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Chevalerie Spirituelle, carême et ascétisme De plus en plus de gens dans le monde chrétien semblent s'intéresser à nouveau à l'esprit chevaleresque. Qu'on se passionne pour la littérature de chevalerie, qu'on étudie les ordres disparus comme les templiers, qu'on se passionne pour les activités d'ordres vénérables subsistant depuis le Moyen Age comme l'Ordre de Malte et l'Ordre du Saint Sépulcre ou que l'on soit initié dans un ordre chevaleresque ésotérique comme la maçonnerie rectifiée, la chevalerie semble fleurir de toute part dans notre monde moderne. Je me propose également sur ce blog, de réfléchir sur cet esprit chevaleresque, j'inaugure donc pour l'occasion une nouvelle rubrique. Je le ferai de la manière qui m'est coutumière, en proposant certaines réflexions personnelles appuyées sur la Tradition. Et précisément, cette période de carême est une bonne occasion d'ouvrir ce travail. Un théologien disait l'autre jour à la radio que le carême était l'occasion de se priver de quelque chose qu'on aime par solidarité avec les pauvres. Oui, soit. Néanmoins, pour quelqu'un qui aspire à la chevalerie spirituelle, ce n'est pas suffisant. Car le carême est l'occasion d'installer certaines pratiques ascétiques dans notre vie. « Ascétisme », voilà un mot qui va en faire frémir plus d'un. Et pour cause, à peine l'a-t-on entendu ou prononcé que des images désagréables viennent à l'esprit : corps malingres, amoindris, mortifiés, yeux ensanglantés, affamés, conscience dérivant sur les eaux âcres de la folie, emportée par le courant de la privation...

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Chevalerie Spirituelle, carême et ascétisme

De plus en plus de gens dans le monde chrétien semblent s'intéresser à nouveau à l'esprit chevaleresque. Qu'on se passionne pour la littérature de chevalerie, qu'on étudie les ordres disparus comme les templiers, qu'on se passionne pour les activités d'ordres vénérables subsistant depuis le Moyen Age comme l'Ordre de Malte et l'Ordre du Saint Sépulcre ou que l'on soit initié dans un ordre chevaleresque ésotérique comme la maçonnerie rectifiée, la chevalerie semble fleurir de toute part dans notre monde moderne.Je me propose également sur ce blog, de réfléchir sur cet esprit chevaleresque, j'inaugure donc pour l'occasion une nouvelle rubrique. Je le ferai de la manière qui m'est coutumière, en proposant certaines réflexions personnelles appuyées sur la Tradition.Et précisément, cette période de carême est une bonne occasion d'ouvrir ce travail. Un théologien disait l'autre jour à la radio que le carême était l'occasion de se priver de quelque chose qu'on aime par solidarité avec les pauvres. Oui, soit. Néanmoins, pour quelqu'un qui aspire à la chevalerie spirituelle, ce n'est pas suffisant. Car le carême est l'occasion d'installer certaines pratiques ascétiques dans notre vie. « Ascétisme », voilà un mot qui va en faire frémir plus d'un. Et pour cause, à peine l'a-t-on entendu ou prononcé que des images désagréables viennent à l'esprit : corps malingres, amoindris, mortifiés, yeux ensanglantés, affamés, conscience dérivant sur les eaux âcres de la folie, emportée par le courant de la privation...Et pourtant, comme souvent, en cédant aux images toutes faites, on est loin de la vérité. Pour la trouver, il faut retourner à l'origine du mot. Ascétisme vient du grec askêsis, signifiant exercices et s'appliquant avant tout au monde de l'athlétisme et à la vie militaire. L'ascète est donc quelqu'un qui va pratiquer certains exercices et se soumettre à une certaine discipline volontaire en vue de fortifier son corps et son esprit.Dans cette période de carême, cette discipline est proposée à l'ensemble des chrétiens mais devrait attirer particulièrement l'attention de ceux qui se réclament d'une certaine chevalerie spirituelle. Car le chevalier est avant tout un combattant et s'il lui faut parfois tirer l'épée contre l'injustice régnant dans ce monde, il lui faut surtout, comme le moine, vaincre ses propres démons.Carême est l'occasion de conscientiser et renforcer ce combat. Mais de quoi s'agit-il au juste ? De se gratter au sang afin d'exhumer nos défauts et nos manquements ?

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D'ensuite battre sa coulpe avant de refouler aux tréfonds de notre inconscient ces faiblesses, le tout dans une atmosphère de culpabilité délétère ? Non. Trois fois non.Le combat chevaleresque se doit d'être digne, aussi fort et tranchant que la lame d'une épée. L'ascèse consiste à ne rien se cacher, à se voir en vérité, à affronter nos démons en les regardant droit dans les yeux. Qui sont-ils ces démons ? Ils sont légions : addictions, peurs, angoisses, colères, égocentrisme, hypocrisie, pulsion de mort, ...L'ascèse du chevalier consiste à leur faire rendre gorge avec force, à s'en purger afin d'ouvrir les portes de la transfiguration.Car le péché n'est pas ontologiquement présent en l'Homme, pour reprendre les mots de Saint Jean Damascène, il est « la semence du diable recueillie volontairement en nous ». C'est donc par notre manque de volonté, notre absence de discernement, par nos choix erronés ou faibles que nous cultivons des attitudes porteuses de mort plutôt que porteuses de Vie. Le choix est nôtre.Terrible responsabilité que celle là qui nous fait seul responsable de nos

manquements envers la Lumière et la Vie. Mais aussi fantastique pouvoir que celui qui nous permet de nous réorienter. Par une ferme décision, par un rajustement de la volonté, par le courage de la prise de conscience et de l'acceptation de la Vérité, nous pouvons à nouveau tourner les yeux vers le Soleil d'Amour Indicible et prendre la main de Celui qui nous la tend et ne désire qu'une chose : nous investir de Sa force et nous hisser au-dessus de notre mesquinerie quotidienne. (à suivre)

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Le véritable chrétien, le véritable chevalier pratique perpétuellement cette prise de conscience, sans repos il mène la croisade contre les démons nés des graines qu'il a lui-même plantés ou que la tempête de la vie a porté jusque dans son jardin intérieur. La période de carême est l'occasion de pousser les troupes de la vertu plus avant, de mener une percée décisive contre l'Adversaire.On est loin de l'apitoiement sur soi et de l'auto-dénigrement, loin de la macération masochiste, loin de la simple observance morale, on est dans une optique de transformation radicale de l'être, de marche vers un niveau plus avancé de conscience.L'ascèse du carême propose de rejeter le manteau du vieil homme afin de se vêtir du blanc manteau de l'Homme nouveau qui participera aux énergies divines et deviendra un champion de la Lumière et du Christ.Cette lutte contre nos passions ne sera pas facile, elle n'est pas un passe-temps ou une vague idée abstraite, elle est un travail de fond incessant sur notre être.Dans ce combat, nous devrons nous assurer l'aide d'alliés de taille, les armées angéliques et les saints sont prêts à nous porter secours, à conditions toutefois que nous les laissions agir en nous et dans notre existence. Une fois encore, il faut préciser qu'il ne s'agit pas ici d'une image. La prière vers les saints et la demande sincère de l'aide des anges permettent réellement à ceux-ci de se manifester dans notre vie et de nous mener vers la victoire. Rêves, inspirations, événements opportuns, leur mode d'action n'a pas de limite. Il se peut aussi que de nouvelles épreuves et difficultés surgissent, toujours celles-ci seront l'occasion de nous dépasser, de nous révéler un travers que nous n'avions pas encore identifié. Une épreuve de vie est un ennemi qui sort du bois, embusqué qu'il était dans notre forêt intérieure. Soudain le voilà qui surgit, fait pleuvoir ses traits enflammés, fait charger ses palefrois de la nuit. Qu'à cela ne tienne, nous sommes prêt aux combats et les épreuves ne sont qu'occasions de nous renforcer dans notre foi.Car, si nous le voulons, nous sommes en permanence sous la protection du Créateur du Monde qui par son Incarnation, a tout assumé afin que tout soit guéri. Il nous donna les armes et la possibilité de vaincre, afin que « la nature humaine qui était autrefois vaincue par le moyen des épreuves, vainquit à son tour celui qui autrefois l'avait vaincu. »(Saint Jean Damascène)

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Le carême est donc l'occasion de fourbir nos armes, d'aiguiser notre épée, de rajuster notre armure et de reprendre l'entraînement. Concrètement, de renouer avec une discipline spirituelle adaptée à notre être. Les exercices spirituels sont à l'âme ce que les entraînements à l'équitation et au maniement de l'épée sont au corps du chevalier. Et tout comme pour le combat physique, il faudra choisir un programme adapté à sa personnalité et à sa structure mentale : prière, lecture du Livre Saint, visualisation, oraison, ouverture du cœur... autant d'armes mises à notre disposition

afin d'affûter notre âme, afin de s'ouvrir à la Présence et de permettre au Christ de nous revêtir de l'armure. Car si les exercices spirituels sont essentiels, il ne faut pas oublier qu'ils ne sont qu'un moyen de s'ouvrir à la Grâce et non une fin qui sauve.Par l'entraînement régulier, notre âme se met au diapason de Celui qui sauve , peu à peu notre volonté ne fait plus qu'un avec la Sienne, nous pouvons alors vaincre nos iniquités. Ces victoires de notre âme retentissent dans l'Univers à mesure que la victoire finale sur les forces du mal se fait plus proche.Car le travail du chevalier spirituel est entrepris non pour lui même, no n pour son salut individuel mais pour l'évolution de toute l'humanité afin que jaillisse la gloire de la Trinité. Le chevalier spirituel peut alors faire sienne l'ancienne devise templière : Non nobis, Domine, non nobis, sed nomine tuo da gloriam ! (Par pour nous Seigneur, pas pour nous mais pour la gloire de Ton nom)