avantage concurrentiel et compétences clées

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Avantage concurrentiel et comptences cls : exprience dune recherche sur le secteur bancaireric LAMARQUE Universit de ToursClassification JEL : L190, G210 Correspondance : CERMAT IAE de Tours 50, avenue Jean Portalis BP 0607 37206 Tours Cedex 3 Tl : (33) 02.47.36.10.10 ; Fax : (33) 02.47.36.10.11 Email : [email protected] Rsum : Les travaux empiriques cherchant reprer vritablement les comptences sont relativement rares mais les rsultats contribuent clairer les sources de lavantage concurrentiel, voquer de vritables m thodologies didentification et parfois remettre en cause la possibilit mme de cette identification. Aprs une synthse des travaux, une attention particulire est porte au secteur bancaire travers une prsentation dtaille des rsultats dune recherche initie en 1995 et renouvele en 1999. Ces rsultats permettent dengager une rflexion sur les problmes poss par cette identification. Abstract : Empirical research with a purpose of identifying a firms competencies is quite rare even if results allow for a highlighting of the roots of competitive advantage, discussion of identification methodologies of competencies and, sometimes, questioning of the possibility of such identification. Following a synthesis of research, a particular attention is paid to the French banking sector through a detailed presentation of a research started in 1995 and repeated in 1999. Results allow for a discussion of the problems related to identification of competencies and their ability to give a good representation of competitive advantage. Keywords : competitive advantage competence banking.

Mots cls : avantage concurrentiel comptences activit bancaire.

Finance Contrle Stratgie Volume 4, N 1, mars 2001, p. 63 88.

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Le discours des tablissements financiers traduit, lheure actuelle, une volont de matriser lensemble des flux financiers associs leurs clients. Ils considrent en effet que lavantage concurrentiel dpend de leur capacit rpondre la totalit des proccupations financires de manire avoir une matrise globale de la relation [M. Ferrary 1997]. Ces stratgies dapproche globale trouvent leur justification la fois au niveau marketing et au niveau financier. Le marketing des services a mis en vidence les avantages dun service global orie nt vers le client [A. Meidan 1996] en considrant que celui-ci doit tre apprhend dans la totalit de ses besoins. Cette approche sest traduite par la proposition de packages dont lobjectif est de fidliser la clientle et de vendre des services plus nombreux que sils avaient t proposs sparment. Dans la continuit de cette approche, les partisans du relationship banking [O. Jackson 1993] introduisent la dimension temporelle dans la relation banque-client. Celle -ci sinscrit dans la dure pour que se dveloppe une relation de confiance ncessaire lchange. Sur un plan financier, les stratgies dapproche globale se justifient par la ralisation dconomies de gamme possibles par ltalement des cots fixes sur un plus grand nombre de produits et par la vente de certains services au cot marginal [I. Walter 1988]. Lexistence de ces conomies a longtemps justifi les stratgies de diversification et les politiques de ventes croises dans beaucoup dtablissements, notamment par la proposition de services non bancaires. Toujours dans le domaine financier, ces stratgies dapproche globale tmoignent dune volont de crer une relation tendue avec la clientle pour amliorer la qualit de linformation dtenue sur celle -ci et, ainsi, mieux analyser le risque [L. Nakamura 1993]. Elles attestent aussi des tentatives engages pour crer des cots de changements importants chez les clients (switching costs), ceux dtenant plusieurs produits dun mme tablissement hsitant gnralement changer de banque. Ces deux sries de justifications nabordent cependant pas la question des fondements de ces stratgies dapproche globale et, plus gnralement, des vritables sources de lavantage concurrentiel dans la banque. Lanalyse des ressources et des comptences de lorganisation constitue une approche renouvele de cette question, proccupation im-

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portante pour les chercheurs et les praticiens en management stratgique [G. Koenig 1999]. Ces concepts ont fourni une explication du succs de nombreuses firmes industrielles ou de services, lanalyse interne prenant alors une place dominante dans lanalyse stratgique [B. Wernerfelt 1984 ; C.K. Prahalad, G. Hamel 1990]. Ltude de la banque dans ce contexte contribue fournir un clairage sur les principales comptences dont la matrise permet dobtenir une position dominante dans le secteur. La thorie des ressources et des comptences trouve son origine dans les travaux de E. Penrose [1959] et de lcole de Harvard [LCAG 1969]. Depuis le milieu des annes 80, diffrentes dfinitions ont t proposes pour chacun de ces concepts et, dans le cadre de cette recherche, il est ncessaire de prciser celles auxquelles lon se rfre. B. Wernerfelt [1984, p.132] dfinit les ressources comme des actifs tangibles et intangibles associs de manire semi-permanente la firme . Ces ressources sont plus ou moins complexes construire, ou acqurir, ce qui dtermine leur pouvoir de diffrenciation. Une comptence est plutt dfinie comme une capacit raliser une tche ou une activit grce aux ressources [R.M. Grant 1991]. Elle dsigne une combinaison de ces dernires en faisant appel des processus organisationnels et des savoir-faire colle ctifs [R. Amit, P.H.J. Schoemaker 1993]. La consquence est quune ressource peut tre considre comme un ensemble fini dactifs pouvant circuler sur un march alors quune comptence ne peut tre clairement borne et ne peut circuler sur un march. Retenir ces deux conceptions qui apparaissent assez largement majoritaires dans les travaux sur cette question1 prsente lavantage de distinguer assez clairement les deux notions pour la suite de linvestigation, lment essentiel pour la comprhension, par les interviews, du cadre conceptuel auquel lon se rfre. Lobjectif premier de cette recherche est didentifier les comptences source dun avantage concurrentiel durable dans la banque. En effet, un des principaux domaines dapplication de la thorie des ressour-

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ces et comptences rside dans ltude des conditions de lavantage concurrentiel [G. Koenig 1999]. La ralisation de cet obje ctif passe tout dabord par une dfinition du cadre mthodologique avec lequel on peut procder ce travail (section 1). Ensuite, pour apprcier le caractre soutenable dun tel avantage, une analyse de lvolution des comptences bancaires entre 1995, date des premires investigations, et aujourdhui est apparue judicieuse dans un contexte de changement rapide de lenvironnement (section 2). La comparaison des rsultats obtenus a deux instants donns fournit une premire indication sur ce caractre soutenable mais soulve un certain nombre de questions autour de la validit des rsultats obtenus. Lanalyse du secteur bancaire, au-del de lamlioration de sa connaissance, est loccasion dengager une discussion sur la capacit de la thorie des ressources et des comptences et des mthodologies didentification donner une reprsentation prcise de lavantage concurrentiel (section 3).

1.

Lidentification des sources de lavantage concurrentiel

Pour la thorie des ressources et des comptences, lavantage concurrentiel dune entreprise rside dans ses ressources et comptences [J. Barney 1990, 1995]. Dans ces conditions, lanalyse interne devient dominante, ce qui constitue une rupture avec la conception traditionnelle fondant lavantage concurrentiel sur le meilleur positionnement produit/march [M.E. Porter 1985]. Centrer la mthodologie sur les aspects internes de la firme suppose cependant une rflexion sur le niveau danalyse retenir au sein de celle-ci mais galement sur les avantages quil peut y avoir combiner analyse interne et analyse externe.

1.1.

Le choix dun niveau danalyse dans lorganisation

Il nexiste pas de critres prcis pour effectuer ce choix et le chercheur doit davantage sadapter au contexte dans lequel il ralise son1 On pourra se rfrer aux travaux de R. Sanchez et al. [1996] qui font une syn-

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tude et aux organisations quil peut analyser. Mme si peu de mthodologies ont t explicitement proposes, on peut distinguer jusqu prsent trois niveaux danalyse pour procder une identification : lentreprise, le produit, le mtier ou le domaine dactivit. Lentreprise comme unit danalyse : les mthodologies fondes sur lanalyse de lentreprise ont t les premires tre dveloppes. Les recherches se sont dabord centres sur ltude des ressources intangibles et lidentification de domaines de comptences. R. Hall [1992], au travers dune enqute auprs des dirigeants issus de diffrents secteurs dactivit (services, production industrielle,), a mis en vidence limportance de certaines ressources dans la russite de leur entreprise. Lintrt du travail rside dans la proposition dun cadre gnral dans lequel sinscrivent les ressources en distinguant diffrents domaines de comptences (culturel, fonctionnel, rglementaire et de positionnement). B. Mascarenhas et al. [1998] ont galement procd une analyse de grandes entreprises et ils ont distingu trois grands domaines : la supriorit technologique, la fiabilit des processus et la solidit des relations avec les tiers. Tableau 1 Typologie des comptences (extrait)Firmes Siemens Excellence technologique Savoir-faire dans les semiconducteurs Excellence de proces s u s Fabrication fiable, de haute qualit et prix raisonnables, perp tue par un programme matre-apprenti. Longue tradition de gestion du processus dinnovation Possde dexcellents sp- Normes trs strictes et cialis tes fonctionnels pour contrle trs strict limitant le la recherche et la fabricaris que dincident avec les mtion dicaments. Leader au nombre dautorisations de mise sur le march Excellence relatio nnelle Liens troits avec les banques allemandes, facilitant laccs aux capitaux pour financer les achats des clients Liens serrs avec la profes sion lui permettent dattirer de nouveaux t alents. La crdibilit que lui apporte la food and drug administration favorise les autoris ations dans les autres pays.

Merck

thse du courant sur le Competence-Based Management .

68Citicorp Connue pour son savoirfaire financier aux tats Unis et pour ses produits sophistiqus

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Rseau mondial qui est en mesure de fournir ses 100 millions de clients nimporte quel service financier, nimporte ou dans le monde et dans nimporte quelle devise, moindre cot et sans ris que Source : B. Mascarenhas et al. [1998]

Met en contact ses clients locaux avec son rseau mondial dtablissements affilis

Les rsultats restent toutefois assez gnraux (tableau 1). Les noncs proposs ne donnent pas de dfinitions prcises des comptences possdes par telle ou telle firme. Ces dfinitions relvent plus du concept de formule stratgique du succs [B. Trgoe, J. Zimmerman 1982 ; A.C. Martinet 1983] que de celui de comptence. Leur caractre trs gnral laisse penser quelles ne constituent pas une explication suffisamment prcise de lavantage concurrentiel. Le produit comme unit danalyse : C.K. Prahalad, G. Hamel [1990] ont plac le dbat au niveau du produit. Le dcoupage de lentreprise en trois niveaux (comptences centrales, produits centraux et produits finaux) est dterminant car il met en vidence des espaces concurrentiels diffrents. Ainsi, au lieu de lutter au niveau de certains produits finaux, il est tout fait possible dacqurir une position dominante sur un produit central intervenant dans la production de ceux-ci. Ces produits centraux tiennent une place essentielle car ils sont la traduction physique des comptences centrales possdes par lentreprise. Procdant par tudes de cas, ils ont pu mettre en vidence les conditions du succs de certaines grandes entreprises : Honda grce son savoir-faire dans les moteurs et les transmissions a pu se dvelopper dans lautomobile, les motos, les tondeuses ou les gnrateurs ; Canon sest appuy sur ses comptences en mcanique de prcision, optique de haute prcision et micro-lectronique pour la plupart de ses produits. M. Tampoe [1994] sinscrit dans la mme logique en proposant une mthodologie fonde sur la distinction entre produits cls et produits secondaires. Lanalyse des premiers doit permettre lidentification des comptences essentielles leur conception (figure 1). Cette mthodologie a t mise en uvre au sein dune entreprise dassistance automobile. Les comptences identifies sont dfinies en

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termes doutils de conception, de systmes de contrle, dingnierie mcanique. Figure 1 Dmarche didentification des comptences

Source : M. Tampoe, [1994].

Le mtier ou le domaine dactivit comme unit danalyse : niveau intermdiaire entre lentreprise et les produits, lintrt de procder une analyse par mtier ou domaine dactivit est de fournir l s bases e dune mthodologie didentification des comptences. Le point essentiel est que le mtier se veut un concept intgrateur des dimensions internes et externes de lentreprise (figure 2). Le mtier exprime la spcificit de lentreprise intgrant son systme de valeurs, ses rgles internes, sa carte de pouvoir, tout ce qui fait son identit [Strategor 1988]. Cette notion englobe donc la fois les concepts de savoir-faire, de comptence, de base dexprience ou de culture. Cette approche permet didentifier sa force interne et de la

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mettre en adquation avec les opportunits identifies. Cette logique est la base des travaux de R. Amit, P.J.H. Schoemaker [1993] mme si ceux-ci proposent une analyse assez subjective de lenvironnement et privilgient dabord les ressources et comptences possdes pour voir dans quelle mesure elles permettent dobtenir un avantage concurrentiel. Figure 2 Le mtier : rencontre dune offre et dune demande

Source : A.C. Martinet [1990].

Retenir le mtier ou un domaine dactivit pour procder une analyse des comptences oblige combiner une analyse externe et interne de la firme ce qui permet une dfinition plus prcise de celles-ci [E. Lamarque 1999]. Plus gnralement, comme le montre les rsultats de R. Henderson, I. Cockbrun [1994] sur lindustrie pharmaceutique2 ,

2 Au travers dun modle conomtrique, ils mettent en avant la productivit de la dcouverte de nouveaux mdicaments comme comptence cl. Celle -ci provient de la possession dexpertises spcifiques dans certaines disciplines de la

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travailler au niveau dun secteur dactivit permet de contextualiser les dfinitions des ressources et comptences, et offre de vrais moyens dobserver.

1.2. Lidentification des ressources et comptencesLtape pralable de la mthodologie consiste dans la dfinition des mtiers de lentreprise puis lidentification se fait en deux temps. Tout dabord, lidentification des ressources et comptences que lentreprise mobilise pour e xister et se dvelopper sur un mtier ou un domaine dactivit. Ensuite, la qualification de celles-ci pour valuer dans quelle mesure elles sont bien la base de lavantage concurrentiel.

1.2.1. Larticulation de lanalyse interne et de lanalyse externe partir dun dcoupage de lorganisation en mtiers, il est ncessaire de procder une analyse des caractristiques de lenvironnement pour dgager les facteurs stratgiques de lindustrie au niveau de chacun deux. Cette premire tape facilite le travail des personnes auxquelles il est demand de dfinir les comptences associes chaque mtier permettant de rpondre ou de satisfaire ces facteurs. Cette articulation peut se rsumer par la figure 3. partir des profils de comptences construits pour chaque mtier, une analyse comparative permet de reprer celles partages par plusieurs mtiers. Leur rle central dans la stratgie de lentreprise peut ainsi tre mieux identifi et mieux compris. Articuler les deux analyses se justifie dans le cadre du concept de mtier qui se veut une intgration de celles-ci. Cela est galement justifi du point de vue de ltude de lavantage concurrentiel. En effet, J. Alberto Sousa de Vasconcellos, C.K. Hambrick [1989] proposent une analyse de la performance fonde sur la confrontation effective des facteurs de succs de lindustrie et des comptences de lentreprise. En

chimie mais aussi de la capacit des entreprises dentretenir une circulation de linformation entre les units de lentreprises et avec son environnement.

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dautres termes, l'entreprise doit dvelopper des comptences de m anire assurer cette confrontation comme le suggre la figure 4. Une fois le travail didentification ralis chacune des comptences doit passer au crible des critres permettant de juger du caractre soutenable de lavantage concurrentiel. Figure 3 Articulation de lanalyse interne et de lanalyse externe

Source : R. Amit, P.J.H. Schoemaker [1993].

Figure 4 Origine et implication des facteurs cls de succs

Source : J. Alberto Sousa de Vasconcellos , C.K. Hambrick [1989].

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1.2.2. La qualification des ressources et comptencesParmi les comptences identifies au sein dune organisation, certaines contribuent plus que dautres la construction dun avantage concurrentiel durable. En dautres termes, il sagit de reprer les comptences distinctives par rapport des comptences de base ncessaires lexistence de la firme mais ne permettant pas dassurer sa comptitivit. Ce travail de qualification seffectue travers une grille de lecture laquelle ont contribu plusieurs auteurs. Cette grille est constitue de critres exognes et endognes la firme. Les critres exognes sont relatifs la raret et aux possibilits de substitution [J.B. Barney 1990] : la raret indique quun nombre rduit de firmes peut accder ou acqurir une ressource ou une comptence. Ce caractre suppose une difficult clairement en dfinir les contours ce qui rend dlicat toute tentative de transfert entre organisations [S.J. Winter 1987]. Un march imparfait contribue, en plus, renforcer cette raret. Des droits de proprit exclusifs, lexistence dactifs spcifiques sont des exemples souvent avancs [S.A. Lippman, L.P. Rumelt 1982] ; les possibilits de substitution doivent tre rduites ou difficilement accessibles ; en dautres termes le contournement de la comptence ou de la ressources ne doit pas tre possible. Les critres endognes sont relatifs la difficult dimitation, la capacit dappropriation et de valorisation. La difficult dimitation tient au processus de conception et de mise en uvre de la comptence par lentreprise. Elle est relle sous certaines conditions 3 : Les dsconomies lies au temps : laccumulation dactifs stratgiques sur une longue priode rend difficile toute tentative dun concurrent pour rattraper son retard. Lavantage de masse dactif : il traduit lide quil est plus facile de dvelopper des actifs stratgiques si lon possde dj un stock important de ce type dactif.

3 Pour une synthse des auteurs sur ces points voir J.L. Arrgle [1996]

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Les interconnexions entre actifs : la possession dun actif stratgique implique le dveloppement dautres actifs qui permettent de lexploiter. On parle dactif complmentaire ou li. Lrosion des actifs : il faut entretenir en permanence lactif pour viter sa dprciation et viter des imitations. Lambigu t causale : le caractre tacite, la complexit et la spcificit de certains actifs les rendent impossible imiter et mme identifier pour un concurrent. La capacit dappropriation traduit la capacit de la firme organiser ses processus de manire bnficier entirement des retombes de la possession et de la mise en uvre de ses ressources et comptences (rentes) [M.A. Peteraf 1993 ; J.B. Barney 1995]. La capacit de valorisation suppose que lentreprise peut rpondre des opportunits de marchs, savoir que la comptence contribue effectivement la ralisation dun besoin non satisfait ou non exprim. Autrement dit, elle doit contribuer significativement la valeur du produit final pour le client [G. Hamel 1994]. Lensemble de ces critres se conjuguent pour donner lavantage concurrentiel un caractre durable et soutenable [I. Dierickx, C.K. Cool 1989 ; D.J. Collis, C.A. Montgomery 1995]. Ltude des profils de comptences tablis deux priodes diffrentes doit nous permettre de juger de ce caractre. Par ailleurs, la thorie des ressources et comptences conforte dans lide que cet avantage reste difficile raliser et que lensemble des critres sont difficiles runir et invite examiner avec plus dattention la dotation en facteurs de la firme [S.A. Tywoniak 1997]. Le secteur bancaire a t retenu comme terrain dinvestigation.

2.

Application au secteur bancaire

Lanalyse des comptences bancaires sest effectue dans un premier temps dans le cadre de ltude des mtiers bancaires en 1995. Elle a t renouvele en 1999 pour rpondre lobjectif danalyser le caractre soutenable de lavantage concurrentiel li lvolution des comptences.

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2.1. La recherche de 1995Lanalyse des mtiers bancaires travers trois tudes de cas a permis de mettre en uvre la mthodologie didentification des ressources et comptences fondes sur larticulation des analyses interne et externe de lorganisation [E. Lamarque 1996]. Pour respecter le caractre intgrateur du concept de mtier, lidentification sest faite en deux temps. Tout dabord, pour chaque mtier bancaire, une liste des principales attentes des clients a t tablie partir denqutes de satisfaction et dtudes [M. Badoc 1986 ; M. Zollinger 1992]4 . Cette liste a t valide au dbut des entretiens Ensuite, ltude des comptences sest faite au sein de la BNP, la Socit Gnrale et le Crdit Agricole qui ont accept de participer la recherche. Dans un cas pilote 5 seize entretiens semi-directifs ont t raliss auprs de responsables de la direction gnrale, direction de la planification, tudes conomiques et bancaires et responsables de mtiers (gestion mobilire, conservation de titres, financements spcialiss). Les interviews ont dfini les comptences que leur tablissement possdait pour satisfaire les attentes dans les mtiers considrs. Il leur a t galement demand de rflchir aux comptences que dautres tablissements pouvaient possder. Enfin, ils devaient tenter dvaluer le caractre distinctif de la comptence en fonction de leur perception de trois critres : imitable, facilit daccs la ressource ou la comptence (raret), substituable. La dmarche a t renouvele auprs de deux cas de contrle avec dix entretiens dans chacun deux. Les profils de comptences labors au niveau du cas pilote ont t complts par les informations nouvelles issues des cas de contrle jusqu obtenir une saturation empirique4 Par rapport au schma 2, retenir comme seul critre de dfinition des facteurs stratgiques de lindustrie la dimension client peut apparatre rducteur. Il sagit cependant de la volont des acteurs qui ont jug que cette dimension tait la plus pertinente. La rponse aux attentes constituait leurs yeux le point primo rdial de la cration dun avantage concurrentiel. 5 Pour des raisons de confidentialit on ne prcisera pas lequel de ces trois cas a servi de cas pilote.

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constate lissue du troisime cas. Le rsultat est la dfinition de profils pour chaque mtier distinguant comptences de base et comptences distinctives issue dune valuation par les acteurs eux-mmes. Les traitements raliss sur ces profils avec la statistique lexicale et leur analyse ont donn un certain nombre de rsultats concernant les caractristiques de lavantage concurrentiel dans la banque. Ainsi la gestion des risques et larchitecture du rseau de distribution sont ressortis comme les domaines cls dans lesquels on peut construire cet avantage de manire durable a priori [E. Lamarque 1999]. Lorganisation et la conception de systmes dinformation et limage de marque apparaissaient aussi comme des lments distinctifs solides. ct des rsultats empiriques, lanalyse plus approfondie des cas avait permis didentifier des sources plus ponctuelles davantage comme linnovation de service, la matrise technologique ou certaines comptences humaines [M. Zollinger, E. Lamarque 1999] 6 .

2.2. Les rsultats de la recherche de 1999La mme dmarche a t de nouveau entreprise en 1999 pour essayer de juger de la stabilit des dfinitions, en particulier au niveau des comptences distinctives lorigine dun avantage concurrentiel. Les trois mmes banques ont t dans un premier temps tudies dans les mmes conditions et lon a pu constater, nouveau, une saturation des rsultats. Le Crdit Mutuel est venu se rajouter comme troisime cas de contrle. Ltude na pas permis de dgager des lments nouveaux, ce qui tend prouver que le phnomne de saturation se ralise ds le troisime cas. Malgr les modifications apportes lors de lactualisation des profils (synthse au tableau 2 et exemple au tableau 3) lanalyse par la statistique lexicale a montr une stabilit dans les domaines de comptences.

6 Il avait t relev en particulier la culture risque du personnel, la matrise des techniques daccueil ou dentretien o lexistence de cadres dlite leader dans une expertise particulire ou dtenteur dun important carnet dadresses.

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Tableau 2

Modification des profils de comptences entre 1995 et 1999

% dnoncs nouveaux de comptences dans les profils Banque de dtail 32 Distribution de produits 18,5 dassurance 36,3 Banque des PME et Professio n8,3 nels 23 Financements spcialiss 33,3 Interventions en fonds propres 8,3 Ingnierie financire 27,7 Gestion de valeurs mobilires 46,1 Intermdiation financire Conserv ation des titres

Mtiers bancaires

Lanalyse factorielle a ainsi confirm le maintien de la place dominante accorde la gestion des risques et lorganisation de la distribution comme domaines principaux de comptences (tableau 4). La principale diffrence avec ltude de 1995 tient la possibilit dinterprter le quatrime axe comme tant celui de lorganisation et du management de la banque en gnral. Ce changement traduit limportance croissante dans la vision des dirigeants q la comptitivit des tablissements ue bancaires se jouera de plus en plus sur leur mode de fonctionnement et leur organisation au-del des aspects traditionnels de lactivit bancaire. De plus, des dimensions comme limage de marque ou la notorit napparaissent plus comme des lments vritablement distinctifs, la plupart des tablissements de la place ayant atteint des niveaux comparables dans ce domaine. Elles restent par contre des comptences de base ncessaires lexistence dune banque sur le march.

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Tableau 3

Profil de comptences du mtier banque de dtail (juillet 1999)7

Comptences communes lensemble des mtiers de la banque de dtail Comptences de base 1 Possder un rseau physique ou lectronique 2 Connaissance des vnements de la vie du client 3 Segmentation fine du march selon plusieurs optiques : matrise des risques, attentes, rentabilit, comportement : savoir-faire de lanalyste pour interprter la segmentation 4 Formation du personnel la vente et la ngociation 5 Matrise de la connaissance des produits pour rpondre aux exigences de la clientle 6 Capacit mettre en place des systmes informatiques et de les grer 7 Matrise de la technologie dans les produits et services 8 Capacit transposer des produits et services Minitel vers le PC banking 9 Offre combine de plusieurs produits/services : package 10 Mise en place de techniques dcrmage des DAV pour alimenter lpargne 11 Architecture et convivialit des agences 12 Image de marque : srieux et professionnalisme 13 Scurit des transactions, des biens et des personnes Comptences distinctives 14 Rseau suffisamment dcentralis et canal de distribution spcialis : articulation des diffrents modes de distribution : banque accs multiples 15 Maillage optimal du rseau : offre/client/canal 16 Ractivit et proactivit par rapport la concurrence 17 Anticipation des besoins 18 Historisation des vnements de la vie du client, importance du fichier client et exhaustiv it (Systme dinformation) 19 Innovation produit et de process : devancer la concurrence de quelque mois 20 Capacit sengager sur des promesses client (contractualisation) et communiquer de manire transparente sur les conditions de loffre 21 Capacit proposer des produits aux meilleures conditions : tarification concurrentielle 22 Structure des cots de ltablissement / connaissance du cot de revient 23 Capacit sassurer une croissance rgulire pour avoir une position dominante sur son march 24 Management cohrent entre centralisation et dcentralisation 25 Capacit de remise en cause et de ractivit par rapport aux changements de lenvironnement Comptences distinctives spcifiques lactivit Collecte 26 Approche globale du patrimoine financier 27 Capacit ngocier avec le client 28 St ructuration des gammes et diversification des produits 29 Grer et transformer les fonds collects Comptences distinctives spcifiques lactivit Crdits 30 Mise au point de scores et procdures de cotations 31 Facturation correcte du risque pris 32 Trouver des ressources faible cot et de dure approprie

7 Les modifications et les nouvelles dfinitions de comptences par rapport aux rsultats de 1995 sont prsents en italique gras.

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33 Offre diffrencie en fonction de la varit des situations : produits souples, possibilits de rengociations, remboursements sur mesure Comptences distinctives spcifiques lactivit Services 34 Matrise de la facturation : connaissance des cots 35 Qualit irrprochable des services de base : moyens de paiement, assistance, assurance voyage 36 Couplage service bancaire produits dassurance 37 Banque distance, Internet

Tableau 4 Rsultat de lanalyse factorielle sur les profils de comptences en 1995 et 19998Valeur propre Interprtation 1995 0,4542 valuation relatio nnelle du risque 0,4314 Cotation e t facturation du risque 0,4013 Efficacit de la distrib ution 0,3741 Pas dinterprtation poss ible Valeur propre 1999 0,4328 0,4215 0,4118 0,3825 Interprtation valuation relatio nnelle du risque Cotation et facturation du risque Efficacit de la distrib ution Management et organis ation de la banque

Axe 1 Axe 2 Axe 3 Axe 4

Tableau 4 bis Mots caractristiques des axes en 1999Axe 1 Positif Ngatif Positif Capital valu ation Vente Relation Client Risque Particip ation Axe 2 Ngatif Facturation Cotation Risque Score A s s urance Positif Carnet Adresse Relation Suivi Axe 3 Ngatif Rseau Distrib ution Produit Positif Ractivit Changement Axe 4 Ngatif Organis ation Management

8 La rgle de Kaiser impose des valeurs propres suprieures 1. Dans le cas de lanaly se textuelle cette contrainte est moins forte en raison de la nature des donnes. En effet la matire premire est constitue des entretiens semidirectifs qui ont t ensuite formaliss sous forme de profils de comptences lemmatiss pour les besoins du traitement statistique soit un corpus de 1 500 mots diffrents. De plus cette exigence est moins forte car on ne vrifie pas une chelle de mesure. Il est noter que ce genre de mthode est couramment utilis par les sciences politiques pour lanalyse des dis cours.

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Malgr tout, la stabilit des principaux domaines reprsents par les trois premiers axes tranche avec lvolution significative des noncs pris au niveau de chaque profil. Cela renvoie au problme du niveau danalyse des comptences et de leur place dans la construction de lavantage concurrentiel. En fait, si des comptences organisationnelles du type architecture du rseau de distribution peuvent certainement contribuer lexistence dun avantage concurrentiel soutenable sur une priode relativement longue, leur dfinition nest pas assez prcise pour expliquer les fondements ultimes de cet avantage. Ces considrations conduisent sinterroger sur les possibilits didentifier rellement les sources de lavantage concurrentiel travers la thorie des ressources et comptences.

3.

Discussion

La sensation qui domine lorsquon se livre ce travail danalyse reste un sentiment dinachev et dimpuissance en raison de la nature mme des concepts utiliss. Ltude des comptences peut se comparer bien souvent une rgression infinie, autrement dit, il est toujours possible de trouver un niveau supplmentaire dexplication de lexistence de lavantage. Le risque de se perdre dans lanalyse est donc rel et seules des prcautions dans le design de la recherche permet dattnuer le problme.

3.1.

Lidentification des comptences : une rgression infinie

La premire explication logique de lorigine dune comptence provient de la comptence dvelopper une comptence, etc . Cette caractristique voque par D.J. Collis [1994] traduit le fait quil nexiste pas de niveau dfinitif pour lanalyse des sources de lavantage concurrentiel. Chacun des lments contribuant lexpliquer peut avoir sa gense un niveau plus profond. La recherche ralise sur le secteur bancaire vient confirmer lexistence de ce type de problmes. Larchitecture du rseau de distribution, identifie comme une comptence cl, se dcline de manire

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plus prcise et diffremment selon que lon parle de banque commerciale ou de banque dinvestissement (tableau 5). Si la dfinition gnrale de la comptence ne change pas, son contenu peut lui voluer. Le secteur bancaire illustre assez bien ce phnomne dj constat dans dautres domaines. Ainsi la puissance de la marque est probablement lexplication principale de la comptitivit dans le secteur des softs drink sur une assez longue priode [D.J. Collis 1994]. Tableau 5 Principales comptences associes larchitecture du rseau de distributionBanque Commerciale L'architecture du Maillage optimal du rseau rseau de distrib u- Adquation offre/client/canal de tion distribution Articulation des modes de distribution (mix relationnel / transactionnel) pour un mme client Banque d'investissement Qualit relationnelle des dirigeants (carnet d'adresses) Implantation sur les places financires internationales Efficacit des quipes dans le montage d'oprations complexes

Dans lindustrie des semi-conducteurs ou des microprocesseurs, la capacit innover plus rapidement et/ou mieux que ses concurrents apparat comme le dterminant essentiel de la construction dune position dominante [C. Christensen 1993]. Enfin, dans des industries marques par une rglementation contraignante avec des comportements oligopolistiques non concurrentiels (le secteur bancaire avant 1984), lantriorit dans lexercice de lactivit et la position actuelle expliquent lessentiel du succs de lentreprise sur une longue priode. Lorsquon regarde le tableau 5, on se rend compte du danger attribuer lorigine de la comptitivit dune banque la seule architecture de son rseau de distribution. Il faut approfondir la recherche pour dtailler les lments constitutifs de cette architecture de manire prciser les conditions de leur apparition et de leur efficacit. Cette dmarche est dautant plus ncessaire que ces deux comptences se dclinent diffremment selon que lon parle de banque commerciale ou de banque dinvestissement. Dans cette optique, le concept de mta-comptences semble plus appropri pour la qualifier [J.A. Klein, G.M. Edge, T. Kass 1991 ; D.J. Collis 1994 ].

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Au sein mme dun profil de comptences voqu dans le tableau 3, il existe un lien de subordination entre litem 6 Capacit mettre en place des systmes informatiques et de les grer et les items 3 Segmentation fine du march selon plusieurs optiques : matrise des risques, attentes, rentabilit, comportement : savoir-faire de lanalyste pour interprter la segmentation et 2 Connaissance des vnements de la vie du client . En effet, la capacit mettre en place un systme dinformation conduit une meilleure connaissance des vnements de la vie du client ce qui permet des segmentations plus fines. De mme, la capacit proposer des produits aux meilleures conditions (item 21) suppose de connatre prcisment le cot de revient et donc la structure des cots de ltablissement (item 22). De telles constatations ont galement t ralises pour dautres comptences dans dautres contextes. Ainsi, S.C. Wheelwright, K.B. Clark [1992] ont constat que la vritable comptence distinctive en matire dinnovation rsidait dans la capacit dvelopper des structures favorisant la conception de nouveaux produits plutt que le fait de possder simplement une quipe importante en dveloppement de produit. Lexplication de lavantage concurrentiel se situe dans lexistence de telles quipes soutenues par des structures organises pour linnovation.

2.3.

Le design de la recherche

Il faut reconnatre que lidentification des sources de lavantage concurrentiel reste un exercice difficile mme pour les responsables dentreprises. Les comptences cls sont bien souvent caches des concurrents mais aussi de lorganisation elle-mme [M. Tampoe 1994]. Les dirigeants peuvent avoir une vision biaise de la ralit, cherchant peut tre inconsciemment dissimuler leur difficult raisonner avec un tel cadre danalyse. De plus, on ne peut carter la situation de rationalit limite dans laquelle se trouvent les acteurs, savoir que les dfinitions quils peuvent donner sont celles quils considrent comme suffisantes pour expliquer le succs de leur organisation. Le chercheur nest alors jamais assur de connatre la vritable raison de

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ce succs. Cette situation influence le processus de recherche deux niveaux : Un contrle collectif est essentiel dans la dmarche adopte. En effet, comme le remarque B. Moingeon [1994], des biais cognitifs peuvent exister lorsquon demande un acteur (surtout lorsquil fait partie des dirigeants) de faire une analyse des comptences de son entreprise. Les biais cognitifs constituent en principe des risques voqus lors des dmarches hypothtico-dductives, lors de la rponse des questionnaires. On peut penser que ce type de risque existe dans le cadre des dmarches inductives. En effet, il faut avoir le courage dvoquer avec une personne extrieure, ses faiblesses ou les forces de ses concurrents. Le dirigeant peut tre incit prsenter une situation idale plutt que celle quil vit en ralit. De plus, lorsque les rsultats obtenus doivent inciter le stratge remettre en question son analyse, on constate frquemment une raction dfensive. Ceci le conduit privilgier des explications faisant appel des causes externes, indpendantes de sa volont. Ce phnomne peut sassimiler un effet de halo [R.D. Nisbett, T.D. Wilson 1977], certains interlocuteurs pouvant attribuer certaines comptences distinctives un tablissement, non pas parce que celui-ci les possde rellement mais parce que linterview en a globalement une bonne opinion. Par ailleurs, le risque existe que celui-ci rponde sans vraiment rflchir en profondeur. Pour minimiser ces risques, il faut sefforcer de rencontrer des personnes reconnues pour leur connaissance de lorganisation et de ses attributs mais aussi avoir leur totale adhsion au processus de recherche. Cela dit, aider les personnes analyser les comptences cls de le ur entreprise reste un travail auquel les responsables peuvent trouver un intrt car il facilite la comprhension des objectifs et des missions de la firme [K. Long, M. Vickers-Koch 1995] Intgrer dans la mthodologie une validation par des personnes, ou des informations, extrieures aux organisations : la plupart des recherches voques dans la premire partie de cet article font rfrence au cours de la mthodologie lutilisation dinformations externes. Dans la majorit des cas il sagit de documents crits, parus dans des revues

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conomiques relatant lavis dexperts extrieurs ou jugeant les raisons du succs ou de lchec de certaines entreprises. Parfois, lavis des clients peut constituer une source de validation supplmentaire [H. Bakker et al. 1994]. Triangulation des donnes et validation externe sont deux tapes garantissant une certaine objectivit des rsultats et limitant les effets de halo. Enfin, lanalyse dune entreprise ne doit pas faire lconomie dune tude des principaux concurrents avec un double objectif : tudier les groupes stratgiques [M.E. Porter 1985] du point de vue de leur possession de telles ou telles ressources et comptences [A. Mehra 1996] ; identifier les domaines de comptences distinctives de lindustrie.

ConclusionLe principe de lidentification et de lanalyse des comptences apparat extrmement simple au cours dun audit dune entreprise. Les ressources tangibles sont aisment identifiables ce qui nest pas toujours le cas des lments intangibles que sont les comptences dune organisation. Les dfinitions auxquelles les chercheurs ont abouti le plus souvent sont caractrises par des noncs trs gnraux qui ne constituent gnralement pas lexplication de lavantage concurrentiel. Ces noncs trs gnraux illustrent deux dimensions de lanalyse interne dune organisation : tout dabord lexistence des grands domaines de comptences que lon peut en gnral assimiler aux activits dune entreprise (sa chane de valeur). Leur dfinition est stable dans le temps et ils peuvent dcrire de manire gnrale et superficielle les raisons du succs dune entreprise. ensuite, la difficult obtenir une dfinition prcise de la comptence ultime source de lavantage concurrentiel. En ce sens, les dfinitions g nrales que lon obtient rejoignent le concept de processus. On peut en connatre lexistence et les rsultats mais on ne peut avoir de vision prcise de tous les lments qui le constituent un moment donn. Ainsi, larchitecture du rseau de distribution, identifie dans la banque comme un domaine central de comptence, peut se tra-

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duire par une srie de processus diffrents selon que lon se situe au niveau de la banque commerciale ou de la banque dinvestissement. En raison de ce problme de rgression infinie, de la confidentialit de certaines informations stratgiques, il parat certain quune identification exhaustive des comptences est impossible. De plus, il faut bien reconnatre, au regard des diffrents travaux, que les comptences d pendent de lindustrie ou du secteur dactivit dans lequel volue lentreprise et de la priode tudie. Lanalyse de lavantage concurrentiel prsente donc un caractre fortement contingent ce qui oblige un renouvellement rgulier de ce type travail. Mais, malgr tout, il apparat possible tout instant, dans nimporte quelle industrie didentifier des comptences qui sont ou qui seront lorigine de la comptitivit. Le travail du chercheur ne peut se limiter qu la production de listes les plus compltes possibles au sein de multiples tudes de cas de manire sassurer de la connaissance de leurs caractristiques principales au moyen de toutes les informations directes ou indirectes quil peut obtenir.

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