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Coord. : François FORONDA (Université Paris 1, LAMOP, Grupo Consolidado UCM 930369), Jean-Philippe GENET (Université Paris 1, LAMOP) Org. : École des hautes études hispaniques et ibériques (Casa de Velázquez, Madrid), Programme Signs and States. Semiotics of the Modern State (European Research Council), Laboratoire de Médiévistique occidentale de Paris (UMR 8589) COLLOQUE INTERNATIONAL Alfonso X, Siete Partidas, BNE, Vitr. 4/6, fol. 106 (inicio de la Segunda Partida) CASA DE VELÁZQUEZ I C/ DE PAUL GUINARD, 3 I CIUDAD UNIVERSITARIA I MADRID I www.casadevelazquez.org CASA DE VELÁZQUEZ MADRID 16.17.18 DE ENERO DE 2014 DE LOS FUEROS A LAS CONSTITUCIONES EN TORNO A LA IDEA CONSTITUCIONAL EN EUROPA (SIGLOS XII-XVII) DES CHARTES AUX CONSTITUTIONS AUTOUR DE L’IDÉE CONSTITUTIONNELLE EN EUROPE (XII e -XVII e SIÈCLE)

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Coord. : François FORONDA (Université Paris 1, LAMOP, Grupo Consolidado UCM 930369), Jean-Philippe GENET (Université Paris 1, LAMOP)Org. : École des hautes études hispaniques et ibériques (Casa de Velázquez, Madrid), Programme Signs and States. Semiotics of the Modern State (European Research Council), Laboratoire de Médiévistique occidentale de Paris (UMR 8589)

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DE LOS FUEROS A LAS CONSTITUCIONESEN TORNO A LA IDEA CONSTITUCIONAL EN EUROPA (SIGLOS XII-XVII)

DES CHARTES AUX CONSTITUTIONSAUTOUR DE L’IDÉE CONSTITUTIONNELLE EN EUROPE (XIIe-XVIIe SIÈCLE)

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José Manuel Nieto Soria (Universidad Complutense de Madrid) La experiencia medieval en la construcción del mito constitucional español

Contrariamente a lo que sucedió en la experiencia francesa, en los orígenes del impulso constitucional español, tal como se expresó en la Cortes de Cádiz de 1812 y en la consiguiente elaboración del texto de la Constitución de Cádiz se reivindicó como fuente de legitimidad histórica la evocación de un medievo caracterizado por el protagonismo de la iniciativa política popular a través de las asambleas políticas y de las Cortes, en sus diversas manifestaciones en los distintos reinos hispánicos. Si este fenómeno de evocación histórica alcanzó una especial exacerbación en un contexto de crisis de legitimidad como aquél en el se desarrolló la elaboración del texto constitucional, lo cierto es que tal reivindicación de un medievo afín a proyectos constitucionalistas dio manifestaciones relevantes en el transcurso de la ilustración española en conexión con la el afán de algunos intelectuales de elaborar una historia ajena al espíritu falsario de los viejos cronicones de tiempos precedentes. Sin embargo, la conexión de esta evocación medieval con las circunstancia políticas en que se produjo, dio como resultado toda una mitificación que respondía a la idea de un medievo de perfiles constitucionales manifiestamente anacrónicos.

A partir de este enfoque de conjunto me propongo abordar brevemente cuatro aspectos directamente relacionados con los objetivos de este coloquio:

1. La reivindicación en la España Ilustrada de ciertos valores políticos atribuidos a la época medieval. 2. La valoración del medievo como fundamento histórico de legitimación del texto constitucional

gaditano. 3. La dimensión mitificadora de un pasado medieval interpretado bajo claves constitucionales

prerrománticas.  Frédéric Boutoulle (Université Bordeaux 3) « Ils lui concédèrent la justice pour le maintien de la paix ». Une image du contrat politique et de l’origine des franchises au sein de la paysannerie gasconne au XIIIe siècle

La communication se propose d’aborder, à travers un exemple particulier, les conditions d’émergence d’un corpus de représentations touchant à l’origine des franchises collectives et à celle du pouvoir royal au sein d’une catégorie de la population habituellement mésestimée par l’histoire culturelle et politique : la paysannerie.

L’expression citée en exergue selon laquelle le roi d’Angleterre tiendrait son autorité de ses sujets du duché de Gascogne est empruntée au procès-verbal d’une enquête conduite en Bordelais dans les années 1230. Elle trahit une conception contractualiste du pouvoir qui n’est pas sans évoquer le pactisme du sud des Pyrénées ou, plus au nord, les thèmes mobilisés pendant les crises politiques de l’Angleterre Plantagenêt avec qui l’ancien duché de Gascogne a partie liée depuis 1154. Elle émane d’un groupe social bien particulier, les élites paysannes de la Gascogne occidentale que les sources qualifient souvent « bons hommes » ou « prud’hommes », qui se voient eux-mêmes comme des « francs » ou des « voisins », mais dont les fonctions traditionnelles de médiation du dominium ducal sont doublement menacées dans la première moitié du XIIIe siècle. D’une part par la multiplication des prévôts royaux. D’autre part par l’attrait qu’exercent les villes sur leurs co-paroissiens, compliquant ce faisant la répartition des hébergements, des quêtes ou du service militaire que les prud’hommes sont censés orchestrer localement.

À ce qui paraît être une crise systémique, les prud’hommes répondent par un panel de stratégies conservatoires assez remarquablement documentées au sein desquelles émerge l’idée que le pouvoir du roi-duc procède de délégations populaires ou que les franchises dont ils se prévalent ont une origine … carolingienne. Plutôt que de tenter d’étayer de telles affirmations faute de faits avérés pour les recouper, nous tenterons de comprendre les conditions de politisation d’une catégorie de la population moins étrangère à la literacy et aux grands modèles culturels qu’on ne le croit habituellement. Björn Weiler (Aberystwyth University) Thinking about power before Magna Carta

The intellectual origins of Magna Carta remain a matter of debate among modern historians. While considerable attention has been paid to the impact of the university of Paris, this paper will propose yet another set of sources: historical writing. My particular focus will be on how writers of history from across the Latin west postulated an ideal past in which the ruled oversaw the government of the ruler. The degree to which this image permeated historical narratives, in turn, considerably broadens our understanding of reform movements that emerged across Europe around the year 1200.

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Vicent Baydal (University of Oxford) « Creating a new Kingdom through the law: The constitutional dispute between the monarch and the Aragonese nobles in the colonization of the Kingdom of Valencia, 1231-1330 »

The decision of King James I of Aragon to convert the Islamic lands that he had conquered in the decades of 1230 and 1240 to a new territorial entity with its own laws, the Kingdom of Valencia, shows a different model of colonization to the rest of the Iberian monarchs, which at the same time integrated the areas that they obtained from the Muslims in their existing Christian kingdoms. The main reason can be found in the will of the King to impose his power over the nobility, especially over the Aragonese, who enjoyed extensive privileges in the Kingdom of Aragon. To avoid this situation, between 1238 and 1261 James I declared the Furs or Charters of Valencia as the main law in the Valencian territory, being an extensive code which, in a context of reception of the Common Law, gave the Crown primacy in several key issues, such as justice, the use of natural resources and the imposition of monopolies and tributes. The royal towns, which were mainly ruled by the Charters of Valencia, supported the decision of the King, but the Aragonese nobles, who had populated their manors through the Fueros or Charters of Aragon, rebelled and began a long and intense conflict that lasted until the Parliament of 1330, in which they agreed to adopt the Valencian charters in exchange for important jurisdictional concessions to them. This dispute will be examined in the present paper, stressing the importance of the analysis of power relationships for the study of the legislative production in the different premodern states. Gisela Naegle (Justus-Liebig-Universität-Gießen) Cités-États ou simples sujets? Villes rébelles et villes fidèles dans la constitution du Saint-Empire (14e-16e siècle)

À la fin du Moyen Âge et au début des temps modernes, la constitution de l’Empire, ainsi que le statut et le rôle de ses villes faisaient déjà l’objet des réflexions des contemporains. Dans ses Six Livres de la République (1576) Jean Bodin fait des commentaires sur le traité de Constance de 1183. Il constate que les villes italiennes et allemandes ne pouvaient être considérées comme « souveraines » puisqu’elles reconnaissaient la juridiction de l’empereur qui donnait « juges et commissaires entre les villes » et parce que la confirmation de leurs privilèges portait « reservation de la foy et hommage, ressort et souveraineté ». Pour des auteurs francophones, l’Empire médiéval était une sorte de monstre qui se dérobait aux catégories habituelles de classification. Était-il un État et avait-il une constitution ? La réponse dépend beaucoup des définitions. Pendant longtemps, le modèle de l’État-Nation ou l’exemple de la France et de l’Angleterre servait comme point de référence. Mais la comparaison avec d’autres régions européennes montre que ce type d’État est plutôt une exception. Par rapport à leur rôle constitutionnel, à bien des égards, et en dépit de différences importantes, les villes de l’Empire médiéval présentent davantage des points communs avec les les Cités-États italiennes ou les villes de certaines régions d’Espagne qu’avec les villes françaises. Sous cet angle, il peut être intéressant de comparer l’évolution respective des associations et ligues et les pratiques de pactisme et des « contrats politiques ». L’Empire médiéval fut une monarchie élective avec des dynasties royales changeantes. Il y eut une nécessité constante de négociations. Ceci vaut particulièrement pour des périodes de crise et de vide de pouvoir, pendant lesquelles, afin d’assurer la paix et leur propre défense, les villes et les princes se mettaient à la place du roi. Ligues urbaines et ligues de paix territoriales avaient une double face. Elles pouvaient servir les intérêts de la royauté, mais également devenir un instrument d’opposition et de résistance contre le roi et les princes. Cependant, dans le cas de conflits internes au sein d’une ville, l’empereur recourait parfois aux bons offices d’autres villes. Quelques ligues avaient établi leur propre système de règlement de conflits. Dans certaines parties du Saint-Empire, comme en Suisse, la coopération des villes donnait lieu à la création de nouvelles formes constitutionnelles. À long terme, cette évolution mena à la genèse d’États indépendants. Dans le cas de la Suisse et de quelques autres régions, le modèle « interactif » de la genèse de l’État permet d’intégrer davantage des impulsions venus « d’en bas » qui provoquaient des réactions « d’en haut » et des influences réciproques. Il prend également en compte la communication entre gouvernants et gouvernés, le jeu de requêtes et d’enquêtes et des éléments de l’offre et de la demande de prestations judiciaires et adminstratives. Pour la comparaison européenne, des règnes comme celui des Staufen ou de l’empereur Charles Quint sont particulièrement intéressants. Au XVIe siècle, ce dernier changea le système constitutionnel de nombreuses villes allemandes. Dans l’Empire, il y eut la repression des guerres de paysans, en Espagne, presqu’en même temps, celle des Comuneros, et au Pays-Bas, des mesures contre des villes rebelles. À la même époque, la fin de l’unité confessionnelle eut des conséquences constitutionnelles importantes. Tout comme les princes, les villes

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impériales pouvaient décider de la religion de leurs habitants – ce qui renforcea la tendance à la hiérarchisation interne. Ainsi, les conseils urbains se transformèrent de plus en plus en « autorités » (Obrigkeiten). Sverre Bagge (Universitetet i Bergen) The Scandinavian Election Charters in the Later Middle Ages  

No formal constitution was established in any Scandinavian country in the Middle Ages, but there are some references to government and the division of power in the laws. However, the most important evidence for constitutional ideas is the election charters. The first one was issued in Denmark in 1282 as the result of a conflict between the monarchy and the aristocracy. From the early fourteenth century onwards, it became normal practice for the king to issue an election charter on his accession to the throne. This took place as the result of negotiations with an aristocratic assembly or the council of the realm and was a condition for his acceptance as king. The practice eventually spread to the two other countries and assumed particular importance during the Scandinavian unions in the fifteenth and early sixteenth century. The charters often contain very specific condition, even in some cases favouring individuals, but they also have a number of general conditions which were normally repeated from charter to charter. Taken together, they thus give a picture of late-medieval constitutional ideas and the relationship between monarchy and aristocracy, which will be discussed in greater detail in the paper. Pierre Monnet (Institut Français d’Histoire en Allemagne) La Bulle d'or de 1356, une 'constitution' pour l'Empire ?

Dans une réflexion de large portée géographique et chronologique consacrée à l’idée constitutionnelle en Europe, la Bulle d’or proclamée en 1356 par le roi des Romains et empereur, roi de Bohême, Charles IV de Luxembourg, occupe une place quasiment obligée.

N’est-elle pas la disposition successorale écrite qui connaît la plus grande longévité en Europe puisqu’elle cesse d’agir en même temps que disparaît en 1806 l’ordre impérial ancien qu’elle avait contribué à „constituer“ ? N’est-elle pas appelée dès sa promulgation constitutum, lex, declaratio, liber, edictum, ordinatio, lex imperialis seu statutum et en allemand kaiserliches rechtsbuch ? La dénomination qui lie la Bulle au terme de constitution s’impose ensuite au tout début du XVe siècle, dans un contexte particulier, celui de la déposition au profit de Robert de Palatinat du roi Wenceslas, le propre fils de Charles IV (1361-1419), élu roi de Bohême en 1363, élu roi des Romains en 1376, renié par quatre électeurs déclarant ce dernier « inapte, faible et incapable », au mépris justement des dispositions de la Bulle dont l’objectif premier était de stabiliser la succession royale par l’élection et d’empêcher que ne se rouvre une phase de contre-élections ou d’anti-élections telle que l’Empire en avait connu entre 1250 et 1346. Peu avant ou peu après ladite déposition, les avis divergent entre les spécialistes sur ce point et la datation du manuscrit ne permet pas de trancher, Wenceslas avait commandé une copie richement enluminée de la Bulle qui commence par un prologue dont les premiers mots sont ajoutés au texte initial et déclare : « Incipit aurea bulla imperialium constitutionum », « Ici commence la bulle d’Or des constitutions impériales ». Un bon siècle plus tard, Charles Quint parle en 1519 du « wichtigstes reichsgesetz », « de la loi d’Empire la plus importante », lui qui, en 1530, pour fixer et stabiliser le processus et les réunions des diètes en plein écartèlement confessionnel de l’Empire, avait formé le projet d’une « Bulla Aurea Caroli Quinti » sur le modèle de celle de 1356.

La messe semble donc être dite : aux yeux des contemporains et en tout cas dès le début du XVe siècle, la Bulle paraît avoir été perçue comme un texte « constitutionnel », et apte à recueillir ce surcroît de légitimité qui permet, en son nom, de régler et de normer le pouvoir royal et de s’y référer pour tenter de réformer l’Empire. Et pourtant, regardons bien son contexte, sa forme et son contenu.

1. Le contexte. Le choix de la date de 1356 pour convoquer une grande diète de réforme et de paix s’inscrit dans un

contexte particulier, en Europe, dans l’Empire mais aussi pendant le règne de Charles IV. Pour Charles IV, on peut parler d’une décennie décisive entre 1346 et 1356, dont la Bulle semble

constituer le point d’orgue. En 1346 survient la mort de son père Jean l’Aveugle sur le champ de bataille de Crécy, mais c’est aussi l’année de son élection comme roi des Romains, contre Louis IV de Bavière. Charles est ensuite élu roi de Bohême, en 1347, ce qui pose naturellement la question de l’articulation complexe entre la Bohême et la royauté de l’Empire non sur le mode d’une double monarchie mais d’un roi portant deux couronnes dont la seconde est elle-même constituée en théorie des tria regna de Germanie, d’Italie et de Bourgogne. De là date dans un premier temps un vaste programme politique et idéologique qui s’appuie sur trois colonnes. Tout d’abord une ville, sa capitale, Prague qu’il dote d’une

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université et de nombreux monuments élevés à sa gloire. Ensuite la conquête d’une légitimité que lui confère la répétition de l’élection et du couronnement pour laver la mauvaise procédure de 1346 qui l’avait vu être élu et couronné au mauvais endroit, à Bonn : le 26 mai 1349 il est enfin reconnu solennellement comme roi des Romains, et est réélu dans les formes à Francfort, au bon endroit, le 17 juin 1349. Le 25 juillet 1349 enfin il est couronné à Aix. En dernier lieu, ce programme s’appuie sur une œuvre écrite pensée et conçue selon un vaste plan qu’il tentera de suivre toute sa vie, mêlant écrits théoriques, miroir royal, homélies, conseils de gouvernement et dont la Vita « autobiographique » constitue le premier élément, vraisemblablement rédigée en 1350, au moment de la réception des insignes impériaux à Prague le 21 mars. La même année, à Bautzen, un compromis est trouvé avec la maison des Wittelsbach et vient apaiser le conflit ouvert par l’élection de Charles en 1346. En 1353, il marie l’une de ses filles au duc d’Autriche et épouse lui-même une princesse de Schweidnitz pour renforcer sa position dans la lutte d’influence qu’il mène en Pologne et en Hongrie. Fort de cette légitimité, il peut aborder l’ultime étape du couronnement impérial, qui intervient en 1355 à Rome après que le roi a pris soin de ceindre la couronne des Lombards, et cela l’année où il promulgue pour son royaume de Bohême une vaste réforme contenue dans la Majestas Carolina : une autre « constitution » qui cependant échoue, nous invitant d’ailleurs à prendre en compte dans les travaux de cette rencontre les échecs et loupés constitutionnels. Celle-ci prévoyait en 121 articles l’adoption d’un droit territorial unique, l’instauration d’un patrimoine royal inaliénable, l’interdiction des ligues et le renforcement du pouvoir royal. La Carolina fut certes repoussée par les états et la noblesse de son royaume, mais elle signale résolument une volonté, une politique, une méthode aussi car Charles IV sait qu’il lui faudra désormais négocier. Il a par ailleurs personnellement contribué à sa rédaction, comme il le fit pour sa Vita, et comme il le fit pour la « Bulle » qui, dix ans après 1346, vient en quelque sorte ancrer le programme mis en place : le renforcement de la royauté en Bohême et dans l’Empire sur la base d’une politique dynastique européenne des Luxembourg. En théorie, en effet, tout empereur peut songer en droit à l’élection d’un de ses fils comme roi des Romains de son vivant. Cette politique européenne est commandée par le contexte tout aussi européen qui prévaut en 1356, entièrement dominé par le tournant de la bataille de Poitiers et la capture du roi Jean par les Anglais, un événement qui inquiète autant l’empereur que le pape. C’est en empereur puissant et législateur, disposant de plusieurs couronnes, menant une vaste politique diplomatique et matrimoniale à l’échelle de tout l’Occident, face à un pape avignonnais et à un roi français emprisonné que Charles IV agit par l’acte de 1356.

2. La forme Cet acte est à proprement parler un diplôme royal et impérial émis en chancellerie et bullé, pour

authentification et manifestation de majesté, d’un sceau d’or. Un diplôme donc, mais qui toutefois reçoit une dénomination singulière et distinctive d’autres textes de cette nature puisque la Bulle scellée, c’est-à-dire l’acte et l’objet juridiques d’authentification, finit par désigner le contenu en quelque sorte pars pro toto, et qui plus une pars extérieure au contenu même du diplôme. Cette opération, qui mérite toute l’attention car nous sommes là au cœur d’un processus d’institutionnalisation et de « constitutionnalisation » cruciaux pour le thème de notre rencontre, semble s’opérer assez vite. En 1356 même, Charles IV qui avait promulgué et scellé le diplôme un 25 décembre (la constitutionalité d’un acte tient aussi au calendrier de son adoption, hier comme aujourd’hui) à Metz, ville d’Empire, se contente à l’issue de la diète qui en avait arrêté les derniers articles d’écrire sobrement : « En ce lieu nous avons proclamé publiquement plusieurs dispositions de loi (Gesetzerlasse) et après avoir ainsi réglé ce que commandait la pressante nécessité des circonstances, les princes-électeurs s’en retournèrent chez eux avec notre permission ». Dispositions de loi donc. Mais dès 1366, le commanditaire d’une copie de la Bulle de 1356 pour sa ville (une parmi les 7 copies officielles et les 70 autres copies du texte original latin réalisées entre 1356 et l’impression du texte sous forme d’incunable à partir de 1474), le tout nouvel écoutête impérial de Francfort, Siegfried zum Paradies, parle dans une lettre adressée au Conseil urbain du « buch mit der guldinen bullen di he irwarb der stad von unserm herren der keiser », du « Livre contenant la Bulle d’Or acquis par la ville de notre seigneur l’empereur ». Il semble donc qu’il se soit quand même passé quelque chose dans l’esprit des contemporains pour retenir, parmi d’autres dispositions, diplômes, privilèges, confirmations etc. adoptées durant le long règne de Charles IV (1346-1378), ce texte parmi d’autres.

3. Le contenu Et c’est là le paradoxe, car ce que nous appellerons maintenant la Bulle est inachevée : les 31 articles

s’arrêtent brutalement, en attente de compléments sur la „constitution“ même de l’Empire, qui ne viendront jamais. Les 22 rois des Romains et empereurs qui succèderont à Charles IV jusqu’en 1806 ne l’ont jamais réécrite, complétée ou remplacée.

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En second lieu, ce que règle avant tout la Bulle, ce n’est pas le fonctionnement organique ou étatique de l’Empire : il n’y est pas question d’impôt, ni de Parlement, ni d’armée, ni de capitale, ni de gouvernement, ni d’État quelconque.

Rappelons en quelques mots le contenu de ces 31 articles. Le texte commence par un prologue dont la phrase centrale, reprise de Matthieu, 12 et Luc, 11 stipule : « Omne regnum in se divisum desolabitur », « Tout royaume divisé en lui-même est promis à la désolation ». Il conviendra pour le propos du colloque de regarder en effet les premiers mots de toute „Constitution“ et les patronages qu’ils convoquent et commandent. Charles IV y affirme vouloir par son texte « Favoriser l’union entre les électeurs, aboutir à une élection unanime et fermer la porte à la détestable division ». Les articles proprement dits règlent le sauf-conduit des princes-électeurs traversant l’Empire pour se rendre à Francfort où ils ont été appelés à se rendre par lettres adressées par l’archevêque de Mayence dans un délai de trois mois précédent la rencontre afin d’y désigner un « regem Romanorum in Caesarem promovendum », un « roi des Romains appelé à devenir empereur ». Le prince-électeur ne doit pas apparaître à Francfort avec une troupe dépassant 200 cavaliers et, en cas d’empêchement, doit se faire représenter par un ambassadeur muni d’une procuration de plein pouvoir pour voter à sa place. Réunis dans l’église Saint-Barthélemy, les princes-électeurs doivent entendre une messe et jurer devant l’archevêque de Mayence qui conduit la cérémonie de désigner le meilleur candidat au trône. Ils s’enferment ensuite dans la chapelle de l’église et si aucun candidat n’est désigné au bout de 30 jours, ils sont réduits au pain et l’eau comme pour l’élection pontificale. L’élection se fait à une voix de majorité, chaque électeur pouvant également se présenter et voter pour lui-même, et l’élu est proclamé ensuite comme ayant été désigné à l’unanimité. Notons bien que l’élection se fait à la majorité des sept voix obligatoirement exprimées et non pas des électeurs présents. Ce dernier doit aussitôt confirmer tous les privilèges, droits, libertés, coutumes et dignités dont dispose chaque prince-électeur, ces électeurs étant désignés comme « les sept piliers » et les « sept branches du candélabre de l’Empire ». Suivent des dispositions très strictes de préséance entre les électeurs lors des diètes, banquets, processions, offices et cours : il en résulte que l’archevêque de Mayence, en tant qu’archichancelier de l’Empire en Germanie, reçoit presque toujours la préséance devant les autres électeurs ecclésiastiques de Trèves et de Cologne, et le roi de Bohême « cum sit princeps coronatus et unctus », „parce qu’il est prince couronné et oint“ devant les autres électeurs laïcs le comte palatin, le duc de Saxe et le margrave de Brandebourg.

Ces princes électeurs laïcs reçoivent par la Bulle l’hérédité de la voix et des privilèges qui y sont attachés, au profit de leur premier-né, à condition que celui-ci n’embrasse pas la carrière ecclésiastique, ou bien du premier-né de ce premier-né, sous réserve d’une régence exercée par le frère le plus âgé de l’électeur jusqu’à la 18ème année de l’héritier. Il ne peut y avoir déshérence de la voix et si une branche dynastique remplace celle qui avait la voix, c’est à cette dernière qu’échoie la voix. Autrement dit le texte de 1356 se contente de dire que dans l’un des quatre principautés laïques, la voix appartient à la famille princière alors régnante, laissant la principauté et des seigneurs régler leur différend entre eux pour attribuer la Kur. La Bulle réaffirme l’inaliénabilité de la voix et de la principauté à laquelle elle est attachée, plaçant ainsi les électeurs sur un pied d’égalité et confirmant leur formation en un collège. L’ensemble des princes-électeurs jouissent des droits régaliens sur les mines d’or et d’argent et de tout autre métal, sur la frappe des monnaies d’or et d’argent, et bénéficient des privilèges judiciaires de non appellando et de non evocando dans leurs principautés. Ces princes-électeurs doivent tenir une diète annuelle dans un délai de quatre semaines après Pâques dans une ville de leur choix afin d’y discuter les affaires de leurs principautés et de l’Empire. Le texte par ailleurs interdit la pratique des Pfahlbüger qui permet aux villes d’accueillir comme bourgeois des sujets provenant de territoires étrangers.

Les deux derniers articles réaffirment que l’élection du « regis Romanorum futuri imperatoris » doit se produire à Francfort, le couronnement être accompli à Aix-la-Chapelle et la première diète royale réunie à Nuremberg. Et que, compte tenu de la diversité des lois, des coutumes, des mœurs, des modes de vie et des langues présents parmi les différentes nations de l’Empire, les fils des princes-électeurs laïcs, à côté de leur langue maternelle allemande, doivent être instruits à compter de leur septième année dans les langues latine, italienne et slave « eo quod ille lingue ut plurimum ad usum et necessitatem sacri Romani imperii frequentari sint solite et in hiis plus ardua ipsius imperii negocia ventilentur ».

Ni hérédité ni approbation pontificale : une élection « allemande ». L’essentiel à retenir dans ce texte qui combine l’électif et le dynastique tient dans la reconnaissance et la distinction honorifique d’un groupe de sept grands électeurs, érigés en détenteurs de la plupart des droits et des attributs de la souveraineté dans leurs propres principautés, dont le vote majoritaire suffit à faire le roi appelé à devenir empereur sans approbation pontificale.

Quoiqu’il en, soit, et même identifié à un lieu, la polysémie du texte coïncide avec une pluralité des électeurs, des territoires et des lieux centraux devenue réalité dans l’Empire du milieu du XIVe siècle. Elle

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inscrit le pouvoir de cette monarchie élective dans une histoire européenne de lieux encore nomades et changeants du pouvoir central.

Un roi élu par sept électeurs, voilà l’incontournable réalité et en dernier lieu l’essentielle définition « constitutionnelle » de l’Empire lui-même après 1356. À partir de 1356, toute une partie de l’histoire de l’Empire (et donc de l’Allemagne) dépend de quatre facteurs « remués » par le texte : le type de relation du roi et empereur régnant avec les électeurs ; l’attitude des électeurs envers le roi/empereur ; l’entente des électeurs entre eux ; l’entente des électeurs avec les autres princes et seigneurs de l’Empire.

Malgré ces réels acquis, malgré la longévité de son application, cette Bulle a longtemps été considérée pour ses paradoxes et ses manques, interprétés par les historiens, à commencer par les historiens allemands eux-mêmes, comme le signe et la cause de l’inachèvement, de l’incomplétude du Saint-Empire dont au fond la faiblesse et l’archaïque complexité seraient en quelque sorte inscrites dans la Bulle elle-même, jugée responsable, parmi d’autres facteurs du „retard“ étatique et national allemand, de son « Sonderweg », de sa « voie particulière historique. C’est seulement assez récemment qu’une entreprise, non pas de réhabilitation, mais de relecture est à l’œuvre : elle repose sur le desserrement conceptuel entre État et nation dans la longue durée européenne, elle s’appuie sur la prise en compte de l’exceptionalité du cas français (dont la monarchie ne peut pas non plus produire des tomes entiers de « constitution »), elle considère la pluralité des voies d’entrée dans la modernité et l’étaticité en Europe, elle compare avec les autres expériences monarchiques fondées elles aussi sur l’élection tant en Scandinavie qu’en Europe centrale et orientale. L’originalité de la Bulle, son sens du compromis et de l’efficacité, sa longévité permettent à cette aune de réintroduire l’Empire dans une longue histoire européenne de la construction de l’État moderne dont il a longtemps été exclu, comme le furent en règle générale les monarchies du Nord et de l’Est de l’Europe au profit d’une concentration du regard sur les cas français, anglais et espagnols auxquels on a ajouté les cités-États d’Italie. Ce rééquilibrage doit se faire au prix d’une meilleure prise en compte du consensus, de la norme, du rituel et de la négociation dans le contrat politique et dans la définition d’une société politique fondée sur l’échange entre gouvernants et gouvernés, dans le droit fil de l’argumentaire du colloque nous invitant à envisager la « constitution » comme la traduction de l’« état d’un échange politique ». Autrement dit, ce texte de 1356 appartient à plusieurs histoires, celle de l’Allemagne, celle de la Bohême, mais plus généralement celle de l’Europe où ont cohabité des modèles de construction territoriale et de légitimation politique aussi variés qu’une élection royale puis impériale ou le sacre d’un roi thaumaturge de père en fils pour prendre deux cas opposés. Parallèlement, la Bulle appartient aussi à l’histoire européenne des théories politiques et juridiques qui ont présidé à sa naissance et à sa rédaction. Les dispositions de la Bulle, sa réception et sa diffusion montrent combien l’élection est au cœur de l’institutionnalité et du pouvoir en Occident, d’autant qu’elle se trouve ici combinée avec un titre impérial qui lui-même ne se confond pas avec le titre royal. Sa complexité et sa longévité permettent au texte d’être élevé au rang de Meistererzählung. Pas plus mais aussi pas moins.  Michel Hébert (Université du Québec à Montréal) Les capitulations provençales de Marie de Blois (1385-1390) : une démarche constitutionnelle ?

D’une famille angevine à l’autre, entre la mort de Jeanne Ière en 1382 et la consolidation du pouvoir de Louis II grâce au patient travail de sa mère, Marie de Blois, de 1385 à 1390, la Provence vit une situation de rupture qui conduit à une véritable guerre civile opposant partisans et adversaires de la « seconde maison d’Anjou ». Si l’aspect militaire de cet épisode est désormais assez bien connu, de même que la figure de Marie de Blois, on n’a pas suffisamment attiré l’attention sur le processus des négociations qui conduisent au rallliement final de la Provence et surtout de ses villes autour de cette seconde maison d’Anjou. Or ce processus, le Journal de Jean le Fèvre, chancelier de la reine, nous le montre bien, passe par la négociation et la diplomatie. La présente étude s’intéressera à une source presque entièrement négligée, mais riche d’enseignements quant au processus diplomatique, à savoir le texte des chartes de confirmation ou d’octroi de franchises que la reine concède aux plus importantes villes des comtés de Provence et de Forcalquier entre 1385 et 1390 en échange de leur fidélité ou, pour les plus récalcitrantes, de leur soumission.

On s’intéressera d’abord aux formes rédactionnelles et à la procédure de confirmation et de concession de privilèges qui caractérise la grande œuvre de pacification de la Provence par la reine et régente Marie de Blois, avant de tenter une brève analyse, dans un second temps, des grands champs d’intérêt de cette législation abondante et variée (où alternent des dispositions communes à plusieurs villes et des dispositions d’intérêt purement local), susceptible de nourrir une réflexion sur la portée constitutionnelle plus générale que l’on peut vouloir reconnaître à cet ensemble de textes aussi riche que méconnu.

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Fabrizio Titone (Unversidad del País Vasco) Sistema normativo e partecipazione politica. I Libr i delle comunità siciliane nel tardo Medioevo

Con riferimento alle universitates siciliane tra i primi del Trecento e metà del Cinquecento, analizzo le modalità di consolidamento del sistema normativo locale, il grado di partecipazione locale nell’attività politica, il ruolo delle assemblee cittadine e del Parlamento.

Considero in particolare due organi di governo, il Parlamento ed il consiglio cittadino, e un esito della contrattazione, i Libri privilegiorum, che rappresentano una delle testimonianze più rilevanti delle negoziazioni corte regia-universitates. I Libri costituiscono le memorie locali e consentono di guardare ai livelli di confronto alla base prima della discussione sull’obiettivo normativo da perseguire quindi della strategia di interazione da realizzare con il re. Un processo che aveva frequentemente un accoglimento regio della richiesta avanzata dalla comunità ma una sua graduale applicazione. Un procedimento che implicava numerosi passaggi, tra cui un dibattito interno e l’assenza, nel confronto Corte regia-comunità, di un’equazione petizione-concessione della norma. Dall’analisi del consolidamento del sistema di diritti e di garanzie delle universitates emerge una forte fluidità nel confronto comunità-re e/o suoi rappresentanti, secondo una tipologia di contrattazione che non coincide né con inefficacia né con esito costituzionalmente debole del confronto ma è uno sviluppo coerente di una relazione fra re e paese di tipo non verticistico.

I Libri costituiscono una traccia di rilievo per guardare ai processi di costituzionalizzazione, per considerare gli equilibri politici alla base del loro sviluppo e le basi materiali che ne danno una rappresentazione. Emerge una peculiarità: la maggioranza della documentazione raccolta nasce in un contesto di emergenza, di contrapposizioni interne, di tensioni con la corte regia.  Jonas Braekevelt (Universiteit Gent) Constitutions de l'État, constitutions des États: les interactions entre restrictions princières et privilèges des gouvernés aux Pays-Bas Bourguignons.

In the ample Belgian and Dutch historiography treating the government of the different principalities that, during the later fifteenth century, started to blend into the nascent Burgundian-Habsburg State, considerable attention has been devoted to the 'constitutional' aspects of this government. By tracing back expressions of the notion of popular sovereignty to twelfth-century Flemish cities, or by highlighting the almost continuous existence of general privileges and princely pledges—the so-called Joyous Entries—within the duchy of Brabant from the middle of the fourteenth century onwards, historians tried to identify a tradition of the 'political contract' between the governors and governed of the medieval Low Countries. This tradition was seen to be consecrated in 1477, when Mary of Burgundy, sole heiress to duke Charles the Bold, was forced to issue a General Privilege, granting fundamental freedoms and rights to the inhabitants of the entire Burgundian Low Countries.

Nevertheless, I intend to demonstrate that the General Privilege of 1477 and its regional equivalents (granted to the estates of Brabant, Flanders, Holland etc.) were to a large extent the result not only of a tradition of political participation by the governed, but of the Burgundian State formation process and the development of central institutions and unified legislation as well. Princely restrictions and institutional reforms already contained or alluded to several clauses that eventually resurfaced in the freedoms granted to her subjects by Mary of Burgundy, while the popular revolts and complaints of 1477 echoed earlier discussions within the ducal administration on the ordinary or absolute powers of the prince.  Christopher Fletcher  (Laboratoire  de  Médiévistique  Occidentale  de  Paris) Are there ‘constitutional’ ideas in the rolls of the English Parliament, 1340-1422?

Historians of late medieval England have since the seventeenth century taken the idea of the ‘constitution’ in a very different way from that implicit in the theme of this conference – a movement ‘from charters to constitutions’. For reasons discussed by other contributors to this conference, the concept of the ‘ancient constitution’ was already in the seventeenth century an inseparable part of every politically active Englishman’s conception of the ideal rule of the kingdom he lived in, whether he believed it dependent on royal power or the direct emanation of the organically evolved customs of the English people. In the debates of the seventeenth century, to consider the ‘constitution’ as deriving from a written text would be to go further in the acceptance of royal prerogative power than most of its more

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ardent defenders. Even in early modern England a vision of the ‘constitution’ pertained which we would today think of as ‘anthropological’ – an observation of the mores and practices of a given people, more than its codification in written norms. This vision only hardened with the challenge of the American and French revolutions. Most nineteenth-century Englishmen, and perhaps the late medieval political historian above all, took the ‘constitution’ as a set of ‘unwritten’ practices as part of its very nature. The typical Victorian English gentleman knew perfectly well that the ‘British constitution’ had somehow existed since time immemorial, even though it was, somewhat mystically, nowhere written down. Certainly there were written evidence of its contents, like Magna Carta, but these were finally only the emanations of the ancient practices of the English people, which pre-existed them.

Ideological considerations aside, it is thus more readily explicable that a number of recent late medieval political historians have returned to the idea of the ‘constitution’ even after the radical debunking of the particular idea of the late medieval ‘constitution’ which pertained in the late nineteenth century. For the school of historians around Christine Carpenter (Edward Powell, John Watts, Helen Castor...) the ‘constitution’ has all the power of the anthropological concept of ‘culture’, or the concept of ‘mentalité’ as developed by the Annales school, all whilst being more directly related to practice and the history of institutions. For these ‘new constitutional historians’ the ‘constitution’ is not a written text (like the post-revolutionary American or French constitutions) even though particular documents (Magna Carta...) might be important in understanding it. It is an ensemble of assumptions, norms and practices, the ‘rules’ of the political ‘game’, a synonym for ‘political culture’.

Nonetheless, I would suggest that whereas the work of these ‘new constitutional historians’ has done much to renew late medieval political history, this is less a result of their interest in the ‘constitution’ than in their more general commitment to the importance of understanding ‘political culture’, all whilst relating this closely to political practice. In the English tradition, the concept of ‘constitution’ is a dangerous one, carrying as it does the implication of the existence of an ‘unwritten constitution’ which is somehow fixed, as if, indeed, it were written: as if all historical actors knew its text, yet we have simply lost the original. ‘Political culture’ might seem a more amorphous expression to use, but it also carries with it the possibility of multiplicity and internal contradiction. In this paper, through an examination of the Rolls of Parliament, a source which one might expect to present an unusually unified vision of late medieval political culture, I will suggest that the concept of a (implicitly single) ‘constitution’ is misleading for later medieval England. There were a multiplicity of different political ‘games’ each with their own ‘rules’, which varied over time, in accordance with who was speaking to whom, and to what end. These were not only different from one another, but also cannot be deduced from the overarching of the ‘rules of the game’ as they have been identified by recent ‘new constitutional’ historians. Carlos Laliena Corbera (Universidad de Zaragoza) Distancia y constitucionalidad. La evolución política del reino de Aragón en la década de 1440-1450

A mediados de la década de 1440 hacía más de diez años que Alfonso V se había instalado en Italia y comenzaba a ser evidente que tenía muy poco interés en volver a pisar los territorios peninsulares de la Corona. Las interminables discusiones con las asambleas parlamentarias de los distintos estados, que bloqueaban sus iniciativas y las poco excitantes perspectivas de una política exterior dedicada a intervenir en Castilla no eran comparables con las posibilidades que abría la conquista definitiva de Nápoles. En este contexto, lo extraordinario –la ausencia del rey– se había convertido en Aragón en lo ordinario. En este punto se suscitan dos problemas fundamentales: ¿cómo se gobernaba un reino sin la presencia del rey? y, en segundo lugar, ¿cómo se construía la legitimidad de un gobierno de esta naturaleza?

Entre los años 1441 y 1454, el gobierno del reino fue asumido de facto por las Cortes, constituidas en un parlamento que actuaba casi ininterrumpidamente. Los brazos (estados o estamentos) estuvieron reunidos oficialmente durante ocho años, pero en los intervalos se formaron comisiones de diputados que ejercieron el control administrativo y político del reino. Por otra parte, las Cortes marginaron cuanto pudieron al Lugarteniente del rey, su hermano Juan de Navarra, al que atribuían los males derivados de su agresiva política en Castilla. Es difícil concebir un modelo de gobierno menos monárquico que este: las Cortes disponían en la práctica de plenas facultades para controlar el espacio político aragonés, para utilizar medios de coerción a gran escala, para acumular recursos económicos a través de la deuda pública y para desarrollar una administración propia que en parte suplía a la real y que, en todo caso, respondía a intereses diferentes de los del monarca (o, al menos, de los intereses dinásticos defendidos por Juan de Navarra).

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Esta experiencia partía de una trayectoria anterior bastante prolongada. En efecto, desde la segunda mitad del siglo XIV, las Cortes habían conseguido imponer al rey la creación de comisiones de diputados que recaudaban los impuestos (especialmente, los indirectos sobre el comercio) y administraban los subsidios concedidos al monarca. La continuidad de estas comisiones había conducido a la formación de un organismo político, regulado entre 1427 y 1436, la Diputación del General del reino de Aragón, que dedicaba preferentemente su atención al control del gasto público y a la emisión de deuda, pero que cada vez tenía mayor presencia en la esfera política. Como es sabido, los reyes habían liquidado prácticamente su patrimonio como consecuencia de las guerras del Trescientos y para la financiación de los aparatos estatales y, en particular, de las empresas militares dependían de las concesiones efectuadas por las Cortes y gestionadas por la Diputación aragonesa. Lo mismo sucedía en los demás estados de la Corona, lo que obligaba a los soberanos a negociaciones extenuantes para conseguir fondos.

La escalada bélica que se inicia hacia 1447 coloca al reino al borde del colapso económico y agota sus recursos, pero también sitúa a los grandes oficiales de la corona en un segundo plano y exige de las Cortes una regulación definitiva del sistema de elección de los diputados y de sus funciones. Las ordenanzas extremadamente complejas que se dictaron en las Cortes de Zaragoza en 1448 señalaron al detalle las competencias de los diputados, que contaban con una sede fija (las Casas de la Diputación), un archivo y una minuciosa organización de los ingresos y pagos, es decir, una hacienda dotada de un presupuesto. A pesar de que el estado de guerra impidió hasta 1454 el funcionamiento de esta nueva administración, no cabe duda de que estas ordenanzas señalaban un preciso itinerario para la constitución de un aparato de poder dotado de amplias prerrogativas y no solo paralelo sino alternativo al poder real.

Esta evolución constitucional que se beneficiaba de la lejanía del rey (unas Cortes que reivindicaban su superioridad y su autoridad en el reino sobre cualquier otro núcleo de poder, una Diputación que institucionalizaba el ejercicio de esa autoridad como delegación de las Cortes, una regulación jurídica que daba a la Diputación una sólida consistencia legal), exigió el desarrollo de una definición bastante precisa de una de una legitimidad específica. Los discursos ideológicos que cimentaron el proceso de legitimación de este gobierno de elites comprenden aspectos clásicos con una formulación propia: la defensa de la paz y la integridad del reino, la exigencia de justicia entendida en un sentido muy extenso, la exaltación del orgullo por la posesión de las ‘libertades’ de los aragoneses, que se manifestaban en sus leyes, cuya tutela estaba encomendada a las Cortes y la Diputación. Junto a ellos, vale la pena subrayar la importancia de los temas que resonaban paralelos: la ‘innata fidelidad y amor’ de los aragoneses a su rey, heredada de sus antepasados, y, finalmente, la obligación de conservar el honor del reino, intrínsecamente unido al del propio rey. Frédéric F. Martin (Université de Nantes) Légitimité, légalité et civilitédans l’ordre juridique royal. Conflit, procédure et consensus aux origines du constitutionnalisme (France, XVe-XVIe siècles)

À n’en pas douter, le pouvoir royal n’est pas conçu au Moyen Âge comme illimité ou absolu. Nonobstant les efforts menés par certains juristes pour libérer le roi de ses entraves, celui-ci demeure encadré ou, plus précisément, ordonné. Il ne se place pas au-dessus ou en-dehors du droit mais ses décisions doivent s’inscrire dans une civilité qui n’est pas ou pas encore subjuguée – en principe – par la politique. À cet égard, les limites du pouvoir, telles qu’elles se dessinent à la toute fin du Moyen Âge, sont moins normatives que procédurales. Elles reposent sur un consensus parfois rompu et qu’il convient de rétablir. À partir des objections théoriques comme pratiques à la toute puissance du souverain, cette intervention s’efforcera de montrer les transformations qui s’opèrent en la matière aux XVe et XVIe siècles. La réflexion sur le statut et les limites juridiques du pouvoir royal va en effet de pair avec le double mouvement d’affirmation de celui-ci et de renforcement de la positivité du droit. Juristes et politiques prennent alors la mesure d’une double impossibilité : celle d’enfermer strictement le souverain dans le droit comme de l’en libérer totalement. Aux origines du constitutionnalisme, le masque d’une autonomie apparente est alors apposé sur une hétéronomie persistante mais déplacée. Jérémie Ferrer-Bartomeu (École nationale des chartes, Université Paris-Sorbonne) Le pouvoir des « bureaux ». Secrétariat d’État et genèse de la monarchie administrative, (royaume de France, vers 1560-vers 1595)

1. Problèmes et perspectives : Une monarchie sacrale en quête de réformation politique L’inflation documentaire des papiers d’État dans la seconde moitié du XVIe siècle en France est un des

témoignages les plus remarquables du travail de la monarchie sur elle-même. Les papiers d’État, leur

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raison graphique, leur inscription dans les lieux de pouvoir que sont les « bureaux » de la « monarchie administrative » mais également les horizons d’attente des agents du prince que nous repérons dans les plis des sources sont autant de catégories d’analyse qui permettent de répondre aux problématiques de l’expertise, de la circulation de l’information et des mécanismes de la prise de décision au cœur de l’État royal dans un contexte de troubles politico-religieux d’une ampleur inédite. Dès lors, comment restituer la spécificité socio-politique de l’État royal de la seconde moitié du XVIe siècle dans un contexte historiographique profondément renouvelé ? Quelles innovations institutionnelles viennent enrichir notre compréhension des reconfigurations et des réformations de l’administration royale lors des guerres de religion ? Quelles sont les homologies entre l’évolution des savoirs juridiques, des compétences techniques et des croyances religieuses spécifiques des acteurs de la « monarchie administrative » et l’efficacité politique grandissante du gouvernement royal de la fin du XVIe siècle au début du XVIIe siècle ? L’historiographie récente a montré comment la manifestation de la royauté sacrale du dernier Valois passait par une réformation angoissée des mœurs et la saturation de l’espace public en constitution par une piété démonstrative, portée par des institutions et des pratiques inédites. Roi de paix et roi-Christ, un des souverains qui retient particulièrement notre attention, Henri III de France, est alors animé par une « quête sacrificielle » destinée à attirer sur son royaume la bénédiction divine. Nous voulons montrer comment l’inflation documentaire et la mise en ordre des papiers d’État sont l’envers nécessaire et laborieux du spectacle connu de l’exaltation de la majesté sacrale par le dernier Valois.

Notre hypothèse de travail principale est la suivante : la croissance des troubles, des pratiques et des oppositions factieuses de toute nature va rendre nécessaire, à partir de la fin des années 1560, la monstration et la tentative de saturation de l’espace politique par les papiers d’État. En effet, cette documentation abondante semble être à la fois la trace d’un travail patient de la monarchie pour réprimer la sédition et contenir les troubles mais aussi la formulation administrative d’un idéal politico-religieux. Cet idéal de concorde et d’harmonie s’incarne dans la régulation juste et efficace des conflits par le gouvernement du prince. Face aux contestations politico-religieuses, inédites par leur radicalité, le gouvernement royal cherche également à disqualifier les oppositions et à maintenir en fait sa prééminence de droit dans l’ordre politique. Les conseillers du prince, au soutien de ce programme ambitieux, doivent ainsi innover et informer leurs savoirs et leurs pratiques de catégories nouvelles dans l’action politique.

2. Les secrétaires d’État et la formulation de la volonté politique Pour réaliser le programme qui impose la centralité de l’Etat à l’ensemble des acteurs politiques au

cours des guerres de religion en France, des agents - les secrétaires d’État - dont la position n’est pas encore totalement assurée au début des guerres, vont occuper rapidement une place déterminante et lier leur destin et leurs stratégies de mobilité sociale au destin de la monarchie valoisienne. Ces agents vont, tout au long des guerres, créer des procédures de décision, inventer une langue administrative et tenir sur leur propre groupe, leur travail et leurs stratégies sociales un discours qui tend à se confondre avec le récit d’État et de bonne police. L’inflation de leur position fonctionnelle dans les rouages de l’État royal nous paraît être sanctionnée et reconnue au moment de la première résolution des conflits socio-politiques et religieux avec le changement dynastique et l’avènement d’Henri IV. L’autorité du premier Bourbon prend appui sur de nouvelles catégories socio-politiques, issues des rouages neufs de la «monarchie administrative». Ses succès permettent au groupe des « lettrés d’État » d’assurer ses positions plus fermement au cœur du gouvernement monarchique et de sédimentent ses pratiques administratives, préfigurant la monarchie administrative du XVIIe siècle.

Pour réaliser l’étude du groupe spécifique des secrétaires d’État, nous nous inscrivons dans la récente tendance historiographique qui tente d’enrichir les travaux pionniers d’Hélène Michaud sur le personnel des « bureaux » royaux au XVIe siècle. Nous souhaitons restituer ainsi la trame institutionnelle d’une histoire de l’État moderne ancré dans les pratiques professionnelles de ces acteurs qui participent à la création, à la formulation et à la projection de la parole politique. Notre attention pour le groupe des lettrés d’Etat retient une chronologie relativement longue qui s’ouvre au

début des guerres de religion dans le royaume de France pour s’achever à la mort d’Henri IV. Le temps long permet ainsi de saisir la naissance des secrétaires d’État au cœur de l’appareil administratif de la monarchie (1547) tout en s’attachant à décrire précisément les évolutions de cette fonction de part et d’autre du changement dynastique.

3. « Des mémoires d’État, vous êtes la mémoire » : Villeroy, acteur et témoin des reconfigurations de la

société politique, de Charles IX à Henri IV L’inflation documentaire des papiers d’État suppose la refonte des cadres traditionnels de la société

politique et l’implantation, au cœur de l’État, d’un personnel aux horizons d’attente neufs pour soutenir

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cette réformation qui s’inscrit dans les conceptions politiques nouvelles des derniers Valois. Une approche de l’État par la pratique et la consistance concrète de l’ouverture des paquets de correspondances, la préparation et la collection de formulaires de listes de relais de postes, les ratures et brouillons des lettres montre un projet politique mouvant, s’affrontant à la rugosité et aux malheurs

des temps. Les innombrables décisions prises par les commis de chancellerie révèlent une histoire politique ouverte et potentielle. Sans faire l’économie d’une réflexion sur la notion problématique qu’est l’État moderne dans la récente historiographie, nous centrons l’analyse sur la jonction des intérêts d’une société politique qui lie son destin matériel au prince et la déclinaison des pratiques de ce groupe dans l’action de gouvernement.

Un acteur en particulier nous semble rendre raison des profonds bouleversements de l’entourage royal : Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy. L’analyse de ses pratiques professionnelles et de ses conceptions politiques s’insère dans le courant récent de l’étude européenne des acteurs institutionnels.

Nous tentons ainsi de lier pratiques et évènements, discours et cadres mentaux en dépliant ce qui fait la matière dense de la vie et des écrits du secrétaire de quatre rois de France. Nous lions l’édifice de papiers produit, la restitution d’une trajectoire politique et les réformes de l’entourage du roi dans les décennies 1580-1590. Nous tentons ainsi de comprendre comment Villeroy fonde, en fait et en droit, de nombreuses innovations politiques qui, sur près de cinquante ans, s’adossent à la configuration d’un imaginaire royal renouvelé. Né dans le sein des troubles militaires et des dissensions religieuses, ce personnage est peu repéré dans l’historiographie - la monographie que lui consacre Joseph Nouillac date de 1908. Son étude précise nous révèle pourtant ce que le secret du cabinet et des correspondances ne livre qu’en balbutiant : comment se forme, au cœur du gouvernement du royaume, un groupe de « lettrés » qui transmet, d’une dynastie à l’autre, son expérience, son souci et son goût de l’État dans des procédures tant raffinées que quotidiennes. Les heurts de la trajectoire de Villeroy (secrétaire d‘État de 1567 à 1588 et de 1594 à 1617), notamment sa disgrâce en 1588 au plus fort de la Ligue dont on ne sait s’il en partage toutes les options, sont autant d’anfractuosités qu’il conviendrait de sonder pour interroger l’homologie de l’évolution des conceptions politico-religieuses

et la formation d’un appareil socio- politique en partie renouvelé au début du XVIIe siècle. Saisi dans le groupe des « lettrés d’État », Villeroy en partage les horizons d’attente, une culture philosophique spécifique et composent avec les organes traditionnels de pouvoir ainsi qu’avec la société politique essentiellement nobiliaire et magistrate des rapports complexes et parfois concurrentiels. Secrétaires des commandements, secrétaires des finances, secrétaires du roi, secrétaires d’État, ces acteurs vont occuper une place symbolique et fonctionnelle de plus en plus importante, redoublant et parfois disqualifiant les organes de décision traditionnels ; ils sont les opérateurs de la traduction du dire et du vouloir royal de l’agencement et de la résolution des conflits dans le royaume et à la cour. La restitution de cet ethos administratif conjoint à l’idéal du service grâce à l’étude de la pratique quotidienne d’un des plus éminents acteurs politiques de cette période permettrait alors d’appréhender d’une manière inédite la façon dont évoluent, dans les arcanes d’un prince secret et mystérieux, ceux qui ont la responsabilité de transformer toujours plus systématiquement la réalité en pouvoir et en vouloir d’État.

Cette entreprise spécifique de reconfiguration des pouvoirs sous le règne du dernier Valois semble alors être portée par l’exigence angoissée de réformation du royaume, l’attachement constant aux formes de vérité et aux procédures justes de la décision et de l’action politiques. Cette mise en ordre du gouvernement s’effectue selon les critères originaux de la bonne police ; il nous semble nécessaire de rassembler, pour un temps et dans un même corpus, les traces d’archives les plus diverses pour comprendre quels savoirs, quelles pratiques et quel régime discursif scandent cette séquence politique.

Les contemporains du roi qui formaient son entourage politique et administratif étaient alors confrontés, dans la construction de leur habitude d’État, aux lettres, règlements, discours normatifs et aux cérémonies de l’information royale qui saturaient leur univers mental. C’est pourquoi il nous paraît fondamental, pour faire l’histoire de cette reconfiguration politique et en restituer l’économie générale, de confronter et de mettre en série, de la même manière, ces sources disparates, ces productions épistolaires et ces relations diplomatiques, ces écrits théoriques, apologétiques, historiques : pris dans leur ensemble, ils forment, selon nous, l’appareil discursif de l’État par lequel celui-ci opère et se raconte, fonctionnel et virtuel à la fois, inscrit dans l’imaginaire de la bonne police et dans le réel des dissidences religieuses, des pratiques et des coups. À la confluence de ces deux exigences, il est nécessaire d’exhumer ce qui fait le socle de la «langue grise» des papiers d’État, traces des procédures administratives, tenant tout ensemble et dans une apparence de neutralité impartiale les horizons d’attente contradictoires et bien souvent conflictuels de la société politique de la fin du XVIe siècle.

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4. Lier mémoires, récits et pratiques d’État Nous repérons également dans la documentation que les opérateurs de la «main du roi» inscrivent et

consignent la mémoire des décisions politiques qu’ils ont à connaître, notamment dans des instruments volumineux tels que les formulaires de chancellerie, conservés en grande partie à la bibliothèque de l’Institut de France. Cette tension discursive donne une densité supplémentaire à la position du personnel politique dans le fonctionnement de la monarchie des derniers Valois, car ce personnel vient alors s’inscrire dans une habitude d’État, une mémoire et trouve ainsi sa propre légitimité dans l’invention d’une tradition administrative qu’il contribue à créer. Les pratiques d’information, d’aide à la décision, d’expertise, de classement indiquent que le règne du roi Henri III est un moment qui se constitue politiquement dans l’écrit, dans la régulation de pratiques socio politiques mises en scènes par des règlements normatifs qui tous tentent de saisir un réel mouvant, contradictoire, qui résiste aux tentatives traditionnelles de mise en ordre. Ces pratiques sont également conjointes à des récits d’État très divers, que les secrétaires et leurs commis contribuent à écrire. Ces récits sont autant de cérémonies qui célèbrent le monopole de vérité de l’écriture souveraine ; les « lettrés d’État » qui la servent en sont les opérateurs, ils constituent progressivement les savoirs d’État à partir desquels il est possible d’analyser les horizons d’attente des familles officières au début du XVIIe siècle.

Les pratiques et les techniques administratives que nous proposons d’étudier dans leurs nombreuses

implications se régulent de manière interne et s’ordonnent face à la concurrence accrue du libelle d’opposition religieuse, politique, de la feuille imprimée séditieuse qui sature l’espace public en constitution à la fin du règne ; l’écrit administratif et sa mise en série devenant ainsi un des instruments de combat politico-religieux à part entière, mis immédiatement au service des tentatives problématiques de régulation de l’écrit par le pouvoir royal. C’est au coeur de ce moment d’intense réformation, en 1569, que le fonds de la chancellerie devient davantage autonome du Trésor des Chartes, le plus ancien fonds d’archives de l’État. En 1575, l’expression de «lois fondamentales du royaume» apparaît pour la première fois ; le «Trésor des Chartes» est ainsi une «garantie lointaine», l’héritage de papier sur lequel se déposent des savoirs et des «horizons bureaucratiques» inédits. On peut ainsi interroger la concomitance de la réforme de la conservation des papiers d’État et la structuration d’une nouvelle administration chargée de les produire. Saisissant un vaste ensemble documentaire composite dans le terrain que constituent les départements des secrétaires - analysant plus spécifiquement le département de Nicolas de Neufville - nous pouvons restituer la spécificité de l’État de la fin du XVIe et au début du XVIIe siècle au prisme de la saturation d’écrits qui l’affecte alors. Liant les papiers d’Etat entre eux, on observe des chaînes d’écritures et de pouvoir qui rendent visibles, possibles et historiquement repérables des continuités entre le gouvernement du royaume de la fin du XVIe siècle et celui du début du XVIIe siècle, moment où se constitue cette habitude des professionnels de l’écrit que sont les secrétaires de la main, des commandements et des finances - qui seront incorporés au début du XVIIe siècle dans la compagnie des secrétaires du roi.

5. Sources et méthode d’enquête Nous proposons d’analyser par sondages des séries de correspondances politiques actives entre le

monarque et certains de ses secrétaires ; ces lettres, non publiées, sont un des matériaux principaux de ce corpus. Elles permettent de restituer, sur des séquences longues, les conceptions de la pensée politico-religieuse des derniers Valois. Les mutations et les horizons d’attente du groupe des lettrés d’État résident également dans la saisie des correspondances entre les départements, mais aussi avec les différents acteurs du pouvoir engagés dans les opérations de guerre et de négociation. L’étude de la correspondance croisée de M. de Villeroy et de Jacques de Matignon est sur ce point décisive.

Les sources normatives rendent très sensible l’effort de réformation voulu par le dernier Valois : il convient de lier, par une approche comparatiste, les textes qui traitent de l’organisation de l’administration attachée directement au service du roi et ceux qui structurent les nouvelles institutions de pénitence et de piété démonstrative. Les sources discursives - Mémoires d’État, relations longues, traité de correspondance - sont l’élément fondamental qui permet de lier sources épistolaires et sources de la pratique, afin de résorber les ténèbres qui envahissent les cabinets des départements des secrétaires du roi.

Nous pensons utile pour l’enquête d’affecter ces sources à l’analyse des concepts développés originellement par des spécialistes d’autres espaces (s’agissant essentiellement du monde germanique, de la Bohême, de l’Italie, du monde ibérique et de l’Angleterre) et d’autres temps (les XVIIIe et XIXe siècles). Ainsi, les apports de la recherche sur la formation des sciences camérales, sur les nouveaux régimes de gouvernementalité ainsi que les méthodes de fabrication technique, matérielle et linguistique du droit sont essentiels pour questionner ces sources à nouveaux frais. Les mécanismes de prise des décisions et les

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fonctionnements en réseaux, l’évolution du statut de l’écriture manuscrite et de la signature politique sont également autant de concepts fondamentaux pour le projet que nous présentons. Ce décentrage dans le temps et dans l’espace permettrait alors de découvrir dans les plis de l’action politique de la fin du XVIe siècle des catégories d’analyse nouvelles et d’étayer notre étude de la constitution d’un groupe de lettrés d’État au cœur du fonctionnement quotidien de la monarchie française.

En outre, l’inscription dans des champs académiques parents de l’histoire tels que l’anthropologie des pratiques et des stratégies d’écriture, la science et la philosophie politiques, la sociologie (qui autorise des questionnements précis sur les modalités, les pratiques de gouvernement conduites et inscrites dans les stratégies d’acteurs individuels et collectifs), ou encore l’analyse linguistique et l’histoire littéraire (qui interrogent la raison graphique et la langue spécifique des modes et des effets du discours) permettrait également d’entrer dans les espaces interstitiels de la décision politique, au dévoilement dans la documentation toujours problématique.  Marie-France Renoux-Zagamé (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) Du contrôle de civilité à l’enregistrement des lois : fondements du contrôle judiciaire du souverain monarchique

Que le gouvernement monarchique, à la différence du régime despotique, soit soumis à des « règles fixes et établies », Montesquieu l’affirme, et nul ne le conteste vraiment pour ce qui est de la monarchie française. Mais les incertitudes et les interrogations demeurent. Elles portent tout d’abord sur la légitimité et l’efficacité du contrôle par lesquels les Parlements, qui dépendent de lui, prétendent, lors de l’enregistrement, vérifier que le souverain, dans son activité édictale, se soumet aux normes qu’il est censé respecter. Mais c’est avant tout sur le contenu et l’extension de ces principes supérieurs susceptibles de constituer une limite à la toute-puissance du souverain que se concentrent les doutes. A lire en effet les fameuses remontrances des XVIIe et XVIIIe siècles, les refus d’enregistrement et donc de validation d’une loi nouvelle, sont certes fondés sur un « jugement de comparaison », qui conduit les juges à constater sa contrariété avec telle ou telle des lois dont ils estiment avoir le « dépôt » ; mais la diversité des normes ainsi proclamées inviolables, est telle qu’on a le sentiment que la supériorité qui leur est ainsi conférée, n’est que passagère, et ne fait guère que masquer une volonté politique d’opposition. En se donnant la possibilité de conférer quasi à discrétion le statut d’inviolabilité, les juges semblent le vider de tout contenu théorique et de toute efficacité juridique.

Telle est le jugement fréquemment porté et il nous semble reposer sur une méconnaissance tout à la fois de l’histoire du contrôle judiciaire des lois dans l’ancienne monarchie, mais également de l’esprit de la méthode mis en œuvre pour l’exercer.

C’est en effet lors de la « préhistoire » médiévale de l’enregistrement des lois, que se fixent la procédure à suivre et les critères à faire respecter lorsqu’il est demandé aux juges du Parlement d’inscrire sur leurs registres, pour leur donner pleine validité, les Lettres patentes du souverain. Selon les termes mêmes des différentes ordonnances qui, de la fin du XIIIe siècle à la fin du XVe siècle, mettent en place ce contrôle, c’est, pour l’essentiel, le caractère « civil » de la mesure qui doit être contrôlé. S’inspirant, comme avant lui le législateur canonique pour les décrétales, des règles romaines régissant la validation judiciaire des rescrits, le législateur monarchique demande en effet à ses juges de « vérifier » que les mesures obtenues de la Chancellerie ne sont pas « contra jus », entendons qu’elles ne sont pas contraires au jus civile, c'est-à-dire, pour la pensée juridique française, non pas tant au droit romain lui-même, qu’au « droit de raison » qu’elle a coutume de viser – et de faire prévaloir - à travers les règles puisées dans le Corpus juris civilis.

Compris à travers les commentaires des maîtres des universités, ce contrôle de « civilité » va conduire le juge médiéval à utiliser critères et règles procédurales prévus par les règles romaines. Pour en comprendre l’esprit, nous utiliserons un instrument d’un intérêt exceptionnel, les recueils d’extraits d’archives du Parlement, constitués à la fin du XVIIe siècle par le conseiller Le Nain : ils permettent, en raison du grand nombre de textes de plaidoyers repérés et recopiés, d’avoir une vue d’ensemble des méthodes et des arguments utilisés. Comme le veulent ordonnances et règles romaines, la décision durant les trois derniers siècles médiévaux est prise au terme d’un procès entre ceux qui demandent l’enregistrement et ceux qui s’y opposent. C’est au moyen de ce débat contradictoire, qui les conduit à écouter les plaidoiries pro et contra des avocats des parties, ainsi que le réquisitoire et les conclusions des gens du Roi, que les juges s’attachent à « vérifier » que les mesures examinées expriment bien la volonté du monarque, qu’elles ne remettent pas indûment en cause des droits particuliers, et plus généralement, qu’elles ne sont pas contraires au « droit ».

Les données de cette casuistique judiciaire permettent de comprendre l’esprit de la méthode alors mise en œuvre : contrôler la civilité d’une loi, ce n’est pas la confronter aux règles romaines elles-mêmes, mais au travers et au-delà d’elles, vérifier que la loi ne va pas à l’encontre des « principes supérieurs » dont les

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règles seraient l’expression. Mais, ainsi présentée, la méthode des juges médiévaux, c’est, transposée aux questions liées à l’enregistrement des lois, la méthode générale qui est celle de la raison juridique de l’ancien droit. L’étude de la casuistique judiciaire des Temps modernes le montre : en l’absence d’une hiérarchie formelle et préétablie entre les différentes catégories de normes – en l’absence d’une constitution écrite, dirons-nous pour faire simple - la solution de toute question débattue devant les juges passe par le recensement des différentes règles à appliquer, puis par leur mise en parallèle, et enfin par une esquisse de hiérarchisation. Pour proposer cette hiérarchie, base de l’ordre d’applicabilité des lois, l’interprète s’efforce de cerner les points de convergence entre les normes, pour faire apparaître les « grands principes », les « maximes fondamentales » dont elles sont la mise en œuvre. Dès lors, plus que dans les remontrances liées à la pratique moderne de l’enregistrement, c’est dans les plaidoyers des avocats des XVIIe et XVIIIe siècle qu’on peut voir émerger et se fixer les principes supérieurs qui sont pour la pensée juridique de ce temps l’expression d’un droit inviolable.  Sixto Sánchez-Lauro (Universidad de Barcelona) Constitucionalidad en la Corona de Aragón durante el período de los Austrias: la intensificación del pactismo en Cataluña como mecanismo de creación jurídica y como control en el ejercicio del poder

La labor jurídico-publica llevada a cabo por Fernando II el Católico en Cataluña potencia y garantiza el desarrollo de la constitucionalidad tradicional cristalizada en el pactismo parlamentario, el cual se había iniciado en las postrimerías del siglo XIII. El rey Fernando reafirma el régimen pactista, que se intensifica y madura durante los siglos XVI y XVII como mecanismo defensivo del sistema jurídico catalán frente al autoritarismo de la Casa de Austria. La constitució “Poc valria” de 1481 (Constitució de l’observança) declara que cualesquiera disposiciones regias contrarias al ordenamiento vigente serán nulas ipso facto, quedando oficiales y jueces exentos de su obediencia. Poc valria fer lleys e constitutions si no eren per Nós e nostres officials observades.

Esta constitució, suplementada por otras también fernandinas y complementada en Cortes de Barcelona de 1599, consolida el “normativismo historicista” definido por Lalinde Abadía, haciendo posible el triunfo en Cataluña del pactismo sobre el absolutismo hasta la Nueva Planta de 1716. Sin embargo, este sistema constitucional, bajo tutela judicialista, conduce progresivamente a una atrofia legislativa, a una acentuación romanista y jurisprudencial y a frecuentes y graves tensiones político-administrativas e ideológicas entre los órganos regios hispánicos y los representativos catalanes; tensiones que se radicalizan ante la periferización de Cataluña, al igual que el resto de territorios de la Corona de Aragón, en el contexto de la Monarquía Hispánica.  José Domingues (Universidade Lusíada do Porto) Do Constitucionalismo Revolucionário Medievo às Ordenações do Reino de Portugal

Os momentos histórico-políticos mais intensos, de convulsão social e grave crise institucional, de alguma forma, acabam por despertar o «vulcão» do poder constituinte originário, dando origem a uma nova Constituição. Esta conjuntura, prima facie, poderia remeter para uma ideia de constitucionalismo contemporâneo e para os momentos revolucionários portugueses que estiveram na base dos textos constitucionais dos séculos XIX-XX. Mas não é esse o escopo desta comunicação, que pretende recuar aos tempos da Baixa Idade Média portuguesa à procura de possíveis contributos para o estudo das veneráveis raízes de um constitucionalismo originário da Europa Ocidental. Nos arcaísmos do constitucionalismo euro-ocidental vão assentar, a partir dos finais do século XVIII, os alicerces ideológicos para um novo constitucionalismo revolucionário liberal, trazido pelos ventos que sopravam do outro lado do Atlântico.

Um período de circa quatro séculos (XII-XV), caracterizado por uma constante instabilidade política e intestinas convulsões sociais, abre múltiplas sendas de abordagem ao constitucionalismo revolucionário luso. Por isso, cingir-me-ei apenas a alguns aspectos materiais e formais de produção legislativa que acabaram por entroncar no processo de compilação do Ius regni em Livros de Ordenações, iniciado com o momento constituinte revolucionário de 1383-1385. Foi deste momento crítico, em que perigava a independência do reino, que brotou a «lava» constitucional garante da autonomia do ordenamento jurídico português e, consequentemente, se consolidou a ideia de Estado que, paulatinamente, se vinha afirmando desde o (tão controverso) momento constituinte fundacional das Cortes de Lamego, reunidas por D. Afonso Henriques na igreja de Santa Maria de Almacave.

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The most intense historical and political moments of social turbulence and severe institutional crisis awakened, in some way, the ‘volcano’ of the original constituent power, giving rise to a new Constitution. This situation, prima facie, could send us to an idea of contemporary constitutionalism and to the Portuguese revolutionary moments that were the basis of the constitutional texts of XIX-XX centuries but this is not the purpose of this communication. What is intended is to go back to the times of Lower Middle Ages Portuguese to looking for possible contributions to the study of the roots of a venerable constitutionalism originated in Western EuropeFrom the late eighteenth century, the ideological foundations for a new revolutionary liberal constitutionalism, brought by winds blowing across the Atlantic, will be based on the archaisms of the Euro-Western constitutionalism.

A period of about four centuries (XII-XV), characterized by a constant political instability and social turbulence leads to multiple approaches to the Portuguese revolutionary constitutionalism. So, I only will focus in some material and formal aspects of the lawmaking gathered in the compilation process of Ius regni in Books of Ordinances which started with the revolutionary constituent moment of 1383-1385.

It was from this critical moment of danger to the independence of the kingdom that emerged the constitutional «lava», which was the guarantee of the Portuguese legal system autonomy and accordingly it was consolidated the idea of State that gradually, had been evident since the (so controversial) constituent moment of the foundational Cortes of Lamego, joined by D. Afonso Henriques in the church of Santa Maria Almacave  Jérôme Loiseau (Université de Franche-Comté) La nécessité publique contre les privilèges : les monarchies de France et d’Espagne face aux états des deux Bourgognes au Grand siècle

Depuis le XIVe siècle, le duché et le comté de Bourgogne sont des entités politiques en partie administrées par des institutions similaires : un gouverneur, un parlement et des états provinciaux réunissant les députés des trois ordres de la société. Depuis la fin du XVe siècle, ces deux espaces sont disjoints, l’un, le Duché relevant de la souveraineté du roi de France et l’autre, la Comté relevant de la souveraineté de Charles Quint puis de Philippe II d’Espagne. Leurs relations sont réglées par un traité de neutralité régulièrement renouvellé. À partir de 1595, la neutralité cède le pas à un régime de paix armée puis franchement de guerre à partir de 1636 jusqu’à l’incoporation de la Comté au royaume de France en 1678.

L’histoire des deux Bourgognes, au Grand Siècle, s’inscrit ainsi pleinement dans le conflit d’échelle européenne qui oppose les deux maisons de Bourbon et de Habsbourg ; il implique, à l’échelle provinciale, une intensification de la question fiscale : «urgente nécessité» dans le Duché, « necessité inexcusable » en Comté. Or, les dépenses militaires, de part et d’autre de la Saône, incombent très largement, selon les « libertés, franchises et privilèges » des deux provinces, à leur monarchie. Tout l’enjeu du débat politique va donc résider dans les capacités des rois à faire payer les Bourguignons pour la défense de leur patrie et plus encore pour celle de l’État.

De 1636 à 1678, chacun des deux souverains va s’attacher ainsi à souligner et prétexter l’extraordinaire de la guerre pour outrepasser les droits ordinaires qui les lient aux Bourgognes. La longueur de la guerre génére l’émergence d’un nouvel impôt (le don gratuit extraordinaire) d’un montant significatif et qui tend à devenir une obligation juridique supplémentaire, signe d’un pouvoir royal à prétention absolutiste et d’un renouvellement de la constitution coutumière. Mais tandis qu’au Duché cette métamorphose des relations entre l’Etat et les états confirme leur rôle de relais du pouvoir royal, en Franche-Comté, ils disparaissent, n’étant plus jamais réunis par la couronne espagnole à partir de 1666, pratique prolongée par la France.

Les deux Bourgognes au XVIIe siècle offrent donc un observatoire pertinent pour comprendre, de façon comparative entre la France et l’Espagne, les mutations institutionnelles engagées à la faveur de la guerre en suivant les voies multiples – réforme institutionnelle, coup de majesté, renouvellement rhétorique, technique juridique, contrôle politique- empruntées par les pouvoirs monarchiques pour s’affirmer face aux états, signes traditionnels d’une monarchie consensuelle et en retour, l’adaptation ou non de ces états à la volonté des souverains de redéfinir la chose publique. Rachel Foxley (University of Reading) The Levellers and the English constitution in the English Civil War

During the English Civil War of the 1640s, both royalists and parliamentarians justified themselves in terms of legality and constitutionalism. Due to the unwritten nature of the constitution and the importance of precedent and custom within the common law system, multiple readings of the

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constitutional situation were possible. Appeals to the 'fundamental laws' of the polity articulated a belief in an essential constitutional basis for the state, but also proved to be flexible enough to serve polemical arguments when needed.

The Levellers were a radical grouping who grew from the parliamentarian side in the civil war and urged a resettlement which would either abolish the monarchy and House of Lords or end their legislative powers, placing supreme power in a reformed elected House of Commons (the 'Representative'). A small group of civilian leaders of the Leveller movement in London produced a campaign of pamphlet literature and petitions for these and other reforms. Their connections with radicalism in the parliamentarian New Model Army remain uncertain, but the first Agreement of the People (October 1647) reflected some Leveller demands even though it emerged from an army context. This document attempted to set out the fundamentals of government for the future, and the second and third Agreements of the People (December 1648-January 1649 and May 1649) adopted the same principle and were certainly associated with the Levellers.

The Agreements of the People sought to ratify these new fundamental laws through popular consent, through a process of subscription which in the Second Agreement would have determined the effective bounds of full citizenship. However, in spite of the revolutionary changes which the Agreements embodied, their rhetoric was cautious; in order to draw on the power of (ancient) constitutionalism it was necessary to minimize the impression of innovation. The Agreements of the People were thus presented partly as codifications of fundamental laws; the civil war had been fought due to the uncertainty and disagreement over the nature of these fundamental laws which would now be ascertained and documented for the future. It was not simply a matter of disguising the conclusions of theoretical discussions as a fundamental law which had always applied; there was a historical aspect to the development of the Levellers' thought. However, the historical and legal thinking of the Levellers was always shaped by current concerns as much as it shaped the Levellers' thinking about the present. Pablo Fernández Albaladejo (Universidad Autónoma de Madrid) Naturaleza frente a const i tuc ión en la monarquía de España. Sugerencias para una nueva lectura de la crisis constitucional de 1640

Una consolidada tradición historiográfica viene contemplando la evolución de la monarquía de España durante los siglos XVI y XVII como una secuencia recorrida por una tensión estructural entre absolutismo y constitucionalismo. Esta tensión se correspondería con una diferencia sustancial entre los ordenamientos jurídicos de los dos cuerpos políticos mayores que componían (la Corona de Castilla y la Corona de Aragón) la monarquía y que, en última instancia, se manifestaría de forma visible en el decisivo momento de 1640, contemplado por ello como una auténtica crisis constitucional de la monarquía. Siendo incuestionable la presencia inicial de principios y tradiciones jurídicas distintas en la conformación de los ordenamientos (dentro incluso de la propia Corona de Aragón), no es menos cierto que la pretendida contraposición entre ambos sistemas en clave de una impronta constitucionalista presente en los territorios aragoneses que estaría ausente en la absolutista Castilla, no parece -hoy por hoy- del todo convincente. Los ordenamientos forales de los territorios de la Corona de Aragón, con su vertiente limitadora de los poderes del rey, no dejaban de reconocer a éste un elenco de facultades regalianas que equilibraban la perspectiva libertaria. A la inversa, la posición inicial más autocrática de la realeza castellana sobreentendía a su vez una constitución de sujetos corporativos amparados por las sólidas garantías del ius commune. Constitución (en el sentido de constitución material expuesto por Otto Brunner) y constitucionalismo (en el sentido del juego gubernaculum-iurisdictio de C. H. McIlwain) no dejaba de haberlo en ambos casos. Como ha hecho notar Antonio Hespanha, las diferencias entre las formas del régimen político (cualesquiera que fuesen) en nada afectaban a las limitaciones sobreimpuestas por un entendimiento compartido de constitución, de un orden de cosas informado por la noción de iurisdictio e indisponible a la intervención unilateral del poder político.

La irrupción de una dinastía común desde el último tercio del siglo XV, con la dinámica monárquico-imperial inmediatamente sobrevenida, abrió un nuevo escenario e impuso exigencias fiscales y materiales que, en principio, trataron de conciliarse sin alteraciones sustanciales en el diseño político con el que se había configurado la monarquía. Sustentada sobre una lógica de uniones (principales o accesorias) entre sus cuerpos y subsiguiente respeto de sus ordenamientos, la monarquía, hasta fines del XVI, pudo conciliar su carácter político agregativo (su constitución, si se quiere) con un reparto desigual de los costes. La crisis global de fines del reinado de Felipe II marcó los límites a esa singular dinámica política, dando paso a una reflexión que, si bien planteada desde una perspectiva castellana, contemplaba y exigía una reordenación global de la arquitectura política de la monarquía. Un militante arbitrismo planteó entonces, invocando un

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principio de necesidad, la adopción de una serie de cambios necesarios para la estricta conservación del modelo. El reinado de Felipe III asistió así a las primeras propuestas para refundar la monarquía en una clave unionista-integradora, planteando una dinámica de unión amorosa entre todos los súbditos presididos por el rey-pastor, acompañada de un reparto equilibrado de cargos entre todos los grupos dirigentes. La propuesta reclamaba a su vez libertad de actuación para el monarca en el ámbito de aquellas cuestiones que tuvieran que ver con el gubernaculum -la política- de la monarquía, dando por supuesto que la vertiente jurisdiccional que afectaba a los derechos particulares permanecería intocable frente a eventuales intervenciones del poder regio.

El plan del conde-duque de Olivares intentó ajustarse a esa línea de actuación, expuesta con toda precisión en la Instrucción secreta de 1624. Lejos de la impronta absolutista que frecuentemente se le atribuye, el favorito era plenamente consciente de las líneas rojas constitucionales que recorrían su proyecto, manifestando su completa aceptación de las reglas -y de los límites implícitos- que operaban entre cosas de gobierno y cosas de justicia. Topó no obstante con una mala gestión política del reinado anterior y con una decidida oposición de los poderes corporativos y territoriales para participar incondicionalmente en la renovación propuesta, una resistencia que él mismo tampoco supo reconducir. Respondiendo a esa situación, Olivares se acogió no obstante a los argumentos de un renovado derecho natural puestos en boga por la escolástica castellana tardía y, a partir de los cuales, defendió la prioridad de una unión natural entre los cuerpos políticos de la monarquía, un mecanismo de autodefensa que ya “le enseñó naturaleza a los mismos brutos”. Frente a este dato de partida prioritario, sustentado en el derecho divino, natural y de gentes, las limitaciones de los ordenamientos territoriales carecían de sentido. Lejos de allanarle el camino, el planteamiento del conde-duque se encontró con una contra-argumentación que, desde Cataluña, se acogía paradójicamente a los mismos supuestos que él invocaba. Concebido también como una estricta cuestión de necesidad, el argumento de la “defensa natural” del Principado proporcionaba una legitimidad prepolítica a partir de la cual cabía oponerse y resistir la presencia de tropas extranjeras en el territorio, sin que ello supusiese una deslealtad al monarca.

Omitiendo aquí detalles sobre posterior evolución de los acontecimientos, el conflicto planteado en 1640 terminaba por reducir a un juego de suma-cero las posiciones enfrentadas, cuya resolución (después de un prolongado enfrentamiento) reabriría finalmente un escenario constitucional nuevo y a la vez conocido. Las pretensiones de un soberanismo fuerte (aunque no absolutista) sustentadas por Olivares dieron paso a la opción por una difusa soberanía pastoral inspirada y arropada cada vez más por una teología que, si bien no dejaba de reconocer una cierta autonomía a la política, limitaba sin embargo su esfera a los marcos de una actuación pastoral-tutelar sobre la comunidad política, desaconsejando cualquier deriva decisionista. A su vez, y como un personaje tan significado como Juan de Palafox defendería, se abría paso una práctica política de reconocimiento de los ordenamientos regnícolas, un escenario constitucional que haciendo de la necesidad virtud apostaba por una constitución global de la monarquía sustentada sobre el reconocimiento de un complejo de reinos capaces -sin mayor contradicción- de permanecer a la vez unidos y separados a la monarquía, tal y como argumentaba Pedro de Valenzuela en su Portugal unido y separado (1650) o se hacía constar en la Recopilación navarra de 1686. Una dinámica neoforalista cuyas posibilidades de continuidad se verían desbaratadas a raíz del conflicto sucesorio abierto en 1700.  William Pettigrew (University of Kent) The Empire and the English Constitution in the Seventeenth Century

What was the relationship between England's remarkable commercial expansion overseas in the 17th century and the profound changes to her government that define England's domestic history in the 17th century? During the 17th century, England established and sustained several overseas trading companies: the East Indian, Royal African, the Virginia, the Levant, the Massachusetts Bay, the Russia, and the Hudson’s Bay. Together they developed an English corporate presence in four continents. In the same period, the English constitution changed from a divinely ordained absolutist monarchy to a mixed constitution in which Parliament enjoyed supremacy and supported a more powerful state. How did these developments – the expansion of English influence in the world and the profound alteration in English domestic governance – influence one another? This paper will depict the formative stages of the English empire as a series of experiments with government. These experiments generated important insights for the mother country and her overseas holdings. It will show how the first multinational corporations played an unappreciated part as conduits for globalization and constitutional change.

 

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Andrea Zorzi (Università degli Studi di Firenze) Dentro la città: il lessico della cittadinanza nelle città italiane comunali e signorili (secoli XIII-XIV)

Come è noto, le città italiane - come quelle della Cristianità occidentale - vennero fondando la propria autonomia politica nel corso del XII secolo anche attraverso il giuramento dei loro cives (milites, negotiatores, iudices): unioni giurate in associazioni dai nomi più vari "coniuratio", "communio iurata", "communis", "universitas", etc.

Paolo Prodi ha mostrato come tali vincoli, fondandosi sulla fides reciproca dei contraenti, fondassero al contempo lo spazio d'azione e di legittimità del potere politico, in una dimensione dualistica e contrattistica che si pose alla base dello sviluppo storico del costituzionalismo. Il giuramento rappresentava il tramite tra gli individui e le istituzioni. Un giuramento - si osservi - in rapporto a Dio che collegava il vincolo religioso alla struttura del potere nella società.

Nella crisi delle sovranità universali, l'opera dei giuristi fu quella di collegare le associazioni giurate agli istituti del diritto romano e canonico, a cominciare da quello di "universitas". Bartolo da Sassoferrato, in particolare, sviluppando la dottrina della "civitas sibi princeps", contribuì a legittimare anche sul piano giuridico le istituzioni cittadine che il pensiero aristotelico-tomistico aveva già ricondotto alle forme di governo dell'aristocrazia e della "politeia". La convergenza delle grandi tradizioni del pensiero teologico e giuridico contribuì a rendere le civitates italiane una realtà politica autogovernata da proprie leggi e, de facto, indipendente. La relazione intende ripercorrere questi svolgimenti muovendo dall'analisi del lessico della cittadinanza, vale a dire dei percorsi attraverso i quali la partecipazione alla cittadinanza si nutrì di un orizzonte di valori politici che fondarono a loro volta un discorso pubblico "costituzionale", in quanto fondato su un insieme di "norme", non immediatamente giuridiche, che orientavano la relazione tra i governanti e i cives, e dunque tra società e potere nello scambio politico. L'insieme dei valori muoveva dalla "giustizia" che doveva guidare i magistrati cittadini nel loro operato. La “giustizia” rappresentava la base morale per perseguire il “bene comune”, garantendo la “concordia” sociale e la “pace” della comunità, e per conseguire così la “grandezza” della città.  Gian Maria Varanini (Università degli Studi di Verona) Oltre la città? Il lessico delle dedizioni nelle città italiane del Trecento e del Quattrocento

Le carte di dedizione, stilate nel momento della transizione a un nuovo dominio politico e presentate al nuovo dominus, costituiscono uno degli strumenti più usualmente adottati, nelle complesse trasformazioni politiche che interessano l’Italia centro-settentrionale nel Trecento e nel Quattrocento, per regolare i rapporti tra una città che si assoggetta e l’autorità “superiore” alla quale essa si assoggetta (si tratti di una città dominante, oppure di un principe). Come hanno mostrato nei decenni scorsi diverse ricerche importanti (Chittolini, Ortalli e altri), questi documenti per un verso costituiscono un riconoscimento di gerarchie e di rapporti di forza, e mettono a nudo per un altro verso – in un momento cruciale e talvolta drammatico, nel quale la comunità politica cittadina è chiamata a guardarsi allo specchio – le ragioni stesse dello “stare insieme” politicamente. La comunicazione intende esaminare se questi testi si limitino a rielaborare e riverniciare la tradizionale ideologia politica cittadina, oppure se contengano – nel testo originario, o nelle rielaborazioni e nei commenti che successivamente i giuristi cittadini e/o i consigli predispongono – elementi di riconoscimento o di presa d’atto di assetti “costituzionali” che vadano “oltre la città”.  Diego Quaglioni (Università di Trento) Constitution et constitutionnalisme (XVIe – XVIIe siècle)

Dans le Corpus Juris de Justinien la maxime «princeps legibus solutus est» (Digeste, 1, 3, 31) est accompagnée de la maxime de la loi Digna vox, qui veut que le souverain soit «legibus alligatus», soumis aux lois en raison de la subordination au droit de son auctoritas (Code Justinien, 1, 14, 4). La loi Digna vox soutient qu'il est digne du souverain de se soumettre aux lois, parce que l’autorité du souverain pendet («dérive») de l'autorité du droit, et se soumettre aux lois (submittere legibus principatum) signifie augmenter et non pas diminuer son pouvoir. Le système des limites du pouvoir réside donc dans la volonté de se conformer à une loi qui domine et contraint.

Par conséquent, le constitutionnalisme pré-moderne est caractérisé par la dialectique entre ces deux visages de la souveraineté : le pouvoir souverain implique la solutio a legibus, à savoir l'indépendance de la

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force coercitive de la loi, mais la souveraineté est dans le même temps limitée par la soumission à l’équité et à l'ensemble des principes du droit des gens, du droit naturel et du droit divin, c’est-à-dire par un «cercle invisible» qui bornait l’autorité et le pouvoir, par un «système» qui allait au-delà et au-dessus du droit positif.

Dans ce double paradigme de la souveraineté que le Moyen âge juridique et politique hérite de l’Antiquité romaine, c’est l’honestas qui impose au Prince de se soumettre volontairement aux lois. Comme le disait Tocqueville: «Alors la constitution des peuples était despotique, et leurs mœurs libres. Les princes avaient le droit mais non la faculté ni le désir de tout faire». Ce qui est aujourd’hui pour nous la «loi fondamentale», la Constitution comme système de garanties données aux sujets afin de borner le pouvoir, c’était alors justement un système de limites religieuses, éthiques et juridiques, qui fonctionne comme une «constitution».

Cette tradition se perpétue jusqu'au seuil de la modernité et du constitutionnalisme moderne. Ceci peut être vu à partir des principaux exemples de la littérature juridique et politique du XVIe siècle, et en particulier dans ce Manifeste des doctrines radicales dans le domaine du droit public européen intitulé Vindiciae contra tyrannos, publié en 1579 et immédiatement traduit en français sous le titre De la puissance du prince légitime sur le peuple et du peuple sur le prince. Dans la crise des guerres de religion étaient déjà apparus la Franco-Gallia de François Hotman (1573), Le Droit des Magistrats de Théodore de Bèze (1574), les Six livres de la République de Jean Bodin et le Discours d’Innocent Gentillet (1576), c'est-à-dire tous les textes qui formeront peu après la base nouvelle du droit public dans les pays réformés.

Tous ces textes, bien que différents dans leurs intentions, ont posé la question de la nature du pouvoir, et encore plus de ses «freins» , c'est-à-dire de ses limites constitutionnelles. Les Vindiciae contra tyrannos ont un début exemplaire: le texte s'ouvre en rappelant la tradition et les règles doctrinales du droit commun, avec la loi Digna vox et sa proclamation solennelle de la nécessité pour la maiestas d’être limité et soumise au droit. Pierre Bonin (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) Les lois fondamentales comme constitution de l'ancienne France, une invention des légitimistes L’essor, et les formes nouvelles, qu’a connu en France le droit constitutionnel sous la Ve République, avec le développement du contrôle de constitutionnalité, portent les historiens du droit à lui chercher des antécédents sous l’Ancien Régime, et renforcent, par l’analyse du rôle des parlements, une équivalence souvent explicite entre les lois fondamentales antérieures à 1789 et les constitutions écrites postérieures. Si le propre de l’histoire est de poser au passé les questions du présent, et qu’une telle démarche n’a donc rien de scientifiquement critiquable, il faut cependant en sonder la part d’anachronisme, pour ne pas transformer l’analogie en stricte identité et en tirer des conséquences excessives. Quelques signes montrent en effet que les lois fondamentales n’ont pas sous l’Ancien Régime le caractère central que leur accordent aujourd’hui bien des synthèses d’histoire du droit public ou des institutions. En particulier elles ne font pas l’objet, en tant que catégorie autonome, d’entrées dans les dictionnaires juridiques du XVIIIe siècle… Il en va de même jusqu’au début du XXe siècle, comme en témoigne l’œuvre du grand constitutionnaliste et historien du droit, certes républicain, Adhémar Esmein. Or, entre 1907 et 1914, trois thèses d’histoire du droit vont reprendre le thème contre-révolutionnaire que l’Ancien Régime connaissait une constitution coutumière, et placer en son coeur les lois fondamentales. Le contexte y porte à partir de la mort du comte de Chambord chez les monarchistes : les légitimistes tenant de la branche espagnole, aînée, s’opposent aux descendants de Louis-Philippe, en contestant la validité des renonciations de Philippe V d’Espagne au traité d’Utrecht, au nom de l’indisponibilité de la couronne. Cette thématique s’accompagne de la redécouverte de l’œuvre de Terrevermeille, et de sa valorisation bien au-delà de sa diffusion effective du XVe au XVIIIe siècle. Favorablement reçue par une histoire du droit devenue politiquement conservatrice dans l’entre-deux-guerres, cette construction historiographique est encore dynamisée par le « revival » légitimiste qui précède la célébration du millénaire capétien. Or une telle présentation, historiquement située, tend selon un travers fréquent des juristes à essentialiser les notions qu’ils manipulent. En donnant pour intemporel le concept de constitution, ou pour certain le contenu des lois fondamentales, elle présente l’avantage de rendre intelligible les mécanismes juridiques anciens, au point d’en faire l’origine des logiques actuelles. En revanche, cet aplanissement téléologique masque les transformations de l’époque moderne, entre naissance médiévale et forme actuelle, et interdit la confrontation de modèles alternatifs, en projetant un impensé positiviste-normativiste sur une réalité sans doute longtemps beaucoup plus conforme au schéma du jusnaturalisme classique.