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  • EXPRIENCES SENSIBLES ET DAMBULANTES

    Relevs de balades sonores carnets de notesExpriences d'coutes en marches

    Balades sonores Carnet de notes Desartsonnants Avril 2014

  • 1 - Dans le clotre de l'hpital de L'htel Dieu Lyon, balade solitaire nocturne (Une heure trente environ)

    tombe de nuit, vers 22H, aprs une chaude journe d't, microenregistreur en main, j'entre dans l'hpital de l'Htel Dieu, au centre de Lyon.Avant mme de pntrer dans l'enceinte de l'hpital, une norme ventilationattire mon oreille, masquant presque lorsque je m'en approche, le bruit desvoitures, nombreuses cette heure-ci, et le brouhaha des clients attabls auxterrasses des bars faisant face l'hpital.Je pntre dans une premire cour. Cet hpital, tout en longueur et assezancien dans sa partie centrale, transform au fil du temps et des besoins parde nombreux ajouts, appendices architecturaux, se compose dans sespassages publics d'une srie de cours intrieures, passages vots dediffrentes poques, de dambulatoires, d'anciens clotres, jardins...`Ds franchi le portail d'entre, on est frapp par le contraste. Nous passonsd'un tumulte urbain un calme serein. Un effet de coupure comme lequalifient les acousticiens s'impose l'oreille. En l'espace de quelques pas, onpasse d'un monde l'autre, avec un contraste tel que notre oreille la fois sedtend et se met aux aguets pour saisir les subtilits du lieu. Cette surprisenous entrane dans d'autres mondes sonores, et nous met, sans transition, encondition pour aborder la srie d'ambiances plutt apaises qui rythmeront ladambulation.Le calme relatif du lieu me procure sentiment d'apaisement subit, voire brutalentre l'extrieur et l'intrieur, une coupure inattendue qui vient aiguiser notrecoute .Je prend alors conscience de la rverbration omniprsente en traversant, augr de mes avances, des lieux referms sur eux-mme, minraux,gnrateurs de nombreux chos subtils et varis. Tous les sons entendus,produits, sont exacerbs, prolongs par cette caractristique acoustiquechangeante, qui semble tirer les lieux vers des horizons difficiles cernerdans l'espace. Ces rverbrations construiront l'un des mes fils conducteursdurant cette marche. Au fil des filtrages rverbrants plus ou moins longs,colors de graves ou d'aigus, j'ai l'impression de traverser une collectionsd'effets acoustiques significatifs, donnant aux sons une profondeur et unedensit remarquable, tout en les fondant dans un espace immersif. Je metrouve ainsi littralement baign par l'acoustique ambiante.Pour parler des sources sonores, ce sont les bruits de pas qui construisent latrame sonore rcurrente. Les miens tout d'abord. Pas amplifis par la topologiedes lieux gnrant les phnomnes de rverbrations prcits, ce sont euxaussi qui jalonneront ma marche. Je fais d'ailleurs, dans cette acoustiqueamplificatrice, trs nettement la diffrence, au fil des personnes croises, entredes pas claquants des chaussures talons, ceux feutrs des soignants ensabots silencieux, et une infinit de variantes selon les chaussures et lesdmarches. Chaque pas entendu prend une personnalit marque, rapide oulente, rgulire ou incertaine, claquante ou tranante, trs prsente oudiscrte... Le pouvoir de discrimination du lieu permet d'affiner l'coute vers de

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  • moindre dtails, qui prennent alors toutes leur importance dans la constructionde ce paysage sonore hospitalier.La deuxime source sonore est constitue de voix. Elles aussi omniprsentesquoique plus ponctuelles cette heure dj tardive pour un hpital. je croise,au gr des couloirs, essentiellement des soignants qui devisent mi-voix. Eneffet, le calme des lieux semble inciter parler trs bas, dans une sorte deconfidence, d'intimit, la fois trs sensible du fait que peu de sources sonoresmergentes et trs discrte de par leur faible volume sonore. Chaquerencontre constitue un vnement sonore la fois feutr et trs prsent,presque cisel. J'entends venir de trs loin les sons, rverbrs par cette suitede couloirs mi-intrieurs mi-extrieurs. Des clats subits de voix d'un groupede jeunes l'extrmit d'un couloir donnant sur un trottoir hors enceinteprennent tout d'un coup une incroyable proportion, quasi dmesure etoutrancire dans la srnit des lieu, mais la fois tonique et revigorante.Autre caractristique ce ce parcours hospitalier, la dambulation tout au longdes couloirs est rythme d'ouvertures, soit vers des jardins intrieurs, descours, soit vers des portes menant diffrents services. Ainsi, des fentresacoustiques amnent des sons plus ou moins tnus, fontaines, voix, bruits dechariots ou d'objets mtalliques... En quittant les couloirs de liaison pourpntrer dans les jardins, ou des cours intrieures, la sensation de l'espace etl'ambiance sonore se trouve radicalement modifie, en quelques pas. Larverbration s'attnue beaucoup, des lments vgtaux viennent amortir lessons, l'espace s'ouvre vers le haut, dgag des plafonds abritant notrecheminement. A mi-parcours, une chappe mne vers un portail rejoignantles quais du Rhne, laissant s'engouffrer subitement une nappe de moteurs enflux quasi continu sur ce grand axe urbain. On est brusquement tir de notredouce rverie dambulatoire par cette intrusion automobile au sein de ce quipourrait tre compar un oasis de calme en centre ville. Mais ds que l'ons'loigne, le lieu s'apaise nouveau et reprend trs vite sa srnit nocturne.Dernire chose parmi les constantes, et non des moindres, la prsenceincontournable de ventilations, arations, climatisations et autres ventilateursbrasseurs d'air.J'en ai cit une, avant mme de pntrer dans l'enceinte hospitalire, maisforce est de constater qu'elles sont lgions et qu'une fois la magie des lieuxretombes, on les entend d'un bout l'autre du parcours.Le paradoxe tant que ces ventilations sont tellement prsentes, voireomniprsentes, qu'on ne les dcle pas immdiatement. Il faut que,progressivement, l'oreille se rende l'vidence que, dans la srnit apparentede cet hpital, les arations diverses et varies brassent beaucoup d'air, defaon assez consquente l'oreille. Et ce que l'on pourrait juger a prioricomme un drne nuisible, par trop envahissant, devient, pour moi en tout cas,au fil de l'coute, une musique des lieux, sans cesse renouvele tout au longdu parcours.L encore, le calme des espaces traverss renforce l'identit de ces soufflants.Ceux qui sont discrets, que l'on peroit juste en les approchant de prs, ceuxqui sont trs prsents, ceux qui cliquettent, ou qui tournent rond, ou quivarient dans leur vitesse de rotation, qui chuintent, qui ronronnent, quisifflent... L encore, je me trouve en prsence de toute une srie d'objets

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  • giratoires, cintitques. Pour peu que l'ion prenne un peu de recul, vacuant cequi pourrait paratre nous les faire paratre comme une pollution sonorepermanante, en tout cas pour ceux qui vivent dans ces lieux, ces ventilationsdeviennent pour le promeneur-coutant que le suis, une source d'attraitacoustique des plus intressante. En focalisant l'coute sur ces sources soufflantes, je peux traverser toutl'hpital sans jamais quitter une soufflerie de l'oreille, en mixant le passagede l'une l'autre sans en interrompre l'coute, pour peu que ma concentrationsoit suffisante et l'attention non dtourne involontairement par un autre accident sonore.Ayant effectu, en solitaire, plusieurs fois cette promenade coute, en principeaux mmes horaires, j'ai chaque fois retrouv, avec le mme engouement, descaractristiques acoustiques quasi similaires, la diffrence de quelques"surprises" sonores ne venant pas franchement chambouler l'impressionglobale.Dommage que ce lieu magique pour l'coute soit prochainement destin trerhabilit en un centre de loisirs et de commerce. Que restera t-il alors de cesmagnifiques ambiances auditives d'hpital, rvlant tout la fois une activitsans cesse bruissonnante tout en restant intiment feutre ?

    2 - Balade sur les pentes de la Croix-Rousse Lyon, festival Bellevue, 6 personnes (Deux heures environ)

    Cette promenade mane d'un proposition pour un festival ax sur l'cologie, ledveloppement durable et les conomies solidaires dans un quartier lyonnais.Un petit groupe de 6 personnes, essentiellement du quartier, dont deuxtudiants des Beaux-Arts et un pote sonore vidaste qui a ralis une vidoreportage de cette balade.Le parcours a t pralablement repre, et la promenade est effectue etguide par deux personnes avec l'aide d'un ami ingnieur du son, conteur etartiste sonore.Le dbut de la promenade donne lieu un petit commentaire sur ce qu'est unebalade sonore et quelques rapides explications concernant l'cologie et lepaysage sonore, les effets acoustiques et quelques dmarches esthtiqueslies ces sujets. La place Bellevue, dpart de la balade surplombe Lyon et une mandre duRhne et offre, comme son nom l'indique une vue imprenable et magnifiquesur la ville.Plusieurs plans sonores se distinguent nettement. En proximit, des enfantsjouent dans diffrents ateliers tandis que des adultes les encadrent et font lavaisselle.En dessous, une route encastre entre des btiments assez hauts. De sons devhicules et de pitions montent d'un premier plan en contre-bas. Au loin, larumeur de la ville, dans une coute panoramique, droule son continuumsonore nanmoins assez attnu, et d'o mergent parfois les stridences desklaxons et sirnes.Des "cornes d'coute" fabriques pour la circonstance, sortes de longue-oues

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  • quipes d'un pavillon termin d'un stthoscope permettent qui le veut decanaliser des points d'coute, de les amplifier et de les colorer en visant dessources sonores plus ou moins proches.Un peu plus bas, dans une rue descendante, on fait une halte dans uneimpasse troite, encastre entre deux murs et escaliers trs hauts. L'coute yest rduite quelques sons trs proches, dans un espace confin etrverbrant. Alban, mon coquipier profite de cet endroit intime pour lire unconte indien d'Amrique du Nord racontant comment entendre des sonsmagiques en se promenant dans des forts, lecture qui prend ici unesignification circonstancie, mme si notre coute se droule en milieu urbain.Quelque mtres plus bas, une ouverture, fentre auriculaire, constitue d'unescalier trs en pente, amne dans le calme de la ruelle une brusque irruptiondu ronronnement automobile provenant des quais en contre-bas. Onremarque un effet de coupure trs net ds le moment o l'on dpasse cettebrche sonore et que les sons disparaissent instantanment du paysage.Plusieurs passages-tests devant cet escalier confirment cet effet.Sur cette mme rue, on coute un concert de botes musique, l'oreille collesur la rambarde d'un escalier, effet magique, posie garantie. L'exprience serarenouvele sur une autre rampe trs longue, les auditeurs, oreille colle larambarde, sont trs espacs, et ne voient pas le joueur de bote. Au passage,et dans la continuit des micro-bruits, on ausculte au stthoscope et l'oreilleune grande armoire lectrique laissant chapper, diffrents endroits, de douxvrombissements et autres sifflements et vibrations. La prochaine halte nousemmne place Colbert, elle aussi dominant Lyon o l'coute se rvleparticulirement riche et varie. Voix en terrasses de bars, boulistes, magasinsbordant la place, autobus et voitures, pitons.. si l'on s'arrte au centre de laplace tous ces sons nous entourent et se dplacent sans cesse autour de nous.Superbe effet de spatialisation, et excellente discrimination des sources, toutest net, presque cisel, parfaitement localisable, dans une coute quilibre,venant contrebalancer le brouhaha d'autres quartiers de la ville. Cette dernirepossde bel et bien des richesses sonores, condition de les dcouvrir etd'vacuer certains a priori tenaces, tel ville = bruit.Toujours sur cette place, une fontaine urbaine nous permet de passer d'uneambiance sonore globale de nouveaux micro-sons, de revenir une coutedu dtail isol grce un effet loupe. On ausculte l'eau sous toute sescoutures, de la gouttelette un flot impressionnant lorsqu'on l'coute avec unetrompe. Quelques badauds nous regardent comme d'tranges huluberluscoutant l'eau ou les vibrations d'un panneau d'information au stthoscope etavec d'autres tranges objets. Certains nous questionnent, se risquent testerles "longue-oues", et repartent tout tonns de cet instant d'coute aussiinopine qu'inhabituelle .Sitt quitt la place, nous pntrons dans l'une des plus clbre traboule croix-roussienne, la Cour des Voraces. Les traboules, spcificits architecturale despentes de la Croix-Rousse, constituent un ddale de passages couverts,d'escaliers en cours intrieurs, de porches et de passages intrieurs entre etsous des btiments. Ces derniers permettaient aux canuts de descendre la soie l'abri, tout au long des pentes, jusqu'au Rhne o les balles de prcieux tissutaient charges sur des pniches.

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  • Pour revenir notre traboule, elle est constitu d'une premire terrasse, puisd'un large escalier jusqu' une seconde plate-forme finissant sous un escaliermonumental clair-voie, architecture imposante et caractristique des penteslyonnaises. Un autre escalier passe sous le btiment, en contourne un flanc,descend vers des rduits enterrs, pour aboutir sur un mur fermant la partieintrieure de la traboule. Ce trajet entre passages ouverts, ferms,surplombants, encaisss, offre une incroyable diversit de points de vue, et depoints d'oue. C'est l une sorte d'acm du parcours, o mme les habitants duquartier sont tonns de cette richesse sonore qu'ils ont souvent travers sansvraiment en prendre conscience. L'un des objectifs d'une balade sonore tantbien videmment de redcouvrir ces richesses porte d'oreille, et la cour desvoraces est un espace exceptionnel pour ce faire, un passage lyonnaisincontournable, un lieu qui mriterait d'tre class au guide des sites d'couteremarquables, si ce dernier existait.Durant environ trois-quart d'heure, de nombreuses situations d'coute sontexplores dans ce lieu magique, o les rverbrations, masquages, circulationssonores, filtrages nous enchantent l'oreille. On cre des accidents acoustiques,parfois tonitruants en descendant un escalier avec une valise roulettes, oude faon plus discrte, en faisant sonner une petite boule tintinnabulante. Nousmontons dans les tages, lisons des contes dans une cave enterre, lesauditeurs coutant sur un perron au-dessus, par des grilles d'aration, nousnous arrtons au bas o, par les fentres ouvertes d'un mur de btimentfermant le passage, des sons de radio, des voix, des bruits mnagersponctuent l'espace, dans un concert faon "musique concrte", toujours nimbde belles rverbrations.Cet fin de parcours, avant le retour la place du dpart, nous montre quelpoint l'coute d'un lieu peut se rvler riche devant la beaut d'une multitudesde paysages sonores, du plus minimaliste au plus imposant.

    3 - Balade forestire nocturne, Festival Les Temps d'Art est lev, Saint-Martin en Haut, 15 20 personnes (2 heures environ)

    Participation un festival-rencontres autour d'une formation culturelle Mtiers des Arts et de la Culture , dans un centre de vacances rural, sur lesmonts du Lyonnais. Le cadre est champtre, magnifique, avec un grand tangentour de forts. Je travaille avec Nathalie Bou, une plasticienne ,scnographe, car les balades sonores seront accompagnes d'une installationenvironnementale destine mettre l'oreille en condition. L'installation est libred'accs, les deux balades nocturnes quand elles ont accompagnes.

    L'installation, scnographie d'coute, est dlimite par une petite prairie enpente trs douce, ceinte d'un ct par un ruisseau et une range d'arbres, etde l'autre par un bois assez abrupt. Ce petit espace en forme de clairire-amphithtre de verdure naturel, s'achevant sur l'extrmit d'un tang, seprte parfaitement des jeux d'coute.

    Des nattes de diffrentes couleurs ont t poses mme le sol, tournes versl'tang, pour inciter le promeneur s'allonger et couter.

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  • Des objets, trompes et longues oues, stthoscopes trafiqus sont poss a etl pour ausculter les sons tout loisir.

    Tout autour de la clairire, des mobiles de cramiques, d'onyx et d'caillestintent dlicatement, dans un pointillisme sonore dlimitant de fugitivesfrontires auriculaires.

    Des crits, aphorismes autour de l'coute sont dissmins sur la prairie, surdes plaques translucides et multicolores.

    Tout autour du plan, d'eau, six cadres d'coute, simples cadres de bois,invitent le promeneur viser avec ses yeux et ses oreilles, un endroit prcis.

    Sur une table de pierre, sont poses de petites sculptures en grillage, desboules tintinnabulantes, des botes musique, des objets d'coute,stthoscopes, et autres objets pour explorer le monde des micro-sons.

    C'est de cette clairire que partiront, nuit tombante, deux promenades coutesur deux soirs conscutifs, avec des circuits identiques.

    Ces promenade nous font progressivement quitter le monde festif dufestival, o voix et musiques tissent un bruit de fond assez dense, pour gagnerprogressivement les hauteurs d'un village. Lentement, l'ambiance sonores'amenuise, jusqu' ne laisser place nos seuls bruits de pas, chuchotementset vols dans des fourres de quelques nocturnes drangs par notre approche.En mme temps que les sons se font plus tnus, la lumire a elle aussiconsidrablement diminu, jusqu' la presque obscurit de la forts. Cetattnuation progressifs des ambiances lumineuses et sonores aiguisent notreperception de l'environnement. Chaque points lumineux ou micro-bruit prendune place importante, le silence s'est naturellement impos dans le groupe, lanuit et ses bruits mystrieux, parfois inquitants emmne notre coute dansdes territoires quasi inconnus, existants et intrigants.

    Aprs une monte sur un chemin entour de bois assez touffus, qui nousenferme dans un univers nous dbouchons subitement sur une immenseprairie, balme de verdure aux courbes douces que viennent terminer au loind'assez hautes collines boises. C'est un vaste amphithtre verdoyant, quidonnent tout coup nos oreilles un grand bol d'air , une sensation derespiration ample et paisible au sortir de la fort. On sent physiquementl'espace plus ar, l'air moins pesant, et comme une pression acoustiqueallge. Au niveau sonore, nous avons droit un incroyable concert degrillons et sauterelles profitant de la chaleur que le sol a emmagasin durantla journe pour donner une srnade nocturne. On s'allonge dans l'herbe etl'on coute, un bonne de quinzaine de minutes, en silence, cet incroyablepointillisme qui anime l'espace de part en part. Quelques sons de bovins etde chiens venant d'une ferme assez lointaine, les sons portent sur de grandesdistances dans cette tolopogie, et mme le sons grave d'un avions se fontentendre en contre-point, sans aucunement dranger, bien au contraire, cettesymphonie rustique. Nous somme quelque part trs loin de la fte que nousavons laiss quelques centaines de mtres en contrebas, et que nousn'entendons plus du tout, protg par cette cuvette enceinte naturelle quiamplifies les micros bruits en nous isolant quasi reste du monde. Un sentiment

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  • d'tre sur une plante part, dans un immense thtre de verdure nocturne etbruissonnant, rien que pour nous.

    La redescente vers le village s'effectue avec l'effet inverse, de quitterprogressivement un univers de calme pour revenir le fte, ses vois etmusiques. Mais pour autant, la transition et agrable, nos oreilles tantmaintenant pleinement rceptives ces transitions de mondes sonores, cesmusiques des lieux tellement signes qu'on les eut cru fabriques pour lacirconstance. Et pourtant...

    4 - Balade autour du quartier des Terreaux (Lyon) avec une quinzaine d'tudiants designers, dans le cadre d'un atelier design sonore, 20 participants (une heure trente environ)

    Dans le cadre d'un workshop consacr au design sonore, s'appuyantnotamment sur la notion d'environnement et de paysage sonore, nousarpentons un circuit pralablement repr dans le premier arrondissement deLyon. Cette promenade s'effectue chaque anne, comme un rituel marquant ledbut de ces ateliers, mais surtout comme une mise en condition de l'oreille,comme une premire approche de terrain donnant entendre des exemplessignificatifs d'ambiances acoustiques urbaines, comme des trames retravailler par la suite.Le premier arrondissement de Lyon comporte (au moins) trois types detopologies urbaines trs caractristiques et diffrencies, avec les quais deSane et ses bas-ports entrecoups d'escaliers, le quartier des Terreaux, formde grandes et de petites places typiques, d'avenues hausmanniennes et depetites rues resserres, et les pentes de la Croix-Rousse, vritables labyrinthesde rues troites, pentues, de petites places, d'escaliers et de traboules1.Nous partons habituellement d'une place trs anime, sorte de mini quartier la fois intime et populaire, et trs prise des touristes et des acteurs culturelsde la cit. Un mixte comme il en existe dans beaucoup de villes, o joueurs deptanques habitus ctoient tudiants des beaux-arts, mres de famillessurveillant les enfants qui jouent sur la place et hommes d'affaires. Au centrede cette place entoures de rues, bordes de commerces, surtout des cafsrestaurants, s'rige une statue monumentale au pied de laquelle vacommencer notre promenade coute. C'est ici que seront donnes quelquesconsignes Imaginez vous dans une ville, un pays inconnu, en vacances, lesyeux et les oreilles en alertes, excits par l'exotisme de la dcouverte. Mme sinous faire acte d'coute collective, restez chacun dans une bulle individuelle,sans commenter quoi que ce soi jusqu' la fin de la promenade. Restez ouverts tous les sons, la rumeur ambiante, aux lments mergents, aux sonsvenant de droite, de gauche, de dessus, de derrire, du lointain comme du trsproche, aux mouvements et aux rythmes...La place est assez referme, seules quelques rues troites et une monted'escaliers permettant d'chapper son enclos. Les sons sont donc1 http://www.lyontraboules.net/

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  • essentiellement ceux d'un espace plutt repli sur lui-mme, sans tretoutefois de par ses proportions touffant. C'est un espace immersif, d'oquelques chappes et rumeurs viennent s'ajouter discrtement l'environnement . On peroit parfaitement les sources sonores, trsdistinctement, avec juste une rverbration idale, les situant prcismentdans l'espace, montrant des plans trs tags, de trs proche l'autre boutde la place. Les scnes sonores y sont, mme par l'poque hivernales o nousles abordons riches et changeantes, voix, circulation et bruits de commerces etde travaux s'quilibrant dans un subtil contrepoint, un beau petit thtred'coute pour mettre l'oreille en condition.

    5 - Balade sonore chalonnaiseAvec 12 tudiants de l'cole d'Art Mdia Fructidor Chalon sur Sane (2H30 heures environ)

    Premire tape d'un workshop autour de l'criture de paysages sonoresurbains, nous sortons nous frotter l'oreille la vie chalonnaise, par un soleilradieux, de quoi se mettre les tympans en apptit.

    Des points forts, non pas en terme de dcibels, mais de beaux momentspotiquement sonores, s'offrent rapidement notre coute.

    Un passage resserr entre deux btiments ouvre une brche sonore, nousl'empruntons et par un fondu progressif, une musique de Nol s'impose,rapidement accompagne de multiples crissements de patins sur une patinoirephmre, de plein air, crissements dynamiques. Nous dzoomonsprogressivement pour nous regrouper sous un kiosque musique. Visionpanoramique, l'coute associe, l'endroit idal pour lire un extrait de "l'Art desbruits" de Russolo. Des klaxons et autres rythmicits urbaines viennentprolonger fort propos la lecture, semblant donner raison, musicalementparlant, aux futuristes bruitistes italiens.

    Rues pitonnes pleines de bruissements finement rverbrs, la cloche de lacathdrale joue en contrepoint d'une meuleuse, duo improbable et nanmoinsdes plus russis.

    Intrieur de la cathdrale Saint-Vincent. Un presque silence, nanmoins habitde pas rsonnants, de voix chuchotes, de grincements et claquements deportes. Une ambiance sereine, o l'espace architectural magnifie chaquemicro-source, une lgre porosit qui nous fait percevoir quelques bribesfeutres, amoindries, comme fantomatiques, du monde extrieur.

    Un passage vout avec des pas marqus claquants, qui s'en vont decrescendojusqu' se fondre dans la rumeur urbaine, musiques qui nous talonne jolimentl'oreille.

    Les bords de Sane, en contre-bas, bruits urbains amortis, rivire miroirsonore rebondissante qui porte les sons d'une rive l'autre; sous un pontrsonnant, lecture d'un passage de George Perec "Espces d'espaces", ne paschercher construire mais dj, plus modestement, lire l'espace, ici par lesdeux oreilles.

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  • Fin de la balade dans une cour intrieure, havre isol ou nous nous entendonsbien, changes de ressentis, l'coute est amorce, titille, on va pouvoirpenser l'criture

    6 - Balade dans une universit dijonnaise, rencontres altermondialistes et cologiques, 15 participants des rencontres (Une heure environ)

    Une balade sonore prvue dans le cadre de rencontres cologiques etaltermondialiste, avait t, comme il se doit, pralablement repre, rpte,dlimite.

    A l'heure o ladite promenade devait avoir lieu, les conditions mtorologiquesse montrrent plus que dfavorables, dversant sur Dijon quantit d'eaufurieuse, ne nous permettant pas de mettre raisonnablement une paired'oreilles dehors, mme des plus hardies.

    Peu importe, ce que l'on ne pourrait pas our en extrieur, on l'improviseraitdans une coute intrieure, en tous cas l'intrieur des btiments del'universit qui nous accueillait ce jour l.

    Tant pis pour les cours intrieures et rues avoisinantes, les couloirs et passagescouverts serviraient donc de terrains d'coute.

    Le groupe d'coutants joue alors le jeu, et commence partir doucement l'exploration d'une architecture sonore, l'improviste, mais nanmoins guid.

    Le btiment est vaste, ancien, labyrinthique et trs typ. Une ancienneuniversit massive et imposante.

    Des craquements boiss de pas, qui aimeraient pourtant se faire plus discrets,sur des parquets, dans des escaliers... Ils font nanmoins partie du jeuxd'coute.

    Des transitions, passages et couloirs assez bas de plafond, dbouchant soudainsur des espaces plutt en hauteur, avec des modifications d'acoustiquessoudaines et remarquables, des coupures impromptues, vivifiantes, unearchitecture qui garde l'oreille dans un agrable tat d'alerte, sans pour autantla brusquer outre mesure.

    Un moment magique car inattendu : une avance couverte d'un toit de tlesplastiques qui, pour tre trs inesthtiques, nous offre un abri couvert que lapercussion des gouttes d'eau transforme en un vritable instrument demusique. Un concert de gouttes aquatiques plicploquant au-dessus nos ttes,spatialises, rsonantes, timbres, aux rythmes alatoires et complexes. Lemoment que l'on attend pas et qui nous offre, d'un coup d'un seul, un instantde belle musique des lieux, comme un point fort, un acm sonore au cur denotre dambulation.

    L'instant qu'il faut savoir saisir, l'espace qu'il faut apprcier, ne surtout pasviter mais au contraire prendre le temps de l'apprcier sa juste valeur.

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  • Le reste du btiment continue de s'offrir bien volontiers notre explorationauriculaire - des voix feutres exfiltrant des bureaux aux portes entrouvertes,et parfois jaillissantes au dehors comme des diables ressort, des talonssolitaires ou en groupe se rapprochant ou s'loignant, dessinant des espacesdevins dans leurs formes et volumes. Des sons familiers, aismentidentifiables mme si dissimuls notre vue par d'innombrables cloisons ;photocopieurs, sonneries de tlphones, bips informatiques, portes de placardsmtalliques... Toute une vie quotidienne porte d'oreilles !

    Les alas climatiques ont finalement model une promenade des plussurprenante, o d'ailleurs l'lment aquatique lui-mme joua un rle des plusimportant. Ne jamais maudire les contretemps, ni renoncer leur tendrel'oreille !

    7 Balade dans la ville de Mons (Belgique), dans le cadre du festival d'art sonore City Sonic, 15 personnes (Une heure trente environ)

    Lors d'un festival d'arts sonore Mons, et d'une intervention au centre culturel Le Mange autour de pratique de la balade sonore, nous dambulons dansla belle cit montoise, avec un groupe d'une quinzaine de personnes. Cettedambulation est une sorte de pari car elle propose un priple urbain oreilles nues , en vitant sciemment les installations sonores que propose lefestival City Sonic, mettant lui-mme en scne un parcours sonores dans laville. Il faut donc, pour assumer et dfendre ce choix, considrer la ville mmecomme une installation sonore que l'coute rvlerait au fil des pas, sachantque les participants ont dj visit le festival et ses uvres le matin, qu'ilssont pour la plupart des acteurs sonores, et qu'il faudra donc encore pouvoirles surprendre. Sachant galement que la balade ne propose, face parfoisd'imposants dispositifs, qu'une coute sans autre artifices que ce que la ville,et le guide, voudra bien nous faire entendre.

    Et cette fois-ci encore, aprs une petite mise en oreille, et surtout avec legnreux concours de la ville, de ses habitants, de sa topologie, de sesespaces, de sa vie en gnral, la magie opre. Le groupe se soude dans unecoute sereine, attentive, voire mme captive. Le centre montois dispose ilest vrai de vritables richesses acoustiques, une colline surplombante, unmaillage de rues paves, troites, des cours intrieures, des places trsvivantes, un beffroi qui sonne clairement et joliment, des voix, de subtilesrverbrations... On passe rapidement d'une scne l'autre, la ville complicerenouvelant sans cesse les ambiances, tenant en veil notre capacit d'coute,tel un compositeur qui userait de mille couleurs orchestrales, rythmes etsilences subits pour nous tenir en alerte.

    On constate au passage l'impertinence d'une muzac horripilante dans laprincipale rue commerante et la joie de lui chapper en empruntant un petitaxe parallle.

    On redcouvre comment un bel agencement campanaire, premire installation

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  • sonore historique dans l'espace public, prsent depuis fort longtemps dans noscits, ne ponctue de fort belle manire le temps en mme temps qu'il ne creun marqueur-signal sonore d'une qualit indniable.

    Durant un instant, le carillon du beffroi surmontant a ville s'est mis dialogueravec un carillon de l'artiste Jaques Rmus, install dans le cadre du festival surla place centrale, moment magique.

    On redcouvre une fois encore sa ville, la majorit des participants tantmontois, ou de la proche rgion, comme un espace sonore qui finalement,dans son esthtique globale, rsiste bien la diversit et la qualit des uvressonores installes, pour peu qu'on y tende une oreille curieuse.

    La ville installation sonore, dcouvrir de concert dans de nombreux lieux !

    8 Balades dans un quartier de Saint-Etienne (Centre Deux), dans le cadre d'une rencontre professionnelle Ville festive , 10 personnes (Une heure environ)

    Lors d'une rencontre professionnelle posant comme sujet la ville festive, entreanimations, drives et cohabitations sociales nocturnes, le son se retrouvecomme souvent au cur des dbats, souvent d'ailleurs comme une nuisanceplus que comme une potentielle source de plaisir.

    Les deux promenades sonores programmes dans cette journe tentaient deproposer une approche moins enclin aux constats radicaux d'une villebruyante, sonorement agressive, archi pollue par des flots de dcibelsincontrls...

    Prendre du recul en effectuant lentement, un tour du quartier, passant d'unerue anime des cours intrieures, au travers des ilots d'immeubles, sous lavoute couverte d'une galerie marchande, dans des escaliers reliant diffrentspoints du quartier... dans le but avou de montrer une grande diversitacoustique qui ne soit pas forcment si violente que ce que l'on en dcrit.

    Laisser des a priori aux vestiaires avant de partir en coute, la ville n'est passystmatiquement synonyme de surenchre sonore alors que la campagne estun havre de paix o les concerts d'oiseaux ravissent les oreilles... Je force letrait dessein, quoique...

    Et il s'avre que le cheminement choisi relativise effectivement le discours partrop catastrophique d'une cit enfer acoustique voue aux Gmonies via destorrents de vacarmes discordants.

    Des passages o les pas rsonnent et marquent des espaces clairementressentis, o les voix s'entendent et se font entendre parfaitement, sans forcer,o les oiseaux sont (presque) aussi chantants que dans les forts du Massif duPilat voisin, o les voitures n'envahissent pas (trop) le paysage mme si elles yont leurs places d'incontournables citadines... Certes, pas un paradis del'coute, une sublime symphonie sans fausse notes aucunes, mais en tout casune atmosphre coutable sans stress, voire souvent avec un rel plaisir. Il

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  • faut pour cela jouer du contraste, serpenter dans le dedans-dehors, ou dansl'extrieur-intrieurs des ilots, explorer les passerelles, les coursives, lesescaliers et les ruelles permettant de belles car subtiles porosits entresdiffrentes ambiances. Il faut entendre les changes, via les fentres ouvertesdans une belle journe douce et ensoleille, des espaces privs et des espacespublics, radios, voix, cuisine en prparation, espaces qui communiquent touten semblant se respecter mutuellement. Il faut entendre les percussionsrverbres de chantiers de restauration de faades, ainsi que les voix desouvriers qui se rpercutent sur d'autres murs, semant parfois, par le jeu deschos, la confusion chez l'couteur public quand leur localisation.

    Ils faut entendre ces milles sonorits du quotidien qui rythment et fabriquentde la vie, plus que de la violence, en tous cas ce jour l. Michel Risse, grandcouteur public s'il en fut, me disait un jour que c'est en ouvrant sa fentre surles bruits de Paris qu'il se sentait bien vivant, appartenant une communautcitoyenne que les sons de la ville, s'ils agressent parfois, tendent aussi unirdans une coute partage. Je repensais ces paroles ce jour l, en enmesurant toute leur vracit.

    Un sociologue spcialiste de la fte urbaine, participant l'une des deuxbalades exprimait son plaisir d'avoir parcouru ces lieux dans une postured'coute en mode doux, lentement, comme un geste en rsistance face l'agitation chronique que nos environnements sociaux et professionnelstendent nous imposer.

    9 - Toulouse au pas pas (Du Capitole au quartier Jean Chaubet) 25 personnes (1H15) dans le cadre du Festival mergences 2013

    Dans le cadre du festival Emergences, impuls par l'association PatchWorks,Desartsonnants est invit proposer une dambulation urbaine, l'coute deToulouse.

    Il s'agit de relier le centre historique, la trs clbre Place du Capitole, unquartier o se situe le centre Laque Jean Chaubet, accueillant les promeneurscoutants pour une petite causerie autour des marches sonores.

    Comme d'habitude, un reprage de l'itinraire est effectu en amont.

    Les possibilits de parcours sont riches, et constituent un condens assezreprsentatif de situations auriculaires urbaines, ce qui ne peux que rjouir lesoreilles de celui qui est en charge de proposer cette promenade.

    Ds le dpart, nous nous trouvons dans un tissu sonore trs riche, sanstoutefois se montrer agressif. Voix, fontaine, spectacle de rue l'autre bout dela place ponctuent l'espace en en en dessinant assez clairement lesdimensions, jouant avec de belles rverbrations, dans une ambiance trsvivante, l'image d'un centre ville que les passants accaparent en jouissant deses moindre espaces.

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  • Une petite traverse vers la place Wilson nous amne une autre scne, toutaussi anime, bien que dans de moindre proportions architecturales. Lencore, la fontaine pose un dcor chuintant, tandis que les bancs entourant laplace sont occups par des groupes dont les conversations emplissentdlicatement l'espace. Un mange pour enfants constitue une sorte de phareauditif o se catalysent rires et cris. Un groupe de catalans au verbe haut,nous rappelle la proximit voire les affinits entre les villes de Toulouse etBarcelone.

    Traverse d'un grand boulevard pour emprunter la rue des 7 troubadours o,trs rapidement, tout devient plus feutr. Un beau calme urbain y rgne,faisant entendre les moindre pas, activits des commerces, climatisations etventilations... La ville peut, on le constate ici, radicalement changer d'image enquelques pas !

    Dbouch sur le canal du midi, avec une circulation routire qui revient sur ledevant de la scne. Elle semble toutefois apaise par la vue de l'eau, d'unevgtation richement colore, de promeneurs flnant sur le cheminpitonnier... La vue et l'oreille se contrediraient-elle, o informeraient-ellesdiffremment le promeneur, tentant par une trange synesthsie de retrouverun certain quilibre sensoriel, dans une exprience esthtique plus ou moinsvolontairement recherche?

    Nous longeons maintenant une voix ferre se lovant dans une fosse trs encontrebas. Le passage de trains trs faible vitesse rveille l'espace sansl'envahir compltement, proposant une varit de sons assez incroyable, ogrincements martlements, sifflements, chuintements, prsentent unvocabulaire sonore propre rjouir nombre de compositeurs musiciens oupreneurs de sons frus de paysages lectroacoustiques.

    On emprunte ensuite une rue trs troite et pentue o l'architecture resserremet nouveau en avant chaque bribes de conversations, chaque chappesonore s'exfiltrant de fentres ouvertes.

    Arrive au terme de notre promenade, nous dbouchons sur la place EdgarPinel, un charmant petit parc urbain o de nombreux enfants jouent, sous leregard de parents devisant paisiblement sur les bancs alentours. Ambiancetout la fois calme et nanmoins vivante d'un quartier en priphrie du centre.

    Un kiosque musique attire immdiatement mon regard et je vais le fairesonner de la voix sans plus attendre - et l, Oh surprise !

    Au centre de cet architecture logiquement construite pour diffuser de lamusique en espace public, le son devient trangement diffract, la foisamplifi et distordu par une multitude d'chos, de dlais acoustiques qui luidonnent de curieuses teintes mtalliques. C'est trs drle et excitant de jouerde la voix avec ces effets, mme si j'imagine que les musiciens se trouvant aucentre devaient normment souffrir de cette tranget acoustique. Il faudraque je teste comment on peroit les sons de l'extrieur, ct public.

    Le reprage termin, je suis assez combl par ce parcours qui prsente unvritable catalogue de situations auriculaires urbaines, partant d'un picentre

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  • trs dense, et arrivant progressivement vers un extrieur qui se dspaissit aufil de la marche pour arriver cet trange kiosque permettant de faire sonnerde faon trs ludique une "architecture d'coute".

    Une promenade de plus ma collection, que je pourrais ds demain fairepartager toute oreilles curieuses de sonorits urbaines.

    10 - Festival Electroxel#3 - Nantes 2013 - balades sonores - Thmes et variations

    Durant le festival Electropixel#3, organis sur l'Ile de Nantes par l'associationAPO33, Desartsonnants tait invit chaque jour proposer une balade sonore,ainsi qu'une rencontre avec les promeneurs coutants, autour de cettepratique. Au dpart, plusieurs itinraires sont envisags. A l'arrive, c'est unseul circuit qui est propos, devant sa richesse intrinsque, les variations trssensibles d'un jour l'autre, d'un public l'autre. Successions de galeriespeuples de touristes dont beaucoup d'enfants, rverbrantes souhaits, depassages entre des entrepts et ateliers dserts, d'une cour intrieure avecune fontaine, d'un parking souterrain, d'installations sonores en espace publicdont une trs belle de Rolf Julius... Tout y est pour le bonheur de l'coute.

    Marche lente, arrt dans une entre de garage dont la forme vase donnel'impression d'tre au fond d'un pavillon acoustique focalisant, dans une oreillegante, auscultation de fontaines, d'une paroi bulles glougloutantes encollant l'oreille la vitre, ventilation modulante cache derrire un buisson, unparking o des voiture et pitons passent sur des grilles situes juste sur nosttes, des situations d'coute mettre entre toutes les oreilles. Et bien d'autredifficiles dcrire.

    Public d'artistes, de promeneurs non avertis, de visiteurs d'Electropixel, de 5 15 personnes, chaque journe est trs diffrente dans les ractions, lesdiscussions, les retours d'exprience des promeneurs... Le vent change etforcit les deux dernires journes, on entend de nouveaux sons absents jusquel, des feuilles sches glissent le long d'alles dsertes avec des raclement quidessinent un bel espace en mouvement, un arbre en pot chante et bruissejoliment en y collant l'oreille, et une fin de journe, les avions survolent le sitetrs bas pour atterrir l'aroport voisin. On consolide une communautd'coutants dont l'nergie est presque tangible, trange cohorte ou sectesilencieuse aux yeux des personnes croises sur le parcours qui nous regardentdubitativement. On construit ensemble une vritable installation sonoreurbaine ! Le fait de parcourir 5 fois un itinraire repr me permet de mesurer la fois les constantes et les variations sonores du site, d'adapter chaque jour,en fonction des ambiances, des vnements, des publics, des dcouvertesfortuites, la faon de dambuler, de mnager des arrts appropris, d'crire insitu un parcours qui droule son histoire fleur de paysage, fleur d'oreille...

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  • 11 Balade sonore quartier de la Guillotire Lyon avec des tudiants de l'cole d'architecture Fvrier 2014 2X15 tudiants

    Quelques impressions sonores aprs une matine de balade dans le quartier dela Guillotire, Lyon, avec deux groupe d'tudiants architectes.L'objectif :raliser une "carte sensible", en prambule un TD autour de l'analyseurbaine.Un itinraire donn, effectu de concert, d'environ 2, 5km pour 2heures de dambulation urbaine. Donc deux parcours identiques, soit un alleret un retour, en mode pendulaire, pour ainsi accompagner deux groupes. Unitinraire deux voix, avec une urbaniste et un promeneur coutant, quiconvoque tant l'coute que le regard, implique le fait de se situer dans un lieu,de s'en immerger, de le (re)sentir sans pour autant en faire une analyse tropdidactiquement enfermante, voire sclrosante. L'aubaine du jour, un ciel d'unbleu limpide, une clart presque scintillante, une temprature agrable, deslumires faire plir d'envie Gaugin ou Van Gogh ! Surtout celles du matin,vers 8 heures. Premier constat, effectuer un parcours d'coute dans un senspuis dans l'autre change radicalement la perception des lieu, tel point qu'onpourrait croire emprunter un tout autre chemin ! La vue, les points de vue, trsassocis l'coute, aux points d'oue, sont totalement mtamorphoss,nonobstant les changements dus l'heure qui avance, aux activits qui sedensifient. Deuxime constat, effectuer une dambulation sur un laps detemps assez long, 4 heures entre 8 et 12 heures sans interruption, sorte depetite randonne urbaine, permet, au-del de l'immersion, de constatercombien un paysage volue au fil du temps. Cela peut paratre vident, etpourtant, le vivre est autre chose que l'imaginer. Tout d'abord l'veil de laville. 8 heures du matin, de nombreux commerces sont encore ferms, lespassants assez peu nombreux, la temprature frache et les sons pluttfeutrs, hormis un camion poubelle ou de livraison qui vient secouer un peuviolemment cette douce torpeur matudinale. Puis un long crescendo, lui aussiagit de soubresauts, se matrialisant l'oreille par un phnomned'amplification progressif, des strates sonores qui s'accumulent, un paysagesonore qui devient de plus en plus dense, compact, une rumeur urbaine quis'affirme, des volets mtalliques des boutiques qui secouent l'espace de leursrles grinants, en se levant comme contre-cur... Des voix plusnombreuses, diversifies aussi, nous traversons le "quartier chinois", puis celuide la Guillotire plus mditerranenne, on entend vraiment la mixit duquartier d'autant que, midi approchant, on en sent les odeurs apptissantesqui s'chappent des restaurants et piceries pour envahir progressivement larue. Le quartier asiatique, nouvel an oblige, se pare d'une multitude deguirlandes aux normes boules rouges pompons dors, suspendues entresles immeubles, colorant la rue, et semblant donner aux sons-mmes unecouleur rebondissante, festive, bigarre. Bien sr, cette amplificationsonore,marque de plus en plus de mouvements physiques, n'est pas d'unergularit linaire. Il suffit de passer l'arrire d'une place pour se couper, enquelques mtres, en quelques secondes, d'un flux circulant, ou bien qu'un feutricolore ne vienne interrompre, pour un instant, sur un quai le grondementvoiturier. Mais cette densification reste nanmoins trs sensible, quasi

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  • palpable. Dans cette dambulation, pour qui sait les apprhender, des tempsforts, des instants magiques ! Sous un pont du Rhne, de nombreux oiseauxnichent sous le tabouret mtallique, et forment une incroyable barrire deppiements fbriles; une guirlande sonore suspendue, qui s'estompe ds quel'on pntre sous le pont. Ce pont routier nous plonge rapidement dans uneombre frache et rverbrante, o les sons prennent plus d'espace, deprofondeur, entrecoups par une belle percussion trs grave, produite l'entre du pont par des voitures franchissant un joint mtallique. Toudoum,toudoum ! - silence, ou presque - Toudoum, toudoum ! Le fleuve est quand lui silencieux, malgr l'norme flux aquatique charri cette poque pluvieuse.Il faut attendre le passage de deux cygnes nageant pniblement contre-courant, pour entendre clairement les clapotis et remous provoqus par leurlutte contre les flots. Autre lieu autre ambiance, un arrire de place coup d'ungrand axe trs passager par un immense btiment de verre en arc-de-cercle.Un lieu propice un point d'oue. Des voix rverbres, lointaines, d'autrestrs proches, des passages furtifs ou affirms, rapides ou non, des fentresd'coute portant l'oreille bien au-del de la vue, une ambiance riche, assezinclassable, sorte d'agitation tranquille, que j'adore tout particulirement - unoasis auriculaire mettant agrablement nos sens en veil... Qui plus est sil'coute est collective, recueillie.

    J'aurais pu voquer bien d'autres lieux, places, dents creuses, espacespopulaires bouillonnants entre commerces alternatifs et refuges d'artistes, letout menacs d'une gentrification galopante... Mais il faut s'y promener poursentir l'me d'un des dernier

    quartiers spcifiques lyonnais, avec toute sa diversit et son identit fleur depeau ! Dernier constat . En fait, devant l'offre parfois plthorique des baladessonores en tous genres, dont certaines que j'ai pu tester, je trouve que labeaut sonore des lieux, le frmissement sensible qu'ils peuvent nous procurerest bien souvent baillonn par un flot d'intentions et de paroles pdagogiques,didactiques... L'ambition de vouloir tout expliquer, analyser, srier, touffe leplaisir d'un corps de promeneur coutant se livrant un bain sonore vivifiant,et finalement rduit de beaucoup le message pdagogique initialement vis. Ecrire un beau parcours d'coute qui marquera durablement les participants, etles incitera couter autrement par la suite, exige de prserver des espacesde liberts o la posie des lieux ne sera pas masque par un discours tropthorique et envahissant.

    12 Balade pluvieuse, 30 tudiants en Design Graphique Quartier des terreaux Lyon Atelier Ville sonore - 1 heure

    Un vendredi, matine trs fraiche et pluvieuse.

    RDV avec une trentaine d'tudiants de Design graphique pour une baladesonore lyonnaise, quartier des Terreaux, entame d'un atelier autour de "la villesonore". Dernier jour d'tude avant les vacances d'hiver.

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  • Des tudiants peu enthousiastes, voire quelque peu rticents l'ide de sortirles oreilles dehors...

    Et pourtant, comme souvent, la magie opre jusqu' en oublier la pluie, etmme trouver des lieux o elle prend une magnifique prsence.

    Un passage traboulant large et haut, o une percussion aquatique rsonne surdes tables mtalliques.

    Une place trs minrale o des gouttes rythment l'espace de plocs sonoresavec une nergie acoustique surprenante.

    Un arrt improvis sous un chafaudage mtallique o la pluie "fait desclaquettes" au-dessus de nos ttes, pour citer une belle expression d'un grandchanteur disparu.

    Des voitures qui chuintent le paysage en longues traines liquides.

    Une fontaine monumentale qui rythme l'espace de ses chutes brises sur desreliefs de marbres, en mme tant que son approche masque et gomme quasitotalement tout autres source sonore.

    Concerto aquatique tout en finesse, o la diversit et la richesses des sourcesn'ont d'gal que la curiosit et l'merveillement de l'coutant.

    Ce n'est pas la premire fois que j'aime couter la ville sous la pluie, sesambiances si particulires, mais cette promenade confirme, si besoin tait, cetintrt pour une "coute liquide" dont la posie est d'une indniable beaut.

    Mme les tudiants, au-del de leur rticence initiale, en ont convenu. L'atelierpeut donc se poursuivre, aliment entre autre par l'nergie d'une premireapproche immersive, sensible, et avec la prsence d'une belle pluviositcomplice.

    En cours de rdaction ou venir

    Balade sonore Tananarive, dans le cadre du festival du film court deTana

    Balade sonore Vienne (Autriche) Dans le cadre du festival ListeningCities

    Balade sonore Orlans, dans le cadre d'un workshop autour de l'espacesonore l'cole suprieure d'Arts et de Design

    Balade sonore quartier de Vaise Lyon, de la gare aux quais de Sane

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    EXPRIENCES SENSIBLES ET DAMBULANTESRelevs de balades sonores carnets de notesExpriences d'coutes en marches1 - Dans le clotre de l'hpital de L'htel Dieu Lyon, balade solitaire nocturne (Une heure trente environ)2 - Balade sur les pentes de la Croix-Rousse Lyon, festival Bellevue, 6 personnes (Deux heures environ)3 - Balade forestire nocturne, Festival Les Temps d'Art est lev, Saint-Martin en Haut, 15 20 personnes (2 heures environ)4 - Balade autour du quartier des Terreaux (Lyon) avec une quinzaine d'tudiants designers, dans le cadre d'un atelier design sonore, 20 participants (une heure trente environ)5 - Balade sonore chalonnaiseAvec 12 tudiants de l'cole d'Art Mdia Fructidor Chalon sur Sane (2H30 heures environ)6 - Balade dans une universit dijonnaise, rencontres altermondialistes et cologiques, 15 participants des rencontres (Une heure environ)7 Balade dans la ville de Mons (Belgique), dans le cadre du festival d'art sonore City Sonic, 15 personnes (Une heure trente environ)8 Balades dans un quartier de Saint-Etienne (Centre Deux), dans le cadre d'une rencontre professionnelle Ville festive, 10 personnes (Une heure environ)9 - Toulouse au pas pas (Du Capitole au quartier Jean Chaubet) 25 personnes (1H15) dans le cadre du Festival mergences 201310 - Festival Electroxel#3 - Nantes 2013 - balades sonores - Thmes et variations11 Balade sonore quartier de la Guillotire Lyon avec des tudiants de l'cole d'architecture Fvrier 2014 2X15 tudiants12 Balade pluvieuse, 30 tudiants en Design Graphique Quartier des terreaux Lyon Atelier Ville sonore - 1 heure