casablanca 2010 : le traitement arv en tant que prévention
DESCRIPTION
Présentation de Bernard Hirschel, Unité VIH/sida, Hôpitaux Universitaires de Genève, Genève, Suisse, pour la conférence francophone de Casablanca 2010.TRANSCRIPT
Le traitement ARV en tant que prévention
Bernard HirschelUnité VIH/SIDA
Hôpitaux Universitaires de GenèveGenève, Suisse
L’impasse de la prévention
• Comportement sexuel
• Préservatifs
• Circoncision
• Vaccins
• Microbicides
L’abîme entre la théorie et la L’abîme entre la théorie et la pratique pratique
Oral Acyclovir
Couples sérodiscordant: Pourcent de partenaires infectés après 10 ans
Taux d’échec réel
Taux d’échec théorique
Vaccines
Préservatif
Oral ARV
0 40 60 8020
Abstinence
Ward Cates
Trithérapies: potentiellement plus
efficaces
Tous Hommes-Femmes Femmes-Hommes
Etude « Rakai » : risque de transmission en fonction de la charge virale.
Pas de transmission, si CV «indétectable»
Quinn et al. N Engl J Med 2000;342:921-9
N Engl J Med 1999;341:394-402
Maternal levels of plasma HIV RNA and the risk of perinatal transmission
Pas de transmission, si virémie maternelle < 1000/ml
Virémie d’une mère de nouveau-né non infecté
Virémie d’une mère de nouveau-né infecté
Transmission Mère-Enfant
0
5
10
15
20
25
30
< 1994 1996 2000 2004
AZT
Trithérapie% enfantsinfectés
Transmission par lait maternel
0
2
4
6
8
10
Sans traitement
% enfantsinfectés
Peltier et al. AIDS 2009, 23:2415-23
227 enfants au sein, mères sous NVP/3-TC/AZT, au Rwanda, une infection
Effets de la trithérapie sur la transmission hétérosexuelle
• 393 couples hétérosexuels à Madrid• Le patient “index” HIV +, consulte entre 1991-2003• Parmi les partenaires sexuels, le seul facteur de
risque pour le VIH était l’exposition au patient “index”
• Tous les partenaires furent testés, pour mesurer la prévalence de l’infection VIH parmi les partenaires.
Castilla, et al. JAIDS 2005; 40:96-101
Prévalence de l’infection VIH parmi les partenaires
0
2
4
6
8
10
12
< 1996 99-03
Pré-trithérapie Trithérapie
Po
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infe
cté(
e)s
Castilla, et al. JAIDS 2005; 40:96-101
« Trithérapie versus préservatifs »Taux d’infections chez les partenaires sexuels
Traitement dupatient index
Sans ttmt
Mono- oubithérapie
Trithérapie
Préservatifs
>1x/moissans
<1x/moissans
Tjs avec
0
2
4
6
8
10
12
0123456789
10%
%
Préservatif + Trithérapie comparés à préservatif seul: 3 études africaines
Ce qu’elles ont en commun:• Couples séro-discordants• Promotion du préservatif
Ce qui les différencie:• Etude A*, sans trithérapie (a évalué l’effet de la
circoncision sur la transmission homme-femme)
• Etude B**, avec trithérapie• Etude C***, période sans trithérapie suive de période
avec trithérapie
* Wawer M et al. Lancet 2009**Bunnell R et al. Abstract 29, 15th CROI, Boston 2008*** Donnell D, 17th CROI, San Francisco, 2010, Abstract 136
Résultats
Etude A* Etude B** Etude C***« avant » « après »
Préservatifs Trithérapie - -
Infections %/an 12 0.5 2.23 0.39
* Wawer M et al. Lancet 2009; 374:229-37 **Bunnell R et al. Abstract 29, 15th CROI, Boston 2008, AIDS 2006*** Donnell D, 17th CROI, San Francisco, 2010, Abstract 136
En conclusion
• HAART diminue la transmission Mère-Enfant• HAART diminue la transmission hétérosexuelle
(pas de données concernant la transmission homosexuelle)
• En Afrique et en Europe, HAART semble plus efficace que les préservatifs, chez les couples séro-discordants hétérosexuels.
Effets de la trithérapie sur l’épidémie du SIDA
Projections en Colombie britannique
Hogg et al. Unpublished, 2006
Traités tous
Traités 30%
0123456789
10
200620102014201820222026203020342038
Infe
cti
on
s V
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2006 10 14 18 22 26 30 34 38 42 2050
0
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2006 2010 2014 2018 2022 2026 2030 2034 2038 2042 2046 2050
Year
Cos
t (bi
llion
s)Coûts du traitement
Traités tousTraités 30%
2006 10 14 18 22 26 30 34 38 42 2050
109 $
Hogg et al. Unpublished, 2006
0
5
10
15
20
25
30
2006 2010 2014 2018 2022 2026 2030 2034 2038 2042 2046 2050
Year
Cos
t (bi
llion
s)Coûts du traitement
2006 10 14 18 22 26 30 34 38 42 2050
Billions de $
Petits investissements
Grandeséconomies
• Lima VD et al. Expanded Access to Highly Active Antiretroviral Therapy: A Powerful Strategy to Curb the HIV Epidemic; JID 2008; volume 198, July 1.
• Hogg et al. Unpublished, 2006
Kahn JG et al. Economic Analysis of ART for Prevention in South Africa. 17th CROI, San Francisco, Febr. 2010, abstract 965
Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles…*
* Box, G.E.P., Robustness in the strategy of scientific model building, in Robustness in Statistics, R.L. Launer and G.N. Wilkinson, Editors. 1979, Academic Press: New York.
Les modèles diffèrent…
2000 2020 2040
ARV for CD4 < 350
Granich et Williams. 2008 Luna et Montaner. 2008
Et cela porte à conséquence…
ARV for CD4 < 350
Luna et al. 2008
Si Luna et Montaner ont raison, il suffit de traiter > 75% de ceux dont les CD4 < 350, et à terme, il n’y aura plus de nouvelles infection: le VIH va disparaître de la population
2000 2020 2040
ARV for CD4 < 350
Granich et al. 2008
Mais si Granich et Williams ont raison, on ne vaincra jamais le VIH en traitant tous ceux qui ont moins de 350 CD4. Il faut tester tout le monde fréquemment et traiter tous les séropositifs (courbe verte)
Trêve de modèles, il nous faut des études et des données !
HPTN* 052
• Mike Cohen et al.: Une étude randomisée pour évaluer la trithérapie + soins anti-VIH primaires, comparée aux soins anti-VIH primaires seuls, pour la prévention de la transmission sexuelle dans les couples séro-discordants.
• Boston, Rio, Blantyre et Lilongwe au Malawi, Harare au Zimbabwe, Pune et Chennai en Inde, Chiang Mai en Thailand
* HPTN: Health Prevention and Treatment Network
Critères d’inclusion
• 1’750 couples (3’500 individus)• CD4 = 350-550 cellules/mm3
• Un partenaire HIV+, l’autre HIV-• Peut être hétérosexuel ou homosexuel,
cependant, en réalité: – Seulement 3% HSH dans une étude pilote– Femme séropositive, homme séronégatif, et vice
versa, en proportion approx. égale
• Endogames: 93% disent qu’ils n’ont eu qu’un seul partenaire sexuel durant les 6 derniers mois.
Randomisation
• Dans le groupe d’intervention, la trithérapie commence tout de suite, donc à un taux de CD4 entre 350 et 550.
• Dans le groupe contrôle, selon les indications locales
Critères de jugement
1. Transmissions2. Progression selon la classification de l’OMS,
tuberculose, décès (également une étude « quand commencer »).
3. Toxicité de la trithérapie
Suivi planifié: 5 ans. Surveillance de la résistance, de l’effet des MST
sur la transmission VIH, des réponses immunologiques au VIH etc…
HTPN 052: Calendrier
05-06: Phase pilote chez 82 couples2007: Début6/08: Recrutement de 800 couples, expansion du
recrutement en Afrique7/09: 1’200 couples recrutés*6/14: Fin du suivi
* Mike Cohen, communication personnelle, Capetown, 22/07/2009
Limites de HPTN052
• Couples sérodiscordant hétérosexuels: seulement une partie du problème
• Population générale: L’approche de randomisation individuelle n’est pas faisable
• On mesure l’incidence de l’infection VIH avant l’introduction de l’ART, puis après
• Exemple: Colombie britannique (J. Montaner et al.)
Population générale:L’approche avant-après
Charges virales en Colombie britannique, 1996-2009• Chaque individu est représenté une fois par an avec sa CV la plus élevée
pour l’année
Etude de cohorte VIH Suisse
09(preliminary)
31.12.2009)2009
Problèmes avec l’approche avant-après
• « Maman, viens vite, j’ai heurté le réverbère avec mon tricycle et toutes les lumières se sont éteintes » (Tribune de Genève, 28 septembre 2003)
• « Les enfants dont les mères écoutent du Mozart pendant la grossesse sont plus intelligents » (Tribune de Genève, 28 juin 2008)
• « Le vaccin contre le H1N1 m’a déclenché une sclérose en plaque » (Tribune de Genève, 15 mars 2010)
Elle n’est pas nouvelle, l’erreur « post hoc ergo propter hoc »
Comment faire mieux (1)
• Comparer deux régions, en même temps:– Dans une on augmente la diffusion des ARV– Dans l’autre on fait comme d’habitude
On mesure, dans les deux, le nombre de nouvelles infections VIH
• C’est mieux, mais pas parfait: Les deux régions se distingueront sûrement sur de nombreux points :
– Nombres et types de partenaires sexuels– Utilisation du préservatif– Prévalence de la circoncision– etc
Mais si on ne comparait pas deux, mais 30 régions, 15 avec expansion ARVs, 15 sans, et chaque fois,
l’incidence tombe dans les régions avec expansion ARVs, mais non dans les régions contrôle…
Mais si on ne comparait pas deux, mais 30 régions, 15 avec expansion ARVs, 15 sans, et chaque fois,
l’incidence tombe dans les régions avec expansion ARVs, mais non dans les régions contrôle…
C’est l’idée essentielle de l’essai randomisé par grappes (cluster-randomized trial), où
l’unité de randomisation n’est pas un individu, mais un groupe, p.ex. tous les habitants d’un
village
Le centre africain pour desétude de santé et de population
Durban
Johannisburg
Antiretroviral Treatment as Prevention (TasP), A cluster-randomized trial in Hlabisa, KwaZulu-Natal, South Africa
• Newell ML, Dabis F et al.
• Projet soumis à l’ANRS, en 3 phases
• Phase pilote 2010 – 2013, 4 « grappes »
• Essai propre, 2013 – 2015, 28 « grappes »
Newell et al.
Obstacles
1. Usure
2. Compensation de risque
3. Désavantages (pour l’individu) versus bénéfice (pour la communauté)
4. Coût et durabilité
Usure…Groupe d’intervention
• Pas tous seront testés• De ceux qui sont testés,
certains ne recevront pas leur résultat
• De ceux qui le reçoivent et sont HIV+, pas tous seront traités
• De ceux qui sont traités, pas tous auront un traitement efficace
• Des traités efficacement, certains arrêteront
Attrition…Group contrôle
• Certains sont déjà traités• La proportion des traités
augmentera:– Meilleur accès au traitement– Révision des indications (limite
de 350 ou 500 cellules plutôt que 200 etc.)
• De ceux qui ne sont pas traités, beaucoup utiliseront d’autres méthodes de prévention:– Préservatifs– Circoncision
– Microbicides– etc
Groupe d’intervention• Pas tous seront testés• De ceux qui sont testés,
certains ne recevront pas leur résultat
• De ceux qui le reçoivent et sont HIV+, pas tous seront traités
• De ceux qui sont traités, pas tous auront un traitement efficace
• Des traités efficacement, certains arrêteront
Usure: Exemple de la PTME
• Femmes enceintes 40000• Ont reçu des conseils 17263 40000 43%• Testées 12438 40000 31%• On reçu les résultats 12065 40000 30%• Positives 2924 9403 30%• On reçu la névirapine
– Mères 1654 940318%
– Enfants 1157 940312%
• Partenaires testés 86 9403 0.9%
Observé Idéal Obs/Idéal
Source: Stringer EM et al. AIDS 2003; 17:3077 (Lusaka, Zambia)
Compensation de risque
• Risques sexuels augmentés dans les « grappes » d’intervention– Peut être important, ou non, si les sujets prennent les
ARVs– Les essais de circoncision sont rassurant de ce point
de vue, sans augmentation de prise de risque sexuel dans les groupes d’intervention
Désavantages (pour l’individu) vs. bénéfice (pour la communauté)
• Tout compte fait, l’essai produira des bénéfices limités pour l’individu, mais un grand bénéfice potentiel pour la communauté
• Risques et bénéfices médicaux:– Les personnes dans les grappes d’intervention auront
probablement moins de maladies liées au VIH. Ce bénéfice sera quantifié dans l’essai.
– Néanmoins, des individus asymptomatiques avec un système immun intact bénéficieront peu, et certains auront d’effets adverses imputables au traitement
• Risques non-médicaux– Stigmatisation et discrimination
Ressources and Durabilité
La poursuite de l’effet préventif du traitement augmentera le nombre de personnes éligible pour trithérapie
– Augmentera les coûts– Augmentera la pression pour rendre disponible les
ARVs– ? Priverait ceux qui en ont le plus besoin (les
immunosupprimés) de traitement ?– Durabilité d’un programme « ARVs pour prévenir » ?– Sélection de souches résistantes ?
ARVs pour prévenir: L’essai randomisé n’est que la première étape
TasP1: Années 1 à 3:
Evaluation
TasP2: Années suivantes
TasP1 comparé à Tasp2
TasP1 TasP2
Randomisation Grappes Aucune
Indication pour la trithé- Tous HIV+ Tous HIV+rapie dans les grappes d’intervention
Indication pour trithérapie Soins habituels Tous VIH+ dans le groupe contrôle (pas de contrôles)
Suivi 2 ans 3-8 ans
Raison d’être Efficacité Durabilité
Acknowledgements
• ANRS• F. Dabis• Marie-Louise Newell• J. Montaner• R. Granich• M. Cohen• A. Calmy, E. Boffi