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N° 28 Publication gratuite Inspection acadØmique de l’Essonne BULLETIN DE LIAISON DES ÉCOLES DE L'ESSONNE Interview avril 2000 BLÉ91 N°28 - avril 2000 - IA Essonne Sommaire (suite page 2) Edito 1 Interview : Jean HÉBRARD 3 Maîtriser l’oral, comment faire ? 4 Un ouvrage controversé 5 Faut-il abandonner l’écrit pour se consacrer à l’oral ? 6 Une recherche en Essonne 7 La lecture à haute voix 8 Le débat argumenté 10 Théâtre et oral 11 La parole de l’élève à l’école 12 Des rituels aux activités-repères 14 La récitation, en passant par les jeux vocaux Le s Le s Le s Le s Le supplØment d upplØment d upplØment d upplØment d upplØment de lAIS : e lAIS : e lAIS : e lAIS : e lAIS : BLAISE n° 5 15 Le paravent qui fait parler 16 Pour une redéfinition de l’exposé 18 Education musicale et langue orale 19 Comment faire parler 30 élèves en maternelle ? 20 Vous avez dit quoi de neuf ? 21 Bibliographie sur l’oral 22 Les manuels de CP (le retour) 24 Les temps des verbes : méfions-nous. 26 Quels contrats ? 27 Monographies des communes de l’Essonne 28 On note à la maternelle ! Jean HØbrard, inspecteur gØnØral de lEducation nationale, est lun des auteurs dun important rapport sur loral 1 . AprLs avoir ØtØ chercheur en histoire de lØducation à lINRP, conseiller technique dans divers cabinets ministØriels, il a aujourdhui une vision prØcise de lØtat de lenseignement de loral, de ses difficultØs, de ses enjeux et des amØliorations possibles. BLÉ91 - Le rapport de lInspection gØnØrale, La place de l’oral dans les enseignements à l’école primaire, ne se fonde pas seulement sur une enquŒte. Jean HØbrard -En effet, une première partie concerne les attentes de l’institution à travers les programmes et les instructions officiels, mais également à travers les rapports d’inspection. Elle dessine le cadre de la seconde partie, qui se fonde sur une enquête de terrain, grâce à des visites de classe dans les trois cycles qui à chaque fois ont donné lieu à deux types de séances : une séance où l’oral devait être un objectif explicite d’enseignement et une séance où l’oral était le vecteur des apprentissages. Par ailleurs, des questionnaires adressés à des enseignants ont complété les observations. Vous nØpargnez pas les inspecteurs, à travers lanalyse de leurs rapports Les inspecteurs se montrent attentifs aux conditions de communication dans la classe et à la participation des élèves. Toutefois, ils semblent plus intéressés par la communication elle- même que par l’activité langagière qu’elle met en jeu. Ils se satisfont donc d’une classe où l’on parle et où l’enseignant s’efface. En contrepartie, ils négligent souvent ce que l’on y dit et la qualité des interactions qu’y produit le maître. Ils paraissent, à cet égard, beaucoup plus proches des instructions officielles de 1972 que de celles de 1985 ou 1996 et donnent peu d’indications, dans leurs rapports, sur ce que doit être un bon dialogue pédagogique. 1-La place de loral dans les enseignements à lØcole primaire, Inspection générale de l’Education nationale, rapporteurs : Martine Safra, Jean Hébrard, Serge Thévenet, Ministère de l’Education nationale, de la Recherche et de la Technologie, septembre 1999. Dossier : Loral Outre notre supplément BLAISE et des articles sur des sujets divers en fin de numéro, avec en particulier une nouvelle enquête sur les manuels de lecture dans les CP de notre département, ce numéro est largement consacré à l’oral. Sans traiter tous les aspects de l’oral à l’école, ce dossier vous propose une analyse et des recommandations concernant les pratiques des enseignants par un inspecteur général, des informations plus théoriques, des ressources bibliogra- phiques et, bien sûr, des situations pratiques pour aider les enseignants à diversifier leurs pratiques de l’oral.

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N° 28Publication gratuite

Inspection académique de l'Essonne

BULLETIN DE LIAISON DES ÉCOLES DE L'ESSONNE

Interview

avril 2000

BLÉ91 N°28 - avril 2000 - IA Essonne

Sommaire

(suite page 2)

Edito

1 Interview : Jean HÉBRARD 3 Maîtriser l’oral, comment faire ? 4 Un ouvrage controversé 5 Faut-il abandonner l’écrit pour se consacrer à l’oral ? 6 Une recherche en Essonne 7 La lecture à haute voix 8 Le débat argumenté10 Théâtre et oral11 La parole de l’élève à l’école12 Des rituels aux activités-repères14 La récitation, en passant par les jeux vocaux Le s Le s Le s Le s Le supplément dupplément dupplément dupplément dupplément de l�AIS :e l�AIS :e l�AIS :e l�AIS :e l�AIS : BLAISE n° 515 Le paravent qui fait parler16 Pour une redéfinition de l’exposé18 Education musicale et langue orale19 Comment faire parler 30 élèves en maternelle ?20 Vous avez dit quoi de neuf ?21 Bibliographie sur l’oral22 Les manuels de CP (le retour)24 Les temps des verbes : méfions-nous.26 Quels contrats ?27 Monographies des communes de l’Essonne28 On note à la maternelle !

Jean Hébrard, inspecteur général de l�Education nationale, est l�un des auteursd�un important rapport sur l�oral1. Après avoir été chercheur en histoire del�éducation à l�INRP, conseiller technique dans divers cabinets ministériels, ila aujourd�hui une vision précise de l�état de l�enseignement de l�oral, de sesdifficultés, de ses enjeux et des améliorations possibles.

BLÉ91 - Le rapport de l�Inspection générale, Laplace de l’oral dans les enseignements à l’écoleprimaire, ne se fonde pas seulement sur uneenquête.

Jean Hébrard -En effet, une première partieconcerne les attentes de l’institution à travers lesprogrammes et les instructions officiels, maiségalement à travers les rapports d’inspection. Elledessine le cadre de la seconde partie, qui se fonde sur

une enquête de terrain, grâce à des visites de classe dans les troiscycles qui à chaque fois ont donné lieu à deux types de séances :une séance où l’oral devait être un objectif explicited’enseignement et une séance où l’oral était le vecteur desapprentissages. Par ailleurs, des questionnaires adressés à desenseignants ont complété les observations.

Vous n�épargnez pas les inspecteurs, à travers l�analyse deleurs rapports�

Les inspecteurs se montrent attentifs aux conditions decommunication dans la classe et à la participation des élèves.Toutefois, ils semblent plus intéressés par la communication elle-même que par l’activité langagière qu’elle met en jeu. Ils sesatisfont donc d’une classe où l’on parle et où l’enseignant s’efface.En contrepartie, ils négligent souvent ce que l’on y dit et la qualitédes interactions qu’y produit le maître. Ils paraissent, à cet égard,beaucoup plus proches des instructions officielles de 1972 que decelles de 1985 ou 1996 et donnent peu d’indications, dans leursrapports, sur ce que doit être un bon dialogue pédagogique.

1-La place de l�oral dans les enseignements à l�école primaire, Inspectiongénérale de l’Education nationale, rapporteurs : Martine Safra, JeanHébrard, Serge Thévenet, Ministère de l’Education nationale, de laRecherche et de la Technologie, septembre 1999.

Dossier :

L�oral

Outre notre supplément BLAISE et desarticles sur des sujets divers en fin denuméro, avec en particulier une nouvelleenquête sur les manuels de lecture dansles CP de notre département, ce numéroest largement consacré à l’oral. Sanstraiter tous les aspects de l’oral à l’école,ce dossier vous propose une analyse etdes recommandations concernant lespratiques des enseignants par uninspecteur général, des informations plusthéoriques, des ressources bibliogra-phiques et, bien sûr, des situationspratiques pour aider les enseignants àdiversifier leurs pratiques de l’oral.

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(suite de la page 1)

Quelles sont vos principales conclu-sions concernant l�école maternelle ?

La constatation la plus étonnante est que,peut-être, l’oral n’est plus, comme il l’alongtemps été, au centre des activités del’école maternelle. On y voit de plus en plussouvent des enfants remplissant commeils le peuvent des fiches polycopiées dontl’intérêt est loin d’être évident.Peut-être est-ce simplement que lesenseignants ne disposent plus d’uneformation suffisante sur l’acquisition dulangage. Ils ne mesurent plus à quel pointchacune de leurs paroles peut jouer un rôledécisif pour l’enfant s’ils parviennent à enfaire une interaction efficace.Les instructions officielles distinguentpourtant bien les grands axes du travail àeffectuer : activités de communicationd’une part (dans le domaine «Vivreensemble»), activités langagières del’autre (domaine «Apprendre à parler età construire son langage»).Elles suggèrent aussi une progression quiva de l’accompagnement du tout petitencore en train d’acquérir son langaged’action, à l’étayage de l’enfant qui, verstrois ans, réapprend à utiliser son langage,cette fois pour évoquer des situationspassées, à venir ou imaginaires. Ellesengagent enfin à donner aux plus grandsles moyens d’une première réflexion sur lalangue qu’ils utilisent (en particulier danssa dimension phonétique, mais aussi danssa dimension textuelle).Les rituels du matin (il faut bien avouerqu’ils sont le plus souvent sans réel intérêt)et le regroupement autour du tapis «pourparler» ne peuvent suffire à réaliser ceprogramme ambitieux. Il y a pourtant dessituations très riches à l’école maternelle.Je pense, en particulier, au travail fait surles albums, à «l’heure du conte», à toutesles situations de «dictée à l’adulte», etc.Force est de constater qu’elles donnentrarement lieu aux interactions adultes/enfants qu’elles pourraient permettre.En fait, la vraie question posée par

l’enseignement de l’oral à l’école mater-nelle est celle de l’activité langagière dumaître. Comment, à chaque étape del’apprentissage, interagit-il avec les enfantspour leur permettre d’acquérir le langageet la langue dont ils ont besoin pour devenirdes écoliers ? Comment, tout au long de lajournée, module-t-il ses interventions pourinteragir le plus fréquemment possible avecchaque enfant et, plus particulièrement,avec ceux qui en ont le plus besoin ?

Quant à l�école élémentaire, quellessont vos principales recommanda-tions, au regard de vos observations ?

Pour l’école élémentaire, deux axes sedégagent. Le premier concerne la com-munication. Elle ne peut être mise pluslongtemps au service de n’importe quelbavardage. Elle doit être recentrée endirection de l’éducation civique etcitoyenne des enfants. Dans chaque école,le règlement intérieur doit faire l’objetd’une élaboration collective, des réunionsde régulation du «vivre ensemble» doiventêtre organisées chaque semaine, les enfantsdoivent y apprendre que la discussion estle seul moyen de résoudre les conflits et detrouver les bonnes solutions aux problèmesque pose la vie collective. Partout les élèvesdoivent apprendre les règles de lareprésentation (délégué de classe) etl’importance de la vie associative (USEP,OCCE, etc.).Le deuxième axe, très déficitaire d’aprèsnos observations, concerne le dialoguepédagogique, c’est-à-dire le processus parlequel, lors de l’échange avec l’adulte,l’enfant acquiert des représentationsneuves ou modifie ses représentationsspontanées tout en enrichissant la languequ’il parle. Trop souvent l’enseignant secontente de faire trouver la réponse qu’ilattend en interrogeant successivementles élèves de sa classe. Le souci de menerà bien la leçon fait oublier que toute erreurdoit faire l’objet, avec l’enfant qui l’aproduite, d’un dialogue qui en permetl’analyse et la résolution.

Vous distinguez «oral pour apprendre»et «oral à apprendre».

Cette distinction ne va pas de soi à l’écoleprimaire. Elle est pourtant essentielle.L’oral «pour apprendre» doit y occuper uneplace centrale. Il est la modalité même del’apprentissage à cet âge. Il ne faut pas pourautant oublier l’oral «à apprendre». C’estactuellement à l’école maternelle qu’il estle mieux travaillé même si de grandsprogrès peuvent être faits. A l’écoleélémentaire, on peut entrer dans lestechniques et les arts de l’oral comme lalecture à haute voix, la diction poétique,l’expression théâtrale ou, sur un autreregistre, la conduite de discussion oul’exposé.Toutefois, l’enrichissement de la langueorale reste encore un objectif prioritaire, enparticulier au cycle III, pour les enfants quine bénéficient pas, chez eux, desollicitations verbales soutenues. Lalittérature de jeunesse peut jouer, dans cetteperspective, un rôle décisif à conditionqu’elle fasse l’objet de débats et dediscussions comme on le fait avec l’albumà l’école maternelle.

Bibliographie sélectivede Jean Hébrard

ØDiscours sur la lecture (1880-1980),Anne-Marie Chartier et Jean Hébrard,BPI, coll. «Etudes et recherches», 1989.

ØLa culture de l�écrit et les réseaux deformation : le rôle des réseaux acadé-miques maîtrise de la langue dansl�impulsion des actions lecture-écriture,actes de l�Université d�été de Lacanau,septembre 1991, sous la dir. de MaxButlen et Jean Hébrard, CRDP deCréteil,1992.

ØLire, écrire, Anne-Marie Chartier,Christiane Clesse, Jean Hébrard, Hatier,tome 1 : «Entrer dans le monde de l’écrit :au cycle 2», 1ère éd. 1991, 3ème éd. 1998 ;tome 2 : «Raconter, dicter, écrire», 1998.

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Parler devant le groupe, c’est du mêmeordre que l’expression corporelle et la

danse. C’est s’exposer aux regards : lelangage révèle le milieu culturel, les idéespersonnelles et certains enfants préfèrentéviter ces situations à risques en se taisant.D’autant que le niveau de langue véhiculépar l’école est souvent différent de celuide la vie courante.

Pour quels enjeux ?

Certains élèves n’ont pas toujours unespace de parole à la maison ; un corpusminimum leur permet d’exprimer leursbesoins. Dans le film Ça commenceaujourd�hui, une enseignante dit : «Ilsne parlent pas, c’est juste de la survie».Pour ceux-là, mais aussi pour les autres,l’enseignant se doit de mettre en placedes situations orales pour :� oser prendre la parole ;� écouter et prendre en compte celled’autrui ;� prendre la parole à bon escient ;� exprimer leurs sentiments, leursimpressions ;� défendre leur opinion ;� acquérir un registre de langue courant ;� acquérir une nouvelle langue pour lesenfants migrants ;� enrichir leur vocabulaire et leur syntaxe.

Quelles difficultéspour les enseignants ?

Souvent, des moments quotidiens deconversation figurent à l’emploi du tempsdes enseignants sous le nom d’entretienou de quoi de neuf ? En maternelle, c’estle moment de la présentation du projet oudes ateliers. Dans les classes, on constateque dans la réalité, le maître se heurteparfois à des difficultés de mise en œuvredues :

� à l’intérêt personnel («ma maman m’aacheté une petite voiture») ;� aux temps de discussions trop longs(l’attention des enfants se relâche) ;� aux enfants qui monopolisent la parole(les autres se désintéressent de ladiscussion) ;� aux interventions de l’enseignant quimonopolise la parole à la place des élèves ;� aux questions fermées qui n’appellentaucune réponse construite («avez-vousaimé ce livre ?») ;� aux questions qui mettent les élèves endifficulté («pourquoi as-tu aimé celivre ?») ;� aux sujets enchaînés sans lien (lasolidarité, le racisme, la cour de l’école puisla rencontre sportive) ;� au moment décontextualisé du reste desapprentissages (sans synthèse ou trace écrite) ;� aux interruptions fréquentes du maîtredans un souci de correction (mais quidécouragent l’enfant ).

Quelles situationsmotivantes proposer ?

Réunir les enfants et leur donner la parolen’est pas une condition suffisante pouratteindre les objectifs que l’on s’est fixés.Sans objet de conversation, la séance devientvite un bavardage improductif, et lesenseignants se découragent. Pourtant lessituations de communication sontnombreuses et variées :� présentation d’articles de presse ;� présentation de livres de la BCD ;� réunion de conseil de classe ou de cycle ;� exposé ;� travail en groupe avec un rapporteur ;� tutorat ;� rencontre avec un professionnel ;� discussion sur un extrait de livre ou unfait de société ;

� saynète improvisée ou non ;� jeu du portrait ;� création poétique...

Comment faire pour évaluer ?

Si l’on attribue à ces moments un rôlepédagogique, l’enseignant se posera laquestion de l’évaluation et se doterad’outils pour émettre un avis objectif.Des grilles d’évaluation élaborées avec lesenfants leur permettent de savoir ce qu’onattend d’eux et d’être attentifs à leur proprelangage.

date : sujet :

nom des élèves prises de parole

Marie +++

Paul +

Julie

Pierre +++++

date : sujet : nom :

J’ai pris la parole

J’ai respecté le sujet

J’ai répondu à un camarade

J’ai posé une question

J’ai répondu à une question

J’ai appris quelque chose

En conclusion

Pour apprendre à maîtriser l’oral à l’école,il faut que l’élève comprenne les enjeux desséances proposées et que celles-ci sedéroulent en fonction de compétencesprécises dans une progression. Il s’agitdonc bien de séances d’apprentissage quidemandent au même titre que les autres àêtre préparées par l’enseignant. On pourraaussi :� prévoir un ordre du jour qui évite ladispersion ;� donner un moment de réflexion pourrassembler ses idées sur le sujet proposé ;� nommer un secrétaire qui note les idéesprincipales ;� laisser une trace de synthèse qui reflètel’évolution du discours.

Joëlle HAIZE, conseillère pédagogiqueà Palaiseau

Maîtriser l’oral,comment faire ?Faire parler, laisser parler, apprendre à mieux parler, c�est difficile.Pourquoi ? Comment s�y prendre ? Pourquoi les activités oralessont-elles si difficiles à mettre en �uvre dans une classe ?

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Si, intrigué par l’intérêt que leur porte un PE2 de passage dans votre école,

il vous venait la curiosité d’aller consulterces ouvrages1 au CDDP ou au centre deressources de l’IUFM, il est probable quevous auriez du mal à les obtenir : ils sontconstamment empruntés ou réservés. Etl’engouement des PE pour ces ouvrages necesse pas avec la fin de la préparation auxépreuves du concours.

Des outils pour l’enseignant

Le plus remarquable est sûrement celui quiconcerne l’outil d�évaluation d’uneproduction langagière orale. L’auteurdonne une grille d’analyse, un système decodage et de comptage des différentesoccurrences, avec des exemples deproductions orales d’enfants de maternelletranscrites.Les programmations liées aux grillesd’évaluation, les propositions de situationsétoilées en fonction de leur capacité à«sidérer» les enfants (pour les inciter às’exprimer) seront aussi d’excellentscarnets de route pour que les équipes netravaillent point à vue, mais en cohérence,en continuité et à l’écoute de chacun.Toutes les propositions faites autour del’ album, avec des exemples analysés deréécriture de certains classiques dans lerespect du palier syntaxique auquel se situel’enfant, des travaux menés sur «l’album-écho» (élaboré avec les élèves dematernelle, pour rendre compte d’expé-riences vécues), permettent d’assurerl’indispensable articulation langage oral-lecture-écriture.

Enfin, un chapitre donne une informationminimale sur la phonologie du français,ainsi qu’un ensemble de pistes à suivrepour apporter des éléments de solution auxproblèmes articulatoires auxquels seheurtent des enfants de maternelle.

Pourquoi cet engouement ?

D’abord, peut-être, en raison du styleadopté par l’auteur : aucune cuistrerie, unvocabulaire simple, clair, précis, ajusté,bref un texte d’accès facile qui, de plus,donne une quasi-incarnation aux exemplesqui sont proposés : je vous assure que cesenfants vous les entendez presque, et vousavez hâte de retrouver ceux qui vous sont(ou seront) confiés, maintenant que vousvous sentez mieux armé pour les aider tousà avancer dans leur difficile travaild’appropriation de la langue.

Contre un académisme pressé

C’est à partir d’une longue et patienteécoute de productions langagières oralesd’enfants de toutes les sections de lamaternelle, analysées par un faisceauéclairant de connaissances linguistiques,que Philippe Boisseau met à jour uninventaire ordonné des principalesformes syntaxiques auxquelles l’enfantrecourt pour s’exprimer oralement.L’évolution des différentes formes estclairement donnée et les passages obligéssont nettement balisés.Ces étapes, avertit ce pédagogue, devrontêtre impérativement respectées pourchaque enfant. Le travail de l’enseignantde la maternelle est «de mettre à sa

disposition, à travers les feed-backsqu�on renvoit en écho à ses propositions,à travers même la forme des questionsqu�on lui pose pour le conforter dans sesémissions, des modèles bien à portée del�endroit où il en est dans la recons-truction de notre langue (�) ce quiconduit à juger excellents des feed-backscomme :Elle fermait bien sa porte POUR QU’il nerentre pas, le renard.Ah oui, tu as reconnu la maison OÙ il secache, le bonhomme.peut faire grincer des dents le «sur-moipédagogique» de beaucoup d�entre nous,plus tranquilles avec (...)Elle fermait bien sa porte POUR QUE lerenard ne rentre pas».

Philippe Boisseau consacrera de nom-breuses pages à démontrer comment unacadémisme pressé, qui, parce qu’il brûledes étapes essentielles du processusd’élaboration de sa langue par l’enfant,empêche en fait celui-ci d’accéder à lamaîtrise de cette langue.Ne pas renvoyer à l’enfant simplementdes formes académiques, mais interagiravec lui à l’aide «des modèles bien àportée de l�endroit où il en est dans lareconstruction de notre langue», exigedu pédagogue des compétences com-plexes : les nombreux outils fournis parl’auteur constituent une aide à leuracquisition.Fabienne SABOYA, maître formateur à l�école

Descartes de Saint-Michel-sur-Orge

Un ouvrage controverséPhilippe Boisseau est l�auteur de deux tomes sur le langage à lamaternelle qui ont un succès certain : Fabienne Saboya nousexplique pourquoi. Marie-Alix Defrance fait partie d�une équipede recherche qui ne partage pas certains des partis pris deP. Boisseau, notamment sur la traduction de la langue écrite desalbums en langue orale et l�utilisation artificielle de tournuressyntaxiques induites par l�adulte. En regard, page ci-contre,elle apporte le point de vue de son équipe sur l�oral.

1-Introduction à la pédagogie du langage :maternelle, tomes 1 et 2, Philippe Boisseau,CRDP de Rouen, 1996 et 1997, 325 p. et 228 p.Phil ippe Boisseau a été instituteur,formateur au centre de formation desmaîtres spécialisés, puis IEN.

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Faut-il abandonner l’écritpour se consacrer à l’oral ?

Aujourd’hui la question de l’oral revient au premier plan des recom-

mandations ministérielles. Nombreuxsont les enseignants qui se sentent démunispour faire progresser les enfants : ils seheurtent à des disparités accrues entre lesenfants. Ils veulent aider prioritairementles enfants les plus en difficulté, car ilssavent que, faute d’avoir résolu leurdifficulté langagière dès le début de lascolarité, tous leurs apprentissages enseront entravés.Le fait de travailler sur l’écrit n’empêchepas ces enfants de progresser à l’oral, bienau contraire. Pour avoir participé pendant4 ans à la recherche PROG1 sur lesapprentissages progressifs de l’écrit, dela petite section au CE1, nous avons acquisla conviction suivante : il faut aider l’enfantà développer non seulement l’oral, mais lelangage dans toutes ses dimensions et soustoutes ses formes. L’écrit en fait partie, etil est susceptible de stimuler le langage oralet la réflexion, comme nous le verrons.

De la mère à la maîtresse

Quand le bébé se lance à produire dulangage, sa mère s’adapte le plus possibleà lui pour l’encourager ; elle le comprendpresque par avance et attend avidementses premiers mots, ce qui est très stimulantpour lui. Le langage du bébé se construitdans ce milieu restreint et les situations

immédiates. La première rupture survientquand il arrive à l’école où l’on necomprend pas toujours ce qu’il dit, et où ildoit renoncer à ce langage maternel pourse plier à une langue nouvelle partagée ausein de l’école.Si la maîtresse sait le mettre en confiance,l’enfant va parler de ce qui lui importe leplus : son «chez lui». Déjà, il va devoirquitter la situation présente pour évoquerd’autres personnes, d’autres lieux, dans unautre temps, le tout inconnu de soninterlocutrice. La maîtresse s’ajustefinement à lui, le devine, le stimule par sonécoute, ses questions, et si elle sait doserson aide, mais le laisser aussi affronter ladifficulté, l’enfant se met à chercher cequ’il doit préciser pour qu’elle puisse lecomprendre ; c’est très complexe, celas’appelle : l’adaptation au destinataire.Si par ailleurs dans la vie de classe, lamaîtresse offre aux enfants la possibilité dechoix et d’initiatives, si elle valorise lesprogrès et célèbre les exploits (surtout ceuxdes enfants timides), ils se mettent à fairedes projets, à en parler, ils ont envie de lesdéfendre, ils deviennent les sujets de leurparole en devenant les sujets de leursapprentissages. Alors, immanquablement,leur langage se complexifiera, ils seserviront de ce qu’ils auront entendu pourle recréer et en faire leur parole.

Très vite, l’écrit

Dans cet élargissement progressif de lasphère du langage, l’écrit intervient trèsrapidement : si on veut réaliser jeudi unebelle purée pour toute la classe, il faut queles parents apportent des pommes de terre.On va le leur demander en écrivant une

lettre. Mais les parents ne sont pas là, et nesavent rien de ce projet. L’absence del’interlocuteur et le décalage dans le tempsposent une difficulté nouvelle, mais ils’agit toujours de dire quelque chose àquelqu’un : c’est bien du langage. Et lejeudi, quand les enfants voient arriver lespommes de terre, ils commencent à réaliserle pouvoir que donne l’écrit. Bientôt ilsvoudront s’en saisir.L’entrée dans l’écrit impose également untemps de réflexion pour repérer ce que saitou ne sait pas le destinataire, pour ne rienoublier, pour le dire dans le bon ordre. Cetteréflexion est aussi pour nous une activitélangagière que l’enseignant doit déve-lopper, car elle est essentielle dans tous lesapprentissages.Voici un bref moment de classe qui rendraplus concret notre propos. Il se situe dansune des classes de la recherche, en milieuZEP. Le lapin de cette classe de moyennesection circule en liberté, parce que lesenfants ont choisi de le laisser marcher pourrééduquer sa patte après une fracture.Soudain, un enfant se souvient que lefactotum risque d’entrer pour faire destravaux, et de blesser le lapin. La maîtressedit seulement : «Comment pourrait-onfaire ?» Les enfants proposent de mettreun mot sur la porte et le dictent à lamaîtresse : «Attention, Panpan sepromène dans la classe.» Quand le motest écrit, elle leur laisse le soin de dire où ilfaut le placer. Elle confie le papier à unenfant qui veut le coller bien en vue (pourlui !) sur la porte, à l’intérieur de la classe.Un autre enfant dit : «Ah non, ça va pas, ipourra pas le voir, Jean-Jacques !»L’enfant reprend le mot et le colle àl’extérieur, mais un troisième enfantproteste : «C�est à l�envers, les écritures»,et peu à peu la discussion permet de leplacer au mieux. Un enfant dit même :«Faut le mettre plus haut, pass�que lesyeux de Jean-Jacques, i sont là.» (geste).La maîtresse souligne que c’est une bonneidée de le placer pour celui qui va le lire.Un quart d’heure plus tard, Jean-Jacquesentre avec précaution dans la classe et

1-Le résultat de cette recherche sera publiédans un ouvrage pour les maîtres, intituléApprentissage progressif de l�écrit en mater-nelle, éd. INRP-Hachette, coll. «Pédagogiespour demain». Il doit paraître au troisièmetrimestre 2000.

Marie-Alix Defrance a longtemps enseigné au centre IUFMd�Etiolles. Chercheur associé à l�INRP, elle affirme l�importancede l�écrit pour le développement de l�oral. Sans polémiquer, elledonne un autre point de vue que celui de Philippe Boisseau, louépage ci-contre.

(suite page 6)

Dossier : L�oral

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demande : «C�est qui Panpan ?» Lesenfants sont très étonnés, c’est la premièrefois qu’ils touchent du doigt la différenceentre ce qu’ils savent, eux, et ce que sait ledestinataire de leur message. La maîtressela relève et l’explique. Développer lelangage, c’est beaucoup plus que «faireparler les enfants» : c’est apprendre àpenser par le langage.La lecture quotidienne d’albums est uneoccasion d’enrichir l’expérience dulangage écrit, vraiment caractéristique del’écrit. Les albums choisis sont toujours lusplusieurs fois, parfois en petits groupes, etla compréhension s’approfondit : ondiscute sur l’histoire, ce qu’on aime, oun’aime pas, sur son univers de fiction, surles personnages, leurs actions, et très viteles enfants deviennent exigeants sur leurpropre compréhension et demandent desexplications, que la maîtresse renvoie augroupe pour une élucidation collective.Parfois, c’est le langage écrit lui-même quinous paraît problématique pour leur âge.En ce cas, nous le disons aux enfants le plusclairement possible. Une maîtresse degrande section annonce ainsi saprésentation du Géant de Zéralda deTomi Ungerer : «Je vous ai apporté cettehistoire, parce que je crois qu�elle vavous plaire. Mais quand je l�ai lue chezmoi hier soir, j�ai trouvé qu�elle étaitdifficile à comprendre à cause des motsqui sont écrits dedans. Alors aujourd�huije ne vais pas vous la lire, je vais vous laraconter avec mes mots, en vousmontrant les illustrations. Et plus tard,je vous la lirai et ce sera encore plusbeau.» Elle fait alors un récit oral qu’ellea bien préparé chez elle pour le rendre trèsaccessible. Car la lecture se fait toujourssans rien changer au texte, et la maîtressemontre bien comment elle fait pour lire.Nous avons constaté que ce genre de travaildéveloppe le langage oral et préparevraiment l’apprentissage de la lecture.

Marie-Alix DEFRANCE, chercheur associé àl�INRP, coordinatrice nationale

avec M ireille Brigaudiot et Gilbert Ducancelde l�équipe INRP - PROG

Une recherche en Essonne(suite de la page 5)

Dossier : L�oral

Liliane LE PESANT et Max BUTLEN,professeurs de français au centre IUFM

d�Etiolles

1-Max Butlen, Rouska Haglund, Liliane LePesant (PIUFM), Daniel Becchio, Marie-France Winghart (DEA).

Comment, dans le contexte particulier de la ZEP des Tarterêts àCorbeil, aider les enfants de cycle 2 à surmonter les difficultésqu�ils rencontrent dans l�apprentissage de la lecture ?Tel est l�objet de la recherche-action que conduisent desprofesseurs1 de notre centre IUFM en collaboration avec leséquipes pédagogiques des écoles de la Montaigne des Glaises etPablo Picasso.

Cette recherche repose sur une double hypothèse : les difficultés langa-

gières éprouvées à l’oral par les enfantsconstituent un obstacle essentiel àl’apprentissage technique de la lecture età la formation culturelle de ces lecteurs ;l’identification de ces difficultés etl’analyse de leurs évolutions tout au longdu cycle 2 doivent permettre de mettre enplace des remédiations pédagogiquesefficaces.

Méthodologie adoptée

Une cohorte d’enfants, scolarisés en grandesection de maternelle à l’école Montaignedes Glaises, sera suivie jusqu’en CE1 àl’école élémentaire Pablo Picasso. Aucours d’entretiens individuels, l’équipe derecherche analysera deux fois par an leursproductions langagières, en se référant àleur aptitude à parler de l’écrit, du code etde la culture de l’écrit.La grille d’observation s’organise autourde 5 axes : la prononciation, la syntaxe, levocabulaire, la cohérence du discours, lafamiliarisation de l’enfant avec la culturede l’écrit. Dans chaque domaine, le degréde maîtrise des compétences est réguliè-rement mesuré à partir d’un supportd’expression orale, constitué par unensemble de quatre albums disponibles enBCD. Lors de chaque entretien, chaqueenfant sera invité à choisir un album, à leraconter et à commenter sa lecture avecl’enquêteur.

Premières observations

A la fin de la première observation engrande section de maternelle, les difficultésrenvoient à :� une faible conscience phonologique :confusion entre deux phonèmes, suppression

de la consonne finale, mots écorchés quirendent le discours peu compréhensible ;� la syntaxe : mauvais choix de pré-position, déficit de connecteurs spatio-temporels, erreurs sur les marquesgrammaticales du singulier et dupluriel (les petits i veut voir), recoursinsuffisant à la phrase complexe qui permetle passage à l’abstraction ;� la progression de l’information : ancragedéfectueux du référent, ambiguïté dans ladésignation, utilisation rare ou laborieusedes anaphores, absence d’élémentsporteurs d’informations clés, manqued’explicitation, notamment du lien decause à effet ;� la lecture de l’image, l’interprétation desillustrations ;� l’existence ou à l’absence de sociabilitésautour des livres et de la culture de l’écrit.Moins un élève a une connaissance deslivres et des lieux de production et dediffusion des livres, plus la qualité de sonexpression orale s’en ressent, plus sonentrée dans le code semble difficile.Pour approfondir l’analyse et élaborer despropositions pédagogiques, un séminairede formation continue réunit cette annéel’équipe de recherche et d’autresenseignants volontaires, mobilisés par lamême problématique. Des membres del’Observatoire national de la lecture serontassociés à certaines de ses réunions detravail.BLÉ 91 ne manquera pas de vous informerdes résultats de cette recherche.

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Dans l’un de ses romans, Jane Austen fait déclarer à une héroïne qu’il serait

impossible de trouver le bonheur avec unhomme ne sachant pas lire à haute voix :«cela m�aurait brisé le c�ur de l�en-tendre lire avec si peu de sentiments».Dans les sociétés grecque et latine del’Antiquité, les lectures publiques devaientêtre maîtrisées par celui qui s’essayait àl’art oratoire. Ainsi les pratiques de lectureà haute voix jalonnent-elles l’histoire. L’onpourrait dérouler une galerie de portraits delecteurs à haute voix tout au long dessiècles : moine déchiffrant un manuscrit,précieux lisant un sonnet, philosopherépandant les Lumières, homme psal-modiant la Torah ou le Coran, hussard dela République lisant les textes classiques,acteur célèbre présentant un choix detextes…La lecture à haute voix admet une grandevariété de circonstances, de lecteurs,d’auditeurs, de types d’écrits, d’enjeux :on lit à haute voix pour faire partager leplaisir d’un texte, faire connaître à d’autresune information écrite qu’ils n’ont pas,justifier une déclaration. Situation d’ex-pression et de communication, la lecture àhaute voix est une activité de la vie sociale,professionnelle, familiale.

La lecture à haute voix et l’école

Des années 70 aux années 80, les instruc-tions officielles pour l’école élémentaire etles didacticiens de la lecture mettent enavant la lecture silencieuse. On combat lesinterminables séances de lecture ânonnéeoù chacun s’ennuie ferme. Une lecturesilencieuse porteuse de sens est alorsopposée à une lecture oralisée qui n’impli-que pas que l’enfant comprenne ce qu’il dit,ni qu’il apprenne à lire.Puis les textes officiels de 1985, 1991,1995 placent la lecture à haute voix en

complément indissociable de la lecturesilencieuse : ils incitent à «lire en situationde communication (...) de façonexpressive» ; ils affirment que «la lecturefaite à haute voix par le maître estindispensable». Cette condition, lire en«situation de communication», estessentielle : elle exclut la lecture répétitiveorale, vide de sens.Par ailleurs, le texte d’orientation concer-nant le collège des années 20001 instituel’organisation d’ateliers de lecture pourtous les collégiens et la lecture à haute voixest souvent citée comme une activitépossible.Enfin, le projet de documents d’applicationdes programmes de l’école élémentaireindique : «La lecture à haute voix par lemaître continue d�occuper une placeprivilégiée. La lecture à haute voix parl�élève doit être, quant à elle, un moyende faire valoir le sens du texte : elle doitêtre préparée»2.Si ses particularités sont encore à définir,la place de la lecture à haute voix estréaffirmée.

Qu’est-ce que lire à haute voix ?

Lire à haute voix ne s’improvise pas.L’engagement corporel que cela demandeest à prendre réellement en compte, maisce n’est pas tout. La réussite dépendra decompétences à acquérir progressivement :comprendre le texte, savoir se placer physi-quement, respirer, articuler, maîtriser leregistre de sa voix, son timbre, pouvoirassocier le regard, l’audition, la phonation…Il ne s’agira pas d’entraîner artificiellementles élèves avec une batterie d’exercices,mais de construire avec eux leur propreprogression en fonction des besoinsrecensés. Dans cette perspective, l’ouvrageLa lecture à haute voix du CP au CM2présente un tableau indicatif avec les

entrées suivantes : difficulté rencontrée,causes, compétences visées, activités deremédiation.

Le tutorat de lecture

C’est une activité souvent proposée aux«grands » en direction des «petits». Dansune situation d’oral, donner la parole àquelqu’un qui ne dit rien ne suffit pas à lefaire parler. De même, un enfant ne devrapas affronter directement l’épreuve de lalecture d’un texte à lire aux petits à hautevoix ; la valorisation qu’il percevra dans lefait d’être mis en avant ne suffira pas.Il conviendra d’identifier avec les élèvesles étapes nécessaires et les compétencesen jeu : le choix du livre, l’évaluation de sapropre lecture, la préparation du texte, lalecture d’une façon expressive... Le travailsur la respiration, la maîtrise de la peur, leplacement de voix effectué dans d’autresactivités vocales et corporelles sera utile.Au cours d’activités décrochées, lestechniques utilisées au théâtre serontutilisées pour le travail sur la respiration,la posture, l’articulation, l’interprétation3.La lecture à haute voix est une activité quiconcourt à l’acquisition de compétencesdans le domaine de la lecture et de l’oral ;elle participe également à la constructionde la personnalité de l’enfant. Elle apleinement un statut d’apprentissage àl’école.

Laurence FROUIN, responsable du centredépartemental en ressources lecture

1-BO n°23 du 10 juin 1999.2-BO spécial du 26 août 1999.3-Voir articles pages 10 et 14.

La lecture à haute voix

Bibliographie

- La lecture à haute voix du CP au CM2,Annick Billaud-Lecoinet, Anne-Marie Ducros,Isabelle Dupinay-Lemaire, Michelle Ros-Dupont, éd. Bordas, 1999.- Lire à haute voix au cycle 3, Bruno Pled,Pierre Roudy, Claude Hameau, éd. Nathan,1997.- La lecture à haute voix, Georges Jean,éd. de l’Atelier, 1999.

Cette activité est-elle vraiment à l�ordre du jour ? Plus quejamais ! Comment la rendre motivante et source d�apprentissage ?

Dossier : L�oral

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Définition : le débat est une situationd’échange par laquelle au moins deuxpersonnes présentent leurs points de vue,les défendent contre les points de vueadverses, par des procédés rhétoriques età l’aide d’arguments.

Les enjeux de l’activité

Ils sont essentiels, puisqu’il s’agit de :- former un citoyen capable d’écouterautrui, de respecter et de s’enrichir de sespropos, de développer son esprit critique ;- conduire l’enfant à se construire desoutils : une stratégie de débat et les moyensde la mettre en place.

Exemples de situations motivantes1.Pour débattre, avant tout, il faut êtremotivé.- La classe doit choisir entre deux activités :vélo ou escalade. Quels sont les argumentsen faveur de l’une ou de l’autre activité ?(tous cycles).- Le loup a détruit les maisons des troispetits cochons. Quels argumentspermettent de défendre le loup, de lecondamner ? (tous cycles).

Une démarche

Voici une séquence en 7 étapes.� Le sujet du débat est formuléprécisément et d’éventuels besoins dedocumentation créés par ce débat sontdégagés.� Si nécessaire, la classe mène unerecherche documentaire sur le sujet ; onpeut aussi procéder à un brainstorming.� Un débat «diagnostic» avec obser-vation et analyse des stratégies de débatest mis en place : les enfants passentalternativement en débat et en observation.

� Pour construire l’argumentation,différents aspects de la «stratégie» sonttravaillés. Ces points seront définis plusloin, avec des propositions pour essayerde résoudre les problèmes.� Un débat avec un public évaluateurest organisé.

L’évaluation n’interrompt pas la séance,mais est menée simultanément par desenfants observateurs, en retrait du débat, àl’aide de grilles précises, simples etfacilement utilisables par tous. On peutavoir recours à des enregistrements, pourévaluer objectivement la prise de parole dechacun, quantitativement et qualitative-ment. Les critères de réussite sont àdéterminer avec les élèves, en fonction desstratégies efficaces observées.En voici quelques exemples :L�enfant prend la parole. Il écouteautrui. Sa voix est audible. L�enfantdonne son opinion. Il donne desarguments. Il réfute les argumentsd�autrui. Il a des propos clairs et précis.Il a des propos logiques�

� Une fiche-outil est construite etincluse dans un fichier regroupantdifférentes situations d’oral rencontrées :exposé, enquête, théâtre...� Cette fiche-outil sera réutilisée dansd’autres contextes de débat.

Chaque étape peut se dérouler en plusieursséances.

Difficultés et solutions

On constate que :- le débat dérape, le niveau sonore monte,le groupe devient ingérable ;- l’autre n’est pas pris en compte ;- les enfants ne retirent rien du débat ;- l’argumentaire n’est pas développé ;- certains enfants ne s’expriment pas,d’autres trop ;

- le sujet du débat est trop complexe ;- le sujet a trop ou pas assez d’implicationdans la vie des enfants : du fade aupassionnel... ;- le sujet n’est pas assez polémique et nese prête pas à la controverse.

Les propositions pour essayer de résoudreles problèmes, rencontrés du cycle 1 aucycle 3, concernent différents aspects dudébat.

Les enjeux du débat sont explicitésclairement avec les enfants qui voient uneutilité au débat. Ils ne mettent pas les élèvesdans une situation d’exercice à subir : ledébat doit avoir un sens et une finalitésignificative pour les enfants.

Les règles sont déterminées dans lerespect de chacun : deux ou trois suffiront.Elles seront justifiées collectivement :- on demande la parole au régulateur deséance pour parler ;- le régulateur de séance donne, mais necoupe pas la parole ;- il répartit équitablement la parole.

L�organisation du groupe-classe doitêtre adaptée :- la taille des groupes de débat : 3 enfantsau cycle 1, jusqu’à 6 au cycle 3 ;- le régulateur : il sera différent à chaquedébat ;- les observateurs : 1 observateur pour 1participant, voire 2 observateurs pour 1même participant au cycle 3 ;- les secrétaires : au cycle 1 et au cycle 2l’enseignant, 2 enfants au cycle 3 ;En résumé et à titre d’exempleuniquement :- au cycle 1, avec une classe de 28, on peutorganiser un atelier «langage» de 7 enfants :1 enfant donne la parole, 3 débattent,3 observent. Les autres enfants serontrépartis en autonomie dans les ateliers«graphisme», «jeux mathématiques»,«arts plastiques», avec éventuellement unsoutien de l’aide-éducateur ;- au cycle 3, avec une classe de 28, on peutorganiser la classe de la façon suivante :6 débatteurs, 6 à 12 observateurs,2 secrétaires, 1 régulateur. Le reste des

Le débat argumenté«Si tu es différent de moi, loin de me léser, tu m�enrichis.»

Antoine de Saint-Exupéry

1-Extraites de Maîtriser l�oral, cycle 3,éd. Magnard, 1998.

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enfants sera en autonomie avec un contratde travail.

La conduite de la séance : le rôle durégulateur est de donner la parole.Le rôle du maître est de reformuler laquestion régulièrement et d’aider lesenfants à reformuler, à synthétiser lespropos, afin de faire le point sur l’évolutiondu débat et ainsi le recadrer.Le rôle des secrétaires est de rédiger uncompte rendu des idées principales dudébat, afin de constituer une mémoire degroupe et de poursuivre ultérieurement ledébat si nécessaire en s’y référant.Le rôle des observateurs est d’évaluer lescomportements et les stratégies efficacesà l’aide de deux ou trois critères définiscollectivement, par exemple : le nombre deprises de parole, la clarté des propos, lesidées cohérentes, celles qui sont originales,etc.Il est essentiel que les enfants s’essaientaux différents rôles. Au cycle 1, seuls lessecrétaires n’apparaissent pas, mais unesynthèse orale sera effectuée et le maîtreprendra des notes sous la dictée desenfants.

Le temps de la séance : de quelquesminutes au cycle 1 à 10-15 minutes aucycle 3 ; ce temps peut s’allonger avecl’expérience du groupe, l’intérêt du groupepour le sujet...

La préparation du débat : pourcertains sujets, une recherche documen-taire2 sera utile pour étayer les arguments,pour développer le contenu de l’argu-mentaire.Il peut être également intéressant d’expli-citer avec les enfants des techniques, desstratégies de débat, à partir de situationsconcrètes filmées, par exemple, et enadaptant la formulation au cycle : lespropos sont convaincants s�ils sontprécis, clairs, structurés, organisés avecune logique implacable ; le discourss�étaye sur des connaissances solides dusujet débattu ; les idées nouvelles sontplus séduisantes que les vieux clichés,mais les idées traditionnelles rassurent.

Dans certains cas, il est essentiel de savoir«garder la main», de ne pas être à coursd’arguments, d’anticiper sur les propos etla logique de son adversaire. Il faut alorsne jamais perdre le fil des paroles de l’autreafin de répondre rapidement : éventuelle-ment, en prenant des notes, pour sesouvenir des dires de l’adversaire, pour nerien oublier et pour mieux renvoyer la balle.Il est souhaitable d’apprendre à parlerlentement pour réfléchir en même temps…Le public appréciera mieux une personnecapable de respecter les propos de sonadversaire.Pour ne pas passer pour quelqu’un sansdiscernement, il semble utile de ne pasemployer une argumentation fondée sur ladéfense de son seul point de vue, maisd’introduire des contre-arguments. Ainsi,le débat ne conduit-il pas dans uneimpasse, car il y a plusieurs voies dedialogue.Il est possible d’évoluer au cours du débat,voire de changer d’avis. Il est absurde dese cramponner à une idée qui se révèlemoins bonne que celle de l’adversaire. Lepublic saura en tenir compte et la suite despropos de celui qui aura montré sonhonnêteté n’en sera que plus crédible.Si l’on est à cours d’arguments, on peutrebondir sur ceux des autres, ou essayer detrouver la faille dans leur logique...

La construction d�un outil de référence,d’une fiche-guide du débat, pour structurerun argumentaire, s’appuiera sur :- une synthèse avec les enfants desstratégies efficaces observées au cours desdébats (cf. étape 4 des séances) ;- la liste des documents qui permettentde se préparer à un débat, les mots-clésnécessaires à l’argumentation, à laréfutation ;

- l’utilisation de la vidéo avec beaucoup deprécautions... Il est risqué de se voir et des’entendre, surtout en situation difficile.

Le choix d�un thème de débat nécessitela prise en compte de quatre dimensions :- une dimension psychologique inclut lesmotivations et les intérêts individuels desenfants ;- une dimension sociale concerne l’intérêtdu groupe-classe pour le thème à l’intérieuret à l’extérieur de l’école ;- une dimension cognitive renvoie authème lui-même et à des connaissancesdes enfants ;- une dimension didactique demande quele thème ne soit pas trop quotidien et qu’ilpermette d’accéder à des connaissancesnouvelles, car le débat est non seulementun moyen d’expression, mais aussi unepossibilité d’appropriation des savoirs3.

Elisabeth BINTZ, conseillère pédagogiqueà Viry-Chatillon

2-Cf. BLÉ91 n° hors série, avril 1998, sur la re-cherche documentaire.

3-Pour des compléments, voir «Le débat régulé»,Pour un enseignement de l�oral : initiation auxgenres formels à l�école, Joaquim Dolz,Bernard Schneuwly, ESF, 1999.

Quelle différence entre argumenter et justifier ?

Justifier : s’efforcer de faire reconnaîtreun point de vue comme juste, légitime,fondé, grâce à des preuves.

Argumenter : présenter des preuves àl’appui d’une thèse, réfutant un autrepoint de vue.

Différence principale entre justifier etargumenter : on justifie un point de vue,on argumente contre un point de vuequ’on cherche à réfuter, car au moinsdeux thèses sont en présence.Par exemple : on justifie sa réponse àune question du maître. On argumenteen faveur du centre aéré contre lesmercredis à la maison.

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Nous mettrons ici l’accent sur lesactivités théâtrales, au cœur des

acquisitions langagières. Il s’agit de fairedécouvrir aux enfants, dans le plaisir du jeu,d’autres manières de manipuler le langageet aussi d’accéder à sa maîtrise. Avec lethéâtre, le langage se met «en pratique»,avec des situations de communication quiont du sens pour l’enfant.Le jeu spontané est inné chez l’enfant. Cesont les premiers pas vers le jeu théâtral.Nous avons tous vu les enfants jouer à «être»dans le coin dînette, dans la cour, autour dela malle à costumes. L’enseignant est alorsle témoin d’une mise en jeu de la parole. Ilpeut décider de l’exploiter par un travailautour du langage oral, grâce à l’apparitiond’objets insolites ou de mises en scèned’événements-surprises, d’interventionsthéâtralisées par les adultes : quelqu’un alaissé des empreintes de pas dans l’école, lamarionnette de la classe a disparu.Tout ceci n’est que l’amorce d’une pratiquethéâtrale à l’école. Dans ces situations, lesréactions des enfants font émerger desespaces de parole et d’échange.L’enseignant a alors la matière pourproposer la mise en jeu de leur imaginaire.Mais pour amener l’enfant à construire sonlangage, il est indispensable que l’ensei-gnant le guide vers la théâtralisation pourqu’il prenne conscience de ses capacités decommunication et les développe. Unepratique régulière du jeu théâtral s’installealors. On peut dégager plusieurs typesd’activités qui mettent en jeu la parole ausein du jeu théâtral.

Le travail de la voix

Pour parler et dire, il faut connaître etmaîtriser un outil de communication : savoix. Pour cela, les jeux théâtraux proposentun éventail très large d’exercices sur la

Théâtre et oralLe théâtre est à l�intersection des langages : langage oral, langageécrit, langage du corps, langage des images.

respiration, le placement de la voix, lesrésonateurs, l’articulation et l’expression.Tout message oral est influencé dans sonefficacité par l’élocution et le rythme vocal.Combien de brillants esprits ont endormi lessalles par leur discours monocorde !

La création de récits oraux

Les enfants sont amenés à utiliser le langageoral dans la mise en jeu d’histoires, desituations induites par l’enseignant à partirde thèmes, de canevas, d’objets, d’albumssans texte, de scènes du quotidien, etc.A chaque fois, l’enfant est acteur face à desspectateurs (les autres enfants). Il prendalors conscience de la nécessité d’undiscours compréhensible et intéressant pourl’autre.

La mise en espace de récits

Ces récits peuvent être écrits par lesenfants, des auteurs ou être le résultat demontages de textes. La transposition à lascène de textes narratifs écrits nécessitele passage du code écrit au code oral. Lestextes deviennent de la matière à jouer.Les enfants s’imprègnent de façon activede différents registres de langue, de stylesd’écriture. Les mots prennent corps par lejeu théâtral.Au travers des activités théâtrales, lesenfants acquièrent des compétenceslangagières (concernant l’élocution,l’expressivité, la cohérence) et de commu-nication (écouter l’autre, le respecter, savoiret oser prendre la parole, se taire).En effet, le silence est premier. Il est le tempsde concentration, de préparation à la parole.Il est la frontière entre l’enfant et lepersonnage.

Irène MERCUZOT, ZIL à Massy etMarie-Noëlle NOURY, maître formateur

à l�école maternelle Moreau à Massy

Bibliographie

De Gérard Moncomble et Michel Piquemal,chez Albin Michel éducation :ØThéâtre pour de rire : 18 pièces à monter enateliers, de la grande section au CE1, 1998Ø17 pièces humoristiques pour l�école : àmonter en ateliers, du CE2 au CM2, 1998

Sous la direction de Christian Lambin,chez Retz :ØPetites comédies pour les enfants : de 7 à11 ans, 1993ØPremiers rôles pour petits comédiens, 1996ØPièces drôles pour les enfants, 7-11 ans,1996ØPièces policières, 7-11 ans, 1997

De Dominique Négrier avec ou sans AlainHéril, chez Retz :Ø60 exercices d�entraînement au théâtre, àpartir de 8 ans, 1992Ø100 jeux de théâtre à l�école maternelle,1995ØPetits spectacles à jouer en maternelle,1997ØPièces pour frissonner, 7-13 ans, 1998ØEntraînement à l�improvisation : 60exercices commentés, à partir de 8 ans, 1999

De François Fontaine, chez Retz :ØDes sketches à lire et à jouer, 5-8 ans, 1994ØPièces historiques, 9-14 ans, 1997

Dirigé ou présenté par Denise Chauvel,chez Retz :ØDes spectacles pour les enfants : du mimeà la pièce de théâtre, 5-10 ans, 1991ØPièces et saynètes pour les enfants, 1998

Toujours chez Retz :ØLa grammaire en scènes, 8-11 ans, Anne-Catherine Vivet-Rémy, François Fontaine,Christian Lamblin, 1995ØThéâtre et langage à l�école : 100 exercicespréparatoires, 3 pièces complètes pour 25élèves, 3 trames de pièces pour 25 élèves, 8-11 ans, Yak Rivais, 1995ØLes malheurs de l�orthographe au théâtre,7-10 ans, Danièle Fix et al., 1998ØContes, fables et bestiaire, 9-13 ans, Anne-Catherine Vivet-Rémy, Suzanne Rominger,Brigitte Saussard, 1998

Chez d�autres éditeurs :ØMonter des spectacles avec des enfants :pour tous les acteurs en herbe, Ann Rocard,Le Temps apprivoisé, 1991ØL�enfant et le théâtre : techniques d�expres-sion au service de l�école, Noëlle et BernardRenoult, Pascal Gautier, Colin, 1992ØLe jeu dramatique en milieu scolaire, Jean-Pierre Ryngaert, Weismalel, 1996, 3ème éd.ØCollection «théâtre» chez Magnard, depuis1999 : à 15F, de 16 à 40 pages

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Les programmes de l’école primairefont de la maîtrise de la langue

l�objectif majeur des différents cycles. Lavolonté de faire parler les élèves dans dessituations variées y est clairement affirmée.Le dernier rapport de l’Inspectiongénérale2 insiste sur le sens réel de lacommunication dans le domaine de l’oral :«S�interroger sur l�oral, c�est aussitôts�interroger sur les raisons que l�on ade s�exprimer ou de débattre. L�une desraisons des insuffisances du systèmeéducatif dans le domaine de l�oral, c�estsans doute le profond scepticisme desélèves quant à la nécessité même decommuniquer.»

L’identité de l’élève

Oser s�exprimer est l’un des premiersobjectifs. La parole est un acte d’expressionde soi, une prise de risque, un véhicule quisert à pénétrer le monde, un vecteurd’émotion, d’affirmation et de découvertede soi et des autres.C’est dans la famille, cette crypte de laparole dont parle le psychanalyste JacquesLévine3, que les parents vont initier sonapprentissage et que s’y vivent les premierssuccès ou les premières défaites. Denombreux enfants arrivent à l’écolechargés de ces défaites qui les empêchentde construire paisiblement leur rapport àeux-mêmes, aux autres et au monde. Lesenseignants perçoivent rapidement cesmalaises à travers les formes de prise deparole de l’élève, violentes, mutiques,désordonnées, pauvres.Ancrée dans des activités d’expression, laparole doit, comme le souligne AlainTouraine, aider l’enfant à affirmer ce qu’il

est, à se découvrir au milieu des autres, àprendre connaissance de son identité, àdévelopper une image de lui positive quiseule lui permettra d’entrer en relation avecles autres et de «manier la languenationale (...) pour être capable depercevoir l�Autre, ce qui est la conditiond�une vie en commun»4.Quels sont les activités ou les dispositifsqui vont permettre réellement ce travail deprise en considération et de développementdes identités personnelles ?

Le statut de l’élèveet les valeurs de référence

Déterminé par l’ensemble des droits, deslibertés, des responsabilités qui sontconfiés par l’enseignant à l’élève, le statutde l’élève conditionne le pouvoir que cedernier a (ou n’a pas) d’agir seul ou avecles autres à l’intérieur de la classe :comment et pourquoi, par exemple,échanger avec les autres élèves dans desclasses dont l’organisation est «presquetoujours frontale» ou dans lesquelles «lesilence apparaît comme le moment oùpourrait surgir de l�inattendu»,s’interroge sur ce point précis le rapport del’Inspection générale ?Responsabiliser les élèves, c’est leurdonner du pouvoir, les rendre partenaires,co-opérateurs de la vie de la classe et de sesprojets.Divers dispositifs pédagogiques permet-tent de rendre cette responsabilisationeffective. L’attribution, au sein de la classeou de l’école, de rôles sociaux en est un despremiers. Leur variété est telle que leurnombre dépasse largement celui desélèves5. C’est alors par la parole qu’on

organise la vie de la classe, que l’on définitles responsabilités, qu’on les attribue et lesévalue.L’organisation de la classe en groupesrestreints autour de projets est égalementun dispositif donnant du sens à la com-munication. C’est par l’échange qu’ons’organise dans le travail, qu’on donne sonavis, qu’on justifie, qu’on choisit, qu’onprend des décisions.La nature de la communication est égale-ment fortement corrélée aux valeurs deréférence de la classe qui induisent le tissurelationnel autour duquel se construisentles apprentissages. Il est évident qu’on necommunique pas de la même façon dansune classe où il est interdit de travailler àdeux et dans une classe où l’entraide estencouragée et fait l’objet d’un appren-tissage méthodologique spécifique.

Les dispositifs de médiation

Faire de la classe une communauté de vieet de recherche ayant pour objectif leconcours de chaque individu à la réussitede chacun demande l’institution destructures d’expression et de régulationsans lesquelles discuter, s’écouter,exprimer ses désaccords, relèvent du défi.Il existe en pédagogie coopérative ouinstitutionnelle une très grande paletted’outils de médiation qui permettent desortir de la relation duelle maître/élève

La parole de l’élèveà l’écoleDeux responsables nationaux de mouvements pédagogiques1

présentent, dans un article écrit en coopération, le point de vue deleur mouvement et répondent à la question «A quoi cela peut-il bienservir de parler en classe ?»

1-CRAP, cercle de recherche et d’actionpédagogiques, qui publie les Cahierspédagogiques et l’OCCE, office central de lacoopération à l’école qui publie Animation &Education.

2-La place de l�oral dans les enseignements : del�école primaire au lycée, septembre 1999 ;voir l’interview de Jean Hébrard en p.1 et 2.

3-Jacques Lévine, dans la revue de l’AGSAS,Je est un autre, n° 9, 1999.

4-Alain Touraine, Pourrons-nous vivreensemble ?, éd. Fayard, 1997.

5-Voir les écrits d’André de Peretti, dansAnimation & Education ou dans BLÉ 91 n°17,«L’éducation à la citoyenneté», janvier 1997.

6-Francis Imbert et le Groupe de recherche enpédagogie institutionnelle, Médiations,institutions et loi dans la classe, ESF, 1994 ;Vivre ensemble un enjeu pour l�école, ESF, 1998.

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1-Le groupe est constitué de conseil lerspédagogiques, maîtres formateurs, direc-trices d’école maternelle, DEA et de toutespersonnes jugées «expertes» dans undomaine et qui peuvent s’associer auxtravaux du groupe de manière régulière ouoccasionnelle ; il est placé sous la respon-sabilité d’une IEN, Marie-Pierre Luce.

Des rituelsaux activités-repères

(suite page 13 )

dans laquelle la plupart des communi-cations scolaires se trouvent enfermées.Francis Imbert

justifie l’institution de tels

dispositifs : pour éviter en classe lesrelations «affectives» et les pièges quileur sont attachés, il «importe quel�enseignant ait recours à desinstitutions, à des dispositifs demédiations qui fassent tiers entre lesenfants et lui, entre les enfants entreeux... qui permettent à chacun de seconfronter à la loi de l�obligation àl�échange, à l�interdit de la violenceet du parasitage»6.

Pour conclure

Aborder, comme le fait le rapport del’Inspection générale, la question de lacommunication sous l’angle de lanécessité, et non pas sous celui habituelde la maîtrise formelle, signifie claire-ment selon nous que l’apprentissage del’oral dépasse largement la sphèrecognitive et qu’il ne saurait se satisfaireni d’un empilement de situations d’oralvides de sens, ni d’un empilementd’activités de «remédiation maître-élève», fussent-elles ludiques...

Kristel GODEFROY,CRAP et Cahiers pédagogiques

et Jean-François VINCENT,secrétaire général de l�OCCE

et secrétaire départemental de l�OCCE91

Congrès national pédagogiquede l�OCCE

réalisé en collaboration avec l’INRP9 et 10 mai à Tours

«La coopération scolaire :la citoyenneté en actes»

Renseignements :ØFédération nationale de l’OCCE

Louis Alberti101 bis rue du Ranelagh75016 ParisTél : 01 44 14 93 [email protected]

45ème congrès internationalICEM Pédagogie Freinet

Rennes, 21-25 août

«L�école populaire :un enjeu pour les années 2000»

Contacts :Ø [email protected]

ØCatherine Chabrun122 avenue Juvisy Cottages91260 Juvisy-sur-OrgeTél : 01 69 24 36 [email protected]

Il convient en premier lieu de faire une mise au point terminologique. Ce n’est

pas par caprice ou souci de faire du neufavec de l’ancien que le groupe dépar-temental «école maternelle»1 a décidé derepréciser la terminologie !Si l’objectif légitime de ce que l’on appelait«les rituels» est de donner de bonneshabitudes aux enfants et de les sécuriser,que penser de ces activités qui se répètentà l’identique tout au long de l’année, voiredu cycle ?«Faire la date», «faire la météo» : cesconsignes empreintes d’incorrectionsyntaxique s’accompagnent d’activitésmécaniques, qu’il est temps de remettre enquestion ! Il y a là une réflexion à mener à

l’école maternelle, en conseil de cycle, pourque l’accent soit mis sur le sens réel de cesactivités : nous les nommons activités-repères afin de les situer dans unedynamique d’apprentissage et non deconditionnement.Cela ne signifie pas que rien ne sera plus«ritualisé» à l’école maternelle : les règlesde vie, clairement explicitées, contribuerontà mettre les enfants dans des conditionspropices à l’écoute, aux apprentissages,aux activités quotidiennes de la classe ; parexemple, pour le moment du conte : «Cric,crac, l�histoire est dans mon sac !» ouavant de se lancer dans une activitédifficile : «Une minute, je réfléchis !»...Les activités-repères sont fonctionnelles etont du sens dans la vie de la classe : ellessont donc logiquement réparties dans lajournée. Elles permettent aux élèves dedévelopper la maîtrise des langages (pardes échanges oraux individuels, en petitsgroupes, en collectif, par la prise d’indicesécrits) et d’apprendre à vivre ensemble, serepérer dans le temps et l’espace, êtreautonome et comprendre le sens desactivités qui leur sont proposées.

Quelle institutrice de maternelle la mieux intentionnée n�a pasressenti une lassitude à mettre à jour le calendrier le matin, àregarder le temps gris mais pas vraiment nuageux, à fairedénombrer les présents ? Ces rituels servent-ils vraiment à quelquechose ? Pourquoi donc compter les enfants le matin ? Faut-ilvraiment se contraindre à observer le ciel chaque jour ? Et ladate ? Ne pourrait-on pas attendre le CP pour s�en préoccuper ?Ne suit-on pas aveuglément une tradition matinale de l�écolematernelle ? Les propositions suivantes nous permettent derepenser des habitudes.

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NB : L’observation du temps qu’il fait ne sera proposée qu’en fonction des situations d’apprentissage prévues : projet scientifique, déplacements augymnase, à la bibliothèque, sorties pédagogiques…

Le groupe départemental«école maternelle»

(suite de la page 12)

Domaines d’activitéspour apprendre à :

�vivre ensemble ;�s’initier au monde del’écrit ;�parler, construire sonlangage ;�se repérer dans letemps et dans la suitedes nombres ;�dénombrer ;�se repérer dansl’espace.

Activités-repères

�Mise à jour de la date,motivée par :- le repérage des évé-nements particuliersde la vie de la classe(anniversaires,sorties…) ;- l’emploi du temps (dela journée, en fonctiondu jour de gymnase, depiscine…) ;- les projets de la classeet les contratsd’activitéscorrespondants (cequ’on a fait / ce quireste à faire).

�Mise à jour destableaux :- de présence (pourremplir le registred’appel) ;- de restaurationscolaire (pourtransmettre l’effectifà la responsablede cantine) ;- des responsabilités ;- de la collation.

Mise en œuvreTPS

�L�enseignantorganise uneimprégnationsans apprentissagesystématique.�L�enseignantprésente les activitésà venir.

�A l�oral, l�enseignantpropose différentessituations pourreconnaître tous lesenfants de la classeet les adultes.�L�enfant retrouveprogressivement sonétiquette-prénom parmid�autres, en s�aidant duréférentiel des prénomsdes enfants de la classe(prénoms + photos).�L�enseignant compteles étiquettes desprésents pour remplir leregistre d�appel, cellesdes enfants qui mangentà la cantine pourtransmettre l�effectif.

Mise en œuvrePS

�L�enseignantprésente et utilisequotidiennement dessupports authentiques(calendrier, emploi dutemps...)�L’enseignantprésente les activitésà venir.

�A l’oral, l’enseignantpropose différentessituations pourreconnaître tous lesenfants de la classe etles adultes.�L’enfant retrouve sonétiquette-prénomparmi d’autres, ens’aidant du référentieldes prénoms desenfants de la classe(prénoms + photos).�L’enseignant compteles étiquettes desprésents et les enfantsreconnaissent etdénombrent lesétiquettes des absentspour remplir le registred’appel, celles desenfants qui mangent àla cantine pourtransmettre l’effectif.

Mise en œuvreMS

�L’enseignantprésente et utilisequotidiennementles supports ; puis lesélèves mettent à joureux-mêmes les repères.�On prévoit ensembleles activités à venir.

�L�élève reconnaît sonprénom selon les troissystèmes graphiques(en s�aidant d�unréférentiel) et lesprénoms des autresenfants de la classe.�L�enfant retrouve lesprénoms des absentspour les dicter àl�enseignant qui remplitle registre d�appel.�Les enfants comptentles étiquettes desprésents et cellesde ceux qui mangentà la cantine.Ils remplissent lesfeuilles de cantine,du centre de loisirs etpassent commandeaux responsablesde la collation.

Mise en œuvreGS

�L�élève reconnaîtprogressivement etécrit lui-même la suitedes jours et des mois.�On prévoit ensembleles activités à venir.

�L’élève reconnaît sonprénom et son nom defamille selon les troissystèmes graphiques(en s’aidant d’unréférentiel) et lesprénoms des autresenfants de la classe.�L’élève retrouve lesprénoms des absentspour les dicterà l’enseignant quiremplit le registred’appel.�Les enfants comptentles étiquettes desprésents et cellesde ceux qui mangentà la cantine.Ils remplissent lesfeuilles de cantine,du centre de loisirs etpassent commandeaux responsablesde la collation.

Les activités en italique soulignent la progression.

De plus en plus d’enseignants indiquentaux élèves le déroulement de la demi-journée ou de la journée. Quand les enfantsse repèrent mieux dans le temps, c’est eux-mêmes qui formulent l’anticipation. C’esten aidant ainsi les élèves à «se projeter»dans le temps que d’une part on les aide àse repérer et que d’autre part, au lieu devivre la succession des activités passi-vement, ils en connaissent l’articulation et

passent activement d’un temps à l’autre.L’évolution des activités-repères de lasection de tout-petits à la grande sectionpermet à l’enfant de progresser et deprendre conscience de ses progrès, à traversdes pratiques quotidiennes, et en situationauthentique et non artificielle. La gestiondu groupe-classe par l’enseignant en seraégalement facilitée (ce qui est loin d’êtrenégligeable !). En effet, il n’est pas rare que

les enfants se mettent à s’agiter lors de rituelsdémotivants.Pour toutes ces bonnes raisons…, cesactivités pourraient être l’objet d’un échangeen conseil de cycle 1, afin de parvenir à unecohérence et une progression. Cetteréflexion a sa place dans le projet d’école.

Le tableau ci-dessous n�est pas exhaustif : il donne un exemple de programmation de la section de tout-petits à la section de grands.

En réponse à des besoins, à la vie de la classe et de l�école :

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Que dit le dictionnaire Hachettemultimédia de la récitation ? «Texte

littéraire, poème qu�un écolier doitapprendre par c�ur». Plus loin, le mêmedictionnaire précise : «action de réciter».C’est dans cette acception que nousemploierons le terme réciter, en complétantainsi la définition : «dire à haute voix,devant un public, de manière expressive,un texte mémorisé dans lequel chacunproduit du sens.»

L’intérêt pédagogique

Il s’agit bien sûr de graver, dans lesmémoires, une partie du patrimoine de lalittérature, mais aussi de développer leplaisir de dire en faisant varier, en isolant,en combinant, en explorant tous lesparamètres du son et de la voix, pourpermettre à des sensibilités diverses des’exprimer. On y découvrira surtout leplaisir de dire ensemble et de participer àla mise en espace sonore d’un texte.

Les compétencesdans le domaine de la langue

Dans les Programmes de 1995, la récitationapparaît sans dire son nom. C’est unecompétence à mettre en œuvre dans ledomaine de la langue, notamment orale1.Au cycle 1 : dire et mémoriser des textescourts (comptines, poèmes...).Au cycle 2 : dire de mémoire un poème.Au cycle 3 : dire de mémoire un texte enprose ou en vers.Pour travailler cette compétence et pourtendre vers la naissance et le partaged’émotions, il faut que l’élève soit capablede dire un texte de façon audible devant unauditoire, en ayant travaillé l’articulation, laprononciation et la puissance de la voix. Ildoit aussi faire preuve de créativité enadaptant son expression aux différents

types de textes et au sens qu’il veut produire.Il doit enfin pouvoir se concentrer et réagiraux incitations du maître ou d’un élève pourenchaîner sa proposition vocale à celles deses pairs, dans le cadre d’une œuvre vocalecommune.

Pistes pratiques

Pour dépasser la caricature, la corvéeânonnante de la récitation, on diversifierales exercices.

A faire varierL�intensité de la voix :

- varier l’intensité, de la voix chuchotée au cri ;- accentuer certains mots pour traduire dessentiments forts (peur...).La hauteur :- varier l’émission, du grave à l’aigu et vice versa ;- faire émerger une voix aiguë parmi des voixgraves ou vice versa.Le timbre :- modifier le timbre de sa voix ;- rassembler les mêmes types de voix (rauque,douce...) ;- jouer avec les accents régionaux ou étrangers.La durée et les changements de rythme :- dire plus ou moins rapidement (selon letempo) ;- découper les syllabes et faire varier leurlongueur ;- ménager des pauses plus ou moins longuesentre les mots, les phrases, les vers ;- reprendre un mot, une fin de vers, un refrainen écho (successif) ou en canon (simultané).La densité :- combiner les dictions à une voix ;- à deux voix ;- par groupes ;- en classe entière.L�expression :- traduire ses sentiments par le corps ;- accompagner la récitation d’une gestuelle,de déplacements et de bruitages (onoma-topées, rires...).

Ces exercices seront au service d’unprojet de diction chorale.

Conseils pour le choixdes textes et bibliographie

Choisissons des textes qui se prêtent àl’interprétation. Les textes seront attractifs,suffisamment proches des enfants, maisd’une réelle valeur poétique : des poèmes deTardieu, Queneau, Carême, Prévert,Desnos, mais aussi Rimbaud, Verlaine,Eluard ; des poèmes par thèmes : Parolesde révolte, Paroles de femmes, Parolesde sagesse, aux éditions Albin Michel ; descomptines : Comptines pour ne paszozoter, Comptines pour ne pasbredouiller, Comptines pour nasillercomme un canard de Pierre Coran,Direlire aux éditions Casterman ; la sérieLes petits bonheurs de Corinne Albaut auxéditions Actes Sud Junior.

L’évaluation

Une grille d’analyse peut être élaborée avecles enfants. Il s’agit d’une liste de critèresà prendre en compte et travailler dansles différents exercices.A titre d’exemple :- Tout le texte est-il dit sur le même ton ?- Si changements de ton il y a, sont-ilsexpressifs, donnent-ils du sens au texte ?- Les pauses, les silences sont-ils respectés ?- Le texte est-il restitué fidèlement ? Etc.Cette évaluation pourra être faite soit parles auditeurs, soit par le récitant lui-mêmeaprès nouvelle écoute au magnétophone.En conclusion, ces activités d’interprétationde textes vont permettre à l’enfant des’approprier un patrimoine culturel, dedévelopper des capacités de mémorisation,d’élargir sa palette d’expressions. Ce seraégalement un moyen de fédérer le groupe-classe par le plaisir de dire et de s’écouter.Bien sûr, ce travail sur l’interprétation doitêtre complété par un travail sur l’écriturepoétique.

Mado CAUVAS, conseillère pédagogique àMassy et Christophe de MONTMOLLIN,

conseiller pédagogique départemental enéducation musicale

La récitation en passantpar les jeux vocauxQu�en est-il aujourd�hui de la récitation ? Exercice «ringard»sans intérêt ou activité formatrice indispensable à la maîtrise dela langue et à l�expression de soi ?

1-On la trouve aussi implicitement dans lechapitre «mémoire» des «compétencesméthodologiques».

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Organisation

Dispositif : au sein de la classe, 3 fois 2enfants en atelier «paravent», en présencede l’enseignant ; des ateliers en activitéautonome sont mis en place parallèlement.Matériel utilisé : 3 paravents ou caches(une plaque opaque de contre-plaqué ouun carton placé verticalement entre lesdeux enfants), ce qui permet d’entendre,mais pas de voir ; 6 supports de jeu(fabriqués par l’enseignant).Durée : séances d’environ 20 minutes, unefois par semaine.

Déroulement de l’activité

� Mise en situation et motivation : les jeuxsur la langue sont liés au projet de la classe.� Explication des consignes et des règlesdu jeu.� Relances et reformulations si néces-saire, par l’enseignant, en cours de jeu.� Observation et recueil des productionsorales : prise de notes ou enregistrement.

Evaluation

Avec les enfants, en fin de séance :- vérification par l’autre enfant qui comparela production obtenue au support initial ;- identification et justification des oubliset des erreurs : l’enseignant aide à lacomparaison entre le référent et sa repro-duction effectuée sous la dictée deconsignes orales.Par l�enseignant, entre les séances :- inventaire du vocabulaire utilisé et descaractéristiques syntaxiques ;- repérage des indicateurs de progrès ;- pointage des compétences en cours deconstruction, pour adapter des situationsaux besoins des élèves.

Objectifs pour l’enseignant

� Créer de véritables situations de travailsur la langue orale, au sein de paires, pourconduire les élèves à s’exprimer et à se fairecomprendre.� Mettre l’enfant en situation de produireet recevoir différents types de discours, detravailler différentes compétences.

Compétences travaillées

Elles relèvent à la fois de la communicationorale, du traitement de l’information et desapprentissages transversaux :- compétences lexicales, par l’utilisationd’indicateurs spatiaux et temporels ;- compétences syntaxiques, par le recoursà des connecteurs ;- compétences discursives, grâce à lavariété des situations visant à développertel ou tel type de discours, à amener l’élèveà produire un discours adapté à la situation,à organiser un récit de façon cohérente(déroulement chronologique, progression,continuité dans l’utilisation despronoms...), à formuler des questionsprécises ;- compétences transversales : comprendreet respecter la consigne, le jeu, le message,les règles de la situation ; s’intégrer dansun dialogue avec un pair, écouter sonpartenaire.

Le paravent qui fait parlerVoici, clé en mains, la présentation d�une situation orale trèsmotivante, avec une auto-évaluation immédiate des élèves.Cette activité de dictée originale en paires d�enfants interactives,observée avec des élèves de grande section, peut être adaptée à desplus jeunes et à des plus âgés.

Dossier : L�oral

ExemplesDiscours injonctif

Ø Dicter à son camarade un dessin ouun graphisme : chaque enfant a unsupport sous les yeux ; les précisionssont données à tour de rôle.Ø Indiquer un itinéraire sur unlabyrinthe afin que l’autre enfantremette dans l’ordre chronologique lesdifférentes étapes du parcours (lelabyrinthe est le même, les parcours sontdifférents).Ø Localiser des dessins, signesgraphiques, figures géométriques..., surun quadrillage, pour que l’autre enfantles place correctement.

Discours narratifØ Raconter une histoire choisie parmiplusieurs séries d’images séquentiellespour que l’autre enfant trouve la sériecorrespondante.Ø Raconter une histoire dans l’ordre enlisant une série d’images séquentiellesafin que l’autre enfant remette dansl’ordre les différents faits évoqués parces images.

Discours descriptifØ Décrire une image dans une séried’images assez semblables pour quel’autre enfant la retrouve dans une sérieidentique.Ø Un enfant dispose d’un menu(5 images représentant les 5 élémentsdu repas) ; décrire chaque image àl’autre enfant qui doit recomposer lemenu en choisissant parmi un grandnombre d’images très proches,légèrement nuancées.

Michelle NEDELEC, IEN à Lisses

En cycle 1, tout particulièrement, et endébut de cycle 2, il s’agit d’enrichir puisde structurer les expériences langagièreset non d’organiser des apprentissagessystématiques.De nombreuses variantes sont envi-sageables pour diversifier et complexifierles situations. On peut faire confiance àla créativité des enseignants et à l’imagi-nation débordante des enfants pours’approprier et enrichir ces quelquesidées.

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L’ exposé s’inscrit dans une longue tradition scolaire et rhétorique. C’est

une production linguistique qui conduit unénonciateur à communiquer oralement etsynthétiquement les informations etconnaissances qu’il a rassemblées sur unsujet donné, à l’attention d’un public qui aété expressément réuni pour entendrel’exposant, pour s’informer, pour apprécierune performance.L’exposé suppose donc un sujet dediscours et d’enseignement, un orateur,un public, un texte, une interprétation,une appréciation. C’est un genre textuelpublic1 relativement formel et spécifiquerégi par un certain nombre de règles defonctionnement et de critères d’appré-ciation. Les types de textes quiprédominent dans cette production sontles textes descriptifs et explicatifs ; on peuttoutefois y rencontrer d’autres types detextes, argumentatifs et conversationnelspar exemple2. Le genre est proche dudiscours, de la communication, de laconférence ; il s’en distingue cependant, en

Pour une redéfinitionde l’exposé

raison notamment du décorum (plussimple qui l’entoure) et du statut dulocuteur par rapport à son auditoire. De cepoint de vue, l’exposé pourrait êtreconsidéré comme une propédeutique de laconférence et du discours.L’orateur est apprécié autant en fonction del’intérêt, de l’exactitude et de la nouveautédes informations transmises, qu’enfonction de la manière de les transmettre(qualités d’exposition, organisation de sondiscours, articulation entre les différentesparties de l’exposé ; prise en compte desattentes, interrogations et représentationsde l’auditoire ; effets de surprise, capacitésde séduction).

Des compétences multiples

Pour transmettre les informationsrassemblées ou les savoirs acquis, lapratique de l’exposé fait appel à de trèsnombreuses compétences qui sont au cœurde bien d’autres activités pédagogiques.Les élèves ne pourront d’ailleurs lesacquérir que progressivement au long deleur scolarité, de la maternelle à la classeterminale. Ainsi l’exposé a-t-il quelquechose d’une épreuve initiatique quimobilise un grand nombre de compé-tences langagières en même tempsqu’elle permet de les développer. Il relèved’un apprentissage continu qui supposel’identification des difficultés, l’étudede différents modèles, un entraînementrégulier.Quels sont donc dès lors les champs decompétences à travailler pour parvenir à lamaîtrise progressive des techniques del’exposé ? L’aptitude à prendre la parole,

à la conserver, à s’exprimer oralement defaçon compréhensible et efficace, est bienévidemment au centre de la pratique del’exposé. Cela suppose d’abord de prendreconscience des caractéristiques d’uneprésentation orale. L’exposé obéit à desrituels langagiers qu’il faut amener àidentifier, puis à respecter. Les enfantsdoivent apprendre à se repérer dans lesniveaux et registres de langage pour choisirceux qui seront opportuns ; il leur fauts’entraîner à la reformulation des termesou notions complexes, puisqu’il s’agitd’expliquer avec un vocabulaire précis etadapté, afin d’être en mesure pour chaquesegment de l’exposé de recourir sinécessaire à une paraphrase explicative.

Des connaissances

L’audition d’exposés d’experts (celui d’unmagicien expliquant un tour de magie parexemple) peut être une bonne référence3.Il convient en tout cas, à partir de diversesproductions orales, de procéder à des trisde textes, d’apprendre à repérer les outilslinguistiques clefs dans la constructiond’un exposé. Une attention particulièresera accordée aux organisateurs textuelsqui assurent l’articulation des différentesparties du discours et la cohésionthématique4, aux différentes tournuresqui ponctuent toute prise de parolepublique qui se prolonge (alors, voyonsmaintenant), aux interjections, auxmécanismes et mots de liaison qui balisentle texte, permettent de distinguer oud’opposer idées essentielles et notionssecondaires, de présenter un ordre logique.Le travail sur les connecteurs est donc ànouveau fondamental : connecteursénumératifs et spatio-temporels pour lesexposés de type descriptif, énumératif, etlogiques pour l’exposé de type explicatif5.Une attention particulière devra êtreaccordée aux procédures de désignation(les anaphores et substituts) pour ancrer leréférent et garantir la compréhension.Enfin, il faudra choisir une positiond’énonciation et apprendre à s’y tenir.

1-Pour reprendre l’expression de Joaquim Dolzet Bernard Schneuwly, Pour un enseignementde l�oral, ESF, 1998.

2-Pour reprendre la terminologie de Jean-Michel Adam, Types et prototypes, Nathanuniversité, 1993.

3-La BCD les donnera à voir et entendre sousforme de cassettes audio et vidéo.

4-Par exemple : pour commencer, dans unpremier temps, pour résumer ce point, dans unsecond moment, pour conclure.

5-Consulter à cet égard les ouvrages de Blochet,et al. Maîtriser l�oral, cycle 1, 2 et 3, Magnard,1998 et 1999.

Max Butlen nous montre la complexité de cette situation d�oral etindique les apprentissages à mettre en �uvre, fondés sur l�expli-citation des critères de qualité d�un exposé.

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Le plan des tâches

L’exposé appelle une planification destâches. Les unes relèvent de la recherchepréalable d’informations, les autres de lastructuration interne de l’exposé et de sonexécution. L’enfant, comme le maître, doitles distinguer. La recherche d’informationsrenvoie à une quantité impressionnante decompétences méthodologiques : repérer lessources d’informations, localiser lessupports et documents pertinents, adapterdes stratégies de lecture sélective puisanalytique, collecter les informationsutiles, les trier, les hiérarchiser, éliminertout ce qui peut provoquer du bruitdocumentaire, dégager l’essentiel, lereformuler, prendre des notes, être capablede préparer un écrit qui servira de tremplinet d’appui à la prise de parole. Toutesrecherches et activités qui donnerontl’occasion d’approfondissements etd’entraînements en situation décrochée.

Le plan de l’exposé

Les compétences méthodologiques quirenvoient à la structuration interne del’exposé ne sont pas moindres : il convientd’ordonner et de présenter les infor-mations. La construction du plan estessentielle et se réalise en fonction desrituels et règles de fonctionnement del’exposé : on distingue classiquement unephase d’ouverture et d’accueil, au cours delaquelle l’exposant se présente et selégitime, une phase de présentation duthème et du sujet qui gagne à inclure uneproblématisation ou pour le moins unquestionnement, une phase de présentationdu plan, le développement structuré quipeut inclure la présentation de diversdocuments, la synthèse, la clôture avec sesrituels de remerciements et de séparation.

La communication

Fondamentalement, l’exposé permet àchaque enfant qui s’y risque d’éprouver,selon la lettre bourdieusienne, ce queparler veut dire6. Se glissant quelquesinstants dans la peau du maître, il prend

conscience des difficultés, des pièges et desjoies de l’exercice et du métier. Il découvreque la communication, tout autant quel’enseignement, ne peuvent fonctionnerque si un pacte s’établit entre l’exposant,qui a fait l’effort de se hisser au statutd’expert, et son public, qui doit être disposéà apprendre. L’élève va donc être attentifà son public et interpréter ses attitudes ;il se trouve dans la nécessité de travaillerune série de compétences communica-tionnelles : maîtriser le trac, placer etdéplacer son corps, apprendre à poser savoix, à réguler son débit, à capterl’attention de son public ; il lui faut, pourne pas le perdre ou l’ennuyer, se dégagerdes notes, maintenir le contact par leregard, les gestes, vérifier la compré-hension par un questionnement régulier etdiscret. Il s’agit d’intéresser, de fairecomprendre, de convaincre, de plaire.

La pédagogie

Les tâches à gérer sont innombrables etpeuvent décourager. Dans ces conditions,il n’est pas étonnant que la pratiquede l’exposé engendre de nombreuxproblèmes. Elle est réputée relever del’oral, mais elle appelle de nombreuxtravaux de lecture et une production écritequi doit être un support à l’expression etnon un carcan. Elle incite l’élève à restituerun savoir nouveau ; mais aux difficultésliées au contenu s’ajoute celle de saretransmission, alors que la méthodologiede l’exposé est rarement explicitée,critériée, objet d’apprentissages.Pour éviter les exposés-fleuves indigestes,pour épargner les déceptions aux jeunesexposants et l’ennui à leur auditoire, on ne

peut qu’inviter à une véritable modestiedans les attentes, appeler à sérier lesobjectifs et les tâches, commencer par desmini-exposés, des prises de parole courtes,mais continues et circonstanciées. Onprogressera pas à pas en accompagnantméthodiquement les enfants dans cetapprentissage. Il ne saurait être question deleur demander de gérer sans préparation etdu premier coup toutes les tâchesqu’implique l’exposé, encore moins deréinventer seuls toute la méthodologie. Lamaîtrise du genre ne peut être que lente etlongue : les trois cycles d’ailleurs n’ysuffiront pas. Pour construire desprogressions raisonnables, on pourras’appuyer sur celles qui sont désormaisdisponibles sur le marché pédagogique7.Une des conditions de la réussite reposesur l’explicitation tout au long de l’activitédes critères de qualité de l’exposé. Il estdésormais entendu que les élèves lesutilisent d’autant plus volontiers commeguide et aide dans leur production, s’ilsles ont établis eux-mêmes en amont.En bout de course, pour paracheverl’appropriation du genre, on pourras’amuser à le détourner en réalisant unexposé sur un texte, la vie, l’œuvre d’unécrivain inexistant, sur un animalimaginaire ; on inventera la biographied’un faux empereur, roi, pharaon,président, en la donnant pour vraie ; onfera dérailler un court moment un exposéqui par ailleurs respecte parfaitement leprotocole du genre. Vaste programmequi devrait permettre aux enfantsd’apprendre à exposer sans s’exposertrop inconsciemment !

Max BUTLEN, professeur de françaisau centre IUFM d�Etiolles

6-Pierre Bourdieu, Ce que parler veut dire,Fayard, 1982.

7-Celles précédemment citées de chez Magnardpeuvent servir de premier point d’appui. Onconsultera également, pour avoir unereprésentation des attentes de l’institution etdes professeurs au collège, La maîtrise de lalangue au collège (Ministère de l’Educationnationale, Savoir Livre-CNDP, 1997).

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Au moment où la maîtrise de la langue est plus que jamais enjeu de réussite,

le professeur d’éducation musicale que jesuis voudrait donner quelques repères pourque les maîtres s’engagent avec plus derigueur dans les activités vocales, sans enbriser l’émotion et le plaisir. Elles portenten elles «le développement à venir» desapprentissages linguistiques.Trop souvent, tout se passe comme si diredes comptines ou chanter des chansonspermettait automatiquement d’écouter, etcomme si le fait de dire beaucoup suffisaitpour que naisse un jour la consciencephonique nécessaire à la lecture etl’écriture. Il n’en est pas ainsi pour tous lesélèves, et en particulier pour les élèves nonfrancophones.

La perception auditive

Percevoir est un processus que je diraisdynamique, en ce sens qu’il repose surdeux trajets dont l’un va vers notre espaceintérieur et le construit, tandis que l’autrey puise son énergie.Le trajet 1 met en relation le stimulussonore avec l’image, le souvenir mental.C’est ce que Britt-Mari Barth appelle laperception primaire. En parcourant cetrajet, l’élève apprend à entendre(comprendre, ressentir), mais cela ne suffitpas pour percevoir. C’est ainsi qu’il peutentendre des musiques fort nombreusessans que cela ne construise en aucunefaçon son écoute.

Le trajet 2 met en relation les souvenirsdes stimuli sonores avec la faculté derappeler ces souvenirs «pour lesrapprocher selon un même attribut».En parcourant le trajet 2, l’élève apprendà écouter, ce qui nécessite une attentionsoutenue. En entendant plusieurs fois lamême musique, l’élève parcourt letrajet 2. Mais c’est surtout grâce auxactivités vocales chantées, comptines ouchants, que l’élève, entraîné par jeu àparcourir sans cesse le trajet 2, apprend àécouter.

Trajet 2Espace intérieur Å rappel des souvenirs et images

mentales pour comparaison

ECOUTER

Ecouter, c’est se placer dans la situationdu guetteur, de la sentinelle, dans lasituation du chat qui attend la souris,comme le disait Maurice Martenot.Ecouter suppose donc une attentionextrême que nul ne peut maintenirlongtemps. L’oreille est aux aguets. Danscette posture, elle attend le retour dequelque chose qu’elle a antérieurementplacé dans son souvenir et qu’elle désireretrouver le plus vite possible : ce qui vaarriver sera comparé en un éclair à ce quiest connu et sera classé par rapport à lui :«Dès qu�un individu perçoit quelquechose par ses cinq sens, il déclencheimmédiatement toute une chaîned�opérations mentales destinée àdéterminer ce qu�il voit. En route il y ades erreurs, des vérifications, desretours en arrière : le cycle se répèteindéfiniment. L�éclair conviendrait

mieux que la ligne droite pour lereprésenter, car l�enchaînement desétapes est si rapide que tout est fondudans l�espace de l�éclair.»1

Les activités chantéesau cycle 1 et au cycle 2

A partir d’un chant ou d’une comptine,quatre situations sont nécessaires pourapprendre à percevoir auditivement lalangue orale. Ces situations sont toutesréalisables par des maîtres polyvalents aucycle 1 comme au cycle 2.

Situation 1 : Apprentissage oral etcollectif d’une comptine ou d’unechanson qui sera progressivementmémorisée et interprétée.Situation 2 : Renforcement de cetapprentissage au moyen de jeuxmusicaux autour de la comptine ou de lachanson. Cette situation peut revêtir desaspects extrêmement variés : certainsjeux simples sont réalisables par tous lesmaîtres, tel celui de frapper toutes lessyllabes orales de la comptine ou de lachanson.Situation 3 : Evaluation par «le faire».Réalisation de l’enregistrement de cettecomptine ou de ce chant chanté par lesélèves (sans l’aide du maître). La qualitéde l’écoute est extrême.Situation 4 : Evaluation par «le dire».Ecoute et commentaire de l’enregis-trement par les élèves. Le maître guide lescommentaires vers l’analyse auditive,sans exclure les remarques d’ordresensible.

Dans les écoles, la situation 1 est la pluscouramment mise en œuvre. La situation2 est assez rare. Les situations 3 et 4 sontpratiquement absentes : l’élève n’a pas lesmoyens de s�écouter.

Education musicaleet langue oraleFrançoise Gaussin montre concrètement comment l�éducationmusicale participe à la construction de la conscience phonique.Elle s�appuie sur les travaux de Britt-Mari Barth : «Percevoir estun processus cognitif fondamental nécessaire à tout développementà venir».

Trajet 1Stimulus Æ Espace intérieur

(souvenirs, images mentales)

ENTENDRE

Dossier : L�oral

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Quelques conseilspour les maîtres

Ø Le maître ne doit pas attendre de«chanter juste» pour réaliser ces activités :c’est en chantant qu’il apprendra à chanter,et surtout à interpréter.Ø Le maître qui voudra parfaire sa justesseapprendra la comptine ou la chanson chezlui avec le support d’un CD qu’il écouteraplusieurs fois avant de chanter seul.Ø Pour apprendre à ses élèves à écouterles sons de la langue orale, le maîtrechoisira des chansons simples. Le choixd’un répertoire non approprié est l’erreurla plus fréquente et la plus préjudiciablepour l’élève comme pour le maître. On sereportera utilement à Musique au quo-tidien au cycle 22 pour juger du niveaudes comptines et chansons à proposer.

Comment aiderchaque enfant ?

Le travail collectif a ses limites. En petitgroupe, le maître peut évaluer et faireévoluer par des jeux appropriés lesdifficultés individuelles. Le dispositif desateliers (en maternelle et au CP) permetd’accompagner 4 ou 5 enfants de façonplus personnalisée. Mais les maîtresmanquent de formation en ce domaine.De même, en l’état actuel de la formationdes maîtres, et sauf exception notoire, lachorale de l’école apprend à vivreensemble plus qu’à chanter et s’écouter.Or, beaucoup trop de maîtres comptentseulement sur la chorale pour les activitéschantées, en maternelle comme au CP, aulieu de faire confiance à leur voix, mêmeimparfaite.

Quelles étapes dans leparcours d’apprentissage ?

Ø Repères pour construire une pro-gression selon les cycles :- dès la petite section, l’interprétation du

chant ou de la comptine est aussiimportante que sa justesse ;

- l’interprétation individuelle de lacomptine ou du chant est possible à

tout âge, dès qu’un élève le désire ;- l’enregistrement (la situation 3) ne doit

être pratiqué qu’à partir de la moyennesection ;

- la conquête de la justesse s’effectue surles cycles 1 et 2 ;

- le repérage graphique des paroles seraproposé à partir de la grande section.

Ø Repères pour le passage à la langueécrite :Deux savoir-faire sont souvent retenus àjuste titre par l’enseignant comme«indicateurs» permettant au maître desavoir si l’élève est apte à franchir le seuilde la langue orale vers la langue écrite :- savoir frapper le rythme musical du mot

ou du groupe de mots que l’on a prononcéou chanté (sans support visuel) ;

- savoir proposer des mots dans lesquelson entend un phonème donné (quelleque soit sa position dans le mot).

Or, ces indicateurs me paraissent convenirà deux conditions :- si l’élève manifeste ces savoir-faire de

façon strictement individuelle et sansaucun modèle («Peux-tu frapper lerythme de Am Stram Gram ?» ou bien,«Peux-tu proposer un mot dans lequelon entend le son... ?») ;

- si l’élève réalise ces deux jeux sonoresavec plaisir et facilité.

Dans la mesure où ces deux conditions sontremplies, alors seulement il sera possiblede penser que la conscience phonique decet élève est en construction.Si l’élève ne joue pas, s’il n’est pas à l’aise,il ne sert à rien de répéter ces situations«indicateurs». Il faut travailler ailleurs : ilest nécessaire de reprendre les quatresituations mentionnées plus haut.

Françoise GAUSSIN, professeur de musiqueau centre IUFM d�Etiolles

1-Britt-Mari Barth, L�apprentissage de l�abs-traction, Retz, 1987.

2- La mallette Musique au quotidien au cycle 2(CRDP de Bourgogne-PEP21, 1997) estdisponible dans toutes les inspections.

Dossier : L�oral

Comment faire parler 30 élèves en maternelle ?

Mettons de côté, d’une part les conver-sations duelles, lors des temps éducatifs(accueil, passage aux toilettes, habillage,etc.), qui ne posent pas de problème auxenseignants, d’autre part le dialogue engrand groupe qui permet, sans que tous lesélèves parlent, de relancer les activités dela classe et qui reste bref. Comment s’yprendre pour faire parler plus systéma-tiquement tous les enfants ?Les enseignants de maternelle maîtrisent letravail en ateliers. Ils savent prévoir desateliers qui fonctionnent en autonomie,éventuellement régulés par une ATSEM ouun aide-éducateur. Il est donc possiblede prévoir les organisations suivantes :- un atelier d’oral est animé parl’enseignant dans un coin de la classe sil’espace est suffisant pour avoir desconditions où les autres ateliers ne créentpas de gêne sonore, ou dans un espaceattenant s’il existe, ou encore dans lecouloir si les locaux sont exigus ;- des ateliers d’oral où les élèves sont enautonomie fonctionnent grâce à unesituation motivante : jeux de devinette (unenfant doit deviner ce que l’autre a dans sonsac au trésor), situation du paravent (décritep.15), saynète qu’on connaît et qu’onrejoue, etc. ;- pendant la sieste, l’enseignant de petitesection prend en charge un petit grouped’élèves ;- le samedi matin, les élèves présents, peunombreux, participent à un atelier d’oral ;- les classes fonctionnent de temps en tempsà deux : un enseignant prend en charge untrès grand groupe pour une activitécollective (conte, projection, chorale, EPSavec un aide-éducateur…), tandis quel’autre organise un atelier d’oral ;- un tutorat est organisé avec le cycle 3 dontl’objectif est non pas l’écoute d’une lecturepar les grands, mais la conversation, avecune situation précise ; etc.Les groupes peuvent être homogènes(volubiles et silencieux séparés) ouhétérogènes, selon les objectifs.

Claire BONIFACE, IEN à Palaiseau

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Sous l’appellation quoi d�neuf, ontrouve de nombreux dispositifs

poursuivant des objectifs différents etfonctionnant selon une périodicité toutaussi variable.Dans certaines classes, on traite quo-tidiennement de sujets «libres ouspontanés» que les enfants choisissent enfonction de leurs préoccupationspersonnelles1. Dans d’autres, on abordedes points d’actualité au jour le jour, ausujet desquels les enfants échangent,confrontent leurs informations et leurssources. Enfin, certains s’apparentent à unexposé que présente un enfant sur un sujetd’actualité.En ce qui me concerne, institutrice dans uneclasse de CM2, j’ai décidé il y a quatre ansde lier cette activité à la lecture d’unhebdomadaire d’information auquel laclasse était abonnée. En effet, bien quel’abonnement à cette revue ait été décidéen conseil de coopérative, j’ai constaté quesi certains élèves étaient des lecteursassidus, d’autres l’ignoraient : commentles impliquer dans la lecture et laprésentation d’articles ?

Dans un premier temps, j’ai demandé auxenfants lecteurs habituels du journal deprésenter un article les ayant intéressés.Certaines contraintes ont été alors donnéespour susciter chez les autres l’envie dedécouvrir l’article par eux-mêmes :résumer le sujet en donnant l’informationessentielle, ne pas lire l’article et en faireune présentation brève afin de ne pasdéflorer le sujet.

Apprendre à présenter

Pour aider les présentateurs à exposer defaçon synthétique leur sujet, nous avons,au cours de séances d’études dirigées,élaboré une fiche-guide. Ecrite en groscaractères, celle-ci peut être posée sur latable, tel un prompteur à la télévision.Libre de ses gestes, l’enfant peut montrerl’article, le gros titre et commenter leséventuelles illustrations, sans perdre le filde ses idées.Pris au jeu, de nombreux enfants ont vouluprésenter à leur tour des articles. Certains,en préparant leur fiche-guide sur destransparents, peuvent, grâce au rétro-projecteur, compléter leurs informationspar d’autres illustrations, graphiques ouschémas.Afin de ne pas déborder les trente minuteshebdomadaires prévues dans l’emploi dutemps, il a fallu rapidement prévoir uncalendrier où les volontaires s’inscrivent.Cette façon de procéder a semblé porter sesfruits, mais il restait la question del’évaluation sous deux aspects : celui de

l’investissement réel des élèves auditeurset celui de l’intérêt en terme d’apportd’information.Afin de valoriser le travail du présentateuret d’éviter la passivité des auditeurs, je leurdemande de prendre des notes. Dans lecadre des études dirigées, les élèvesapprennent à relever l’essentiel d’unmessage, à utiliser des symboles et desabréviations. Regroupées sur un cahier,ces notes doivent être assez claires etprécises pour pouvoir être utilisées dansle cadre d’une évaluation mensuelleconcernant plusieurs articles d’actualité.Cette évaluation permet de faire le point surl’écoute et la mémorisation effectives.Cette interprétation libre du quoi d�neuf de la pédagogie institutionnelle répond àmon souci initial et a évolué dans le tempsen fonction des réactions et descommentaires des enfants.

La richesse du quoi d’neuf

Le quoi d�neuf favorise les comportementsvalorisés dans la classe : entraide etcoopération pour la préparation des fiches-guides, pour la recherche d’illustrations etde documents complémentaires ; respectdu travail réalisé et écoute de la personnequi parle. Il permet de développer descompétences dans le domaine de la langueorale et écrite. Les enfants choisissent fréquemment dessujets proches de leurs préoccupa-tions (racket, violence, agression...) quipermettent la mise en place de débats«décontextualisés» (ce que ne peuvent pasêtre les débats du conseil de coopérative,centrés eux sur des problèmes de vie declasse). Cette distanciation, en dépas-sionnant les débats (dans le sens où ilssont moins chargés d’affect), facilitel’expression, la confrontation des opinions,l’argumentation... ce qui ne représente pasle moindre des intérêts de ce travail.

Evelyne VINCENT, maître formateurà l�école Les Erables

à Villemoisson-sur-Orge

Vous avez dit quoi d’neuf ?Le quoi d�neuf connaît un regain de jeunesse. Caricaturé parfois,vidé de son sens quand il ressemble au texte libre où le blanc de lapage est aussi stimulant que l�injonction «je vous ordonne d�êtrespontané», détourné de ses principes quand les enfants nantisracontent leur week-end de loisirs à ceux qui ont passé le leur dansles escaliers de l�immeuble (j�ai fait du cheval, après ma mémé m�aemmené faire du kayak et puis j�ai été au théâtre), il nécessite uneorganisation et des objectifs rigoureux. Témoignage d�unepraticienne.

1-C’est le dispositif originel de la pédagogieinstitutionnelle. Véritable outil de médiation etd’expression de soi, il ne poursuit pas d’objec-tifs pédagogiques spécifiques, donnant à sesdétracteurs l’impression «d’une perte detemps» (cf. Médiations, institutions et lois dansla classe, Francis Imbert et le Groupe derecherche en pédagogie institutionnelle, ESFéditeur, 1994).

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Notre choix

ØParler ensemble à la maternelle : lamaîtrise de l�oral, l�initiation à l�écrit,Agnès Florin, Ellipses, 1995.Quatre angles de vue orientent cetouvrage : un panorama des textes officielsde 1970 à 1995, une présentation descourants de la recherche depuis le début dusiècle, une analyse des pratiques scolairesdu langage en école maternelle, despropositions d’activités de langage àl’école maternelle.

ØAp-prendre la parole, EvelineCharmeux, SEDRAP,1996.Cet ouvrage propose à la fois une réflexionsur l’oral et ses enjeux, des donnéesthéoriques faciles d’accès, une démarchepédagogique, des contenus d’ensei-gnement organisés de la maternellejusqu’au collège, ainsi que des situationset des activités pour chacun des cycles dela scolarité.

ØPour un enseignement de l�oral :initiation aux genres formels à l�école,Joaquim Dolz, Bernard Schneuwly, ESFéditeur, 1998.Ce livre apporte une définition desdifférentes formes d’oral, une démarched’enseignement de l’oral, des exemplesde séquences d’oral avec un filage trèsprécis des séances et une illustration pardes rapports d’expérimentation menéeavec des groupes d’enfants.

ØIntroduction à la pédagogie dulangage : maternelle (tomes 1 et 2),Philippe Boisseau, CRDP de Rouen,1996 et 1997: voir article p. 4.

ØMaîtriser l�oral, Patrick Blochet,Chantal Mairal, Magnard, 1998.Un voyage dans les instructions officiellesde 1887 à nos jours permet de situer l’oral

dans l’enseignement d’aujourd’hui. Unapport théorique, accessible, se réfère aux«grands noms» de l’oral et s’articule autourde trois pôles : les compétences langa-gières, la démarche, le projet. Quelquespistes d’activités sont balayées ; ellesseront développées selon des fiches, dansles trois ouvrages suivants organisés parcycle.Au cycle 1, les fiches s’articulent autour dedeux axes : de vraies situations de langagemotivantes et des jeux oraux, décritsclairement et utilisables rapidement parl’enseignant. Les fiches sont détaillées :objectif principal, durée, dispositifpédagogique, matériel, déroulement desopérations, critères de réussite, liaisonsoral-écrit, variantes.Aux cycles 2 et 3, les fiches permettentd’aborder avec sa classe les différents typesd’oral dans des situations ayant du senspour les élèves. L’apprentissage est fondésur la construction d’outils de référencesélaborés avec les enfants, pour chaque typed’oral. Les sujets proposés sont adaptablesaux différents projets de classe.L’organisation de la séance est précise :durée, matériel nécessaire, déroulementdes opérations, dispositif pédagogique(collectif ou en groupe). Les critères deréussite sont définis clairement.Des jeux oraux renforcent la mise en placede certaines compétences.ØEnseigner l�oral à l�école primaire,Groupe Oral Créteil, coordonné parCatherine Le Cunff et Patrick Jourdain,IUFM de Créteil-Hachette éducation, 1999.De très nombreuses situations péda-gogiques d’oral sont proposées du début ducycle 1 à la fin du cycle 3 et également auxclasses de perfectionnement. Elles sontaccompagnées d’une analyse rigoureuse etétayées par une réflexion théorique digeste.

L’évaluation est envisagée de façongérable. Un répertoire des situationsfacilite l’utilisation de ce document pourla préparation de classe.

Les apports de la recherche

Ø Repères, «Pratiques langagières et ensei-gnement du français à l’école», n°15, 1997.Ø Repères, «L’oral pour apprendre»,n°17, 1998.Ø Pratiques, «Interactions et appren-tissage», n°103-104, novembre 1999.

D’autres ouvrages pratiques

Ø Enseigner l�oral à l�école élémen-taire, Georges Gauzente, CDDP de laMarne, 1993.Ø Situations de communicationsécrites et ou orales à l�usage des maîtresde l�école élémentaire, CRDP deFranche-Comté, 1994.Ø Approches de la langue orale àl�école maternelle, dir. Marie-FrançoiseFerrand, CRDP de Lyon, 1994.Ø Argos, la revue des BCD et des CDI,«Espaces de lecture, espaces de paroles »,n°12, avril 1994 ; un numéro sur l’oralsortira en 2000.Ø Ateliers de langage pour l�écolematernelle, Jean-François Simonpoli,Hachette éducation, 1995.Ø Pour que chacun parle : à l�écolematernelle et au CP, Philippe Clermont,Annie Cunin, Marie-Louise Scheidhauer,CRDP d’Alsace, 1997.Ø Langue orale en maternelle : il étaitune fois la musique des mots, dir. OdileObiso, CRDP du Nord-Pas de Calais, 1999.

Le conte, le théâtreet la lecture à haute voix

Ø Le conte au service de l�apprentis-sage, cycle 2 et 3, avec un CD, Anne Popet,Evelyne Roques, Retz, 2000.

Ø Voir pages 7 et 10 pour le théâtre et lalecture à haute voix.

Nous avons choisi en priorité des ouvragespratiques qui permettent de diversifier les situationsde classe, tout en se référant à des apportsthéoriques. Des références complémentairess�adressent aux lecteurs avides...

Bibliographie sur l’oral

Elisabeth BINTZ, conseillère pédagogique àViry-Chatillon et Laurence FROUIN,

responsable du centre de ressources en lecture

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Nombre de CPen 1997-1998

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18523693184427

129113293122934

671

146

817

Daniel et ValérieCaroline et BrunoChats, chats, chatsA l�aube de l�écoleLutiBigoudiGuide de lecture : objectif lireBoule et BillRatusLa sorcière et moiEn avant les CP !Lire au CP : le nouveau fil des motsPaginaireGafiCroquepagesDame CocaCahier PlumeLecture en fêteTibili ou Ecrit livreMikaLecture envolAnimalireLecture à croquerAbracadalireCadou

Quatre saisons pour apprendre à lire1

Coucou LilouFrisapla la sorcièrePas à pageGrindelire

Plusieurs manuels utilisésMéthode Borel Maisonny

CP AVEC MANUEL

CP SANS MANUEL

TOTAL DES CLASSES DE CP

Pourcentagede classes en1997-1998

0,1%0,4%0,1%0,6%0,1%0,6%0,7%0,4%22,6%0,2%0,4%8,4%3,8%10,3%0,5%0,2%0,9%15,8%1,3%3,9%1,1%0,4%1,5%3,5%4,2%

82,1%

17,9%

100%

Nombre de CPen 1999-2000

04110111791136165735199114194139640506103719

13

2

658

151

809

Pourcentagede classes en1999-2000

0%0,5%0,1%0,1%0%

0,1%0,1%0,1%9,8%0,1%0,1%4,5%2%7%

0,4%0,6%0,1%12,2%1,4%5,1%1,1%0,5%1,6%11,9%4,9%6,2%0,7%1,2%4,6%2,3%

1,6%

0,2%

81,3%

18,7%

100%

196419691970197319761985198619871987198819881990199219921992199319931993199319951995199519961996199619971998199819981999

1-Cette méthode a plusieurs titres : Ecrit livre, Tibili ou Quatre saisons pour lire. Les deux premiersfurent publiés en 1993, mais le manuel Quatre saisons pour lire qui complète la valise pédagogiquen’est paru qu’en 1997. Les différents titres sont utilisés dans 7,5% des classes de CP.

Les manuels de CP (le retour)Souvenez-vous de notre enquête choc sur les manuels de lecture au CP, agrémentée de commentairesdénués de langue de bois pédagogique. C�était notre n°21 de février 1998. En deux ans, le paysage denos classes de CP a bien changé. Annick Vinot, qui a dépouillé notre nouvelle enquête concernanttous les CP de l�Essonne, nous donne au passage des infos sur les nouveautés de l�édition.

Deux ans plus tard,quoi de neuf ?

� Les quatre manuels qui l’emportaient aupalmarès, dans l’ordre Ratus, Lecture enfête, Gafi et Le nouveau fil des mots,connaissent une chute vertigineuse : ilsrégnaient à eux quatre sur 69,6% desclasses utilisant un manuel ; ils ont bienbaissé : 41,2%.� Tout lasse et tout passe, Ratusn’échappe pas à cette règle. Sa suprématied’il y a deux ans s’effondre, même sipresque une classe sur dix l’utilise encore.� Mis à part les adeptes du célèbre rat, lesfervents de manuels antérieurs à 1990restent marginaux. Luti, Daniel et Valérieont, quant à eux, pris une retraite bienméritée. Caroline et Bruno et A l�aubede l�école, antérieurs aux programmes de1985 (!), survivent étrangement.� Lecture en fête garde un bon score,le meilleur, talonné de près par Abra-cadalire.� Bonne nouvelle : de nombreux ensei-gnants ont déclaré compléter leur manuelavec des albums et des écrits variés.� Les enseignants ayant choisi detravailler sans manuel sont en légèreaugmentation.� D’autres ont choisi d’utiliser dans leurclasse plusieurs manuels à la fois ousuccessivement, suivant les besoins desélèves.� Il y a deux ans, une classe sur dixutilisait un manuel édité après 1995, laproportion est aujourd’hui d’une classesur trois. On ne peut que s’en réjouir. Lespublications qui ont suivi les programmesde 1995 sont dans l’ensemble de qualité.Nous faisons l’hypothèse que le n°21 deBLÉ91 y a été pour quelque chose danscertaines classes…

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Bienvenueaux nouveaux manuels

Des dérives sans s’en apercevoiret des détournements de génie

Un manuel est un outil et nous savonsqu’un bon outil ne fait pas un bon ouvrier,mais qu’un bon ouvrier mal équipé restecompétent.Certains enseignants, pour de bonnesraisons telles que gagner du temps, oupour de mauvaises raisons (lire c’estdéchiffrer), ne conservent dans des manuelsde qualité que l’aspect grapho-phonétique.Toutes les excellentes propositions duguide du maître, concernant par exemplela diversité des écrits lus et PRODUITS,sont oubliées. Quel dommage et surtoutquelle erreur ! Nous savons depuis déjàbien longtemps que l’apprentissage de lalecture ne peut se réduire à la combinatoire.Que leur conseiller ? Relire les program-mes de 1995, utiliser avec précision lesguides pédagogiques associés auxmanuels, lire le n°21 de BLÉ91 ou encorefaire connaissance avec Bernard Devanneou Catherine Tauveron1.En revanche, des enseignants travaillantde gré ou de force avec Ratus, Gafi etcompagnie réussissent à rendre cesaffreuses bêtes fréquentables et mêmeintéressantes. Ce cas n’est pas rare dansles classes de PE sortant d’IUFM quin’ont pas pu choisir leur manuel. L’astuceconsiste, par exemple, à s’introduiresouvent en BCD, à présenter au moinschaque semaine un texte inconnu auxélèves, à leur faire produire de l’écritavant qu’ils ne sachent lire (comme enmaternelle), à travailler la compréhensionde l’implicite (surtout pas dans le manueloù tout est clair comme lola mange de lasalade), etc.

Certains enseignants travaillant sans manuel,notamment avec des albums, souhaitentparticiper à un groupe d’échanges à ce sujet.Si vous êtes intéressé (e), contactez le centredépartemental de ressources en lecture,école du Parc aux Biches, 91000 Evry.

Ø Lire, écrire et compagnie, Les édi-tions de la Cigale, Grenoble, 1997Partagerez-vous notre coup de cœur pourun inconnu en Essonne, émanant d’un petitéditeur ? Le manuel, une banque dedonnées de textes variés, propose uneclassification des écrits par thèmes prochesde la vie des élèves, croisée avec unetypologie de textes, y compris argumen-tatifs. Les trois cahiers d’exercices offrentdes activités diversifiées, notamment deréelles situations de production d’écrits. Leguide pédagogique présente, outre desinformations concrètes fort utiles pourgérer au mieux un CP, tous les aspectspédagogiques de l’apprentissage de lalecture-écriture en relation avec lesdifférentes disciplines et l’édition pour lajeunesse.

Ø Coucou Lilou, Hachette, 1998Le manuel, de format agréable, présente dixthèmes d’étude permettant une ouvertureculturelle particulièrement riche et desécrits variés. Un «dico des sons» estdétachable. Les cahiers d’exercices, encouleur, donnent envie d’écrire ; laproduction d’écrits reste à développer. Leguide pédagogique détaille l’enjeu et ledéroulement des séances, des pistes detravail interdisciplinaires et une biblio-graphie pertinente pour l’enseignant. EnEssonne, un enseignant sur deux ayantchoisi ce manuel ne semble pas en êtresatisfait (mais ils ne sont que six !). Ah oui,Lilou est une chenille qui se cache un peu

Ø Frisapla la sorcière, SEDRAP,Toulouse, 1998Des textes variés ont pour fil conducteur lesaventures de plusieurs personnages, un peudécevants : la sorcière Frisapla tient de lagrand-mère soixante-huitarde et ses deuxcompagnons le chat Teigne et la chauve-souris Gus semblent être des cousins deRatus ; deux enfants apparaissent auchapitre 7 ; tout ce monde-là existe aussien marionnettes. Sur une double page, ondécouvre les textes et leurs illustrations,l’étude du code qui associe différents

graphèmes d’un même son, un «dico» pourle capital de mots, un questionnaire ouvert,un texte de réinvestissement ou un résumé,une présentation de différentes formesverbales... Le manuel se termine par unmini dictionnaire illustré. Les cahiersd’exercices de lecture et les cahiersd’exercices d’écriture proposent desexercices variés, un peu mâchés pour laproduction d’écrits. Le guide pédagogiqueaide quotidiennement le maître. Les dixenseignants qui l’utilisent dans le dépar-tement s’en disent satisfaits. Animalire,chez le même éditeur, nous avait sembléen son temps plus original.

Ø Pas à page, Nathan, 1998Le manuel contient quinze modulesstructurés à l’identique, avec des thèmesvariés permettant une exploitation pluri-disciplinaire. On apprécie la présence detextes longs, à l’opposé de l’étude desphrases minimalistes de la tradition. Lescahiers d’exercices proposent des activitésvariées, un peu limitées en productiond’écrits. Le guide pédagogique comprendune réflexion théorique et une aide, jour parjour. Enfin, un disque compact proposel’enregistrement d’histoires, de comptineset de chansons contenues dans le manuel.

Ø Grindelire, Bordas, 1999Le manuel s’organise autour de cinqhistoires pour la jeunesse écrites pour laméthode par de vrais écrivains, reprises à parten albums. La page de gauche est réservéeau texte et à son illustration ; celle de droite àla mémorisation d’un capital de mots, aufonctionnement et à la compréhension de lalangue, ainsi qu’au réinvestissement desacquisitions. L’étude du code est concentréeà la fin de chaque chapitre, suivie d’uneprésentation de différents types d’écrits.Les cahiers d’exercices sont composésd’activités variées. Le livre du maître estdétaillé, avec des compléments sur l’éditionpour la jeunesse.

Ø Trois nouveautés à analyser pro-chainement : J�apprends à lire avecMini-Loup chez Hachette, Je lis avecDagobert chez Istra, Ribambelle chezHatier.

1-Par exemple : Apprendre à lire : bâtir uneculture au CP, une année de lectures, avecJacqueline Boussion et Michèle Schöttke,Catherine Tauveron, Hachette, 1998.

Annick VINOT, conseillèrepédagogique à Orsay

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Il est d’usage de commencer l’appren- tissage des temps au CE1 par les

«époques» situées sur une flèche du temps :hier aujourd’hui demain

passé présent futur

A chaque adverbe de temps, on faitcorrespondre une époque qui, comme parhasard est le nom d’un «tiroir»2 : passé pourpassé composé, présent pour présent,futur pour futur.Mais comment expliquer à un enfant queDemain, Zoé se marie a bien le sens d’unfutur même si on emploie le présent del’indicatif ? Pourquoi lui refuser l’énoncé :Aujourd�hui j�ai fini mon travail, sousprétexte qu’il emploie le passé composé ?

Le premier système

L’emploi des tiroirs de la conjugaison sefait selon deux systèmes. Le premier estorganisé autour de la parole (monologue,autobiographie au présent) : tous les propossont repérés par rapport au moment de laparole, ce qui constitue ce que les linguistesappellent l’énonciation discursive. Leprésent situe celui qui prend la parole aumoment de cette parole. L’énonciation sedéfinit par trois termes : je, ici, maintenant.Certains temps verbaux peuvent situer lesévénements comme simultanés, antérieursou postérieurs à ce moment subjectif.Au présent, l’action du verbe se fait enmême temps que le locuteur parle : Jevous remercie. Dans la phrase On voitquelquefois la Corse des côtes deFrance comme aujourd�hui, l’adverbeaujourd�hui et le présent de l’indicatifindiquent que l’énoncé coïncide avec le

moment de la parole, mais le fait de voir lescôtes dépasse ce moment comme l’indiquequelquefois. Le présent est dilaté.Le présent gnomique implique des géné-ralités, des permanences qui ne réfèrentdonc pas seulement au moment del’énonciation. Il est employé dans lesproverbes, dans les énoncés scientifiques.L’événement peut être décalé par rapportau moment de l’énonciation. C’est ce quifait dire à certains grammairiens3 que leprésent n’est pas un temps, puisqu’il peutépouser toutes les valeurs :- valeur de postériorité par rapport àl’énonciation : Dans trois jours, il pleut ;- valeur d’antériorité par rapport à l’énon-ciation : Hier, Pierre arrive et me dit� ;- valeur «historique» ou présent narratif :Il était bien caché sous les fourrés. Il lesvit arriver de loin.Tout à coup, il lesentend près de lui�Celui qui parle se déplace au moment desévénements ou les événements sontdéplacés pour coïncider avec le momentde l’énonciation, afin qu’ils appar-tiennent au présent de l’énonciation etque le lecteur ait l’impression d’assisteren direct à l’histoire.Le présent est un temps difficile à la foisparce qu’il ne possède pas de désinencepropre, contrairement aux autres tiroirs4,mais aussi parce qu’il peut s’employer avectoutes les valeurs.Le futur situe un événement postérieurpar rapport au moment de l’énonciation.Le français connaît deux futurs gramma-ticaux et plusieurs futurs périphrastiques :aller + infinitif, être sur le point de +infinitif, devoir + infinitif.

La projection dans l’avenir est plus oumoins grande. D’où les nuances de futur«proche» ou «lointain» pour le futur simplecomme pour le futur périphrastique :Demain, il sera trop tard. Je vaismanger une pomme.Comme pour le présent, on trouve unemploi de futur «historique» : Il était biencaché sous les fourrés. Il les vit arriverde loin. Tout à coup, il les entend prèsde lui. Il les entendra tout la nuit durant,frissonnant de froid et de peur.L’énonciation est transportée dans le passépour actualiser l’événement.Par rapport au futur simple, le futurantérieur permet de considérer que l’actionest accomplie. Il marque égalementl’antériorité par rapport à l’actionprincipale : Quand tu lèveras la tête deton travail, je serai déjà parti.L�imparfait ne s’emploie pas seulementpour les faits qui durent : Cinq ans plustard, il mourait ; mourir est présentécomme bref.Avec l’imparfait, l’événement est vu «del’intérieur», dans son déroulement, sanslimitation explicite. La valeur chrono-logique de l’imparfait consiste à marquerl’antériorité par rapport au moment de laparole : En ce moment, vous lisez un arti-cle rasant sur les temps, hier et avanthier, c�était un Agatha Christie.Le passé composé possède deux valeurs.La première est celle de présent accompli :J�ai nagé trois longueurs de bassin sansm�arrêter (maintenant, au moment où jevous parle, je viens de le faire…). C’estpourquoi il est compatible avec main-tenant, aujourd�hui.Il ne faudrait passanctionner un enfant qui l’emploierait.

Les temps des verbes :méfions-nous.Ce feuilleton1

sur la conjugaison se poursuit avec l�emploi des«tiroirs» de la conjugaison. Comme dans les deux articlesprécédents, Carole Tisset décape les habitudes dans le domaine del�enseignement de la conjugaison� L�imparfait, temps de ladurée ? Faux ! Passé simple, temps de l�action brève ? Que nenni !

1-Voir les deux épisodes précédents dansBLÉ91, n°23, octobre 1998 et n°25, mars1999.

2-Le mot tiroir vient des linguistes Damouretteet Pichon. Il évite l’emploi du mot temps pournommer le temps de conjugaison qu’on nedifférencie plus avec la valeur temporelle, celle-ci étant confondue avec le temps qui passe.

3-Guy Serbat.4-Voir le précédent article «Surtout renoncer

aux tables de conjugaison», BLÉ91, n°25,mars 1999.

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Un deuxième système

Le deuxième système est caractéristiquede la langue écrite ; il présente desévénements comme coupés du moment dela parole. On l’appelle énonciationhistorique. Deux temps sont fonda-mentaux : le passé simple et l’imparfait.On peut y trouver le passé antérieur, leplus-que-parfait, ainsi que le condition-nel. Le présent, autre que les présentsintemporel et narratif, et le futur, sont exclus.Le passé simple n’exprime pas la rapiditéou la brièveté. Il n’est pas ponctuel : Il plutquarante jours et quarante nuits. Lepassé simple offre une vision «externe» del’action, comme un tout limité, borné. Lepassé simple est l’épine dorsale du récitdans la mesure où les verbes qui fontavancer l’intrigue sont nécessairementemployés à ce temps. L�imparfait sert àplanter un décor, à expliquer les circons-tances peu importantes. C’est le temps dela description, de l’arrière-plan. Le passésimple permet la mise en relief desévénements qui constituent l’intrigue :

Maître Corbeau sur un arbre perchéTenait en son bec un fromage.Maître Renard, par l�odeur alléchéLui tint à peu près ce langage.

L’imparfait déborde tout repère. Le passésimple sert de repère.Le conditionnel est un futur dans unénoncé coupé du moment de la parole. Ilmarque la postériorité par rapport à unévénement repéré dans le passé : Mme Xrencontra M Y. Ils se plurent, semarièrent� Dix ans plus tard, commebeaucoup, ils divorceraient.Le passé composé fait concurrence aupassé simple avec une seconde valeur, autreque celle indiquée ci-contre. La concurrencedes deux passés n’est pas récente. AuXVII ° siècle, les grammairiens instituèrentla règle des 24 heures qui commandaitqu’un fait s’étant déroulé au-delà de la nuitécoulée devait se narrer au passé simple.Pour savoir à quel passé composé on aaffaire, il faut vérifier par la substitutionavec le passé simple : Il était une fois unegentille sorcière. Un jour, elle a disparu(= elle disparut). Le passé composé

indique bien un passé et non un présentaccompli. Il est choisi de préférence aupassé composé parce qu’il est commu-nément employé à l’oral, parce que sesformes de conjugaison ne prêtent pas àsourire contrairement au passé simple(pensez à vous pûtes).

Que faire en classe ?

On pourra commencer par travailler lachronologie en dehors de toute formeverbale afin de bien installer les conceptsde simultanéité, postériorité, antériorité.On peut utiliser l’emploi du temps, lesprescriptions, les différentes activitéssportives d’une même séance afin de faireplacer les «événements» les uns par rapportaux autres. Puis on prendra différentsrepères.Exemple : Avant l�EPS, on a fait unedictée. Après l�EPS, on fera du calcul.Avant le calcul, on a fait une dictée, puisde l�EPS. Après la dictée, on fera del�EPS, puis du calcul.Pour travailler les temps, il est nécessairequ’au préalable l’élève distingue le verbedes autres mots. Des activités systéma-tiques de substitution, en observant leschangements de sens et les changementsorthographiques, comme les tris de mots,aideront bien mieux qu’une définitionimposée par le manuel ou l’adulte5. Pourqu’intuitivement s’installe le doublesystème, on fera repérer systéma-tiquement, quel que soit le type de texte, cequi est dialogue (qui ressemble àl’énonciation discursive) et narration (quiressemble à l’énonciation historique). Destextes combinent les deux énonciations. Ilfaut donc veiller à aller du «pur» au«mixte» :- dialogue théâtral ;- bulles de BD ;- dialogue téléphonique ;- dialogue de personnages dans un récitavec un minimum d’incises qu’une lecturedramatique effacera ;- autobiographie ;- texte explicatif et texte prescriptif ;- narration sans dialogue à l’imparfait etau passé simple, narration au passéentrecoupée de dialogues…

En production d’écrits, on ne mélangerapas ! Les récits seront d’abord à l’imparfaitet au passé simple. L’emploi du passécomposé s’admet avec les plus grands, aurisque de passer du récit au discours.Régulièrement, en lecture, on vérifiera lacompréhension de la chronologie desévénements dans un passage du texte lu enclasse. Là aussi, on ira du simple aucomplexe, avec un entraînement collectiforal avant de passer à la forme écriteindividuelle.Voici deux exemples d’exercices.

Numérote les événements dans l�ordreoù ils se sont réellement passés.

Exercice simple :1-Le petit poisson bleu demande une écaille.2-Les vagues ont rapporté l’histoire à

Octopus.3-Octopus disparaît.4-Octopus donne un conseil.5-Arc-en-ciel reste seul6.

Exercice difficile :1- Lucas s’est mis en tête de me trouver un

compagnon à moi son chat.2- Vous parlez d’une idée !3- Je ne demande rien à personne, moi !4- Ce matin, Lucas vient me voir.5- «Il te faudrait un camarade, Ronron…

Une tortue ferait l’affaire.6- C’est bien trop lent pour moi, Lucas !7- Ce qui te conviendrait, c’est un chien !

Un beau chien !8- J’ai sommeil ? Lucas.9- Nous en reparlerons, demain.»Ce texte est difficile parce qu’il mêle unepartie narration au présent alors que lesfaits racontés ont déjà eu lieu, donc sontantérieurs. Il fait semblant de s’adresser àquelqu’un. Le texte écrit mime un conteoral. La partie «dialogue» est centrée sur leprésent, mais n’est pas sur le même planque le récit. Il est inclus.On visera d’abord la compréhension del’ordre chronologique. Puis, on observerales temps, pour montrer leur valeurchronologique.

Carole TISSET, maître de conférences au centre IUFM d�Etiolles

5-Voir «Surtout ne pas donner de définition duverbe», BLÉ91, n°23, octobre 1998.

6-D’après Arc-en-ciel, le plus beau poisson desocéans, M. Pfister, éd. Nord-Sud, 1992. Cetexercice nécessite bien entendu d’avoir lul’album.

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Quels contrats ?Contrat de réussite, contrat éducatif local, contrat local de sécurité,contrat de ville... Comment s�y retrouver ?Guy Guézille, inspecteur d�académie adjoint, nous aide à nousrepérer.

Face à une situation et une évolutionde plus en plus préoccupantes où

incivilité et violence se développent aupoint de se banaliser, l’état a engagé uneréflexion visant à améliorer collectivementles actions de prévention, de dissuasionvoire de répression, susceptibles derépondre à ce phénomène.Cette réflexion a été menée dans lesdomaines de l’éducation, l’insertion, lasocialisation, la santé et la sécurité.Partant du principe que de nombreuxacteurs sociaux et éducatifs mènent déjàdes actions au sein des communes,l’objectif et la philosophie généralechoisis par l’état consistent à recenser,mutualiser et provoquer une prise deconscience collective d’initiativesmenées ou à mener.Cette forte volonté politique se concrétisepar une mise en place de contrats ayantchacun une orientation et des objectifsbien spécifiques. Il n’en reste pas moinsque tous ont un rôle et une fonctioncomplémentaires qui doivent se traduirepar une cohérence d’actions au niveaulocal.Voici en quelques lignes, ce qui caractérisechacun de ces contrats. A noter que l’ordrede présentation va du contrat le plus«éducation nationale» vers celui qui sesitue dans le contexte le plus général.

Le contrat de réussite

Ce contrat est rattaché à la mise en placedes réseaux d’éducation prioritaire (REP).L’objectif principal est la mise en œuvred’actions et de moyens permettant auxjeunes en difficulté d’accéder à un meilleurniveau scolaire. La réussite scolaire estdirectement rattachée à ce contrat. Cetobjectif majeur pourra être atteint grâce à :- des actions culturelles et sportives ;

- l’accès aux technologies nouvelles ;- une grande qualité relationnelle avec lesparents ;- une ouverture vers le monde extérieur(scientifique, économique, culturel etsportif, collectivités).L’Essonne possède actuellement 13 réseauxd’éducation prioritaire qui regroupent178 écoles, 18 collèges, auxquels sontassociés 3 lycées. Leur fonctionnement estconfié à un responsable et à un coor-donnateur qui sont entourés d’un conseil deréseau. Le contrat est conclu entre le recteurou son représentant (l’inspecteurd’académie) et les responsables du REP.Il est signé pour une période de 3 ans et feral’objet d’une évaluation au niveau duréseau et au niveau départemental.

Le contrat éducatif local

Ce contrat traite de l’aspect préventif etéducatif au sein d’une politique de ville oud’agglomération. Il se caractérise surtoutpar les actions menées dans le domainepéri-scolaire et extra-scolaire. Ceciexplique que les principaux partenairessont au plan local : les services municipauxconcernés, l’école et les associations(culturelles, sportives et autres).Les grands objectifs sont la recherched’équilibre pour les jeunes d’âge scolaireentre la réussite scolaire d’une part, laconstruction et l’épanouissement de lapersonnalité d’autre part.7 contrats sont actuellement labellisés parun groupe départemental de pilotage dontle préfet et l’inspecteur d’académie sont lescopilotes désignés par le texte de référence.En Essonne, le préfet a délégué sa fonctionde copilote au directeur départemental dejeunesse et sports. Ce groupe de pilotagecomprend, d’autre part, le conseil général,la CAF, la DDASS, le FAS.

Le contrat local de sécurité

Comme son nom l’indique, ce contrat esttrès orienté vers les problèmes de sécurité.Ceci explique la présence du préfet biensûr, mais aussi du procureur de larépublique (copilote avec le préfet), de lapolice, de la gendarmerie. L’éducationnationale y est totalement associée et lerecteur, tout comme le président du conseilgénéral et du conseil régional, peut êtreamené à signer ce type de contrat.Aux aspects éducation et sécurité qui sontdeux grands objectifs de ce contrat, il fautajouter l’aménagement du territoire quiprend une importance toute particulière etexplique une présence très forte de ladirection départementale de l’équipement.Est importante aussi la cohésion sociale,symbolisée par la présence de la DDASSet de la DDT.Au sein d’une ville ou d’une agglo-mération, ce contrat se traduit par unpartenariat entre les services municipauxconcernés, la police ou la gendarmerie,l’école, les associations, les sociétés detransports et les bailleurs sociaux. Lesconseils communaux de prévention contrela délinquance (CCPD) sont une réponsecollective recommandée.

Le contrat de ville

La caractéristique de ce contrat est sonaspect fédérateur et général.Il rassemble tous les partenaires évoquéslors de la description des deux contratsprécédents, CEL et CLS. Il relèvecomplètement d’une politique de ville, degroupement de villes ou d’agglomération.Les grands thèmes, tels que l’éducation, lasécurité, les transports et l’aménagementdu territoire, sont la base de son existence.Il faut surtout souligner la notion de projeturbain à moyen et long terme qui apparaîtdans les contrats de ville. L’habitat etl’urbanisme y sont soigneusement étudiéset peuvent avoir à terme une très grosseinfluence sur la sécurité et la qualité de viecollective au sein d’une ville.26 contrats de ville sont actuellement encours d’élaboration pour une durée de 7 ans.

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Guy GUEZILLE, inspecteurd�académie adjoint,

coordonnateur académique REP

Les siglesCAF : caisse d’allocations familiales

CCPD : conseil communal de préventioncontre la délinquance

CEL : contrat éducatif local

CLS : contrat local de sécurité

DDASS : direction départementale del’action sanitaire et sociale

DDJS : direction départementale de lajeunesse et des sports

DDE : direction départementale del’équipement

DDTE : direction départementale du travailet de l’emploi

DRAC : direction régionale de l’actionculturelle

FAS : fonds d’action sociale

REP : réseau d’éducation prioritaire

Conclusion

Voici ainsi présentés les différents contratsactuellement en cours d’élaboration ou demise en œuvre.Il faut en retirer la forte volonté de l’étatde structurer, d’harmoniser et de mutua-liser les ressources et les compétencesexistantes au sein d’une ville ou d’uneagglomération.Ceci ne doit pas nous faire oublier, au-delàde cette mise en cohérence, le rôle capitalque joue chaque acteur de terrain dans larecherche de solutions face à cette situationde plus en plus préoccupante.Volonté et solidarité doivent bien sûrse conjuguer au présent, mais surtout etencore plus au futur.

Monographiesdes communes de l’Essonne

Chaque école a reçu une information,relative au projet de rédaction de mono-graphies des communes essonniennes.A l’occasion de l’année 1900, unemonographie avait été rédigée pourchaque commune de France, en généralpar les instituteurs. L’ensemble de cestravaux, qui restent d’un grand intérêt,avait été remis aux Archives dépar-tementales, où l’on peut encore lesconsulter.Cette opération pourrait être renouvelée100 ans plus tard, sur la base duvolontariat et du bénévolat, éven-tuellement avec les moyens techniquesd’aujourd’hui.Des initiatives, notamment dans lesétablissements scolaires, ont déjà étéprises ici et là. Il a semblé souhaitablede les «fédérer», afin de leur apporterl’aide méthodologique dont ellespourraient avoir besoin et d’en assurerl’exploitation au niveau départemental,avant publication d’une synthèse.Il convient de préciser que laparticipation des enseignants n’est pasexclusive d’autres bonnes volontés:élus, «érudits locaux», clubs deretraités...Une proposition de «trame» a étéélaborée, une équipe de professeursd’histoire-géographie et d’historienslocaux se met en place pour suivrel’opération et apporter toute l’aide dontvous pourriez avoir besoin.

Pour plus de précisions, pour faireconnaître votre intention de participer àcette opération, ou encore pour obtenir lescoordonnées des autres personnes devotre commune prêtes à y participer,contactez :

Jean-Luc FRANCEau centre IUFM d�Etiolles

91450 Soisy-sur-Seine tel : 01 69 89 61 51

Directeur de la publicationBernard MACCARIO, Inspecteur d'académie

Directeur de la rédactionNicole GAUDELET, IENA

Rédactrice en chefClaire BONIFACE, IEN

Comité de rédactionElisabeth BINTZ, conseillère pédagogique

Rolande DELORD-LASSUS, DEA Laurence FROUIN, centre ressources lectureJean-François GEY, directeur d’IMPRO

Murielle HODEAU, maître formateur à l’IUFMMarie LAVAUD, DEA

Michèle PELLOUX, coordonnatrice ZEPGeneviève RANC, IENCarole TISSET, PIUMF

Pierre THEVENIN, conseiller pédagogiqueJean-François VINCENT, OCCE

Annick VINOT, conseillère pédagogiqueIllustrations

Patrice GOURDET, conseiller pédagogiqueMise en page

Danielle RODA, IAICorrection

Sylviane CHAULEYImprimerieE. P. 3000

91830 Le Coudray-MontceauMise sous pli

IMPRO Roger Lecherbonnier de Palaiseau

ISSN N°1269-4010

Pour toute correspondance :BLÉ 91

12, rue du Docteur Morère91120 Palaiseau

Tel : 01 69 31 27 30 - Fax : 01 69 31 44 54E-mail : [email protected]

Les textes de référence

Ø Contrat de réussiteCirculaire n° 99-007 du 20 janvier 1999«Elaboration, pilotage et accompagnementdes contrats de réussite des réseauxd’éducation prioritaire», BO n° 4 du 28janvier 1999.

Ø Contrat éducatif localCirculaire n° 98-144 du 9 juillet 1998«Aménagement des temps et des activitésde l’enfant : mise en place du contratéducatif local et des rythmes périscolaires»,BO n° 29 du 16 juillet 1998.

Ø Contrat local de sécuritéCirculaire du 28 octobre 1997 relative à lamise en œuvre des contrats locaux desécurité, JO du 30 octobre 1997.

Ø Contrat de villeCirculaire du 31 décembre 1998 relativeaux contrats de ville 2000-2006, JO du15 janvier 1999.Circulaire n° 99-194 du 3 décembre 1999«Préparation et suivi des volets "éducation"des contrats de ville», BO n° 44 du 9décembre 1999.

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Les enseignants hésitaient à com- menter les travaux des élèves. Il était

parfois difficile pour les parents d’analyserseuls, sans aucun commentaire de l’ensei-gnant, les travaux de leur enfant.On a vu apparaître à l’école maternelle, etparfois au CP, un système de petites têtes,souriantes ou pas.

Avantage et inconvénients

On voit tout de suite si c�est bien ou pas.L’enfant le voit, les parents le voient. C’esttrès clair. On comprend tout de suite. Onn’a pas besoin d’expliquer davantage.C’est justement le problème.Ce système ressemble beaucoup à unenotation ; d’ailleurs, certaines enseignantesn’hésitent pas à parler de notes. Rappelonsà ce sujet l’affirmation de la ministre1 : lanotation n’a pas sa place à l’écolematernelle.Cette appréciation est globalisante : au lieude procéder à une analyse fine des réussitesou des erreurs et des progrès à faire,l’enseignant globalise cette évaluation enune tête, parfois «moyenne», qui donne peud’informations sur le travail fait, si ce n’estqu’on n’a pas à être particulièrementcontent, ni trop triste. Quant aux têtes tristes,quelle image l’enfant reçoit-il de son travail :il lui faut être triste ? La maîtresse est triste ?Les parents seront tristes ?Cette appréciation est affective, voiremoralisante (tu as bien travaillé, tu voisje suis contente, tu m�as fait plaisir).L’attention de l’enfant se focalise sur cette

appréciation et peut ainsi perdre de vue leplaisir de l’apprentissage au profit du plaisirde la note. N’oublions pas non plus, avecréalisme, les usages familiaux de cettenotation : «tu n�as eu aucun tête souriantecette semaine, tu n�auras pas de�».

Propositions

Lorsqu’on recourt à une auto-évaluation del’élève pour certaines situations très netteset faciles à évaluer (j’ai mis trois balles dansle panier), il peut être utile de recourir à dessymboles : dans ce cas, évitons les symbolesfondés sur la subjectivité, pour utiliser (parexemple) un rond proportionnellementrempli (F, E) ou des feux verts, orange,rouges.Lorsqu’une évaluation, un bilan, sont faitsà la fin d’une séance, ou au début de la séancesuivante, individuellement, en petit groupe,ou en grand groupe, on réfléchit avec lesenfants à ce que la maîtresse va écrire : cemessage concernera aussi bien l’enfant quela famille. Il pourra dans certains cas êtrel’objet d’une dictée à l’adulte ou donner lieuà des questions de l’enfant : «qu�est-ce quetu as écrit là ?». Bien entendu, l’encoura-gement de l’enfant est fondamental.Cette analyse des réussites et des progrès àfaire précède des entraînements différenciés :c’est parce qu’on aura montré qu’on a besoind’apprendre à mieux découper qu’onparticipera lors de la prochaine séance à unatelier d’entraînement au découpage ; c’estparce qu’on fait les 3 à l’envers qu’ons’entraînera à mettre à l’endroit lesétiquettes-nombres qu’on présentera àl’envers. Ces activités d’entraînementpeuvent même être annoncées en

commentaire des travaux réalisés. Lesélèves sont associés à cette démarche dedifférenciation.

Les principes

L’erreur est une source d’informations pourl’enseignant et pour l’enfant : elle doit êtreconsidérée positivement. Il est donc tout àfait normal de faire figurer dans les cahiersdes enfants les travaux contenant des erreurset manifestant peu à peu les progrès.L’enfant acteur de ses apprentissagesn’est pas une formule vide. La circulairerécente sur les langages à l’école maternellela développe :

«Au fil des sections, il convient de favoriserprise de distance et prise de conscience pardes questions et des commentairesaccompagnant les productions, puis par uneanalyse explicite avec les enfants. (…)L’association des enfants à leur évaluations’intègre dans cette stratégie. D’abordconsidérée comme l’identification desprogrès accomplis avant d’être conçuecomme la confrontation d’une réalisation àdes attentes grâce à l’identification descritères de réussite, elle contribue à les faireentrer dans l’univers des apprentissagesscolaires, sous la forme que développeral’école élémentaire. Les enfants deviennentconscients de ce qui est à acquérir, de leurdegré de réussite, et peuvent détachersavoirs et savoir-faire des contextes de leurmise en œuvre. Des moments de bilanpermettent de faire le point sur ce qui a étéfait et ce qui a été appris ; la valorisation descomportements, des réalisations, desprogrès et des propositions laisse des tracesdans les cahiers ou dossiers qui font le lienavec les familles.»2

Tout ceci n’est rien d’autre qu’uneexplicitation de ce qu’on appelle, dans lejargon pédagogique que BLÉ91 fuit, maisparfois consent à employer parce qu’il fautbien appeler un chat un chat…, l’évaluationformative.

Claire BONIFACE, IEN à Palaiseau

2-Instruction du 8 octobre 1999, BO n°8 du 21octobre 1999.

On note à la maternelle !

A l�école maternelle, les pratiques d�évaluation évoluent. Souvenez-vous de l�époque où les enseignant(e)s de maternelle ne supportaientpas l�idée d�évaluer, associée à la crainte de porter un jugementdéfinitif alors que l�enfant est en acquisition instable. Les craintesallaient jusqu�au fantasme du «fichage». Si ce temps est révoludans la plupart des classes, d�autres excès ont pris le relais.

1-Lors des Etats généraux de la lecture et deslangages en mai 1999, à Nantes.