construction modérne 111

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N°111 TRIMESTRIEL–2002 MODERNE MODERNE

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N ° 1 1 1 T R I M E S T R I E L – 2 0 0 2 MODERNEMODERNE

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Sommaire – n° 111r é a l i s a t i o n s CRÉTEIL – Faculté d’économie

PAGES

0106Architecte : Pierre Riboulet

L’université,point de départ pour la ville

LE KREMLIN-BICÊTRE – ÉcolePAGES

0710Architectes : Frédéric Schoeller & Isabelle Richard

Architecture de haute précision

SAINT-DIZIER – LogementsPAGES

1115Architecte : François Noël

Un quartier d’hiers’habille à l’heure moderne

MILAN – Teatro ArmaniPAGES

1619Architecte : Tadao Ando

Un théâtreà la gloire de l’éphémère

b l o c - n o t e s• Actualités• Livres, multimédia

PAGES

3536

>>> En couverture : Teatro Armani à Milan,

par Tadao Ando

7, place de la Défense • 92974 Paris-la-Défense CedexTé l . : 01 55 23 01 00 • Fax : 01 55 23 01 10

• E-mail : [email protected] •• internet : www.infociments.fr •

DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Anne Bernard-GélyDIRECTEUR DE LA RÉDACTION : Roland Dallemagne CONSEILLERSTECHNIQUES :Bernard David ; Serge Horvath ; Jean Schumacher

CONCEPTION,RÉDACTION ET RÉALISATION :ALTEDIA EDITING

5,rue de Milan – 75319 Paris Cedex 09

RÉDACTEUR EN CHEF : Norbert Laurent RÉDACTRICE EN CHEF ADJOINTE :Maryse Mondain

SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Philippe FrançoisMAQUETTISTE : Sylvie Conchon

Pour les abonnements, fax :01 55 23 01 10,E-mail : [email protected]

Pour tout renseignement concernant la rédaction,tél. : 01 44 91 51 00

éditorial

MODERNEMODERNE

POLIGNY – LaboratoirePAGES

2023Architecte : Patrice Vallée

Écrin de bétonpour laboratoire d’analyses

MEYLAN – Maison individuellePAGES

2427Architecte : Michel Janick

Un architecte réinvente la notion d’espace

ORLÉANS – Laboratoire du CNRSPAGES

2830Architectes : J.-B. Bethgnies & S. Leclair

La réussiten’attend pas le nombre des années

SCHWEIGHOUSE – Centre culturelPAGES

3134Architecte : Michel Girold

La forme,matérialisation de l’usage

La revue Construction moderne est consultable sur www.infociments.fr

Educatifs, culturels, sportifs ou techniques,les équipements participent à notre confortquotidien et contribuent chaque jourdavantage à la qualité de vie dans nos villes.Les cultures sont devenues plurielles, lesfrontières entre art et sport s’estompent,les mouvements de création spontanée se développent… Autant de dynamiquesnouvelles qui participent à la revitalisationdes quartiers anciens et à l’animation des plus récents. Et qui exigent l’inventionde lieux nouveaux, polyvalents et flexibles.Pour la 6e session de son concoursd’architecture, lancée à l’occasion de larentrée universitaire 2002-2003, Cimbétonpropose comme thème “Une maison descultures nouvelles”. Ce concours, destinéaux étudiants des écoles d’architecture,ainsi qu’aux étudiants des écolesd’ingénieurs, est un temps fort du dialogueétabli par Cimbéton avec les enseignants et les élèves architectes ou ingénieurs.

ROLAND DALLEMAGNE,directeur de la rédaction

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r é a l i s a t i o n CRÉTEIL – Faculté d’économie

L’université,point de départ pour la ville● ● ● Puissant facteur d’urbanité, la refonte des installations de l’université de Créteil confirme

un pôle de centralité. Premier livré parmi les différents bâtiments en projet, la faculté des sciences

économiques conçue par Pierre Riboulet est l’élément fédérateur de cette restructuration.

Deux porches donnent une assise monumentale à cette architecture expressionniste qui abrite, sous

une peau de béton blanc préfabriqué, toute une superposition de fonctions différentes.

Mais la conception du bâtiment anticipe également des extensions futures. Affaire à suivre…

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a construction de la facultédes sciences économiques

de Créteil par Pierre Riboulets’inscrit dans une restructura-tion de plus grande ampleur quiconcerne la totalité des installations del’université et intègre la construction deplusieurs bâtiments neufs. En ce sens,la faculté des sciences répond auxdirectives fixées par la SEMAEC, sociétéd’économie mixte chargée de l’aména-gement de la zone. Les hauteurs du bâti-ment et la présence de deux grands

porches reliant un parvis central résul-tent de ces obligations. Proche de l’uni-versité existante et de la station demétro Créteil-Université, le site est unpôle de centralité important. “Les ques-tions posées par l’étude de ce projetsont intéressantes, nombreuses et com-plexes, souligne Pierre Riboulet, et toutesles données ne sont pas nécessairementconvergentes. Il ne s’agit pas seulementde répondre à l’énumération d’un pro-gramme de locaux, mais de constituerun lieu et d’obéir aux directives régle-

mentaires en tenant compte des bâti-ments engagés. Il faut aussi laisser desopportunités urbaines ouvertes pourl’avenir.” En sortant du métro, le voya-

geur est accueilli. Les commerces, laperspective vers les jardins du mail desMèches, les échappées latérales vers lesbâtiments d’habitation, tout concourt à

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>>> Vue générale du parvis lorsqu’on arrive du métro.

La recherche d’une grande clarté des lignes s’illustre

par l’emploi du béton, qui vient souligner et unifier l’ensemble.

La blancheur du matériau détache le bâtiment de l’asphalte du parvis.

Traversé par un porche monumental, le bâtiment fait seuil

à l’urbanité. Le béton met en valeur l’épaisseur

et la modénature de la façade.

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« De par sa plasticité unique, le béton est irremplaçable »

Entretien avec Pierre Riboulet

Construction moderne : Bâtimentsuniversitaires et bibliothèquescomptent parmi vos spécialités.Comment vous exprimez-vous dansces grands programmes culturels ?

Pierre Riboulet : Cettespécialisation est surtout le fait desconcours, où les jurys choisissentles concurrents selon des références déjà acquises. Ne boudons pas notre plaisir,

cependant. Ces programmescomptent parmi les plus beauxqu’un architecte puisse traiter. J’aieu la chance d’en réaliser plusieursà Saint-Denis, à Limoges, à Toulouse et ici à Créteil. À chaquefois, j’ai pu constater à quel pointl’impact de ces bâtiments sur la villeest fort, au point de transformer un lieu et de donner une vie nouvelleà ces quartiers. Que ce soit auprèsdes étudiants ou d’une population

plus large, leur usage social et culturel est considérable. Complétées par quelquesprogrammes annexes (expositions,auditoriums, restaurants…), lesgrandes bibliothèques publiquesjouent le rôle de véritables maisonsde la culture. Ces bâtiments doiventdonc être aussi beaux que possibleet affirmer leur force et leurcaractère sans cesser d’être ouvertset largement accueillants. Dans ces

programmes, unir ces contraintesest l’une des difficultés principalesdu travail de l’architecte.

C. M. : Comment le matériau béton,qui accompagne votre œuvre depuisl’époque de l’Atelier de Montrouge,sert-il ces objectifs ?

P. R. : C’est effectivement, et depuislongtemps, mon matériau deprédilection. Cela rejoint ma réponse

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créer là une vie urbaine que les nouvellesconstructions universitaires viennentprogressivement conforter. Pièce maî-tresse de ces installations universitaires,la faculté des sciences économiques sedevait d’affirmer sa monumentalité.

● La fonction crée la forme

L’architecte a donc choisi d’exprimer for-tement les volumes contrastés des diffé-rentes fonctions qui se superposent à

l’intérieur du bâtiment. Afin d’assurerune bonne lisibilité de ces fonctions,chaque partie du programme (accueil,bibliothèque, salles de cours, etc.) estmontrée en tant que telle. Cette valeurexpressionniste du bâtiment est croiséeavec les directives urbaines fixées parl’aménageur :outre les porches et les ali-gnements, le plan du bâtiment devaitrespecter un tracé prédéterminé, quePierre Riboulet a choisi d’affirmer parune articulation forte entre les deuxporches au droit du hall principal.

La complexité résultant de l’imbricationdes éléments du programme et descontraintes urbaines est compensée parla recherche d’une grande clarté deslignes et des différents éléments archi-tectoniques que le matériau béton vientsouligner en unifiant l’ensemble. Selonl’architecte, “cela se traduit dans le trai-tement des parois pleines, des transpa-rences vitrées et de leur contraste, parl’affirmation de lignes filant d’un bout àl’autre du bâtiment, par la mise en évi-dence des parties évidées et par la

recherche d’un beau matériau unique,le béton, lisse et riche de plusieursnuances de couleurs et de finitions selonles granulats qui le composent. Le bâti-ment est donc clair dans tous les sens duterme – y compris sa peau –, comme ilsied à un établissement destiné à éclai-rer la compréhension du monde.” Au stade du concours, l’architecte avaitpréconisé l’utilisation d’un béton poli“présentant toutes les qualités dumarbre sans en avoir la fragilité”, mais lematériau initialement prévu a finale-

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route de Choisy-le-Roi

précédente. Les bibliothèquesdoivent faire preuve d’une doublecapacité : être transparentes là où il le faut – accueil, fonctionspubliques – et plus “refermées”,presque protectrices, dans les sallesde lecture, où chaque lecteur doitêtre à l’abri du bruit et de l’agitationdu monde pour que puisse s’exercerle travail de la pensée. Nul autrematériau que le béton, par sasouplesse et sa facilité à se façonnerautour des usages, ne peut assurercette double fonction. Il est aisé de l’ouvrir sur de larges surfaces,

de dégager des portiques ou despilotis, ou encore de lui faireexprimer des zones “pleines”,percées à la demande pour assurerl’éclairage naturel et les vues. Du faitde cette plasticité unique, le bétonest irremplaçable. Outre l’unité qu’ilassure naturellement entre la structure et la forme, il présentel’avantage d’accueillir toutes sortesde revêtements ou de pouvoir resterapparent, de vieillir et de se patiner,ce qui est encore plus “vrai”.

Propos recueillis par Christine Desmoulin

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ment été remplacé par du béton deciment blanc lissé. Les façades longitudi-nales sont constituées d’éléments préfa-briqués de grande taille venant recouvrirl’extrémité des voiles de béton transver-saux coulés en place à l’avancement. Ense raccordant aux éléments préfabri-qués, ce béton coulé en place a apportéune souplesse à même de répondre auxexigences de la structure.Par sa masse, le matériau béton répondaussi à la nécessité de créer des bâti-ments “épais” : 17 m pour les sallesd’enseignement ou la bibliothèque, et23 à 25 m pour les amphithéâtres ; sansoublier la création de porches de 14 m delarge sur deux ou trois hauteurs d’étage.“Il fallait une construction d’un certainvolume et d’une certaine masse, souspeine d’être tout à fait inconsistant”,confirme Pierre Riboulet.

● Un mot d’ordre : la libertéde mouvement

Une université étant le lieu d’un impor-tant passage, il importe de garantir unegrande liberté de mouvement. C’estpourquoi le rez-de-chaussée est peuoccupé. Il est imparti à l’accueil, à la sco-

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Amphithéâtre 251 places

Bureaux des professeurs

Salles de cours

Bibliothèque

Terrasse

Parc de stationnement

Cette coupe montre la superposition des éléments programmatiques et

les reprises de charges structurelles. Au premier étage, la ligne des

amphithéâtres crée une sous-face en pente ascendante vers le parvis, ce

qui permet de loger les accueils et les pilotis ainsi qu’une large terrasse en

balcon sur la place centrale pour les bureaux des enseignants.

La bibliothèque gagne son autonomie en venant couronner le bâtiment.

Elle bénéficie de deux doubles hauteurs au-dessus du grand porche,

l’une pour la salle d’accueil et l’autre pour la consultation. Trois noyaux

d’ascenseurs et d’escaliers desservent les étages. Ils sont complétés par

un accès supplémentaire pour les trois logements de fonction.

❙❙❙ Coupe transversale

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larité et aux bureaux des étudiants, leplot sud accueillant le restaurant et sonaire de livraison. Il dessert aussi les cinqamphithéâtres du premier étage avecune entrée haute et une entrée basse.Ces amphithéâtres se répartissent endeux groupes de part et d’autre duporche, chaque ensemble disposantd’un hall en double hauteur. Les servicesintérieurs et les logements de fonctionsont également au premier étage.

● Impression d’élancementet de légèreté

Au deuxième étage, on trouve lesbureaux du doyen et ceux des ensei-gnants chercheurs, les salles d’informa-tique, le plot sud restant entièrementlibre pour l’extension de la bibliothèque.C’est l’étage le plus “mince”, mais ildomine le plus “épais”, ce qui donne unélancement à la coupe et affirme la légè-reté longitudinale de l’immeuble. Ponc-tué de place en place par des surlargeurss’ouvrant sur des terrasses, le couloircentral n’est jamais sombre.Le foyer commun et différentes salles deréunion sont rassemblés dans cettemême unité qui peut fonctionner de

manière autonome en dehors deshoraires usuels. À l’extrémité sud, lessalles d’informatique s’éclairent partiel-lement sous le grand porche, à l’écartdes lumières vives.Le troisième étage abrite les salles decours qui, elles aussi, tirent profitd’échappées visuelles vers les terrassesà partir du couloir central. “Bien qu’ilsaugmentent sensiblement la surfacehors œuvre, ces lieux en surlargeur sontindispensables. Notamment aux inter-cours, lorsqu’il est important de disposerd’espaces où l’on peut se tenir, parler ouattendre sans gêner la circulation”,insiste Pierre Riboulet.

Conformément aux directives du pro-gramme, le quatrième étage – uniqueniveau d’un seul tenant – accueilleles trois salles de lecture de la biblio-thèque dans un bel espace unitaire ettransparent. Animé par de nombreux

effets de lumière, cet espace offre lapossibilité de différencier les ambiancesen fonction des lieux.Zénithale au-dessus de deux petitsjardins intérieurs, la lumière naturelledevient tantôt frontale, tantôt indirecte

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>>> Progressivement, l’université vient couturer les parcours

vers le centre-ville. Détail d’angle, terrasse et accès.

Tandis que les fonctions du bâtiment s’expriment en façade par

des ouvertures plus ou moins grandes, le porche accueille le visiteur.

Vue du hall principal. De part et d’autre du porche, les deux

groupes d’amphithéâtres (2 + 3) sont reliés par une passerelle.

Chacun possède un hall en double hauteur avec le rez-de-chaussée.

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>>> Les qualités plastiques

et structurelles du matériau béton

lui ont permis de répondre aux

contraintes imposées par les

deux porches de 14 m de large, qui

donnent un effet de “porte” urbaine

au bâtiment de Pierre Riboulet.

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dans les espaces en double hauteurqui se développent vers le bas et vers lehaut pour définir la zone centrale de labibliothèque, où se situe la banqued’information et de prêt.

● Des coupes transversalescontrastées

Il existe enfin un cinquième niveau par-tiel réservé, comme sa terrasse, pourune extension éventuelle. Le projettirant sa force de la superposition deces programmes hétérogènes, chaquepartie est exprimée pour elle-même.Les coupes transversales s’en trouventainsi très contrastées. Basés sur la ten-sion et la continuité des lignes, leslongs pans des façades calment le jeuen unifiant la composition.

La structure, composée d’une tramepoteaux-poutres et voiles traversantsporteurs en béton B 30, est lisible dansles halls. Le parti architectural imposantla superposition d’éléments hétérogènes(amphithéâtres, bureaux et salles declasse), cela se traduit par une rupture decharge au droit des amphithéâtres. Cequi explique la présence de poutres enbéton hautes performances (B 60) degrande portée (10 à 12 m) qui enjambentles amphithéâtres à hauteur du plafond.

● Bétons “high-tech” pouréquipement d’avenir

Il est à noter qu’en une dizaine d’années,l’utilisation du béton hautes perfor-mances s’est généralisée pour résoudredes problèmes structurels ponctuels.

Faciles à marier avec des bétons tradi-tionnels, ces bétons apportent un béné-fice technique incontestable, commel’illustre cet équipement de grandeenvergure. Gros consommateurs d’es-pace, les programmes universitairessont également sujets à des extensionsquand le nombre d’étudiants s’accroîtou lorsqu’une discipline se développe.C’est pourquoi l’on a délibérémentchoisi d’inclure dans la conception dece bâtiment des potentialités d’exten-sion qui se révèleront extrêmementfaciles à réaliser plus tard. “Ce qu’unrèglement fait, un autre peut aisémentle défaire, confirme l’architecte. Car lesbâtiments ont une vie plus longue queles contingences administratives.” Lacapacité constructible étant supérieureau programme imparti, Pierre Ribouleta ainsi proposé d’anticiper la construc-tion ultérieure d’un étage en super-structure à partir d’une surélévation dela terrasse. Cette idée ayant été retenuepar la maîtrise d’ouvrage, les fonda-tions et la structure ont été surdimen-sionnées en conséquence. ❚

TEXTE : CHRISTINE DESMOULIN

PHOTOS : OLIVIER WOGENSKY

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>>> Dans les circulations baignées de lumière naturelle,

l’architecte dilate l’espace pour offrir aux étudiants, et au-delà

des espaces d’enseignement proprement dits, des espaces plus

informels comme les halls ou les surlargeurs des couloirs.

À proximité des amphithéâtres, galeries et promenoirs se distinguent

par leur largeur et leur caractère intensément lumineux.

Dans les salles de lecture de la bibliothèque, le dessin des

percements précise les ambiances.

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Maître d’ouvrage :Université Paris XII – Val-de-Marne

Assistant maître d’ouvrage :SEMAEC

Maîtrise d’œuvre :Pierre Riboulet,architecte ;

Dimitri Chpakovski,architecte assistant ;

Beaulieu ingénierie,BET ;Arelier Grunig Tribel,

architectes paysagistes ;Françoise Couvez,architecte coloriste

Entreprise générale :Hervé

Préfabrication :Rufa

SHON :9 620 m2

Coût :

11,29 M€ HT

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Page 9: Construction modérne 111

r é a l i s a t i o n LE KREMLIN-BICÊTRE – École

Architecturede haute précision● ● ● Dans un contexte périurbain hétéroclite et compliqué, l’école maternelle Robert-Desnos

superpose les codes, les niveaux de lecture, et assemble dans une parfaite cohésion des espaces

singuliers et extrêmement travaillés. Le béton unifie ces éléments dans un seul matériau et une

seule écriture. Au final, la complexité de l’ensemble ainsi constitué inspire force et harmonie.

Et si l’on peut oser quelques parentés ou analogies, disons que cette œuvre évoque à la fois

le Salk Institute de Louis Kahn, en Californie, et les travaux récents des élèves d’Henri Ciriani.

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n hauteur sur une butte, àquelques encablures du

périphérique parisien, dans untissu pavillonnaire parsemé degrands ensembles, l’école mater-nelle Robert-Desnos s’est implantée auniveau d’un nœud routier tortueux,plus caractérisé par ses croisements endévers et sa circulation chaotique quepar ses qualités urbaines ou conviviales.Sur ce terrain impossible, coincé dansl’arrondi du carrefour, en surplomb d’uneparcelle rectangulaire que borde la barreR + 3 de l’école primaire Charles-Péguy,

à laquelle il vient se greffer en son extré-mité, le nouveau bâtiment accueille sixclasses d’école maternelle et une surfacedeux fois plus grande d’équipements :ateliers, restaurant, salles de repos, demotricité, espace multimédia, biblio-thèques et administration, pour uneSHON de 2 010 m2.Cet édifice propose une articulationextrêmement savante entre les diffé-rentes contraintes du site, et assembledans une apparente unité des morceauxde programme bien distincts. Il prendplace dans le prolongement de l’école

primaire existante, bâtiment répétitif etsans charme du début des années cin-quante, dont il grignote au passage sixtrames afin d’y installer un centre de loi-sirs et l’ensemble cuisines-restaurationde la maternelle. Cette partie de l’écoleexistante, réaffectée à l’école maternelle,fut reprise en sous-œuvre sur 3 m dehauteur par des poteaux coulés en placesur puits, et entièrement désossée.

● Un ovale et un carréassemblés

Mais l’édifice est avant tout identifiablepar sa partie récente, faite de l’assem-blage, dans un langage constructifaffirmé, de deux formes géométriques :l’ovale et le carré. Le terrain initial étaitun talus situé entre la rue et la cour decette école, à plus de 4 m en contrebas.

Après réalisation d’une paroi blindéepérimétrique à l’aplomb de la rue, lanouvelle construction a été décollée del’alignement. Cette disposition en “couranglaise” isole du trafic urbain et per-met d’orienter les vues. L’ovale – aussicaractérisé par un grand porte-à-fauxsous lequel vient se greffer une voie delivraison – y ouvre ses fenêtres perpen-diculairement à la chaussée, tandis quele volume orthogonal porte sur quatrepoteaux qui soulèvent l’école et créentune transparence entre la grande couret le jardin en contrebas de la chaussée.Ce soubassement est un préau fermé,dont le vitrage général souligne la dimi-nution progressive de la surface des dif-férentes ouvertures à mesure que l’ons’élève dans les étages.L’entrée se fait au niveau haut du ter-rain, par un pont en bois qui enjambel’espace créé par ce retrait de l’édifice

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>>> Le volume orthogonal des salles de classe et

sa terrasse abritée, cour de récréation des petits. Le volume

ovale et ses percements le long de la passerelle d’accès.

La “cour anglaise” entre voirie et salles de classe (cf. coupe

ci-dessous). Vue intérieure de la rampe. Les ouvertures

affleurent le sol et mettent en évidence un effet de cisaillement entre

les volées droite et gauche.

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sur l’alignement. On est là entre l’ovaleà gauche, qui abrite la bibliothèque,l’espace multimédia, la psychomotri-cité, et les volumes orthogonaux de lapartie droite dédiée aux salles declasse. Ces deux grandes masses ontl’originalité d’avoir été conçues enalternance des demi-niveaux distribuéspar une rampe continue. Lieu de vie etd’échange, la rampe distribue tous leslieux d’enseignement et de développe-ment. Elle fait glisser entre la cour dubas et la “cour du haut”, terrasse derécréation semblable à un solarium

abrité des regards extérieurs en haut dubloc carré, où les plus jeunes enfantspeuvent jouer en toute quiétude.

● Un autre volume “longiligne”

Parcours ludique et paysager, cetterampe a comme enveloppe un volumesingulier. De fait, entre le volume carréet l’autre ovale, s’insère un troisièmevolume longiligne, caractéristique en ceque sa paroi côté cour et son sol sontinclinés. Schématiquement, tout se passe

C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1 9

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Rythme des bossages et du coffrageAfin de redonner une échelle et une lisibilité à leurs parois, les archi-

tectes ont disposé sur les banches des éléments de contreplaqué

légèrement incurvés. La banche, divisée sur sa hauteur en modules

de 91 cm de haut, reçoit donc ces panneaux qui ne se superposent

pas parfaitement : à une partie convexe correspond au niveau supé-

rieur ou inférieur une partie concave, et réciproquement. Il s’ensuit,

de façon à peine discernable tant la courbe des contreplaqués est

peu marquée, une modulation due aux effets d’ombre de ces bos-

sages sinusoïdaux qui se superposent. Des joints verticaux accen-

tuent la lisibilité de ces bossages de 91 x 755 cm, et la présence de

quatre trous de serrage dans chaque module achève de donner le

rythme et l’échelle des parois.

L’entreprise TGM a retenu la solution d’un béton autoplaçant qui seul

autorise des fentes horizontales et obliques pouvant aller jusqu’à

6 m de long (sur 30 cm de haut). Les coffrages à base de traverses

métalliques sont en contreplaqué “bouleau” et reçoivent une résine

phénolique très épaisse. Cette ossature mixte bois-métal a assuré

des hauteurs de coulage de 4,20 m. Baguettes, joints, méthode d’ap-

plication des huiles, nettoyage des outils, stockage, nature des man-

nequins, entrent pour une large part dans la qualité d’aspect de ces

voiles. Celle-ci est aussi le fruit de la relation privilégiée qui s’est tis-

sée entre l’architecte et le chef de chantier, au gré des complexités

de la mise en œuvre. “Ce projet est la rencontre de l’artisanat des

coffrages et du calcul poussé des cisaillements, ou encore du dessin

complexe de la rampe à 10 %”, confirment les architectes.

TECHNIQUE

rue Paul-Lafargue

cour de récréation

0 2 10 m

❙❙❙ Coupe transversale

Page 12: Construction modérne 111

comme si les auteurs avaient en préa-lable composé cet élément de l’ensemblearchitectural avec des murs verticaux,despaliers horizontaux, des percements cor-respondant aux horizontales desditspaliers… et que, mus par un désir detransformer ces paliers en rampes incli-nées à 10 %, ils avaient soulevé levolume sur l’un de ses angles bas, puisl’avaient maintenu dans cette situationen interposant une cale (un pilier penché,cela va de soi) sous l’angle soulevé.Résultat : les horizontales s’inclinent.

● Rigueur géométrique

Pour corser le tout, la façade côté courpart en dévers. Mais alors que cette des-cription pourrait sous-entendre confu-sion ou perte de repères, on constatequ’il n’en est rien. La force de cette géo-métrie s’appuie sur des lignes construc-tives régulières et métronomiques :joints, balèvres, trous de serrage.Ce principe d’école sans escalier – cequi en soi constitue une première – aquelques vertus pédagogiques ; il per-met aux enfants de mettre leur corpsen mouvement dans l’espace, dedécouvrir par celui-ci la lumière, la

matière, la couleur. Une cour sur letoit, une entrée en pont-levis depuis larue, des salles toutes fondées sur ladifférence : cette réalisation ressembleà une combinaison bien orchestrée demultiples expériences sensorielles donton retiendra encore le travail sur lebrut et le fini (salles de classe-ateliers),sur la couleur (sols en caoutchouc,coulé en place puis poncé), sur leregard. Les façades offrent une multi-plicité de vues, de rais de lumière, dehauts panneaux vitrés, de possibilitésà l’échelle des enfants. Cette polypho-nie est sans doute à mettre en relationavec la formation musicale et intellec-tuelle d’Isabelle Richard et FrédéricSchoeller auprès de Pierre Boulez. Élé-ments de programme, de site, deforme, jouent et croisent librementleur propre partition et composent untout parfaitement homogène.

● Le béton maîtrisé

Cette unité passe par l’affirmation d’unmode constructif. Aux yeux des archi-tectes, le béton est la seule matièrecapable de donner corps à leurs ambi-tions esthétiques. Pour avoir travaillé

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>>> Salle de classe. Travail sensoriel complexe sur

l’espace, la lumière, la couleur. Sol en caoutchouc coulé en place.

Élément central de la composition, la rampe est perceptible

depuis l’intérieur des salles de classe, par la présence de son voile

béton et les percements qui suivent son inclinaison.

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Maître d’ouvrage :mairie du Kremlin-Bicêtre

Maîtres d’œuvre :Isabelle Richard et Frédéric Schoeller

Entreprise gros œuvre :TGM

(43 % du coût total)

Surface :2 010 m2 SHON

Coût :

2 M€

dans leurs jeunes années auprès duJaponais Tadao Ando, ils ont acquis uneincontestable maîtrise de ce matériau.Une prescription des plus rigoureuses estla clef de leur exigence, et ce travail estindissociable de celui accompli sur lalumière.Tandis que la mise en œuvre dubéton clair crée une finition “vaguée”,véritable attrape-lumière qui met le bâti-ment en vibration par instants fugaces,les façades ne sont plus percées desimples fenêtres sur le dehors, mais pro-posent de multiples qualités de filtres, devues, de cadrages du ciel. Au fil de lavisite de cette école, on sent à la fois untravail immense sur le matériau – sa rela-tion à l’espace, sa mise en œuvre – et unsentiment joyeux, fait d’une extrêmeattention aux enfants, à leurs besoins, àleurs gestes, à leur regard, ainsi qu’auxpersonnes qui auront à les accompagnerdans leur parcours scolaire. ❚

TEXTE : VINCENT BORIE

PHOTOS : JEAN-MARIE MONTHIERS

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Un quartier d’hier s’habille à l’heure moderne ● ● ● L’ensemble de 52 logements sociaux récemment réalisé à Saint-Dizier s’inscrit au cœur

d’un important îlot typique du quartier de la Noue, à l’ouest de la ville. Cet ancien faubourg

est caractérisé par les “voyottes” – des venelles piétonnes au tracé parallèle – et une urbanisation

plus récente mêlant immeubles des années soixante, pavillons et petites maisons de ville. Dessiné

par François Noël, ce nouveau projet s’organise en trois bandes de maisons parallèles, dans

une architecture moderne et affirmée, inspirée tout ensemble par le mouvement De Stijl et le cubisme.

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r é a l i s a t i o n SAINT-DIZIER - Logements

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e quartier de la Noue,situé à l’ouest de Saint-

Dizier, est un ancien faubourgde bateliers ou de brelleurs, quilivraient par flottage sur laMarne des trains de bois (lesbrelles). Il est caractérisé par les“voyottes”, des venelles piétonnesparallèles qui desservent les maisonset les maisonnettes construites dansl’épaisseur de l’îlot. Ces maisons bassesen torchis, souvent de petites dimen-sions, ont pour la plupart été construitessans autorisation. En se développantdans la profondeur de l’îlot perpendicu-lairement à l’avenue de la République,elles ont généré un tissu en lanières.L’ensemble de 52 logements sociauxdessiné par l’architecte François Noëls’inscrit dans un important îlot de cetype, situé non loin du centre-ville. Lesvoyottes qui le parcourent sont orientéesnord-sud. L’opération a pour vocation dedonner une nouvelle jeunesse à ce tissuurbain et aux voyottes plutôt en voied’obsolescence. Le projet comprend unimmeuble de 36 logements collectifs etde 16 logements individuels organisésen trois séries parallèles de maisons enbande. L’immeuble s’installe à l’angledes rues François-1er et de l’Abbé-Cornu,

et construit un front urbain. Les troisbandes de maisons occupent le fond dela parcelle. Elles sont implantées dans lacontinuité du tissu en lanières et tissentdes liens avec les maisons existantes.Les voies piétonnes desservant les trois séries de maisons prolongent lesvoyottes. Les deux parties du projet sefédèrent autour d’une pelouse implan-tée au cœur du plan de masse. Elleconstitue un espace commun protégé,calme et convivial, offert aux jeux desenfants et aux habitants.

● L’immeuble collectif : côté rue, façades urbaines…

L’opération présente sa façade principalesur la rue François-1er. Le paysage afficheici des échelles variées. Le projet estencadré par deux immeubles R + 4 à lagéométrie minimale typique de la pro-duction courante des années soixante.En vis-à-vis se succèdent pavillons oupetites maisons de ville de différentesépoques... Composant avec l’environne-ment et le règlement d’urbanisme quilimite la hauteur sur rue à R + 1, le bâti-ment présente un socle inscrit dans legabarit imposé en front de rue à R + 1,

surmonté de deux niveaux plus étroitsplacés en retrait. Dans le volume généralainsi défini, l’architecte installe les loge-ments traversants au rez-de-chaussée etau premier étage, les duplex venant encouronnement.Le volume est travaillé sur les thèmes del’unité et de la fragmentation. La façadeest très dessinée et décline tout un jeu

de plans en avancée ou en retrait, depercements, de matières, de couleurs.“Quand on regarde cette façade, pré-cise François Noël, on y trouve des élé-ments qui sont répétés à l’identique,comme les panneaux habillés de pierreou la petite équerre de béton en sus-pension qui marque chaque entrée. Àcôté de ces éléments réguliers, on dis-

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1 2

L

placeErnest-Renanrue François-1er

rue de l’Abbé-Cornu

N

avenue de la République

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tingue tout un jeu de détails et de cou-leurs qui introduisent des distinctionspermettant d’identifier chaque entrée etchaque logement. La partie supérieurede la façade correspond aux duplex. Elleest en retrait par rapport à la rue. Sondessin est plus découpé, ponctué par descreux, des arrondis.” Ainsi, le socledonne une linéarité et une unité à l’en-semble. Il installe l’alignement sur la rueet structure la composition de la façade,tandis que les voiles et les plans qui leponctuent donnent un rythme et mar-quent les trois séquences d’entrée. Pourchacune d’elles, un vide en retrait com-pose un espace extérieur de transitionentre la rue et le hall d’entrée doublehauteur qui s’offre au regard à traversde généreuses baies vitrées. Installédans l’espace de transition, un banc enbéton accompagne la progression versle hall. Cet élément de mobilier perma-nent est dessiné pour accueillir etcamoufler les coffrets normalisés desconcessionnaires de réseaux.Sur la rue François-1er, le volume répondaux différentes échelles du lieu et com-pose un immeuble collectif tout en évi-tant l’effet de barre. Quand il se retournesur la rue de l’Abbé-Cornu, le bâtiments’inscrit dans l’échelle plus discrète de

cette voie secondaire, régie par un gaba-rit de maisons de ville (R + 1, R + 2).À l’approche de l’angle, une équerre sou-levée amorce le retournement du bâti, etle jeu affirmé des volumes ciselés dans lamasse assure l’articulation entre les diffé-rentes échelles.

● … côté jardin,une façade cubiste

Côté jardin, la façade apparaît plusdécoupée. Elle est traitée dans un espritplus ludique. “Du fait de son statuturbain et parce qu’elle représente le pro-jet, la façade sur rue est plus habillée,comme ‘tirée à quatre épingles’,explique l’architecte. De l’autre côté,l’immeuble collectif s’ouvre au sud surl’espace végétal central. Les séjours des

logements sont installés dans cettedirection. La façade est traitée dans uneoptique plus plastique et plus ludique.Deux volumes en avancée viennentrythmer la façade. Ils établissent un rap-port contrasté avec les demi-coques ver-ticales en béton brut à motif de galetsdes cages d’escalier. Ces deux élémentsmarquent les différentes séquences dela façade.” L’architecte développe unegéométrie, un jeu de découpages et untravail sculptural d’inspiration cubiste

fait d’avancées, de retraits, de retourne-ments, de mise en profondeur. Lerythme des balcons, des terrasses, desloggias, les poutres en porte-à-faux, lesbrise-soleil, sont autant d’éléments duvocabulaire architectural qui participentà l’ensemble de la composition.Les touches de couleur accusent lescontrastes, accompagnent cette géomé-trie très sculpturale, accentuent et révè-lent les découpes. Formes et couleursdistinguent chaque logement de ce qui

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3

>>> Sur la rue François-1er, l’opération présente une façade

urbaine répondant aux différentes échelles du lieu. Textures,

matières et couleurs accompagnent le jeu des formes, accentuent

et révèlent les découpes. “La façade orientée au sud est traitée

dans une optique plastique et ludique.” (François Noël.) Balcons

et terrasses prolongent les séjours largement ouverts au soleil.

3

2

1

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“maisonnée”. L’un des pavillons est unlogement de quatre pièces (F4) tandisque l’autre en comprend cinq (F5). Ilscomposent une unité programmatiqueet géométrique rythmée par des avan-cées dont la hauteur se décale en alter-nance. Les entrées s’installent à l’avantentre les avancées. Des jardins à l’arrièreprolongent le séjour au rez-de-chaus-sée, tandis qu’à l’étage un grand balcons’étire devant les chambres. Jardins etentrée s’ouvrent de part et d’autre desallées prolongeant les voyottes.Chaque ”maisonnée” de deux loge-ments se décale par rapport à l’autred’environ un mètre en plan. Ce déca-lage marque l’autonomie du modulequi se répète pour former une bande. Lavolumétrie générale de chaque bandeet le vocabulaire architectural donnentune dimension collective à cette partiedu projet constituée de logements indi-viduels, par essence plus autonomes.

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4 5

Entre tradition et imaginationSculptée, ciselée, l’architecture de ces immeubles est construite de

façon traditionnelle en béton armé coulé en place. Des éléments pré-

fabriqués en usine ont aussi été mis en œuvre en certains points spé-

cifiques du projet. La structure de l’immeuble collectif est constituée

de voiles et de planchers coulés en place. Les voiles de refend suivent

une trame régulière de 6 m réglée sur les parkings en sous-sol. Les

maisons sont elles aussi en béton coulé en place.

Les géométries complexes et découpées de certaines parties de l’édi-

fice ont fait appel à des solutions imaginatives qui ont pu être mises

en œuvre grâce aux qualités techniques du béton armé et à sa sou-

plesse d’utilisation. Les parois en béton brut avec motif de galets

sont constituées de panneaux préfabriqués en usine. Pour certains

éléments de façade aériens, en décrochement, en équerre ou en

porte-à-faux, l’entreprise a fait appel à des pièces préfabriquées. Une

façon d’optimiser la mise en œuvre de ces parties délicates à couler

en place. Enfin, des pièces telles que les garde-corps de balcon sont

aussi préfabriquées afin de contrôler précisément leur parement.

“Le béton s’impose ici de façon évidente, à la fois pour la construction

du bâtiment et la matérialisation de l’architecture telle qu’elle est des-

sinée, estime l’architecte. Dans un projet de logement social comme

celui-ci, le béton participe à l’économie globale du projet. Il aide à la

mise en œuvre de solutions constructives simples et économiques

permettant de satisfaire aux exigences en vigueur, tant du point de

vue du confort thermique que du confort acoustique.”

TECHNIQUE l’entoure et lui donnent son identité ausein de l’ensemble. Selon le vœu de l’ar-chitecte, en effet, chaque habitant doitpouvoir reconnaître son appartementdans le volume général de l’immeuble,pour permettre à chacun d’exprimer saspécificité. Ainsi, suivant leur configu-ration, les appartements bénéficient debalcons, de terrasses ou de loggias, quisont autant de prolongements pour leslogements. Ils sont conçus et dessinéspour être à la fois généreusementouverts au rayonnement et protégésdes regards extérieurs.

● Maisons en bande : dans la continuité des voyottes

Les trois séries parallèles de maisonssont constituées de la même façon.Dans chaque bande, les pavillons sontgroupés par deux, formant ainsi une

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Dans l’immeuble de logements collec-tifs, les séquences d’entrée, les halls etles circulations font l’objet d’un travailde mise en scène et de qualification desespaces. Multiplicité des vues, traite-ment diversifié de la lumière naturelle,espace double hauteur du hall, sontautant d’événements le long de la pro-menade architecturale proposée à l’ha-bitant entre la rue et la porte de sonlogement. Ici, rentrer chez soi ne seréduit pas à un acte fonctionnel, accom-pli dans des circulations banalisées.François Noël fabrique avec des moyensarchitectoniques simples les différentesparties du parcours visuel de chacunjusqu’à son logement. L’espace exté-rieur de transition, déjà évoqué, met enperspective la vue sur le hall avant depénétrer dans l’immeuble. Il offre aussiun lieu permettant à des voisins de dis-cuter à l’abri du trottoir.Avec son espacedouble hauteur et son mobilier dessiné

et installé en prenant en compte lesgestes du quotidien, le hall constitue lefoyer commun à tous les logements des-servis. Sans ostentation, le hall retrouveici une dimension de représentation dela communauté résidente. Dans tousles cas, circulations, paliers et escaliersreçoivent la lumière naturelle.

● Lumières à parcourir

Dans leurs infinies variations, ombre etlumière agrémentent ainsi les déplace-ments. Selon les cages d’escalier, il existeaussi tout un jeu de fenêtres horizontalesou verticales, voire de larges baies vitrées,qui offrent, depuis les circulations et lespaliers, des vues sur l’espace végétal cen-tral ou sur d’autres parties du projet.François Noël dessine une architecturemoderne, esthétiquement affirmée, ins-pirée par le mouvement de Stijl et le

cubisme. Mais cette approche plastiqueà la fois sculpturale et picturale ne sefait pas au détriment de l’usage et de laliberté, pour chaque locataire, de s’ap-proprier pleinement son logement. Pours’en convaincre, il suffit de voir com-ment les habitants occupent et aména-gent terrasses, balcons et loggias, ouencore certaines parties des circulationsintérieures. Un habitant croisé dans unhall d’entrée confie que son logementduplex est aussi agréable, voire davan-tage que les deux maisons dont il étaitlocataire précédemment.Par son ambiance, par ses dimensionsrespectueuses de ce quartier de fau-bourg et par l’univers créé, ce nouvelensemble, qui décline différenteséchelles allant de l’immeuble collectifaux maisons de ville, assure une transi-tion qui estompe les barres voisines etaméliore leur intégration à l’îlot.Volumé-trie, vocabulaire architectural et couleursdonnent son unité et son identité à cetteopération. Du jeu plastique des volumeset des couleurs se dégage une atmo-sphère ludique et conviviale qui redyna-mise le quartier et fait de l’îlot Renan unendroit où il fait bon vivre. ❚

TEXTE : NORBERT LAURENT

PHOTOS : GUILLAUME MAUCUIT-LECOMTE

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6 7

>>> Les maisons en bande s’installent le long des allées

qui prolongent les “voyottes”. Chaque entrée est marquée par

une équerre de béton en suspension qui signale l’accès à l’espace

de transition entre la rue et le hall. Les entrées des maisons

prennent place entre les volumes en avancée. Dans cette

architecture à l’esthétique moderne affirmée, chaque habitant peut

facilement identifier son appartement au sein de l’ensemble.

7

6

5

4

Maître d’ouvrage :OPM d’HLM de Saint-Dizier

Maître d’œuvre :François Noël, architecte

Bureau d’étude béton :AIC Ingénierie

Économiste :Cabinet Guy Colley

Entreprise gros œuvre :Trabat

Préfabricant :BCM

Surface habitable :• logements collectifs (36) :

2 569 m2

• logements individuels (16) :1 431 m2

Coût :

3,9 M€

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r é a l i s a t i o n MILAN - Teatro Armani

Un théâtreà la gloire de l’éphémère● ● ● De Milan, on connaît bien sûr l’immanquable “quadrilatère de la mode”, temple polychrome

du prêt-à-porter. Mais la banlieue n’est pas en reste. Les faubourgs industriels s’animent d’une

vie nouvelle, sous le double signe de l’art et de la culture. Giorgio Armani l’a bien compris,

qui d’une usine de chocolat fait un nouvel écrin pour les défilés de mode. L’idée, d’ailleurs, est

du maître d’œuvre. Plutôt que de tout reconstruire, le Japonais Tadao Ando a choisi de faire

du bâtiment existant le contexte local du nouveau projet, le site même de la nouvelle architecture.

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Page 19: Construction modérne 111

ans la banlieue de Milan,le tissu urbain est en

pleine évolution. Son passéindustriel induit de vastes par-cellaires, des constructions fonc-tionnalistes adaptées à des espaces degrande échelle ou à des assemblages debureaux. Une reconversion en zones deservices est en cours, et l’on voit appa-raître de nombreux programmes dereconstruction et/ou de réhabilitationliés à l’art et à la culture. Ce sont de nou-veaux lieux conquis à la mode actuelle.

● Le site : un bâtiment industriel

Dans ce cadre, le célèbre designer devêtements Giorgio Armani a été l’un despremiers à décider d’établir ses bureauxet activités sur une parcelle affichant enfaçade sur rue un bâtiment des annéessoixante-soixante-dix. Plutôt que de tout

reconstruire, l’architecte japonais TadaoAndo a envisagé le bâtiment industrielexistant comme faisant partie du site. Ilest ainsi devenu le contexte local du nou-veau projet, le “site” même de la nou-velle architecture. D’une facture trèssimple, la construction existante offre safaçade sur rue sur deux niveaux et demi.Elle est composée d’un soubassementclairement marqué, d’un rythme trèsrégulier de verticales en brique séparantdes fenêtres de mêmes dimensions etplacées à la même distance les unes desautres. Un grand porche coupe la ligneconstruite et permet ainsi à Tadao Andode venir encastrer un mur en béton quimarque alors le départ du nouveau pro-jet. Ce dernier s’étend ensuite sur l’en-semble resté libre de la parcelle, en unestructure indépendante contenant unenouvelle “vie”ou activité.Le nouveau projet étire ses quelque3 400 m2 sur la totalité du lieu, soit12 300 m2. Il est dédié à différents évé-

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D

>>> Une simple marque sur le mur surligne la séparation

fonctionnelle entre les murs de béton. La salle de réception

ou d’exposition fait jouer espace interne et vue externe.

2

1

1 2

Variation B

Plan d’eau

Variation C

Variation D

Théâtre modulableVariation A

Espace de réception

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nements : des défilés de mode, des spec-tacles, des expositions. C’est pourquoil’architecte l’a conçu comme un théâtrede 900 à 1 000 places modulables, avecses magasins et coulisses, un foyer, unespace pour des banquets, et un longchemin d’accès.

● Une forme savammentconstruite

La nouvelle structure est créée indépen-damment de l’ancienne. Un très longpassage s’enfonce dans la parcelle àpartir du bâtiment sur rue. Rythmé parune colonnade sur une partie de sonparcours, sombre dans un premiertemps lorsqu’il longe des showrooms etdes bureaux, il subit ensuite deux respi-rations violentes. La première consisteen une ouverture visuelle sur un patioau sol recouvert d’eau. Un vide qui per-met à l’espace de réception de se tour-ner au jour. La seconde se trouve à lasuite, mais de l’autre côté du chemine-ment, avec une courbure de la paroi debéton qui protège les espaces fonction-nels, tels les toilettes, et renvoie versl’entrée du théâtre. Ce dernier se déve-loppe en un espace libre modulable

selon les besoins. C’est une pièce dontle système d’évolution des sièges per-met une utilisation en théâtre ordinaire,en couronne autour d’une scène, oumême en simple salle. Placé le plus loinpossible de l’édifice existant, le théâtreest ainsi parfaitement libre de toutecontrainte formelle ou technique.Comme souvent avec Tadao Ando, leparcours est initiatique. Afin d’établirde nouveaux dialogues entre architec-tures ancienne et récente, le maîtred’œuvre japonais use du béton commed’un matériau faisant contrepoids à lamasse des bâtiments existants.

● La permanence du béton en fond de scène

Le béton est là pour stimuler les dyna-miques artistiques, comme un matériaude fond de scène offert à la vie du lieu etau spectacle très mouvant des défilés.Au changement perpétuel des collec-tions, le béton oppose sa présence, sonaspect, sa permanence. Dans le longpassage, des colonnes hautes viennentmarquer le lieu. Carrées, elles se dres-sent seules, détachées du plafond, etdonnent une dimension à l’espace ; leur

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r é a l i s a t i o n MILAN - Teatro Armani

3 4

La mode, cet opéra moderneLa mode est-elle un art ? La question se pose avec toujours plus

d’acuité. L’année 2001 a été celle d’une rétrospective de Giorgio Armani

sur l’ensemble de la célèbre spirale du musée Guggenheim de

New York. Le monument de Frank Lloyd Wright est connu pour exposer

les collections d’art radical du début du XXe siècle, et ce, quel qu’en

soit le genre. Cette même année, avec l’aide des architectes Rem

Koolhaas et Jacques Herzog, Prada a transformé ses boutiques en nou-

veaux espaces événementiels. “La mode devient donc une question

sérieuse : architectes, designers, photographes, sont là pour donner un

message plus complexe. Elle devient une parfaite expression culturelle

des productions à la fois totalitaires et extrêmement courtes de notre

temps, qui n’accorde qu’une attention limitée.” Loin d’être un art

mineur, la mode est devenue trop lourde d’enjeux pour rester frivole.

“Comme un opéra du XIXe siècle, le défilé d’un créateur de mode

contemporaine exprime le style de la vie publique actuelle.Mais à la dif-

férence de l’opéra, le défilé ne dure que 21 minutes. Giorgio Armani a

ouvert ce qu’il appelle un théâtre.Un lieu dessiné pour que les célébrités

glissent de leur limousine vers leurs sièges réservés le long d’une route

triomphale.” Le passage du chaos urbain industriel de Milan vers le

monde d’Armani s’accomplit en une marche au milieu de colonnes aus-

tères, comme dans un ancien cloître. Le comptoir d’accueil devient un

objet d’art, tandis que des portes tout aussi austères mènent à de fru-

gaux espaces de réception.Le défilé devient ici une fin en soi,un événe-

ment artistique,bien loin du simple négoce de vêtements.

TECHNIQUE

Page 21: Construction modérne 111

répétition aide à évaluer la distance àparcourir jusqu’au théâtre. Décalées,elles ne commencent qu’après le pas-sage sous le bâtiment existant, puis ellescontinuent un peu au-delà de la respira-tion courbe du foyer pour amener jus-qu’à la véritable entrée du théâtre.Tout au long du parcours, un mur debéton vient doubler les cloisons desbureaux et des showrooms traversés. Safonction de doublage est clairement affi-chée, à la fois par un éclairage au niveaude son décollement du plafond et par unéclairage au sol qui l’isole comme unesurface plane sans fonction porteuse.Son calepinage de quatre hauteurs mar-quées de faux “panneaux préfabriqués”renforce les effets contraires de lagrande hauteur des colonnes et desouvertures basses sur l’extérieur. Desdéfilés peuvent s’y produire. Dans lefoyer courbe, la paroi est incurvée pour

donner un puissant effet conique. Desouvertures dissimulant des lumièresélectriques rythment la courbe.

● Étonnantes lumières

Au sol, la lumière est remplacée par desgrilles de ventilation très sobres. Uncomptoir lumineux contenu dans uneboîte de verre rend l’espace presqueirréel. À l’opposé des effets précédentsdans le long passage, deux colonnesrondes viennent s’enfoncer dans le pla-fond avec un effet lumineux de décolle-ment. Plus massives, elles s’alignent dansle prolongement du mur du corridor. Lecalepinage des murs en béton pour lessurfaces coniques de la courbe et planesdes façades du théâtre marque alors unnombre plus important de faux “pan-neaux préfabriqués” (de six pour les

façades et l’intérieur du théâtre à septpour le cône du foyer). Entre colonnesrondes et calepinages, l’échelle changeet renforce encore cette impression dedilatation de l’espace, réelle en volumehorizontal, et visuellement construite envertical.De lourdes portes de métal d’unerare sobriété montrent les entrées de l’es-pace de réception et du théâtre.La salle des banquets, après ce passagedans le sombre, ouvre largement sur unecour “pavée d’eau” où le béton se reflèteà l’envi. De vastes pans de béton sur-plombent de tout aussi vastes ouverturesvitrées et semblent flotter au-dessus dusol. L’épaisseur des murs est renforcéeafin d’asseoir encore mieux le matériau.Les verres possèdent des dimensionsmaximales et leurs menuiseries sontréduites au plus simple. Le théâtre lui-même est comme le reste du projet : unespace de béton, sol et murs. Les siègess’affichent comme des éléments totale-ment indépendants de l’espace. Modu-lables, ils sont recouverts d’un tissu quirend leur présence plus fragile par rap-port au béton. Différentes couleurs per-mettent des variations de tons. ❚

TEXTE : SYLVIE CHIRAT

PHOTOS : RICHARD BRYANT

PHOTOS 2 ET 6 : TADAO ANDO ARCHITECT & ASSOCIÉS

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>>> La salle de réception, entre le plan d’eau et

le théâtre lui-même. Simple surface monolithique en acier,

les portes du théâtre semblent contenir un mystère. Les portes

du théâtre, à droite, sont mises en valeur par une dilation de

l’espace du côté opposé. Soudaine respiration lors

de la promenade entre les murs de béton : un plan d’eau apparaît,

où se réfléchissent les parois des nouveaux bâtiments.

6

5

4

3

Lieu :via Bergognone 59,Milano(à l’intérieur du siège social

de Giorgio Armani)

Maître d’ouvrage :Giorgio Armani

Maître d’œuvre :Tadao Ando Architect & Associés(Tadao Ando,Kulapat Yantrasat)

Suivi de chantier :Tadao Ando Architect & Associés

+ Intertecno SpA de Milan

Entreprise de construction :Marcora Costruzioni

Programme :centre événementiel (défilés,représentations,expositions)

avec théâtre (capacité :900 places),espace de réception,

foyer,entrée,magasins,pour un total de 3 400 m2

5 6

Page 22: Construction modérne 111

r é a l i s a t i o n POLIGNY - Laboratoire

Ecrin de bétonpour laboratoire d’analyses● ● ● C’est par un ouvrage en béton brut que la région Franche-Comté a choisi d’exprimer

la modernité et la technicité du nouveau laboratoire de l’industrie laitière. Bâtiment complexe,

soumis à des conditions d’hygiène drastiques, il a pour objet d’assurer l’analyse et le contrôle

de l’agroalimentaire fromager. Une mission qui s’accorde à merveille avec l’architecture

de Patrice Vallée, auteur d’une écriture résolument contemporaine et pourtant respectueuse

de l’architecture du centre ancien de Poligny, voisin immédiat du nouveau laboratoire.

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vec son église, sa collé-giale, sa place, ses mai-

sons et ses extensions péri-phériques, Poligny, capitale duComté, aurait tout l’air d’une petiteville bien tranquille si elle n’était deve-nue l’un des leaders dans le domainede la recherche et de la formation enagroalimentaire laitier et fromager.À la limite de la ville ancienne, un quar-tier en plein développement regroupeaujourd’hui différents organismes dontl’École nationale d’industrie laitière(ENIL), le laboratoire départementald’analyses agricoles, ainsi que le labo-ratoire régional de l’ENIL que réaliseaujourd’hui Patrice Vallée.

● Moderne et emblématique

Plongé dans cet ensemble qui fait l’ob-jet d’un vaste chantier, on aborde lenouveau bâtiment par une petite rue

située à la limite du centre ancien. Parle contraste qu’il fait naître avec lesbâtisses voisines, l’édifice affirme lavolonté régionale de faire de ce labora-toire un équipement représentatif del’activité locale. L’écriture moderne, lavolumétrie contemporaine, les maté-riaux (béton brut, acier et verre), lepositionnement dans le paysage, sontautant d’éléments qui concourent àdonner un statut d’équipement à l’en-semble. Sur la rue, la question de l’ali-gnement est traitée avec finesse parune succession de plans tantôt obliqueset tantôt parallèles, tantôt proches ettantôt éloignés, qui jouent avec leslimites de la propriété.Concernant les constructions, le concep-teur déclare : “Analogiquement, jem’intègre par la géométrie ; pour cequi est du style, j’ignore totalement cequ’il y a autour.” On est donc bien loinde l’intégration par mimétisme. Et pour-tant, la succession des plans accom-

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1 2

A pagne la suite de pleins et de vides desmaisons et des jardins qui constituent letissu urbain, tandis que la volumétriecontemporaine se rapproche, par sataille, de celle des maisons du bourg.

● Un contexte touffus, tourmenté

À l’origine du projet, le terrain paraîtextrêmement exigu. La parcelle présenteune géométrie torturée, avec des anglesrentrants, et plusieurs bâtiments occu-pent le site. Certains sont destinés àune réhabilitation, d’autres devraientêtre démolis. Des différences de niveauimportantes existent entre le champ defoire, sur lequel s’ouvrira à terme l’équi-pement, et la rue qui borde le centre dela commune. Les règlements d’urba-nisme imposent un prospect à R + 3maximum, et l’ensemble est situé dansle périmètre de l’architecte des Bâti-

>>> Face au centre ancien, la volumétrie

contemporaine traduit la suite de pleins et de vides qui constitue

le tissu urbain de Poligny.

21

Page 24: Construction modérne 111

Centre d’étude et de contrôle d’analysesen industrie laitière (CECA Lait), qui estun instrument d’évaluation des perfor-mances et de contrôle qualité des labo-ratoires agroalimentaires. Le deuxièmeétage est investi par les services del’INRA qui étudient l’influence desmicro-organismes sur la qualité et legoût des fromages.

ments de France. Pour faire face à cescontraintes, le concepteur développe unprocessus très rationnel. Dans un premiertemps, les surfaces et les fonctionnalitéssont mises en ordre, puis, à l’aide d’unemaquette à 2 mm/m, le projet est monté“comme une évidence”, de manièrepresque vernaculaire. Contraints parl’emprise constructible limitée et leurs

relations fonctionnelles extrêmementfortes, les locaux sont composés parmodules autour de cours intérieures. Pourassurer une continuité avec la place et évi-ter tout changement de niveau contrai-gnant pour la circulation des chariots, lebâtiment est légèrement enchâssé dans leterrain. La composition des façades côtérue accuse ce décalage de niveaux par

un rez-de-chaussée en cour anglaise,entièrement vitré, qui donne l’impressiond’un édifice flottant au-dessus du sol.

● Une phase, deux services

La première phase, aujourd’hui réalisée,abrite dans ces premiers niveaux le

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r é a l i s a t i o n POLIGNY - Laboratoire

3 4

« J’aime valoriser le béton par sa mise en œuvre »

Entretien avec Patrice Vallée

Construction moderne : Voilàplusieurs années que vous travaillezle béton brut. D’où vient cet intérêt ?

Patrice Vallée : J’aime les matériauxconcrets, les matériaux premiers. Ce qui m’intéresse, c’est que leshabitants, les gens en général, soientà même de comprendre, d’identifierles composantes d’une architecture.Par ailleurs, d’un point de vue pluspratique, le béton brut est un matériau qui vieillit très bien et accepte facilement l’altération du temps. On sait que son aspect ne sera pas vraiment différent

d’ici quelques années, et cela, c’estun atout pour le maître d’œuvreautant que pour le maître d’ouvrage.

C. M. : Alors qu’il existe aujourd’huiune gamme très riche de bétons –aspect, couleur, finition, traitement –,vous restez fidèle au béton gris.Quelles en sont les raisons ?

P. V. : Effectivement, j’ai toujoursutilisé un béton gris tout à faitclassique, car ce qui m’intéresse,c’est de prendre un matériau courant et de le travailler, de le valoriser au travers d’une mise

en œuvre extrêmement soignée.C’est au travers du calepinage des façades, du traitement des trousde banches, de la profondeur des joints creux, que tout un travail de proportions s’opère et magnifie en quelque sorte le matériau.

C. M. : Quelles évolutions avez-vousnotées de la part des entreprisesdepuis vos premiers projets ?

P. V. : Tout comme j’affine, projetaprès projet, les prescriptionsarchitecturales, je note avec intérêtles progrès qui s’opèrent dans la

composition des bétons. Mais ce qui me frappe avant tout, pour moiqui utilise un béton tout à faitclassique, ce sont les progrèsaccomplis par les entreprises dans la réalisation des ouvrages bruts de décoffrage. On peut dire que cestypes de mise en œuvre et de finitionsont aujourd’hui entrés dans la culture des entreprises. Nombred’entre elles voient dans cet intérêtpour le bel ouvrage une occasion de présenter leur savoir-faire. Au final,on se retrouve avec le même but.

Propos recueillis par Hervé Cividino

Page 25: Construction modérne 111

Particulièrement pointus en termes tech-niques, ces locaux sont équipés de l’ins-trumentation propre aux laboratoires(paillasses, sorbones, alimentation enfluides spécialisés, etc.). Ils répondent àdes normes sanitaires (sols en résine,plafonds et revêtements sanitaires) àmême de garantir la validité des expé-riences qui s’y opèrent. Des normesauxquelles le béton vient ajouter sarésistance exceptionnelle aux agentsagressifs (acides lactiques, par exemple),résistance qui constitue un gage desécurité indéniable dans un bâtimentdestiné au secteur agroalimentaire.Les fonctions sont disposées suivant unemarche en avant confortée par un sys-tème de traitement d’air filtré qui met leszones sales en dépression et les zonespropres en surpression, de façon à évitertoute contamination bactérienne. Audernier niveau, un local techniquecouvre l’ensemble de l’immeuble. Il apour vocation de contenir les rejets et delimiter les nuisances sonores liées auxéquipements. Son architecture trans-parente contribue à faire apparaître latechnicité du bâtiment.D’un point de vue technique, et au diremême de l’architecte,“la principale diffi-culté fut de résoudre le problème du pas-

sage des réseaux”. Patrice Vallée auraitvolontiers réalisé un étage de moins pourdisposer d’une hauteur de plénum plusimportante. La mise en œuvre d’unestructure en béton armé organiséeautour d’un noyau central porteur a per-mis de surmonter ces difficultés. Lesdalles surferraillées, de 7 à 8 mètres deportée, sont lancées jusqu’aux poteauxcirculaires disposés en périphérie. Pourlibérer un maximum d’espace dans lesfaux plafonds, les poutres de rive, aux-quelles sont suspendues les façades, sontnoyées dans l’épaisseur des planchers.

● Coulage de précision pour parements de qualité

Le calepinage savant des façades couléesen place dans des coffrages bois traduitle travail effectué sur la trame de l’édifice.Basé sur une mesure de 0,50 m, le bâti-ment dans son ensemble a été pensépour être coulé précisément, sans repriseni décalage, à partir d’une seule dimen-sion. Les mêmes exigences ont étéapportées par le concepteur quant à laqualité des parements de béton : aucunponçage, reprise ou ragréage n’étaittoléré sur les parements bruts. De fait,

une démarche qualité a été mise enplace par l’entreprise lors de l’exécutionpour contrôler la fabrication et l’emploides coffrages bois, ainsi que la composi-tion et la mise en œuvre du béton. Pouréviter toute bavure, les angles saillantsont été chanfreinés au moyen d’unebaguette triangulaire tandis que lesreprises aux arrêts de coffrage étaientarasées verticalement dans l’axe desjoints creux. Enfin, les parements ont étébrossés manuellement avant applicationd’une lasure incolore mate. Destinée àprotéger et à imperméabiliser le béton,elle apporte une impression de finiimpeccable, indissociable de l’image derigueur et de qualité sanitaire qui sied àun laboratoire agroalimentaire. ❚

TEXTE : HERVÉ CIVIDINO

PHOTOS : OLIVIER WOGENSKY

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>>> Au dernier niveau, l’ouvrage de béton brut est surmonté

par un local technique transparent qui rend visible et “signifiante”

la technicité du bâtiment. Parfaitement calepinées, les façades

de béton intègrent les ouvertures dans une trame invariable de 0,50 m

de côté. Traités par des vitrages, les angles accusent la lecture

verticale du bâtiment. Les laboratoires répondent à des normes

sanitaires précises auxquelles le béton ajoute sa résistance

exceptionnelle aux agents agressifs.

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Maître d’ouvrage :conseil régional

de Franche-Comté

Maître d’œuvre :Patrice Vallée

Bureau d’étude :INGC

Entreprise gros œuvre :Verazi

Page 26: Construction modérne 111

r é a l i s a t i o n MEYLAN - Maison individuelle

Un architecteréinvente la notion d’espace ● ● ● Par son panorama grandiose sur les Alpes, cette demeure dilate littéralement le regard.

Une même impression d’espace se lit à l’intérieur, malgré l’exiguïté relative de la surface habitable.

Ce sentiment de volume est d’abord le fait du béton, qui permet de longs encorbellements et de fins

piliers. Une grande fluidité s’en dégage, accentuée par les rangements encastrés et par la teinte

uniformément blanche de l’architecture, dedans comme dehors. Une fluidité contrebalancée

par la forte structuration qu’apporte le jeu des horizontales, à l’extérieur comme à l’intérieur.

24 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

Page 27: Construction modérne 111

n jeune couple et ses troisenfants désiraient une

demeure avec un maximum delumière, à la manière d’une mai-son de vacances. Un site fut recher-ché dans la région de Grenoble, avec labeauté du panorama pour critère. Il futtrouvé juste au pied de la premièrefalaise du massif de Chartreuse, face àla chaîne de Belledonne. Sous lescouches stratifiées de la falaise, lamaison édifiée par l’architecte MichelJanik se caractérise par un jeu pousséde superpositions et d’enchaînementsde plans horizontaux. La toiture apporteune autre allusion au lieu : ce toit à deuxpentes déborde fortement, comme ceuxdes chalets alpins.La contrepartie de ce site superbe est larelative exiguïté du terrain, 800 m2. Lamaison occupe donc fortement la par-celle – rectangulaire – et aligne sesdeux ailes sur deux des côtés de celle-ci,formant un L. Mais pour ne pas saturer

le terrain et loger en même temps unnombre conséquent de fonctions, l’ar-chitecte a dû faire preuve d’astuce.C’est dans cet objectif d’exploiter aumieux l’espace intérieur qu’ont étéregroupées au premier étage les petitessurfaces des chambres et des salles debains. De même, Michel Janik s’est dis-pensé de tout dégagement pour menerà la salle de bains des deux filles,puisque celle-ci se situe entre leursdeux chambres, avec entrée directe.

● Grands espaces collectifs

Le rez-de-chaussée peut ainsi accorderde généreuses dimensions aux piècescollectives : la cuisine, la salle à manger– capable d’accueillir près de vingtconvives –, et surtout le salon. Sur deuxniveaux dans sa partie centrale, il frôleles 11 m de long sur 6 m de haut. Lescommanditaires formulèrent plusieurs

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U

>>> L’ampleur de la rampe d’accès contrebalance la relative

petitesse de la parcelle. Finesse des piliers, élancement

des porte-à-faux, autant de possibilités apportées par le béton.

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Page 28: Construction modérne 111

demandes à l’architecte, comme celled’une teinte uniformément blanche.Touten acceptant les partis pris de MichelJanik, et en allant jusqu’à le consulterpour choisir les meubles. Preuve qu’ici,architecture et décoration entretiennentune alliance étroite.

● Renversement de situation

Une solution a permis d’exploiter l’es-pace au maximum : le salon, dans sapartie haute et sur ses quatre côtés,communie avec différentes pièces quis’avancent en mezzanine. L’édifice enretire un grand dynamisme, avec cesvolumes compacts à l’étage au-dessus

du vaste volume vide du salon. Lesgrandes portées en encorbellementexpliquent l’emploi du béton coulé enplace, qui constitue l’intégralité de lastructure. Sur ces longs porte-à-faux, deséléments de béton préfabriqué auraiententraîné des joints trop importants.Le choix du béton coulé en place se jus-tifie aussi par la recherche d’une cer-taine finesse dans les piliers scandantla longue façade, presque totalementvitrée, qui regarde la piscine. Nousavons ici un niveau qui se dispense qua-siment d’éléments porteurs, alors quel’étage en surplomb apparaît beaucoupplus fermé, compact. On peut y voir unedisposition “inversée” qui s’apparentesensiblement à celle du salon.

“Nous avons voulu mettre en évidenceles possibilités constructives offertes parle béton, avec ces grands encorbelle-ments, ces piliers presque inexistants ensection comme en nombre, plutôt quede mettre en évidence le matériaubéton”, explique Michel Janik. De fait,une peinture blanche l’habille intégrale-ment. L’architecte est allé très loin dansce sens : la finition blanche s’accom-pagne de sols en pierre d’un beige extrê-mement clair, et ne comporte quequelques contrepoints, comme lesvasques en pierre de lave grise de la sallede bains des parents.Du fait de cette teinte blanche d’en-semble, on pourrait craindre que la mai-son, principalement exposée à l’ouest et

au sud, ne provoque un éblouissementles jours de grand soleil. Il n’en est rien,car des tentures légères modèrent lesapports lumineux. Le plan en L et lesvastes ouvertures sur les quatre côtés del’édifice créent des circulations d’airdans toutes les directions, circulationsqui apportent une ventilation naturelle.

● Impression de fluidité

Né de l’emploi d’un béton coulé enplace, le grand élancement des partiesen mezzanine crée une sensation defluidité. Pareille sensation se trouveaccentuée par les placards intégrés etleurs portes coulissantes qui libèrent

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r é a l i s a t i o n MEYLAN - Maison individuelle

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Page 29: Construction modérne 111

l’espace des habituels meubles de ran-gement. De plus, la décoration apportéepar la maîtresse des lieux se montre par-faitement sobre et ajoute encore à lalégèreté de l’architecture. Semblablelégèreté, pourtant, ne donne nullementl’impression d’une architecture évanes-cente, car elle se trouve relevée par untravail poussé sur les successions et lessuperpositions de plans horizontaux. Àla question de savoir si ce travail vise àinscrire la maison dans la superpositionde lignes horizontales qui animent lafalaise de Chartreuse, en fond de scène,Michel Janik apporte une précision.“Mes commanditaires auraient vouluune demeure en bord de mer. C’est dece désir qu’est partie l’idée d’une mai-son aplatie, tout en lignes horizontales,tout en simplicité.” Grâce au travail del’architecte, l’édifice ne donne en aucuncas l’impression d’une constructiondéplacée, hors de propos dans le sitealpin. Sa position sous la falaise, à

laquelle elle est parallèle, l’assimile eneffet à une courbe de niveau, surplom-bant elle-même les courbes de niveausituées plus bas, en descendant vers lavallée de Grenoble.La succession de plans horizontauxdébute par le mur de clôture de la pro-priété, où une marquise vient protéger leportail. Elle se prolonge avec l’enchaîne-ment des terrasses et des deux ailes dela maison, l’une plus haute que l’autre,et va jusqu’au plus intime du bâtiment.Sur le cheminement latéral d’accès à lamaison, dans le jardin, se crée même unplan supplémentaire par plongée dans lesous-sol : une dalle de verre attire l’œilvers cette dimension insoupçonnée.

● Architecture rythmée

Ces glissements entre dehors et dedanssont fréquents, ce qui multiplie encoreles associations de plans horizontaux.De

la maison au jardin, en passant par lesjeux complexes d’emmarchements entremaison et jardin, tout est donc trèsrythmé, très architecturé. Il en est ainside l’enchaînement de plans formant lechemin latéral d’accès à la maison. Etaussi des combinaisons de murets, dansle jardin et autour de la piscine, muretsqui tiennent la pente et la structurenttout ensemble. L’agencement en planshorizontaux et emmarchements exclut laprésence de pentes, qui, d’après l’archi-tecte, “auraient enlevé de sa simplicitéà la composition”. Seule existe la pentenécessaire pour mener au garage ensous-sol. Ladite pente se compose delarges bandes de béton désactivé alter-nant gravillons beiges et gris. Destiné augarage, le volume intérieur est devenusalon d’été pour la fraîcheur qui y règne,du fait de sa position semi-enterrée. Ils’ouvre largement sur le dehors,exemple supplémentaire de glissemententre extérieur et intérieur.La communion entre maison et jardinest accentuée par l’unité de teinte. Ununivers immaculé auquel ne se sous-traient que la piscine et sa bordure debois, ainsi que le mur de clôture gauchede la propriété et le mur masquant lacuisine de jardin, tous deux en pierre

appareillée. Tous ces éléments d’archi-tecture autour de la maison sont enbéton banché avec un coffrage bois soi-gné, d’où leur grain fin, leur aspect lisse.Cet aspect lisse apporte aux jeux desformes extérieures la fluidité si caractéri-tique de la maison. ❚

TEXTE : GABRIEL EHRET

PHOTOS : GUY DÉPOLLIER

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>>> De chaque point de la maison, la vue embrasse le massif

de Belledonne. La blancheur du bâtiment se poursuit à l’extérieur

avec les murets et les emmarchements, à l’intérieur avec le beige grisé

des sols. Le puits central du salon fait écho à l’atrium de

l’antique demeure romaine. Les transparences se multiplient

entre le puits central et les différentes pièces.

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Maître d’ouvrage :privé

Maître d’œuvre :Michel Janik

BET structures :Alpes Structures

Entreprise de maçonnerie :Roffet-Boulon

SHON :230 m2

Coût :

320 000 €TTC

Page 30: Construction modérne 111

r é a l i s a t i o n ORLÉANS - Laboratoire du CNRS

La réussiten’attend pas le nombre des années● ● ● Posé comme une sculpture dans le paysage végétal d’Orléans-la-Source, le centre de recherche

Ernest-Babelon tire sa force et sa dimension d’une exécution en béton clair particulièrement

soignée. Première réalisation des architectes J.-B. Bethgnies et S. Leclair, ce bâtiment leur

a permis de développer une architecture riche en détails et en solutions intelligentes, qui sont

autant de réponses à des besoins exprimés par un maître d’ouvrage désireux de donner sa chance

à une jeune équipe. Et qui, au final, se déclare entièrement satisfait de l’ouvrage livré.

28 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

Page 31: Construction modérne 111

a recherche sur les archéo-matériaux – des objets

datant de 10 000 ans avantnotre ère jusqu’à la fin duMoyen Âge –, telle est la voca-tion du centre Ernest-Babelon.Cet ensemble de laboratoires, équipésd’une instrumentation sophistiquée,exerce à l’attention des services duCentre national de la recherche scienti-fique (CNRS), mais aussi des musées oudes antiquaires. Il s’agit, par exemple,d’authentifier et de retrouver les ori-gines des matériaux qui composent desoutils antiques, dans le but de reconsti-tuer, ensuite, les voies commerciales etles échanges existant à l’époque.Situé sur le campus paysager du CNRSd’Orléans-la-Source, le bâtiment a étéimplanté sans contrainte particulière,si ce n’est l’exposition et les donnéesprogrammatiques. Un premier volumeparallélépipédique, orienté suivant unaxe nord-sud, abrite au rez-de-chaussée

les laboratoires de recherche, et àl’étage les bureaux des chercheurs.Cette partition du programme se traduiten façade par l’expression d’un soclerelativement fermé, surmonté d’unétage plus largement ouvert sur le pay-sage. Un second parallélépipède, com-posé de l’administration et d’un pôled’hébergement pour les thésards, estposé perpendiculairement à ce premiervolume. Le hall d’entrée, dilaté sur unedouble hauteur, est aménagé à l’inter-section des deux immeubles.

● Un objet sculpté dans le paysage

De manière à présenter un impact maxi-mal dans le paysage malgré une taillemodeste (1 000 m2), le bâtiment a étépensé comme une sculpture. L’articula-tion des masses s’organise en partantd’un point central situé dans le hall.

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0 5 10 15 20 25 m

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L

>>> Composé sur un plan en T, l’édifice articule, autour

d’un hall d’accueil, laboratoires et administration. À l’image

d’une sculpture, les éléments de béton se répondent les uns aux

autres suivant un jeu de pleins et de vides.

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Page 32: Construction modérne 111

rales. C’est le cas au rez-de-chausséedes “murs épais”, équipés de largesappuis, qui intègrent les rangementsbas des bureaux, tandis qu’à l’étage, lesbandeaux vitrés protégés par des “cas-quettes brise-soleil” positionnées dansla continuité des faux plafonds assurentune forte relation au paysage.L’aspect et le traitement des bétonsn’ont pas été négligés. On peut s’enassurer dans le hall, par exemple, où lessols de béton verni teinté en noir assu-rent la continuité avec les bétons désac-tivés de gravillons roulés utilisés pour letraitement des espaces extérieurs.

● Satisfaction partagée

Si les architectes reconnaissent avoir lar-gement utilisé le bâtiment à des finsd’expérimentation, ils n’en sont pasmoins critiques sur la complexité de cer-taines formes : “Lorsque l’on regardel’édifice, on a vraiment l’impression quel’on a tenté tous les ‘coups’ possibles : lacasquette, le mur en épaisseur, le ban-deau vitré, le vitrage ponctuel, les plis enbéton, les percements, la modénature dubéton texturé en partie basse… Aujour-d’hui, avec le temps qui passe, on a envie

Depuis ce nœud, la façade du rez-de-chaussée se plie vers le nord, la façadede l’étage se rabat à l’opposé, tandisqu’un troisième pli vient couvrir les deuxet constituer la toiture. Les extrémitésdu bâtiment, travaillées sur le mêmemode, marquent la spécificité techniquedu centre de recherche. À l’est, l’allègedu premier niveau se termine par uneforme en équerre qui englobe le réser-voir d’azote liquide. À l’opposé, uncadrage en béton intègre les bouteillesd’azote gazeux.

● Le béton, matériau d’architecture et de création

En partant de cette volonté sculpturale,les concepteurs ont réalisé une œuvreentièrement en béton brut. Un maté-riau auquel ils reconnaissent de nom-breuses qualités : “Le béton est le seulmatériau qui permette de passer del’architecture à la sculpture. On peut le

travailler, le modeler à volonté, alorsqu’en métal, en verre ou en bois, on enreste à des assemblages, ce qui posedes problèmes de tectonique que l’onne rencontre pas avec le béton.” D’unpoint de vue constructif, la structure estsimple. Elle se définit par un systèmede refends porteurs, perpendiculairesaux façades, positionnés sur une tramede 6 mètres, et de dalles porteuses.Dans l’épaisseur, le bâtiment s’orga-nise en deux travées de 4 mètres depart et d’autre d’une circulation cen-trale qui intègre des espaces de range-ment réservés dans les cloisons. Lesfaçades, exécutées en béton clair, ontété coulées en place pour tout le rez-de-chaussée et préfabriquées surchantier pour l’étage.Premier chantier d’une équipe jeune, lecentre Ernest-Babelon est un bâtimentfouillé qui, derrière l’apparente homo-généité que lui donne l’emploi systé-matique du béton brut, révèle une foulede détails et de solutions architectu-

30 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

>>> “Le béton est le seul matériau qui permette de passer

de l’architecture à la sculpture.” (J.-B. Bethgnies et S. Leclair.)

Façades, sols, structure, enveloppe à l’intérieur comme

à l’extérieur, le bâtiment décline une multitude d’emplois du béton.

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r é a l i s a t i o n ORLÉANS - Laboratoire du CNRS

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Maître d’ouvrage :CNRS Orléans,délégationCentre-Auvergne-Limousin

Maître d’œuvre :J.-B.Bethgnies & S.Leclair,

architectes

Bureau d’étude :Groupe ABAC

Entreprise gros œuvre :SNB

de prendre du recul et d’épurer au maxi-mum.” Mais au final, les maîtresd’œuvre, aujourd’hui confortés par uncarnet de commandes conséquent, necachent pas leur satisfaction d’avoir réa-lisé ce premier bâtiment pour un maîtred’ouvrage qui se révèle totalement satis-fait de l’édifice livré. Un maître d’ouvragequ’il convient de saluer pour avoir sudonner sa chance à une jeune équipe. ❚

TEXTE : HERVÉ CIVIDINO

PHOTOS : JEAN-MARIE MONTHIERS

Page 33: Construction modérne 111

r é a l i s a t i o n SCHWEIGHOUSE - Centre culturel

La forme, matérialisation de l’usage ● ● ● Le centre culturel et sportif de Schweighouse abrite deux types d’activités principaux.

Et la conception architecturale de Michel Girold tient parfaitement compte du fonctionnement

de chacune. Le bâtiment présente des typologies distinctes, permettant d’identifier les différentes

fonctions. Les matériaux de construction ont été mis au service de cette différenciation, tant

pour leurs propriétés physiques que pour leurs qualités esthétiques. Le béton brut, omniprésent,

forme le lien entre les différentes parties de l’édifice, en structure comme en surface.

C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1 31

Page 34: Construction modérne 111

e centre culturel et sportifde Schweighouse, une

agglomération située à environtrente-cinq kilomètres de Stras-bourg, est un des éléments pré-pondérants de la commune.Celle-ci est aujourd’hui en plein déve-loppement, dans le domaine des sportscomme dans celui des loisirs. Le bâti-ment est implanté au centre du terrain

qui lui était dévolu. Prévu comme unlieu de rencontre et de convivialité, il estouvert sur la rue et entouré d’espla-nades, de parkings, de voies de circula-tion dédiées aux piétons.La double vocation de l’équipement agénéré sa composition architecturale,non seulement en plan, mais égalementen élévation et en volume. Il était pri-mordial de différencier les fonctions et

bien sûr les espaces intérieurs et exté-rieurs par des traitements spécifiques etappropriés. Il semblait aussi nécessaireà l’architecte comme au maître d’ou-vrage d’apporter la plus grande flexibi-lité d’utilisation à cet outil polyvalent.Les surfaces intérieures sont divisiblesgrâce à des systèmes de cloisons et debarrières coulissantes qui, par exemple,ferment une partie de la salle des fêtesou la cuisine, ou qui interdisent certainsaccès en fonction des manifestations.

● Un bâtiment divisé en trois parties

Le bâtiment se divise donc en trois par-ties principales. À l’ouest, la partie spor-tive comprend un gymnase, une salle dedanse et de musculation au rez-de-chaussée, un dojo à l’étage, des sani-taires et des locaux de service. À l’est,la partie culturelle est équipée d’unegrande salle modulable, de sanitaires, deloges et, au niveau supérieur, d’une régieet d’une salle de réunion. Au centre setrouvent les parties communes : le vastehall d’accueil avec l’escalier communaux deux activités, une cafétéria don-nant sur un patio, et enfin une cuisine.

À l’extérieur, cette disposition tripartiten’apparaît pas au premier regard,même si les volumes qui abritent les dif-férentes activités sont traités distincte-ment. Les matériaux employés sont peunombreux : du béton brut (coulé enplace et préfabriqué) couvert d’unecouche de lasure anti-graffitis, du verre,de la terre cuite et du métal. Ils suscitentdes expressions architecturales diversi-fiées et particulières.La façade d’entrée monumentale appa-raît comme un emblème, un signal dansla ville, l’expression de l’équipementpublic par excellence. La guérite du gar-dien traitée en arrondi, comme un gui-chet, participe également de l’identitéaffirmée des lieux. Un panneau debéton brut lasuré, qui forme une sortede paravent, se prolonge en un acrotèrequi couronne la paroi vitrée du halld’entrée. Il se développe, sur la droite,en un bloc presque aveugle qui abriteles sanitaires des sportifs. Le bâtimentse déploie derrière cette avancée, mar-quée par le trait d’union rouge queforme le plafond de l’auvent en contre-plaqué marine peint. Le béton, qui agardé la trace des veines du bois desbanches, marque le caractère résolu-ment contemporain de l’édifice. En per-

32 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

r é a l i s a t i o n SCHWEIGHOUSE - Centre culturel

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rue des Sports

Page 35: Construction modérne 111

mettant une écriture architecturaleorthogonale et contrastée, il favorise lesjeux d’ombre et de lumière, les opposi-tions entre les pleins et les vides.Le béton ceinture l’édifice, qu’il ancredans son site par son effet de masse. Ilfédère l’unité de l’ensemble, relie lesfaçades par des retours maçonnés, faitle lien avec les autres matériaux, etstructure le bâtiment dans sa totalité.Le bardage de terre cuite qui habille levolume du dojo en avancée de lafaçade principale, ainsi que la sallepolyvalente au nord, dont une partie estconçue en arrondi, viennent nuancercet effet de modernité. L’aspect plusorganique des tuiles et leur teinterouge orangé exaltent la luminosité etla plénitude du béton blanchi.

● Une série de volumes fragmentés

La façade est, où se rejoignent plusieursparties du bâtiment, présente une sériede volumes fragmentés. Un cube debéton, qui abrite les vestiaires et lessanitaires du rez-de-chaussée ainsiqu’une terrasse à l’étage, semble péné-trer dans la partie dojo ; il se confronte

véritablement aux autres matériaux– terre cuite et verre –, comme pour serévéler. C’est l’exaltation, voire l’opposi-tion des propriétés physiques et esthé-tiques de chaque matériau qui est icidémontrée : l’éclat et la sensualité de laterre, la légèreté et la transparence duverre, la masse et la puissance du béton.Un escalier monumental (de 6 mètresde large) forme un porte-à-faux et créeun relief très prononcé, comme uneréponse au volume en avancée de lasalle de sport.

● Combinaison de béton et de bardage métallique

Un peu plus loin, sur cette mêmefaçade, un bardage métallique grishabille le pignon en saillie du gymnase.Le bardage recouvre l’isolation posée àl’extérieur du mur de béton, conservétel quel à l’intérieur de la salle pouraménager une paroi d’escalade. Lebloc de métal ainsi créé se détache dubâtiment grâce à une faille vitrée, quela lumière traverse de part en part. Cesystème de séparation visuelle des dif-férents éléments du projet, à l’aided’interstices vitrés ou non, se retrouve

à plusieurs reprises. Il marque le pas-sage d’une fonction à une autre, d’unmatériau à un autre.Trois autres cubes en avancée revêtus demétal, qui servent d’entrepôt au matérielsportif, animent la façade arrière.Ouverte sur une aire prévue pour rece-voir du public, nombreux lors de cer-taines manifestations sportives, cettefaçade reflète et résume l’intérêt queMichel Girold porte à l’utilisation desmatériaux, mais aussi à la volumétrie etau problème de l’échelle.Ici, l’écriture architecturale exprime àl’extérieur la simplicité du volume inté-rieur du gymnase. Cette façade estconçue en trois registres horizontaux.Au niveau du sol, les baies vitrées et lesblocs aveugles bardés de métal fontalterner rythme vertical et horizontal,opacité et transparence. Un bandeaude béton, constitué de panneaux préfa-

briqués réalisés en utilisant le mêmefond de coffrage en planchettes de boiset la même composition de béton quedans le reste du bâtiment, et qui semblereposer sur les baies et asseoir l’édifice,est surmonté d’une bande de Reglittranslucide qui laisse entrevoir la struc-ture de la salle omnisports et pénétrerla lumière naturelle. L’ossature est com-posée de poteaux moisants en bétonsupportant une charpente en lamellé-collé. Là encore, chaque matériau estmis en valeur par la présence de sonvoisin, sur le même mode du contrasteet de l’opposition.

● Continuité visuelle

La présence du béton dans les princi-paux lieux de circulation permet d’éta-blir une continuité visuelle et spatiale

C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1 33

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>>> Vue de la façade d’entrée : la présence du béton blanchi

et de la vaste baie vitrée ouverte sur le hall exprime le statut

d’équipement public du bâtiment. Avec le béton, l’architecte

donne à l’édifice sa géométrie orthogonale, nuancée par

l’aspect plus organique des carreaux de terre cuite. Lorsqu’il

est brut, le béton laisse apparaître les veines du bois des banches.

La légèreté et la brillance des larges parties vitrées exaltent son aspect

à la fois minéral et monolithique.

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Page 36: Construction modérne 111

entre l’intérieur et l’extérieur du centreculturel et sportif. L’ampleur du halld’entrée fait corps avec l’image toutentière du bâtiment : un équipementpratique, à la fois public et convivial,vaste et lumineux.

● De la rigueur dans l’association des matières

La composition du béton, tout commesa mise en œuvre, sont identiques auxsolutions retenues à l’extérieur. Mais latrace des veines du bois en surface,effleurées seulement par la lumière, s’yfait encore plus visible, plus sensible.On note combien l’architecte a tenucompte de l’association du béton brut etdes matériaux de second œuvre dans lecalepinage du carrelage et des pan-neaux de faux plafond, dans le position-nement des menuiseries, dans le traite-ment du retour de certains murs pouréviter au maximum les problèmes dejoints. Les gabarits de tous ces élémentsont été étudiés pour restreindre lesdécoupes, et conférer ainsi un certainraffinement à la juxtaposition des par-ties traitées en gros œuvre et des élé-ments dits “de décoration”.

Si la composition architecturale dépen-dait pour une bonne part d’une utilisa-tion optimale des matériaux, la questionde l’échelle du bâtiment fut aussi pourl’architecte une des bases de sa concep-tion. S’agissant d’un bâtiment public, ildevait se démarquer de son environne-ment, constitué de pavillons d’habita-tion, sans toutefois s’imposer par ungigantisme excessif. Il devait, en un mot,demeurer à l’échelle de la ville. Les deuxniveaux que l’édifice abrite se font àpeine sentir au sein d’une géométriehorizontale. L’acrotère d’entrée, les ban-deaux de vitrages, les brise-soleil, l’orien-tation du bardage métallique et du cale-pinage des tuiles de terre cuite, toutcomme les joints de béton, contribuent àrenforcer cette disposition.

● Juste proportion des différents volumes

De même, chaque élément, chaque par-tie du projet se devait également derester en rapport avec l’ensemble, endimension comme en volume. Les diffé-rentes activités sont affirmées à traversdes volumes proportionnés. Côté est,des panneaux de béton forment une

protection pour une terrasse, ainsi que lacontinuité du mur qui jouxte la paroivitrée de la salle de judo, sans provoquerde rupture de gabarit.Au nord, l’appar-tement du gardien, qui couvre desgarages et des locaux techniques, estconçu dans le prolongement de la partiemaçonnée du gymnase, juste sous labande de Reglit translucide. Les échelleset les proportions sont ainsi respectées.Le centre culturel et sportif de Schweig-house est une réponse aux volontésconjuguées du maître d’ouvrage d’offrirà la population de sa ville un équipe-ment fonctionnel et convivial, et de l’architecte d’introduire au sein d’unenvironnement traditionnel une notecontemporaine, l’emploi du béton brutétant le principal élément fédérateur decette modernité. ❚

TEXTE : CLOTILDE FOUSSARD

PHOTOS : GUILLAUME MAUCUIT-LECOMTE

34 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

>>> Le hall d’entrée est commun aux deux activités –

l’une culturelle, l’autre sportive – du bâtiment. Là encore, le béton

est largement présent. La continuité qu’il apporte entre l’extérieur

et l’intérieur contribue à tisser un lien entre les différentes parties

de l’édifice. La structure de la salle de gymnase, en poteaux

béton et poutres en lamellé-collé, confère à ce vaste espace une

indéniable impression de légèreté.

5

4

r é a l i s a t i o n SCHWEIGHOUSE - Centre culturel

4 5

Maître d’ouvrage :commune de

Schweighouse-sur-Moder

Maître d’œuvre :Michel Girold,

architecte

BET structures :Loeb

Économiste :C2BI

Gros œuvre :Ets Renner

Page 37: Construction modérne 111

événement brèves➜ Voyage d’étude en Finlande

Soutenue par Cimbéton,l’option “Architecture,structures, matériaux” de l’école d’architecture de Versailles a choisid’effectuer au printempsdernier un voyage d’étudesen Finlande, pour visiterl’œuvre de l’architectefinlandais Alvar Aalto.Une occasion pour lesenseignants et leursétudiants de vérifier lesqualités du béton, mais ausside découvrir les œuvres desarchitectes KhristianGullichsen, Erkki Kairamo… ❚

➜ Cimbéton auCongrès de l’UNSFADu 17 au 19 octobrederniers, à Dijon, se tenait le33e Congrès de l’Unionnationale des syndicatsfrançais d’architectes(UNSFA). Partenaire de cegrand rendez-vous de laprofession, Cimbéton étaitprésent en la personne deMichel Spitz, architecte, qui asouligné l’apport dumatériau béton dans ladémarche “haute qualitéenvironnementale” (QHE). ❚

➜ Salon des maires etdes collectivités localesSeule rencontre nationaleréunissant en un seul lieuplus de 41 000 élus et décideurs territoriaux,ainsi que l’ensemble de leursfournisseurs de biens et de services, le Salon desmaires et des collectivitéslocales 2002 se tiendra à Paris-Expo, porte de Versailles, les 19, 20 et 21 novembre prochains.Au menu, conférences,ateliers “technologies de l’information et de lacommunication”, rencontresau Village territorial, etc. ❚

C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1 35

Concours Bétons, matière d’architecture :“Une maison des cultures nouvelles”Les inscriptions à la 6e session du concours “Bétons, matière d’archi-tecture” organisé par Cimbéton sont ouvertes depuis le mois d’oc-tobre 2002. Cette consultation est destinée aux étudiants des écolesd’architecture françaises inscrits en 2e ou 3e cycle, aux architectesinscrits en DEA ou ayant passé leur diplôme au cours de l’année2002, ainsi qu’aux étudiants des écoles d’ingénieurs. Thème choisipour cette session 2002-2003 : “Une maison des cultures nouvelles”.

Avec la croissance du temps libre et l’émergence du concept deloisirs depuis 150 ans, sports, culture et loisirs tiennent une placecroissante dans les questions urbaines. Un nouvel essor naît dudéveloppement des maisons du peuple, des théâtres populaires etdes équipements sportifs dans les années vingt, relayé par les mai-sons de la culture dans les années soixante. Depuis, les politiquessont devenues locales et les cultures plurielles, effaçant parfois lesfrontières entre art et sport, entre culture officielle et création spon-tanée. Pariant sur leur potentiel de lien social, certaines villes cher-chent à capter les dynamiques nouvelles en inventant des lieux nou-veaux, des équipements polyvalents permettant aux pratiquesémergentes de se développer.

Création d’un édifice nouveau ou reconversion d’un bâtiment existanten intégrant une démarche environnementale inspirée des attentesde développement durable, le sujet proposé aux candidats porte surla conception d’un équipement culturel et sportif, polyvalent etflexible, répondant aux nouvelles dynamiques artistiques et sociales.

Trois communes – Lens (62), Nice (06) et Reims (54) – sont asso-ciées au concours.Elles proposent cha-cune un site réel à l’imagination desconcurrents. Chaquecandidat ou équipede candidats feradonc son choix parmices trois sites. ❚

“Une maison des cultures nouvelles”

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ÈM

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Sixième session 2002-2003

CONCOURS D’ARCHITECTURE CIMBÉTON

BÉTONS, MATIÈRE D’ARCHITECTURE

Octobre 2002 :Ouverture des inscriptions

Décembre 2002 :Clôture des inscriptions

Mars 2003 :Rendu des projets

Avril-mai 2003 :Réunions du jury

Juin 2003 :Remise des prix

Calendr ier

Rentrée littéraireRéalisé sous la direction de PierreClément et de Nathalie Lancret,Hanoï, le cycle des métamorphoses

vient de paraître auxÉditions Recherche.Reflet du travail entrepris par l’Ipraus sur l’Inventaire des cartes et plans desvilles asiatiques, l’ouvrage

donne une cartographie et unelecture des plans de la capitale dunord-Vietnam, complétée d’unedémarche d’analyse architecturale.

À noter également, la deuxième édition de Conception etcoordination des projetsurbains. Conçu parNicole Eleb-Harlé, cetouvrage qui s’inscrit dans

la collection “Histoire, architectureet urbanisme” analyse dix projetsurbains ayant marqué la décennie. ❚

Un site Internetpour l’industriecimentièreLes internautes peuvent ajouter unnouveau site à la liste de leurs favoris.Inauguré pour la rentrée 2002,“www.infociments.fr” est ouvert àtous les publics de l’industriecimentière – utilisateurs, étudiants,prescripteurs, professionnels de la

filière béton –,qui y trouverontune importantebase de données.Au programme, un panorama des

solutions techniques et esthétiquesoffertes par le ciment et sesapplications, deux rubriquesconsacrées à la contributionenvironnementale de la filière, unespace “actualités”, entre autres ! ❚

Parut ions

Mult imédia

a c t u a l i t é s

Page 38: Construction modérne 111

b l o c - n o t e s

frères Perret sur la mise en valeur systématiquedes fonds d’archives publics et privés. À la foischronologique et thématique, elle comporte huitsections qui offriront au visiteur une vision glo-bale de leur œuvre, avec ses multiples ramifi-cations dans le siècle, et redéfinit la statured’Auguste Perret sur la scène architecturalefrançaise et internationale.

Du 20 septembre 2002 au 6 janvier 2003Musée Malraux – 2, boulevard Clémenceau76000 Le Havre – Tél. : 02 35 19 62 62 ❚

Du 20 septembre 2002 au 6 janvier 2003, “LeHavre, ville réinventée” propose un ensemble decinq expositions gravitant autour d’AugustePerret et de la reconstruction du Havre. L’une deces cinq expositions intitulée “Perret, la poétiquedu béton” est coproduite en partenariat par l’Ins-titut français d’architecture, la ville du Havre etla ville de Turin. Cette exposition constitue lapremière grande manifestation consacrée aux

➜ Institut françaisd’architecture/Cité del’architecture et du patrimoine

Henri Sauvage, Jean-Baptiste Minnaert

Architecte, urbaniste, créateurde mobilier et décorateur, Henri Sauvage (1873-1932) se distingue par la richesse de son œuvre. Inscrit dans le mouvement des idées de sontemps, celui du début du siècle,il participa à l’émergence de l’architecture moderne.Inventeur de l’immeuble à gradins, Henri Sauvage estaussi l’auteur, dans les annéesvingt, du nouveau magasin de la Samaritaine, conjugaisonde performances techniques et d’esthétique Art déco. Lesmagasins Decré (1931), à Nantes, sont une autreréussite. Ce dernier grand projetmontre l’engagement d’HenriSauvage dans le mouvementmoderne, parfaitement restitué par le travail de Jean-Baptiste Minnaert. Éditions Norma

Exposit ion

➜ Matériaux de Paris

Bernard Marrey

Paris toujours avec BernardMarrey, qui nous propose une lecture originale de l’architecture de la capitale, à travers lesmatériaux qui la constituent.Une façon de visiter l’histoirede l’architecture, des arts et des techniques de la ville.Cette histoire, marquée par lesinfluences étrangères,l’avancée des techniques etdes découvertes scientifiques,les modes ou les stylesarchitecturaux, a façonné le visage de la capitale dansune passionnante diversité. Le bois, la pierre, le plâtre, la brique, les couvertures, le fer et la fonte, le verre, la mosaïque, la céramique, le béton, sont ainsi abordéssuccessivement. Une manièreattrayante de parcourir le longchemin qui mène jusqu’aubéton, matériau des plusétonnantes prouessestechniques et du renouveaude l’architecture… Éditions Parigramme

➜ Les compagnons du tour de Franceaujourd’hui

Jacqueline Cantaloube

“lls peuvent aussi bientravailler sur un refuge desAlpes ou une chapelle romanedans le Var, reconstruirel’Hermione à Rochefort,participer au chantier du TGVMéditerranée, restaurer unemaison au Laos ou les façadesdu musée de l’Ermitage àSaint-Pétersbourg […]” Ils, cesont les compagnons du tourde France, qu’un même idéalréunit autour de leur métier.Le tour de France leur permetde découvrir des méthodes et des ambiances de travail différentes d’unerégion à l’autre, de rencontrerd’autres hommes et ainsid’enrichir leurs connaissances.Trente et un compagnons sontici présentés. Les témoignagesrecueillis nous montrent toute la noblesse de leurtravail, où les outils et le savoir-faire traditionnelcôtoient les techniques les plus contemporaines.Éditions Ouest-France

➜ Identification d’une villeArchitectures de ParisSous la direction d’Eric Lapierre

“Quelle est l’identitéarchitecturale de Paris ? Surquelles dispositions presqueinconscientes repose le visage,si familier qu’on ne le détaillejamais, des rues de lacapitale ?” Voilà deux desquestions posées par cetouvrage qui fait suite à unerécente exposition portant le même titre. Son auteur, Éric Lapierre, qui fut aussicommissaire de l’exposition,distingue sept périodes allantdu milieu du XIXe siècle à nosjours, au sein desquelles sontabordés des sujets récurrentsde l’architecture parisienne :évolution d’un élémentmorphologique remarquable(le bow-window, la façadeépaisse), type de bâtiment (lestours), mode de construction(la préfabrication), dispositifurbain (la cour et l’îlotouverts)… Pour les passionnésde la ville lumière.Éditions du Pavillon de l’Arsenal-Picard Éditeur

L ivres

Perret, la poétique du béton

36 C O N S T R U C T I O N M O D E R N E / N ° 1 1 1

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Commandés à l’architecte François Noël par l’OPM d’HLM

de Saint-Dizier, les 52 logements sociaux du quartier de la Noue

(voir p.11) se distinguent par une architecture moderne qui puise

son inspiration aux sources du mouvement De Stijl et du cubisme.

Du jeu plastique des volumes et des couleurs se dégage une

atmosphère ludique, conviviale, propice au dynamisme du quartier

et au bien-être des habitants comme des passants.

4e de couverture : vue intérieure du centre de recherche Ernest-Babelon, à Orléans.

p o r t f o l i o

Page 40: Construction modérne 111