bulletin spécial finances publiques

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les sénateurs socia listes www.senateurs-socialistes.fr B ulletin S pécial F inanceS puBliqueS D éBat en Séance puBlique leS 17 et 24 juillet 2012 Vendredi 27 juillet 2012

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Finances publiques

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Page 1: Bulletin Spécial Finances publiques

les sénateurs socialistes

www.senateurs-socialistes.fr

Bulletin Spécial

FinanceS puBliqueS

DéBat en Séance puBlique

leS 17 et 24 juillet 2012

Vendredi 27 juillet 2012

Page 2: Bulletin Spécial Finances publiques

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noteS...

- Loi de règlement des comptes pour 2011 page 3

- Les orientations des finances publiques pour 2012 page 6

- Loi de Finances rectificative pour 2012 page 13

interVentionS en Séance puBlique...

règlement DeS compteS et rapport De geStion pour 2011DiScuSSion générale le 17 juillet

François MARC, Rapporteur général Finances : page 20Michèle ANDRE : page 23Frédérique ESPAGNAC : page 26Richard YUNG : page 28Jean-Yves LECONTE : page 30

orientationS DeS FinanceS puBliqueS

DéBat le 17 juillet

François MARC, Rapporteur général Finances : page 32page 45

Yves DAUDIGNY, Rapporteur général Affaires sociales : page 35Michèle ANDRE : page 38Maurice VINCENT : page 41

loi De FinanceS rectiFicatiVe pour 2012DiScuSSion générale le 24 juillet

François MARC, Rapporteur général Finances : page 47Yves DAUDIGNY, Rapporteur général Affaires sociales : page 51Françoise CARTRON, Rapporteure pour avis Culture : page 54François REBSAMEN, Président du Groupe socialiste : page 56Michèle ANDRE : page 58Christiane DEMONTES : page 61Georges PATIENT : page 63Jean-Pierre CAFFET : page 65Claude HAUT : page 67David ASSOULINE : page 69Claudine LEPAGE : page 70Jean-Bernard MAGNER : page 71

communiquéS De preSSe...

- Dans le cadre du PLFR 2012 - La majorité sénatoriale veille à ce que la TNT nedevienne pas un instrument de spéculation

Bulletin Spécial

Finances publiques

page 2

p. 3

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Page 3: Bulletin Spécial Finances publiques

pour la première fois, un Sénat majoritairement àGauche a à connaître de la loi de règlement descomptes, sur l’exécution du budget adopté par l’an-

cienne majorité. Si l’exercice reste essentiellement tech-nique et formel, il donne l’occasion de revenir sur l’inco-hérence des orientations du précédent Gouvernement,tant sur les dépenses engagées que sur la structure desrecettes.

L’examen du projet de loi et du rapport de la Cour desComptes révèle en effet que la baisse apparente dudéficit doit être fortement relativisée, en raison, d’unepart, d’un solde budgétaire artificiellement gonflé en2010 par les mesures d’urgence du plan de relance et,d’autre part, d’une stabilisation apparente des dépensesd’avantage due à des éléments conjoncturels qu’à uneréelle stratégie budgétaire (1).

Cette inaction reste d’autant plus préoccupante que lesréformes budgétaires et fiscales du précédentGouvernement continuent de produire des effets négat-ifs sur le budget de l’Etat, qui justifient les réformesannoncées par le Gouvernement Ayrault (2).

1. une amelioration en trompe-l’Œil DuDeFicit qui reVele une action gouVernementaleinaDaptee

Après un déficit budgétaire record de près de 150 Md €en 2010 –dû essentiellement au plan de relance-, l’exé-cution des lois de finances pour 2011 a conduit a undéficit d’un peu plus de 90 md € (5,2 % piB), soit encorele double de son niveau d’avant crise, pour un taux decouverture des dépenses par les recettes de 69%.

le respect des normes de dépenses, qui donne l’im-pression d’un effort vertueux, s’explique en réalité pardes éléments conjoncturels, qui ont donné une margede manœuvre de manœuvre supplémentaire sans laque-lle les objectifs n’auraient pas été respectés.

En définitive, l’effort structurel de réduction du déficit aessentiellement porté sur les recettes, conduisant à lapoursuite de l’évolution de l’encours de dette, quiapproche les 90% du piB. Tout reste donc à faire en cedomaine, pour atteindre l’objectif gouvernemental d’unsolde public à 3% PIB en 2013 (et nul en 2017) et inver-ser l’évolution de la dette publique.

1.1. la baisse optique du déficit

la baisse du déficit budgétaire de l’etat de près de

60 md€ par rapport à 20101 s’explique essentiellementpar le niveau historique du déficit en 2010, dû notam-ment aux « investissements d’avenir » du plan de relancede l’économie. Cette baisse correspond donc essentielle-ment à l’arrêt des engagements du Gouvernement,engagements budgétaires dont la mise en œuvre rested’ailleurs à définir, les crédits n’ayant pour l’essentiel pasencore été dépensés par les opérateurs concernés(décaissements limités à 675 M€ en 2010 et à 1,5 Md €en 2011).

le taux de couverture des dépenses par les recettes,plus révélateur que la seule part du déficit dans le PIB,reste inférieur de 10 points au niveau de 2008, de15 points par rapport aux années précédentes. Le pas-sage de 53,3% en 2010 à 69,1% en 2011, dû à la situationévoquée plus haut, ne peut donc être vu comme un suc-cès.En définitive, l’effort structurel (baisse du déficit due àdes décisions du gouvernement) a essentiellementporté sur les recettes. L’argument opposant une Droiteresponsable en termes de dépenses à une Gauchefascinée par l’impôt ne résiste donc pas aux faits.

note de travai l . . .

loi de règlement des comptes pour l’année 2011

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 3

echec et artifices de la relance

Comme l’avait notamment souligné Nicole Bricq lors de l’ex-amen de ces mesures en janvier 2009, les dispositifs du plande relance n’étaient ni équilibrés ni efficaces. Concentréssur l’investissement, ils ne corrigeaient qu’à la marge la poli-tique budgétaire menée au cours des deux années précé-dentes. Surtout, il ne faisait guère de place aux objectifssociaux pourtant recommandés par la Commissioneuropéenne en novembre 2008, notamment les transfertsen faveur des ménages à faibles revenus (li-mités à la primede solidarité active).

Le programme de 35 Mds € d’investissement d’avenir lancéen 2010 n’a pas d’avantage profité à l’économie, à peine plusde 6% de ce montant ayant été engagés entre 2010 et 2011(2,175 Md€). En revanche, il a contribué à augmenter artifi-ciellement le déficit. La Cour des Comptes relevait ainsi dansson rapport de mai 2012 sur la gestion budgétaire de l’Etaten 2011 que la réduction de 48,3 md € du besoin definancement de l’etat par rapport à 2010 ne serait que de13,2 md€ si seuls les fonds réellement décaissés avaient étépris en compte.

Page 4: Bulletin Spécial Finances publiques

1.2. Des dépenses contenues grâce à des élémentsexceptionnels

Deux normes de dépense (dites « 0 volume » et« 0 valeur ») ont été introduites pour s’assurer que ladépense publique est globalement contenue d’uneannée sur l’autre. le respect de ces normes en 2011 estessentiellement dû à des éléments exceptionnels.les dépenses de l’etat à l’intérieur du périmètre « 0 vo-

lume »2 ont diminué de 0,6%. Ceci s’explique essen-tiellement par une inflation supérieure aux estimations(2,1%, contre 1,5% prévus), offrant une marge demanœuvre supplémentaire de 2,1 Md € (la moindredépense constatée par rapport à l’objectif étant juste-ment de 1,7 Md €).

La baisse des dépenses à l’intérieur du périmètre « zéro

valeur »3 à hauteur de 259 M € doit quant à elle être rel-ativisée par la moindre dépense au titre du FCTVA -653 M € d’économies- sans lesquelles le dépassementaurait atteint près de 400 M€.Enfin, si le déficit constaté est inférieur de 4,6 md€ àcelui prévu dans la dernière lFr, ce décalage s’expliqued’une part par des reports de charge sur l’exercice

20124 , d’autre part par des éléments exceptionnels5.Ces deux aspects, qui auraient pu être anticipés,réduisent l’amélioration réelle à 1 md d’euros selon lacour des comptes, tenant essentiellement à la réduc-tion du déficit des collectivités locales.

1.3. une trajectoire de dette mal maîtrisée

au cours des dix dernières années, l’encours de dettepublique a doublé, passant de 853 à 1 717 Md €. Selonla Cour des comptes, la dette devrait dépasser 90% duPIB à la fin 2012 ou début 2013, alors que l’Allemagneamorce une tendance inverse.Cette situation est d’autant plus préoccupante que lacharge de la dette continue de croître, pour devenir lepremier poste de dépenses de l’etat. les frais financiersont augmenté de 5,8 md€, c’est-à-dire près de 15% parrapport à 2010, près de 25% par rapport à 2009, alorsmême que les conditions de financement restaient glo-balement favorables.

2. DeS reFormeS FiScaleS couteuSeS, DeSDepenSeS SouS-eValueeS et inaDapteeS

L’exécution du budget pour 2011 révèle la sous-évalua-tion du coût des orientations budgétaires et fiscalesdécidées par le précédent Gouvernement. le manque desincérité des prévisions, et la minimisation des effetsinduits par des engagements politiques contestés, illus-tre l’absence de prise en compte des alertes que l’oppo-sition parlementaire et la cour de comptes n’ont eu decesse d’adresser.

2.1. le coût des réformes fiscales

La loi de règlement illustre notamment la faiblesse desrecettes fiscales, due aux effets à long terme desréformes du précédent quinquennat, à la faiblesse del’impôt sur les sociétés et aux complexités créées par laréforme de la taxe professionnelle.

Déduction faite des effets temporaires de la réforme dela taxe professionnelle en 2010 (entraînant une perte derecettes de 14,5 Md €), les recettes fiscales nettes del’etat ont certes augmenté de 16,2 md € (250,3 Md € en2010, 266,5 en 2011).Néanmoins, ce niveau resteinférieur de près de 25md€ au produit constaté en 2007et 2008, alors qu’ont disparu les effets temporaires duplan de relance et de la réforme de la taxe profession-nelle, qui expliquaient la faiblesse de ces recettes en2009 et 2010.

Comme le soulignait Nicole Bricq dans son rapport d’in-

formation sur les prélèvements obligatoires6, cesréformes ont chaque année des effets directs sur lesressources de l’etat. Ainsi, pour 2011, l’impact budgé-taire de ces mesures fiscales est estimé à une perte deplus de 22 md € de recettes, soit :

- 11,7 Md € pour la loi TEPA - 7 Md € pour la réforme de la TP,- 3,1 Md € pour la baisse de la TVA dans la restaura-tion,- 0,5 Md € pour la réforme de l’ISF.

l’impôt sur les sociétés est le plus touché par la stagna-tion de la croissance des recettes. Sa part dans lesrecettes de l’Etat (2,1%) est inférieure de 0,4 point à celleconstatée en moyenne entre 2002 et 2008.

Sa croissance spontanée était estimée à 5,3 Md € par laLFI, mais s’avère limitée à 0,5 Md. Cette faiblesse n’acertes pas empêché une croissance de près de 20% deson produit (de 32,9 Md € à 39,1 Md en 2011), maiscelle-ci est très inférieure aux prévisions de la lFi, quiattendait un produit de 44,8 Md€. En outre, cette crois-sance s’explique essentiellement par des effetsmécaniques (3 Md € dus à la disparition des effets duplan de relance, 1,6 Md € tenant à la réforme de la taxeprofessionnelle).

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 4

notre ambition : rendre justice à l’impôt sur les sociétés

L’impôt sur les sociétés pâtit du caractère de plus en plusthéorique de son taux. En effet, grâce à l’adoption successived’abattement et de niches fiscales, les entreprises payent unmontant très inférieur au taux nominal de 33,33%. Le taux réelmoyen est en effet estimé entre 17% et 22%, avec de trèsgrandes disparités selon la taille de l’entreprise : 20% pour lesentreprises de 50 à 249 salariés, 8% pour les sociétés duCAC 40.

Page 5: Bulletin Spécial Finances publiques

les effets de la réforme de la taxe professionnelleavaient également été sous-évalués dans la loi definances initiale. L’allègement au bénéfice des entrepris-es était en effet estimé à 5,8 Md € en régime decroisière ; il devrait finalement s’élever à 7 md€ lesprochaines années, et à 8,1 md€ pour 2011.

Il convient de noter que les effets pour les entreprisessont bien moins clairs que ne l’envisageait la réforme(seulement 40% en profitent réellement), alors que sesconséquences sur les ménages (sur qui pèsent d’avan-tage de charges) et sur les collectivités territoriales sontdurables. Cette réforme a en effet eu un triple effet per-vers sur les collectivités territoriales, consistant en uneperte d’autonomie financière, une perte de prévisibilitédes ressources –pénalisant leurs capacités d’investisse-ment, fondamentales pour l’économie- et une disparitécroissante entre les différentes collectivités territori-ales, selon l’activité économique susceptible de générerdes recettes.

2.2. une gestion purement comptable des effectifs

alors qu’elle était censée générer 500 m€ d’économienette, la politique du « un sur deux » n’a en réalité per-mis d’économiser que 373 m €, une fois déduit l’effet dedéparts en retraite plus nombreux que prévus. Elle a enrevanche clairement contribué à augmenter le nombred’heures supplémentaires, qui coûtent 1,3 md € pour laseule mission education nationale, soit 2,2% de lamasse salariale de celle-ci.

au-delà de l’inefficacité et de l’injustice d’une telleapproche arithmétique des effectifs –qui cachent detrès grandes disparités entre secteurs sur la ventilationdes presque 32 000 ETP supprimés en 2011-, les dépens-es de personnels ont continué à croître, sous l’effetnotamment des mesures catégorielles mises en œuvre(562,2 M).

2.3. un budget rendu insincère par une évaluationdéfaillante des dépenses

Le rapport de gestion témoigne que de très nombreusesmissions ont été chroniquement sous-budgétées,nécessitant des interventions sur les crédits en lois definances rectificatives. Cette sous-évaluation, soulignée chaque année tant parle Parti socialiste que par la Cour des Comptes, s’expliquepour partie par le recours croissant aux dépenses fis-cales. Difficilement prévisibles a priori, et fortement évo-lutives, elles devront faire l’objet d’une évaluation a pos-teriori, en s’appuyant sur les enseignements des lois derèglement.

parmi les quatre lois de finances rectificatives interv-enues en 2011 (29 juillet, 19 septembre, 2 novembre et28 décembre), la deuxième et la troisième portaientessentiellement sur la solidarité financièreeuropéenne, soit directement dans la loi du 19 septem-bre –qui fixe les modalités de soutien à la Grèce et ren-force les capacités d’action du FESF- soit, plus indirecte-ment, en redéfinissant la garantie apportée à DEXIA (loidu 2 novembre).Ces engagements posent la question plus globale del’insuffisance du recensement et de l’évaluation desengagements hors-bilan de l’etat, soulignée par la Courdes Comptes, et sur les conséquences financières àterme de telles garanties. François Marc a donc proposéà la Commission des Finances d’ajouter à la loi de règle-ment un article imposant la présentation, à l’occasion dechaque loi de règlement, de l’ensemble des garantiesaccordées par l’etat et des limites dans lesquelles ellessont accordées.

Cette disposition va dans le sens des réserves sub-stantielles émises par la cour des comptes, qui regret-tait à l’occasion de certification des comptes de l’Etatpour 2011 que « dans l’attente de la création d’un outilrecensant l’ensemble des garanties de l’Etat accordéespar une loi de finances, ainsi que les actes administratifsqui s’y rapportent, il n’est pas possible de disposer d’uneassurance raisonnable sur l’exhaustivité et l’évaluationdes engagements hors bilan de l’Etat pris dans le cadred’accords bien définis » (rapport de mai 2012, p. 53).________________

1 90,7 Md € contre 148,8 Md € en 2010, soir un passage de 7,1%à 5,2% du PIB2 Objectif de stabilisation des dépenses et prélèvements surrecettes –hors remboursement et dégrèvements et fonds de con-cours- en tenant compte de l’inflation3 Hors charge de la dette et hors pensions4 Notamment 900 M€ en cas de condamnation sur le précomptemobilier5 Notamment le versement de 900 M€ prévu dans le cadre du pro-gramme de prêt à la Grèce, finalement effectué par le FESF

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 5

la proposition de loi déposée en février 2011 par le groupesocialiste, sous l’impulsion de François Marc et FrançoisRebsamen, visait à mettre fin à ce « mitage » de l’IS, par (i)l’abrogation du régime du bénéfice mondial consolidé, (ii)l’instauration d’un seuil minimal effectif égal à la moitié dutaux facial actuel et (iii) la modulation de l’iS en fonction duréinvestissement des bénéfices dégagés.

La majorité de l’époque, après avoir écarté cette proposition, aabrogé le régime du BMC dans la troisième loi de finances rec-tificative pour 2011. Le projet de loi de finances rectificativesprésenté par le nouveau Gouvernement reprend pour sa part lapriorité donnée au réinvestissement, en introduisant une con-tribution additionnelle sur les montants de dividendes dis-tribués.

Page 6: Bulletin Spécial Finances publiques

1) un nouveau départ : le débat d’orientation budgé-taire de juillet 2012

► prévu par l'article 48 de la lolF, le débat d'orienta-tion des finances publiques (DOFP) constitue le rendez-vous budgétaire du début de l'été.

• Le DOFP permet au Gouvernement de présenter lecadrage des projets de loi de finances (et de finance-ment de la sécurité sociale) qui seront déposés à l'au-tomne.

• en 2012, le débat d'orientation des financespubliques s'inscrit, pour la deuxième fois, dans le cadredu « semestre européen », qui instaure une procédurede surveillance de la préparation des budgets nationauxpar les autorités communautaires.

• en 2012, également, ce débat s’inscrit, comme en2011, dans un contexte d’extrême fragilité des financespubliques de la France : la situation du budget de l'Etatreste très dégradée, le déficit étant plus de deux foissupérieur à celui de 2006, dont le précédentGouvernement avait hérité.

• en 2012, enfin, le Gouvernement issu des électionslégislatives de juin a demandé à la Cour des comptes unaudit des comptes publics, censé aider leditGouvernement à effectuer ses choix stratégiques de tra-jectoire des finances publiques en toute connaissance decause : pour cette raison, le débat d’orientation desfinances publiques ne porte pas seulement sur les per-spectives budgétaires 2013, ni sur celles de la période2013-2017, mais d’abord sur les perspectives immédi-ates du 2ème semestre 2012, lequel sera marqué par unprojet de loi de finances rectificative 2012 n° 2.

2) les principes de la nouvelle stratégie gouverne-mentale

• la situation économique française, et celle de sesfinances publiques, se sont nettement dégradées en2011, malgré une amélioration du déficit public en2011, qui a tenu pour plus de la moitié à la dissipation defacteurs conjoncturels ou exceptionnels.

• Malgré le redémarrage de l’activité en fin d’année,la croissance devrait être modeste en 2012.

• L’audit de la Cour des comptes remis auGouvernement début juillet a mis en évidence la néces-sité de mesures de redressement.

• la stratégie de redressement des financespubliques que le nouveau Gouvernement entend appli-quer dès 2012 repose sur :- des prévisions sincères,- une première étape de la réforme fiscale dans lesens d’une plus grande justice, permettant de respecterla trajectoire de finances publiques choisie,- une gestion responsable et juste de la dépensepublique.

• Pour ce qui est des perspectives économiques etde finances publiques pour 2013 :- les nouvelles orientations mises en oeuvre auxniveaux européen et national devraient permettre à laFrance de renouer avec la croissance et les créationsd’emploi,- la poursuite de l’effort de redressement des financespubliques devrait garantir le retour du déficit à 3 % en2013,

• Pour ce qui est du retour a l’équilibre des financespubliques en 2017, il devrait être atteint :- grâce à plus d’équité, de justice et de vérité,- dans le respect des engagements européens de laFrance,- par la refondation et la modernisation de l’actionpublique,- par l’instauration d’une procédure d’évaluation desinvestissements,- et par le renforcement des règles de gouvernancedes finances publiques.

• le poids de la dépense publique dans le piBdevrait diminuer de 2,5 points d’ici 2017, grâce à uneévolution en volume limitée à 0,8 % sur la période 2013-2017, cet effort devant porter sur l’ensemble des admin-istrations publiques :

- pour l’etat, une stabilisation en valeur des dépen-ses, hors charge de la dette et des pensions :

note de travai l . . .

les orientations des finances publiques pour le 2ème semestre 2012 etpour 2013-2017Débat à l’assemblée nationale : 10 juillet 2012Débat au Sénat : mardi 17 juillet 2012

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 6

Page 7: Bulletin Spécial Finances publiques

stabilité globale des effectifs et de la massesalariale, importante réduction des dépenses de fonction-nement ;- pour les opérateurs : mêmes règles que pourl’Etat ;- pour les collectivités territoriales : stabilisation desconcours ;- pour les administrations de sécurité sociale : mo-dération des dépenses.

• La hausse des prélèvements obligatoires doit êtreconcentrée sur 2012 et 2013.

• Dès 2014, la part de la dette dans la richessenationale devrait commencer à baisser, permettant desortir de la spirale de l’endettement public.

• En 2017, la dette publique devrait avoir reflué de7,3 points par rapport à 2012, ce qui constituerait unerupture majeure après dix ans de progression quasi inin-terrompue (+ 27 points).

3) la mise en œuvre de la stratégie gouvernementaleen 2012

• Le 2 juillet 2012, le Premier président de la Courdes comptes a remis au Premier ministre un rapportd’audit (non contraignant) sur la situation des financespubliques, qui lui avait été demandé le 18 mai, danslequel la Cour :- met en garde le Gouvernement contre le niveau dela dette publique, qui devrait dépasser 90 % du PIB à lafin de l’année 2012 ;- estime que, dans un contexte de croissance plusfaible que prévu, le Gouvernement devrait trouver aumoins 33 MD€ pour ramener le déficit public à 3 % en2013, conformément au critère défini par le traité deMaastricht ;- et préconise un effort pouvant être accompli, sansremettre en cause le cœur de l’action publique, tout enaméliorant l’efficacité de celle-ci, consistant à :

o baisser les dépenses publiques, o réduire le nombre de fonctionnaires, o réduire les doublons administratifs, o voire augmenter le taux d’impôts à assiette large (TVA ou CSG).

• Le 3 juillet 2012, dans son discours de politiquegénérale, le Premier ministre a exposé que - le rétablissement des comptes publics était unenjeu majeur, avec pour objectif :

o de maîtriser la dépense publique,o et de trouver de nouvelles recettes fiscales

- qu’il convenait de rejeter l’emploi du terme« rigueur », au motif qu’avait été anticipée pendant lacampagne électorale la faiblesse de la croissance en2012. • Le Gouvernement fonde désormais sa perspectivebudgétaire :- sur une croissance de 0,3 % en 2012 (au lieu de0,5 % annoncée par François Hollande pendant la cam-pagne électorale) ;- sur une croissance de 1,2 % en 2013 (au lieu de1,7 % envisagée auparavant) ;- sur 3 priorités (jeunesse, sécurité et justice) devantentraîner des choix subséquents dans tous les autressecteurs budgétaires ;- avec un objectif :

o de stabilité globale du nombre de fonction-naires,

o d’équilibre entre la création (pour lessecteurs prioritaires) et la disparition d’emplois dans lafonction publique. Pour la période 2013-2015, lessecteurs non prioritaires connaitront une baisse de 2,5 %de leurs effectifs, soit environ 15.000 postes non rem-placés chaque année, quand il est prévu d’en créer12.000 par an. Jean-Marc Ayrault a également confirméle plafonnement des niches fiscales, la création d’unenouvelle tranche d’impôts à 45 % ainsi qu’un taux d’im-position de 75 % pour les revenus dépassant un milliond’euros par an.

• En conséquence, pour la partie de l’année 2012restant à courir (soit le 2ème semestre 2012), le projetde loi de finances rectificative de juillet 2012 (collectifbudgétaire 2012 n°2), présenté au conseil des ministresdu 4 juillet 2012, et examiné à l’Assemblée nationale àpartir du 16 juillet, prévoit notamment, pour atteindrel'objectif de limitation du déficit public à 4,5 % de larichesse nationale en 2012 :

- la révision à la baisse de 7,1 mD€ des prévisionsde recettes des administrations publiques pour 2012,dont 5,1 MD€ pour l'Etat :

o 3,4 MD€ au titre de l’impôt sur les sociétés, lebénéfice fiscal 2011 ayant été largement surestimé ;

o 1,4 MD€ au titre de la TVA, dont 1 MD€ lié àune mauvaise prise en compte de la correction en droitsconstatés de la TVA 2011 et 0,4 MD€ à la révision à labaisse de la croissance ;

o 0,3 MD€ au titre de recettes diverses.

- et le redressement parallèle des recettespubliques à hauteur de 7,2 MD€ en 2012 (+ 6,1 MD€ en2013) grâce, notamment, aux mesures suivantes :

o une taxe de 3 % sur les dividendes distribuéspar les entreprises de plus de 250 M€ de chiffre d'affaires(dont seront donc exonérées les PME),

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 7

Page 8: Bulletin Spécial Finances publiques

o la réduction de diverses niches fiscales etsociales (comme les versements des entreprises au titrede l'épargne salariale qui se verront appliquer un forfaitsocial de 20 %, au lieu de 8 % actuellement),

o la limitation de l'optimisation fiscale desentreprises (comme le transfert de bénéfices àl'étranger),

o un acompte sur la contribution exception-nelle à l'impôt sur les sociétés payée par les entreprisesde plus de 250 M€ de chiffre d'affaires.

o le doublement de la taxe de risque sys-témique pesant sur les banques,

o le doublement de la taxe sur les transactionsfinancières (acquisitions d'actions),

o la soumission des stocks de produitspétroliers détenus par les entreprises à une taxe excep-tionnelle de 4 %,

o une contribution exceptionnelle sur la for-tune au titre de 2012,

o la réduction des abattements en ligne directepour le calcul des droits de succession et de donation à100 000 € par ascendant et par enfant,

o l’allongement du délai de rapport fiscal desdonations de 10 à 15 ans,

Nota - Ces deux dernières mesures épargneront lesclasses moyennes : après réforme, 88 % des successionsresteront exonérées d'impôt (contre 95 % auparavant),et le délai de rapport fiscal des donations profite essen-tiellement aux successions figurant parmi les 10 % lesplus importantes.

o le maintien de 2 points des prélèvementssociaux portant sur les revenus du capital, prévue dans lecadre de la « TVA sociale »,

o l’annulation de la hausse de la TVA program-mée par le gouvernement précédent pour faire de cettetaxe une « TVA sociale » (et qui avait consisté en uneaugmentation de 1,6 point du taux normal de TVA),

o l’alourdissement de la taxation des stock-options,

o la soumission aux prélèvements sociaux desrevenus immobiliers des non-résidents.

o la suppression de l’exonération des cotisa-tions sociales dont bénéficient les heures supplémen-taires (sauf pour la part patronale des entreprises demoins de 20 salariés),

o l'ouverture de 89,5 M€ de crédits pour l’en-seignement, financés par l’annulation de crédits à dueconcurrence sur les crédits des autres missions,

o le financement de la majoration de 25 % del'allocation de rentrée scolaire, qui interviendra dès larentrée 2012, en vue de soutenir le pouvoir d'achat desclasses moyennes et populaires.

4) une situation exceptionnelle et un lourd héritage

• la France traverse depuis 4 ans une crise sévère,qui a frappé l’ensemble de l’économie mondiale.

• Cette crise est avant tout le résultat des dérègle-ments du système financier, des déséquilibres et desexcès d’endettement qui les ont accompagnés. Partiedes Etats-Unis en 2008, elle s’est prolongée en Europe àpartir de 2010, faute de mécanismes de résolution rapi-des et efficaces, et d’une perspective politique pourl’avenir de l’Europe.

• Mais la crise a, en France, des causes plus pro-fondes :- elle traduit l’essoufflement d’un modèle de crois-sance qui n’a pas tenu ses promesses, et que la récessionde 2009 a fragilisé encore davantage, - et elle résulte également de choix qui n’ont passuffisamment préparé l’avenir.

5) un triple déficit pour la France : déficit de crois-sance, déficit de crédibilité, déficit de confiance

a) un déficit de croissance

• Au milieu de l’année 2012, l’économie françaiseconnaît une croissance atone :- elle n’a pas encore retrouvé le niveau d’activitéd’avant 2008 ;- le pouvoir d’achat des Français n’a pas progressédepuis 2007 ;- le chômage frappe 10 % de la population active(contre 7,5 % en 2007), les jeunes rencontrant toujoursdavantage de difficultés à s’insérer dans le marché dutravail.

• L’économie française souffre d’une demande peudynamique :- du fait de la situation économique de ses parte-naires européens, contraints à des politiques d’austéritéen l’absence de solution d’ensemble à la crise des dettessouveraines ;- mais également en raison de facteurs internes :

o faiblesse de l’investissement des entrepri-ses, en raison d’un climat d’incertitude ;

o faiblesse de la consommation des ménages,notamment les plus fragiles, en raison d’un pouvoird’achat qui recule depuis trois trimestres ;

o faiblesse de la demande publique, notam-ment de l’investissement local.• La crise a également révélé les faiblesses struc-turelles de l’appareil productif : - Depuis 5 ans, la dégradation de la balance com-merciale, dont le déficit a atteint un record historique en2011, est le corollaire des pertes considérables de partsde marchés à l’exportation. - Les entreprises françaises, et particulièrement lespme ou les eti (entreprises de taille intermédiaire), souf-frent d’un environnement peu propice aux investisse-ments, à l’innovation et à la recherche, en raison d’unsystème fiscal qui avantage essentiellement les grands

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groupes, ainsi que de difficultés d’accès aux finance-ments. - L’investissement des entreprises souffre aussi de lacompression des marges de ces entreprises : leur tauxde marge a reculé de plus de 3 points en 5 ans, du fait dela progression des coûts de production : le problème dela perte de compétitivité des entreprises doit être traitéde façon globale, et prendre en compte l’ensemble deses causes, des facteurs de coût aux facteurs « horscoût ».

b) un déficit de crédibilité

• les comptes publics dérivent depuis 10 ans :- la dette publique a augmenté de 800 MD€ depuis2002.- le déficit public est encore en 2011 de plus de100 MD€. - Comme la Cour des comptes l’a souligné, la crisen’est pas le seul facteur de dégradation des financespubliques françaises : celle-ci est avant tout d’originestructurelle et reflète les choix de politique économiqueet fiscale opérés au cours de la dernière décennie. Encomparaison, l’Allemagne, qui partait d’une situationplus dégradée que la France en 2001, a su ramener sondéficit public à un niveau proche de l’équilibre en 2011 (à1 % du PIB), malgré la crise.

• La dette publique française a surtout augmenté enraison de déficits structurels récurrents et de l’incapac-ité à réduire sensiblement les déficits en période decroissance. Or, les déficits alimentent un endettementqui conduit à prélever lourdement sur les revenus d’ac-tivité pour servir les intérêts de la dette, à favoriser larente au détriment des revenus des travailleurs et desentrepreneurs.

• La perte progressive de crédibilité de la France setraduit par des conditions moins avantageuses pour ladette française que pour la dette allemande, même si laFrance continue de se financer à un faible coût.

• Pour 2012, l’audit de la Cour des comptes a faitressortir une situation financière plus dégradée quecelle qui avait été annoncée dans le programme de sta-bilité déposé en avril 2012. - Cette dégradation n’est due qu’à la marge à l’affaib-lissement de la croissance. - Elle résulte surtout d’estimations de recettesexagérément optimistes.

c) un déficit de confiance

• les changements de cap de l’action gouvernemen-tale, ainsi que l’instabilité et la confusion de ses objectifs,ont sapé la confiance de nombreux Français dans l’actionpublique.

• Des décisions fiscales injustes, en faveur des plusprivilégiés, ont entamé la cohésion sociale.

• l’absence de concertation avant que soient prisesles grandes décisions a également accru la méfiance vis-à-vis des pouvoirs publics.

• le climat social du pays s’est détérioré, à forced’opposer certaines catégories de Français les unes con-tre les autres : les entrepreneurs contre les salariés, lafonction publique contre le secteur privé, les plus âgéscontre les jeunes.

• Il convient donc d’envisager une relation rénovéeentre l’etat et les acteurs du monde économique etsocial.

6) une stratégie de redressement économique, socialet financier

► Pour le Gouvernement, le changement d’orientationde la politique économique et sociale souhaité par lesFrançais passe par une action en faveur de la croissanceet de la solidarité au niveau national et européen, etpar un redressement des comptes publics, dans la jus-tice économique et sociale.

a) la relance du projet européen

• Pour le Gouvernement, le retour de la croissancepassera en premier lieu par une relance du projeteuropéen.

• Le sommet européen des 28 et 29 juin 2012 a sem-blé exprimer une prise de conscience collective de laprofondeur de la crise et de la nécessité d’actions degrande ampleur pour relancer la croissance et la soli-darité entre etats. Les décisions qui ont été prises ontrépondu à 3 objectifs :- mettre la croissance au premier rang des prio-rités :

o Pacte pour la croissance, plan de 120 MD€,soit 1 % du PIB de l’Union européenne,

o introduction d’une taxe sur les transactionsfinancières ;- contribuer à renforcer la stabilité financière dansla zone euro, en cassant la boucle entre dette bancaireet dette souveraine,

o avec notamment la mise en place avant la finde l'année 2012 d'une supervision bancaire intégréedans la zone euro,

o le Mécanisme européen de stabilité (MES)pouvant procéder à des recapitalisations directes desinstitutions financières en difficulté ;- approfondir l'union économique et monétaire, entravaillant autour d'une « feuille de route » proposéeavant fin 2012, où la France devrait défendre la vision

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d'une intégration solidaire en matière financière, budgé-taire et économique, en veillant au renforcement de ladémocratie dans les décisions européennes.

• C'est parce que le Conseil européen sembleassumer cette réorientation d'ensemble au planeuropéen, qui complète et rééquilibre l'approche suiviejusqu'à présent, que le Président de la République aannoncé qu'il proposerait, en France, la ratification dutraité sur la stabilité, la coordination et la gouvernanceau Parlement.

• Ce Conseil européen a semblé commencer à mar-quer une vision équilibrée de la réponse à la crise et dela construction de l'europe, fondée sur la responsabilitébudgétaire, la croissance et la stabilité financière, dansune perspective d’intégration solidaire.

b) les premières actions du gouvernement

• Le Gouvernement a pris, dès son entrée en fonc-tion, des décisions en faveur de la justice, de l’emploi etdu pouvoir d’achat des ménages les plus fragiles :- Un décret a permis le départ à la retraite à 60 anspour ceux qui ont commencé à travailler avant 20 ans. - Dès 2012, l’allocation de rentrée scolaire (ARS) estrevalorisée de 25 %, pour soutenir le pouvoir d’achat desfamilles modestes. - Le SMIC a fait l’objet d’une petite augmentation au1er juillet.

• ces mesures sont intégralement financées et nepèsent pas sur les comptes publics.

• Par ailleurs, le projet de loi de finances rectificativede juillet va :- abroger l’augmentation de la tVa (« TVA sociale »),qui aurait constitué une ponction importante sur le pou-voir d’achat des classes moyennes,- supprimer les avantages consentis aux heures sup-plémentaires, dont les effets défavorables sur l’emploiont été démontrés, et qui a induit une hausse du chô-mage dans une conjoncture défavorable. La dégradationde la situation économique commande en effet, à courtterme, d’amplifier les actions en faveur de la demande.Les politiques visant à accroître nos capacités devraientquant à elles jouer plus graduellement.

• Enfin, face à une situation plus dégradée qu’annon-cé, le Gouvernement a commencé à remettre en ordreles finances publiques, condition indispensable duretour de la confiance : il a annoncé un ensemble derègles de gestion responsable des finances publiques.

• Les mesures du projet de loi de finances rectifica-tive de juillet garantissent le respect de l’objectif dedéficit pour 2012 à 4,5 % de la richesse nationale, tout

en préservant la croissance et en rétablissant la justicesociale et fiscale.

c) le soutien à la croissance et à l’emploi

• Au cours des prochains mois, le Gouvernement doitmettre en oeuvre, en concertation avec les partenairessociaux, des mesures en faveur de l’emploi : - le contrat de génération pour lutter contre le chô-mage des jeunes et des seniors, - la sécurisation des parcours professionnels, - la création de 150 000 emplois d’avenir pourfaciliter l’insertion des jeunes dans l’emploi.

• Le soutien au pouvoir d’achat des ménages passerapar une action sur le prix de certains biens, à com-mencer par la santé et le logement, qui figurent parmiles dépenses dites « contraintes » des ménages : - l’encadrement des dépassements d’honoraires,- l’encadrement des loyers, dans les villes où la situa-tion est particulièrement tendue.- Une politique d’accroissement de l’offre de foncieret de logements doit, par ailleurs, être mise en oeuvre,afin de stimuler rapidement le secteur du bâtiment, etde faire baisser, pour les ménages, le coût d’accès aulogement. - D’autres leviers doivent être mobilisés pouraccroître les ressources disponibles et l’efficacité des dis-positifs en faveur du logement :

o recours à l’épargne populaire, o taxation du foncier inutilisé,o simplification des procédures d’aboutisse-

ment des projets.

• Le Gouvernement prévoit aussi d’oeuvrer enfaveur de l’investissement des entreprises, condition duredressement productif, en mobilisant 2 leviers : lafinance et la fiscalité. - la finance doit être remise au service de l’é-conomie réelle, avec :

o la création d’une Banque publique d’in-vestissement,

o la réforme bancaire séparant les activitésutiles à l’investissement des opérations bancaires spécu-latives,

o la mise en place d’une bourse au service desentreprises pour les aider à lever des capitaux,

o la réforme de l’épargne réglementée,- la fiscalité doit permettre de faciliter l’accès aucrédit des entreprises, avec :

o la réforme de la fiscalité de l’épargne, o la réforme, plus générale, d’une fiscalité ren-

due plus lisible, plus efficace et plus juste, qui devraitfavoriser les entreprises qui investissent (en particulierles PME et les ETI), au détriment de celles qui délo-calisent, et qui, plus généralement, devrait être mise auservice de la compétitivité des entreprises.

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• Par ailleurs, le potentiel de croissance devrait êtrerenforcé par des actions en faveur de :

o la jeunesse, o de la rénovation du système éducatif et de la

formation tout au long de la vie,o de la transition énergétique.

d) le redressement des comptes publics dans la justice

• Le redressement des comptes publics est impératifpour :- restaurer la crédibilité financière, - contribuer au redressement du pays,- conserver sa souveraineté face aux marchésfinanciers.

• Mais pour être compris et pour être efficace, ceredressement doit être conduit dans un esprit de justiceet dans un souci d’efficacité économique :- en préservant la croissance à court terme dans uncontexte de faiblesse conjoncturelle, - et en réalisant une réforme des prélèvements obli-gatoires qui permette d’accroître les capacités d’offre etla compétitivité à moyen terme de l’économie française.

• La situation macroéconomique de la France justifiede procéder à un partage équilibré des efforts entrerecettes et dépenses :- un effort particulièrement important sera accomplien 2013, avec le retour du déficit à 3 % du PIB ;- tandis que la poursuite de la politique de redresse-ment devait permettre d’atteindre l’équilibre descomptes publics en 2017.- L’effort immédiat portera davantage sur lesrecettes, - tandis que les efforts en matière de dépenses sedéploieront sur la totalité de la mandature.

• afin de ne pas peser sur une croissance affaiblie,seront privilégiées des mesures fiscales portant sur :- l’épargne, - le patrimoine financier,- la suppression de dispositifs inefficaces, - la mise à contribution des ménages les plus aisés,disposant d’une capacité d’épargne plus substantielle, etdes grandes entreprises, dont les taux d’imposition sontles moins élevés,

• la maîtrise de la dépense publique et le sérieuxbudgétaire doivent être au service des priorités de lamajorité en matière d’emploi, d’éducation, de justice, desécurité, de logement, de santé et d’environnement. - Mais pour que les efforts fiscaux soient acceptés,l’argent public doit être dépensé au plus juste.- Pour cette raison, toutes les administrationspubliques devraient contribuer à l’effort de redresse-ment :

o les effectifs de l’Etat seront stabilisés pendantles 5 prochaines années,

o les hausses d’effectifs dans l’enseignement, lajustice et la sécurité seront compensées par des baissesd’effectifs ailleurs.

• En ce qui concerne les administrations de sécuritésociale, les réformes de la dépendance et la négociationglobale sur les retraites doivent s’engager avec les parte-naires sociaux dans un cadre financier durablementéquilibré, les dépenses d’assurance maladie devant êtremaîtrisées.

• Dans le cadre d’un nouvel acte de décentralisa-tion, un pacte de confiance et de solidarité doit être con-clu entre l’Etat et les collectivités locales, associant cesdernières à l’effort de redressement, tout en garantissantplus de justice, ce qui passe par le renforcement desmécanismes de péréquation horizontale.

7) une nouvelle méthode du gouvernement

• Le Gouvernement doit mettre en oeuvre leredressement économique, social et financier du paysdans la concertation avec les partenaires sociaux et, dansce but, doit rétablir un climat de confiance avec lescorps intermédiaires. - Une conférence sociale s’est tenue les 9 et 10 juilletautour des thèmes de l’emploi, de la formation et dudéveloppement des compétences, des salaires et dupouvoir d’achat, du redressement de l’appareil productif,de l’égalité entre hommes et femmes, de la qualité de vieau travail, de l’avenir des retraites et du financement dela protection sociale, et du rôle de nos services publics etde ses agents. - Cette conférence sociale devrait permettre dedéfinir, avec les partenaires sociaux, la méthode, lesmatières et un calendrier des réformes économiques etsociales des prochains mois.

• Pour assurer l’adhésion des fonctionnaires et desusagers, le Gouvernement veut redonner de la lisibilitéà l’action publique :- la révision générale des politiques publiques(RGPP) est arrêtée depuis le 6 mai. - la maîtrise des finances publiques ne sera pasdéfinie de façon arithmétique et aveugle, mais selon despriorités qui devraient contribuer au redressement dansun souci de justice. - De façon inédite, la nouvelle étape de la décentra-lisation sera conçue de façon conjointe avec la réformede l’etat.

• enfin, le projet de loi de finances pour 2013, et leprojet de loi de programmation des finances publiques2013-2017, qui seront déposés au Parlement avant ledébut du mois d’octobre, devraient marquer un effort

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particulier en début de législature pour réussir leredressement du pays dans la justice.

8) De nouvelles perspectives économiques et definances publiques

• A très court terme, le redressement de la situationconjoncturelle devrait être très graduel. - La croissance ne devrait s’établir qu’à 0,3 % en2012, hypothèse prudente retenue pour l’élaboration duprojet de loi de finances rectificative, conforme au con-sensus des économistes, et proche de celle anticipéeaujourd’hui par l’INSEE (0,4 %). - la faiblesse de la croissance en 2012 est déjàprévisible, compte tenu de l’acquis de croissance à l’issuedu premier trimestre et de la faiblesse de la productionindustrielle en avril.

• La France devrait pouvoir renouer progressive-ment avec la croissance en fin d’année 2012, puis toutau long de l’année 2013. - La croissance pourrait atteindre 1,2 % en moyenneannuelle en 2013. Cette hypothèse (qui correspond auxprévisions des institutions internationales) est prudente,et repose sur un scénario de dissipation très progressivedes tensions financières. - L’économie ne recommencerait à créer des emploisqu’en 2013, car la résistance de l’emploi au début de2012 traduit probablement un blocage temporaire deplans sociaux et un recours massif, par le Gouvernementprécédent, aux contrats aidés en période électorale.

• le retour de la confiance devrait permettre ensuited’atteindre une croissance comprise entre 2 % et 2,5 %entre 2014 et 2017. Par prudence, la trajectoire deretour à l’équilibre des comptes publics en 2017 est con-struite sur le bas de cette fourchette.

• le déficit public devrait s’établir :- à 4,5 % du PIB en 2012, - puis à 3 % en 2013, après les mesures du PLFR dejuillet 2012 et du projet de loi de finances pour 2013. - L’équilibre des comptes publics devrait être rétablien 2017.

• Sur l’ensemble de la trajectoire, l’évolution de ladépense publique devrait être maîtrisée : + 0,8 %, enmoyenne, sur 2013-2017.

• le taux de prélèvements obligatoires devraitatteindre 46,5 % du PIB en 2017, avec une modificationimportante de sa composition par rapport à la situationactuelle :- la réforme fiscale devrait permettre de rendre lesystème de prélèvements français plus efficace et plusjuste,

- et de mieux répartir la charge :o entre PME, entreprises de taille intermédiaire

et grands groupes, o entre ménages aisés et dotés de patrimoines

importants et classes moyennes et ménages modestes.

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2) préSentation Du DiSpoSitiF

► le projet de loi vise à :

- commencer à redresser l’économie françaisedans la justice des comptes publics,

- garantir le respect par la France de ses objec-tifs en matière de réduction du déficit,

- et mettre en oeuvre les engagements pris parle Président de la République.

i. réduction du déficit public

• recettes - Le PLFR prend en compte une révision àla baisse de 7,1 mD€ des prévisions de recettes desadministrations publiques pour 2012, dont 5,1 MD€ pourl'Etat :- pour 5,9 MD€, cette réduction est essentiellementdue à la révision à la baisse des prévisions exagérémentoptimistes des recettes retenues par le précédentGouvernement, indépendamment de la croissance ;- pour 2,4 MD€, cette réduction est due à la révisionà la baisse de 0,3 % de la croissance économique. - A l'inverse, les prévisions de certaines recettes ontété révisées à la hausse de 1,2 MD€.

• Dépenses- L'audit de la Cour des comptes faisant état d'unrisque en exécution sur la dépense de l'Etat (hors chargede la dette et des pensions), estimé entre 1,2 MD€ et2 MD€, dû en partie à des hypothèses optimistes deconstruction du budget initial,

- le Gouvernement a décidé, afin de maîtriser cesrisques, de maintenir la réserve initiale et d'augmenterson montant de 1,5 MD€.

• Déficit

- Pour atteindre l'objectif de limitation du déficitpublic à 4,5 % du PIB en 2012,

- les dispositions fiscales et de recettes socialesinscrites dans le PLFR devraient permettre de redresserles recettes publiques de 7,2 mD€ en 2012, soit un mon-tant équivalent à la révision de la prévision de recettes.

• prélèvements - l’effort contributif devant, pourêtre juste, être demandé en priorité à ceux qui en ont lesmoyens, tout en épargnant les plus modestes, les hauss-es de prélèvements sont ciblées sur les entreprises et lesménages disposant des capacités contributives les plusimportantes.

S’agissant des plus grandes entreprises :- taxe de 3 % sur les dividendes distribués par lesentreprises de plus de 250 M€ de chiffre d'affaires, lesPME en étant exonérées ;- réduction de diverses niches fiscales et sociales,notamment les versements réalisés par les entreprisesau titre de l'épargne salariale, qui se verront appliquerun forfait social de 20 % (contre 8 % actuellement) ;- adoption de diverses mesures techniques, afin delimiter l'optimisation fiscale des entreprises et, en parti-culier, le transfert de bénéfices à l'étranger ;

note de travai l . . .

loi de finances rectificative pour 2012

collectif budgétaire 2012 n° 2

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1) calenDrier

assemblée nationale- PJL n° 71, présenté en Conseil des ministres le 4 juillet 2012- Rapport de la commission des finances n° 79 (Christian Eckert)- Rapport pour avis de la commission des affaires culturelles n° 78 (Martine Faure)- Rapport pour avis de la commission des affaires sociales n° 77 (Denys Robiliard)- Discussion en séance publique : 16-17-18 juillet

Sénat- Rapport de la commission des finances (François Marc) : 23 juillet- Rapporteur de la commission des affaires culturelles : Françoise Cartron- Rapporteur de la commission des affaires sociales : Yves Daudigny- Discussion en séance publique : mardi 24 – mercredi 25 – jeudi 26 juillet

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- acompte sur la contribution exceptionnelle à l'im-pôt sur les sociétés payée par les entreprises de plus de250 M€ de chiffre d'affaires.

S’agissant des mesures sectorielles :

- doublement de la taxe de risque systémiquepesant sur les banques ;- doublement de la taxe sur les transactions finan-cières (acquisitions d'actions) ;- taxe exceptionnelle de 4 % sur les stocks de pro-duits pétroliers détenus par les entreprises.

S’agissant des ménages, les mesures fiscalespèsent essentiellement sur les plus aisés :- contribution exceptionnelle sur la fortune au titrede 2012 ;- réduction des abattements en ligne directe pour lecalcul des droits de succession et de donation à100 000 € par ascendant et par enfant ;- allongement du délai de rapport fiscal des dona-tions de 10 à 15 ans ;

► ces mesures épargneront les classesmoyennes : 88 % des successions resteront exonéréesd'impôt (contre 95 % auparavant), le délai de rapport fis-cal des donations profitant essentiellement aux 10 %plus importantes successions.- maintien de l’'augmentation de 2 points desprélèvements sociaux portant sur les revenus du capi-tal, prévue dans le cadre de la « TVA sociale » par leprécédent gouvernement ;- suppression de la hausse de la tVa votée par laprécédente majorité : l'augmentation de 1,6 point dutaux normal, qui devait être applicable au 1er octobre(contre une baisse des cotisations patronales), auraitconduit à ponctionner de plus de 10,6 MD€ par an lepouvoir d'achat des Français ;- augmentation de la taxation des stock-options ;- soumission aux prélèvements sociaux des revenusimmobiliers des non-résidents ;- abrogation de l'exonération de cotisations socialesdont bénéficient les heures supplémentaires, sauf pourla part patronale des entreprises de moins de 20 salariés,compte tenu de la situation de l'emploi et des financespubliques.

ii. mise en oeuvre des engagements du président de larépublique

• l'enseignement bénéficie de 89,5 M€ d'ouverturesde crédits, financés par annulation de crédits à due con-currence sur les crédits des autres missions.

• le pouvoir d'achat des classes moyennes et popu-laires est soutenu, par souci de justice autant que d'effi-cacité économique.

• la majoration de 25 % de l'allocation de rentréescolaire, qui interviendra dès la rentrée 2012, estfinancée.

• la hausse de la tVa, programmée par le précédentgouvernement, est annulée.

• toutes les mesures prises par le gouvernementsont intégralement financées soit par des économies,soit par des recettes supplémentaires.

3) FocuS

■ a - pour commencer à rééquilibrer les comptespublics, malgré la révision à la baisse des perspectivesde croissance, le gouvernement fait appel à la contri-bution de ceux qui ont échappé à l’effort collectif de parla volonté du gouvernement précédent

• la « philosophie » du plFr 2012 n° 2 peut serésumer :- en un effort nécessaire, mais juste, qui doit perme-ttre à la France d’afficher un déficit limité à 4,5 % du PIBà la fin de 2012,- grâce à une première diminution des dépenses, - et à une forte contribution demandée aux con-tribuables aisés et fortunés, ainsi qu’aux grandesentreprises.

• pour justifier les nombreuses augmentations deprélèvements, le gouvernement a mis en avant deuxexplications : - « l’ardoise cachée » du précédent Gouvernement(des mesures non financées) ;- et une croissance anémiée, estimée à tout juste0,3 % en 2012 :

o et à 1,2 % en 2013 (au lieu du 1,7 % espérépar le candidat Hollande), chiffre assez proche du chiffrede 1 % qu’avait estimé la Cour des comptes qui, dans sonrécent audit, a chiffré à 33 MD€ le besoin de finance-ment du budget 2013, afin de ramener le déficit public à3 %.

• Aussi les mesures prises au travers du collectifbudgétaire ont-elles été considérées comme indispen-sables pour éviter que le déficit budgétaire n’atteigne5 % à fin 2012.

• première loi budgétaire du quinquennat deFrançois Hollande, ce projet de loi repose essentielle-ment sur :- des hausses d’impôts, pour un montant de7,2 MD€ (presque le double en 2013),- et un gel de dépenses, pour un montant de1,5 MD€,

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Page 15: Bulletin Spécial Finances publiques

- le déficit budgétaire étant porté à 81,1 MD€, lesmoins-values fiscales étant compensées par les nouvelleshausses d'impôts.- Le Gouvernent a promis de s’attaquer, dès le bud-get 2013, à la réduction des dépenses, afin de parvenirà l’équilibre budgétaire en 2017,- mais le plFr supprime dès maintenant desmesures emblématiques du précédent quinquennat,comme la TVA sociale, les exonérations sociales et fis-cales liées aux heures supplémentaires ou la quasi-dis-parition des droits de mutation.

• pour procéder au redressement dans la justice, leGouvernement a décidé de faire surtout appel à la con-tribution de ceux qui ont bénéficié de manièredéraisonnable des décisions de ces dernières années :symbole de cette volonté, la contribution exceptionnellesur la fortune, contribution qui devrait rapporter le plusen 2012, mais qui s’accompagne de nombreuses hauss-es de prélèvements, partagées entre entreprises etménages, principalement, et par ordre décroissant :

- la contribution exceptionnelle sur la fortune(2,3 MD€),- la suppression des allègements sociaux attachésaux heures supplémentaires (980 M€),- le maintien de la hausse des prélèvements sociauxsur les revenus du capital (800 M€),- le doublement de la taxe de risque systémique desbanques (800 M€), ajouté par l’Assemblée nationale,- le versement anticipé de la contribution exception-nelle de l’impôt sur les sociétés (800 M€),- une contribution exceptionnelle des banques(550 M€),- une contribution exceptionnelle du secteur pétroli-er (550 M€),- la hausse du forfait social (550 M€)- le doublement de la taxe sur les transactions finan-cières (170 M€),- la hausse des droits de mutation (140 M€),- la hausse de la contribution de France Télécom(125 M€)- la hausse du prélèvement social sur les stock-options (75 M€),

• le gouvernement considère que ce premier textebudgétaire n’est qu’une étape de son plan de redresse-ment dans la justice, le but de la trajectoire budgétairedevant être le rétablissement de l’équilibre en 2017.

- les grandes lignes du plan quinquennal de réta-blissement de l’équilibre budgétaire en 2017 ont ététracées dans le rapport préparatoire au débat d’orienta-tion des finances publiques, qui insistait sur la volonté duGouvernement de resserrer les dépenses publiques(Etat, collectivités locales, Sécurité sociale), qui nedevront pas augmenter de plus de 0,8 % par an (en vo-

lume, c'est-à-dire en plus de l'inflation), ce taux étantplus rigoureux que le 1,1 % avancé par le candidatHollande, puisque les prévisions de croissance ont,entre-temps, été revues à la baisse. la différence(0,3 point rapporté à 1.100 mD€ de dépenses) n'est pasnégligeable, puisqu'elle représente des économies sup-plémentaires sur les dépenses de plus de 3 mD€ par an.

Pour y parvenir :o les dépenses de l'Etat seront gelées en valeur

absolue pendant 5 ans,o de même que les dotations aux collectivités

locales,o et les dépenses de santé devront être parti-

culièrement surveillées, le Gouvernement entendantcontenir leur hausse à 2,7 % en 2013, puis à 2,5 % lesannées suivantes, alors qu’elles augmentent naturelle-ment de près de 4 %. - Le défi que s’est fixé le Gouvernement consiste ence que le collectif budgétaire doit avoir un effet immédi-at sur les recettes (les hausses d’impôts devant être con-centrées sur 2012-2013, tandis que les lois de financesqui suivront doivent produire des effets sur les dépensestout au long du quinquennat.

• le gouvernement s’est vu contraint de prendre encompte des paramètres nouveaux :

- outre la révision à la baisse de la croissance pour2012 (0,3 % de croissance) et 2013 (1,2 %), - le gouvernement prévoit le retour à l'équilibrebudgétaire en 2017 sur la base d'une croissanceannuelle de 2 % à compter de 2014 (au lieu de 2 % à2,5 % précédemment). Si cette prévision s’avérait, letaux de dépenses publiques (56,2 % en 2012) serait sta-bilisé en 2013 (56,1 %), pour être ensuite abaissé jusqu'à53,4 % en 2017, soit un recul programmé de près de3 points de PIB ;- dans le PLFR, le Gouvernement porte, par ailleurs,le gel supplémentaire de crédits des ministères à1,5 MD€, afin de compenser les dépenses nonfinancées.

• A court terme, l'effort de redressement pourramener le déficit à 3 % de piB dès 2013 va d’abord etsurtout porter sur les prélèvements.

- L'ordre de grandeur d'un besoin de mesures de30 MD€ avancé par la Cour des comptes était attendu.- Les économies sur la dépense devant représenterenviron 8 MD€ en 2013, il faudra donc 20 à 25 milliardsde recettes nouvelles.- Pour ce faire, le Gouvernement anticipe, de fait,une hausse du taux de prélèvement obligatoire de1,2 point de PIB en 2013, soit près de 25 MD€.

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Page 16: Bulletin Spécial Finances publiques

■ B - la lutte contre la dette considérée comme uninstrument de souveraineté

• le rétablissement des comptes publics est consi-déré par le gouvernement comme la première prioritédu quinquennat, alors que la dette, qui atteint près de90 % de la richesse produite chaque année, représenteun poids écrasant :- elle est synonyme de moins d'écoles, moins decrèches, moins d'hôpitaux, moins de transports publics,etc…- elle est aussi un enjeu de souveraineté, car uneFrance endettée est une France dépendante desmarchés.

• D’où la nécessité, pour le Gouvernement, de fairedes choix, consécutifs à la double révision à la baisse dela croissance, à 0,3 % en 2012 et 1,2 % en 2013 :- c’est la justification des hausses d'impôts immédi-ates du collectif budgétaire ;- c’est aussi la justification du cadrage très strict pour2013-2015 des dépenses de l'Etat, gelées en valeur (horscharges de la dette et pensions). • Mais même si la situation actuelle était prévue parle Gouvernement, il est juste de rappeler que la cour descomptes a estimé que, même en stabilisant en volume ladépense publique, un objectif plus dur que celui prévupar l'exécutif (+1 %), une hausse de la CSG ou de la TVAdevrait être difficilement évitable... - Le Gouvernement va devoir démontrer que sonprogramme fiscal (tranche d'imposition à 45 % et taxe à75 % au-delà de 1 M€, alignement de la fiscalité du cap-ital sur celle du travail, plafonnement des niches, etc.,suffira à assurer le besoin de financement : ce sera l’ob-jet de la loi de finances pour 2013.- D'ici là, le Gouvernement va devoir effectuer deschoix délicats dans les secteurs qui, à la différence de l'é-ducation, de la sécurité et de la justice, ne sont pas pri-oritaires.

■ c - la suppression des allègements sociauxattachés aux heures supplémentaires

• Alors que les destructions d’emplois se multiplient,et que le chômage repart fortement à la hausse, laFrance était sans doute le seul pays au monde à avoirinstitué un système de destruction d’emplois financépar des fonds publics.

• En effet, comme n’ont cessé de le dénoncer, depuis2007, les socialistes, le dispositif sur les heures supplé-mentaires instauré par la loi TEPA conduisait à rendre,pour les entreprises, les embauches plus chères que lerecours aux heures supplémentaires. En période defaible activité, ce dispositif freinait l’embauche, et enpériode de récession, c’était une véritable machine àcréer des chômeurs.

• De plus, non seulement ce mécanisme a démontréson inefficacité totale en termes d’emploi (puisqu’ilfreinait ledit emploi et qu’il favorisait le chômage), maisil a aussi démontré son inefficacité totale en matièred’augmentation du pouvoir d’achat. Et dans la périodede crise que nous traversons, ce sont d’abord les Françaisles plus modestes et, parmi eux, les intérimaires et lestravailleurs employés en CDD, qui ont été les premiers àen faire les frais.- en termes de pouvoir d’achat, le gain de cettemesure était très inégalement réparti (moins de 40 % del’ensemble des salariés) et les salariés eux-mêmesn’avaient aucune prise dessus, faire des heures supplé-mentaires, ou ne pas en faire, dépendant d’une décisionde l’employeur. - Au total, le pouvoir d’achat par unité de consom-mation n’a augmenté que de 0,1 % par an en moyenneentre 2007 et 2010, et a même reculé en 2011 et au pre-mier trimestre 2012.

• Au regard du coût considérable qu’il représentait(4 MD€), ce système était intenable et dangereux : cesont autant de moyens qui auraient pu être utilisés poursoutenir vraiment l’emploi et le pouvoir d’achat del’ensemble des Français modestes dont ceux-ci sontprivés.

• Il était donc juste que le nouveau Gouvernementsupprime ce dispositif inique.

■ D – le renforcement de la taxation des stock-options

• la contribution sociale patronale passant de 14 %à 30 %, et la contribution salariale de 8 % à 10 %, leGouvernement en attend plus de 300 M€ par an : cettetaxation, très importante, va conduire à un régime fiscalpeu attractif.

• Le précédent Gouvernement avait introduit en2008 une contribution sociale patronale de 10 % (lors del'attribution) et une contribution salariale de 2,5 % (lorsde la levée), s'appliquant autant aux stock-optionsqu'aux actions gratuites. ces charges sociales ont étérelevées au 1er janvier 2011, afin de financer la réformedes retraites :- la contribution employeur est passée de 10 % à14 %- et celle des salariés a plus que triplé (de 2,5 % à8 %), avec des taux minorés pour les attributions gratu-ites en dessous d'un certain seuil.

• le prélèvement social libératoire va augmenter denouveau, pour bondir à 30 % pour la part patronale, etêtre porté à 10 % pour la part salariale :- la hausse de la contribution patronale s'appliqueraaux options attribuées à compter du 1er septembre (la

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contribution est en effet acquittée à l'entrée) ;- la contribution des salariés étant acquittée « à lasortie » (c’est-à-dire au moment de la vente ou de la réa-lisation de la plus-value), le nouveau taux s'appliqueraaux options attribuées depuis 2007, si elles sont cédéespostérieurement à la date d'entrée en vigueur du collec-tif.

• pour le gouvernement, le niveau des prélève-ments sociaux sur les stock-options soulève un pro-blème d'égalité :- entre les salariés n'ayant pas accès à ces formesparticulières de rémunérations,- et ceux qui en bénéficient, qui sont souvent lesmieux rémunérés dans l'entreprise.

• D'où la proposition de renforcer la convergenceentre les différentes formes de rémunération, la haussedes prélèvements sur les stock-options étant justifiée,par ailleurs, au regard de la faible utilité sociale etéconomique de ces formes de rémunération, qui ne sontpas liées à la production de valeur.

• le gouvernement prévoit un surcroît de recettesde 75 M€ en 2012 et de 317 M€ en 2013, sous unehypothèse de comportement inchangé, ce qui devraitêtre le cas, étant donné que la création d'un prélève-ment spécifique n'avait pas modifié, par le passé, le com-portement des employeurs.

• le candidat Hollande avait affirmé qu’il n'accep-tait pas les rémunérations scandaleuses, les parachutesdorés et les distributions mirifiques de stock-options, etavait même évoqué une suppression totale des stock-options, sauf pour les entreprises naissantes. Avec lahausse de la CSG sur les revenus du capital et l'alour-dissement fiscal à venir pour les plus hauts revenus(tranche d'IR à 45 %, etc.), l'attrait des stock-options vadevenir limité : mais c'est le but du Gouvernement.

■ e – l’arrêt de la prise en charge des frais de scolarité àl'étranger

• la prise en charge des frais de scolarité, sans con-dition de ressources, pour les lycéens français à l'é-tranger va être supprimée : le dispositif coûtait 32 M€.

• Le Gouvernement précédent avait fait de cettemesure, dès 2007, une mesure symbole destinée à assur-er l'égalité d'accès aux établissements d'enseignementfrançais à l'étranger :- mais vu le coût du dispositif (31,9 M€ pour l'annéescolaire 2011-2012), la prise en charge des frais de sco-larité pour les élèves français à l'étranger s'est arrêtée aulycée ;- l'an dernier, 7.600 lycéens en avaient bénéficié.

• la mesure, dénoncée par la gauche et même parune partie de la droite, au moment de sa mise en place,va être supprimée dès la rentrée prochaine : leGouvernement entend ainsi mettre un terme à l'effetd'aubaine dont ont bénéficié les grandes entreprisesprésentes à l'étranger, qui prennent généralement encharge la scolarité des enfants de leurs expatriés, cetteprise en charge des frais de scolarité n'étant soumise àaucune condition de ressources.

• maintenir la mesure n'aurait, de toute façon, étéenvisageable, en termes d'équité, que si elle s'étaitgénéralisée à tous les niveaux scolaires, comme l'avaitsouhaité initialement le Gouvernement précédent. Maisdans ce cas, ce sont 110.000 élèves qui auraient été con-cernés, soit près de 15 fois plus que le nombre de béné-ficiaires actuels. Pour cette raison, le gouvernementprécédent avait renoncé à cette extension, de nom-breux sénateurs UMP ayant même tenté, en vain, desupprimer la gratuité dans les lycées.

• Le nouveau Gouvernement indique toutefois quecette prise en charge sera remplacée à la rentrée deseptembre 2012 par un dispositif d'aides à la scolaritéplus juste : une partie des 31,9 M€ pourrait ainsi êtreredéployée pour financer des bourses scolaires en fonc-tion des besoins des familles.

■ F - le déficit de la Sécurité sociale se réduit moinsvite que prévu en 2012

• Selon la Commission des comptes de la Sécuritésociale, le déficit de la Sécurité sociale s'élèvera à15,5 mD€ en 2012, au lieu des 13,8 MD€ prévus.- Le déficit, estimé pour 2012, sans les mesures cor-rectives prises par le nouveau gouvernement, s'élève à15,5 MD€ pour le régime général, au lieu de 13,8 MD€initialement prévus lors de la loi de financement de lasécurité sociale (LFSS) votée en 2011 sous la précédentemajorité. - en 2011, le déficit du régime général était de17,4 mD€.- Si cette mise à jour des comptes (une autre auralieu à l’automne) ne tient pas compte des mesuresbudgétaires rectificatives du gouvernement faisantl’objet du PLFR, mais intègre l’augmentation du Smic et ledécret retraite pris récemment en faveur des salariésayant commencé à travailler avant 20 ans.

• Dans le plFr, le Gouvernement prévoit que sur7,18 MD€ de mesures nouvelles, 2,3 MD€ serontattribués à la Sécurité sociale.- Dans le détail, pour le régime général, la mise à jourde la CCSS donne un déficit de 15,5 MD€, dont 6,8 MD€pour la branche maladie, 5,8 MD€ pour la retraite, et2,7 MD€ pour la famille.

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- En ajoutant le Fonds de solidarité Vieillesse (FSV),qui finance le minimum vieillesse et dont les comptes sedétériorent, le total du déficit de la Sécurité sociale semonte à 19,9 MD€, contre 20,9 MD€ en 2011.

• La dégradation du déficit prévisionnel de la Sécuritésociale pour 2012 est liée à la dégradation de la conjonc-ture économique, les recettes sur revenus d’activitéétant révisées à la baisse de 2,6 MD€ :- dont 1,5 MD€ lié à la baisse de la masse salariale- et 400 M€ dus à l’impact de la hausse du Smic.

■ g - le gouvernement relève de 8 % à 20 % leforfait social qui pèse sur l'intéressement et la partici-pation pour combler une partie du déficit de la Sécuritésociale

• En relevant de 8 % à 20 % la taxe qui pèse sur l'é-pargne salariale, le Gouvernement compte engranger550 M€ de plus dès 2012, et 2,3 MD€ en 2013 : cesrecettes supplémentaires devront combler une partiedu déficit de la Sécurité sociale, qui devrait se monter à15,5 MD€ en 2012.

• instauré par le gouvernement précédent en 2009,le forfait social (c'est le nom de cette taxe) :- vise à faire contribuer aux finances publiques desrevenus qui sont soumis à la CSG, mais qui sont exemp-tés de cotisations (à la différence des salaires),- et pèse sur les employeurs, et non sur les 10 mil-lions de salariés qui bénéficient de ces compléments derevenus. - Il s'agit de la participation et de l'intéressement,des PEE et des Perco, des retraites chapeaux et de laprime de partage des profits, éléments de rémunérationqui ont représenté au total 18,3 MD€ en 2011.

• D'abord fixé à 2 %, le taux du forfait a été relevétous les ans par le gouvernement précédent :- à l’argument selon lequel, en le portant d'un coupde 8 % à 20 %, le nouveau Gouvernement risque depénaliser l'épargne salariale, - il est à considérer que, jusqu'à présent, les haussessuccessives du taux de forfait n'ont pas pénalisé l'essorde l'épargne salariale, qui a encore bondi de 15 % en2011, la forte hausse des bénéfices des entreprises en2010 s'étant répercutée sur l'intéressement et la partici-pation versés en 2011, - et le nouveau Gouvernement répond que l'in-téressement et la participation resteront, même taxés à20 %, bien plus avantageux que les salaires, sur lesquelspèsent des charges dépassant souvent 40 %. - Il reconnaît néanmoins que la mesure pourraitfreiner, au moins un peu, l'engouement pour l'épargnesalariale constaté ces dernières années.

- Mais il n'est pas question, en revanche, de taxer lescontrats de prévoyance, car ce ne sont pas des élémentsde rémunération : les soumettre au forfait social ris-querait de pénaliser la protection sociale complémen-taire des salariés.

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règlement DeS compteS et rapport De geStion pour 2011DiScuSSion générale le 17 juillet

François marc, rapporteur général Finances : page 20

michèle anDre : page 23

Frédérique eSpagnac : page 26

richard Yung : page 28

jean-Yves leconte : page 30

orientationS DeS FinanceS puBliqueS

DéBat le 17 juillet

François marc, rapporteur général Finances : page 32

page 45

Yves DauDignY, rapporteur général affaires sociales : page 35

michèle anDre : page 38

maurice Vincent : page 41

loi De FinanceS rectiFicatiVe pour 2012DiScuSSion générale le 24 juillet

François marc, rapporteur général Finances : page 47

Yves DauDignY, rapporteur général affaires sociales : page 51

Françoise cartron, rapporteure pour avis culture : page 54

François reBSamen, président du groupe socialiste : page 56

michèle anDre : page 58

christiane DemonteS : page 61

georges patient : page 63

jean-pierre caFFet : page 65

claude Haut : page 67

David aSSouline : page 69

claudine lepage : page 70

jean-Bernard magner : page 71

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monsieur le président, monsieur le ministre, meschers collègues, nous devons nous livrer aujour-d'hui à trois exercices : le premier est formel,

juridique et découle de l'application de l'article 41 de laloi organique relative aux lois de finances puisque que,tant que la loi de règlement relative à l'exercice 2011 nesera pas adoptée, le projet de loi de finances pour 2013ne pourra pas être mis en discussion. Je vous invite doncpar avance, mes chers collègues, à adopter le projet deloi qui vous est soumis, faute de quoi le Gouvernementne pourrait pas présenter son budget, ce qui seraitévidemment une catastrophe pour notre pays. Audemeurant, le vote en faveur du texte ne vaut pas appro-bation de la politique budgétaire conduite en 2011. Cesera notre deuxième exercice de ce jour : analyser la ges-tion de la précédente majorité. Il est important d'établirun diagnostic avant de construire une stratégie pourl'avenir. Enfin, nous nous livrerons en soirée au troisièmeexercice, c'est-à-dire, à la lumière de l'exercice 2011, àl'examen des orientations budgétaires pour les années àvenir.

Que dire de l'année 2011 ?

Au sein de la commission des finances, nous avonsdepuis longtemps le souci de resituer l'exécution du bud-get de l'État, sur laquelle porte le projet de loi de règle-ment, dans le cadre plus vaste des finances publiquesdans leur ensemble. En effet, ce qui compte à la fois dupoint de vue du droit communautaire et du point de vuedes observateurs extérieurs, ce sont non pas les perfor-mances budgétaires du seul État mais celles de la France,collectivités territoriales et sécurité sociale comprises.De ce point de vue, on peut tirer plusieurs enseigne-ments de l'exécution 2011. Le fait qui vient à l'esprit enpremier est le niveau du déficit : 5,2 points de PIB alorsque la prévision était de 5,7 points, la moitié de l'amélio-ration du solde étant due aux administrations sociales.Cette bonne performance – saluons-la ! – s'explique enpartie – pour 0,8 point de PIB – par des phénomènesexceptionnels : l'arrêt du plan de relance, les modalitésde prise en compte des investissements mi-litaires encomp-tabilité nationale et les moindres décaissementsau titre des investissements d'avenir.

Mais je voudrais surtout relever les raisons qui ont per-mis la relative bonne tenue de la croissance en 2011, quia été – rappelons-le – de 1,7 %.

C'est la variation desstocks qui a permis cettecroissance forte au pre-mier trimestre. Aux troistrimestres sui-vants, lacroissance a été quasi-ment nulle. Il ne faut,par conséquent, passous-estimer la gravitéde la crise économiqueque nous traversons.Pour finir avec cesremarques introductivessur le cadrage général, je voudrais exprimer un souhait,monsieur le ministre. L'exécution du budget de l'État doitêtre analysée dans le cadre global de l'évolution desfinances publiques. Cela implique, en même temps quenous analysons le projet de loi de règlement, de regardercomment a été exécuté le programme de stabilité. LeGouvernement nous a transmis la semaine dernière lebilan qu'il doit réaliser chaque année. Mais ces éléments– reconnaissons-le – ne sont pas suffisants car les pro-grammes de stabilité eux-mêmes ne sont pas assez pré-cis puisqu'ils ne ventilent pas les objectifs de dépenses etde recettes par catégorie d'administrations publiques.

Par conséquent, en exécution, il ne nous est pas possiblede savoir d'où viennent les dérapages ou les bonnes sur-prises. Comme nous attachons beaucoup d'importance àcette question, je voudrais vous dire, monsieur le mi-nistre, que la commission des finances est à votre servicepour approfondir ce sujet et, si besoin était, pour précis-er ses attentes.

Concernant l'exécution du budget de l'État en 2011, jevoudrais formuler quelques observations.

La première est que la crise et les réponses qui lui ont étéapportées ont considérablement désorganisé lesfinances publiques et en particulier leur lisibilité. Lesdonnées doivent en permanence être retraitées pourrefléter la réalité. Ainsi, en apparence, les dépenses del'État baissent, mais, si l'on neutralise l'effet du grandemprunt, elles augmentent. En apparence, les recettesaugmentent de 29 milliards d'euros, mais en réalité –une fois démontée la tuyauterie installée pour permettrela réforme de la taxe professionnelle – on s'aperçoit

projet de lo i . . .règlement des comptes et rapport de gesion pour l’année 2011

intervention de François marc, rapporteur général de la commission des finances,sénateur du Finistère(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Page 21: Bulletin Spécial Finances publiques

qu'elles sont stables par rapport à 2010 – à 255 milliardsd'euros – et que leur progression spontanée est mêmeen retrait de 3,3 milliards d'euros par rapport aux prévi-sions.

Quant au déficit, il s'établit à 90 milliards d'euros etenregistre une amélioration spectaculaire de près de60 milliards d'euros, qui doit être ramenée à seulement14 milliards d'euros une fois pris en compte les effets dugrand emprunt, qui a creusé de 35 milliards d'euros ledéficit en 2010 pour majorer d'autant ou presque lesressources de trésorerie de l'État. Si l'on y ajoute laréforme de la taxe professionnelle et la fin du plan derelance, on a l'explication complète.

Conclusion : même si 2011 a marqué les dix ans du votede la loi organique relative aux lois de finances, il n'estpas certain que l'on ait beaucoup progressé en matièrede lisibilité des comptes publics…

Ma deuxième observation porte sur l'évolution desdépenses.

Je réserverai d'ailleurs l'analyse des recettes pour monintervention dans le débat suivant car c'est en appréciantles recettes au niveau consolidé et pas seulement à celuide l'État que l'on se rend le mieux compte du contrasteentre le discours « anti-impôt » que tenait le précédentgouvernement et l'ampleur des hausses de prélève-ments obligatoires qu'il a fait voter en 2011. Le mêmecontraste, par symétrie, s'observe en matière de dépens-es. Le gouvernement précédent ne cessait de rappelerson souhait de maîtriser, voire de réduire les dépensesde l'État. Son candidat à la présidence de la Républiqueavait même retenu, dans son programme électoral, unetrajectoire de retour à l'équilibre reposant à 80 % sur lesefforts en dépense.

À la lumière de l'exécution 2011, on se rend compte dudécalage entre la rhétorique et la pratique. Vous lesavez, l'État s'est doté de deux normes de dépensetransversales. La première vise à stabiliser en volume lemontant de l'ensemble constitué des dépen-ses de l'Étatet des prélèvements sur recettes. En loi de finances pour2011, le Gouvernement affichait l'ambition non seule-ment de respecter cette norme de stabi-lité, mais d'allerplus loin en faisant reculer les dépen-ses de 0,2 % en vo-lume, en les plafonnant à 357 milliards d'euros. Ce volon-tarisme n'a pas complètement payé, puisque les dépens-es relevant de cette norme se sont finalement élevées à357,4 milliards d'euros. Le dépassement aurait pu êtreencore plus important si l'on n'avait pas recouru à descontorsions budgétaires, comme celle qui a consisté àattribuer à l'Agence de financement des infrastructuresde transport de France, l'AFITF, par le biais d'un fonds deconcours 400 millions d'euros qui auraient dû relever dela norme de dépense...

La seconde norme de dépense, celle qui stabilise envaleur les dépenses de l'État hors charge de la dette etpensions, est également dépassée.

Si l'on s'intéresse maintenant aux différentes missionsqui composent le budget de l'État, on s'aperçoit quevingt sur trente ne respectent pas les plafonds fixés parla loi de programmation 2009-2011. Si l'on s'intéresse,enfin, à la l'évolution des dépenses en fonction de leurnature, et en particulier aux règles dont l'État s'est dotépour piloter l'évolution des dépenses de fonctionnementet d'intervention, il apparaît que l'objectif d'une réduc-tion de leur montant n'a pas été atteint.

Prenons d'abord les dépenses de fonctionnement. Ellessont stables par rapport à 2010, à 46,2 milliards d'euros,alors que la loi de finances prévoyait qu'elles dimi-nueraient et s'établiraient à 43,6 milliards d'euros. Ellesont donc dérapé de 2,6 milliards d'euros, constatés surles missions « Défense », « Culture » et « Écologie »

Il faut aussi relever, au sein des dépenses de fonction-nement, que les subventions pour charges de servicepublic représentent désormais plus de la moitié desdépenses de fonctionnement, ce qui illustre le poidscroissant des opérateurs dans la mise en œuvre des poli-tiques publiques.

Prenons maintenant les dépenses d'intervention, dontles unes – les dépenses de guichet – devaient être stabil-isées tandis que les autres – les dépenses discrétion-naires – devaient être réduites.

On constate en exécution que les services comptables del'État ne savent pas distinguer les unes des autres. Je mepermets de le relever car je sais que le nouveau gou-vernement souhaite conserver cette distinction pourl'avenir. Saura-t-on faire en 2012 ce qui n'était pas possi-ble en 2011 ? On peut, monsieur le ministre, le souhaiter.

Du point de vue de la maîtrise des dépenses, les chiffresétaient plus encourageants puisque l'on constate unediminution de plus de 14 %. Mais cette fois encore, aprèscorrection, on s'aperçoit que la baisse résulte exclusive-ment des phénomènes comptables et des effets desinvestissements d'avenir et du plan de relance.

Cela étant, il est un poste de dépenses plus dynamiqueque les dépenses d'intervention, je veux parler de lacharge de la dette, dont le montant a augmenté en 2011de 14,3 % et, avec 46,3 milliards d'euros, a dépassé celuides dépenses d'intervention, et ce alors même que lestaux sont restés très bas. Il s'agit d'une matière haute-ment inflammable, qui explique pourquoi il est vital quela crise de la zone euro ne s'étende jamais à la France.

J'en viens maintenant aux dépenses de personnel.

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 21

Page 22: Bulletin Spécial Finances publiques

En 2011, les effectifs ont été réduits de 31 278 équiva-lents temps plein travaillés. De 2003 à 2012, la précé-dente majorité aura détruit au total plus de 183 000emplois de fonctionnaires.

En 2011, le taux de non-remplacement des départs enretraite s'est établi à 49,8 % – ce qui est conforme à l'ob-jectif annoncé –, le record étant atteint par le ministèrede la défense avec 83 % de départs non remplacés.Malgré ces suppressions, il faut être conscient que lesdépenses de personnel ont continué d'augmenter. Ellesse sont élevées à 117,7 milliards d'euros, en hausse de1,7 % par rapport à 2010 à périmètre constant. Mais cequ'il faut retenir, encore une fois, c'est l'incapacité dugouvernement précédent à tenir ses objectifs puisqueles dépenses constatées en exécution sont supérieuresde 600 millions d'euros au montant inscrit en loi definances initiale. Ce constat n'étonnera pas les rappor-teurs spéciaux de la mission « Défense », qui savaientd'avance que les dépenses de personnel avaient étésous-évaluées de 341 millions d'euros.

Au sein des dépenses de personnel, i1 faut souligner queles dépenses de pensions sont toujours dynamiques avecune augmentation de 4,7 %.

Il est un sujet auquel on aurait voulu s'intéresser, maispour lequel les données ne seront pas disponibles, nousdit-on, avant le projet de loi de finances pour 2013 : ils'agit des dépenses fiscales, un sujet qui nous est cher,monsieur le président. Je serais curieux de comprendrepourquoi il n'est pas possible de connaître au mois dejuillet, au moins, le coût qu'ont représenté, l'annéeprécédente, les niches fiscales les plus coûteuses.

Pour préparer le projet de loi de finances pour 2013, iln'aurait pas été inutile non plus de dresser un bilan dudispositif de « rabot » qui figurait dans la loi de financespour 2011.

Espérons que nous pourrons en savoir plus bientôt !

J'en viens à ma troisième série de remarques : le résultatde toutes ces évolutions, c'est une dette de l'État dont lemontant s'accroît de 84 milliards d'euros en 2011, pours'établir à 1 313 milliards d'euros, tandis que la detteglobale des administrations publiques s'élève à 1 717milliards d'euros. En 2002, le montant de la dette de l'É-tat était près de deux fois inférieur puisqu'il s'établissaità 746 milliards d'euros. C'est dire le chemin mal-heureusement parcouru depuis cette année 2002 etc'est dire aussi les efforts qui nous attendent pourl'avenir.

En quatrième et dernière remarque, je voudrais évoquerle bilan et le hors bilan de l'État, en me limitant à deuxaspects.

D'abord, la France vient d'être lourdement condamnéepar la Cour de justice de l'Union européenne dans lecadre d'un contentieux relatif à la fiscalité des orga-nismes de placement collectif en valeurs mobilières, lesOPCVM, non résidents, la commission des finances aétudié cette question de près. La Cour des comptes nousapprend que le risque avait été provisionné, à hauteur de3,3 milliards d'euros.

Cela montre que les services de la direction générale desfinances publiques font bien leur travail. Pour 2011, ledocument annexé au projet de loi de règlement retrace10 milliards d'euros de provisions pour litiges.

Je comprends, monsieur le ministre, que, s'agissant d'af-faires en cours, le compte général de l'État ne détaille pasles contentieux qui donnent lieu à provisions. Il n'enreste pas moins qu'il nous faut travailler ensemble pourque les parlementaires soient mieux sensibilisés à cesrisques.

Enfin, je veux revenir sur un sujet qui nous avait préoc-cupés l'année dernière : l'absence de recensement desgaranties accordées par l'État, qu'il s'agisse des montantsen cause ou des risques associés. Le ministre du budgetFrançois Baroin nous avait assuré en commission que lasituation allait s'améliorer. Le secrétaire d'État PierreLellouche nous l'avait confirmé en séance. Or, cetteannée, la Cour des comptes s'alarme à son tour dans sonrapport. Nous reprendrons ce débat lors de la discussiondes articles. En effet, pour marquer le coup, la commis-sion a adopté, sur ce point, un amendement qui a voca-tion à nous permettre d'engager un débat approfondisur ce sujet, dont l'importance est croissante.

Il faut se souvenir que nous avons adopté, en 2011, qua-tre lois de finances rectificatives. Les deux premières,celle de juillet et celle de septembre, comportaient desdispositions importantes en matière de garantiesaccordées par la France au Fonds européen de stabilitéfinancière, tandis que la troisième, celle d'octobre,accordait la garantie de l'État aux émissions du groupeDexia. En 2011, la solidarité européenne majore de0,7 point de PIB la dette publique, notamment par le jeudes dettes garanties. En 2012, ce sera 2,4 points de PIB,et près de 3 points en 2013. Nous sommes donc dansune zone où le hors bilan et le budget se rejoignent, et ilnous serait précieux d'y voir plus clair.

Pour conclure, monsieur le président, je confirme que lacommission des finances invite le Sénat à adopter le pro-jet de loi de règlement et le compte de gestion pour l'an-née 2011, mais que, dans sa majorité, elle appelle leGouvernement à conduire une politique budgétaire dif-férente de celle dont je viens de rappeler les grandeslignes.

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Page 23: Bulletin Spécial Finances publiques

je vous remercie, monsieur le ministre, monsieur lerapporteur général, de vos explications relatives à lasituation budgétaire. Au nom du groupe socialiste, je

me réjouis que l’élan qui a donné cet automne une nou-velle majorité au Sénat se soit poursuivi au printemps etpermette aux membres du Gouvernement de venir, enconfiance, présenter leurs projets devant un Sénat quiles soutient. Cependant, dans ce nouveau contexte, mapremière intervention ne vous est pas directement des-tinée, puisque je m’adresserai plutôt à nos collègues del’ancienne majorité.

Cela a été souligné, ce projet de loi de règlement descomptes a ceci de particulier que le gouvernement qui laprésente n’est pas responsable de ce qu’elle contient. Nile gouvernement issu des élections des 10 et 17 juindernier ni la majorité sénatoriale ne sont responsablesdu texte que nous examinons aujourd’hui. Il doit êtreimputé aux anciennes majorités parlementaires qui ontsoutenu Nicolas Sarkozy pendant ces cinq dernièresannées.

Ainsi, le jour est venu de régler les comptes. Je n’ai pasdit « régler nos comptes », car la situation économiqueet budgétaire nous impose de laisser derrière nous lespolémiques des campagnes électorales. Toutefois, enexaminant les comptes pour 2011, nous sommes bienforcés de revenir sur les incohérences des cinq dernièresannées, et donc de vous demander des comptes. Car lenouveau gouvernement hérite d’une situation trop gravepour que vous puissiez vous défausser de toute respons-abilité, pour qu’il vous soit épargné un examen critiquedes décisions que vous avez soutenues quand vous étiezdans la majorité.

La semaine prochaine, nous reviendrons une nouvellefois sur cet héritage. Le projet de loi de finances recti-ficative actuellement en débat à l’Assemblée nationale aen effet pour objectif principal de rattraper, par desrecettes fiscales nouvelles, les manques dus à votreimprévision. Lorsque cela aura été fait, la nouvellemajorité pourra entamer le redressement dans la justicepour lequel François Hollande a été élu. Mais, dans voscritiques à venir, n’oubliez pas ceci : la crise a certes lim-ité nos marges de manœuvre budgétaires, mais, vous lesavez bien, elle ne peut pas tout excuser.

Ces marges, vous les avezvous-mêmes réduites pardes réformes injustes etinefficaces et vous n’avezpas tenu compte de nosmises en garde. C’estpourquoi j’ai été trèsétonnée d’entendre notrecollègue Philippe Dallierprétendre, la semainedernière, que leGouvernement faisaitsemblant de découvrir lasituation actuelle et queFrançois Hollande aurait caché celle-ci aux Français pourse faire élire.

S’il y a une chose qui distingue la majorité nouvelle del’ancienne, monsieur Dallier, c’est bien notre constanceet notre lucidité.

Avec Nicole Bricq et les autres sénateurs de gauche, nousn’avons cessé de vous alerter sur les risques que faisaitcourir votre aveuglement politique. Et nous n’étions pasles seuls à le faire !

En 2011, la France accuse un déficit de plus de 90 mil-liards d’euros. M. le rapporteur général l’a déjà dit, labaisse par rapport à l’année précédente s’expliqueessentiellement par un niveau artificiellement élevé en2010. Le montant constaté en 2011 n’en demeure pasmoins accablant : près du double des montants de 2007et de 2008, un taux de couverture des dépenses par lesrecettes de seulement 69 %, ce qui aboutit à un montantde dette publique deux fois plus important qu’en 2002.

Accumuler en dix ans autant de dette que tous les gou-vernements précédents : voilà le bilan de la droite !

Pour le seul État, la dette représente deux tiers du pro-duit intérieur brut annuel, soit pour lui cinq ans derecettes nettes. Certes, on ne peut cesser toute dépensepublique pendant un quinquennat pour consacrer toutesles recettes au remboursement de la dette, mais il y a unchemin entre cela et l’inaction et c’est l’inaction qui a étéchoisie, conduisant la France à l’asphyxie financière.

projet de lo i . . .règlement des comptes et rapport de gesion pour l’année 2011

intervention de michèle anDre, sénatrice du puy-de-Dôme(séance du mardi 17 juillet 2012)

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En 2010, puis en 2011, la charge de la dette a ainsi con-tinué d’augmenter, devenant le premier poste dedépenses, devant l’éducation nationale. Drôle de para-doxe : plutôt que de financer l’avenir de nos enfants,nous consacrons plus d’argent à rembourser les intérêtsd’une dette qui pèsera sur eux.

Ce risque d’asphyxie financière, Philippe Séguin l’avaitpourtant évoqué plusieurs fois devant nous. Et, dès2009, il avait souligné que ni la crise ni les dépenses con-joncturelles visant à en réduire les effets n’étaient lesseules causes du dérapage budgétaire. Déjà, la diminu-tion des recettes – due en premier lieu aux dispositionsde la loi TEPA – expliquait une grande partie du déficit.Cela n’a fait que s’aggraver depuis lors.

Ainsi, pour l’année 2011, qui nous intéresse aujourd’hui,l’effet des réformes de ces cinq dernières annéesreprésente plus de 22 milliards d’euros de recettes per-dues pour l’État. La moitié est due à la loi TEPA, un tiersà la réforme de la taxe professionnelle, le reste à laréforme de la TVA dans la restauration et à celle de l’ISF.

Certes, ces mesures ont profité à certains, mais ellesn’ont pas profité à tous les Français, surtout pas auxménages les plus modestes. En revanche, c’est bien surces ménages qu’a pesé, pour l’essentiel, la hausse de laTVA, par laquelle vous avez achevé de faire de la pro-gressivité inversée le socle de votre politique fiscale.

En somme, pour reprendre l’expression de Nicole Bricq,le dernier quinquennat aura été celui de l’incohérence etdes injustices.

Elle n’était d’ailleurs pas la seule à le souligner. Dansvotre propre camp, certains s’inquiétaient de la dif-férence de traitement dont bénéficiaient les ménages lesplus aisés. Je citerai ainsi notre ancien collègue NicolasAbout, qui regrettait, en 2010, à propos du bouclier fis-cal, que « l’effort que les Français devront fournir pourredresser notre situation sera consenti par tous, sauf parnos concitoyens les plus aisés, protégés par le bouclierfiscal ». Il ajoutait : « Il ne faut pas nécessairement beau-coup plus d’impôt, mais il faut parvenir à un impôt plusjuste. »

Apparemment, il n’a été guère été entendu. Certes, cesdernières années, vous avez fait le choix de plus d’im-pôt : 12,5 milliards d’euros en 2011, 21 milliards d’eurosen 2012, du fait de vos seules réformes.

C’est d’ailleurs à cela que vous devez la très relativeréduction du déficit structurel, plus qu’à une réductiondes dépenses, que vous vous êtes contentés de sous-budgéter avant d’être rattrapés par la réalité en coursd’exécution.

Il ne vous est donc plus possible d’opposer une droiteresponsable devant la dépense à une gauche idolâtrantl’impôt, car vous avez finalement trouvé cet outil trèspratique pour rattraper vos erreurs. En revanche, vousn’avez rien fait pour que cet impôt soit plus juste.

Je prendrai pour cela l’exemple de la suppression de lataxe professionnelle. Les effets pour les entreprises sontbien moins clairs que ne l’envisageait le gouvernementde l’époque : dans certains secteurs, seules 40 % d’entreelles en profitent réellement et, en moyenne, seules60 % sont gagnantes.

En revanche, ses conséquences sur les ménages et sur lescollectivités territoriales sont durables. Comme nousl’annoncions, cette réforme a eu un triple effet perverssur ces collectivités : une perte d’autonomie financière,une perte de prévisibilité des ressources et une disparitécroissante entre les différentes collectivités territoriales.

Les effets de cette réforme pour l’État avaient égalementété sous-évalués. Le coût pour l’État de l’allégement aubénéfice des entreprises était en effet estimé à 5,8 mil-liards d’euros en régime de croisière ; il devrait finale-ment s’élever à 7 milliards d’euros les prochaines années,et à plus de 8 milliards d’euros pour 2011.

S’agissant de l’impôt sur les sociétés, là encore, nousvous avions appelés à agir. Peu à peu, le taux de 33,33 %est devenu bien théorique. Grâce à la création successived’abattements et de niches fiscales, le taux moyen effec-tif est plus proche de 20 %, avec de très grandes dispa-rités selon la taille de l’entreprise. Vous le savez commenous, en moyenne, une entreprise du CAC 40 paye enréalité 8 % d’impôt sur les sociétés, soit un quart du tauxlégal.

C’est pourquoi nos collègues François Marc et FrançoisRebsamen avaient proposé de mettre fin à ce « mitage »de l’impôt sur les sociétés. Leur proposition de loi avaitété repoussée. L’Assemblée nationale a finalement faitsienne, tardivement, l’idée d’abroger le régime du béné-fice mondial consolidé. Le gouvernement de Jean-MarcAyrault en reprend une autre dans son projet de loi definances rectificative, celle de la modulation de l’impôten fonction du réinvestissement par l’entreprise desbénéfices dégagés. Il l’accompagne d’autres mesurespermettant à l’impôt sur les sociétés de retrouver unrendement acceptable.

Car, non seulement vous n’avez pas souhaité réhabiliterl’impôt sur les sociétés, mais vous avez également sures-timé son rendement. En 2011, alors que vous attendiezun produit de près de 45 milliards d’euros, celui-ci estinférieur à 40 milliards d’euros.

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Certes, c’est mieux qu’en 2010, mais ce n’est mieux queparce que, cette année-là, cet impôt pâtit à la fois desmesures du plan de relance et du régime transitoire de lataxe professionnelle. Encore une fois, il était urgentd’agir ; vous avez préféré attendre.

S’agissant des recettes, votre bilan n’est guère plus bril-lant. Votre mesure la plus emblématique, c’était le non-remplacement, mécanique, d’un fonctionnaire sur deux.J’y reviendrai ultérieurement. La manière dont vousl’avez mise en œuvre s’avère un désastre. Vous affirmiezque cette politique serait un levier efficace de réductionde la dépense. En définitive, l’économie brute estinférieure d’un tiers à celle que vous annonciez et cetteéconomie en postes n’a même pas correspondu à uneéconomie en charges, car les mesures catégoriellesaccordées à cette occasion en annulent les effets.

Surtout, ces suppressions mécaniques, sans réflexionglobale, ont contribué à augmenter le nombre d’heuressupplémentaires, ce qui montrait bien que les réductionsne correspondaient pas, loin de là, à des sureffectifs.

Je prendrai l’exemple des préfectures. Celles-ci ontconnu d’importantes suppressions d’effectifs qui onttouché les agents de guichet, lesquels sont chargés d’ac-cueillir le public désireux de faire établir un documentd’identité, la carte grise d’un véhicule automobile outout autre titre. La suppression de ces postes a rendunécessaires, à certains moments, non seulement la fer-meture des guichets afin de permettre le traitement desdossiers, mais encore le recours aux heures supplémen-taires, tout simplement pour que les agents puissentvenir à bout de leur travail ordinaire.

Pour quel gain ? L’épuisement des préfectures et despréfets !

Voilà deux ans, j’avais rendu un rapport consacré à lamise en œuvre de la révision générale des politiquespubliques dans les préfectures, sujet qui préoccupe aussibien les personnels que les préfets et les administrateurs.Il est apparu qu’ils étaient déjà à l’os – mes chers col-lègues, vous comprenez tous le sens de cette expression–, alors n’en rajoutons pas !

Si nous voulons un État fort, celui-ci ne peut s’appuyersur une administration affaiblie, amaigrie et dont nousvoyons bien aujourd’hui qu’elle ne pourrait pas faire faceaux demandes. Certains collègues aborderont sans nuldoute les problèmes qu’on rencontre dans d’autresdomaines.

Faute de réflexion et de concertation, nous avons eu del’affichage politique, lequel n’a pas permis d’atteindrel’objectif fixé.

De la même manière, vous avez tenté de faire croire auxFrançais que l’inscription de la règle d’or dans laConstitution changerait tout. Mais pourquoi ne l’avez-vous pas appliquée vous-même, cette règle, qui respec-tait simplement un traité européen, lequel valait bienune règle d’or ? Vous étiez les législateurs ; rien ne vousempêchait de voter des budgets en équilibre, si ce n’estles recettes que vous avez vous-mêmes supprimées.Renvoyer à l’Europe ou au Conseil constitutionnel et,surtout, renvoyer à plus tard, c’est facile, mais sans véri-table efficacité !

J’étais la semaine dernière à Bruxelles et j’ai eu l’occasiond’échanger avec de nombreux parlementaires, en partic-ulier belges et italiens. Ils ne comprennent pas ce qu’afait la France. L’exemple qu’a donné notre pays à sesvoisins européens, c’était celui des paroles et non celuides actes. Le souffle européen vient le plus souvent desgrands pays comme la France. Alors, quand les grandspays soufflent le chaud et le froid et se dispensent derespecter les traités européens, il ne faut pas s’étonnerque les plus petits ne respectent pas une discipline dontvous avez fait un argument électoral plus qu’un axe degouvernement.

En somme, Nicolas Sarkozy n’a été qu’un illusionniste, auniveau tant national qu’européen. Votre politique budgé-taire n’aura apporté ni stabilité ni croissance. C’est ceque montre ce projet de loi de règlement. Et c’est ce quinous incite, avec le gouvernement de Jean-Marc Ayrault,à redresser les finances publiques dans une logique decroissance, de justice et de vérité.

En cela, nous ne renierons pas cette phrase de PierreMendès France, toujours d’actualité : « Les réformesactuellement indispensables ne se réalisent pas à coupsde baguette magique ou seulement par un scrutinheureux, et leurs fruits ne mûrissent pas aussi vite qu’onle souhaiterait. L’essentiel, c’est que le pays ne soit pasdupé une fois de plus. Pour cela, il faut, avant tout,informer loyalement. »

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monsieur le président, messieurs les ministres,mes chers collègues, je ne crois pas nécessairede revenir sur l’état de délabrement des

finances publiques laissé par le précédent gouverne-ment, situation déjà exposée par M. le rapporteurgénéral, François Marc, ainsi que par ma collègueMichèle André.

En ma qualité de rapporteur spéciale de la mission« Politique des territoires », j’orienterai mon propos surce thème. Ces derniers temps, j’ai perçu, chez certains,l’enthousiasme que suscite une politique volontairealliant croissance et maîtrise des comptes publics et,chez d’autres, dont nous ne sommes pas, une tendancemarquée à la critique et à l’atermoiement.

Vous, dans l’opposition, vous nous parlez de « règle d’orbudgétaire ». Mais les mots « justice » et « humanisme »ont-ils un sens pour vous ? En effet, aucune règle d’orconstitutionnelle ne pourra restaurer la confiance, qu’ils’agisse de celle des Français en eux-mêmes, en leur payset en l’avenir, ou de celle des marchés financiers, quicraignent autant l’excès de dette que les effets négatifsd’une trop grande contrainte budgétaire sur la crois-sance.

L’État se doit d’assurer l’égalité républicaine, l’équilibredu développement et la péréquation financière.L’examen du projet de loi de règlement, c’est l’heure dubilan. Voyons donc ce qu’il en est.

J’aborderai tout d’abord le développement équilibré desterritoires et l’égalité républicaine.

Une réforme de l’État menée à la mode Sarkozy, demanière désorganisée et incontrôlée a abouti à la déser-tification de certaines régions de France au regard desservices publics. Laissez-moi vous exposer la situationcataclysmique qui prévaut notamment dans mondépartement, les Pyrénées-Atlantiques : suppression detrois tribunaux à la suite de la réforme de la carte judici-aire et d’une cinquantaine de postes d’enseignant, donthuit qui relevaient du réseau d’aides spécialisées auxélèves en difficulté, ou RASED ; près de 200 médecinsgénéralistes en moins en l’espace de seulement deuxans...

J’arrêterai là mon énuméra-tion, mais il faudrait jepourrais mentionnerencore les réductionstouchant les servicespostaux ou les perma-nences des caisses pri-maires d’assurance ma-ladie, sans pour autantatteindre à l’exhaustivité.Montesquieu estimait que« l’amour de la démocratieest celui de l’égalité ». Ilsemble que la précédentemajorité n’ait pas fait de cet adage son cheval debataille… La dégradation du service public est devenueune réalité incontestable, ce qui montre bien le déni – etj’irai jusqu’à parler de mépris – dans lequel s’est obstinéle précédent gouvernement au cours des dernièresannées.

Et si l’on s’attache à l’exécution du budget de 2011, sur latotalité des indicateurs de performance, 53 % seulementont atteint les objectifs fixés, soit huit sur un total dequinze. Quand on sait que ce taux n’était encore que de40 % en 2010 et même de 14 % en 2009, on pourrait allerjusqu’à féliciter le précédent gouvernement de l’effortfourni…

Je reste cependant assez réservée, tout comme la Courdes comptes, sur ce dispositif de suivi des résultats de lamission et recommande la possibilité d’inscrire davan-tage ces indicateurs dans une véritable logique de per-formance.

J’aborderai maintenant la péréquation financière et l’in-tervention territoriale de l’État.

Si la suppression de la taxe professionnelle, remplacéepar la contribution économique territoriale, a eu glob-alement des conséquences positives pour 60 % desentreprises, comme le rappelle justement un rapportrendu par le Sénat à la fin du mois dernier, il faut tout demême savoir que 20 % d’entre elles sont perdantes et,surtout, que cette réforme a accru considérablement lesinégalités financières entre collectivités locales.

projet de lo i . . .règlement des comptes et rapport de gesion pour l’année 2011

intervention de Frédérique eSpagnac, sénatrice des pyrénées-atlantiques(séance du mardi 17 juillet 2012)

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En 2011, l’exécution du programme des interventionsterritoriales de l’État a, par ailleurs, conduit à une con-sommation de 88 millions d’euros en autorisations d’en-gagement et de 63 millions d’euros en crédits depaiement. Si, contrairement aux années précédentes,n’est plus constatée une baisse des crédits ouverts et descrédits consommés, on assiste de nouveau à une sous-exécution budgétaire : seuls 94 % des autorisations d’en-gagement ont été mobilisées et 74 % des crédits depaiement ont été mandatés.

L’addition de ces phénomènes a conduit nos territoiresvers des perspectives pour le moins pessimistes, alorsque les investissements des collectivités, en collabora-tion avec les services locaux de l’État, pourraient être desleviers formidables, voire primordiaux, pour ledéveloppement de l’activité économique.

Enfin, un budget correspondant, en quelque sorte, à deschoix, l’examen d’un projet de loi de règlement est doncl’heure de relever ces derniers.

André Gide disait : « Choisir, c’est renoncer ». Alors, vous,ancienne majorité, avez renoncé à une action publiquelocale, équitable, personnalisée, efficace et durable, etpréféré une action centralisée, injuste, déshumanisée,incohérente, et éphémère.

Nous ne voulons pas exercer le pouvoir comme vousl’avez fait pendant dix ans, en particulier durant ces cinqdernières années.

Au contraire, nous sommes porteurs d’un sens de l’ac-tion politique guidé par l’intérêt général. Notre devoirest non pas d’imposer des mesures aussi idéologiques etdémagogiques qu’injustes, qui ne satisferaient qu’unecatégorie de la population, mais bel et bien de proposercelles qui nous rassembleraient toutes et tous dans lasolidarité, l’égalité, la justice et l’efficacité.

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monsieur le président, messieurs les ministres,mes chers collègues, je commencerai, si vous levoulez bien, par m’adresser à M. Delattre, qui a

qualifié ce débat de « comédie ». Tout d’abord, noussommes loin de Dante. Et puis, ce n’est pas le mot qui meparaît convenir. En effet, derrière les chiffres que nousvous rappelons, que nous vous répéterons, et que vousne contestez pas, même s’ils vous font mal, il y a beau-coup de malheurs, du chômage, de la misère, de la pau-vreté. Par conséquent, dans ce débat, je ne me sensguère d’humeur à sourire. Notre propos est sévère, maisil est juste. En réalité, nous appuyons là où ça vous faitmal !

Non, il n’y a pas de « On verra » ! Nous parlons du passé :on a vu ! Monsieur le président Marini, ce n’est pas moiqui ai utilisé le mot « comédie » !

Nous procédons donc à l’examen du projet de loi derèglement pour 2011. Cela a déjà été dit, mais je lerépète : la réduction du déficit qui y est affichée est untrompe-l’œil.

L’adoption de quatre lois de finances rectificatives l’an-née dernière est symptomatique, au moins, d’unegrande difficulté à assurer la gestion des financespubliques et à suivre l’évolution de l’économie…

Le dernier collectif adopté, qui répondait à un impératifbudgétaire lié à la crise, était en fait de natureeuropéenne. En revanche, les autres modificationsapportées au budget initial montrent que le gouverne-ment Fillon n’avait pas anticipé la dégradation de la con-joncture économique, pourtant annoncée depuislongtemps par des instituts de conjoncture.

Dès le deuxième trimestre de 2011, la croissanceéconomique a été faible, voire atone. Or, à cette époque,vous chantiez sur tous les tons les grands mérites de laseule austérité. Et lorsque certains parmi nous osaientavancer l’idée selon laquelle un peu de relanceéconomique améliorerait grandement la situation, vousnous traitiez d’irresponsables. Vous arguiez du fait quevous, vous étiez aux affaires, que nous, nous n’y étionspas, etc.

Et pourtant, la chute desinvestissements, de notrepotentiel industriel et, parconséquent, de la compéti-tivité s’est poursuivie pen-dant cette période. Et c’està nous qu’il revient main-tenant de relever le défi dela compétitivité ! Parailleurs, comme cela a étéindiqué, l’exécution budgé-taire a été marquée par uneréduction des dépenses del’État. Cependant, celle-ci aété facilitée par différents phénomènes conjoncturels :taux d’inflation de 2 %, moindres dépenses au titre dufonds de compensation de la TVA, etc.

Nous avions noté – ce point a d’ailleurs longuement étéévoqué en commission des finances – l’évolution de lamasse salariale, qui prouve que la RGPP n’a pas atteintses objectifs. La mise en œuvre de la politique de non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à laretraite n’a pas produit les effets escomptés. Elle a étéappliquée de façon mécanique, comme plusieurs de mescollègues l’ont souligné. Plaidant un peu pour ma« paroisse », je précise que 72 % des départs à la retraiteayant eu lieu au sein du réseau consulaire n’ont pas étéremplacés. De ce fait, eu égard aux effectifs dont elle dis-pose, la France ne peut plus maintenir un réseau de deuxcents consulats à travers le monde.

Un débat devra d’ailleurs être ouvert sur ce que l’onappelle l’« universalité du réseau consulaire ». Je nedévelopperai pas ce point de mon intervention, desexemples ayant été donnés au préalable par différentscollègues.

J’en viens maintenant aux heures supplémentaires,auxquelles le journal Libération consacre aujourd’huiune demi-page. Grâce aux heures supplémentaires, dontont bénéficié en particulier certaines catégories d’en-seignants, il en est parmi eux qui ont pu doubler leursalaire !

projet de lo i . . .règlement des comptes et rapport de gesion pour l’année 2011

intervention de richard Yung, sénateur représentant les Français établis hors de France(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Page 29: Bulletin Spécial Finances publiques

Pour la seule éducation nationale, le coût de cettemesure s’est élevé à 1,5 milliard d’euros. Il s’agit biend’un dérapage ! Et vous conviendrez avec moi que, detoute façon, le doublement du salaire des enseignantsn’était tout de même pas l’objectif visé. Nous en dis-cuterons la semaine prochaine ! De cela et des cotisa-tions sociales…

S’agissant des recettes, l’année 2011 a été marquée parles effets d’un certain nombre de décisions, que nousavions critiquées en leur temps. Ainsi, la loi TEPA aentraîné pour l’État un manque à gagner de près de12 milliards d’euros. L’instauration du taux réduit de TVAdans la restauration, grande invention s’il en est, a coûté3 milliards d’euros.

La réforme de la taxe professionnelle a, quant à elle,coûté 7 milliards d’euros.

À toutes ces mesures, dont le coût total atteint 22 mil-liards d’euros, il faut ajouter l’allégement de l’ISF, adoptéen pleine tempête financière – 400 millions d’euros – etla forte baisse du rendement de l’impôt sur les sociétés,soit près de 5 milliards d’euros ! Il y a donc eu conjugai-son de cadeaux fiscaux, de niches, et d’une baisse nonnégligeable du rendement de l’impôt.

Le creusement de la dette fiscale et, par conséquent, dela dette publique aurait pu être vertueux s’il avait aidé àla relance de la croissance économique et à la créationd’emplois. Mais ces cadeaux fiscaux se sont mués en di-videndes, en dépenses immobilières, voire en gaspillagesdivers. Au fond, nous sommes face au paradoxe d’unepolitique qui a été à la fois injuste et inefficace. Injustepuisqu’elle n’a pas concerné les catégories sociales qui enavaient besoin et inefficace puisque… le résultat obtenuparle de lui-même !

Certes, monsieur le président, car, la mémoire étantcourte, vous oublierez encore plus vite que tout lemonde ! Il est donc tout à fait normal que nous fassionsces rappels.

Tout à fait, et c’est bien pourquoi vous n’aimez pas qu’onvous les rappelle. En fait, vous n’aimez pas ce débat !

Je ne suis pas honnête ?

Chers collègues de l’opposition, vous ne pouvez pas con-tester un seul des chiffres que je rappelle.

Le temps de parole qui m’a été accordé arrivant à sonterme et l’opposition n’aimant pas mes propos, je vaisconclure mon intervention.

La dette s’élève à 1 800 milliards d’euros. Avez-vousdivisé cette somme par 60 millions de Français ?

Cela fait 30 000 euros par Français ! C’est quasiment unrecord mondial.

Chers collègues de l’opposition, vous criez beaucoupmais, paradoxalement, vous allez voter le présent projetde loi. Effectivement. Par conséquent, nous devrionsnous entendre, même si nous n’avons pas les mêmesraisons de voter ce texte.

Quoi qu’il en soit, le projet de loi de règlement que nousexaminons est le reflet fidèle du désastre de la gestionprécédente.

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monsieur le président, messieurs les ministres,mes chers collègues, je ne vais pas être trèsoriginal : je vais, moi aussi, me référer à la Cour

des comptes, mais en m’appuyant sur des travaux plusanciens, à savoir son rapport d’octobre 2010 sur « lesinterventions de l’État dans l’économie par des moyensextrabudgétaires ». Son président, Didier Migaud, indi-quait alors que l’État avait multiplié pendant lesdernières années les recours aux PPP, les partenariatspublic-privé, et il émettait les plus grandes réserves surles conditions d’exercice du contrôle parlementaire surces modalités d’intervention.

À l’examen du projet de loi de règlement des comptespour l’année 2011, on le constate une fois encore : il n’ya pas une ligne sur ces dépenses puisque, par définition,elles sont extrabudgétaires. Pourtant, elles ont coûtécher à l’État et elles continueront à peser sur nosfinances si nous ne modifions pas notre politique en lamatière. Lignes à grande vitesse, travaux du Grand Paris,centre hospitalier sud-francilien à Corbeil-Essonnes,rénovation de campus universitaires, tribunaux, prisons,ministère de la défense…Pour financer les grandes infras-tructures publiques, l’État, les collectivités territoriales etles établissements publics ont sollicité de plus en plus lesecteur privé, dans le cadre de partenariats public-privé.Pour les entreprises privées appelées à participer, c’est labonne affaire. En revanche, pour l’État, les collectivitéslocales et les contribuables, ce mode de financementconstitue un piège dès lors que, in fine, c’est l’État quipaie.

La Cour des comptes estime d’ailleurs, dans une commu-nication à la commission des finances sur les partenariatspublic-privé en matière pénitentiaire, que l’engagementde l’État atteint aujourd'hui, rien que pour la construc-tion des prisons, environ 20 milliards d’euros, soit unpoint de PIB ou encore le tiers de la recette annuelle del’impôt sur le revenu. En ces temps de vaches maigrespour les finances publiques, les partenariats public-privéont fait figure de solution miracle. Depuis des années, lesadministrations et les collectivités locales ont pu se doterpar ce biais d’écoles, d’hôpitaux, d’infrastructuresroutières sans bourse délier –pourl’instant, mais à quel coût en réa-lité ? –, le coût d’in-vestissement étant supporté par des entreprises privéesqui, en contrepartie, se voient garantir le versement deloyers pendant des décennies.

La France a fait sien il y amoins de dix ans ce systèmeimporté de Grande-Bretagne, où au moins soi-xante-six hôpitaux sontaujourd’hui en faillite pour yavoir re-couru. Tout aussiinquiétante est la perte decompétence de l’État queportent en germe les PPP.Que pèsera-t-il demain siceux-ci se généralisent ?Plus rien ! Il sera asphyxié.Sa capacité à imaginer et àconcevoir des projets publics disparaîtra, de même quesa compétence à les gérer. Il y aura alors un transfert,une sorte de « privatisation du patrimoine public ». C’estd’autant plus inquiétant que ces PPP profitent aux grandsgroupes et non aux PME, peut-être même pas auxentreprises de taille intermédiaire. En théorie, tout lemonde est traité sur un pied d’égalité, mais certains sont« plus égaux que d’autres » et, en pratique, seulsBouygues, Veolia, Eiffage, Vinci et quelques autres ont lacapacité de monter des dossiers. Les entreprises pluspetites n’ont pas les reins assez solides pour se mesurerà ces groupes. Dans le cas du « Pentagone à lafrançaise », 20 millions d’euros auraient ainsi étédéboursés par les candidats à l’opération.

Dans ce contexte, on ne peut que se réjouir que, à lasuite des déclarations de François Hollande pendant lacampagne présidentielle à propos d’un audit sur les PPPliant l’État, Christiane Taubira, ministre de la justice, aitdit hier avoir demandé une inspection générale sur lemode de financement du futur palais de justice de Paris,dont le contrat en partenariat public-privé a été signé enfévrier dernier.

Christiane Taubira a également annoncé le gel du plan deconstruction de nouvelles prisons lancé par sonprédécesseur en procédure accélérée à la fin de la ses-sion parlementaire précédente. C’est heureux, car laseule imputation des loyers dus aux opérateurs despartenariats public-privé pour les prisons aurait conduità des loyers multipliés par plus de cinq entre 2011 et2017, ce qui aurait complètement asphyxié le budget del’administration pénitentiaire.

projet de lo i . . .règlement des comptes et rapport de gesion pour l’année 2011

intervention de jean-Yves leconte, sénateur représentant les Français établis hors deFrance(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Oui, mes chers collègues, il est temps d’agir, de revoir lesstratégies d’investissement de l’État dans la gestion deson patrimoine immobilier et d’assurer la transparencedans la présentation de ses comptes.

En mai dernier, le premier président de la Cour descomptes et le président de la première chambre, audi-tionnés devant le Sénat, rappelaient que les 86 milliardsd’euros de reste-à-payer entre deux exercicescor-respondaient à des autorisations d’engagementtechniquement consommées sans que les crédits depaiement correspondants l’aient été, cette forte crois-sance s’expliquant, pour partie, par le recours accru auxPPP. Et Didier Migaud de conclure : « La Cour sera cer-tainement amenée à formuler des observations surcertains PPP, mais cela sera sans doute trop tard. C’est leParlement qui est force de proposition en la matière. »

Monsieur le ministre, cette intervention sur la questiondite extrabudgétaire des partenariats public-privé mesemble importante, car elle illustre le mode de gestionde l’ancienne majorité.

À quoi bon parler de règle d’or et d’équilibre si l’ondéveloppe année après année le recours aux finance-ments extrabudgétaires, qui permettent à la fois de fairedes cadeaux à ses amis et de cacher d’importantsengagements de l’État ?

Le rapport de gestion pour l’année 2011 est l’occasion dedemander qu’à l’avenir puissent figurer dans ce typed’exercice l’ensemble des engagements de l’État, dontles partenariats public-privé. Il faut que ceux-ci fassentl’objet d’un contrôle parlementaire et qu’ils soientcomptabilisés de la même manière dans les budgets del’ensemble de nos partenaires de l’Union européenne,car, pour faire des comparaisons chiffrées entre pays, ilfaut disposer de chiffres comparables.

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Page 32: Bulletin Spécial Finances publiques

monsieur le président, monsieur le ministre, meschers collègues, le rapport d’information de lacommission des finances, élaboré en vue de ce

débat sur les orientations des finances publiques, s’inti-tule 2013-2017: une trajectoire équilibrée pour lescomptes publics.

Ce titre reflète la position adoptée par la commissiondepuis le mois d’octobre 2011. Rappelez-vous, sur laproposition de Nicole Bricq, nous avions considéré quel’effort d’une centaine de milliards d’euros pour parvenirà l’équilibre des comptes en 2017 devait être partagé àparité, de manière équilibrée, entre recettes et dépen-ses. Ce titre illustre aussi la démarche du Gouvernement,qui nous propose effectivement, conformément auxengagements pris par François Hollande lors de la cam-pagne électorale, de parvenir à l’équilibre en 2017 autravers d’un effort partagé entre dépenses et recettes.

Alors que nous entamons une législature au cours delaquelle les questions de finances publiques seront cen-trales, il est important, mes chers collègues, que nousayons les idées claires sur la trajectoire sur laquelle nousnous engageons.

Nous devons effacer l’intégralité de notre déficit budgé-taire entre 2013 et 2017, c’est-à-dire 90 milliards d’eurosenviron. Il ne faut vraisemblablement pas compter sur lacroissance pour combler une part importante de ce trou.Si elle nous procure 10 milliards d’euros sur les 90 mil-liards dont nous avons besoin, nous pourrons nousestimer heureux.

Dès lors que nous ne pouvons pas compter sur la crois-sance, il faudra prendre des mesures discrétionnaires,pour un montant équivalent d’une quarantaine de mil-liards d’euros tant en recettes qu’en dépenses. J’ouvre làune parenthèse : si la croissance n’était pas celle que leGouvernement escompte, notamment à partir de 2014,et que l’objectif de retour à l’équilibre en 2017 étaitnéanmoins maintenu, il conviendrait évidemment d’entirer les conséquences sur le montant des mesures dis-crétionnaires à prendre.

Pour ce qui est des dépenses, nous obtiendrons ces40 milliards d’euros en freinant le rythme de leur évolu-tion spontanée.

Alors qu’elles connaissentune augmentation naturellede plus de 1,5 % par an, ilfaudra contenir celle-ci à0,8 %. L’effort portera demanière plus prononcée surl’État que sur les collectivitésterritoriales et la sécuritésociale. Cela impliquera derespecter des normesexigeantes et de financertoutes les nouvelles dépen-ses par des économies nou-velles. Les ministres, selon ce qui nous a été annoncé,devront proposer des réformes de leurs administrationsavant la fin du mois de septembre. J’invite donc nos col-lègues de l’opposition à faire preuve de patience. Sontdéfinis dès à présent les objectifs chiffrés et les normesd’évolution des dépenses. Le changement par rapport auprécédent gouvernement, c’est que les économies vontêtre décidées non pas de manière forfaitaire et aveugle,mais par chaque mi-nistère, en fonction des évolutionsdes missions et des besoins de leurs administrations.

S’agissant, à présent, des recettes, la question se pose desavoir comment trouver les 40 milliards d’euros néces-saires. Si la croissance ne produit pas de rendement, ilfaudra augmenter les prélèvements obligatoires enmême temps que nous modifierons leur structure dansun sens plus juste. Nous aurons l’occasion d’en reparleren examinant le collectif budgétaire.

Dans ce scénario, mes chers collègues, l’année 2013,vous l’aurez noté dans les annonces du Gouvernement,sera la plus importante, celle à la fin de laquelle nousnous devrons de respecter l’objectif que nous a fixé leConseil : ramener notre déficit à 3 % du produit intérieurbrut. Si nous n’y parvenions pas, une mécaniquejuridique de sanctions se mettrait en place. De manièreplus immédiate, notre crédibilité en serait affectée, car lepoids politique de cet objectif est désormais tel que l’onne peut s’en abstraire.

Pour garantir le respect d’un tel objectif, leGouvernement propose de concentrer sur 2013 les troisquarts des hausses de prélèvements obligatoires prévues pour la législature, soit une trentaine de milliardsd’euros.

Débat. . .orientations des finances publiques

intervention de François marc, rapporteur général de la commission des finances,sénateur du Finistère(séance du mardi 17 juillet 2012)

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C’est la bonne stratégie : l’effet multiplicateur desdépenses étant plus fort que celui des recettes, il ne fautpas prendre le risque d’étouffer la croissance de 2013 encomprimant trop les dépenses.

Mais il y a un préalable à tout cela : atteindre, en 2012,le point de départ de cette trajectoire quinquennale,c’est-à-dire un niveau de déficit de 4,5 % du PIB. C’estpour nous assurer que nous ne manquerons pas notrepoint de départ que le Gouvernement a préparé un pro-jet de loi de finances rectificative, que nous analyseronsen détail la semaine prochaine.

Après cette présentation des enjeux et des ordres degrandeur, je voudrais faire quelques commentaires.

Le premier porte sur la préparation de la session d’au-tomne. Le Gouvernement a présenté tout récemment lamaquette à partir de laquelle le projet de loi de financessera construit ; les rapporteurs spéciaux et pour avis peu-vent en prendre connaissance. Elle évolue peu par rap-port à 2012, mais je dois relever que le périmètre desmissions reflète de moins en moins celui des politiquespubliques et de plus en plus celui des attributions desdifférents ministres. Cela doit nous amener à réfléchirsur l’application de la LOLF à cet égard, et il conviendrapeut-être d’y apporter des corrections à l’avenir.

Mon deuxième commentaire – je présente par avancemes excuses aux collègues de l’opposition pour la peineque je vais leur occasionner… – porte sur le contrasteentre la stratégie équilibrée et réaliste proposée parl’actuel gouvernement et la stratégie plus « équilibriste »du précédent, qui avait été reprise dans le programmede Nicolas Sarkozy.

Rappelez-vous, cette stratégie était fondée sur un retourà l’équilibre reposant à 80 % sur la maîtrise des dépens-es. Le retour que nous proposons s’appuie pour moitiésur la réduction des dépenses et sur l’augmentation desrecettes.

La voie proposée par le gouvernement précédent n’étaitni souhaitable ni réaliste. Elle n’était pas souhaitable, carelle aurait porté atteinte au fonctionnement des servicespublics. Elle n’était pas possible, car le gouvernementprécédent n’est, de toute façon, jamais parvenu àrespecter ses objectifs en matière de maîtrise desdépenses. Ainsi, de 2008 à 2011, ces dernières ont aug-menté, en moyenne, de 1,4 %. Pour maîtriser le déficit,les équipes gouvernementales successives de M. Fillonont, entre 2010 et 2012, augmenté les prélèvementsobligatoires de plus de 40 milliards d’euros.

L’effort que l’actuel gouvernement propose de faireporter sur les recettes en une législature de cinq ans – enne visant pas les mêmes prélèvements, bien entendu – la

majorité précédente l’a fait subir en trois ans. Dès lors,vous comprendrez, chers collègues de l’opposition, quenous ne pouvons accepter les procès en « matraquagefiscal », que certains dans vos rangs ont déjà commencéà instruire.

Je le répète, l’effort de 40 milliards d’euros que nousallons demander sur cinq ans, le précédent gouverne-ment l’a demandé sur trois ans.

La comparaison est tout à fait explicite !

Mon troisième commentaire portera sur un autre aspectde la politique équilibrée que nous propose le nouveaugouvernement : l’équilibre entre discipline budgétaire etsoutien de la croissance.

La précédente majorité a dégradé le déficit structurel parle programme fiscal qu’elle a mis en œuvre en début delégislature, en particulier la fameuse loi TEPA, sur laque-lle elle est revenue en fin de législature, pour partie aumoins. Elle a ouvert les vannes budgétaires de 2008 à2010, en réponse à la crise. La crise de la zone euro l’aensuite conduite à s’enfermer dans une rhétorique pri-vilégiant l’austérité et laissant de côté la croissance.

Le nouveau Président de la République, au contraire, estparvenu à faire émerger le thème de la croissance dansle débat européen. Lors du Conseil qui s’est tenu les28 et 29 juin, les Européens se sont dotés d’un « pacte decroissance et d’emploi » complétant et rééquilibrant lesrègles budgétaires, ce qui conduit le Gouvernement àconsidérer désormais que nous pouvons les accepter.

Je voudrais donc consacrer mon quatrième et derniercommentaire à ces nouvelles règles budgétaireseuropéennes, qui appellent en particulier trois remar-ques de ma part.

Premièrement, ce qui compte vraiment et ce sur quoinous sommes jugés, c’est le respect des engagements etnon la sophistication des dispositifs juridiques que nousmettons en place. Les règles constitutionnelles qui exis-tent dans certains pays, en particulier en Allemagne,sont d’ailleurs très sommaires puisqu’elles se contententde fixer des objectifs, sans prévoir ni la manière demesurer la conformité à la règle ni les sanctions en cas denon-respect. Le Président de la République est donc toutà fait fondé à refuser de s’engager dans un processusinapproprié d’inscription de cette règle dans laConstitution.

Deuxièmement, si les évolutions de la gouvernancebudgétaire européenne sont très importantes, il ne fautpas accorder plus de place qu’il n’en mérite au traité surla stabilité, la coordination et la gouvernance dansl’Union économique et monétaire, dont le Conseil

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constitutionnel dira s’il comporte des dispositions con-traires à la Constitution.

Les dispositions du TSCG sont, en tout état de cause,pour la plupart, déjà présentes dans des textes de droitcommunautaire en vigueur ou en cours de discussion.Surtout, la règle que ce traité demande d’inscrire dans ledroit national s’applique déjà au niveau européen. Cetterègle est devenue contraignante depuis la réforme dupacte de stabilité du 26 novembre dernier. Cela justifie laposition actuelle du gouvernement français.

Troisièmement, j’évoquerai les conséquences de l’appli-cation des nouvelles règles budgétaires du pacte de sta-bilité.

D’une part, le traité nous demande d’inscrire dans notredroit interne l’obligation de réduire notre déficit struc-turel de 0,5 point de PIB par an jusqu’à ce que nousayons atteint notre objectif de moyen terme, à savoirl’équilibre structurel.

D'autre part, à compter de 2017, il nous faudra réduirede 20 % par an notre excédent de dette par rapport auseuil de 60 %.

Ces règles sont strictes, mais il faut être conscient que lapolitique budgétaire que nous devrons conduire après2013 pour les respecter sera moins exigeante que cellequi doit être mise en œuvre pour atteindre l’objectif de3 % en 2013.

Entre 2012 et 2013, nous devrons réduire notre déficiteffectif de 1,5 point de PIB en un an, et notre déficitstructurel plus encore. C’est un effort très important quinous est réclamé.

Après 2013, lorsque nous ne serons plus sous le coupd’une procédure pour déficit excessif, nous ne seronsplus obligés de réduire notre solde structurel « que » de0,5 point par an, ce qui est déjà significatif, mais c’estplus de trois fois moins que le rythme qui nous estassigné pour l’an prochain. En revanche, à l’avenir, lesÉtats qui « sortiront des clous » devront se soumettre àla nouvelle mécanique du pacte de stabilité, complétéesur plusieurs points par le traité, et à celle des nouveauxtextes en préparation. L’effort demandé sera, pour laFrance, moindre, mais les contraintes que la Commissionet le Conseil pourront imposer aux États seront trèsfortes.

Les implications sont réelles en termes non seulement deprocédure budgétaire, mais aussi d’équilibres institution-nels puisque le traité, encore plus que le pacte de stabi-lité, limite les capacités de blocage des États. Il faut bienque nous analysions toutes les conséquences de ces évo-lutions.

Mes chers collègues, le débat doit avoir lieu et il doit sepoursuivre entre nous jusqu’à la dernière semaine dumois de septembre. En effet, le Premier ministre vient del’annoncer il y a une heure, le Parlement sera convoquéen session extraordinaire la dernière semaine deseptembre pour envisager la ratification de ce traité.Nous devons donc réfléchir à l’ensemble de ses con-séquences pour préparer au mieux cette dernièresemaine de septembre.

Beaucoup l’ont dit ces derniers temps, la monnaieunique souffre de n’être pas accompagnée d’un gou-vernement économique. L’harmonisation des règles degouvernance budgétaire en Europe est donc souhaitabledans son principe dès lors qu’elle s’inscrit dans unestratégie de croissance pour la zone euro. Nous verronsce qui résultera des travaux du groupe animé parHerman van Rompuy, mais il est indéniable que, sansunion budgétaire en Europe, nous n’arriverons, parexemple, jamais aux eurobonds et à la mutualisation desdettes souveraines.

Ce qu’il faut désormais, c’est construire des majorités auConseil et au Parlement européen pour peser sur la dé-finition des règles.

Quant à nous, mes chers collègues, il nous faudra êtreactifs et faire vivre la conférence des commissions desparlements nationaux que prévoit l’article 13 du traité.

Ces considérations, mes chers collègues, me conduisentà ma conclusion : les orientations des finances publiquespour la législature à venir ne sont pas seulement deschiffres. Les chiffres sont importants, ils sont lourds etnous devons les assumer. Mais c’est surtout de leurrespect que dépendent la place et l’influence de laFrance en Europe.

C’est pourquoi, mes chers collègues, monsieur le min-istre, il est si précieux que la France soit désormaisdirigée par un gouvernement réaliste et crédible.

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monsieur le président, monsieur le ministre, meschers collègues, comme chaque année, la com-mission des affaires sociales entend apporter

dans ce débat d’orientation son éclairage spécifique surla situation des finances sociales. Celles-ci représententle premier poste de nos comptes publics.

Dans la dette et dans les déficits qui sont aujourd’hui aucentre de nos préoccupations, leur part est moindre quecelle du budget de l’État. Pour autant, leur retour àl’équilibre est tout aussi nécessaire. Pourquoi ?

D’abord, parce que la problématique des prélèvementsobligatoires forme un tout, que le poids de la dettesociale réduit nos marges de manœuvre et nous exposeà des risques financiers au même titre que la dette de l’É-tat.

Ensuite, parce que, nous l’avons souvent dit dans cethémicycle, financer les prestations sociales d’aujourd’huipar des déficits et de la dette, c’est reporter des chargessur les générations à venir tout en hypothéquant leniveau de leur protection sociale, ce qui est économique-ment, socialement et moralement insupportable !

J’ai détaillé dans mon rapport écrit les dernières évolu-tions des comptes sociaux au vu de la clôture de l’exerci-ce 2011 et des prévisions présentées il y a quelques joursdevant la commission des comptes de la sécurité sociale.

En 2011, le déficit du régime général et du Fonds de sol-idarité vieillesse, FSV, s’est élevé à 20,8 milliards d’euros,soit 1 milliard d’euros de moins que le montant retenudans la dernière loi de financement.

En revanche, l’année 2012 devrait s’achever en présen-tant une situation plus dégradée que ne le laissaientprésager les prévisions. Aucun gros risque de dérapagedes dépenses de sécurité sociale n’a été identifié mais,avec une croissance à l’arrêt, les recettes fléchissent.Sans mesure correctrice, le déficit s’alourdirait de 2 mil-liards d’euros par rapport au montant de la loi definancement et serait peu ou prou identique à celui de2011, soit 20 milliards d’euros.

La crise a fait exploser le déficit du régime général.

Depuis 2009, il dépassechaque année, FSVinclus, plus de 20 mil-liards d’euros, avec unrecord absolu de 28 mil-liards d’euros en 2010 !Mais la crise n’expliquepas tout. Elle a aggravé ledéficit structurel persis-tant des comptes sociaux,de l’ordre de 10 milliardspar an, déficit qui n’a pasété véritablement traitéau moment où le con-texte économique s’y prêtait bien plus qu’aujourd’hui.Comme l’a indiqué devant nos commissions des financeset des affaires sociales le Premier président de la Courdes comptes, « la France est entrée dans la crise avec unedette trop élevée et des comptes en déficit structurel ».

Face à ces déficits et à la nécessité de financer la dettesociale, le précédent gouvernement a additionné desréajustements ponctuels, opérés sans logique d’ensem-ble, au gré des urgences du moment et au détriment dela recherche de financements plus solides, répondantréellement à l’évolution des besoins à moyen terme.

La dette sociale a gonflé. C’est ainsi que, l’an dernier,65 milliards d’euros correspondant aux déficits des troisannées 2009 à 2011 ont été transférés à la caisse d’amor-tissement de la dette sociale, la CADES. Autre exemple,62 milliards d’euros supplémentaires sont prévus de2012 à 2018 au titre des déficits de la branche vieillesse.Et une partie des déficits restera à financer, comme ceuxdes branches maladie et famille de 2012 ou celui durégime de retraite des exploitants agricoles. J’ajouterai ledéficit de la branche accidents du travail et maladies pro-fessionnelles, qui reste pendant depuis trois ans. Nos col-lègues Catherine Deroche et Jean-Pierre Godefroy vien-nent de présenter sur ce sujet, dans le cadre de laMECSS, un rapport particulièrement pertinent.

S’agissant des perspectives pour 2013 et au-delà, la Courdes comptes a effectué des projections qui aboutissent àdes résultats très sensiblement différents de ceux quinous avaient été présentés lors du dernier projet de loi

Débat. . .orientations des finances publiques

intervention d’Yves DauDignY, rapporteur général de la commission des affaires sociales,sénateur de l’aisne(séance du mardi 17 juillet 2012)

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de financement de la sécurité sociale et qui avaient pour-tant été révisés en cours de discussion au vu de la dégra-dation des hypothèses de croissance.

La branche vieillesse ne parviendrait pas à résorber sesdéficits qui resteraient supérieurs à 10 milliards d’eurospar an, CNAV, et FSV confondus. Nous sommes loin duretour à l’équilibre à l’horizon 2018 annoncé lors de laréforme des retraites !

Nous connaissions la fragilité de ce scénario fondé surune hypothèse de retour progressif au plein-emploi et detransfert de cotisations de l’UNEDIC vers l’assurancevieillesse.

Selon la Cour des comptes, la branche famille resteraitégalement en situation de déficit prolongé, de l’ordre de2 milliards d’euros par an, notamment du fait du moin-dre rendement des recettes qui lui ont été affectées ensubstitution d’une part de CSG transférée à la CADES. Làaussi, nous avions alerté sur les risques de déséquili-brage de la branche, qui sont malheureusement désor-mais avérés.

Enfin, la Cour des comptes estime qu’il faudrait entre sixet douze ans, selon le niveau de l’ONDAM, pour arriver àéquilibrer les comptes de l’assurance maladie.

Au total, sans mesures correctrices, les déficits cumulésdu régime général depuis 2012 pourraient atteindre155 milliards d’euros en 2020, soit environ 100 milliardsde plus que le montant des transferts des déficits vieil-lesse à la CADES déjà programmés jusqu’en 2018.

Face à cette situation et sans attendre le prochain PLFSS,le Gouvernement a déjà pris ou annoncé plusieurs déci-sions qui concilient deux objectifs : d’une part, préservernotre niveau de protection sociale, avec une prioritépour nos concitoyens les moins favorisés, d’autre part,amorcer résolument la réduction du déficit.

L’abrogation de la TVA sociale écartera la ponctioninjuste que le précédent gouvernement avait program-mée sur le pouvoir d’achat des ménages. Les cotisationsd’allocations familiales étant maintenues à leur niveauactuel, la hausse de deux points du prélèvement socialsur les revenus du capital, entrée en application ce moisde juillet, constituera une ressource nette pour la sécu-rité sociale. Elle permettra de financer la majoration de25 % de l’allocation de rentrée scolaire, mais égalementd’alimenter la branche vieillesse pour un montant de2,2 milliards d’euros par an à compter de 2013.

Plusieurs niches sociales seront réduites, notammentavec le passage de 8 % à 20 % du forfait social.

Enfin, le décret du 2 juillet sur l’âge d’ouverture du droità pension de vieillesse procède à un relèvement de0,2 point des cotisations à compter du 1er novembre,porté progressivement à 0,5 point d’ici à 2016 et répartipour moitié entre part patronale et part salariale. Cetterecette nouvelle garantit le financement du retour à laretraite à soixante ans en faveur des salariés ayant com-mencé à travailler à 18 ou 19 ans, tout en procurant unsurplus de ressources à la CNAV.

Au total, ces premières mesures représentent déjà ungain net de ressources pour la sécurité sociale de près de1,5 milliard d’euros en 2012, ce qui permettra de revenirà un niveau de déficit proche de celui qui a été voté enloi de financement, puis de 5 milliards d’euros par an àcompter de 2013.

Cet effort sera équitablement réparti. Il vise en prioritédes revenus jusqu’ici peu ou pas sollicités pour lefinancement de notre protection sociale.

Il n’est pas exclusif de mesures de justice – je pense auxsalariés ayant suffisamment cotisé pour bénéficier dutaux plein, auxquels deux années de travail supplémen-taires avaient été imposées – ni de mesures de soutiendu pouvoir d’achat des familles modestes, avec la majo-ration de l’allocation de rentrée scolaire.

Ce premier pas devra être prolongé.

Nous nous trouvons aujourd’hui face à une situationextrêmement dégradée des comptes sociaux, sanséquivalent dans le passé, avec 90 milliards d’euros dedéficits cumulés pour le régime général et le FSV sur lesseules années 2007 à 2011, et 20 autres milliards d’eurosà venir en 2012.

Les orientations prises depuis quelques semaines mon-trent la bonne direction et témoignent d’une volontétrès claire ne pas laisser la situation se détériorer davan-tage. Une action résolue est amorcée en même tempsqu’est préservée la situation de nos concitoyens lesmoins favorisés.

Avec les recettes nouvelles qui vont être mises en place,un pas important sera fait sur la voie de la réduction dudéficit. En s’attaquant à un certain nombre de nichessociales, elles vont dans le sens d’une réforme plus struc-turelle, dont nous savons tous qu’elle sera nécessaire.

Au cours de la dernière décennie, le financement de lasécurité sociale a donné lieu à une multiplicité demesures qui l’ont rendu plus complexe et beaucoup plusinstable. Cette évolution n’a pas favorisé, bien au con-traire, le traitement des déficits récurrents.

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Le Premier ministre a souhaité saisir le Haut Conseil dufinancement de la protection sociale sur les évolutionspossibles du système actuel, notamment en termes dediversification des recettes, dans la perspective d’uneconcertation avec les partenaires sociaux, puis d’uneréforme législative en 2013.

Une réforme du financement de la sécurité sociale devranécessairement répondre à deux enjeux : premièrement,assurer un niveau global de ressources en accord avec lesbesoins des régimes sociaux, ce qui impliquera néces-sairement la majoration de ces ressources eu égard auxdéséquilibres persistants ; deuxièmement, définir la partrespective des différentes formes de ressources, le caséchéant après en avoir imaginé de nouvelles, de lamanière la plus optimale au regard d’objectifs clairs, àsavoir une plus grande équité entre les différents typesde revenus et d’assiettes d’imposition, sans ignorer larecherche d’une meilleure compétitivité de notre pays.

S’agissant des dépenses, c’est pour la branche vieillesseque les perspectives déficitaires sont aujourd’hui les plusaccentuées. L’essentiel des mesures de financement pri-ses ou annoncées ces dernières semaines lui sera affec-té. Elles devraient permettre de couvrir près de la moitiédu besoin de financement à moyen terme, mais ne suf-firont pas à résorber le déficit.

Dans le cadre des concertations prévues en 2013, il s’agi-ra de travailler à la définition de paramètres justes etéquitables tout en permettant à notre système deretraite d’atteindre l’équilibre financier.

Il sera également nécessaire d’agir en profondeur sur lesressorts de la dépense d’assurance maladie.

Au-delà de la poursuite d’actions déjà engagées, commela diminution du prix des produits de santé, notammentdes médicaments génériques, des mesures plus struc-turelles devront être envisagées.

De toutes les réflexions conduites ces derniers mois, unlarge consensus émerge désormais autour du renforce-ment de la pertinence et de l’efficience des parcours desoins et des séjours hospitaliers, dans un double objectifd’amélioration de la qualité des prises en charge et d’op-timisation dans l’utilisation des ressources.

L’organisation d’un véritable parcours de santé, pro-longement du parcours de soins, constituera l’axe centraldes efforts à mener.

De nombreuses sources de surcoût sont à éliminer, touten rendant l’accès aux soins plus rapide et en améliorantla qualité de la prise en charge.

Ces mesures supposent, de la part de tous les acteurs,une forte mobilisation qu’il faut désormais concrétiser.

Telles sont, monsieur le président, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, les observations que jesouhaitais présenter, au nom de la commission desaffaires sociales, dans le cadre de ce débat sur les orien-tations des finances publiques, qui prépare des choixdéterminants pour notre pays.

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Monsieur le président, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, cette interven-tion sera plus brève que celle que j’ai prononcée

à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlementdes comptes.

J’ai déjà parlé du passé ; je ne pense pas qu’il soit utiled’y revenir. Surtout, je souscris pleinement à l’analysedéveloppée par Benoît Hamon, qui représente ici leGouvernement, même si la sévérité de son propos nem’a pas échappée, non plus qu’à François Marc. Noussavons bien que les temps qui viennent seront exigeants.

Vous avez exposé très clairement, monsieur le rappor-teur général, les enjeux réels des années à venir. Vousl’avez fait en parlementaire aguerri et nous devronsgarder vos propos en mémoire.

Monsieur de Montesquiou, nous ne sommes tout demême pas responsables du doublement de la dette etdes 3 millions de chômeurs que nous lègue le précédentgouvernement ! Incontestablement, ce dernier a malanticipé et mal géré la crise. Aujourd’hui, nous héritonsde cette situation. Au demeurant, vous auriez peut-êtrepu matérialiser plus tôt dans vos votes les bonnes idéesque vous venez de lancer…

Nous voilà donc avec un double héritage. Car la crise,bien réelle, entraîne une croissance économique faible,pour ne pas dire nulle. En la matière, les pronostics duFMI publiés aujourd’hui dans la presse ne sont pas denature à nous rassurer.

La crise et le montant historique de la dette contraignentgrandement les possibilités de l’action publique. Noussavons bien que rien ne pourra nous dispenser de rem-bourser notre dette. Il nous faut donc revenir à l’équili-bre : telle est la trajectoire que vous nous avez présen-tée, monsieur le ministre délégué, et nous vous avonsbien entendu.

À propos du précédent gouvernement, je voudrais égale-ment revenir sur un autre aspect, que j’ai déjà rapide-ment abordé tout à l’heure.

En effet, ce qui nous frappe aujourd’hui, c’est la manièredont nos voisins européens ont perdu confiance en la

France, qui fut pourtantun grand pays, porteurdes espérances del’Europe. Selon eux, nousserions quelque peupassés à côté des enjeux,notamment en nous dis-pensant de respecter lescritères de Maastrichtlorsqu’il en était encoretemps. Comme l’a rap-pelé un de nos collègues,le président de laRépublique de l’époqueavait lui-même annoncé, lors d’une réunion del’Eurogroupe, que la France ne respecterait pas lesditscritères, qu’il s’agissait d’en tenir compte et qu’il n’y avaitpas là matière à débat.

Nos voisins européens se sont également lassés de ceprésident si fier de sa relation avec l’Allemagne ; nousavions finalement l’impression que l’Europe se réduisaità ces deux pays, le nôtre et l’Allemagne.

Nous en profiterons encore, monsieur Marini … Vousavez bien abusé de l’argument des 35 heures et de laretraite à 60 ans, réforme engagée par le présidentMitterrand ! Peut-être même, en effet, pourriez-vousinvoquer les congés payés, accordés par Léon Blum en1936, ou l’invention de l’école par Charlemagne ?

Avec l’Europe, nous sommes au cœur du débat d’orien-tation. En effet, comme les vingt-sept États membres,nous sommes liés par une contrainte européenne. Il étaitdonc nécessaire de changer de méthode.

Le Président de la République François Hollande, en ren-contrant sans délai, non seulement la chancelière alle-mande, mais aussi les présidents des gouvernementsitalien et espagnol, MM. Monti et Rajoy, est parvenu àobtenir que l’Europe s’intéresse à la croissance, à traversles mesures que nous connaissons, mais que je n’évo-querai pas plus longuement, car nous passerons sansdoute quelques bons moments, à l’automne prochain, àen débattre dans cet hémicycle.

Débat. . .orientations des finances publiques

intervention de michel anDre, sénatrice du puy-de-Dôme(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Cependant, même si c’est dans l’Europe, et avecl’Europe, que nous pourrons régler notre problème decroissance et de dette, ce sont bien le Gouvernement etle Parlement, ensemble, qui peuvent et doivent donnerl’impulsion nécessaire pour permettre le redressementde la France aux niveaux européen et mondial.

Oui, il nous faudra tout à la fois augmenter les recettes etbaisser les dépenses. Qui sera surpris d’entendre de telspropos au Sénat ? L’hiver dernier, la rapporteuregénérale nous avait longuement détaillé, à cette tribuneet en commission des finances, la double mécanique àlaquelle nous sommes confrontés. Je me souviens mêmequ’un ministre avait jugé désagréable que le Sénat semette à faire de la politique !

Cela correspondait sans doute à un sentiment plusgénéral … Nous avions alors proposé d’augmenterquelques lignes budgétaires de nature à apporter desrecettes supplémentaires, mais cela n’a pas été retenupar la commission mixte paritaire. Dont acte ! Toutefois,nous sommes totalement préparés à ce débat, monsieurle ministre délégué, car nous l’avons déjà abordé, et nousy prenons part avec sérieux.

Permettez-moi, tout d’abord, d’insister sur la concerta-tion qui devra être mise en œuvre, notamment avec lesdifférentes administrations.

Vous nous avez indiqué, monsieur le ministre délégué,que chacun de vos collègues devrait faire des efforts etqu’il recevrait, à cet effet, une note détaillant de façoncomplète les moyens d’organiser son ministère.

Demander des efforts par avance fait toujours un peupeur. Je le sais pour avoir moi-même occupé une fonc-tion ministérielle il y a quelques années ; je suppose quec’est toujours aussi compliqué aujourd’hui. Quoi qu’il ensoit, cela signifie que les ministres devront parler avecleur administration.

Comme l’ont rappelé mes collègues, la RGPP appliquéede manière mécanique a fait des dégâts infinis dans tousles domaines. Il en est ainsi de la justice, par exemple, lafermeture de tribunaux ayant conduit à des regroupe-ments de personnels. Dans quelle situation ceux-ci setrouvent-ils aujourd’hui ? Et que dire de la police, de lagendarmerie, de l’éducation nationale, de l’hôpital pub-lic, des préfectures, de toutes les administrations !

Il sera nécessaire de refaire le point sur les missionsdévolues à ces administrations et sur les travaux confiésaux personnes qui y travaillent. N’oublions pas, en effet,que la majorité des fonctionnaires de nos administra-tions sont de catégorie C, perçoivent des salaires mod-estes et ont parfois consenti de nombreux efforts pours’adapter à de nouvelles tâches.

Certains, un peu âgés, ont dû se mettre à l’informatique,car cet outil est désormais nécessaire dans tous les ser-vices. De plus, ils n’ont pas la possibilité d’intégrer unautre établissement ou une autre structure, ce qui leurpermettrait de vivre dans des conditions plus correctes.

Tous mes collègues en conviendront sans doute avecmoi, chaque ministre serait bien inspiré de travailler enplus étroite collaboration avec chacun des rapporteursspéciaux des différentes commissions parlementairespour examiner nos propositions.

Pour avoir passé plusieurs années au sein de l’institutionsénatoriale, je puis attester de la richesse des rapports

que nous produisons lors du débat budgétaire ; ils peu-vent constituer une aide fiable pour le ministre con-cerné. Aussi, je vous engage, monsieur le ministredélégué, à travailler davantage avec nous.

Par ailleurs, il faudra rétablir la confiance avec les collec-tivités, qu’il s’agisse des communautés de communes,des communes, des départements ou des régions, quisouffrent aujourd’hui, faute d’une autonomie financièresuffisante.

La confiance peut sembler un mot creux. Je tiens cepen-dant à rappeler combien les collectivités ont souffertd’être considérées, dans le passé, comme des variablesd’ajustement, qui plus est fragiles, du fait de leur mod-este masse budgétaire. Elles doivent désormais êtretraitées en partenaires. L’État n’a d’ailleurs pas manquéd’agir ainsi lorsque, à l’occasion du lancement de grandsprojets, il a eu besoin d’elles. Récemment encore, il s’estengagé à mettre en place les lignes à grande vitesse, à lacondition que les collectivités y participent. Cela signifiedonc, bel et bien, qu’elles sont partenaires et qu’elles nesauraient être hiérarchiquement inférieures.

Plutôt que de convoquer les collectivités, il convient deles inviter à travailler avec l’État et à produire du sens« autrement ». Je suis persuadée qu’elles sauront réali-ser l’effort nécessaire pour y parvenir, comme elles ontsu le faire par le passé.

Revoir l’organisation de l’ensemble des administrationset redonner confiance aux collectivités prendra dutemps. Par ailleurs, il faut aussi travailler avec lesentreprises.

L’un de nos collègues a dit tout à l’heure que nous étionsles ennemis des entreprises. Quels propos surprenants !Pour notre part, nous avons dit à plusieurs reprises com-bien il était au contraire précieux de travailler avec lesentreprises et d’apporter aux PME toute l’attentionnécessaire ; mais nous reviendrons ultérieurement sur cesujet.

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Le seul levier qu’il nous soit aujourd’hui possible d’ac-tionner rapidement est celui des recettes. Le gouverne-ment de François Fillon l’avait d’ailleurs compris puisqu’ilavait augmenté les impôts en fin de mandature. Ce quiétait sans doute alors un sursaut désespéré s’inscrit,pour nous, dans une réflexion d’ensemble : il s’agit d’unemesure d’équilibre entre la baisse des dépenses et lahausse des recettes sur l’ensemble du quinquennat.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre délégué, legroupe socialiste soutient les orientations claires, justes,prudentes et sincères que vous proposez.

Vous le savez, la sincérité est essentielle en matièrebudgétaire. Dans le cadre de l’examen du projet de loi derèglement, nous avons souligné que ce que nous votions,c’était la sincérité des comptes. Si nous n’étions passincères, nous risquerions de perdre, me semble-t-il, laconfiance des Français, voire la confiance en nous-mêmes, et ce serait grave.

Mes chers collègues, je ne saurais résister au plaisir deciter à nouveau, après Éric Bocquet, cette belle phrasede Jaurès : « Le courage, c’est de chercher la vérité et dela dire ».

En conclusion, je tiens à féliciter le Gouvernement, quinous présente une feuille de route exigeante, rigoureuseet, en un mot, courageuse. Nous devrons tous accomplirles efforts nécessaires. Vous pouvez compter sur legroupe socialiste pour soutenir votre action.

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Page 41: Bulletin Spécial Finances publiques

Monsieur le président, monsieur le ministredélégué, monsieur le président de la commis-sion des finances, messieurs les rapporteurs

généraux, mes chers collègues, le débat d’orientation desfinances publiques permet de faire le point sur les per-spectives économiques et financières de notre pays pourles années à venir.

Chacun peut mesurer, monsieur le ministre délégué,l’ampleur de l’effort de redressement à accomplir,compte tenu de l’état très dégradé des comptes publicsdont vous héritez, malheureusement, et de l’évaluationde la croissance économique dont nous pourrions béné-ficier.

L’estimation raisonnable retenue traduit bien le contextede « croissance molle » que nous craignions et qui estdevant nous pour plusieurs années, en raison tant ducontexte international que des problèmes de compétiti-vité de notre économie.

Sur un plan général, je ne peux que me féliciter des ori-entations que vous avez tracées. Elles témoignent d’uneforte volonté de justice sociale dans la répartition de l’ef-fort à accomplir, d’une forte mobilisation duGouvernement pour favoriser, malgré la crise, la crois-sance la plus élevée possible, et ce dans la droite lignedes résultats obtenus par le Président de la Républiqueau niveau européen.

Nombre de questions d’ordre général ayant déjà étéabordées, je voudrais plus particulièrement insister surun dossier majeur, qui exigera une attention soutenuedans les mois à venir, tant ses conséquences budgétaireset son impact sur la croissance économique pourraientêtre importants, alors même qu’ils ne sont, à l’heureactuelle, ni totalement connus ni maîtrisés. Je veux par-ler de la situation de la banque Dexia et de la question dufinancement des collectivités territoriales à court etmoyen terme.

J’aborderai donc, successivement, la situation de Dexiaet son coût potentiel pour les finances publiques, lesconséquences à court terme pour les collectivités terri-toriales et, enfin, le cadre financier qu’il nous faut pure-ment et simplement reconstruire à moyen terme pourgarantir le financement des collectivités territoriales etdes hôpitaux.

Sans revenir en détail surl’histoire mouvementée deDexia, je me contenterai derappeler que ce groupe, issud’un rapprochement avec laCaisse des dépôts etconsignations, a joué unrôle essentiel dans lefinancement des collecti-vités territoriales, et avaitacquis une réputation sisolide, liée à l’histoire decette institution, qu’elle laprécédait partout enFrance, dans ses relations avec les grandes villes commeavec les plus petites de nos communes.

Aux yeux de tous, Dexia était le successeur de la CAECL,la Caisse d’aide à l’équipement des collectivités locales,puis du Crédit local de France, offrant la garantieassumée d’accéder à un crédit stable et peu coûteux,répondant en cela à une logique de service public.

L’évolution réelle de la banque au tournant des annéesquatre-vingt et sa dérive rapide vers une logique finan-cière privée ont échappé à toutes les activités de con-trôle, dont la surveillance et la sécurité de notre systèmefinancier sont pourtant la raison d’être.

Toujours est-il que, devenu un groupe multinational,Dexia a développé, entre 2002 et 2008, un modèlefinancier hautement risqué. Je le répète, il est incom-préhensible que les autorités de contrôle aient été aussidéfaillantes. L’héritage de cette époque est aujourd’huiparticulièrement lourd et risque de marquer les années àvenir. Ainsi, en 2008, la banque était prise dans des acti-vités financières tentaculaires et peu lisibles, avec unbilan passé en quelques années à 650 milliards d’euros.Dexia a intégré de fait un véritable hedge fund, avec unportefeuille obligataire de 220 milliards d’euros en 2008,évalué, trois ans auparavant, à 70 milliards d’euros. Parailleurs, cette même année, Dexia a fait face à un besoinimmédiat de trésorerie de 260 milliards d’euros, soitl’équivalent de la dette grecque.

Malgré un piètre bilan, le précédent président du comitéde direction de Dexia et plusieurs de ses collaborateursont bénéficié de retraites chapeaux.

Débat. . .orientations des finances publiques

intervention de maurice Vincent, sénateur de la loire(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Même si les sommes peuvent paraître limitées au regarddu volume des créances dont nous discutons, je souhaite– c’est symboliquement et moralement important ! –que le Gouvernement examine tous les moyens envis-ageables pour récupérer ces retraites chapeaux, éval-uées, semble-t-il, à 15 millions d’euros.

Il faut maintenant faire face aux conséquences de ladéréglementation qui a prévalu, y compris dans unsecteur tel que le financement des acteurs publics. À cetégard, la responsabilité des gouvernements précédentsest clairement engagée.

L’équipe de direction de Dexia qui s’est installée en 2008a mis en œuvre, ainsi que l’a rappelé récemmentM. Mariani, un « démantèlement raisonné » de labanque, en espérant limiter le coût et, surtout, éviter ledéclenchement d’un risque systémique, dont les con-séquences sur d’autres sociétés financières auraient sansdoute été considérables. Elle a fait en sorte de réduire levolume des actifs et l’exposition aux risques du groupe,même si elle s’est défait, en premier lieu, des actifs lesplus facilement revendables. Cette équipe a égalementfait en sorte de clarifier les multiples relations financièresentre les filiales du groupe. Cette orientation ne sauraitêtre contestée, mais 250 milliards d’euros se trouvent,encore aujourd’hui, dans le portefeuille de Dexia.

Les questions qui se posent à nous sont claires : quelleest exactement la composition de cette enveloppe con-sidérable ? L’État ayant engagé une partie de sa garantie,quels sont les risques pour nos finances publiques ? Dansce cadre, il s’agit de mesurer le niveau de risque actuelsur les finances publiques.

Je le rappelle, le groupe a bénéficié d’une recapitalisa-tion à hauteur de 6,4 milliards d’euros en 2008 à un coûtsurévalué partagé entre la France, la Belgique et leLuxembourg. Selon les auditions réalisées récemmentpar la commission des finances, la France a déjà perdu3 milliards d’euros : 1 milliard pour le budget de l’État, et2 milliards pour la Caisse des dépôts et consignations.

Toutefois, en 2011, le groupe a perdu 12 milliards d’eu-ros : 4 milliards d’euros dans le cadre du rachat par laBelgique de Dexia Banque Belgique et 5 milliards d’eurosdans le cadre de l’exposition de Dexia à la dette sou-veraine grecque. Manifestement, les pertes potentiellesà venir sont encore importantes.

Les risques sont désormais concentrés en Espagne et enItalie au travers du financement des collectivités, desbanques et des titres obligataires de ces deux pays. Est-ilencore possible de sortir de cette exposition ou est-ceimpossible, au risque de déstabiliser nos pays parte-naires ? Existe-t-il des scénarii d’exposition aux risquesfinanciers selon l’évolution de ces pays et le comporte-

ment des marchés financiers ? Ces questions que nousnous posons sont légitimes, et nous suivrons attentive-ment l’évolution de ce dossier, tout en gardant à l’espritla maîtrise de nos finances dans les années à venir.

Vous le savez, en 2011, le Parlement français a été con-duit à délibérer dans l’urgence afin de déterminer lemontant maximum des garanties d’État qui pourraientêtre accordées à Dexia.

Dans le cadre de ces garanties, une clef de répartition de36,5 % pèse sur la France, le reste revenant aux deuxautres parties prenantes, le Luxembourg et la Belgique,ce dernier pays n’étant pas satisfait. Nos ministres sonten train de résister, car la révision de cet accord con-stituerait une circonstance aggravante pour notre proprebudget.

D’ici à 2014, le besoin pour ces garanties est estimé entre70 et 90 milliards d’euros. Même si des intérêts ont étéperçus par l’État, ceux-ci sont relativement faibles auregard des sommes en jeu.

Eu égard à ce qui a été dit dernièrement en commissiondes finances, le risque potentiel - qui existe ! - est évalué,à l’horizon 2014, entre 25 et 34 milliards d’euros.

Voilà l’évaluation que l’on peut faire de la somme quisera nécessaire si les garanties de l’État sont appelées àleur maximum. Nous souhaitons tous que cela n’arrivepas, mais il me semble important d’avoir en tête cetordre de grandeur. Telle est la réalité dont nous devonstenir compte.

Dans le cadre de ce propos relatif au groupe Dexia, jevoudrais saluer la démarche de transparence et desincérité financière engagée par nos collègues FrançoisMarc, rapporteur général de la commission des finances,et Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la mission «Engagements financiers de l’État », afin d’obtenir de laCour des comptes une enquête sur les modalités derecensement et de comptabilisation des engagementshors bilan de l’État. Alors que les garanties ne figurentpas au budget de l’État, il me semble aujourd’hui décisifde mettre en place un outil de recensement, notammentau travers de la publication d’un « jaune » budgétairedans le cadre de la présentation au Parlement du projetde loi de finances initiale. Une telle disposition viendraitcompléter utilement les obligations fixées par la loiorganique relative aux lois de finances, la LOLF.

Pour revenir à Dexia, son effondrement, ou plutôt sondémantèlement organisé, pose dans l’immédiat, chacunle sait dans cette assemblée, le problème du finance-ment des collectivités territoriales, pour 2012 et au-delà.

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Il faut donc, et c’est le deuxième point de mon interven-tion, trouver des réponses d’urgence aux difficultés d’ac-cès au crédit des collectivités territoriales, ainsi qu’auproblème spécifique des emprunts toxiques, soulevé lorsde la dernière audition de M. Mariani.

Je n’insisterai pas sur le rôle économique des collecti-vités territoriales ; tout le monde le mesure. Ellesréalisent 70 % de l’investissement civil et représentent,par le biais de la commande publique, 10 % du PIB. Ellesjouent également un rôle contracyclique et d’aménage-ment du territoire. Elles sont, enfin, au cœur des servicespublics rendus aux habitants.

La bataille pour l’emploi et le maximum de croissance,que nous devons absolument conduire, passe par l’in-vestissement local et le dynamisme des collectivités ter-ritoriales. C’est pourquoi la question de leur situationfinancière est déterminante pour limiter les con-séquences de la crise dans les années à venir.

Les collectivités territoriales font face au resserrementde l’offre de crédits bancaires, notamment à cause desnouvelles règles dites de « Bâle III » et de la réticence desbanques commerciales à leur prêter des fonds. Cette dif-ficulté est accentuée par la situation incertaine de Dexia.J’ajoute que, en plus de ce problème de rareté du crédit,le niveau des marges bancaires atteint des sommets –plus de 300 points de base –, qui affectent le coût ducrédit.

Le besoin de financement annuel du secteur public localet des hôpitaux, très important, se situe autour de20 milliards d’euros. Il nous a été rappelé que les ban-ques privées traditionnelles devraient financer autour de10 milliards d’euros en 2012. Il faut toutefois trouver unmoyen de remplacer les 4 milliards d’euros que devaitapporter Dexia. De nombreuses collectivités locales s’in-terrogent sur le reliquat à trouver pour pouvoir financerleurs investissements.

Du côté de Dexia, le retrait de 1,6 milliard d’euros decrédits revolving, annoncé brutalement la semainedernière, n’a pas arrangé les choses. Le relais pris par laco-entreprise associant la Banque postale et la Caissedes dépôts et consignations demeure suspendu à l’ap-probation par la Commission européenne du plan dedémantèlement de Dexia. La lenteur de la création decette nouvelle banque conduit à s’interroger sur sacapacité à apporter 2 milliards d’euros dès 2012.

Vous le voyez, monsieur le ministre délégué, la situationimmédiate est tout sauf claire et rassurante pour les col-lectivités locales. Chacun a appris la décision récente duGouvernement de porter effectivement à 5 milliardsd’euros le montant des nouveaux prêts fournis par laCaisse des dépôts et consignations.

C’était évidemment indispensable, mais il faut aussitrouver les moyens d’y ajouter 2 ou 3 milliards supplé-mentaires. Or ce point n’est pas encore acquis. Lesmodalités pratiques restent à définir, même si des assur-ances nous ont été données par des représentants duTrésor.

Pour près de 500 collectivités territoriales, les empruntstoxiques constituent un autre facteur d’incertitude ;cette question revient fréquemment en discussion. Jerappelle que, à la fin de l’année 2011, j’avais demandéqu’un inventaire complet soit opéré. La commissiond’enquête de l’Assemblée nationale a évalué à 19 mil-liards d’euros le total des prêts toxiques, dont 10 mil-liards sont attribuables à Dexia. Le coût de sortie devraitavoisiner 15 milliards d’euros, à répartir sans doute surles dix prochaines années.

Comme je l’avais fait auprès du précédentGouvernement, je demande à l’État de prendre ce pro-blème à bras-le-corps, non pour en assumer le coût total– là n’est pas la question ! –, mais pour mettre en place,avec les collectivités territoriales et les banques respons-ables, un système mutualisé et consolidé de sortie decrise. Rien ne serait pire que de laisser pourrir la situa-tion.

Je serai plus bref s’agissant de mon troisième point :après avoir garanti les financements pour 2012 et 2013,il faut reconstruire un système fiable de financement descollectivités territoriales.

Ce système, que chacun appelle de ses vœux, doitretrouver la fiabilité, la sécurité et le coût modéré quin’auraient jamais dû faire défaut. Aujourd’hui, chacunmesure l’ampleur de la catastrophe due à la croyanceaveugle dans les bienfaits de la dérégulation à outranceet dans la primauté des résultats financiers, quels quesoient les moyens utilisés pour les obtenir.

Les banques privées continueront naturellement dejouer un rôle dans le nouveau système. Il faut veiller à ceque leurs ressources soient assurées et à ce que les con-ditions de prêt aux collectivités territoriales ne devien-nent pas sélectives et coûteuses ; c’est une dérive possi-ble. En clair, il faut garantir l’apport annuel d’au moins10 milliards d’euros par les banques commerciales. Étantdonné l’évolution du système financier européen, ce nesera peut-être pas si facile ; nous devrons donc y êtreattentifs.

Il est urgent également, je l’ai déjà dit, de compenser ladisparition d’ores et déjà engagée de Dexia. Je necacherai pas que je suis un peu inquiet, à titre personnel,quand je vois la complexité du schéma associant laBanque postale et la Caisse des dépôts et consignations.

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Cette nouvelle entité sera-t-elle en capacité de fournir4 milliards d’euros en 2013 ? Aura-t-elle la mêmeprésence territoriale que l’ancien Crédit local de France ?Ce n’est pas acquis. Aura-t-elle les compétences néces-saires pour conseiller les collectivités locales ? De nom-breux salariés de Dexia possédaient ces compétences,même si celles-ci ont été dévoyées par une mauvaisestratégie.

Ces questions me semblent très importantes pour lesecteur public local, et beaucoup d’élus se les posent. Denombreux salariés de Dexia, qui sont au total 1 300, seles posent également, en même temps qu’ils s’interro-gent sur leur devenir.

En tout état de cause, je vous propose d’assumer leretour clair et net à une logique de service public danscette nouvelle entité, et de garantir que nos institutionsde contrôle ne failliront pas une deuxième fois sur cepoint.

Enfin, j’appelle votre attention sur l’intérêt de soutenirenfin la création d’une agence de financement des col-lectivités territoriales, portée par les associations d’élus.Ce projet est bien avancé ; s’il s’était heurté à un certainnombre de réticences sous le précédent gouvernement,il est aujourd’hui devenu concret. Il devrait permettre desécuriser l’accès à la liquidité, de diversifier les sources,d’optimiser le coût du financement des collectivités ter-ritoriales, et surtout de compléter leur besoin definancement dans les années à venir.

L’agence serait un acteur parmi d’autres du financementdes collectivités locales, un acteur qui constituerait ungage de solidarité entre ces collectivités, et sans douteaussi un élément modérateur des marges bancaires quej’ai évoquées tout à l’heure.

Pour terminer, je souhaite souligner l’importance de cesenjeux. Nous connaissons tous les efforts à fournir pourmaîtriser les dépenses ; ils seront, je le crois, partagéséquitablement. Nous ne pourrons obtenir une crois-sance renouvelée sans des collectivités localesdynamiques, capables d’investir. Cela implique de leurdonner la garantie qu’elles pourront accéder à unfinancement fiable.

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Page 45: Bulletin Spécial Finances publiques

je tiens tout d’abord à remercier les différents ora-teurs d’avoir utilement et abondamment exploité lerapport d’information que j’ai rédigé au nom de la

commission des finances sur ce débat d’orientation desfinances publiques, et d’y avoir puisé un certain nombred’éléments. Je souhaiterais juste apporter quelques pré-cisions, car j’ai l’impression que les chiffres qu’il com-porte ont parfois été interprétés.

J’évoquerai tout d’abord l’effort à faire sur les recettes etles dépenses.

Ce débat sur les orientations des finances publiquesporte sur une période de cinq ans, pour laquelle un cer-tain nombre d’observations ont été émises dans le rap-port d’information. C’est donc sur cette période quenous avons indiqué que l’effort consenti sur les 90 mil-liards d’euros devait être équitablement réparti entre lesrecettes et les dépenses : 40 milliards d’euros pour lesrecettes, autant pour les dépenses.

Par conséquent, à ceux qui prétendent que nous don-nons notre agrément à un dispositif qui va solliciter lesrecettes à hauteur de 90 %, contre seulement 10 % pourles dépenses, je répondrai que, sur l’ensemble du dis-positif validé, la commission des finances donne aujour-d’hui son accord sur le principe d’un équilibrage.

Ensuite, concernant le « choc fiscal » dont a parléM. Delattre ou le « matraquage fiscal » que d’autressénateurs de droite ont évoqué dans leurs propos, jevoudrais simplement rappeler que – cela figure dans lerapport d’information –, au cours des trois annéespassées, les recettes et les prélèvements obligatoires ontaugmenté de 40 milliards d’euros.

Or nous avons l’intention, sur cinq ans et dans un con-texte difficile, de solliciter la recette dans la même pro-portion : le procès en matraquage fiscal est difficilementrecevable ! En tout cas, c’est ce que j’ai essayé de rappel-er dans mon rapport d’information.

Enfin, pour ce qui est des entreprises, vous avez raison,monsieur Delattre – M. de Montesquiou a aussi évoquécette question –, de dire qu’il faut utiliser le levier fiscalpour favoriser l’emploi, le développement économiqueet aider les entreprises dans leur effort d’investissement.

Nous sommes d’accord surce point, d’autant que vousavez vous-mêmes, duranttoutes ces dernièresannées, utilisé ce levier fis-cal, mais dans un sens quine nous paraît pas satis-faisant. En effet, tout lemonde le constate aujour-d’hui, ce capitalismefinancier exacerbé, qui aété un peu la toile de fonddes actions engagéesdepuis dix ans, a conduit à une politique fiscalefavorisant les très grandes entreprises, sociétés du CAC40, qui ne payaient que 8 % d’impôt sur les sociétés,alors que le taux d’imposition des PME était de 22 % ou23 %.

Voilà le levier fiscal utilisé par la droite depuis dix ans ! Cesont les petites et moyennes entreprises qui ont« casqué », ce sont elles qui ont été mises en difficulté etqu’il faut aujourd’hui remettre au premier plan en lesfavorisant dans leur effort d’investissement. Le créditd’impôt recherche doit être davantage orienté vers lesPME ; l’impôt sur les sociétés et d’autres prélèvementsdoivent davantage les favoriser. C’est dans cet esprit quenous souhaitons une réorientation du levier fiscal« entreprises ».

Pour conclure, face à certains propos parfois un peu forts– j’allais dire excessifs, mais chacun a droit de s’exprimerà sa guise et, au fond, toutes les idées sont recevables –,tenus par ceux qui ont défendu pendant dix ans les gou-vernements en place, je tiens tout simplement à rappel-er que la situation dans laquelle nous nous trouvons estla suivante : 90 milliards d’euros de déficit après dix ansde gouvernement, monsieur Delattre, et un endette-ment considérable.

Je n’en dis pas plus. C’est à cela que nous devons aujour-d’hui nous atteler, en essayant de ramener le déficit de90 milliards à zéro. Imaginez un peu l’effort qu’il va falloirentreprendre pour essayer de maîtriser l’endettementet, éventuellement, de le réduire au plus vite.

L’équation n’est pas simple, j’en conviens.

Débat. . .orientations des finances publiques

intervention de François marc, rapporteur général de la commission des finances,sénateur du Finistère(séance du mardi 17 juillet 2012)

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Page 46: Bulletin Spécial Finances publiques

Cependant, il ne faut pas à l’avance dire que les mesurespréconisées seront défaillantes. On en jugera. Quoi qu’ilen soit, une ambition est affichée par le Président de laRépublique, et un programme comprenant un certainnombre d’initiatives a été annoncé par leGouvernement. Pour ma part, j’encourage ce dernier àagir en ce sens, tel qu’il a été validé par le pays lors desélections récentes.

J’ose espérer, et je rejoins sur ce point le président de lacommission des finances, que la situation de notre paysva s’améliorer. Nous partageons tous cet objectif et nouspouvons espérer, en exerçant ensemble notre travail par-lementaire, contribuer à améliorer la copie autant qu’ille faudra au cours des débats à venir dans cet hémicycle.

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Page 47: Bulletin Spécial Finances publiques

monsieur le président, monsieur le ministre, meschers collègues, le projet de loi de finances rec-tificative que M. le ministre vient de nous

présenter répond à une double nécessité.

La première, vous l'avez indiqué avec beaucoup de con-viction, monsieur le ministre, c'est de conforter la placede la France en Europe. La seconde, c'est de tenir sansdélai les engagements pris devant les Français dans lecadre des élections présidentielles.

S'agissant de la première nécessité, rappelez-vous, cherscollègues, les mois qui ont précédé l'élection présiden-tielle. Politiquement, la France était considérée commen'ayant plus de rôle spécifique puisqu'elle se contentaitde relayer les exigences allemandes. (Exclamations surles travées de l'UMP.) Économiquement, le risque étaitque l'Europe se coupe en deux, l'enjeu pour la Franceétant de savoir si elle basculerait plutôt du côté sud oudu côté nord.

Aujourd'hui, la situation a changé. Politiquement, laFrance a retrouvé une voix mieux affirmée, qui a permisde redonner de l'unité à la zone euro en mettant fin auxdialogues de sourds. Économiquement, les évolutionssont à double tranchant. Ce qui est positif, c'est que laFrance n'a pas rejoint les pays qui connaissent des diffi-cultés de financement.

Ce qui est inquiétant, c'est le fait que nous nous finan-cions à des taux négatifs alors que l'Espagne et l'Italie sedébattent pour conserver des conditions de financementsoutenables. Cela montre que les investisseurs ne croientplus aujourd'hui en l'unité de la zone euro. L'accueilfavorable réservé, pendant quelques jours, aux décisionsprises au Conseil des 28 et 29 juin montre que l'espoirsubsiste, mais la confiance ne reviendra pas tant que riende tangible ne pourra être constaté.

Dans ce contexte, monsieur le ministre, notre gouverne-ment doit poursuivre son travail de persuasion, de con-viction, pour faire avancer les idées que nous défendonset qui donneront une perspective à la zone euro : union bancaire, licence bancaire au Fonds européen de stabil-ité financière, le FESF, et au MES, le mécanismeeuropéen de stabilité, lorsqu'il sera en mesure de voir lejour, augmentation de la taille des dispositifs de stabilité.

Cependant – et j'en reviensà ce projet de loi de financesrectificative –, la France nepourra pas être un moteuret nos partenaires ne pour-ront pas faire confiance ànos solutions si par ailleursnous ne montrons pas notrecapacité à garder notre mai-son en ordre. C'est la bonnegestion de notre pays quiassurera notre crédibilité enEurope. Cette loi definances rectificative est lepremier exemple de la manière dont le Gouvernement etla majorité qui le soutient veulent désormais conduirenotre pays.

Lucidité, réalisme et transparence, voilà les premièresqualités que je trouve à ce collectif budgétaire.

L'objectif est de respecter en 2012 la trajectoire desfinances publiques, c'est-à-dire de ramener le déficit à4,5 % du produit intérieur brut en fin d'année. Pour cela,il ne faut pas habiller un peu, comme l'avait fait le gou-vernement précédent, les chiffres pour donner le senti-ment que l'objectif sera atteint. Il faut, au contraire, faireen sorte de réussir même si de mauvaises nouvellesdevaient survenir. C'est pourquoi il était important que leGouvernement révise à la baisse son hypothèse de crois-sance, corrige en conséquence les prévisions de recetteset évalue l'ampleur des risques de dérapage sur lesdépenses.

En matière de prévision de recettes, il n'est pas déplacéde penser que le Gouvernement précédent n'a pas tiréles conséquences dans le premier collectif budgétaire de2012 de toutes les informations dont il disposait. Quoiqu'il en soit, le tir est rectifié ici. Les moins-values derecettes sont évaluées à 7,1 milliards d'euros pourl'ensemble des administrations publiques.

Aux effets de la conjoncture et aux erreurs de prévision,il faut ajouter les conséquences de la condamnation parla Cour de justice de l'Union européenne du régime fiscaldes OPCVM, les organismes de placement collectif envaleurs mobilières.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de François marc, rapporteur général de la commission des finances,sénateur du Finistère(séance du mardi 24 juillet 2012)

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Page 48: Bulletin Spécial Finances publiques

Nous devrons rembourser environ 5 milliards d'euros,dont 1,5 milliard dès cette année. Aurions-nous puarrêter le compteur plus tôt ? La question mérite d'êtreposée. Nous avons en tout cas le sentiment que desinformations auraient pu être exploitées bien avant.

Pour les dépenses, le dérapage potentiel est estimé àenviron 2 milliards d'euros. Au total, c'est bien unedizaine de milliards d'euros – soit plus d'un demi-pointde PIB – qu'il faut trouver pour que notre déficit de 2012soit bien de 4,5 % du produit intérieur brut en fin d'an-née, et non de 5 %.

Comment cet objectif va-t-il être atteint ?

En dépenses, le choix du Gouvernement est de respecterles règles sur la base desquelles a été construite la loi definances pour 2012. La plus importante est celle selonlaquelle les dépenses de l'État autres que la charge de ladette et les pensions doivent être stabilisées en valeur.Pour la tenir, et donc pour faire face aux risques de déra-page, le Gouvernement accroît de 1,5 milliard d'euros lemontant des crédits mis en réserve. Souvenons-nousqu'il y a seulement quatre mois la précédente ministredu budget expliquait que les risques de dérapage étaientsi réduits que l'on pouvait se permettre d'annuler descrédits mis en réserve dès le début de l'année...

Le nouveau gouvernement corrige le tir et fait heureuse-ment preuve, en la matière, de plus de prudence.

Ces règles sont strictes, mais leur respect est essentiel,notamment parce que la pression à la hausse desdépenses est importante et que les motifs de dépensesexceptionnelles surgissent sans cesse. Le versement enmars 2012, en dehors de la norme de dépense, de deuxtranches de capital au lieu d'une au mécanismeeuropéen de stabilité est, à cet égard, un bon exemple.

En recettes, nous évoquerons longuement dans la dis-cussion des articles les différentes mesures qui figurentdans ce collectif budgétaire et je reviendrai dansquelques instants sur leur logique. Je veux juste rappelerà ce stade que ces mesures vont rapporter 7,3 milliardsd'euros au titre de 2012, dont 5,7 milliards d'euros pourl'État et 1,6 milliard d'euros pour la sécurité sociale. En2013, ces mesures rapporteront 4,4 milliards d'euros enplus, ce qui nous procurera une base de départ de11,7 milliards d'euros pour l'année.

Au total, les mesures du projet de loi de finances recti-ficative permettront de stabiliser le déficit « maas-trichtien », qui est celui qui intéresse nos partenaires etles observateurs, et donc de contenir son dérapage. Sonmontant devrait même être réduit de 500 millions d'eu-ros. Le déficit budgétaire, celui que nous votons à l'arti-cle d'équilibre, sera réduit de manière plus importante,

de 3,7 milliards d'euros, pour atteindre 81,1 milliardsd'euros.

Mes chers collègues, rappelez-vous l'examen du premiercollectif budgétaire. Nous avions dénoncé un dérapagede plusieurs milliards d'euros, le déficit budgétaire ayantété porté à 84 milliards d'euros, contre 78 milliards d'eu-ros dans la loi de finances initiale.

Ce qui m'a frappé dans ce collectif budgétaire, c'est quenous commençons à ressentir les effets budgétaires desdispositifs de stabilité mis en place dans la zone euro.

D'abord, le rapport du Gouvernement sur les orienta-tions des finances publiques nous a montré la semainedernière que notre dette publique de 2012 – 89,4 pointsde PIB – incluait d'ores et déjà pour 2,4 points de PIB lesgaranties apportées aux dispositifs de stabilité. Ensuite,le dividende que la Banque de France verse à l'État pour-rait être réduit, puisqu'elle rembourse désormais à laGrèce les revenus que lui procurent les titres grecsqu'elle détient. En outre, il se pourrait qu'Eurostat ana-lyse ces remboursements comme des dépenses, quiviendraient peser sur notre déficit public. Enfin, la baissedes taux d'intérêt de nos prêts bilatéraux à la Grèceréduit de 300 millions d'euros nos recettes non fiscales.

Nous reviendrons sur ces sujets lors de la discussion del'article 17.

Au total et en résumé, n'en doutons pas, mes chers col-lègues, ce collectif budgétaire atteint son premier objec-tif : il permet de tenir le cap budgétaire et conforte notrecrédibilité en Europe.

Il faut maintenant examiner le second objectif de ce pro-jet de loi de finances rectificative. Répond-il aux autresattentes exprimées par les Français ? Permet-il, pourreprendre la thématique de la campagne électorale, « leredressement dans la justice » ? La réponse est oui.

Pour les membres de la majorité sénatoriale que noussommes, il y a une vraie satisfaction à voir figurer dansun texte transmis par l'Assemblée nationale, aux quatrepremiers articles, un ensemble de mesures que nousavions votées en vain ces derniers mois, sur l'initiativedes différents groupes, socialiste, CRC, RDSE et écolo-giste.

Je pense à la suppression du régime d'exonération desheures supplémentaires, dans son volet tant fiscal quesocial, au retour – partiel, certes – sur les allégements dedroits de mutation issus de la loi du 21 août 2007 enfaveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, diteloi « TEPA », au rétablissement de l'ancien barème del'impôt de solidarité sur la fortune, à la suppression de laTVA sociale.

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Le message est clair : une page est tournée. Désormais,l'action publique encouragera l'emploi plutôt quel'aubaine, le travail plutôt que la rente, l'innovationplutôt que la baisse des salaires.

La fiscalité jouera un rôle important dans la remise enordre de nos priorités et le Gouvernement nous annoncepour l'automne deux chantiers essentiels : d'une part,l'amélioration de la progressivité de la fiscalité desrevenus, qu'il s'agisse de ceux du travail ou de ceux dupatrimoine ; d'autre part, la refonte de l'assiette de l'im-pôt sur les sociétés. Je salue sa décision d'engager sansattendre ces réformes, là où d'autres auraient pu s'abri-ter derrière l'ampleur de la « marche budgétaire » àfranchir pour les repousser à plus tard.

D'ailleurs, ce projet de loi de finances rectificative envoiedes premiers signaux. Avec la taxe sur les dividendes,nous aurons désormais un impôt sur les sociétés dif-férencié selon que les bénéfices sont réinvestis plutôtque distribués. Les possibilités de se livrer à des mon-tages optimisants pour réduire son impôt sur les sociétéssont réduites. Le secteur financier, en particulier ban-caire, est mis à contribution en raison de sa situationspécifique dans l'économie, puisqu'il est à la fois essen-tiel pour l'alimentation des entreprises en crédit et à lasource des excès qui ont provoqué la crise dont nous nesommes toujours pas sortis. En conséquence, ce secteurest taxé par le canal de la taxe sur les transactions finan-cières, qui est doublée, et par celui de la taxe de risquesystémique, dont l'assiette reflète les actifs pondérés parles risques.

Du côté des dépenses, il faut saluer la détermination duGouvernement à mettre en œuvre ses engagementsmalgré les difficultés budgétaires et à toujours gager lesdépenses supplémentaires par des annulations ou desredéploiements, et ce quel que soit leur montant, mêmelimité.

C'est ainsi que le coût des créations de postes dans l'en-seignement scolaire – 90 millions d'euros – est gagé àdue concurrence par des annulations. La hausse du SMIC– 100 millions d'euros – ou la suppression du droitacquitté par les bénéficiaires de l'aide médicale d'Étatseront financées par des redéploiements.

Le second objectif de ce collectif budgétaire – répondreaux attentes des Français – est donc aussi atteint.

Mes chers collègues, il est un domaine des financespubliques qui n'a pas été évoqué jusqu'à présent et dontla commission des finances a souhaité enrichir le texteadopté par l'Assemblée nationale, il s'agit des financeslocales. Cela ne surprendra personne au Sénat.

Je vous proposerai plusieurs amendements visant àrésoudre des difficultés concrètes auxquelles sont con-frontées les collectivités territoriales, en particulier lesintercommunalités qui doivent gérer en même temps lesconséquences de la suppression de la taxe profession-nelle et l'achèvement de la carte de l'intercommunalité.

Je vous soumettrai surtout un amendement tendant àrendre opérationnel le processus de révision des valeurslocatives professionnelles engagé en 2010, qui estaujourd'hui interrompu, car des modifications législa-tives sont nécessaires pour traduire les enseignementsde la phase d'expérimentation.

Mes chers collègues, je n'ai pas besoin de vous expliquerl'enjeu de ce dispositif, vous le connaissez tous : si lesvaleurs locatives professionnelles ne correspondent pasmieux à la réalité des capacités contributives, nousserons mis en grande difficulté non seulement pourredonner de l'autonomie fiscale aux collectivités, en par-ticulier sur les taux, mais aussi pour permettre la montéeen puissance des mécanismes de péréquation justes etincontestés. Or, le processus enclenché en 2010 est enpanne. Les acteurs concernés avaient joué le jeu, maisaujourd'hui, faute de perspective, ils sont en train de sedémobiliser. Il faut donc leur envoyer un signal et c'est ceà quoi nous nous attelons avec cet amendement.

J'ai le sentiment que, si nous ne relançons pas dès cet étéle processus de révision de valeurs locatives profession-nelles, nous courrons un risque très important d'en-sablement. Pierre Jarlier, co-rapporteur de la missiond'information sur la révision des valeurs locatives profes-sionnelles et commerciales, partage ce point de vue, toutcomme la commission des finances, dans sa quasi-una-nimité, qui a évoqué ce sujet hier.

Mes chers collègues, j'en viens à ma conclusion. Ce pro-jet de loi de finances rectificative pour 2012 est le pre-mier texte budgétaire qui suit l'élection présidentielle. Ilsemble intéressant de comparer la démarche que nousmenons aujourd'hui à celle qui prévalait voilà dix anscomme à celle qui a été engagée il y a cinq ans. Le projetde loi de finances rectificative pour 2002 qui nous avaitété présenté après l'élection présidentielle de 2002 nousappelait à réduire les impôts, en particulier l'impôt leplus juste, l'impôt progressif, l'impôt sur le revenu.Francis Mer était alors ministre de l'économie, desfinances et de l'industrie. On nous promettait un choc decroissance : en libérant les initiatives et les énergies desinvestisseurs par une baisse d'impôt sur le revenu, onallait créer de la croissance. Or nous avons bien vu que lerésultat n'était pas à la hauteur des annonces.

Le même constat peut être dressé concernant le projetde loi de finances rectificative pour 2007 qui nous a étésoumis voilà cinq ans, avec le fameux paquet fiscal.

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Certains nous l'ont présenté comme un cocktail gagnant,qui allait générer de la croissance, créer de l'initiative etpermettre de redresser les finances publiques.

Vous venez de le rappeler, monsieur le ministre, enmatière d'endettement, la situation de la France estaujourd'hui catastrophique : le déficit budgétaire estconsidérable et les objectifs annoncés n'ont en rien étéatteints. Il est donc important qu'une page soit aujour-d'hui tournée, qu'une nouvelle politique soit mise enœuvre, c'est celle que vous venez de nous présenter.

Nous sommes nombreux à partager cette volonté d'unredressement dans la justice. Je pense très sincèrementque ce projet de loi de finances rectificative pour 2012contribuera à cette action. C'est la raison pour laquellenous apporterons notre vif soutien au Gouvernement.

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madame la présidente, monsieur le ministre, meschers collègues, la commission des affairessociales est saisie pour avis de ce projet de loi

de finances rectificative pour 2012 qui, dans le domainesocial comme dans le champ du budget de l'État, répondà deux objectifs. Il s'agit, d'une part, d'enrayer la détéri-oration des comptes publics afin de respecter les objec-tifs de réduction des déficits et de retour à l'équilibre et,d'autre part, de mettre en œuvre les orientations et pri-orités du nouveau Gouvernement en imprimant les pre-mières inflexions en matière de répartition de l'effortcontributif, de moyens des politiques publiques et deprotection sociale.

Lors du débat sur les orientations des finances publiquesla semaine dernière, j'ai détaillé la situation et les per-spectives des finances sociales.

Je ne reviendrai pas dans le détail sur ce sujet, mais rap-pellerai simplement que, avec une croissance à l'arrêt,les recettes de la sécurité sociale ont fléchi. Sans mesurecorrectrice, le déficit du régime général pour 2012s'alourdirait de 2 milliards d'euros par rapport au mon-tant de la loi de financement de la sécurité sociale. Ilserait peu ou prou identique à celui de 2011, soit 20 mil-liards d'euros, un niveau qui aurait donc été atteint oudépassé pour la quatrième année consécutive.

J'ai également évoqué la semaine dernière les projec-tions à moyen terme réalisées par la Cour des comptesdans le cadre de son audit. Elles divergent très nette-ment de la trajectoire de retour à l'équilibre présentéepar l'ancien gouvernement. Au contraire, elles soulig-nent une tendance au maintien durable des déficits à unniveau très élevé. Il est donc nécessaire d'infléchir cettetendance rapidement. C'est ce que propose ce collectifbudgétaire, qui ne se résume pas, toutefois, à dégagerdes recettes supplémentaires. En effet, il traduit aussi denouvelles orientations pour notre système de protectionsociale, avec l'objectif d'une plus grande équité, tantdans son financement que dans les garanties apportéesà nos concitoyens.

J'évoquerai, tout d'abord, l'article 1er , qui revient sur lemécanisme de la TVA dite « sociale », voté il y a quatremois.

La commission des affairessociales s'était opposée àcette mesure pour desraisons de méthode commepour des raisons de fond.Sur le plan de la méthode,nous l'avions jugée pour lemoins improvisée quelquessemaines avant l'électionprésidentielle, alors que legouvernement en avaitclairement écarté leprincipe dès le début de lalégislature. Était-ilraisonnable de vouloir traiter cette question en dehorsd'une réfle-xion plus globale sur le financement de notreprotection sociale ? Avait-on réellement et soigneuse-ment évalué toutes les incidences macro-économiquesd'un éventuel basculement vers la TVA ? De ce point devue, nous approuvons la méthode retenue à l'issue de lagrande conférence sociale, visant à saisir le Haut conseildu financement de la protection sociale en vue d'uneéventuelle réforme en 2013.

En ce qui concerne le fond, l'impact de la mesure pro-posée par le précédent gouvernement sur la compétiti-vité des entreprises françaises nous avait paru bienhypothétique. On ne constate aucun consensus deséconomistes sur le sujet et les rapports qui avaient étéremis au gouvernement en 2007 ne l'avaient visiblementpas convaincu.

La commission des affaires sociales considère égalementque ce transfert de cotisations patronales sur lesménages se traduirait inévitablement par une ponctionimmédiate sur le pouvoir d'achat, ponction non seule-ment malvenue en cette période de croissance à l'arrêt,mais surtout extrêmement injuste, puisqu'elle frapperaitproportionnellement davantage les ménages les plusmodestes, ceux qui consomment l'intégralité de leursrevenus.

En cohérence avec la position que nous avions affirméevoilà quatre mois, nous approuvons donc l'abrogation durelèvement programmé de la TVA, le maintien du mode actuel de calcul des cotisations d'allocations familiales en vigueur et la confirmation du relèvement de 2 points du

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention d’Yves DauDignY, rapporteur général de la commission affaires sociales,rapporteur pour avis, sénateur de l’aisne(séance du mardi 24 juillet 2012)

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prélèvement social sur les revenus du capital. Celui-ci setraduira par un surcroît annuel de ressources de 2,6 mil-liards d'euros.

S'agissant du régime des heures supplémentaires, lacommission des affaires sociales n'était directement con-cernée que par les exonérations de cotisations socialesmises en place par la loi TEPA. Les dispositions de l'arti-cle 2 du projet de loi rejoignent celles que le Sénat avaitadoptées dans le dernier projet de loi de financement dela sécurité sociale, sur notre proposition. Ces exonéra-tions représentent un coût élevé pour les financespubliques. Les évaluations menées, aussi bien par leConseil des prélèvements obligatoires que parl'Inspection des finances, dans le cadre de leurs travauxsur les niches sociales, ont abouti à des conclusions trèsréservées.

Ces instances ont relevé les deux principales limites dudispositif : son effet « ambigu » sur l'emploi, puisqu'ildécourage certaines embauches ; un effet d'aubaine,également, dans la mesure où les avantages fiscaux etsociaux auraient incité les entreprises à officialiser desheures supplémentaires jusqu'alors sous-déclarées,voire à déclarer comme rétribuant des heures supplé-mentaires des rémunérations jusque-là attribuées sousd'autres formes. Un rapport bipartisan de l'Assembléenationale, adopté en juin 2011, établissait le même cons-tat. Certes, le recours aux heures supplémentaires peutrépondre à une nécessité pour les entreprises, mais leursubventionnement à une telle hauteur est-il réellementjustifié ?

Le Gouvernement ne le pense pas, sauf pour les trèspetites entreprises, celles de moins de vingt salariés, quicontinueront de bénéficier de l'exonération de cotisa-tions patronales de 1,5 euro par heure. Je relève que lacompensation par l'État de ces exonérations sociales serasupprimée. L'opération sera donc neutre pour la sécuritésociale, le surcroît de recettes revenant à l'État. Il faudranéanmoins maintenir une compensation pour lesexonérations subsistant au profit des très petitesentreprises. Nous avons bien noté l'engagement duGouvernement de proposer un nouveau mécanisme decompensation dans les textes financiers pour 2013. Lacommission des affaires sociales se félicite également dece que l'article 2 prévoie l'apurement de la dette con-tractée par l'État à l'égard de la sécurité sociale au titrede la compensation des années 2010 et 2011. Elle vousproposera, par amendement, une rédaction plusexplicite sur ce point.

Le projet de loi prévoit également la réduction deplusieurs niches sociales, notamment sur les stock-options et attributions gratuites d'actions, ainsi que sur les avantages accessoires aux salaires entrant dans lechamp du forfait social.

Depuis plusieurs années, l'assiette dudit forfait évolue demanière particulièrement dynamique, beaucoup plusrapidement que la masse salariale. L'écart de prélève-ment entre les différentes formes de rémunérationsfavorise très certainement un effet de substitution audétriment des salaires, soumis aux cotisations patronalesde sécurité sociale. Ici encore, la Cour des comptes,comme l'Inspection des finances, a proposé de réduireces niches sociales.

S'agissant du forfait social, la Cour des comptes suggéraitde porter son taux à 19 %, soit à peu près l'équivalentdes cotisations patronales d'assurance maladie et d'allo-cations familiales, qui, à la différence des cotisationsd'assurance vieillesse ou d'assurance chômage, n'entraî-nent pas de contrepartie individuelle en termes de droitsà revenus supplémentaires.

Suivant un raisonnement du même type, l'article 27 duprojet de loi prévoit de retenir un taux de 20 %. Celui-cipermettrait une plus juste participation au financementde la sécurité sociale des éléments de rémunérationsoumis au forfait social, sans menacer l'attractivité deces dispositifs, qui continueront de bénéficier d'un tauxglobal de prélèvement très inférieur à celui qui est opérésur les salaires.

Je souligne que ces mesures reprennent pour partiecelles votées par le Sénat dans le dernier projet de loi definancement de la sécurité sociale. Dans la mêmelogique, la commission des affaires sociales vous pro-posera un amendement portant sur l'assujettissementdes indemnités de rupture les plus élevées, parfois qual-ifiées de « parachutes dorés », que le Sénat avait égale-ment adopté en novembre dernier.

Les dispositions du projet de loi auront un impactfinancier très sensible, y compris dès l'année 2012. Autotal, elles représentent, pour la sécurité sociale, environ1,5 milliard d'euros de recettes supplémentaires pour2012, et 5,5 milliards d'euros par an à compter de 2013.L'essentiel des ressources ira à la branche vieillesse, pourun montant d'environ 4,5 milliards d'euros par an, soitune contribution significative à la réduction de sondéficit. La branche famille bénéficiera d'un surcroît derecettes de 400 millions d'euros par an, qui couvrira lamajoration de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire.

Comme je l'ai indiqué lors du débat d'orientation sur lesfinances publiques, ces mesures permettront, si ellessont adoptées, d'amorcer un redressement des financessociales, en faisant porter l'effort sur des revenus troppeu sollicités jusqu'ici, qu'il s'agisse des revenus du capi-tal ou de ceux qui bénéficient de niches de plus en plusdifficiles à justifier dans le contexte financier actuel.

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Enfin, la commission des affaires sociales a approuvé l'ar-ticle 29 sur l'aide médicale d'État, l'AME.

En 2010, le Sénat avait rejeté l'instauration du droit detimbre à la charge des bénéficiaires de l'AME et la procé-dure d'agrément préalable pour les soins coûteux et nonurgents. Il avait adopté un amendement de suppressionde la commission des affaires sociales, présenté par lerapporteur pour avis de la mission « Santé », à l'époquenotre collègue Alain Milon.

Notre argument était précisément celui qu'invoque leGouvernement à l'appui de cet article 29, à savoir queces mesures conduisent à retarder des soins qui seront,en tout état de cause, réalisés, ce délai pouvant avoir desconséquences préjudiciables tant sur l'état de santé dupatient que sur le coût définitif des prises en charge. Ils'agit donc d'un véritable problème de santé publique.

Les mesures adoptées sur proposition du gouvernementprécédent témoignent d'une suspicion, qui nous paraîtinjustifiée, à l'encontre des bénéficiaires du dispositif,mais aussi des médecins qui prescrivent des soins lourds.Or un rapport de l'Assemblée nationale de juin 2011 arelativisé la croissance des dépenses d'AME et a large-ment démontré que celle-ci résultait de facteurs assezbien identifiés – nous y reviendrons certainement dansle débat –, notamment du mode de facturation à l'Étatpar les hôpitaux.

Telles sont, madame la présidente, monsieur le ministre,mes chers collègues, les observations de la commissiondes affaires sociales sur le projet de loi de finances recti-ficative pour 2012. Elle a émis un avis favorable sur cetexte, sous réserve de l'adoption des deux amendementsqu'elle vous présentera.

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madame la présidente, monsieur le ministre, meschers collègues, la commission de la culture, del'éducation et de la communication a décidé de

se saisir pour avis du projet de loi de finances rectifica-tive pour 2012, que l'Assemblée nationale vientd'adopter, car plusieurs dispositions concernent sonchamp de compétences.

Tout d'abord, la commission de la culture se réjouit vive-ment de la reconstitution, en faveur du spectacle vivant,de l'intégralité des crédits d'intervention prévus en loi definances initiale pour 2012.

C'est une excellente nouvelle pour ce secteur. Ainsi,23,5 millions d'euros seront rapidement débloqués,comme nous l'a confirmé Mme Aurélie Filippetti, min-istre de la culture et de la communication, à l'occasion deson audition devant notre commission, le mercredi18 juillet dernier.

Ces crédits apporteront une bouffée d'oxygène trèsattendue par de nombreux lieux et compagnies, dont lesmarges artistiques ont été rognées ces dernières années,les installant, pour beaucoup d'entre eux, dans unegrande fragilité. Cela a encore été confirmé récemmentpar les professionnels que la délégation de notre com-mission, qui s'est rendue en Avignon, a rencontrés. Parailleurs, la commission de la culture a donné un avisfavorable à l'adoption de l'ensemble des articles dontelle s'est saisie. Il s'agit de mesures d'urgence bien-venues, dans l'attente de la construction à long terme denouvelles politiques en faveur de l'éducation et de la cul-ture.

Nous nous réjouissons tout particulièrement de l'article23 du projet de loi, qui rehausse le plafond des autorisa-tions d'emploi de la mission « Enseignement scolaire »,conformément aux engagements du Président de laRépublique. Les moyens humains dévolus à ladite mis-sion seront ainsi renforcés, avec 1 524 équivalents tempsplein, ou ETP, annuels travaillés, dont 1 000 professeursdes écoles, sans parler des personnels non enseignants.Ainsi, 100 conseillers principaux d'éducation, 1 500 aux-iliaires de vie scolaire individualisés, qui accompagnentles enfants en situation de handicap, 2 000 assistants d'é-ducation et 500 agents de prévention et de sécurité sco-laire seront recrutés.

Tous ces personnels sontindispensables à la réussitede notre jeunesse.L'enseignement agricole,particulièrement touché parles suppressions de postes,n'a pas été oublié. Il s'agit làd'un message de confianceet d'espoir adressé auxéquipes enseignantes, simalmenées ces dernièresannées. Ces recrutementspermettront aussi des amé-nagements de service pourles enseignants stagiaires, en attendant la si nécessaireréforme de la formation des enseignants.

Je me félicite aujourd'hui de ces corrections, quitémoignent de la volonté du Gouvernement de concilierla responsabilité budgétaire et l'ambition éducativeretrouvée.

Après plusieurs années de fragilisation du primaire, enparticulier de l'école maternelle, l'accent mis sur ce seg-ment essentiel du système éducatif est particulièrementbienvenu. De même, je salue les mesures destinées àmodifier aussi rapidement que possible le déroulementde l'année de stage des futurs enseignants. Ainsi, ils severront octroyer des décharges de service afin de leurpermettre de poursuivre leur formation au métier d'en-seignant.

Ce projet de loi de finances rectificative répond auxbesoins les plus criants, de sorte que la rentrée scolairede 2012, préparée par l'ancien gouvernement, se passele moins mal possible, surtout là où il y a le plus de souf-frances et de difficultés. De nouveaux enseignants serontdevant les élèves à la rentrée, au grand soulagement desparents. Ainsi, nous éviterons que certaines classes àfaibles effectifs soient fermées en zone rurale et nouspermettrons de nouveau à des enfants de trois ans detrouver le chemin de l'école maternelle, notammentdans les zones dites « sensibles ».

Nous commençons à réparer les dégâts, que nous avonstous identifiés et subis sur nos territoires, qu'ils soientruraux ou urbains.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de Françoise cartron, rapporteure pour avis de la commission de la culture,sénatrice de la gironde(séance du mardi 24 juillet 2012)

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En commission, certains de nos collègues se sontexprimés sur la suppression de la défiscalisation desheures supplémentaires prévue par l'article 2 du projetde loi. Nous ne nous sommes pas saisis de cet article,parce qu'il appelle une réflexion globale.

Néanmoins, sur ce point, soyons clairs : d'une part, lesheures supplémentaires des enseignants ne s'appliquentni au primaire ni à la maternelle, secteurs de l'éducationque le ministre a déclaré prioritaires, à notre grande sat-isfaction ; d'autre part, cette mesure, utilisée abondam-ment par le précédent gouvernement, a sans douteempêché la création de postes de titulaires, dans unepériode où l'emploi est en forte crise. Rendez-vouscompte : il s'agissait d'un budget de 1,3 milliard d'euros,soit l'équivalent de la totalité des crédits consacrés auxremplacements dans toutes nos écoles, ou de la totalitédu budget alloué à l'enseignement agricole.

Cela méritait donc rectification.

L'article 24 du projet de loi, quant à lui, vise à ramener de7 % à 5,5 % le taux de TVA applicable aux filières les plusfragiles de la culture et dont l'accès est le plus difficilepour certains publics.

Il s'agit, en premier lieu, des livres, imprimés commenumériques, pour un coût fiscal annuel évalué à 50 mil-lions d'euros, et, en second lieu, du secteur du spectaclevivant, nos collègues députés lui ayant étendu cette dis-position en adoptant un amendement du groupe socia-liste. Là aussi, nous ne pouvons que soutenir ces mesurespuisque le Sénat s'était farouchement opposé à l'adop-tion de l'article 13 de la loi du 28 décembre 2011 definances rectificative pour 2011, qui avait procédé à lahausse du taux de TVA.

Par ailleurs, l'article 30 du projet de loi tend à supprimerla prise en charge des frais de scolarité des enfantsfrançais scolarisés dans un établissement d'enseigne-ment français à l'étranger, créée en 2007. Je vous rap-pelle que nous avons dénoncé, chaque année, une tellemesure au coût exponentiel, qui présente, en outre,d'importants inconvénients.

Si cette mesure de gratuité pouvait apparaître commeégalitaire, elle a induit des effets pervers, créant des iné-galités entre élèves français et étrangers ou entre élèvesfrançais et ressortissants de l'Union européenne. Deplus, elle a abouti à tendre fortement la capacité d'ac-cueil des élèves étrangers résidents et de pays tiers.Enfin, elle a ouvert la voie à un désengagement potentieldes entreprises prenant en charge les frais de scolaritédes enfants de leurs cadres expatriés.

Soulignons que la nouvelle mesure ne doit pas pénaliserles familles les moins aisées, qui resteront éligibles auxbourses scolaires, attribuées sous conditions deressources. Il y a donc là une justice.

J'évoquerai, pour finir, l'article 30 bis , qui vise à reporterde quelques mois la date effective du passage des uni-versités d'Antilles-Guyane et de la Réunion aux respons-abilités et compétences élargies, en application de la loidu 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilitésdes universités. Il s'agit de faire coïncider le transfert descrédits de masse salariale avec l'année budgétaire etcivile. La commission de la culture soutient cette mesurede sécurisation de la rémunération des personnels desuniversités concernées.

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes cherscollègues, je vous confirme donc que la commission de laculture, de l'éducation et de la communication a donnéun avis favorable à l'adoption de l'ensemble de ces arti-cles. Je le répète, ces mesures d'urgence montrent que leGouvernement a choisi de faire de l'éducation et de laculture l'une de ses priorités, ce que nous attendionsdepuis fort longtemps Aussi, nous le soutenons danscette voie.

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madame la présidente, monsieur le ministre, meschers collègues, nous assistons à un débatquelque peu surprenant. Voilà à peine plus de

deux mois que le Président de la République a été élu etun mois que l'Assemblée nationale a été installée. Orceux qui ont été au pouvoir pendant dix ans font déjàpleuvoir les critiques.

J'ai envie de leur dire : Un peu de modestie !

Le président Marini avait pourtant bien commencé – lamodestie n'est pas forcément dans ses habitudes –, avecun discours qui, au début, ne manquait pas de finesse.Toutefois, j'ai trouvé que la fin de son intervention étaitnon seulement sentencieuse, mais aussi désobligeantepour l'une de nos collègues, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour laquelle nous avons beaucoup d'estime.

Par ailleurs, vous pourriez garder vos leçons, au moinspendant un temps ! C'est la moindre des choses quandon a gouverné pendant dix ans !

À cet égard, madame des Esgaulx, si nous sommes trèscontents que le ministre Vidalies puisse être présentparmi nous en cet instant, je regrette comme vous que leministre du budget ait dû s'absenter. Sachez toutefoisque son départ n'a rien à voir avec votre intervention !Vous oubliez un peu facilement le bilan que vous laissez !C'est tout de même assez invraisemblable !

Quelle est la situation ? Le ministre du budget l'a tout àl'heure fort bien rappelée. Mes chers collègues de l'op-position sénatoriale, après dix ans de pouvoir, cinq ansde présidence de Nicolas Sarkozy, après un million dechômeurs supplémentaires, un déficit du commerceextérieur et des déficits budgétaires jamais atteints etdes mesures d'injustice fiscale, vous venez, deux moisaprès les élections, nous donner des leçons et nous direque nous faisons erreur. Un peu de patience ! Vous aurezle temps de porter jugement !

Soyez assurés que nous essayons de travailler calme-ment, en établissant des perspectives. Nous ne prenonspas de décisions à la hâte.

De votre côté, vous semblez avoir découvert la compéti-tivité trois mois avant l'élection présidentielle.

Sur la TVA, vous avez étéjusqu'à prendre unemesure applicable en octo-bre prochain alors que vousétiez au pouvoir depuis dixans et que vous avez débat-tu pendant cinq ans de l'op-portunité d'une tellemesure ! Comment osez-vous maintenant venir nousdire qu'il ne faut pas sup-primer la TVA sociale ? Ehbien, nous, nous allons lasupprimer, car nous sommes favorables au pouvoird'achat et, contrairement à vous, nous ne voulons pasque tous les Français soient taxés !

Madame Des Esgaulx, contrairement à ce que vous avezaffirmé, il faut bien aujourd'hui adopter une loi definances rectificative, parce que vous nous avez laisséune facture. Nous devons trouver un peu plus de septmilliards d'euros pour respecter les objectifs budgétairesqui avaient été fixés, soit un déficit public inférieur à4,5 % du PIB. Avec vous, c'est toujours aux autres qu'in-combe la faute ! En tout cas, telles n'étaient pas les prévi-sions.

Nous verrons ! Vous aurez le temps de critiquer ! Pour lemoment, accordez-nous ne serait-ce qu'un peu decrédit ! Certes, vous devez bientôt désigner vosreprésentants et, nous le savons bien, celui qui apparaî-tra comme le meilleur opposant aura sûrement un peuplus de chances que les autres. Pourtant, je ne vois pasde candidat ici ! En tout cas, je ne crois pas, madameDes Esgaulx, que vous soyez candidate !

Je ne sais si c'est un bien ou un mal pour l'UMP ; c'est unautre sujet ! Toujours est-il que votre manière de vouscomporter, après deux mois, en fait après un mois devéritable exercice du pouvoir, n'est tout simplement pascorrecte ! Prenez les choses calmement ! Un peu demodestie ! Votre bilan, après dix ans de pouvoir, cinq ansde présidence Chirac et cinq ans de présidence Sarkozy,devrait vous y inciter ! Alors même que, comme Jean-Pierre Chevènement l'a rappelé tout à l'heure, lesfinances étaient à l'équilibre en 2001–2002, vous nouslaissez aujourd'hui une situation catastrophique et vousvenez donner des leçons !

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de François reBSamen, président du groupe socialiste, sénateur de lacôte-d’or(séance du mardi 24 juillet 2012)

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C'est quand même incroyable !

Pour notre part, et comme l'indique l'intitulé de ce pro-jet de loi de finances « rectificative », nous allons « recti-fier », c'est-à-dire corriger, modifier, amender : en unmot, « redresser ».

Ce redressement, nous voulons le porter. Il porterad'abord sur la justice en matière de charge fiscale, quidoit être justement répartie entre ceux qui, pendant cinqans, ont reçu beaucoup d'avantages de votre part et ceuxqui, dans le même temps, n'ont rien vu en termes depouvoir d'achat.

Telle est la justice fiscale que nous voulons réinstaurer.

Le redressement ne peut s'accomplir sans le retour àl'équilibre budgétaire, la réduction des déficits et lerecours à des recettes nouvelles. En effet, cela a été rap-pelé, nous devons trouver 7 milliards d'euros pourrespecter les engagements qui avaient été pris par legouvernement Fillon.

En la matière, nous ferons preuve de justice.

Ainsi, nous instaurerons, en 2012, une contributionexceptionnelle sur les ménages ayant un patrimoine deplus de 1,3 million d'euros.

Nous abaisserons à 100 000 euros l'abattement sur lesdonations et successions en ligne directe.

Nous doublerons le taux de la taxe sur les transactionsfinancières, en la faisant passer à 0,2 %, tout en gardantla même assiette pour permettre d'avoir un rendementéquivalant à ce qui était prévu.

Nous instaurerons une contribution exceptionnelle de4 % sur la valeur des stocks de produits pétroliers, con-tribution que mes collègues de la majorité sénatorialesouhaitaient d'ailleurs établir depuis longtemps.

Finalement, nous sommes très heureux parce que nousvoyons reprises l'essentiel des propositions en faveur dela justice que nous avions faites au mois de décembredernier, qui avaient effectivement été votées ici, et quin'avaient alors bien évidemment pas été mises enœuvre, car il y avait un peu d'amnésie de votre part.

Quand vous voulez jouer les pompiers pyromanes, nousvoulons le redressement et du pouvoir d'achat pour lesFrançais !

Du pouvoir d'achat, vous n'en avez pas du tout distribuépendant cinq ans ; d'ailleurs, la consommation est enbaisse. Au demeurant, la TVA que vous vouliez imposeraurait encore amputé le pouvoir d'achat : c'est un peu

plus de 11 milliards d'euros qui auraient été prélevés surl'ensemble des Français. Étant donné le temps qu'il vousa fallu pour la mettre en place, vous avez beau jeuaujourd'hui de nous reprocher sa suppression, vous quine l'avez même pas expérimentée !

Nous appelons à la sérénité en la matière.

Nous voulons renforcer le pouvoir d'achat, et nous avonspris des mesures en ce sens. Ainsi, je le rappelle, la reval-orisation de 25 % de l'allocation de rentrée scolaire, quiportera cette dernière à 356 euros pour un enfant de 6 à10 ans, contre 284 euros précédemment, et à 375 eurospour un enfant de 11 à 14 ans, contre 300 euros.L'augmentation qui en résulte – vous aimez calculer,nous aussi ! – est toujours supérieure à 70 euros. Voilàqui accroît le pouvoir d'achat des Français !

Le Gouvernement a aussi procédé à la revalorisation duSMIC, ce qui n'avait jamais été fait, par un coup depouce, certes léger, mais qui améliore concrètement lepouvoir d'achat des Français. Il a publié un décret visantà l'encadrement des loyers lors de la relocation ou durenouvellement du bail, ce qui concerne 40 % de la pop-ulation. Encore une mesure en faveur du pouvoird'achat !

Aujourd'hui, avec l'abrogation de la « TVA compétiti-vité » et le rétablissement du taux réduit de TVA dans lesecteur du livre, par exemple, nous avançons sur le ter-rain du pouvoir d'achat et de la justice fiscale et sociale.Ce choix de faire peser nos mesures sur les ménages lesplus aisés, nous le faisons au nom de la justice, parce quenous voulons et nous ferons en sorte que l'effort soitproportionnel à ce que gagne chacun. Le redressementse fera dans la justice, pour mettre fin à tous les effetsd'aubaine que vous avez créés. Je pense notamment à lagratuité instaurée en faveur des lycéens français scola-risés dans les établissements français à l'étranger : parune mesure électoraliste adoptée en 2007, vous aviezdécidé de faire prendre en charge par l'État, à hauteur dequelque 35 millions d'euros par an, les frais de scolarité,quels que soient les revenus des familles.

Nous, nous mettrons cette prise en charge sous condi-tion de ressources, parce que nous voulons que cettemesure soit juste !

Mes chers collègues, le redressement exige aussi l'exem-plarité au plus niveau de l'État. La décision, prise par lePrésident de la République et le Premier ministre,d'abaisser de 30 % leurs indemnités en est un signe…

En 2007, on a augmenté de 180 % les indemnités duPrésident de la République, aujourd'hui, on les baisse de30 %, la différence est là : nous donnons l'exemple à tousles niveaux !

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madame la présidente, monsieur le ministre, meschers collègues, à l'heure où nous entamonsl'examen de ce projet de loi de finances recti-

ficative, nous ne pouvons pas ne pas avoir présente à l'e-sprit la situation économique de l'Espagne, qui emprunteà des taux importants, ainsi que l'annonce de la dégra-dation des notes allemande et néerlandaise. Ces faits,qui dépassent nos frontières, doivent apporter une pro-fondeur supplémentaire à notre débat. J'entends par làque nous devons cesser de raisonner « hors-sol », car ledésendettement est une problématique non pas franco-française, mais internationale et plus spécifiquementeuropéenne.

Il serait illusoire de croire que nous sommes en mesured'enrayer seuls la crise de la dette. Au niveau européen,la France a pris des engagements. Ils exercent certes unecontrainte sur le pouvoir décisionnel national, mais ilsconfèrent aussi un rôle particulier à la France, qui se doitde respecter de façon exemplaire ses engagements.Comment oublier que le précédent président de laRépublique, M. Cahuzac y a fait allusion, était allé annon-cer lui-même qu'il ne respecterait pas les critères deMaastricht, considérant qu'il pouvait excéder les 3 % dedéficit pourtant admis par tous, ouvrant ainsi la porte àtoutes les dérives. Plus que jamais, l'objectif dedésendettement se conjugue avec les impératifs de dis-cipline, de coopération et de solidarité avec nos parte-naires, car la France ne peut pas se permettre d'agirseule. Elle est un pays de l'Union européenne, fière del'être et responsable avec les autres pays, et peut-êtremême plus que ses partenaires, du bien-être des peuplesde cet espace privilégié, car en paix depuis des décen-nies.

Dans ce contexte international et européen, malgré tousles sujets qui nous occupent, à juste titre d'ailleurs,reconnaissez, mes chers collègues, qu'il est un sujet quitient une position centrale, en tout cas à nos yeux : celuide l'emploi. Je n'évoquerai que ce point, faisant miennesles positions du président de notre groupe, FrançoisRebsamen, après les interventions du ministre chargé dubudget et de notre rapporteur général, François Marc.

Un chiffre récent a pu nous surprendre : malgré la stag-nation de l'activité, 18 300 postes, selon l'INSEE, ont étécréés dans le secteur marchand au premier trimestre de2012.

Pourtant, nous savons tousque cette bonne nouvelleen cache de bien moinsbonnes. Les marges desentreprises se sontréduites et elles risquentde chercher à les rétablirdans les mois qui viennenten ajustant leurs effectifs àla baisse, et ce d'autantque ce que l'on appelle des« plans sociaux », que l'ondevrait peut-être qualifierde « plans de réductiond'effectifs », ont manifestement été retardés du fait desdernières élections. L'affaire PSA n'est-elle pas embléma-tique de cette situation ?

Avec plus de 4,9 millions d'inscrits à Pôle emploi, soit unactif sur six, et après un an de montée ininterrompue duchômage, c'est pourtant d'abord sur l'emploi que le nou-veau gouvernement, celui que nous soutenons, serajugé.

Le Président de la République s'est engagé à renforcerles moyens du service public de l'emploi, à hauteur de1 500 à 2 000 postes en contrat à durée indéterminée –chiffres que vous nous préciserez, monsieur le ministre– : c'est indispensable pour désengorger une machineaujourd'hui asphyxiée, mais cela n'aura guère d'impactsur le niveau du chômage. En revanche, la suppressiondes exonérations sociales et fiscales sur les heures sup-plémentaires dans les entreprises de plus de vingtsalariés, mises en place par la loi TEPA, n'est pas du toutanecdotique.

Durant les Trente Glorieuses, on n'avait pas besoin desubventionner les heures supplémentaires : lesentreprises accordaient des heures lorsqu'elles enavaient besoin, parce que cela correspondait à la situa-tion de l'époque, et qu'il fallait rapidement ajuster laqualité et la quantité de travail à la demande de produc-tion. Mais dans la situation présente, alors que le chô-mage est massif, que les suppressions de postes se mul-tiplient et que les capacités de production sont excéden-taires au regard de la demande, la France était sansdoute le seul pays au monde à avoir institué un systèmede destruction d'emplois financé par des fonds publics.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de michèle anDre, sénatrice du puy-de-Dôme(séance du mardi 24 juillet 2012)

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Les socialistes n'ont cessé de le dénoncer depuis 2007 :le dispositif sur les heures supplémentaires, instauré parla loi TEPA, conduisait, pour les entreprises, à rendre lesembauches plus chères que le recours aux heures sup-plémentaires. Nous l'avons déjà dit, et cela sera sansdoute répété, ce dispositif freinait l'embauche en péri-ode de faible activité. En période de récession, il étaitune véritable machine à créer des chômeurs.

Pensons à ce qu'ont fait les entreprises allemandes dansle même temps : elles ont réduit le temps de travail pen-dant que passait l'orage, pour l'allonger une fois l'éclair-cie venue.

Certains pays ont supprimé les cotisations appliquées ausupplément de salaire offert par l'heure supplémentaire,au motif de l'égalité entre les droits sociaux représentéspar une heure normale de travail et une heure supplé-mentaire. Le précédent gouvernement, au contraire,avait créé une profonde inégalité entre ces deux typesd'heure. Les rares pays qui avaient fait de même pour latoute petite fraction de la rémunération procurée par lesheures supplémentaires – je pense notamment à l'Italie– ont supprimé ce dispositif, du fait de la période de chô-mage qu'ils rencontrent actuellement. De plus, cemécanisme a démontré son inefficacité totale non seule-ment en matière d'emplois – il freinait l'embauche etfavorisait le chômage – mais aussi en matière d'augmen-tation du pouvoir d'achat.

Dans la période de crise que nous traversons, ce sontd'abord les Français les plus modestes et, parmi eux, lesintérimaires et les travailleurs employés en CDD, qui ontété les premiers à faire les frais de ce dispositif. Le gainde pouvoir d'achat représenté par cette mesure étaittrès inégalement réparti : moins de 40 % de l'ensembledes salariés en ont bénéficié. De plus, les salariésn'avaient aucune prise sur le recours à cet outil : ils fai-saient des heures supplémentaires au gré de l'em-ployeur. Au total, le pouvoir d'achat par unité de con-sommation n'a augmenté que de 0,1 % par an enmoyenne entre 2007 et 2010. Il a même reculé en 2011et au premier trimestre 2012.

Au regard du coût considérable qu'il représentait – 4 mil-liards d'euros, je le rappelle –, ce système était intenable.Ce sont autant de moyens qui auraient pu être utiliséspour soutenir vraiment l'emploi et le pouvoir d'achat del'ensemble des Français modestes, qui en sont privés, legain de pouvoir d'achat obtenu par ceux qui ont unemploi étant compensé par la perte de pouvoir d'achatsubie par ceux qui se retrouvent au chômage. Il étaitdonc juste, monsieur le ministre, que le nouveau gou-vernement supprime ce dispositif.

Pour ce qui me concerne, je suis persuadée qu'il seracompris de tous les Français.

Je voudrais, à ce point de mon intervention, m'écarterquelque peu de mon propos. Mesdames, messieurs lessénateurs, qui a dit que les heures supplémentairesseraient supprimées ?

À entendre certains d'entre vous, je pense notamment àl'intervention de M. le président de la commission desfinances, mais aussi à celle de notre collègue FabienneKeller, on a l'impression qu'il n'y aurait plus d'heures sup-plémentaires.

Vous avez évoqué la situation de l'aide-soignante, dontl'emploi requiert qu'elle effectue des heures de sujétion,l'amenant à travailler un dimanche. Les heures supplé-mentaires existaient avant, et elles existeront après,évidemment ! La seule différence est que ces heuresseront imposables. Et alors ? Beaucoup de Français ontvoté pour le président Hollande en connaissance decause : ils savaient qu'ils auraient un effort à faire ! Ilsacceptaient ainsi d'y participer, soyons clairs !

Les heures supplémentaires seront donc toujours possi-bles. Ne faisons pas comme si elles étaient soudaine-ment supprimées. Voilà ! Quand on touche un salaire, onpeut payer des impôts ! C'est d'ailleurs une façon de par-ticiper à l'effort pour tous. Je considère que cela seracompris. Ces heures supplémentaires représententl'équivalent de 400 000 emplois à temps plein sur l'an-née. En les réduisant de moitié, on peut considérer quel'économie française pourrait créer quelque 200 000emplois.

En ce qui concerne les emplois publics, le précédent gou-vernement avait instauré, dès 2007, la règle du non-rem-placement d'un fonctionnaire d'État partant à la retraitesur deux. Les 155 000 postes ainsi supprimés depuis cinqans dans la fonction publique d'État ont pesé de façonnon négligeable sur le marché du travail, et notamment,nous le savons bien, sur les jeunes diplômés. Le nouveaugouvernement est revenu sur cette règle, et c'est bienainsi. L'État s'est engagé à subventionner des emploisaidés destinés à certaines catégories de population : lesjeunes, les seniors, les demandeurs d'emploi de longuedurée, parmi lesquels figurent, nous le constatons, denombreuses femmes. Ce système n'est certes pas lapanacée mais, dans le contexte dégradé que nous con-naissons, il pourrait être utile pour permettre à certainspublics en difficulté de mettre le pied à l'étrier et d'éviterdes situations d'exclusion difficilement réversibles.

Or le nombre de ces emplois reste encore inférieur, pourl'instant, à ce qu'il était en 2007, avant la crise. De plus,en raison – sans doute ! – des élections, les deux tiers deceux qui étaient budgétés sur l'ensemble de l'année –soit 240 000 sur 350 000 – ont déjà été consommés aupremier semestre. Nous remarquons qu'ils s'appli-quaient néanmoins sur de très courtes durées.

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Leurs titulaires sont ceux qui, grosso modo , viendrontgrossir les bataillons des chômeurs en juin et juillet.

Le nouveau ministre du travail a donc annoncé qu'ilreprendrait le dispositif. De nouveaux types de contratsaidés vont être mis en place. Ils sont destinés à aider lesassociations, ce qui évitera les effets d'aubaine. Ils serontégalement dirigés vers les publics fragiles que sont lesespaces urbains et les grands espaces ruraux sensibles.

Le contrat de génération verra le jour en 2013, mais nousaurons l'occasion d'en reparler.

Je dirai, pour conclure, que les difficultés économiqueset sociales sont là. Pour autant, il importe de veiller à laqualité des conditions de travail et au dialogue dans lesservices publics et les entreprises de notre pays. Nous nepouvons notamment pas oublier les effets désastreuxdes suicides commis dans certaines grandes entreprises.Faisons attention aux salariés de notre pays, car c'est del'énergie et de la confiance de celles et ceux qui travail-lent que dépendra aussi, me semble-t-il, le redressementde la France.

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madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, le présent projetde loi de finances rectificative me fournit l'occa-

sion de dresser le bilan des choix effectués par la droitependant dix ans et de rétablir la vérité sur la situation denotre pays. Cela ne vous étonnera pas, j'axerai partic-ulièrement mon intervention sur l'état des comptes soci-aux et m'appuierai sur les derniers travaux de la Cour descomptes et de la Commission des comptes de la sécuritésociale.

La situation générale de nos comptes sociaux estextrêmement dégradée. Après quatre années consécu-tives de déficits très élevés - je pense notamment aurecord de 28 milliards d'euros atteint en 2010 -, le déficitdu régime général et du Fonds de solidarité vieillesses'est élevé à 20,8 milliards d'euros pour l'année 2011.Toutes les branches sont dans le rouge. Le déficits'établit à 8,6 milliards d'euros pour la branche maladie,à 2,6 milliards d'euros pour la branche famille, à 200 mil-lions d'euros pour la branche accidents du travail et mal-adies professionnelles et à 2,6 milliards d'euros pour labranche vieillesse, somme à laquelle il faut ajouter les3,5 milliards d'euros de déficit du Fonds de solidaritévieillesse.

En élisant Président de la République François Hollande,la majorité des Français a choisi le changement.

Ainsi que l'a annoncé le Premier ministre dans sa décla-ration de politique générale, le redressement de notrepays est une impérieuse nécessité et il nous faut retrou-ver l'équilibre de nos comptes publics à l'horizon 2017.

Le présent projet de loi de finances rectificative constituedonc la première étape de la politique économique deredressement dans la justice et illustre cette volonté dechangement tant attendue par nos concitoyens etexprimée par le Président de la République. Ce collectifbudgétaire impacte la structuration des recettes et desdépenses.

Pour le régime général de la sécurité sociale, plusieursdispositions se traduiront par des ressources supplémen-taires supérieures à 5 milliards d'euros en année pleine àcompter de 2013 et à 1,5 milliard d'euros dès cetteannée.

La première mesure que jesouhaite évoquer à montour tant elle est impor-tante concerne l'abrogationdu mécanisme de « TVAsociale ». Qu'elle soitdénommée par certainscollègues siégeant à droitede cet hémicycle « TVAcompétitivité » ou encore« TVA anti-délocalisation »,toujours est-il que la haussede 1,6 % du taux de TVAconstituait un transfert descotisations patronales à la branche famille sur lesménages.

Cette disposition aurait été préjudiciable au pouvoird'achat des Français. Je pense notamment à nos conci-toyens les plus fragiles, à ces ménages modestes peuévoqués sur vos travées, chers collègues de l'opposition,à ceux qui ont du mal à « joindre les deux bouts », quiconnaissent des fins de mois difficiles. Voilà ceux dontnous parlons ici. Mécaniquement, la consommationaurait diminué, avec le risque de contracter le peu decroissance qu'enregistre notre pays et d'accentuer lesinjustices. En outre, nous le savons tous et M. Dominatil'a évoqué, l'« effet prix » aurait été totalement marginalet n'aurait pas modifié la compétitivité de nos entrepri-ses.

Je veux rappeler en cet instant que, voilà quelques mois,la commission des affaires sociales, dont je suis membre,a reçu notre collègue Jean Arthuis, qui nous a expliqué,tout comme aujourd'hui, que, pour améliorer la com-pétitivité des entreprises françaises, l'augmentation de laTVA devrait être bien supérieure à 1,6 %. De notre pointde vue, c'est donc tout logiquement qu'il est proposéd'abroger cette hausse de TVA tout comme son corol-laire, à savoir la baisse des cotisations patronales au titredes allocations familiales. Parce que la recherche d'uneplus grande justice fiscale est au cœur des préoccupa-tions du Gouvernement, la hausse de 2 points desprélèvements sociaux sur les revenus du capital, qui apris effet le 1er janvier dernier pour les revenus du pa-trimoine et le 1er juillet pour les revenus dits « de place-ment », est conservée.

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intervention de christiane DemonteS, sénatrice du rhône(séance du mardi 24 juillet 2012)

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Un rendement de 2,6 milliards d'euros en est attendu enannée pleine et un montant représentant 0,3 point duprélèvement social sera affecté à la Caisse nationale d'al-locations familiales.

Ce supplément annuel de recettes s'élèvera à 400 mil-lions d'euros dès cette année 2012, soit un peu plus quele coût estimé de la majoration de l'allocation de rentréescolaire. Le reste, d'un montant évalué à 400 millionsd'euros en 2012 et à 2,2 milliards d'euros par an dès2013, ira à la Caisse nationale d'assurance vieillesse.

D'autres dispositions contenues dans les articles 25, 26et 27 du présent projet de loi visent à réduire les nichesfiscales. Je n'insisterai pas sur ce point, le rapporteurgénéral de la commission des affaires sociales, YvesDaudigny, l'ayant fort bien développé.

Au total, les recettes nouvelles s'élèveront à 5,5 milliardsd'euros par an à compter de 2013, dont 4,5 milliardsd'euros pour la branche vieillesse, et à 1,5 milliard d'eu-ros dès cette année. Pour le régime général, elles s'a-joutent au relèvement progressif des cotisations d'assu-rance vieillesse.

Permettez-moi de conclure en mettant particulièrementl'accent sur la branche vieillesse. Étant la plus déficitaire,c'est vers elle que seront dirigées en priorité ces recettesnouvelles, lesquelles devraient permettre, à terme, decouvrir près de la moitié des besoins de financement dela branche. Néanmoins, mes chers collègues, le déficitstructurel ne sera pas résorbé. Souvenons-nous de laréforme des retraites de 2010, une réforme que nousavions dénoncée à l'époque, en raison de son caractèrebrutal et parce qu'elle avait été imposée sans concerta-tion. Quel changement depuis la prise de fonctions denotre gouvernement !

Cette réforme était aussi injuste : 90 % des mesuresétaient financées par les revenus du travail ; la situationde certains salariés en a été dégradée. Je pense partic-ulièrement aux femmes, singulièrement aux mères defamille, dont la vie professionnelle a été segmentée.Cette réforme était également injuste pour tous ceux quiont commencé à travailler tôt, pénalisés par l'augmenta-tion de la durée de cotisation, injuste pour tous ceux quiconnaissent des conditions de travail éprouvantes, voirepathogènes, la droite confondant sciemment pénibilitéet invalidité.

Injuste, cette réforme est enfin d'une inefficacité désor-mais avérée : elle avait pour objet le retour à l'équilibreen 2018, or nous en sommes bien loin !

Pis, le déficit du FSV augmente du fait de la hausse duchômage. Sans changement, à l'échéance 2018, labranche vieillesse enregistrera toujours près de 10 mil-

liards d'euros de déficit annuel, soit près de 90 milliardsd'euros cumulés à l'horizon 2020.

Quel bilan, et quelle nécessité de réformer structurelle-ment et justement !

En attendant les prochaines réformes structurelles, letexte que nous examinons aujourd'hui constitue unepremière étape dans l'entreprise de redressement denotre pays. Il marque la volonté du Gouvernement defaire face sans dogmatisme aux urgences, notamment entermes de redressement des comptes publics et sociaux.En visant notamment les revenus jusqu'alors peu ou passollicités, il revient à l'équité.

Ce texte marque aussi la volonté de renouer avec lesprincipes de justice et de solidarité sans lesquels touteentreprise collective est vouée à l'échec.

Ce projet de loi de finances rectificative réoriente enfinnotre système fiscal vers plus de justice et plus d'effica-cité, et ce au service de l'intérêt général.

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madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, ce projet de loide finances rectificative, même s'il contient

surtout des mesures d'urgence, envoie aux outre-mer unpremier signal, que l'on peut qualifier de positif. Il est enrupture avec le traitement budgétaire qui avait étéjusqu'ici infligé aux territoires ultramarins par le précé-dent gouvernement, à savoir une diminution constantede l'effort total consenti par l'État en leur direction.

En effet, durant la période 2007-2012, les outre-mer ontété particulièrement pénalisés par la politique gouverne-mentale de réduction des niches fiscales. Les nichesoutre-mer ont été régulièrement stigmatisées,attaquées, rabotées, voire supprimées, à tel point qu'en2012 ces dépenses ont encore diminué de 525 millionsd'euros. Pourtant, l'essentiel du financement dans lesoutre-mer est assuré par ce dispositif, en raison de lafrilosité connue des banques locales. En conséquence, leniveau d'activité dans les outre-mer n'a cessé de chuter– moins 39 % durant cette même période – et les taux dechômage explosent partout. Aussi est-il bien que, dansce projet de loi de finances rectificative, l'on n'ait pastouché à la défiscalisation outre-mer, comme on le faisaitjusqu'alors.

Le quatrième engagement de François Hollande pour lesoutre-mer, qui était « de maintenir le montant de ladéfiscalisation et d'instaurer des plafonds spécifiquespour les outre-mer afin de préserver l'attractivité de cedispositif essentiel pour le financement des économiesultramarines », est ainsi respecté.

De manière générale, les outre-mer approuvent l'ensem-ble des mesures qui figurent dans ce projet de loi definances rectificative. Ces dispositions doivent permettreau Gouvernement d'atteindre l'objectif fixé d'un déficitpublic de 4,5 points de PIB en 2012, tout en instaurantdavantage de justice sociale dans notre système fiscalsans casser la croissance. C'est un objectif louable, etnous devons tous participer à cet effort de redresse-ment.

Parmi les mesures de ce projet de loi de finances recti-ficative, je tiens néanmoins à accorder une mentiontoute particulière à certaines qui auront un impact trèsfort pour les outre-mer.

J'évoquerai, en premierlieu, la revalorisation del'allocation de rentrée sco-laire. Plus du quart de lapopulation ultramarinevivant en dessous du seuilde pauvreté, l'augmenta-tion de 25 % de l'allocationde rentrée scolaire serabienvenue et bien accueil-lie dans ces territoiresfortement marqués par lavie chère. Dans les mesuresdu changement pour la rentrée scolaire 2012, la situa-tion des outre-mer n'a pas non plus été occultée. C'estune excellente chose, étant donné le retard enregistrépar les académies ultramarines par rapport à celles demétropole. Les 1 000 nouveaux postes de professeur desécoles ont été répartis entre académies avec le souci del'intérêt général et les outre-mer ont pu ainsi bénéficierde cinquante postes.

Autre mesure qui impacte fortement les outre-mer, lafacilitation de l'accès aux soins des bénéficiaires de l'aidemédicale d'État par la suppression du droit d'entrée de30 euros.

Cette suppression est vivement critiquée par l'opposi-tion, mais, avec un taux d'immigration irrégulière de plus20 % dans mon département, la Guyane, je suis bienplacé pour témoigner que ces 30 euros n'ont fait qu'en-traîner un renoncement à l'accès aux soins, avec les con-séquences bien connues que l'on sait : aggravation despathologies et multiplication des risques de contagion oude contamination pour la population entière.

Le Gouvernement a donc raison de supprimer ce droitd'entrée et j'en profite pour rappeler à mes collègues del'opposition qui voudraient son maintien que la Francene s'arrête pas à l'Hexagone et qu'il faut de temps entemps penser à ces outre-mer, Mayotte et la Guyanenotamment, où le taux d'immigration est très élevé. Demême, il nous faudra songer à réduire significativementle montant des taxes que doivent payer les étrangers lorsde la délivrance ou du renouvellement d'un titre deséjour, montant qui a été augmenté de façon exorbitantepar l'ancien gouvernement.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de georges patient, sénateur de la guyane(séance du mardi 24 juillet 2012)

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Page 64: Bulletin Spécial Finances publiques

Je salue également la suppression de la « TVA sociale »,mort-née dans l'Hexagone, mais que les outre-mer onteu à connaître.

La TVA sociale a été instaurée par la loi Perben de 1994dans les départements de la Réunion, de la Guadeloupeet de la Martinique. Le taux de TVA y avait été relevé de7,5 % à 9,5 % et des exonérations de cotisations avaientété mises en place dans divers secteurs de l'économie.

Les effets ont surtout été négatifs. On a ainsi constatéune diminution du pouvoir d'achat, car la baisse des prixn'a pas compensé la hausse de la TVA, une relance del'inflation et, surtout, un effet d'aubaine pour certainesentreprises qui ont profité de la baisse des cotisationspour augmenter leurs profits et non pour baisser leursprix hors taxe, en particulier dans les secteurs où la con-currence économique est la moins forte.

Monsieur le ministre délégué, nous comprenons fortbien que certains sujets d'importance pour les outre-merportés à la connaissance du Gouvernement n'aient puêtre traités dans ce collectif budgétaire. Je veux parlerdes finances des collectivités locales, de la lutte contre lavie chère, de la relance de la production, de l'emploi, enparticulier celui des jeunes, de la santé, du logement, del'insécurité.

Il s'agit de questions sensibles, mais je sais qu'ellesseront traitées dans le projet de loi de finances pour2013, et j'insisterai pour qu'elles le soient. Je pense toutspécialement au réajustement des finances des collecti-vités locales, en particulier celles des communes deGuyane discriminées par le plafonnement de leur dota-tion superficiaire et du prélèvement opéré sur l'octroi demer. D'ailleurs, une mission devrait être diligentée sur cesujet trop souvent renvoyé aux calendes grecques.

Monsieur le ministre délégué, les outre-mer ont adhérémassivement au programme de François Hollande pourle changement. Aussi seront-ils très attentifs au respectdes engagements pris, notamment les 30 engagementspour les outre-mer.

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madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, nous connaissonstous la situation de notre pays : une dette qui a

explosé – 600 milliards d'euros de plus en cinq ans –, unchômage de masse – près de 10 % de la populationactive –, un déficit record de notre commerce extérieur– 70 milliards d'euros l'an dernier. Bien sûr, il y a eu lacrise, mais, à lire le rapport de la Cour des comptes, celle-ci n'a contribué que pour une part bien modeste à cettesituation. En effet, depuis cinq ans, c'est l'ampleur dudéficit structurel, c'est-à-dire le déficit que notre paysaurait connu en l'absence de crise, qui explique l'essen-tiel de la progression de la dette. Depuis 2007, ce déficitstructurel n'a jamais été inférieur à 3,3 % du PIB, ce quien dit long sur les efforts d'économie réalisés par leprécédent gouvernement.

Il était donc temps d'engager le redressement de noscomptes publics.

C'est ce que fait le Gouvernement avec ce collectifbudgétaire, en prenant les mesures qui permettent deramener le déficit à 4,5 % du PIB, c'est-à-dire derespecter les engagements européens de la France.Madame Des Esgaulx, vous avez affirmé que ce collectifbudgétaire ne servait à rien. Reconnaissez qu'il sert aumoins à cela, respecter les engagements européens de laFrance ! Ce n'est pas rien ! Au début d'un quinquennat,c'est certainement une nouveauté. Ce collectif budgé-taire engage le redressement des comptes publics avec lajustice comme boussole, puisque ces mesures concer-nent principalement la rente ainsi que les plus gros pat-rimoines, en revenant, par exemple, sur la division pardeux de l'ISF que l'ancienne majorité avait entérinée. Il lefait également avec le souci de ne pas aggraver la con-joncture économique de notre pays, déjà très dégradée,tant il est vrai qu'aucune mesure de politiqueéconomique n'est bonne ou mauvaise dans l'absolu ;tout dépend de la situation conjoncturelle dans laquelleon se trouve.

Justice, soutien à la croissance, cohérence : tels sont lesobjectifs que les deux premiers articles de ce texte sym-bolisent et sur lesquels je m'attarderai quelques instants.

L'article 1er supprime la TVA dite « sociale » et rend ainsiaux ménages 11 milliards d'euros de pouvoir d'achat, en année pleine.

Cette suppression va dansle sens de la justice,puisque la TVA, en pesantsurtout sur les ménagesles plus modestes, est l'undes impôts les plusinjustes. C'est égalementune mesure d'efficacitééconomique, car, danscette période où c'estjustement la faiblesse dupouvoir d'achat de nosconcitoyens qui obère lacroissance, le transfert decharges d'un tel montant des entreprises vers lesménages était le plus sûr moyen de ralentir une activitédéjà atone. C'est d'ailleurs l'argument principal qu'invo-quaient nombre de dirigeants et de ministres de laprécédente majorité. Chacun se souviendra des proposde MM. Copé, Baroin, Estrosi, Bertrand, voire de MmeLagarde, mais sans doute étaient-ce là, pour reprendrel'expression du président de la commission des finances,de « vagues supputations d'économistes »…

L'article 2 revient, quant à lui, sur la défiscalisation etl'exonération de charges sociales des heures supplémen-taires mises en œuvre par la loi TEPA de 2007. Dans laconjoncture actuelle, ce dispositif était tout simplementinepte. Subventionner les heures supplémentaires peutêtre utile en période de plein-emploi ou de pénurie demain-d'œuvre, mais n'a aucun sens dans un contexte dechômage de masse. D'ailleurs, aucun autre pays ne l'afait. Et, pour reprendre l'exemple de l'Allemagne, devenusi cher à l'ancien Président, même si ce fut bien tardif, ilfaut souligner que ce pays encourageait financièrementla réduction du temps de travail et le Kurzarbeit , c'est-à-dire le chômage partiel permettant le maintien dessalariés dans l'entreprise, pendant que la France con-sacrait chaque année près de 5 milliards d'euros financéspar l'emprunt et la dette à une mesure empêchant lacréation d'emplois nouveaux ou, pis, détruisant desemplois existants.

Qu'on le veuille ou non, en période de sous-emploi,encourager les heures supplémentaires conduit à uneffet de substitution, donc à une réduction de l'em-bauche, de l'ordre de 30 000 emplois selon l'OFCE et de80 000 emplois selon l'INSEE.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de jean-pierre caFFet, sénateur de paris(séance du mardi 24 juillet 2012)

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 65

Page 66: Bulletin Spécial Finances publiques

Cela étant, j'entends les arguments sur le pouvoird'achat additionnel individuel procuré par les heuressupplémentaires. Force est de constater néanmoins queces gains enregistrés par ceux qui ont un emploi eteffectuent des heures supplémentaires sont annulés parles pertes de ceux qui se retrouvent au chômage ou n'ac-cèdent pas au marché du travail en raison de ce mêmedispositif.

En outre, en rendant 11 milliards d'euros aux ménagespar la suppression de la TVA sociale, nous faisons plusque compenser les 3 milliards d'euros consacrés à ladéfiscalisation et aux exonérations des heures supplé-mentaires pour les ménages.

Enfin, je rappelle les mesures favorables au pouvoird'achat prises par ce gouvernement, comme le décretsur la modération de l'évolution des loyers, l'augmenta-tion de 25 % des allocations de rentrée scolaire ou laréduction de la TVA sur le livre.

Mes chers collègues, ces deux mesures, comme d'autresque contient ce collectif budgétaire, ont été adoptéespar la majorité sénatoriale au mois de février dernier.L'Assemblée nationale les avait supprimées. C'estpourquoi, l'alternance ayant été au rendez- vous, nousles revoterons non seulement avec conviction, mais aussiavec la certitude qu'elles entreront en vigueur et con-tribueront ainsi au redressement du pays dans la justiceet la cohérence de la politique menée.

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 66

Page 67: Bulletin Spécial Finances publiques

madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, en tant quecorapporteur spécial des crédits de la mission

« Enseignement scolaire », je souhaite aborder un sujetpeu évoqué aujourd'hui, pour me féliciter du choix faitpar le nouveau gouvernement de placer l'éducation aupremier rang de ses priorités. Ce choix a été porté par lePrésident de la République tout au long de la campagnepour l'élection présidentielle et a été rappelé avec forcepar le Premier ministre lors de sa déclaration de poli-tique générale, au début de ce mois.

Le Président de la République et le Gouvernement ontdonc fait de la jeunesse et de l'éducation la priorité dunouveau quinquennat. C'est cette feuille de route quicommence, aujourd'hui, à être mise en œuvre.

Premier acte budgétaire du nouveau gouvernement, ceprojet de loi de finances rectificative traduit un change-ment de cap. Il marque une première étape pourredonner au service public de l'éducation les moyenshumains nécessaires à son développement. À terme,60 000 postes seront créés dans l'éducation nationale,même si un plus grand nombre encore a été supprimépar la précédente majorité.

Il est vrai que la situation dont nous héritons est parti-culièrement grave, même catastrophique à bien deségards. Il y a urgence, en effet, pour que la rentrée deseptembre s'effectue dans nos établissements scolairesdans des conditions à peu près normales. Il faut doncparer au plus pressé. Nous avons, en tant que législa-teurs, le devoir de consacrer l'égalité des chances de tousles enfants, à l'école, au collège et au lycée. Ce faisant,nous posons les bases les plus sûres pour construire unmonde de justice et de fraternité.

Victor Hugo écrivait d'ailleurs dans Les Misérables :« L'égalité a un organe : l'instruction gratuite et obliga-toire. »

Je rappellerai à cet égard une triste évidence, qui ne peutêtre contestée par personne : l'effort de financementglobal de l'éducation a été diminué de 1 point de PIB aucours des dix dernières années, ce qui a entraîné unedégradation de la position de la France dans les perfor-mances comparées des systèmes scolaires, telle qu'elle aété mesurée dans différentes enquêtes. Tout cela est,hélas, une réalité !

Il faut ajouter à tout ce quiprécède, une réductiond'effectifs à contre-courantdes vrais besoins éducatifsqui a, une fois de plus, lour-dement pénalisé les zonesles plus défavorisées de nosterritoires. Dès la rentrée2012, il y aura donc 1 000professeurs des écoles sup-plémentaires devant lesélèves, 100 nouveaux con-seillers principaux d'éduca-tion présents dans les éta-blissements scolaires, 1 500 auxiliaires de vie scolaireindividualisés en plus pour aider les élèves handicapés,mais également 2 000 nouveaux assistants d'éducation,qui assureront l'accompagnement des élèves, 500 agentssupplémentaires chargés de la prévention et de la sécu-rité scolaire dans les établissements en difficulté. Quipeut nier que cela répond, aujourd'hui, à de vraisbesoins ?

Trop longtemps sacrifié, l'enseignement technique agri-cole bénéficiera, lui aussi, de 50 emplois supplémen-taires. En outre, la mise en place de décharges provi-soires de services au bénéfice des enseignants titulaires,nouvellement recrutés, demandera de mobiliser desmoyens accrus, à hauteur de 1 628 postes. LeGouvernement respectera ainsi sa promesse de rétablirla formation initiale des nouveaux enseignants.

Compte tenu de l'urgence budgétaire, les moyens nou-veaux accordés au service public de l'éducation serontfinancés par des annulations de crédits des autres mis-sions budgétaires d'un montant strictement équivalent,à hauteur de 89,5 millions d'euros. À cet égard, il estnécessaire de rappeler quelques ordres de grandeur :89,5 millions d'euros, c'est un peu plus d'un millième dudéficit budgétaire de l'État en 2012. La politique menéeest donc parfaitement soutenable sur le plan budgétaire.Il s'agit bien davantage d'une question de choix et de pri-orités, qui conduisent à une répartition des crédits plusjuste et plus équitable.

Cette même volonté de justice et de redistribution a con-duit le Gouvernement à revaloriser de 25 % l'allocationde rentrée scolaire, au profit de 3 millions de famillesparmi les plus modestes.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de claude Haut, sénateur du Vaucluse(séance du mardi 24 juillet 2012)

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 67

Page 68: Bulletin Spécial Finances publiques

Comme l'ensemble des priorités gouvernementales,cette mesure est intégralement financée, grâce à l'affec-tation pérenne d'une partie des ressources issues de lahausse de 2 points des prélèvements sociaux sur lesrevenus du patrimoine et de placement.

Enfin, je rappellerai l'effort réalisé en matière de forma-tion initiale des enseignants, laquelle avait été sup-primée pour des raisons purement comptables par leprécédent gouvernement. L'enseignement, cela s'ap-prend, comme tout autre métier !

Madame la présidente, monsieur le ministre délégué,mes chers collègues, l'heure est à la réforme et à la jus-tice. La place donnée à l'éducation nationale – ici, uneplace prioritaire - nous permet de mesurer comment ungouvernement prépare l'avenir de ses concitoyens.L'échec scolaire est encore massif. Trop d'élèves dans lesmilieux défavorisés restent au bord de la route, en raisondes inégalités sociales et territoriales qui n'ont cessé dese creuser ces dernières années. La tâche est immense,le chantier ne fait que s'ouvrir.

Le Premier ministre ayant parlé de pacte générationnel,je suis très satisfait d'appartenir à cette majorité quidécide, enfin, de réduire la fracture scolaire et les inégal-ités sociales. C'est pourquoi le présent projet de loi definances rectificative doit être soutenu et voté.

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 68

Page 69: Bulletin Spécial Finances publiques

madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, trois minutes detemps de parole, c'est juste assez pour adresser

un message. Je voudrais donc me réjouir que, dans unesituation décrite par tous les orateurs comme très diffi-cile, le Gouvernement, dans l'examen du budget de laculture, n'ait pas considéré la culture comme un simplesupplément d'âme, comme un domaine non prioritaireet sans importance.

Aussi, plutôt que de sabrer ce qu'avait fait la majoritéprécédente, le Gouvernement est simplement revenusur l'augmentation de la TVA sur le livre et le spectaclevivant, portée de 5,5 % à 7 %. Même si ce n'est qu'unemesure, parce qu'il ne s'agit que d'un projet de loi definances rectificative, voilà un signal à portée générale.

J'ai été ébahi, épaté, devant le manque d'humilité d'unde nos présidents de commission, lequel, au cours descinq dernières années, a usé sa salive pendant desdizaines d'heures pour nous vendre une politiqueéconomique et financière qui a abouti, aujourd'hui, à undéficit de la balance commerciale de 70 milliards d'euros– et c'est lui qui vient nous parler de compétitivité… – età 600 milliards d'euros de déficit supplémentaire !

À chaque fois, il nous a expliqué combien cette politiqueétait la bonne, et en nous donnant des leçons !

Malgré cet héritage,… Malgré cet héritage, disais-je, ilimportait de dire que la culture, loin de n'être qu'un sup-plément d'âme, est l'âme même de notre peuple, ce quifait que, justement, malgré une situation difficile pourtout le monde, on peut vivre des moments de commu-nion, d'émotion, de réflexion, de création, que l'on peuttenir le coup et envisager encore l'avenir avec opti-misme, que l'on peut être un citoyen qui continue àcroire en son pays, à croire en la réussite de projets con-crets, dans son quartier, dans sa cité.

Qu'un gouvernement, dans une telle situation, aitannoncé le rétablissement du taux ancien de TVA, c'estun vrai signe, et important.

En ce qui me concerne, en considérant ce collectifbudgétaire, j'ai cherché où il était possible, dans lesdomaines de la culture, de la communication, de l'audio-visuel, de rapporter de l'argent à l'État.

Je défendrai ainsi unamendement relatif auxcessions de fréquences deTNT délivrées gratuitementpar l'État, sur lesquelles cer-tains veulent faire de la val-orisation financière. Outreque son adoption feraitentrer de l'argent dans lescaisses, ce serait un signetrès clair adressé à tous ceuxqui seraient tentés despéculer à cette occasion.Tel est le message que jevoulais faire passer. La culture est facteur de développe-ment économique. On l'a vu dans des villes qui étaienten grande difficulté, car frappées par la crise. Je pense àBerlin, à Bilbao, à Lille, à Nantes, à Lens aujourd'hui.

Monsieur le ministre délégué, je sais que telle est votreintention et celle du Gouvernement, mais je forme levœu en cet instant que, dans l'élaboration du prochainbudget, la même attention soit portée à la culture, pourfaire que ce tout petit budget soit préservé au maximum.

C'est une question fondamentale pour l'ensemble denotre peuple !

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de David aSSouline, sénateur de paris(séance du mardi 24 juillet 2012)

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 69

Page 70: Bulletin Spécial Finances publiques

madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, je vais, moi aussi,vous parler de ces Français de l'étranger qui ont

désormais onze nouveaux députés ainsi qu'une ministredéléguée et que plusieurs dispositions de ce projet de loide finances rectificative concernent spécifiquement.

J'évoquerai, d'abord, la prise en charge des frais de sco-larité des lycéens français inscrits dans un établissementd'enseignement français à l'étranger, la PEC.

Le candidat François Hollande s'était engagé à la rem-placer par une aide à la scolarité sur critères sociaux pourtous les élèves. Élu, il a tenu son engagement de cam-pagne, puisque l'article 30 prévoit la suppression de laPEC : première étape respectée !

Les crédits sont maintenus dans le même programme. Àl'occasion de récents discours prononcés devantplusieurs communautés françaises à Rome et à Londres,le Président de la République a clairement manifesté lavolonté de réorienter les crédits vers les bourses surcritères sociaux : deuxième étape respectée !

De nombreuses familles n'avaient, légitimement, pasanticipé un changement des règles aussi rapide. L'équitéexige de prendre en compte leurs difficultés : l'attribu-tion des bourses selon le barème actuel est, bien sûr,maintenue et des mesures exceptionnelles d'accompag-nement sont prévues.

N'oublions pas que le vœu du Président de la Républiqueest d'ouvrir l'accès au réseau dans la justice et l'équité.Cela commande, monsieur le ministre délégué, dans unsecond temps, de reconsidérer les critères d'attributiondes bourses et d'en abonder le budget. Et, pour initierune logique vertueuse de modération des frais d'éco-lage, de voter une dotation budgétaire satisfaisante àl'AEFE, l'Agence pour l'enseignement français àl'étranger.

Je reviendrai, plus tard dans le débat, sur les plafondsd'emplois des enseignants titulaires détachés et l'oublidu réseau AEFE, qui font l'objet d'un amendement quej'ai déposé avec mes collègues Jean-Yves Leconte etRichard Yung.

Concernant, ensuite, l'as-sujettissement auxprélèvements sociaux desrevenus immobiliers desnon-résidents, en ma qua-lité d'élue de gauche, je mefélicite d'une telle mesure,destinée à imposer lesrevenus du capital commeceux du travail. Visantd'abord les investisseursétrangers et les exilés fis-caux, elle pèse cependantaussi sur plusieurs milliersde ménages français ayant conservé un bien immobilieren France, marqueur fondamental de la fidélité à leursracines.

Il ne s'agit pas de solliciter un régime particulier. Il resteque ces « Français à l'étranger » et « Français à partentière » aspirent à une égalité de traitement dans tousles domaines, par exemple, celui de la déductibilité descharges, dont sont exclus ceux qui sont établis horsd'Europe. De même, l'égalité prescrit de prévoir le mêmetaux d'imposition des plus-values pour tous : résidentsou non-résidents. C'est l'objet d'un amendement que j'aidéposé avec mes collègues Richard Yung et Jean-YvesLeconte.

Quant à la non-rétroactivité, c'est une mesure de bonsens destinée non seulement à assurer une sécuritéjuridique aux investisseurs, mais aussi à permettre auxpropriétaires résidant à l'étranger, qui, rappelons-leencore, ne sont pas des nantis désireux d'échapper àl'impôt, de budgétiser cette nouvelle charge.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de claudine lepage, sénatrice représenant les Français établis hors de France(séance du mardi 24 juillet 2012)

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 70

Page 71: Bulletin Spécial Finances publiques

madame la présidente, monsieur le ministredélégué, mes chers collègues, pendant les cinqdernières années, l'école a payé le prix fort de la

RGPP et a été véritablement utilisée comme variabled'ajustement budgétaire : suppressions massives depostes, suppression de la formation professionnelle desenseignants, disparition des réseaux d'aide pour lesélèves les plus en difficulté. Les remplacements desmaîtres ne sont plus assurés – s'ils le sont, ils le sont mal -, de même que l'accueil des enfants de moins de troisans, et le taux d'encadrement des écoles élémentaires estdevenu le plus mauvais de tous les pays de l'OCDE.

Je vous rappelle, mes chers collègues, que le projet de loide finances pour 2012 prévoyait la suppression de 14 000postes, dont 5 700 à l'école primaire…

À présent, la tâche est immense. Dans son programmeprésidentiel, François Hollande a été très clair : l'écolesera une priorité de l'action publique durant son quin-quennat. Il faut donc aujourd'hui, dans un premier tempset dans l'urgence, réparer. Il faut revenir, en particulier,sur les suppressions de postes prévues pour la prochainerentrée par le précédent gouvernement. C'est pourquoi,dans ce collectif budgétaire, l'article 23 traduit sur les pla-fonds d'emplois ministériels les premiers efforts réalisésdans ce secteur : 89,5 millions d'euros de crédits supplé-mentaires sont débloqués pour financer les recrutementsprévus. Cette enveloppe va permettre de financer lesmesures annoncées et de fournir des moyens en person-nels supplémentaires afin d'atténuer les plus graves ten-sions constatées. Ces moyens sont notamment ciblés surle premier degré, avec le recrutement de 1 000 postes deprofesseur des écoles.

En effet, priorité est donnée aux premiers apprentis-sages, en maternelle et en primaire. De plus, cet articleprévoit le financement des recrutements de 100 con-seillers principaux d'éducation, de 1 500 auxiliaires de viescolaire individualisés pour renforcer l'accompagnementdes élèves handicapés en intégration, de 2 000 assistantsd'éducation dans les éta-blissements afin d'améliorerl'accompagnement des élèves, notamment dans lessecteurs les plus sensibles, où cela est bien nécessaire,ainsi que de 500 agents chargés de la prévention et de lasécurité scolaire dans les établissements en difficulté.

Dans les premier et second degrés, des aménagementsde service vont bénéficier aux enseignants stagiaires lors

de leur première annéed'exercice afin qu'ils puis-sent compléter leur forma-tion initiale. Ces aménage-ments sont mis en place àtitre transitoire dans l'at-tente de la réforme de la for-mation initiale desenseignants ; ils prendrontla forme d'une décharge deservice de trois heures heb-domadaires. Quant à l'en-seignement technique agri-cole, il n'est pas oublié,puisque 50 emplois y sont créés, alors que le précédentgouvernement avait prévu d'en supprimer un grand nom-bre.

Certes, les suppressions massives – souvenez-vous : prèsde 80 000 postes au cours des cinq dernières années ! –ne pourront être résorbées que progressivement.Cependant, les crédits débloqués dans ce projet de loi definances rectificative permettent, dès à présent, deremédier aux difficultés les plus criantes et de donnerune impulsion nouvelle à notre système éducatif pour larentrée de 2012. D'ores et déjà, des orientations clairessont fixées pour l'avenir. Des critères de justice ont étéretenus pour la répartition de ces recrutements : lesaffectations sont faites en fonction du taux d'en-cadrement, des difficultés sociales et éducatives des ter-ritoires, et de leur caractère rural.

Avec les sénateurs de la nouvelle majorité présidentielle,je me félicite de ce message clair que nous délivre leGouvernement : l'école est enfin redevenue la priorité dela nation, et les engagements pris seront tenus. De grandschantiers vont s'ouvrir dès 2013, concernant, entreautres, la formation des enseignants, les rythmes sco-laires, la carte scolaire, pour ne citer que ceux-là. Cesquestions seront discutées et négociées avec lesenseignants, les parents d'élèves et les collectivitéschargées des moyens de fonctionnement, ainsi qu'avec lemonde associatif et périscolaire, qui forme un réseauéducatif structurant autour de notre école publique.

C'est aussi l'affirmation que, dorénavant, leGouvernement est aux côtés des enseignants, des élèves,de leurs familles, de toutes celles et de tous ceux qui sontattachés aux valeurs laïques de l'école de la République.

projet de lo i . . .loi de finances rectificative pour 2012

intervention de jacques-Bernard magner, sénateur du puy-de-Dôme(séance du mardi 24 juillet 2012)

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 71

Page 72: Bulletin Spécial Finances publiques

Le sénateur de Paris David ASSOULINE, au nom des sénateurs socialistes, a fait adopter par le Sénat unamendement instituant une taxe sur la revente des chaînes TNT, dans le cadre des débats pour le projet de loirectificatifpour 2012.

Cet amendement permettra, par là-même, de réguler toute opération spéculative autour des chaînes TNT. Ilavait déjà été présenté par le groupe socialiste et voté par le Sénat dans le cadre du Projet de Loi de Financesde cet automne.

Le texte avait été censuré par le Conseil constitutionnel suite aux modifications établies par l'Assembléenationale.En effet, deux idées commandaient à la mise en place de la TNT : diversifier l'offre audiovisuelle, et permet-tre l'émergence de “nouveaux entrants”.

Depuis, le succès de la TNT est avéré mais des contournements de l'esprit, qui avait présidé à sondéploiement, ont vu le jour.

Cet amendement, par une taxation à 5% de toute revente de chaine TNT, évitera que l'utilisation du domainepublic ne devienne purement spéculative au détriment de l'Etat. Par ailleurs, l'abattement prévu d'un milliond'euros permettra de préserver l'économie des entreprises audiovisuelles indépendantes ou locales.

Quant à l'Etat, il obtient là une nouvelle recette fiscale juste, et substantielle le cas échéant, ce qui n'est pasnégligeable en cette période.

Diffusion le 26 juillet 2011

communique De preSSe

Bulletin Spécial «Finances publiques» page 72

Dans le cadre du plFr 2012

la majorité sénatoriale veille à ce que la tnt ne devienne pas un instrument de spéculation

Page 73: Bulletin Spécial Finances publiques

Bulletin du groupe socialiste du Sénatavec la participation des collaborateurs du groupe

coordination : marie d’ouince

aïcha Krai

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