charles liénart, 5e maire (1797-1798) · l’an v soit le 19 septembre 1797 et son dernier acte le...
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BULLETIN HISTORIQUE DE LAMBERSARTN°8 - Été 2018
Un attentat contre l’Empereur Napoléon III au nord de Lambersart
Le 11 septembre 1855, deux cantonniers découvrent sur la voie ferrée de Lille à Calais, inaugurée en 1848, une boite en tôle de fer placée sous la traverse et dont le disque supérieur présentait deux petites ouvertures qui donnaient passage à deux fils métalliques qui suivaient la voie pendant environ 35 mètres. Ces fils communiquaient avec une pile de Bunsen (grosse pile électrique chimique). La machine infernale placée sur le chemin de fer entre Pérenchies et Lambersart, était destinée à faire sauter le convoi qui devait conduire l’Empereur aux fêtes de Tournai du 12 septembre via Lille… Ce fait divers illustre l’hostilité d’une partie de la population française face au régime autoritaire de Napoléon III, après son coup d’état du 2 décembre 1851 ruinant la IIè république. En dépit d’un contrôle policier sur la presse, l’opinion publique républicaine résiste au régime à l’image de Victor Hugo en exil à Bruxelles puis dans les îles anglo-normandes. La seconde partie du règne de Napoléon III marquera cependant une inflexion libérale réelle de 1859 à 1870. Le courant anarchiste se développe alors en Europe pour culminer avec l’attentat spectaculaire du président de la république française Sadi Carnot le 24 juin 1894 à Lyon. S’en suivra la loi contre la propagande anarchiste, en vigueur jusque 1992.
SOMMAIRE :p.1 : un attentat anarchiste - dossier central : la 5e mairie, premier hôtel de ville -
p.4 : Charles Liénart, 5e maire de Lambersart
Dans les registres de l’état civil, nous trouvons
son premier acte le 5e jour complémentaire de
l’an V soit le 19 septembre 1797 et son dernier
acte le 27 germinal de l’an VI soit le 16 avril 1798
et Balthazar Delobelle est son adjoint. Ce dernier
est remplacé le 1er vendémiaire de l’an VI par
Louis Watrelos, fermier.
En 1790, Charles Liénart est le second élu après
le maire Paul Joseph Duribreux. De même il est
cité comme officier (conseiller) municipal en
1793 sous l’autorité du maire Noël Deleplanque.
Son père, Charles François Liénart (1731-1765)
est échevin de Lambersart. Celui-ci se marie le
22 avril 1755 à Quesnoy sur Deûle avec Anne
Françoise Hovelacque. Ils sont les censiers de la
ferme du Mont Garin appelée autrefois Maugarni
ou de Flines (car appartenant à cette abbaye). La
photo montre la tour porche à pigeonnier
conservée, vue depuis la rue de Verlinghem.
C’était un droit d’église ou de noblesse de possé-
der des pigeons.
Charles Joseph naît le 17 mars 1762 à Lamber-
sart. Il apparaît dans l’acte de baptême de son
fils Henri Joseph Liénart du 23 octobre 1803. Sa
Recherches du Comité Historique de Lambersart : Didier Delval (état-civil ville), Dominique Pagliaro (archives ville), Gilbert Pattou (Syndicat d’Initiatives), Soizic Léger, Catherine Meersdam et Sylvain Leroy (archives SIVOM), Éric Parize (culture-patrimoine-tourisme ville) et Claude Reynaert (historien, adjoint au maire culture-patrimoine-archives). Textes et photos : Claude Reynaert et Éric ParizePour nous contacter :[email protected] de Lambersart 19, avenue Clemenceau 59130 Lambersartwww.lambersart.fr/bulletin-historiqueParution chaque mois sauf juillet-août. Versions numériques disponibles dans la rubrique « retour sur notre histoire ».Responsable de publication : Claude REYNAERT Secrétaire de publication : Éric PARIZE
Impression ville de Lambersart
Charles Liénart, 5e maire (1797-1798)
femme est Marie Catherine Joseph Descamps.
La mention de cultivateur montre la continuité
du recrutement des maires dans le monde des
riches paysans : les censiers. Nous avons égale-
ment retrouvé sa signature, ainsi que son acte
de décès à Warneton (Belgique) : le 31 octobre
1832 à l’âge de 70 ans.
La 4e mairie installée dans l’ancienne école du
Bourg (voir bulletin 7) va durer 20 ans en dépit
de son inconfort et son inadaptation à une ville
qui dépasse les 10.000 habitants à la veille du
XXe siècle. On peut l’expliquer à la faiblesse des
ressources de la commune à l’époque et à la
charge provoquée par la construction de la
nouvelle église Saint Calixte (1894 à 1896) et
l’agrandissement de l’église Saint Sépulcre
(1890), ainsi que d’écoles publiques de garçons
tant au Bourg qu’à Canteleu. Les efforts finan-
ciers pour arrimer à la commune le hameau
industriel et ouvrier de Canteleu depuis sa
tentative de sécession en 1876, sont réels. Un
hôtel de ville prestigieux au milieu de l’avenue
de l’Hippodrome, à mi-distance du Bourg de
Lambersart et de Canteleu, est-il l’aboutisse-
ment de cette politique ?
Le facteur démographique est un paramètre
LA 5e MAIRIE 1er Hôtel de Ville de Lambersart !
DOSSIER
essentiel mais l’arrivée du colonel à la retraite
Félix Clouët des Pesruches (voir photos) au
poste de maire en 1892 est d’une importance
capitale. Cet officier de carrière bonapartiste
vient résider dès 1878 à Lambersart dans le
château Saint Louis de son oncle décédé, le
colonel Eudoxe Poulle, rue de la Carnoy (sa
façade donnant actuellement sur le parc du
Ginkgo). Ce maire contribue par un gros don à
la reconstruction de Saint Calixte et à la
construction en 1880 des écoles catholiques
Jeanne d’Arc et St-Joseph au Bourg. Il est vrai
qu’il hérite d’une fortune familiale considé-
rable.
Le prolongement de l’avenue de l’Hippodrome
de Canteleu vers le Bourg en 1890 décidé par le
maire précédent Alfred Becquart, son adjoint
Félix Clouët et le conseiller municipal Edmond
Ory instigateur de la première moitié de l’ave-
nue, se fait dans l’idée de vendre les terres
agricoles des frères Becquart, censiers de la
ferme de l’Anglée (site actuel de la place Félix
Clouët), en parcelles de terrain à bâtir. Dans
l’opposition municipale, Richard Bailly, ancien
maire, s’oppose en vain au projet Becquart,
proposant une grande avenue entre Canteleu
et les terres de sa pépinière du Canon d’or
(c’est l’axe actuel des avenues de Bouf-
flers-Verdun-Foch-Doumer achevé en 1935).
Les prescriptions du cahier des charges impo-
sées aux acquéreurs des terrains Ory-Grou-
lois s’appliquent aussi au prolongement de
l’avenue, en particulier le recul imposé de 10
mètres des constructions par rapport à
l’alignement du trottoir. Le maire Félix Clouët
décide de construire un hôtel de ville presti-
gieux sur un terrain offert par Edmond Ory à
l’angle de l’avenue du Bois (Delécaux depuis).
Edifié de 1894 à 1898 et dessiné par l’archi-
tecte lillois Henri Boudin (déjà auteur pour
Clouët de St-Calixte, St-Sépulcre, etc…), sa
composition académique en angle de rue est
de style éclectique. L’angle est marqué par
une tour imposante avec deux ailes en retour
pour la mairie et la poste. La tour à étage noble
avec attique a sa couverture conique surmon-
tée d’un lanternon, rappelant la guette com-
munale d’un beffroi Renaissance. Les ailes
sont de trois travées d’expression classique.
Devenue trop petite malgré le départ de la
poste vers son nouvel hôtel des PTT (en 1929
en bas de l’avenue Derville devenue Maréchal
Leclerc), elle sera siège d’associations et de la
recette municipale après 1937. Ce bel ouvrage
sera détruit en février 1965 pour faire place en
1966 à un immeuble privé (banque et apparte-
ments de nos jours), peu soucieux d’affirmer
l’angle des avenues comme sut le faire Henri
Boudin. Félix Clouët profita peu de sa nouvelle
mairie, décédant de maladie en 1897. Ce
seront son adjoint devenu maire Auguste
Bonte, puis Henri Delécaux, Georges Petit,
Albert Mabille de Poncheville et Charles Van-
cauwenberghe au début de son mandat...
Félix Clouët Edmond Ory Henri Boudin
L’hôtel de ville en 1898 (photo en page une : en 1896 avec villa Nelly à droite) vu depuis l’avenue de l’Hippodrome.
En 1900, vu depuis l’avenue du Bois (rue Auguste Bonte ici) avec café de la Mairie à droite (restaurant maintenant).
L’horloge de la mairie est un bon indicateur.
La 4e mairie installée dans l’ancienne école du
Bourg (voir bulletin 7) va durer 20 ans en dépit
de son inconfort et son inadaptation à une ville
qui dépasse les 10.000 habitants à la veille du
XXe siècle. On peut l’expliquer à la faiblesse des
ressources de la commune à l’époque et à la
charge provoquée par la construction de la
nouvelle église Saint Calixte (1894 à 1896) et
l’agrandissement de l’église Saint Sépulcre
(1890), ainsi que d’écoles publiques de garçons
tant au Bourg qu’à Canteleu. Les efforts finan-
ciers pour arrimer à la commune le hameau
industriel et ouvrier de Canteleu depuis sa
tentative de sécession en 1876, sont réels. Un
hôtel de ville prestigieux au milieu de l’avenue
de l’Hippodrome, à mi-distance du Bourg de
Lambersart et de Canteleu, est-il l’aboutisse-
ment de cette politique ?
Le facteur démographique est un paramètre
LA 5e MAIRIE 1er Hôtel de Ville de Lambersart !
DOSSIER
essentiel mais l’arrivée du colonel à la retraite
Félix Clouët des Pesruches (voir photos) au
poste de maire en 1892 est d’une importance
capitale. Cet officier de carrière bonapartiste
vient résider dès 1878 à Lambersart dans le
château Saint Louis de son oncle décédé, le
colonel Eudoxe Poulle, rue de la Carnoy (sa
façade donnant actuellement sur le parc du
Ginkgo). Ce maire contribue par un gros don à
la reconstruction de Saint Calixte et à la
construction en 1880 des écoles catholiques
Jeanne d’Arc et St-Joseph au Bourg. Il est vrai
qu’il hérite d’une fortune familiale considé-
rable.
Le prolongement de l’avenue de l’Hippodrome
de Canteleu vers le Bourg en 1890 décidé par le
maire précédent Alfred Becquart, son adjoint
Félix Clouët et le conseiller municipal Edmond
Ory instigateur de la première moitié de l’ave-
nue, se fait dans l’idée de vendre les terres
agricoles des frères Becquart, censiers de la
ferme de l’Anglée (site actuel de la place Félix
Clouët), en parcelles de terrain à bâtir. Dans
l’opposition municipale, Richard Bailly, ancien
maire, s’oppose en vain au projet Becquart,
proposant une grande avenue entre Canteleu
et les terres de sa pépinière du Canon d’or
(c’est l’axe actuel des avenues de Bouf-
flers-Verdun-Foch-Doumer achevé en 1935).
Les prescriptions du cahier des charges impo-
sées aux acquéreurs des terrains Ory-Grou-
lois s’appliquent aussi au prolongement de
l’avenue, en particulier le recul imposé de 10
mètres des constructions par rapport à
l’alignement du trottoir. Le maire Félix Clouët
décide de construire un hôtel de ville presti-
gieux sur un terrain offert par Edmond Ory à
l’angle de l’avenue du Bois (Delécaux depuis).
Edifié de 1894 à 1898 et dessiné par l’archi-
tecte lillois Henri Boudin (déjà auteur pour
Clouët de St-Calixte, St-Sépulcre, etc…), sa
composition académique en angle de rue est
de style éclectique. L’angle est marqué par
une tour imposante avec deux ailes en retour
pour la mairie et la poste. La tour à étage noble
avec attique a sa couverture conique surmon-
tée d’un lanternon, rappelant la guette com-
munale d’un beffroi Renaissance. Les ailes
sont de trois travées d’expression classique.
Devenue trop petite malgré le départ de la
poste vers son nouvel hôtel des PTT (en 1929
en bas de l’avenue Derville devenue Maréchal
Leclerc), elle sera siège d’associations et de la
recette municipale après 1937. Ce bel ouvrage
sera détruit en février 1965 pour faire place en
1966 à un immeuble privé (banque et apparte-
ments de nos jours), peu soucieux d’affirmer
l’angle des avenues comme sut le faire Henri
Boudin. Félix Clouët profita peu de sa nouvelle
mairie, décédant de maladie en 1897. Ce
seront son adjoint devenu maire Auguste
Bonte, puis Henri Delécaux, Georges Petit,
Albert Mabille de Poncheville et Charles Van-
cauwenberghe au début de son mandat...
Félix Clouët Edmond Ory Henri Boudin
L’hôtel de ville en 1898 (photo en page une : en 1896 avec villa Nelly à droite) vu depuis l’avenue de l’Hippodrome.
En 1900, vu depuis l’avenue du Bois (rue Auguste Bonte ici) avec café de la Mairie à droite (restaurant maintenant).
L’horloge de la mairie est un bon indicateur.
BULLETIN HISTORIQUE DE LAMBERSARTN°8 - Été 2018
Un attentat contre l’Empereur Napoléon III au nord de Lambersart
Le 11 septembre 1855, deux cantonniers découvrent sur la voie ferrée de Lille à Calais, inaugurée en 1848, une boite en tôle de fer placée sous la traverse et dont le disque supérieur présentait deux petites ouvertures qui donnaient passage à deux fils métalliques qui suivaient la voie pendant environ 35 mètres. Ces fils communiquaient avec une pile de Bunsen (grosse pile électrique chimique). La machine infernale placée sur le chemin de fer entre Pérenchies et Lambersart, était destinée à faire sauter le convoi qui devait conduire l’Empereur aux fêtes de Tournai du 12 septembre via Lille… Ce fait divers illustre l’hostilité d’une partie de la population française face au régime autoritaire de Napoléon III, après son coup d’état du 2 décembre 1851 ruinant la IIè république. En dépit d’un contrôle policier sur la presse, l’opinion publique républicaine résiste au régime à l’image de Victor Hugo en exil à Bruxelles puis dans les îles anglo-normandes. La seconde partie du règne de Napoléon III marquera cependant une inflexion libérale réelle de 1859 à 1870. Le courant anarchiste se développe alors en Europe pour culminer avec l’attentat spectaculaire du président de la république française Sadi Carnot le 24 juin 1894 à Lyon. S’en suivra la loi contre la propagande anarchiste, en vigueur jusque 1992.
SOMMAIRE :p.1 : un attentat anarchiste - dossier central : la 5e mairie, premier hôtel de ville -
p.4 : Charles Liénart, 5e maire de Lambersart
Dans les registres de l’état civil, nous trouvons
son premier acte le 5e jour complémentaire de
l’an V soit le 19 septembre 1797 et son dernier
acte le 27 germinal de l’an VI soit le 16 avril 1798
et Balthazar Delobelle est son adjoint. Ce dernier
est remplacé le 1er vendémiaire de l’an VI par
Louis Watrelos, fermier.
En 1790, Charles Liénart est le second élu après
le maire Paul Joseph Duribreux. De même il est
cité comme officier (conseiller) municipal en
1793 sous l’autorité du maire Noël Deleplanque.
Son père, Charles François Liénart (1731-1765)
est échevin de Lambersart. Celui-ci se marie le
22 avril 1755 à Quesnoy sur Deûle avec Anne
Françoise Hovelacque. Ils sont les censiers de la
ferme du Mont Garin appelée autrefois Maugarni
ou de Flines (car appartenant à cette abbaye). La
photo montre la tour porche à pigeonnier
conservée, vue depuis la rue de Verlinghem.
C’était un droit d’église ou de noblesse de possé-
der des pigeons.
Charles Joseph naît le 17 mars 1762 à Lamber-
sart. Il apparaît dans l’acte de baptême de son
fils Henri Joseph Liénart du 23 octobre 1803. Sa
Recherches du Comité Historique de Lambersart : Didier Delval (état-civil ville), Dominique Pagliaro (archives ville), Gilbert Pattou (Syndicat d’Initiatives), Soizic Léger, Catherine Meersdam et Sylvain Leroy (archives SIVOM), Éric Parize (culture-patrimoine-tourisme ville) et Claude Reynaert (historien, adjoint au maire culture-patrimoine-archives). Textes et photos : Claude Reynaert et Éric ParizePour nous contacter :[email protected] de Lambersart 19, avenue Clemenceau 59130 Lambersartwww.lambersart.fr/bulletin-historiqueParution chaque mois sauf juillet-août. Versions numériques disponibles dans la rubrique « retour sur notre histoire ».Responsable de publication : Claude REYNAERT Secrétaire de publication : Éric PARIZE
Impression ville de Lambersart
Charles Liénart, 5e maire (1797-1798)
femme est Marie Catherine Joseph Descamps.
La mention de cultivateur montre la continuité
du recrutement des maires dans le monde des
riches paysans : les censiers. Nous avons égale-
ment retrouvé sa signature, ainsi que son acte
de décès à Warneton (Belgique) : le 31 octobre
1832 à l’âge de 70 ans.