bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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MINISTERE DE LA CULTURE CONSEIL DU PATRIMOINE ETHNOLOGIQUE INTITULE DE LA RECHERCHE: BOUDDHISME ET MIGRATION "LA RECONSTITUTION D'UNE PAROISSE BOUDDHISTE LAO EN BANLIEUE PARISIENNE // RAPPORT FINAL CATHERINE CHQRON-BAIX JANVIER 1986

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Page 1: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

MINISTERE DE LA CULTURE

CONSEIL DU PATRIMOINE ETHNOLOGIQUE

INTITULE DE LA RECHERCHE:

BOUDDHISME ET MIGRATION

"LA RECONSTITUTION D'UNE PAROISSE

BOUDDHISTE LAO EN BANLIEUE PARISIENNE / /

RAPPORT FINAL

CATHERINE CHQRON-BAIX

JANVIER 1986

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1

Introduction

L'année 1975 marque/ pour les trois pays de l'ancienne

Indochine française/ le Vietnam/ le Cambodge/ le Laos/ l'installation

d'un nouvel ordre politique. Les bouleversements économiques/

sociaux et culturels qui l'accompagnent sont suivis du vaste exode

de plus de trois millions de personnes (1)/ dont 700 000 furent

prises en charge par l'UNHCR à leur entrée dans les principaux

pays d'asile temporaire/ la Thaïlande, la Malaisie, Hong Kong/

Singapour, l'Indonésie.

La France/ dont la présence dans cette région du monde s'est

prolongée pendant un siècle/ commence/ en mai 1975, à accorder

l'asile politique aux ressortissants de ces trois pays/ et devient

rapidement le troisième pays d'accueil/ après les Etats-Unis (2),

et la Chine (3) avec 80 400 personnes au 31 août 1981.

(1) chiffres UNHCR, cités par Georges CONDOMINAS et R. POTTIER/ dans Les réfugiés originaires de l'Asie du Sud Est. Arrière-olan historique et culturel. Les motivations de départ. Rapport au Président de la République. La Documentation Française. Collection des rapports officiels. Paris 1901. p. 48 (2) au 31 août 1981 : 555 000 réfugiés d'Asie du Sud Est (3) à la même date : 262 500.

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2

Cette vague migratoire/ composée pour 26,17% de réfugiés

de nationalité vietnamienne, 36,34% de nationalité cambodgienne,

36,85% de nationalité laotienne, (1) présente une grande diversité

ethnique, reflet du caractère de mosaïque du peuplement de

l'Asie du Sud-est continentale.

Au-delà de la nationalité déclarée, on distingue en effet parmi

ces réfugiés des personnes d'origine chinoise, des Xhmers, des

Vietnamiens (ou Kinh), des Lao, des Hmong, des Yao, des Nung,

des Khmou.

Ainsi, ceux que l'on nomme commodément "les réfugiés indochinois"

appartiennent en fait à des cultures différentes qui, si elles

participent toutes d'une même grande aire géographique, n'en

présentent pas moins des traits spécifiques. La langue, la religion,

l'histoire, varient considérablement d'un groupe à l'autre et

influent largement sur les modes d'insertion dans la société

d'accueil. Les capacités d'organisation de chaque groupe dépendent

pour une bonne part de son mode de fonctionnement et de sa place

dans la société d'origine.

Les réfugiés d'origine chinoise, déjà en situation migratoire

dans les pays de la péninsule indochinoise, et traditionnellement

spécialisés dans le commerce, retrouvent ici le même type d'activi­

tés .

Les Vietnamiens bénéficient d'une communauté déjà implantée en

France, qui peut, au moins partiellement, encadrer les nouveaux

venus.

(1) Chiffres du Ministère de l'Intérieur. 1981.

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3

Les Khmers ou les Lao, peu représentés jusqu'alors dans notre

pays/ et n'ayant jamais connu dans leur histoire de mouvement

migratoire aussi massif vers l'Occident, doivent/ quant à eux,

trouver des stratégies d'enracinement qui leur sont propres.

Ce sont ces différentes spécificités qui entraînent vite,

dès les premières années de l'installation, une certaine tendance

au regroupement ethnique et la mise en place d'une organisation

interne à chaque communauté.

Des "quartiers" chinois se constituent à Paris, par exemple, dans

les 13è, 18è et 20è arrondissements, mais on voit aussi se former,

dans les banlieues des grandes villes, de petites communautés

khmères ou lao ou vietnamiennes.

A l'intérieur de chaque groupe ethnique se développent des réseaux

de relations propres ; une entraide économique prend le relais

des institutions d'accueil, des liens affectifs et sociaux s'appu­

yant sur la párentele ou le voisinage se tissent, des commerces

et des entreprises asiatiques se créent. Une vie associative,

enfin, permet la réactualisation d'activités artistiques, ou

artisanales et cherche à préserver les cultures d'origine.

Les pratiques religieuses tiennent souvent une place primordiale

dans ces initiatives de regroupement. Des lieux de culte khmers,

lao, vietnamiens, chinois s'installent un peu partout en France,

et surtout en région parisienne. C'est à l'un d'eux qu'est

consacrée la présente recherche.

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4

Problématique

Ce travail prolonge une observation entamée en 1978

auprès de la population lao réfugiée en France. Celle-ci concernait

différents aspects de l'insertion des réfugiés dans la société

française.

En particulier, l'étude d'un groupe de mo_lam, (m£ = "maîtres",

lam = chant), (1) musiciens et chanteurs du Laos du Sud, qui

perpétuent en France leur tradition artistique, avait permis de

révéler certains des changements en cours dans leur mode de vie,

à travers leur expression littéraire. (2)

Les résultats de ces travaux avaient aussi mis en évidence

l'importance des valeurs bouddhiques dans la culture lao.

Il devenait indispensable, face à la création de monastères

lao dans différents lieux, de prendre en compte la dimension

religieuse dans la vie des réfugiés.

Les travaux ethnologiques menés sur le Bouddhisme lao

montrent en effet le rôle prédominant du vat, la pagode, (3), dans

la société traditionnelle. Ils révèlent la priorité accordée à

la création d'un monastère par toute agglomération nouvellement

constituée qui, par lui, s'affirme en tant que groupe social

organisé.

(1) Le lam est un genre musical et littéraire très populaire au Laos. Interprété sous la forme de chants alternés, et accompagné au khène, orgue-à-bouche en bambou, par des bardes, amateurs ou professionnels, qui se répondent des heures durant, il anime, dans la société rurale, tous les rassemblements festifs.

(2) cf Catherine CHORON-BAIX : Mo lam du Sud Laos réfugiés en France Thèse de doctorat de 3ème cycle. E.H.E.S.S. Paris 1983.

(3) le terme "pagode" désigne en réalité un temple chinois. Il est pourtant utilisé aussi pour le lieu de culte des bouddhistes dans la péninsule indochinoise. Je me conforme ici à cet usage commode.

Page 6: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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On peut penser que la transposition d'une telle institution, la

pagode, dans la société industrielle française/ est au coeur

d'une sociabilité lao en train de se reconstruire.

Il est probable/ également/ que celle-ci nécessite des aménagements

pour être compatible avec le milieu nouveau.

Cette recherche se propose de vérifier ces deux hypothèses,

en étudiant/ avec les méthodes de l'observation participante,

l'une des pagodes reconstituées en France.

Elle vise, d'une part/ à définir la paroisse bouddhiste qui

se forme autour du monastère, afin de montrer les mécanismes du

regroupement des réfugiés en milieu urbain français.

Elle analyse/ d'autre part/ les éléments de continuité et

de rupture qui caractérisent aujourd'hui les pratiques religieuses

des Lao en exil/ en observant les activités redevenues possibles

au sein du vat.

Ce second axe de la recherche doit alors entraîner une réflexion

sur la place du facteur religieux dans l'insertion de cette

population en France.

Pour répondre à ces objectifs/ les méthodes d'enquête

doivent être souples, consistant en une investigation continue,

à l'intérieur du vat lui-même, mais aussi à l'extérieur, suivant

les trajectoires des fidèles lao.

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Méthodologie

Profitant d'un ancrage déjà ancien dans des communautés de la

région parisienne/ je fus introduite auprès des responsables du

comité de soutien de l'une des deux pagodes lao installées autour

de la capitale, celle de Villiers-le-3el, dans le Val d'Oise.

Bien accueillie par ce comité, j'ai pu en étudier les statuts,

et m'entretenir avec ses membres fondateurs.

Participant, depuis 1981, aux grandes célébrations bouddhiques,

j'ai commencé, en 1983, à me rendre régulièrement à la pagode

hors des grandes dates du calendrier bouddhique, afin de la voir

fonctionner dans son quotidien. J'y rencontrais les responsables

religieux et laïcs, et participais aux activités qui s'y déroulaient

L'analyse du flux incessant de fidèles, les entretiens avec

certains, et les relations développées à l'extérieur de la pagode,

dans les familles, m'ont permis de comprendre la nature des

pratiques religieuses et les motivations des bouddhistes lao.

Le temps passé auprès des bonzes fut bien entendu très important.

Les interrogeant interminablement sur leur rôle au vat, sur

leurs sentiments quant à l'évolution de leur charge en France,

j'ai pu, surtout, les observer dans l'exercice de leurs fonctions.

Témoin discret lorsqu'ils recevaient leurs fidèles, j'ai assisté

aussi à l'accomplissement de certains rites.

Suivant leurs conseils, j'ai dû faire un travail de documentation

sur le Bouddhisme "savant", par la lecture d'ouvrages, fort

nombreux, consacrés à l'enseignement du Bouddha, ou sur le

Bouddhisme populaire lao. (1)

(1) voir la bibliographie sur le sujet à la fin du rapport.

Page 8: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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Ces différentes informations purent enfin être confrontées aux

observations faites, à deux reprises, en 1983 et 1984, dans la

société d'origine, grâce à deux séjours dans le Nord Est de la

Thaïlande, peuplé de Lao. (1)

Ces divgrs matériaux, ensuite brassés, permettent

aujourd'hui de dresser un premier bilan de la religion lao

réorganisée dans l'exil.

Celui-ci n'est qu'une étape d'une recherche qui devra se

poursuivre dans une perspective plus large et comparative.

Le rapport qui suit est le fruit d'un travail d'une année et

demie, dont l'enquête fut interrompue plusieurs fois, par suite

de longues absences des bonzes constituant le sangha, la communauté

monastique, de Villiers-le-Bel. (2)

Dans ce laps de temps, pourtant, des choses ont changé ;

certains bonzes ont quitté le monastère, des fidèles assidus ont

déménagé, d'autres sont apparus, obligeant à adapter les outils

et méthodes d'enquête à ces revirements. Ceux-ci attestent

l'extrême labilité d'une population immigrée de fraîche date en

France, dans une situation souvent encore précaire, installée, en

outre, en milieu urbain et suburbain.

Pour totalement cerner les processus du regroupement religieux

de ces exilés, il est sûr qu'il faut les appréhender dans une

perspective à long terme, englobant les comportements des jeunes

Lao de la seconde génération.

(l)Les berges du Mékong, qui fait la frontière entre la Thaïlande et le Laos, sont peuplées de part et d'autre de populations lao. Les Lao Isan (Lao de l'Est) qui vivent sur la rive thaïlandaise du fleuve sont d'ailleurs six fois plus nombreux que ceux de la rive Laotienne.

(2) le chef de la pagode est parti plusieurs mois en Australie, et un autre bonze, quant à lui, a séjourné plusieurs mois au Népal

Page 9: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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Il faut pouvoir aussi confronter des matériaux plus amplement

recueillis/ ce qui n'a pu être effectué ici/ pour des questions

de "stratégie méthodologique" ; comme nous le verrons plus tard/

les deux pagodes lao de la région parisienne entretiennent des

relations de rivalité qui m'ont empêchée d'en faire une observation

conjointe. Je risquais en effet un rejet de part et d'autre, et

j'ai préféré m'assurer une insertion sans heurt dans l'une d'elles,

sachant que les processus observables là étaient/ de toute façon/

totalement pertinents pour la compréhension du phénomène étudié.

Néanmoins, il est nécessaire qu'à l'avenir, ce travail de

comparaison entre différentes paroisses bouddhistes lao, en France,

mais aussi dans d'autres pays d'accueil, (aux Etats-Unis, en

Australie, au Canada), soit accompli. Lui seul doit permettre de

dégager des traits permanents sur les modalités d'intégration

des exilés d'Asie du Sud Est dans les sociétés occidentales, et

sur la place et l'évolution qu'y connaît le Bouddhisme.

Pour l'heure, ce qui est présenté ici doit être compris comme

un ensemble de tendances remarquables dans les comportements

religieux des Lao en France. Celles-ci révèlent la prégnance des

valeurs bouddhiques dans la vie individuelle et collective des

réfugiés. La prise en compte de cette dimension était tout à fait

essentielle pour une meilleure connaissance des modes d'insertion

de cette population méconnue de la majorité des Français.

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Je tiens à remercier le Conseil du patrimoine Ethnologique/ au

Ministère de la Culture/ de m'avoir donné la possibilité de mener

cette recherche/ et d'en présenter ici les résultats.

Je veux aussi exprimer ma gratitude à tous les Lao qui ont bien

voulu n'accorder leur temps et leur confiance et ont toujours

réservé à mon travail un accueil très favorable : les bonzes de

Villiers-le-Bel/ les membres du Comité de soutien du Bouddhisme

et d'Action Socio-culturelle Lao (C.S.B.C.)/ les fidèles de la

pagode/ rencontrés régulièrement ou plus fortuitement/ les amis

lao enfin/ que je côtoie depuis maintenant de longues années.

La première partie du document qui suit est une présentation

de la vague migratoire lao dans notre pays. Après avoir brièvement

retracé l'histoire de la fuite du Laos/ elle rappelle les principales

caractéristiques de l'intégration des Lao en France ; implantation

géographique/ insertion économique/ réseaux de relations internes

au groupe ethnique/ y sont tout à tour évoqués.

Suit une analyse de la place des valeurs religieuses dans la

vie des réfugiés. La manière dont ils interprètent/ à la lumière

des principes bouddhistes/ leur situation actuelle d'exilés/ est

tout particulièrement à retenir/ dans la mesure où elle explique/

pour une bonne part/ leur volonté de regroupement autour de la

pagode. Les diverses tentatives/ les obstacles et les échecs y

sont abordés, et introduisent l'étude du monastère du Val d'Oise,

le vat Velouvanaram.

Page 11: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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Dans la troisième partie, c'est la paroisse formée autour

de cette pagode qui est envisagée. En examinant les origines et

le fonctionnement, à partir notamment des statuts de son

comité de soutien, je recense ensuite les différentes catégories

de fidèles qui la fréquentent, afin d'en délimiter l'aire

d* influence.

La quatrième et dernière partie du rapport décrit le vat

lui-même, dans son organisation spatiale et ses diverses activités-

La description du lieu abritant le monastère, la vie quotidienne

qu'y mènent les bonzes, les fonctions qu'ils y exercent, font

apparaître des transformations, qui suscitent, en conclusion,

une analyse du rôle des pratiques religieuses dans la formation

de l'identité lao en France.

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11

1 . L! immigration lao en France

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1. Histoire

Au 31.12.84/ le nombre de Laotiens entrés légalement en France

est de 33 640, dont 12 192 montagnards. (1)

Deux périodes différentes sont à distinguer dans cet afflux.

- jusqu'au mois de mai 1981 :

Parmi les 27 672 Laotiens entrés dans notre pays au cours de

la période de Juin 1975 à Août 1981, on dénombre environ 20 000 Lao,

5 000 Hmong, 288 Khmou, et une certaine proportion de personnes

d'origine chinoise.

Constituant l'ethnie majoritaire du Laos, (deux millions pour une

population totale de trois millions et demi), les Lao sont aussi

les plus nombreux des réfugiés de nationalité laotienne résidant

dans ce pays.

Comme leurs compatriotes, ils fuient, à partir d'avril 1975, après

la victoire du Pathet Lao sur le gouvernement royal, puis

1' abolition de la monarchie et la proclamation de la République

Démocratique Populaire du Laos (RDPL), en décembre 1975.

Les premiers partis sont essentiellement des citadins, dont

les motivations sont surtout politiques : militaires échappés des

séminaires, personnes menacées d'être envoyées dans les camps de

rééducation politique, étudiants, fonctionnaires et policiers

compromis avec les Américains, commerçants d'origine chinoise ou

Vietnamiens en difficulté. (2)

(1) Chiffres du Ministère de l'Intérieur..

(2) Pour une étude de ce mouvement migratoire, voir G. COtIDOMIîIAS et R. POTTIER, on. cit.

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En 1976/ les départs/ moins nombreux que l'année précédente/(1)

sont le fait d'une forte proportion de Hmong et de montagnards/

mais commencent aussi à toucher les paysans lao/ qui voient leur

niveau de vie baisser considérablement sous l'effet des mesures

économiques prises par le nouveau régime.

Cet exode des paysans lao s'amplifie en 1978 et 1979 et s'accélère

en 1980.

Tous ces réfugiés lao séjournent/ pour la plupart/ plusieurs

mois/ voire plusieurs années/ dans les camps de Thaïlande/ à

NongkaI pour ceux du Nord Laos/ à Ubon Ratchathani pour ceux du

Sud.

Malgré des conditions de vie difficiles/ surtout pendant les

premiers mois suivant l'exode massif du Laos/ ils beneficent là

d'un environnement, écologique/ et socio-culturel/ qui leur est

familier. La population locale du Nord-est thaïlandais, d'ethnie

lao, participe encore largement, malgré la pression économique/

politique, sociale et culturelle exercée par le pouvoir central

thaïlandais/ des valeurs et modèles de la culture lao. Une

communauté de langue/ de croyance/ des relations de parenté et

des échanges économiques constants lient depuis toujours les Lao

installés sur les deux rives du Mékong. Ils ont permis à quelques

70 000 réfugiés du Laos de se fondre dans la population lao isan.

(1) Deux raisons essentielles peuvent expliquer ce ralentissement temporaire ; d'une part les opposants les plus déterminés au nouveau régime sont déjà partis, d'autre part/ il devient plus difficile de quitter le Laos, les autorités renforçant le contrôle des frontières.

r

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14

Mais cette possibilité est tout à fait exclue dès 1976, les

autorités thaïlandaises prenant de sévères mesures contre toute

clandestinité/ et les populations locales elles-mêmes commençant

à rejeter ces migrants qui menacent leur fragile équilibre

économique.

Les réfugiés lao doivent alors se diriger vers un pays tiers.

La France semble être, pour la majorité d'entre eux, le meilleur

choix possible. (1) Celle-ci, de son côté, retient en priorité

entre 1976 et 1979, les personnes ayant rendu des services au

pays, dans le passé, celles qui maîtrisent notre langue, et celles

qui ont déjà des parents installés ici.

Ces critères de sélection sont encore plus précis à partir de

mai 1981 et modifient l'arrivée des réfugiés lao.

- de juin 1981 à aujourd'hui :

A partir de mai 1981, la politique française d'accueil des .

réfugiés du Sud Est asiatique se fait plus restrictive, notamment

vis à vis des Laotiens. (2) En juin 1981, le gouvernement fixe

le quota pour les réfugiés de la péninsule indochinoise, toutes

origines confondues, à 1 500 par mois. En août 1982, il est ramené

à 450 par mois, dont moins de 100 pour les réfugiés en provenance

des camps de Thaïlande, la priorité étant accordée aux personnes

en transit en Indonésie, à Galang, ainsi qu'aux regroupements de

Vietnamiens.

(1) R. POTTIER, op. cit, écrit à ce propos, p. 175 : " pour les Lao, s'il3 pouvaient vraiment choisir, la très grande majorité préférerait la France à tout autre pays occidental. Beaucoup de réfugiés affirment qu'ils aiment les Français parce qu'ils les connaissent et que, réciproquement, les Français les connaissent"

(2) cf le rapport de G. CRUNEL rédigé début 1984, et publié dans le ÎI° 27. 28 du Bulletin d'information et de liaison du CCRL

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En janvier 1983/ alors que le quota est de 700 réfugiés du

Sud-est asiatique par mois/ dont 300 pour ceux de Thaïlande/ la

France accueille principalement des Cambodgiens (70 à 80%)/ les

Laotiens ne représentant qu'environ 10% de ce chiffre.

Une procédure mise en place par le Secours Catholique et le

Comité National d'Entraide permet d'accélérer la venue de 5 600

personnes pour lesquelles des visa d'entrée avaient été signés

avant mai 1981. Celles-ci sont arrivées en août et septembre 1984.

Actuellement/ les possiblités d'entrée en France diminuent

encore pour les réfugiés de la péninsule indochinoise/ dont les

quota, ramenés à 200 ou 250 par mois, sont considérablement

réduits afin de permettre l'accueil de réfugiés d'autres origines,

Iraniens, Afghans, Polonais, etc..

Ne sont plus désormais pris en compte que les regroupements de

famille dits de "première catégorie" (parents-enfants, ou époux

séparés).

Cette restriction rend la situation des réfugiés d'Asie du

Sud Est en transit en Thaïlande très préoccupante, surtout pour

les Laotiens qui continuent d'y affluer ; alors qu'on enregistrait

une baisse des demandes d'asile des Laotiens en 1982 (5 019), et

en 1983 (7 491), les difficultés économiques actuelles du Laos,

le manque de débouchés professionnels pour les jeunes rentrés de

stage de formation au Vietnam ou en URSS, la crainte de devoir

partir pour un pays de l'Est, entraînent une recrudescence des

passages en Thaïlande.

Page 17: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

16

En 1984, 15 000 Laotiens supplémentaires demandent l'asile, ce qui

porte le nombre de réfugiés du Laos, toutes ethnies confondues,

à 88 985 en juin 1985, (1) soit 65% des réfugiés du Sud Est

asiatique hébergés en Thaïlande.

Pour eux, la situation semble se bloquer totalement ; les restric­

tions d'accueil des pays occidentaux, l'échec de la politique de

rapatriement volontaire au Laos, qui ne concerne que 2 546 personnes

(essentiellement des montagnards) (2), et le refus depuis 10 ans

de la Thaïlande, d'une installation définitive sur son territoire,

laissent des milliers de Laotiens en camp face à un avenir des

plus incertains...

Ils n'ont en tous cas pratiquement plus aucune chance de venir

en France, puisque cette dernière accorde l'entière priorité

aux Cambodgiens et aux Vietnamiens ; en 1984, le nombre de Laotiens

arrivés légalement est de 750, et diminue encore en 1985. De

janvier à septembre 1985, 232 Laotiens ont été accueillis

officiellement sur un total de 2 110 personnes en provenance de

l'Asie du Sud Est. (3)

Pour ceux qui ont obtenu l'asile en France, cette situation

est parfois préoccupante, car ils ont peu d'espoir de voir arriver

ceux des membres de leur famille aujourd'hui en camp en Thaïlande.

De plus, leurs conditions d'insertion en France ne sont pas

toujours faciles.

(1) chiffres de l'UNHCR

(2) il semble que les raisons principales de cet échec soient liées à la crainte de représailles, à l'obligation de suivre une "rééducation", et à -la réinstallation, bien souvent, en dehors de son village d'origine.

(3) statistiques de la Croix Rouge Française chargée de l'accueil aux aéroports.

Page 18: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

17

Une insertion parfois difficile

Pour les Laotiens résidant dans notre pays/ on peut aussi noter

une situation évolutive/ marquée par deux périodes différentes.

- une rapide autonomisation se remarque pendant les premières

années d'exil.

Les Lao connaissent pour la première fois de leur histoire une

migration massive vers les pays occidentaux, et sont confrontés

à une transplantation brutale à laquelle ils sont souvent mal

préparés. Les premiers contingents/ en particulier/ ne peuvent

bénéficier/ à leur arrivée/ de l'encadrement de compatriotes

anciennement implantés. Ils n'étaient que 1096 en 1975. Ils doivent

donc/ pour la plupart/ passer par le dispositif d'accueil mis en

place avec l'association France Terre d'Asile.

Dirigés vers des ¿entres provisoires d'hébergement créés un

peu partout dans le pays,' ils disposent de trois à six mois pour

trouver une insertion socio-professionnelle et s'initier aux

rudiments de la langue française. Affectés au hasard des places

disponibles dans ces centres dispersés sur l'ensemble du territoire,

les réfugiés s'installent généralement, dans un premier temps,

à proximité de ceux-ci, là où les possibilités d'emploi et de

logement sont favorables.

Ils ne tardent pas, pourtant, comme d'autres réfugiés d'Asie du

Sud Est d'ailleurs, à rechercher un rapprochement vers Paris et

les grandes villes.

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18

La capitale; qui; au Laos déjà/ puis dans les camps de

Thaïlande, jouissait d'une image prestigieuse, continue d'exercer

un grand attrait sur les nouveaux venus ; on pense y obtenir plus

aisément du travail, on sait pouvoir s'y procurer, dans les

commerces asiatiques nombreux des 13è, 18è ou 20è arrondissements,

les biens et services nécessaires à la continuation de certaines

pratiques culturelles, comme les habitudes alimentaires. On sait,

enfin, y retrouver des compatriotes, parents, amis, voisins, avec

lesquels entretenir des relations régulières indispensables à

l'équilibre. Les Lao sont, en effet, issus d'une société encore

essentiellement rurale, et sont habitués à se situer dans le cadre

d'un espace social restreint, le village, ban. Le développement

urbain au Laos, ces dernières années, est profondément calqué sur

ce modèle rural, la ville apparaissant comme un agglomérat de

villages un peu plus important que les regroupements en milieu

rural. Et c'est à l'intérieur de cette unité d'appartenance, le ban,

que se définit l'individu.

Au-delà de la famille nucléaire, structure certes fondamentale

de la famille lao, la párentele et le voisinage fondent en effet

les relations sociales. Elles permettent un partage des

responsabilités, qui s'effectue à l'intérieur de structures

associatives, les samakhom. L'entraide, durant la période des

grands travaux, ou la coopération au sein d'une association

d'irrigation, le soutien financier dans des associations de type

tontines, ou encore les réalisations collectives au profit de la

communauté villageoise constituaient les formes les plus courantes

de la solidarité économique au village.

Page 20: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

19

Les Lao sont donc habitués à une grande proximité dans leurs

relations de parenté et de voisinage, proximité concrétisée par

des actions collectives.

Exilés/ ils ne peuvent envisager la coupure du groupe ethnique

et familial et 1'atomisation.

La peur.de l'isolement entraîne très vite des déplacements de

familles/ qui réduisent à néant les tentatives d'insertion en

province, dans les petites villes et les villages.

Jusqu'à ces dernières années, les réfugiés ont su, en faisant

jouer leurs propres réseaux de relations, s'émanciper des

institutions d'accueil pour se procurer eux-mêmes une intégration

socio-économique.

Depuis deux ou trois ans, toutefois, cette solidarité tend à

décroître.

une solidarité ethniaue aui tend à faiblir : i

La pénurie d'emploi et de logement retient plus longtemps les

nouveaux arrivants dans les centres provisoires d'hébergement, et

alourdit leur prise en charge par les collectivités. L'aide social

en effet, augmente pour les asiatiques et concerne surtout ceux

qui sortent, souvent sans emploi, des foyers d'hébergement, ceux

qui sont licenciés économiques, les jeunes quittant le milieu

scolaire sans pouvoir s'intégrer dans des programmes de formation,

faute de place. La communauté ethnique, pour les mêmes raisons

économiques, mais aussi sous l'effet de certains changements de

mentalité sur lesquels nous aurons à revenir, ne joue plus autant

Page 21: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

20

} son rôle d'encadrement. Il est vrai que les nouveaux venus viennent

souvent de passer de longues années/ désoeuvrés et assistés/ dans

des camps. Devenus passifs/ ils attendent une aide que la

\ communauté ethnique/ aux prises avec des difficultés économiques/

n'est plus en mesure de leur donner. En outre/ l'accoutumance \

au système social français/ qui offre des possibilités d'assistanat/

réduit le sens de la solidarité anciennement fort chez les Lao.

Face à cette situation de crise/ le repli sur Paris et les

grandes villes tend à s'amplifier.

Et l'implantation géographique des Lao en France est ainsi

déterminée à la fois par le marché du travail et de l'immobilier,

et la volonté d'un certain regroupement ethnique.

Une implantation urbaine et suburbaine

S'installant dans les zones urbaines et suburbaines, les Lao

se concentrent dans les banlieues Nord et ' Est de Paris, en

particulier dans le Val d'Oise/ la Seine Saint Denis/ la Seine et

Marne/ le Val de Marne/ et en province/ à la périphérie de grandes

villes comme Lyon, Montpellier, Marseille/ Toulouse, Limoges,

Rennes, Metz, Bourges.

Bien qu'il soit très difficile d'obtenir des données précises,

on estime que plus de la moitié des Laotiens ayant trouvé refuge

en France vit dans la région parisienne, et qu'on y compte environ

12 à 13 000 Lao.

Page 22: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

21

Ceux-ci habitent généralement les grandes cités et investissent

certains quartiers des villes nouvelles/ à Marne-la-Vallée; par

exemple/ ou Courcouronnes / Evry/ etc..

Cette implantation/ précaire à ses débuts/ se stabilise

progressivement/ marquée souvent par l'accession à la propriété

immobilière. Grâce au recours au crédit bancaire et à l'entraide

financière au sein du groupe ethnique/ des Lao de plus en plus

nombreux achètent aujourd'hui des logements dans des immeubles des

banlieues proches/ ou font construire des pavillons dans les

périphéries plus lointaines.

L'installation/ devenue durable/ permet alors la constitution

de petites communautés, au sein desquelles ressurgissent certaines

pratiques communautaires/ organisées selon un modèle associatif

qui leur est coutumier.

Page 23: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

22

2. Une sociabilité en reconstruction

Le développement d'une vie associative

Apparu dans les années 1978 - 1979/ ce mouvement associatif

ne cesse de se développer depuis. On compte actuellement une

trentaine de samakhom/ dont la durée d'existence et l'efficacité

sont très variables.

Beaucoup d'entre elles ont un organe de publication/ rendant

compte de leurs activités et diffusant les informations entre les

différentes communautés.

Nous n'en citerons/ à titre d'exemples/ que quelques uns des plus

importants : le Bulletin de Liaison de l'Amicale France-Laos, à

Chartres-de-Bretagne/ le trimestriel Khouan Nay de l'Association

des Femmes Lao en France (A.F.L.F)/ à Paris/ le bi-mensuel

Muong Lao à Fontenay-sous-Bois/ le bi-mensuel Champa Muong Lao

à Paris 13ème, le mensuel Lane Xang de Solidarité Lao/ à Créteil/

le bulletin mensuel du Centre de Culture et de Recherche Laotiennes/

à Paris 18ème, lu trimestriel Enfants du Mékong d'Asnières, le

mensuel de l'association Phuean Noum Lao de Sainte-Foy-les-Lyon/

etc. . . .

Page 24: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

23

A côté de cette fonction de documentation et de diffusion

de l'information/ les associations lao proposent à leurs adhérents

de nombreuses activités : activités sportives/ avec la constitution

d'équipes de jeunes et l'organisation de rencontres inter-équipes/

activités artistiques et artisanales/ avec la formation de groupes

de musique traditionnelle ou moderne/ de troupes de danse,

création d'ateliers de tissage/ de vannerie/ de sculpture, de

peinture, activités intellectuelles, avec l'ouverture de cours

de langue laotienne, de centres de documentation/ de bibliothèques,

pratiques religieuses, enfin, avec la reconstitution de monastères

bouddhistes.

Au travers de ces entreprises diversifiées, les associations

répondent à des objectifs précis. L'exemple de l'une de ces

associations suffira à' les mettre en évidence, puisqu'ils sont

explicitement évoqués dans les statuts mêmes.

Il s'agit de l'Association des Artistes Lao de Melun, créée dans

le courant de l'année 1984.

Page 25: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

24

Article 1 :

"L'AALM regroupe tous les artistes lao (musiciens, chanteurs,

danseurs, sportifs), de Melun, qui éprouvent le besoin, en tant

que réfugiés, de se rassembler au sein d'une association pour

développer leurs activités artistiques et culturelles, résoudre

leurs problèmes matériels et faire connaître le patrimoine lao

en France".

Article 2 :

"L'AALM a pour buts :

. de préserver le patrimoine culturel et artistique lao

. de développer l'amitié entre les réfugiés et de permettre

l'entraide dans leur vie quotidienne

. de créer des liens d'amitié entre les Français et les Lao

habitant Melun

. d'établir des contacts entre les réfugiés lao de France et

ceux des autres pays d'accueil (Etats-Unis, Canada, Australie,

Japon....)."

Une telle association définit clairement ses objectifs ; visant

la sauvegarde d'un patrimoine culturel menacé tant par les

changements survenus au Laos que par les processus acculturatifs

nés de la transplantation en Occident/ elle veut aussi contribuer

à l'organisation de la communauté lao en France et assurer son

intégration harmonieuse en facilitant les contacts entre membres

du groupe ethnique et avec la société globale.

Page 26: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

25

Cette volonté de protéger la culture d'origine/ commune à

toutes les communautés en provenance de la péninsule indochinoise

en France/ les différencie d'autres groupes allogènes installés

dans notre pays/ chez lesquels elle est apparue souvent plus

tardivement. Ce phénomène est sans doute lié à l'histoire de ces

populations, déjà confrontées, avant 1975, à la pénétration

sauvage de modèles culturels étrangers, notamment américains et

thaïlandais, dont il fallait se protéger, et brutalement agressées

par les bouleversements politiques de 1975. Il est dû aussi aux

conditions de leur installation dans la société française.

Celle-ci leur a réservé, dans son ensemble, un accueil favorable,

nourrissant une image positive des cultures d'Asie, héritée pour

une part du passé de la France dans cette région du monde, pour

une autre de la campagne médiatique très mobilisatrice sur le

drame indochinois. L'encouragement, voire la collaboration directe

de certaines organisations françaises, tels que le Secours

Catholique, ont dû jouer comme facteur stimulant et facilité les

démarches des Lao.

Parallèlement à ce souci de sauvetage de la culture lao, une

autre dimension, qui influe sur le mode d'insertion des réfugiés

dans la société globale, se fait jour dans le mouvement associatif.

Organisant entre les différentes associations des échanges de

prestations qui démultiplient les réseaux de relations, il rétablit

en effet une sociabilité spécifiquement lao.

Alors que les plus importantes des amicales cumulent diverses

activités, la plupart sont connues pour une "spécialité". On sait,

Page 27: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

26

par exemple; qu'il existe à Melun un groupe de mo lam qui peut

animer les fêtes et participer à la célébration de certains rituels.

On sait que l'Association des Femmes Lao forme de jeunes danseuses

capables de donner des spectacles pour le Nouvel An lao/ etc.. i

On finit par se connaître d'une banlieue à l'autre, d'une région à

l'autre, tissant sur l'ensemble du territoire français, et hors de

ses frontières aussi, des réseaux où s'entrecroisent les liens de

parenté, de voisinage, et l'appartenance à un samakhom. Ce "commerce"

dans son sens large, entre les groupes de réfugiés, n'est pas sans

rappeler celui, constant, qui reliait les villages dans la société

rurale. Pour se désigner, en France, les Lao se réfèrent désormais

à cette nouvelle appartenance, comme ils se situaient, au Laos, à

partir de leur ban, leur village, d'origine.

Pour ces exilés, issus d'une société qui ne sépare guère ses

arts de sa religion, et qui sanctionne ses pratiques communautaires

par la célébration du culte, il n'est pas étonnant que le temple

soit au coeur de la sociabilité retrouvée.

La pagode qui, dans la société traditionnelle, est un

investissement prioritaire pour toute agglomération nouvelle, est

le centre de la vie communautaire et la plaque tournante des

échanges, économiques, sociaux, religieux, festifs. Sa transposition

dans l'exil est indispensable, car c'est autour d'elle que peuvent

se multiplier les relations à l'intérieur du groupe ethnique. C'est

grâce à elle, aussi, que redevient possible la pratique d'une

religion qui fournit au Lao les cadres spirituels, moraux, sociaux,

culturels, sans lesquels son identité est menacée.

Page 28: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

27

2 » Bouddhisme et migration

Page 29: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

28

3. le Bouddhisme lao et l'exil

"Je souffre pour ces vieillards si respectueux de nos règles,

Qui pratiquaient l'aumône chaque matin.

Se rendaient chaque jour à la pagode,

Ramassaient des fleurs pour les donner en offrandes,

Priaient le Bouddha.

Nos temples .superbes

N'ont plus aujourd'hui leurs bonzes.

Nos monastères sont vidés, totalement.

Le son des cloches, des gongs, du tambour,

S'est tu à jamais. —

C'est le silence.... •

Plus de gongs, plus de cymbales, plus de tambours,

Plus personne pour faire les offrandes.

Qui donc va soutenir les chefs de nos pagodes ?

Qui recevra le vénérable aîlleul dans sa robe jaune ?

Où se cachent aujourd'hui les robes jaunes ?

Nos vénérables bonzes ne sont plus là pour la prière,

Ils ne vont plus à la quête matinale,

Ils ne se déplacent plus.

Le supérieur de la pagode ne prie plus,

Il ne prodigue plus ses conseils.

Qui donc va nous enseigner ?

Qui va nous aider à réfléchir ?

Nous ne pouvons plus compter que sur les divinités du ciel (1)

pour nous porter secours".

(1) devata désigne les divinités célestes correspondant aux _then des croyances nimistes thaï.

Page 30: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

29

Cet extrait d'un chant composé et interprété par la mo lam

Soubane, lors d'une fête familiale, dans la banlieue de Paris/

en mars 1983/ résume bien le désarroi de nombreux exilés arrachés

à leur monde religieux.

L'abandon de la pagode villageoise et des moines hante les

mémoires/ entretenant une culpabilité constante.

Les Lao interprètent parfois la tragédie de l'exil comme la

sanction de conduites passées reprehensibles (1). Le démantèlement

du groupe familial et ethnique en est le prix à payer. Mais

séparés désormais de leurs bonzes, et privés du monastère qui

faisait l'unité de leur communauté, les réfugiés sont en perdition.

C'est le cas surtout des plus âgés/ pour lesquels la dévotion

et l'attachement au clergé bouddhique sont une structure essentielle

de leur être social.

Il est vrai que le Bouddhisme lao/ Bouddhisme dit du "Petit

Véhicule", Hinayana, (2), d'un terme péjoratif attribué au

Bouddhisme des anciennes écoles par les tenants du Mahayana, le

"Grand Véhicule", et aujourd'hui remplacé par Theravada, "doctrine",

ou "Opinion des anciens", (3) a su se fondre harmonieusement dans

la société lao, au point d'en devenir le fondement principal. (4)

(1) Nous reviendrons longuement sur ce phénomène.

(2) littéralement "moyen inférieur de progression".

(3) le Bouddhisme Theravada est considéré comme l'orthodoxie originale, pratiquée à Ceylan, en Birmanie, en Thaïlande, au Cambodge, au Laos, et à Cnittagong dans le Pakistan Oriental. Le Mahayana qui se développa plus tard est pratiqué en Chine, au Japon, au Tibet, en Mongolie.

(4) Pour une étude détaillée, nous renvoyons aux multiples ouvrages consacrés au Bouddhisme, dont certains figurent dans la bibliographie, en fin de ce rapport.

Page 31: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

30

Comptant quelques 2, 8 Millions d'adeptes, soit 95% de la

population, il fut introduit au Laos, selon la tradition écrite,

au I4èrae siècle (1). Il s'y est mêlé au fonds animiste thaï et

proto-indochinois qui préexistait alors sous la forme du culte

des Phi, les Génies, communs aux populations de langue thaïe, mais

aussi aux Vietnamiens, aux Cambodgiens, aux Birmans.

Ne parvenant jamais à faire disparaître cet ancien culte local (2)

le Bouddhisme Theravadin s'y est progressivement adapté.

Il a son plus grand rayonnement aux 16ème et 17ème siècles, à

l'apogée du Lan Xang, le "Pays du Million d'Eléphants", nom ancien

du Laos, pour connaître ensuite un déclin qui, lié à la décadence

du royaume, (3) entraîne une recrudescence de l'animisme.

Celui-ci a gardé depuis une grande vigueur et la religion des Lao

apparaît ainsi comme une acculturation de ces deux ensembles de

croyances, auxquelles s'ajoutent encore certains éléments de

l'Hindouisme, probablement hérités de la pénétration du Bouddhisme,

tels que la croyance en la transmigration et la référence à

des déités du panthéon hindouiste.

Dans ce syncrétisme religieux, le Bouddhisme reste toutefois

l'élément dominant qui dicte largement la vie du Lao.

(1) Selon la tradition écrite, ce serait le roi Fa Ngoum, premier souverain du royaume de Lan Xang, et sa femme, la princesse khmère Nang Keo Lot Fa, qui auraient introduit le Bouddhisme au Laos. En réalité Fa Ngoum en a été le propagateur actif, mais les données archéologiques et l'histoire des pays voisins attestent la présence du Bouddhisme au Laos avant le 14ème siècle. Cf Présence du Bouddhisme. N° spécial France-Asie, Fév. Juin 1959, pp. 889.892.

(2) un édit du roi Pothisarath en 1527 proscrit le culte des Phi et ordonne la destruction de tous leurs sanctuaires.

(3) aux 17ème et 18ème siècles, le Lan Xang est morcelé, envahi par r,.::;-'\KSi3in3 siamois et Ho, qui réduisent en ruines les monuments religieux, et ravagé par des guerres intestines.

Page 32: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

31

Celui-ci vénère les trois Joyaux/ (Pha Tay)/ le Bouddha/

(pâli Pha Phout/ sanskrit Buddha), sa Doctrine, (pâli Dhamma/

sanskrit Pharma), et la Communauté (pâli Pha Sang, sanskrit Sanggha)

Il recherche/ à l'instar du Sage qui atteignit le Niphan (pâli

Nibbana/ sanskrit Nirvana) 1' abolition du cycle des transmigrations.

La mort est en effet normalement suivie d'une renaissance dont

la qualité dépend des actes accomplis antérieurement/ kam.(pâli

kamma, sanskrit karma).(1)

Il doit donc le respect absolu à toute vie, selon l'un des

fondements principaux de la morale bouddhique. Il lui faut aussi

pratiquer le détachement de toute chose, le désir et la passion

n'étant que sources de souffrance. Seule la bonté envers tous les

êtres vivants et le renoncement aux biens de ce monde sont

susceptibles de conduire à l'Illumination, à l'état de Bouddha,

à la libération du cycle des réincarnations.

Dans la vie quotidienne du Bouddhiste lao, cette morale

trouve son application dans l'obligation de faire le bien, de

donner l'aumône, hed boun (du pâli punna, sanskrit punya, le mérite,

la vertu)/ c'est-à-dire d'acquérir des mérites pour le futur.

Cette notion de boun est devenue centrale dans la société lao

et régit tant l'ensemble des rapports sociaux que la vie de chacun. (2)

(1) Le kam ou karma, désigne l'ensemble des actes, bons ou mauvais, qui déterminent l'incarnation prochaine.

(2) Dans son étude sur le Bouddhisme lao, Thao Nhouy Abhay écrit à ce propos : " si le Bouddhisme a deux sortes d'adeptes, les clercs et les laïcs, il ouvre aussi deux voies contraires de salut : le chemin du Nirvana aux abstinents et aux contemplatifs, celui des bonnes renaissances aux gens de biens attachés aux plaisirs de la terre mais qui font l'aumône et vénèrent les reliques. Les boun procèdent de cette dernière foi. "Faire un boun, c'est donner un disciple au Bouddha en organisant une ordination ou un ondoiement de bonzes ; "faire un boun" c'est participer aux offrandes des fêtes du Paravana (sortie du carême) ; c'est faire don de nourriture et d'habits ; c'est aux principales dates de la vie du Bouddha, méditer ses actes, suivre les processions autour des reliquaires". "Le Bouddhisme lao" in Asoicti du Pays Lao . P- 50

Page 33: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

32

Les bonzes/ "représentants directs du Bouddha" (1) sur la terre

sont les destinataires désignés de ces aumônes méritoires.

L'état monastique correspond en effet à l'idéal de désintéressement

et de détachement proné par la morale bouddhique. Celui qui y

satisfait en entrant dans les ordres provoque un enrichissement

de mérites non seulement pour lui-même mais aussi pour des tiers :

le donateur (chao sattha)/ parent ou étranger/ qui lui procure

l'équipement nécessaire/ et l'ensemble des donateurs quotidiens/

les laïcs qui pourvoient à ses besoins matériels/ et notamment lui

procurent chaque jour la nourriture qu'il doit quêter.

Le Bouddhisme lao permet à tout homme/ sans distinction d'origine/

de prendre l'habit jaune/ bouat (ou konq bouat : prendre l'habit/

ordination)/ à un moment de son existence/ et pour la durée qu'il

désire. Cette retraite monastique asseoit définitivement son

prestige au sein de la communauté/ lui permettant même de faire

précéder son nom du titre qu'il y obtient lorsqu'il quitte le

froc (2).

En dehors de cette période de total détachement et de profonde

piété, il peut continuer d'enrichir son karma grâce aux offrandes

destinées à ceux qui vivent sous le froc. Ceux-ci jouissent donc

d'une autorité morale incontestée, d'ailleurs tout à fait

perceptible dans l'improvisation de la chanteuse Soubane que nous

avons vie toute à l'heure.

(l)citation de Thao Nhouy Abhay, op. cit/ p. 922.

(2) celui qui a été novice a le titre de Xieng, celui qui, ayant été bonze, n'a reçu aucun ondoiement, a le titre de Thit/ le Somdet devient dans la vie laïque/ Chane, le Xa_ est appelé Chane Xa le Nha Khou, Chane khou. Maha est le titre des bonzes ayant^suivi au moins les trois premières années d'études à l'école de Pâli.

Page 34: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

33

Bien entendu/ l'autorité morale du bonze est d'autant plus

grande qu'il s'élève dans la hiérarchie du clergé bouddhique.

Son ancienneté et son savoir/ sa réputation/ lui permettent, par

des cérémonies successives d'ondoiements (kong hot ) / de gravir

l'échelle des grades religieux, au nombre de six, par ordre

décroissant : Notkheo, Loukkeo, Lakkham, Khru, Sa et Somdet.

Mais plus que le titre, c'est le temps passé dans les ordres qui

fait la notoriété d'un moine.

Les supérieurs de pagode (pha athikane ou pha oupassa), sont

souvent choisis pour leur longue expérience au monastère, plus

que pour leur grade. Elus par les bonzes, le chef et les notables

du village, ils sont consultés pour tous les problèmes et très

écoutés.

L'exil qui sépare les moines de leurs fidèles prive ceux-ci

d'un soutien moral extrêmement précieux.

C'est pour retrouver cet appui auprès de leurs bonzes, et à travers

eux encore, accomplir les actes méritoires, que des groupes de

réfugiés tentent aujourd'hui de reconstituer leurs monastères.

Entreprise difficile, exigeant de trouver des religieux capables

de prendre la direction d'un sanqha, alors même que la diaspora

lao, en France, et plus généralement en Occident, manque cruellement

de bonzes.

Page 35: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

34

4- L exode du clergé

L'exode des religieux ne fut en effet nullement comparable

à celui des laïcs. Tandis que les plus âgés des moines sont

demeurés au Laos après 1975/ la grande majorité de ceux qui ont

franchi le Mékong se sont intégrés dans les monastères de

Thaïlande/ dans le Nord Est du pays souvent/ mais aussi dans

la plaine centrale, et autour de Bangkok. Le Patriarche du Laos

lui-même, autorité supérieure du clergé bouddhique, déjà fort

âgé en 1975, et de santé fragile, était installé à Bangkok, où

il est .'mort -. récemment.

Certains bonzes ont aussi séjourné, pour des périodes variables,

dans les camps de réfugiés lao de Nongkaï et de Ubon Ratchathani.

A Ubon Ratchathani, par exemple, une pagode fut construite

en 1977, dans l'enceinte du camp. Elle y jouait un rôle centrale

dans la vie des réfugiés. On y stockait les provisions alimentaires

(dont la plus grande partie provenait de dons à la communauté

monastique) destinées aux maquisards basés dans les environs.

Les bonzes, par leurs exhortations et leurs conseils, contribuaient

a l'organisation de la résistance et travaillaient à la

réunification des exilés.

En témoignent ces quelques extraits d'un sermon enregistré en 1981

dans ce camp (1) :

(1) j'effectuai, en 1981, une recherche dans le Nord Eût de la Thaïlande, et particulièrement dans ce camp de réfugiés, grâce à une bourse "Jeunes Chercheurs" du Ministère de l'Education Nationale.

Page 36: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

35

"Si nous autres, hommes de ce bas monde, savons vivre en harmonie

les uns avec les autres, nous montrer solidaires et unis, nous

sentir frères, alors nous connaîtrons le bonheur, la dignité,

l'équilibre, l'invulnérabilité. Cette sagesse là est notre bien

le plus cher. (...)

Dans un pays, dans un village, quand il y a désaccord et désunion,

on court immanquablement au désastre. Voyez le Vietnam, le Cambodge,

et notre Laos !

En fondant une nation, on institue des principes spirituels, une

éthique, et une culture qui dictent les pensées, les actes, les

élans de coeur de chacun, jour après jour. Sans ces règles, sans

cette morale, sans cette culture, une nation ne peut qu'encourir

le mépris. Une nation qui n'a pas de règles est comme un homme

sans vêtement. (...)

Tous, nous connaissons l'amour et la jalousie. Tous, sans exception,

aimons notre père, notre mère. Lorsqu'on éprouve un amour sincère,

authentique, on doit être prêt à consentir des sacrifices pour

l'être qu'on aime et qu'on désire. (...)

Celui qui aime sa nation, qui aime le Bouddhisme, qui désire

l'indépendance de son pays, celui-là doit consentir aux trois

sacrifices suivants : savoir faire don de sa force physique, savoir

faire don de son intelligence, savoir faire don de ses biens

matériels. Celui qui est capable de cela fait la preuve d'un

amour vrai, authentique, pour sa nation".

Page 37: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

36

S'appuyant sur la morale bouddhique et les valeurs de la

société lao; cette homélie tente de réveiller le sentiment

patriotique et la solidarité chez les réfugiés déchirés par

l'histoire. Sans jamais prendre parti explicitement/ les moines

ont ainsi joué un rôle actif sur la scène politique pendant ces

années difficiles.

C'est parmi ces bonzes réfugiés des camps de Nongkhal et de

Ubon Ratchathani que les comités de.soutien au Bouddhisme créés

en France à partir des années 80 peuvent recruter les religieux

susceptibles de diriger des monastères. Mais les obstacles sont

nombreux et les projets ont parfois la plus grande peine à être

menés à leur terme.

La création de vat en France : une difficile entreprise

En 1982, une trentaine de Lao installés dans la région de

Metz, rejoints par ceux de toute l'Alsace, de Nancy, et même de

Belgique, font venir de Nongkaï un moine ayant une longue

expérience de la vie monastique au Laos, le vénérable Phombuangdi,

afin de fonder un vat à Borny, dans la banlieue de Metz. L'état

de santé de celui-ci, gravement dégradé par un séjour de six

années dans le camp thaïlandais, ne lui permet pas d'exercer

longtemps son rôle de chef du monastère. Hospitalisé longuement

à Nancy, il ¡naurt à Metz en mars 1983. Le bonze qui prend sa

succession à la tête du vat ne remplissant pas ses fonctions

comme le souhaiterait son comité de soutien, la pagode de Borny

Page 38: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

\

37

cesse de fonctionner au début de l'année 1984. (1)

Il n'existe actuellement/ pour l'ensemble de la France/ que quatre

monastères lao : trois en région parisienne/ celui de Villiers-le-

Bel/ anciennement à Gonesse, le plus ancien/ puis celui de

Choisy-le-Roi/ anciennement à Villeneuve-Saint-Georges/ et/ depuis

1984, celui de Saint-Leu-La Forêt ; en province, un bonze exerce

les fonctions monastiques à la périphérie de Caen, à Hérouville-

Saint-Clair. Une pagode dirigée par un moine d'origine thaïlandaise/

à Tournon, est fréquentée par des Lao installés dans le Sud de la

France/ mais surtout par des méditants européens. Deux nouvelles

pagodes pourraient s'implanter prochainement dans la banlieue

parisienne/ rattachées à celle de Choisy-le-Roi. (2)

D'autres projets sont en cours/ mais n'ont pu aboutir à ce jour.

A travers la fragilité de certaines expériences/ telle celle

de Borny/ se mesurent les difficultés rencontrées par les

bouddhistes lao dans la réorganisation de leur culte.

Pourtant/ le processus qui amène les réfugiés à tenter la

reconstitution de monastères dans l'exil semble bien de même nature

que celui qui conduisait/ dans la société d'origine/ à la création

d'une paroisse bouddhiste.

"Lorsque des cultivateurs} après avoir défriché un pan de forêt et

l'avoir ameubli en rizières, se trouvent former ainsi un hameau

suffisamment étoffé pour transformer leurs abris de rizières en

(1) Nous verrons dans la dernière partie de ce rapport les raisons de la fermeture de vat Borny.

(2) Ce sont là des projets très récents ; le chef de la pagode de Choisy envisage en effet l'acquisition de deux pavillons, l'un en proche banlieue Sud, l'autre à Marne-la-Vallée. Il n'en était pas question au moment de l'enquête menée pour cette étude.

Page 39: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

38

demeures fixes, leur premier souci sera, pour "animer" en quelque

sorte cette nouvelle collectivité, de créer un vat va.

Ce "monastère de forêt" permettra d'affirmer l'existence du groupe

de maisons en tant qu'unité sociale. Désormais, il ne s'agit plus

d'une agglomération d'immigrants et de pionniers, mais d'une

collectivité possédant un centre d'intérêt qui sera à la fois son

forum et son temple et qui, au yeux des étrangers, la représentera,

lui servira d'emblème et de symbole. Bref, cet ensemble de maisons

de défrichement, se détachant de son village d'origine, deviendra

une nouvelle paroisse". (1)

Cette longue citation de Georges Condominas décrivant la naissance

d'une paroisse bouddhiste en milieu lao traditionnel nous renvoie

au coeur de notre sujet ; dans la société rurale, dès qu'un groupe

est suffisamment établi sur le plan socio-économique pour former

une communauté en tant que telle, il se dote aussitôt de

l'institution qui vient sanctionner définitivement son existence,

le vat.

C'est bien ce processus qui, transposé dans la société

française, semble en oeuvre, lorsque des groupes de réfugiés

entreprennent la constitution d'un monastère.

Pourtant, la congrégation qui se forme ainsi paraît d'emblée

moins aisée à délimiter que dans la société d'origine. Car, si,

là-bas, le vat rassemble une population géographiquement et

socialement stable, il ne peut en être de même en situation

migratoire.

(1) Georges CONDOMINAS : "Notes sur le bouddhisme populaire en milieu rural lao", in Archives de sociologie des religions, N° 25, 1968, p. 91.

Page 40: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

39

/ L'unité villageoise lao n'a, en effet, rien à voir avec

I villes et banlieues françaises, et les frontières de la

en sont nécessairement autrement définies.

C'est à partir de l'histoire d'un de ces monastères de

banlieue, celui de Villiers-le-Bel, que nous voulons appréhender

cette réalité nouvelle.

Observant les origines, et la composition de l'association

responsable de la pagode, analysant les fonctions respectives de

ses membres, étudiant, enfin, le mouvement de population au sein

du monastère, nous pouvons en effet cerner les limites du

rayonnement d'un vat dans la société urbaine occidentale.

Du même coup, nous découvrons aussi les mécanismes, économiques,

sociaux, psychologiques, par lesquels se réalise une entreprise

communautaire visant la réorganisation du culte religieux.

les

paroisse

Page 41: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

40

3 . La paroisse lao en banlieue parisienne

Page 42: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

41

5 . Naissance du Vat Velouvanaram

Le Comité de Soutien du Bouddhisme et d'Action Socio-culturelle

lao (C.S.B.C.)

En 1976/ arrive en France un moine bouddhiste de grande

notoriété dans son pays, disciple du Patriarche du Laos/ (1)

le vénérable Maha Chanty. (2) Mal installé dans un petit studio,

au sixième étage d'un immeuble vétusté du 18ème arrondissement de

Paris, celui-ci commence rapidement à célébrer des cérémonies

religieuses pour de nombreux réfugiés lao. Il est alors l'unique

moine lao en région parisienne. Il lui devient vite difficile de

répondre aux besoins des bouddhistes lao, de plus en plus nombreux.

Une association se constitue alors pour soutenir son action.

Composée pour l'essentiel de phrania, mandarins ennoblis par le

souverain du Laos, déjà organisés sur le plan politique en un

Front National de Libération du Laos, elle est dénommée "Association

Bouddhiste Lao" (A.B.L.). Elle se charge de collecter des fonds

pour l'entretien du moine. Mais les problèmes matériels, liés à

l'exiguïté des lieux, dans le lSème arrondissement, et surtout

d'importantes dissenssions au sein de l'A.B.L. amènent le vénérable

Maha Chanty à émigrer aux Etats-Unis, en 1979.

A nouveau privé de religieux, les bouddhistes lao de Paris se

tournent alors vers la pagode khmère de Créteil, dirigée par le

vénérable Boukri.

(1) c€ p. 32 '

(2) Maha est, rappel^m-I-j, la titre réservé aux moines lsttréa. (voiF~cïï que nous avons dit de la hiérarchie du clergé tpuddhique p. 31.)

Page 43: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

42

Lao et Khmers/ comme les Siamois/ les Birmans et les Singhalais/

nous l'avons dit/ partagent la même religion, et leurs moines,

en France/ collaborent volontiers dans la célébration du culte.

La présence, à la pagode de Créteil, d'un prince de la province

de Champassak, au Sud du Laos, renforce encore ces liens. Le prince

Chao Saï entre en effet à la pagode de Créteil en mars 1980, pour

une retraite monastique à la suite du décès de son père. Il amène

de nombreux Lao à fréquenter ce monastère.

Toutefois, la nécessité d'un lieu de culte spécifiquement lao

se fait sentir chez les fidèles ; les plus âgés notamment, très

attachés aux valeurs religieuses, veulent disposer d'un vat

abritant des moines lao capables de leur apporter le soutien moral

dont ils ont le plus grand besoin.

Sous leur pression, des dissidents de l'A.B.L. décident la création

d'une nouvelle association, le Comité de Soutien du Bouddhisme et

d'Action Socio-culturelle Lao. (CS.B.C.).

Les objectifs en sont :

Article 1 :

•Il est fondé entre les adhérents aux présents statuts un Comité

régi par la loi du 1er juillet 1901 et le décret du 1er Août 1901,

donommé CS.B.C.

Article 2 :

Ce Comité a pour buts :

- de soutenir la communauté religieuse des moines bouddhistes,

Page 44: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

43

- de faciliter les activités de ces moines dans le culte et la

pratique du Bouddhisme,

- d'effectuer des publications et d'exercer les diverses activités

charitables selon les rites, la croyance et les coutumes lao en

France.

Ayant déposé ses statuts à la Préfecture du Val d'Oise/ le

4 février 1981 (1), le C.S.B.C. publié au Journal Officiel le

14 février rappelle alors le vénérable Mana Chanty/ afin de fonder,

sous sa direction/ la pagode de Gonesse, appelée vat Velouvanaram.

La première partie de l'article 7 du règlement intérieur précise

en effet :

"Le siège du C.S.B.C. est sis au N° 2 allée Rembrandt, 95500 Gonesse

Il porte le nom de vat Velouvanaram et sert provisoirement de

pagode, de lieu de résidence aux moines et à la pratique du culte.

Ce monastère est placé sous la responsabilité du C.S.B.C qui

s'occupe de son entretien".

En novembre 1981/ le sangha de Gonesse, composé de trois bonzes,

porte à la direction du vat le vénérable Mana Chanty (2).

Dans le même temps, un autre moine lao, le vénérable

Maha Thavan, arrive lui aussi en France. Il crée à son tour, avec

le soutien de la fraction restante de l'A.B.L., un autre monastère

lao, installé dans un premier temps à Villeneuve-Saint-Georges,

puis plus tard à Choisy-le-Roi.

(1) Le texte intégral des statuts du Comité, ainsi que de son règlement intérieur figurent en annexe p. 150, 151, 152 et 153.

(2) voir en annexe p. 157 1e document intitulé "Acte portant choix d'un supérieur du Sanoha lao au monastère Velouvanaram".

Page 45: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

ERRATUM

Le texte de la note (1)/ page 44, n'a pas été imprimé.

(1) le terme pâli Nikaya, signifiant "multitude/ assemblage, collection", désigne "le corpus canonique". Il a aussi le sens, comme ici, de "classe, ordre, groupe, secte, association, congrégation".

Page 46: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

44

En quelques mois/ les Lao, totalement inorganisés sur le plan

religieux jusqu'alors/ se dotent de deux monastères/ dont les

fondateurs et les orientations sont en opposition, reproduisant

ainsi l'antagonisme historique/ au Laos, de deux traditions/

Nikaya (1) dans le Bouddhisme Theravadin : la tradition Mahanikaya

dominante au Laos comme au Cambodge/ à laquelle se rattache le

sangha de Gonesse/ et la tradition Dhammayout/ d'introduction plus

récente dans ces pays/ et à laquelle appartient le vénérable

Maha Thavan.

La secte Dhammayout/ née en Thaïlande à l'initiative du

futur Rama IV, lorsqu'il était encore moine, en réaction à une

certaine dégradation de la conduite des moines au Siam/ fut

introduite au Laos vers 1890, dans le Sud du pays, par un moine

d'origine Kha qui avait longtemps vécu à la cour de Champassak.

Une grande partie de la province se rallia à ce courant. Mais il

s'est éteint par la suite, sous la pression des tenants de la

tradition Mahanikaya, pour ne se maintenir que dans la province de

Khong, au sud du pays.

Les divergences qui opposent ces deux traditions sur le plan

religieux portent essentiellement sur certaines règles de la

discipline monastique, bien difficiles, d'ailleurs, à discerner

pour un non bouddhiste ; les moines Mahanikava portent le bat

(bol à aumône), suspendu à l'épaule par une bretelle appelée yog,

tandis que les Dhammayout le portent à la main. La prononciation

du pâli diffère aussi, les Mahanikaya ayant conservé la phonétique

khmère datant de l'introduction du Bouddhisme.

Page 47: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

45

Ces dissemblances sont, on le voit, mineures ; pourtant/ les deux

traditions n'ont jamais pu coexister véritablement au Laos, pas

plus d'ailleurs qu'au Cambodge, alors qu'en Thaïlande, une

politique d'harmonisation est menée à l'instigation de la cour.

C'est qu'en réalité, l'opposition est d'ordre politique et renvoie

aux tensions historiques entre la Thaïlande et ses voisins. Les

moines Dhammavout qui, il est vrai, ont utilisé les rois de

Champassak, vassaux de ceux de Thaïlande, pour s'introduire au

Laos, sont perçus comme les instruments privilégiés d'une certaine

ingérence¡thaïlandaise dans la société lao. Accusés de s'appuyer

sur les autorités princières pour asseoir leur influence, ils sont

réputés soutenir les mandarins et les seigneurs, les moines

Mahanikava apparaissant, eux, plus proches des milieux populaires.

L'opposition entre les deux Nikaya est donc totalement mêlée à

l'hist oire de l'Eglise bouddhique qui, dans le cadre de la

féodalité classique, fut toujours étroitement liée au pouvoir

politique. Elle le fut d'ailleurs partout, et notamment au

berceau même du Bouddhisme, à Ceylan, où les détenteurs de

l'orthodoxie pactisaient aussi avec les autorités politiques.

Cette liaison constante dans la société traditionnelle lao,

entre pouvoir laïc et pouvoir religieux, semble donc se rétablir

dans l'exil. Les groupes de pression qui, en France, se chargent

de la création de monastères, recherchent l'appui des bonzes, dont

l'autorité incontestée auprès des fidèles leur assure une clientèle

politique.

Page 48: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

46

Avec l'A.B.L. d'un côté/ le C.S.B.C. de l'autre/ la

population lao immigrée de la région parisienne se trouve divisée.

Les deux associations entretiennent des relations de rivalité qui/

en réalité, concernent surtout leurs responsables.

Chacune/ en effet/ rassemble d'anciens hommes politiques/ militaires

hauts fonctionnaires et aristrocrates qui s'opposent aujourd'hui

sur les stratégies de reconquête du Laos et sont en relation avec

des mouvements de résistance agissant en Thaïlande/ dans les zones

limitrophes du Laos. Ce débat politique recoupe les clivages entre

clans qui marquent la politique laotienne avant les événements de

1975, puis après. Il sépare les politiciens entre courants adverses,

regroupés autour de personnalités proches/ d'un côté/ de la voie

neutraliste/ d'un autre, de représentants de la famille royale

de la province méridionale de Champassak/ d'un autre encore/ de

partisans plus marqués à gauche.

Il ne nous appartient pas, dans le cadre de cette étude, de

discuter le fond; de ce débat, pour deux raisons essentielles :

d'une part, il reste interne aux communautés réfugiées et n'a pas,

pour l'instant, d'incidences sur la scène française, si ce n'est

sous la forme d'éventuelles affinités avec certains partis

politiques français. D'autre part, et surtout, il n'intéresse

guère une majorité des Lao d'origines plus modestes, anciens petits

fonctionnaires, employés, cultivateurs, qui, au Laos déjà, s'en

tenaient à l'écart.

Page 49: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

47

La plupart des réfugiés savent, certes, à quelle tendance

se rattache chaque comité de soutien. Ils n'en tiennent pas

nécessairement compte dans leur propre fréquentation de l'un ou

l'autre monastère. D'autres critères semblent intervenir dans leur

choix, dictés par les contraintes du nouveau mode de vie et du

paysage urbain dans lequel ils s'inscrivent ici.

A Gonesse, par exemple, des bouddhistes lao, soucieux avant tout

du respect des valeurs religieuses, se rendent à la pagode pour

une célébration, sans se préoccuper de son appartenance à tel ou

tel Nikaya.

S'associant, par leurs dons et leurs actions, à l'entretien

du monastère, ils contribuent à en élargir l'aire d'influence

au-delà des limites habituelles d'une paroisse bouddhiste lao.

Celle-ci, stable et géographiquement délimitée dans la

société d'origine, comprend, en France, outre les adhérents de

son comité de soutien, de multiples fidèles venus d'horizons très

divers.

Pour cerner les contours de cette nouvelle paroisse, il nous

faut donc examiner tour à tour ces différentes catégories de

paroissiens que sont, d'une part, les membres du CS.B.C. et,

d'autre part, les fidèles plus épisodiques du vat Velouvanaram.

Page 50: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

48

6. Laire d'influence du Vat

Les membres du C.S.B.C.

On peut les considérer, globalement/ comme faisant partie de

la paroisse du vat Velouvanaram. Pourtant/ ils ne sont pas tous

impliqués de la même manière dans les activités de la pagode.

Les statuts du Comité/ dans l'article 5/ distinguent en effet

quatre sortes de membres :

"- les membres fondateurs sont ceux qui ont créé ou soutenu sans

réserve le comité aussi bien par leur apport d'aide matérielle

que morale".

Il s'agit essentiellement des quelques trente familles de Gonesse

et des environs qui sont à l'origine du Comité. La plupart sont

membres du conseil d'administration.

" - les membres d'honneur sont ceux qui ont rendu au Comité des

services eminent s".

Ce sont par exemple des personnalités Laotiennes ou Françaises

ayant participé aux démarches auprès des administrations pour

la création du C.S.R.C.

Page 51: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

49

- les membres actifs, notamment des personnes d'origine lao, sont

ceux qui paient les cotisations ou les droits d'entrée avec voix

deliberative à l'assemblée générale et d'une façon générale à

l'administration et à la direction du comité".

L'article 3 du règlement intérieur en précise la définition :

"On entend par membre actif toute personne ayant adopté le

Bouddhisme comme principale religion et qui, de façon constante

et régulière, apporte un soutien moral, matériel et financier aux

activités culturelles et manifestations religieuses organisées

par le CS.B.C.

C'est parmi ces derniers, notamment/ que s'organise un tour, trois

fois par semaine, pour assurer les repas des bonzes et l'entretien

matériel du vat.

" - les membres sympathisants sont des personnes qui désirent

témoigner à la communauté religieuse lao en France leur amitié et

leur encouragement à la bonne marche du comité".

Ce sont souvent des Français proches des milieux laotiens, qui

prodiguent conseils et aide aux responsables du comité.

Le Conseil d'administration du C.S.B.C est choisi parmi ces

différents membres. Il comprend un Président, deux Vices-Présidents,

un Secrétaire Général, deux Secrétaires Généraux adjoints, un

Trésorier, et un Trésorier adjoint.

Le Président du C.S.B.C. est un ancien haut fonctionnaire de

l'administration fiscale, de religion catholique. Présent lors de

toutes les célébrations importantes, il veille au bon déroulement

Page 52: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

50

des opérations sans jamais prendre part au culte lui-même.

La nomination d'un responsable non bouddhiste à la tête du C.S.B.C.

témoigne de la tolérance des Bouddhistes/ mais surtout de leur

capacité à évaluer les contraintes imposées par l'environnement

nouveau ; les membres du comité choisissent des personnalités bien

insérées dans la société française pour assurer efficacement

la gestion de la pagode- Le président du C.S.B.C. a une formation

de juriste et des accointances nombreuses en France/ qui facilitent

les démarches. Cette stratégie dénote une faculté d'adaptation

mais laisse aussi supposer que des enjeux, autres que religieux,

se jouent dans la réorganisation des pratiques religieuses en exil.

Nous aurons à y revenir.

Ainsi, la majorité des membres du C.S.B.C. se compose, on le voit,

de personnes d'origine lao, ayant exercé des responsabilités

importantes au Laos ; mais le présence d'étrangers, et particuliè­

rement de Français est aussi souhaitée. Elle est d'ailleurs

explicitement prévue par l'article 2 du règlement intérieur :

"Tout Lao né bouddhiste, touts personne d'ethnie ou de peuple

différent qui a su témoigner son profond attachement au Pays du

Million d'Eléphants et qui respecte et suit l'enseignement du

Bouddha peut adhérer librement au C.S.B.C. et en devenir membre

de plein droit".

Cette volonté d'ouverture doit permettre au C.S.B.C. d'accueillir

en son sein des non Lao, par exemple des personnes appartenant

à certaines ethnies minoritaires du Laos, mais aussi des Français

Page 53: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

51

susceptibles de faire la liaison entre la communauté lao et la

société globale/ et de garantir la crédibilité de son action.

Les membres du CS.B.C. constituent indéniablement

des paroissiens du. vat Veloùvariarar:. ... % '.l'-' ' "•

Participant de façon régulière à l'entretien de la pagode/ ils

font partie intégrante de la paroisse bouddhiste telle qu'elle se

définissait dans la société d'origine ; celle-ci englobait en effet

toutes les maisonnées donnant chaque jour l'aumône de nourriture

aux bonzes d'un vat. Pour les adhérents qui apportent leur

contribution/ en nature/ en argent/ en main d'oeuvre/ au monastère

de Gonesse, tout se passe presque comme autrefois/ à quelques

aménagements près. Les distances/ d'une banlieue à l'autre/ les

horaires du travail salarié/ les problèmes de voisinage, le climat

même/ ne permettent pas de faire l'offrande quotidienne de

nourriture aux bonzes et obligent à la mise en place d'un tour.

Le principe/ néanmoins/ reste très comparable à celui de la

tradition. Ces vieilles dames que leurs enfants viennent

accompagner en voiture/ plusieurs fois par semaine/ à la pagode/

où elles passent la journée en prières auprès des bonzes/ sont

bien de ces fidèles assidus pour qui la fréquentation régulière

du monastère est constitutive d'une certaine identité sociale.

Pour ces bouddhistes la., l'attachement au vat est de même nature

que le sentiment d'appartenance que suscitait la pagode dans

la société rurale lao.

Page 54: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

52

En effet/ bien entretenue, la pagode est le témoin de la

générosité de ses fidèles, elle est source de fierté, et symbole

du groupe ; aussi chacun déploie-t-il tout son zèle pour satisfaire

au mieux les besoins du sangha et donner de son vat la meilleure

image possible.

Un sentiment communautaire comparable à ce que nous appelons

"l'esprit de clocher" se développe ainsi autour du monastère,

entraînant aussi une certaine concurrence avec d'autres vat.

Les rivalités entre le C.S.B.C. et l'A.B.L. ne sont pas sans

rappeler les relations de compétition qu'entretenaient des

agglomérations voisines au Laos. Celles-ci sont un vestige du

modèle de relation sociale pré-bouddhique fondé sur le piep, la

"face", qui instaurait entre les individus et les groupes des

rapports de force et de lutte. Remplacé, avec l'avènement du

Bouddhisme, par la notion de mérite, il continue de sous-tendre

les rapports sociaux, faisant du prestige, lié au mérite, un

élément essentiel de l'identité individuelle et collective.

A Gonesse, le noyau des fidèles les plus constants ne ménage pas

ses efforts lorsque la réputation du vat est en cause. (1)

Nul doute que se manifeste là un sentiment d'appartenance à la

paroisse.

(1) Il n'est que de voir l'accueil extrêmement favorable qui fut toujours réservé à cette étude, susceptible, aux yeux des fidèles, de mettre en valeur les activités du vat.

Page 55: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

53

Pour les autres fidèles du vat/ ceux qui n'appartiennent

pas au C.S.B.C. et viennent/ de façon beaucoup plus irrégulière/

s'y acquitter de leurs obligations religieuses/ ce sentiment

d'appartenance est sans doute plus diffus.

Il s'exprime néanmoins par la participation ponctuelle à des

actions communautaires au profit du monastère.

Les nombreux Lao qui/ venus des différentes banlieues de

Paris ou de province/ s'associen.t _epls.odiquemen.t-.aux. activités

du monastère/ font/ eux aussi/ partie de la population paroissiale

du vat Velouvanaram.

Un brassage de fidèles

Un incessant va-et-vient se fait/ chaque jour/ à la pagode/

de réfugiés lao qui/ faute de disposer d'un lieu de culte a

proximité de chez eux, doivent se déplacer vers les seuls vat

existants pour pratiquer leur religion.

Celle-ci/ il est vrai/ est peu contraignante/ et les visites

au monastère peuvent s'espacer largement dans le temps.

"Il n'y a. pas de rites ou cérémonies extérieures qu'un Bouddhiste

soit obligé d'accomplir. Le Bouddhisme est une voie de vie > et ce

qui est essentiel, c'est de suivre le Noble Sentier Octuple",, écrit

Page 56: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

54

Walpola Rahula (1). Mettant davantage l'accent sur "voir"/

"comprendre"/ plutôt que sur la foi et la croyance/ la doctrine

bouddhique/ dhamma, l'essentiel du Bouddhisme/ doit être pratiquée/

perfectionnée par chacun..Aucun élément charismatique ou sacré

n'y est attaché et elle n'a guère à voir avec l'adoration. Dès lors,

pour le Bouddhiste, point d'office obligatoire/ point de prière

régulièrement imposée.

"On est son propre refuge, qui d'autre pourrait être le refuge ?"

enseigne le Bouddha. (2) Et c'est à chaque individu de fixer la

fréquence et la forme de sa piété religieuse.

Pour le Bouddhiste lao, nous l'avons vu, celle-ci prend toute sa

dimension dans la pratique de la charité/ hed boun.

Et la pagode constitue/ par excellence/ le lieu où accomplir les

actes méritoires. En se montrant généreux dans ses offrandes aux

bonzes, le Lao gagne des mérites et assure sa bonne réputation au

sein du groupe social. Sans cette structure communautaire qui lui

permet d'enrichir son karma/ il ne dispose que de peu de repères

pour s'identifier à sa religion.

Emigré dans une société occidentale où il est pour une grande

part livré à lui-même, aux prises avec des difficultés d'intégration,

où l'environnement, enfin, n'incite guère à la dévotion, il a fort

peu d'occasions de manifester sa piété dans son quotidien.

Dans l'incapacité de faire, chaque jour, l'aumône de nourriture

aux bonzes, il peut certes encore respecter certaines des préceptes

bouddhiques.

(1) Walpola RAHULA L'enseignement du Bouddha d'après les textes les plus anciens. 1961. Paris, Ed du Seuil.p. 111

(2) Dhp XII, 4.

Page 57: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

55

Il peut se reconnaître dans les cinq sila ("préceptes"),

"ne pas tuer"/ "ne pas voler"/ "ne pas commettre l'adultère",

"ne pas mentir"/ "ne pas s'enivrer". Mais l'exode a bousculé ses

structures familiales et sa manière de vivre. Le respect de ces

règles, avec lesquelles/ au Laos déjà/ il prenait certaines

libertés/ n'a plus ici guère de sens. Les familles sont dispersées/

des conflits éclatent entre parents et enfants/ entre amis/ des

couples de plus en plus nombreux se déchirent ou se séparent/ sous

la pression de la société ambiante qui propose des modèles et des

rôles nouveaux. L'interdit de l'adultère ou de l'alcool, que les

Lao ont eu tendance à enfreindre largement lors des fêtes profanes

par exemple, n'a plus ici beaucoup de poids, dans une société

perçue comme très libre/ de moeurs faciles. En outre/ les

préoccupations matérielles envahissent le quotidien et ne portent

pas à la spiritualité ou à la charité.

A l'intérieur de son foyer/ le réfugié lao peut encore/ seul

ou avec les membres de sa famille/ réciter chaque soir, avant le

coucher, la prière au Bouddha devant le petit autel érigé au-dessus

de son lit. Mais, là encore, le rythme de vie nouveau tend à lui

faire abandonner cette habitude. Si l'on trouve dans la quasi

totalité des appartements lao le petit autel dédié au Bouddha, et

parfois/ quoique plus rarement/ aux génies tutélaireS/ rares sont

les familles qui s'y recueillent de manière régulière.

Page 58: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

56

Hors du milieu ambiant qui, dans la société d'origine/ portait

l'ensemble du groupe social à accomplir/ chaque jour, le plus

naturellement, les gestes simples du rituel et de la prière, le

Lao se dispense progressivement de ces derniers. Il lui faut

désormais une occasion particulière, dans sa vie familiale ou

sociale, pour qu'il les effectue.

Il continue, ainsi, de marquer certains épisodes de la vie de

ses enfants par la célébration de rituels qui peuvent être

faits chez lui, sans la présence de bonzes ; les anniversaires du

jeune enfant sont une de ces circonstances.

De même, certains troubles, dans sa vie personnelle, l'amènent

aussi à invoquer le Bouddha et les divinités tutélaires héritées

de l'ancien culte des Phi. Par exemple , les insomnies ou les

terreurs nocturnes d'un bébé, souvent interprétées comme la marque

d'un mauvais génie, donnent lieu à ce type de'rituels.

Le plus couramment célébré est le sou khouan, l"appel des

âmes".

Cette cérémonie est un des vestiges des croyances animistes

intégrées au Bouddhisme. Rite propitiatoire, elle est destinée à

conjurer le mauvais sort qui pourrait résulter de la fuite de

certaines âmes hors du corps de l'individu. Rite de guérison,

elle est accomplie chaque fois que le maladie est attribuée à la

perte des âmes. Rite honorifique enfin, elle accroît le prestige

du bénéficiaire. Dans les occasions solennelles où elle est

célébrée en l'honneur d'une personne de notoriété, elle prend le

Page 59: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

57

plus savant de baci, que les refuges retiennent aujourd'hui

prioritairement.

Selon la croyance lao/ l'individu est doté de 32 "âmes vitales" (1)/

qui; chacune; appartiennent à une partie du corps; et peuvent à

tout moment s'en échapper; attirées par quelque force maléfique.

On prépare donc un plateau d'offrandes (pa khouan = "plateau" des

"âmes")/ destinées aux âmes dont on va faire le rappel. (2)

L'officiant, généralement un bonze défroqué/ s'adresse aux

divinités tutélaires afin d'obtenir le retour de toutes les âmes

vagabondes vers le bénéficiaire de la cérémonie. Celui-ci peut

être le nouveau-né à qui l'on souhaite longue vie et bonne santé,

le mère qui vient d'accoucher, le convalescent, le voyageur qui

s'en va ou qui revient....

Après les invocations aux génies; tous les participants se

souhaitent bonne chance en se passant au poignet un cordonnet

blanc, auparavant béni par les bonzes, et symbole de l'emprisonne­

ment des âmes. (3) .

(1) les ethnies thaï non bouddhisées attribuaient à l'être humain 120 âmes, 60 "âmes de la tête"; 60 "âmes du corps"; que les Lao ont réduites à 32 afin de les faire correspondre au nombre des organes du corps. Pour une étude complète sur ce sujet; voir Richard POTTIER, Le système de santé lao et ses possibilités de développement; Thèse de doctorat es Lettres. Univ. R. Descartes. Mars 1979. p. 765 (2) Le contenu des offrandes varie suivant l'importance de la cérémonie. Pour un grand baci, le plateau d'offrandes forme une pyramide; faite de coupes en argent. Pour un petit sou khouan, des cornets; wan ou souaï suffisent.

(3) Pour une description détaillée du rituel et du contenu des invocations; voir T. N. ABHAY; op. cit, p. 12 à 15.

Page 60: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

58

Ce- rituel peut être accompli aussi pour des animaux ou des-objets.

Car khouan désigne/ dans son sens large/ une force occulte

présente non seulement chez les êtres vivants/ mais aussi dans les

choses. (1)

On pratiquait ainsi/ dans la société rurale, l'appel des âmes pour

la charrette à boeufs, les pirogues/ les tambours de pagode/ les

instruments de musique/ etc....

Le baci/ rituel très spécifiquement lao, reste pratiqué par

les réfugiés/ non seulement pour toutes les circonstances

habituelles/ mais aussi en des occasions nouvelles qui découlent

de la vie en France. On organise un sou khouan pour l'ami ou le

parent qui vient d'obtenir l'asile dans notre pays, pour celui

qui part vers un nouveau pays tiers/ pour celui qui part en visite

aux Etats-Unis ou au Canada, pour celui qui vient d'obtenir un

emploi, pour la réussite à un examen, etc.... On l'accomplissait

même, ¿ans les premières années de l'exil, pour l'acquisition

d'une automobile ou d'un logement. Mais ces événements se sont

banalisés, et ne donnent plus lieu aujourd'hui au rituel.

A l'issue du baci, a toujours lieu une fête profane, au

cours de laquelle on chante, on danse, on mange ensemble.

L'organisation de ces réjouissances est une manière de "hed boun','

faire le bien.

Mais ces rituels et ces fêtes, largement empreints de restes

animistes, ne suffisent pas à l'enrichissement du karma.

L'offrande la plus génératrice de mérites, ne l'oublions pas, reste

celle destinée aux bonzes.

(1) Mous aurons l'occasion de revenir sur cette notion de khouan,

Page 61: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

59

En outre/ la présence de ces derniers est tout à fait

indispensable lors de certaines circonstances très précises : les

rites funéraires ou la bénédiction d'un mariage/ par exemple/

exigent leur intervention. Enfin/ les bonzes sont des guides

spirituels, des conseillers, dont les réfugiés ont le plus grand

besoin pour affronter les difficultés de la vie en exil.

C'est pour satisfaire ces exigences que le réfugié lao se

tourne vers les monastères constitués en France, permettant à

ces derniers d'étendre leur influence au-delà de ce que pouvaient

être les limites d'une paroisse bouddhiste dans la société

traditionnelle.

Sans tenir compte du rattachement du vat à tel ou tel

Nikaya, il a tendance à choisir celui qui rassemble des personnali­

tés prestigieuses ou connues de lui, ou, plus simplement encore/

celui qui est le plus facile d'accès pour lui.

Le monastère d'Hérouville Saint Clair/ dans la banlieue de Caen,

par exemple/ est fréquenté essentiellement par les Lao installés

dans le Calvados. Celui de Borny/ quand il fonctionnait, l'était

par ceux de l'Est de la France.

Toutefois, ce sont les deux pagodes de la région parisienne

qui connaissent la plus grande affluence.

De par sa position centrale sur la carte de France, mais surtout

parce qu'il fournit aux réfugiés disséminés sur notre territoire

de multiples prestations introuvables ailleurs, Paris constitue

un pôle de rassemblement régulier. On profite généralement d'un

Page 62: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

60

voyage à la capitale pour faire tout à la fois l'approvisionnement

en denrées alimentaires nécessaires à la cuisine asiatique/ dans

les commerces spécialisés des 13ème/ 18ème ou 20ème arrondissements/

pour y rencontrer les parents et les amis, pour y effectuer, enfin/

une visite aux moines.

Les Lao de province se regroupent pour se rendre ensemble à Paris,

une fois par mois, par exemple/ et y acheter/ en grosses quantités/

les sacs de riz/ le nam pla (1)/ les piments et légumes indispensa­

bles à la préparation de certains plats. Ils saisissent cette

occasion pour se rendre au vat et y recevoir la bénédiction des

bonzes, avant de se retrouver entre amis pour "faire la fête".

Cette organisation/ calquée sur le modèle de solidarité et

de gestion collective qu'ils connaissaient au village/ au Laos/

bénéficie pleinement aux deux monastères de la région parisienne/

ainsi fréquentés par des groupes venus de toutes les régions de

France.

Le vat Velouvanaram voit en 1981, de nombreux Lao se rallier

à un projet communautaire à son profit, qui va lui permettre de

venir s'installer à Villiers-le-Bel.

(1) saumure de poisson d'un usage très fréquent dans les préparations culinaires des Lao.

Page 63: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

61

L'investissement communautaire au profit de la pagode

Très vite à l'étroit dans l'appartement de Gonesse, le

sangha doit envisager, dès le courant de l'année 1981, d'agrandir

le lieu du culte. Une propriété de 430 m2 est trouvée à Villiers-le-

Bel, pour laquelle, en décembre 1981, est signée une promesse de

vente et effectué un premier versement de 50 000 F. (1)

Le montant global de la propriété étant de 500 000 F, le C.S.B.C.

lance un appel de fonds auprès des bouddhistes lao pour réunir la

somme nécessaire à l'achat définitif.

La collecte des fonds a lieu le 7 février 1982, lors de la

célébration d'une importante fête du calendrier bouddhique,

le Boun Makha Bouxa, qui commémore le premier grand concile des

moines bouddhistes en Inde, près de Rajagrha, en 500 ac. (2)

La cérémonie se déroule dans un restaurant scolaire de Gonesse

loué par le C.S.B.C. afin d'accueillir la foule des fidèles.

Cinq moines sont présents ce jour-là, le supérieur du monastère,

et ses deux bonzes, ainsi que deux moines khmers. Participe aussi

à la célébration un pho khao, dévot ayant pris l'habit monastique. (3 )

(1) Voir en annexe les photocopies des documents concernant ces opérations.

(2) Ce concile réunit 1250 disciples de Bouddha, qui les accepta dans sa communauté religieuse, leur remit les règles du Canon pâli et leur prédit sa mort.

(3)Les pho khao ("pères" "blancs") et meh khao ("mères" "blanches") sont des dévots qui, pour gagner des mérites, prennent l'habit monastique, blanc pour eux, et non pas ocre jaune comme celui des bonzes. Ces hommes et ces femmes, le plus souvent vers la fin de leur vie, s'engagent, lors de la prise de voeux, à suivre 8 des règles du Dhamma. (Les novices doivent en suivre 10 et les bonzes 227) .

Page 64: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

62

Du côté des fidèles/ sont là, arrivés par groupes , dans des

voitures bondées où s'entassent les adultes, les vieillards/ les

enfants, des Lao de toutes les banlieues Nord et Nord Est de Paris :

Gonesse biensûr, mais aussi Sarcelles, Saint-Denis, Aulnay-sous-Bois

Bondy, Chelles, Lagny, Melun. Ils sont rejoints par les "provinciaux!'

de Montereau, Reims, Limoges, Bourges....

C'est pendant la quête des bonzes, vers onze heures, qu'a

lieu la collecte des fonds. Outre les aumônes habituelles faites

aux moines, nourriture, vêtements, savon, cigarettes, et autres

biens nécessaires à leur entretien, on offre ce jour-là des sommes

d'argent qui seront utilisées à l'achat du pavillon de Villiers-le-

Bel. Deux cent mille francs sont réunis en quelques heures, avec

des dons spectaculaires pouvant; atteindre 10 000 F pour une seule

personne ! Les noms des donataires et le montant de leurs offrandes

sont annoncés par microphone à l'assemblée, qui peut ainsi mesurer

la générosité des participants ! (1)

Grâce à cet appel de fonds, venu s'ajouter au capital dont

disposait déjà le C.S.B.C. sous forme de droits d'adhésion réglés

par ses membres, l'achat comptant du pavillon, 8 avenue des

Charmettes, à Villiers-le-Bel est réalisé dans le courant de

l'année 1982. Le vat Velouvanaram peut être transféré là-bas,

continuant d'ailleurs d'être appelé par ses fidèles "vat Gonesse".

(1) un avait là à faire à ce que Georges CONDOMINAS appelle des "dons ostentatoires" à propos des dons ayant pour objet l'extension de la communauté ou l'accroissement du nombre de ses membres, ou l'élévation en grade de certains d'entre eux, ou encore la création d'un nouveau monastère. OD. cit p. 115.

Page 65: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

63

Ceux-ci se réfèrent en effet davantage à ce qui fut le noyau

premier de la paroisse/ celui des fondateurs du C.S.B.C. qu'au

lieu d'installation de la pagode.

"Vat Gonesse", pourtant/ rassemble/ on le voit/ une foule de

Lao géographiquement éclatés, capables de se mobiliser pour une

action communautaire au profit du monastère bouddhique/ comme ils

l'auraient fait/ dans le cadre du village/ dans la société

d'origine.

Comme là-bas, les motivations religieuses qui poussent à cet

engagement sont très étroitement mêlées au système de valeurs

sociales.

En faisant pour la pagode des dépenses parfois somptuaires/ le

réfugié lao s'acquitte/ à la manière du paroissien d'un vat

traditionnel/"de 1'obligation.du don prescrite par la morale

bouddhique. En même temps/ il en retire un prestige (piep) accru,

et très important pour lui, car, s'intégrant dans une société de

consommation/ il accorde une part grandissante aux signes

extérieurs de richesse. Sa générosité à 1' égard du monastère

témoigne de son adaptation réussie/ ce qui constitue, en soi/ une

valeur positive.

Le bouddhiste lao tient en effet le bien-être économique pour une •

condition du bonheur, et y voit la preuve d'une conduite méritoire.

Page 66: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

64

Au Laos déjà/ avec la diffusion de modèles de comportement

d'origine urbaine et étrangère (thaïlandaise en particulier), le

piep était fortement lié à la possession de certains biens très

appréciés/ tels que l'automobile. En France/ le Lao est d'autant

plus sensible à ces consommations prestigieuses qu'elles lui sont

désormais plus facilement accessibles. Etre possesseur d'une

maison individuelle ou d'un appartement/ d'une voiture de grosse

cylindrée, c'est manifester sa capacité d'intégration dans la

société française.

Le réfugié pourrait être tenté de privilégier ces consommations

individuelles au détriment des dépenses destinées à la collectivité/

telles les dons au monastère. Ces dernières gardent pourtant leur

place dans le budget des familles/ sans doute parce qu'elles

répondent à un double besoin : permettant d'afficher aux yeux de

tous une certaine réussite matérielle/ elles satisfont le sens de

la face/ tout en opérant une redistribution des richesses, à

travers laquelle c'est l'unité du groupe ethnique qui s'affirme.

Issus d'une société fortement hiérarchisée/ les Lao n'accordent

pas une valeur première à l'égalité/ mais savent/ par

l'intermédiaire de structures communautaires aussi fortes que

la pagode, corriger certaines disparités et rétablir la cohésion

du groupe social.

En participant au financement des activités des bonzes en France,

activités qui, nous allons le voir, débordent largement le cadre

strictement religieux, les réfugiés lao restituent au groupe

Page 67: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

65

ethnique démantelé par l'exil une communauté de croyance/ de

pensée/ indispensable à son équilibre.

Par là même/ ils donnent à voir à la société qui les accueille

la spécificité de leur culture/ leur capacité d'organisation/ et

leur dynamique.

Peut-être cette dernière dimension devient-elle même/ pour

certaines catégories de Lao au moins/ la raison première de leur

adhésion au projet du C.S.B.C. Pensons au président du comité/

qui/ catholique pratiquant/ consacre une part énorme de son temps

à la réorganisation d'un culte religieux dont il ne se réclame pas.

C'est que; au-delà des préoccupations religieuses/ se joue,

dans la création puis l'entretien d'un monastère, l'affirmation

d'une identité. Celle-ci explique le ralliement multiple des

réfugiés vers cette structure capable de répondre à leurs

aspirations religieuses tout en leur fournissant une unité

d'appartenance.

La paroisse bouddhiste lao apparaît désormais comme une nébuleuse,

reflet de la dispersion des Lao dans le paysage urbain français.

Rompant avec la stabilité qu'elle avait dans la société d'origine,

elle se conforme au cadre de vie nouveau, et s'adapte à des

besoins nouveaux.

L'observation du fonctionnement interne de la pagode, et des

activités qui s'y déroulent doit maintenant nous permettre d'aller

plus avant dans l'analyse des transformations que doivent subir

les pratiques religieuses des Lao pour se maintenir en France.

Page 68: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

66

4 . Le monastère reconstitué: continuité et rupture

Page 69: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

67

7. Vie quotidienne

L'espace

A cinq minutes de la gare SNCF/ adjacente à la rue commerçante

de Villiers-le-Bel, l'avenue des Charmettes est calme/ bordée de

jardins et de petits pavillons.

Au N° 8, une maison de taille moyenne, avec sa façade blanche et

ses persiennes closes ; c'est, insoupçonnable et insoupçonné, le

vat Velouvanaram. On est loin des superbes constructions de l'Asie,

et pourtant, cette petite propriété, jadis habitée par une famille

française, abrite aujourd'hui.le culte bouddhiste lao et sa

communauté monastique.

Entourée d'un jardinet à l'avant et d'une longue bande de

terrain à l'arrière, l'habitation est tout à fait caractéristique

des pavillons de nos banlieues, dans son aspect extérieur, comme

dans son agencement intérieur : au sous-sol, une buanderie, une

chaufferie, une cave ; au rez-de-chaussée, une entrée, une cuisine,

une salle de bains, des toilettes, une chambre, une salle de

séjour ; à l'étage, un palier, une chambre mansardée, un grenier.

Une telle distribution de l'espace intérieur ne pouvait être

conservée par le sangha, tenu au respect de certaines normes, dont

celle, essentielle, de la séparation entre aire du culte et aire

profane.

Un vat est en effet normalement situé sur un vaste terrain et

réparti en plusieurs bâtiments indépendants : l'un pour le logement

Page 70: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

68

des religieux, un autre pour le sanctuaire, un autre enfin pour

la sala, sorte d'édifice public servant d'entrepôt, d'hébergement

pour les visiteurs, de salle de réunion et de salle à manger pour

les bonzes.

Contraints à une unité de lieu inhabituelle, les bonzes de

Villiers-le-Bel ont dû faire effectuer quelques travaux afin de

respecter les règles de la vie monastique.

L'ancien sous-sol du pavillon est aujourd'hui transformé en une

sala ; 1 ' ex-buanderie est maintenant un entrepôt pour le matériel

nécessaire au fonctionnement du monastère et les provisions des

bonzes. La chaufferie est devenue une cuisine où sont,préparés les

repas des bonzes. La cave est aménagée en salle à manger, salle de

réunion pour le conseil d'administration du C.S.B.C. et de réception

pour les gens de passage. (C'est là que se sont déroulés la plupart

des entretiens avec les religieux et les fidèles, durant l'enquête).

Le sous-sol du pavillon, qui possède un accès direct sur le jardin,

est ainsi réservé' aux affaires matérielles du vat, au monde profane,

tandis que le rez-de-chaussée constitue le lieu du culte.

Ce qui était une salle de séjour est transformé en sim, le

sanctuaire, au fond duquel est érigée une grande statue du Bouddha.,

entourée d'autres, plus petites, et de multiples offrandes, de

fleurs, de bougies en cire d'abeille, de bâtons d'encens. Les volets

en sont toujours fermés, et la pièce est totalement dénudée, à

l'exception de l'autel, et, détail insolite dans ce décor, d'un

téléphone....

Page 71: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

69

C'est là que se déroulent les célébrations religieuses et la

réception des fidèles. Ceux-ci accèdent directement au sim par la

porte d'entrée du pavillon/ et l'on peut voir; sur le perron/ les

multiples paires de chaussures que l'on retire avant d'y pénétrer...

Les religieux sont logés dans la chambre du rez-de-chaussée et à

l'étage. Eux qui/ au Laos/ pouvaient se retirer dans les petites

constructions individuelles sur pilotis; koutdi/ qui leur étaient

réservées/ dans l'enceinte du monastère/ pour s'adonner à l'étude

ou à la méditation, ont ici beaucoup de difficultés à s'isoler.

L'exiguïté des lieux et l'impossibilité de disposer d'un logement

tout à fait séparé du reste du vat les obligent à se mêler

davantage à ses affaires matérielles.

En outre, l'énorme et très diverse demande des fidèles est une

sollicitation permanente/ qui les amène à modifier quelque peu

leurs rythmes et leurs activités au sein du monastère.

Le temps

Dans le Bouddhisme Theravadin/ "les devoirs des moines qui

vivent dans les villes et les villages sont doubles ; ils doivent

passer une partie de leur temps à étudier et à méditer} pour leur

propre développement intellectuel et spirituel. Ils doivent d'autre

part enseigner les enfants qui viennent étudier au monastère,

Page 72: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

70

s'occuper des besoins religieux des laïcs et entretenir le

monastère, prononcer des sermons régulièrement à la congrégation

qui s'assemble certains jours, ainsi que donner des conseils et

des instructions religieux aux individus et aux groupes, régler

les cérémonies religieuses, organiser des associations pour le

bien-être social, etc.." (1)

Sont là résumées par Walpola RAHULA les principales attributions

des moines. Celles-ci rythment leur vie de chaque jour au

monastère.

A Villiers-le-Bel/ les moines voient certaines de ces fonctions

prendre une importance particulière/ tandis que d'autres sont

réduites. Les règles de la discipline monastique y sont aussi

bousculées.

S'efforçant de respecter le vinhaya, (la discipline monastique)/

ils doivent répondre à la demande de leurs fidèles et sont souvent

contraints de modifier certaines de leurs activités.

Levés/ en période normale/ vers cinq heures le matin/ ils s'adonnent,

seuls dans leur chambre, à la méditation/ à la prière et à l'étude

des textes/ jusqu'à sept heures environ/ temps de leur premier

repas. La matinée est ensuite consacrée à la méditation encore et

à l'étude de l'enseignement du Bouddha.

Veillant à ne pas gêner leur voisinage, ils ont abondonné certaines

des techniques de méditation ; celles qui consistent, en pays

lao, dans les vat pa, les pagodes de forêt, en une marche

(1) Walpola RAHULA, op. cit. p. 108

Page 73: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

71

ininterrompue de plusieurs heures/ sur un même parcours/ sont

en particulier abandonnées. Les prières sont aussi plus discrètes/

évitant la psalmodie qui risquerait d'attirer l'attention alentour.

Avant midi/ comme le veut la tradition/ les bonzes prennent leur

deuxième et dernier repas de la journée. L'après-midi est alors

réservé à la réception des fidèles. Et les bonzes devront attendre

le départ/ souvent tardif/ des derniers visiteurs/ pour pratiquer

à nouveau la méditation avant de se coucher.

Il est rare que cet emploi du temps soit tout à-fait respecté

au vat Velouvanaram.

L'incessant va-et-vient perturbe en général le déroulement normal

de la journée. Certaines situations d'urgence amènent parfois les

bonzes à recevoir en toute hâte un fidèle en difficulté qui vient

demander une intervention ou une aide. Interrompant alors sa

méditation matinale/ le bonze doit réfléchir avec l'intéressé à la

manière de régler un conflit avec un employeur/ de faire rentrer

au foyer un conjoint en fugue, de solutionner un problème de carte

de réfugié/ etc...

Sollicité par des fidèles souvent en détresse/ il doit aujourd'hui

s'engager dans le monde extérieur bien davantage qu'il ne le

faisait dans la pagode de village/ au Laos. Lui qui/ dans la

tradition bouddhique/ doit se tenir à l'écart de toutes contingences

matérielles/ et laisser aux laïcs le soin de régler les affaires

d'intendance, est ici contraint de faire face à ces problèmes.

Page 74: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

72

Bien que l'essentiel de son entretien soit assuré par les fidèles/

il est davantage mêlé à la vie matérielle courante«.fdu vat.

Des familles de Gonesse/ de Saint-Denis/ d'Aulnay-sous-Bois/

viennent, chaque jour, en alternance, préparer et servir les repas

du sangha.

A tour de rôle encore, des femmes et des hommes viennent faire le

ménage, la lessive et le jardinage. Ils sont aidés par un homme

d'une cinquantaine d'années qui, sans famille en France, est

hébergé de manière permanente avenue des Charmettes et fait office

de salavat, sorte de marguillier et sacristain chargé de l'entretien

du vat.

Mais la promiscuité à laquelle oblige l'exiguïté des lieux et

l'incapacité de certains fidèles, qui ne parlent pas le Français,

à prendre des initiatives, amènent les bonzes à prendre eux-mêmes

en charge la bonne marche matérielle du monastère ; ils répondent

le plus souvent eux-mêmes au téléphone, qui sonne sans arrêt, ils

décident des achats nécessaires, etc..

Ainsi le sangha, et son chef surtout, prend de plus en plus

de responsabilités en matière de gestion du vat. C'est lui, en

particulier, qui décide, avec le C.S.B.C., de l'utilisation des

fonds recueillis sous la forme de dons auprès des fidèles. Le choix

de certains investissements, en matériel, en accessoires nécessaires

au culte, se décide en conseil d'administration, avec sa participa­

tion. Ceci suppose qu'il se préoccupe de questions d'argent qui

normalement devraient lui échapper totalement.

Page 75: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

73

Afin de préserver/ dans ce domaine/ un minimum de la règle

bouddhique/ les bonzes ont fait modifier l'article 7 des statuts

du CS.B.C. concernant les conditions d'adhésion. Celui-ci

prévoyait de soumettre celle-ci au "paiement de droits d'entrée

ou de cotisations fixées par l'Assemblée générale" et à la

"souscription volontaire et formelle de fournir des cotisations

annuelles ou des subventions quelconques au Comité".

Les moines/ appuyés par les plus fervents des fidèles de Gonesse,

considérèrent qu'il y avait là une entrave aux règles bouddhiques

et que l'adhésion des membres devait prendre la forme de dons au

vat et à sa communauté monastique/ par conséquent laissés à la

discrétion des fidèles.

L'article 3 du règlement intérieur prévoit donc désormais :

"Par dérogation aux articles 5 et 7 des statuts du CS.B.C.,

l'admission d'un membre n'est pas impérativement soumise au

paiement de droits d'entrée ou de cotisations ; le C.S.B.C. s'en

remet à la discrétion de l'intéressé".

Bel exercice d'acrobatie/ qui permet de concilier les impératifs

français et lao : le C.S.B.C, association loi 1901/ s'assure des

rentrées d'argent régulières ; la morale bouddhique est sauve, et

les fidèles peuvent gagner des mérites en fournissant des dons à

la pagode !

Se transformant/ dans certains cas, en de véritables hommes

d'affaires, brassant des problèmes techniques/ administratifs,

Page 76: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

74

juridiques/ financiers qui leur sont normalement étrangers, les

moines voient une partie de leur quotidien au vat accaparée par

des préoccupations matérielles.

Pourtant, parallèlement à celles-ci, ils doivent s'acquitter

de leurs fonctions de clercs, et notamment de celle qui constitue

la principale, celle d'officiers du culte.

Page 77: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

75

8. La réorganisation des fonctions monastiques:

La célébration du culte

Le culte bouddhiste comprend/ traditionnellement/ la

célébration de cérémonies fixées par le calendrier bouddhique/

d'une part/ celles de la vie familiale et sociale des Lao d'autre

part.

La vie en France oblige parfois à en modifier la fréquence et les

dates.

. les fêtes du calendrier bouddhique

L'année bouddhique est ponctuée de nombreuses fêtes/ que les

conditions de vie en France ne permettent pas de toutes célébrer.

Le travail salarié et les distances réduisent la disponibilité des

Lao. Ne sont par conséquent maintenues que les plus importantes

des grandes fêtes bouddhiques/ dont les dates/ déterminées par les

bonzes eux-mêmes/ sont couvent en léger décalage par rapport au

calendrier bouddhique. Elles sont toujours célébrées en fin de

semaine/ pour permettre à tous de venir y assister.

Les bonzes procèdent généralement entre eux, au vat/ à la

célébration de la fête à sa date réelle, et une deuxième fois,

pour leurs fidèles/ à une date leur convenant davantage. (1)

(1) Voir en annexe p. 165 photocopies d'invitations envoyées par le C.S.B.C. aux Lao pour ces fêtes.

Page 78: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

76

L'année bouddhique débute avec le Nouvel An/ Pi May, fête à

la fois religieuse et profane; comprenant des rites de purification

au cours desquels on lave à grandes eaux les statues du Bouddha,

dans les maisons et les pagodes. Les fidèles doivent aussi

s'asperger abondamment/ ce qui donne lieu, au Laos,, à des scènes

de rue colorées et d'une grande gaieté I De telles pratiques sont

bien.sûr ici abandonnées, et la nouvelle année est célébrée de

manière plus discrète/ autour de la statue du Bouddha/ au cours du

mois d'avril. Pi May est très largement fêté par toutes les

associations lao qui/ en dehors de la cérémonie religieuse/

organisent des. réjouissances profanes/ avec spectacles de danse/

de musique/ bal/ etc..

Aussitôt après/ à la pleine lune du 6ème mois, a lieu la

grande fête commemorative de la naissance, l'illumination et la

mort du Bouddha, dans le courant du mois de mai, à Gonesse.

En juillet/ c'est l'entrée du carême' bouddhique (1) qui

enjoint aux bonzes de ne plus quitter leur monastère durant trois

mois, règle fort difficile à respecter en France, tant les

obligations extérieures sont nombreuses !...

Au mois d'août, c'est la fête des morts, et en septembre,

l'offrande du 9ème mois.

La sortie du carême est célébrée en octobre, et en novembre,

les fidèles de "vat Gonesse" font l'offrande de Kan thin, au cours

de laquelle on fait don aux bonzes des pièces d'étoffe servant à

leur habillement.

(1) le carême bouddhique débute le 15ème jour de la lune croissante du 8ème mois pour prendre fin le 15ème jour de la lune croissante du Heme.

Page 79: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

77

Ces fêtes sont l'occasion de grands rassemblements qui ne

peuvent avoir lieu au monastère lui-même/ trop petit. Le sanqha

doit donc/ situation tout à fait nouvelle, se déplacer vers un

local capable d'accueillir la foule des fidèles. Le C.S.B.C. loue

parfois la pagode de Vincennes/ et, le plus souvent, nous l'avons

déjà vu, un restaurant scolaire, à Gonesse, qu'il prépare, la veille

de la cérémonie, à recevoir le culte. Le matin même de la

célébration, une statue de Bouddha et les accessoires nécessaires

au culte sont amenés par les bonzes sur place.

Le sangha de Villiers-le-Bel et le C.S.B.C. envisagent d'élever

sur le terrain situé à l'arrière du pavillon de l'avenue des

Charmettes un bâtiment permettant de recevoir une assistance

nombreuse pour célébrer les grandes fêtes. Mais la crainte de

gêner le voisinage et l'hypothétique obtention du permis de

construire ont, jusqu'à ce jour, retardé la réalisation de ce

projet.

Au cours de ces grandes cérémonies, les moines prononcent des

sermons qui sont, biensûr, une exaltation des vertus bouddhiques

mais aussi un moyen de diffusion d'informations pour les différentes

communautés présentes. Des bonzes en provenance d'autres pagodes,

en France et dans d'autres pays d'accueil, hôtes de passage au

"vat Gonesse" , assistent à ces célébrations et font aussi circuler

les nouvelles de la diaspora lao à travers le monde.

Ces homélies sont aussi le moyen, pour le chef du vat Velouvanaram,

de faire pour ses fidèles un bilan de ce qu'ils vivent aujourd'hui

en France et de leur rappeler leurs devoirs conformément à la

règle bouddhique.

Page 80: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

/ 78

En 1984, par exemple, lors du boun Mackha Bouxa, le

vénérable maha Chanty s'adresse en ces termes à l'assemblée

présente :

"Aujourd'hui est le jour de Mackha Bouxa. C'est le jour le plus

important de l'ère bouddhique. C'est le jour où Bouddha a offert

une grande oraison à ses disciples et ses fidèles. Il y avait là

1250 disciples. (...) (1)

Nous, Bouddhistes, croyons en Mackha Bouxa. Tous les ans, nous

devons faire une grande réunion pour célébrer cet événement.

Dans le Pattimokka, (2)Bouddha parle souvent des règles de vie des

bonzes. (... )

Quand on prend le Dhamma, il faut de la tolérance, pour que la

vie collective soit possible.. Cest là la base de notre religion.

Il nous faut pratiquer la tolérance, la patience, pour atteindre

la libération, comme le Bouddha. Il faut surtout éviter le mépris,

la mésentente et la haine. Dans la vie de tous les jours, il faut

respecter les cinq sila : ne pas tuer, ne pas voler, ne pas

commettre l'adultère, ne pas mentir, ne pas s'enivrer.

Il ne faut pas consommer plus que de mesure, il faut éviter le

superflu et savoir se contenter du nécessaire.

Dans leur vie quotidienne, les fidèles ne doivent pas vivre au-

dessus de leurs moyens, pour que les fins de mois ne soient pas

trop difficiles. Si l'on ne prend garde à ses dépenses, alors on

tombe dans la misère et on ne peut plus compter sur personne.

(1) suit un passage rappelant ">i l'assistance la signification ce cette célélv/ation.

{?.) n':t Pratimoksa ; texte fondamental dans la discipline bouddhique qui comprend la liste des prescriptions disciplinaires et des sanctions aux manquements.

Page 81: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

79

Dans la maison, là où l'on mange, là où l'on dort, il faut que

tout soit propre, et bien en ordre ; sans hygiène, on se ruine

la santé.

Dans la vie de famille, il ne faut pas prendre seul les décisions.

Il faut être au moins deux, et consulter une autre personne de

la famille. Si un couple veut avoir un enfant, il faut que l'homme

et la femme décident ensemble. Et quand l'enfant est né, il faut

encore que tous deux ensemble ils l'éduquent. Il faut surtout que

les parents montrent la bonne voie à leurs enfants. Il faut faire

le boun, être généreux, pour que les enfants, plus tard, fassent

de même.

C'est ainsi encore dans la vie communautaire ; tout le monde se

dit patriote, mais l'esprit patriotique, c'est d'abord au sein

de la famille qu'il faut l'exprimer. Dans un groupe, on doit

savoir être tolérant à l'égard des autres, éviter les disputes.

Celui qui se comporte ainsi peut alors avec fierté se dire patriote"

Après avoir retracé les origines et la signification du boun

Mackha Bouxa, le vénérable rappelle à l'assemblée les devoirs des

fidèles, consignés dans le Pattimokka. La tolérance, vertu

première dans le Bouddhisme, et tout à fait remarquable dans

l'histoire des religions, et l'observance des sila, sont les

principales obligations des laïcs. Elles doivent trouver leur

application dans le quotidien. Le bonze reprend donc, un à un, les

domaines de la vie familiale et sociale des Lao en France, afin de

les exhorter à respecter ces règles et à corriger certains de leurs

défauts.

Page 82: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

80

Il dresse/ du même coup, implicitement/ un bilan plutôt négatif

de leur intégration. Lui qui connaît parfaitement/ pour être le

confident de nombreux fidèles/ les difficultés actuelles des

réfugiés/ tente de recentrer ces derniers/ grâce à l'évocation des

valeurs bouddhiques.

La soif de consommation/ pourtant contraire à la règle du

détachement/ entraîne/ chez beaucoup/ des dépenses excessives et

une gestion parfois catastrophique de leur budget. Ils sont souvent

dans l'incapacité de redresser seuls la situation/ mais ne peuvent

plus/ aujourd'hui/ compter sur les mécanismes de solidarité

traditionnels. Ceux-ci se basaient sur le principe de la réciprocité

que la société française ne favorise nullement. Avec le recours

au système d'assistanat français, les Lao sont de plus en plus

individualistes, et ne trouvent plus, à l'intérieur du groupe

ethnique, les structures institutionnelles permettant d'organiser

l'échange de dons et de services. Lorsqu'une famille lao est en

difficulté, elle devient vite assistée, perdant la face aux yeux

de tous et discréditant l'ensemble du groupe ethnique.

La tenue du foyer et l'organisation de la vie familiale sont une

autre des difficultés rencontrées par les réfugiés. Des mères de

famille, sollicitées à l'extérieur du foyer par une activité

salariée, par le modèle occidental de la femme "libérée"/ ne

s'acquittent plus toujours de leurs obligations domestiques.

Des hommes soumis à un rythme de vie rapide auquel ils ne sont pas

Page 83: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

81

habitués, négligent leur famille. Le jeu, pratique très ancrée

dans les moeurs lao, ou l'excès d'alcool, sont parfois source

de conflits familiaux et d'importants problèmes matériels. (1)

Un certain laisser-aller dans la gestion des affaires familiales

s'installe, qui désorganise complètement l'équilibre des rôles.

La société lao reconnaît la complémentarité des sexes et des

classes d'âge. L'individu, au sein de la famille nucléaire, et plus

largement dans sa párentele, jouit d'une certaine autonomie sans

être jamais isolé ni écarté de l'exercice des responsabilités.

Ici, en France, le noyau père-mère-enfants, coupé de sa párentele,

est déstabilisé par les multiples pressions de la société

environnante. Les enfants, tôt scolarisés, maîtrisent la langue

française et les règles sociales beaucoup plus sûrement que leurs

aînés ; ils savent donc résoudre nombre de problèmes plus

efficacement qu'eux. L'autorité parentale souffre de cette mise

en infériorité, qui entraîne souvent des comportements de démission,

laissant les enfants livrés à eux-mêmes. C'est pourquoi le

vénérable rappelle le devoir du couple dans l'éducation des jeunes.

Le dernier passage de son sermon est une allusion très

directe aux incessants différends qui éclatent dans des groupes

informels ou organisés et qui réduisent à néant toute tentative

d'action communautaire efficace.

(1) Il arrive que des hommes ou des femmes perdent des sommes d'argent considérables au jeu ; on voit par exemple des salaires à peine perçus dilapidés en quelques heures autour d'une table de jeu....

Page 84: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

82

Les conflits se soldent presque toujours par la dissolution ou

l'éclatement en factions adverses, suivant un schéma très

traditionnel chez les Lao.

Dans la gestion des affaires collectives, en effet, dans la

société rurale, toute prise de décision supposait un consensus.

Quand celui-ci ne pouvait être atteint, il fallait l'arbitrage des

anciens et des bonzes. Si, finalement, la conciliation n'aboutissait

pas, il y avait alors scission.

Ce processus se reproduit ici, très largement amplifié par

l'absence d'arbitres. Les vieillards, trop peu nombreux, ne sont

plus aptes à évaluer les situations nouvelles et à prodiguer les

conseils pertinents. Les bonzes, trop rares, n'ont pas la

disponibilité suffisante pour être à l'écoute de tous.

Dès lors, faute de mécanismes de régulation interne, c'est un peu

la loi de la jungle qui prend le dessus parmi les groupes lao,

divisés par des querelles intestines, des inimitiés de clans,

des intérêts antagonistes. Cela nuit profondément, rappelle Mana

Chanty, à l'esprit patriotique dont se réclament précisément de

nombreux Lao qui s'opposent, le plus souvent, sur des questions

de politique laotienne.

Dans un tel sermon, le bonze s'efforce donc d'aider

l'assistance à prendre conscience de ces problèmes et à les

résoudre avec le secours de la foi religieuse.

Page 85: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

83

Pour les laïcs, la contribution à la fête, bien qu'elle ne

soit nullement obligatoire, est bien entendu génératrice de

mérites. Aussi la plupart des familles s'arrangent-elles pour

assister, au moins une fois dans l'année, à l'une de ces grandes

célébrations du calendrier bouddhique.

Les jeunes eux-mêmes, dont la ferveur religieuse, pourtant, tend

à diminuer, viennent à ces rassemblements. Ils sont pour'eux

l'occasion de retrouver des compatriotes, de rencontrer ceux de

leur classe d'âge, conjoints possibles, de se tenir, enfin, au

courant des nouvelles de la communauté et d'établir des contacts

utiles pour l'obtention d'un emploi, d'un logement, d'une aide

quelconque... Parfois poussés, aussi, par leurs aînés, à fréquenter

la pagode, ils gardent par là une certaine proximité avec leur

religion et leur culture.

La participation au culte joue pour tous ces fidèles un rôle

d'intégration ; occasionnant des retrouvailles, elle favorise le

développement d'échanges, affectifs, matrimoniaux, économiques,

et dynamise le sentiment d'appartenance au groupe.

Mais, plus encore que ces grandes fêtes annuelles, les

cérémonies familiales gardent une grande vigueur dans la vie des

réfugiés.

. Les cérémonies privées

Celles-ci occupent une large part dans les activités des

moines, les amenant à se rendre de foyer en foyer pour bénir un

nouveau-né, célébrer des funérailles, etc.. Car les familles lao

s'adressent au sanana pour tous ces événements importants.

Page 86: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

84

Le mariage/ cérémonie civile chez les Bouddhistes, exige, par

exemple, pour être tout à fait réussi, l'intervention des moines.

Traditionnellement, on se marie au Laos les mois pairs : 2ème,

4ème et 12ème mois, et surtout le 6ème mois, le plus faste,

puisqu'il est celui du boun Bang Faî, la fête "des fusées", rite

de fécondité se déroulant avant la venue des pluies. On évite

généralement la période entre le 8ème et le 12ème mois, consacrée

aux travaux des champs et marquée par le carême bouddhique.

En France, on tente de respecter cette coutume, et l'on consulte

généralement le bonze pour fixer avec lui la date la plus

favorable et lui demander de venir bénir les fiancés.

La tradition veut que, la veille du mariage, ceux-ci soient réunis

par un fil de coton à un chapitre de bonzes, qui bénissent l'eau

dont ils seront aspergés le lendemain. Après avoir offert un

repas aux moines, les fiancés reçoivent leur bénédiction.

Celle-ci, appelée souat mon lot nam yen, continue de consacrer

l'union de nombreux jeunes mariés en France.

Elle est suivie d'un sou khouan qui clôt la cérémonie du mariage.

Si les jeunes Lao qui se marient aujourd'hui ici négligent la

tradition de la dot (kha dong, payée par le futur époux à la

famille de la jeune fille), s'ils refusent presque toujours

l'intervention d'entremetteurs, chargés autrefois des négociations

entre les familles, préférant, à la manière française, faire eux-

mêmes le choix de leur mariage, ils restent par contre très attachés

Page 87: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

85

à la bénédiction des bonzes ; celle-ci est une sorte de garant de

la réussite du couple Í S'en dispenser risquerait de porter

malheur et ferait/ en outre/ perdre la face !

De la même manière/ s'il n'existe pas, dans le Bouddhisme,

de cérémonie comparable au baptême chrétien/ il est toujours de

bon augure de faire bénir l'enfant qui vient de naître par les

bonzes. Afin de le protéger contre tout danger/ on lui remet un

bijou/ petite chaîne ou bracelet/ sur lequel sont inscrits quelques

signes en pâli. On profite généralement de l'occasion pour faire

ensuite un sou khouan, suivi de réjouissances.

Il arrive que certains parents, les plus dévots, consultent

les religieux pour le nom à donner à leur enfant.

Ceux-ci savent, en principe, faire correspondre les conjonctions

des astres, le jour et l'heure de la naissance avec les lettres et

les syllabes. Lorsque des parents, sur l'avis des bonzes, savent

leur enfant en situation de fragilité, ils lui donnent un nom

"fort", du type Singh, le "lion". Si au contraire, sa conjonction

astrale est favorable, on lui attribue un nom à résonance plus

douce.

Le prénom tient en effet une place privilégiée chez les Lao et

c'est pourquoi il convient de bien le choisir.

L'état civil ne fut institué au Laos qu'en 1943, (par un arrêté

du gouverneur général de l'Indochine), et l'usage du nom de famille

ne fut rendu obligatoire qu'à cette date.

Page 88: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

86

Jusqu'alors/ le nom patronymique n'existait pas, et les appellations

étaient limitées. On s'appelait/ par exemple/ Deng (qui signifie

"Rouge") ou Dam ("Noir"), ou Singh (le "lion"). Plusieurs personnes

pouvaient avoir le même nom. Pour distinguer entre les individus,

on ajoutait au nom d'une personne celui de son enfant ou de son

conjoint : Deng, père de Singh, par exemple. On utilisait aussi

le titre qui indiquait l'origine et le rang social : Chao

désignait les princes et les nobles, Thao les mandarins, Naï les

gens de basse extraction. On pouvait, enfin, comme nous l'avons vu,

faire précéder le nom du grade acquis à la pagode. (1)

Cette coutume s'est maintenue jusqu'à nos jours, et les réfugiés

accordent toujours assez peu d'importance, au moins lorsqu'ils-sont

entre eux, au nom de famille, considérant les noms de personnes

comme la véritable appellation.

Ils donnent à leurs enfants des prénoms lao pour la plupart, et

demandent parfois l'avis des bonzes. Certains prennent aussi le

conseil de membres de la parenté restés au Laos, moyen symbolique

de restituer une certaine réalité à des liens familiaux perdus.

La majorité des petits réfugiés nés en France s'appellent Orassa,

Anuloï, Konesavane, etc..

Certains d'entre eux se voient attribués des prénoms français,

choisis parmi les plus classiques, ils s'appellent alors Jacques,

ou Pierre. D'autres encore reçoivent deux prénoms : l'un, français,

(1) cf p. 33

Page 89: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

87

pour l'école/ l'autre, lao, pour la maison. D'autres, enfin,

ont des noms capables de s'harmoniser tant avec la sonorité lao

qu'avec celle du Français ; les parents forgent alors des prénoms

qui, disent-ils, "passent bien à l'école et partout en France,

dans les administrations, etc.. et ne choqueront pas s'ils

retournent au Laos un jour".

Tous ces enfants de la seconde génération, en tous cas,

quelque soit leur nom, sont le plus souvent accueillis en ce bas

monde par la bénédiction des bonzes.

A l'autre extrémité de la vie, ces derniers ont encore un

grand rôle à jouer.

Les rites funéraires n'ont chez les Lao rien à voir avec ceux de

l'Occident chrétien. Mourir pour un Lao, c'est entrer dans une vie

nouvelle et meilleure, c'est un événement heureux, que l'on

celé bre dans la liesse. (1)

Mais il demande, dans la tradition, de longs rites qu'il n'est

pas possible ici d'accomplir.

Alors qu'il faudrait pouvoir.veiller le mort pendant sept jours

avant de procéder aux cérémonies de crémation qui, elles, durent

six jours et six nuits, les règles en vigueur en France ne

permettent plus de telles pratiques.

Néanmoins, l'essentiel du rituel se maintient pour ceux qui

meurent en sol français ; car, sans de bonnes funérailles,

sanctionnées par la présence des moines bouddhistes, le mort

risquerait de rester hanter les vivants.

(1) la maison où l'on veille le mort, au Laos, est d'ailleurs appelée huan di : la "maison" "heureuse".

Page 90: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

88

Autrefois/ les Lao distinguaient entre la mort naturelle/ qu'ils

considéraient comme une "bonne" mort/ et la mort violente/ qu'ils

voyaient comme une "mauvaise" mort/ à laquelle on refusait la

crémation. Cette discrimination s'était perdue au Laos ces dernières

décennies ; elle n'est plus du tout prise en compte en France.

Le Lao qui meurt ici/ fut-il un accidenté de la route/ a droit

à tous les hommages de sa famille et de sa communauté ethnique.

Les membres de sa parenté installés ici/ rejoints parfois par ceux

qui sont exilés aux Etats-Unis ou au Canada/ se réunissent autour

de sa dépouille et font appel aux .bonzes, pour qu'ils viennent

prier autour de son cerceuil :

"Mortj o mort, poursuis ta destinée ! Cours au Niphane (1) ou va

naître en une vie meilleure. Ne reste pas hanter les demeures et

les vivants (...).. Ceux que tu laisses se rendent compte de ton

bonheur dans ta libération. Ils attendent patiemment, gaiement}

leur tour. Tu ne leur manques pas. Ils sont heureux sans toi.

Poursuis ta destinée !"

La veuve et les enfants du défunt ne peuvent plus/ comme le voulait

la coutume, se vêtir de blanc et se raser le crâne. Seuls les plus

âgés des réfugiés, ceux qui, n'ayant pas d'activité professionnelle

par exemple, vivent repliés sur leur communauté ethnique, peuvent

aujourd'hui continuer cette tradition.

(1) Niphane désigne le "paradis" auquel peuvent prétendre les bouddhistes laïcs. Le Nirvana est l'état suprême atteint par les sages.

Page 91: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

89

Le mort est généralement incinéré/ dans un colombarium/ en

présence de ses parents et amis/ et ses cendres sont ensuite

déposées dans un cimetière. De nombreux Lao souhaiteraient voir

les ossements de leurs défunts conservés/ selon la tradition/ à

la pagode. Mais le supérieur de Villiers-le-Bel est obligé de

refuser j.es demandes/ le vat n'ayant pas la capacité de recevoir

les cendres de tous les Lao décédés dans la région parisienne.

Cent jours après le décès/ on procède à une fête commemorative/

le boun than ha (fête d'aumône à l'intention de...)/ au cours de

laquelle la famille fait don à la pagode d'un équipement de bonze.

Une cérémonie particulière/ enfin/ est célébrée par les réfugiés

en l'honneur des parents décédés' en terre natale. Ce rite funéraire

était accompli lors des décès des guerriers morts sur le champ de

bataille/ par exemple. Il a lieu à Villiers-le-Bel/ en présence

des bonzes et des parents du défunt.

Chargés de la célébration de ces importants événements

familiaux/ les bonzes ont un agenda extrêmement chargé/ qui oblige

les fidèles à fixer longtemps à l'avance la date des cérémonies

qu'ils souhaitent les voir honorer.

Les bonzes voyagent énormément à travers la France entière.

Véhiculés par leurs fidèles le plus souvent, ils se déplacent aussi

en train ou en avion, lorsque leurs obligations les appellent

hors de France. Le supérieur de "vat Gonesse" entretient des

relations étroites avec des communautés lao réfugiées en Australie

Page 92: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

90

au Canada/ aux Etats-Unis, où il a fondé un monastère en 1980.

Appelé pour arbitrer un conflit entre groupes rivaux, il y

participe surtout a l'organisation de la communauté ethnique, et

rend des services religieux aux Lao qui n'ont pu trouver de chefs

religieux.

Les bonzes sont aussi invités à certaines rencontres inter­

confessionnelles, en France et en Europe, et jouent aujourd'hui

un rôle public entraînant, lui aussi, de nombreux déplacements et

de longues absences hors du monastère.

Ces voyages perturbent leurs activités religieuses et

sociales. Désorganisant leur emploi du temps, ils obligent les

moines à réduire leur temps de prière et ù: étude :

"Nous avons beaucoup de mal à trouver le recueillement nécessaire

à l'étude de l'enseignement du Bouddha, certains jours. Nous

sommes tout le temps dérangés¡ et cela nuit au Vinaya. Mais

comment faire ? Nous ne pouvons pas refuser d'aider les fidèles

qui viennent nous voir", disent-ils.

Leurs absences laissent les fidèles parfois très désemparés.

Car leur demande est forte, et dépasse très largement le cadre

strictement religieux.

Page 93: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

91

\

La multi-pie demande ' des" fidèles \

, Les bonzes continuent d'exercer/ pour la congrégation réunie

autour de "vat Gonesse", le rôle de conseiller/ de guide/

d'éducateur/ de devin/ voire de guérisseur/ que lui confiait déjà

la société rurale lao.

Mais ces fonctions doivent s'ajuster aux situations que vivent

aujourd'hui leurs fidèles.

Ceux-ci/ surtout lorsqu'ils sont isolés en France/ se

tournent vers leurs religieux pour solutionner toutes leurs

difficultés/ matérielles aussi bien que morales ou affectives.

Privés du soutien des anciens/ qui/ dans la société lao/ jouissent

du plus grand respect/ des réfugiés sans famille n'ont le plus

souvent que le seul recours aux bonzes pour trouver l'appui moral

qui leur fait tant défaut. Et leur demande est multiple !

On sollicite l'aide du bonze/ nous l'avons vu, pour remplir

un imprimé de sécurité sociale ! Mais on vient aussi lui soumettre

des problèmes très personnels/ qui le plongent dans la vie privée

et sociale des laïcs.

On recherche/ par exemple/ son arbitrage, dans les conflits entre

parents ou amis/ entre membres d'un samakhorti/ non sans lui avoir

largement exposé toutes les données du différend. Le bonze doit

alors émettre son avis sur les torts de chaque partie/ et proposer

une conciliation/ sans que l'une ou l'autre ne perde la face....

Page 94: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

92

On vient aussi l'interroger sur le bien-fondé d'un départ

vers un nouveau pays tiers.

"Je n'ai ici aucune famille, vénérable ; je ne trouve pas de

travail ; je voudrais partir rejoindre mon ami aux Etats-Unis."

Le moine doit alors mettre son interlocuteur en garde contre les

difficultés et les risques de déception qu'il encourt.

Si/ finalement/ il approuve le projet/ on lui demande alors de

consulter les astres afin de fixer la date du départ/ et de bénir

le futur voyageur.

Une autre fois, c'est une épouse délaissée qui vient exposer

ses problèmes conjugaux. Après l'avoir écoutée/ le bonze doit la-,

conseiller et souvent consacrer un talisman qui ne la quittera

plus, en prononçant quelques formules sacrées qui parviendront

peut-être à ramener le conjoint infidèle....

Les bonzes sont en effet les détenteurs de ces katha/ formules

magiques/ qu'ils apprennent des recueils sur feuilles de latanier

dans lesquelles elles sont consignées/ ou dont ils ont la révélation

au cours de leurs méditations.

Le vénérable Chao Sal/ qui s'adonne aux techniques de concentration

fondées sur la répétition de mantra et la fixation de points

visuels/ dit entendre des sutta ( skt sutra = discours/ sermon/

texte), au bout d'un certain temps de travail sur lui-même.

"C'est une sorte de voiz intérieure, dit-il , qui monte en moi

et me fait prononcer, sans que je le contrôle, des sutta dans la

langue du Bouddha."

Page 95: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

93

•Il peut ensuite les mémoriser pour en faire usage/ lors de certains

rituels/ ou les transmettre/ sous une forme simplifiée/ à se fidèles..

Ceux-ci/ y compris les jeunes/ sont encore très convaincus

du pouvoir de ces katha/ tout comme ils restent confiants dans les

vertus de certaines pratiques empiriques.

Si l'utilisation des plantes médicinales/ qu'il est presque^/'

toujours impossible de se procurer en France/ tend à disparaître/

certaines techniques thérapeutiques traditionnelles ont encore

cours parmi les réfugiés.

La survivance de certaines pratiques empiriques

L'usage des philtres d'amour/ par exemple/ qu'une vieille

dame confectionne toujours, à Dijon, est fréquent parmi les jeunes

gens qui trouvent difficilement à se marier.

Un médecin acupuncteur lao installé dans la banlieue de Lyon connaît

pour sa part la formule de 1'elixir de longue vie, composé, dit-il/

de haricots rouges et noirs/ de corne de rhinocéros et de diverses

plantes que l'on peut trouver dans certains commerces asiatiques...

Les bonzes ont toujours été associés à ces pratiques

empiriques. Car c'est généralement à la pagode, où sont conservés,

dans les bailan, écrits anciens, les recueils de recettes/ que

le mo ya ( "maître"-ès-"médicaments") s'initie à la connaissance

des simples. Aussi beaucoup de bonzes (ou d'anciens bonzes)

çnt-il^ une formation d'herbalistes.

Page 96: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

94

Le vénérable Mana Chanty est de ceux-là.

Il lui arrive/ à Villiers-le-Bel, de prodiguer ses conseils pour

quelque malaise bénin. Mais il reconnaît avoir beaucoup oublié :

"Il fallait procéder à des rites avant la collecte des plantes.

Je ne me souviens plus aujourd'hui du contenu des invocations.

Après quoi, on pouvait s'enfoncer dans la forêt pour rechercher

les racines, les feuilles, les lichens. Je ne saurais plus en

reconnaître beaucoup, car il faut en voir énormément, et pratiquer

sans cesse la manipulation de toutes ces plantes pour être un

bon mo va. De toute façon, je crois qu'il est préférable, pour

nos fidèles, d'utiliser la médecine occidentale, car nous ne

trouvons pas ici ce qui est nécessaire à la préparation de la

médecine traditionnelle".

Ces pratiques empiriques ne sont jamais la seule thérapie

utilisée par les réfugiés. Loin de négliger la médecine occidentale/

ils tendraient/ au contraire, à faire une surconsommation de

certains produits pharmaceutiques, tels que l'aspirine ou ses

dérivés.

Mais il leur arrive très fréquemment de se protéger doublement, si

l'on peut dire/ contre la maladie, en associant aux soins médicaux

que leur propose la société française des pratiques mágico- -

religieuses nécessitant l'intervention des bonzes.

Page 97: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

95

9. Bouddhisme et magie

Le malheur comme la maladie continuent/ pour nombre de Lao,

d'être liés à l'idée du karma, à laquelle se mêle la croyance dans

les Phi/ les génies.

Ils sont interprétés comme la sanction d'actes mauvais, et la

marque d'une force malfaisante qu'il faut neutraliser.

C'est là l'objet du sou khouan, que l'on peut faire dans un but

thérapeutique, en présence du mo phone, le "maître"-ès-"voeux. (1)

C'est aussi le sens de certains rituels de protection effectués par

les bonzes, au cours desquels se transmettent les katha.

C'est, enfin, la fonction des guérisseurs qui, nombreux et

spécialisés au Laos, manquent aujourd'hui en France, obligeant

les moines bouddhistes à se substituer parfois à eux.

(1) le mo phone, (appelé achan (du skt acara, le "maître",) dans la région de Vientiane, ou pham, dans le Sud du Laos), est un laïc qui, ayant séjourné à la pagode, est spécialisé dans la lecture des prières et invocations en pâli lors des cérémonies.

Page 98: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

96

Il existe/ en effet/ dans la société rurale, plusieurs types

de guérisseurs/ tous des "magiciens"/ le plus souvent passés,

quand ils sont des hommes, par la pagode.

Outre le mo ya, 1'herbaliste/ on trouve l'astrologue, mo ke kho,

("maître" "ôter" "mauvais sort"), l'exorciste, mo pao mon ("maître",

"souffler" "mantra"), le shaman, mo mon ("maître" "mantra"), enfin

le rebouteux, mo soui.

D'autres personnages peuvent intervenir, qui ne sont pas de

véritables guérisseurs : les mediums, masculins, mo thiem, ou

féminins, les plus nombreux, nang thiem, qui incarnent les esprits

protecteurs des territoires.

Ces différents spécialistes, formés par des aînés et

consacrés par un rituel initiatique, ont, dans la société lao, un

rôle complémentaire de celui des bonzes.

Le shamanisme, lié structurellement à une certaine conception de

l'univers, qui a su s'harmoniser avec le Bouddhisme, vise à

rétablir la liaison rompue entre le ciel et la terre.

Dans la mythologie lao, le ciel et la terre communiquaient aux

débuts des temps puis furent séparés. (1) L'accès au ciel fut alors

interdit aux humains, à l'exception du shaman qui, semblable aux

premiers hommes, peut encore y aller. Lui seul connaît le chemin

de la terre au ciel et peut, par le rituel, rétablir le contact

avec l'au-delà-

(1) Pour une étude détaillée des mythes lao, voir Richard POTTIER, op. cit.

Page 99: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

97

Cette croyance/ qui appartient au substrat culturel thaï/

mêlé d'influences chinoises et mon khmères/ est plus forte chez

les ethnies non bouddhisées que chez les autres ; ces dernières

pourtant/ et les Lao en particulier, ne l'ont jamais tout à fait

perdue.

Et bien qu'amoindrie encore par l'exil/ elle donne lieu, parmi

certains réfugiés, ceux qui vivaient dans les régions les moins

urbanisées au Laos, à des célébrations de type magico-religieux.

Les rituels magico-religieux

Des Lao du Sud, installés actuellement en Seine-et-Marne,

procèdent, chaque année, au rituel d'invocation des génies

célestes, en présence d'une mo phi fa ("maître"ès-"génie" du "ciel")

originaire de la province de Paksé.

Cette femme, accompagnée par un mo khene (maître -ès-khène) (1)/

joueur d'orgue-à-bouche qui lui donne le rythme, effectue une

danse au cours de laquelle elle entre en relation avec ses génies

auxiliaires pour guider les âmes dans l'au-delà ou aller

rechercher les âmes errantes. (2)

(1) les musiciens reçoivent le titre de mo_, parce que, comme les divers guérisseurs, ils sont initiés et considérés comme doués de "pouvoirs".

(2) les rites shamaniques et mediumniques de guérison sont en fait très proches des rites d'appel des âmes.

Page 100: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

98

Mais de tels mo sont fort rares en France/ et les bonzes sont

ici appelés à accomplir/ non sans réticence/ des rituels

autrefois réservés à ces spécialistes.

Le vénérable Chao Saï/ qui bénéficie auprès de ses fidèles/

d'une double "aura"/ puisqu'il est à la fois prince et bonze/

se voit ainsi sollicité pour traiter les maux les plus troubles...

Cette dame âgée; qui se dit envoûtée depuis plus d'un mois/

souffre de symptômes mal définissables qu'elle lui demande de

guérir en procédant à la récitation de formules magiques.

Monsieur Vong/ lui/ connaît des maux de tête, des vertiges/

des malaises qui finissent par lui provoquer une syncope.

Hospitalisé pendant une semaine/ il se sent encore très faible à

son retour chez lui. Il vient consulter les bonzes de "vat Gonesse",

accompagné de son épouse.

Reçu deux fois par le vénérable maha Chanty/ les jours précédents,

c'est avec le vénérable Chao Saï qu'il s'entretient aujourd'hui,

après avoir préparé, aidé de Madame Vong/ les petits cornets, kaï,

qu'il souhaite donner en offrandes.

Page 101: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

99

Monsieur Vorig :

"Après mon hospitalisation, quand je suis revenu à la maison, je

me sentais encore malade. Tous les jours, entre huit heures du

matin et trois heures de l'après-midi, puis à nouveau le soir,

de vingt heures à une heure du matin, j'aillais très mal. Je sentais

comme un poids sur moi. Même pendant mon sommeil, je sentais que

ça n'aillait pas. Je n'ai pas de fièvre, mais j'ai sans arrêt des

chauds et froids."

Le bonze :

"Est-ce que vos membres sont paralysés ?"

Monsieur Vong : n

Non, mais je me sens trop chaud ou trop froid".

Madame Vong :

"Je voudrais que nous fassionsune offrande, vénérable.

Monsieur Vong :

"Moi aussi, je pense qu'il faut faire une offrande. Si je suis

devenu comme cela, je sens que c'est à cause d'un phi qui est

entré dans notre famille. Je crois que c'est un phi qui vient de

la famille de ma femme. Je voudrais faire une offrande pour ce phi.

Le bonze :

"Je veux bien faire cette cérémonie. Je vais demander qu'on

m'apporte un verre d'eau. Je vais vous donner des katha. Mais tous

les soirs il faut que vous priiez avec ces katha. Et je ne suis

pas sûr que vous soyez guéri. Je ne peux pas vous le promettre.

Page 102: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

100

Monsieur Vong :

"Hier et avant-hier, j'ai déjà fait une cérémonie avec un uerre

d'eau. Et le vénérable a craché l'eau en soufflant sur mon visage.

Je me suis senti beaucoup mieux. J'ai eu l'impression qu'une âme

était sortie de ma tête".

Le rituel commence alors.

Le bonze tient une petite bougie de cire allumée à la main gauche;

dans l'autre, il a le livret dans lequel il a consigné des sutta

qui lui furent révélés lors d'une de ses méditations.

Monsieur Vong est assis au sol ; debout derrière lui/ à sa gauche,

le moine récite les sutta. Puis il s'interrompt, introduit la

flamme du petit cierge dans sa bouche, puis souffle sur le malade.

Il reprend ensuite sa psalmodie, se plaçant cette fois à la droite

de Monsieur Vong.

Il renouvelle l'opération plusieurs fois, tandis que Madame Vong

reste assise, recueillie, auprès de son époux.

Après environ dix minutes, le rituel s'achève.

Le bonze :

"Est-ce que vous sentez du frais ?"

Monsieur Vong :

"Oui, c'est vrai. Mais j'ai aussi senti une âme sortir en spirale,

par deux fois."

Il s'avance vers le moine pour lui remettre un cornet d'offrande

contenant de l'argent. Celui-ci refuse.

Page 103: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

101

Monsieur Vong :

"Cela m'a fait beaucoup de bien."

Le bonze :

"Si vous le voulez, on peut faire une cérémonie encore pour que

vous soyez complètement guéri. Cela peut provenir de Phi au Laos

qui hantent votre famille.

Peut-être est-ce parce que vous et votre famille ne prenez pas

suffisamment soin des Phi. C'est pourquoi ils continuent de

hanter votre .famille."

Monsieur Vong :

"Oui, au Laos, nous avions un ho phi, il) et, bi en sûr, ici,

il n'y en a plus. Tout seul, je ne sais comment il faut faire. Je

ne sais pas faire les cérémonies pour le phi. C'est pour cela que

je ne m'en occupe plus ici."

Le bonze bénit alors l'eau contenue dans le verre qu'on lui

a apporté, après y avoir éteint le petit cierge de cire d'abeille.

Pendant que Monsieur Vong boit cette eau, le moine récite des

prières en pâli.

Le bonze :

"Est-ce que vous vous sentez léger ?"

Monsieur Vong :

"Oui, je me sens bien, léger, à l'aise".

(1) autel dédié aux génies.

Page 104: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

102

Le bonze :

"C'est pavee que tout le monde a quitté le pays, les Phi n'ont

plus de demeure. Chaque famille a ses Phi, et quand on est tous

partis, ils restent sans abri."

Madame Vonq :

"Oui, je comprends bien. Les Phi, ce sont nos ancêtres, nos

parents,, qui cherchent leurs enfants, leurs petits-enfants."

Monsieur Vonq :

"Je me sens bien maintenant parce que c'est la troisième séance.

La première fois, j'ai senti de la fumée qui .sortait en spirales

de ma tête. Je la voyais. Cette fois-ci, j'ai vu deux ou trois

spirales de fumée noire qui sortaient de mon front, de la

commissure des yeux. Cette fois je sens que c'est fini. Il n'y a

plus rien qui sort de moi. "

Le bonze :

"Je vous conseille de ne pas trop vous soucier de tous ces Phi,

de cette fumée. Parce que sinon, ils peuvent revenir vous hanter.

Maintenant il faut oublier tout cela."

Madame Vonq :

"Quand nous étions au Laos, une fois, mon mari s'est senti mal ;

il se grattait partout, il a fait une crise terrible. On a fait

venir un mo phi pour chasser le mal. Il a promis aux Phi de leur

faire des offrandes. Je suis presque sûre que c'était ma mère qui

était revenue. Après la cérémonie, mon mari s'est senti très bien".

Page 105: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

103

Monsieur Vong :

"A la même époque, mon fils, qui avait cinq ans, se promenait dans

la rizière quand il a été attaqué par des insectes. IL 'est revenu

en pleurant parce que ces bêtes s'étaient introduites dans ses

narines. On n'arrivait pas à les en retirer. On attrapait leurs

pattes, mais leurs corps restaient dans les narines, et le gamin

saignait du nez. On a fait venir un mo_, qui a dit que c'était ma

mère qui était venue le hanter. Nous avons fait le boun et mon fils

a guéri.

Cela doit vous paraître incroyable, mais c'est vrai. On n'arrivait

pas à enlever les insectes. Et après le boun, ils sont partis

tous seuls. Plus aucune trace dans les narines de mon fils.

Le bonze :

"Oui, cela me paraît très étonnant. Mais je vous crois."

Monsieur Vonq :

"Comme je viens de vous le dire, c'est le phi qui me hante. Je

voudrais bien ne pas m'en préoccuper, mais je ne peux pas faire

autrement.

Avant que je quitte le pays, il ne se passait pas une année sans

que je fasse une cérémonie dédiée aux Phi. Et tous les deux ans,

on faisait le sacrifice du buffle. Cela durait sept jours, avec

tout le village".

Page 106: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

104

Dans ce qui vient de se -passer/ et malgré les précautions

prises par le bonze/ la tradition bouddhiste a quelque peu "dérapé".

Certes/ l'influence du Bouddhisme sur les pratiques thérapeutiques

s'est souvent traduite/ dans la société d'origine, par une

intervention directe des bonzes.

Ceux-ci peuvent/ nous l'avons vu, prescrire, gratuitement/ des

remèdes. Ils peuvent bénir/ en récitant des formules auspicieuses/

les fils de coton servant au sou khouan. Ils consacrent l'eau

lustrale utilisée pour conjurer le mauvais sort. C'est ainsi qu'on

purifiait les maisons/ les pirogues/ etc.. dans la société

traditionnelle.

On peut aussi leur demander de déterminer la cause, naturelle ou

surnaturelle/ d'une maladie, grâce à leur pouvoir de clairvoyance

acquis par la pratique de la concentration mentale.

On peut encore les charger de consacrer les talismans qui rendent

invulnérable.

On peut/ enfin/ accomplir des cérémonies strictement bouddhiques

pour obtenir une guérison/ à la pagode. C'est le cas notamment

lorsqu'on attribue la maladie à une dette contractée par le

malade dans cette vie ou dans une autre, envers les esprits de

certains défunts, par exemple envers les parents.

Dans ces cérémonies, les fidèles font aux moines une offrande, tan,

(du pâli dana). Celle-ci génère des mérites qui sont alors dédiés

aux esprits des morts et aux génies considérés comme les

responsables de la maladie.

Page 107: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

105

Le rituel qui vient diêtre accompli n'est pas tout à'fait

de cette nature. Il y a certes une relation évidente entre la

maladie de Monsieur Vong et des défunts de sa parenté, qui, dit-il,

viennent le hanter. Mais la technique utilisée par le bonze pour

le traiter est en fait celle du mo pao mon, (le "maître" qui

"souffle" les "formules magiques"), l'exorciste.

Celui-ci récite en effet une formule magique qu'il souffle

sur son patient. Il peut aussi utiliser l'eau lustrale dont il

asperge le visage du malade ou qu'il lui fait boire.

Dans tous les cas, quelque soit la variante des multiples techniques

d'exorcisation utilisée, elle repose sur le principe du souffle

véhiculant le pouvoir magique du mon. (1)

C'est bien là la méthode employée par le vénérable Chao Saï,

qui pratique à la fois la récitation de formules magiques, le

souffle, et fait boire l'eau lustrale à Monsieur Vong.

Les sutta dits par le bonze sont ces formules magiques qui, tirées

de prières et de méditations, font partie du dhamma et tirent leur

p ouvoir des mérites attachés à celui-ci. Elles possèdent en outre

un pouvoir intrinsèque lié à leur expression en pâli.

Pour le bouddhiste lao, les mots pâli sont en effet totalement

"efficaces" parce qu'ils sont la langue du Bouddha. (2).

(1) La magie lao, (thérapeutique, amoureuse, guerrière), emploie toujours ce type de technique. Elle est utilisée aussi par l'herbaliste pour donner toute son efficacité au remede, et par . rebouteux pour ressouder les os.

Cf "Re'chercher¡ur,'ía'"littératüre~Iaotienne", BEFEO Tome XVII, Fase. 5. 1917.

Page 108: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

106

C'est donc à l'aide du souffle/ qui porte ces formules

magiques/ que le vénérable entreprend/ comme c'est le rôle de

l'exorciste/ d'expluser du corps du malade les esprits maléfiques

qui s'y sont' introduits.

Il y a là une infraction à la règle monastique ; les bonzes n'ont

pas le droit de "chasser" les esprits/ puisque toute violence leur

est interdite. Mais le bonze accepte l'ambiguïté de la situation,

soucieux/ avant tout/ de créer/ chez Monsieur Vong, un choc

émotionnel capable de rétablir un équilibre psychique perturbé.

Il sait que/ de son côté/ le fidèle vit le rite comme une

exorcisation. Il réalise une sorte de compromis entre le respect

des règles auxquelles il est tenu; et la demande de Monsieur Vong.

Par exemple, il n'a pas à prendre le kaï, et ce pour deux raisons :

le kaï contient de l'argent que le moine ne doit pas accepter,

puisqu'il lui est interdit de gagner sa vie par une activité

lucrative. Il doit vivre de la mendicité et des aumônes. Il refuse

donc l'argent que lui tend Monsieur Vong à l'issue de la cérémonie.

En outre, le kaï contient des offrandes destinées aux génies

protecteurs du guérisseur ; or il est interdit au bonze de rendre

un culte aux esprits.

Pour ces raisons, un moine bouddhiste ne peut, en principe, être

un guérisseur. Sa seule intervention, dans une cérémonie

d'exorcisme, devrait se borner à la lecture de textes édifiants,

qui demandent aux phi de cesser de nuire aux humains et leur

conseillent de faire le bien. Car, dans le contexte bouddhique,

on ne doit pas craindre les esprits, pas plus qu'on ne doit leur

être hostile. On ne doit ni les honorer, ni les combattre. Il faut

Page 109: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

107

seulement les aider à atteindre la délivrance/ en leur dédiant

des mérites, et en lisant pour eux des sermons édifiants.

Cette conception/ on le voit dans le cas de Monsieur Vong,

reste très théorique. Celui-ci sait qu'il ne devrait pas se

préoccuper des Phi,' mais, dit-il/ "il ne peut faire autrement¡

car ce sont eux qui viennent le hanter".

Il y a là une trace encore vivace des rapports entretenus avec le

surnaturel dans le pré-bouddhisme. Les relations avec les esprits,

dominées par la peur et l'hostilité, obligent à faire pour eux

des sacrifices, à les "nourrir" (liang phi), ou à leur faire la

guerre, par l'intermédiaire d'autres esprits, les génies

auxiliaires des shamans et des exorcistes.

Le Bouddhisme, nous l'avons dit, n'est pas parvenu à faire

disparaître ce type de relations avec le monde occulte. Il a dû les

intégrer, réussissant tout au plus à les moraliser.

Et le Bouddhisme populaire, celui que vivent et pratiquent au jour

le jour les gens, continue donc de véhiculer ces croyances,

s'opposant en cela au bouddhisme "savant", celui des érudits qui

étudient les textes canoniques.

Apportant à ses adeptes des recettes capables de les aider à

résoudre leurs problèmes quotidiens, il leur fournit une grille

d'interprétation pour tout ce qui leur arrive.

Page 110: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

108

La notion de karma est l'une de ces clés essentielles de

compréhension.

Dans la conception savante/ toute action/ rappelons-le/

entraîne des conséquences spirituellement bonnes ou mauvaises/ qui

déterminent le devenir. Une "bonne" action est celle qui/ détachée/

est génératrice de mérites et permet la délivrance du cycle des

renaissances. Une "mauvaise" action est commandée par le désir et

l'envie/ l'attachement aux biens de ce monde/ elle éloigne du

Nirvana.

Mais la conception populaire du "mauvais karma"/ kam ven, !

(kam = action/ ven = haine)/ est toute autre.

Le kam ven est compris comme la conséquence de la haine d'un

esprit que l'on a offensé dans une vie antérieure.

Les infirmités/ par exemple/ ou les maladies incurables/ sont la

conséquence du kam ven.

Lorsque Monsieur Vong se dit hanté par un Phi de sa belle-famille/

il est confusément renvoyé à ses manquements passés. Et son

tourment est aggravé par sa fuite du pays/ qui laisse les esprits

des ancêtres sans abri et sans soin.

La culpabilité qu'entraîne l'abandon de la terre natale

peut s'exprimer de multiples façons. La somatisation en est une/

et le recours à la religion/ qui se confond dès lors avec la

magie/ devient indispensable.

Elle est/ en effet/ le moyen de rétablir le lien/ symbolique il

est vrai, avec la terre natale, avec les parents et les ancêtres

laissés au pays.

Page 111: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

109

C'est sans doute pourquoi/ malgré leur extrême réserve vis à

vis de ce phénomène/ les bonzes acceptent de se prêter à

l'accomplissement de rituels de type magico-religieux.

Il n'est pas impossible/ en effet/ que/ dans l'épreuve de l'exil/

la notion populaire du kam ven ne ressurgisse avec une certaine

vigueur dans les consciences lao/ obligeant les moines bouddhistes

à la prendre désormais plus largement en compte.

La chanteuse Soubane/ en tous cas, que nous retrouvons dans une

de ses compositions récentes/ exprime avec force ce sentiment du

kam ven :

"Nous voici loin, mes amis.

Si loin de notre patrie !

Chacun s'est enfui de son côté,

Le père au Nord, les fils au Sud,

Ne peuvent plus se rejoindre.

Les tout-petits ont été abandonnés dans la fuite,

Les époux »ont séparés.

Quel est ce karma qui nous divise ?

( . . . )

Le destin me harcèle.

Moi, votre fille, je suis triste.

( . . . )

Est-ce le ven ou le kam

Qui m'ont faite orpheline ?

( . . . )

Page 112: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

110

Le ven me poursuivra et m'accablera

Jusqu'à la mort.

Mon père, qui m'a soutenue.

Qui m'a élevée et ne m'a jamais quittée,

Aujourd'hui n'est plus.

Père, où se trouve ton âme ?

Viens écouter ta petite fille,

Comme le veulent le ciel et la terre.

Si j'ai dû venir m'établir ici,

c'était là mon karma.

Je prie les divinités célestes (1)

Pour que l'âme de mon père aille au paradis.

Mais quel est ce ven qui m'a obligée

A quitter les miens ? 0

( . . . )

Oui, on dit que même si l'on ne veut partir,

Le ven vous y oblige !

Même si l'on ne veut quitter le Laos,

Le ven vous y contraint.

Moi, Soubane, je voudrais savoir quel est ce yen.

Comment est-il ?

Est-il gros comme une coquille,

Ou comme les traces d'un éléphant ?

S'il est ainsi, alors, moi, Soubane,

Je paierai un chasseur pour l'abattre,

Moi, Soubane, je paierai un tireur à l'arc

Pour l'éliminer."

(1) thevada, les génies célestes hérités de l'Hindouisme.

Page 113: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

Ill

Ce chant évoque la détresse de ceux qui ont dû quitter

parents/ enfants ou conjoints pour venir s'établir en Occident dans

les années 1975. Il exprime aussi la résignation de ces bouddhistes

qui voient dans la tragédie de l'exode la loi du karma. L'exil y

est présenté comme la conséquence du kam ven/ cette faute passée,

cause aujourd'hui de la souffrance des réfugiés. Soubane se fait

l'écho de tous ces Lao qui s'interrogent sur le mystère des

manquements passés, dont il faut accepter la sanction aujourd'hui.

C'est ici même que l'idée de destinée puise sa force. Et les images

des derniers vers/ celles du chasseur et du tireur à l'arc peuvent

être comprises comme une allusion à ces rituels magico-religieux

où l'on paie un guérisseur/ shaman ou exorciste/ pour combattre les

esprits maléfiques liés à la croyance au kam ven.

Ce texte est bien sûr une création poétique, expression/ en

outre d'une femme qui est elle-même mo_, par conséquent plus proche

du monde occulte que la moyenne des réfugiés. Il traduit bien,

néanmoins, ce que d'autres qu'elle ressentent, peut-être plus

confusément, ou réfreinent, sous la pression du milieu environnant.

Contrairement à Monsieur Vong, qui se dit hanté par des esprits

restés en terre natale, les réfugiés disent volontiers que les

Phi ne les ont pas suivis dans l'exil :

"Ils sont au Laos. Ici, ils ne peuvent rien nous faire"/ disent-ils.

Page 114: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

112

Pourtant/ un certain monde occulte semble bien encore se

manifester pour beaucoup.

Ne correspondant plus tout à fait aux génies qui peuplaient

l'espace villageois, des forces, (khouan, pris cette fois dans

son acception large), sont là, qu'il convient de contrôler.

D'où cette nécessité absolue de donner aux morts des funérailles

décentes, d'où le rituel du sou khouan, d'où le recours aux katha

et aux talismans qui protègent, d'où, enfin, ces rituels

d'exorcisation qui manifestent la persistance de l'activité de

certains esprits.

Ceci n'est pas le seul fait des personnes âgées ou des adultes.'

Les petits Lao, largement insérés dans la société française, par

là scolarisation notamment, sont élevés,'à la maison, dans une

atmosphère de superstition dont ils portent l'empreinte.

Ils n'en parlent guère, ou se défendent vigoureusement de croire

en ces "fantômes", comme ils nomment en Français ces forces

mystérieuses.

Pourtant, ils sont facilement inquiétés par d'hypothétiques

menaces. Par exemple, ils n'aiment guère, et jusqu'à un âge assez

avancé, dormir seuls. La nuit est biensûr le moment le plus

propice aux agissements des esprits... Des frères et des soeurs

qui pourraient, dans les logements H.L.M., profiter d'une chambre

individuelle, préfèrent se regrouper dans une même pièce, ou,

mieux encore, partager celle de leurs parents pour dormir.

Page 115: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

113

Il est vrai que dans la demeure traditionnelle lao, en milieu

rural/ il n'existe généralement qu'un seul, vaste espace de cepos,

où cohabitent les deux ou trois générations de la maisonnée.

Les adultes trouvent par conséquent plutôt normal que leurs

enfants dorment auprès d'eux.

Et ils savent aussi/ quoique de manière inconsciente/ alimenter

chez ceux-ci une crainte diffuse de certains phénomènes ; les

enfants n'apprécient pas les craquements dans la maison, le soir,

ils se montrent vigilants dans leur contact avec certaines

personnes, notamment les anciens "mo',* dont ils ont entendu parler

par leurs aînés ; ils participent de ce monde trouble dès leur

plus jeune âge et ont ainsi de leur religion une image peu précise.

Ils ont vu leurs parents prendre pour eux des précautions

particulières, à l'occasion de certains anniversaires, ils les

ont vuscélébrer des rituels, ils les accompagnent à la pagode

pour recevoir la bénédiction des bonzes lorsque des événements

familiaux importants surgissent.

Nourris à la fois de la croyance plus ou moins contenue en

certaines forces mystérieuses, et du respect dû aux moines,

ils entretiennent en fait souvent une confusion entre ces deux

domaines que sont la religion et la magie. Ils connaissent fort

mal, en tous cas, les fondements de la croyance bouddhiste, et

la signification des rituels, qu'ils accomplissent par imitation,

et davantage par conformité à la volonté de leurs parents que par

conviction personnelle.

Page 116: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

114

Les bonzes de Villiers-le-Bel sont tout à fait conscients

de cette évolution parmi les enfants lao/ et voudraient pouvoir

la contrecarrer, par une action pédagogique et réformatrice/

susceptible de répondre aux aspirations et aux besoins que suscite

le cadre de vie nouveau.

Mais leurs fonctions d'éducation qui/ au Laos déjà/ s'étaient

considérablement affaiblies avec la généralisation de l'instruction

publique/ deviennent ici dérisoires/ face à la prégnance du

système scolaire français et à la pénétration rapide des modèles

occidentaux.

Page 117: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

115

10. Bouddhisme et éducation

Autrefois/ le vat était la seule école au Laos/ et les

familles les plus pauvres envoyaient leurs enfants y recevoir un

minimum d'instruction. Ils y apprenaient le calcul, la lecture,

et l'écriture du Laotien, et quelques rudiments de pâli.

Avec l'apparition de l'enseignement public et laïc dans les

villages, ce phénomène avait diminué, mais les familles gardaient

la coutume de faire entrer leurs enfants dans les ordres pour une

période plus ou moins longue, afin qu'ils aient une instruction

religieuse et gagnent ainsi des mérites..

La croyance en la nécessité de l'enseignement est une tradition

remontant aux origines mêmes du Bouddhisme. Le Bouddha ne se

considérait nullement comme un prophète, mais plutôt comme un

maître, dont le devoir était de transmettre aux autres les

résultats de sa recherche. Il voyait donc dans l'ignorance une

source de mauvaise conduite, et l'une des causes de l'attachement

Page 118: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

116

aux biens matériels. C'est pourquoi le Bouddhisme confère à son

clergé un rôle d'éducateur de première importance/ auquel la

population lao est restée attachée.

Pourtant/ aujourd'hui/ en France/ seuls quelques rares

garçons, (1) appartenant aux familles les plus ferventes, font

encore une retraite à la pagode de Villiers-le-Bel.

Et celle-ci n'est en rien comparable au séjour que faisaient les

"bonzillons" ou "novices" (choua ou nène ) / dans la société rurale.

Ces jeunes garçons qui/ n'ayant pas encore atteint l'âge de

20 ans à partir duquel on peut devenir moine/ (2), entraient dans

les ordres pour y étudier les textes sacrés/ notamment les Jataka/

récits des vies antérieures du Bouddha.

Portant la même tenue que les bonzes (3), le "novice" s'engageait

lors de son ordination/ à suivre dix règles d'observance.

Soumis à une discipline très sévère/ à un régime alimentaire très

austère, il apprenait à obéir à son maître, (khou/ du skt guru) ,

non seulement comme disciple mais aussi comme serviteur.

Le bonzillon effectuait certains travaux domestiques au vat et

pouvait subir des châtiments corporels. (4)

(1) La faculté d'entrer dans les ordres est refusée aux femmes ; nous allons y revenir.

(2) Pour être bonze, il faut avoir 20 ans au moins, ne pas avoir tué ou volé, ne pas avoir de maladie de peau. On est "bonzillon" de 10 ans, âge minimum, à 20 ans.

(3) seul le drapé de la toge diffère.

(4) lorsque l'enfant entre à la pagode, son père doit déclarer au maître : "faites de lui ce que voua voudrez, traitez-le comme il vous plaira, pourvu toutefois que vous ne le vendiez pas infirme".

Page 119: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

117

Son khou, en échange, lui dispensait son enseignement et le

retraitant lui restait reconnaissant pour vie reste.de SGS jours.

Plus question d'imposer de telles règles aux quelques novices

de "vat Gonesse" !

Ceux-ci, soumis aux obligations scolaires, ne viennent à la pagode

que les mercredis, les fins de semaines, et pendant les congés.

Partageant épisodiquement la vie des moines, ils participent, de

façon très limitée, à certains travaux d'entretien du vat, tel que

le jardinage, aux beaux jours.

Le khou chargé de leur éducation religieuse doit opérer des choix

dans ce qu'il peut leur transmettre.

Les novices ne peuvent, faute de temps, espérer maîtriser la

lecture et l'écriture des caractères tham, ceux des textes

canoniques.

Ils apprennent donc par coeur les sutta élémentaires qui leur

permettent de s'associer aux bonzes dans la célébration des

cérémonies.

Ils s'initient d'autre part aux techniques de la "concentration

mentale", samadhi, pendant plusieurs heures, sous la surveillance

du bonze.

A l'issue de ces séances, ce dernier écoute leurs expériences

et discute avec eux des résultats de leur travail.

Il joue là, pour ces quelques privilégiés, un rôle d'encadrement

très important, qui leur permet une réflexion sur leur comportement

Page 120: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

118

et leur mode de vie en France.

Certains de ces jeunes montrent pour leur khou un profond

attachement, qui confine parfois à la vénération, et peut être

interprété comme un phénomène de transfert.

Ces jeunes, perturbés par la transplantation dans la société

occidentale, sont souvent aux prises avec des difficultés

personnelles, familiales, ou sociales, graves.

Le khou leur fournit des modèles dont ils sont privés dans leur

vie quotidienne et les. rassure.

L'enseignement dispensé par les bonzes du vat Velouvanaram profite

à quelques jeunes filles lao qui, pourtant, dans la tradition

bouddhique, en sont largement exclues.

La misogynie inhérente au Bouddhisme interdit en effet aux

femmes d'entrer dans les ordres et les empêche donc de recevoir

une éducation religieuse à la pagode.

Cette exclusion des femmes s'expliquerait par la souillure que

représentent les menstruations et l'impossibilité, pour les femmes,

de connaître l'état de sérénité totale et permanente du fait des

cycles. La femme serait, sur le plan karmique, inférieure à

l'homme, mais pourrait, cependant, parvenir a l'état d'arahan,

saint ou sainte ayant atteint le Nirvana, au prix d'un effort

supérieur. C'est pourquoi le Bouddha, qui avait créé l'ordre des

Bikkhuni pour sa belle-mère, avait imposé à ces dernières 500 règle

d'observance, au lieu de 227 pour les hommes.

Page 121: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

119

Une telle discipline étant impossible à respecter, l'ordre des

Bikkhuni disparut il y a cinq siècles.

Les femmes peuvent toutefois accomplir une retraite monastique/

nous l'avons vu/ en devenant/ le plus souvent à la fin de leur vie,

des men khao ("mères" "blanches")/ qui respectent huit sila,

(préceptes) et vivent comme des bikkhuni sans en être. Demeurant

à l'écart des bonzes/ elle ne sont pas habilitées à célébrer le

culte et ne jouent pas un rôle social important au sein de la

communauté comme le font les bonzes.

La situation nouvelle qu'engendre l'exil permet donc à des

jeunes filles de venir s'initier aux techniques de la méditation

ou à l'étude des textes sacrés auprès des moines, sans pour autant

être des retraitantes.

Issues de familles très dévotes, ces jeunes filles trouvent au

monastère un refuge moral et affectif qui tend a. les isoler de

la société environnante.

Conscients qu'il y a, dans ce comportement/ un risque de

déviation à 1'-égard du Dhamma/ et d'enfermement très négatif pour

elles, les bonzes s'efforcent de tempérer leur ferveur religieuse :

"Le Bouddha n'a jamais été partisan d'un ascétisme forcené", disent-

ils, "il a toujours prêché une politique du possible, demandant

qu'on ait une règle de conduite raisonnable".

Page 122: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

120

Craignant que, dans ces cas limites, la dévotion ne se

transforme en bigoterie, contre laquelle il leur faut lutter,

les bonzes voient, par ailleurs, la grande masse des jeunes

réfugiés échapper à leur autorité.

Les novices sont très minoritaires parmi les jeunes Lao, et la

plupart des enfants et adolescents ne reçoivent plus une réelle

éducation religieuse.

Soumis, sans nuance, à l'influence de la société environnante, ils

ne retiennent de leur religion que ses aspects les plus

spectaculaires : cérémonies et rituels. Par contre, ils ignorent

tout, ou presque, de ses fondements spirituels.

Ce phénomène est sans doute accentué par l'absence

d ' interrelations entre les pratiques religieuses de leur groupe

ethnique et la société globale.

L'absence d'interrelations entre le Bouddhisme lao et la

société globale

Les petits Lao ne voient quasiment jamais de Français au vat

et ceux qu'ils y rencontrent apparaissent comme des cas

particuliers : hommes et femmes mariés à des Laotiens, couples

ayant adopté ou parrainé un enfant asiatique, retraitants attirés

par les philosophies extrême-orientales, qui souhaitent s'initier

aux techniques de méditation, par exemple, auprès des bonzes.

Dans tous les cas, ces occidentaux sont minoritaires et perçus

comme un peu "à part".

Page 123: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

121

Pour le reste; il est vrai/ les échanges qui se produisent

autour du vat entre leur communauté et la société française sont

limités.

Le plus souvent ponctuels/ ils ont lieu pour des questions

d'organisation matérielle/ administrative.

Ils peuvent cependant/ quoique très exceptionnellement encore/

être plus circonstanciés.

Ainsi, le bonze de la pagode de Metz fut appelé à intervenir auprès

d'un petit Français que ses parents pensaient envoûté, .i]

La presse locale et nationale s'est/ à l'époque/ saisie de cet

événement/ faisant de l'exorcisation du petit garçon une nouvelle

à sensation ! (1)

Ce cas, pour l'instant unique, semble-t-il/ d'échange direct et

précis entre la communauté lao et française/ sur le terrain

religieux, a sans doute été possible parce qu'il concernait la

population d'une banlieue d'une ville de province, où les relations

de voisinage, même limitées, sont tout de même plus authentiques

qu'en région parisienne.

Paris garantit par contre un anonymat qui protège de l'éventuel

rejet. Les Lao savent qu'il s'y produit un brassage leur permettant

la continuation de leurs pratiques religieuses sans attirer outre

mesure les regards. La contrepartie en est un certain repli ethnique

et des interrelations qui restent fortuites.

(1) Voir en'-innexe, p. 162 à 165, différentes coupures de presse sur cette affaire.

Page 124: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

122

Dès lors/ les jeunes Lao ne peuvent comprendre toujours

clairement l'articulation de leur culture d'origine avec celle

de la société globale. Et cette dernière, parce qu'elle est

omniprésente, et pénètre largement à l'intérieur des foyers lao,

par les medias très écoutés, en particulier, tend à s'imposer

plus fortement à eux, entraînant un affaiblissement des valeurs

morales, et religieuses lao.

L'éducation des jeunes échappe aujourd'hui presque totalement

aux religieux, comme d'ailleurs aux parents.

Ce que les adultes ont à proposer à leurs enfants leur paraît

souvent désuet. Ce que les jeunes donnent à voir de leur devenir

à leurs aînés suscite un sentiment d'étrangeté et d'impuissance

que les bonzes n'ont guère les moyens de combattre.

Dans ce contexte, les valeurs bouddhiques authentiques ont le

plus grand mal à se maintenir, et la tâche des bonzes de vat Gonesse

est complexe.

Partagés entre des fidèles qui s'éloignent du Bouddhisme

ou le méconnaissent, d'autres qui l'utilisent à des fins extra­

religieuses, d'autres encore qui font montre d'une ferveur très

ritualiste et mêlée de croyances animistes, les bonzes parlent

parfois de crise de leur religion.

Page 125: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

123

11. Une religion en crise

"Notre religion est dans une situation difficile, qui n'est

pas seulement due à notre installation en France et en Occident

plus largement. Il y avait déjà des problèmes dans notre pays.

Mais avec l'exil, beaucoup de nos fidèles auraient besoin d'un

soutien moral et spirituel, d'un retour aux sources, que nous ne

sommes pas toujours en mesure de leur donner, parce que nous ne

maîtrisons pas bien les situations.

Notre communauté est trop divisée, et nous, religieux, subissons

trop de pressions !"

Ce constat/ par un des bonzes de Villiers-le-Bel; n'est pas

il est vrai/ tout à fait nouveau.

Une certaine évolution du Bouddhisme/ ces dernières décennies/

au Laos et dans les pays voisins/ fait depuis longtemps l'objet

de contestations.

Page 126: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

124

Thao Nhouy ABHAY écrivait, dans les années 50 :

"Derrière l'aimable décor de religiosité, derrière nos bornes en

éternelle prière, et nos fidèles si pieusement attentifs à

l'accomplissement des rites, qu'y-a-t-il ? Il y a - avec un

sentiment religieux profond - de l'ignorance, beaucoup de fatalisme

et une inépuisable résignation. Et tout ceci, hélas, nous conduit

à la mort". (1)

Et de dénoncer le relâchement des bonzes, l'individualisme et

le laisser-aller des fidèles, trop peu exigeants vis à vis de

leurs clercs !

Un mouvement de rénovation entrepris en 1941 a tenté de

redresser la situation, mais il n'a pas été réellement suivi

d'effets. Et le peuple lao, "désabusé, se laisse vivre, convaincu

de l'inanité de toute action" dit encore T. N.ABHAY. (2).

(1) T.N. ABHAY, Aspects du pays lao, p. 59

(2) op. cit. p. 60

Page 127: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

125

Le culte lao se réorganise en France en conservant ces écueils.

Certains d'entre eux tendent même à s'y accentuer.

Loin de perdre du terrain, les pratiques magico-religieuses,

nous venons de le voir, perdurent et se confondent dangeureusement,

aux yeux des bonzes, avec les valeurs bouddhistes.

Pour ces derniers, en effet, elles "déforment le Dhamma", et

entretiennent chez les réfugiés des croyances qui "ne sont plus

adaptées à ce qu'ils ont à vivre ici"* disent-ils.

D'un autre côté, la société de consommation dans laquelle

s'insèrent les Lao renforce leur tendance à l'acquisition, leur

goût pour les biens matériels, et les signes extérieurs de

richesse perçus comme des marques de prestige.

Ceci les réconforte dans leur individualisme, entraînant une

extrême précarité de toute action communautaire.

Nous l'avons dit, de nombreuses associations se font et se

défont, minées par des querelles intestines qui empêchent

l'aboutissement de leurs projets.

Ce caractère velléitaire est aggravé, il faut le dire, par des

conditions de vie difficiles.

Occupant des emplois peu ou sous-qualifiés, exigeant de longs

déplacements et un effort physique important, implicant un

rythme de travail et de vie rapide, les réfugiés n'ont pas toujours

le ressort nécessaire pour mener à bien des actions qui sont un

surcroît de fatigue et de souci.

Page 128: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

126

La priorité est donc laissée à l'intégration économique/

et l'attachement aux valeurs bouddhiques ne se manifeste plus

guère que dans ses aspects ritualistes et matériels.

Ces comportements, en lesquels les bonzes voient une perte

de la spiritualité, atteignent leur maximum dans les enjeux

politiques qui viennent interférer dans la gestion des monastères

reconstitués.

Un courrier adressé par le chef de la pagode de Tournon à

l'association de Metz, qui lui demandait conseil pour la création

d'un vat dans l'Est de la France, évoque très explicitement

ces problèmes.

En voici quelques extraits les plus parlants : (1)

"Dors du dernier Pimay, un moine de Paris est venu pour honorer

vos cérémonies. Son impression sur la communauté asiatique de

Metz n'est pas très favorable à l'implantation d'une pagode.

Si de faire venir un moine pour honorer leurs cérémonies suffit

aux la€cs} pour le moine que vous allez faire venir, il va avant

(1) Voir la photocopie de la lettre adressée par le chef du monastère de Tournon aux responsables de Metz en annexe p. 161

Page 129: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

127

peu se retrouver dans le même cas qui se renouvelle systématiquement

où après la première euphorie, le moine se retrouve seul, sans

soutien et doit même faire face à sa providence.

Notre propre expérience ici à Tournon nous donne aussi raison de

vous mettre en garde. Au début, nous avions espéré le soutien des

communautés asiatiques, qui s'est révélé plus nébuleux qu'efficace..

(...) L'expérience des moines asiatiques à Paris rejoint notre

propre expérience, et même dans la capitale, où les fidèles

asiatiques sont nombreux, ces communautés utilisent davantage la

pagode ou la communauté des moines comme faire-valoir de leurs

associations mais pas du tout pour le bien du Dhamma ni pour le

soutien des moines."

Ces tensions et ces obstacles font perdre à la religion et

son clergé sa crédibilité au/ yeux de certains Lao, et notamment

de jeunes Lao qui/ étudiants au Laos/ poursuivent en France des

études ou une formation professionnelle/ et recherchent une

intégration réussie au sein de la société française.

Ceux-là se montrent très circonspects dans leur fréquentation

des vat.

Refusant d'être assimilés au "clan" qui soutient tel ou

tel monastère/ ils gardent délibérément leurs distances :

"Je ne veux pas qu'on pense que j'appartiens à tel courant

politique sous prétexte que je vais à telle pagode.

Quand on se rend là-bas, il faut surveiller tout ce qu'on dit,

parce que tout le monde est à l'affût de la moindre critique ou

Page 130: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

128

du moindre propos pour vous taxer de ceci ou de cela.

Pour moi, il se passe trop de choses qui n'ont rien à voir avec

notre religion, là-bas" , confie Saï.'\

Face à cette désaffection presque forcée de certains jeunes/

les bonzes de Villiers-le-Bel voudraient trouver les moyens de

faire regagner a la religion lao son crédit auprès d'eux/ en

l'adaptant aux préoccupations actuelles.

En particulier/ ils comprennent que la jeunesse lao/ largement

imprégnée de la pensée occidentale/ ne peut adhérer aux croyances

archaïques encore vivaces chez les aînés.

Ils souhaitent expurger la religion de ces "superstitions" qui

pervertissent la foi bouddhique.

Tenant un discours plus rationnel/ ils insistent davantage sur

l'éthique, explicite dans la doctrine bouddhique/ de l'indépendance

et de l'autodétermination/ plutôt que sur le respect inconditionnel

des rites.

"Réfléchissez à ce que vous voulez vraiment, ne vous laissez pas

influencer par l'environnement, par les apparences, par les "on-dit"

conseillent-ils à leurs fidèles.

Aux jeunes qui/ soumis à de fortes pressions familiales/ se voient

contraints de suivre des cérémonies sans signification pour eux,

ils proposent aujourd'hui une attitude plus responsable/ garantie

d'une démarche plus authentique.

Page 131: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

129

Dans l'accomplissement des gestes religieux; ils visent à un

plus grand dépouillement et se montrent moins attachés aux règles

de bienséance ; celle qui impose/ par exemple/ au laïc/ de se tenir

au minimum à la même hauteur que le bonze/ ou mieux/ à un niveau

inférieur/ ne leur semble pas essentielle/ et il leur arrive

fréquemment de converser avec les fidèles autour d'une table/ dans

la sala du vat, se situant ainsi au'même niveau qu'eux.

Ils adoptent avec les jeunes adeptes une attitude plus décontractée

afin/ expliquent-ils) " de faciliter le dialogue, et de ne pas

les bloquer par l'observance de multiples règles sans véritable

importance".'

Mais ils se heurtent/ dans ces tentatives réformatrices/

aux plus âgés de leurs fidèles/ très choqués par ce qu'ils

considèrent comme des infractions à la règle monastique.

Pourtant/ les bonzes s'appuient/ dans cette volonté de

rénovation de leur religion/ sur la parole même du Bouddha :

"Ce qui doit être changé doit être changé" dit-il dans le

Tipitaka (1), et s'dressant à son disciple Ananda :

"Quand je serai mort, Ananda, que l'Ordre, s'il le juge à

propos, abolisse tous les préceptes de peu d'importance". (2)

Autorisant à mettre l'accent sur certains de ses éléments/ à en

mettre d'autres en sourdine/ la doctrine bouddhique est assez

souple pour s'adapter aux transformations sociales.

(1) recueil de textes pâli considéré comme les archives les plus anciennes de l'enseignement du Bouddha.

(2) Voir L'évangile du Bouddha, de Paul CARUS, Ed. Ajjarius. PUF, p. 255.

Page 132: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

130

La tâche n'est pourtant pas aisée pour les moines réfugiés.

En butte aux plus conservateurs de leurs fidèles/ ils ne

rencontrent pas toujours l'assentiment de ceux auxquels ils

destinent prioritairement ces novations/ les jeunes.

Ceux-ci peuvent se montrer/ eux aussi/ fort traditionalistes.

"Pour moi, des bonzes qui passent leur temps en conversations

téléphoniques, en voyages, en discussions sur des problèmes

matériels, ne sont pas des bonzes. Un vat avec la télévision,

le magnétoscope, n'est plus un monastère. Je ne suis pas d'accord

avec cela" , souligne Tep; jeune étudiant de 20 ans.

Le désaccord peut aller jusqu'à la rupture définitive entre

les fidèles et leurs religieux.

C'est ce qui se passe à Borny/ entre la paroisse de Metz et le

bonze responsable du vat/ en 1984. Lorsque les fidèles de la région

réalisent que leur chef de pagode conserve pour lui et sa famille

certaines des allocations qu'ils avaient réussi à obtenir en son

non.-, (allocation-vieillesse/ logement/ etc...)/ ils considèrent

qu'il y a là un manquement grave à la discipline monastique ;

ces fonds/ pensent-ilS/ doivent être destinés au vat/ puisque

l'entretien du moine est assuré par la congrégation. Ils décident

donc le renvoi du bonze et la fermeture du monastère de Borny.

De tels incidents portent préjudice à l'ensemble des

religieux réfugiés en France/ et augmentent le scepticisme de

nombreux fidèles.

Page 133: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

131

Les jeunes Lao ne sont pas opposés à toute rénovation du

Bouddhisme. Au contraire/ certains souhaiteraient/ comme les

bonzes de "vat Gonesse", le voir se défaire de ses aspects

"obscurantistes". Ceux-là suggèrent/ par exemple/ que l'on

traduise les prières pâli/ incomprises de la majorité des fidèles/

en Laotien.

Mais c'est surtout sur les qualités morales et spirituelles de

leur clergé qu'ils se montrent le plus exigeants :

"Ce qu'il nous faut," disent-ils/ " ce sont des bonzes instruits,

capables de nous guider spirituellement. On ne va pas à la pagode

pour entendre parler de questions matérielles, financières, de la

vie de tous les jours. On va là-bas pour se recueillir, pour prier,

pour entendre des paroles pieuses et recevoir des conseils de

sagesse, d'apaisement. Nos cérémonies doivent garder leur

solennité} sinon, elles ne servent plus à rien".

Ce sont ces mêmes jeunes Lao qui/ capables de tenir ce type

de discours/ ne manquent jamais d'effectuer les cérémonies

religieuses les plus importantes/ comme celles qui honorent le

décès d'un membre de leur famille/ en France ou au Laos, ou

la célébration d'un mariage....

Page 134: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

132

C'est qu'il y a chez tous les Bouddhistes/ comme le note

P.A. SARAM/ (1) "une référence tendancielle à certains aspects

de la doctrine bouddhique", qui, chez les réfugiés lao, se

perpétue au sein de la société française, même lorsqu'ils s'y

intègrent largement.

Ils conservent en effet un attachement pour les rites et

les préceptes, alors que, par ailleurs, leur histoire, individuelle

et collective, les engage dans des modes relationnels et des

comportements autres.

Le Bouddhisme en tant qu'étiquette continue ainsi d'être

accepté comme constituant leur identité religieuse, et, au-delà,

leur identité culturelle.

(1) P. A. SARAM, "Bouddhisme et société à Sri Lanka", in Revue Internationale des Sciences Sociales, Volume XXIX N° 1977. p. 346

2,

Page 135: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

133

Conclusion

Page 136: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

134

La culture bouddhique englobe bien plus/ nous l'avons vu,

que le seul accomplissement des rites. Les arts, littéraires/

musicaux, picturaux, chorégraphiques, en sont imprégnés, et les

attitudes morales, spirituelles, sociales, culturelles, y puisent

leur essence- Elle fournit une vision du monde et des modèles que

la transplantation en Occident ne suffit pas à effacer. Elle doit,

cependant, s'y adapter.

Parmi les transformations que nous avons observées au cours

de cette étude, et qui, nous l'avons souligné, étaient déjà

amorcées dans la société d'origine, nous avons noté l'abandon de

certaines pratiques et l'inobservation des interdits ; on ne prie

plus guère devant l'autel familial, on prend une distance toujours

plus grande vis à vis des préceptes.

Par contre, les rites fondamentaux se maintiennent, et coexistent

avec ceux de la société environnante. Les Lao fêtent Noël et le

Nouvel An français, mais continuent de célébrer le Pi May de l'ère

bouddhique. Ils manifestent là une volonté de se fondre dans la

société globale sans perdre leur identité.

La sélection des pratiques bouddhiques maintenues dans l'exil

semble répondre à un certain nombre de choix.

Sont conservés les cérémonies accomplies peu fréquemment, telles

les grandes commémorations, du calendrier bouddhique.

Page 137: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

135

Sont conservés encore les rites qui ne nécessitent pas un

isolement social et ne font pas courir le risque d'un rejet de

l'environnement. Les retraites monastiques/ par exemple/ sont de

plus en plus rares, car elles supposent une coupure radicale avec

le monde extérieur. Certaines techniques de prières sont abandonnées

parce qu'elles attirent trop l'attention.

Sont conservés, enfin, les rites qui peuvent être redéfinis dans

une optique moderne ; l'assouplissement de l'étiquette bouddhiste,

l'élimination des croyances archaïques, jugées trop irrationnelles

pour le monde actuel, sont les perspectives réformatrices des

bonzes de Villiers-le-Bel.

Nous avons constaté que ces novations sont mal acceptées

par certains fidèles, les plus âgés souvent, c'est-à-dire ceux

qui n'ont pas à s'intégrer réellement dans la société française.

Entretenus par leur famille/ les vieillards vivent repliés sur

la communauté ethnique, et, pour eux, la tradition est comme

pétrifiée. Les personnes âgées se défendent contre l'étrangeté

ressentie dans la société d'accueil, et l'angoisse face au

changement par une attitude de plus en plus conservatrice.

En revanche, pour tous les autres réfugiés, adultes, jeunes

gens, enfants, impliqués dans les réseaux de relations de la société

globale, la religion est en compétition permanente avec la mentalité

laïque, prédominante. Et ces transformations sont indispensables.

Elles ne témoignent pas d'un déclin absolu de la religion, mais

plutôt d'une évolution de la pratique religieuse, sans renoncement

à la culture bouddhique.

Page 138: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

136

Car celle-ci est chargée d'une affectivité qui concerne

moins la doctrine que ses "utilisations". Le rôle symbolique du

monastère/ les notions de bouny le mérite/ et de piepy le prestige

qui s'y rattache/ sont autant d'éléments qui alimentent un

sentiment d'identité individuelle et collective et voilent les

besoins extra-religieux des réfugiés.

Ces derniers, agressés par la transplantation dans le monde

industriel et urbain/ blessés par le statut d'exilés, trouvent dans

la pagode reconstituée le moyen de se "réconcilier"/ pour reprendre

une expression de Malinowski, (1)/ avec eux-mêmes et avec le groupe

ethnique. Pour ces Bouddhistes attachés à l'idée du karma, les

pratiques religieuses sont une manière de résoudre les difficultés

à accepter leur nouvelle condition. Elles font, en outre, la liaison

avec la patrie perdue, car elles maintiennent des' relations

symboliques avec les parents/ les amis, les ancêtres laissés au

Laos. Gardant les empreintes du fonds animiste ancien, elles

entraînent parfois un glissement du rôle des moines, amenés à

se substituer aux guérisseurs de la société traditionnelle.

La religion, qui se confond alors, pour certains encore, avec la

magie, apporte une sécurisation affective importante.

Mais, nous l'avons vu aussi, parallèlement à la piété et aux

émotions qu'ils peuvent exprimer au monastère, les réfugiés

(1) Dans Magic, Science and Religion (N.Y. Doubleday, 1955), Malinowski dit à propos de la religion : "elle réconcilie l'homme avec lui-même. C'est aussi la fonction qu'elle remplit au niveau du groupe". p. 53.

Page 139: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

137

y rétablissent encore une sociabilité qui leur est spécifique/

y compris d'ailleurs avec ses dysfonctionnements.

L'organisation de la pagode génère des comportements laïques

autant que religieux. Elle engendre un ensemble de relations

sociales/ un "commerce" au sens large/ où des réseaux/ fondés sur

la parenté/ le voisinage/ l'échange de biens et de services/

se déploient/ et inter-agissent/ sous-tendus/ toujours/ par les

valeurs lao. Le soutien à la pagode, dans cette toile ainsi tissée,

est alors porteur d'une double signification : grâce/ d'une part/

au mérite gagné dans les offrandes, il assure le karma/ valeur

religieuse ; il réaffirme d'autre part/ régulièrement ou plus

ponctuellement, l'appartenance au groupe/ et y garantit la

réputation/ la "face"/ valeur sociale.

Cette ambivalence montre l'interdépendance entre les pratiques

religieuses et les facteurs socio-culturels/ au point qu'il est

impossible d'isoler la composante religieuse dans le mécanisme de

formation de l'identité lao en France.

Car les réfugiés ont/ à côté des rites bouddhiques, d'autres

modes d'identification à leur culture d'origine. La permanence de

leurs habitudes alimentaires, la préservation de leur langue,

la faible mixité de leurs mariages, le choix des prénoms de leurs

enfants sont de ceux-ci. Surtout, leur engagement dans une vie

associative visant la sauvegarde de leur patrimoine culturel et

artistique constitue un comportement identitaire très marqué.

Mais, à y regarder de plus près, celui-ci est largement traversé

par le religieux.

Page 140: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

138

La plupart des productions culturelles passent par la- célébration

du culte OU; au moins/ la référence aux valeurs bouddhiques.

La musique, la littérature orale et écrite, la danse, la peinture,

ou la sculpture, sont profondément enracinées dans le fonds

religieux. Lorsque l'identité lao s'affirme par ces éléments

laïques, elle est toujours, plus ou moins explicitement, renvoyée

au Bouddhisme. Aussi peut-on s'interroger sur le devenir de ces

traditions artistiques enseignées aux jeunes Lao qui, dans le

même temps, méconnaissent les fondements spirituels et moraux de

leur société. Il est probable qu'elles perdront vite leur

profondeur, pour se transformer en manifestations purement

folkloriques.

Il en va de même du culte religieux, dont les gestes peuvent,

eux aussi, se vider de leur sens, se "laïciser", perdant alors

leur signification sociale.

Si la notion de boun, le mérite, devait, par exemple, perdre sa

dimension religieuse, pour n'être plus qu'une valeur sociale,

liée à l'idée du prestige, il est sûr que, cessant de jouer son

rôle de régulation des rapports sociaux, elle laisserait libre

cours à l'individualisme déjà fort des Lao. L'identité lao se

diluerait dans des comportements de plus en plus laïques, où

l'indifférence primerait, au détriment de l'esprit communautaire.

Ces changements ne seraient pas nécessairement garants d'une

insertion harmonieuse dans la société française, si l'on en juge

par les alte'rations que subissent déjà les relations familiales

et.sociales de certains réfugiés.

Page 141: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

139

Ce processus n'est cependant pas inéluctable. Il menace/

certes/ dans certaines couches de la population lao immigrée :

personnalités politiques/ hommes d'affaires/ jeunes attirés par

les modèles de l'Occident/ tendent à utiliser le monastère

davantage comme un lieu tratégique du rassemblement ethnique/ que

comme un centre religieux.

Mais ce type de comportement peut être contrebalancé par un

certain traditionalisme/ que nous avons relevé chez d'autres

réfugiés/ et qui tient à l'attachement/ dont nous parlions toute

à l'heure, à la doctrine bouddhique.

Ce traditionalisme ne se manifeste pas seulement chez les adultes

et les vieillards. Il est aussi perceptible chez de jeunes Lao

qui, bien qu'insérés dans la société globale, se réclament encore

de la culture bouddhique, et, à travers elle/ de la culture lao.

La présence des moines et la reconstitution des pagodes est/ pour

ceux-là/ de première importance/ puisqu'ils permettent

l'expression concrète de cette appartenance.

Aussi/ au terme de cette étude/ convient-il de souligner

combien la réorganisation du culte/ qui s'est révélée indispensable

dès les premiers moments de l'implantation en France/ est

un enjeu essentiel pour l'insertion des Lao dans notre pays.

Elle s'est opérée rapidement. Elle a entraîné des transformations

pour être viable ici. Elle pervertit parfois la doctrine bouddhique,

entraînant, en particulier, un certain renforcement des croyances

archaïques.

Page 142: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

140

Mais cette dernière est souple et peut s'adapter au

changement ; et/ surtout/ l'attachement à la culture bouddhique

reste assez fort pour constituer une marque identitaire.

Transposé dans la société française/ le Bouddhisme continue

d'entretenir un sentiment d'identité collective. Il maintient aussi

la liaison symbolique avec la terre natale. Il est donc un apport

affectif primordial/ dont nul ne peut prévoir l'efficacité à long

terme. Les valeurs de l'Occident/ laïque et individualiste/

reçoivent un écho certain dans l'éthique de l'indépendance et de

l'autodétermination prônée par la doctrine. Sans un ressourcement

à la morale bouddhique/ dans sa globalité/ sans les conditions

requises au recrutement et à la formation de nouveaux adeptes/ il

est possible que celle-ci prenne le pas sur tous les autres aspects

de la culture bouddhique.

Pour l'heure/ les Lao en exil trouvent dans leurs valeurs

religieuses/ singulièrement dans celle du mérite/ source

d'enrichissement karmique, la légitimation d'une insertion réussie

dans la société industrielle.

En les réactualisant dans les pagodes de banlieue, ils leur

restituent leurs fonctions régulatrices des rapports sociaux.

Ils se réapproprient ainsi/ ajusté à leur nouvelle destinée/ l'un

de leurs traits culturels les plus structurants ; ils l'utilisent

à rétablir une sociabilité qui leur est propre et concourt à

définir leur identité en France.

La réorganisation du culte religieux, qui restaure, au sein

du groupe ethnique, des liens spécifiques mais non exclusifs,

apparaît dès lors comme un instrument privilégié de la stratégie

migratoire des Lao dans notre société.

Paris, Janvier 1986.

Page 143: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

141

Table des matières

Introduction 1

Première partie : L'immigration lao en France 11

Chapitre 1 : Histoire 12

Chapitre 2 : Une sociabilité en reconstruction 22

Deuxième partie : Bouddhisme et migration 27

Chapitre 3 : Le Bouddhisme lao et l'exil 28

Chapitre 4 : L'exode du clergé 34

Troisième partie : La paroisse lao en banlieue parisienne • •40

Chapitre 5 : . Naissance du vat Velouvanaram 41

Chapitre 6 : . L'aire d'influence du vat 48

Quatrième partie : • Le monastère reconstitué.: Continuité et rupture 66

Chapitre 7 : Vie quotidienne: 67

Chapitre 8 : Réorganisation des fonctions monastiques - 75

Chapitre 9 : Bouddhisme et magie 95

Chapitre 10 : Bouddhisme et éducation 115

Chapitre 11 : Une religion en crise 123

Page 144: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

142

Orientation bibliographique 143

Annexes 149

Planches-Phot os 167

Page 145: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

143

Orientation bibliographique

elles concernent des revues spécialisées sur

l'Asie du Sud Est/ ainsi que deux ouvrages collectifs

publiés par France-Asie/ l'un consacré au Laos,

l'autre au Bouddhisme.

Asie du Sud-Est et Monde Insulindien. Bulletin du CeDRASEMI. (Centre de Documentation et de Recherche sur l'Asie du Sud-Est et le Monde Insulindien).

Bulletin des Amis du Rovaume Lao. -

Bulletin de l'Ecole Française d'Extrême-Orient.

France-Aàie

France-Asie. Présence du Rovaume Lao/ oavs du Million d'éléphants et du parasol blanc.

N° spécial 118.119.120/ Saigon, Mars, Avril, Mai 1956.

(Version anglaise 1959)

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Page 146: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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Page 151: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

149

Annexes

Les statuts du C.S.3.C 150

Le règlement intérieur du C.S.B.C 152

La déclaration du C.S.B.C. à la Préfecture du Val d'Oise 154

Lettre du notaire concernant l'achat à Villiers-le-Bel 155

Reçu du notaire après signature de la promesse de vente 156

Acte portant choix d'un supérieur du sangha lao au monastère Velouvanaram 157

Attestation d'achat du pavillon de Villiers-le-Bel par le C.S.B.C 158

Courrier du maire de Villiers-le-Bel concernant cette étude...160

Lettre du supérieur du monastère de Tournon à l'association Franco-Asiatique 161

"Envoûtement à Metz-Borny ? Un enfant de 9 ans exorcisé par un bonze." W. Wirtz. Le Républicain Lorrain. 8 mai 1983 162

"La sorcière est dans l'escalier". E. Favereau. Libération. 19 mai 1983 163

"Dans la seule pagode de l'Est/ un bonze répand à Metz l'enseignement du Bouddha". G. Charut. Est républicain. 20 mai 1983 164

Invitation à la Fête de l'Entrée du Carême bouddhique 165

Invitation à la fête de Vixakhabouxa j_5¿

Page 152: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

COMITE DE SOUTIEN DU BOUDDHISME ET D'ACTION SOCIO-CULTURELLE LAO —*• •• 2 , A l i c e Rembrandt

95500 Gonesse

T

S T A T U T S

CHAPITRE - I : DENOMINATION - DUT - SIEGE 150

ARTICLE.- I.

ARTICLE.- 2.

ARTICLE.- 3.

Il est fondé entre les aghérents aux présents statuts un Comité régi par la LOI du 1er Juillet 1901 et le Décret du l6 Août 1901, dénommé : " COMITE DE SOUTIEN DU BOUDDHISME ET D»ACTION SOCIO-CULTURELLE LAO '• ( par abréviation C.S.B.C. ). Ce Comité a pour buts : - de soutenir la communautté religieuse de moines Bouddhistes; - de faciliter les activités de ces moines dans le Culte et la Pratique du Bouddhisme;

- d'effectuer des publications et d'exercer les diverses activités cha­ritables selon les rites, la croyance et les coutumes lao en France.

Son siège social est fixé au N°2, Allée Rembrandt (Orly-Parc) 95500 -Gonesse ( Département du Val d'Oise ). Il pourra être transféré à un autre lieu par la décision du Conseil d'Administration.

CHAPITRE - II

ARTICLE.- 4. Sa durée est illimitée.

DUREE

CHAPITRE - III : MEMBRES - ADMISSION - RADIATION.

ARTICLE.- 5» Le Craoité se compose des membres suivants : - Membres fondateurs sont ceux qui ont créé ou soutenu sans réserves le Comité aussi bien par leur apport d'aide matérielle que morale;

- Membres d'Honneur sont ceux qui ont rendu au Comité de services éminents. Ils peuvent être dispensés au paiement de droits d'entrée ou de cotisa­tions par le Conseil d'Administration.

- Mmebres actifs, notamment des personnes d'origine lao, sont ceux qui paient les cotisations ou de droits d'entrée et participent avec voix deliberative à l'Assemblée Générale et d'une façon générale à l'Admi­nistration et à la Direction du Comité;

- Membres sympathisants sont des personnes qui désirent témoigner à la communauté religieuse Lao en France leur amitié et leur encouragement à la bonne marche du Comité.

ARTICLE.- 6. Pour faire partie du Comité, il faut être agréé par le Conseil d'Adminis­tration qui statue lors de chacune de ses réunions sur les demandes pré­sentées.

ARTICLE.- 7« L'admission des membres est soumise : - au paiement des droits d'entrée ou do cotisations fixés par l'Assemblée Générale;

- à la souscription volontaire et formelle de fournir des cotisations an­nuelles ou des subventions quelconques au Comité.

ARTICLE.- 8. La qualité de membres se perd par : - la démission, - le décès, - la radiation prononcée par le Conseil d'Administration pour non paiement de la cotisation ou pour motif grave, l'intéressé ayant été invité par lettre recommandée à se présenter devant le bureau pour fournir des ex­plications.

ARTICLE.

CHAPITRE - IV : RESSOURCES.

9. Les ressources du Comité comprennent : - le montant des cotisations ou droits d'entrée, - les offrandes durant les cérémonies religieuses, dons et subventions des personnes privées ou morales,

- les rétributions ou remboursements des services rendus, - toutes autres ressources autorisées par les textes législatifs ou régle­mentaires.

CHAPITRE - V CONSEIL D'ADMINISTRATION

<. ..

ARTICLE.- 10. Le Comité est dirigé par un Conseil des membres, élus pour Deux ans par l'Assemblée Générale. Les membres sont rééligibles.

Page 153: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

ARTICLE.- 11.

ARTICLE.- 12.

ARTICLE.- 13.

ARTICLE.- 14.

Le Consei l d 'Adminis t ra t ion c h o i s i t parmi s e s membres, au s c r u t i n s e c r e t , un bureau composé de : - Un Prés ident - Deux Sécré ta i res-Généraux-Adjoint3 - Deux Vices -Prés iden ts - Un T r é s o r i e r - Un Secré ta i re -Généra l - Un Trésor i e r -Adjo in t

151

En cas de vacances, le Conseil pourvoit provisoirement au repmplacement de ses membres. Il est procédé à leur remplacement définitif par la plus pro­chaine Assemblée Générale. Les pouvoirs des membres ainsi élus prennent fin à l'époque où devrait normalement expirer le mandat des membres remplacés. Le Conseil d'Administration se réunit tous les six mois sur convocation du Président ou sur la demande du quart de ses membres.

Les décisions sont prises à la majorité des voix? en cas de partage la voix du Président est prépondérante.

Tout membre du Conseil qui, sans excuses, n'aura pas assisté à trois réunions consécutives pourra être considéré comme démissionnaire.

CHAPITRE - VI : ASSEMBLEE GENERALE ORDINAIRE ET EXTRAORDINAIRE.

Io- L'Assemblée Générale ordinaire comprend tous les membres du Comité à quel­ques titres qu'ils y soient affiliés. Elle se réunit une fois par an au mois d'Avril.

Les membres sont convoqués par les soins du Secrétaire Général 15 jours avant la date fixée avec ordre du jour bien déterminé. Le Président, assisté des membres du Conseil d'Administration, préside l'Assemblée Générale et ex­pose la situation morale du Comité. Le Trésorier rend compte de sa gestion et soumet ce bilan à l'approbation de l'Assemblée Générale. Il est procédé, après épuisement de l'ordre du jour, au remplacement, au scrutin secret, des membres du Conseil sortants. 2°- Le Président peut convoquer une Assemblée Générale extraordinaire chaque fois que le Conseil d'Administration l'estime nécessaire ou bien la moitié plus un des membres inscrits en font la demande.

L'Assemblée Générale doit se composer de la moitié au moins des membres ayant voix deliberativos. Si cette proportion n'est pas atteinte, l'Assemblée est convoquée de nouveau, mais à 15 jours d'intervalle et cette fois elle peut valablement délibérer quelque soit le nombre des membres présents. Un règlement intérieur sera établi par le Conseil d'Administration et soumis à l'approbation de l'Assemblée Générale.

Ce règlement éventuel est destiné à.fixer les divers points non prévus par les statuts, notamment ceux qui ont trait à l'administration interne du Comité.

En cas de dissolution prononcée par les deux tiers au moins des membres pré­sents à l'Assemblée Générale, un ou plusieurs liquidateurs sont nommés par celle-ci, et l'actif, s'il y a lieu, est dévolu conformément à l'Article 9 de la LOI du 1er Juillet 1901 et au Décret du l6 Août 1901.

Fait à Gonesse, le 05 Janvier 198l

Le Président,

Le Secrétaire-Général,

Jacques PHIMPHAVONG

Raymond PIIOMMACHANH

Page 154: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

CCÍMITE DE SOUTIEN BU EÜÜDEHI5ME £ D'ACTION SOCIO-CI<LTUP.2LLE LAO

2 , Al l i ' o Rembrandt y550O Gono«se

l

REGLEMENT INTERIEUR 152

AUTICLX. I.- Uno des grandes Religions du monde, le Bouddhisme: est le Patrimoine "SACHS" et inaliénable du peuple lao dont plus 'de 70?i sont bouddhistes. "Indispon-sable" à sa vie spirituelle, il a façonné ses moeurs, ses coutûaes et mar­qué do manière durable sa culture, son art et sa littérature.

Conduit par l'histoire à chercher réconfort et consolation au sein de cette religion, le peuple lao y a trouvé douceur, paix et tolérance; toutes choses, belles et élevées, qui ennoblissent le genre humain et con­

tri ouent à son bonheur. ARTICLE. 2.- Tout lao né bouddhiste, toute personne d'ethnies ou de peuples différents

qui a su témoigner son profond attachement au Pays du Million d'Eléphant et qui respecte et suit l'enseignement du Bouddha, peuvent adhérer libre­ment au CS.B.C. et en devenir membre de plein droit.

ARTICLE. 3«- Par dérogation aux articles 5 & 7 d93 statuts du C.S.B.C, l'admission d'un membre n'est pas impérativement soumise au paiement do droits d'entrée ou de cotisations; le C.S.B.C. s'en remet à la discrétion de l'intéressé.

On entend par cerabre actif toute personne ayant adopté le Bcuddhismo comma principale Religion et qui, de façon constante et régulière, apports lai soutien moral, matériel et financier aux activités culturelles et mani­festations religieuses organisées par le C.S.B.C.

ARTICLE. 4. -La composition du conseil d'administration est ainsi établie : 1.- un Président 2.- deux Vices-Présidents 3«- un Secrétaire-Général 4.- deux Secrétaires-Généraux Adjoints 5.- un Trésorier 6.- un Trésorier-Adjoint 7«- c eux commissaire;* aux comptes

Le Présidant du Conseil d*Administration représente le C.S.B.C. dans tous les actes de la vie civile et est donc habilité à le représentai* en justice. Il est responsable de toutes les activités du C.S.12.C. devant l'As­semblée Générale, à qui il doit on soumettre-annuellement un rapport général

Pour le bon fonctionnement de C.S.B.C, le Président peut donner man­dat ou délégation do pouvoir aux membres du Conseil d'Administration pour l'exercice de certains do ses fonctions.

Lea Vices-Présidents doivent seconder le Président dans l'exécution de ses taches, telles qu'elles ont été définies par le Conseil d'Administra­tion du C.S.B.C; et en cas d'absence prolongée ou d'empêchement du Pr03i~

, dent, ils assurent de plein droit tous ses pouvoirs. Le Secrétaire-Général assisté de ses deux adjoints est chargé du Se­

crétariat, du registre des membres, des archives et de la correspondance. Il peut être chargé, à la demande du Conseil d'Administration et sur

un ordi*^ du jour déterminé, de convoquer les membres en Assemblée Générale ordinaire ou extraordinaire, et ceci 15 jours avant chaque ouverture de l'As semblée Générale. Il en est le rapporteur des débats.

Le Trésorier est chargé de I'encaissement des recettes et en verse le montant dan-i les comptes eu banque ouverts au nom du C.S.B.C, tient des registres comptables du patrimoine du C.S.B.C. sous la surveillance du Pré­sident. Il présente le bilan de toutes les opérations et rend, compte à L'As-nembléc Générale annuelle qui statue sur la gestion.

Le Trésorier-Adjoint reuiplr.ee le Trésorier en C M d'absence ou d'em-pochfîK'jnt de celui-ci. Il apporte son concours dans l'exécution dos taches, dévolues au Trésorier.

Les Cor,Tiis3&ire«j aux comptes sont nommés par l'Assemblé-?. Générale. 13.3 ont pour mi. si.oa do vérifier le..s pièces comptables du C.S.B.C. quant-a leur régularité et li?ur authenticité. Il lour j.ncombo, on cas do déplace-monts jrréçuiici-i ao?> tonde du C.5.U*C, d:j procéder à dec crquStos ot d'en drossc?r un v.-ipport qui acra soumis an:; délibérations de l'Assemblée Genoralo ixtr.ior di.iairti »

Page 155: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

" " - 153

ARTICLE« 5»~ Les fonds du C.S.B.C. sont déposés JOJÎS d¿ux comptes qui sont ainsi dénommés :

•. a/- un compte central bloqué (bancaire ou postal) avec proavis de trois mois. Tout retrait d'argent de ce compte est subordonné à deux.signatures,

celle du Président en exercice ez celle du Chef de Monastère "Vat Vélou-vanaram" à la seule condition que ce retrait soit destiné à l'achat ou à la construction de la Pagode et du Centre Socio-Culturel lao. b/- un compte courant (bancair-2 ou postal) dont la gestion est placée sous la responsabilité du Président et du Comité en place.

Les fonds déposés à ce compte sont fixés à vingt milles francs maxi-mun et sont destinés aux dépenses urgentes de fonctionnement du Comité d'Administration et qui doivent faire l'objet obligatoirement de vérifi­cations ultérieures par les commissaires aux comptes.

Tout retrait d'argent de ce compte doit être obligatoirement muni de deux signatures, celle du Préaident et celle du Trésorier ou celles de leur mandataires respectifs. Le3 conditions .fixées pour ce retrait feront l'objet d'une note spéciale du Président accompagnée du spécimen de dépôt de signature auprès des banques.

Tout engagement de dépenses supérieures à cinq milles francs du compte courant doit être soumis préalablement à l'approbation du Conseil d'Admi­nistration qui sera convoqué à cet effet par le Président.

ARTICLE. 6.- Les membres du Conseil d'Administration sont é?us pour deux ans par l'As­semblée Générale au scrutin secret (§.Art.lO). Par mesure de simplification, l'Assemblée Générale a la possibilité de n'élire d'abord que le Prénident du C.S.B.C. qui aura toute latitude rie former son équipe et de choisir li­brement les membres du Conseil d'Administration. L'Assemblée Générale se déterminera en dernier ressort à main levée ou au scrutin secret sur le degré de confiance qu'elle souhaite accorder à ceux-ci.

Ils sont tenus de respecter le secret des délibérations, un minimum de bien séance sociale dans les débats et l'esprit d'amitié et d'entraide du C.S.B.C. Il leur est recommandé de ne rien fai^e qui puisse porter atteinte à la dignité et au prestige, du C.S.B.C., le plus ferme soutien de la reli­gion bouddhique et de la communauté des .moines de la Pagode " Wat Vélouva-naran".

ARTICLE. 7.- Le siège du C.S.B.C. est .SÍ3 au n°2, Allée Rembrandt 95^00 Gonesse. Il por­te le nom de Wat Velouvanaram et sert provisoirement de Pagode, de lieu de résidence aux moines et à la pratique du culte. Ce monastère est placé sous la responsabilité du C.S.B.C. qui s'occupe de son entretien.

Guide spirituel, garant de la conformité des activités culturelles et des manifestations religieuses aux usages établis par le Eouddhisme, l'Ab­bé aide de ses conseils les membres dirigeants du C.S.B.C., qui doivent lui rendre compte avec déférence du déroulement des résultats de chaque fete de l'année en cours.

Arrêté à sept articles.

Fait à Gor.es3e, le 26 Juillet 198l Le Président, ^-

Le Secrétaire-Général • JJ J^(jPUO^

FHBiPHAVONG Jacques

COPIE CERTIFIÉE PÜCMMACHANI! Raymond

CONFORME A L'ORIGINAL

L<¿, fiu$7¿ie«¿-

Page 156: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

Direction do l'Administration Ccncrale

efcrie>Ja>fl&jJßmöntafc(fc0

PREFECTURE DU VAL-D'OISE

154

ASSOCIATIONS

(Loi du 1" juillet 1901)

RECEPISSE DE DECLARATION

N» 2 CULT/81 (a rappeler dans la correspondance)

LE PREFET DU VAL-D'OISE reconnaît avoir reçu ce jour une déclaration

déposée par Monsieur PHIMPHAVONG Jacques - Président

demeurant à 95500 GONESSE - 1 , ai l ée Cézanne

relative à la formation SOUS le titre de "Comité de Soutien du Bouddhisme et d'Act ion Socio Culturel LAO"

d'une association dont le siège social est situé à 95500 GONESSE 2, allée Rambrandt

ayant pour objet

Soutenir la communauté Religieuse des Moines Bouddhistes,

fac i l i ter les act iv i tés de ces Moines dans le culte et la pratique du Bouddhis­me, effectuer des publications et d 'exercer les diverses activités charitables selon les r i t e s , la croyance et les coutumes lao en France

La déclaration prescrite par la loi du 1 " juillet 1901 sera rendue publique dans un délai d'un mois à compter de ce jour (décret du 16 août 1901).

A cet effet, la demande de publication souscrite par. les déclarants a été transmise par mes soins à l'imprimerie du * Journal Officiel " à la date de ce jour.

Deux exemplaires des statuts étaient joints à la déclaration.

95010 Pontoise. le 4 Fév r ie r 1981

LE PREFET.

fZür 'o Préfet CM Je Bureau.

Signé C. LAÎÏCJSNÎÉ

PUBLIE AU JOURNAL OFFICIEL N C.1599 DU 1 4 / 0 2 / 8 1 95 - VAL D'OISE

'SIOM 4679

Page 157: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

102

EDMOND FRICOTEAUX NOTAIRE

SwccMMur *• Hr LOUIS CHASLOT

11 , rue des l'rsulincs ' Boile Postile 30

93203 S A I N T - D E N I S

CEDEX 1

CHEQUES POSTAUX PAÎIS 1529-19 X

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L'ETUDE iprei-m.di

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INITIALES A RAPPELER

DANS LA REPONSE :

CF. Dossier DAVESNE

155 £S Í20-S3-77 i:;;ne« e/c.:c.-i)

93203 SAiNT-DENis CEDEX 1. LE 16 d é c e m b r e 1981

•COMITE DE SOUTIEN DU BOUDDHISME• ET D'ACTION SOCIO CULTURELLE LAO 2 , a l l é e Rembrandt 95500 GONESSE

L J

M o n s i e u r l e P r é s i d e n t ,

J e vous in forme q u ' à v o t r e demande, j ' a i o u v e r t en mon étude. , un d o s s i e r c o n s t i t u é s u i v a n t l e s é l ément s qu i m'ont é t é f o u r n i s ve rba l emen t e t que j e n ' a i pu v é r i f i e r , d e s t i n é à l a r é g u l a r i s a t i o n d ' u n e v e n t e e n v i s a g é e p a r M. e t Mme J a c q u e s DAVESNE à v o t r e p r o f i t , de propriété s i se à VTLLIERS l e BEL (Val d 'Oise), 8 av. des Charmettes, cad. sec t . E n° 517 pour 430 m2 comprenant un pa­vi l lon d 'habitat ion élevé sur sous-sol divisé en buanderie, chaufferie, cave, d'un rez-de-chaussée divisé en entrée, cuis ine, sa l le de bains, W.C., chambre, sa l l e de séjour-salon, e t d'un étage divisé en pa l i e r , chambre mansardée ; grenier ; l e tout couvert en t u i l e s ; eau, gaz (1) moyennant l e p r i x p r i n c i p a l de CINQ CENT MILLE FRANCS (500.000 F.) payable pa r t i e de deniers de l ' associa t ion , e t pa r t i e de deniers d'emprunt.

Cette lettre vous est adressée sous réserve de toutes modifications ultérieures qui pourraient m'être signalées.

V e u i l l e z a g r é e r , Monsieur l e Président, l ' a s s u r a n c e de mes seni-iEEiits- d i s t i n g u é s e t dévoués .

(1) é l e c t r i c i t é , tout à l 'égout , chauffage central au mazout - Ter ra in . / .

Page 158: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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Fortin * U Progrès Part*

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REÇU DE (sou« reserve d'encaissement des cheques remis)

DÉLIVRÉ AUX CONDITIONS ET

CONFORMÉMENT AUX TEXTES

MENTIONNES AU VERSO

La somme de :V-

- V - . -1

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S OU J H ftttT H fl v)0 N A Cu\¿'*

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COMPTES A CRÉDITER

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CAUSE DU VERSEMENT

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^ D1 Fait à Saint-Denis

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Chèque/Vir1 N°

Chèque/Vir1 N"

VirWersement au C.C.P. Etude du C.C.P. N" V * - > s " l ^ O . j V&ïk

Page 159: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

COMITE DE SOUTIEN DU BOUDDHISME & D'ACTION SOCIO-CULTURELLE LAO

2 , A l l é e Rembrandt 955OO Goneaae

157

" WAT VELOUVANARAM "

- * -

ACTE PORTANT CHOIX D»UN SUPERIEUR DU.SANGHA

LAO AU MONASTERE VELOUVANARAM.

Noua conformant à l'enseignement bouddhique et au Vinaya

qui ordonne la vie spirituelle, morale et matérielle des moines

bouddhistes et au nom de Sa Sainteté le Patriarche du Laos, Nous

Phra Souk BOUAHOM, Phra Maha Chanthy SOUPHANTHAVONG et Phra Chao

Saysanasak NACHAMPASSAK reconnaissons par ce présent Acte avoir

porté à la Direction spirituelle de Wat Vélouvanaram Phra Maha

Chanthy SOUPHANTHAVONG.

Fait à Gonesse, le 25 Novembre 198l

Io- Phra Souk BOUAHOM .. j s-, .....

2°- Phra Maha Chanthy SOUPHANTHAVONG .

3o- Phra Chao Saysanasak NACHAMPASSAK

Sous Contreseing du Président du Comité de Soutien du Bouddhisme et d'Action Socio-Culturelle Lao.

Kim PHIMPHAVONG,

\\ s ;•....-. • ••&/£?//

Page 160: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

158

COMITE DE SOUTIEN DU BOUDDHISME & D'ACTION SOCIO-CULTURELLE LAO 2, Allée Rembrandt - 95500 Gonesse - Tél. (3) 987.5i.54

Association régie par la Loi du 1er Juillet 1901 et le décret du 16/O8/19OI - Déclarée au Journal Officiel N.C.1599 du l4/02/8l

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CS9Vjma3U321J 8201313 Mr. & Mme Jacques Marcel DAVESNE, 8 , Avenue des Charmettes

954OO VILLIERS-LE-BEL ( VAL D'OISE ) , CÍ1293CS91J U2JTÎJ CCaZ HUSmuSlJ^

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Page 161: Bouddhisme et migration : la reconstitution d'une paroisse

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¿ . - tüSüC3Ui1iai3Umn Reçu n°64660 du 17/12/81

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160 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

VILLE DE VILLIERS-LE-BEL — VAL D'OISE

Tél. 990.54.86 Service Culturel Sportif

etPériscolaire Le courrier doit être adressa à M. le Maire

CM/CR .W

Villiers-le-Bel, le 28 Juin 1983 Le Maire de VILLIERS-LE-BEL Chevalier de la Légion d'Honneur Sénateur Conseiller Général

MadameCHORON-BAIX Catherine CEDRASEMI 25 Sentier du Tourniquet

93100 M0NTREUIL-S0US-B0IS

Madame,

J'apprends avec intérêt votre projet d'entreprendre une étude sur la Communauté Laotienne de Villiers-le-Bel et Gonesse.

Cette Communauté ne s'étant pas manifestée, l'évalutation de son importance sur la Ville est très difficile.

Cependant, je reste très intéressé par toute information que vous pourrez me transmettre concernant son implantation sur Villiers-le-bel.

Veuillez croire, Madame, à l'assurance de ma considération distinguée.

*fáá*#>

La Mairie est ouverte du lundi au vendredi d e 8 h ¿ 1 2 h e t d e 1 3 h 3 0 á 1 7 h 3 0

Le Service des Affaires Générales également le samedi de 8 h à 12 h

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tradition de la forêt sous Ja direction du

Vénérable BODHINYANATHERA (ACHAAN - CHAH)

Monsieur,

Le Vénérable Nyanadharo a bien reçu votre lettre avec le questionnaire que voua lui aviez demandé de remplir. L'idée d'établir une Pagode à Metz n'a jamais été évoquée par M. Amphay Doré devant le Vénérable, autrement celui-ci lui aurait dit ce qu'il en pensait. Lors du dernier Pymay un moine de Paris est venu pour honorer vos cérémonies. Son impression sur la communauté asiatique de Metz n'e3t pas très' favorable 9 l'implantation d'une Pagode. Si de faire venir un moine pour honorer leur3 cérémonies suffit aux laïcs, pour le moine que vous allez faire venir, il va avant peu de temps se retrouver dans le même cas qui se renou­velle systématiquement ou après la première euphorie, le moine se retrouve seul, sans soutien, et, doit même faire face à sa providence.

Notre propre expérience ici à Tournon nous donne aus3i raison de vou3 mettre en garde. Au début, nous avions espéré le soutien de3 communautés asiatiques qui s'est révéré plus nébuleux qu'éffi-* cace. Toutes les promesses données n'ont Jamais été suivi d'effet réel. Si le Vénérable Nyanadharo n'avait pas été connu dans le milieu occidental comme un maître de méditation déjà trJès entouré par un noyau de fidèles trè3 dévoués, l'expérience de Tournon, n'aurait pas pu être faite. L'expérience des moines asiatiques à Paris rejoint notre propre expérience et même dans la Capitale où le3 fidèle3 asiatiques sont très nombreux, ces communautés utilisent davantage la^Pagode ou la communauté deo moines comme faire valoir pour leur3 associations mais pas du tout pour le bien du Dhamma ni pour le soutien des moines. Pour votre questionnaire, noua vous informons que nous sommes propriétaires, sans aucune subvention d'un organisme officiel ou privé. Le soutien du Monastère par les communautés asiatiques peut atre considéré comme nul, seul notre activité de Centre de Méditation nous permet d'exister.

Avec no3 sincères salutations dans le Dhamma.

Dhammathina'

6, chemin de Houcharin . 07300 TOURNON • FRANCE

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Un enfant de 9 ans exorcisé par un bonze

II est toujours hasardeux d'avancer sur le ténébreux sentier de la magie noire, d'autant plus qu'il n'était plus temps de se procurer une amulette de protection. Tant pis. Actualité oblige. Depuis plusieurs semaines, une histoire de sorcellerie secoue la rue du Maine à Metz-Borny. Un garçon de 0 ans a été envoûté, selon ses pa­rents, par des voisins. Rassurez-vous il va beaucoup mieux. II vient d'être exorcicé par un bonze laotien dont la pagode est installée quelques immeubles plus loin.

Ames sensibles s'abstenir. En cette ère du Verseau, les puissan­ces maléfiques sont en marche. A Borny notamment, où des por­tes s'ouvrent sur les travaux mystérieux des praticiens de la magie noire.

Au No 8 de la rue du Maine, Mme Ginette Vemhes, mère de six enfants ne fait aucun secret, au contraire, du mauvais sort que l'on a jeté à son fils Daniel, 9 ans. Elle décrit les symptômes de I'«ensorcellement».

«C'est à l'école que l'on a constaté tout d'abord du chan­gement dans son comportement.. Mon garçon qui était tête de classe n'arrivait plus à suivre. De plus il était sujet à des malai­ses. Il se mettait à transpirer et tombait quelquefois en syn­cope ».

A ce stade, objectivement Mme Vemhes pose le problème sur le plan strictement médical. « Nous avons consulté le méde­cin traitant, puis, il faut l'avouer, d'autres praticiens. Personne ne décelait - l'origine du mal. Finalement Daniel a été ilacé en observation une di­

zaine de jours à l'hôpital Bon Secours où il a subi tous les exa­mens imaginables. Sans plus de résultat. Mais pendant le séjour hospitalier il faut noter que ses malaises avaient cessé. Ils ont repris dès son retour à la mai­son».

Sorcellerie et contre-magie

Puisque le corps médical est impuissant, la famille Vemhes

se tourne vers l'Eglise. La ma­man de Daniel affirme. «Nous avons consulté l'exorciste de l'évêché. Il nous a dit que l'en­voûtement ne faisait aucun doute mais que lui-même étant souffrant il ne pouvait interve­nir». Dès lors pour conjurer le mauvais sort, les Vemhes tirent toutes les sonnettes. Finalement ils obtiennent l'intervention des bonzes laotiens de Borny. Une pagode est en effet Installée de­puis un an environ au 22, de la rue du Maine. Ce temple boud­dhique est dirigé par un Vénéra­ble qui ne quitte qu'exception­nellement la position du lotus...

• Il accepte, néanmoins, de contre- ' attaquer l'offensive occulte qui a pris pour cible le petit Daniel.

L'enfant, depuis un mois, ne joue plus, ne dort plus, ne mange plus. « Il a perdu six kilos », pré­cise sa mère.

Heureusement le Vénérable est là. Imposition des mains for­mules cabalistiques et talisman. En une seule séance, Daniel est désenvoûté mais il doit porter jour et nuit un collier magnétisé. Il faudra d'autres Interventions des prêtres bouddhistes pour exorciser l'appartement.

Le démon a bon dos?

Mais plusieurs précautions va­lent mieux qu'une. Sur le conseil des bonzes, Mme Vemhes ré­pand du sel sur le paillasson, fait figurar dovoiil sa porto Iqsrepró-5oatäi^ns_du_>_dieu_£C3oJIla déesse des... sorciers » entre un crucifix, s'achète, pour elle, une

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Daniel ne quitte jamais son collier magnétisé par les bonzes.

croix du Christ et multiplie les objets religieux dans l'apparte­ment.

Et pour donner bonne mesure à l'événement, M. Vemhes écrit au parquet, a la préfecture, à la présidence de la République I

Cette affaire de sortilège, fait grand bruit à Bomy. D'autant que les Vemhes accusent des voisins de magie noire. Les incri­minés retournent ces accusa­tions à l'envoyeur. Il va de soi que dans ce contexte le cli­mat relationnel n'est pas au beau fixe, rue du Maine.

A la limito, toute coito hlstolro n'est peut-être qu'une mauvaise querelle de palier. Mais il est cer­tain que l'enfant Daniol a souf­

fert réellement de troubles psy­chosomatiques graves. Alors ?

Alors la sorcellerie a peut-être bon dos. Elle est contagieuse, qui plus est. Il semble que d'autres personnes témoignent de maléfi­ces dont elles sont l'objet. A moins qu'elles ne prêtent au dé­mon des soucis quotidiens aux­quels elles ne savent plus faire front.

Toujours est-il que depuis quelques semaines un quartier de Borny se laisse engloutir par des ténèbres ensorcelées. Qu'y faire ? Le bûcher appartient heu-nniaoniunt au passé. Lo culto mu-gique n'est pas un délit.

Werner WIRTZ.

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V-.;- •':,•'.;, " EA'-^A^uC^ 20 mal 1983 LOR.

! Il a exorcisé un enfant de. neuf ans V

¡Dans la seule «Pagode» de l'Est un bonzeképand à Metz renseignement de Boudha METZ. — Born?. Un quar­

tier HLM de Mets où vit la majorité des réfugiés asiati­ques arrivés depuis 1978 en Moselle. Plusieurs cental- -nés. Un millier peut-être. Vietnamiens, Cambodgiens, Laotiens. Des rues aux noms de provinces françaises. Rue du Maine, au 22 : des trallltl et un escalier qui perd son carrelage. > On monte trois ¿taces, on sonne. Un bonzil-Ion en robe safran vient' ouvrir. C'est la. On enlevé. ses chaussures à l'entrée, on glisse sur la moquette usée d'un salon désertique. Phra Khamsanr Sourasack est assis sur le coté, à la fols' {rave et enrageant, mas­quant une petite pièce où l'autel, un magnifique autel, est dressé. On. est dans la • Pagode». La seule pagode bouddhiste laotienne de tout l'Est de la France, en présence du seul bonze.

II y a deux mois vivaient dans ce deux pièces modeste mais lumineux deux Vénéra­bles. L'un est mort le 19 mars dernier. Il s'appelait Kham-' bang Phomleuandl. Son coeur avait été trop ébranlé par la vie dure des camps de réfugiés. Il s'est éteint à Metz, à l'âge de 33 ans, après avoir apporté beaucoup de réconfort à la communauté des laos, les Laotiens des plaines, qui pratiquent le • bouddhisme du petit véhi­cule».

Toutes les viandes.» sauf l'éléphant

L'autre bonze, Phra Kham-sang Sourasack • qui fut. marié et travailla comme surveillant à l'aéroport de Luang Trapang jusqu'en 1970, avant de fuir le Pathet-Lao et se réfugier dans une • pagode» - vit aujourd'hui avec un jeune bonzillon dans . l'appartement. Le novice suit les enseignements spirituels de son maître et l'aide à faire le ménage et la cuisine.

I » 'vénérable KHAM SANO SOURAZACK devint l'autel où II médite plusieurs heures par jour.

Le bonze, lui, passe. une grande partie de sa journée en méditation. Il sort aussi quand ses fidèles l'Invitent pour purifier la maison d'un malade, animer les cérémo­nies de mariages, de décès, de naissances, célébrer les fêtes, etc.. .Mine de, rien, la jouméed'un bonze est bien rempile, même dans une

. •pagode' HLM» qui n'a pas encore été consacrée et attend pour cela un bouddha •déjà» consacré, qui doit

1 arriver cet ¿té de Bangkok; si tout va bien.

En attendant, le Vénérable se lève chaque matin à cinq heures ; il prend son petit déjeuner -du café au lait, pas du thé • puis il fait sa prière quotidienne pour la purifica­tion de l'esprit et du coeur. D'abord il se concentre et médite pour lui-même • car il faut gagner des «bouns», c'est-a-dire des biens, des sortes d'indulgences, dans la perspective d'une réincarna­tion meilleure - puis il prie pour les autres, pour le bien-être et la prospérité de tout ce qui est vivant : les hommes et les animaux. A i l h, les fidèles viennent offrir &

manger au bonze; le seul repas de la journée ' qu'il fera : le plus souvent de la ' viande cuite avec des légu­mes, ou du riz gluant, l'ali­ment de base des Laotiens :<J'ai le droit de manger toutes les viandes, sauf l'éléphant, le tigre, le chien et le chat», dit-il par l'Intermé­diaire d'un traducteur. Comme quoi un bonze ce • n'est pas forcément végéta­rien. D'ailleurs il fume aussi, des «Benson and Hedges» (•ce n'est pas interdit), et se considère comme un simple réfugié. Ce n'est pas un saint, " mais un guide. Dans la reli­gion bouddhique, s'il y a des commandements proches d'ailleurs de ceux des chré­tiens, par contre il n'y a pas de Dieu suprême, mais sim­plement les enseignements du Bouddha et les Mantra, des prières qui sont plutôt des méditations Incantatoi­res. Le bonze en est le dépositaire humble et provi­soire. Contrairement aux prêtres, il peut en effet quit­ter à tout Instant la »Pagode« et la toge rouge orangé, reprendre la vie active et revenir plus tard parmi les bonzes.

L"í''-",'-"V.'! i-: nviyz-S'-¿j

La - pagode -, c'esf »vanf touf un appartement HLM où l'on vit aussi, \ comme tout le monde.

Un bonzillon vit avec le bonze et s'enrichit de son enseignement et de sa sagesse, tout en l'aidant a faire le ménage et la cuisine.

(Photos René POSCHBACH).

Pour tous renseignements, Béarn, 37070 Mets - tél. 737 s'adresser i l'Association 23 23 ( lundi, mercredi; ' franco-asiatique d'échanges - . --et de loisirs, 3, rue du Languedoc, Ibis, rue du

vendredi, 11 h • 12 h 30 ;' mardi, 18 h-19 h ; jeudi 14-16 . h)

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165

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:- . •'.. 3, Avenue des Charmettes '-. '.=.-',. ...-...- '.':'' -h . - V-Gonesse, le 15 ,Juin 1983 •"'•.: .'95400 Villiers-Le-Bel ' .;. "' , -"• * "':'•• -\'~' """• .v ' ''.'"* -'•'" ' f ' •• •""•.-..

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--. .,-;-'r--\. ; '_. -. ..-." ..V :-v;. "AJla Fête de l'Entrée du Carême Bouddhique " "

-.':. • ,\. /.Sousîle Patronage ."de Vén/. Chanthy* SOUPHANTHAVONG ,• Chef de la Pagode l';V :.'" - W A T VELOUVAHARAM"'à Villiers-Lé-Bel"«: !la communauté des" Koines-Bouddhistes,

. -, ; '_'•:'•.Le.Comité de Soutien au Bouddhisme & d'Action Socio-Culturelle Lao ..'•*•• ." " ', •• '."..;-vous prie de bien Vouloir honorer de votre présence la Fête :de l'Entrée du Carême '. '

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.. ;•.'-.;--•... - lb,00 \: .Fin de la cérémonie v"' .'-y) _'/. .y" -,". v\. .

Nous vous souhaitons la bienvenue Ce bonne Fête

..-,,"•. " - LE COMITE DE FETE " '.

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G*o•B* C« 8,'Avenue des Charmettes 95400 Villiers-Le-Bel

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•N° 26 /CSBC

Gonesse, l e 10 Mai 1983

* ' I N V I T A T I O N

A l a Fê te de V I X A K H A B 0 U.X A

Sous le Patronage du Vén. Chanthy SOUPHANTHAVONG, Chef de la Pagode »WAT VELOUVANARAM'1 â Villiers-Le-Bel & la communauté des Moines Bouddhistes,

Le Comité de Soutein au Bouddhisme & d'Action Socio-Culturelle Lao vous prie de bien vouloir honorer de votre présence la Fête de VIXAKHABOUXA qui aura lieu : ...•-• -, . . LE DIMANCHE, 29 MAI 19Ö3

Au Restaurant Scolaire Claret - Rue Claret - 9550° Gonesso

P R O G R A M M E

09hOO 09,50 11,00 12,30 13,30 16,00

Réunion dos Fidèles & Invités . ! Cérémonie Religieuse Déjeuner des Bonzes Buffet & buvette réservés aux participants Prêche dos Bonze3 Fin de la Cérémonie

MERVI & BONNE-FETE

LE COMITE DE FETE

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Planches photos

Le vénérable .' Mana Chanty officiant lors du Boun Mackha Bouxa dans les locaux du restaurant scolaire Claret/ à Gonesse/ en 1984 168

L'assemblée des fidèles au boun Mackha Bouxa 169

Les offrandes destinées aux bonzes 170

Un exemple d'autel familial dans un foyer lao de la banlieue parisienne ; . . .171

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168

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Le vénérable Mana Chanty, chef du vat Velouvanaram, officiant lors

du Boun Mackha Bouxa, dans les locaux du restaurant scolaire Claret,

à Gonesse, en 1984,

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169

L'assemblée des fidèles au boun Mackha Bouxa/ en 1984.

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170

Les offrandes destinées aux bonzes.

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Un exemple d'autel familial dans un foyer lao de la banlieue

parisienne.