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BURUNDI : LA BANQUE MONDIALE DEPOSSEDE LES PETITS PAYSANS….. Deogratias NIYONKURU

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Page 1: BURUNDI : LA BANQUE MONDIALE DEPOSSEDE LES PETITS PAYSANS….. Deogratias NIYONKURU

BURUNDI : LA BANQUE MONDIALE DEPOSSEDE LES PETITS PAYSANS…..

Deogratias NIYONKURU

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BURUNDI:UN PAYS TRES PAUVRE

• Population: 8,1 millions d’habitants• Densité: 291 ha/km²• 90% vivent de l’agriculture de

subsistance, avec 0,37 ha en moyenne

• IDH: 166/169; PIB/ha: 125$US• 66% de la population vivent en

dessous du seuil de pauvreté• Café: principale ressource monétaire

pour 55% population et 80% de recettes d’exportation

• 27% de la population doit vendre son café sur pied pour survivre et se soigner à 1/3 prix

• 51% du budget dépend de l’aide extérieure dont 70% de la BM

• Espérance de vie: 50,3 ans

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LE CAFE AU BURUNDI• Fait vivre 55% des ménages • Présent sur 14 provinces sur les 17• Couvre de 60% à 80% des recettes

d’exportation d pays• Le tissu industriel le + important du

pays et donc le + grand fournisseur d’emplois ruraux hors production agricole: près de 1.100 emplois permanents et 15.000 emplois temporaires

• Exclusivement des plantations familiales

• Mais forte saisonnalité de la production

• Donc un produit plus que stratégique pour le pays

1948

/49

1953

/54

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2003

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0

5,000,000

10,000,000

15,000,000

20,000,000

25,000,000

30,000,000

35,000,000

40,000,000

45,000,000

50,000,000

PRODUCTION

Quantité

Campagne-café

Qua

ntité

(en

kg)

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Le pays le plus dépendant du café

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INDUSTRIE DU CAFE

PRODUCTION

DEPULPAGE LAVAGE

DEPARCHAGE

TORREFFACTION Café torréfié

Café vert

Café parche

Café cerise

MultinationalesMicro usine

publique

SODECO publicPetits privés:

Sivca, CBC

155 SDLDont 133 publics :

Gérés/SOGESAL

4.500000 de petits paysans agri familiale

Page 6: BURUNDI : LA BANQUE MONDIALE DEPOSSEDE LES PETITS PAYSANS….. Deogratias NIYONKURU

UN PEU D’HISTOIREPÉRIODE Etapes Situation1900-1930 Introduction du café au Burundi par le pères

blancsLa colonie organise l’extension du verger

Culture s’étend sous le fouet pour générer des revenus et payer un impôt

De 1930-1958

Forte extension du verger. La commercialisation est privée surtout par commerçants grecs

Le Café se vend en ‘’washed’’En 1958: 38 millions de plants

produisant 20.000 tonnes de fruitsDe 1958-1976

Encadrement maximal Le paysans prend goutProduction de 15.000 à 27.000 tonnes

de café vertDe 1976-1990

Construction de stations de lavage sur crédit BM remboursé par un prélèvement

Etatisation de la filière, création de l’OCIBUCours mondiaux très mauvais vers 1980

Le verger atteint 190.000 arbres, mais la production plafonne à 40.000 tonnes puis revient vers 25.000T

1993-2002 Guerre civile, déplacés, abandon des plantations, usines attaquées

La production baisse de plus de 30%L’Etat contrôle tout et saigne le paysan

pour financer la guerre et 1996 Début du désengagement des Etats sous pression

e la BM et FMICréation des SOGESTALs avec des

fonds mixtes

1996 Premiers groupements des producteurs2000 Création des unions

Puis des fédérations en 2002La fraude sur les pesées et la paie est

mieux contrôlée.

2002 Création des fédérations

Page 7: BURUNDI : LA BANQUE MONDIALE DEPOSSEDE LES PETITS PAYSANS….. Deogratias NIYONKURU

UN PEU D’HISTOIRE SUITE2004 Création de la confédération Le mouvement a pris sa dimension nationale

20052006

Tentative de vente de 2 stations arrêtées par l’actuel président alors ministre en charge de la privatisation

Pression énorme de la BM sur l’état pour l’atteinte du point d’achèvement de l’IPPTE

2007 Reconnaissance officielle de la propriété du café aux caféiculteurs

Les paysans se sentent soutenusLa BM exerce des pressions honteuses: aide

budgétaire, appui à la gratuité des soins des enfantes

Dec 2008 Le Gouvernement adopte la stratégie de désengagement de l’Etat de la filière

Désarroi chez les caféiculteurs

2009 Appel d’offre international pour vendre 29 lots de SDL et 2 lots d’usines de déparchage. Le groupe suisse WEBCOR est le seul qui gagne 13 SDL

Mais la commercialisation reste aux mains du comité de commercialisation SOGESTAL-paysans

2010 WEBCOR après plusieurs coups de bluff offre un prix de 350F contre 490 pour les autres

Nouvelles

Grogne chez les paysansL’autorité essaie de comprendre les paysans, mas la BM tape le point sur la table

2011 Les paysans boudent WEBCOR qui se lance dans le’’ washed’’, mais offre un prix inférieur aux autres

Fin 2011: relance du second appel d’offres

L’autorité comprend la situation et essaie de dialoguer, mais la BM s’impose

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LA CNAC

Les associations initiées/gouvernement 1996 et confiée à INADES sur contrat

Quatre niveaux de structuration:1997-2000  : naissance des associations collinaires

aujourd’hui à 30002000-2002  : naissance des unions des associations au

niveau des stations de lavage aujourd’hui à 1432 002-2003 : naissance des 5 Fédérations dans les cinq

bassins caféicoles2004 : naissance de la Confédération Nationale des

Associations des Caféiculteurs du Burundi (CNAC-MURIMA W’ISANGI) le 2 Juin 2005.

Soit 125.000 paysans qui représentent 20% des caféiculteurs

2006: Début de la création des coopératives à côté des unions, organisations à caractère commercial: 84 coopératives agrées

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LA PRIVATISATION ÉTAIT NECESSAIRE

1. Au lieu de gagner le gouvernement a dû s’endetter auprès des banques pour couvrir les intérêts des banques: 18 milliards de Francs

2. Les SOGESTALS ont aussi contracté des dettes importantes et n’ont plus assuré l’entretien des machines: l’outil industriel était menacé

3. Le prix payé au producteur n‘a fait que plonger et ne représentait que 40% des recettes contre près de 70% dans les autres pays

4. En conséquence, les paysans ont abandonné le café sans entretien. La production a chuté, la cyclicité s’est aggravé (de 40.000 T 6.700 T) et le rendement par plant est passé de 1 kg à moins de 300 g voire 150g

5. Néanmoins, l’exigüité des terres suite à la pression démographique, le manque et la pénibilité du paillage, la priorité à se nourrir plutôt que de faire du café expliquent aussi et peut-être autant cet abandon

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Mais ces questions résolues dès 2007• Le 1er mai 2007: la président déclare que le café

appartient aux paysans• Ceux-ci en concertation avec les SOGESTALs ont mis

en place des règles pour résoudre ces problèmes– plus de garantie de l’Etat pour les banques, mais

utilisation du fonds de stabilisation– Clé de répartition entre les intervenants: 72%

reviennent aux paysans et 16.9 aux dépulpeurs qui ne doivent plus s’endetter

– L’encadrement de la production est confiée à la CNAC et des fonds dégagés dans la clé de répartition

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Nette amélioration du prix au producteur

2001-2002

2002-2003

2003-2004

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2009

2009-2010

2010-2011

2011-2012

-

0.10

0.20

0.30

0.40

0.50

0.60 Valeur$

Valeur$

2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011100 100 100 150 200 220 300 315 350 490 630

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LE MODELE IMPOSE PAR LA BMC’est le modèle unique déjà préconisé dans plusieurs pays:• L’OCIBU doit être démantelé et tous ses actifs vendus et remplacés par une autorité

de régulation : ARFIC• Une interprofession est mise en place pour discuter des questions de la filière entre

les familles: producteurs, dépulpeurs, déparcheurs, exportateurs…)• Les stations de lavage sont vendus par lots de 3 à 6 (mais pas plus de 6 lots nouveau)

seuls les 104 jugés rentables seront vendus et les autres fermés• Les deux usines de déparchage en deux lots avec priorité à ceux qui achètent le plus

de SDL dans la région donc un contrôle total de la chaine• Les acquéreurs doivent disposer d’un chiffre d’affaire de 1 millions de dollars et d’un

résultat net de 100.000 dollars sur les trois dernières années excluant ainsi les nationaux. Le dernier appel les a réduit de moitié avec des facilités pour le joint venture nationaux-multinationales

• Une part réservataire de 25% sera gardée pour les coopératives des caféiculteus qui doivent les acheter avant deux ans sinon, l’acquéreur peut tout acheter

• La clé de répartition est supprimée car contraire aux règles de la concurrence• Le gouvernement est semé par la BM d’adopter le modèle pour atteindre le point

d’achèvement. • Le Gouvernement l’adopte avec des réserves qui ne seront jamais considérées

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Les ‘’bienfaits’’ du modèle selon la BMAffirmation de la BM La réalité

1. Le prix au producteur va augmenter grâce à la concurrence

Il est très difficile au paysan de déplacer son produit dans le délai des 6 heures

2. Le tissu industriel sera mieux entretenu par le propriétaire surtout qu’il a des moyens

Sans doute tant que ce sera rentable, mais rien ne l’empêchera d’investir dans des segments + rémunérateurs

3. La part réservataire permet aux paysans de Controller tous les maillons de la filière

Même pas de minorité de blocage, la multinationale sera souvent à la fois vendeur et client; il devient impossible de connaitre le prix exact

4. Les actions que détiennent le paysan dans une grande société lui permettront d’accéder au crédit de soudure

La cerise du café déposé chez le dépulpeur l’assure déjà

5. La grille de répartition fixée 72% l’empêche d’avoir une part plus élevée

Tous les dépulpeurs se plaignent déjà qu’il est trop élevé et WEBCOR a donné le ton

6. L’Etat va enfin tirer des recettes du café grâce aux impôts

Pas plus qu’aujourd’hui, au contraire tout le potentiel de création de nouveaux emplois disparait avec l’exportation des bénéfices. Le pays va perdre l’essentiel de ses sources de devises

7. Grace à un prix plus élevé et l’obligation d’investir dans l’encadrement, la production va s’améliorer

WEBCOR a consenti des investissements plus faibles que le reste de la filière malgré un tapage médiatique.

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Répartition de la plus-value du café

1971-80 1981-88 1989-950%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

Valeur ajoutée dans les pays consommateursCoûts du transport et perte de poidsValeur ajoutée dans les pays producteursProducteurs

Graphique 1. Distribution des revenus le long de la chaîne du café, 1971-95

Source : Benoit Daviron, Stefano Ponté, « Le Paradoxe du café ». Ed. QUAE, 2007. p.260

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QUE CONTESTENT LES PAYSANS?1. Le droit de propriété du café leur revient de la production à l’exportation.

C’est d’abord un droit naturel qui leur a été reconnu ensuite par le président et qu’ils exercent parfaitement depuis 2007. La privatisation est un déni de ce droit en limitant leurs manœuvres au niveau de la cerise

2. La propriété des stations de lavage revient aux caféiculteurs: les stations ont été construites grâce à un prêt de la banque mondiale que les caféiculteurs ont remboursé grâce un prélèvement de 60F bu/kg pendant près de dix ans

3. Les terrains sur lesquels sont bâtis les usines ont été expropriés pour intérêt public. Si des privés les récupèrent, ils doivent les acheter au juste prix. Il s’agit ici d’accaparement des terres par des multinationales dans n pays surpeuplé

4. La part réservataire est insignifiante et ne permet pas aux paysans de participer à la prise de décision. Ils n’ont même pas d’argent pour la payer! Grave hypocrisie donc de la BM

5. La suppression de la clé de répartition expose le paysan aux lois des marchands qui ne recherchent qu’un intérêt maximal. L’Etat a le devoir de protéger les plus faibles

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QUE CONTESTENT LES PAYSANS? SUITE1. La stratégie viole la loi sur la privatisation. Le parlement aurait dû être

entendu. Les paysans ont porté plainte, mais l’Etat poursuit le processus, avec le couteau à la gorge de la BM

2. Le fonds de stabilisation et l’excédent de campagne de 2004 doivent revenir aux paysans qui ont été sous payés ou alors répartis à l’ensemble de la filière selon la clé de répartition actuelle

3. Les autres pays de l’East african community font la promotion de coopératives. Le Burundi se prive ainsi des marchés ‘’fair’’

4. Le prix de vente des stations est dérisoire: 75.000 dollars que l‘on récupère en une année de bonne campagne. Il y a bradage des biens publics

5. Les nationaux sont exclus de ce marché par des conditions financières . La nouvelle proposition de privilégier des joint venture multinationales- nationaux conduit à la situation d’avant 2007 où un petit club de burundais l’ABEC en partenariat avec quelques traders faisait la loi.

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Conséquences: un désastre économique, sociale et politique

• Avec un prix injuste, les paysans vont refuser de vendre aux SDL et se réorienter vers le ‘’washed’’

• Le fait de se sentir frustré va entrainer la migration vers des cultures plus faciles comme au Cameroun

• Reprise des exportations frauduleuses vers le Rwanda

• C’est toute l’économie d’un pays très pauvre qui est ainsi bradée aux intérêts des multinationales

• C’est la vie de 5 millions de petits paysans très pauvres sacrifiée, 16.000 emplois sacrifiés dans le monde rural

• C’est aussi un profond ressentiment d’injustice et un terreau fertile pour la reprise de la guerre

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Et la Suisse dans tout cela?• La Suisse est un gros consommateur de café:9.5Kg/pers/an: le 3ème

mondial• La Suisse est un grand actionnaire de la BM• Seule le groupe suisse WEBCOR a acheté les stations de lavage• La Suisse a une excellente coopération avec le Burundi surtout dans la

province de Ngozi où justement WEBCOR a racheté des stations de lavage (un excellent projet de santé et un autre de sécurisation foncière):12.2millions de CH en 2010 soit près de 20CH/habitant de Ngozi

• La perte chez les paysans directement causée par WEBCOR est en moyenne de 42.000 F bu /paysan soit 35 CH (140 Fkg pour une moyenne de 350 kg)

• Tous les efforts de la coopération vont donc s’annihiler avec une population qui sera privée de l’essentiel de sa source de revenus

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Merci donc de soutenir les paysans burundais

Mais aussi ceux du monde entier