cas pratique sort du contrat de travail en cas de ... · • cas pratique sort du contrat de...

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tout l’emploi & formation • no 582 • 25 mars 2013 formation 51 cas pratique sort du contrat de travail en cas de transfert d’entreprise christine a travaillé comme ambulancière pour ambulances Z. lors d’une réunion du personnel, l’employeur a fait état de difficultés financières, qui l’incitaient à cesser ses activités. a l’instar des 25 autres employés. christine a été licenciée le 28 juillet pour le 30 septembre. par la suite, l’employeur a informé 20 des 25 employés que le congé était «nul et non avenu», précisant que dans le cadre de la reprise par une autre société, leur contrat de travail serait transféré à la nouvelle entité. christine ne faisait pas partie des collaborateurs dont le congé était ainsi annulé… elle s’est dès lors opposée à son licenciement. S elon l’article 333 CO, si l’employeur transfère l’en- treprise, ou une partie de celle-ci, à un tiers, les rapports de travail passent à l’acquéreur, avec tous les droits et obligations qui en découlent, au jour du transfert, à moins que le travailleur ne s’y op- pose. Ainsi, une véritable obligation de reprise incombe à l’acquéreur et il n’est pas possible d’écarter cette conséquence en concluant une convention dérogatoire entre l’em- ployeur qui transfère l’entreprise et celui qui la reprend. Seuls les contrats en cours sont transférés Seuls les rapports de travail exis- tant au moment du transfert de l’entreprise passent à l’acquéreur, y compris les contrats résiliés pour une date postérieure au trans- fert. Cela signifie que le travailleur dont le contrat a été résilié pour un terme précédent le moment du transfert, comme c’est le cas pour Christine, ne verra pas ses rapports de travail repris par le reprenant. Lorsque le congé intervient à l’oc- casion du transfert d’entreprise, il se pose toutefois la question de savoir si la résiliation du contrat de travail par l’employeur n’est pas abusive. Il n’est pas possible de licencier pour éviter le transfert La règle du transfert automatique des relations de travail a été in- troduite dans le droit suisse dans un but d’harmonisation avec le droit européen. Selon la directive européenne, un tiers ne peut pas reprendre une entreprise sans re- prendre simultanément le person- nel de celle-ci. La directive précise que le transfert d’entreprise ne constitue pas en lui-même un mo- tif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire, ce qui ne fait pas obstacle à des licenciements intervenant pour des raisons éco- nomiques, techniques ou d’organi- sation. Il est nécessaire de déterminer le réel motif de licenciement En droit suisse aussi, le licencie- ment est dès lors abusif s’il a pour unique but d’empêcher le transfert des rapports de travail ou de faire perdre des avantages liés notam- ment à l’ancienneté (prime de fi- délité, délais de résiliation…) à des employés licenciés et ensuite réen- gagés par le reprenant. En l’espèce, le Tribunal a considéré que le licenciement collectif du 28 juillet paraissait fictif, dans la me- sure où il permettait à la société reprenante de choisir ses futurs employés, par ce qui ressemblait certes à un contournement de la loi, mais qu’en fait, les réels motifs étaient véritablement économiques. En effet, la société Ambulances Z connaissait de graves difficultés financières. Dans ce contexte, il a été admis qu’une réduction du personnel constituait une mesure propre à améliorer la situation sur le plan financier. Il n’y a donc pas eu fraude à la loi dans ces circons- tances et la résiliation du contrat de travail de Christine a été considéré comme valable. n Nicole de Cerjat, juriste, responsable du service juridique au secrétariat romand de la SEC Suisse, Neuchâtel Société suisse des Employés de Commerce (SEC Suisse) Case postale 3072 2001 Neuchâtel Tél. 0848 810 910 (membres) Tél. 0901 555 717 (non- membres: Fr. 2.50 / min.). l’art», mais elles ne sont pas as- sez pratiques pour être «quali- fiantes», hormis la médecine et le droit, à la rigueur. Leur grand atout, c’est la «certification» (voir geoffroydelagasnerie.com, et le livre «Une société sans école» d’Ivan Illich). Et c’est là que nous pouvons passer au se- cond cas annoncé au début, fût- ce en trois lignes (on y reviendra une autre fois): la «culture scien- tifique», dont les moyens ont été l’objet d’un colloque au Museum (voir rezoscience.ch). La statue du Commandeur «Toute personne a le droit de (…) participer au progrès scien- tifique», dit un article de la Dé- claration universelle des droits de l’homme. La formule est ambiguë: «participer», est-ce en profiter, l’accompagner ou la fabriquer? Tout le monde peut faire de la musique ou de la peinture… pas de la physique ou de la génétique. Le temple de la science est l’Université, ceux de l’art, le cinéma, le festival, ou… le musée. Pourtant, la science est en mal de «communication» et multiplie les «manifestations»: si les écoles – hautes ou basses - n’arrivent plus à donner une «culture scientifique durable» aux jeunes, il y a un problème scolaire. Mais il reste un espoir, dans ce monde saturé de savoir: les textes fédéraux contiennent toujours plus de fautes d’ortho- graphe, comme l’«apprentissage duale»; c’est une bonne nou- velle… par les trous, on respire à nouveau. n Boris Engelson

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tout l’emploi & formation • no 582 • 25 mars 2013

• f o r m at i o n 51

• c a s p r at i q u e

sort du contrat de travail en cas de transfert d’entreprisechristine a travaillé comme ambulancière pour ambulances Z. lors d’une réunion du personnel, l’employeur a fait état de difficultés financières, qui l’incitaient à cesser ses activités. a l’instar des 25 autres employés. christine a été licenciée le 28 juillet pour le 30 septembre. par la suite, l’employeur a informé 20 des 25 employés que le congé était «nul et non avenu», précisant que dans le cadre de la reprise par une autre société, leur contrat de travail serait transféré à la nouvelle entité. christine ne faisait pas partie des collaborateurs dont le congé était ainsi annulé… elle s’est dès lors opposée à son licenciement.

Selon l’article 333 CO, si l’employeur transfère l’en-treprise, ou une partie de

celle-ci, à un tiers, les rapports de travail passent à l’acquéreur, avec tous les droits et obligations qui en découlent, au jour du transfert, à moins que le travailleur ne s’y op-pose. Ainsi, une véritable obligation de reprise incombe à l’acquéreur et il n’est pas possible d’écarter cette conséquence en concluant une convention dérogatoire entre l’em-ployeur qui transfère l’entreprise et celui qui la reprend.

Seuls les contrats en cours sont transférésSeuls les rapports de travail exis-tant au moment du transfert de l’entreprise passent à l’acquéreur, y compris les contrats résiliés pour une date postérieure au trans-fert. Cela signifie que le travailleur dont le contrat a été résilié pour un terme précédent le moment du

transfert, comme c’est le cas pour Christine, ne verra pas ses rapports de travail repris par le reprenant.Lorsque le congé intervient à l’oc-casion du transfert d’entreprise, il se pose toutefois la question de savoir si la résiliation du contrat de travail par l’employeur n’est pas abusive.

Il n’est pas possible de licencier pour éviter le transfertLa règle du transfert automatique des relations de travail a été in-troduite dans le droit suisse dans un but d’harmonisation avec le droit européen. Selon la directive européenne, un tiers ne peut pas reprendre une entreprise sans re-prendre simultanément le person-nel de celle-ci. La directive précise que le transfert d’entreprise ne constitue pas en lui-même un mo-tif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire, ce qui ne fait

pas obstacle à des licenciements intervenant pour des raisons éco-nomiques, techniques ou d’organi-sation.

Il est nécessaire de déterminer le réel motif de licenciementEn droit suisse aussi, le licencie-ment est dès lors abusif s’il a pour unique but d’empêcher le transfert des rapports de travail ou de faire perdre des avantages liés notam-ment à l’ancienneté (prime de fi-délité, délais de résiliation…) à des employés licenciés et ensuite réen-gagés par le reprenant. En l’espèce, le Tribunal a considéré que le licenciement collectif du 28 juillet paraissait fictif, dans la me-sure où il permettait à la société reprenante de choisir ses futurs employés, par ce qui ressemblait certes à un contournement de la loi, mais qu’en fait, les réels motifs étaient véritablement économiques.

En effet, la société Ambulances Z connaissait de graves difficultés financières. Dans ce contexte, il a été admis qu’une réduction du personnel constituait une mesure propre à améliorer la situation sur le plan financier. Il n’y a donc pas eu fraude à la loi dans ces circons-tances et la résiliation du contrat de travail de Christine a été considéré comme valable. n

Nicole de Cerjat, juriste, responsable du service juridique au secrétariat romand de la SEC

Suisse, Neuchâtel

Société suisse des Employés de Commerce(SEC Suisse)Case postale 30722001 NeuchâtelTél. 0848 810 910 (membres)Tél. 0901 555 717 (non-membres: Fr. 2.50 / min.).

l’art», mais elles ne sont pas as-sez pratiques pour être «quali-fiantes», hormis la médecine et le droit, à la rigueur. Leur grand atout, c’est la «certification» (voir geoffroydelagasnerie.com, et le livre «Une société sans école» d’Ivan Illich). Et c’est là que nous pouvons passer au se-cond cas annoncé au début, fût-ce en trois lignes (on y reviendra une autre fois): la «culture scien-

tifique», dont les moyens ont été l’objet d’un colloque au Museum (voir rezoscience.ch).

La statue du Commandeur«Toute personne a le droit de (…) participer au progrès scien-tifique», dit un article de la Dé-claration universelle des droits de l’homme. La formule est

ambiguë: «participer», est-ce en profiter, l’accompagner ou la fabriquer? Tout le monde peut faire de la musique ou de la peinture… pas de la physique ou de la génétique. Le temple de la science est l’Université, ceux de l’art, le cinéma, le festival, ou… le musée. Pourtant, la science est en mal de «communication» et multiplie les «manifestations»: si les écoles – hautes ou basses

- n’arrivent plus à donner une «culture scientifique durable» aux jeunes, il y a un problème scolaire. Mais il reste un espoir, dans ce monde saturé de savoir: les textes fédéraux contiennent toujours plus de fautes d’ortho-graphe, comme l’«apprentissage duale»; c’est une bonne nou-velle… par les trous, on respire à nouveau. n

Boris Engelson