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0 Ministère de la Culture et du Tourisme Bureau Burkinabè d’Etudes & d’Appui-conseils (BBEA) Rapport final, Mai 2012

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Ministère de la Culture et du Tourisme

Bureau Burkinabè d’Etudes & d’Appui-conseils (BBEA) Rapport final, Mai 2012

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TABLE DES MATIERES

LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS................................................................ 2LISTE DES TABLEAUX.............................................................................................. 3LISTE DES GRAPHIQUES ........................................................................................ 3

Contexte et justification ......................................................................................... 11Objectifs de l’étude ............................................................................................... 12Méthodologie ........................................................................................................ 12

PREMIERE PARTIE : LE SECTEUR CULTUREL AU BURKINA FASO .................. 151. LES INSTITUTIONS D’ADMINISTRATION ET DE SOUTIEN A LA CULTURE ET LA POLITIQUE CULTURELLE................................................................................. 15

1.1. Les institutions d’administration et de soutien................................................ 151.2. Les orientations politiques dans le secteur de la culture ................................ 17

2. LES RESSOURCES CONSACREES AU SECTEUR CULTUREL...................... 203.1. APERÇU SUR L’ECONOMIE DU BURKINA FASO....................................... 23

3.1.1. Performances globales............................................................................ 233.1.2. Caractéristiques sectorielles.................................................................... 23

3.2. Le Burkina Faso : une richesse culturelle immense mais insuffisamment exploitée................................................................................................................ 24

3.2.1. Aperçu général sur le potentiel culturel burkinabè................................... 253.2.2. Le patrimoine culturel et naturel .............................................................. 293.2.3. La musique traditionnelle......................................................................... 323.2.4. Les manifestations culturelles.................................................................. 333.2.5. Contraintes à la valorisation du potentiel culturel burkinabè.................... 35

3.3. Les filières culturelles..................................................................................... 373.3.1. Aperçu des filières culturelles.................................................................. 373.3.2. Art de la scène......................................................................................... 403.3.3. Musique enregistrée ................................................................................ 453.2.4. Art plastique, appliqué et artisanat d’art .................................................. 493.3.5. Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique ..................................... 523.3.6. Patrimoine culturel................................................................................... 563.3.7. Livre et presse écrite ............................................................................... 593.3.8. Manifestations culturelles ........................................................................ 61

4. IMPACTS DE LA CULTURE SUR L’ECONOMIE DU BURKINA FASO............... 684.1. La transversalité du secteur culturel............................................................... 68

4.1.1. Secteur primaire et secteur culturel ......................................................... 684.1.2. Le secteur de la culture dans le secteur secondaire................................ 694.1.3. Secteur tertiaire et secteur culturel .......................................................... 70

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4.2. Impacts de la culture sur l’économie nationale .............................................. 714.2.1. Secteur culturel et revenu national ......................................................... 714.2.2 Secteur culturel et emploi ......................................................................... 754.2.3 Secteur culturel et équilibre extérieur ....................................................... 78

5. La culture, le socle du développement social du Burkina Faso ............................ 835.1 Les mécanismes traditionnels de méditation au Burkina Faso ....................... 83

5.1.1 Les mécanismes de prévention des conflits ............................................. 835.1.2 Les institutions de gestion des conflits ..................................................... 88

5.2. Rôle intégrateur de la culture : inculturation et ouverture............................... 915.3 Les organisations communautaires : un vecteur de promotion d’un développement social ........................................................................................... 945.4 Culture et développement durable .................................................................. 955.5 Les savoirs locaux, facteurs d’impulsion du développement agricole : le cas du zaï ......................................................................................................................... 965.6 Culture et genre .............................................................................................. 97

CONCLUSIONS ....................................................................................................... 99DOCUMENTS CONSULTES.................................................................................. 105

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LISTE DES SIGLES ET ABBREVIATIONS AEPJLN : Association des Editeurs et Publicitaires de Journaux en Langues Nationales AJMB : Association des Jeunes Musiciens du Burkina ARPEM : Appui au Réseau Ouest Africain des Pépinières d’entreprises de Musique ATB : Atelier Théâtre BurkinabèBBDA : Bureau Burkinabè du Droit d’AuteurCALAHV : Cercle des Activités Littéraires de Haute VoltaCB-IIT : Centre Burkinabè de l’Institut international du ThéâtreCD : Compact diskCDC : Centre de Développement ChorégraphiqueCENASA : Centre National des Arts du Spectacle et de l’AudiovisuelCERAV/Afrique : Centre Régional pour les Arts Vivants en Afrique CFRAV : Centre de formation et de recherches en arts vivantsCITO : Carrefour International du Théâtre de OuagadougouCNA : Cinéma Numérique Ambulant CTR : Compagnie théâtrale la RoseDAF : Direction de l’Administration des FinancesDAPA : Direction des Arts Plastiques et Appliquées DAS : Direction des Arts du Spectacle DCN : Direction de la Cinématographie Nationale DCPM : Direction de la Communication et de la Presse Ministérielle DEP : Direction des Etudes et de la PlanificationDGFR : Direction générale de la formation et la rechercheDGLLP : Direction générale du livre et de la lecture publique DGPC : Direction générale du patrimoine Culturel DGT : Direction générale du tourismeDMP : Direction des Marchés PublicsDPICC : Direction de la Promotion des Industries Culturelles et CréativesDRH : Direction des Ressources Humaines DSC/PM : Patrimoine MondialDVAT : Direction de la Valorisation et de l’Aménagement Touristique ECG : Espace Culturel GambidiEDIT : Ecole de Danse Irène TassembédoEICVM : Enquête intégrale sur les conditions de vie des ménagesENAM : Ecole nationale d’administration et de magistratureFDT : Fonds de Développement TouristiqueFENATHEB : Fédération Nationale de Théâtre du Burkina Faso FESMAN : Festival Mondial des Arts NègresFESPACO : Festival Panafricain du Cinéma et de la Télévision de OuagadougouFESTIMA : Festival International des Masques et des Arts FITD : Festival International de Théâtre pour le DéveloppementFITMO/FAB: Festival International de théâtre et de Marionnettes de Ouagadougou/Festival des Arts du Burkina INSD : Institut national de la statistique et de la démographieISIS : Institut Supérieur de l’Image et du son/studio-école (ISIS/Studio-école) J2C : Association des Journalistes et Communicateurs pour la Culture MN : Musée National ONTB : Office National du Tourisme BurkinabèPASC : Programme d’Appui au Secteur CulturelPCBF : Plateforme Culturelle du Burkina FasoPNC : Politique Nationale de la CulturePSIC : Programme de Soutien aux Initiatives Culturelles DécentraliséesSCADD : Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement DurableSIAO : Salon International de l’Artisanat de OuagadougouSP/SNC : Secrétariat Permanent de la Semaine Nationale de la CultureSYNAM : Syndicat national des Artistes Musiciens UGEL : Union des Gens de LettresUJCB : Union des Journalistes Culturels du Burkina UMAB : Union des Marionnettistes du Burkina FasoUNIMA : Union Internationale des Marionnettistes

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Budget du Ministère de la culture de 2007 à 2010 (en millions de FCFA)................................................................................................................................. 20Tableau 2 : Type d'infrastructures pouvant accueillir des spectacles ....................... 22Tableau 3 : Répartition provinciale des manifestations culturelles modernes........... 34Tableau 4 : Répartition par province des festivals actifs au Burkina Faso................ 35Tableau 5 : Facteurs de production dans le secteur de la culture ............................ 39Tableau 6 : Offre et demande d’une compagnie de théâtre...................................... 43Tableau7: créations et diffusions théâtrales du CITO de 2002 à 2011 ..................... 44Tableau 8: Activités de la duplication au Burkina Faso ............................................ 48Tableau 9 : Opinion des enquêtés sur la piraterie .................................................... 49Tableau10 : Chaîne de valeurs de la filière « Art plastique, appliqué et artisanat d’art »........................................................................................................................ 50Tableau11 : Chaîne des valeurs de la filière « Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique ».............................................................................................................. 53Tableau12 : Evolution des média au Burkina Faso .................................................. 54Tableau 13 : Dépenses imputables au tourisme (en FCFA)..................................... 58Tableau 14 : Chaîne de valeur de la filière livre et presse écrite .............................. 60Tableau 15 : Dépenses culturelles des ménages ..................................................... 61Tableau 16 : Contribution de l’industrie du papier, de l’édition et de l’imprimerie à la formation du PIB....................................................................................................... 72Tableau 17 : Indicateurs économiques des opérateurs de l’enquête........................ 73Tableau18 : répartition des emplois culturels selon le sexe...................................... 75Tableau19 : répartition des travailleurs dans le domaine de la culture selon le niveau de vie ........................................................................................................................ 77Tableau20: Evolution de la situation des objets exportés par type .......................... 82Tableau 21: Groupes socio-ethniques du Burkina Faso parents à plaisanterie........ 86Tableau 22: Emissions radiophoniques diffusées en langues nationales................. 93

LISTE DES GRAPHIQUES

Graphique1 : Répartition des filières culturelles au niveau artisanal …………………32Graphique 1 : Répartition de l’activité des opérateurs par filière culturelle ............... 38Graphique 2 : Poids des fonctions dans la chaîne de valeurs de la filière « Arts de la scène »..................................................................................................................... 42Graphique 3 : Offre de produits de la filière « Arts de la scène_ATB ....................... 43Graphique 4 : Offre et demande des arts de la scène_cas de l’ATB ........................ 44Graphique 5 : Fonctions de la chaîne de valeurs « Musique enregistrée » .............. 46Graphique 6: Evolution des médias de l’audiovisuel ................................................ 54Graphique 7 :Répartition des emplois culturels selon les filières.............................. 76Graphique 8 : Evolution des importations en valeur et en volume (pour les produits culturels) ................................................................................................................... 80Graphique 9 : Motifs de voyage au Burkina Faso..................................................... 81Graphique 10 : Evolution des exportations en valeur et en volume (pour les produits culturels) ................................................................................................................... 82

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RESUME OPERATIONNEL

Le Burkina Faso est riche d’une soixantaine de groupes ethniques possédant chacune ses traditions et ses manifestations culturelles. Ces communautés culturelles entretiennent entre elles des relations d’échanges socio-culturels qui sont un socle de développement d’une diversité culturelle assumée. Certaines valeurs et pratiques culturelles traditionnelles sont largement partagées par la plupart des communautés : la parenté à plaisanterie, les mécanismes de médiation et de gestion des crises, la tradition des masques, les manifestations culturelles traditionnelles, l’artisanat, etc. Ces richesses culturelles se retrouvent dans les domaines comme l'architecture, la musique, les religions, la danse ou les folklores locaux, les arts plastiques, l’artisanat d’art, etc.

A l’instar de la plupart des pays africains, le patrimoine culturel du Burkina Faso est essentiellement immatériel, composé des savoir-faire traditionnels, des célébrations traditionnelles d’évènements sociaux tels que les naissances, les mariages, les funérailles, les fins et les débuts de saison ou des évènements cosmiques comme les éclipses du soleil ou de la lune. Ce patrimoine immatériel, qui se retrouve dans toutes les communautés, est dynamique et évolutif. La richesse du patrimoine immatériel burkinabé a conduit à l’émergence de nombreuses activités culturellesmodernes. C’est pourquoi le Burkina Faso est reconnu pour son dynamisme culturelqui se manifeste effectivement par le fait qu’il abrite de grandes manifestations culturelles d’envergure internationale tels que le FESPACO, le SIAO, la SNC, le FITMO, le FITD, Jazz à Ouaga, Waga Hip hop, etc.

Toute cette activité culturelle contribue au développement économique et social du Burkina Faso.

Filières culturelles et emplois

Au total 164 592 personnes, représentant 1,78% des actifs occupés en 2009 ont un emploi dans le domaine de la culture. Ces emplois culturels sont en faveur des hommes. Ils sont pourvus à 57,3% par des hommes et à 42,7% par des femmes.Cependant, la présence féminine est plus forte dans certaines activités comme la filature artisanal, le tissage et l’ennoblissement textile, la production céramique et la vannerie. Suivant les filières culturelles retenues, il ressort que la filière Arts plastiques, appliqués et artisanat est la plus importante du point de vue de l’emploi avec plus de la moitié des emplois pourvus en 2009. Elle est secondée par la filière Formation/Appui-conseils constituée en majorité des activités d’enseignement, avec 28,2% des emplois du secteur de la culture.Par ailleurs, la structure des emplois créés par le secteur de la culture répartis par type d’employeur laisse entrevoir une prépondérance nette des entreprises individuelles, pour la plupart informelles avec 95,4% des emplois pourvus en 2009.

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Cette situation met en relief le fort caractère « auto-emploi » de l’emploi dans le secteur culturel au regard de la faible organisation des entreprises individuelles (librairies par terre, ventes de cassettes et CD audio et vidéo, projection cinématographique CANAL+, etc.).

Emplois culturels et niveau de vie1

Les travailleurs opérant dans la filière formation/appui-conseils sont relativement dans des conditions de vie meilleures (80% sont dans le dernier quintile de niveau de vie). Dans la filière livre et presse, 75% des personnes sont logées dans le quintile des personnes les plus aisées. La filière artisanat, art appliqué, est la moins enviable avec la plus faible proportion d’employés dans le quintile de niveau de vie le plus élevé avec 38,1%. La quasi-totalité des entreprises qui les emploient sont très peu modernisées.

Secteur culturel et PIB

La contribution du secteur culturel au PIB en 2009 a été de 79 677 millions de FCFA représentant 2,02% du PIB. La filière « art plastique, appliqué et artisanat d’art » est la plus grosse contributrice avec plus de 68%. Cela est simplement dû à la taille de cette filière dans le secteur de la culture.

Secteur culturel et équilibre extérieur

Du fait de la faiblesse, voire de l’absence d’industries locales dans certains secteurs de la culture, les produits comme les appareils de réception, de conversion et de transmission ou de régénération de la voix, les produits de beauté et de maquillage, les carreaux en céramique, constituent une composante pour l’heure incompressible dans la structure des importations de biens culturels du pays. Avec les carreaux vernissés ou émaillés en céramique, les produits de l’habillement (tissus, articles de friperie, chaussures, etc.), les meubles, les produits de beauté et de maquillage, ils sont les principaux produits importés liés à la culture

En 2011, les importations de produits culturels atteignent 143 milliards de FCFA, en croissance de 6,4% par rapport à 2010. Cette valeur représente 8,2% de la valeur totale des importations officielles de biens au Burkina Faso.

Les exportations de produits à contenu culturel étrangers

Les exportations de biens culturels constituent un moyen de vendre la culture burkinabé au plan international et peuvent être sources de revenus substantiels pour

1 Cette analyse ne donne pas de façon absolue l’état de pauvreté. Elle montre la répartition des populations au sein d’un même groupe en fonction des niveaux de vie relatifs matérialisés par les quintiles de revenus.

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l’ensemble du Burkina Faso. En 2011, la valeur des exportations est de 13 milliards, en hausse de 20% par rapport à son niveau en 2010. Les exportations restent ainsi très faibles en valeur (10 fois moins) par rapport aux importations de biens culturels.

Les produits à base de coton tels que les ouates et les articles en ouates, les fils de coton autres que les fils à coudre, les articles d’habillement en coton, etc., les peaux de bovins (y compris le wettblue) pour le cuir, les productions originales de l'art statuaire, les sculptures sont les principaux produits exportés.

En exemple, les 69 679 objets de natures diverses (bois, poterie, vannerie, etc.) ont été exportés en direction du reste du monde et principalement de l’Europe en générant des recettes valant 333 800 000 de FCFA en 2010.

Au regard des contraintes et difficultés rencontrées par le secteur et afin de tirer meilleure partie des potentialités, l’étude a formulé des recommandations.

1- PATRIMOINE

1.1. Inventairesa. Développer un programme massif d’inventaire du patrimoine matériel et

immatériel. Ce programme devrait enregistrer, photographier et filmer tous les aspects de la culture nationale, y compris l'architecture, les monuments et sites archéologiques et naturels, la musique traditionnelle, la littérature orale, les croyances religieuses, les savoirs et savoir-faire traditionnels ;

b. Créer une base de données pour le patrimoine culturel qui peut être accessible de l'intérieur comme de l'extérieur du pays pour l'identification, la conservation, la planification et la recherche.

1.2. Réhabilitation

a. Restaurer et réhabiliter des sites, monuments et villes anciennes avec la participation des communes et des populations locales ;

b. Développer des centres d’artisanat d’art dans les communes, en relation avec les musées là où il en existe ;

c. Développer et promouvoir l'artisanat local ainsi que d'autres activités culturelles par des expositions dans les musées communaux et locaux.

1.3. Conservation

Eviter que les politiques d’urbanisation ou de travaux publics n’engendrent la destruction de notre patrimoine culturel immobilier notamment l’architecture traditionnelle dans les vieux quartiers ; les vieux quartiers doivent rester des parties intégrantes des villes qui se modernisent.

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1.4. Muséesa. Créer des musées thématiques dans toutes les communes chefs-lieux de

provinces en fonction des potentialités culturelles pour intégrer l'histoire des civilisations locales, la technologie et la science, ainsi que les pratiques de la vie quotidienne locale ;

b. Soutenir les communautés locales dans la création de musées communautaires

c. Développer une politique nationale de collecte et commencer la collecte des objets pour doter les musées provinciaux et communautaires ;

d. Créer un musée national d’histoire naturelle qui sera un pôle complémentaire du musée nationale ;

e. Aider les musées à organiser des programmes éducatifs et des expositions à l’attention des populations et particulièrement des scolaires ;

f. Mettre en place des commissions indépendantes composées d’éminentes personnalités (universitaires, grandes figures du clergé, chefs traditionnels, fonctionnaires en retraite et dirigeants d'industries et d’entreprises de renom) qui aideraient à définir les grandes orientations et les stratégies de développement des musées ;

g. Restaurer les bâtiments historiques pour servir de musées, de lieux de la mémoire ou de centres culturels dans les différentes régions et dans les communes afin de promouvoir les traditions et la culture populaire locale;

h. Soutenir la construction de studios d'enregistrement locaux afin de préserver, valoriser la musique traditionnelle et augmenter la production musicale des musiciens locaux ;

i. Encourager et soutenir les cinéastes pour la réalisation de films documentaires et de fictions sur l'histoire du Burkina Faso ;

j. Responsabiliser les élus des collectivités territoriales dans la mise en œuvrede projets culturels dans leurs localités.

2. FORMATION ET EDUCATION ARTISTIQUE

2.1. Formation des jeunes et promotion de l’éducation a. Offrir des bourses de formation aux jeunes talents dans les plus grandes

écoles mondiales de leurs domaines artistiques ;b. Soutenir les structures publiques et privées de formation existantes dans les

arts de la scène pour en faire des pôles d’excellence profitables au pays et au reste de l’Afrique. La mise en place d’un plan cohérent de soutien au développement des structures de formation artistiques et culturelle publiques et privées ainsi que le développement de stratégies de formation des formateurs permettraient une insertion harmonieuse de l’éducation artistique, base de développement d’une véritable culture artistique ;

c. Introduire l’éducation artistique (patrimoine, arts plastiques, arts de la scène, cinéma, etc.) dans tous les ordres d’enseignement du système éducatif burkinabè ;

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d. Donner une formation spécifique adaptée aux personnes impliquées dans l’inventaire du patrimoine.

2.2. Formation du personnel culturel et sensibilisation des communautés

a. Formation intensive du personnel, travaillant dans les institutions culturelles ;b. Sensibiliser les communautés locales à la nécessité de l'inventaire et de la

gestion des biens culturels.

3. PROMOTION CULTURELLE

3.1. Visibilité de la culture burkinabè

a. Assurer la promotion de la culture du Burkina Faso en la rendant plus visible dans les espaces publics et privés de notre Administration publique, nos représentations diplomatiques, nos établissements publics d’enseignements primaire, secondaire et supérieur. Des directives peuvent être prises dans ce sens. par exemple les espaces publics pourraient être décorés de nos objets culturels et les cadeaux de fin d’années pourraient être constitués des produits de nos artistes plasticiens et de nos artisans locaux ;

b. Assurer la promotion de la culture du Burkina Faso en la rendant plus visible dans les espaces privés, dans les établissements privés d’enseignements primaire, secondaire et supérieur. Une politique incitative consistant en la délivrance de reconnaissance peut être expérimentée. Par exemple des prix en objets d’art peuvent être décernés aux établissements privés qui auraient fait l’effort de promotion de notre culture ;

c. Mettre en place une véritable politique du livre par la création d’un fonds de soutien à l’édition et à la lecture publique comme ce qui existe dans d’autres pays;

3.2. Valorisation des technologies, savoirs, savoir-faire et valeurs traditionnels

a. Utiliser les techniques architecturales et les savoirs et savoir-faire traditionnels pour promouvoir une architecture locale. Le gouvernement pourrait utiliser cette option dans la construction des édifices publiques ;

b. Adopter des mesures incitatives sur le sponsoring et le mécénat culturels. A travers des mesures de réduction d’impôts ou l’octroi de distinctions honorifiques, l’Etat peut développer une motivation des citoyens et des entreprises nantis à soutenir la politique et l’action culturelles ;

c. Faire connaître nos valeurs traditionnelles dans l’édification de sociétés inclusives, de paix, de tolérance par l’organisation de conférences. Les travaux de recherche, les études thématiques, les publications, les modules d’enseignement, les conférences publiques, les colloques scientifiques, etc.pourraient être des voies à exploiter pour faire mieux connaître ces valeurs.

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4. FINANCEMENT

a. Instaurer une loi de prélèvement de 1% des budgets des grands travaux nationaux pour le financement des grands projets culturels comme la restauration des monuments, la réalisation des musées, les fouilles archéologiques, la décoration des bâtiments publics, etc. ;

b. Rendre plus autonomes les institutions culturelles et encourager l’initiative privée dans le secteur culturel ;

c. Soutenir les associations culturelles, les collectivités locales et des entrepreneurs culturels engagés dans le promotion et la valorisation du patrimoine culturel national à l'intérieur et l'extérieur du pays ;

d. Mettre en place un fonds de soutien à l’entrepreneuriat culturel. Il pourrait être alimenté par les prélèvements opérés sur les projections dans les salles de cinéma, les vidéo clubs ainsi qu’un impôt intérieur ad hoc sur les produits culturels importés. Une agence autonome de promotion de l’entrepreneuriat culturel pourrait abriter ce fonds.

5. SYSTEME D’INFORMATION STATISTIQUE

a. Prendre en compte systématiquement le volet culture dans la caractérisation des activités des individus de la population recensée dans les prochainsrecensements de la population ;

b. Introduire une branche « Culture » dans les différents secteurs économiques de la comptabilité nationale ;

c. Dans la perspective de l’introduction de la branche « culture » dans les statistiques nationales, mener une étude pour recenser exhaustivement toutes les activités pouvant faire partie de cette branche dans chaque secteur ;

d. Les efforts entrepris par la DEP/MCT ont permis au Burkina Faso de disposer d’annuaires statistiques du secteur culturel, régulièrement élaborés. Nonobstant ces résultats fort appréciables, il importe de renforcer davantage le dispositif de production statistique tant de moyens humains, matériels que financiers.

6. SUIVI DU DEVELOPPEMENT CULTUREL NATIONAL

Rendre permanent le Comité de suivi de cette étude nationale des impacts socio-économiques de la culture au Burkina Faso. Il faudrait, pour cela, élargir ses compétences pour en faire un instrument de veille et un organe de suivi de la mise en œuvre des présentes recommandations. Il pourrait par ailleurs aider à identifier les goulots d’étranglement dans la mise en œuvre et proposer des solutions.

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7. INDICATEURS DE MESURE DES IMPACTS SOCIAUX ET ECONOMIQUES A CONSIDERER

- Contribution au PIB (Poids de la valeur ajoutée du secteur culturel à la valeur ajoutée globale, PIB) ; INSD

- contribution à la croissance (part contributive du secteur culturel à la croissance du PIB) ; INSD

- contribution à l’emploi ; INSD- contribution à l’éducation et à la formation : effectifs des ordres

d’enseignements du secteur culturel/effectifs globaux des mêmes ordres d’enseignement ; MCT et autres départements ministériels ;

- contribution à l’équilibre extérieur : solde extérieur du secteur culturel ; taux de couverture ; Douane

- prise en compte du genre : importance des femmes dans le secteur culturel ;MCT

- Contribution à la prise en compte de l’environnement : budget des films,émissions radio, etc. consacrés au thème de l’environnement/ensemble des budgets ; MCT.

8. MIEUX CONNAITRE LES VALEURS TRADITIONNELLES

Mener une étude pour déceler les valeurs traditionnelles partagées afin de construire une nation de paix, de tolérance et de solidarité forte de ses 63 ethnies.

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INTRODUCTION

Contexte et justification

Pays enclavé de l’Afrique de l’ouest situé dans la boucle du Niger, le Burkina Faso s’étend sur une superficie de 274 00 km2. Ses voisins immédiats sont le Niger à l’Est et au Nord, le Mali au Nord et au Nord-Ouest, la Côte-d’Ivoire à l’Ouest, et le Ghana, le Togo et le Bénin au Sud. Sa population est actuellement estimée àenviron 17 millions d’habitants. Bien que classé parmi les pays les plus « pauvres »du monde, le Burkina Faso a connu des performances économiques remarquables ces dix dernières années avec une croissance annuelle du revenu réel qui a dépassé 5%. Et on estime que les réformes courageuses qui ont été entreprises, notamment sur l’amélioration du climat des affaires, ne manqueront pas de porter fruit. Il est d’ailleurs déjà constaté une poussée de l’investissement dans le secteur minier - qui du reste n’a pas encore révélé toutes ses potentialités - dont la contribution au PIB a été multipliée par plus de 2 en trois ans.Malgré les meilleures performances du passé récent et l’avenir économique prometteur, le sous-développement reste la caractéristique principale du Burkina Faso. Des efforts doivent donc être redoublés, si l’on veut voir s’améliorer les conditions de vie des plus pauvres qui restent nombreux. Tous les secteurs de l’activité économique doivent être mis à contribution. C’est probablement pour cette raison que dans le cadre de la Stratégie de Croissance Accélérée et de Développement Durable (SCADD) adoptée en 2011, le gouvernement burkinabè a considéré le secteur de la culture comme un des « piliers de la croissance accélérée.». La culture fait donc partie des secteurs prioritaires au même titre que l’agriculture, les mines et les PME/PMI.Mais, pour qu’il en soit réellement ainsi, il est nécessaire que, d’une part, la contribution du secteur de la culture soit reconnue et connue et que, d’autre part, des ressources adéquates y soient affectées afin de tirer partie entière des potentialités. Or, pour diverses raisons, notamment le caractère immatériel et diffus de bien de produits culturels, la contribution du secteur de la culture n’est pas visible. Il s’ensuit des positionnements de principe sur l’importance de la culture sans que cela ne soit accompagné d’actions franches et déterminées. La mise en évidence, aussi exhaustivement que faire se peut, de la contribution du secteur de la culture àl’économie nationale devient un passage obligé, dans ce contexte où le souci d’équité est le guide de l’affectation des ressources.

En effet, dans un contexte de rareté, l’allocation des ressources tient compte de certaines variables comme le volume de l’emploi engendré par tel ou tel secteur, la contribution à la valeur ajoutée ou la contribution à l’équilibre extérieur. La méconnaissance ou la non mise en évidence de ces différents apports peut être àl’origine d’une allocation inéquitable des ressources financières. Au contraire, une bonne connaissance de l’état des lieux permettrait non seulement une bonne allocation des ressources mais aussi une bonne planification de l’action

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gouvernementale et de celle des autres parties prenantes (sponsors, ONG, PTF).Enfin, la constitution de données de référence, permet une évaluation continue des effets et impacts des politiques.

Objectifs de l’étude

L’objectif général de l’étude est d’évaluer la contribution de la culture au développement économique et social du Burkina Faso et de faire des recommandations à même de la renforcer. De manière spécifique, sont inclusesdans la mission du Consultant, les activités suivantes :

- la collecte et la mise à disposition des informations quantitatives et qualitatives sur l’état de développement de la culture au Burkina Faso ;

- la détermination des effets et impacts des secteurs d’activités culturelles sur le développement économique, humain et social du Burkina Faso ;

- la proposition de pistes d’actions ainsi que des recommandations pour renforcer les impacts sociaux et économiques de la culture.

Il est également demandé au Consultant de proposer des indicateurs de suivi et d’évaluation du secteur culturel, des modalités d’actualisation des données contenues dans l’étude.Pour ce faire, le Consultant a conçu et mis en œuvre une démarche méthodologique, sommairement présentée ci-dessous.

Méthodologie

L’élaboration du rapport a été une combinaison d’une démarche participative, faitede rencontres avec la DEP et le Comité technique de suivi de l’étude, et de la mise en œuvre de démarches et d’outils spécifiques. L’équipe d’experts a eu des rencontres régulières avec le premier responsable de l’étude au sein du ministère de la culture ainsi qu’avec le Comité de suivi de l’étude. Ces rencontres ont eu pour objectifs de :

1. clarifier et avoir une compréhension partagée des TDR ;2. approfondir la compréhension du mandat des consultants, préciser

certaines attentes spécifiques et organiser de façon pratique le déroulement de l’étude ;

3. recueillir les différentes instructions et au besoin apporter des éclairages sur la méthodologie proposée ;

4. identifier les sources documentaires et collecter des documents disponibles sur les secteurs d’activité culturelle ;

5. collecter la documentation existante au niveau de la structure et voir la documentation complémentaire à rechercher ;

6. mettre au point les modalités pratiques de lancement, de démarrage et d’exécution de l’étude.

Puis d’autres rencontres ont eu lieu pour rendre compte de l’évolution de l’étude.

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Sur le terrain, il a été procédé à une revue documentaire et à des rencontres avec des personnes ressources. L’analyse documentaire a pour objectif de satisfaire aux attentes de l’analyse qualitative.L’étude a eu un important volet enquête par administration d’un questionnaire. L’administration d’un questionnaire visait à combler l’insuffisance ou l’absence de données qualitatives ou quantitatives pour répondre aux attentes de l’étude. Les opérateurs qui ont fait l’objet de l’enquête appartiennent aux six filières culturelles qui ont été retenues et relèvent des différentes fonctions dans la chaîne de valeurs de chaque filière. Ainsi les opérateurs qui en ont fait partie sont :

- les créateurs (bronziers, sculpteurs sur bois, fabricants d’instruments de musique, compositeurs, …..);

- les producteurs; - les vendeurs d’articles culturels du secteur informel;- les vendeurs d’articles culturels du secteur formel;- les lieux d’animation culturelle;- les radios et les télévisions;- les industries d’appui technique;- etc.

Le questionnaire a été conçu de manière à s’adapter à l’opérateur et à l’activité et à favoriser la prise en compte de certaines préoccupations de l’étude, notamment l’impact social (prise en compte de la dimension genre, prise en compte des groupes défavorisés, …), l’impact sur le développement local, l’impact sur la connaissance mutuelle, etc. Il avait aussi pour ambition de renseigner :

- la zone où l’activité se mène;- le type de bien ou service culturel;- son origine;- le producteur/fournisseur;- le marché (national, touristique, à l’exportation);- les ventes (quantités et montants);- les investissements;- les chiffres d’affaires;- les emplois (ventilés selon le genre);- etc.

Déroulement de l’étude / difficultés rencontrées

L’étude s’est déroulée entre janvier et mai 2012. L’enquête a été réalisée entre le 7 mars et le 15 mai 2012; elle a couvert dix des 13 régions du Burkina Faso pour un échantillon d’environ 500 enquêtés. L’étude n’a pas rencontré de difficultés particulières, mis à part le cas des non répondants, qui ont été surtout rencontrés dans le secteur formel, ou le cas des organisations ayant disparu, de celles qui végètent ou encore de celles qui n’ont pas encore commencé leurs activités.

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Une autre ‘difficulté’ méthodologique qui s’est présentée fut celle provenant du fait que beaucoup d’opérateurs du secteur ne se sont pas professionnalisés dans la chaîne de valeurs. Ils assument plusieurs fonctions : créateurs, producteurs, distributeurs, etc. Ce type d’opérateurs « multifonctions » est difficile à saisir dans la chaîne des valeur par une seule et unique variable qui serait « fonction dans la chaîne des valeurs » ; on a beau caractérisé cette fonction de ‘première’ ou ‘principale’, malgré tout, on ne s’en sort pas ; tant et si que le bureau s’est résolu à faire de chaque fonction une variable binaire (Oui j’exerce cette fonction/Non je ne l’exerce pas). Les fréquences qui apparaissent dans les tableaux statistiques relatifs aux fonctions sont des scores de la fonction dans l’ensemble de la population. Les données financières fournies par l’enquête, dans la mesure où elles proviennent des déclarations des répondants, dont on connaît par ailleurs la légendaire prudence sur ces questions, doivent être considérées comme des grandeurs notionnellesvraisemblablement minorées ; elles ne peuvent pas avoir une valeur probante.

Contenu de l’étude

L’étude comprend deux parties : la première essaie de faire un état des lieux de l’économie et du secteur de la culture au Burkina Faso ; la seconde d’évaluer la contribution du secteur culturel au développement social et économique du Burkina Faso.

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PREMIERE PARTIE : LE SECTEUR CULTUREL AU BURKINA FASO

Cette première partie fait l’état des lieux de l’économie et du secteur culturel au Burkina Faso, dans son administration, ses institutions, ses ressources et ses potentialités. Avant toute chose, cependant, il nous parait utile d’apporter quelques précisions sur le sens que nous donnerons au concept de culture dans la suite du document.

Dans une étude publiée par deux universitaires américains2 il ressort qu’il n’existepas moins de 160 définitions différentes du terme « culture » ; ce qui montre toute la difficulté que rencontrent les spécialistes pour trouver une définition consensuelle de ce concept.

Nous retiendrons, ici, la définition de l’UNESCO qui appréhende la culture commeétant l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances.

Le terme culture aura deux niveaux d’entendement dans ce document : d’une part, au sens le plus large, son caractère transversal et sa présence dans toutes les activités de la vie humaine et, d’autre part, dans une composition avec le mot secteur, qui permet de cerner la culture dans un découpage formalisé incluant la politique et l’action culturelles et pouvant être comparé à d’autres secteurs comme l’économie, l’agriculture ou l’éducation.

1. LES INSTITUTIONS D’ADMINISTRATION ET DE SOUTIEN A LA CULTURE ETLA POLITIQUE CULTURELLE

1.1. Les institutions d’administration et de soutien

Les institutions d’administration et de soutien au secteur de la culture au Burkina Faso comprennent les structures publiques centrales, les collectivités territoriales et les structures privées associatives.

L’administration de la culture au Burkina Faso est du ressort de l’Etat qui définit et met en œuvre la politique culturelle nationale à travers un département ministériel plein. Les origines d’un tel département ministériel au Burkina Faso remontent à 1971, année au cours de laquelle le gouvernement de l’époque a décidé de la

2Kroeber, A.L. et Kluckhohn, Culture : A critical review of concepts and definitions, HarvardUniversity, Peabody Museum of American Archeology and Ethnology Papers, 1952, p. 47.

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création d’un Ministère de l’éducation nationale et de la culture. Depuis cette période, le département de la culture a connu des fortunes diverses en se retrouvant rattaché successivement à différents ministères (éducation, sport, jeunesse, communication, information, etc.). C’est en 1985, au cours de la période révolutionnaire, qu’il a obtenu un premier statut de ministère plein, non rattaché à un autre département.

C’est donc ce département qui a la charge de la conduite de l’action gouvernementale en matière de culture. Il comprend, outre le cabinet du ministre et le secrétariat général, des services centraux, des services déconcentrés et des services rattachés. Les directions provinciales, prévues dans le dispositif organisationnel ne sont pas encore toutes installées.

Les structures centrales du ministère concourent à la réalisation des actions directement initiées par le cabinet ministérielle ou par le gouvernement. Elles sont au nombre de seize (16) dont quatre directions générales. Il s’agit de la Direction générale du patrimoine Culturel (DGPC), de la Direction générale du livre et de la lecture publique (DGLLP), de la Direction générale du tourisme (DGT) et de la Direction générale de la formation et la recherche (DGFR). Des douze (12) directions qui se rattachent à ces directions générales, 8 peuvent être considérées comme propres au département de la culture. Ce sont : la Direction des arts plastiques et appliquées (DAPA), la Direction des arts du spectacle (DAS), la Direction de la cinématographie nationale (DCN), la Direction de la promotion des industries culturelles et créatives (DPICC), la Direction de la valorisation et de l’aménagement touristique (DVAT), la Direction des études et de la planification (DEP), et le Secrétariat permanent de la Semaine Nationale de la Culture (SP/SNC), seul service central du ministère se trouvant hors de Ouagadougou, à Bobo-Dioulasso.

L’administration culturelle est restée pendant longtemps très centralisée. Elle vient d’entamer sa déconcentration administrative à l’intérieur du pays. Ainsi, les services ci-dessus décrits sont complétés par la création de treize (13) directions régionales, qui sont les structures déconcentrées du ministère dans les treize (13) régions administratives du pays. Ces directions régionales viennent d’être installées et sont encore en phase de consolidation. Six (6) directions provinciales expérimentent ce deuxième niveau de déconcentration.

Les structures rattachées comprennent les services publics décentralisés ainsi que les projets et programmes de développement concourant à l’accomplissement des missions du département. Ce sont les structures publiques à vocation culturelle suivantes : le Festival Panafricain du Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou (FESPACO), le Centre National des Arts du Spectacle et de L’Audiovisuel (CENASA),l’Institut Supérieur de l’Image et du son/studio-école (ISIS/Studio-école), le Musée National (MN), le Bureau Burkinabè de Droits d’Auteur (BBDA), l’Office National duTourisme Burkinabè (ONTB), le Fonds de Développement Touristique (FDT) et le Centre Régional pour les Arts Vivants en Afrique (CERAV/Afrique). Ce sont des

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établissements publics qui disposent en principe d’une personnalité juridique et d’une autonomie de gestion.

Le secteur de la culture étant transversal, d’autres départements ministériels et des institutions publiques conduisent des actions qui viennent renforcer celles du ministère en charge de la culture. Il s’agit du MATD, du MENA, du MESS, du MICA, du MEF, du MS, du MAE, etc. Ces départements ministériels interviennent dans le financement direct d’activités culturelles (spectacles de sensibilisation, soutien à des manifestations culturelles) et de manière indirecte à travers la mise en relation des acteurs culturels avec les partenaires financiers dans le cadre de la coopération culturelle. Une de ses attributions est de jouer le rôle d’interface entre les acteurs culturels et l’Etat.

A ces structures publiques relevant de l’Etat central, il convient d’ajouter les collectivités locales qui ont bénéficié, dans le cadre de la mise en œuvre de la décentralisation, d’un transfert des ressources et des compétences dont celles relevant du secteur culturel. Le pays compte en tout 352 communes.

1.2. Les orientations politiques dans le secteur de la cultureLe Ministère en charge de la Culture définit, organise et met en œuvre la politique culturelle du pays. En plus, il est chargé d'assurer, de coordonner et de diffuser les activités culturelles, préserver et mettre en valeur le patrimoine culturel national, protéger les œuvres de l'esprit, et gérer les échanges internationaux en matière de culture.

Le Burkina Faso dispose d’une politique culturelle bien codifiée. La première politique culturelle codifiée du Burkina Faso date de 2005. Ce document de politique culturelle est une somme de réflexions sur les principes, l’existant, les atouts et contraintes ainsi que les perspectives de développement de la culture burkinabè. Il se voulait une orientation générale de l’action culturelle au Burkina Faso et sa finalité était de « permettre à la culture de contribuer au développement humain durable au Burkina Faso 3». Après quatre ans de mise en œuvre, elle a été remplacée par une nouvelle politique culturelle. Ce nouveau référentiel a été adopté en Conseil des ministres le 14 octobre 2009 et rendu officielle à travers le Décret n°2009-778/PRES/PM/MCTC/MEF portant adoption du document de Politique Nationale de la Culture (PNC) du 10 novembre 2009.

Cette politique culturelle est la résultante opérationnelle de la vision que le Gouvernement s’est donné sur la place et le rôle de la culture dans le développement du Burkina Faso. La politique culturelle actuelle du Burkina Faso s’inscrit dans la logique de la vision prospective qui est de faire du Burkina Faso «une Nation solidaire de progrès et de justice, qui consolide son respect sur la scène

3 Ministère de la Culture, des Arts et du Tourisme, Politique Nationale de la Culture du Burkina Faso (PNC), Ouagadougou, e 2005

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internationale». Il s’agit de parvenir à réaliser une symbiose culturelle qui sera le résultat d’un brassage culturelle de la diversité ethnique et culturelle du pays. La vision du secteur culturelle qui découle de cette vision globale et de la stratégie nationale de réduction de la pauvreté est celle d’un « pôle dynamique jouant un rôle essentiel dans le développement, le renforcement de la paix, la cohésion nationale, le rayonnement international du pays. » 4

Les principaux axes définis sont la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, la consolidation de la cohésion sociale et le développement de l’économie de la culture. Cette politique culturelle, qui a titré leçon des insuffisances de celle de 2005, est accompagnée d’un plan d’action décennal qui couvre la période 2010-2020.

Le but de la PNC est « de fonder l’avenir de la Nation sur les valeurs et les réalités endogènes en mutation 5». C’est pourquoi elle entend mettre en valeur le patrimoine culturel (savoir et savoir-faire endogènes), promouvoir la créativité pour renforcer la diversité culturelle et développer l’économie créative. L’exécution de la PNC devra se faire à travers des plans d’action triennaux et des structures spécifiques de mise en œuvre tels que le Conseil national de la culture et le Comité de pilotage prévus à cet effet ainsi que les mécanismes de suivi-évaluation envisagés. L’Etat veut également compter sur les structures privées d’administration et de soutien à l’action culturelle qui sont essentiellement des associations sans but lucratif.

Un des objectifs de la nouvelle politique culturelle est l’émergence d’opérateurs culturels privés. Cette nouvelle politique culturelle entend redynamiser le secteur de la culture et mobiliser l'ensemble des acteurs du secteur.

Les collectivités locales peuvent également définir et mettre en œuvre des politiques culturelles locales car la culture est une compétence transférée, conformément à la loi AN-055 du 21 décembre 2004 sur la décentralisation6.

Cette politique culturelle s’exprime aussi à travers l’adoption de dispositions juridiques et l’adhésion à des conventions et traités internationaux.

D’une manière générale, les efforts déployés depuis les années 2000 par les autorités nationales ont contribué à la mise en place d’un cadre juridique de plus en plus structuré avec l’adoption de textes réglementaires sur le dépôt légal, la protection de la propriété littéraire et artistique, le code de la publicité, la protection

4 Ministère de la Culture et du Tourisme, Politique Nationale de la Culture du Burkina Faso (PNC), Ouagadougou, novembre 2009, p.30

5 Ministère de la Culture et du Tourisme, Politique Nationale de la Culture du Burkina Faso (PNC), Ouagadougou, novembre 2009, p.86 C’est dans ce cadre que la ville de Ouagadougou s’est dotée, en 2009, d’une Politique Municipale de la Culture.

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du patrimoine culturel, et des décrets portant règlementation de l’exportation des objets d’art et portant organisation de spectacles culturels au Burkina Faso, etc.

Le cadre juridique et institutionnel du secteur culturel burkinabè est donc composé de textes législatifs et règlementaires nationaux ainsi que d’instruments internationaux ratifiés. Ces textes sont renforcés par l’existence d’instruments spécifiques relatifs aux différentes structures rattachées qui sont essentiellement des Etablissements Publics de l’Etat (EPE).

Il est à noter toutefois qu’au niveau des textes des efforts restent à faire pour rendre le cadre juridique plus adapté aux besoins de développement du secteur. En effet, il existe encore des insuffisances telles que l’absence de statut de l’artiste, le manquede textes règlementant l’éducation artistique au Burkina Faso ou encore l’inexistence des textes d’application de certaines lois dont celle sur la protection du patrimoine.

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2. LES RESSOURCES CONSACREES AU SECTEUR CULTUREL

En tant que garant des richesses du patrimoine culturel national et responsable de la conception et de la mise en œuvre de la politique culturelle, le ministère de la Culture et du Tourisme est le grand pourvoyeur de ressources pour les activités et initiatives culturelles. Ainsi l’Etat met à la disposition du département des ressources financières, humaines et matérielles pour la réalisation des missions qui lui sont assignées.

2.1. Les ressources financières

Les ressources financières provenant du budget de l’Etat, pour modestes qu’elles puissent paraître au regard des besoins du secteur, ont évolué à un rythme soutenu depuis 2011.En effet, d’un montant de 3,7 milliards de FCFA en 2007, les allocations budgétaires sont passées à 7,6 milliards en 2010, soit une évolution qui a plus que doublé en niveau avec un taux de croissance annuelle moyen de 27,12%. Cette évolution est tirée par le personnel et l’investissement à un rythme identique (35,72% de croissance annuelle).7

Tableau 1 : Budget du Ministère de la culture de 2007 à 2010 (en millions de FCFA)

Titre de dépenses

Années budgétaires

2007 2008 2009 2010 MoyenneTaux de croissance (en%)

Personnel 0,4 0,9 1 1 0,83 35,72Fonctionnement 0,2 1 0,4 0,4 0,50 25,99Transferts courants 2 3,4 2,7 3,2 2,83 16,96Investissements exécutés par l’Etat 1,2 2,2 3,9 3 2,58 35,72Total 3,7 7,6 8 7,6 6,73 27,12Source : Annuaire statistique, MCT, 2010

A ces ressources directement allouées au ministère en charge de la culture, il faut ajouter celles allouées par le budget de l’Etat aux collectivités nationales pour le financement des activités culturelles.

2.2. Les ressources humaines

L’on note une faiblesse des ressources humaines disponibles pour la mise en œuvre de la politique et de l’action culturelles. Elles sont insuffisantes et faiblement qualifiées. Cela s’observe tant au niveau des agents publics de l’Etat qu’à celui des

7Il faut néanmoins préciser que les années 2008,2009 et 2010 prennent en compte, outre le département chargé de la culture, ceux du tourisme et de la communication.

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collectivités ou des acteurs privés. L’insuffisance de formation reste une constante, la plupart des acteurs ayant été formés sur le tas. Il existe cependant une lueur d’espoir avec le développement progressif de l’offre de formation.. L’ouverture au début des années 2000 des filières de formation artistique permanente dans le secteur public (ENAM en 2004-2005, Université de Ouagadougou en 2002-2003) et dans le privé (CFRAV en 2003) place le Burkina Faso sur la voie du développement d’une formation artistique structurée. Son exemple a inspiré des pays de la Sous-région comme le Sénégal et le Bénin, au niveau universitaire.

2.3. Les ressources infrastructurelles

L’existence d’infrastructures et d’équipements de qualité favorise une bonneorganisation de la création et de la diffusion des œuvres artistiques. L’Etat, en plus des réalisations datant des premières années des indépendances comme la Maison du peuple et les Maisons des jeunes, a construit ou aidé à construire des salles dans les villes de Ouagadougou (CENASA, Palais de la Jeunesse et de la Culture Jean-Pierre Guingané, CDC, Jardin de la Musique Reemdoogo), de Bobo-Dioulasso (Théâtre de l’Amitié, Maison de la culture) et de Ouahigouya (Salle de spectacle Mahamoudou Ouédraogo). Ces réalisations sont venues renforcées celles qui existaient déjà et qui sont l’œuvre d’opérateurs culturels privés ou de partenaires de la coopération culturelle.

Les plus importants sont : l’Espace Culturel Gambidi (ECG), l’Espace Atelier Théâtre Burkinabé (ATB), le Centre Culturel Français-Georges Méliès (CCF-GM), le Centre de Développement Chorégraphique (CDC), le Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou (CITO), le Centre Culturel Français- Henri Matisse (CCF-HM), l’Espace Rencontre des Jeunes de DAFRA (ERJ Dafra), le Centre Djeliya et l’Espace Siraba. Indépendamment de ces espaces, divers lieux assurent par défaut le rôle de salles de spectacles, comme le montre le tableau 2 suivant. Ce tableau montre en effet que 34,51% des infrastructures sont des salles de cinéma, 17,70% des Maisons des jeunes et seulement 15,04%, soit moins du sixième de l’ensemble, des salles effectivement conçues pour les spectacles. Le reste est constitué de lieux transformés en salles d’exposition ou de spectacles pour pallier le manque d’infrastructures dans certaines localités du pays.

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Tableau 2 : Type d'infrastructures pouvant accueillir des spectacles Type d'infrastructures Fréquence

absolueFréquence

relative (en %)Bar 1 0,88Centre culturel 2 1,77Centre d'exposition 1 0,88Centre de création 3 2,65CLAC 5 4,42CPL 9 7,96Infrastructure hôtelière 8 7,08Infrastructure sportive 5 4,42Institution culturelle 1 0,88Maison des jeunes 20 17,70Plateau de spectacles 1 0,88Salle de cinéma 39 34,51Salle de spectacles 17 15,04Salle polyvalente 1 0,88Total 113 100,00Source : Répertoire des infrastructures de spectacles, MCT, 2010

Ainsi, malgré les importants efforts déployés pour doter les artistes et le public de lieux de rencontres artistiques, le cadre infrastructurel demeure problématique. En effet, mis à part les grands centres urbains comme Ouagadougou, Bobo-Dioulasso et Ouahigouya qui disposent de salles adaptées à des productions de grande facture, les autres localités restent complètement démunies et les salles qu’on y rencontre sont désuètes et sous équipées. Selon les données disponibles, seulement 23,9% des salles répertoriées disposent d’un équipement technique en son et lumière.

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3. APERÇU SUR L’ECONOMIE, LA CULTURE ET LES FILIERES CULTURELLES DU BURKINA FASO

3.1. APERÇU SUR L’ECONOMIE DU BURKINA FASO

3.1.1. Performances globales

De 1999 à 2009, le Burkina Faso a réalisé de bonnes performances macroéconomiques. Le revenu national, mesuré par le Produit intérieur brut, aussi bien en valeur nominale qu’en valeur réelle, présente un trend croissant. Le PIB à prix courant est passé de 1854 milliards en 1999 à 3941 milliards en 2009, soit un taux de croissance annuelle moyen de 7,83%. Le PIB constant, bien qu’évoluant dans le même sens, avance à un rythme plus lent, en passant de 1854 milliards à 3100 milliards, pour un taux de croissance annuelle moyen de 5,27%. Ainsi, que ce soit en valeur courante ou en valeur constante, les performances du Burkina Faso sont, dans le contexte mondial actuel, consistantes.Cette bonne performance macro-économique a été obtenue grâce à l’adoption et à la mise en œuvre de programmes de stabilisation et de réformes structurelles pour améliorer la gestion des finances publiques, et libéraliser l’économie. L’apparition de nouveaux produits, en l’occurrence les produits des technologies de l’information et de la communication (TIC), et l’arrivée de nouveaux opérateurs dans les secteurs des TIC, des mines et du transport aérien explique cette évolution. Ces performances sont tempérées par deux faits majeurs. La première vient du fait que ce taux de croissance de 5,27% est tiré par la consommation finale et non par l’investissement. En effet, le taux de croissance réalisé provient de celui de la consommation finale (4,70 points) dont celle des ménages (3,10 points) contre une contribution de l’investissement à hauteur seulement de 1,69 points dont 0,5 point pour l’investissement privé et une contribution négative du secteur du commerce extérieur. C’est donc une croissance qui, d’une part, ne s’accompagne pas d’une forte croissance du tissu productif et, d’autre part, se traduit par une perte nette de ressources extérieures (devises).En second lieu, ces bonnes performances ne se sont malheureusement pas traduites par une amélioration significative des conditions de vie des populations. Avec un PIB net d’environ 500 $ EU (2011), le Burkina Faso reste confronté au défi de la pauvreté : 42,8 % de la population globale, dont 51,5% en milieu rural, vit en dessous du seuil de pauvreté.

3.1.2. Caractéristiques sectorielles

La formation du PIB du Burkina Faso repose essentiellement sur le secteur primaire et le secteur tertiaire. En effet, selon les données disponibles, le premier secteur, entermes de contribution à la formation du PIB, est le secteur tertiaire (42,9% en moyenne) ; suivi du secteur primaire (29,7% en moyenne) et finalement du secteur secondaire (20% en moyenne).Cet ordre est pratiquement resté le même depuis

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1999, mais la perte régulière d’importance des secteurs primaire et secondaire au profit du secteur tertiaire est remarquable.

Dans son ensemble, le secteur primaire occupe, au Burkina Faso, plus de 85 % de la population active, contribue pour près de 30% à la formation du produit intérieur brut et assure plus de 85 % des recettes d’exportation. Malgré ce poids prépondérant, les niveaux de revenus du secteur demeurent bas. Depuis la fin des années 90, le secteur primaire de l’économie burkinabè a connu une croissance relativement faible. Cette évolution tient aux aléas climatiques et à la fluctuation des cours des produits de base sur les marchés internationaux des matières. Etant effectivement une agriculture pluviale, la production dépend fortement de la pluviométrie qui, dans le contexte géographique du Burkina Faso, est très capricieuse. La production agricole étant par ailleurs tirée par la production cotonnière, lorsque les cours s’orientent à la baisse, la production cotonnière est découragée. La conjugaison de ces deux phénomènes ces dernières années ont eu raison de la bonne croissance du secteur primaire observée au début des années 80 jusqu’à la fin des années 90. Pourtant, le secteur primaire recèle encore d’importantes potentialités. A peine près de 50% de la superficie agricole exploitable serait cultivée et les marges de croissance en termes de productivité restent encore importantes. Des filières spécifiques ont un potentiel jugé intéressant (fruits et légumes, tubercules, anacarde, karité, sésame, riz, élevage), et ont besoin d'être suffisamment valorisées.Le secteur secondaire est relativement peu développé, même si les potentialités restent considérables en regard des matières premières susceptibles de servir de base au développement de l’industrie. Le secteur tertiaire est celui qui est le plus important en termes de contribution à la formation du PIB. Depuis 1999, il a toujours occupé cette position mais celle-ci n’a fait que se renforcer constamment. Ainsi, de 38,5% en 1999, le poids du secteur tertiaire dans le PIB est passé à 46,4% en 2009 au détriment du secteur primaire et surtout du secteur secondaire. Par définition, le secteur tertiaire est fait des services marchands et non marchands. Sur la période 1999-2009, la croissance du PIB a été impulsée par celle du secteur tertiaire, qui y a contribué pour 3,1 points dont 1,9 et 1,3 pour respectivement lesservices marchands et les services non marchands.

3.2. Le Burkina Faso : une richesse culturelle immense mais insuffisamment exploitéeLe Burkina Faso est riche d’une soixantaine de groupes ethniques qui constituent autant de terreaux favorables au développement d’une diversité culturelle pétillante.L’ensemble de ces ethnies se distribue en une dizaine de familles culturelles quesont les Mossi, les Gourounsi, les Gourmantché, les Bissa, les Mandé, les Bobo, les Senoufo, les Lobi et les Dagari. Chaque famille culturelle possède sa propre langue et ses dialectes.

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Outre les valeurs communes, chaque groupe possède des richesses spécifiques liées à sa propre histoire, à ses traditions et à ses croyances. Certaines communautés historiques et linguistiques entretiennent des liens identitaires assez étroits ; ce qui a favorisé le développement de pratiques intercommunautaires telles que la parenté à plaisanterie (voir chapitre 5). Les différentes communautés possèdent des manifestations culturelles traditionnelles qui sont des formes de marqueurs culturels (Djomêle, Basga, naabyikiugu, Ringou, etc.) et qui se déroulent de façon cyclique en suivant les saisons. Leur engagement dans la protection et la valorisation de leur patrimoine s’est traduit, ces dernières années, par le développement de manifestations festivalières à caractère identitaire visant à promouvoir les richesses patrimoniales: warba de Zorgho, liwaga de Séguénéga,Wedbindé de Kaya, Zaoré de Koupéla, Djenka de Garango, masques de Dédougou,Pouni, Toma, Boulsa, etc.

3.2.1. Aperçu général sur le potentiel culturel burkinabè

Dans la société traditionnelle burkinabè, à l'instar des autres sociétés africaines, il est difficile de parler d'organisation systématique de la culture au sens moderne du terme. La culture burkinabè est à la fois un mélange de pratiques traditionnelles et de coutumes. Elle est partie intégrante de la vie quotidienne de l'individu. Pour pénétrer le secret de la culture dans chaque société, il apparaît indispensable, dès lors, de suivre le déroulement des grands événements qui rythment la vie dans nos villages (rituels des initiations, des mariages, des récoltes, des enterrements et funérailles etc.). Cette culture s'exprime par des éléments importants au nombre desquels on peut citer :

les valeurs de références telles que la solidarité, l’hospitalité, l’intégrité, le sens de l’honneur, le courage, et le travail ;les savoirs et savoir-faire traditionnels dans des domaines comme la médecine traditionnelle, l’artisanat et l’architecture ;les traditions orales: considérées comme la principale source de l’histoire des populations africaines, elles véhiculent, à travers les âges, les créations et pratiques culturelles des peuples. Elles constituent de ce fait les principaux fondements de la société burkinabè.

la musique et la danse: le rythme a une place importante dans la vie duburkinabè. Dans la société traditionnelle, la musique et la danse ne sont pas seulement des divertissements, elles servent à extérioriser les émotions, les sentiments, à informer, stimuler, mobiliser. Elles sont également les éléments indispensables à la compréhension des masques.

En fait le potentiel culturel Burkinabé se caractérise par sa diversité. Les différents groupes ethniques au Burkina ont des traits caractéristiques spécifiques et expriment leurs identités à travers la sculpture sur bois ou en bronze, l’architecture, la musique, la danse, les savoirs et savoir-faire traditionnels… .

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3.2.1.1. L’art du Burkina Faso

L’art du Burkina-Faso est très riche et bien connu aux plans national et international. Cet art est essentiellement composé de masques, de statuaire, de poterie, de meubles, d’instruments de musique, et d’architecture. Certains des éléments sont exposés dans les plus grands musées du monde : le Musée d’art africain de la Smithsonian à Washington DC, le Métropolitan Museum of Art à New York, le Musée du Quai Branly à Paris, etc.

- les masquesImage 1: Masque Nuni (Photo Diamitani)

Un des éléments les plus représentatifs de l’art burkinabè est incontestablement celui des masques. Nombreuses sont les communautés culturelles qui possèdent leurs traditions de masques.

Il existe plusieurs types de masques. Les plus connus sont à tête de bois, mais il y a en qui sont entièrement conçus en feuilles, fibres ou tissus.

Dans toutes les ethnies où le masque est présent, son caractère sacré est permanent ; c’est la règle. Chaque masque possède une ou plusieurs fonctions dans le cadre de la vie sociale. A côté des masques

sacrés, sacrificiels, on rencontre des masques de parade auxquels sont souvent accolés des sobriquets comme « masque des enfants », « masques des femmes » ;ils sont les symboles de l’innocence, de la tendresse, de l’amour.

Les masques servent à de nombreux usages dans le quotidien, les cérémonies et les festivals. Ils symbolisent souvent des personnages mystiques et légendaires et sont les liens entre le monde des vivants et celui des morts, les ancêtres. Ce ne sont pas des gens de ce monde ; « ils descendent du ciel », apprend-t-on très tôt aux jeunes!8

L’accès au masque est réservé aux initiés qui le connaissent et qui peuvent communiquer avec lui. Le contact en vue de l’initiation se fait souvent très tôt, dès la tendre enfance ; l’initiation elle-même, qui est une école de formation, se fait progressivement et se termine formellement dans certaines sociétés par une consécration. Dans certaines sociétés les jeunes des deux sexes sont initiés tandis que dans d’autres seuls les jeunes de sexe masculin ont accès à l’initiation.

8 Le respect de cette loi est particulièrement stricte au sein de certaines sociétés de masques au point que lorsqu’une personne décède accidentellement alors qu’elle portait un masque, il n’est pas organisé de funérailles pour elle, afin de perpétuer le mythe que le masque n’est pas de notre monde ; par conséquent un service d’ordre et un système de sécurité (garde rapprochée, système de guidage par le truchement du langage des initiés), sont mis en œuvre autour du masque pour minimiser les accidents (incendie, accidents causés par des obstacles que le masque n’a pas vus, agressions lors des rivalités au sujet des ordre de préséance, etc. ).

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- la statuaire

La statuaire est un art pratiqué par plusieurs groupes ethniques du Burkina Faso, dont principalement les Lobi, les Dagara, les Gan, les Birifor, les Moosé, les Bwaba,les Léla, les Nuna, et les Winiéma,

L'art de la statuaire est avant tout cultuel. Les statues et statuettes sont créées pour servir de support à certains cultes ou pour intervenir dans les rites. Mais elles jouent également un rôle politique en ce qu'elles représentent souvent le chef, le roi et autres symboles du pouvoir. Elles peuvent parfois avoir une fonction plus ludique ou pédagogique. A titre d’exemple, une grande partie de l’art de la statuaire au Burkina Faso est liée à la maternité ou à la fécondité, comme cela se voit dans le reste du continent africain.

- la poterie

En plus des masques, la poterie constitue l’une des traditions artisanales les plus vivaces au Burkina Faso. Selon les régions, les hommes ou les femmes sont potiers et pratiquent différentes techniques. En général, l’activité de la poterie est le fait desfemmes des forgerons, qui sont les sculpteurs des masques dans la plupart des sociétés traditionnelles au Burkina Faso. Les jarres fabriquées selon leur dimension servent à stocker le grain, de réservoir d’eau, de marmite ou d’instrument de fabrication de la bière de mil. La jarre sert également à conserver des objets personnels dans les familles.

- le mobilier

Dans l’art du Burkina Faso le mobilier est très représenté, notamment les sièges. Dans la plupart des régions les sièges des hommes ont trois pieds, et ceux des femmes en ont quatre et tous sont taillés dans une seule pièce. Dans certaines régions, comme le sud-ouest, les hommes utilisent de grandes chaises basses à long dossier.

- les instruments de musique

L’un des pans importants de la culture burkinabé est le domaine de la musique et de la danse traditionnelles où il existe de multiples instruments de musique qui sont par ailleurs des objets d’arts. Il s’agit entre autres des tambours d’aisselle, des petits tam-tams (bendré en mooré), de la flûte traversière, du sifflet taillé dans le bois des Lobi, la clarinette des Bisa, etc.

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- l’architecture

Les richesses culturelles sont également nombreuses dans les domaines de l'architecture. Le domaine architectural est marqué par des constructions en terre de style soudanien et de peinture murale. L’une des plus belles réalisations est la mosquée de Bobo-Dioulasso. Au sud-ouest, les habitations-forteresses des Lobi domine l’architecture par leur élégance. Les habitats Gurunsi implantés dans le sud du pays dominent l’architecture par les fresques murales réalisées par les femmes.

3.2.1.2. Quelques domaines culturels d’excellence du Burkina Faso

Les domaines du cinéma avec le FESPACO, le tourisme et les musées peuvent être considérés comme des cadres de références en matière de valorisation du patrimoine culturel burkinabè. Leur action a permis un renforcement du dynamisme et du rayonnement culturel du pays.

- le cinéma

La reconnaissance internationale du Burkina Faso comme plaque tournante du cinéma Africain et siège des organisations des cinéastes fait également de lui une pépinière de techniciens du cinéma. De ce fait, les professionnels de ce secteur sont constamment sollicités dans la sous-région, pour la réalisation de films.

Dans le domaine événementiel, la tenue régulière du FESPACO renforce l’image d’un pays en pointe dans la création et la diffusion cinématographiques sur le continent. L’on note des efforts en matière de création cinématographique avec la réalisation régulière de séries télévisées. Aussi, avec le développement du numérique, les vidéos clubs, qui ont fait leur apparition il y a environ une décennie, prennent du terrain dans les villages et dans les faubourgs des cités urbaines où ils tiennent lieu de substituts aux salles de diffusion cinématographique. Le cinéma mobile, animé par le FESPACO, et le Cinéma Numérique Ambulant (CNA), circulent dans les provinces pour sensibiliser et informer les populations locales sur des thèmes liés à la santé, à l’environnement, à l’éducation, à la culture, à la lutte contre la pauvreté, etc.

- le tourisme culturel

Sur le plan touristique le Burkina Faso bénéficie, par rapport aux autres pays de la sous-région d’avantages essentiellement liés à la stabilité politique, à la publicité et à l'image que lui confèrent d’une part le FESPACO, le SIAO, la SNC, le FITMO, le FITD, les NAK, les Kundé, le FESTIMA, Waga Hip Hop et Jazz à Ouagadougou qui ont lieu chaque année ou tous les deux ans, et d’autre part, ses sites culturels (Loropéni, Laongo) et naturels (Fabedougou, Sindou, Cascades, Dunes).

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- les musées

En matière de structures de sauvegarde et de valorisation du patrimoine culturel un musée national et des musées locaux ont été créés. Ils mènent des activités de promotion du patrimoine à Ouagadougou et dans les provinces avec l’aide des populations locales. Le Burkina Faso compte une quinzaine de musées nationaux dont le musée de Manéga, un musée privé en passe de devenir le musée le plus fréquenté du pays avec plus de 25 000 visiteurs au cours des deux dernières années..

3.2.2. Le patrimoine culturel et naturel

Dans le but d’assurer une meilleure protection du patrimoine culturel et naturel et de trouver une solution à leur dégradation, les Etats membres de l’UNESCO ont adopté en 1972 la convention sur la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel. Le patrimoine culturel, selon la définition adoptée par l’UNESCO, désigne tout objet ou ensemble, naturel ou culturel, matériel ou immatériel, qu'une collectivité reconnaît pour ses valeurs de témoignage et de mémoire historique, en faisant ressortir la nécessité de le protéger, de le conserver, de se l'approprier, de le mettre en valeur et de le transmettre aux générations futures.

La loi N° 024-2007/AN portant protection du patrimoine culturel au Burkina Faso identifie, en son article 4, quatre catégories de patrimoine culturel :

le patrimoine culturel meuble ;

le patrimoine culturel immeuble

le patrimoine culturel immatériel ;

le patrimoine naturel.

3.2.2.1. Le patrimoine meuble

Le patrimoine culturel matériel se définit comme l'ensemble des biens meubles qui peuvent être déplacés sans dommage pour eux-mêmes et pour l’environnement (peintures, sculptures, monnaies, instruments de musiques, armes, manuscrits…).Le patrimoine meuble burkinabé est principalement composé des objets d’art, dont les masques et les statuettes.Avec sa soixantaine de groupes ethniques le Burkina Faso possède une diversité de patrimoine matériel. Bien qu’ayant subi des brassages avec d’autres cultures, une bonne partie de ce patrimoine est toujours conservé par les différentes communautés. Et l’Etat, dans sa politique de conservation et de préservation de ce patrimoine, a mis en œuvre une politique muséale qui a permis, à ce jour, la création d’une quinzaine de musées publics à travers le pays et a encouragé la création de musées privés. Ainsi un ensemble de près de 20 000 objets ont été collectés dans

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ces musées dont plus de 13 000 sont documentés et enregistrés. En plus des objets on peut inclure dans ce patrimoine les archives conservées aux Archives Nationales et celles d’autres institutions telles que l’Université de Ouagadougou, la Cinémathèque de Ouagadougou, le Centre National de Recherche Scientifique (CNRST) et de l’Institut Imagine9 qui disposent d’archives audiovisuelles.

3.2.2.2. Le patrimoine immeuble

Le patrimoine immeuble regroupe les biens immobiliers (monuments, sites archéologiques…) qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de l’histoire, de l’art ou de la science ; et du point de vue historique, esthétique, ethnologique ou anthropologique.Le patrimoine immeuble du Burkina Faso est surtout composé d’une architecture traditionnelle très variée, à l’image des habitats lobi, kasséna, bobo, senufo et peul.

3.2.2.3. Le patrimoine immatériel

Comme beaucoup de pays africains, le patrimoine du Burkina est essentiellement immatériel. Il est composé des pratiques, des représentations, des savoirs, des savoir-faire traditionnels, des instruments, objets et artefacts qui leur sont associés. Ainsi, les célébrations traditionnelles d’évènements sociaux tels que les naissances, les mariages, les funérailles, les fins et les débuts de saison, etc., ou d’évènements cosmiques comme les éclipses du soleil ou de la lune sont des expressions du patrimoine immatériel. Ce patrimoine immatériel, qui se retrouve dans toutes les communautés, est dynamique et évolutif. Il se renforce par des apports d’autres cultures d’ordre local, national, régional et international. il se manifeste dans les domaines suivants :

les traditions orales : elles font partie des principaux fondements de la société africaine. Elles sont également une source de l’histoire et un moyen de préservation de traditions séculaires ;

les pratiques sociales, rituels et événements festifs ;

les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ;

les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel ;

la musique et la danse : le patrimoine culturel immatériel est un patrimoine vivant qui donne à chacun de ceux qui en sont les dépositaires un sentiment d’identité et de continuité, tant il se l’approprie et le recrée constamment. C’est également un patrimoine fragile et en perpétuel danger car il est le moteur de la diversité culturelle. En effet, au Burkina Faso comme dans de nombreux pays africains, le patrimoine culturel y est essentiellement

9L’Institut Imagine est une structure créée par le cinéaste Gaston Kaboré

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immatériel. Ce patrimoine immatériel est dynamique et fait l’objet de brassage avec d’autres cultures dans un monde globalisé.

C’est précisément le foisonnement de ce patrimoine culturel immatériel qui est à la base de la création des manifestations culturelles, telles que la Semaine nationale de la Culture - qui est aujourd’hui un bon cadre pour la promotion, la valorisation et la diffusion des pratiques artistiques traditionnelles - et les différents festivals de masques et de danses qui se sont développés.

D’autres composantes, comme la parenté à plaisanterie, les contes et traditions, forment le socle de ce patrimoine immatériel qui est également au cœur de nombreuses manifestations culturelles dont les festivals d’arts traditionnels et de promotion du patrimoine.

3.2.2.4. Le patrimoine naturel

Le patrimoine naturel comprend les sites naturels ayant un intérêt environnemental, social ou culturel tels que les paysages culturels, les formations physiques, biologiques ou géologiques. Dans l'acception générale, le patrimoine naturel, comme le patrimoine culturel, est un bien commun, relativement épargné par l'action de l’homme ou des intempéries naturelles et qui doit être légué aux générations futures.Au lieu d'avoir été construit par l'Homme, le patrimoine naturel résulte de l'évolutionet parfois des interactions entre l'homme et la nature. Ce patrimoine est donc une somme de ressources naturelles pour l'ensemble des espèces vivantes, dont l'humanité fait partie, et pour les générations futures. Une composante du patrimoine naturel peut être considéré comme patrimoine immatériel et est souvent intégrée dans le bien commun, et peut faire aussi l'objet d'appropriation et privatisation (parexemple les bois sacrés).

La convention de l’UNESCO comprend dans le patrimoine naturel :

les monuments naturels constitués par des formations physiques et biologiques ou par des groupes de telles formations qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue esthétique ou scientifique ;

les formations géologiques et physiographiques et les zones strictement délimitées constituant l’habitat d’espèces animale et végétale menacées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science ou de la conservation ;

les sites naturels ou les zones naturelles strictement délimitées, qui ont une valeur universelle exceptionnelle du point de vue de la science, de la conservation ou de la beauté naturelle.

Le patrimoine naturel est un des éléments de plus en plus pris en compte pour le classement sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco. Les principaux sites

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naturels du Burkina Faso sont des falaises, des pics, des dunes, des mares et cascades.

En ce qui concerne le patrimoine naturel, un recensement de sites a été effectué à travers le territoire national dont seulement 44 sont inscrits sur la liste national du patrimoine. Les plus connus sont les cascades de Banfora et de Karfiguela, les pics de Sindou, les mares aux crocodiles sacrés, les grottes et le site de Loropéni quivient d’être classé sur la liste du patrimoine mondial. A cela s’ajoute les zones deconservation de la faune où existent encore de nombreuses espèces animales ainsi que des formations végétales sauvages : le parc du W, la mare d’Oursi, classée patrimoine de l’Humanité.

Mais il reste encore de nombreux sites naturels qui attendent d’être répertoriés, inventoriés, conservés et gérés. Les activités liées à ces travaux ainsi que les sites eux-mêmes sont des sources potentielles de création d’emplois et de revenus pour les populations locales.

3.2.3. La musique traditionnelle

La musique traditionnelle, désigne l'ensemble des musiques associées à une culturelocale, nationale ou régionale ou à une zone géographique ou ethnique. Musiques orales et populaires, elles se transmettent par l'ouïe, bien que certains groupes musicaux et musiciens modernes appliquent les méthodes du solfège sur les musiques traditionnelles afin de les interpréter ou de les répertorier.

La musique traditionnelle est jouée à l’origine avec des instruments traditionnels,c’est à dire fabriqués localement, et elle est souvent transmise de génération en génération mais peut aussi déborder la communauté. Ainsi, la musique traditionnelle burkinabé englobe différents genres de chants ou de musiques instrumentales qui sont jouées par les différents groupes ethniques vivant au Burkina ou dans d’autres pays ou même, de nos jours, par des gens d'autres nationalités.

Nous pouvons considérés par exemple le liwaga, le balafon comme faisant parties des danses et musiques traditionnelles du Burkina.

Les deux dernières décennies ont vu cette musique se propulser au-devant de la scène artistique nationale sous plusieurs formes et à travers des initiatives variées. Ainsi, après l’émergence de Kaboré Issaka dit Zougnazagmda qui s’est imposé au bout de quelques années, la vitalité de la musique traditionnelle allait se confirmer avec la révélation de nouveaux talents, désignés sous la dénomination de vedettes de la chanson traditionnelle, dont les porte-voix sont nombreux.10Dans le même temps, des groupes traditionnels de plus en plus structurés vont se faire connaître à

10Kisto Koimbré, Nana Bibata, Hado Gorgo Léontine, Bamogo de Nobéré, etc.

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la faveur de la Semaine Nationale de la Culture11. Bon nombre d’entre eux ont déjà été lauréats du Grand prix national des arts organisé dans le cadre de la SNC.

3.2.4. Les manifestations culturelles

Les manifestations culturelles sont des formes d’expression culturelles qui se produisent dans une périodicité assez régulière et dans un espace de temps donné. Certaines de ces manifestations culturelles sont aussi anciennes que les sociétés qui les abritent : ce sont les manifestations funéraires, les fêtes traditionnelles, les rites saisonniers. Elles émanent de l’héritage culturel des ancêtres, des croyances et des religions.

Le Burkina Faso compte près de 8000 villages. Même en tenant compte des villages où la religion musulmane s’est installée depuis bien longtemps, il n’est pas exagéré de dire que le nombre de manifestations culturelles traditionnelles au Burkina Faso est trois voire quatre fois le nombre de villages, tant chaque village abrite dans l’année au moins deux manifestations culturelles : les fêtes de fin des saisons et les célébrations funéraires (funérailles froides). Ce segment des manifestations culturelles recèle d’un potentiel commercial et touristique qui n’est pas encore suffisamment exploité.

Les autres manifestations culturelles, qui s’inscrivent historiquement dans le brassage entre les peuples, l’élévation du niveau d’éducation, de connaissance et de conscience des peuples, sont plus récentes. Elles ambitionnent de promouvoir des valeurs communautaires, locales, nationales voire africaines auprès du reste du monde, désormais de plus en plus ouvert ; elles voudraient défendre, préserver, conserver. Elles sont aussi partie au commerce des services en même temps que produits d’une activité économique qui se nomme « tourisme ». Comme telles, ces manifestations culturelles récentes sont offertes sur le marché par des promoteurs publics ou privés. Au Burkina Faso, on ne compte pas moins de 70 manifestations culturelles réparties sur l’ensemble du territoire. Sur 45 provinces, 25 abritent des manifestations culturelles (Tableau 3).

11Les groupes les plus en vue, sont Kiswendsida, Naaba Yadéga, Wassenimi, Yèrèlon, les ensembles de danses dodo, kigba, warba, salou, liwaga.

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Tableau 3 : Répartition provinciale des manifestations culturelles modernes

Province

Statut juridique du festival

Province

Statut juridique du festival

Privé Public Total Privé Public TotalBam 1 1 Les Balé 1 1Boulgou 3 3 Mouhoun 2 2Boulkiemdé 5 5 Nahouri 1 1Comoé 2 2 Namentenga 1 1Ganzourgou 1 1 National 1 1 2Gourma 2 2 Oudalan 1 1Houet 4 1 5 Poni 3 3Ioba 1 1 Sanmatenga 1 1Kadiogo 21 4 25 Soum 2 2Kadiogo et Houet 1 1 Sourou 2 2Kadiogo et Oubritenga 1 1 Yatenga 3 3Kossi 1 1 Zandoma 1 1Kouritenga 1 1

Kourwéogo 1 1Ensemble du Burkina 64 6 70

Source : Ministère de la culture, répertoire des manifestations culturelles

Le plus grand nombre se retrouve à Ouagadougou avec 25 manifestations propres et 2 manifestations partagées avec les provinces du Houet et de l’Oubritenga. Les deux autres plus grandes provinces, en termes de manifestations culturelles, sont le Boulkiemdé et le Houet. En fait, Ouagadougou tire partie de son statut de capitale politique et de ville la plus peuplée du Burkina Faso ; ce qui crée une demande de produits culturels très au-dessus de celle qui peut s’exprimer dans les autres villes et localités du Burkina Faso.

Par rapport à l’envergure, 22 manifestations présentent une envergure internationale (31,43%), 5, soit 7,14%, une envergure nationale et 43 (soit 61,43%) une envergure locale.

D’un point de vue du statut juridique, 6 sont publiques tandis que 64 relèvent du privé associatif à but non lucratif.

Tout cela prouve le dynamisme des acteurs du secteur de la culture mais augure des difficultés, notamment financières, auxquelles ne manquera pas d’être confrontée la plupart de ces manifestations culturelles. D’ailleurs tous les festivals ne sont pas actifs : seuls 34 peuvent être considérés comme actifs.

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Tableau 4 : Répartition par province des festivals actifs au Burkina FasoProvince Statut juridique du festival Total

Privé PublicBoulgou 2 2Boulkiemdé 2 2Gourma 1 1Houet 1 1 2Kadiogo 13 4 17Kossi 1 1Kouritenga 1 1Mouhoun 1 1Namentenga 1 1Oudalan 1 1Poni 1 1Sanmatenga 1 1Soum 1 1Yatenga 2 2

29 5 34Source : répertoire des manifestations, MCT

3.2.5. Contraintes à la valorisation du potentiel culturel burkinabè

Le potentiel culturel burkinabè est très riche mais faiblement exploité. Pourtant, laforte proportion de jeunes au sein de la population constitue un potentiel de consommateurs qui ne demandent qu’à être formés, entretenus et fidélisés pour créer les conditions d’une demande plus forte en matière de produits artistiques et culturels.

Une des explications à cette insuffisance est que les opérateurs intervenant dans le secteur sont surtout des Association Sans But Lucratif dont la structuration n’est pas favorable à un développement d’activités rentables. Une meilleure organisation du secteur et un renforcement des capacités d’action (ressources humaines, matérielles et financières) permettraient une meilleure exploitation du riche potentiel culturel et augmenterait de façon significative sa contribution au développement.

En plus, les nombreux sites et monuments historiques et naturels existant attendent toujours d’être répertoriés, inventoriés, conservés et gérés. Les activités liées à ces travaux sont de potentielles sources de création d’emplois et de revenus pour les populations locales.

A ce jour, il n’existe pas de répertoire exhaustif des manifestations culturelles traditionnelles à l’image de ce qui est fait pour les festivals modernes. Une étude réalisée par le bureau d’études BERCOF en 2005 donne une estimation de 800 groupes de musique évoluant dans les arts traditionnels de la scène, 650 groupes de

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danse, 100 compagnies de théâtre. Ce qui dénote d’une forte potentialité du secteur culturel.

Aux insuffisances évoquées s’ajoute une certaine faiblesse dans la coordination desactions menées par les différents acteurs (l’Etat, les collectivités, la société civile et les partenaires au développement). La plupart des structures culturelles nationales ne développent leurs actions que vers les acteurs culturels vivant dans les centres urbains et semi urbains. De nombreux artistes et artisans vivant dans les zones rurales, notamment les femmes, ne sont généralement pas pris en compte, ou de façon isolée, par manque de moyens financiers et techniques.

Il convient de signaler également qu’il existe très peu d’agences nationales privées de production culturelle au Burkina Faso. La difficulté d’accès au crédit bancaire pour financer les projets culturels bloque l’émergence d’un corps de promoteursprivés aptes à détecter et à lancer de jeunes talents. L’Etat et ses partenaires au développement ont des difficultés à mettre en place des mécanismes de financement et des synergies permanents de soutien aux initiatives culturelles. En dépit de quelques financements extérieurs (Union Européenne, OIF, Africalia, Adami, Prince Claus, Ford Fondation, Wallonie Bruxelles, Norad, Danida, etc.) la majorité des opérateurs privés culturels, les artistes, et les artisans n’ont pas toujours accès aux ressources nécessaires et surtout au crédit.

Malgré sa richesse culturelle reconnue, le secteur de la culture burkinabè reste toujours un domaine difficile à gérer et à rentabiliser. En effet les nombreuses productions artistiques et les nombreux festivals à travers le pays ne drainent toujours pas assez de touristes au Burkina Faso. Le patrimoine culturel burkinabè est mal connu par les burkinabè et par les autres peuples. Par exemple le patrimoine que l’on cite comme riche et diversifiée n’est pas totalement inventorié et catalogué. Il y’a une faible corrélation entre les filières culturelles et le tourisme.

Il y a très peu de sponsors et il n’y a pas de mécènes nationaux au Burkina Faso.Les bailleurs de fond sont principalement l’Etat et les coopérations bilatérales et multilatérales qui, souvent, imposent leur vision de la culture à travers leur financement. Le domaine de la culture est perçu comme peu rentable si bien que les privés et autres sponsors nationaux ne s’y risquent pas trop ; ce qui fait que rien ne semble définitivement acquis dans le domaine de la culture au Burkina Faso. La prise en compte de la culture au niveau local est marginale. Finalement il y’a un manque de coordination au niveau local et national ; ce qui conduit à un manque de capitalisation des expériences et de prise en compte des expertises nationales. Si l’on ajoute à cela le manque de documentation sur les initiatives culturelles et la faiblesse des évaluations des actions menées, on peut affirmer que le problème général de la culture burkinabè est non seulement l’insuffisance de ressources financières et humaines mais aussi le sous équipement et l’obsolescence des infrastructures qui ne favorisent pas une exploitation maximale du riche potentiel existant.

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3.3. Les filières culturelles

Le choix des filières retenues a été guidé par un souci d’opérationnalisation et d’efficacité ; ceci a conduit à privilégier des regroupements qui se rapprochent autant que faire se peut de la réalité du terrain et qui instaurent une chaîne de valeurs cohérente de bout en bout en conformité avec la logique de l’approche filière. En effet, «la filière permet de mettre en évidence, au-delà des relations marchandes vendeurs-clients, des synergies, des effets externes, des relations de coopération et des nœuds stratégiques, dont la maîtrise assure une domination; elle constitue un espace des stratégies d’acteurs.» (Hugon, 1985). Bien que certaines filières soient mieux structurées que d’autres, toutes les filières retenues correspondent à la configuration du secteur culturel du Burkina Faso. Six filières thématiques ont été retenues: les arts de la scène, la musique enregistrée, les arts plastiques, appliqués et l’artisanat d’art ; les arts du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique ; le patrimoine culturel ; le livre et la presse écrite. A ces six filières culturelles, il a été ajouté deux filières transversales : les manifestations culturelles et la formation/appui-conseils. Après un aperçu général, cette section passe en revue chacune des six filières ainsi que des filières transversales.

3.3.1. Aperçu des filières culturellesL’exploitation primaire des données de l’enquête met en lumière deux phénomènes intéressants : d’une part le caractère dominant des filières ouvertes, dynamiques et bénéficiant des TIC et, d’autre part, la double pauvreté des filières culturelles. Sur la base de l’enquête terrain, il apparaît que la filière « Art plastique, appliqué et artisanat d’art » est la filière la plus importante (29%), suivie de la filière « Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique » (14%), puis de la « musique enregistrée »(12%). Cette situation correspond à la perception intuitive que tout observateur pourrait avoir de l’importance des filières culturelles au Burkina Faso. En effet la première filière, celle de « l’art plastique, appliqué et artisanat d’art »apparaît la plus étendue en termes de métiers et la plus visible en termes de présence économique. Ensuite, cette filière est relativement ouverte en termes de capitaux nécessaires pour y entrer.

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Graphique 1 : Répartition de l’activité des opérateurs par filière culturelleL’importance de la filière « art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique » vient du développement prodigieux du marché du film sur support numérique, du développement de la production cinématographique, de celui de la radio et de la télévision avec toutes les activités qui s’ensuivent.

Source :BBEA, résultats de l’enquête

Cela vaut aussi pour la musique enregistrée. Quant à la filière Formation/Appui-conseils, elle est aussi relativement ouverte, surtout dans ses segments consultations et formations courtes non diplômantes. Deux filières, la filière « Patrimoine culturelle » et celle du «livre et presse écrite »mobilisent chacune moins de 10% des opérateurs de l’échantillon. Cela pourrait être symptomatique de l’insuffisante promotion du patrimoine culturel et peut-être d’un besoin d’une politique volontariste du livre et de l’édition.

La seconde caractéristique globale qui se dégage est la double pauvreté des différentes filières au niveau des facteurs de production. L’ensemble des opérateurs enquêtés qui ont répondu se caractérise par la faiblesse de l’investissement initial et par celle des effectifs salariés. L’investissement total varie de 11.000 FCFA (22 $) à 1.300.000.000 de FCFA (2.600.000 $), pour une moyenne d’environ 24.000.000 de FCFA (48 000 $).

Art de la scène 10%

Musique enregistrée

12%

Art plastique, appliqué et

artisanat d'art 29%

Art du cinéma, de

l'audiovisuel et du

numérique 14%

Patrimoine culturel

6%

Livre et presse écrite

8%

Manifestations culturelles

10%

Formation/Appui-conseils

11%

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Tableau 5 : Facteurs de production dans le secteur de la culture

Région StatistiquesInvestissement total Nombre de

salariés

CASCADES

Nombre de répondants 16 30 Minimum 220 000 1Moyenne 501 250 1Maximum 1 200 000 1

CENTRE

Nombre de répondants 58 153 Minimum 80 000 1Moyenne 61 352 145 5Maximum 1 300 000 000 112

CENTRE EST

Nombre de répondants 15 25 Minimum 110 000 1Moyenne 648 300 1Maximum 2 500 000 1

CENTRE NORD

Nombre de répondants 18 31 Minimum 90 000 1Moyenne 988 611 2Maximum 5 000 000 9

HAUTS BASSINS

Nombre de répondants 4 13 Minimum 75 000 1Moyenne 5 931 250 9Maximum 19 250 000 60

PLATEAU CENTRAL

Nombre de répondants 20 27 Minimum 11 000 1Moyenne 1 113 300 1Maximum 15 000 000 3

Total

Nombre de répondants 154 335 Minimum 11 000 1Moyenne 23 749 935 3Maximum 1 300 000 000 112

Source : Enquête BBEA

Le nombre d’employés aussi est faible. Sur l’ensemble de l’échantillon, le nombre moyen d’employés par opérateur est de 3, compris dans un intervalle allant de 1 à 112.Il s’ensuit que les techniques de production sont très peu capitalistiques, et que la main d’œuvre employée, à l’image de la faiblesse du capital, est très peu qualifiée. Les techniques de production sont donc artisanales voire manuelles. S’il est vrai que le mode de production faiblement capitalistique est caractéristique de l’art et de l’artisanat d’art, il n’en demeure pas moins qu’un niveau d’équipement minimum pourrait améliorer la productivité.

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3.3.2. Art de la scène Les Arts de la scène comprennent toutes les activités relevant du spectacle vivant(théâtre, conte, danse, musique vivante, marionnettes, etc.), c’est-à-dire des spectacles exécutés par des personnes physiques devant un public. Ils présentent deux grands segments : les arts traditionnels et des arts modernes. Si l’avènement des arts modernes est récent et qui peut être plus ou moins datée, l’origine des arts traditionnels remonte à une période fort éloignée et reste très peu connue.

Les arts traditionnels de la scène renvoient aux musiques, chants, arts de l’oralité et danses traditionnelles de type profane. Le sacré et le rituel sont à classer dans une autre catégorie au regard de leur fonction première.

Toutes les communautés culturelles burkinabè possèdent leurs formes d’expression artistique qui sont exécutées lors des évènements marquant des moments particuliers de la vie de la communauté.

L’histoire des arts modernes de la scène commencerait sous la période coloniale avec notamment l’introduction du théâtre et de la musique d’inspiration occidentale qui se manifesteront à travers l’église et l’école avant d’être généralisés sur l’ensemble du pays.

3.3.2.1. Opérateurs de la filièreLes principaux opérateurs de la filière des arts de la scène sont les troupes de danse, les compagnies théâtrales, les ensembles artistiques, les orchestres et vedettes de la chanson, les producteurs des arts de la scène. Ils exercent leur métier avec la collaboration d’autres opérateurs, plutôt techniques, comme les salles de spectacle (spécialisée ou polyvalente), les régisseurs du son et de la lumière, les entreprises de location de matériels, les institutions de formation, etc. Les métiers qui s’y rencontrent sont ceux de comédiens, danseurs, metteurs en scène, chorégraphes, auteurs de théâtre, dramaturges, scénographes, décorateurs, régisseurs du son et de lumière, costumiers, directeurs et administrateurs de compagnies, les chargés de production, les chargés de relations publiques et de communication dans les théâtres, chargés de documentation, critiques littéraires,chorégraphiques auteurs, conteurs, médiateurs, managers, producteurs, programmateurs, etc.

Le nombre des acteurs exerçant dans cette filière est très peu connu. Il est parfois sous-évalué. Les efforts de constitutions de statistiques engagés ces dernières années par la Direction des Etudes et de la Planification (DEP) du ministère en charge de la culture permettront certainement de disposer de données précises. En attendant, les données statistiques fournies par certaines structures culturelles montrent une évolution importante des artistes et des autres acteurs du secteurculturel au Burkina Faso. Par exemple, de 2002 à 2009, le Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou (CITO) a formé 686 artistes de théâtre (Présentation

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CITO, 2009) et l’Espace Culturel Gambidi en a formé 206 de 2003 à 2009 (CFRAV, 2011).

De nombreuses associations opèrent dans la filière. Certaines d’entre elles sont reconnues pour leur dynamisme pendant que d’autres restent plongées dans une certaine léthargie. Les principales associations professionnelles de la filière des arts du spectacle sont le Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou (CITO), l’Atelier Théâtre Burkinabè (ATB), la Fédération du CARTEL, le Centre Burkinabè de l’Institut international du Théâtre (CB-IIT), la Fédération Nationale du Théâtre du Burkina Faso (FENATHEB), l’Espace Culturel Gambidi (ECG), la Compagnie théâtrale le Roseau (CTR), l’association SIRABA, la Compagnie l’Œil du cyclone, la compagnie Marbayassa, la compagnie Espoir, le Centre de Développement Chorégraphique (CDC), l’Ecole de Danse Irène Tassembédo (EDIT), l’association des managers du Burkina, l’association Umané Culture, l’association Jazz à Ouaga, le Syndicat national des Artistes Musiciens (SYNAM), l’Association des Jeunes Musiciens du Burkina (AJMB), l’Union Internationale des Marionnettistes (UNIMA), UMAB (Union des marionnettistes du Burkina Faso), l’Association Maison de la Parole, l’ Association Wamdé, etc.La force de la filière des arts du spectacle au Burkina Faso réside dans sa productivité et dans les efforts déployés au cours de ces deux dernières décennies pour résorber le manque d’infrastructures culturelles adéquates. Ces efforts ont permis l’édification de l’espace Gambidi en 1996, du Jardin de la Musique Remdoogo en 2004, du Centre de Développement chorégraphique en 2006, du Palais de la jeunesse et de la culture Jean Pierre Guingané en 2011, de la Maison de la Culture en 2012, etc. Cela permet aux opérateurs de la filière de disposer de lieux de création et de diffusion mais également de développer des activités annexes de prestations de services (hébergement, restauration, location de salles et de matériel, etc.) qui leur assurent une entrée régulière de ressources financières pour le fonctionnement et le financement de certains projets culturels. Certaines initiatives ingénieuses comme celle de la Fédération du Cartel, association promotrice des Récréatrales méritent d’être signalées. Pour faire face aux difficultés que rencontrent les structures naissantes pour se doter d’une administration professionnelle et structurée, quatre compagnies décident de mettre en commun leurs ressources pour créer une administration commune, la Fédération du Cartel, chargée d’accompagner leurs projets artistiques.D’importantes actions ont été entreprises dans le cadre de la coopération culturelle pour une meilleure structuration de la filière et pour un soutien aux acteurs de la filière. C’est le cas des projets et programmes (PSIC, PASC, Fonds régional pour la culture, etc.) initiés dans le cadre de la coopération culturelle avec l’Union Européenne, la CEDEAO, l’UEMOA ou l’OIF. Ces actions ont eu pour effet un renforcement du nombre d’opérateurs culturels et une plus grande implication des collectivités dans l’élaboration et la mise en œuvre de projets culturels. Cette hypothèse semble corroborer les résultats de l’enquête terrain.

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Graphique 2 : Poids des fonctions dans la chaîne de valeurs de la filière « Arts de la scène »

L’enquête de terrain s’est intéressée aux fonctions dans la chaîne de valeurs de la filière « Arts de la scène ». Toutes les fonctions sont présentes, allant de la création au financement et à la

formation/appui-conseils.Cependant, les fonctions les plus fréquentes chez les

professionnels de la filière ont trait à la création, la mise en marché (diffusion/distribution/vente), la production, la formation et l’appui-conseils. La présence d’entreprises qui font du financement ou aident à trouver des financements mérite d’être mentionnée.

3.3.2.2. Produits et marché des Arts de la scène Les produits de la filière « Arts de la scène » font incontestablement partie des produits culturels les plus populaires au Burkina Faso au sens où ils sont les plus intégrés dans la vie quotidienne des populations, les plus consommés et potentiellement les plus demandés. Il n’y a presque pas d’évènement au Burkina Faso qui ne soit accompagné de manifestations des « arts de la scène » : les troupes de danses traditionnelles se produisant à diverses occasions, les sorties rituelles des masques, les célébrations funéraires s’accompagnant de spectacles de masques ou de troupes de danses, les mariages et leurs youyous, les rites initiatiques avec les spectacles qui les accompagnent et, naturellement, lorsque le marché existe, les produits des arts de la scène modernes qui sont offerts en permanence dans les grandes villes du Burkina Faso.

Dans ces grandes villes, en effet, on rencontre les produits culturels relevant de la filière art de la scène : le théâtre, les ballets, les orchestres et les vedettes de la chanson sur scène, le play back, le conte, etc. Il n’existe pas de statistiques sur l’ensemble des spectacles relevant de la filière « Art de la scène » au Burkina Faso. Néanmoins certaines données disponibles montrent qu’il y a un intérêt du public pour le théâtre. Les données du tableau 6, de l’Atelier Théâtre Burkinabè, montrent des performances croissantes dans le domaine du théâtre tant au niveau de la production littéraire, de l’offre de spectacles que du public drainé par ces spectacles.

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10,71

28,57

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010203040506070

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Tableau 6 : Offre et demande d’une compagnie de théâtre1996-1997

1999-2000

2004-2005

2005-2006

2006-2007

2007-2008

2008-2009

2009-2010

Pièces 8 12 10 12 15 11 17 19Spectacles 54 135 205 219 269 151 164 133Public 19 300 41 465 92 377 80 880 111 902 59 016 35 699 44 366

Source : Annuaire statistique, Ministère de la culture et du tourisme, 2010

Ainsi, la production de pièces théâtrales est passée de 8 au cours de la saison 1996-1997 à 19 en 2009-2010, soit une production annuelle en croissance à un rythme moyen de 6,9%. Cette création intellectuelle, malgré quelques périodes de baisse assez prononcée, est fortement orientée à la hausse (Graphique 3). Cette tendance globale positive pourrait trouver son explication dans la conjugaison de plusieurs facteurs parmi lesquels le développement de la formation théâtrale qui a renforcé la capacité d’intervention des troupes et la demande de plus en plus importante en pièces de sensibilisation sur le plan national. En guise d’illustration, les 11 pièces théâtrales de la saison 2007-2008 sont des pièces de théâtre forum qui ont pour titres : Guerre pour la terre, Harcèlement, Histoires d’eau et de femmes, Idrissa garibou, La Force de l’amour, La Promesse, Le Sang des enfants, les 5 valeurs de l’ONEA, Main basse sur l’association, Nassongo ou le salaire de la poule et Terre en péril. Des titres qui traduisent l’orientation sociale de ces créations diffusées 151 fois dans plusieurs localités du Burkina Faso.

Graphique 3 : Offre de produits de la filière « Arts de la scène »_ATBEn revanche, les spectacles offerts, après avoir cru à un rythme aussi prononcé que celui des pièces jusqu’en 2007, a accusé un fort déclin à partir de cette année-là ; et cette orientation s’est poursuivie jusqu’en 2010.Cette situation contrastée entre la créativité intellectuelle et la production révèle peut-être un problème structurel : la faiblesse de la fonction

de production dans la chaîne de valeurs des arts de la scène. La création est en effet présente et soutenue ; ce qui fait défaut se trouve dans la finance, c'est-à-dire les professionnels de la production en quantité et en qualité (capacité financière) suffisantes.

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Offres de produits de la filière "Arts de la scène"_ATB

Spectacles Pièces

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Graphique 4 : Offre et demande des arts de la scène_cas de l’ATBLe public drainé présente aussi le même trend avec un taux de croissance annuelle moyen de 6,6% et une inversion de tendance tout aussi marquée à partir de 2007, même s’il est constaté une légère remontée en 2009(Graphique 4). Ainsi, l’offre et la demande évoluent dans le même sens ; semblant indiquer que le problème ne

réside pas dans la demande mais plutôt dans l’offre. Les créations et les diffusions du CITO montrent une importance de la diffusion artistique au niveau national et sur le plan international.

Tableau7: créations et diffusions théâtrales du CITO de 2002 à 2011

2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Totalcréations 1 1 2 2 2 4 2 4 3 5 26Diffusions nationales 30 22 75 80 70 140 60 78 70 116 741Diffusions internationales 1 0 0 2 2 3 1 0 0 2 11

Ces données confirment les tendances présentées par l’ATB. Bien que la croissance ne soit pas linéaire, l’on constate une permanence et même une augmentation de la création et de la diffusion des spectacles de théâtre. Ainsi, sans prétendre que l’offre crée sa demande, on peut raisonnablement soutenir que le marché des arts de la scène n’est pas encore saturé.

3.3.2.3. Contraintes et faiblesses de la filière Arts de la scène

Bien que les Arts de la scène connaissent une certaine floraison au Burkina Faso, il reste qu’ils rencontrent de nombreuses difficultés pour développer leurs activités et répondre de façon efficiente à la demande locale et internationale. Les besoins qui se sont exprimés au cours de l’enquête touchent à la finance, sous forme dedemande de subvention directe ou indirecte, à la politique culturelle, et au besoin de soutien pour le renforcement des capacités humaines. Cependant, s’il faut hiérarchiser les besoins de soutien, ceux qui tendraient àrenforcer les capacités humaines doivent venir en priorité. En effet, beaucoup

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Offre et demande ATBPublic/Spectateurs Spectacles

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d’artistes doivent être félicités pour les résultats auxquels ils parviennent, car pour y arriver, ils n’ont eu que leurs talents purs pour le faire ; ils n’ont pas eu de formation ;au mieux, ils ont été autodidactes. Une fois qu’une masse critique d’artistes de grands talents sera sur le marché, il y aura des effets d’entrainement sur les autres fonctions de la chaîne de valeur notamment sur les industries techniques et les producteurs. La priorité des priorités réside donc dans la formation. Après la formation, il convient de mentionner la faible structuration des opérateurs de la filière et l’émiettement des initiatives. Enfin, certains produits culturels nationaux sont encore victimes de préjugés défavorables qui font que des catégories de personnes hésitent à consommer les produits artistiques nationaux.

3.3.3. Musique enregistrée

L’histoire de la musique enregistrée au Burkina Faso est intimement liée à celle de la musique dite moderne dont l’origine remonte à la période coloniale. Tout a commencé dans les grands centres urbains de Bobo et Ouagadougou avec les premières formations orchestrales tels l'Harmonie Voltaïque, l'Orchestre Antonio et Volta Jazz, dont les répertoires étaient constitués d’interprétations de musiciensfrançais, latino-américains, congolais et de quelques créations.

Après l’accession du pays à l’indépendance en 1960, les musiciens burkinabè commencent à s’affirmer en produisant leurs propres chansons qui venaient renouveler et enrichir le répertoire des orchestres. C’est la période au cours de laquelle les premiers enregistrements vont commencer à circuler permettant aux titres des nationaux d’être largement diffusés sur le plan national. Cela va susciter une adhésion des mélomanes et la formation de nouveaux orchestres. Certains musiciens comme Georges Ouédraogo, Traoré Amadou Balaké et Tidjane Coulibaly vont exporter leurs talents hors des frontières du pays. Après cette génération portée surtout par le collectif à travers les formations orchestrales, viendra une nouvelle génération qui verra émerger des individualités. Ce sont les vedettes de la chanson moderne qui vont profiter du développement de la radiodiffusion avec les facilités qu’elle offrait pour se faire connaitre à travers le pays. Elles vont introduire de nouvelles sonorités inspirées des musiques étrangères de plus en plus diffusées dans le pays. Le lancement de la Semaine Nationale de la Culture en 1983 offre unnouveau cadre d’expression aux artistes musiciens traditionnels dont la popularité ne cesse de grandir. Des ensembles artistiques comme NabaYadéga, Kiswendsida et des artistes comme Solo Dja Kabako sont des révélations de cette biennale nationale des arts.

La décennie 1990-2000 est marquée par la création des premiers studios et l’apparition des impresarios et des organisateurs de spectacles qui vont contribuer à la promotion de la musique burkinabè. Dans le même temps, des artistes musiciens traditionnels vont se révéler sous l’impulsion des « home studios » comme Bazar Musique. Ils vont œuvrer au développement de genres patrimoniaux bien maîtrisés et bien travaillés dans les langues du pays. L’exemple des premières maisons

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d’enregistrement sera suivi au tournant de l’année 2000 avec des studios comme Seydoni Production, Production Tam-Tam, Abazon, etc. qui vont bénéficier des facilités offertes par l’évolution technologique et les prouesses du numérique pour développer le marché local du disque.

3.3.3.1. Opérateurs de la filière

D’après les données de l’enquête de terrain, toutes les fonctions de la chaîne de valeur de la filière « Musique enregistrée » connaissent la présence d’opérateurs :créateurs, producteurs, jusqu’à la fonction de financement.

Graphique 5 : Fonctions de la chaîne de valeurs « Musique enregistrée »

Comme dans le cas des arts de la scène, ce sont les fonctions de mise en marché (promotion, marketing, diffusion, distribution, vente) qui apparaissent dominantes. L’activité de création occupe une bonne place avec près de 45% des personnes interrogées qui interviennent dans la création. Quant à la production, elle

occupe un rang plutôt moyen : 4 ième en importance sur 9 fonctions.

Dans le secteur formel des filières culturelles, les principaux opérateurs de la filière sont les maisons de production, au nombre de 29, de distribution, 10, et les structures de diffusion au nombre de 2. Cependant, dans l’échantillon d’opérateurs qui a été enquêté, il a été dénombré pas moins de 45 opérateurs se déclarant être dans la fonction de diffusion/distribution/vente, 13 qui font de la reproduction et 10 de la fabrication.

Les principaux studios d’enregistrement sont : Cenasa, Studio Kibaré, les Studios Abazon, Armada Diffusion, Bimo Vision, Label Korie, Seydoni Production, Studio Baobab, Studio Djembé, Tam-Tam Production, Recordz, Ouaga Jungle, Safari Production, K. Systems, OuagaNdjam, Bazar musique, etc.

Les acteurs qui animent la filière sont les artistes musiciens, les arrangeurs, les producteurs, les diffuseurs, les distributeurs, les vendeurs grossistes ou détaillants.

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En 2010, le BBDA enregistrait 288 artistes musiciens et 151 déclarés au titre des droits voisins. Les principales associations professionnelles de cette filière sont les suivantes : Association des managers du Burkina, Syndicat national des artistes musiciens, Association des jeunes musiciens du Burkina, Association des musiciens professionnels du Faso, Syndicat national des entrepreneurs du spectacle, syndicat national des artistes musiciens et assimilés du Burkina Faso. Une des principales associations dans le secteur est l’Association des commerçants et vendeurs de K7 et CD du Kadiogo (ASCOVECA).

Les principales associations professionnelles de cette filière sont les suivantes :Association des managers du Burkina, Syndicat national des artistes musiciens, Association des jeunes musiciens du Burkina, Association des musiciens professionnels du Faso, Syndicat national des entrepreneurs du spectacle, syndicat national des artistes musiciens et assimilés du Burkina Faso.

Des efforts sont déployés au quotidien par les acteurs de la filière et certains partenaires de la coopération culturelle pour une meilleure structuration de la filière. Les associations telles que la Plateforme Culturelle du Burkina Faso (PCBF), le Collectif Reggae et le projet Appui au Réseau Ouest Africain des Pépinières D’entreprises de Musique (ARPEM) dont l’action vise l’émergence de structures culturelles privées en sont des illustrations.

Les opérateurs culturels du secteur ont initié des activités de promotion. Cela se fait à travers l’édition des œuvres musicales primées dans le cadre des compétitions organisées par le ministère de la culture, par l’action des maisons de production et de distribution de disques comme Bazar musique, Seydoni Production, Mozac Production, par les festivals locaux, nationaux et internationaux qui s’ouvrent aux arts traditionnels et à travers les featurings conduits par des musiciens modernes comme Smokey, Faso Combat, Bonsa, etc. Ces initiatives ont permis l’émergence d’artistes de la musique traditionnelle et aidé ces arts traditionnels à résister face à l’invasion de la world music.

3.3.3.2. Produits et marché de la musique enregistréeLes produits de cette filière sont des contenus musicaux véhiculés par des supports matériels tels les K7, les CD audio ou vidéo, les différents supports numériques, etc.

La demande de musique enregistrée est le fait de toute la population en âge d’être sensible à une mélodie. Cela est particulièrement vrai des sociétés traditionnelles burkinabè où non seulement la musique est partie intégrante de la vie au quotidien,mais aussi, et surtout, où la formation musicale est une composante importante de l’éducation tout court. Cela se fait pendant les soirées familiales de contes où chacun est appelé à conter ; et les contes intègrent les chants ! Un bon conteur est un chanteur. Et, à défaut d’être un bon conteur, on devient mélomane à force d’écouter les autres si bien chanter. La rencontre de cette tradition avec la modernité faite de radio, de télévision et de téléphone mobile multimédia ne pouvait que créer une

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demande toute acquise à la musique enregistrée. On peut dire aujourd’hui que la demande de téléphone mobile serait nettement inférieure à son niveau actuelle, si ce moyen de communication n’avait pas intégré les possibilités d’enregistrer la musique et d’écouter la radio. Toute la demande de téléphone de la part de la catégorie des populations à faible revenu est fonction de ces paramètres.La musique enregistrée, du côté de l’offre, comprend deux segments : les produits importés et la production nationale. D’après les données de l’enquête, les produits importés (CD, K7, DVD) proviennent de l’Afrique (Côte d’Ivoire, Mali, Nigéria, Togo, Ghana, Sénégal), de l’Europe (la France et la Hollande sont citées), de l’Amérique (USA) et de l’Asie (Japon).L’offre nationale se compose de productions nouvelles et de reproduction d’œuvres anciennes. La duplication qui intervient à ces occasions est soumise à la délivrance d’autorisations par le BBDA. D’après les chiffres fournis par cette institution (tableau 8 ci-dessous), le nombre d’autorisation de duplication est passé de 360 en 2002 à 540 en 2010, atteignant son niveau maximum en 2006 avec 1080 autorisations. Tableau 8: Activités de la duplication au Burkina Faso

2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010Nombre d'autorisations 360 630 890 780 1 080 1 010 900 540 540K7 dupliquée (en milliers) 274 565 587 411 401 400 235 136 89CD audio/ vidéo (en milliers) 5 7 8 9 13 25 24 50 39Source : Annuaire statistique du ministère de la culture, Ouagadougou, 2011

Sur la période 2002-2010, il n’y a pas eu moins de 6 730 autorisations de duplication, plus de 3 000 000 de K7 et 175 000 CD audio/vidéo dupliqués. Cela donne une idée des œuvres concernées et des chiffres d’affaires en jeux.

3.3.3.3. Contraintes et faiblesses du secteurLa plus grande contrainte au développement de la filière de la musique enregistrée reste la piraterie qui a profité des facilités technologiques pour se développer de façon inquiétante. Elle constitue de nos jours une réelle menace pour la survie de la filière.

Les résultats de l’enquête montrent que les acteurs du secteur sont très conscients du phénomène. En effet 81% des opérateurs enquêtés la jugent « Importante à très importante » et estiment qu’elle touche tous les produits de la musique enregistrée.

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Tableau 9 : Opinion des enquêtés sur la piraterieFréquence % % cumulé

Très importante 21 50 50Importante 13 31 81Moyenne 6 14 95Faible 2 5 100Total 42 100Source : Enquête BBEA

En conséquence, la lutte contre la piraterie revient de manière récurrente dans les propositions des opérateurs comme une des principales voies de soutien à la filière de la musique enregistrée. Une telle politique, qui doit être volontariste, irait de paireavec la lutte contre la corruption, la mise en place d’une intelligence économique dans ce domaine, la promotion des artistes burkinabè, le contrôle régulier des œuvres diffusées et le recensement des entreprises du secteur.

A cette contrainte majeure, il faut ajouter la cherté des produits intermédiaires entrant dans la fabrication des produits de la musique enregistrée et le manque de structures de formation permanente dans les métiers de la musique. En effet, bien que des structures comme le Jardin de la musique Reemdoogo ou la Dernière trompète s’investissent activement dans ce domaine, l’offre de formation reste limitée et la formation existante se déroule sous forme d’ateliers, de résidences ponctuelles ou de master Class. Il faut dire que la principale force des artistes du domaine réside dans leurs talents et la volonté de réussir qui se traduit par une autoformation et l’apprentissage par la pratique.

3.2.4. Art plastique, appliqué et artisanat d’artImage 2 : Galerie d’arts en bordure de rue (Photo BBEA)

L'art plastique et l’artisanat d’art se fondent à la fois sur le beau, le sublime et la pratique ; faisant naître sous les doigts d'artistes forgés par des générations des objets qui accompagnent l'individu dans la vie de tous les jours. Ils comprennent la peinture, la sculpture, la ferronnerie, la vannerie, le tissage, la poterie, la maroquinerie, le batik,

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etc. L’art plastique et l’artisanat d’art occupent au sein de l’économie une place prépondérante. Considérée à l'origine comme activité locale d'appoint,l’artisanat(tissage, poterie, forge, sculpture, fonderie) par exemple, va, à la faveur des mutations socio-économiques, se révéler aux communautés de base comme (i) une source d'emplois et de revenus; (ii) un atout déterminant dans le processus de modernisation des secteurs tels que l'agriculture, le bâtiment, la maîtrise de l'eau; et (iii) un facteur de l'élargissement du marché national et extérieur.

Les métiers de l’artisanat, qu’ils aient trait au travail du batik, de la broderie, de la vannerie, de la poterie, du cuir, du bois, du bronze et du granit sont autant de références du savoir-faire des artistes et artisans burkinabé. L'objet fabriqué doit servir dans la vie quotidienne. Il exprime et satisfait des besoins matériels et spirituels. On y retrouve, au niveau des expressions artistiques, non seulement les parures, l’art vestimentaire, les textiles, les masques, les statuettes, la poterie mais aussi des savoir-faire, comme l’architecture et l’artisanat, qui se transmettent de génération en génération par la tradition orale. A chaque groupe ethnique correspond une expression artistique précise.

3.3.4.1. Opérateurs de la filièreLes opérateurs sont constitués de tous les participants, en tant que fonctions et/ou en tant que métiers, à la chaîne des valeurs. De nombreux artistes formés à l’étranger et au Burkina produisent des œuvres artistiques de toutes natures tels que la peinture, la sculpture sur bois, le batik, le bronze. Aujourd’hui des centres tels que le Centre National d’Artisanat d’Art, le Village Artisanal, le Hangar 11, l’Association Nationale des Artistes Plasticiens (ANAPAP), la Cité des Arts et les Centres Lukaré,entre autres, forment et présentent les œuvres de ces artistes.

Comme dans les filières précédemment analysées, la chaîne des valeurs de la filière des arts plastiques, appliqués et de l’artisanat d’art est complète. Toutes les fonctions s’y retrouvent, allant de la création au financement en passant par la mise en marché (Tableau 10).

Tableau10 : Chaîne de valeurs de la filière « Art plastique, appliqué et artisanat d’art »Fonctions Nombre %Création/composition/collecte 109 67 Conservation/restauration 12 7Production/édition 34 21 Reproduction 14 9Fabrication 43 26 Promotion/marketing/valorisation 49 30 Diffusion/distribution/vente 77 47 Financement 3 2Formation/Appui-conseils 11 7Source : Enquête BBEA

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Ici en revanche, c’est l’activité de création qui est dominante avec 109 opérateurs déclarant exercer dans la création. Ceci est normal, parce que le domaine de l’art est, par définition, celui de la créativité. Ensuite, l’activité de mise en marché arrive en seconde position avec 77 opérateurs. Enfin, à l’image des autres filières, la fonction de production est faible. En fait les opérateurs sont les producteurs de leurs propres créations.

Cette filière est celle où les métiers prolifèrent : agent de vente, artisan, assistant conservateur, assistant technique, assistante/promotrice, chanteur, chef de musique, conservatrice, couturier, décorateur, dessinateur, fondeur, guide animateur, impressionniste, sérigraphe, maquilleuse, modeleur, monteur, promoteur, mouleur, technicien de coulage, promoteur, artiste peintre, régisseur, etc.

3.3.4.2. Produits et marché de la filièreLes produits des arts plastiques et de l’artisanat englobent la création et la production de pièces et d’articles de natures diverses. Les principaux produits répertoriés sont les tableaux de peintres, le batik, les sculptures (sur bois, sur granite), les bronzes, la poterie, le cuir et les bijoux, la vannerie et les tissages, la sérigraphie, le design, .la calligraphie, etc. Les produits de l’artisanat burkinabè sont appréciés pour leur originalité et pour leur qualité. Certains de ces produits sont le résultat de savoir-faire capitalisés au sein des communautés (poterie de Tcheriba, vannerie de Banfora, etc.).

Le marché des produits de cette filière est principalement national. En effet 90% des opérateurs interrogés indiquent que leur marché est national et qu’ils le réalisent sur place ; 2% couvrent d’autres régions du marché national tandis que 8% font de l’exportation. Cette situation s’explique par le caractère très étendu de cette filière dont des composantes importantes sont exclusivement ou essentiellement orientées sur le marché national : par exemple l’art capillaire ou les couturiers, la poterie, la vannerie sont destinés au marché national. Par contre, dans ce secteur se retrouventdes produits dont le marché est essentiellement extérieur : les produits des arts plastiques tels que les produits du bronze, les statuettes et figurines sur bois, les tableaux et batiks, les colliers, bracelets, etc. Le marché de ces produits est essentiellement européen et un des grands sponsors de ces produits sur le marché international est « Artisans du Monde », ONG française, qui offre dans ses galeries européennes, des produits de l’artisanat burkinabè. Il existe aussi sur place des grands opérateurs à l’exportation des produits de l’artisanat burkinabè12.

3.3.4.3. Contraintes et faiblesses de la filière

Il existe une multiplicité d'activités de promotion du secteur de l'artisanat et de l’art initiées par l'Etat, les différents bailleurs de fonds, les ONG nationales et

12 Il est regrettable que ces grands opérateurs, qui sont des entreprises étrangères installées au Burkina Faso, aient refusé de collaborer à cette étude ; manquant ainsi l’occasion de contribuer à la recherche de solutions aux problèmes de la filière culturelle où ils prospèrent.

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internationales et le secteur privé. Mais, compte tenu de la fragmentation des responsabilités et des attributions, ces activités sont plutôt conduites de manière soit discontinue, partielle ou encore non coordonnée. D’où la nécessité d’un mécanisme de coordination efficace s'appuyant sur une stratégie nationale de promotion de la filière. Dans cette perspective, un document de stratégie national vient d’être adopté en décembre dernier. Il envisage un certain nombre de concertations avec tous les ministères et partenaires dont l’action est en rapport avec la culture.

En attendant que les intentions soient traduites en actes, les actions menées par l’Etat, celles de la société civile et des partenaires au développement se croisent sans une planification concertée. La plupart des structures culturelles nationales ne développent leurs actions que vers les acteurs culturels vivant dans les centres urbains et semi urbains. De nombreux artistes et artisans vivant dans les zones rurales, notamment les femmes, ne sont généralement pas pris en compte, ou le sont au cas par cas.

La faiblesse organisationnelle des acteurs est un important goulot d’étranglement.Une bonne organisation leur aurait permis d’avoir une meilleure visibilité au plan international et d’avoir accès à cet important marché.

L’étroitesse du marché national n’est pas non plus le facteur le moins bloquant. L’Etat pourrait contribuer rapidement à lever ce goulot d’étranglement, en votant annuellement un budget pour la décoration des espaces publics tout en contribuant, à chaque fois que l’occasion se présente, à une meilleure visibilité des arts plastiques du Burkina.13

3.3.5. Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numériqueImage 3 : Place des cinéastes à Ouagadougou (Photo BBEA)

Le cinéma est défini comme un art audiovisuel. Il expose au public un film, c’est-à-dire une œuvre composée d’images en mouvement projetées sur un support, généralement un écran blanc, et accompagnées la plupart du temps d’une bande sonore.Le cinéma est devenu à la fois un art populaire, un divertissement, une industrie et un média. Il peut aussi être utilisé à des fins de propagande, de recherche scientifique ou de pédagogie.

Couramment désigné sous le terme de « septième art », le terme « cinéma » vient de « cinématographe », qui est un nom donné par Léon Bouly en 1892 à l’appareil de projection dont il déposa

13 Cela peut être l’occasion pour l’Etat de remettre au goût du jour et pour son propre compte, le mot d’ordre « produisons et consommons burkinabè !»

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le brevet. Cinéma peut donc désigner l’art, sa technique ou encore, par métonymie,la salle dans laquelle il est projeté. Ici nous parlerons du cinéma comme art et technique.

Le développement du cinéma et de l’audiovisuel fait partie, depuis les indépendances, d’une des premières préoccupations de la politique culturelle auBurkina. La réalisation du premier film burkinabè en 1960, a été suivie par la création de la télévision nationale en 1963 et les premiers pas du Festival Panafricain du Cinéma et de la Télévision de Ouagadougou (FESPACO) en 1969. Cette dynamique a motivé l’Etat burkinabè à engager une politique de promotion et de développement de l’activité cinématographique et audiovisuelle, à travers la construction d’infrastructures de production et de diffusion, l’acquisition d’équipements, le soutien à la formation professionnelle et à la création.

Le secteur de la production - distribution - exploitation du cinéma burkinabè, qui est relativement bien structuré et équipé, a joué un rôle prépondérant dans la mise en place des cinématographies de l’Afrique de l’ouest, notamment durant les années 1980. Il a permis l’émergence de plusieurs cinéastes au niveau national comme au niveau sous régional et africain. Dans le même temps, résultant d’une politique volontariste, le FESPACO a confirmé son leadership sur le continent, fixant Ouagadougou définitivement comme la capitale du cinéma africain.

3.3.5.1. Opérateurs de la filière La chaîne des valeurs de la filière « Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique » est complète. Toutes les fonctions sont présentes (Tableau 11).

Tableau11 : Chaîne des valeurs de la filière « Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique »Fonctions Nombre %Création/composition/collecte 27 35,53 Conservation/restauration 9 11,84 Production/édition 32 42,11 Reproduction 15 19,74 Fabrication 8 10,53 Promotion/marketing/valorisation 36 47,37 Diffusion/distribution/vente 48 63,16 Financement 3 3,95 Formation/Appui-conseils 14 18,42 Source : enquête BBEA

Dans cette filière, la fonction la plus importante est la mise en marché : 63,16% des opérateurs enquêtés disent qu’ils exercent dans cette fonction et 47,37% font de la promotion, du marketing et de la valorisation. Quant à la production, elle implique 42,11% des enquêtés. Le financement est le parent pauvre de cette chaîne des valeurs avec seulement trois opérateurs qui y interviennent. Il faut dire que la

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réalisation de certaines activités de cette filière nécessite d’importants budgets sansque la rentabilité ne soit assurée. Cela est particulièrement vrai du cinéma où au problème du budget s’ajoute l’absence d’une chaîne de distribution organisée et, par conséquent, d’une politique de promotion.

L’audiovisuel s’est remarquablement développé au cours des douze dernières années. En témoigne l’augmentation prodigieuse des stations de radio et des chaînes de télévision (Tableau 12). De 52 radios en 1999, le Burkina Faso en comptait 112 en 2010, soit un taux de croissance annuelle moyen de 7,22%,provenant essentiellement de l’évolution du nombre des radios associatives et communautaires, des radios confessionnelles et des radios commerciales.

Tableau12 : Evolution des média au Burkina Faso

1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010Tx croissance

Radio 52 53 60 67 69 72 73 74 102 113 115 112 7,22%Confessionnelle 13 13 13 18 19 20 20 20 31 34 35 35 9,42%Associative/communautaire 9 9 15 16 17 19 19 20 29 33 33 33 12,54%Commerciales 16 16 17 18 18 18 19 19 26 30 32 29 5,56%Internationale 3 4 4 4 4 4 4 4 4 4 3 3 0,00%Communale - - - - - - - - 1 1 1 1 0,00%Publique 11 11 11 11 11 11 11 11 11 11 11 11 0,00%Télévision 3 4 5 5 5 5 5 5 8 9 12 14 15,03%Confessionnelle - 1 1 1 1 1 1 1 2 2 3 3 11,61%Associative - - - - - - - - - 1 1 1 0,00%Commerciales - - 1 1 1 1 1 1 2 2 4 5 19,58%Internationale - - - - - - - - 1 1 1 1 0,00%Publique 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 2 6,50%MMDS 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 0,00%Source : Annuaire statistique du Ministère de la culture et du tourisme, édition 2010 Graphique 6: Evolution des médias de l’audiovisuel

Sur la même période, le nombre de chaines de télévision est passé 3 à 14 soit un taux de croissance annuelle moyen de 15,03% impulsé par les chaines commerciales et confessionnelles. 2007 est une année symbole de cette croissance fulgurante. Au cours de cette année en effet, le nombre de stations de radio a cru de 37,8% tandis que celui des chaines de télévision connaissait un bond de 60%.

Source : A partir du tableau précédent

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Evolution des médias de l'audiovisuel au Burkina Faso

Radio

Télévision

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A cela il convient d’ajouter les chaînes satellitaires accessibles sur abonnement et qui renforcent l’offre de la filière « Art du cinéma, de l’audiovisuel et du numérique).

3.3.5.2. Produits et marché de la filière

Si les produits de la filière « Arts de la scène » sont incontestablement les plus populaires, il n’est pas exagéré de dire que ceux de la filière cinéma, audiovisuel et du numérique partagent cette popularité. La télévision, le cinéma et la radio sont trèsdemandés dans le milieu rural et le milieu « people » des grandes villes. En témoigne l’augmentation prodigieuse des stations de radio et des chaînes de télévision (Tableau 12). La prolifération des vidéo clubs dans les grandes villes et la capacité de « mobilisation » des radios locales sont d’autres signes de la demande de produits cinématographiques et de l’audience grandissante des radios de proximité.L’on peut donc soutenir que le marché de l’audiovisuel est un des marchés les plus importants des marchés de la culture au Burkina Faso. Il est constitué de toutes les personnes physiques et morales, résidentes ou non, qui ont des besoins de communication, d’information, de divertissement et de distraction. Le public burkinabé est très demandeur de productions nationales. On constate que le public plébiscite les productions nationales et l’accueil en salle est massif, vu les grandes affluences lors des projections dans les salles. Cela encourage les réalisateurs et producteurs dans la réalisation de nouveaux films qui se font maintenant sous forme numérique avec de moins gros budgets. L’engouement du public va également aux séries télévisées locales qui sont de plus en plus présentes sur les écrans des télévisions publiques comme privées. Et ce contexte nouveau a permis au Burkina Faso d’être vu comme un modèle en matière de production d’images. Ainsi, les séries télé locales telles que « Kadi Jolie », « Quand les éléphants se battent », « Commissariat de Tampouy », « Super flic », « Trois femmes un village », « L’avocat des causes perdus », etc. commencent à se poser comme une alternative à la consommation en masse de télénovelas brésiliennes, mexicaines, vénézuéliennes ou des séries indiennes.Pour des raisons diverses, comme le besoin de s’informer, de s’éduquer, de se protéger, de prendre une décision ou de s’octroyer un plaisir, les produits de la filière « cinéma, de l’audiovisuel et du numérique » ont tendance à devenir, dans toutes les sociétés humaines, des produits de consommation courante ; presqu’au même titre que les articles (électro) ménagers, vestimentaires, les produits alimentaires ou les moyens de déplacement. Et cela ira grandissant avec le phénomène de la mondialisation et l’amélioration du niveau d’éducation des populations. Dans un pays comme celui du Burkina Faso où le taux d’alphabétisation n’est que de 20% et celui de l’accès à internet de moins de 1%, il est aisé de se faire une idée des potentialités dont recèle cette filière à court, moyen et long termes. La diffusion des œuvres des cinéastes burkinabè par les chaines de télévision africaines et européennes constitue des performances remarquables à noter et produit des effets importants tant sur le plan économique que sur celui du rayonnement international de notre culture. Le développement de ce secteur a

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permis la création de nombreux emplois directs et indirects, engendrant ainsi une valeur ajoutée pour l’économie nationale.

3.3.5.3. Contraintes et faiblesses de la filière Le cinéma burkinabè connaît depuis lors une crise structurelle engendrée par la raréfaction des ressources financières, l’obsolescence des équipements et des infrastructures techniques, la rupture de la chaîne de formation des cadres du secteur et le manque de recyclage des professionnels exerçant sur le terrain. Aujourd’hui, seulement une douzaine de salles de cinéma fonctionnent encore tandis que le nombre de centres de diffusion vidéo est estimé à 400 dans la seule ville de Ouagadougou et à 800 sur l'ensemble du territoire.

Le développement technologique, précédemment évoqué est à l’origine des nouveaux défis auxquels les professionnels du patrimoine culturel africain doivent faire face. La conception d’un cadre juridique approprié et d’un réseau sous régional afin de surveiller efficacement et de protéger le patrimoine intangible ouest africain renforcera d’avantage les capacités des personnes et des communautés à mieux protéger leur patrimoine.

3.3.6. Patrimoine culturel

Avec sa soixantaine de groupes ethniques, le Burkina Faso possède un patrimoine culturel matériel, immatériel et naturel, riche et varié, quoique non totalement inventorié. Bien qu’ayant subi des brassages avec d’autres cultures, une bonne partie de ce patrimoine est toujours conservé par les différentes communautés. Ce qui a permis à l’Etat, dans sa politique de conservation et de préservation de ce patrimoine de concevoir et mettre en œuvre une politique muséale dont le résultatest la création d’une quinzaine de musées publics à travers le pays. Toujours dans le cadre de cette politique, l’Etat a encouragé la création de musées privés.

Image 4: Galerie du musée de la musique à Bobo (Photo Diamitani)

Les musées servent comme pointsfocaux d’attraction pour les visiteurs et les touristes dans les régions où ils sont implantés, et ont, de ce point de vue, une fonction d’animation qui va bien au-delà de leur activité essentielle.

Un musée privé, le musée de Manéga, situé à 35 km de Ouagadougou, est devenu un lieu d’attraction pour de nombreux Burkinabè et les étrangers de passage. Le Burkina c’est aussi

son site de sculpture sur granite de Laongo, localité qui se trouve à la sortie Est de

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Ouaga, et où des artistes du monde entier se rencontrent régulièrement pour exprimer leurs talents et apporter leur contribution au renforcement du patrimoine culturel du Burkina Faso.

3.3.6.1. Opérateurs de la filière

La filière du patrimoine regroupe différentes catégories de personnes qui sont des conservateurs du patrimoine et des musées, des animateurs et guides de musées, des chercheurs, historiens de l’art et archéologues, commissaires-priseurs, antiquaires, galeristes, médiateurs culturels, régisseurs, restaurateurs d’œuvres, architectes, collectionneurs, administrateurs.

Ces acteurs sont souvent affiliés à des institutions publiques et privées qui sont notamment la Direction Générale du Patrimoine Culturel, les directions régionales de la Culture et du tourisme, les musées nationaux, provinciaux et communaux et les municipalités, les galeries d’art, les centres de recherche et les universités.

Compte tenu de la diversité et de la richesse du patrimoine culturel au Burkina, et pour permettre une meilleure préservation et promotion de ce patrimoine, l’Etat a créé au sein de l’Ecole Nationale d’Administration et de la Magistrature (ENAM) une section patrimoine culturel où sont formés chaque année des dizaines de conservateurs, d’animateurs, de restaurateurs et de guides de musées et du patrimoine.

3.3.6.2. Produits et marché du patrimoine culturel

Image 5: Architecture traditionnelle Bobo(Photo Diamitani)

Dans le domaine du patrimoine culturel, le Burkina Faso dispose d’un nombreimportant de produits compétitifs du fait de leur grande qualité et ainsi que de leur caractère unique. La demande des produits du patrimoine comprend deux segments : la demande nationale et la demande internationale ou étrangère. Laconsommation nationale de produits culturels est le fait des intellectuels et des personnes à revenus élevés. Les « intellectuels » sont souvent à la quête

d’une meilleure connaissance de leur patrimoine culturel ou de leurs racines tandis que les classes aisées intègrent la découverte de cette catégorie des richesses nationales dans leurs loisirs. Il en est ainsi parce que le tourisme, en l’occurrence culturel, a un coût qui n’est pas à la portée du burkinabè moyen. Certes le prix payé une fois sur le site est souvent modique mais les distances à parcourir sont souvent

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longues et les coûts y afférents véritablement dissuasifs14. A cela, il convient d’ajouter les frais de séjour qui restent cependant élevés à l’échelle nationale. Selon l’INSD, les dépenses des ménages susceptibles d’avoir été affectées au tourisme ou d’avoir été engendrées par le tourisme sont constituées de deux postes : les forfaits touristiques et les dépenses liées aux hôtels et services d’hébergement.

Tableau 13 : Dépenses imputables au tourisme (en FCFA)Postes de dépenses Montant en FCFAForfaits touristiques 339 485 058Hôtels et autres services d'hébergement 1 239 475 920Total 1 578 960 978Source : INSD, Enquête sur les conditions de vie des ménages, 2009

Ainsi, les forfaits touristiques et les dépenses d’hôtels et assimilés se sont élevés en 2009, à 1,6 milliards de FCFA environ.

La demande étrangère est le fait des étrangers résidents ou de touristes d’affaires mettant à profit leur voyage pour faire de la découverte ou de touristes qui ont choisi la destination du Burkina Faso. Cette dernière sous-catégorie arrive au Burkina Faso pour les sites historiques ou naturels.

Le patrimoine est ainsi un pôle potentiel d’amélioration des conditions de vie des populations des zones concernées. Cela est particulièrement important lorsque les populations locales sont parties prenantes du processus de préservation et de restauration des sites, avec une prise en charge de ces sites.

3.3.6.3. Contraintes et faiblesses de la filière

Bien que la classification par l’Etat d’un site en tant que site du patrimoine soit une première mesure de protection et donne le droit aux pouvoirs publics d’intervenir en cas de besoin, en pratique, cette inscription n’est pas très efficace. Certains sites classés sont détruits et laissés à l’abandon malgré ce label, soit par dégradation naturelle, soit à cause de l’action délibérée ou non de l’homme. L’Etat ne dispose pas de moyens financiers et humains suffisants pour protéger et valoriser ces sites et ne fait pas assez de sensibilisation pour informer les populations concernées.

La valorisation économique du patrimoine bâti passe par une structuration de la filière du tourisme culturel et par la valorisation des sites eux-mêmes au profit des activités économiques locales. Actuellement, les recettes du tourisme ne contribuent pas à la conservation ni à l’entretien des sites : il est indispensable de trouver des

14Par exemple, les pics de Sindou, ou la mare aux hippopotames de Tingréla, sont distants de 400 à 500 km de la Région Nord du Burkina Faso et les coûts du transport pour y accéder en aller et retour peuvent atteindre 30.000 FCFA (600 $). La nuitée à l’hôtel coûte entre 10000 et 50000 FCFA (20 à 100 $). Il en va de même pour l’habitant de l’Ouest désirant se rendre à l’est ou au nord pour visiter un site historique ou naturel. Quand on sait que le revenu annuel moyen au Burkina Faso est d’environ 500 $, on mesure l’accessibilité financière de ces produits au ménage burkinabè moyen.

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modalités de collecte des fonds en provenance des visiteurs pour assurer la protection et la conservation des sites.

Malgré la création de nouveaux musées, ces institutions connaissent des difficultés liées aux ressources humaines, financières et autres. Les musées privés connaissent encore plus de difficultés de fonctionnement et de consolidation de leurs structures.

3.3.7. Livre et presse écrite

Le développement de la filière livre et presse écrite au Burkina Faso est relativementrécent. Au niveau du livre, depuis les publications pionnières de Dimdolbsom Ouédraogo dès les années 1928 et l’édition en 1962 du premier roman de la littérature burkinabè par Nazi Boni, très peu de progrès a été constaté dans la filière. Hormis quelques publications sporadiques, toutes faites à l’étranger, rien de significatif ne s’est passé jusqu’au début des années 1980. L’histoire du livre Burkinabè retient néanmoins deux grandes distinctions d’envergure à l’échelle africaine. Il s’agit des deux grands prix littéraires d’Afrique décernés à Maître PacéréTitenga en poésie et à Patrick G. Ilboudo en roman. Au niveau associatif, la filière du livre a connu une animation particulière avec la création en 1967 du CALAHV et des activités qu’elle a organisées pendant quatre ans dans tout le pays. D’autres regroupements comme l'Union des gens de Lettres (UGEL) ou encore la Mutuelle pour l'Union et la Solidarité des Ecrivains (MUSE) vont suivre. Malheureusement, toutes ces associations vont tomber dans une certaine léthargie, au bout de quelques années d’activités. Au niveau du développement de la presse écrite, il faut dire que le paysage national est marqué actuellement par une pluralité et une floraison des titres. Pourtant, pendant longtemps, ce sont les publications d’Etat qui vont être prédominantes avec la création en 1959 de l’hebdomadaire Carrefour Africain. Le premier titre privé, l’observateur, est créé en 1973. En 1984, un quotidien d’Etat, Sidwaya est lancé, portant ainsi à deux le nombre des quotidiens d’information générale. A la suite de l’adoption de la Constitution de 1991 et le retour à une vie démocratique, le pays va connaitre son printemps de la presse écrite avec la création de nombreux journaux indépendants dont des titres en langues nationales. Le paysage médiatique national compte actuellement une vingtaine de titres dans sept langues nationales : mooré, jula, fulfuldé, gourmantchéma, liélé, sissala et nuni. Les principaux titres sont produits en langue française. Les plus en vue sont les quotidiens Sidwaya, l’Observateur paalga, le Pays et l’Express du Faso. Comme hebdomadaires, nous pouvons citer le Journal du jeudi, l’Indépendant et l’Opinion. Les autres périodiques bien connus sont l’Evènement, l’Eveil, San finna, Bendré. Il faut souligner qu’en plus de ces publications à vocation indépendante ou publique, il y a des publications de type associatif ou confessionnel qui participent au renforcement de l’action de la presse écrite au Burkina Faso. L’évolution technologique avec les facilités d’accès à Internet viendra renforcer ce mouvement avec le développement de l’édition en ligne.

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3.3.7.1. Opérateurs de la filière Les éditeurs et imprimeurs vont surtout bénéficier du printemps de la presse écrite avec sa forte demande de papiers et d’impression pour devenir des entreprises commerciales relativement solides. Le paysage burkinabè compte environ quarante-cinq (45) imprimeries fonctionnelles à ce jour. Elles sont toutes concentrées à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso. Il en est de même des maisons d’édition du livre. Les plus connues sont les Editions Presses universitaires, les Editions scientifiques, les Editions l’Harmattan, Burkina Livres, Faso Livres, les Editions Faso service, les Editions Sankofa et les Editions Descendues du ciel.

Tableau 14 : Chaîne de valeur de la filière livre et presse écriteFonction dans la chaîne de

valeursNombre d’opérateurs exerçant cette fonction %

Création/composition/collecte 9 19,57 Conservation/restauration 7 15,22 Production/édition 21 45,65 Reproduction 9 19,57 Fabrication 3 6,52 Promotion/marketing/valorisation 11 23,91 Diffusion/distribution/vente 31 67,39 Financement 3 6,52 Formation/Appui-conseils 5 10,87 Source : Enquête BBEA

Comme dans les autres filières, la chaîne de valeur est complète avec la présence de toutes les fonctions. Les fonctions les plus importantes sont la mise en marché (Diffusion/distribution/vente et Promotion/marketing/valorisation) suivie de la fonction de production. Dans cette filière la fonction de création occupe une position médiane. Ce constat suggère la nécessité d’une politique volontariste du livre et de la lecture.

Les principales associations professionnelles du secteur sont l’Association des éditeurs du Burkina Faso, la Société des éditeurs de presses (SEP), l’Association des éditeurs et publicitaires de journaux en langues nationales (AEPJLN), l’Union des journalistes culturels du Burkina (UJCB), l’Association des journalistes du Burkina, l’Association des journalistes et communicateurs pour la culture (J2C).

L’Etat, à travers plusieurs actions, dont l’organisation des GPNAL, du prix du président du Faso et de la Foire Internationale du Livre de Ouagadougou (FILO), est la première vitrine de promotion de cette filière au Burkina Faso. Au niveau du MCT, une direction générale est consacrée à la promotion de cette filière. Ces actions font de l’Etat, un des principaux opérateurs de la filière.

3.3.7.2. Produits et marché du livre et de la presse écrite

Des 375 acteurs du secteur de la culture répertoriés, la filière « livre et presse » est, après la filière cinéma et audiovisuel, la seconde en importance numérique. Elle

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prend la première place lorsqu’est pris en compte les acteurs du secteur informel. Outre les journaux d’information générale et/ou spécialisée, elle regroupe les auteurs, les éditeurs, les imprimeurs, les messageries, les librairies/papeteries et la myriade de petits entrepreneurs du secteur informel.

La demande des produits de cette filière est constituée de toutes les personnes physiques et morales consommatrices ou productrices d’informations écrites, de littérature : l’Administration publique, les ménages et les entreprises. C’est donc un vaste et important marché.

D’après les données de l’INSD, en 2007 les dépenses des ménages dédiées au livre et la presse écrite ont dépassé 5,3 milliards de FCFA (Tableau 15)

La papeterie et les livres constituent les postes les plus importants de ces dépenses avec près de 9/10 du montant.

Tableau 15 : Dépenses culturelles des ménages

Poste de dépenses des ménagesMontant en FCFAEn FCFA En %

Livres 1 292 022 084 24,37%Journaux et Publications périodiques 593 098 036 11,19%Imprimés divers 14 957 986 0,28%Papeterie et matériel de dessin 3 401 913 790 64,16%TOTAL 5 301 991 895 100,00%Source : INSD, enquêtes sur les conditions de vie des ménages

Compte tenu du rôle et de la politique de l’Etat en faveur de l’éducation, il est permisde penser que les dépenses de l’Etat consacrées aux mêmes rubriques seront beaucoup plus importantes que celles des ménages.

3.3.7.3. Contraintes et faiblesses de la filière

Les contraintes au développement de la filière du livre au Burkina Faso sont lafaiblesse des structures, qui sont des petites entreprises dont les capacités sont relativement modestes. Cette faiblesse est qualitative et quantitative et porte sur les capacités à mobiliser les ressources, l’organisation des producteurs eux-mêmes et les performances des facteurs de production. Toutes choses qui exposent la filière àla piraterie et à l’invasion des produits étrangers. La filière se caractérise également par une forte concentration géographique des opérateurs. Les imprimeries et les maisons d’éditions sont fortement concentrées dans la ville de Ouagadougou. En effet, sur une quinzaine de structures d’édition répertoriées, seulement deux sont installées hors de Ouagadougou, à Bobo-Dioulasso.

3.3.8. Manifestations culturelles

Les manifestations culturelles constituent la principale vitrine des arts et de la culture au Burkina Faso. Les premières manifestations ont été organisées au lendemain des

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indépendances par le CALAHAV puis par le Ministère de la jeunesse. Elles étaient des cadres de regroupement des artistes et de diffusion des créations artistiques à la faveur de compétitions nationales. Par la suite, en 1969, la semaine du cinéma africain qui deviendra plus tard le FESPACO va être lancée. En 1983 l’Etat lance la Semaine nationale de la Culture (SNC) avec pour ambition de servir de vitrine à la culture du pays. Elle sera pluridisciplinaire à l’image des journées culturelles du CALAHV qui l’ont précédée. En 1988 et 1989, le pays enregistre la création de deux manifestations théâtrales : le Festival International du Théâtre pour le Développement (FITD) et le Festival International de Théâtre et de Marionnettes de Ouagadougou/Festival des Arts du Burkina (FITMO/FAB). Elles seront renforcées par d’autres manifestations dans les autres arts de la scène (musique, danse, contes, masques, etc.). On peut dire sans hésiter que le Burkina Faso est un pays de manifestations culturelles, tant il en existe aujourd’hui dans les différents arts modernes et traditionnels à travers tout le pays.

3.3.8.1. Opérateurs de la filière

Les opérateurs majeurs de la filière Manifestations culturelles sont l’Etat avec le FESPACO, le SIAO, le SITHO, la SNC et les associations culturelles privées promotrices du FITD, du FITMO/FAB, des Recréatrales, de Jazz à Ouaga, de WagaHip hop, du FESTIMA, du FIAPO, des Rencontres chorégraphiques Dialogues du corps, de Yeleen, du FESCO, du Wedbindé, du Liwaga, etc.

Toutes les manifestations culturelles de type festival au Burkina Faso sont soit l’œuvre de l’Etat, à travers le ministère en charge de la culture, ou des associations culturelles privées. Elles ont toutes pour vocation d’assurer la promotion d’une ou de plusieurs filières artistiques. Exception faite de quelques opérateurs privés comme la Maison de la parole, promotrice du festival Yeleen, de Umané Culture avec Waga HipHop et Saga Musica ou encore de Jazz à Ouaga et le FESTIMA qui affirment clairement leur volonté de s’inscrire dans une logique d’économie de la culture, les autres restent toujours orientés sur le caractère non lucratif des manifestations culturelles.

Les principales associations professionnelles sont la Fédération Nationale du Théâtre du Burkina Faso (FENATHEB), la Fédération des Festivals et Manifestations Culturelles du Burkina Faso (FFMC/BF), le Collectif Reggae et Développement (CRD), le Centre Burkinabè de l’Institut international du Théâtre (CB-IIT), l’Union des Ensembles Dramatiques de Ouagadougou (UNEDO), la Fédération du Cartel, le Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou, l’Union Internationale des Marionnettistes (UNIMA), l’Union des Marionnettistes du Burkina Faso (UMAB), etc.

3.3.8.2. Produits et marché de la filière

Le Burkina Faso est très créatif en matière de manifestations culturelles. Ces manifestations culturelles vont de la manifestation locale à la manifestation d’envergure internationale en passant par la manifestation d’envergure nationale.

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Les plus célèbres, internationalement réputées, sont le FESPACO pour le cinéma, le SIAO et le FIAPO pour l’artisanat et les arts plastiques, la SNC, le FESTIMA et les nombreux festivals locaux pour le patrimoine, le SITHO pour le tourisme, le FITMO/FAB, le FITD, Récréatrales, Jazz à Ouaga, Waga Hip Hop, Yeleen et Dialogues de corps pour les arts de la scène. Mais, le Burkina Faso ne dénombre pas moins d’une centaine de manifestations culturelles réparties sur l’ensemble du pays. Ces manifestations, bien que se réclamant de filières spécifiques sont des cadres de rencontres des différentes filières. Un festival comme le FITMO/FAB programme à la fois des arts de la scène, des expositions d’arts plastiques, des projections cinématographiques, de la diffusion musicale à travers le village, des activités de promotion du livre (lectures publiques et dédicaces d’ouvrages édités),des ateliers de formation artistique et des activités de valorisation du patrimoine culturel.

Chacune de ces manifestations draine, à chaque édition, un public international, africain et national important. Chaque manifestation possède son public de professionnels, d’amoureux ou simplement de touristes occasionnels. Ces manifestations sont en elles-mêmes des marchés de leurs produits, créent des marchés connexes ou des opportunités d’affaires pour des acteurs et produits d’autres secteurs économiques et, souvent, offrent des espaces de rencontres et d’échanges. C’est le cas du Marché International du Cinéma Africain (MICA) qui est organisé à l’occasion du FESPACO pour favoriser la rencontre entre vendeurs et acheteurs de produits filmiques africains.

Ce sont donc autant de participants professionnels offreurs ou demandeurs des produits des filières culturelles concernées (cinéma, artisanat d’art, arts de la scène, etc.), de simples amoureux de telle ou telle filière, des professionnels d’autres secteurs économiques souhaitant faire la promotion ou simplement vendre leurs produits, qui sont présents dans la localité le temps de la rencontre. Ces manifestations sont aussi des espaces de rencontres et d’échanges où les acteurs peuvent échanger ou communiquer ou promouvoir leur idéal ou leur philosophie. Par exemple, chaque édition se tient sur un thème. Outre le fait que le thème souligne l’importance de la manifestation pour le domaine mis ainsi en exergue, il donne lieu à des fora où s’expriment des spécialistes, des acteurs eux-mêmes ou des mécènes (Etat, bailleurs de fonds, ONG, institutions régionales ou internationales).

3.3.8.3 Contraintes et faiblesses de la filière

Les manifestations culturelles, de par leur caractère hautement médiatique, constituent une preuve de vitalité artistique et culturelle. Elles confèrent au pays une image de carrefour culturel. Ce dynamisme fait parfois oublier les contraintes qui sont celles des organisateurs de ces activités. Les principales difficultés auxquelles font face les manifestations culturelles sont de plusieurs ordres : organisationnel, matériel, infrastructurel, humain et financier. Malgré le développement de la formation artistique au cours de ces dernières années et la création de lieux de

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rencontres culturelles, les manifestations n’arrivent pas à en profiter pour renforcer leur professionnalisme. La faiblesse des ressources les exposent toujours à un recours quasi permanent au bénévolat qui ne constitue pas une garantie pour une organisation de qualité. Aussi, le financement national (20 à 30% en moyenne du financement global selon les manifestations) reste faible à un moment où les guichets extérieurs sont de moins en moins accessibles et où les coûts de la médiatisation sont de plus en plus élevés. Enfin, les manifestations culturelles semblent être des produits de consommation locale. Mis à part le festival Yeleen qui organise une participation forte et active des touristes à l’évènement, les autres ne semblent pas faire de la participation des touristes étrangers, une priorité.

3.3.9. Formations/Appui-conseils

La formation structurée et l’appui-conseils sont des activités relativement récentes dans le paysage culturel burkinabè. Leur émergence réelle ne remonte qu’à la décennie 2000.

Dans le domaine de la formation, il existe une quinzaine de structures qui œuvrent à dispenser des formations dans les filières des arts plastiques, des arts de la scène, de l’audiovisuel et du management culturel. Le privé est à l’origine de l’existence de plus des trois quart des structures. Les structures publiques sont au nombre de quatre. Ce sont des Etablissement Publics à caractère Administratif (EPA) et des Etablissements Publics à Caractère Scientifique, Culturel et Technologique (EPSCT).Parmi les structures privées pionnières et d’importance, il peut être mentionné Les structures comme le Centre de Développement Chorégraphique (CDC), le Centre deFormation et de Recherche en Arts Vivants (CFRAV), l’Atelier Théâtre Burkinabè (ATB), l’Ecole de Danse Irène Tassembédo (EDIT), l’Association SIRABA, etc.

L’appui-Conseils, quant à lui, commence à se structurer et à se professionnaliser au Burkina Faso. Pendant longtemps, ce sont des structures extérieures qui avaient le monopole du domaine. La mise en œuvre des programmes PSIC a révélé la nécessité de disposer de structures d’appui-conseils qui aideraient les acteurs culturels à mieux formuler leurs projets, à structurer leurs organisations et à mesurer leurs actions.

3.3.9.1. Opérateurs de la filière

Les principaux opérateurs de la formation dans les arts et la culture au Burkina Faso sont l’Etat et les associations culturelles privées. Les structures étatiquesdéveloppant une offre de formation culturelle sont l’Université de Ouagadougou à travers la Filière AGAC qui développe une formation de niveau licence dans les arts (dramatiques et plastiques) et une formation de niveau Master en Administration etgestion culturelles, l’ENAM qui propose une formation pour des agents et des cadres de l’administration culturelle, l’ISIS-Studio école dont l’offre de formation porte sur la réalisation et la production cinématographiques et, enfin, l’INAFAC qui propose des modules de formation de base en arts plastiques, en danse et en musique.

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Les associations privées opérant dans la filière sont l’Espace Culturel Gambidi qui, à travers le CFRAV, développe une formation de niveau supérieur en arts dramatiques, l’EDIT et le CDC qui forment dans le domaine de la danse, l’ATB qui dispense une formation de base en arts dramatiques, l’Institut Imagine qui forme dans les arts du cinéma et des structures de diffusion comme le Jardin de la Musique Reemdoogo, le CITO, la Maison de la parole, les Instituts Français et le Bureau de liaison de Goethe Institute qui organisent des ateliers ponctuels ou périodiques.

Les principaux opérateurs de l’Appui-Conseils sont surtout des acteurs du privé,comme l’Organisation pour la Dynamisation des Arts du Spectacle en Afrique (ODAS-Africa), le Bureau ETIC, l’Agence Focus Global, Africa Label Group, Bitel Communication, Sud Icone, Planète culture, l’Association Nagan Les Experts, la Plateforme culturelle du Burkina Faso, Afrik Heur,.

3.3.9.2. Produits et marché de la filière

Il existe deux types de produits dans la filière Formation et Appui-Conseils. Pour la formation, ce sont les contenus des enseignements et formations dispensés aux étudiants et aux professionnels des arts et de la culture. L’offre de formation disponible prépare les acteurs à l’exercice d’un métier d’artiste (comédiens,danseurs, réalisateurs) ou d’administrateur (producteurs, administrateurs et gestionnaires culturelles). D’une manière générale, ces formations répondent à des besoins réels de l’administration publique ou à ceux du privé. Les structures culturelles manifestent de plus en plus le besoin de professionnalisation. Il leur faut pour cela disposer d’administrateurs et de gestionnaires culturels formés. La formation en Administration et Gestion Culturelles ouverte en 2002-2003 à l’université de Ouagadougou a permis de mettre sur le marché une soixantaine de produits de niveau maîtrise.Au niveau de l’appui conseils, ce sont les prestations de services à travers les études diagnostiques ou factuelles qui ont pour objet de renseigner et d’aider les acteurs culturels à prendre les meilleures décisions dans le sens de la réussite de leurs actions. Dans les premiers moments, ce sont les partenaires financiers institutionnels qui exigeaient des structures qu’ils appuyaient des études évaluatives leur permettant de vérifier l’utilisation et les impacts de leurs apports financiers. Par la suite, et de plus en plus, certaines structures culturelles commencent à intégrerl’appui-conseils dans leur programme de communication, de mobilisation de fonds, de formation des ressources humaines et d’évaluation de leurs activités. En matière d’Appui-conseils, le Burkina Faso dispose actuellement d’une expertise dont les compétences sont sollicitées à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Par exemple l’opérateur ODAS Africa a conduit, avec les cabinets BICFL et KYRNEA International, l’étude sur les festivals de théâtre en Afrique en mars 2003 et a participé à l’évaluation des programmes PSIC dans plusieurs pays africains.

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3.3.9.3. Contraintes et faiblesses de la filière

La formation culturelle publique comme privée reste, malgré ses performances, une activité marginale qui ne bénéficie pas d’un financement conséquent des institutions publiques. C’est à peine si certaines structures ne sont pas perçues comme étant non essentielles dans un contexte ou tout est prioritaire. L’Appui-Conseils local ne bénéficie pas non plus d’avantages particuliers. Compte tenu de son développement assez récent, il n’est pas bien connu de tous les acteurs du secteur culturel. En outre, il semble être victime d’une certaine habitude des acteurs culturels qui, lorsqu’ils disposent d’un peu de moyens, font appels à l’expertise extérieure, surtout non africaine. Une attitude qui trahit une forme de complexe vis-à-vis des compétences locales.

3.4. Action des partenaires au développement et de la société civile dans la structuration des filières

L’effervescence de la culture au Burkina a réussi à attirer l’attention de certains bailleurs de fonds bilatéraux (France, Danemark, Belgique, Luxembourg, Allemagne, Chine, Pays Bas) et multilatéraux (Organisation intergouvernementale de laFrancophonie (OIF), UNESCO, UNICEF, Union Européenne).

Par exemple, la coopération française soutient des projets qui accordent une place à l'action culturelle, comme le financement du réseau de bibliothèques, les échanges entre artistes français et burkinabé, et le financement de petits projets privés.

D'autres partenaires tels que le Danemark, les Pays Bas, le Luxembourg commencent à s’intéresser à la coopération culturelle en mettant en place des programmes d’accompagnement dans les domaines de la formation et des échanges interculturels..

L'OIF, la Communauté Française de Belgique et le Canada soutiennent les CLAC et la lecture publique en milieu rural, en procurant des équipements de projection et de diffusion d’origine francophone.

L’Union Européenne a mis en place avec le Ministère de la Culture et du Tourisme le programme de soutien aux initiatives culturelles (PSIC) en 2000 et le programme de soutien des actions culturelles en 2006. Le PSIC et le PSAC ont apporté aux projets agréés (environ 235 projets) des subventions allant jusqu’à 15 millions FCFA par projet.

Le secteur du patrimoine bénéficie d’investissements appréciables de la part de bailleurs de fonds internationaux et de partenaires au développement. Les principaux partenaires financiers opérant dans le secteur du patrimoine au Burkina, en plus de l’Union Européenne, sont l’UNESCO, les coopérations Taïwanaise et française.

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L’Union Européenne a été fortement impliquée dans le financement des études pour la préparation et l’organisation du concours international pour la construction du Musée national. La république de Chine Taiwan est intervenue dans la construction de pavillons et l’équipement de certains d’entre eux.

La plupart des coopérations bilatérales ont en fait eu des projets au niveau de la formation du personnel, de l’inventaire, la conservation, et la valorisation par la collecte et le montage d’expositions.

D’autres accords de coopération dans le domaine de l’archéologie avec l’université de Ouagadougou existent avec les coopérations française, suisse et allemande.

Des initiatives de collaboration entre la société civile (ONG, associations culturelles, secteur privé, etc.) et l’Etat ont permis au pays de promouvoir les différents secteurs culturels, tant sur le plan national qu'international. Le milieu artistique s'organise, des opérateurs tentent d’exercer le métier culturel en tant qu’indépendants, des municipalités développent des actions qui renforcent leurs projets dedéveloppement.

A l’échelle internationale le Burkina Faso est représenté à travers ses comédiens, ses cinéastes, ses artistes bronziers et ses sculpteurs qui remplissent une fonction d’ambassadeurs culturels du pays.

En conclusion, il peut être retenu que le potentiel culturel burkinabè est important ;que des efforts appréciables ont été faits, donnant lieu à des résultats encourageants. Toutefois, beaucoup reste à faire tant au niveau des acteurs étatiques que des opérateurs privés pour parvenir à une exploitation optimum du riche potentiel culturel burkinabè. Il s’agira notamment d’adresser la question de la mise à niveau de toutes les filières culturelles du point de vue de la structuration, de la professionnalisation, du renforcement des capacités et de l’identification de la forme appropriée d’appui que le public peut apporter au privé pour la conquête du marché intérieur et extérieur.

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DEUXIEME PARTIE : CONTRIBUTION DU SECTEUR CULTUREL AU DEVELOPPEMENT SOCIAL ET ECONOMIQUE DU BURKINA FASO

Si l’économie, au sens de la recherche de la croissance, de la lutte contre le chômage et de la répartition équitable des revenus, est au centre des premières préoccupations des citoyens et par conséquent des dirigeants à tous les niveaux, il peut être rappelé que le développement est une notion globale, qualitative, qui présente des dimensions économiques pures mais aussi des dimensions humaines pures comme le fait d’assurer la paix et la sécurité à tout le monde ; le fait de faire en sorte que toutes les activités soient inclusives, le fait de respecter l’environnement. Sous ces différents angles, la présence du secteur de la culture est permanente et, ce faisant, elle contribue au développement économique et social du Burkina Faso. Cette partie ambitionne de poser les jalons d’une esquisse de mesure des impacts de la culture sur l’économie du Burkina Faso en abordant successivement le volet économique puis le volet social.

4. IMPACTS DE LA CULTURE SUR L’ECONOMIE DU BURKINA FASO

La culture est à l’origine de nombreux impacts sur l’économie du Burkina Faso tant du point de vue de l’économie domestique que de celui de ses relations avec le reste du monde et tant au niveau réel qu’au niveau financier. Afin d’évaluer à sa juste mesure cette contribution, il convient de présenter de rappeler le caractère transversal de la culture au sein de l’économie du Burkina Faso.

4.1. La transversalité du secteur culturel

4.1.1. Secteur primaire et secteur culturel

Le secteur de la culture se retrouve dans le secteur primaire à travers la branche « Sylviculture, pêche et chasse » notamment dans ses aspects « patrimoine naturel ». Bien que les statistiques adéquates ne soient pas disponibles, il est utile d’indiquer que les formations végétales ou les surfaces d’eau naturelles préservées et rationnellement exploitées sont à l’origine de la création de valeur ajoutée, à travers les emplois créés et les revenus salariés versés, les intérêts payés au système financier, les revenus des investisseurs et les revenus de l’Etat. Ainsi, il existe au Burkina Faso 12 unités de conservation de la faune (UCF). Dans chacune de ces UCF la faune est partiellement ou intégralement protégée, donnant lieu à des activités de tourisme de vision ou de tourisme cynégétique.

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Carte 1

Source : BBEA, 2005

Les activités développées dans ces UCF procurent des revenus aux agents économiques classiques que sont les ménages, les entreprises et l’Etat mais aussi aux collectivités locales, créent parfois des occasions d’établissement de relations de coopération décentralisée et favorisent le développement local. Le patrimoine naturel comprend aussi les formations géomorphologiques ou les plans d’eau d’intérêt touristique tels les pics de Sindou ou du Gobnangou, le lac deTingréla, la mare d’Oursi ou les cascades de Karfiguéla. Ce sont donc des produits touristiques naturellement rattachables au secteur primaire en ce sens qu’ils sont des produits de la nature ou constituent une continuité de la terre.

4.1.2. Le secteur de la culture dans le secteur secondaire

Bien qu’étant dans beaucoup de cas de l’art ou de l’histoire, il y a bel et bien de l’industrie dans la culture. « L’industrie de la culture » est désormais un terme courant qui désigne l’ensemble des acteurs des chaînes de valeur des filières culturelles qui, conjointement, concourent à mettre sur le marché des produits culturels. C’est une industrie au sens de la massification d’acteurs divers ; mais c’est aussi une industrie au sens des procès et méthodes de production hautement capitalistiques utilisant des technologies de pointe. Les activités d’un studio qui

Carte 1 : Zone de conservation de la Faune au Burkina Faso

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comprennent le tournage, l’enregistrement du son et de l’image, le montage sont inconcevables sans la mise en place d’une véritable chaîne de production à l’instar des autres industries. Ainsi, l’industrie de la culture sous l’angle des unités de production type studio, compte près d’une vingtaine d’unités formellement installées15. A cela s’ajoute les « home studio » et les studios des organisations à but non lucratif. Les services qu’ils offrent comprennent l’enregistrement d’album ou de titre, la prise de son, le mixage, le montage de spot radio, le tournage de clip vidéo, le montage de spot vidéo, etc. S’ils sont producteurs, ils mettent sur le marché des produits audiovisuels sous forme de K7 ou de CD. Or un studio d’enregistrement emploie au minimum un preneur d’image et de son, un cameraman, un monteur, un mixeur, un metteur en scène, etc. L’imprimerie constitue en elle-même une industrie et en est une au Burkina Faso de par le nombre d’unités installées à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso. On n’en dénombre pas moins de quarante cinq (45).Il existe donc dans le secteur secondaire une composante culturelle certainement importante mais qui n’est pas formellement saisie par le système statistique.

4.1.3. Secteur tertiaire et secteur culturel

Le secteur culturel est une composante importante du secteur tertiaire. C’est en effet dans le secteur tertiaire que sont rangées, parce que ce sont des services, les activités de toutes les filières culturelles : arts de la scène et du spectacle, les arts ducinéma, de l’audiovisuel et du numérique, la musique enregistrée, le livre et la presse écrite et même le patrimoine culturel. D’après l’annuaire statistique du ministère de la culture, on ne dénombre pas moins de 375 entreprises et organisations opérant dans le secteur culturel. A cela s’ajoute l’importante population opérateurs dans l’informel,à savoir ceux de l’artisanat d’art (couturiers, les acteurs de l’art capillaire, potiers/potières, maroquiniers, vanniers, acteurs de l’art culinaire,tapissiers, ébénistes, orfèvres, etc.), des Arts plastiques (sculpteurs, artistes-peintres, dessinateurs, photographes) et des arts appliqués (designers,stylistes/modélistes, décorateurs).Il n’existe pas de données statistiques organisées faisant ressortir le caractère culturel ou pas des activités du secteur tertiaire mais la simple observation permet de se convaincre de son importance dans le secteur tertiaire. Par exemple, les métiers de tailleur ou de couturier sont les plus répandus au Burkina Faso ; il suffit qu’il y ait un marché pour qu’on y trouve un tailleur. Ceci est aussi vrai des métiers qui ont trait à l’art capillaire, à la photographie, etc., qui se sont d’ailleurs prodigieusement

15Les principaux studios d’enregistrement sont : Cenasa, Studio Kibaré, les Studios Abazon, Armada Diffusion, Bimo Vision, Label Korie, Seydoni Production, Studio Baobab, StudiaoDjembé, Tam-Tam Production, Recordz, Ouaga Jungle, Safari Production, K. Systems, OuagaNdjam, Bazar musique, etc.

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développés ces derniers temps. Et que dire des métiers liés à l’architecture et à la construction ? Le secteur tertiaire est donc essentiellement culturel.

4.2. Impacts de la culture sur l’économie nationale

4.2.1. Secteur culturel et revenu nationalLa contribution du secteur de la culture à la formation du revenu national est réelle. La preuve est faite par la présence, dans tous les secteurs économiques (primaire, secondaire et tertiaire) de produits et d’acteurs culturels qui apportent leurs contributions à la constitution des richesses nationales. Sans revenir sur ce qui a été présenté au chapitre 3(voir plus haut), il n’est que de rappeler les apports :

- du patrimoine culturel et naturel à travers la venue de touristes nationaux et étrangers ;

- des entreprises d’appui technique aux industries culturelles ;- des filières culturelles (hormis la filière patrimoine culturel et naturel citée plus

haut), qui offrent des produits comme ceux des arts de la scène, de l’audiovisuel, des arts plastiques, appliqués et de l’artisanat d’art, du livre et de la presse écrite, etc ;

- des manifestations culturelles qui drainent des foules de festivaliers nationaux et/ou internationaux ;

- des structures de formation et d’appui-conseils ;- les structures d’accueil et d’hébergement.

Toutes ces contributions prennent la forme de salaires et d’honoraires perçus, d’intérêts et de dividendes versés, d’impôts payés et de devises encaissées.

Malheureusement, l’organisation actuelle du système de la statistique nationale nepermet pas de faire ressortir la contribution du secteur de la culture au revenu national. Et cela n’est pas une spécificité burkinabè. Au-delà du Burkina Faso, eneffet, il est aussi difficile, voire impossible d’estimer directement la contribution de la Culture à la formation du produit intérieur brut (PIB) à partir des données des services d’élaboration des comptes économiques nationaux dans la sous régionouest africaine. En effet, les nomenclatures économiques utilisées en comptabilité nationale classifient les secteurs d’activité selon les branches d’activité économiqueissues directement de la Classification internationale type par industrie des activités économiques (CITI) et déclinées sous forme de nomenclatures régionales, sous régionales, etc. Ces classifications ne considèrent pas la Culture comme un secteur à part entière. Les activités culturelles sont donc transversales au sein de chacune des branches et sous branches d’activités définies relativement aux besoins de comparabilité internationales des économies.

Il est donc nécessaire de procéder à l’estimation de la contribution du secteur culturel au revenu national. Cette estimation permettra de disposer d’un ordre de grandeur de la contribution de la Culture à l’Economie du Burkina Faso.

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La démarche a consisté d’abord à déterminer la valeur ajoutée moyenne générée dans chaque filière par les acteurs y intervenant. L’équipe de consultants y a été aidée par certaines données, même partielles, produites par la comptabilité nationalecomme celles qui figurent dans le tableau suivant et qui ont trait à la contribution de l’industrie du papier, de l’édition et de l’imprimerie à la formation du PIB.

Tableau 16 : Contribution de l’industrie du papier, de l’édition et de l’imprimerie à la formation du PIBPrix ValeurProduction marchande principale 10 432 Production non marchande principaleProduction marchande secondaire 95 Production non marchande secondaireConsommation Intermédiaire 8 639 Valeur ajoutée brute 1 888 Salaires bruts des salariés déclarés 1 262 Salaires bruts des salariés non déclarés 197 Contrib. soc. effec. à la charge des employeurs 151 Contributions sociales imputées des employeursAutres Impôts sur la production 193 Subventions sur la productionRevenu d'exploitation 85 Actifs produits fixesSalariés déclarés 805 Salariés non déclarés 82 Entrepreneurs individuels : PatronsEntrepreneurs individuels pour compte propreAides familiauxSource : Base de données INSD

Comme il est aisé de le constater, bien que ces données soient très partielles, elles permettent de se faire une idée de l’importance de cette industrie pour la formation du revenu national : près de 2 milliards de valeur ajoutée en 2009 dont 1,459 milliards de salaires versés à 887 salariés dont 805 déclarés à la sécurité sociale, soit un salaire mensuel moyen de 130 000 FCFA pour les salariés déclarés et de 200 000 FCFA pour les salariés non déclarés. Certes, les consommations intermédiaires de cette industrie sont essentiellement constituées de papier, mais il n’en demeure pas moins qu’elle consomme beaucoup d’énergie. Par conséquent, une partie non négligeable des 8,639 milliards de FCFA de consommations intermédiaires a été affectée au paiement des factures énergétiques. En plus des tableaux de la comptabilité nationale, qui permettent de saisir quelques indicateurs économiques, les données d’enquêtes de terrain ont également été exploitées pour appréhender la contribution moyenne par acteur à la formation de la richesse économique. La valeur ajoutée moyenne varie entre 244 192 FCFA par employé pour les opérateurs du monde associatif, 502 635 FCFA pour le secteur privé informel et 892 857 FCFA pour le secteur privé formel, le tout compris dans une fourchette allant

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La considération des opérateurs et de l’ensemble des acteurs de chacune des filières permet ensuite de procéder dans chaque domaine filière retenue, et des paramètres spécifiques obtenus, d’estimer la valeur ajoutée globale qui échoit aux activités retenues dans le périmètre culturel défini dans le cadre de la présente étude.

En 2009, la valeur ajoutée dégagée par les filières culturelles est estimée à 79,667 milliards de francs CFA.

Ces résultats ne captent pas en totalité l’apport du secteur culturel à l’économie du fait de l’indisponibilité de données suffisamment détaillées pour saisir l’apport indirect de la culture à travers la richesse créés par les opérateurs au moment des évènements culturels qui se déroulent dans le pays ; non plus l’apport économique du tourisme récepteur pour des raisons culturelles, etc. Le tableau 19 ci-après fournit la distribution par filière de la valeur ajoutée ainsi que la valeur ajoutée de l’ensemble du périmètre culturel retenu.

Tableau 18 : Contribution de la culture au PIB

FILIERE CULTURELLEValeur ajoutée (en millions de FCFA)

Poids (en % du PIB)

Arts plastique, art appliqué et artisanat d’art 54 391 1,38

Livre et presse 11 490 0,29

Patrimoine 3 201 0,08

Cinéma et audiovisuel 3 402 0,09

Arts de la scène 3 586 0,09

Musique enregistrée 1 035 0,03

Manifestations culturelles 811 0,02

Formation/Appui conseils 1 751 0,04

Valeur Ajoutée du secteur culturel 79 667 2,02

PIB (2009) 3 941 000 100,00

Cette valeur représente 2,02% du produit intérieur brut réalisé par le pays au cours de la période. Elle a été constituée en grande partie par les activités de la filière artisanat, art appliqué qui totalise un montant de 54,391 milliards de francs CFA, représentant 68,27% de la valeur ajoutée totale créée par le secteur. L’importance du nombre d’acteurs dans cette filière explique fortement sa contribution à la réalisation de ce résultat par les opérateurs du secteur de la culture.

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4.2.2 Secteur culturel et emploi

Les activités culturelles au Burkina Faso emploient un nombre relativement important de personnes. En effet, 164 592 personnes, représentant 1,78% des actifs occupés en 2009 ont un emploi dans le domaine de la culture. Des disparités au niveau du genre sont à noter. Les postes de travail sous tendus par les emplois culturels sont pourvus à 57,2% par des hommes et à 42,8% par des femmes. Selon les branches, cette répartition est inégale. Les femmes sont ainsi plus nombreuses dans des activités tels la filature, le tissage, la vannerie, la fabrication de produits céramiques.Les autres activités culturelles sont pour la plupart l’apanage des hommes.

Tableau19 : répartition des emplois culturels selon le sexeSexe Total

Branche d'activité de l'entreprise dans laquelle nom a exercé son activité principale Masculin Féminin Total %Fabrication d'articles d'habillement ; préparation et teint 15 714 11 837 27 551 16,7 Filature, tissage et ennoblissement textile 6 944 19 127 26 071 15,8 Fabrication d'articles en bois, liège, vannerie et sparteri 9 619 15 207 24 826 15,1 Réparation d'articles personnels et domestiques 9 458 1 737 11 195 6,8 Fabrication de produits céramiques 754 8 507 9 261 5,6 Fabrication d'autres articles textiles 4 348 2 606 6 954 4,2 Activités de jeux, activités sportives ou récréatives 3 220 3 333 6 553 4,0 Activités cinématographiques, de radio, de télévision et de 5 264 - 5 264 3,2 Activités de fabrication n.c.a. 3 271 745 4 016 2,4

Autres 16 310 3 249 19 559 14,2 Ensemble 94 184 70 408 164 592 100,0 % 57,2 42,8 1,78 Total actifs occupés 4 572 065 4 689 979 9 262 044

Source : EICVM2009, résultats provisoires

Hormis ces activités, il convient de signaler que la culture a également des effets positifs indirects sur les emplois à travers des secteurs importants comme ceux de l’hébergement et de la restauration et des débits de boissons. En effet, 63 484 emplois sont pourvus dans ces secteurs en 2009. Cette situation donne une idée sur les effets d’entrainement du secteur culturel en termes d’emplois générés dans bien d’autres domaines de l’économie burkinabé.Suivant les filières culturelles retenues, il ressort que la filière Arts plastiques, appliqués et artisanat est la plus importante du point de vue de l’emploi avec trois quarts des emplois pourvus en 2009. Les arts de la scène et le patrimoine culturel n’emploient chacun environ 4% des emplois pourvus par le secteur culturel16.

16 Ici, on a capté l’activité principale exercée, certaines personnes pouvant exercer une activité secondaire.

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Graphique 7 : Répartition des emplois culturels selon les filières

Source : EICVM2009, résultats provisoires

Par ailleurs, la structure des emplois créés par le secteur de la culture répartis par type d’employeur laisse entrevoir une prépondérance nette des entreprises individuelles, pour la plupart informelles avec 78,7% des emplois pourvus en 2009. Cette situation dépeint la « précarité » des emplois dans le secteur culturel au regard de la faible organisation des entreprises individuelles (« librairies par terre »,ventes de cassettes et CD audio et vidéo, projection cinématographique CANAL+, etc.) et des ménages privés. Les entreprises privées formelles comptabilisent 2,9% des emplois culturels en 2009 tandis que l’administration publique occupe à travers le Ministère de tutelle et les établissements publics de l’Etat (EPE), une faible proportion de 1,8%.

Globalement, la répartition des populations œuvrant dans les secteurs culturels est presque égalitaire. A priori, la culture ne se présente pas comme un domaine paupérisant ou un secteur dont les employés ont de faibles niveaux de vie. Un appui à ce secteur pourrait contribuer à améliorer la situation de bien être des employés culturels à travers une augmentation des populations dans les derniers quintiles de bien être au détriment des autres ; toute chose qui contribuerait à améliorer le niveau de vie des personnes travaillant dans le secteur.

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11,9 3,3

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3,9 Artisanat, art appliqué

Arts de la scène

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Cinema, audiovisuel etnumerique

Livre et presse

Patrimoine

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Tableau20 : répartition des travailleurs dans le domaine de la culture selon le niveau de vieSecteur Culturel/ Branche d'activité culturelle Quintiles

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Artisanat, art appliqué

Filature, tissage et ennoblissement textile

3,2% 5,4% 28,9% 30,0% 32,5% 100,0%

Fabrication d'autres articles textiles 8,8% 32,7% 58,5% 100,0%

Fabrication d'étoffes et d'articles de bonneterie

3,2% 21,8% 47,3% 27,8% 100,0%

Fabrication d'articles d'habillement ; préparation et teint

7,6% 4,6% 6,5% 27,7% 53,5% 100,0%

Travail du cuir ; fabrication d'articles de voyage

21,0% 29,2% 49,8% 100,0%

Fabrication de chaussures 53,8% 46,2% 100,0%

Sciage et rabotage du bois 16,2% 2,7% 39,1% 42,0% 100,0%

Fabrication d'articles en bois, liège, vannerie et sparteri

27,2% 3,9% 14,6% 36,1% 18,1% 100,0%

Fabrication de produits céramiques 13,8% 36,6% 30,1% 19,5% 100,0%

Métallurgie et première transformation des métaux précieux

51,6% 48,4% 100,0%

Fabrication de matelas et de meubles 24,0% 30,8% 45,2% 100,0%

Activités de fabrication n.c.a. 24,8% 75,2% 100,0%

Récupération 56,4% 40,5% 3,1% 100,0%

Réparation d'articles personnels et domestiques

1,0% 5,0% 23,2% 22,0% 48,8% 100,0%

Total 10,0% 5,6% 16,6% 29,6% 38,1% 100,0%

Livre et presse

Fabrication de papier, de carton et d'articles en papier ou

77,2% 22,8% 100,0%

Imprimerie 10,0% 90,0% 100,0%

Activités d'agences de presse 17,5% 82,5% 100,0%

Total 12,4% 12,2% 75,5% 100,0%

Patrimoine

Fabrication de produits pharmaceutiques

26,2% 73,8% 100,0%

Hôtels et autres moyens d'hébergement de courte durée

13,4% 86,6% 100,0%

Restaurants, débits de boissons 1,7% 8,5% 11,7% 21,8% 56,3% 100,0%

Activités d'architecture, d'ingénierie et autres activités

10,6% 89,4% 100,0%

Activités des médiathèques, musées, réserves naturelles

100,0% 100,0%

Total 1,5% 8,1% 11,1% 20,7% 58,7% 100,0%

Cinéma et audiovisuel

Fabrication d'équipements et appareils de radio, télévision

100,0% 100,0%

Activités cinématographiques, de radio, de télévision et de

5,9% 8,3% 16,1% 25,8% 43,9% 100,0%

Total 5,8% 8,1% 15,8% 25,3% 45,0% 100,0%

Art de la scèneActivités de jeux, activités sportives ou

récréatives 30,3% 15,0% 54,6% 100,0%

Total 30,3% 15,0% 54,6% 100,0%

Source : EICVM2009, résultats provisoires

Cependant, d’une branche d’activité culturelle à une autre, on constate une différentiation dans la distribution des populations occupées dans les domaines culturels selon les quintiles de niveau de vie. Pendant que les populations évoluant le

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domaine du livre et de la presse sont concentrées vers les quintiles de niveau de vie les plus élevés, celles opérant dans la fabrication d’articles en bois, d’articles de vannerie ou dans la récupération y sont relativement moins nombreuses.

En termes de filières, les travailleurs opérant dans la filière livre et presse sont relativement dans des conditions de vie meilleures. En effet, plus de 75,5% de ces derniers sont représentés dans le cinquième quintile de niveau de vie. Vient ensuite le patrimoine avec 58,7% de personnes logées dans le quintile des personnes les plus aisées au regard des dépenses par tête effectuées au cours de la période de référence. La filière artisanat, art appliqué, constituée presque totalement de personnes travaillant dans des entreprises pour la plupart très peu modernes, enregistre évidement la plus faible proportion d’employés dans le quintile de niveau de vie le plus élevé avec 38,1%. Formée en grande partie d’entreprises traditionnelles faiblement organisées et presque pas mécanisées, cette filière mérite une attention particulière car elle emploie une frange importante de la population active occupée du pays.

4.2.3 Secteur culturel et équilibre extérieur

Le secteur culturel est une composante importante des échanges internationaux mais il ne se limite pas à cela. Dans une certaine mesure, il constitue un puissant moteur de ces échanges. En effet, dans le contexte actuel du 21ième siècle, que vaudraient les échanges d’un pays sans l’estime que les autres peuples du reste du monde ont pour la culture du pays concerné ? Tout commence donc par la culture. En outre, la culture présente cette caractéristique d’avoir, dans beaucoup de situations, des avantages absolus, parce ce que les produits concernés sont uniques ; tout au plus les produits qui peuvent être considérés comme concurrents ne sont que des substituts potentiels. En conséquence d’être la porte d’entrée et le moteur des échanges internationaux ainsi que d’avoir une compétitivité inégalable, la culture contribue à l’équilibre extérieur du Burkina Faso. Ce paragraphe ambitionne de présenter une esquisse d’évaluation de la contribution du secteur culturel à l’équilibre extérieur du Burkina Faso en montrant, d’une part, le degré d’ouverture du Burkina Faso au reste du monde et les conséquences économiques qui en découlent, et, d’autre part, le degré d’ouverture du reste du monde à l’économie du Burkina Faso.

4.2.3.1. L’ouverture du Burkina Faso à la culture du reste du monde

L’ouverture d’un pays au reste du monde peut s’apprécier au travers des voyages de ses ressortissants à l’étranger à l’occasion des phénomènes migratoires volontaires et des voyages pour motifs de tourisme.

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4.2.3.1.1. Les voyages des burkinabè à l’étranger

Les voyages des burkinabè à l’étranger ne sont pas bien connus en raison de la faiblesse des statistiques dans ce domaine. Cependant, sous l’angle de la migration ou des voyages touristiques, sans pouvoir avec exactitude en saisir l’importance, il est bien connu que le burkinabè est très ouvert à la culture du reste du monde. Par exemple, l’importance de la communauté burkinabè dans la sous-région, notamment en Côte d’Ivoire et au Ghana, est bien connue. En effet, on estime le nombre de burkinabè vivant en Côte d’Ivoire à quatre millions et au Ghana à un million. Dans la région Afrique, le Burkinabè est présent dans l’espace francophone et particulièrement en Afrique centrale (Les deux Congo, Gabon).Au sujet des autres continents, l’ouverture vers l’Europe, principalement vers la France, reste forte pour des raisons historiques ; mais l’intérêt pour l’Amérique (Canada, Etats Unis) s’affirme de plus en plus. Les motivations de l’ouverture vers la France et le Canada sont les études, tandis que vers les Etats-Unis les études mais aussi la recherche d’un mieux-être en sont les principales causes. L’attrait américain s’explique par la réussite et la puissance américaines et est favorisé par la politique américaine en la matière, en l’occurrence la sélection des candidats à l’immigration aux Etats-Unis par l’organisation de loteries.Le burkinabè est aussi ouvert à l’Asie (Chine, Japon). Les motivations de l’ouverture vers l’Asie sont surtout d’ordre commercial.

4. 2.3.1.2. Les importations de produits à contenu culturel étrangers

Les importations constituent en elles-mêmes la manifestation de l’ouverture d’un pays sur la culture du reste du monde. Cependant, on s’intéresse ici à l’ouverture du Burkina Faso à la culture du reste du monde à travers l’importation et la consommation de produits culturels d’origine étrangère.En valeur et en volume, les importations de biens culturels suivent une tendance à la hausse. En 2011, les importations de produits culturels atteignent 143 milliards deFCFA, en croissance de 6,4% par rapport à 2010. Cette valeur représente 8,2% de la valeur totale des importations officielles de biens au Burkina Faso. Les principaux produits importés sont les biens à base de tabac, les produits tels que les appareils pour la réception, la conversion et la transmission ou la régénération de la voix, les carreaux vernissés ou émaillés en céramique, les produits de l’habillement (tissus, articles de friperie, chaussures, etc.), les meubles, les produits de beauté et de maquillage…

Du fait de la faiblesse, voire de l’absence d’industries locales dans certains secteurs de la culture, les produits comme les appareils de réception, de conversion et de transmission ou de régénération de la voix, les produits de beauté et de maquillage, les carreaux en céramique, constituent une composante pour l’heure incompressible dans la structure des importations de biens culturels du pays.

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Graphique 8 : Evolution des importations en valeur et en volume (pour les produits culturels)

Source : Annuaire statistique, MCT, 2010

4. 2.3.2. L’ouverture du reste du monde à la culture burkinabè

4. 2.3.2.1. Les voyages des étrangers au Burkina Faso

Le Burkina Faso reçoit des étrangers des quatre continents que sont l’Afrique, l’Amérique, l’Asie et l’Europe. Sur la base des statistiques hôtelières, de 2000 à 2009 et à l’exception de cette dernière année, structurellement, les visiteurs étrangers du Burkina Faso sont des européens. En effet, sur un total de 199 845 touristes ayant séjourné annuellement en moyenne dans les hôtels, 95 041 sont européens, soit 34,03%%, contre 84 839 africains soit 30,38% ; viennent ensuite les américains, puis les asiatiques. Au sein des européens les visiteurs français sont dominants ; puis viennent respectivement les belges, les allemands et les italiens. Parmi les africains, les ivoiriens sont les plus nombreux, suivis des nigériens et des maliens au même niveau, puis des sénégalais et des togolais aussi à niveau équivalent. Les visiteurs américains proviennent essentiellement des Etats-Unis et du Canada tandis que les asiatiques sont constitués essentiellement des chinois et des libanais. Le taux de croissance annuelle moyen des visiteurs étrangers a atteint 8,86%, sous l’impulsion des visiteurs africains (10,84%), américains (9,81%), asiatiques (8,62%) et européens (7,04%). Ce panorama met en évidence l’intérêt de plus en plus croissant de la destination Burkina Faso pour le reste du monde, en même temps qu’il révèle le potentiel de développement qui reste dans les différentes régions du monde. Apparemment le

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Burkina Faso n’est visité que par les ressortissants de quelques pays de chacun des 4 continents, étant entendu que les visites en provenance de l’Océanie n’ont pas été enregistrées. Les motivations des visiteurs ont trait aux affaires et aux activités professionnelles, à des visites à des parents et amis, au tourisme pure, aux safaris vision ou chasse, à la santé, à des motifs religieux ou de pèlerinage, etc.

Graphique 9 : Motifs de voyage au Burkina Faso

Source : Annuaire statistique, MCT, 2010

4.2.3.2.2. Les exportations de produits à contenu culturel

Les exportations de biens culturels constituent un moyen de vendre la culture burkinabé au plan international et peuvent être sources de revenus substantiels pour l’ensemble du Burkina Faso. Mais l’amélioration des recettes d’exportations de biens et services culturels est conditionnée par l’attractivité des produits culturels burkinabè offerts sur le marché international.Les exportations en valeur et en volume de biens culturels présentent une allure erratique, malgré une tendance globale à la hausse certes mais qui, au demeurant, s’opère à un rythme plus lent que les importations de produits à contenus culturels.En 2011, la valeur des exportations est de 13 milliards, en hausse de 20% par rapport à son niveau en 2010. Les exportations restent ainsi très faibles en valeur (10 fois moins) par rapport aux importations de biens culturels. Les principaux biens culturels ou les produits de base servant à la fabrication de biens culturels du Burkina Faso en direction du marché extérieur sont les produits à base de coton tels que les ouates et les articles en ouates, les fils de coton autres que les fils à coudre, les articles d’habillement en coton, etc., les peaux de bovins (y

2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2009Vacances-loisirs 34 854 31 917 48 681 57 136 64 427 46 470 57 839 78 966 72 548Affaires et motifs professionnels 98 281 53 268 110 811115 272165 343224 880233 215211 256246 390Visite à des parents et amis 15 696 27 468 19 802 22 527 28 119 30 066 38 318 38 811 40 709Ensemble 165 328184 289198 376216 653290 005324 342358 683374 265401 308

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compris le wettblue) pour le cuir, les productions originales de l'art statuaire, les sculptures.

Graphique 10 : Evolution des exportations en valeur et en volume (pour les produits culturels)

Source : INSD, Comptes nationaux

En exemple, les 69 679 objets de natures diverses (bois, poterie, vannerie, etc.) ont été exportés en direction du reste du monde et principalement de l’Europe. La France représente le partenaire le plus important en matière d’exportation d’objets d’art. Les recettes générées par ces objets valent 333 800 000 de FCFA en 2010.

Tableau21: Evolution de la situation des objets exportés par typeNature des objets exportés 2007 2008 2009 2010Quantités déclaréesBois 14 128 9 228 20 762 7 682Poterie 1 115 949 791 817Métaux 17 420 11 187 22 322 13 613Vannerie 17 271 20 641 9 036 10 166Textile 19 760 15 119 14 018 10 673Cuirs/Peaux 8 115 8 867 5 660 5 121Divers 41 708 54 371 46 408 21 607Nombre total d’objets exportés 119 517 120 362 118 997 69 679Valeurs déclaréesValeur (en millions de FCFA) 470,7 416,27 409,5 333,8 Source : Annuaire statistique de la Culture et du Tourisme

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5. LA CULTURE, SOCLE DU DEVELOPPEMENT SOCIAL DU BURKINA FASO

Ce chapitre détaille les ressources culturelles susceptibles de servir de fondement au développement du Burkina. Dans cette optique, il décrit successivement les mécanismes traditionnels de médiation permettant de prévenir et de gérer les conflits ; le rôle de la culture dans la construction de la nation burkinabè ; son importance dans le succès de certaines initiatives endogènes de développement ;les croyances, systèmes d’interdits et sanctions sociales qui permettent de générer un processus de développement durable ; l’apport des savoirs locaux dont notamment le zaï dans le développement du secteur agricole burkinabè ; le rôle qu’elle joue dans l’autonomie sociale des femmes.

5.1 Les mécanismes traditionnels de médiation au Burkina Faso

Si le conflit est un élément inhérent, consubstantiel voire constitutif de toute société humaine, il apparaît aussi comme le symptôme d’un dysfonctionnement de l’organisme social, un élément néfaste à la paix sociale. Surtout lorsqu’il dégénère en confrontation violente qui met en jeu la vie des individus ou des collectivités. En dépit de tout ce qui a été fait et tout ce qui se fait encore de nos jours pour dénigrer, dévaloriser et sous-estimer les valeurs endogènes propres aux sociétés locales, il existe encore des ressources internes, des mécanismes éprouvés et des institutions capables de prévenir et de gérer les conflits sociaux (conflits matrimoniaux, lignagers, religieux, ethniques, fonciers, frontaliers, de pouvoir, etc.), et donc de sauvegarder « la paix qui est à la fois un moyen et une finalité dans le processus de développement des peuples. Il s’avère alors utile de connaître ces institutions. Nous décrirons successivement les mécanismes de prévention des conflits et les institutions de gestion des conflits.

5.1.1 Les mécanismes de prévention des conflits

Face à leur aspiration à la paix, les sociétés locales ont développé plusieurs mécanismes de dissuasion et de prévention des conflits. Ce sont les mariages inter-lignagers ou inter-villageois, les compétitions sportives ou artistiques, la parenté à plaisanterie.

- Les mariages inter-lignagers ou inter-villageois

La pratique de l’exogamie assure des relations d’échanges matrimoniaux entrelignages ou entre villages. Ces alliances inter-lignagères par le biais du mariage créent des liens de sang qui réduisent considérablement les risques de conflits ouverts.

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- Les compétitions sportives ou artistiques

Les compétitions sportives telles que la lutte traditionnelle pratiquée dans de nombreuses sociétés burkinabè sont des occasions ou des manifestations contribuant au rapprochement des communautés. Elles peuvent aussi affermir des réconciliations.

- La parenté à plaisanterieElle fait partie des institutions sociales qui favorisent la prévention et la résolution des conflits. Elle se manifeste sous deux formes : la première est la parenté à plaisanterie qui lie des personnes appartenant à des groupes ethniques ou des espaces géographiques différents (Mossé/Samo, Bissa/Gouroussi, Yadsé/Gourmantché). La seconde est une alliance à plaisanterie qui peut exister entre un mari et ses belles sœurs (ses « petites femmes ») ou entre une femme et les petits frères de son mari qui sont ces « petits maris ». Par extension, cette alliance à plaisanterie existe également entre les petits frères et les belles sœurs du mari. Elle fait fréquemment ses preuves dans la réduction des « petits » problèmes sociaux qui auraient pu dégénérer en grands conflits. Un grand nombre de groupes socio-ethniques au Burkina Faso entretiennent des relations de parenté à plaisanterie entre eux (cf. tableau ci-dessous).La parenté à plaisanterie se conçoit comme un pacte de non-agression qui unit et rapproche deux camps. Elle oppose un groupe à un autre dans un antagonisme ludique et verbal. On reconnaît aisément deux parents à plaisanterie à travers les injures bien ciblées que ceux-ci se lancent ou à la querelle simulée à laquelle ils se livrent. Pour un non-initié, assister à une telle scène peut s’avérer inquiétant : les deux parties s’invectivent parfois avec violence, laissant croire que l’altercation va dégénérer en bagarre. En fait, la plaisanterie dans ce contexte vise non seulement à détendre l’atmosphère, mais aussi à resserrer les liens d’amitié et de fraternité. En outre, il n’est pas rare que cette parenté à plaisanterie véhicule un message très fort qui pousse l’autre partie à un changement positif. En plus de son caractère ludique qui vise à instaurer une ambiance fraternelle, la parenté à plaisanterie joue aussi un rôle très important parfois décisif dans la résolution des conflits et dans la conjuration des malheurs.Dans la société dagara, par exemple, la parenté à plaisanterie appelée le « loluoru »apparaît selon Gbaane Dabiré Constantin (1975), comme une instance de réconciliation, de pacification qui garantit de l’extérieur la cohésion et la stabilité des clans engagés : en dirimant les conflits internes à chaque groupe, il en conjure la désintégration qui viendrait et qui représente la pire des menaces pour un groupe ». L’intervention d’un parent à plaisanterie est très attendue dans les situations conflictuelles pour y ramener la paix, la réconciliation, l’harmonie, l’entente. La tradition exige que ce dernier soit écouté et obéi. Faire fi de ce type de médiation, c’est remettre en cause cette structure mise en place par les ancêtres et s’attirer du même coup le courroux de ceux-ci. Ce qui signifie que la mentalité qui sous-tend cette médiation est telle que celle-ci enregistre du succès dans la plupart des cas.

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De plus, si les risques d’une conflagration sociale du pays ont pu être évités durant la période 1966-1982, c’est en partie grâce à la parenté à plaisanterie. « Si le pays a pu vivre plusieurs dizaines d’années dans un État dirigé par des Sana [Samo] (Sangoulè Lamizana et Saye Zerbo) par exemple, cela est dû au fait que les liens de parenté à plaisanterie qui les lient aux Mossi ont servi d’éléments modérateurs » (Badini 1996 : 114).Les relations de plaisanterie permettent d’affirmer que dans le cas du Burkina Faso, la diversité des organisations sociales demeure compatible avec la construction de la nation. Ceci parce que les tentations de repli identitaire et de communautarisme sont absorbées par les interrelations qui se nouent entre groupes sociaux par le biais justement de la parenté à plaisanterie.

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5.1.2 Les institutions de gestion des conflitsLorsque les conflits éclatent malgré tout, le pouvoir de gestion de ces conflits est porté par un certain nombre de médiateurs et d’intercesseurs dont l'objectif est l’apaisement, la réparation et la réconciliation.

- Les chefferies coutumièresDans certaines localités du Burkina Faso, comme la région moaga, les chefferiessont de tout temps joué un rôle de premier plan dans la régulation des conflits. Elles sont perçues par les populations locales comme étant les plus aptes à conduire efficacement la conciliation dont l’objectif poursuivi est la réconciliation, le maintien de bonnes relations et la paix sociale. D’autant plus que contrairement au magistrat de l’ordre judiciaire, le chef coutumier n’est pas, prisonnier d’un ensemble de textes préétablis. Il dispose d’une plus grande marge de liberté, n’étant tenu que par quelques grands principes généraux. La solution concrète à un litige ne lui est donc pas dictée d’avance. Il pourra adapter la solution à chaque cas, et même à chaque individu, l’objectif suprême poursuivi étant moins la satisfaction intégrale de l’individu dans ses droits que le maintien et la préservation de la stabilité et de l’entente entre les groupes. La meilleure solution sera de dire, non pas qui est fautif, mais comment préserver l’intérêt de la société et des ressources communes, à l’avantage de tous (Ouédraogo, 1996 : 8 ).Par exemple, dans le cadre des dégâts des champs où les chefs traditionnels sont fréquemment sollicités, ceux-ci, après les salutations d’usage, lancent le débat sur fond de rappel formel des règles ou des conventions qui structurent la tentative de conciliation. On pourrait les formuler de la façon suivante :- le rappel des principes du vivre ensemble ;- le rappel des obligations de celui qui est à l’origine du ou des dommages ;- le rappel des circonstances ou des contextes de manière à apaiser le cœur de la victime et obtenir sa disposition à l’acceptation d’une demande de pardon ;- l’interdiction d’attaquer l’adversaire par des propos outrageants ou de recourir à la violence physique contre lui ;- la renonciation par la médiation à imposer la volonté de l’une ou l’autre des parties pour privilégier un accord ou un arrangement sur la base de concessions réciproques ou de compensations financières.En clair, les protagonistes sont invités, à faire preuve de forte volonté voire de courage pour dominer les amertumes et les rancunes et trouver la sérénité nécessaire à amener une fin positive au litige qui les oppose.Ce n’est donc pas un procès mais une conciliation ; mais elle est la règle, donc un trait culturel. On ne tranche pas contre quelqu’un et malgré lui. Les « audiences » seront répétées jusqu’à ce que la solution proposée soit acceptée de tous.

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- Les castes de forgeronsLes forgerons occupent une place éminemment stratégique et symbolique dans la plupart des sociétés traditionnelles locales. De par leurs pouvoirs mystiques (manipulation des forces puissantes et dangereuses comme la foudre), ils sont, dans le contexte de la vie communautaire, des hommes de paix. Ils incarnent excellemment le pouvoir de pardon. Ils interviennent dans le règlement de certains conflits pour empêcher l’engagement des individus dans un cycle de vengeance. L'intervention du forgeron ne vise pas à punir juridiquement et pénalement mais à trouver un accord ou un arrangement entre les parties prenantes au conflit. Le refus de conciliation est considéré comme un manquement grave au respect dû au forgeron. Le forgeron peut sanctionner cette attitude par : l'interdiction de livrer de produits de forge au quartier ou à la localité, temporairement ou durablement, jusqu'à, dans les cas les plus graves, l'interdiction faite à tout forgeron de résider dans le village.

- Les maîtres de la terreLes détenteurs de maîtrises de terre exercent un pouvoir sacralisé de pacification. Ainsi, dans les sociétés lignagères du sud-ouest du Burkina, en particulier les sociétés dagara, le maître de la terre (tegansob) joue un rôle important de médiateur dans les conflits interfamiliaux. Cette médiation s’opère de la façon suivante : « le chef de terre accompagné de six hommes, dont le kumbèrsob, prend une masse de forge appelée zèr, une enclume, une paire de pinces, une branche de gaa (diospyrosmespiliformis), une calebasse pleine de cendre, et une autre remplie d’eau. Selon la coutume, la masse de forge n'est jamais portée sur la tête, mais étant donné la gravité de la situation, elle l’est á cette occasion. Le tigansob et sa suite se dirigent vers le champ de bataille. Près de celui-ci, ils s’avancent doucement parmi les combattants qui arrêtent les hostilités. Celui qui porte la cendre la jette à chaque pas dans la direction de la bataille. Le zèr est jeté ainsi que les tenailles, au centre même de la bagarre, et on verse de l’eau dessus. Le chef de terre dit alors quelques mots sévères et fait demi-tour avec sa suite. Le sort en est jeté en ce moment, les flèches sont mises dans les carquois. Les deux parties doivent se mettre d’accord sur le champ pour ramener tous les instruments au chef de la terre. Personne ne peut retourner chez lui, tous sont prisonniers du tigansob, et ils séjournent chez lui jusqu’au jugement » (Père Jean Hébert,1976).

- Les griots Ils sont présents dans presque toutes les sociétés burkinabè. Autrefois, les griots faisaient partie de la cour des rois et des nobles où ils leur servaient de conseillers. Par leur connaissance des lignées et des sociétés, ils jouent un rôle non négligeable dans la transmission des coutumes et des dictons qui sont la base de l’éducation des jeunes enfants et qui régissent toute relation au sein du village. Ils sont égalementsollicités dans les conflits locaux en tant que médiateurs où ils réussissent àconstruire un accord entre les protagonistes grâce à ces connaissances.

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- Le neveu utérinLe neveu utérin joue un rôle remarquable dans la médiation des conflits qui surviennent au sein de sa famille maternelle, ainsi qu’entre son oncle maternel et ses épouses. Quelles que soient les causes du conflit, sa médiation permet d’accéder à une solution acceptée par les parties en conflit. Car l’oncle ne peut rien refuser à son neveu.

- Les conseils de sagesLe conseil des sages est une constante des structures d’organisation traditionnelles

de la plupart des communautés traditionnelles du Burkina Faso. Les sages sont les garants du respect de la morale sociale et du maintien de l’équilibre dans ces communautés. Sur toutes les questions engageant l’intérêt commun, leurs avis sont requis. Ils jouent un rôle de régulateurs sociaux et leur voix est bien écoutée. Ce qui fait d’eux des médiateurs recommandés dans les moments les plus critiques. La parole des sages vient après celle de Dieu et des ancêtres dans la société traditionnelle. C’est à juste titre qu’ils sont considérés comme des acteurs de choix dans la médiation pour la résolution des conflits. C’est le cas dans la résolution desconflits familiaux (enfants versus parents notamment) où les médiateurs sont les tantes et les grands parents. Ceux-ci jouent le rôle de conseillers pour les enfants et peuvent interpeller ou même rappeler à l’ordre les parents de ceux-ci s’ils n’ont pas raison. La méthode consiste en une démarche auprès des personnes incriminées, une demande d’explication, des échanges et une intercession auprès d’eux. Elle peut se limiter également à une démarche pour demander le pardon des parents quand l’enfant reconnait sa faute et souhaite être pardonné. Généralement cette démarche est toujours couronnée de succès.

- Les wemdâmba (sg. wemba)Les wemdâmba (sg. wemba) se présentent comme relevant de la descendanced'une fille du fondateur du royaume de Ouagadougou, relation qui s'étend à tous les descendants de ce dernier, à savoir les chefs. «Gens du pardon», en position de neveux et/ou de petits-fils utérins des chefs, ils sont les médiateurs du pouvoir. Leur intermédiation commande l’apaisement des tensions, le pardon ou la recherche du compromis. Ils interviennent sur la demande de tout un chacun, mais ils sont plus particulièrement attachés à la personne du chef et interviennent seulement dans les cas graves : par exemple, lorsque des vies humaines sont en danger à l'occasion de guerres, ou encore lorsqu'un homme est condamné par un chef.

- La Kadiko kassenaDans la société kasena, au centre-sud du pays, la kadiko désigne une femme mariée de retour dans son propre patrilignage. Au-delà de l’organisation des funérailles dont elle s’occupe initialement, la Kadi ko joue un important rôle dans la recherche, le maintien de la paix sociale et dans l’acceptation des autres groupes ethniques. Elle jouit d’une autorité reconnue dans la communauté lui permettant d’intervenir dans lesconflits opposant deux individus, deux groupes de parentés. Elle inspire aussi la

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crainte car ses malédictions se réalisent toujours. Comme le disent les Kassena « On a peur de sa bouche ». Au nom de cette crainte, rares sont les protagonistes qui se risquent à rejeter son intervention dans un processus de réconciliation. Au cours de certaines cérémonies (funérailles, « baptême » du nouveau né sur l’autel du lignage) qui sont des périodes de retrouvailles entre les hommes et leurs divinités, elle pose des actes de réconciliation qui sont favorables à l’adoption d’attitudes nobles, d’engagements pour une coexistence pacifique. En tant que personnage clé, elle est au centre du renouvellement du tissu social en étant régulatrice de tension.

Au final, dans les villages, la gestion d’un conflit en dehors des mécanismes endogènes de médiation peut entraîner d’importantes conséquences. Elle peut provoquer une dégradation voire une rupture des relations sociales. Plus concrètement, elle fait naître de fortes tensions entre les groupes d’appartenance des acteurs en confrontation (segments de lignages ou lignages). Par exemple, dans le cas d’un conflit foncier, elle peut susciter une politique de restriction des accès à la terre. Ce qui peut alimenter un fort sentiment d’insécurité foncière au niveau des propriétaires fonciers et condamner des emprunteurs qui n’entretiennent ni de relations de parenté ni de relations d’alliance avec eux à ne plus bénéficier de prêts de terre à l’échelle locale. Les prêteurs argueront de la propension des gens à privilégier l’arbitrage administratif en cas de litige pour justifier dorénavant leur refus de leur céder temporairement leur terre sous peine de la perdre définitivement.

5.2. Rôle intégrateur de la culture : inculturation et ouverture

Dans un pays comme le Burkina dont l’existence en tant qu’État remonte à 1960, les valeurs apprises et partagées de façon volontariste par les différents groupes ethniques, socio-économiques et politiques qui le composent sont sourced’intégration, d’union et de stabilité.Dans ce contexte, la dialectique de l’inculturation et de l’ouverture (cf. Etude nationale prospective « Burkina 2025 », 2005) revêt une importance capitale. L’inculturation est ce qui permet l’intégration et l’enracinement des membres de la communauté burkinabé dans leurs propres valeurs, leurs normes de comportement et de référence (vision du monde.) Une telle appropriation consciente permettra aux Burkinabè de rencontrer et d’assimiler de façon sélective et efficiente les valeurs exogènes, de s’ouvrir aux autres groupes sociaux dans un échange fructueux et mutuellement avantageux. Il est à noter qu’une mauvaise gestion de la diversité culturelle qui compose ce pays peut être source de clivages ethniques et religieux, de tensions socioculturelles qui peuvent éclater en conflits ouverts et violents. Elle peut susciter l’émergence des groupes fondamentalistes dans toutes les grandes religions révélées (islam, christianisme) et même les religions animistes traditionnelles dont les zélotes vantent de plus en plus la puissance et l’efficacité. Le durcissement des exigences des différents loyalismes obligeant chacun à choisir son camp et à officialiser ce choix

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peut mener le Burkina au bord d’une véritable implosion sociale frisant la guerre civile, même si elle n’est pas armée. Les familles connaissent des déchirures douloureuses, surtout les foyers fondés sur le mariage « mixte » entre gens d’ethnies et/ou de religions différentes devenues antagonistes.En revanche, une bonne gestion de cette diversité peut être à la source de richesse et de dynamisme novateur. Elle peut être judicieusement mobilisée et canalisée vers la conquête de nouveaux espaces d’échanges commerciaux et culturels. Du positionnement des Burkinabè par rapport à leurs repères identitaires dépend en grande partie l’état de l’intégration et de la cohésion sociale. En effet, si les membres d’une société ne partagent pas les mêmes valeurs, il n’y aura pas de cohésion sociale et certains risquent d’être marginalisés par rapport aux autres majoritaires et/ou puissants.L’option prise, il y a quelques années, de rebaptiser le pays Haute-Volta en Burkina Faso, c’est-à-dire, patrie des hommes intègres, paraît une bonne base, toutes les sociétés nationales ayant l’intégrité et la dignité comme valeurs cardinales. Dans un contexte d’analphabétisme criard, il faut souligner que les langues nationales (véhicule de la culture des communautés) contribuent pour beaucoup dans les activités de sensibilisation/information aux valeurs communes.

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5.3 Les organisations communautaires : un vecteur de promotion d’un développement social

L’importance des solidarités traditionnelles dans la promotion d’un développement social peut être illustrée à travers le cas des groupements naam au Burkina Faso.L’initiateur de ces groupements, Bernard Lédéa Ouédraogo, a recherché dans les traditions de sa région (le Yatenga) les valeurs et les institutions sociales permettant, grâce à leur évolution, un auto-développement plus humain, plus supportable et plus "soutenable". D’où la mise en place des groupements naam qui mettent en avant les soubassements culturels de la société rurale pour favoriser l'émergence de formes d'organisation devant affronter les défis « modernes »; la continuité entre le Kombi-Naam, structure sociale traditionnelle mossi (« Pouvoir des Jeunes ») et le groupement Naam est sans cesse rappelée par les animateurs qui définissent ce dernier comme la version adaptée de l'association traditionnelle, respectueuse « des valeurs et coutumes héritées (solidarité, savoir et savoir-faire), mais intégrant les valeurs modernes (technologie, écriture, etc.), qui fondent le développement économique et social » (Gentil et Mercoiret, 1991 : 878).Mais la vision d’un développement endogène et enraciné culturellement n’implique pas l’idéalisation du passé. « Se rappeler le passé, ça rajeunit » dit-on dans les groupements naam qui s’attachent à faire la collecte des histoires et des coutumes anciennes. Celles-ci permettent de connaître et de sélectionner les valeurs jugées positives : l’amitié, la solidarité, le partage, l’entraide, le respect des ancêtres, la prise de décision par consensus, la maîtrise de soi, le désir d’avancer ensemble.Le maître-mot du groupement naam, c’est la responsabilité. Pour développer sans s’abîmer, il faut partir du paysan tel qu’il est, tel qu’il vit, tel qu’il sait, tel qu’il sait faire, tel qu’il veut. C’est dire qu’il faut partir de sa culture. L’objectif c’est d’amener l’homme, par la conscientisation, à affronter ses problèmes après les avoir définis lui-même. L’autre société qu’il entend créer ne sera ni traditionnelle puisqu’elle écarte volontairement les interdits et les coutumes désuets, ni occidentale puisqu’elle rejette les aspects de la culture européenne non désirés. Les groupements naam partent donc du "dedans traditionnel". Ce "dedans" évolue par une dynamique intérieure. Comme il est dit sous le logo du groupement naam « le développement, c’est comme une graine en germination ».Ce parti-pris en faveur de la créativité paysanne africaine, pourvu qu’elle s’enracine dans ses traditions a porté ses fruits : le premier groupement a été créé en 1967. Dix ans plus tard, on comptait 126 groupements. De nos jours, rien qu’au Burkina Faso, on compte plus de 5 482 groupements paysans, appelés Naam, issus d’une synthèse originale entre la tradition et la modernité. Ils réussissent à mobiliser plus de 653 931 membres avec 52% de femmes répartis dans vingt-neuf (29) provinces sur les quarante-cinq (45) que compte le Burkina Faso, tandis que au-delà des frontières de ce pays fleurissent des groupements semblables dans le Mali voisin, au Niger, au Sénégal, en Mauritanie, etc.

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Ces groupements naam déploient toutes sortes d’activités. Ainsi, les champs collectifs, le maraîchage et l’élevage en commun, le séchage des fruits, les banques traditionnelles d’épargne et de crédit, les banques de céréales autogérées pour éviter la spéculation au moment de la "soudure" entre deux récoltes, la fabrication de charrettes et autres outils agricoles, le tréfilage pour lutter contre la désertification (fabrication de gabions), la gestion de moulins à mil, des ateliers de production et de formation en menuiserie, en tissage, etc.Les groupements naam s’activent aussi dans le domaine de l’alphabétisation et de la conservation du fragile environnement sahélien par la formation des paysans à la construction de diguettes, de retenues d’eau, au reboisement, etc.

On enregistre aussi nombre d’activités dans le domaine de la santé préventive et curative, des caisses de solidarité et d’entraide, de la promotion culturelle par la revalorisation de la pharmacopée traditionnelle, etc.

5.4 Culture et développement durable

Les communautés rurales burkinabè qui ont une bonne connaissance de l’environnement physique et culturel dans lequel elles vivent ont su mettre en place des principes protecteurs et pacificateurs des relations homme/nature. C’est ainsi qu’à Koumi une femme d’une quarantaine d’années déclare : « Après le sacrifice du début de l’hivernage, nous ne coupons plus le bois parce que sinon il y aurait un grand vent qui dévastera la brousse et nos champs, et nous ne récolterons rien. Ça sera la famine. C’est pourquoi tout le monde respecte cette période » (in MAIGA, 2009). Une telle conception du rapport entre l’homme et la forêt représente un dispositif à même de contribuer à la protection de l’environnement.Par-delà ces pratiques individuelles, on peut noter également la présence d’espaces de culte ou de bois sacrés où le prélèvement des espèces est strictement interdit. Les contrevenants sont sanctionnés soit par la communauté, soit de façon mystique (par les esprits des lieux sacrés). Ces représentations socioculturelles participent à la conservation et à la protection du couvert végétal. Il s’agit, en effet, de dispositifs contribuant à réguler les ponctions sur les ressources ligneuses ; tout au moins de la part des utilisateurs de ressources observant des rituels.De même, certaines espèces ligneuses sont interdites d’exploitation en raison des rapports totémiques avec les segments sociaux (lignées, lignages, clans). En pays moaga et plus particulièrement dans les provinces du Bam, du Passoré et du Boulkiemdé, il y a le "buan", une pratique coutumière qui assure la préservation et restauration de l’environnement. Elle fixe un certain nombre de règles de gestion des ressources naturelles. Cette réglementation traditionnelle interdit la cueillette anarchique des fruits avant maturation, la coupe et toute sorte de mutilation des arbres et arbustes fruitiers (Butyrospermumparkii, parkiabiglobosa, lanneamicrocarpa, sclerocaryabirrea, diospyrosmespiliformis……) qui ont une valeur économique importante dans la vie des populations locales.

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Le mode opératoire est le suivant : entre la mi-avril et le mois de mai, un signal est donné grâce à un instrument relié à une corde qui, lorsqu’on le fait tourner, relié à la corde, dans le sens du jet d’une fronde, produit un bruit caractéristique qui fait peur aux enfants et aux personnes non averties. Ce bruit nocturne est connu sous l’appellation de « rugissements du masque-mère ». Dès cette nuit là, chaque adulte et adolescent sait qu’il est désormais interdit de monter sur un arbre fruitier jusqu’au début des semis, qui est la période où les fruits des arbres sauvages commence à murir. Tout contrevenant s’expose à la sanction des esprits qui est la chute du haut des arbres, dont on sait qu’elle est périlleuse. Du coup, il se crée une garde humaine pour veiller au respect de l’interdit. Ce sont les parents qui jouent ce rôle parce qu’ils ne veulent pas voir leurs enfants s’exposer à de tels périls. De cette manière donc, toutes les espèces fruitières sont protégées d’année en année et ainsi de suite.Par d’autres voies, des espèces animales ou végétales sont protégées : l’animal sauvage non dangereux qui entre dans un domicile ne doit pas être tué tant qu’il n’a pas commis de faute. Il en est ainsi du serpent boa dans certaines communautés, ou de certains oiseaux qui, du fait de leur proximité avec les êtres humains sont considérés comme domestiques ; certaines espèces animales rares et fragiles sont aussi protégées.On voit bien que les cultures locales sont dans une logique de développement durable à travers la protection totale ou partielle et l’utilisation rationnelle des ressources naturelles.

5.5 Les savoirs locaux, facteurs d’impulsion du développement agricole : le cas du zaï

Les savoirs locaux qui constituent une dimension forte de la culture des sociétés rurales peuvent avoir un rôle crucial dans le développement, et plus particulièrement celui du secteur agricole. C’est le cas du zaï qui est une technique ancestrale moagade restauration des sols devenus incultes ou improductifs. Il a été réhabilité ou remis au goût du jour, à partir des années 1980, par des paysans de la région du Yatengadans un contexte agro-climatique marqué par la récurrence des épisodes de sécheresse (1970-73 et 1983-84, en particulier) et de dégradation des sols. Depuis lors, et face aux obstacles culturels mais aussi aux difficultés techniques d’adaptation des savoirs technico-scientifiques, il est devenu, un des thèmes techniques privilégiés en matière de lutte contre la dégradation des sols. En langue mooré, « Zaï » vient du mot « Zaïegré » qui signifie « se hâter pour préparer la terre ». Il s'agit en effet de récupérer des terres abandonnées, dégradées par une succession de cultures, complètement dénudées, décapées et encroûtées où le ruissellement est si fort qu'il emporte les graines et les résidus organiques qui pourraient régénérer la jachère. Il consiste à préparer la terre très tôt dans la saison sèche en creusant des trous dans le sol, en les remplissant partiellement de fumier eten y enfouissant des semences de sorgho ou de mil. Ces trous creusés sont d'environ 40 cm de largeur et 20 cm de profondeur avec un espacement compris

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entre 0,5 et 1 m. Pendant la saison sèche, ces micro-bassins piègent des sables, des limons et des matières organiques véhiculés par les vents.Dès les premières pluies, le paysan dépose dans chaque micro-bassin une ou deux poignées de matière organique (poudrette de bétail, compost…), soit environ 1 à 3t/ha. Les termites, attirées par la matière organique, creusent des galeries au fond des cuvettes qu’ils transforment en entonnoirs. Les eaux de ruissellement ypénètrent et créent des poches d’humidité en profondeur à l’abri de l’évaporation rapide. Les paysans sèment alors dans ces poquets les différentes cultures (mil ou sorgho).Les avantages du zaï sont principalement : la capture des eaux de ruissellement et de pluie, la préservation des semences et de la matière organique, la concentration de la fertilité et des eaux disponibles au début de la saison des pluies et partant, une augmentation de la production agricole. Il a permis aux paysans de restaurer les terres jadis jugées incultes à l’agriculture, y compris les sommets de collines aux sols gravillonnaires. La technique « Zaï »permet de réduire l’importance du sarclage à la surface des poquets (réduction de 20% en termes d’intensité de sarclage en première année). Dans certains cas, cette technique permet également des re-semis dans les mêmes poquets l’année suivante. Les sols traités en « Zaï » offrent des niveaux de production atteignant 500 à 1 000 kg/ha. De l’avis des producteurs, la technique permet également de gérer de façon rationnelle les rares quantités de matière organique. Sur le plan écologique, des graines d’arbustes fourragers (rejetées par les animaux dans les fèces) contenues dans les poquets poussent et les plants sont entretenus par les paysans; cette pratique a permis le développement de parcs agro-forestiers, base du système de production dans cette région du Burkina.

5.6 Culture et genre

Au Burkina Faso, la culture joue un rôle dans le progrès social, la cohésion, la justice sociale à travers la promotion et la diffusion des valeurs sur lesquelles se fonde l’égalité entre les femmes et les hommes et les opportunités d’emploi qu’elle offre aux femmes. On peut citer l’exemple des Théâtres forum dont les thèmes portent sur les droits des femmes et des enfants, les Infections Sexuellement Transmissibles (IST), la scolarisation des filles, l’accès des femmes à la terre, les formations et les emplois non traditionnels. Par exemple, la troupe théâtrale du Centre Féminin d’Initiation et d’Apprentissage aux Métiers (CFIAM) basée à Ouagadougou qui est composée des élèves du centre, d’un animateur culturel et d’un percussionniste aentrepris ces dernières années des activités de sensibilisation des populations locales sur les thèmes des métiers non traditionnels à travers des sketchs. L’objectif est de convaincre les filles de s’orienter vers des domaines de formations et des emplois non traditionnels. En outre, les activités théâtrales, en même temps qu’elles constituent pour les femmes un cadre propice à leur épanouissement personnel, assurent dans une certaine mesure leur insertion sur le marché du travail. On

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constate ainsi une présence accrue de comédiennes et de techniciennes dans ces activités. Parmi, par exemple, les membres d’un ensemble de troupes de théâtres dénommé le "Cartel", on dénombre, en 2010, 133 comédiennes contre 362 comédiens ; ce qui représente 26,87 % de l’effectif. Quant aux techniciennes, opérant dans ce cartel, il convient de relever qu’elles sont majoritaires : 79 techniciennes contre 73 techniciens. Ce qui représente 51,97% de l’effectif. Le secteur culturel est très ouvert en termes de possibilité d’insertion sur le marché de l’emploi : dans certaines filières, comme l’artisanat d’art, les arts plastiques, les arts de la scène, l’investissement nécessaire pour ce faire est souvent modeste. Et parfois il suffit d’avoir du talent. Ceci explique l’importante présence féminine dans le secteur de la culture.

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CONCLUSIONS

A travers le document le rôle social et économique que joue et peut jouer la culture dans la société burkinabè est patent. D’abord, les nombreux mécanismes traditionnels de médiation que nous avons vus et qui sont tournés vers la prévention et la gestion des conflits témoignent de l’attachement profond des sociétés traditionnelles à la paix sociale sans laquelle aucun développement n’est possible et de leur capacité à concevoir des mécanismes efficaces et efficients aux situations où la paix viendrait à être menacée. On peut rappeler à ce propos les logiques de conciliation, de réconciliation, de pardon qui imprègnent ces mécanismes de médiation. C’est d’ailleurs des valeurs communes comme la tolérance, le pardon qui ont permis à la société burkinabè de résister, de ne pas se dissoudre face à certaines crises socio-politiques.D’autre part, des acteurs de développement (groupements naam notamment) ont pu valoriser explicitement les valeurs traditionnelles des sociétés locales (solidarité, entraide, prise de décision par consensus) pour promouvoir des actions de développement visant l’amélioration du niveau de vie des populations locales, et donc la réduction de la pauvreté.Sur le même registre, on peut aussi rappeler qu’en matière de développement durable des règles traditionnelles existent qui permettent de garantir une gestion durable et efficace des ressources naturelles.Enfin, la culture participe à sa façon à la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes à travers les opportunités d’emploi qu’elle offre à ces dernières. Sur le plan économique, la culture est un secteur transversal qui se retrouve dans les trois secteurs économiques classiques. Elle contribuait ainsi en 2009 à l’emploi (164 592 emplois directs), à la formation du PIB (près de 80 milliards de FCFA en 2009) et aux exportations du Burkina Faso. Elle présente cet avantage propre d’offrir des produits qui ne font pas face à une concurrence du type que connaissent les produits de l’industrie. Il convient donc de prendre des dispositions pour tirer partie de ces avantages. C’est l’objet des recommandations ci-après.

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RECOMMANDATIONS

1- PATRIMOINE

1.1. Inventaires

a. Développer un programme massif d’inventaire du patrimoine matériel et immatériel. Ce programme devrait enregistrer, photographier et filmer tous les aspects de la culture nationale, y compris l'architecture, les monuments et sites archéologiques et naturels, la musique traditionnelle, la littérature orale, les croyances religieuses, les savoirs et savoir-faire traditionnels ;

b. Créer une base de données pour le patrimoine culturel qui peut être accessible de l'intérieur comme de l'extérieur du pays pour l'identification, la conservation, la planification et la recherche.

1.2. Réhabilitation

a. Restaurer et réhabiliter des sites, monuments et villes anciennes avec la participation des communes et des populations locales ;

b. Développer des centres d’artisanat d’art dans les communes, en relation avec les musées là où il en existe ;

c. Développer et promouvoir l'artisanat local ainsi que d'autres activités culturelles par des expositions dans les musées communaux et locaux.

1.3. Conservation

Eviter que les politiques d’urbanisation ou de travaux publics ne causent la destruction de notre patrimoine culturel notamment l’architecture traditionnelle dans les vieux quartiers ; les vieux quartiers doivent rester des parties intégrantes et entières des villes qui se modernisent.

1.4. Musées

a. Créer des musées thématiques dans toutes les communes chefs-lieux de provinces en fonction des potentialités culturelles pour intégrer l'histoire des civilisations locales, la technologie et la science, ainsi que les pratiques de la vie quotidienne locale ;

b. Soutenir les communautés locales dans la création de musées communautaires ;

c. Développer une politique nationale de collecte et commencer la collecte des objets pour doter les musées provinciaux et communautaires ;

d. Créer un musée national d’histoire naturelle qui sera un pôle complémentaire du musée nationale ;

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e. Aider les musées à organiser des programmes éducatifs et des expositions à l’attention des populations et particulièrement des scolaires ;

f. Mettre en place des commissions indépendantes composées d’éminentes personnalités (universitaires, grandes figures du clergé, chefs traditionnels, fonctionnaires à la retraite et dirigeants d'industrie et d’entreprises de renom) qui aideraient à définir les grandes orientations et les stratégies de développement des musées ;

g. Restaurer les bâtiments historiques pour servir de musées, de lieux de la mémoire ou de centres culturels dans les différentes régions et dans les communes afin de promouvoir les traditions et la culture populaire locale ;

h. Soutenir la construction de studios d'enregistrement locaux afin de préserver, valoriser la musique traditionnelle et augmenter la quantité de la production musicale des musiciens locaux ;

i. Encourager et soutenir les cinéastes pour la réalisation de films documentaires et de fictions sur l'histoire du Burkina Faso ;

j. Responsabiliser les élus des collectivités territoriales dans la mise en oeuvre de projets culturels dans leurs localités.

2- FORMATION ET EDUCATION ARTISTIQUE

2.1. Formation des jeunes et promotion de l’éducation

a. Offrir des bourses de formation aux jeunes talents dans les plus grandes écoles mondiales de leurs domaines artistiques ;

b. Soutenir les structures publiques et privées de formation existantes dans les arts de la scène pour en faire des pôles d’excellence. La mise en place d’un plan cohérent de soutien au développement des structures de formation artistiques et culturelles publiques et privées ainsi que le développement de stratégies de formation des formateurs permettraient une insertion harmonieuse de l’éducation artistique dans le système éducatif national, base de développement d’une véritable culture artistique ;

c. Introduire l’éducation artistique (patrimoine, arts plastiques, arts de la scène, cinéma, etc.) dans tous les ordres d’enseignement du système éducatif burkinabè ;

d. Donner une formation spécifique adaptée aux personnes impliquées dans l’inventaire du patrimoine.

2.2. Formation du personnel culturel et sensibilisation des communautés

c. Formation intensive du personnel travaillant dans les institutions culturelles ;

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d. Sensibiliser les communautés locales à la nécessité de l'inventaire et de la gestion des biens culturels.

3- PROMOTION CULTURELLE

3.1. Visibilité de la culture burkinabè

a. Assurer la promotion de la culture du Burkina Faso en la rendant plus visible dans les espaces publics et privés de notre Administration publique, nos représentations diplomatiques, nos établissements publics des enseignements primaire, secondaire et supérieur. Des directives peuvent être prises dans ce sens. par exemple les espaces publics pourraient être décorés de nos objets culturels et les cadeaux de fin d’années pourraient être constitués des produits de nos artistes plasticiens et de nos artisans locaux ;

b. Assurer la promotion de la culture du Burkina Faso en la rendant plus visible dans les espaces privés, dans les établissements privés des enseignements primaire, secondaire et supérieur. Une politique incitative consistant en la délivrance de reconnaissance peut être expérimentée. Par exemple des prix en objets d’art peuvent être décernés aux établissements privés qui auraient fait l’effort de promotion de notre culture ;

c. Mettre en place une véritable politique du livre par la création d’un fonds de soutien à l’édition et à la lecture publique comme ce qui existe dans d’autres pays.

3.2. Valorisation des technologies, savoirs, savoir-faire et valeurs traditionnels

a. Utiliser les techniques architecturales et les savoirs et savoir-faire traditionnels pour promouvoir une architecture locale. Le gouvernement pourrait utiliser cette option dans la construction des édifices publics ;

b. Adopter des mesures incitatives sur le sponsoring et le mécénat culturels. A travers des mesures de réduction d’impôts ou l’octroi de distinctions honorifiques, l’Etat peut développer une motivation des citoyens et des entreprises nantis à soutenir la politique et l’action culturelles ;

c. Faire connaître nos valeurs traditionnelles dans l’édification de sociétés inclusives, de paix, de tolérance par l’organisation de conférences. Les travaux de recherche, les études thématiques, les publications, les modules d’enseignement, les conférences publiques, les colloques scientifiques, etc.pourraient être des voies à exploiter pour faire mieux connaître ces valeurs.

4- FINANCEMENT

a. Instaurer une loi de prélèvement de 1% des budgets des grands travaux nationaux pour le financement des grands projets culturels comme la restauration des monuments, la réalisation des musées, les fouilles archéologiques, la décoration des bâtiments publics, etc. ;

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b. Rendre plus autonomes les institutions culturelles et encourager l’initiative privée dans le secteur culturel ;

c. Soutenir les associations culturelles, les collectivités locales et des entrepreneurs culturels engagés dans la promotion et la valorisation du patrimoine culturel national à l'intérieur et l'extérieur du pays ;

d. Mettre en place un fonds de soutien à l’entrepreneuriat culturel. Il pourrait être alimenté par les prélèvements opérés sur les projections dans les salles de cinéma, les vidéo clubs ainsi qu’un impôt intérieur ad hoc sur les produits culturels importés. Une agence autonome de promotion de l’entrepreneuriat culturel pourrait abriter ce fonds.

5- SYSTEME D’INFORMATION STATISTIQUE

a. Prendre en compte systématiquement le volet culture dans la caractérisation des activités des individus de la population recensée dans les prochainsrecensements de la population ;

b. Introduire une branche « Culture » dans les différents secteurs économiques de la comptabilité nationale ;

c. Dans la perspective de l’introduction de la branche « Culture » dans les statistiques nationales, mener une étude pour recenser exhaustivement toutes les activités pouvant faire partie de cette branche dans chaque secteur ;

d. Les efforts entrepris par la DEP/MCT ont permis au Burkina Faso de disposer d’annuaires statistiques du secteur culturel, régulièrement élaborés. Nonobstant ces résultats fort appréciables, il importe de renforcer davantage le dispositif de production statistique tant en moyens humains, matériels que financiers.

6- Suivi du développement culturel national

Rendre permanente le Comité de suivi de cette étude nationale sur les impacts socio-économiques de la culture au Burkina Faso. Il faudrait pour cela élargir ses compétences pour en faire un instrument de veille et un organe de suivi de la mise en œuvre des présentes recommandations. Il pourrait par ailleurs aider à identifier les goulots d’étranglement dans la mise en œuvre et proposer des solutions.

7- Indicateurs de mesure des impacts sociaux et économiques à considérer

- Contribution au PIB (Poids de la valeur ajoutée du secteur culturel à la valeur ajoutée globale, PIB) ; INSD

- contribution à la croissance (part contributive du secteur culturel à la croissance du PIB) ; INSD

- contribution à l’emploi ; INSD- contribution à l’éducation et à la formation : effectifs des ordres

d’enseignements du secteur culturel/effectifs globaux des mêmes ordres d’enseignement ; MCT et autres départements ministériels ;

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- contribution à l’équilibre extérieur : solde extérieur du secteur culturel ; taux de couverture ; Douane

- prise en compte du genre : importance des femmes dans le secteur culturel ;MCT

- Contribution à la prise en compte de l’environnement : budget des films,émissions radio, etc. consacrés au thème de l’environnement/ensemble des budgets ; MCT.

8- Mieux connaître les valeurs traditionnelles

Mener une étude pour déceler les valeurs traditionnelles partagées afin de construire une nation de paix, de tolérance et de solidarité forte de ses 63 ethnies.

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DOCUMENTS CONSULTES

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Textes juridiques

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