canto cantis - lampe-tempete.fr
TRANSCRIPT
CANTO CANTISChants d'amour de la première fois
partimen & jeux-parti
Ritournelle
ils étaient plusieursen rêvanten rêvant écrire ce chant– air ou ritournelleune ballade des dormeurs
Ballade des dormeurs
dors bien, sans heurttu as bien agi
la foule est un passant anonymede quel nom saurait-il répondre?
ne laisse pas, nonmoleste ta folie, et dorsdors bien, sans heurttu as bien agitu as copié le couteau
molesteta folie et dors, dors bien(ses branches mortes doivent être sciées)mais quant au tronc, aux racinespréserve-les, c'est l'ineffable
fécondité
et tes combatsne font que commencer
loyal capricede ma main décidée sous ta robe
tuée net en plein viol, muette« elle n'a plus toute sa chair »(comme on dit « elle n'a pas toute sa tête »)
la ville sans cerveau n'aime pasles chairs trop sucrées
(la formule n'est pas commentairemais exhibition de rapports)
nous avons du saumon fraisde la rascasseet un poivron rougepoche hivernale de réconfort - mangeonsen pleine canicule d'étéle jour stagne comme un lendemain
de champ de batailley pourvoir d'une denrée obscure :l'amour déclaré lève un silencequi décline, lui aussi
suspensionvisages brusquement assombrisou rosis aux sonorités inreconnaissablesair arrêté
ramasse tes vêtements, ô mon corps libéréexpérimente le grand videsans te soucierde qui mangera ton discours
n'aie pas peur de dire « lascif! »même si tout ce qui entend devient lascifet prend un visage couleur de l'aube
il y a un glissé des nombresquand ils ne tictaquent plus indifférentsà la musique qui les gagne
tu marches, vêtements saccagésparmi les putains qui te craignentpartout dans la rue de Molune foi sans soif et une foi de fossoyeur
– alors qu'il fasse soif sans retain -expérimente le grand vide comme un sourireun murmureun vaccuum inattentif
interminable prison du sommeil
Voyager loin, ou l'art de bien rêver
tout livre est profond si tu sais y trouverde nouveaux livresétagère profonde pour des livres tombés derrière les rangstu y cacheras le tien
parerga d'amour guérinoces brisées
(Kott disait « prose amphibie » ou « amphibienne »parlant des commentairesque les poèmes incluent)encore un violon s'entend
Kott a dit
symboles imprévisibles dont on ignore toutsurgissent comme des coupset l'impudeur dévoile un sens indéchiffré
qui voudrait de toi ?
Kotta dit encore
questions scandées comme pilastres,ou colonnes de portiqueelles marquent le pas de la promenade
Kott ou Kottaqui voudrait de toi ?
Un amant des symboles ?
qui voudrait de toi ?
quelque chose d'un aveu premier,et en premier à soi-même :tu es morte
mais parce que l'amour est mort avec toi(j'aurais voulu être ta cause-meurtrier)on préférerait toujours avoir tuél'amour qui nous fut enlevé
la jalousie est le pire des maux
quand débouchant sur la lumière cruedes quais en hiveron la voit, presque debout sur l'eau
y faire rentrer sa tête, chair contre chairchair dans la chairorganes mésalliés que rien ne prédestine
dans le pré d'amour l'aigleAncolie a crocheténos doigts humideset nos désirs déjà concrétisés- et tromper la matière ?trop tard, c'est la matière qui nous a domptés
la meulière de murs résistants que tu as dressésentre l'air et ta peaune peut empêcher le chantni les larmes du dehorsni les larmes du dedansde se coucher dans le même litde la rivière de chair
Nuit dedans – nuit dehors
la lampe la plus pureest souvent obscure, tiens-toiyeux ouverts à l'obscurqui t'éclaire du dedanspour la tisserande aveugleà la lampe de coudre les deux nuits qui s'ignorent
dors enlové en boule de cire que mes mains ont fondueayant pris forme de mon désir assouvije ne suis plus désormais que mains délicatesfourbues à l'exercice d'accordage de tes cris
[idée que la plus repoussante laideuret que la plus indescriptible beautésont toujours dans les choses frôlées, à portée de main(prose amphibienne)
cheveux baignant ton front sombrecheveux baignant lisse ton front blanccheveux ombrant ton front, lisse et blanc
lisse et froid comme l'amour des statuesapprivoisement d'oiseaux morts
un regard de caméra filme le remake de ma mortc'est un regard cruel et aimant – c'est le tiendigne opérateur qui nous fige en symboles
douce charogne dispersée hors de nouscomme un nom qu'on chasse des carnetsou une épave enfouie
matintu mens !Un soleil dégueule d'une bouche de fumée
Stances, ballades, songs
tu mens avec affrontton ombre t'a quittéetu ne souffles plus sur mes braisestu écrases du talon et foules et éteins
sans doute, je refuse tes yeuximpuissante replétion« tu étais, tu étais, tu étais »replétion et pourrissementun miroir blesséce sera tout pour renvoyer ton regard- mais le miroir est plein gorgé comme un organe
Ecart de Silas de Malte :
elle s'aida d'une éponge et de coton pour cautériser la plaiestopper les couluresl'éponge garda et recracha, le coton garda
on veut tuer quand on sent tué ce qui nous semblaitle plus intime à nous-mêmesqu'il meurt donc aussi !
Il commença à aimer les herbeset les poils au briquetles insectes ensuiteet plus rien ne devrait résister à sa négation résolue
dure mine, amour, de tous les mauxmare devenue dure, réveillantl'aiguillon d'un désir lontemps partique trop long temps a masqué -la feuille d'Acanthe est pourpreblanche striée de pourpre
Ecart de Siobhán de Cork :
mais quel est le style de ton désir?
« nécessité de souffrir » - et le sort en est jetélaisse flotter mes lèvres toujours closes, pitién'ouvre pas de force ma bouche
la poésie du sang ne serait plus retenue
Ecart de Louise de Leicester :
lèvres d'un sourire fanécherchent à embrasserlèvres froisséespétales défraîchissur un tapis de corps anéantisnous ne savons pas encore qu'ils sont morts, déjà mortsle rêve que tu crois suivrederrière toi en morceauxil gît sombre dans la cour où tu jouas enfant
Ecart de Siobhán :
sommités de la négation, dignitairesde ton sommeil agité
PREPARE TA PLACEET GARDE-LA
(comme à un repas d'où, invité,tu seras congédié)
toute chose vivant dans un langage dédiéjambes ivresune montagne passera sur toi, avant l'aubedemain tu ne parleras plus(une crispation invisible dans l'air t'avertit du danger)
Ecart de Silas de Malte :
combien sont-ils ?Ici, un miroir brisé en quatrecombien étaient-ils ?là, un peuple entier meurt de ses rêvesderrière ta voix tes visages nombreux ont des traits habileshabiles dessinsfaces de pierre auxquelles on obéit sans les voir
soudain une douce musique lointainedans tes yeux, quand ta parole attentive aux moindres détails sinistresdans tes yeux, une fable revient de loin pour y luire en mensonge
Ecart de Siobhán de Cork :
fais un pain tiède,de coeurs et de foies desséchéset une farine d'os broyés d'oiseaux mortsta gorge étouffée, ta voix en sera lavée
Ecart de Silas de Malte :Aime les corps des faux-vivants
(ce fut tel un titre, mais il ne fit rien à la suite)
Ecart de Santos :
(que de peaux virginales à chiffonner)
ATTENTION : NE PAS TUER
Ecart de Silas :
un corps violéest un corps déserté– c'est là sa souffrance
ta peau feraun beau tapis de prièrea dit Santos
[Répons :
la lune roule dans tes cheveuxpenchée sur moi, crache tes glaireset ton miel d'abstractions hardiesinjurie ce qui entend encoreet qui devient fumier et entend encoreon s'y risque de plain-piedquite à soutenir les plus vains paradoxes(que l'ordure chante un air mélodieux, etc.)il fait blanc dans l'espritet on se fait vide un instanttes membres grelottant de fièvre,
et toi immobile en silence
la lune roule dans tes cheveuxtantôt fourrure, tantôt filsvoletant insaisissable comme le sableou une cervelle obstinée
quels lendemainspour un chemin constant ?
l'amour est une expériencebrûlante et tristeet on fait feude tout ce bois
le soleil peigne les têteset y trace des sueurs
l'ancolie au départ, le chardon à l'arrivéela paix soit sur les facesmouillées de sueur, ivres de larmes
une mère pleure dans ses mains(mais elle assassina des arbres)
et ses enfants jouant des doigtsavec leurs cheveux(seront-ils de futurs meurtriers sous la lune ?)
il y a des combats qui apaisent
mais il y a comédiele détestable air de flûte des hypocrites
Contradiction des funérailles
les draps défaitsles ombres immobilestout semblait attendrele lever du jourles ombres et le serpentdans une corbeille de linges fraistout semblait attendrele lever du jourdont les lueurs n'appartiennent à personne
pourquoi dis-tu que les poissons ont les yeux morts ?alors que leurs yeuxinsatiablesne se ferment jamaissur le sommeil et le rêve
éclairs de chaleur
paysageun âne, un chien assoupile froissement libre d'une robe
l'ulcère des amours qui laisseles rêveurs à l'agoniedes premières aubes
le tempsoù nous étions parolesprêtres ou bêtesà lancer défis et crocheter le ciel
tiens, celui-ci est mortil n'a laissé qu'un silence
Amen.
Aveugle parmi les ruines
haleine caressant les miroirsNarcisse fermé sur soi, prêt de plonger
(ne pas fléchir)
parle donc, aveugle sans joieon imagine des regardson cultive des ruinesbien que nul ne suit l'amère ablution
observe la vue borgne qui recadre la merà gauche elle pensera, pensera et à droitela vue aveugle à l'intérieur du crânetouchera par prophétied'invisibles objets
un autre, croyant d'un oeildans sa fièvre totalitaireavait fait de sa penséeun autel nu, clair époussetéet sans un instant comprendreque son imagination échouasur un autel dévasté
la dérision, sa bonne étoile et le voile du jour– le sourire de Dieufut ici effacé
Buveurs de vérité
il dilapida un revenu de sang« enfans, buvez, boiteux ennemys de vérité »un peu de sang humain favorisela divinationc'est comme si le sang bu écrivaitses énigmes au dedans, se répandant capillairescalligraphiques au fonddu parchemin du ventre« servez moy bien amys », poursuivit-ilses yeux brûlants d'espoirque son ventre fût gravéet que la poche d'estomac une fois retournéelivrât à une lanterneun brouillon charnel de l'avenir
Miroir des inscriptions
Gaspard Viola Santos l'a dit,comme les motstourne-disque ou Kassotis,« canto cantis »ressemble à un ciseau à boiset à un liantcontre certaines lésions organiques
se canto, que canto !
Inscripçâo
um conjunto de tentativas :definaçâo do amorcujo uso é indefinitivel
era alcunhails l'avait surnommé « os-céus-sujos », ses pairs,« Les-cieux-sales », qui l'accusèrentd'avoir souillé et abaissé la poésieet éteint les lumières du jour et de l'espérance
il était le symbole de ses tentatives
une autre tentative :o amor é negaçao do amortambém existem variàs amores
umumumum...
et il s'endormitdans le sommeil amoureux des tentatives
héros et héroïnes qui battent le sang chauddans leur course désespérée sur une route de cadavresflaque! flaque! fleuris
combien de corps abandonnéscombien de soupirails referméssur des sources souterrainessur des soleils humbles et leurs satellitesfermant délibérément leur course sur ce qui disparaîtavec le temps, l'oubli désavoue les lâchesles auteurs maladroits de crimes quotidiens
Ballade des fugitifs
devant une telle nature et de si hautes couleursil devait se montrer froidnourrir délibérément l'offensedétruire sa visionet prendre son temps
hébétude douloureuse– s'en aller en silence, pleurer sans un motpieds nus il rejoignit la boue
fugitif sur toutes terresil employa ses mains à tuertoute pitié cédant à l'inlassable apathie
fougueux comme les cheveux d'une viergeil donnait à sucer les bouts de ses doigts à vifen cette année lointainetout le monde fermait les yeux, étourdi
un zèle ignoble avait conduit les hommes...
Contradiction de la naissance
je fais un feu de ta réaliténe fuis pas ; les flammes déjà en caressent les contoursnaïve, tu croyais encore que ta peau avait limité ton corps
les flammes révèlent que ton discours a tenu lieu de peau
que faire de tes promesses d'infinique tu trahis chaque jour?combien s'agglomèrent à toute vitesse toutes les sortes de mensongedès que l'on met un pieddans la vie
mais encorele pli de la naissancequi t'engendre sans cesseque tu ne peux trahirc'est le feuqui déforme et embue la réalitéqui t'engendre sans cesse
Contradiction de la laideur
imbéciles contempteurs des chairs râpées, flétrieschairs amoncelées, chairs de gelée immensesdes centaines de gestes immobilesde larges faces regorgeant de paysages ridésmiracles pour les dessinateurs de tous bords- on y radiographie des univers monstrueuxces chairs sont l'esprit de la terre à gravité 8
sale esthète, Narcisse de Néonil est temps que ton jeu finissela laideur appartient aux discoureurs paresseuxqui tuent par paresseen riant, obscurs à eux-mêmes
Prose amphibie
Oratio speculum animi, répétait-ilKott voulait écrire une histoire des miroirs :1. Naissance et évolution des miroirs.2. Formes et aspects des cadres.3. Polissage et usinage des miroirs.4. Histoire des images reflétées. Mémoire des miroirs-du-temps.5. Théorie de l'écoulement du temps et dynamique des figures au miroir.
« J'aurais aimé parler sans images de la terre et de ses habitants. Mais trop d'incertitude naît de ce qu'on écrit sans les yeux. A moins que la main vagabonde se fasse oeil, oreille, à l'occasion, et mémoire bien à elle. »Tels furent les dits de Kott, à propos des miroirs, et pour s'y introduire lui-même.
« Il avait et projet d'insultes, injures, et de comparaisons avilissantes... comme règle générale de la composition des noms. »
On attendait un chant; il ne vint pas...
Miroirs indiscrets
« Jusqu'à ce qu'enfle le jouret que les ombres s'enfuient »
tes obéissements, comme au jourde la première fois, tes chérissementstoujours les mêmes, abondantsinépuisables et cependant toujours rarescomme de célèbres chevauxet la dentition acérée du soleilcomme les chevaux flammivomesfigurent tes chérissementstraduisent tes faits d'amour
Montagne et miroir
elle habite à l'intérieur d'une montagneseuleson regard tourné en ellederrière l'écran bleui de sa peauelle sonde à présent les tumescencesde son crâne déformé, la gelée des hémisphèresles creux et les niches, les colset les lobes luisantset tout ce qui l'accroîtqu'elle contemple une montagne
Anti-Narcisse
nue et droitecomme une pierre de taille, commentant l'Evangiled'une voix faible, sans regard pour le bûcherqui soutenait ses pieds blancs
dis-le à ceux qui écoutent :le discours du feu flétrirala chair réelle, et ses miettes incandescentesse mêleront aux étoiles
La surface se lamente
la surface se lamenteet se meutcomme un Lamento di Teseoune voix venue de loin
[cette voix prend la forme sonore d'un violon
l'haleinemaintenue au miroirs'effaçant(c'est comme une voix qui vient de loin)dans un labyrinthe de miroirs
elle bruiten surfacesurfusant avant de cristalliser
Contradiction des causes
cercle a un sensquand il tourne sur lui-même
l'épine, sentinelle de la rose fragileest à la foisl'aiguillonqui attisela convoitise des amants
Asinité
ton amour parlé édifie un De immensol'ânon et l'ânesse campent les limites du cielune ardeur vénérienne renverse nos principeset la sagesse toute faiteil était une fois un nerf, un certain nerfabsent des planches anatomiquesune foudre traversière qui déchira nos membrespour nous engendrer en corps
de l'asinité est née notre pensée aventureuse
Equipollence
deux oiseaux convolant sans jamais pouvoir se toucherà corps de dimensions égalesamour, impossible de se conjoindre à l'identique
le dos au mur : les Nouveaux nous font facedemain, ils nous tourneront le dosne fuis pas, ouvre les yeuxl'amour toujours sourit aux cendresdésir toujours fleurira sur tes os
nous sommes invités à nous éteindre
de un jusqu'à net de n jusqu'à un
comme chez les Tragiquestu te meus derrière mes yeuxce qui me met hors d'haleinec'est l'image dans mes yeux qui émeut tout mon corpsje jouis, mais j'endure en ton servicela marque du temps sur ce qui m'éblouit
on meurt de telles façons loin de l'amie absenteviens, absurde Cant élégiaque
J'ai été trop longtemps fébrile dans mes postulats, timide dans mes hypothèsespuis trop sûr de moi et téméraire dans mes axiomes fragiles(j'aime, je t'aime, tu m'aimes, nous aimons, etc.)
c'est par défaut de mémoire qu'on supposeune collection infinie de gestes, de paroles, de baisersalors qu'une vie finie ne peut se refermerque sur une suite finie de jeux d'amour
mais j'ignore comment dénombrer et déterminerune place à chaque geste, selon l'ordinalitémais seulement élire en quelques traits, singuliersquatre ou cinq, ou dix momentsoù le don des baisers outrepassa le temps
La tempête
si le coeur me tressaut j'aurai peine à parlerà dire que deux suivant l'un n'y ajoute riende même que des cheveux on ne peut compter les liensles sachant nombreux alors qu'ils ne sont qu'unadmirabledésastre où mes yeux et mes doigts font naufrage
les fentes des pierres empestent parmi les ruinesle rose pourpré d'Agripaume
sur la rocaille sèche, la duveteuse Herbe des Viergesà la fin jaune absinthe, en corrompant mes yeuxl'imprévoyante révélera son ourlet délicieux
aimer le vin acidele mauvais vin de vinaigrequ'il brûle secrètementnos espoirs de bon goût et nos beaux assortiments
caqueter, claquer du becsans en être même oiseau, arcqueter et bouter hors-glottedes mensonges érailléshic le lot du séducteur, baveur, sans nécessitéil regrettera de n'avoir éténi printemps reverdi ni prince des enfers
Contradiction du visage
tout visage a sa musique
frayer parmi les chosesà travers les obstaclesde sa propre intimité
cherche dans la terredes creux lumineuxcomme des mains
un visage a couleur d'asphyxieexpression d'emmuré hagardles étranglementsl'agonie…et pourtant : la PRIERE
Oiseaux d'Eros
le sang fuitsans défensede ta gorgede voix désséchée
(elle entendit d'abord des oiseaux)[petite flûte et wood-block
dictamen des oiseaux :[petite flûte, flûte et hautbois avec wood-block
extase de la trachéele sang fuit en trochée : fuis! fuis! fuitfuitfu-ifu-i
[même configuration musicale :
(Dits du quatuor à cordes)
(dits des vents)[petite flûte, flûte, hautbois, cor anglais (fa), clarinette (si bémol), 2 cors (fa), 2 trombones, 1 tuba, et 1 triangle
Ancolie crochueacérée par ses becset serresviolacées
Maison des morts
ma maison est la maison de tous les mortscertains se lamententd'autres se taisent, sans penséecertains frappent les murs et se cognentla tête et les poings, d'autres se griffentet ouvrent des ruisseaux rubiconsau fil de leur peau blanche
toitu commandes à l'obscuritétu fais lever des arbres, des dansesà travers les planchers
ma maison, maison de tous les mortsoù les morts n'ont plus peurtant que tu demeures cachée
La banquette de neige
seuil enneigésombre pierre de l'adieu
Lasse
apprends à te dévêtircomme le vent abat les arbres et courbeles saules et la lumière dans l'eaulente, d'un canal
Egards
pour une chair apprivoiséela brûlure est plus tendre
l'eau est plus verteta pâleur rougit comme un vaseun vase nu qui exhibe, inachevéle foulard de sangqui tapisse tes parois
l'eau, plus verte en surfacenous égare sur ta naturela nature de ta bouche
lentelèvres lentes(baisse les yeuxta lenteur est presque insolente)
appelons les rasoirs et les dentsà éventer un peule lait de ta peau
moins blanche est ta peauplus tendre est la brûlure
A propos de la jeune fille aveugleI
tympaniser le trou écoulant les sons ininterrompus
A propos de la jeune fille aveugleII
tes yeux de selsans pupille
on apprendra à voir en écoutant
l'aveugle rayonde la pupille du mondedécoulant de ta statue
et à ouvrir une membrane,tympaniser le trou écoulant les sons ininterrompus
Dances, ballades
Ballada de Siobhán de Cork
I
attendsattends qu'il se meuve eau de nuitqu'il coule d'amour, impudiqueque la rage du premier instantse transforme en draps moitesde salive, et d'autres liqueursque cette séquence soit sans lendemainpuisque tous les lendemainssont condensésdans l'ici, à présent
attends un peu, encoreta chair a murmuré la mienneretiens encore un peu, toutetoute indélicate que je sois
encore– ne rester un tempsque murmure et souffle
II
on s'effraie des oiseauxon se détourne des fleursnous revoilà enfantsenchanteurs qu'a banni la Nature
III. 1
Quick! Quick! Blind pain
Before the night is doneHurry, wild knifeBefore the day is gone
Dearest war, filthy painO may the blood do fill my brainDearest knife, outstandish painO may the blood flow from your vein
O may the blood fulfill my pain
III. 2
voilà la nuit roussedans son inexorable passacailleson interminable approche
dans les yeuxun mot seul
la confiance m'a quittéepense-t-elledésormais je pourrai seuledans les yeuxles larmesun motun seul
je n'ai plus personneplus personne avec qui jouerpense-t-ellela confiance je n'en ai plustu m'as privéede mes yeux
dans les yeuxune larme
seule
un motdans les yeux rougesun mot
coupable
Louise, from Leicester :
in a glass coffin cigarettethat lies open clarinettravel blind belle brunettetill your prince till your princethat clock on your wall is a spot on your soulthat clock in your veins is a stop on your pain
Siobhán : snow white in your winter dress how many midgets do you press on your heart full of sorrowa mean mother meant to blowskin white as snowlips red as blood hair black as stout that clock on your wall is a spot on your soul
Louise, from Leicester, said :
travel far from me sweet ladythe sound of Big Ben's burning inside medo not come near me sweet ladya blue rider's hot on your heelsstay away from me sweet ladylest he should deploy his artillery
[both voices :O it is time says the old clockTime for crime murder and bloodO it is time says the old clock
Time for crime murder and blood
IV
be as fast as galeas gay as breezeas bold as gallop
[clarinette
un regard remonte le cours d'une failledans un mur des histoires nous sont contéespar des affluents et des rivières nombreuses
suivre la lézarde tristeparfois uniquedans le creux finement dessinéd'un murparfois multipleune mince ratureune tache sombreun message que le secret a su préserver
se perdre en fins réseauxparmi les nervures d'un mur historienà la fois profond, à la fois surfacelaisse-le parler sans un son dans tes yeux
Maîtres de musique
maîtres de musiqueles nombres de sont emparés de moi
l'amour empêcheleur succession il estla déception des nombres
– j'affirme que mon canzon, mon Cantest sans nombre, dit-elle, le sang lui-mêmeet l'écho du sangla vague musique qui emplit l'air
et elle chanta
[avec harpe
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et malgré la due notation, on eût ditque le chant n'appartenait pas aux notes, aux rythmesaux signes musicaux
– j'affirme que mon Cantest sans nombre, dit une autre,et il te rendra fouj'affirme que mon canto est sans nombreque je chante le miel et la lumière, ma bouche pleine de terre
d'orties et d'excréments
et le rite sombre fit place à son chant
Contradiction du désir
[pour voix, crotales (sur 1 son principal), tambourin, derbuka ou bodhran (sur 2 sons)
comment tu menstu mens comment tutu mens comment -chantait-elle
l'inexprimablequand elle chantait ses yeux avaient des larmeset moi, j'avalais ses larmes
comment respires-tu ?comment as-tu laisséla poussière nous assourdiret assécher nos yeux ?comment parviens-tuà nous faire respirer ?enfin respirer
le temps ordinaire s'ignoretant qu'il a ignoré le nombrede ton tempus immobilemon amour te rejoint, chanteuseen remontant les nombres quiqui me séparent de toi, une seuleune seule note il n'en reste qu'une avant toi
Chant des nombres
[à troix voix comme une seule
l'un de ces personnageschercha encorele sens de cette musiquebien que d'aucune musiqueon ne peut tirer sens
Silence parmi vous !
elles crièrent d'une voixla parole silentiairequi est un criHomère l'a dit :Sigè eph'uméion
Vent d'arbres
et fin redoutée :le violon s'agiteil imite tes cheveuxdésobéissants, ta voix est ce ventfoules d'herbes couchéesbranches admirableset les ânes détachés se taisenton souffle dans les arbrespour faire du sous-boisun orgue de racines
plus loin, plus noir où tu vasla forêt est plus dense
ton chant tu l'as jetédans mon lit, mon poèmedans mes yeux tu l'as jeté
et ta jupe disparaîtavec la musique des tissus des parfumsavec les éléments du crimeà jamais inaccompli
plus loin, plus noir où tu vasplus clair le dernier chant
je sens tes cheveuxet me défais comme une tresseque l'eau assouplit
un caprice de musique une épaule capricieusela chevelure s'y brise et sur l'omoplateen contourne la clé
l'odeur dans tes cheveuxmes narines ma tête s'ouvrent– sonore
puis la flûte se brise, les rivièresse détraquent en musique, tes cheveuxet moi ne sommes plus qu'un
plus loin, plus noirce Un est chaos
des souliers sans semellesnous ont alourdis, ce qui n'était pas mêmeune pensée encombrait nos esprits
où? qu'y a-t-il maintenant?oùoùbattus courbés sous les coupsnous nageons l'un contre l'autre et plus rienplus rien ne retrouverad'ordre, de calme après la mêlée
tes cheveux s'enroulent sur mes doigtsils enserrent mon couparfument mes idéeset réduisent à néantl'horlogerie prévoyante de gestes mesurésde mots dits doucement phrasés
la flûte s'est briséeet le violon, la harpe
comme dans les suicides qui sont des riteselle n'a pas pleuréle ferme résolutionet la main un peu tremblante…dernier chantla main un peu tremblantecomme quand on allume un cierge dans les odeurs de pierre et d'encens…dernier chantet l'ombre héréditairedont on ne comptera plusles apparitionsla lumière est éteinteet revenueau nombre un
à la levée du corpsles cris ne seront plusque des rumeurs assonantesparmi les animaux
[alto et violoncelle
Peuples de Youcef Sebti
« Je suis né dans l'enferj'ai vécu dans l'enferet l'enfer est né en moiet dans l'enfersur la haine – ce terreau qui flambe -ont poussé des fleurs. »plus colérique que Mouloud Mameri et Coleridgeet moins sage que Mohammed Dibou John Milton
voici ses fleurs qu'on nomme Absintheou Herbe des vierges très amèreelle ne sait naîtrequ'en sèches rocailleset pourtantà contrefilses fleurs chantent encore
Balada du fol per amor
[« O digue-es, fo-ol »...
Chants d’amour de la première fois
parce que ton amourest pur malgré toiil est seulement ce qu’il estrien ne l’entrave
l’amour est comme la guerreil ne cherche pas la victoire
il y avait sans doute des maux, des rigueurscomme en hiver où tout semble plus dursans doute encore des glaciers et des pointesdes seringues rouges des manquements
tu peux encore te vengerparce que je ne t’ai pas aiméeencore et distribuerl’évasive douleur qui te fait me haïr
viens dans mon jardin
l’amour est comme une pierre
viens dans mon jardintu y goûteras des pommes empoisonnées« c’est ridicule ! comment peut-on faire tenirle ciel et l’enfer dans une pomme ? »
la pureté que ma langue doit, d’un coupà la pureté de mon amour- est-ce possible ?quand je dis « pur », je veux dire « total »c’est-à-dire sans parties, en entierj’aime quelqu’unelle est sombre et claire par ses yeuxj’aime quelqu’un(un certain aveuglement me tait à l’instant)
Jje ne peux dire plussinon que je te livre comme corpset que je possède en entier –et que je livre mon propre corps en échange
mais a-t-on dit
que l’arbre possédait ses fruits ?l’image est vaine : l’arbre ne possède rienmais nous possédons l’arbre et les fruitset, regardant cette possessionnous ne savons pas si nous nous appartenons
je suis un avec l’amourque je dépeins dans mon discoursquoiqu’on en dise, je suis unentier, total et unje possède tout sans rien savoirje t’aime, je t’aimecomme ce dont je ne peux rien savoirce dont je ne peux rien posséder
voici mon chant : j’aime sans transiger(je ne connais pas de limites)j’aime ce que tu es(rien d’extérieur ne me fera changermais voici que les voeux s'abolissent d'eux-mêmes)
voici mon chant : ilsimplement déclareet tous nos vœux s’abolissent, à l’instantdans ce simple message
je vis dans un assemblagede maisons et de ruesqui ressemblent à un abattoirmais je voiset tu me délivres de l’abattoir(et ton cœur, je le sais, est sans répit pour me secourir)et tu me voisdans l’abattoir tu m’as rendu humain
c’est toi, l’abattoirc’est toi qui m’as mis dans des cases, des espècesc’est toi qui m’as fait vomir mon sanget devenir ce que je suis
c’est toiqui a remporté une partie douteuse :faire de moi un être humainet un être qui aime
pour la première fois, tes bouclestes boucles ensabléestes boucles odorantes
elles parlent pour moivoilà le secret que je veux enseignerque ton odeur vaut plusque l’odeur de tes cheveux a plus de prixque l’ensemble de ce que je voisrien ne peut replacerle sens exact de ces odeurs, valeursj’entrevois un instantentre tes lèvresce pour quoi je fus né
j’aime tes cheveux coulés- mais ils me coulentils me noient et ne laissentrespirer que larmesou bave de ta bouche- sublime évasion
le cœur me manque parfois- c’est que trop de larmesvenues de tes yeuxm’étouffent
j’écris simplement, mais c’est par fixitéselon que j’autorise mon cœurou ma penséeà faire esprit ou corpsselon tes vœux
le froid s’empare de ma voixquand je berce en secret une pierredans mes bras
ni les larmes ni mes brasne réchaufferont la pierre
de toi, absentene subsiste qu’une pierreparmi les pierres
dure et froidela mémoire qui me courbe sous elle
je n’ai aimé qu’une foisaussi vrai qu’un oiseauune seule fois se posadans ma main
j’étais si tranquilleles heures ne passaient plus
plus rien à rechercheren mon esprit, à attendresur la terre comme au ciel
de 1+1+1je vis 3à l’intérieur du premierquand je penseaimer plusieurs foisc’est comme à chaque occasion de pluiede vent ou de soleil- je suis involontairelaissé sans désirle temps dicte mes faveursmes penchants faciles
l’oiseau comme le soleil- il est toujours beauquand il ne vient qu’une fois
tout est bien toutdans l’espace d’un instantet tout n’est plus riendans la durée aveugledilué et perduj’ai aimé sans sommeilde nuit, et presqueà chaque minuteaujourd’hui j’aime sans gestepresque endormi, comme en rêve- je rêve et je trace des plansdes lignes et des figures à ma table boiteuseingénieur de mon amour, rends un moment ton désir muetlaisse parler, en penséela sève claire du temps
la suite apaisante des nombresguidera ta marche dans le monde
la rangée d’arbresje ne peux m’y compterseulement quand je glissed’arbre en arbrevers le sans-arbre
j’ai trouvé l’amourune seule foisje l’ai perdu ensuitej’ai glissé sur plusieurs
et j’ai trouvé à la finl’amour dernierdans le sans-amour
je traduis je traduisrépétant l’avenirdans le présent et l’icije chante le chant d’amourde la dernière fois
pouvoir devant la merne pas embarquerni même nager quelques mètresmais se tenir à la terre seule
comme à un premier moment uniquecomme au sable dernierqui ensevelit les cadavres
ne réveille pas le nombre qui dortdans son sommeilil veille sur tous les nombres
miracle des choses sans nom(elles se laissent compterune par une)
le tic-tac d’une horlogeunununun
retarde la paix heureuse(elle n’est qu’apparence)mais ne t’émerveille pasregarde, seulement
« mains égares »…les choses disparaissentet ne laissent que des nombres
et leur enseignementlaisse encoremoins de choses
élégance de la perteprierou se dévêtir dans le froid
sur le toit d’ardoises bleuesla pluie verseSsns jamais lavernos restes humains dès que nous naissons
à la rigueur le sangquand nous avons des trousmais le reste, rienque vêtements ou cheveux collésvisages ruisselants
nous sommes des choses sans nom- enlevez-nousde la surface de la terre
nous renaîtrons poussières d’ardoiseparoles anéanties
le compte impossible de la poussière(tout l’univers en est forméla musique seulela disperse ou l’assemble)
nous sommes au nombredes miettes de toute musique
quand je suis sans toije compte une à uneles miettes qui me composent(quand l’être humaincompte de cette façon,je dis qu’il fait de la musique)
j’ai de la beautéune très grande vision :elle brille sans nouset se passede nos brouillons sourds
on ne peut racontercomposer un récit de ce que nous sommesqu’avec des nombres
l’exil hors de l’unnous autorise le récitet nous condamne au récit
encore ces frissons dans tout le corpsque semble dicterune solitude accrue, trop amère
les larmes ne sortent paselles s’écoulent en dedans
peut-être vais-je creuser des trousdans ma peau, partoutet l’eau salée qui me remplit partirapeut-être, serai-je enfin vidéde l’ondefroidequi me noie
tout mon sang est tristej’éprouve sa couleur changeanteet qu’il devient froid
il coule lentement comme une larmeil se perdchassé du cœurdans le lit de ma pensée
j’appelle des nombresqui sont des animauxvivants ils me consolentet viennent m’entourer
et l’illusion blanchede recouvrer l’amour(l’autre illusionde la première fois)
unununun...dit l'horloge
« perdre la tête »coupé en deuxon perd l’équilibre, vision embuéeles bougés l’expérience
le poème s'arrête ici(il le doit)
quand un chant fuittel fumée d’un sacrifice initial