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Eau vive Numéro 1 2003 Bulletin UICN Planète Conservation

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Eau vive

Numéro

12003

Bulletin UICN

Planète Conservation

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Planète Conservation 1/20032 Planète Conservation 1/2003 3

Couverture, centre : UNEP/A. Alhamdy Fond : UNEP/Arnason Thorvardur

Planète Conservation(anciennement Bulletin de l’UICN)

Une publication del’UICN-Union mondiale pour la nature

rue Mauverney, 28CH-1196 Gland, Suisse

Tél. : +41(22) 999 0000Téléc. : +41(22) 999 0002

Site Web : http://www.iucn.org

Rédactrice en chef : Nikki MeithRédacteur adjoint : Peter Hulm

Rédacteur invité pour ce numéro sur l’eau : Elroy Bos

Chef de la communication :Corli Pretorius

Direction d’édition : Elaine ShaughnessySecrétariat d’édition : Deborah Murith

Édition française : Danièle Devitre

© 2003 Union internationale pourla conservation de la nature

et de ses ressources

Volume 34, N°1, 2003ISSN :1027-0973

Maquette couverture : L’IV COM SàrlMaquette/Mise en page : Maximedia Ltd.

Produit par :la Division des publications de l’UICN,

Gland, Suisse et Cambridge, R.-U.

Imprimé par : Sadag Imprimerie

Les opinions exprimées dans cette publication ne reflètent pas nécessairement

celles de l’UICN ou de ses membres.

Souscription annuelle : (3 numéros par an) USD 45

(non-membres) envoi par avion compris

Pour tout renseignement sur la souscription, contactez : Cynthia. [email protected]

Veuillez adresser toutes les autres demandes de renseignements à :

[email protected]

SOMMAIRE

16 Carte : Rareté environnementale de l’eau

L’eau et le secteur privé18 L’eau est l’affaire de tous Ashok Khosla

19 Appel à tous les secteurs! Peter B. Spillett

L’eau et l’économie20 Payer pour les services de l’eau Stefano Pagiola

21 Mont Kanla-On : ceux qui paient le prix Rina Rosales

L’eau et les communautés22 Courant inévitable : la parité dans le secteur de l’eau Lorena Aguilar

23 Au-delà de la participation : gestion négociée des bassins hydrographiques Danielle Hirsch

L’eau et les forêts

8 Restauration : une science inexacte David Lamb

9 Trésors dans les nuages Álvaro Luna Terrazas

L’eau et l’agriculture10 Alimentation, eau et biodiversité Jeffrey A. McNeely

11 Juste valeur Rebecca Tharme

L’eau et les aires protégées12 La protection : ses autres avantages Nigel Dudley

13 Andalousie : vue d’ensemble Fernando Molina

L’eau et le droit14 Nous avons besoin de cadres juridiques musclés John Scanlon

15 Des principes à la pratique : étude de cas vietnamienne Megan Dyson

L’eau et le climat29 Adaptation à l’incertitude Brett Orlando

Conclusions30 Question d’équilibre Ger Bergkamp et Jean-Yves Pirot

32 Publications Tout sur l’eau

L’eau et la biodiversité24 Un investissement sage Will Darwall

25 Pêcheries en eau douce : maintenir le flux aquatique Patrick Dugan

L’eau et la communication26 Lancer des ponts : communiquer la science pour la gestion côtière Don Alcock

27 Le lac Öreg : lorsque nature et culture coexistent András Bõhm et László Musicz

L’eau et les barrages28 Fleuves de discorde S. Parasuraman

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au vivePréface3 Nature hospitalière Yolanda Kakabadse

Introduction4 Le bilan hydrologique Achim Steiner

L’eau et les écosystèmes6 Une grande aventure : l’approche par écosystème Hillary Masundire

7 Tout l’écosystème Ton van der Zon

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Lorsque vous pénétrez dans la forêt de brouillard, vous éprou-vez instantanément une sensation de calme profond et de sé-curité, comme dans un sanctuaire. L’humidité vous enveloppe d’un épais manteau. Au-dessus de votre tête, la voûte forestière déploie sa protection en couches successives de branches lour-dement chargées de guirlandes d’orchidées, de mousses, de fougères et de broméliacées. Si ce n’était le bourdonnement des insectes et la musique des oiseaux chanteurs, le silence serait total. Ici, la vie est chaleureusement accueillie par une nature généreuse et hospitalière.

Mon pays, l’Équateur, possède une partie de l’écosystème de forêt tropicale montagnarde de brouillard des Andes septen-trionales. Trésor de biodiversité et d’endémisme, cette région fut le théâtre, il y a quelques années seulement, d’une décou-verte remarquable : une nouvelle espèce d’oiseau, Grallaria ridgelyi. Cet événement est venu à point nous rappeler la valeur essentielle de nos forêts de montagne et les présents dont elles gratifient l’homme et la nature.

Mais le plus beau de leurs dons est l’eau douce et propre qu’elles génèrent. Outre la pluie, ces forêts disposent d’une source fiable d’humidité : l’air lui-même, chargé de brouillard, qui leur permet d’être excessivement généreuses et de fournir l’eau, source de vie, bien-delà de leurs limites.

L’Année internationale de l’eau douce, en 2003, nous donne l’occasion de nous tourner vers la protection et le respect des ressources d’eau. Il est temps de réfléchir au rôle des forêts qui, partout, protègent les sources d’eau. Il est temps de mieux ap-précier les rivières et les zones humides et de renouveler notre

détermination à les protéger. Il est temps aussi d’examiner les nombreuses menaces qui pèsent sur les ressources d’eau et les écosystèmes dont elles dépendent, notamment la conversion d’écosystèmes naturels en pâturages et en terres agricoles, la pollution, la surexploitation et les activités extractives, les espèces exotiques envahissantes, le tourisme de masse et les changements climatiques.

Il est temps enfin de mesurer les difficultés que rencontrent les populations et les communautés les plus pauvres, directe-ment tributaires des ressources naturelles. Il ne suffit donc pas de s’engager à tenir les Objectifs de développement du millé-naire fixés par les Nations Unies – par exemple réduire de moitié la proportion de personnes qui n’ont pas un accès durable à de l’eau potable et salubre avant 2015 – il faut aussi traiter équita-blement et de manière intégrée les questions de distribution de l’eau et d’autres ressources, la santé des écosystèmes naturels et l’amélioration des moyens d’existence.

Sans eau, nous ne pourrons pas résoudre les problèmes de la pauvreté et de la maladie. Nous ne pourrons pas parvenir au développement durable ni conserver la biodiversité, préserver les habitats ni restaurer les écosystèmes.

Les objectifs de protection des sources d’eau et de sauve-garde des écosystèmes de notre planète sont indissociables. Nous devons les réaliser, tous les deux, sans plus tarder.

Yolanda Kakabadse est Présidente de l’UICN-Union mondiale pour la nature

ature hospitalièreYolanda Kakabadse

Les forêts de brouillard d’Amérique du Sud sont plus que des centres de biodiversité : elles captent l’humidité contenue dans le brouillard et génèrent d’importants volumes d’eau, même pendant les périodes de faible pluviosité.

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PRÉFACE

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L’eau, cet élément irremplaçable qui donne vie à notre planète, est devenu un véritable casse-tête.

Ici, il y en a trop ; là, trop peu. Ailleurs, elle est polluée ou inégalement répartie.

La gravité de ces problèmes est uni-versellement reconnue. L’attention de la communauté internationale s’est portée sur la gestion des ressources d’eau au Sommet mondial pour le développe-ment durable, au 3e Forum mondial de l’eau et c’est encore le cas en cette Année internationale de l’eau douce. Tout cela est révélateur des pressions croissantes qui s’exercent sur cette ressource, pen-dant si longtemps considérée comme allant de soi.

Cela indique aussi clairement que l’eau est intimement mêlée à toutes sor-tes de problèmes et d’intérêts. Des voix s’élèvent aujourd’hui, avec une passion justifiée, pour demander que l’on utilise cette ressource à des fins précises, par exemple pour fournir de l’eau salubre aux

e bilan hydrologique Achim Steiner

communautés rurales pauvres ou de l’eau d’irrigation pour la production agricole. Heureusement, une convergence d’opi-nions est clairement en train de se faire jour, à mesure que les différentes voix s’unissent pour demander des solutions globales, efficaces et rationnelles de ges-tion moderne des ressources d’eau.

L’approche par écosystème que l’UICN appuie vigoureusement – par exemple dans le cadre des travaux de l’Initiative pour l’eau et la nature dans 20 bassins hydrographiques – est large-ment acceptée comme une contribution précieuse à ce processus. Nous savons aujourd’hui que les forêts sont vitales pour l’approvisionnement en eau, que les mangroves offrent une protection contre l’élévation du niveau des mers et que les zones humides d’eau douce fournissent des millions de tonnes de poissons pour maintenir les moyens d’existence et l’économie. Pour les ges-tionnaires contemporains des ressources

INTRODUCTION

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d’eau, la protection de la nature va aujourd’hui de pair avec les canalisations et les pompes qui apportent l’eau dans les maisons et dans les champs.

Mais, en dépit de ces signes positifs, il reste encore des enjeux colossaux à affronter dont le moindre n’est pas la mise en pratique de cette convergence d’opinions.

La gestion des bassins hydrogra-phiques n’est pas simple, ne serait-ce qu’en raison de l’échelle même des bassins, de la diversité des possibilités de conservation et de développement, de la multitude d’acteurs impliqués et des interactions entre les nombreux élé-ments des écosystèmes. Il n’est pas non plus facile de trouver les capacités et les ressources indispensables et, même s’il y a des progrès, nous devons renforcer notre influence là où elle compte – dans le monde réel.

Naturellement, les réunions sont utiles car on peut y partager expériences et con-naissances sur les moyens d’améliorer la gestion de la ressource la plus précieuse de la Terre et des ressources qui en sont issues et lui sont associées.

Dans le présent numéro de Planète Conservation, consacré à l’eau, nous discutons de la voie à suivre. Nous re-latons certaines des contributions de notre Union, tant dans le débat que dans la pratique. Nous donnons la parole à des

personnes d’opinions différentes qui décrivent, à l’aide d’exemples précis, les nombreux aspects de la gestion des ressources d’eau et les progrès accomplis au quotidien.

Si la Déclaration ministérielle du 3e Forum mondial de l’eau est, pour beau-coup, un pas en arrière qui n’aura que très peu d’influence sur la gestion de l’eau, les articles qui suivent souhaitent partager des connaissances actuelles sur l’eau et les écosystèmes. Ils disent clairement que l’emphase ne doit pas uniquement porter sur l’eau mais sur toute la gamme des ressources d’eau et des services des écosystèmes aquatiques.

Mais surtout, ils apportent des idées sur les moyens de mieux tenir compte des liens entre la terre et l’eau, les éco-systèmes et l’homme, la conservation et les moyens d’existence.

J’espère que les idées proposées ici vous aideront à progresser et à mettre en œuvre notre vision dans les bassins hy-drographiques de la planète. C’est là où l’UICN et ses membres ont apporté leurs contributions les plus importantes. C’est là où, compte tenu de la dégradation ac-célérée des écosystèmes d’eau douce, nos contributions futures doivent se porter.

Achim Steiner est Directeur général de l’UICN – Union mondiale pour la nature.

www.iucn.org

L’Initiative de l’UICN pour l’eau et la nature est active dans 20 bassins hydrographiques du monde entier. Elle rassemble plus de 120 membres et partenaires de l’UICN dans un effort de démonstration de l’approche par écosystème en matière de gestion de l’eau – afin de redonner vie aux cours d’eau et de maintenir les ressources naturelles dont nous sommes si nombreux à dépendre.

www.iucn.org/themes/wetlands/

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L’EAU ET LES ÉCOSYSTÈMES

ne grande aventure : l’approche par écosystèmeHillary Masundire

E. O. Wilson, le père de la conserva-tion de la biodiversité, déclare dans The Future of Life : «L’interaction entre la biologie, l’économie et la diplomatie est une grande aventure d’un type nouveau.» C’est ainsi que je conçois l’approche par écosystème. C’est la possibilité d’inscrire, enfin, la conservation de la biodiversité dans le processus décisionnel local, na-tional et international, dans tous les secteurs – social, économique et envi-ronnemental.

L’approche par écosystème dans le delta de l’Okavango

À peine sortie de 30 ans de guerre ci-vile, l’Angola tente de reconstruire et de déminer son territoire ravagé. La remise en valeur agricole et touristique dépend de l’eau du fleuve Okavango. Or, les pays voisins, le Botswana et la Nami-bie, manquent d’eau. Ils avaient prévu d’utiliser l’eau du fleuve, loin du fleuve, mais leurs plans sont… tombés à l’eau

lorsque l’UICN en a démontré les inci-dences sur l’intégrité de l’écosystème du delta. Cependant l’histoire ne s’ar-rête pas là.

Le Botswana, avec l’aide de l’UICN et du Bureau Ramsar, prépare un Plan de gestion intégrée du delta de l’Okavango qui adopte l’approche par écosystème. Ce plan n’a cependant aucune chance d’aboutir s’il ne tient pas compte des activités prévues ou en cours en amont, en Angola et en Namibie.

Heureusement, le cadre institution-nel et la volonté politique nécessaires sont déjà là : en 1994, les trois pays, qui étaient déjà membres de la Commu-nauté d’Afrique australe pour le déve-loppement (SADC) et avaient ratifié le Protocole sur les cours d’eau partagés définissant les paramètres et la con-duite des États qui ont des cours d’eau en commun, ont créé la Commission permanente du bassin de l’Okavango (OKACOM). Cette situation difficile et

Lorsque «l’approche par écosys-tème» fut définie comme cadre de mise en œuvre de la Conven-

tion sur la diversité biologique (CDB) en 2000, l’idée prêta à quelque confusion. Ce n’était certes pas une idée nouvelle – nous connaissions déjà les concepts de «réser-ve de biosphère», «écorégion» et «gestion intégrée des bassins versants». Des écolo-gistes visionnaires avaient compris, dans les années 1960 déjà, que les écosystèmes ne se résumaient pas à la biodiversité lo-cale mais recouvraient une notion plus vaste, comprenant le milieu non vivant (l’eau, naturellement) et les interactions et impacts anthropiques.

Ce que la CDB a fait, c’est unifier l’action pour la biodiversité autour d’un concept organisateur central, un concept qui est (selon un récent rapport d’atelier) «global, souple, soucieux du contexte social, scientifique et respectueux des préférences, des traditions et de l’usage culturels».

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Le bassin de l’Okavango s’étend sur l’Angola, la Namibie et le Botswana. Le delta de l’Okavango est le plus grand site Ramsar du monde.

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Le Sommet de Johannesburg pour le développement durable (SMDD) a demandé une réduction impor-

tante de la perte de biodiversité avant 2010 et la gestion intégrée des ressources d’eau. Ces deux objectifs sont insépara-bles : la conservation de la biodiversité et la gestion de l’eau sont les deux faces de la même pièce. Tous deux sont essentiels à l’allégement de la pauvreté et tous deux ont besoin d’une gestion intégrée des écosystèmes. Quelques exemples :

1. Dans la province du Yunnan, en Chi-ne, une mauvaise gestion des forêts, en amont, a eu des répercussions sur tout le bassin versant. Le déboisement des pen-tes de montagne a provoqué une érosion grave, souvent un écoulement torrentiel et un dépôt épais de sédiments dans les rizières et les zones humides. Les inciden-ces économiques sur la petite agriculture sont exacerbées par un déclin du marché des produits forestiers tels que les cham-pignons et le bois d’œuvre.

Aujourd’hui, la Chine et les Pays-Bas collaborent avec la population locale pour améliorer la gestion des forêts et restaurer les fonctions des écosystèmes, y compris la fourniture fiable d’eau propre.

2. Les plaines d’inondation de Waza Logone, au nord du Cameroun

accueillaient les nomades autochtones qui menaient paître leurs troupeaux en période de sécheresse. Elles étaient aussi des frayères importantes pour les pois-sons dont de nombreuses communautés locales dépendent.

La plaine d’inondation du Logone a été fortement dégradée après la construction d’un barrage mal conçu qui a provoqué la disparition des crues annuelles. Pour les agriculteurs, les pêcheurs et les pas-teurs, tout comme pour la superbe faune sauvage, les incidences ont été considé-rables. Le célèbre Parc national du Waza Logone a perdu nombre de ses écosystè-mes les plus riches et les plus fertiles ; ses troupeaux spectaculaires d’antilopes ont pratiquement disparu. Et le barrage n’a même pas rempli ses objectifs d’origine, à savoir augmenter considérablement la riziculture irriguée.

En collaboration avec le gouverne-ment local et avec l’aide des Pays-Bas, l’UICN a réussi à restaurer les crues et certaines des fonctions de l’écosystème.

Dans tous ces exemples, l’approche par écosystème, qui tient compte de tous les processus écologiques, socio-écono-miques et institutionnels pertinents, s’est révélée être un bon mélange de conser-vation, partage équitable et utilisation

out l’écosystème Ton van der Zon

durable – du moins à l’échelle locale. Nous n’avons pas encore appris à agir dans l’intérêt des fonctions de l’écosys-tème mondial.

Le plateau des Guyanes est un des massifs géologiques les plus anciens de la Terre. Ses sols relativement pau-vres sont néanmoins couverts de forêts ombrophiles tropicales quasi vierges et abritent plus de 10% de l’eau douce de la planète. À l’échelle mondiale, la région agit comme régulateur du climat et de l’eau et conserve la biodiversité. Et pourtant, ses fonctions essentielles ont été compromises par un développement local non durable – exploitation non ré-glementée du bois et exploitation de l’or et de l’aluminium, par exemple.

C’est notre prochaine étape. Confor-mément à la Convention sur la diversité biologique, nous devons aider les pays en développement à gérer leurs écosystèmes et les récompenser des efforts qu’ils dé-ploient pour protéger des avantages que nous partageons tous.

Ton van der Zon est Chef du Département de la biodiversité et des forêts, ministère néerlandais

des Affaires étrangères.www.minbuza.nl/english

éventuellement explosive est prête pour l’approche par écosystème.

Certains craignent que la CDB ne s’éloigne trop des espèces qu’elle est censée protéger, moi j’y vois notre seule chance. Pour citer encore Wilson (The Di-versity of Life) : «…il sera impossible de sauver les biotopes si cet effort n’apporte pas d’avantages économiques immédiats à la population pauvre qui vit dans ces biotopes et à proximité.» C’est la raison pour laquelle nous avons fait de l’appro-che par écosystème l’axe central de tous les travaux de la Commission UICN de la gestion des écosystèmes (CGE) et du Programme de gestion des écosystèmes (PGE).

Hillary Masundire est Président de la Commission UICN de la gestion

des écosystèmes.www.iucn.org/themes/cem

Sur le fleuve Logone, un barrage mal conçu a fait tarir les crues annuelles, portant préjudice aux pasteurs, aux agriculteurs, aux pêcheurs et à la faune sauvage.

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L’EAU ET LES FORÊTS

estauration : une science inexacteDavid Lamb

exotiques à croissance rapide ou établir des plantations plus complexes avec un mélange d’espèces indigènes. De nom-breux bassins versants présentent des exemples de toutes ces méthodes.

Or, il est probable qu’avec ce reboise-ment le rendement global en eau dans les bassins versants reboisés diminue – du moins à court terme, pendant la période de croissance rapide des nouvelles fo-rêts. En effet, avec une surface foliaire augmentée, la couronne des nouveaux arbres intercepte davantage de pluie et transpire davantage.

Des gains incertains

Il est possible que le reboisement amélio-re les propriétés physiques du sol super-ficiel et augmente, de ce fait, l’infiltration d’eau de pluie dans la nappe souterraine, mais dans la plupart des cas, ces gains se-ront probablement inférieurs au nouveau taux d’évapotranspiration.

En outre, tous les types de reforesta-tion n’ont pas les mêmes effets. On ne sait pas très bien comment la plupart des espèces les plus communément plantées utilisent l’eau mais on peut présumer que des espèces à croissance rapide utilisent plus d’eau que des espèces à croissance lente. On peut aussi supposer que les incidences du reboisement sur le rende-ment en eau dépendent de la superficie reboisée du bassin versant. Nous avons cependant besoin de meilleures données scientifiques pour ajouter foi à l’une ou l’autre de ces hypothèses.

Cette incertitude pose un problème aux gestionnaires. Si la quantité d’eau est limi-tée, ils voudront appliquer une méthode à toute épreuve pour atténuer le plus possi-ble la réduction du rendement en eau ; s’ils plantent des arbres pour lutter contre la salinité en abaissant la nappe phréatique, ils voudront maximiser cette réduction.

Ces questions sont encore plus mal comprises par les décideurs politiques, dont certains prennent d’importantes décisions d’investissement en pensant que le reboisement améliore le rende-ment en eau.

Conclusion : dans bien des régions du monde, prévoir les approvisionnements en eau de l’avenir relève de l’incertitude la plus totale.

David Lamb est spécialiste en écologie forestière, School of Life Sciences,

Université du Queensland, Australie.www.life.sci.qut.edu.au/

Le déboisement a éliminé les arbres dans les

zones supérieures du bassin versant. Il réduit l’évapotranspiration et

favorise la remontée vers la surface des eaux souterraines salines. On

peut réduire la salinité en plantant des arbres en

amont afin d’augmenter l’évapotranspiration et

d’abaisser de nouveau la nappe phréatique.

On ignore si la plantation d’Araucaria (à gauche de la photo) absorbe plus d’eau

que la forêt ombrophile naturelle, à droite.

rLes études périodiques du cou-vert forestier mondial que réalise la FAO révèlent des changements

spectaculaires. Dans les régions tropica-les, le couvert forestier décline et l’on as-siste à la création de nouveaux paysages simplifiés. En revanche, dans les pays plus industrialisés, non tropicaux, le couvert forestier augmente généralement.

Les scientifiques connaissent bien les processus hydrologiques impliqués même si cette connaissance n’est pas nécessairement partagée par le public ou par les décideurs. En revanche, ils connaissent beaucoup moins bien les incidences collectives des changements qui se produisent dans de nombreux petits bassins versants sur l’approvi-sionnement régional en eau. En d’autres termes, les processus sont connus à pe-tite échelle mais on ignore comment ils se conjuguent lorsque des dizaines de petits bassins versants sont mis ensemble.

La restauration des forêts, tant dans les pays tropicaux que non tropicaux, suscite aujourd’hui beaucoup d’intérêt. Différen-tes méthodes sont possibles : encourager la régénération naturelle, avoir recours à de simples monocultures d’espèces

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Le saviez-vous…

Quarante-deux bassins versants ont aujourd’hui perdu plus de 75% de leur couvert forestier d’origine.

Le Yangtze et le Congo ont perdu plus d’un million de km2 de forêt chacun. (UICN/WRI, 2003)

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Planète Conservation 1/20038 Planète Conservation 1/2003 9

Les forêts montagnardes de brouillard sont vitales pour l’éco-nomie et les moyens d’existence des villes et communautés septentrionales de l’Amérique du Sud car elles fournissent de

l’eau douce non polluée à l’homme et à la nature. Situées entre 1500 et 3000 m d’altitude et entre les versants est et ouest des Andes, elles apportent un complément à la pluviosité en interceptant l’humidité dans les nuages – un service qui devient absolument vital durant la saison sèche.

Certaines forêts de brouillard des Andes septentrionales sont proté-gées pour les valeurs de leurs bassins versants mais beaucoup ne le sont pas et restent des îlots de forêts cernées par des terres agricoles et exploi-tées pour le bois de feu, le bois d’œuvre et les plantes médicinales.

Ces forêts sont aussi parmi les écosystèmes les plus divers du monde sur le plan biologique et présentent de hauts niveaux d’en-démisme localisé. De petites étendues, ne dépassant pas quelques dizaines d’hectares, peuvent abriter des espèces uniques.

La région est une des 200 écorégions prioritaires du WWF et un «point chaud» de la biodiversité défini par Conservation Interna-tional. Elle comprend de nombreuses réserves de la Catégorie I de gestion des aires protégées de l’UICN. Et malgré tout cela, les forêts continuent de perdre pied face à des pressions colossales et variées : colonisation, défrichement pour l’agriculture (y compris pour l’opium et la coca), construction de routes et d’oléoducs, transformation pour le pâturage, surpâturage par les moutons et les chèvres, prélèvement du bois de feu, production de charbon de bois, exploitation minière et surexploitation des produits forestiers.

Certains observateurs disent, en outre, qu’en raison du réchauf-fement planétaire, les bancs de nuages se forment en plus haute altitude, de sorte que la quantité d’humidité vitale que reçoit la forêt diminue. La déforestation et la fragmentation qui en résulteront pour-raient causer de grandes pertes – de biodiversité, de services écosysté-miques vitaux y compris la fourniture d’eau propre, et de possibilités économiques et de développement pour la population locale, dans une région déjà en proie à une pauvreté rurale chronique.

L’Initiative pour les forêts tropicales montagnardes de brouillard a été lancée en 1999 par l’UICN, le WWF, le WCMC-PNUE, le Comité néerlandais pour l’UICN et plusieurs autres partenaires. En 2002, Elle a commencé ses travaux sur un projet de maintien des fonc-tions uniques des bassins versants et de la biodiversité des forêts de brouillard des Andes septentrionales.

Le projet encouragera l’élaboration de stratégies de conservation des forêts de brouillard et le renforcement des aires protégées. Il mettra à l’essai, dans la pratique, de nouvelles approches de la con-servation telles que la rétribution des services environnementaux, la restauration des paysages forestiers et la gestion améliorée du bétail et supervisera la création du réseau et service d’information sur les forêts de brouillard andines. Il bénéficiera de l’appui technique de ses nombreux partenaires internationaux et sera mis en œuvre par des partenaires nationaux, dans chacun des cinq pays des Andes septentrionales – Venezuela, Colombie, Équateur, Pérou et Bolivie – ainsi que par le biais de mécanismes régionaux.

La clé de la réussite réside dans l’aptitude du projet à profiter d’un grand nombre d’initiatives et de partenariats existants dans la région ainsi que dans l’intérêt commun d’acteurs nombreux et variés qui dépendent tous des ressources et des services de ces écosystèmes remarquables.

Álvaro Luna Terrazas est Coordonnateur du Programme pour la conservation des forêts auprès du Bureau régional de l’UICN pour

l’Amérique du Sud (UICN-SUR). www.sur.iucn.org/

résors dans les nuagesÁlvaro Luna Terrazas

L’ours à lunettes des Andes est inféodé aux forêts de brouillard. Il est devenu l’emblème des efforts de conservation en Amérique du Sud.

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Les longues fleurs d'Aethantus mutissi sont pollinisées par le colibri porte-épée Ensifera ensifera.

La grenouille arlequin du Costa Rica est devenue rare depuis 10 ans.

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Planète Conservation 1/200310 Planète Conservation 1/2003 11

L’EAU ET L’AGRICULTURE

En construisant des barrages, en maîtrisant les crues, en drainant les zones humides et en pom-

pant l’eau souterraine pour la produc-tion agricole, les sociétés humaines ont radicalement modifié les écosystèmes d’eau douce.

Les rivières, les lacs et les marécages servent de voies de transport, de déver-soirs pour les eaux usées et de sources d’eau pour les besoins quotidiens de sorte que la plupart des eaux douces ac-cessibles de la Terre sont déjà accaparées par la population.

Compte tenu de la myriade d’utili-sations anthropiques de l’eau, la biodi-versité des écosystèmes d’eau douce est nettement plus menacée que celle des écosystèmes terrestres.

Actuellement, plus de 250 millions d’hectares sont irrigués dont près des trois quarts dans des pays en dévelop-pement (en particulier l’Inde, la Chine et le Pakistan). L’irrigation prélève environ 70% de l’eau douce utilisée par la popu-lation, notamment dans les pays à faible revenu où 87% de cette quantité sert à la production agricole. La diminution du débit des cours d’eau et la baisse des nappes phréatiques sont monnaie cou-rante dans les régions irriguées où les agriculteurs ne sont guère encouragés à ne pas surexploiter l’eau. Les transferts massifs d’eau et l’infrastructure qui les accompagne ont remodelé les régimes

limentation, eau et biodiversitéJeffrey A. McNeely

humides comme un mécanisme crucial pour répondre à la pénurie de terres agri-coles. Les zones officiellement protégées elles-mêmes sont parfois menacées. Ainsi, l’agriculture est considérée comme une cause principale de changement pour la moitié environ des zones humides inscri-tes au titre de la Convention de Ramsar. Environ un quart des sites Ramsar font l’objet d’une agriculture extensive et quelque 10% servent à l’aquaculture.

Le défrichement de la végétation na-turelle de grands bassins versants pour l’agriculture a eu des incidences hydro-logiques qui se sont traduites par une al-tération de l’infiltration des pluies dans le sol, l’accélération de l’érosion des sols et l’augmentation des risques d’inondation en aval. Tous ces changements modifient les habitats aquatiques et riverains, les sols et la biodiversité. La végétation na-turelle est généralement la mieux placée pour intercepter les pluies et ralentir les flux d’eau en surface pour que la pluie ait le temps de filtrer à travers le sol et de recharger les réserves d’eau locales.

L’agriculture n’en reste pas moins une activité principale de l’homme, qui assure notre alimentation et des systèmes de production agricole conçus avec plus de rigueur peuvent augmenter l’effica-cité hydrique, atténuer les effets négatifs sur les écosystèmes et la biodiversité et même, dans certains cas, enrichir la biodiversité.

Jeffrey A. McNeelly est Conseiller scientifique en chef de l’UICN-Union

mondiale pour la nature.

Des pompes irriguent les rizières du Viet Nam. L’agriculture irriguée prélève 70% de toute l’eau que nous consommons.

hydrologiques et créé des barrières à la migration des espèces.

En modifiant le flux naturel des cours d’eau on a bouleversé les communautés qui en dépendent, changé la température et la chimie de l’eau, perturbé la sédimen-tation et causé d’autres impacts nombreux sur la diversité biologique sauvage.

La plupart des pays développés ont pris des mesures pour limiter tout nou-veau drainage des zones humides et ont même entamé une certaine restauration des habitats des zones humides mais de nombreux pays en développement conti-nuent de voir la transformation des zones

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Irrigation dans le désert. Plus de 250 millions d’hectares de terres sont actuellement irrigués.

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Planète Conservation 1/200310 Planète Conservation 1/2003 11

Rebecca Tharme

Il ne fait aucun doute que l’agriculture exerce l’influence dominante sur la partie émergée

de la Terre. En effet, si 30% seulement du total est formé de mosaïques dominées par l’agriculture, il reste bien peu de régions qui ne soient pas touchées par des changements induits par l’agriculture.

Indiscutablement, la principale cause de disparition des zones humides est le drainage et la conversion à l’agriculture : la moitié des zones humides du monde a déjà été détruite – ce chiffre s’élève jusqu’à 60-70% en Europe. Prenons 17 000 sites importants, consacrés à la conservation de la biodiversité sauvage, y compris des zones humides : dans près de la moitié d’entre eux, 30% au moins des terres servent à l’agriculture et la plupart des autres jouxtent ou sont compris dans des terres agricoles. L’agri-culture est la menace la plus grave pour la biodiversité des zones humides : elle est responsable de 20% au moins des extinctions ou risques d’extinction de 10 000 espèces de poissons d’eau douce. Elle a probablement des incidences sur la moitié environ des 1267 zones humi-des actuellement inscrites sur la Liste de Ramsar des zones humides d’importance internationale.

En outre, dans presque toutes les régions agricoles du monde, la qualité de l’eau s’est détériorée en raison d’une concentration accrue de sels dissous, de solides en suspension, de pesticides, d’engrais et de déchets d’élevage, tous en mesure de dégrader les zones humides et d’empoisonner les espèces sauvages. Par exemple, dans les zones humides austra-liennes d’Ouray, un refuge national pour les espèces sauvages, le drainage, pour l’irrigation, d’eau souterraine polluée a entraîné la mortalité des oiseaux d’eau par bio-accumulation de sélénium.

Vue d’ensemble

Les efforts d’amélioration de la gestion des terres et des ressources d’eau, doi-vent être déployés à l’échelle du bassin versant tout entier. Il faut à la fois recou-rir à des stratégies d’éco-agriculture qui associent une production agricole accrue et la conservation de la biodiversité sau-vage, et à l’intégration des principes de conservation et d’utilisation rationnelle des zones humides dans la planification et l’aménagement du bassin.

Quelques avantages

L’agriculture irriguée peut créer des habitats de zones humides pour la biodiversité ou améliorer d’importantes ressources écologiques des zones humides. Les riziè-res, qui couvrent, dans le monde entier, 1,3 million de km2, fournissent la nourriture de base de plus de la moitié de la population du monde et hébergent une riche diversité biologique. L’étude d’un agro-écosystème rizicole de Sri Lanka a permis de recenser 494 espèces d’invertébrés et 103 espèces de vertébrés ainsi que 89 macrophytes. Les régions rizicoles du centre sud de la Louisiane accueillent des populations hivernantes de 225 000 oiseaux de rivage et autres oiseaux. Elles sont donc des sites de conservation d’importance critique aux États-Unis. Sur la photo : culture du riz dans des écosystèmes de zones humides semi-naturels, dans le sud de Sri Lanka.

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Il faut, en outre, attribuer suffisam-ment d’eau aux zones humides elles-mêmes pour maintenir ou restaurer leur structure et leur fonctionnement, ainsi que fournir de l’eau et d’autres biens et services à la population.

Mais avant tout, il faut reconnaître la juste valeur socio-économique des zones humides et, au-delà de la production alimentaire, tenir compte de la pêche et d’autres valeurs de la biodiversité natu-relle – celles-ci peuvent même justifier la reconversion de zones agricoles en habitats naturels.

Par exemple, dans le cas célèbre des zones humides de l’Hadejia-Nguru, au Nigéria, on estime que le revenu des projets d’irrigation existants et proposés dans la région ne compenserait pas plus

de 14% des pertes dues à la destruction des zones humides.

Aujourd’hui, grâce à de tels exemples, nous commençons à comprendre qu’il ne sera possible de garantir l’alimentation, les moyens d’existence et la sécurité en-vironnementale à long terme que par la gestion intégrée des ressources, basée sur une appréciation de la juste valeur de nos ressources naturelles, y compris l’eau et les zones humides.

La conservation de la biodiversité et la production agricole ont partie liée et il faut continuer de les gérer simultanément.

Rebecca Tharme est spécialiste en écologie des eaux douces, Institut international de

gestion des ressources en eau.http://www.iwmi.cgiar.org/

uste valeur

Page 12: Bulletin UICN Planète Conservation...sur la gestion des ressources d’eau au Sommet mondial pour le développe-ment durable, au 3e Forum mondial de l’eau et c’est encore le cas

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L’EAU ET LES AIRES PROTÉGÉES

À une heure de route de Manhat-tan, en direction du nord, la forêt est si dense que l’on pourrait se

croire à des milliers de kilomètres de la métropole. Comment peut-il encore y avoir des forêts sur certaines des terres les plus convoitées de l’Amérique?

Il y a quelques décennies, le Conseil de la ville de New York a calculé qu’il serait plus avantageux d’épurer l’eau potable en la drainant à travers des bassins versants boisés que de construire une nouvelle usine de traitement des eaux. Sans con-testation aucune, contrairement à ce qui se passe pour la conservation de la faune et de la flore sauvages, les forêts ont été protégées et les New Yorkais ont une eau potable de qualité exceptionnelle.

Il devient de plus en plus difficile de justifier la création d’aires protégées uni-quement pour la biodiversité et pourtant, les organisations de conservation ne par-lent généralement de rien d’autre que de cela. Un habitat sauvage protégé, s’il est bien placé et bien géré, apporte des avan-tages nombreux et divers : gestion des sols et de l’eau, atténuation des changements climatiques, sauvegarde de ressources culturelles et immenses possibilités pour le tourisme – qui est peut-être aujourd’hui la plus grande industrie du monde.

Les liens entre les aires protégées et l’eau restent controversés. Les hydrolo-gues sont partagés à ce sujet et les hypo-thèses selon lesquelles les forêts augmen-tent le volume total d’eau et atténuent les inondations ont toutes deux été critiquées. Aujourd’hui, il existe un consensus fra-gile : les forêts, à l’exception des forêts de brouillard, n’ont guère d’incidences sur la quantité d’eau mais elles améliorent, de manière substantielle, la pureté de l’eau – une conclusion qui a des conséquences énormes pour la santé et l’économie.

En fait, la querelle scientifique est généralement ignorée par ceux qui distribuent l’eau douce à la population et qui, pour la plupart, présument que la protection des forêts sur les bassins versants est une bonne assurance. Nos travaux de recherche suggèrent qu’un quart à un tiers des plus grandes villes du monde – par exemple, Melbourne, Bo-gota, Singapour, Johannesburg, Bombay, Budapest et Rio de Janeiro – prennent une partie ou toute leur eau potable dans des bassins versants couverts de forêts.

Et de nombreuses villes plus petites en font autant : ainsi la moitié de l’eau

a protection : ses autres avantagesNigel Dudley

potable de Porto Rico provient de la der-nière grande région de forêt tropicale de l’île. Beaucoup de ces forêts se trouvent dans des aires officiellement protégées dans une catégorie de gestion définie par l’UICN.

Il semble que les gens soient de plus en plus prêts à payer pour ces services. Au Costa Rica, une micro-entreprise de production hydroélectrique qui payait les agriculteurs pour qu’ils maintiennent le bassin versant boisé, justifie le minus-cule pourcentage concerné de son chiffre d’affaires par le contrôle des risques, même si rien ne «prouve» que la disparition des forêts réduirait la quantité d’eau. Au Gua-temala, le WWF et Pepsi Cola collaborent à un projet de conservation des forêts parce que l’entreprise a besoin d’eau douce pour préparer ses boissons. Au Viet Nam, le gou-vernement envisage le paiement des servi-ces écologiques des aires protégées.

Il est risqué de gager la survie du réseau mondial d’aires protégées unique-ment sur l’importance des espèces sauva-ges. Déterminer les autres avantages de ces aires protégées peut fournir la masse critique nécessaire à leur survie.

Nigel Dudley a collaboré avec Sue Stolton, Rachel Asante-Owusu et Larry

Hamilton à une étude des liens entre l’eau et les aires protégées pour la

Banque mondiale. Leur rapport sera présenté à l’occasion du Ve Congrès

mondial sur les parcs de l’UICN.www.iucn.org/themes/wcpa

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L’eau potable qui alimente la ville de New York provient de forêts situées au nord de la métropole.

Melbourne, Australie. Une bonne partie de l’eau de la ville provient de forêts protégées.

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Les habitats sauvages protégés sont une énorme ressource pour le tourisme qui est peut-être aujourd’hui la plus grande industrie du monde.

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Le saviez-vous…

Moins de 5% de la superficie de 82 des 114 bassins versants étudiés dans le monde est protégé au niveau national. (Revenga, 1998)

Le bassin de l’Amazone comprend 16 grandes villes, 9 grands barrages, 7 aires protégées d’eau douce (sites Ramsar) et 24 zones pour les oiseaux endémiques. (UICN/WRI, 2003)

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Planète Conservation 1/200312 Planète Conservation 1/2003 13

Il n’y a pas très longtemps, les aires protégées d’Andalousie étaient encore gérées au mépris

des processus écologiques, des activités et de l’exploitation qui avaient lieu en dehors de leurs limites. Mais les temps ont changé, de même que l’attitude et les règles : les aires protégées doivent aujourd’hui être replacées dans leur contexte environnemental, économique et social le plus large.

Cette approche à l’échelle de tout l’écosystème est particulièrement perti-nente pour les aires protégées liées à des habitats riverains. En effet, l’exploitation et/ou l’abus des ressources d’eau, où que ce soit dans le bassin hydrographique, peuvent entraîner l’effondrement d’éco-systèmes entiers, comme en témoigne l’histoire du Parc national de Doñana et des parcs naturels du sud-ouest de l’Espa-gne (le parc national est la zone centrale et le parc naturel la zone tampon).

En 1998, dans la Région autonome d’Andalousie, un bassin de résidus mi-niers stériles explosa. La mine se trouvait à plus de 40 km en amont de Doñana, mais la pollution affecta une partie des marais du parc naturel et faillit souiller une plus vaste région comprenant les marais et l’estuaire du parc national.

En tout, les boues et l’acide polluèrent 55,6 km de lit fluvial et 4900 hectares de berges et de terres adjacentes. Les inci-dences négatives furent économiques et

ndalousie : le contexteFernando Molina

nord et le littoral de Doñana, au sud. Le projet de corridor vert du Guadiamar fut donc créé, au-delà de la restauration des fonctions et de l’équilibre dynamique du bassin hydrologique, pour tenter d’amé-liorer le niveau de vie des habitants du bassin.

Le projet s’articule autour de quatre axes : 1) surveillance, contrôle et lutte contre la pollution ; 2) création d’un corridor écologique qui puisse servir de refuge pour les espèces sauvages, relier différents habitats et diversifier le paysage ; 3) restauration de l’intégrité écologique du bassin et 4) intégration des systèmes naturels et humains.

La protection des zones humides an-dalouses est aujourd’hui inscrite dans le premier document de planification de ce type préparé par une région es-pagnole, le Plan pour les zones humides andalouses.

Conçu comme chapitre sectoriel du plan directeur du Réseau andalou d’aires protégées naturelles, ce document vi-sionnaire fait sienne la leçon principale du projet du Guadiamar : que l’intégrité écologique d’un territoire ne saurait être séparée des fonctions sociales, éco-nomiques, historiques et culturelles de ses ressources naturelles.

Fernando Molina est Chef du Service de coordination et de

gestion du Réseau andalou d’aires protégées naturelles ; il était

précédemment Chef du Bureau technique du Corridor vert du

Guadiamar.

En 1998, un déversement de résidus miniers a gravement pollué les marais du Parc naturel de Doñana.

sociales aussi bien qu’écologiques. Les poisons répandus sur des terres agrico-les fertiles ne laissèrent derrière eux que chômage et bouleversements sociaux.

Le choc fut salutaire pour les pou-voirs publics qui décidèrent de modifier leur approche de la conservation et du développement durable en Andalousie. C’est ainsi que fut conçu le projet de restauration fonctionnelle du fleuve Guadiamar.

Ce fleuve est à la fois un corridor écologique et un moteur du dévelop-pement économique et social entre les aires protégées de moyenne altitude, au

Les boues et la pollution acide ont recouvert des terres agricoles fertiles, avec de graves conséquences économiques pour les populations locales.

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L’EAU ET LE DROIT

Faute de lois et d’institutions effi-caces, tout est voué à l’échec. La «bonne gouvernance» est donc

essentielle à tous les niveaux si nous voulons remplir les Objectifs de déve-loppement du millénaire. Le profond fossé qui sépare le discours mondial des réalités doit être comblé de toute urgence.

Ce n’est pas un exercice théorique. Cela suppose l’application de principes convenus. Cela signifie qu’il faut se frayer un chemin à travers des négociations difficiles et faire des compromis. Cela nécessite une sensibilité aux circons-tances locales, à la politique locale et une compréhension des valeurs com-munautaires locales.

Il n’existe pas de législation modèle ni d’institutions modèles. Et il n’y a pas d’autre solution que de déployer des efforts opiniâtres, pays par pays, bassin par bassin.

responsabilités, l’obligation d’ouverture et de transparence et prévoir les pouvoirs de lever et de dépenser des fonds.

Les eaux internationales ont fait l’objet de moult débats théoriques et politiques et, au fil des ans, de nombreux instruments ont été rédigés. Les princi-pes sont clairs : moins de débats sur les principes sous-jacents et plus d’efforts consacrés à la mise en œuvre pratique de ces principes. Souvent, cela nécessite des négociations difficiles mais celles-ci ne peuvent être évitées et l’ensemble des communautés du bassin versant doit y participer activement. Il n’y a pas d’échappatoire.

Protéger l’intérêt public

Nous sommes actuellement témoins d’un changement de rôle des gouverne-ments vis-à-vis des services et de la ges-tion des ressources et d’un recours plus fréquent aux instruments économiques pour gérer l’eau. Cela ne veut pas dire que l’influence des pouvoirs publics di-minue. Au contraire, dans de nombreux cas, leur rôle est amplifié, notamment lorsqu’il s’agit d’élaborer et d’appliquer efficacement un cadre juridique solide qui protège réellement l’intérêt public.

Il incombe aux gouvernements et aux parlements de déterminer et de protéger correctement l’intérêt public et les ca-dres juridiques doivent clairement tenir compte de l’équité, de la durabilité, de la transparence, de la participation et de la responsabilité.

On ne saurait considérer l’importance de cadres juridiques musclés indépen-damment de la nécessité de renforcer la capacité intérieure de mise en œuvre et d’application efficace de ces cadres. Il faut réagir, aujourd’hui, aux problèmes critiques du développement tout en construisant systématiquement la capa-cité pour l’avenir.

Lorsque la capacité est déjà limitée, il faut faire en sorte que nul ne soit in-dûment lésé et peut-être concevoir ou fournir des moyens novateurs de renfor-cement ciblé des capacités afin de garan-tir que les positions de négociation soient aussi justes et équitables que possible.

John Scanlon est Chef du Programme de l’UICN pour le droit de l’environnement

et ancien Commissaire de la Commission du bassin Murray-Darling.www.iucn.org/themes/law

Des experts de Hue expliquent les incidences d’une intrusion d’eau salée à la population locale de la rivière Huong (rivière aux Parfums).

ous avons besoin de cadres juridiques musclésJohn Scanlonn

Pour moi, les rivières sont notre «mère», notre sang – d’une manière ou d’une autre, elles nous unissent, où que nous vivions – par l’histoire, l’expérience, la nécessité et souvent le conflit.

– Leith Boully

Des rôles et des responsabilités clairs

La décentralisation et la délégation de l’autorité doivent s’inscrire dans un cadre législatif clair. Les organisations communautaires des bassins versants ne peuvent, en effet, fonctionner sans les pouvoirs et l’appui financier né-cessaires. Les cadres législatifs doivent énoncer, sans ambiguïté, les rôles et les

Le saviez-vous...

En 1995, environ 41% de la population mondiale, soit 2,3 milliards de personnes, vivaient dans des bassins hydrographiques qui souffraient d’un stress hydrique. (Revenga,1998)

Entre 1900 et 1995, l’exploitation de l’eau par l’homme a été multipliée par plus de six, ce qui correspond à plus de deux fois le taux de croissance démographique. (OMM, 1997)

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La Convention de Ramsar sur les zones humides (1971) est un des tout premiers traités mondiaux de la conservation et le seul traité en vigueur qui s’intéresse aux ressour-ces d’eau.

Nb de Parties (1er mai 2003) : 136Nb de sites : 1267Superficie totale : 107 473 745 ha

L’UICN est rapidement passée des débats intellectuels sur la politique de l’eau du 3e Forum

mondial de l’eau, à Kyoto, à la mise en pratique de la politique dans la province de Thua Thien Hue, au Viet Nam.

Le 27 mars, un atelier était consacré aux organismes chargés de la gestion de bassins hydrographiques (OBH) à Hue, dans le cadre du Projet de gestion inté-grée du bassin Huong de l’Initiative WANI sous la houlette d’UICN-Viet Nam. Le but de l’atelier était d’examiner les possibi-lités d’établissement d’un OBH pour le bassin de la rivière Huong. L’atelier était présidé par le Président Me, Président du Comité populaire de la province de Thua Thien Hue, ainsi que par M. Nguyen Minh Thong, Représentant national de l’UICN au Viet Nam.

À l’issue d’une semaine de réunions avec des fonctionnaires et experts locaux, le Chef du Programme de l’UICN pour le droit de l’environnement a fait un exposé détaillé sur les OBH pour aider à l’examen des solutions possibles pour le bassin de la rivière Huong.

L’exposé comprenait une vue d’en-semble des OBH établis dans plus de 10 pays, tant au niveau sous-national que transnational et décrivait l’évolution de nombreux OBH, tels que la Commission du bassin Murray-Darling (Australie) active depuis 85 ans, ainsi que leurs pro-grès au fil du temps. Le concept d’OBH a été appliqué avec succès dans le monde entier mais ces organismes ne sont pas rigoureusement identiques en raison de structures administratives de l’État, de traditions culturelles et politiques diffé-rentes, de la nature de la demande et de l’offre d’eau et des qualités physiques de chaque bassin.

En conséquence, il n’y a pas d’OBH modèle, seulement quelques bons prin-cipes. Tout comme il n’y a pas d’OBH «parfait», seulement le meilleur possi-ble, dans le contexte politique, social, économique et environnemental actuel. Les principes sous-jacents sont connus et doivent être appliqués localement en s’inspirant des leçons d’expériences comparatives, si nécessaire et s’il y a lieu.

Cinq critères clés du bon fonction-nement d’un OBH ont été déterminés

es principes à la pratique : étude de cas vietnamienneMegan Dyson

durant cet atelier. Le premier va de soi : un bon OBH s’inscrit dans la réalité des conditions existantes – en d’autres ter-mes, il ne faut pas essayer d’appliquer rigoureusement le modèle de quelqu’un d’autre.

Autres critères clés : un cadre insti-tutionnel et juridique stable, une base de connaissances solide, l’intégration entre toutes les questions relatives aux ressources naturelles, la sensibilisation et la participation active de la commu-nauté. Beaucoup d’autres questions ont été abordées à l’intérieur de ces domaines généraux.

En s’inspirant de principes internatio-naux convenus et de l’expérience acquise dans d’autres régions du monde, on a pu déterminer ce qui serait le meilleur ré-sultat pour le bassin de la rivière Huong, dans le contexte des lois et de la situation locales.

Megan Dyson est Présidente du Groupe de spécialistes de

l’eau et des zones humides de la Commission UICN du droit de

l’environnement et consultante en droit et politique de

l’environnement, Australie.

ous avons besoin de cadres juridiques musclésJohn Scanlon d

http://www.ramsar.org

Aquaculture de crevettes au bord d’une des lagunes de la rivière Huong (aux Parfums).

www.iucn.org/themes/law

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CARTE DE LA RARETÉ DE L’EAU

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Rareté environnementale de l’eauPlus de 1,4 milliard de personnes vivent dans des bassins hydrographiques où le niveau élevé du stress hydrique menace l’environnement, preuve que nous soustrayons un trop grand volume d’eau de nos cours d’eau, rivières et lacs. La «Carte mondiale de la rareté environnementale de l’eau» est la première tentative faite pour examiner les besoins des écosystèmes d’eau douce à l’échelle mondiale. On peut y voir les régions où le détournement de l’eau a des incidences sur les écosystèmes d’eau douce en aval – l’ampleur de cette incidence. La carte permet aux chercheurs d’examiner les compromis entre l’agriculture et l’environnement. Elle est le fruit d’une étude conjointe de l’Institut inter-national de gestion des ressources en eau (IWMI), du World Resources Institute (WRI), du Center for Envi-ronmental Systems Research de l’université de Kassel et de l’UICN-Union mondiale pour la nature.

www.iucn.org/themes/wetlands/

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L’EAU ET LE SECTEUR PRIVÉ

de produits. Et le fait d’ailleurs déjà en produisant de l’eau en bouteille en grandes quantités.

Mais l’efficacité à elle seule ne justifie pas que l’on mette cette ressource dans les mains d’un organisme privé à moins que celui-ci ne soit prêt à assumer une obligation de service universel et à ga-rantir la satisfaction de tous les besoins de base de manière transparente, respon-sable et permanente.

Ce qu’il faut, c’est instaurer une nouvelle sorte de partenariat public-privé, beaucoup plus complexe que les solutions simplistes mises à ce jour sur le tapis – essentiellement par ceux qui y ont intérêt.

Conscient de l’importance d’associer le secteur privé à leurs délibérations, les organisateurs du 2e Forum mondial de l’eau (FME2) en 2000, ont mis sur pied une table ronde de chefs de 11 grandes entreprises qui participent à la gestion de l’eau. Au récent FME3, les chefs d’en-treprises ont déclaré que «l’eau occupe une place centrale dans la protection de l’environnement mondial, la promotion du progrès social et l’encouragement à la croissance économique» et ont présenté plusieurs projets relatifs à l’eau.

Naturellement, leurs déclarations se heurtent à un certain scepticisme dans les communautés de l’environnement et du développement où l’on considère qu’elles masquent les objectifs réels du secteur privé, à savoir : déréglementer le secteur de l’eau et traiter l’eau comme un bien économique soumis aux lois de l’offre et de la demande et du profit plutôt que comme un droit de l’homme et une nécessité environnementale.

Si les chefs d’entreprises, par les ac-tions de leurs entreprises, prouvent que le secteur privé sait se montrer écologi-quement et socialement responsable en ce qui concerne la ressource naturelle ul-time, et s’ils sont prêts à s’engager à long terme, le partenariat nécessaire pourrait devenir réalité.

Changer la politique des entreprises est une chose, mettre en pratique une approche socialement équitable et tenant compte des écosystèmes pour la gestion de l’eau en est une autre.

Ashok Khosla, fondateur et Directeur de Development Alternatives Group, est un ancien Conseiller régional de l’UICN.

http://devalt.org/

eau est l’affaire de tousAshok Khosla

Faut-il, pour réveiller notre cons-cience collective, voir à la télé des images de civils, dans des pays

en guerre, brandissant des poignées de billets dans l’espoir d’acheter un bidon d’eau pour leurs enfants déshydratés? Combien d’entre nous se rappellent que nous livrons une autre guerre depuis longtemps déjà – une guerre contre la pauvreté chronique, la maladie, la faim et la soif dans tout le tiers monde? Une guerre dont on ne voit pas la fin, une guerre que personne ne semble gagner – ni même vouloir gagner.

L’eau, et en particulier l’eau potable, doit être vue comme un droit fonda-mental de l’être humain. À ce titre, il est indubitablement du devoir des

gouvernements (tant locaux que natio-naux) de satisfaire les besoins de base de chacun et de chacune.

Comme les systèmes publics ne sont pas toujours efficaces, les économistes et les décideurs sont de plus en plus enclins à confier la distribution de l’eau à des entreprises privées. Le problème c’est que les entreprises privées ont d’abord et avant tout pour objectif de faire des bénéfices. En général, elles se préoccu-pent peu des droits de l’individu ou de la nécessité d’assurer une distribution équitable de leurs produits.

De toute évidence, la distribution de l’eau est une affaire lucrative et le secteur privé est tout à fait prêt à ajou-ter cette ressource vitale à sa gamme

L’eau est-elle un bien comme les autres qu’il faut tarifer selon les lois de l’offre et de la demande?

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Planète Conservation 1/200318 Planète Conservation 1/2003 19

Le 3e Forum mondial de l’eau, à Kyoto, s’est fait remarquer par les mouvements de protestation

organisés contre le rôle du secteur privé dans la gestion de l’eau. Si l’on pense que la part du secteur privé représente moins de 5% du marché mondial de l’eau, cela ne manque pas d’ironie. Sans compter que remplir les objectifs du millénaire concernant l’accès à l’eau salubre et à l’assainissement nécessitera des ressour-ces considérables et une réflexion nova-trice de tous les secteurs de la société, y compris le secteur privé.

Beaucoup confondent partenariat public-privé (PPP) avec la privatisation pure et simple de l’eau, y compris avec la propriété des biens. En fait, le PPP repré-sente différentes formes de partenariats, notamment les contrats de services, les contrats de gestion, les contrats de lo-cation, les contrats de construction-ex-ploitation-propriété ou contruction-exploitation-transfert et les contrats de concession, avec la privatisation totale au bout du spectre.

Le secteur privé peut jouer un rôle im-portant – dans le cadre de partenariats solides avec le secteur public – si on le lui demande. Les gouvernements nationaux et locaux devraient avoir liberté absolue de décider de la participation du secteur privé.

La participation du secteur privé peut énormément contribuer à satisfaire les besoins d’une communauté en eau et en assainissement à un prix juste et raison-nable. Le partage des risques, la garantie de l’investissement, la fourniture d’une expérience de gestion et la possibilité d’obtenir des ressources scientifiques et techniques sont les forces du secteur privé. Sans cadres institutionnels régle-mentaires et financiers solides ces forces sont toutefois compromises et la création de ces cadres nécessite une approche plurisectorielle et le renforcement des capacités. Il faut, certes, que les com-munautés locales participent mais de nombreux problèmes de l’eau doivent être résolus à plus grande échelle.

Thames Water travaille depuis long-temps en partenariat avec des organes réglementaires, des ONG et des collecti-vités locales, dans l’intérêt de l’environ-nement. Thames Water s’est notamment

concentré sur la création de zones humi-des et sur leur biodiversité, et pour cela a reçu de nombreux prix.

Le joyau de sa couronne est la Réserve de zone humide de Barnes, au sud-ouest de Londres. Créée parce qu’un complexe de quatre réservoirs de stockage était devenu superflu, c’est un exemple qui illustre à la perfection comment le sec-teur privé peut produire des avantages pour la société et pour l’environnement. Thames a vendu une fraction du com-plexe à un promoteur immobilier privé afin de financer la création d’une réserve naturelle de 40 ha gérée par le Wildfowl and Wetlands Trust.

Depuis quatre ans, près de 200 espè-ces d’oiseaux fréquentent le site et Barnes abrite plusieurs espèces en danger ainsi que des mammifères menacés tels que le campagnol aquatique. La Réserve de zone humide de Barnes est la plus grande réserve de zone humide artifi-cielle urbaine d’Europe à quelques pas du centre de Londres!

Peter B. Spillett est Chef du Département environnement, qualité et durabilité,

Thames Water. www.thames-water.com/

awww.iucn.org/themes/business

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La réserve abrite des mammifères menacés tels que le campagnol aquatique Arvicola terrestris.

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La Réserve de zone humide de Barnes est une réserve naturelle de 40 ha créée par Thames Water et gérée par le Wildfowl and Wetlands Trust.

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Le tadorne de Belon Tadorna tadorna est

un des nombreux oiseaux d’eau qui ont

trouvé refuge dans le grand Londres

grâce à un partenariat entre Thames Water,

Berkeley Homes et le Wildfowl and Wetlands Trust.

ppel à tous les secteurs!Peter B. Spillett

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L’EAU ET L’ÉCONOMIE

L’eau est précieuse – vitale – mais pour la plupart des usagers elle est gratuite ou presque. Pire encore,

ceux qui gèrent les terres où sont régu-lés les flux hydrologiques ne reçoivent aucune compensation pour les services de l’eau que génèrent leurs terres. La couverture végétale et les pratiques de gestion ont une influence sur l’infiltration, l’écoulement et le taux d’évapotranspira-tion et, partant, sur la quantité, la qualité et la périodicité des flux d’eau. Pourtant, les utilisateurs des terres n’ont aucune incitation à prendre ces effets en compte lorsqu’ils choisissent les modes d’occupa-tion de leurs terres. Résultat, ces services si précieux sont souvent perdus.

Le «paiement pour les services de l’environnement» (PSE) est une solution au problème : il s’agit de payer, aux utili-sateurs des terres, les services environne-mentaux qu’ils génèrent et d’aligner ainsi leurs incitations sur celles de la société dans son ensemble.

Les principes fondamentaux du PSE sont les suivants : qui fournit des servi-ces environnementaux reçoit compen-sation et qui reçoit ces services les paye.

Plusieurs pays font l’expérience de tels systèmes, beaucoup avec l’aide de la Banque mondiale.

La théorie est simple et convaincante, mais la pratique n’est pas facile. Il faut, en premier lieu, identifier clairement les services recherchés. Les réseaux de distribution d’eau à usage domestique nécessitent un flux constant et une qua-lité élevée tandis que les producteurs d’énergie hydroélectrique à partir de réservoirs mettent généralement l’ac-cent sur le volume total et font peu de cas de la qualité de l’eau sauf en ce qui concerne la sédimentation qu’il faut em-pêcher. Il importe ensuite de comprendre la relation entre ces services et les besoins d’utilisation des terres en amont. Tant du point de vue quantitatif que qualitatif, nous savons souvent moins de choses que nous ne le pensons sur les incidences des utilisations des terres sur les services de l’eau.

Il faut alors trouver un moyen d’uti-liser une partie de la volonté de l’usa-ger de payer pour le service concerné. Par exemple, la ville d’Heredia, au Costa Rica, facture un droit sur l’eau

«écologiquement ajusté». Les usagers sont souvent réfractaires au paiement de tels droits mais la contrepartie est la perte ou la dégradation de leurs services d’eau – qui sont généralement beaucoup plus coûteuses que le montant du droit.

L’argent collecté doit alors parvenir aux utilisateurs des terres afin de les in-citer à utiliser correctement leurs terres. Le paiement doit, de préférence, être continu et non limité car l’effet d’inci-tation ne dure pas plus longtemps que le paiement et nous avons vu maintes et maintes fois que des projets uniques et à court terme ne peuvent résoudre ces problèmes.

Enfin, pour que tout fonctionne, il faut créer des institutions d’appui, no-tamment des organismes chargés de la collecte des droits demandés pour les services aux usagers et du paiement aux fournisseurs de services et établir des «règles du jeu» claires – par exemple des droits de propriété bien définis.

Stefano Pagiola est économiste principal pour l’environnement au Département de l’environnement de la Banque mondiale.

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ayer pour les services de l’eauStefano Pagiola

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On sait que les services écosys-témiques des bassins versants jouent un rôle fondamental dans

la chaîne d’approvisionnement en eau et pourtant, les planificateurs et les respon-sables du développement oublient cons-tamment de tenir compte de leurs valeurs réelles. L’utilisation et l’attribution sous-optimales des ressources d’eau qui en résultent ont des répercussions sociales, économiques et environnementales. Le bon sens économique plaide en faveur de l’investissement dans les écosystèmes naturels qui sous-tendent l’approvision-nement en eau. L’introduction d’instru-ments économiques pour garantir que les propriétaires des terres reçoivent une compensation pour le maintien des écosystèmes naturels est une innovation qui va dans ce sens.

Le Parc naturel du mont Kanla-On est une des 10 aires protégées prioritai-res des Philippines. Situé dans l’ouest du pays, il couvre environ 24 500 ha et culmine à 2435 m. Sa forêt ombrophile montagnarde dense fait place, en haute

ont Kanla-On : ceux qui paient le prix

Rina Rosales

altitude, à une forêt naine. La flore et la faune diverses sont, en majeure partie, classées menacées, en danger ou en danger critique d’extinction.

Dans le parc, se trouve le bassin versant du Bago qui couvre 75% de la superficie totale du parc.

Autour, 3000 familles revendiquent des droits de propriété sur le parc. L’ex-ploitation des produits forestiers non ligneux et les activités de coupe du bois menacent le bassin versant qui alimente en eau une région de quelque 158 500 ha en aval – environ 27% de toutes les terres transférables et disponibles de l’ensem-ble de la province du Negros Occidental – et plusieurs entreprises commerciales, y compris une grande usine de condi-tionnement d’eau minérale dirigée par SMC-Viva, juste en dehors des limites du parc.

Pour sauvegarder ces ressources d’eau, il faudra mettre en place un mécanisme qui encourage les communautés vivant en amont à adopter des pratiques d’uti-lisation des terres plus écologiques.

Le Conseil de gestion du parc, com-posé de représentants gouvernementaux et non gouvernementaux, a proposé une solution. Dans le cadre de la Loi de 1992 sur le réseau national intégré des aires protégées, le Conseil pourrait imposer des droits aux usagers consommateurs et non consommateurs des ressources naturelles du parc.

Une évaluation économique basée sur le concept de la «rente» (c’est-à-dire la valeur des ressources naturelles non payée qui est répercutée dans les super-bénéfices) a déterminé que SMC-Viva pourrait, à juste titre, payer l’équivalent de USD 4000-18 000 par an en droits de protection du bassin versant. Cette somme serait une source de financement extraordinaire pour les programmes et projets du parc et permettrait de verser une compensation aux résidents pour tous «les coûts de substitution» résultant de changements d’utilisation des terres au profit des objectifs de conservation.

Ce cas est typique de tous les bassins versants du monde où des bénéficiaires qui vivent de la protection du bassin ver-sant en aval, profitent des avantages pour un coût fortement sous-évalué tandis que les communautés pauvres, qui vivent en amont, paient le véritable prix. Espérons que le mont Kanla-On deviendra bientôt un exemple de l’utilisation de paiements pour les services de protection de bassins versants afin de compenser les fournis-seurs de services environnementaux.

Rina Maria P. Rosales est Coordonnatrice,

Programme régional UICN d’économie de l’environnement, Asie.

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Valeurs intangibles : des pèlerins philippins se baignent dans les cascades de la montagne de Banahaw dont l’eau est considérée sacrée.

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Deux vues du mont Kanla-On : le pic de Makawiwili (en haut) et la lagune de Samoc.

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Planète Conservation 1/200322 Planète Conservation 1/2003 23

L’EAU ET LES COMMUNAUTÉS

Les participants au 2e Forum mondial de l’eau (FME2) en 2000, ont reconnu que le secteur

de l’eau est un secteur essentiellement technologique, qui privilégie les solutions techniques. Généralement, le contexte social de l’utilisation des ressources et en particulier, le rôle différent des hommes et des femmes, des communautés pau-vres et riches, des cultures minoritaires et majoritaires est resté ignoré.

En outre, ce secteur n’a jamais su valoriser ou même reconnaître les con-tributions des femmes à la gestion, aux connaissances et à l’utilisation de l’eau et d’autres ressources naturelles. Résultat de cette discrimination et de cette négli-gence, les femmes sont impuissantes et n’ont aucun accès aux ressources, au crédit et aux marchés.

Le secteur agricole est un bon exem-ple. La gestion de l’eau à usage agricole est généralement insuffisante et portée au gaspillage, contribuant à la dégradation de l’environnement. Les grand projets de

ourant inévitable : la parité dans le secteur de l’eauLorena Aguilar

Les organismes publics et les distribu-teurs de l’eau doivent rendre compte de leurs services aux chefs de famille, masculins et féminins.

Plus d’excuses

Il y a eu quelques progrès, mais c’est en-core loin d’être suffisant. Nous n’avons pas réussi à traduire les notions théori-ques de parité en actions et en change-ments mesurables.

Le Sommet des Nations Unies du Millénaire en 2000 et le Sommet mon-dial pour le développement durable en 2002 ont lancé au 21e siècle un défi et lui ont fait une promesse – diminuer de moitié, d’ici 2015, la proportion de per-sonnes sans accès à l’assainissement et diminuer aussi de moitié la proportion de personnes qui ne peuvent obtenir ou se procurer de l’eau potable salubre. La réalisation de cette promesse dépendra en partie de la manière dont nous aurons donné aux femmes les moyens de gérer et de bénéficier des ressources d’eau de leurs communautés.

Il faut cesser de considérer la parité comme une question émergente. Il y a déjà eu trop de compromis et trop de re-tards. L’heure est venue de tenir nos enga-gements par l’action et le changement.

Lorena Aguilar est Conseillère spéciale de l’UICN pour les questions de parité.

www.genderandenvironment.org

développement ont souvent pour effet de diminuer les ressources communes telles que les rivières et les zones humides qui, dans certains cas, sont le seul moyen d’existence des déshérités. Et c’est là une question de parité parce que, à l’échelle mondiale, plus de 70% des pauvres sont des femmes.

Et maintenant que nous avons mis le doigt sur le problème, que pouvons-nous faire? Il faut changer notre attitude fonda-

mentale vis-à-vis de la gestion des ressources d’eau, adopter une appro-che plus globale qui mette en valeur la parité, la justice sociale et les droits des êtres humains. Cette approche devrait s’appuyer sur une meilleure analyse du profil de l’utilisation, des connaissances et des compétences en matière de conservation et d’utilisa-tion durable de la ressource.

Les gouvernements devraient faire participer les groupes d’intérêt à tous les niveaux de la prise de décision et de l’élaboration des politiques et faciliter la participation de tous les acteurs, en particulier les femmes.

Les gouvernements et autres organis-mes du secteur public, entreprises et ONG doivent faire preuve d’un plus grand engagement envers la durabi-lité de l’environnement, la parité et la justice sociale dans la gestion intégrée des ressources d’eau.

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Une femme tressant des paniers dans le delta de l’Okavango. Les femmes jouent un rôle important dans l’utilisation des ressources naturelles provenant des écosystèmes d’eau douce.

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Les grands projets de développement ont souvent pour effet de diminuer les ressources communes dont les populations pauvres – la plupart du temps des femmes – dépendent.

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u-delà de la participation : gestion négociée des bassins hydrographiquesDanielle Hirsch

demandé au Centre for Environmental and Geographic Information Services (CEGIS) de réaliser une étude d’impact sur l’environnement pour son projet de construction d’un régulateur de crues de haute technologie et à grande capacité. Le CEGIS a rapidement découvert que cette approche ne répondrait pas aux be-soins des populations de la région. Il s’est mis en devoir d’élaborer une solution de substitution, en collaboration étroite avec la population locale.

Le résultat est un projet de basse technologie et décentralisé connu sous le nom de Gestion des cours d’eau à marée ( Tidal River Management ou TRM) qui dépend du régime des marées pour le drainage de la région. Alors que le régulateur proposé aurait été beaucoup plus favorable aux secteurs agricole et aquicole excédentaires, la TRM permet à un ensemble de petites activités de

subsistance – pêche et agriculture – de coexister avec des activités agricoles et aquicoles commerciales.

Une analyse socio-économique ap-profondie des aspects institutionnels et environnementaux a plaidé en faveur de la TRM. La BAsD et le gouvernement du Bangladesh se sont mis d’accord et le plan est en voie d’application.

À l’heure actuelle, neuf associations d’aménagement des ressources en eau finalisent un plan de gestion des ressour-ces d’eau de la région.

Cet exemple illustre comment la par-ticipation active des usagers locaux de l’eau peut générer des changements ma-jeurs dans la gestion de l’eau, notamment lorsque les politiques gouvernementales ne constituent pas une entrave.

La participation appelle la négociation

Les analyses montrent que l’approche négociée ne doit pas être assimilée à l’ap-proche participative. D’abord et avant tout, l’approche négociée exige aussi un environnement politique favorable abou-tissant à des processus décisionnels rigou-reusement conçus. Ces processus doivent être soutenus par le renforcement des capacités pour améliorer l’aptitude des

acteurs locaux de négocier efficacement. En outre, un processus réellement négocié appelle les acteurs locaux à élaborer une vision large et claire qui va bien au-delà de leur petit bassin versant.

Danielle Hirsch est responsable de programmes, Both ENDS.

www.bothends.org

La gestion des cours d’eau à marée (TRM) au Bangladesh : la destruction d’un barrage permettra aux marées de drainer la région (à gauche). La gestion des cours d’eau à marée permet à un mélange d’activités de subsistance – la pêche (au centre) et l’agriculture (à droite) – de coexister avec l’agriculture et l’aquaculture commerciales.

Le 3e Forum mondial de l’eau (mars 2003) a reconnu que les stratégies de gestion de l’eau

enracinées au niveau local sont des so-lutions durables et favorables aux pau-vres pour résoudre la crise de l’eau qui ne cesse de s’aggraver. Dans la pratique quotidienne cependant, ces approches continuent d’être considérées comme des compléments marginaux aux ap-proches descendantes de la gestion de l’eau.

Le projet «Gestion de bassins hydro-graphiques : une approche négociée» – entreprise conjointe de Both ENDS et Gomukh – cherche à démontrer que les initiatives enracinées localement sont des solutions de substitution réalistes pour les stratégies de gestion de l’eau actuelles, centralisées et privilégiant l’infrastructure.

Le principe unificateur du projet est que la négociation est l’élément essentiel des approches durables et équitables de la gestion de l’eau. Alors que les appro-ches intégrées marginalisent souvent les acteurs locaux, les initiatives ascendan-tes organisent intentionnellement des négociations à l’échelle du bassin avec la participation de tous les acteurs per-tinents : les hommes et les femmes, les populations urbaines et rurales, les po-pulations qui vivent en amont et celles qui vivent en aval.

L’exemple du Bangladesh

Afin de résoudre le grave problème d’engorgement de Kuhlna-Jessore, une des régions côtières les plus densément peuplées du Bangladesh, la Banque asiatique de développement (BAsD) a

www.iucn.org/themes/spg

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Le concept de TRM s’est révélé être la meilleure stratégie pour régler la question de l’engorgement d’eau dans le delta du Gange grâce, surtout, à la participation de « comités de l’eau » dans chaque village.

– Ashraf-ul-Alam Tutu, Coordonnateur, Coastal Development Partnership (CDP), Khulna, Bangladesh

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L’EAU ET LA BIODIVERSITÉ

n investissement sageWill Darwall

Ce nouveau siècle lance un défi majeur à la communauté mon-diale : fournir de l’eau potable

salubre et l’assainissement pour tous. La construction des réseaux aquatiques inté-rieurs nécessaires pour relever ce défi ainsi que des installations hydroélectriques in-dispensables à la croissance économique peuvent avoir des incidences graves sur la biodiversité des eaux douces.

De nombreuses communautés sont tributaires des espèces d’eau douce pour satisfaire leurs besoins de base et cette réalité de la vie locale justifie une intégra-tion beaucoup plus nette d’éléments de la biodiversité dans les plans de mise en valeur des eaux intérieures. Mais jusqu’à présent, la communauté internationale a largement négligé la biodiversité en tant que facteur dans sa course à la construc-tion de barrages et à la canalisation de cours d’eau avec, pour conséquence, une perte alarmante des biotopes et peut-être même le taux le plus élevé d’extinction d’espèces pour quelque écosystème que ce soit à l’époque contemporaine.

Comment remédier à cette malheu-reuse situation? Comme elle résulte essentiellement d’une absence de con-naissance des fonctions et valeurs des écosystèmes d’eau douce, il serait bon, dans un premier temps, de mettre l’in-formation pertinente sur les espèces à la disposition des planificateurs et des déci-deurs. Or, alors que les écosystèmes d’eau

zones humides qui épurent l’eau et ser-vent de tampon contre des phénomènes extrêmes tels que les inondations et les sécheresses.

J’aime à comparer la conservation des espèces d’eau douce à un investissement boursier. Les conseillers f inanciers recommandent d’étaler les risques en investissant dans une gamme variée d’actions. Selon le même principe, nous devons conserver le plus grand nombre possible d’espèces af in de nous prémunir contre les effets des changements environnementaux.

Will Darwall est responsable de l’évaluation de la biodiversité des espèces d’eau douce pour la Commission UICN de

la sauvegarde des espèces (CSE). www.iucn.org/themes/ssc/

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Le fleuve Ucayali, Pérou. Des pêcheurs transportant un spécimen d’Arapaima gigas. Cette espèce qui peut peser jusqu’à 250 kilos est un poisson recherché que l’on capture dans les petits lacs proches du fleuve principal. Elle est inscrite à l’Annexe II de la CITES.

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douce procurent d’innombrables biens et services aux communautés locales, cette information de base sur les espèces fait cruellement défaut.

Le Programme de l’UICN pour l’éva-luation de la biodiversité des espèces d’eau douce a entrepris de combler cette lacune.

Nous avons, par exemple, un nouveau projet en cours en Afrique de l’Est – une région connue pour le taux élevé de dé-pendance de l’homme vis-à-vis des res-sources alimentaires et du revenu tirés des eaux intérieures. Le projet établira un réseau local d’experts et les formera à l’utilisation d’outils d’évaluation de la biodiversité. Il réalisera également des évaluations directes de l’état de conser-vation des espèces et de leur distribution au Kenya, en Tanzanie, au Malawi, en Ouganda et au Burundi.

Diversifier notre « portefeuille de la biodiversité »

On estime qu’environ 45 000 espèces dé-pendent des habitats d’eau douce mais quel est l’avantage d’en conserver un si grand nombre?

Lorsque nous tentons de convaincre les planificateurs, nous devrions insister sur le fait que les espèces d’eau douce fournissent les produits dont beaucoup de communautés, parmi les plus pau-vres, dépendent. Nous devrions mettre en évidence la valeur économique des services écosystémiques fournis par les

Pêcheur du Mékong près de Huay Xai, RDP lao. De petits poissons comme ceux-ci sont la principale ressource de nombreuses pêcheries locales.

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Le saviez-vous…

Dans les régions riches en espèces comme le bassin versant du Paraná, ainsi que dans une bonne partie de l’Amazonie et du Congo et presque tous les bassins de l’Inde, de la Chine, de l’Asie du Sud-Est et de la Papouasie-Nouvelle-Guinée, moins de 5% de la superficie est protégée. (Revenga, 1998)

Les zones les plus riches du monde pour les espèces de poissons sont l’Amazone qui en compte plus de 3000, le Mékong avec plus de 1200 et le Congo avec 700 (UICN/WRI, 2003)

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êcheries en eau douce : maintenir le flux aquatique Patrick Dugan

Les efforts de conservation de la biodiversité des eaux douces se multiplient et chaque année les

articles se font plus éloquents et les ex-posés plus convaincants pour expliquer la valeur de ces ressources et décrire les menaces qu’elles rencontrent.

Or, si l’on prend le Sommet mondial pour le développement durable (SMDD) ou le 3e Forum mondial de l’eau (FME3) comme indicateurs des progrès, il n’y a pas grand chose qui permette de penser que cet investissement a fait plus que renforcer les craintes et les convictions de ceux qui sont déjà conscients de la nécessité de gérer l’eau pour maintenir la biodiversité aquatique.

Et surtout, bien peu de signes indiquent que la communauté des agriculteurs, des gestionnaires de l’eau, des politiciens et des organismes de développement – ac-teurs clés dans le débat de plus en plus animé sur la gestion de l’eau – s’est réel-lement engagée à ce jour. Depuis le FME3 nous savons que pour ceux qui se préoc-cupent de la biodiversité des eaux douces, cet engagement est l’enjeu principal.

Pour relever le défi, il faut beaucoup mieux comprendre les processus déci-sionnels qui gouvernent la gestion des eaux douces et faire preuve de plus de clarté et de réalisme sur les meilleurs moyens de les influencer. Il nous faut,

processus politiques où se prendront les décisions futures sur l’utilisation de l’eau.

Une meilleure connaissance de ces processus politiques, soutenue par une meilleure information sur la valeur et les besoins en eau des pêcheries en rivière joueront un rôle central pour le main-tien des flux aquatiques et, partant, des ressources aquatiques et des moyens d’existence qui en dépendent.

Patrick Dugan est Directeur général adjoint pour l’Afrique et l’Asie de l’Ouest,

World Fish Center (anciennement ICLARM).

www.worldfishcenter.org/

en particulier, évaluer quelle information serait utile et où. Dans certains cas, c’est une évaluation complète de la valeur de la biodiversité des eaux douces qui sera utile mais les fonds seront rarement disponibles. Bien souvent, des analyses plus ciblées sur des ressources clés se révéleront plus efficaces.

Pour la plupart des cours d’eau tro-picaux de la planète, la ressource la plus importante est le poisson. C’est tout particulièrement évident dans des envi-ronnements tels que le delta intérieur du Niger où les canots de pêche lourdement chargés témoignent d’un rendement annuel d’environ 100 000 tonnes, ou le Mékong, où les filets gonflés de la pêche-rie Dai à elle seule capturent 20 000 ton-nes par an. Mais les pêcheries en petites rivières sont également importantes pour les populations riveraines qui dépendent de ces ressources pour leur subsistance.

Comme d’autres ressources aquati-ques, les pêcheries en rivière et leur con-tribution à la subsistance et à la sécurité alimentaire dépendent étroitement du régime des crues. Si l’on veut les main-tenir, cependant, face aux demandes concurrentes pour l’eau douce, il faut collaborer avec les pêcheurs et autres acteurs pour renforcer la sensibilisation à leur importance et à leurs besoins en flux aquatiques et pour participer aux

www.iucn.org/themes/biodiversity

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Le saviez-vous...

En Asie, la pêcherie du bassin inférieur du Mékong capture environ 2 millions de tonnes de poissons par an pour un revenu total d’environ USD 2 milliards.

Les plus grandes plaines d’inondation d’Afrique, notamment le delta intérieur du Niger, le Sudd du Nil et le lac Tchad, ont chacune un rendement de quelque 100 000 tonnes par an et génèrent un revenu annuel dépassant USD 20 à 25 millions.

– Patrick DuganMarché au poisson à Mopti, Mali. Les pêcheries en rivière et dans les zones humides africaines sont des ressources vitales pour les populations riveraines.

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L’EAU ET LA COMMUNICATION

d’Australie fournit des outils décisionnels et un savoir-faire pour améliorer l’état des bassins versants et des cours d’eau côtiers. Son programme de recherche et développement – coentreprise entre le Gouvernement australien et plusieurs organisations du secteur public et du secteur privé – comprend des projets de recherche pluridisciplinaires dans des bassins versants côtiers choisis qui utilisent des approches participatives avec les acteurs.

Les organisations qui participent gè-rent ensemble le projet, son financement, l’appui en nature, l’équipement et l’exper-tise pour répondre à des problèmes clés tels que les incidences d’une population croissante dans la zone côtière. Dans toute la mesure du possible, les équipes du projet comprennent une vaste gamme «d’utilisateurs des connaissances» tels que les planificateurs et gestionnaires locaux des ressources naturelles, les agriculteurs, les pêcheurs, les spécialistes de la conser-vation et les chefs d’industrie.

Coastal CRC fait aussi office de «cour-tier» des connaissances entre organisa-tions intéressées à la gestion de projet. Chaque projet comprend habituellement un mélange de suivi et d’évaluation de

ancer des ponts : communiquer la science pour la gestion côtièreDon Alcock

Un projet récent de Coastal CRC a permis de fixer des objectifs concernant l’eau douce pour la productivité des pêcheries. L’équipe du projet, en collaboration avec des pêcheurs sportifs et commerciaux a déterminé la population de barramundis, une espèce de poisson estuarienne populaire et a découvert qu’une submersion régulière améliorait la survie des juvéniles dans le bassin du fleuve Fitzroy. Des objectifs de libération d’eau douce d’un barrage (photographié ici), pour des raisons écologiques, ont maintenant été fixés. La pêcherie au barramundi pourra perdurer.

Convaincre ceux qui utilisent les ressources terrestres et aquatiques de la valeur d’une

planification côtière stratégique à long terme et de l’analyse scientifique n’est pas toujours chose aisée. Et il n’est pas toujours aisé non plus de former les cher-cheurs à comprendre les besoins à court terme des agriculteurs, des pêcheurs ou des gens d’affaires. Construire les relations durables indispensables pour résoudre des problèmes communs exige la destruction des barrières culturelles qui divisent ces groupes.

Il y a plusieurs moyens de le faire. Les ateliers sont utiles qui permettent d’échanger des connaissances, de planifier des mesures de gestion et de communiquer les résultats. En outre, parce que différents acteurs utilisent les connaissances de différentes manières, il est bon de prévoir un mélange de pro-duits et d’activités de communication – bulletins, rapports, expositions, bases de données, sites Web, séminaires, con-férences et campagnes de presse.

Mais au bout du compte, le moyen le plus efficace d’obtenir des résultats consiste à créer des réseaux formels et informels solides, au niveau local, entre les scientifiques, le gouvernement et les décideurs de la communauté. Adoptant de tels principes, le Cooperative Research Centre for Coastal Zone, Estuary and Waterway Management (Coastal CRC)

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Le saviez-vous...

À l’échelon mondial, on estime que les écosystèmes d’eau douce produisent un bénéfice annuel de USD 8700 milliards. (Constanza, 1997)

On estime que 50% de toutes les zones humides ont disparu depuis 100 ans. (Myers,1997)

3011 espèces d’eau douce sont actuellement inscrites dans les catégories Menacé ou En danger de la Liste rouge de l’UICN des espèces menacées. (UICN)

la santé des écosystèmes, de cadres décisionnels, de modélisation, de plani-fication de l’environnement, de gestion des données et d’activités scientifiques citoyennes. Les projets et les équipes des projets sont mis en place avec des grou-pes consultatifs d’acteurs locaux.

Dans le bassin versant du fleuve Fitzroy, au centre du Queensland, par exemple, les acteurs locaux travaillent avec les chercheurs du CRC afin de déter-miner l’attitude communautaire et d’éva-luer les cours d’eau, de comprendre les dynamiques biochimiques et physiques des estuaires et l’attribution de l’eau pour les utilisations urbaines et la protection de l’habitat (voir photo).

Les scientifiques sont souvent criti-qués pour se consacrer, seuls dans leur coin, à leurs projets favoris en oubliant de communiquer les résultats au public. Les réseaux coopératifs de recherche ap-pliquée peuvent lancer des ponts entre les scientifiques et la communauté – et entre la science, la politique et la planification.

Don Alcock est Chef de la communication, Coastal CRC.

www.coastal.crc.org.au

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Planète Conservation 1/200326 Planète Conservation 1/2003 27

La ville hongroise de Tata, où vivent 25 000 personnes, est si-tuée sur les berges du lac Öreg

colonisé par l’homme depuis 50 000 ans. Aujourd’hui, cette région est connue pour ses atouts naturels exceptionnels, son histoire économique et culturelle et ses attraits touristiques.

Bien qu’il soit presque entièrement cerné par la ville historique et qu’il ne mesure que 2 km2, le lac est une des régions les plus importantes d’Europe centrale pour l’hivernage des oiseaux d’eau et figure parmi les zones humides d’importance internationale inscrites à la Convention de Ramsar.

Aujourd’hui, différents groupes de personnes utilisent le lac et la qualité de l’eau est menacée.

Après la transition politique de la Hongrie, dans les années 1990, des in-térêts locaux ont réfléchi aux moyens d’exploiter économiquement le lac et malheureusement, les amoureux de la nature n’ont pas su transmettre de message correspondant sur les valeurs naturelles et l’importance écologique du lac. Un programme de communication a donc été conçu en 2001 avec l’aide de la Commission UICN de l’éducation et de la communication et de son projet de renforcement des capacités.

Heureusement, ce projet n’a pas été lancé dans le vide. Les édiles locaux

e lac Öreg : lorsque nature et culture coexistentAndrás Bõhm et László Musicz

avaient déjà commencé à comprendre l’importance du milieu naturel excep-tionnel de la région et décidé que le meilleur moyen de faire fructifier ce trésor consisterait à transformer la ville en lieu de festivals et d’événements culturels. Le projet a également pu s’appuyer sur d’anciennes activités de sensibilisation du public.

Le projet comprenait des activités spéciales auxquelles presque tous les groupes d’usagers furent conviés. Le lac Öreg est particulièrement connu pour le grand nombre d’oies qui viennent y hiverner de sorte que les activités culmi-nèrent avec le Festival de l’oie sauvage où tous les aspects des populations d’oies résidentes du lac (écologique, culturel, artistique, culinaire, économique, etc.) furent démontrés. Cette activité a par-faitement illustré comment les valeurs écologiques et culturelles peuvent coexister pour enrichir la vie de tous les riverains du lac.

Beaucoup de résidents de Tata ont participé au processus de transforma-tion de leur ville. En conséquence, la sensibilisation aux valeurs naturelles de la zone humide a beaucoup augmenté et s’est concrétisée lorsque les citoyens et le gouvernement local ont voté contre la construction d’un terrain de golf juste au milieu de la zone de repos et de nour-rissage la plus importante pour les oies.

Les oies du lac Öreg.

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Le projet de communication de 2001 a culminé par le Festival de l’oie sauvage de Tata.

Un centre d’accueil des visiteurs sera construit près des tours d’observation des oiseaux afin de stimuler l’intérêt pour les valeurs naturelles du lac.

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Récemment, des groupes d’acteurs se sont associés pour parrainer l’ouverture d’un centre d’accueil des visiteurs.

Les gens de la ville ont commencé à se sentir émotionnellement liés à leur ma-gnifique lac mais il reste encore beaucoup à faire. Tous les édiles n’ont pas été con-vaincus qu’il fallait abandonner un déve-loppement économique rapide en faveur de considérations environnementales et esthétiques. Nous devons rester vigilants et poursuivre nos efforts pour renforcer la sensibilisation par une communication efficace.

András Bõhm est responsable pour la zoologie, ministère de

l’Environnement et de l’Eau (chef du projet).

László Musicz est responsable de l’environnement, municipalité de Tata,

chef local de projet.

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L’EAU ET LES BARRAGES

Cela fait des milliers d’années que l’homme construit des barrages pour gérer et stocker l’eau pour

ses besoins personnels, pour l’irrigation et pour maîtriser les crues. Plus récemment, les barrages se sont mis à fournir de l’éner-gie hydroélectrique et de l’eau aux villes et aux industries. Les grands barrages – plus ils étaient grands mieux c’était – sont de-venus des symboles nationaux de richesse, de statut, de savoir-faire technologique et de domination de l’homme sur la nature. Ils ont été systématiquement présentés comme le meilleur moyen de répondre aux besoins en eau et en énergie de po-pulations en expansion et d’économies en voie de modernisation, et de stimuler le développement régional, la création d’emplois et la croissance économique.

Les avantages semblaient si évidents et si indiscutables que presque personne n’a songé aux incidences écologiques et sociales. Les choses se sont mises à changer vers la fin du 20e siècle, à me-sure que les mouvements écologiques, les campagnes pour les droits de l’homme et les mécontentements localisés trouvaient suffisamment de voix et de puissance pour attirer l’attention sur le revers de la médaille – le fardeau de la dette, les dé-passements de budget, le déplacement et la paupérisation de communautés

leuves de discordeS. Parasuraman

entières, la destruction d’écosystèmes et de cultures et le partage inéquitable des coûts et des avantages. Les partisans des grands barrages soulignent que ces derniers ont généralement bien joué leur rôle dans le contexte de stratégies de mise en valeur de l’eau et des ressources d’énergie dans plus de 140 pays et qu’ils ont fourni une gamme indispensable de services relatifs à l’eau et à l’énergie. Les détracteurs répondent qu’il existe des so-lutions meilleures, moins chères, moins destructrices et plus équitables pour sa-tisfaire les besoins en eau et en énergie mais qu’elles ont été ignorées.

Dans son rapport de novembre 2001, la Commission mondiale des barrages (CMB) attire l’attention sur l’absence d’information relative aux incidences des grands barrages. Elle indique que les groupes pauvres et vulnérables tendent à supporter une part disproportionnée des coûts environnementaux et sociaux sans obtenir en échange une part équivalente des avantages économiques. Elle ajoute que l’efficacité et la visibilité des grands barrages se sont révélées beaucoup plus aléatoires et moins fiables qu’on ne le croit généralement. Certains ont exa-cerbé la vulnérabilité aux inondations et, dans certains cas, les dommages causés par les inondations.

Un barrage en Mauritanie. L’expérience de crues artificielles, en Mauritanie, montre que différents régimes de gestion peuvent réduire les incidences sociales et écologiques. Dans le delta du Diawling, les crues pilotes ont augmenté les captures de poissons de 1300% et le nombre d’oiseaux de plus de 400%.

Le but de l’exercice de la CMB était d’aider à éviter de répéter les erreurs passées et de montrer comment mieux faire les choses à l’avenir. Sa recomman-dation la plus importante peut-être est de faire participer des acteurs indépendants, tels que les communautés et les groupes affectés, à toutes les étapes du processus décisionnel.

Des groupes pluriacteurs – composés de représentants de l’industrie, d’insti-tutions multilatérales, de communautés locales, de réseaux d’ONG, de gouverne-ments, entre autres – sont en train de se former au niveau du bassin versant dans tous les grands et petits bassins hydro-graphiques du monde afin d’appliquer l’approche par écosystème à la fourniture d’eau et d’énergie.

L’histoire rendra justice à l’esprit vi-sionnaire de ceux qui ont eu le courage et l’idée d’établir la Commission des bar-rages dont les recommandations pour l’avenir ont modifié le cours de la réflexion et du développement des barrages.

S. Parasuraman siégeait au Secrétariat de la CMB et travaille actuellement avec

ActionAid en qualité de Coordonnateur régional pour les politiques en Asie,

à Bangkok, Thaïlande. www.dams.org ; www.actionaid.org

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Si je devais écrire ce que nous savons, avec certitude, des inci-dences futures des changements

climatiques, mon texte serait bref. Selon les scientifiques, nous pouvons

généralement nous attendre à une aug-mentation de l’instabilité des cycles de l’eau et de l’atmosphère et à des fluc-tuations climatiques plus intenses. Les phénomènes extrêmes d’aujourd’hui seront peut-être la norme demain. Et il semble que la crise de l’eau, dans bien des régions du monde, soit vouée à empirer.

Beaucoup de signes sont déjà sensi-bles : les glaciers qui fondent, le dégel du permafrost et la pluviosité capricieuse en-traînent des dommages étendus comme en témoignent les inondations récentes en Chine, en Europe et en Afrique aus-trale. L’ampleur des changements que nous connaîtrons dépend en partie de la mesure dans laquelle nous réduirons les émissions de dioxyde de carbone, principal responsable des changements climatiques.

Désormais, il n’y a plus de certitude. Lorsque les experts eux-mêmes ignorent l’ampleur et la cadence des changements climatiques, tout ce que l’on peut faire, c’est «se préparer à s’adapter» à l’avenir, quel qu’il soit. Pour cela, il faut constituer des coalitions de politiciens, de scienti-fiques, de gestionnaires et de représen-tants de la société civile pour évaluer les risques et trouver les réponses.

Au 3e Forum mondial de l’eau, à Kyoto, au Japon (mars 2003), l’UICN a présenté un rapport Change : Adaptation of water resources management to climate change (voir page 32). S’appuyant sur des dialo-gues régionaux qui ont eu lieu en Améri-que centrale, en Méditerranée, en Asie du Sud-Est, en Afrique australe et en Afrique de l’Ouest, il met en évidence les mesures que prennent les professionnels de l’eau et indique comment d’autres peuvent les imiter.

Le rapport dit clairement que l’adap-tation nécessite beaucoup plus qu’une connaissance et une technologie spé-cialisées. Ce qu’il demande, ce n’est rien moins qu’une transformation de la société et un investissement d’efforts et de ressources dans la construction de capacités d’adaptation pour l’homme et les institutions. Il prône la souplesse et la capacité d’appliquer des solutions inno-vatrices à des situations locales.

daptation à l’incertitudeBrett Orlando

Il existe des exemples et ils sont à notre portée. L’un est une initiative néerlandaise intitulée «Grandir avec la mer» qui consiste à associer les défenses côtières et la conservation de la nature. L’eau excédentaire sera stockée dans des régions basses pour alimenter l’industrie, l’agriculture et la consommation humai-ne, créer un habitat pour des espèces importantes et fournir des possibilités de loisirs. Ce plan associe les aspects à long terme de l’adaptation aux changements climatiques avec des avantages directs et à court terme pour la société.

Un autre exemple vient du Costa Rica, pays qui dépend à 98% de l’énergie hydroélectrique et qui est donc particu-lièrement vulnérable à tout changement dans la pluviosité. L’Institut costaricien

L’EAU ET LE CLIMAT

d’électricité (ICE) a mis au point une stratégie nationale afin de réduire la consommation et d’encourager les éco-nomies d’énergie. Dans le cadre d’une campagne menée dans les journaux, à la radio et à la télévision, jointe à des incitations économiques, chacun est encouragé à assumer la responsabilité de la gestion durable de l’eau.

Les gestionnaires de l’eau commen-cent enfin à oublier leurs modèles et leurs écluses pour dialoguer avec ceux qui vivent avec l’eau et qui en dépendent.

Brett Orlando est Conseiller politique de l’UICN pour les changements

climatiques. www.iucn.org/themes/climate

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La couronne de neige et de glace du mont Kilimandjaro : comparaison entre 1993 (en haut) et 2000.

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Du point de vue de la gestion des ressources d’eau, le fossé entre la politique et la pratique

semble s’élargir.Le 3e Forum mondial de l’eau qui a

eu lieu à Kyoto, au Japon, cette année, a rassemblé 12 000 experts, qui ont consa-cré des mois de travail à cet événement, et a bien montré la diversité des appro-ches et des pratiques complémentaires pour améliorer la gestion de l’eau. Il a braqué les projecteurs sur les nombreux pays qui ont commencé à revoir leurs systèmes de gouvernance et à renforcer leurs organisations de gestion de l’eau, à encourager les mesures de gestion de la demande d’eau, à favoriser le dialogue pour atténuer les impacts des barrages existants et en projet et à protéger des écosystèmes précieux. Certains de ces

exemples encourageants sont évoqués dans ce numéro spécial de Planète Con-servation.

On peut dire qu’il y a là un pas en avant par rapport au Sommet mondial pour le développement durable de 2002 où l’on a semblé s’intéresser uniquement à la distribution de l’eau aux populations pauvres de la planète. Toutefois, la Décla-ration ministérielle du 3e Forum mondial de l’eau semble être, quant à elle, un autre pas en arrière sur la voie du développe-ment durable. La Déclaration, qui n’a pas proposé de moyens pratiques pour soutenir la mise en œuvre de la gestion intégrée des ressources d’eau, est géné-ralement critiquée pour être plus faible que beaucoup de politiques nationales actuellement en vigueur. Elle aura donc fort peu d’effets réels.

Toutefois, il n’y a pas lieu de désespé-rer. Par nature, les déclarations politiques énoncent ce qui est politiquement accep-table et réalisable et ne reflètent pas né-cessairement ce qui se fait à l’avant-garde de l’innovation. Les déclarations évitent soigneusement les références à l’environ-nement et à sa dégradation ou omettent des mots tels que barrages, moyens d’exis-tence de la population, zones humides, transparence, responsabilité, partage des avantages, etc. Mais le changement ne se produit pas spontanément à la table des négociations. C’est aux niveaux national et local, là où l’urgence est apparente et, en réalité, là où les mesures sont prises, qu’il devrait se produire.

Les séances techniques du 3e Forum mondial de l’eau furent bien plus moti-vantes que les négociations politiques, notamment lorsqu’elles montrèrent les progrès pratiques réalisés pour amélio-rer la gestion de l’eau par une diversité de méthodes et les moyens d’adapter ces approches aux circonstances lo-cales. L’approche par écosystème est aujourd’hui acceptée comme l’une de ces méthodes innovatrices et ce seul fait peut être considéré comme un grand pas en avant.

Une des méthodes pratiques ayant retenu beaucoup d’intérêt au Forum concerne les «flux environnementaux» : une quantité d’eau minimale est main-tenue dans les cours d’eau pour les éco-systèmes et les usagers qui se trouvent en aval. Cette méthode a été appliquée avec succès dans plusieurs pays et l’heure est venue de l’appliquer ailleurs.

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Planète Conservation 1/200330 Planète Conservation 1/2003 31

Autre méthode testée et prouvée : la protection des zones humides et des forêts en tant qu’habitats naturels et fournisseurs de services relatifs à l’eau. Sur le front des barrages, nous avons en-tendu que des efforts considérables sont déployés en Asie, en Afrique et ailleurs, pour obtenir l’adoption de directives internationales sur l’évaluation com-plète et les mesures de compensation et d’atténuation des incidences écologiques et sociales des barrages. L’application généralisée de toutes ces mesures serait aussi un grand pas en avant dans notre lutte pour la protection des écosystèmes, de la biodiversité et de tous ceux qui en dépendent.

Le principal obstacle semble main-tenant être l’absence de capacités suffi-santes et de ressources pour se mettre au travail. Le rapport Camdessus, consacré au financement des services relatifs à l’eau était surtout axé sur des solutions d’infrastructure et de technologie à grande capacité. Beaucoup pensent que les grands barrages n’amélioreront ni l’attribution de l’eau ni l’assainissement pour les populations rurales pauvres et provoqueront une plus grande dégrada-tion de l’environnement.

Le rapport Camdessus et le 3e Forum mondial de l’eau amènent une fois en-core à s’interroger sur l’utilité des grandes réunions internationales. Il est beaucoup plus efficace de construire des coalitions entre gouvernements, société civile, ONG et organisations professionnelles travaillant à des programmes d’action convenus au niveau national et au niveau des bassins versants. C’est là que les connaissances, le savoir-faire

pratique, la volonté de travailler en équi-pe et la détermination à faire rapidement la différence peuvent se conjuguer pour une action efficace.

C’est le meilleur moyen de trans-former les approches et études de cas présentées à Kyoto en réalité pratique, dans l’intérêt des pauvres et du dévelop-pement durable.

C’est là aussi que l’UICN est le mieux placée pour apporter sa contribution en fournissant son expérience technique et en rapprochant ses réseaux pour cons-truire des coalitions.

L’eau, les ressources d’eau et leur gestion restent au cœur de notre travail

en faveur des progrès de la conservation et du développement durable. L’UICN continuera de capter le pouvoir de ses connaissances et de ses ressources ainsi que de son réseau mondial afin d’identi-fier et de mettre en œuvre des innovations pratiques en matière de gestion durable de l’eau.

Ger Bergkamp est Coordonnateur de l’Initiative de l’UICN sur l’eau et la nature.

Jean-Yves Pirot est Coordonnateur du Programme de l’UICN pour les zones

humides et les ressources d’eau.

www.iucn.org/themes/wetlands/

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La planification et l’action conjointes des acteurs en matière de gestion des ressources d’eau sont indispensables au développement durable. Ici en photo : une réunion d’utilisateurs des ressources en Guinée-Bissau.

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PUBLICATIONS

Change: Adaptation of water management to climate change

Ger Bergkamp, Brett Orlando et Ian Burton

Les professionnels de l’eau sont con-frontés à un défi : que décider devant les incertitudes que posent les change-ments climatiques. Cet ouvrage présente une nouvelle approche de gestion qui va au-delà des expédients techniques pour trouver un style plus adaptable, plus complet et plus novateur.

ISBN 1-8317-0702-1, 2003 ; 250 x 190 mm, xii + 53 p. ; USD 15,75. Bon de com-mande No B1203

Vision de l’eau et de la nature

Stratégie mondiale de conservation et de gestion durable des ressources en eau au 21e siècle

Volet «environnement et écosystèmes» de la Vision mondiale de l’eau, exercice du Conseil mondial de l’eau, cet ouvrage représente la première tentative digne de ce nom pour intégrer pleinement les questions relatives à l’environnement dans l’élaboration d’une stratégie com-plète pour la gestion des ressources d’eau au niveau mondial. Préparé par l’UICN à l’issue de vastes consultations, la Vision souligne le rôle crucial des écosystèmes comme base des systèmes entretenant la vie sans lesquels il est impossible d’at-teindre à la sécurité et de la maintenir, et propose un plan d’action pour un monde durable en 2025.

ISBN 2-8317-0515-0, 2000 ; 279 x 216 mm, xii + 52 p., photographies en cou-leur ; USD 18,75. En, Fr et Esp. Bon de commande No B549. Aux États-Unis et au Canada : à commander chez Island Press et au Bureau d’UICN Canada.

Ecosystem Management: Lessons from around the World

A Guide for Development and Conservation Practitioners

Jean-Yves Pirot, Peter-John Meynell et Danny Elder (éd.)

Présentation de l’approche par écosystème et des moyens d’introduire le concept dans les politiques, les procédures, les pratiques et l’appui aux inves-tissements. Il rassemble les leçons de 10 années de projets de terrain, intègre la théorie à ces leçons et les traduit en actions pratiques pour les praticiens du développement et de la conservation.

ISBN 2-8317-0542-8, 2000 ; 210 x 150 mm, x + 123 p., figures, tableaux ; USD 22,50. Bon de com-mande No. B609. Aux États-Unis et au Canada : à commander chez Island Press.

Publication prochaine!

Watersheds of the World

Ce CD et site Web contient la base de don-nées la plus complète sur les bassins hy-drographiques du monde. Présenté au 3e Forum mondial de l’eau à Kyoto, Japon, le CD présente des cartes sur 20 problèmes mondiaux, des données et des indica-teurs pour 154 bassins et une analyse de leur état ainsi que des biens écologiques et services qu’ils fournissent.

Produit par le «Water Resources eAt-las», fruit des travaux du World Resources Institute, de l’UICN, de l’Institut interna-tional de gestion des ressources en eau et de la Convention de Ramsar.

ISBN 1-56973-548-8, 2003 ; USD 125. À commander à l’UICN, au WRI et sur le site Web : http://www.iucn.org/themes/wani/eatlas/

http://www.iucn.org/bookstore

À venir, en juin, de l’UICNFlow – the essentials of environmental flowsMegan Dyson, Ger Bergkamp, John Scanlon (éd.)

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