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Carnet de Voyage En Revenant de Soualiga Rentrer à la maison, au terme du Book Fair de Saint-Martin, est une joie d’avoir bien fait le job, et aussi une tristesse d’avoir laissé passer ce temps béni, sans pouvoir garder en bouche la saveur des embruns distillés là, sous le couvert des mots chaleureux et des propos partagés, en l’agréable compagnie de notre invitée d’honneur, Simone Schwarz- Bart. Moment intense : Simone lisant… Cette fois encore, et cela pour la 14 ème édition, nous avons revisité la Karayib. La cubaine, la martiniquaise, la portoricaine, la guadeloupéenne, la saint-martinoise, la marie-galantaise, l’anglophone plurielle, de la Jamaïque à la Barbade, en survolant l’Anguillaise et promis de

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Carnet de Voyage

En Revenant de Soualiga

Rentrer à la maison, au terme du Book Fair de Saint-Martin, est une joie d’avoir bien fait le

job, et aussi une tristesse d’avoir laissé passer ce temps béni, sans pouvoir garder en

bouche la saveur des embruns distillés là, sous le couvert des mots chaleureux et des

propos partagés, en l’agréable compagnie de notre invitée d’honneur, Simone Schwarz-

Bart.

Moment intense : Simone lisant…

Cette fois encore, et cela pour la 14ème édition, nous avons revisité la Karayib. La cubaine, la

martiniquaise, la portoricaine, la guadeloupéenne, la saint-martinoise, la marie-galantaise,

l’anglophone plurielle, de la Jamaïque à la Barbade, en survolant l’Anguillaise et promis de

ne pas interrompre ce pont que le livre construit en nous, afin de rétrécir l’étendue des

mers, qui nous rend parfois si seuls, et combien semblables, car nous sommes ces brisures

inconsolées du baobad commun.

Echantillon de la tablée caraïbe

Nous avons tant de fois fait le contour de nos rivages échancrés, relevé les tessons partagés

de notre histoire ensevelie à la hâte, à partir de tablées gourmandes, sans cesse élargies,

autour de cet axe fort qu’est la parole anglophone, majoritaire. Nous avons compris que

nous ne devons omettre aucune des composantes de cet espace créole agissant là, mieux

encore qu’ailleurs. L’exiguïté du lieu nous obligeant à un coude à coude réconfortant.

Nous sommes à Saint-Martin, melting-pot en perpétuel mouvement, à l’image de la langue

créole qui sonne comme une réponse aux défis de la nécessaire communication, et c’est

Simone, emblématique porte drapeau, qui nous voit comme le « Babel des tropiques ».

Nous, semés au gré des intérêts des colons, nous, autant de piqures d’aiguilles éparpillés

dans les draps indigo de l’espérance…

Nous nous proposons en solution, pour résoudre les barrières de langues!

Pour la première fois, de manière formelle, nous avons consacré un temps fort à l’apport

francophone dans la créolisation de ce bassin, grâce à l’implication amicale et énergique

d’Aline Hanson, que je remercie pour le passage initial du Rubicon des réticences. Je

remercie les organisateurs principaux que sont Shujah et Lasana, et les ballets charmant

des bénévoles.

Un temps de parole dans les langues de chaque cœur. Une écoute complice, quand parfois

seule la musique des mots menait à comprendre ces ailleurs communs. Et la magie prenant,

la parole allait d’un coin à l’autre, entre nous.

C’était l’entame du salon, dans cet espace magique consacré au savoir qu’est la

médiathèque de Marigot. Nous posons cet instant, comme désormais en temps convenu,

qui implante les auteurs invités dans la terre marquée de Soualiga.

Aussi nous avons souligné, que face à la mondialisation économique dont les effets nous

échappent, qu’il y avait une réponse à donner, pour exprimer la prise en compte des

humanisations. Qu’il y avait une âme possible à accrocher à ce volant dévastateur qu’est la

globalisation, et qu’ici, là, au creux de cette battée qu’est le Salon du livre de Saint-Martin,

nous étions en capacité de proposer au monde, pris dans son concert d’urgences

contradictoires, une pépite créole en réponse. Forme de résultante des forces, en

constante poussée positive, prise dans ce flot froid des contraires économiques.

Alors, je me suis posé la question : comment trouver à valoriser dans ce bassin contraint, la

force de notre quotidien créole, en constante élaboration ?

La langue, la culture créole, se posent en tant que réponse véhiculaire, pour un nouveau

vivre ensemble plus large. Pour une nouvelle ordonnance pacifique dont nos rencontres au

Book Fair seraient les prémices.

Ce nous, dans sa fragile genèse, serait une pierre angulaire à polir sur maintes facettes.

C’est dans cet esprit de facilitation, que nous avons souhaité la présence des organisateurs

de l’Association des Ecrivains de la Caraîbe, car nous sommes appelés à mieux nous

connaître, si nous maintenons d’être ce quantième du monde, revenu enfin sur ses assises.

Cérémonie d’ouverture. Couper de ruban.

Le long entretien entre Dominique de AEC et Lasana de HNP, va, à n’en pas douter,

déboucher sur des réalisations qui seront autant d’étais utiles.

La chargée de mission AEC avec Lasana Sekou (House of Nehes Publisher)

Dominique Hubert (AEC) en compagnie de Josiane Fleming (past doyen de l’université de Sint- Marteen . Ancienne ministre)

Ces réflexions de poètes, tenues avec la légèreté des utopies de coin de table, étaient en

filigrane, à chaque rencontre informelle, ou à la suite de workshops nombreux, de très

grande tenue, menées par des experts qui nous ressemblent.

Assemblée inaugurale au Port of Phillisburg

Je devrais dire à ce stade de mon carnet de voyage, que j’ai retrouvé l’ambiance des

cérémonies d’ouverture, avec ce traditionnel Ribbon cutting.

Que les auteurs invités sont repartis reconnaissants à la garde des bénévoles, pour la

qualité de l’accueil et pour leur indéfectible disponibilité. je garde dans mon cœur leurs

prénoms qui sont devenus au fils du temps, mes repères.

Que le Parrot du Divi hotel, qui veillait sur nos tablées, a promis de ne rien dévoiler de nos

complots ambitieux de faire des caraïbes, ainsi nommées par les colons européens, une

seule entité humaine, Caraïbe, avec sa langue qui redeviendrait le Karayib, dont nos

créoles, pidjins, papamiento, et autres broken-english, auraient été les étais consentants .

Nous pouvons abolir la crête des brisants et réduire les bras de la mer qui nous éloigne,

pour jeter ce pont rêvé entre nous.

Ce séjour, comme toute vie, a connu son début, et sa fin fut à la hauteur des belles

conclusions, avec déjà le désir de nous y retrouver, next year.

Le clap de fin s'est donné à la Chambre de Commerce, en partie nord.

Comme toute joie antillaise, la nuit fut longue et conviviale.

Que vive le 15ème Salon du livre de Saint-Martin. Merci aux visages souriants

Max Rippon Bitasyon Durocher juin 2016