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— DÉCEMBRE 2012 — SOMMAIRE Comité de rédaction : Guillaume Balas, Annabelle Janodet, Mila Jeudy, Jules Joassard, Stéphane Olivier, Sophie Taillé-Polian, Roberto Romero Ont également participé à ce numéro : Charlotte Brun, Hélène Pasquier, Emir Deniz, Emmanuel Recht, Martin Meyrier, Anne-Claire Le Bodic, Raphaël Delaure, Nadia Pellefigue Le salaire moyen des patrons du CAC 40 a été de 4,2 millions d’euros par an en 2012, soit une hausse de 4%. Dans le même temps, le salaire médian des français est resté lui à 17 520 €, en hausse de … 0,7%. Plus de 8,6 millions de personne dans notre pays vivent avec moins de 964 euros par mois. Les français ne supporteront plus longtemps de sans cesse fournir plus d’efforts quand les plus aisés se soustraient à toute forme de solidarité, et choisissent même parfois l’exil fiscal. Il est urgent de répondre à l’aspiration de Justice si nous ne voulons pas prendre le risque que ces femmes et ces hommes perdent toute confiance en l’action publique, en la politique et en la gauche. Le ressenti par les français de la politique gouvernementale est très mitigé. L’épisode de Florange a pu donner l’impression que le Gouvernement ne se donnait pas tous les moyens de peser au côté des salariés dans le rapport de force engagé avec Mittal. Mais dans le même temps, les annonces faites par Jean-Marc Ayrault en clôture de la Conférence nationale de lutte contre la pauvreté (augmentation de 10% du RSA, baisse du taux de non recours aux prestations sociales, garantie jeunes, effort maintenu pour le logement social et accentué pour l’hébergement d’urgence) vont dans le bons sens et répondent à une véritable urgence sociale. Nous avons aujourd’hui besoin de faire basculer le Gouvernement vers un véritable volontarisme de Gauche. Pour mener cette bataille nous avons besoin de l’unité de toutes les forces progressistes. Nous pensons que cette unité ne pourra être construite qu’autour d’un projet global et de la définition d’un nouveau paradigme socialiste. Cette reconstruction culturelle passe par un élément central : la finalité de la question énergétique et la collectivisation de ces ressources. Communistes, écologistes eux aussi se posent des questions sur la pertinence de leur pensée. C’est à partir de ce paradigme que la gauche se rassemblera pour répondre aux enjeux du 21 ème siècle. Rassembler la gauche en France mais aussi en Europe pour construire ensemble une alternative au libéralisme sur le long terme telle va être l’action d’Un Monde d’Avance. C’est la chose la plus utile à faire pour qui veut la réussite de la gauche au pouvoir et éviter qu’une fois encore les classes populaires et moyennes qui nous ont porté au pouvoir se détournent de nous. La question européenne occupera encore une bonne part de l’agenda politique de ces prochains mois c’est pourquoi notre bulletin y est en grande partie consacré. C’est à ce niveau que les prochaines batailles politiques vont prendre place. En présentant une contribution co- signée par une vingtaine de députés allemands de l’aile gauche du SPD, une première au parti socialiste, nous avions posé le premier acte d’un rassemblement des gauches européennes. C’est sur ce chemin que nous allons maintenant avancer. D’ici là, toute l’équipe d’Un Monde d’Avance vous souhaite d’excellentes fêtes ! Guillaume Balas, Secrétaire Général d’Un Monde d’Avance EDITO P.1 EDITO P.2 VIE DU PARTI Entretien avec Charlotte Brun, secrétaire nationale à la petite enfance, aux personnes âgées et aux handicap au PS P.3 VIE DU PARLEMENT Budget 2013 : un budget de combat au service de la justice Adoption du pacte Hammadi-Richard sur la croissance et l’emploi Crédit d’impôt : l’amendement excluant les sociétés cotées au CAC 40 P.6 DOSSIER DU MOIS « EUROPE » Les socialistes face à la prochaine étape de l’intégration européenne Entretiens avec Françoise Castex, Isabelle Thomas, Liêm Hoang Ngoc, députés français au Parlement européenn / Anni Podimata, députée grecque, vice-présidente du Parlement européen / Hannes Swoboda, député autrichien, président du groupe socialiste et démocrate au Parlement européen P.15 VIE DES GROUPES DE TRAVAIL UMA Préparer nos propositions pour le débat sur la décentralisation P.16 ACTUALITÉS Sidérurgie française : histoire d’un grand gâchis Jeunesse & Pauvreté : des chiffres préoccupants Succès de la manifestation pour l’égalité pour tous ! Retour en images P.20 A LIRE / A VOIR / A ECOUTER / AGENDA Bulletin de Liaison d'Un Monde d'Avance, la Gauche décomplexée

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Page 1: BLUMA décembre 2012

BLUMA /// Décembre 2012 /// 1

— DÉCEMBRE 2012 —

SOMMAIRE

Comité de rédaction : Guillaume Balas, Annabelle Janodet, Mila Jeudy, Jules Joassard, Stéphane Olivier, Sophie Taillé-Polian, Roberto Romero

Ont également participé à ce numéro :

Charlotte Brun, Hélène Pasquier, Emir Deniz, Emmanuel Recht, Martin Meyrier, Anne-Claire Le Bodic, Raphaël Delaure, Nadia Pellefigue

Le salaire moyen des patrons du CAC 40 a été de 4,2 millions d’euros par an en 2012, soit une hausse de 4%. Dans le même temps, le salaire médian des français est resté lui à 17 520 €, en hausse de … 0,7%. Plus de 8,6 millions de personne dans notre pays vivent avec moins de 964 euros par mois.

Les français ne supporteront plus longtemps de sans cesse fournir plus d’efforts quand les plus aisés se soustraient à

toute forme de solidarité, et choisissent même parfois l’exil fiscal. Il est urgent de répondre à l’aspiration de Justice si nous ne voulons pas prendre le risque que ces femmes et ces hommes perdent toute confiance en l’action publique, en la politique et en la gauche.

Le ressenti par les français de la politique gouvernementale est très mitigé. L’épisode de Florange a pu donner l’impression que le Gouvernement ne se donnait pas tous les moyens de peser au côté des salariés dans le rapport de force engagé avec Mittal. Mais dans le même temps, les annonces faites par Jean-Marc Ayrault en clôture de la Conférence nationale de lutte contre la pauvreté (augmentation de 10% du RSA, baisse du taux de non recours aux prestations sociales, garantie jeunes, effort maintenu pour le logement social et accentué pour l’hébergement d’urgence) vont dans le bons sens et répondent à une véritable urgence sociale. Nous avons aujourd’hui besoin de faire basculer le Gouvernement vers un véritable volontarisme de Gauche. Pour mener cette bataille nous avons besoin de l’unité de toutes les forces progressistes.Nous pensons que cette unité ne pourra être construite qu’autour d’un projet global et de la définition d’un nouveau paradigme socialiste. Cette reconstruction culturelle passe par un élément central : la finalité de la question énergétique et la collectivisation de ces ressources. Communistes, écologistes eux aussi se posent des questions sur la pertinence de leur pensée. C’est à partir de ce paradigme que la gauche se rassemblera pour répondre aux enjeux du 21ème siècle. Rassembler la gauche en France mais aussi en Europe pour construire ensemble une alternative au libéralisme sur le long terme telle va être l’action d’Un Monde d’Avance. C’est la chose la plus utile à faire pour qui veut la réussite de la gauche au pouvoir et éviter qu’une fois encore les classes populaires et moyennes qui nous ont porté au pouvoir se détournent de nous.

La question européenne occupera encore une bonne part de l’agenda politique de ces prochains mois c’est pourquoi notre bulletin y est en grande partie consacré. C’est à ce niveau que les prochaines batailles politiques vont prendre place. En présentant une contribution co-signée par une vingtaine de députés allemands de l’aile gauche du SPD, une première au parti socialiste, nous avions posé le premier acte d’un rassemblement des gauches européennes. C’est sur ce chemin que nous allons maintenant avancer.

D’ici là, toute l’équipe d’Un Monde d’Avance vous souhaite d’excellentes fêtes !

Guillaume Balas, Secrétaire Général d’Un Monde d’Avance

EDITO

P.1 Edito

P.2 viE dU PARti• Entretien avec Charlotte Brun, secrétaire

nationale à la petite enfance, aux personnes âgées et aux handicap au PS

P.3 viE dU PARLEMENt• Budget 2013 : un budget de combat au

service de la justice• Adoption du pacte Hammadi-Richard sur

la croissance et l’emploi• Crédit d’impôt : l’amendement excluant

les sociétés cotées au CAC 40

P.6 doSSiER dU MoiS « EURoPE »Les socialistes face à la prochaine étape de l’intégration européenneEntretiens avec Françoise Castex, Isabelle Thomas, Liêm Hoang Ngoc, députés français au Parlement européenn / Anni Podimata, députée grecque, vice-présidente du Parlement européen / Hannes Swoboda, député autrichien, président du groupe socialiste et démocrate au Parlement européen

P.15 viE dES GRoUPES dE tRAvAiL UMA• Préparer nos propositions pour le débat

sur la décentralisation

P.16 ACtUALitÉS• Sidérurgie française : histoire d’un grand

gâchis• Jeunesse & Pauvreté : des chiffres

préoccupants• Succès de la manifestation pour l’égalité

pour tous ! Retour en images

P.20 A LiRE / A voiR / A ECoUtER / AGENdA

Bulletin de Liaison d'Un Monde d'Avance, la Gauche décomplexée

Page 2: BLUMA décembre 2012

BLUMA /// Décembre 20122 ///

BLUMA : Charlotte Brun tu as été dé-signée Secrétaire Nationale du PS en charge de la petite enfance, des per-sonnes âgées et du handicap. Bon nombre de militants te connaissent mais peux-tu nous en dire plus sur ton parcours ? Charlotte Brun : J’ai 36 ans, je me suis enga-gé en politique à Cergy où j’avais grandi avant d’adhérer au MJS et d’en devenir Présidente en 2001. Je suis aujourd’hui première adjointe de la commune d’Ecouen dans le Val d’Oise et Conseillère Régionale d’Ile-de-France. Je suis professeure d’histoire-géographie en collège et maman de deux enfants.

BLUMA : Au Congrès de Reims, tu avais déjà été désignée Secrétaire Nationale en charge des personnes âgées, du han-dicap et de la dépendance. tu sais donc déjà ce que signifie cette responsabi-lité.

C.B. : Effectivement ce premier mandat m’a permis de bien comprendre ce que signifiait la charge d’un secteur thématique au sein de la direction du Parti. Il s’agit d’animer la réflexion, de rencontrer les acteurs associatifs et sociaux de son domaine, de produire des notes, des communiqués de presse et de formuler des propositions. Dans ce nouveau mandat, il me semble nécessaire de devancer la réflexion et l’action du Gouvernement. Par exemple le Parti peut lancer des campagnes d’opinion, prépa-rer les projets qui pourraient demain être re-pris par l’exécutif, mener la bataille culturelle

contre la droite. Les secrétaires nationaux doivent construire un parti fort, en campagne permanente.

BLUMA : En l’occurrence, comment cela se traduit dans le domaine précis dont tu as la charge ?

C.B. : Les sujets qui m’ont été confiés ont pour point commun leur lien avec la protection so-ciale. Or il me semble qu’il convient aujourd’hui de faire évoluer notre système vers une plus grande solidarité et vers la prise en compte des évolutions de notre société. Comment construire l’égalité réelle quel que soit l’âge de la vie ? Comment adapter notre société à l’allongement de la durée de la vie ? Comment donner une juste place à toutes les généra-tions ? Comment construire l’accessibilité uni-verselle quels que soit l’âge ou le handicap ? Quelle place donner à l’enfant qui est trop souvent un « impensé de la Gauche » qui est soit appréhendé comme simple membre de la famille ou comme simple élève et pas comme un sujet à part entière ? Je souhaite que le Parti Socialiste poursuive la réflexion pour une réelle prise en compte de la perte d’autonomie, pour une réflexion propre et transversale sur la place de l’enfant ou pour une nouvelle étape de la prise en charge du handicap. Ce n’est pas le moindre des paradoxes.

Les personnes en perte d’autonomie, qu’elles soient âgées ou handicapées, n’ont jamais été aussi nombreuses. Pourtant, la droite n’a eu de cesse de détricoter la loi de 2005, de la vider de son sens et de moyens. C’est à un

changement complet de démarche auquel nous sommes aujourd’hui appelés.

Les chantiers sont nombreux. Il s’agit, bien sûr, des moyens donnés aux établissements et aux associations qui agissent dans ce sec-teur – et aux départements qui les financent. Il s’agit également de faire un véritable effort sur le logement, pour accroitre l’autonomie des personnes et leur permettre, le plus possible, de sortir des institutions et de rester à leur domicile dans les meilleures conditions. Mais plus globalement, il faut surtout changer notre vision d’ensemble sur la question du handi-cap et de la perte d’autonomie. Nous devons sortir du compassionnel pour être dans une démarche de respect recherchant honneur, dignité et bien être pour chacun. Sous la pré-sidence de Nicolas Sarkozy, les jeunes enfants ont également été les victimes d’une vision ul-tra-libérale. Ainsi, la droite a leurré les familles en annonçant des créations de places alors qu’il s’agissait en réalité d’un abaissement des normes d’encadrement. C’est au contraire pour assurer l’égalité entre les enfants dès le plus jeune âge en confortant le rôle des profession-nels et en renforçant leur fonction éducative que nous souhaitons créer un véritable service public de la petite enfance, c’est à dire un cadre légal national, des compétences clarifiées, une gestion de proximité et un financement proté-gé pour éviter que la branche famille ne serve à rembourser la dette sociale comme presque chaque année désormais.

Propos recueillis par Jules Joassard

ENTRETIEN AVEC CHARLOTTE BRUN, secrétaire nationale à la petite enfance, aux personnes âgées et aux handicaps au PS

VIE DU PARTI

Le parti vient d’annoncer sa nouvelle équipe suite au congrès de toulouse, et notamment les nouveaux secrétariats nationaux. Plusieurs camarades ont ainsi été désignés pour animer les idées et les propositions du parti sur des thématiques précises (voir Bluma Flash n°4). Charlotte Brun a été ainsi désigné secrétaire nationale à la petite enfance, aux personnes âgées et aux handicaps.

Il faut changer notre vision d'ensemble sur la question du handicap et de la perte d'autonomie.

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VIE DU PARLEMENT

// Le budget, mode d'emploi

Chaque année à l’automne le Parlement consacre de longues et studieuses semaines à l’examen du Budget. Garantie démocratique, il s’agit pour les représentants du peuple, dé-positaires du pouvoir législatif, de consentir le niveau des prélèvements fiscaux et d’en suivre l’emploi. Le Gouvernement présente un texte en deux parties (les recettes et les dépenses) et les parlementaires (députés et sénateurs) en assurent un examen approfondi. Pour ce faire, chaque mission ou chaque programme fait l’objet d’un rapport au fond par un membre de la commission des finances et d’un rapport pour avis de la part d’un membre d’une des autres commissions permanentes de l’Assem-blée Nationale (Défense, Affaires Economiques, Affaires Culturelles et d’Education, Affaires Sociales, Affaires Etrangères, Développement durable et Lois).Au total l’Assemblée Nationale consacre chaque année au débat budgétaire environ 150 heures, en séance publique et en commission élargie et bien plus encore avec l’examen dans les différentes Commissions. Nos parlementaires décomplexés ont pleinement joué leur rôle dans la préparation de ce budget de

combat, clairement de gauche, pour sortir de l’endettement, soutenir la création d’emplois, l’industrie, le logement et redonner un avenir à l’école.

// Un budget au service des priorités du Gouvernement

Les efforts nécessaires pour réparer les dégâts de la politique irresponsable en matière de déficits menée sous Sarkozy et Fillon seront donc partagés. Les hauts revenus et le capital sont notamment mis à contribution.

Ce budget est clairement au service des priorités gouvernementales :• Priorité à la jeunesse, avec le

remplacement total des départs à la retraite des enseignants, la création de 16 000 postes dans l’Education, de 1000 emplois dans les Universités et de 10 000 contrats de Service Civique.

• Priorité à l’emploi avec la création de 100 000 emplois d’avenir et les contrats de génération pour les jeunes, le maintien intégral des 390 000 contrats aidés et le recrutement de 2000 CDI à Pôle Emploi.

• Priorité à la sécurité et la justice avec la création de 520 postes pour la justice et de 480 postes dans la Police et la Gendarmerie.

L’effort de solidarité portera d’abord sur les ménages les plus aisés (alourdissement de l’ISF pour les plus gros patrimoines, contribution exceptionnelle de 75% au-delà d’un million d’euros) : sur un total de 16 milliards d’euros de recettes nouvelles, 6 pèseront sur les plus fortunés et 9,5 sur les grandes entreprises.

Dans le détail plusieurs députés « Un Monde d’avance » se sont illustrés dans le travail budgétaire et notamment Régis Juanico, rapporteur du Budget des Sports, de la Jeunesse et de la Vie Associative, Michel Pouzol responsable du Budget Presse et Médias ou Mathieu Hanotin, qui est notamment intervenu sur la question de l’habitat insalubre et de la solidarité territoriale.

Nous vous parlions également du CICE et de la hausse de la TVA dans le dernier Bluma. De nombreux députés ont porté des amendements sur la nécessaire conditionnalité de ces crédits d’impôts (voir ci-après).

BUDGET 2013 : UN BUDGET DE COMBAT AU SERVICE DE LA JUSTICE

© Assemblée Nationale

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BLUMA /// Décembre 20124 ///

VIE DU PARLEMENT

Traditionnellement la presse française bénéficie d‘un système complexe et très structuré. Ces aides qui, se concentrent

notamment sur la diffusion, avaient initialement pour but de soutenir la presse citoyenne et d’actualité en permettant à tous, où qu’ils soient sur le territoire, d’y avoir accès.Pourtant, face à l’évolution des techniques d’information, de la vitesse de diffusion de l’information brute aidée par de nouveaux

supports, force est de constater que ni les modes d’aide à la presse écrite, ni ses nécessaires adaptations n’ont été réellement engagées ces dix dernières années.La presse est en pleine mutation : une mutation technologique avec la démocratisation des nouveaux outils de lecture électroniques, une mutation sociétale avec l’explosion de la presse loisir et le recul, jour après jour, de la presse d’opinion et d’information. Une mutation

financière, enfin, avec l’effondrement de modèles économiques obsolètes. Ces mutations ne se sont cependant pas accompagnées d’une mutation de même ampleur des aides accordées à ce secteur. À bien y regarder, le soutien à la presse écrite, c’est, pour le lecteur, la condition de la liberté de choix, quels que soient son territoire et ses opinions, c’est donc un gage de cohésion républicaine.

J’ai été désigné rapporteur du Budget des Sports, de la Jeunesse et de la Vie Associa-tive par la Commission des Finances. A ce

titre, j’ai travaillé depuis l’été avec les services du Ministère et avec ceux du rapporteur spé-cial du Budget sur la préparation du Budget et je l’ai présenté devant la Commission élargie en parlant d’un budget tourné vers l’avenir.

De fait, les crédits demandés pour la mission s’élèvent à 456 millions d’euros en autorisa-tions d’engagement et à 462,8 millions d’euros en crédits de paiement. Si l’on veut apprécier pleinement les moyens consacrés par l’État aux politiques publiques du sport, de la jeu-nesse, de la vie associative et de l’éducation populaire, il faut ajouter aux crédits de cette mission stricto-sensu, ceux en provenance du programme de soutien de la mission So-lidarité, insertion et égalité des chances qui retrace les crédits des dépenses de person-nel et des fonctions support du Ministère des Sports, de la Jeunesse et de la Vie Associative. Avec ces déversements externes et les fonds de concours prévus, la mission voit donc ses moyens en coût complet augmenter d’environ

2,8 % en 2013 par rapport à 2012 avec 962,2 millions d’euros en crédits de paiements. Il est par ailleurs important de souligner que les em-plois de la mission sont globalement préservés en 2013.

En conséquence, le projet de loi de finances préserve intégralement les missions priori-taires du Gouvernement : le développement de la pratique sportive à tous les âges de la vie, le sport pour tous et pour le plus grand nombre, la promotion de la santé par le sport (lutte contre le dopage et sport bien-être) et la lutte contre les inégalités dans l’accès au sport.Pour ce qui est de la politique en faveur de la Jeunesse, de la vie associative et de l’éducation populaire, l’effort financier global consacré par l’État aux politiques publiques en faveur de la jeunesse s’élève à 82,5 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 80,5 milliards d’euros en crédits de paiement en 2013. Cet effort traduit pleinement la priorité accordée par le Président de la République, François Hollande et son gouvernement à la jeunesse. Avec les fonds de concours prévus, ces cré-dits augmentent de plus de 6,7 % l’année

prochaine. La programmation triennale prévoit une augmentation de près de 40% d’ici 2015. Cette progression tranche avec la forte baisse tendancielle des crédits du programme enre-gistré au cours de la dernière législature : plus de 48 millions d’euros, soit – 37 % sur la pé-riode 2008-2012.

Le programme Jeunesse et vie associative pré-serve intégralement les moyens financiers en faveur de la vie associative, en particulier pour la formation des bénévoles et le soutien aux grands réseaux associatifs. La stabilisation des crédits pour les associations se double d’un ef-fort sans précédent en faveur de l’emploi asso-ciatif avec le maintien de 3 600 postes FONJEP dans le budget pour les petites structures, le déblocage par le gouvernement, dès cette an-née de 120 000 nouveaux contrats aidés et le lancement des premiers emplois d’avenir la semaine dernière. Le présent projet de loi de finances prévoit en outre 160 millions d’euros pour financer la montée en charge du service civique, avec un objectif de 30 000 jeunes en 2013.

RÉGIS JUANICO, RAPPORTEUR DU BUDGET DES SPORTS, DE LA JEUNESSE ET DE LA VIE ASSOCIATIVE

MICHEL POUZOL, RESPONSABLE DU BUDGET PRESSE-MÉDIA

Le soutien à presse écrite, c'est, pour le lecteur, la condition de la liberté de choix, (...) c'est un gage de cohésion républicaine.

Le projet de loi de finances préserve intégralement les missions prioritaires du gouvernement.

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VIE DU PARLEMENT

Au cours des discussions à l’Assemblée Nationale sur le budget 2013, j’ai porté et relayé des amendements qui poursui-

vaient un objectif : accroitre la solidarité terri-toriale et la solidarité.

J’ai souhaité ouvrir un débat sur la question de l’habitat insalubre et des sources de finance-ment pour lutter contre ce fléau. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé de taxer l’immobilier de luxe. En effet, comment peut-on accepter qu’en Ile-de-France, à quelques kilomètres de distance, des familles s’entassent dans des taudis dangereux pour leur sécurité, et que dans le même temps, des appartements luxueux se vendent pour certains plus de 10 millions d’euros ? J’ai donc proposé que ces

riches acheteurs soient mis à contribution pour financer les programmes de rénovation de l’habitat indigne. L’idée, si elle n’a pas été reprise à l’identique, a toutefois fait son chemin. Ainsi, dans le projet de loi de finance rectificative, le gouvernement a proposé de taxer plus fortement les très fortes plus-values à la vente d’un bien immo-bilier. Les moyens issus de cette taxation iront à l’ANRU.

J’ai également pris part, aux côtés d’autres députés de la petite couronne de région pa-risienne, aux discussions sur les finances des collectivités et sur l’amélioration nécessaire de la péréquation et de la solidarité territoriale. Un département comme la Seine-Saint-Denis est

considéré comme riche au regard des critères actuels de péréquation, alors même qu’il doit agir en faveur d’une population de plus en plus précaire ! Les dépenses de solidarité comme le RSA pèsent ainsi de plus en plus lourd dans le budget, et pourtant le département doit re-verser plusieurs millions d’euros au titre de la péréquation horizontale. Le gouvernement a accepté d’attribuer une enveloppe supplémen-taire de 170 millions d’euros pour venir en aide aux départements les plus en difficulté. C’est une avancée. Je serai vigilant, notamment pour que dans la future loi sur la décentralisation, la situation des collectivités des territoires popu-laires soit mieux prise en compte.

Les propositions budgétaires qui ont été faites cette année sont autant des mesures de sauvetage que des mesures d’urgence. La situation reste particulièrement préoccupante et, dans ce domaine comme dans bien d’autres, l’héritage de la droite est calamiteux. Si les États généraux de la presse convoqués par l’ancienne majorité avaient posé un bon diagnostic, ils n’ont pas permis d’apporter des réponses à la hauteur de la crise du secteur, tant dans le domaine des aides directes ou indirectes, que sur le soutien de la presse en ligne ou sur le portage.Au sein du groupe socialiste nous avons défendu l’idée qu’il nous fallait repenser en profondeur les aides à la presse écrite dans leur ensemble dans une logique de meilleure répartition des moyens.Il est en effet paradoxal que notre presse, aujourd’hui parmi les plus aidées au monde, traverse une crise récurrente sans précédent. Si l’on rapporte les aides au nombre de numéros vendus, elles n’ont même jamais été aussi importantes que cette année ; les aides de l’État sont à l’origine de 11 % du chiffre

d’affaires du secteur et pourtant la presse quotidienne est à l’agonie.

La presse d’information politique et générale absorbe moins d’un tiers du 1,2 milliard d’euros d’aides annuelles. Pire, lorsque l’on regarde la liste des trente publications les plus aidées, on retrouve cinq hebdomadaires de programmes de télévision ! Si la presse télévisée ou la presse de loisir en général a bien une utilité ludique, en quoi participe-t-elle à l’éducation citoyenne ? Et si la presse de loisir et la presse people connaissent une forte progression et peuvent répondre à une attente des lecteurs, ce n’est pas le rôle de l’Etat de les aider financièrement.Ces aides construites à une autre époque, ont été en partie détournées de leurs objectifs et ont perdu leurs fondements premiers. Au nom de l’égalité et à force de conservatismes corporatistes, l’équilibre entre presse d’information et presse récréative s’est rompu et il est clair pour nous que ces aides doivent aller de façon prioritaire à la presse d’information générale et locale.

La situation du distributeur Presstalis, une nouvelle fois au bord du dépôt de bilan, doit aussi nous questionner et nous pousser à repenser la et moderniser la distribution de la Presse. Si beaucoup a déjà été fait pour éviter une énième catastrophe il semble incontournable qu’une réflexion soit menée sur un rapprochement réel voire une fusion avec son concurrent.Il faut entreprendre, aussi, pour anticiper les changements capitaux induits par le développement massif d’Internet. La presse en ligne est actuellement un acteur dynamique du secteur et la presse de demain sera en grande partie numérique. L’harmonisation des taux de TVA pour ces deux types de presse est une question pertinente.Sur ce sujet comme sur d’autres, nous avons à mener une mission au long cours et si le budget voté cette année répond à cette véritable urgence qu’est le sauvetage nécessaire de la presse quotidienne, il va également dans le bon sens sur le long terme, celui d’une véritable refonte du secteur.

Je serai vigilant, notamment pour que dans la future loi sur la décentralisation, la situation des collectivités des territoires populaires soit mieux prise en compte.

MATHIEU HANOTIN, DÉPUTÉ DE SEINE-SAINT-DENIS

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BLUMA /// Décembre 20126 ///

ADOPTION DU RAPPORT HAMMADI-RICHARD SUR LE PACTE POUR LA CROISSANCE & L’EMPLOI

La Commission des affaires européennes de l’Assemblée Nationale a adopté à l’unanimité ce 4 décembre 2012 le rap-

port d’information pour le pacte de la crois-sance et l’emploi.

Trois solutions fortes étaient présentées :• Différer d’un moins un an le retour à

l’équilibre budgétaire• Laisser la BCE déterminer la politique de

change• Permettre aux crédits accordés par les

Etats et aux actions de solidarité à l’Union européenne et à ses institutions pour les Etats en difficulté de la zone euro d’être exclus du plafond du déficit autorisé.

Ces trois solutions s’inscrivent dans la droite ligne de l’axe choisi par ce pacte européen : la croissance. Pour rappel, ce pacte pour la

croissance et l’emploi, obtenu par François Hollande, met en place un financement de l’économie à hauteur de 120 milliards d’eu-ros. L’enveloppe est répartie entre des fonds déjà existants à redéployer pour la croissance et les outils innovants, tels que le financement de la Banque européenne d’Investissement. Véritable bras financier de l’UE, cette institu-tion permettra de dégager plus de 60 milliards d’euros et la mise en place des project bonds, ces obligations de projets visant à financer des investissements. L’ensemble de ces mesures est destiné à financer des investissements dans l’énergie, les transports, l’emploi des jeunes, l’économie numérique.

A travers ces trois axes, qui font de ce pacte un véritable plan de relance, nous avons souhaité montrer que les tabous devaient être levés, à commencer par celui de la maîtrise de la poli-

tique de change par la BCE. Nous avons éga-lement tenu à rappeler qu’il était nécessaire d’éviter l’ajout de l’austérité à l’austérité.

Enfin, ce suivi du ce pacte pour la croissance et l’emploi a été l’occasion pour nous de s’in-terroger sur les ressources budgétaires euro-péennes, désormais contraintes par les res-trictions budgétaires nationales. Dans le cadre de ce pacte, 11 Etats, dont la France, se sont ainsi engagés à mettre en œuvre la taxe sur les transactions financières, permettant ainsi de déconnecter en partie les budgets nationaux, du budget européen.

Car si nous voulons faire prévaloir une cer-taine idée de l’Europe, il demeure nécessaire de repenser sa nomenclature et de revoir à la hausse un budget qui nous permettra de dis-poser d’un véritable pacte de croissance.

VIE DU PARLEMENT

CRÉDIT D’IMPÔT : L’AMENDEMENT EXCLUANT LES SOCIÉTÉS COTÉES AU CAC 40

Sous-amendement présenté par Pascal Cherki, Henri Emmanuelli, Pouria Amirshahi, Pascale Boistard, Kheira Bouziane, Fanélie Carrey-Conte, Nathalie Chabanne, Do-minique Chauvel, Olivier Dussopt, Jean-Pierre Dufau, Linda Gourjade, Estelle Grelier, Jérôme Guedj, Mathieu Hanotin, Sandrine Hurel, Ré-gis Juanico, Christophe Léonard, Jean-Philippe Mallé, Sébastien Pietrasanta, Michel Pouzol, Denys Robiliard, Barbara Romagnan, Stéphane Travert, Michel Vergnier

Compléter l’alinéa 3 par les mots :« , à condition que leurs actions, parts et autres droits ne fassent pas l’objet de négociations significatives et régulières sur un marché réglementé. »

Le présent sous-amendement a pour objet d’exclure les sociétés cotées sur les marchés

du champ des entreprises éligibles au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

La notion de société cotée est définie par ré-férence à l’article 990 E du code général des impôts, qui exonère les sociétés cotées de la taxe de 3 % sur la valeur des immeubles (taxe prévue à l’article 990 D du même code). Ainsi, dans un cadre économique contraint où l’économie française se doit de retrouver une partie de sa compétitivité, il est impéra-tif d’améliorer et d’amplifier le soutien public au financement des entreprises, en particulier des TPE, des PME et des ETI et ceci dans un contexte de crise économique et financière in-ternationale. Le gouvernement a fait le choix de mettre en place un dispositif de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), afin de per-mettre aux entreprises soumises à la concur-

rence internationale d’améliorer leur crois-sance et leur compétitivité, contribuant ainsi au redressement productif et industriel de la France.Or, le tissu économique français étant princi-palement composé de TPE, de PME et d’ETI, puisqu’elles représentent près de 86% des sociétés Françaises, il est indispensable que celles-ci bénéficient prioritairement de ce crédit d’impôt et du soutien de la puissance publique. En effet, ces entreprises ont besoin de fonds pour améliorer leur trésorerie et ne peuvent pas faire appel à des financements issus des marchés.De ce fait, les entreprises capitalisées en bourse, qui bénéficient déjà de mesures inci-tatives consenties par l’Etat, ne peuvent être bénéficiaires du CECI.

dans le cadre du projet de loi de finances rectificatives pour 2012 et le débat sur la mise en place du crédit d’impôt sur la compé-titivité, Pascal Cherki et Henri Emmanuelli a défendu un sous-amendement visant à exclure les sociétés cotées au CAC 40. Si cet amendement a été rejeté, il a tout de même été voté par les députés EELv, Radicaux de gauche, Front de gauche et par nombre de députés du groupe socialiste. Nous vous dévoilons ci-dessous le contenu de ce sous-amendement.

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DOSSIER DU MOIS SPÉCIAL

EUROPE

Alors que le prix Nobel de la paix vient d’être décerné à l’Union européenne, la construction européenne se situe à

une étape charnière. Elle fut mise en chantier par les « pères-fondateurs », dans l’immédiat après-seconde guerre mondiale, pour pro-mouvoir la paix et éviter que ne ressurgissent les conflits et les démons des deux siècles passés. Dans les années 1980, sous l’impul-sion de François Mitterrand et Helmut Kohl, l’acte unique et la monnaie unique scellèrent les liens économiques entre les Etats. La mise en place d’une union économique et monétaire devait, selon Jacques Delors, poser in fine le problème des instruments politiques néces-saires pour consolider l’édifice. Au cours de cette période, l’Europe fut parfois présentée comme le lieu pertinent de la régulation de la mondialisation. Elle fut souvent vécue comme

le bras armé des politiques néo-libérales. La crise ouverte en 2008 a crument mis à nu ses insuffisances. Il devient urgent de la doter des instruments qui lui font défaut. Malheureuse-ment, un verrou conservateur empêche tou-jours les solutions progressistes de s’affirmer. L’évolution des textes européens est marquée du sceau des propositions néo-libérales, ins-pirées en premier lieu par la droite allemande. Enfin, la prédominance des arrangements intergouvernementaux, le rôle ambigu de la Commission européenne, hésitant à s’éman-ciper des pressions exercées par les Etas membres au Conseil, et le poids trop faible du Parlement européen font de l’Europe un Objet politique non identifié (dixit Jacques Delors).

Tout ceci explique sans doute que nombre de nos concitoyens aient une perception

critique de l’actuelle construction européenne et qu’une conscience collective européenne tarde à s’affirmer, sauf parmi les élites de la mondialisation. La question européenne est en particulier extrêmement sensible aux yeux de l’électorat populaire, qui assimile l’Europe aux politiques d’austérité. Il n’est pas inutile de rappeler que 60% des électeurs socialistes avaient voté « non » en 2005 au référendum sur le Traité constitutionnel.

Au cours de la campagne électorale, pour mobiliser l’électorat de gauche, François Hollande avait annoncé la renégociation du traité budgétaire, décidé par le couple Merkozy, tout en restant flou sur les modalités d’une telle renégociation. Au fil de la campagne, c’est le thème du complément à apporter au TSCG qui s’est progressivement imposé et qui a

doSSiER EURoPE

LES SOCIALISTES fACE à LA PROCHAINE ÉTAPE DE L’INTÉGRATION EUROPÉENNE

dossier réalisé par le groupe de travail Europe, Emmanuel

Recht, Martin Meyrier, An-ne-Claire Le Bodic, Raphaël delaure, Nadia Pellefigue et

Annabelle Janodet

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DOSSIER EUROPE

accouché du pacte de croissance de juin, plus symbolique qu’effectif. UMA a fait le choix de faire campagne contre le TSCG. Nous pensons en effet que son refus par la France aurait inauguré la nouvelle séquence par une offensive qui aurait pu rebattre les cartes du débat sur la stratégie macroéconomique de l’Europe face à la crise. Tel ne fut pas l’option retenue par le Président François Hollande. La victoire de la gauche en France a néanmoins rouvert le débat européen, au moment où les politiques d’austérité font montre de leur incapacité à relancer la croissance et réduire les déficits, et où le lobby financier continue à se montrer rétif à la réforme du système bancaire.

// La nouvelle étape de l’intégration européenneSuite au sommet de juin 2012, c’est une nouvelle étape de la construction européenne, intitulée « Vers une véritable union économique et monétaire », qui est dorénavant en chantier. Une feuille de route dite « des quatre présidents

» (du Conseil, de la Commission, de la BCE et de l’Eurogroupe) a été confiée à Herman Van Rompuy. Sa présentation est à l’ordre du jour du sommet de décembre. La Commission a d’ores et déjà rédigé son projet détaillé quant aux séquences de court, moyen et long terme devant jalonner cette future étape. Le Parlement européen, à son grand regret simplement consulté, s’est invité dans le débat par l’entremise du rapport Thyssen.L’enjeu est désormais de doter l’Union des instruments qui ont jusqu’alors fait défaut à son fonctionnement :• Une union bancaire intégrée pour

superviser les banques, dotée de fonds de garantie des dépôts et de résolution des crises pour éviter de faire peser leur traitement sur le contribuable,

• Une union budgétaire, instaurant certes l’équilibre des comptes publics dans les Etats, mais dotée d’une capacité budgétaire communautaire nécessaire pour gérer les chocs asymétriques et mener des politiques contra-cycliques,

• Une union économique achevant l’intégration des marchés,

• Une union politique incluant de réelles avancées démocratiques afin que les transferts de souveraineté envisagés fassent l’objet d’un contrôle approprié des

parlements européen et nationaux dans le cadre d’une souveraineté partagée.

La consolidation de ces quatre piliers fait d’ores et déjà l’objet de débats au Conseil, à la Commission et au Parlement européen. Des divergences, parfois non-négligeables, apparaissent entre les Etats. L’Allemagne, partisane auto-déclarée du fédéralisme, freine pourtant sur les dossiers bancaires et budgétaires. Au Conseil de décembre, l’Allemagne a obtenu que le périmètre de la supervision bancaire épargne ses banques régionales (mal notées), tandis que le blocage du débat sur les perspectives financières (par les britanniques) 2014-2020 retardera le moment du débat sur l’extension des capacités budgétaires de l’Union. A moins que la France ne profite de cette crise pour proposer la mise en œuvre d’instruments (Taxation des transactions financières, impôt européen sur les sociétés, euro-obligations…) permettant d’abonder de nouvelles ressources propres en-dehors des contributions des Etats membres, afin d’assurer la pérennité du financement du budget de l’Union. Le Parlement propose, pour sa part, d’adopter un cinquième pilier, le pilier social, instaurant les premiers mécanismes de redistribution à

LES ÉTATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNEAllemagne•1957

Autriche•1995

Belgique•1957

Bulgarie•2007

Chypre•20041

Danemark•1973

Espagne•1986

Estonie•2004

Finlande•1995

France•1957

Grèce•1981

Hongrie•2004

Irlande•1973

Italie•1957

Lettonie•2004

Lituanie•2004

Luxembourg•1957

Malte•2004

Pays-Bas•1957

Pologne•2004

Portugal•1986

Républiquetchèque•2004

Roumanie•2007

Royaume-Uni•1973

Slovaquie•2004

Slovénie•2004

Suède•1995

1. La République turque de Chypre du Nord, dont l’autonomie autoproclamée n’est pas reconnue internationalement, fait formellement partie du territoire de la République de Chypre, membre de l’Union européenne ; elle en est exclue pour l’application de la plupart des dispositions des traités de l’Union européenn

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DOSSIER EUROPE

l’échelle européenne. Il inclut notamment des normes salariales plancher, une couverture santé universelle, la garantie de services publics de qualité, le droit au logement et des dispositifs d’insertion des jeunes. Ce pilier social a été obtenu grâce à l’intervention du groupe socialiste et démocrate. Les propositions faites raisonnent à traités constants, mais l’éventualité d’un changement de traité est de plus en plus admise, compte tenu des innovations institutionnelles en jeu (solidarité financière, mutualisation des dettes, financement des ressources propres de l’Union par l’impôt et l’emprunt, constitution de fonds européens de garantie de dépôt et de résolution des crises, etc…). Reste à en définir le calendrier (sans doute après 2015) et les modalités (traité intergouvernemental ou convention).

// La feuille de route des socialistes français La ligne des socialistes pourrait être de pousser en faveur de ce saut fédéral, à condition qu’il soit accompagné d’un saut démocratique et social, et qu’il permette la mise

en œuvre de politiques économiques sociales progressistes à l’échelle communautaire, dès lors que l’équilibre des finances publiques est imposé aux Etats membres (tout comme ceux-ci le font avec leurs propres collectivités locales). Un aménagement de la règle d’or pourrait être proposé. La morosité de la conjoncture économique peut nous y aider, ainsi que l’appui des pays qui ont subi le plus durement la rigueur. Premièrement, exclure du calcul des déficits les dépenses consacrées à l’investissement public permettrait à celles-ci de jouer un rôle anti-cyclique. Deuxièmement, la notion de déficit structurel, imposée par le TSCG, n’a de sens que si le critère d’un déficit courant de 3% est abandonné, afin de laisser jouer les stabilisateurs automatiques (en basse conjoncture, un pays peut parfaitement être à l’équilibre structurel des comptes publics et subir un déficit courant supérieur à 3%, non alarmant parce qu’il finance des amortisseurs de crise). A tout le moins, une adaptation du calendrier des déficits selon la conjoncture propre à chaque pays atténuerait les effets récessifs des politiques d’austérité. Cela doit faire partie des principes d’une bonne coordination des politiques économiques. Ces différents éléments pourraient être mis sur la table des négociations par la

France au Conseil, où François Hollande recevrait l’appui de l’Italie, de l’Espagne et du Portugal. Le Conseil reste pour l’heure l’institution européenne où tout se joue, ou plus exactement où tout se négocie entre les Etats. A notre grand regret de démocrates car en ce lieu, l’Allemagne impose ses vues, tandis que le Royaume Uni veille à ses intérêts. La France devrait jouer plus systématiquement la carte du Parlement Européen et s’appuyer sur les quelques propositions progressistes de la Commission. Sur nombre de thèmes, le Parlement et la Commission sont plus en avance que le Conseil. Que l’on songe aux propositions pour contrôler les agences de notation, à la taxation des transactions financières, à la nouvelle étape de l’union économique et monétaire, ou au débat sur le budget communautaire. S’agissant de la question institutionnelle, même si un changement de traité n’est pas mûr pour l’heure, la question est désormais dans tous les esprits. Il est donc de bon augure de procéder par étapes. Mais nous devons militer en faveur d’une Constituante (dans le jargon européen, une Convention) et pousser pour que le prochain Parlement européen, élu en 2014, ait mandat pour désigner des représentants à cette Convention, chargée de préparer le prochain traité. Ce dernier ne doit en aucun cas être un nouveau traité intergouvernemental, où, à l’instar du TSCG, la position allemande (qui sera vraisemblablement défendue par une possible « grande coalition ») prédominerait. Cette position est aujourd’hui partagée par la Délégation Socialiste Française et le groupe Socialistes et Démocrates au Parlement européen. Elle peut faire l’objet d’un large assentiment au sein du parti. Par la suite, si, malheureusement, le prochain traité était un nouvel avatar des deux précédents, c’est une campagne pour un « non fédéraliste de gauche » qu’il conviendrait alors de mener. C’est cette feuille de route progressiste et pro-européenne qu’UMA propose de faire porter par la Convention du Parti, prévue avant juin 2013. Ce projet fédéraliste alternatif est réaliste ; il tient compte de l’état actuel des rapports de force entre les Etats et entre les forces politiques en présence. Il doit permettre aux socialistes d’être à l’offensive lors de la prochaine campagne en vue des élections européennes.

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DOSSIER EUROPE

LES SERVICES PUBLICS : L'INTÉRêT GÉNÉRAL EN ACTEpar françoise Castex, députée française au Parlement européen

// L'Union européenne contre les services publics ?Pour beaucoup de citoyens, l’Europe est responsable de la dégradation des services publics. Ils gardent en mémoire les directives sectorielles ouvrant libéralisant les transports, l’énergie et La Poste et la Directive «Services» (dite Bolkestein) qui, en organisant la libre circulation des services, ouvre à la concurrence les services publics locaux.Les élus des Régions, des départements et des communes connaissent, eux, la crainte que leurs financements des services publics soient annulées par la Direction générale à la concurrence de la Commission européenne.

// Le vice originel : la concurrence libre et non fausséeLa problématique des services publics, Services intérêt économique général (SIEG) selon la terminologie bruxelloise, est polluée par deux vices de construction de l’UE. Le premier est d’avoir choisi comme principe directeur du marché unique la concurrence «libre et non faussée» et d’avoir donné à la Commission européenne la compétence exclusive de contrôler le strict respect de ce principe. L’intervention publique, toujours suspecte de fausser le marché, est interdite ou

du moins soumise à autorisation préalable de la Commission européenne. Quelques exemptions à cette demande d’autorisation préalable sont consenties ou arrachées à la Commission, par exemple pour financer les hôpitaux et depuis peu, l’ensemble des services sociaux.Le second vice de construction est induit par le principe de concurrence: depuis l’Acte Unique et la libre circulation des services, l’UE de n’a pas voulu distinguer les règles applicables aux services de nature différente, marchands ou non marchands, concurrentiels ou d’Intérêt général.

C’est contre ces deux contraintes fortes que se joue l’avenir des services publics dans l’UE et que se situe l’action politique, celle que je mène avec «l’Intergroupe Services publics» au Parlement européen, celle que nous devrons mener dans les prochaines étapes de la construction de l’UE.

// Le point d'appui : l'intérêt généralLa dénomination utilisée au niveau européen pour désigner les Services publics: Services d’intérêt économique général (SIEG) doit être poussée jusqu’au bout de sa logique. En effet, si la notion d’ «intérêt général» distingue entre eux différents services, il faut aussi admettre que l’intérêt général n’est pas une qualité objective, dont l’appréciation peut être laissée à l’administration européenne, mais qu’elle

est une notion subjective qui exprime une orientation politique.Le Protocole 26 relatif aux SIEG, annexé au Traité de Lisbonne, ouvre d’ailleurs la voie à cette interprétation. Ce protocole reconnait «le rôle essentiel et le large pouvoir discrétionnaire des autorités nationales, régionales et locales pour fournir, faire exécuter et organiser les Services d’intérêt économique général», de même qu’il énonce les caractéristiques des SIEG: «Niveau élevé de qualité, de sécurité, caractère abordable, égalité de traitement, promotion de l’accès universel, droits des utilisateurs»

Toutefois, dans la hiérarchie juridique (et politique) de l’Union, le principe de concurrence et le pouvoir de la Commission priment sur le principe d’intérêt général et la responsabilité politique des élus. C’est cette hiérarchie qu’il faut inverser.La primauté de l’intérêt général et des services publics doit être reconnue à travers un cadre législatif propre qui garantirait financement pérenne et sécurité juridique pour les autorités locales. Cette proposition figurait dans le programme du candidat Hollande. Alors qu’une renégociation des traités devient une hypothése probable, il est temps de remettre en cause la compétence exclusive de la Commission européenne sur le droit de la concurrence. Comme l’ensemble du droit communautaire, il doit être regit par les deux institions démocratiques : le Parlement européen et le Conseil.

Les Français entretiennent une relation forte avec leurs services publics malgré le dénigrement régulier de la droite. Plus qu’ailleurs en Europe, les services publics ont une valeur identitaire forte dans l’image que les Français se font d’eux-mêmes. ils font partie de notre identité républicaine et constituent un lien direct et concret entre la décision politique et la vie quotidienne des citoyens. tant et si bien que lorsqu’apparait des dysfonctionnements de services publics, l’image et la popularité des élus qui ont la responsabilité de leur organisation sont impactées.

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DOSSIER EUROPE

Contrairement à une vision trop souvent aseptisée et uniformisée des décisions prises par les institutions européennes,

la bataille politique fait rage au sein de l’UE. En réalité, chaque texte débattu au Parlement européen fait l’objet de débats houleux et une petite poignée seulement parvient à faire l’unanimité des groupes politiques.

Pourtant, au point de départ des directives et règlements européens, il y a effectivement une constante. Les textes préparés par la Commission européenne (le Parlement n’a pas l’initiative du pouvoir législatif) ont comme principale caractéristique d’émaner d’une inspiration très libérale. D’où vient cette constante? Les fondements de traités vertébrés par le commerce et la libre circulation des marchandises? Les Commissaires eux-mêmes, choisis en 2009 par des gouvernements majoritairement libéraux? Une administration européenne élevée au biberon de la concurrence libre et non faussée? Le poids du Conseil très largement dominé par la droite? Sans doute un peu de chacun de ces ingrédients contribue-t-il à ce cocktail très libéral que l’on retrouve dans les textes concoctés par la Commission.

Les deux premiers textes importants sur lesquels il m’a été donné de travailler au Parlement sont de ce point de vue éloquents.Le premier fut celui de mon baptême à la commission Culture Éducation Formation: la réforme du programme Erasmus. Ce texte, censé constituer un progrès, une avancée démocratique pour les étudiants européens, nous avait été présenté comme la réforme qui devait élargir le nombre des bénéficiaires. Or,

à la lecture du texte, la réforme se résumait pour l’essentiel à instaurer un système de prêt étudiant. Et quel prêt! Non contente d’établir un système qui a pour conséquence d’endetter les jeunes avant même que ceux- ci n’entrent dans la vie active et ne soient rémunérés, non contente de prendre le risque de surendettement dans un contexte de chômage massif des jeunes dans la plupart des pays d’Europe, la Commission européenne propose un dispositif qui confie aux banques la responsabilité de fixer les taux d’intérêt (à condition que ce taux soit inférieur à celui du marché) et ceci en fonction du risque encouru. En d’autres termes, les taux d’intérêt les plus élevés pèseront sur les plus fragiles. En théorie le système des bourses et celui des prêts cohabitent. Mais il y a fort à parier que la concurrence budgétaire en cette période de restriction favorisera le second au détriment du premier. Dans cet exemple qui concerne la mobilité lors des parcours de formation pour améliorer les performances, notamment linguistiques, le libéralisme se dissimule malicieusement derrière la démocratisation. On nous fait croire à l’augmentation du nombre de bénéficiaires alors qu’en réalité, on rend l’accès à la mobilité pédagogique plus difficile et dangereuse pour les plus modestes.

Deuxième exemple, celui de la politique commune des pêches (PCP). Sans examiner tous les aspects de la réforme, le système des concessions de pêche transférables proposé par la Commission est suffisamment démonstratif. Comme chacun sait, pour éviter la surpêche et permettre le renouvellement de la ressource halieutique, les institutions de l’Union fixent, chaque année, des limites maximales de droits à pêcher par espèces

et par tonnes de poissons. Ce sont les TAC et quotas. La proposition initiale de la Commission était de rendre transférables et individuels ces droits à pêcher. En d’autres termes, on aurait pu vendre ou louer ces droits. Cette privatisation de la ressource halieutique aurait conduit à bien des dérives, dont celle de la concentration des quotas vers les armements les plus puissants, mais aussi la création inéluctable d’un marché des droits à pêcher avec les risques de spéculation inhérents à tout marché. Ajoutons que l’affectation individuelle de ces droits à pêcher anéantirait tout le travail de gestion collective opérée par les organisations professionnelles qui s’est avérée beaucoup plus vertueux car plus facilement contrôlable. L’inspiration libérale s’est ici drapée d’une toute autre vertu, celle du respect de l’environnement. Par quel miracle les Concessions de Pêche Transférables permettent elles une gestion plus écologique que l’attribution de quotas par État membre? Par quel miracle une tonne de cabillauds transférable n’équivaut pas à une tonne de cabillauds non transférable? Probablement le miracle de la multiplication des poissons...

Ces deux textes doivent être votés à la session du Parlement de février 2013. Peut être ne connaîtront-ils pas le même sort, le débat à été plus âpre sur la PCP pour lequel la commission pêche a déjà indiqué sa désapprobation aux concessions de pêche transférables (CTP) alors que pour Erasmus la commission culture et éducation a déjà émis un vote majoritairement favorable pour les prêts étudiants. Quoiqu’il en soit, à Bruxelles, à Strasbourg ou ailleurs, c’est bien de débat et de rapport de forces politiques dont il s’agit.

COMBATTRE LES DÉRIVES LIBÉRALES EN EUROPEpar Isabelle Thomas, députée française au Parlement européen

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DOSSIER EUROPE

ENTRETIEN AVEC LIêM HOANG NGOCDéputé français au Parlement Européen, Rapporteur pour le groupe des Socialistes & Démocrates sur la feuille de route pour l'avenir de la zone euroBLUMA : Beaucoup appellent de leurs vœux la mise en place d’une Europe plus forte, plus démocratique et plus solidaire, mais par où faut-il commencer pour mettre réellement en œuvre cette Europe ?

Liêm Hoang Ngoc : La victoire de la gauche en France a rouvert le débat. Un compromis semble se dégager entre les chefs d'Etats et de gouvernement, le Parlement Européen et la Commission sur un calendrier bien précis des mesures à prendre d'ici à la fin de la décen-nie. L'union bancaire d'abord, en commençant par la mise en place d'un superviseur unique pour les banques de la zone euro. L'union économique ensuite, à travers laquelle les mé-canismes de coordination de la discipline bud-gétaire existant doivent être complétés par des mesures en faveur de la croissance et l'emploi. Ceux-ci seraient suivis par l'union budgétaire fondée sur un vrai budget fédéral pour la zone euro. Enfin, l'Union politique pour assurer un fonctionnement démocratique de l'Union.

Au Parlement européen, les socialistes euro-péens ont réussi à convaincre les conserva-teurs et les libéraux d'ajouter à cette feuille de route l'union sociale, pour garantir une convergence vers le haut des économies eu-ropéennes. Reste à convaincre le Conseil Euro-péen. Il faut commencer par un plan européen pour lutter contre le chômage des jeunes.

Ce séquençage n'est pas idéal. Nous nous bat-tons pour qu’un revenu minimum européen, la taxe sur les transactions financières et les eu-ro-obligations soient mis en œuvre sans tarder. Nous regrettons également que le chantier de l’harmonisation fiscale prenne tant de retard. Nous nous inquiétons des difficultés à parvenir à un accord ambitieux sur le budget européen. Elles compromettent l’avènement rapide d’un fédéralisme budgétaire européen.

BLUMA : où sont aujourd’hui les blocages qui empêchent d'aller plus loin dans l’union économique et monétaire ? Peut-on les sur-monter?

LHN : Il nous faut composer avec une majorité de chefs d’Etats et de gouver-nements issue des rangs de la droite, et qui, par ailleurs, semblent davantage préoccupés par leurs intérêts nationaux que par l'intérêt commun de l'Europe. Par ailleurs, la Commission sous l'égide de José Manuel Barroso est très faible, tandis que le Parlement est souvent ignoré par les Etats. En réalité, ce sont les arrangements entre ces derniers au Conseil, où l’influence de l’Allemagne est pré-dominante, qui restent décisifs. Les Peuples européens sont pour leur part désabusés - à juste titre - par le manque d'avancées sociales d’une construction européenne qu’ils assimi-lent désormais aux politiques d’austérité.

Dans ce contexte, les socialistes européens, qui militent en faveur d’un fédéralisme pro-gressiste, ont une responsabilité particulière. A chaque étape, ils doivent s’assurer que des mesures concrètes rééquilibrent les politiques européennes en faveur de l'emploi, du déve-loppement durable et de la préservation du modèle social. Enfin, nous devons nous assu-rer que chaque transfert de souveraineté soit couplé à un transfert de légitimité démocra-tique correspondant.

BLUMA : Ne faut-il pas un nouveau traité qui change la logique initiale libérale et permette l'émergence d'une vraie dé-mocratie européenne ?

LHN : Il faut réorienter les politiques de l'Union qui organisent malheureusement le désen-gagement de la puissance publique. Il faut améliorer l'architecture de la zone euro, dans laquelle le pilier monétaire doit être complété

par des piliers budgétaire et social. L’Europe ne peut se priver de politique budgétaire et d’instruments de redistribution. Elle doit se do-ter des moyens nécessaires pour encadrer le libre-échange. Des institutions démocratiques, dotées des ressources et des mandats néces-saires doivent émerger pour mettre en œuvre cette vision.

A court terme, il faut faire bouger les lignes dans le cadre des traités actuels. Un exemple : le Pacte de Stabilité et de Croissance est une aberration. Il inclut néanmoins la notion de « circonstances exceptionnelles » qui pourrait être invoquée pour renégocier le calendrier de réduction des déficits. Autrement, on s’in-terdirait de mener des politiques volontaristes contre la récession et le chômage.

A long terme, un nouveau traité sera néces-saire, ne serait-ce que pour élargir le champ de la codécision - autrement dit, changer le rapport de force entre le Parlement et le Conseil européen. Mais cela nécessite d'abord que l'Europe regagne la confiance de ses ci-toyens. Un premier test interviendra aux pro-chaines élections européennes de 2014. Les socialistes européens doivent faire campagne pour faire sauter le verrou conservateur qui enferme les politiques économiques et so-ciales. Il est enfin souhaitable que le prochain Parlement ait mandat de mettre sur pied une Convention préparant la rédaction du prochain traité.

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DOSSIER EUROPE

ENTRETIEN AVEC ANNI PODIMATADéputée Grecque au Parlement Européen, Vice-Présidente du Parlement Européen

BLUMA : Le Nord et le Sud de l’Europe semblent s’éloigner de plus en plus. Quelle est la stratégie de la Gauche Européenne pour inverser la tendance et renouer avec le progrès et la solidarité ?

ANNi PodiMAtA : « Le fait que de nombreuses personnes reparlent du «Nord» et du «Sud», comme s’il s’agissait de parties séparées de l’Europe, est un marqueur de l’impact désastreux de la doctrine conservatrice qui a dominé l’Europe ces dernières années et de son incapacité à traiter l’aspect global des problèmes économiques en Europe. C’est une évolution très inquiétante, qui est à même de remettre en cause l’existence même du projet européen.

Le pré-requis pour inverser cette tendance - entre pays du nord et du sud mais également entre les citoyens de ces pays - est donc de ramener sur le devant de la scène les valeurs centrales de l’intégration européenne, et notamment la solidarité et la convergence. Nous devons également être réalistes,

déterminés et concrets dans la reconnaissance des vrais problèmes économiques et sociaux en Europe ainsi que dans les solutions que nous entendons y apporter. Cette nouvelle attitude ne peut se traduire que par des politiques visant à promouvoir la croissance, l’emploi, l’inclusion, la stabilité et la responsabilité démocratique.

Cette divergence ne fera que s’accroitre si l’on ne met pas en œuvre dès maintenant, à coté des mécanismes existant comme le Pacte de Stabilité et la surveillance des budgets, une nouvelle gouvernance et de nouvelles politiques, comme par exemple le Pacte pour la Croissance et l’Emploi, qui avait été décidé

grâce à l’insistance de la France, mais aussi un véritable Pacte Social pour le respect et la promotion des droits sociaux et des droits du travail au sein des Etats et entre les Etats.

BLUMA : La crise des dettes souveraines est-elle insurmontable pour l’Union ?

A. P : L’Europe peut surmonter la crise de la dette si, et seulement si, elle dépasse les pratiques injustes qui ont mené à la crise. Nous ne devrions jamais perdre de vue comment la crise a débuté. Le problème de la dette souveraine n’est qu’une conséquence naturelle de la crise financière, qui a causé une socialisation massive des pertes du secteur financier. La dette publique est par ailleurs directement connectée à la récession économique et à l’augmentation massive du chômage, qui entraine l’augmentation des déficits et affaiblit toute stratégie de consolidation fiscale.

La crise de la dette souveraine ne peut être résolue avec les seules politiques d’austérité. Même le FMI admet désormais que le multiplicateur fiscal est plus élevé qu’initialement estimé - et que par conséquent, l’impact récessif des politiques de consolidation a été sous-estimé.

L’austérité est vouée à l’échec économique, tant en ce qui concerne le court que le long terme. Elle est aussi vouée à l’échec politique, car elle détruit l’élément le plus important pour une sortie de crise dans le respect de la démocratie: la légitimité, le soutien et la confiance du peuple dans le projet européen. Pour surmonter la crise des dettes souveraines,

l’Europe a besoin de regagner le soutien du peuple. Cela ne pourra se faire qu’en adoptant des nouvelles politiques, plus réalistes et plus à même de réussir, qui donnent plus de temps pour réduire les déficits, et qui priorisent la croissance, l’emploi et la protection sociale. BLUMA : Comment peut-on renouer avec un message positif sur l’Europe, en particulier dans les pays qui souffrent de l’austérité imposée par la troïka ? A. P : Le message positif le plus évident est que l’Europe, après avoir été, pendant 4 ans, incapable de reconnaitre les vrais problèmes et d’offrir des solutions rapides et efficaces, présente aujourd’hui un plus haut niveau de consensus sur le besoin d’une solution cohérente, qui inclut un calendrier pour le court comme le long terme et des politiques qui vont au-delà de l’austérité. Le fait que les sociaux-démocrates aient repris des forces, notamment avec la victoire en France, n’est pas étranger à cette évolution. L’impasse dans laquelle l’Europe était engagée jusqu’à présent est désormais reconnue par tous; son dépassement est à l’ordre du jour. Mais les changements vraiment décisifs, nécessaires à l’Europe et à ses citoyens, ne se matérialiseront qu’avec un rééquilibrage du rapport de force politique en Europe, en faveur du socialisme.

L'Europe peut surmonter la crise de la dette si, et si seulement, elle dépasse les pratiques injustes qui ont mené à la crise

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BLUMA /// Décembre 201214 ///

BLUMA : La Gauche est actuellement minoritaire dans toutes les institutions européennes (Parlement, Conseil, Commission). Comment influence-t-elle les politiques européennes ?

HANNES SWoBodA : « C’est vrai, la gauche est minoritaire en Europe. Nous avons subi des défaites en Espagne, au Portugal et en Grèce au lendemain de la crise. Mais la gauche en Europe reprend du poil de la bête. Regardez le résultat des élections cette année en France, en Slovaquie et en Roumanie. Nous sommes en outre de retour au gouvernement au Danemark, en Belgique, aux Pays-Bas et en Lituanie. Nous espérons bien de nouveaux succès en 2013, en Italie, en Allemagne, à Malte, en Autriche ou en Bulgarie.

Au sein du Parlement européen, les socialistes et les démocrates représentent, avec 190 membres, le deuxième groupe politique. Nous sommes minoritaires mais nous sommes incontournables pour former une majorité et faire avancer l’Europe dans le sens que nous voulons. Nous avons pu profiter des divisions de la droite pour réunir une majorité sur la taxe sur les transactions financières et sur l’introduction d’un pacte social dans la réforme de l’Union économique et monétaire. Même en minorité, le groupe socialiste et démocrate peut

f a i r e

entendre sa voix.

Nous avons commandé un rapport à trois instituts économiques indépendants dont l’OFCE en France. Ce rapport montre, chiffres à l’appui, que la Commission européenne s’est trompée sur l’impact de l’austérité et qu’il faut donner plus de temps aux Etats de la zone euro pour réduire leurs dettes et déficits publics. Ce document est pour nous une alternative sérieuse à l’examen de croissance annuel publié par la Commission et nous comptons bien nous en servir dans les débats à venir. Notre ambition, c’est que l’Europe retrouve le chemin de la croissance, des investissements et de l’emploi.

Nous devons revenir aux affaires partout en Europe pour permettre un véritable changement. La gauche a le devoir de se montrer unie, mieux qu’elle ne l’a fait dans le passé. Les élections européennes de 2014 marquent notre prochain grand rendez-vous. Je me félicite que les socialistes européens aient décidé de préparer un programme commun qui sera porté par un candidat à la présidence de la Commission européenne à travers l’Europe. Les socialistes européens doivent aborder cette échéance rassemblés. Nous devons renforcer notre coopération contre l’austérité et le chômage et pour la croissance.»

BLUMA : L’élection de François Hollande a-t-elle permis de redonner un nouveau souffle aux socialistes européens ? Peut-elle permettre de changer le rapport de force avec la droite ?

H.S. : « La victoire de François Hollande le 6 mai dernier a certainement modifié la donne en Europe. Grâce à François Hollande. L’Union européenne est sortie de l’austérité pure et dure imposée par les gouvernements

conservateurs. L’Europe a adopté un pacte de croissance de 120 milliards d’euros. Le montant est certes modeste mais il marque un changement d’orientation de l’Europe. C’est un pas en avant important pour nous sociaux-démocrates.

Le rapport de force au sein du Conseil européen s’est aussi considérablement modifié. Depuis

2008, l’Europe était dominée par le

couple Merkozy. Dans ce couple franco-allemand, Mme Merkel était la plus forte. Elle est parvenue à imposer sa vision austère de l’Europe à tous ses partenaires. Les choses sont différentes avec François Hollande. Il n’y a plus de directoire franco-allemand. Il est parvenu à nouer de nouvelles alliances avec Mario Monti en Italie, Mariano Rajoy en Espagne. Le Premier ministre belge Elio di Rupo qui est socialiste, se sent aussi moins seul.»

BLUMA : Quel est le rôle du Parlement européen dans la crise actuelle? Peut-il contrebalancer la logique intergouvernementale des Etats membres?

H.S. : « Le rôle du Parlement européen est très important et pourtant le grand public en a peu conscience. Le Traité de Lisbonne a offert de nouveaux pouvoirs aux députés européens. Ils décident désormais sur un pied d’égalité avec les gouvernements européens sur tous les dossiers concernant la régulation des marchés financiers, par exemple. Après le déclenchement de la crise financière en 2008, tout était à faire. L’Europe a beaucoup avancé pour introduire des règles du jeu claires sur les marchés financiers et mettre un frein «au capitalisme casino» des années 2000.

Le Parlement européen a joué un rôle majeur et s’est montré souvent plus ambitieux que les Etats membres par exemple concernant les agences de notation ou l’Union bancaire. C’est sous la pression du Parlement européen et plus particulièrement de notre groupe politique que les chefs d’Etat et de gouvernement se sont ralliés à la taxe sur les transactions financières; le problème, c’est que les chefs d’Etat et de gouvernement ont tendance à s’approprier tout le succès quand ils parviennent à prendre une décision.

Récemment, les Vingt-sept ont parfois contourné le Parlement européen. Ainsi, le Parlement européen n’a pas eu son mot à dire sur d’importants sujets comme le Traité budgétaire ou la mise en place du mécanisme européen de stabilité. Mais les chefs d’Etat et de gouvernement et la Commission européenne sont conscients aujourd’hui qu’il ne pourra pas y avoir de nouveaux progrès dans l’intégration européenne notamment au sein de la zone euro sans un renforcement du contrôle démocratique. A la lumière des avancées vers une véritable union économique et monétaire, le Parlement européen devra établir de nouvelles règles de coopération avec les parlements nationaux. A l’avenir, députés européens et députés nationaux seront appelés à travailler ensemble plus étroitement pour le bien être de nos citoyens.»

ENTRETIEN AVEC HANNES SWOBODADéputé Autrichien au Parlement Européen, Président du Groupe des Socialistes et démocrates au Parlement Européen

DOSSIER COMPÉTITIVITÉ

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BLUMA /// Décembre 2012 /// 15

En 2009 à Saint-Nizier, l’ancien Président Sarkozy engageait une réforme territo-riale que les élus et responsables socia-

listes ont fortement contestée. S’appuyant en grande partie sur le rapport Balladur, il initiait une véritable contre-réforme ultra-libérale qui visait à la réduction du nombre des élus régio-naux et départementaux avec leur remplace-ment par le conseiller territorial, à la modifica-tion du mode de scrutin, à la redéfinition et à la « clarification » des compétences des différents échelons territoriaux, à la modification de la carte et du fonctionnement des intercommu-nalités, à la création des métropoles et surtout à la forte restriction de l’autonomie fiscale des collectivités et à un nouveau cadeau aux pa-trons par la suppression du lien entre les terri-toires et l’activité économique (suppression de la taxe professionnelle).

Avec la victoire de la Gauche en mai dernier ce processus dévastateur pour les territoires et notre démocratie a heureusement été inter-rompu comme le Président de la République s’y était engagé. Ainsi le 20 novembre dernier l’Assemblée Nationale commençait par abroger le conseiller territorial. Une autre réforme de la décentralisation était ainsi engagée dans la suite des Etats Généraux que François Hollande avait conclus au côté de Marylise Lebranchu, Ministre en charge du dossier en octobre.

Les détails du Projet du Gouvernement com-

mencent à filtrer. Les derniers arbitrages devraient intervenir en janvier pour une pré-sentation du texte en Conseil des Ministres mi-février. Pour ce qui concerne l’Assemblée Nationale, c’est Olivier Dussopt qui devrait être désigné Rapporteur du texte par la Commis-sion des Lois. Le BN du PS a de son côté mis en place un groupe de travail co-presidé par Alain Fontanel et Pierre Cohen (FNESR) avec tous les présidents et personnalités de gauche des associations d’élus..

Dans ce contexte il faut être vigilant afin que la fameuse « révolution copernicienne » et l’in-quiétant tournant vers un« socialisme de l’offre » ne se déclinent pas également dans cette réforme territoriale. En effet, les aspects les plus dévastateurs de la réforme Sarkozy sont écartés mais aucune garantie n’est actuelle-ment apportée pour éviter la concurrence et le creusement des inégalités entre les terri-toires. De même, l’érosion des dotations, la limitation assumée de l’investissement public et l’absence de marge de manœuvres en terme de péréquation ont de quoi inquiéter. Certaines déclarations du gouvernement ne sont pas très rassurantes. Ainsi le premier Ministre lors de la présentation du CICE disait : « C’est d’abord en réduisant les dépenses publiques que nous financerons la première moitié de l’effort (…) Ces réformes porteront sur l’action publique dans son ensemble. Non seulement l’Etat, mais également ses agences, les collectivités

locales, dans le cadre de la nouvelle étape de décentralisation » ou bien Marylise Lebranchu : « en période de crise, la priorité est à la ratio-nalisation des services »

Il convient notamment d’être très attentif :• A la question des métropoles perçues

par certains barons locaux comme un moyen de concentrer les moyens et de cannibaliser le développement économique au profit de zones déjà favorisées

• A la question du redécoupage, de la parité et des modes de scrutin pour les scrutins départementaux et intercommunaux (même si cet aspect de la réforme ne figurera pas dans le texte de Marylise Lebranchu mais dans un projet de loi dédié porté par Manuel Valls)

• A la question du Grand Paris

• A la question de la nouvelle vague de transfert de compétences

• A la question de la péréquation et plus largement du mode de financement des collectivités et à la prise en compte dans cette péréquation des ressources mais aussi des charges des collectivités

• A la concomitance entre le pacte Etat/collectivités locales promis par le Président de la République et cette réforme des compétences

• A l’engagement du maintien d’un Etat fort garant de l’égalité

• A l’engagement du maintien d’un haut niveau d’investissements publics

• A la question de la démocratie locale

• Au renoncement à toute ambition d’aménagement du territoire du fait d’une logique purement comptable de la réforme.

A toutes ces questions, le groupe de travail sur les collectivités souhaitent trouver des propositions. Si vous souhaitez contribuer et participer, vous pouvez joindre Stéphane sur [email protected].

VIE DES GROUPES DE TRAVAIL UMA

COLLECTIVITÉS & INSTITUTIONS

PRÉPARER NOS PROPOSITIONS POUR LE DÉBAT SUR LA DÉCENTRALISATION

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BLUMA /// Décembre 201216 ///

ACTUALITÉS

Toute la France a été émue récemment du désespoir des ouvriers d’ArcelorMittal. Les scènes d’ouvriers en colère, criant

leur volonté de ne pas voir saccagé l’outil industriel qu’ils ont construit ont montré à quel point la classe ouvrière défend d’abord et avant tout cet acquis, à quel point ils se l’approprient et à quel point ils se sentent plus légitime que M Mittal pour le défendre. Monsieur Mittal n’est la que depuis 6 ans, la sidérurgie lorraine elle est là depuis 2 siècles.

Si ces scènes sont nouvelles pour certains, elles sont pour nous, lorrains des scènes habituelles tant nous avons vu de « restructuration » qui en réalité ont souvent été des déstructurations

voire des saccages industriels. Car l’histoire de ces hauts fourneaux ne date pas de la volonté de M Mittal de les fermer. Ils ont une longue histoire qui est en réalité l’histoire de la France industrielle. Ils ont contribué à construire notre pays. Les ouvriers disent souvent que « la Tour Eiffel est faite d’acier lorrain » et c’est vrai. De la même manière, nos voitures, nos immeubles, nos objets quotidiens sont souvent façonnés à partir de cette matière qui fut faut-il le rappeler le moteur de la première révolution industrielle en Europe.Or, on nous dit aujourd’hui que l’acier lorrain serait trop cher, que la demande européenne serait trop faible. Rappelons quelques vérités.

SIDÉRURGIE FRANÇAISE : HISTOIRE D’UN GRAND GÂCHIS

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BLUMA /// Décembre 2012 /// 17

ACTUALITÉS

D’abord, la cherté d’un acier ne se mesure évidement pas au prix de la main d’œuvre qu’elle emploie. En effet, la masse salariale dans la sidérurgie ne joue que de manière très marginale sur le prix final de l’acier. Industrie à fort investissement capitalistique, le cout de l’acier contient surtout 3 éléments : le capital technique et industriel investi pour construire et maintenir les hauts fourneaux, les couts de transport aussi bien de la matière première que du produit fini et enfin la matière première coke (charbon) et fer nécessaires à la production.La question de la rentabilité de l’acier français ne se pose donc pas vraiment en termes de coup de la main d’œuvre. En Europe, les premiers producteurs et transformateurs

d’aciers sont les allemands (qui faut-il le rappeler ont refusé il y a plus de 10 ans de brader leur sidérurgie à M Mittal) dont la main d’œuvre qualifiée dans ce secteur est infiniment plus chère que celle de la France.

C’est donc d’abord et avant tout le manque d’investissement qui produit la cherté de l’acier de Florange aujourd’hui. Si l’outil industriel avait été entretenu et les investissements nécessaires à leur modernisation réalisés, cette question ne se poserait même pas aujourd’hui comme elle ne se pose ni pour les coréens ni pour les allemands.Au lieu d’investir, nous avons bradé toute notre sidérurgie à M Mittal alors que les restructurations et les investissements consentis par l’Etat avant la privatisation par la droite avaient largement été amortis. M Mittal n’avait donc qu’a engranger les bénéfices de ces usines gratuites, sans y investir jusqu’à ce qu’elles ne vaillent plus rien par manque d’investissement. C’est donc bien trop tard que nous avons réagi dans ce dossier industriel comme sur beaucoup d’autres. Attendre qu’une industrie s’effondre avant de réagir. Attendre les manifestations des ouvriers en colère avant de s’inquiéter de l’avenir industriel de la France. La droite est la première responsable de la situation actuelle. En effet, c’est le gouvernement d’Alain Juppé qui a privatisé le groupe Usinor qui était le résultat des nationalisations de 1981. Une fois captée par les financiers il était difficile d’avoir une action efficace des pouvoirs publics pour maintenir une industrie de l’acier forte. C’est encore un gouvernement de droite qui a laissé faire l’OPA hostile de M Mittal en 2006 sur le groupe Usinor alors que la fusion de 2002 entre les sidérurgies françaises luxembourgeoises et espagnoles avaient sans doute eu un sens et qu’une fusion avec un sidérurgiste allemand était possible. L’acier n’est pas un matériau comme un autre. D’abord parce que c’est un matériau très cher et à ce titre il peut rapidement peser positivement ou négativement sur notre balance commerciale. Deuxièmement, l’acier est un matériau stratégique à fort apport capitalistique, ce qui signifie que si une usine disparait il est très difficile de recréer

de la sidérurgie alors que les savoirs faires ont disparu et que l’investissement initial nécessaire est très important. Troisièmement l’acier est le produit de base dans de nombreuses industries stratégiques comme l’automobile (1er employeur industriel en France), l’aéronautique ou encore et surtout la défense.

Or, on le sait aujourd’hui, toutes les industries se tiennent les unes les autres. Si une usine automobile disparait, il y a fort à parier que les sous traitants suivront le pays dans lequel ira cette usine. De la même manière, un constructeur automobile aura tendance à se placer le plus près possible des usines sidérurgiques afin de minimiser les coûts de transport et de logistique.

Que pouvions nous donc faire alors que tout ce que je viens de dire n’avait pas été fait. Pouvions-nous encore sauver la sidérurgie française et ses hauts fourneaux par une nationalisation. Je pense que oui. Le gouvernement nous a indiqué qu’il aurait fallu 1 milliards d’euros pour remettre cette usine à niveau et la revendre dans son intégralité et a jugé que pour 600 emplois cela n’en vallait pas la peine. Au-delà du fait que ce chiffre est largement surestimé (l’investissement public nécessaire était sans doute autours de 400 millions), c’est surtout être bien naïf sur les intentions futures de M Mittal. C’est aussi avoir un résonnement à court terme et sans prendre en compte l’aval à savoir toutes les industries que j’ai cité qui faute d’acier iront se délocaliser afin de diminuer les coûts de transport. Ce ne sont donc pas les 600 emplois sur un haut fourneau qui sont en cause, ce sont des dizaines de milliers d’emplois de toute l’industrie européenne.

La croissance mondiale va sans doute redémarrer un jour ou l’autre. Ce jour là beaucoup de pays auront des outils de production capables de répondre à cette nouvelle demande. La France, elle, leur importera sans doute de l’acier.

Emir deniz

Lire le communiqué Un Monde d'Avance du 07.12.12 Retrait de Mittal du dossier Ulcos, encore une reculade http://unmondedavance.eu/retrait-de-mittal-du-dossier-ulcos-encore-une-reculade-

communique-de-presse-un-monde-davance/

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BLUMA /// Décembre 201218 ///

JEUNESSE & PAUVRETÉ : DES CHIFFRES PRÉOCCUPANTS

 

 

Les conséquences de la crise n’en finisse pas de dégrader les conditions sociales des plus

fragiles. La France connait aujourd’hui 8.6 millions de personnes pauvres, c’est-à-dire 8.6 millions d’individus vivant avec moins de 964€/mois. C’est 350 000 personnes de plus qu’en 2009. Face à cette situation, le Gouvernement vient d’annoncer une série de mesures, notamment une augmentation du RSA de 10% d’ici 2017 pour le ramener à un équivalent de 50% du SMIC. LA CMU C sera également étendue pour toucher 500 000 personnes supplémentaires, 8 000 places d’hébergements d’urgence sont également créées, ainsi qu’un registre contre le surendettement. Enfin, un contrat d’insertion pour les jeunes en insertion sera créé. Ces mesures sont nécessaires et urgentes pour faire face à la montée de la pauvreté en France. Elles permettent également de mettre en œuvre la Justice sociale. C’est dans ce sens

que d’autres mesures et dispositifs doit être mis en place.

En finir avec l’exclusion des jeunes

La pauvreté touche particulièrement les 18-25 ans. Premières victimes du chômage de masse et de l’exclusion, ils sont désormais un sur quatre à être pauvre selon le dernier rapport de l’INJEP. Leur taux de chômage est aujourd’hui de 25%. Dans ce contexte, il est urgent de réfléchir à une extension des dispositifs sociaux, et notamment du RSA, pour sortir les jeunes de la précarité. La discrimination de l’âge pour l’ouverture du RSA est un non-sens alors que les jeunes sont la catégorie de la population la plus frappée par la pauvreté. François Hollande avait fait de la jeunesse un de ses thèmes prioritaires de sa campagne. Il faut désormais les concrétiser notamment à l’occasion de la conférence interministérielle consacrée à la jeunesse le 22 avril prochain.

Régis Juanico interpelle le Gouvernement sur l’augmentation de la pauvretéLors des questions au Gouvernement du mardi 11 décembre, Régis Juanico a interpellé le Jean Marc Ayrault sur cette thématique de la pauvreté. vous trouve-rez ci-après l’intégralité de son interven-tion.

Ma question s’adresse à M. le Premier Ministre.Le Président de la République, François Hol-lande, a fixé un cap clair à ce quinquennat. C’est le redressement dans la justice, avec la jeunesse pour priorité.Tous les indicateurs dont nous disposons sur la situation des jeunes sont alarmants, en particu-lier celui de la pauvreté. Selon le premier rap-port de l’institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire, qui vient d’être publié à la demande de la ministre Valérie Fourneyron, 23 % des jeunes de 16 à 25 ans sont considé-rés comme pauvres, soit une proportion double de ce qu’elle est pour le reste de la population. Depuis 2004, le taux de pauvreté des jeunes a progressé de cinq points. Selon l’étude, le taux d’extrême pauvreté des jeunes, c’est-à-dire de ceux qui vivent avec moins de 576 euros par mois, s’est accru de près de 40 % entre 2007 et 2009.Nous pouvons tous le constater, de nombreux jeunes renoncent aujourd’hui à se soigner ou ne trouvent pas de logement, faute de moyens financiers. Ils sont de plus en plus nombreux à recourir aux associations de solidarité ou aux épiceries solidaires pour se nourrir. Monsieur le Premier Ministre, votre Gouvernement a pris à bras-le-corps cette situation en prenant des premières mesures volontaristes.Certaines facilitent l’accès au logement et à la santé, d’autres redonnent la priorité à l’édu-cation nationale dans le cadre du plan de lutte contre le décrochage scolaire. S’y ajoutent les premiers emplois d’avenir signés sur notre ter-ritoire, le contrat de génération que nous allons bientôt examiner à l’Assemblée Nationale et en-fin la sécurisation des parcours professionnels, qui fait l’objet d’une négociation entre les par-tenaires sociaux. Outre les jeunes, 8,6 millions de nos concitoyens sont aujourd’hui en situation de pauvreté.Monsieur le Premier Ministre, vous avez conclu ce matin la conférence nationale de lutte contre l’exclusion. Quelles sont les mesures concrètes que vous pouvez annoncer à la représentation nationale ?

Retrouvez cette séquence en vidéo sur le blog de Régis Juanico : http://www.juanico.fr/2012/12/11/question-dactualite-sur-le-plan-du-gouvernement-contre-la-pauvrete/

ACTUALITÉS

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BLUMA /// Décembre 2012 /// 19

SUCCÈS DE LA MANIFESTATION DU 16 DÉCEMBRE EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ POUR TOUS !

RETOUR EN IMAGES

ACTUALITÉS

200 000C’est le nombre de manifestants qui ont battu le pavé le week-end du 15-16 décembre pour défendre l’égalité de tous !

Prochain rendez-vous annoncé : le 27 janvier prochain, soit deux jours avant que le texte ne soit présenté à l’Assemblée Nationale.

Page 20: BLUMA décembre 2012

BLUMA /// Décembre 201220 ///

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SiGNEZ Et FAitES SiGNER LA PÉtitioN PoUR UNE tvA RÉdUitE SUR LE LoGEMENt SoCiALhttp://unmondedavance.eu/signez-et-faites-signer-la-petition-pour-une-tva-reduite-sur-le-loge-ment-social/

AGENDAMi-Janvier : lancement du débat contributif sur internet pour prépa-rer le forum «transition écologique» du Parti socialiste qui aura lieu le 6 avril prochain

Nos camarades jeunes organisent une «École des Cadres» les 12 et 13 janvier prochain. Néanmoins, ils ont besoin de financer le déplacement des camarades à Paris. Ils lancent donc un appel à contribution. Si vous le souhaitez, vous pouvez donc envoyer un chèque à l’ordre d’Un Monde d’Avance.

15 janvier : présentation du projet de loi portant création du contrat de génération au Parlement

29 janvier : Présentation de la réforme « Mariage pour tous » devant le Parlement

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