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École doctorale 139 : Connaissance, Langage, Modélisation Département de Psychologie Équipe d’accueil 4386 : Laboratoire parisien de psychologie sociale Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et conséquences de l’ambivalence ressentie. THÈSE Pour l’obtention du grade de Docteur en Psychologie Présentée et soutenue publiquement par Caroline Leygue Le 11 Décembre 2009 Directeur de thèse : Thierry Meyer Jury Vincent DRU, Professeur, Université Paris Ouest Nanterre La Défense Fabien GIRANDOLA, Professeur, Université de Bourgogne, Rapporteur Thierry MEYER Pr, Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Directeur Bo SANITIOSO, Professeur, Université René Descartes, Rapporteur Isabel Urdapilleta, Professeur, Université Paris 8

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École doctorale 139 : Connaissance, Langage, Modélisation Département de Psychologie Équipe d’accueil 4386 : Laboratoire parisien de psychologie sociale

Aspects structuraux des attitudes :

Antécédents et conséquences de

l’ambivalence ressentie.

THÈSE Pour l’obtention du grade de Docteur en Psychologie

Présentée et soutenue publiquement par Caroline Leygue

Le 11 Décembre 2009 Directeur de thèse : Thierry Meyer

Jury Vincent DRU, Professeur, Université Paris Ouest Nanterre La Défense Fabien GIRANDOLA, Professeur, Université de Bourgogne, Rapporteur Thierry MEYER Pr, Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Directeur Bo SANITIOSO, Professeur, Université René Descartes, Rapporteur Isabel Urdapilleta, Professeur, Université Paris 8

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Remerciements

Je remercie d’abord les membres de mon jury qui ont accepté de me lire et

d’apporter un regard critique sur ma thèse. Je remercie particulièrement mon

Directeur de Thèse, Thierry Meyer, pour sa confiance et son aide tout au long de ce

travail.

Mes remerciements vont ensuite aux personnes qui ont contribué à ce travail

directement ou indirectement, professionnellement ou personnellement. En

particulier :

Julien Chappé et Jean-François Verlhiac, pour leur précieuse contribution à deux

des études présentées ici.

François Ric, qui a été mon Directeur de Maîtrise et grâce à qui j’ai pris goût à

la recherche expérimentale. Je le remercie pour son amitié et ses nombreux et

précieux conseils.

Alice Follenfant, Dimitri Vasiljevic, Peggy Chekroun, David Vaidis et surtout

Anja Zimmermann pour leur soutien et leurs encouragements indispensables. Ils sont

plus que des collègues exceptionnels, ils sont de vrais amis.

Je remercie Greg Maio pour toutes nos discussions passionnantes et ses points

de vue enrichissants sur les attitudes, et sur l’ambivalence en particulier.

Merci à mes nouveaux collègues de l’Université de Cardiff. Les différents

séminaires de recherches aiguisent chaque semaine mon enthousiasme pour la

Psychologie Sociale, et la Psychologie en général.

Je suis redevable à Dominique Muller pour ses enseignements et ses conseils

excellents – et amusants - en statistiques.

Je suis aussi reconnaissante envers tout le Laboratoire de Psychologie Sociale

de Paris Ouest. J’ai beaucoup apprécié travailler dans cet environnement

Merci à tous les participants, tous volontaires et bénévoles, qui ont accepté de

prendre part à mes études, présentées ou non ici, mais toutes utiles à mon Doctorat en

cours.

Je suis extrêmement reconnaissante envers ma famille (et infiniment envers ma

mère) et mes amis, de m’avoir accompagnée dans les bons et les moins bons moments

de cette thèse, et cela même à distance.

Et, « last but not least », je dois à mon père et à mon beau-père d’avoir eu

l’idée et l’envie de faire un doctorat. Je pense à eux tout particulièrement.

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Sommaire Résumé 8 Abstract 9 Introduction générale 10

1. Qu’est ce que l’ambivalence ? 10 2. Vue d’ensemble 14

Chapitre 1 : J’aime et je n’aime pas. Ambivalence structurale et

ambivalence ressentie 16 1. Conception classique et bipolaire des attitudes 16 1.1. Les échelles bipolaires 16

1.2. La conception bipolaire des attitudes et des affects 16

1.3. Limitations des échelles bipolaires 17

2. Indépendance des évaluations positives et négatives 18 2.1. Le plan évaluatif bivariant 18

2.2. Indépendance fonctionnelle de la positivité et de la négativité 19

a. Définition 19

b. Données empiriques 20

3. Ambivalence : Conceptualisations et opérationnalisations 23 3.1. Distinction entre l’ambivalence et les autres formes de conflit cognitif 23

a. Distinction entre l’ambivalence et la dissonance cognitive 23

b. Distinction entre l’ambivalence et les attitudes duales 24 3.2. Définition de l’ambivalence 24

3. 3. Les mesures directes et indirectes de la force des attitudes 25

3.4. Ambivalence structurale 25

a. Définition 25

b. Mesure 26

3.5. Ambivalence ressentie 30

a. Définition 30

b. Mesure 30

3.6. Relations entre les deux formes d’ambivalence : différentes mesures et

différents concepts 32

4. Antécédents de l’ambivalence 33 4.1. Antécédents de l’ambivalence structurale 33

a. Antécédents structuraux 33

b. Traits de personnalité 34

c. Caractéristiques situationnelles 35

4.2. Antécédents de l’ambivalence ressentie 36

a. Antécédents structuraux 36

b. Traits de personnalité 36

c. Facteurs situationnels 37

5. Conséquences de l’ambivalence 38 5.1. Effets sur le traitement de l’information 38

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5.2. Effets sur le comportement 40

Chapitre 2 : Le programme de recherche : antécédents et

conséquences de l’ambivalence ressentie, dans le domaine de la santé

43 1. Pourquoi le choix de l’ambivalence ressentie ? 43

2. L’ambivalence ressentie comme meilleur indicateur de l’ambivalence 44 3. Antécédents de l’ambivalence ressentie 47 4. Conséquence de l’ambivalence ressentie sur le comportement 50

5. Présentation des 5 études 54 5.1. Pertinence de l’ambivalence dans le domaine de la santé 54

5.2. Les antécédents de l’ambivalence ressentie 55

5.3. Les conséquences de l’ambivalence ressentie sur l’intention de

comportement 56

Chapitre 3 : Antécédents de l’ambivalence ressentie : Les

modérateurs de la relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie 59

Introduction 59 1. Relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie 60 1.1. Différences entre les deux types de mesures 60

1.2. Différence entre les concepts 61

a. Ambivalence structurale sans ambivalence ressentie 61

b. Ambivalence ressentie sans ambivalence structurale 62

1.3. Une relation qui varie 62

1.4. Pourquoi l’ambivalence serait-elle plus ou moins ressentie ? 63

1.5. Quand l’ambivalence serait-elle plus ou moins ressentie ? 64

a. Différences interindividuelles 64

b. Variables situationnelles 64

1.6. Les modérateurs structuraux de la relation entre ambivalence structurale et

ambivalence ressentie 65

2. Les études présentées ici 66

Etude 1a : Ambivalence affective vs ambivalence cognitive 68

1. Introduction 68 2. Méthode 69

2. 1. Participants et procédure 69

2. 2. Variables indépendantes 70

2. 3. Variable dépendante 71

3. Résultats 72

3.1. Ambivalence structurale 72

3. 2. Ambivalence ressentie

4. Discussion 73

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6

Etude 1b : Proportion d’évaluations positives et négatives saillantes 75

1. Introduction 75

2. Méthode 77

2.1. Participants et procédure 77

2.2. Variables indépendantes 77

2.3. Variable dépendante 78

3. Résultats 79

3.1. Ambivalence structurale 79

3.2. Ambivalence ressentie 79

4. Discussion 82

Chapitre 4 : Conséquences de l’ambivalence ressentie sur

l’intention de comportement 84

Introduction 84

1. Ambivalence ressentie et comportement 85

1.1. Les effets modérateurs de l’ambivalence sur le comportement. 85

1.2. Des effets directs de l’ambivalence sur l’intention de comportement ? 86

2. Les études présentées ici 87 2.1. L’ambivalence réduit-elle vraiment dans quelle mesure une attitude prédit

l’intention de comportement ? 87

2.2. L’ambivalence ressentie comme modérateur des effets des informations sur

l’intention de comportement 88

2.3. L’ambivalence ressentie comme médiateur des effets des attitudes sur

l’intention de comportement 89

Etude 2a : Une attitude ambivalente peut-elle prédire l’intention de

comportement ? 90

1. Introduction 90 2. Méthode 91

2.1. Participants et procédure 91

2.2. Variables indépendantes 91

2.3. Variables dépendantes 93

3. Résultats 94

3.1. Analyses préliminaires 94

3.2. Ambivalence structurale 95

3.3. Ambivalence ressentie 95

3.4. Intention de s’exposer au soleil 96

4. Discussion 97

Etude 2b : Effet modérateur de l’ambivalence ressentie sur l’intention

comportementale 99

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1. Introduction 99 2. Méthode 101

2.1. Participants et procédure 101

2.2. Variables indépendantes 101

2.3. Variable dépendante 103

3. Résultats 103

3.1. Analyses préliminaires 103

3.2. Ambivalences structurale et ressentie 103

3.3. Intention de consommer des produits sucrés 104

4. Discussion 106

Etude 2c : Effet médiateur de l’ambivalence ressentie 108

1. Introduction 108 2. Méthode 110 2.1. Participants et procédure: 110

2.2. Variables indépendantes. 110

2.3. Variables dépendantes 112

3. Résultats: 113

3.1. Analyses préliminaires 113

3.2. Ambivalence structurale 113

3.3. Ambivalence ressentie 114

3.4. Intention de s’exposer au soleil 115

3.5. Analyse de médiation modérée 115

4. Discussion: 117

4.1. Ambivalence ressentie et intention de comportement 117

4.2. Processus de médiation modérée 118

Chapitre 5 : Discussion générale et conclusion 120

1. Discussion des principaux résultats par rapport aux problématiques de

départ. 120

1.1. Les attitudes ambivalentes : une structure qui n’est pas aussi « évidente »

qu’on pourrait le penser. 120

1.2. Les conséquences sur l’intention de comportement : au-delà de la simple

modération. 122

1.3. L’ambivalence ressentie comme meilleur indicateur de l’ambivalence 123

2. Limitations 124

3. Domaines d’application 126

4. Les pistes de recherches 128

Références 130

Annexes 138

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Résumé

Dans les recherches sur l’ambivalence, on distingue l’ambivalence structurale

(la présence d’évaluations positives et négatives), de l’ambivalence ressentie

(l’impression subjective que son attitude est ambivalente). Une série de 5 études,

appliquées au domaine de la santé, examine les antécédents et les conséquences de

l’ambivalence ressentie. Dans la première étude, la composition de l’attitude, sur des

bases cognitives ou affectives, modère la relation entre ambivalences structurale et

ressentie. Dans la deuxième étude, les résultats montrent un biais de négativité : les

informations négatives ont plus de poids que les positives dans le ressenti

d’ambivalence. Les trois études suivantes portent sur les conséquences de

l’ambivalence sur l’intention comportementale. L’étude 2a suggère que les attitudes

ambivalentes, si elles sont accessibles, peuvent être predictrices de comportement.

L’étude 2b indique que l’ambivalence ressentie modère les effets de l’information

reçue sur l’intention comportementale, de telle sorte que les participants ambivalents

sont plus influencés par cette information. Enfin, dans une dernière étude,

l’ambivalence ressentie médiatise les effets des attitudes sur l’intention

comportementale. Cette médiation est modérée par l’implication des participants dans

le problème. Dans leur ensemble, les recherches présentées ici permettent de conclure

que l’ambivalence ressentie est sans doute un meilleur indicateur de l’ambivalence

que l’ambivalence structurale.

Mots-clefs : Ambivalence, Meta-attitude, Structure des attitudes, Force des

attitudes, Intention de Comportement.

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Abstract

In ambivalence research, structural ambivalence (the co-existence of

positive and negative evaluations) is distinguished from felt ambivalence (the

subjective feeling that one’s attitude is ambivalent). In a series of 5 studies,

applied to risk behaviors, we examined the antecedents and consequences of felt

ambivalence. In Study 1a, the attitude’s affective and cognitive components

moderated the effects of structural ambivalence on felt ambivalence. In Study

1b, results show a negativity bias: negative evaluations weigh more than

positive evaluations on felt ambivalence. The 3 other studies involve the

consequences of ambivalence on behavioral intention. Study 2a suggests that

ambivalent attitudes, if accessible, can predict behavioral intention. Study 2b

indicates that felt ambivalence moderates the effects of information on behavior

intention: ambivalent people are more affected by information than non-

ambivalent people. Finally, in Study 2c, felt ambivalence mediates the effects of

attitudes on behavioral intention. This mediation is moderated by participants’

implication in the issue. Overall, this body of research suggests that felt

ambivalence is a better indicator than structural ambivalence.

Key words: Ambivalence, Meta-attitudes, Attitude Structure, Attitude

Strength, Behavioral Intention.

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Introduction générale

1

Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour

et de haine, et que ces deux sentiments sont en conflit. Linus ressent cette « bataille »

et semble ne pas apprécier cela…

1. Qu’est ce que l’ambivalence ?

Comme Linus, on peut tous penser à des choses qu’on veut à la fois faire et ne

pas faire. Des choses qu’on aime et qu’on n’aime pas : un gâteau au chocolat (exquis

mais contraire à son régime), un dernier verre de vin au dîner, une paire de chaussures

très chère, aller chez le dentiste, ou prendre l’avion. Trouve-t-on cela désagréable ?

Cette opposition entre des évaluations positives et négatives à propos d’un même

objet est au cœur de ce travail.

Bien que la vie quotidienne suggère le contraire, l’idée que notre évaluation

d’un stimulus puisse être à la fois positive et négative va à l’encontre de plusieurs

1 1 Lucy : « Ceci, Linus, est un dessin du cœur humain ! Un côté est rempli de haine, et l’autre côté est

rempli d’amour… Ce sont les deux forces qui sont constamment en conflit l’une avec l’autre… »

Linus : « Je crois que je vois exactement ce que tu veux dire… Je les sens se battre ! »

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11

théories des attitudes (voir Eagly & Chaiken, 1993). Quand on parle d’attitude en

psychologie sociale, le plus souvent on fait référence à la tendance à évaluer un

stimulus (un objet, une personne, un comportement ou une idée) avec un certain degré

de positivité ou négativité (Eagly & Chaiken, 1993, p. 265; Fazio, 1989). La plupart

des définitions des attitudes ne prennent pas en compte la possibilité que notre

évaluation d’un stimulus soit positive et négative (Eagly & Chaiken, 1993; Osgood,

Suci, & Tannenbaum, 1957; Thurstone, 1928). D’après ces définitions, la structure

des attitudes est unidimensionnelle, allant du négatif au positif. Quand le « positif »

augmente, le « négatif » diminue forcément, et vice-versa. Mais cette vision semble

limitée.

Les évaluations positives et négatives n’ont pas forcément une relation

réciproque, mais peuvent plutôt co-exister et même être en conflit. Un tel conflit intra

personnel, et les expériences subjectives qu’il suscite, ont été étudiés en ce qui

concerne les attitudes (par ex., Thompson, Zanna, & Griffin, 1995), mais aussi les

processus affectifs (Cacioppo, Gardner, & Berntson, 1997; Fong & Tiedens, 2002) ;

ou les motivations (Fong & Tiedens, 2002).

En ce qui concerne les attitudes, on parle de valence pour désigner l’orientation

positive ou négative des attitudes. La présence d’évaluations positives et négatives

concernant un unique stimulus est appelée ambivalence (attitudinale). Parler

d’ambivalence en ce qui concerne les attitudes a commencé avec Scott (1969) et

Kaplan (1972). Selon ce dernier, nous devrions distinguer dans les attitudes deux

positions différentes qualitativement : l’ambivalence et la neutralité. La différence

entre neutralité et ambivalence est que dans le cas de la première, l’individu ne fait

aucune association positive ou négative avec l’objet (par exemple parce que l’objet est

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nouveau, ou sans intérêt). Dans le cas de l’ambivalence, l’individu fait des

associations, éventuellement fortes, positives et négatives avec l’objet.

Les attitudes ambivalentes ont été étudiées pour de nombreux stimuli, comme

les minorités ethniques (Katz & Hass, 1988; Maio, Bell, & Esses, 1996), les hommes

politiques (Abelson, Kinder, Peters, & Fiske, 1982; Haddock, 2003; Lavine,

Thomsen, Zanna, & Borgida, 1998), le don d’organe (van den Berg, Manstead, van

der Pligt, & Wigboldus, 2005), du shampooing (Jonas, Diehl, & Brömer, 1997),

l’usage d’ecstasy (Conner, Sherlock, & Orbell, 1998), ses propres parents (Maio,

Fincham, & Lycett, 2000), les organismes génétiquement modifiés (de Liver, van der

Pligt, & Wigboldus, 2005), manger de la viande (Berndsen & van der Pligt, 2004), ou

encore soi-même (Riketta & Ziegler, 2006, 2007).

Une attitude est ambivalente quand elle est composée d’attributs positifs et

négatifs. Cela implique pour l’attitude une structure spécifique et une représentation

dimensionnelle de cette structure spécifique. D’après le modèle unidimensionnel des

attitudes, les évaluations positives et négatives sont réciproques. En conséquence, les

attitudes ont une valence générale soit positive (par exemple, j’aime m’exposer au

soleil), soit négative (par exemple, je n’aime pas m’exposer au soleil), soit neutre (par

exemple, je n’ai pas d’opinion concernant l’exposition au soleil) (voir Eagly &

Chaiken, 1993). L’ambivalence implique une conception bidimensionnelle des

attitudes qui suggère que les réactions positives et négatives envers un objet d’attitude

ne sont pas nécessairement réciproques (Cacioppo & Berntson, 1994; Cacioppo, et al.,

1997). L’ambivalence apparaît alors quand les évaluations positives et négatives sont

co-activées : les attributs de l’objet d’attitude aux valences opposées sont saillants.

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Cette ambivalence dans la structure de l’attitude (ou ambivalence structurale)

peut éveiller un sentiment d’ambivalence (Holbrook & Krosnick, 2005; Jonas, et al.,

1997; Newby-Clark, McGregor, & Zanna, 2002; Priester & Petty, 1996; 2001). Cette

ambivalence ressentie ou méta-attitudinale peut être désagréable (voir par ex., Maio,

Greenland, Bernard, & Esses, 2001; Nordgren, Van Harreveld, & Van der Pligt,

2006).

L’ambivalence structurale est évaluée par des mesures indirectes ou opératives

qui permettent une appréciation objective des processus de jugement (Bassili, 1996;

Greenwald & Banaji, 1995). Le degré de « conflit » entre évaluations positives et

négatives qu’un individu fait d’un objet est calculé, à l’aide de scores sur des échelles

séparées pour les attributs positifs et pour les attributs négatifs (voir Jonas, Broemer,

& Diehl, 2000; Kaplan, 1972; Priester & Petty, 1996; Thompson, et al., 1995) ou à

l’aide de questions ouvertes (Maio, et al., 1996; Maio, et al., 2001). Un score

d’ambivalence est calculé, le plus souvent à l’aide de l’équation de Griffin :

Ambivalence = (P+N)/2-P-N, où P et N sont respectivement les évaluations

positives et négatives de l’objet (Thompson, et al., 1995).

L’ambivalence ressentie est directement mesurée par des indices méta-

attitudinaux (Bassili, 1996). L’impression subjective d’ambivalence est estimée par

les réponses à des questions concernant la manière dont on évalue son attitude : par

exemple si on a l’impression qu’elle est mitigée, partagée ou composée à la fois

d’éléments positifs et négatifs (Conner & Sparks, 2002; Nordgren, et al., 2006;

Priester & Petty, 1996).

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14

Bien que les gens voient souvent les aspects positifs et négatifs d’une personne,

d’un objet ou d’une idée, ils peuvent parfois ne pas être conscients de cette

ambivalence ou ne pas vouloir l’exprimer (Conner & Sparks, 2002; Jonas, et al.,

2000; Nisbett & Wilson, 1977). Les deux indices d’ambivalence, structurale et

ressentie, sont peu ou modérément corrélés, les coefficients de corrélation allant de

.20 à .50 selon les études. Cette corrélation est influencée par des variables

individuelles, telles que la préférence pour la cohérence, ou contextuelles, par

exemple l’accessibilité simultanée des aspects positifs et négatifs de l’objet (Newby-

Clark, et al., 2002). La structure des attributs contradictoires (Gebauer, Maio, &

Pakizeh, 2009), ou leur modalité (par ex., musique et images, Larsen, Norris,

McGraw, Hawkley, & Cacioppo, 2009) peuvent influencer cette corrélation.

2. Vue d’ensemble

La thèse présentée ici a donc pour objet l’ambivalence des attitudes, et

précisément l’ambivalence ressentie. J’ai choisi comme domaine d’application celui

de la santé. Typiquement, des comportements hédonistes (plaisir de manger, s’exposer

au soleil) renvoient à des risques avérés (cancer, maladies cardio-vasculaires).

Dans un premier temps (chapitre 1), je ferai une revue de la littérature portant

sur les attitudes ambivalentes. Cette revue ne reprend pas l’intégralité des recherches

existant sur l’ambivalence. J’ai choisi de me concentrer sur une introduction des deux

formes d’ambivalence : structurale et ressentie. Je commencerai donc par une brève

description des conceptions bipolaire et bi-dimensionnelle des attitudes. Puis je

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décrirai les ambivalences structurale et ressentie, et leurs mesures. Enfin, j’aborderai

certains de leurs antécédents et conséquences.

Dans un second temps (chapitre 2), je détaillerai le programme de recherches

présenté dans cette thèse.

Puis, dans les deux chapitres expérimentaux (chapitres 3 et 4), les cinq études

que j’ai choisies seront présentées. Tout d’abord les deux études portant sur les

antécédents de l’ambivalence ressentie, puis les trois études portant sur les

conséquences de l’ambivalence ressentie sur l’intention de comportement.

Enfin, dans le chapitre 5, je reviendrai sur les résultats des études, sur leurs

limites et sur ce qu’elles apportent aux connaissances actuelles sur l’ambivalence.

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Chapitre 1

J’aime et je n’aime pas.

Ambivalence structurale et ambivalence ressentie.

1. Conception classique et bipolaire des attitudes

1.1. Les échelles bipolaires

Cela fait maintenant plus de 80 ans que Thurstone a développé son échelle

d’attitudes (Thurstone, 1928). Il se base sur les méthodes de psychophysique d’étude

de la perception, et mesure l’attitude du sujet « telle qu’exprimée par l’acceptation ou

le rejet d’opinions » (Thurstone, 1928, p. 533). Il reconnait cependant que les opinions

peuvent être « multidimensionnelles », qu’elles ne peuvent pas être représentées par

un continuum linéaire. Seulement, selon lui, c’est « l’idée même de mesure »

(Thurstone, 1928, p. 534) qui implique ce continuum linéaire, de la même manière

que la longueur, le volume ou l’âge.

Les échelles d’attitude bipolaires ont déterminé les données et les théories sur

les attitudes pendant plusieurs années (Eagly & Chaiken, 1993; Osgood, et al., 1957).

1.2. La conception bipolaire des attitudes et des affects

Eagly et Chaiken (Eagly & Chaiken, 1993) définissent les attitudes comme « la

tendance psychologique exprimée par l’évaluation d’une entité particulière avec un

degré d’approbation (favor) ou de désapprobation (disfavor) » (p.1). Dans la

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17

conception bipolaire, les attitudes et les affects sont compris comme un continuum

allant du positif au négatif, ou de l’acceptation au rejet. Les mesures classiques des

attitudes – les échelles bipolaires – reflètent cette conception (Osgood, et al., 1957;

Thurstone, 1928) : une attitude peut être résumée par la différence nette entre les

évaluations positives et négatives. Comme « bien » est le contraire de « mal »,

« positivité » est le contraire de « négativité », et l’une diminue si (et seulement si)

l’autre augmente. Cacioppo et Berntson (1994) citent 3 principes associés à cette

conception: (a) une attitude est la fonction jointe d’activations positives et négatives,

(b) les fonctions d’activations de valences positive et négative ont en général des

effets opposés sur une attitude, et (c) ces fonctions d’activations sont contrôlées

réciproquement.

1.3. Limitations des échelles bipolaires

Les limites de ce type d’échelle résident principalement dans l’interprétation du

point médian. L’élimination du point médian n’est pas considérée comme solution,

étant donné que la difficulté d’interprétation serait la même pour des choix de

réponses « autour du milieu ». Par exemple, si quelqu’un entoure « 4 » sur une échelle

de 1 à 8, c'est-à-dire autour du milieu, en direction du pôle « positif » : la personne

est-elle « un tout petit peu positive » ou « un tout petit plus positive que négative » ?

Si le point médian est souvent interprété comme une attitude neutre (c'est-à-dire

ni positive ni négative) (Thurstone, 1928), en réalité il est ambigu. Et la neutralité

elle-même peut résulter de deux processus différents, soit d’expériences neutres avec

l’objet d’attitude, soit à la fois d’expériences positives et d’expériences négatives (J.

D. Edwards & Ostrom, 1971).

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Ainsi, Klopfer et Madden (1980) pensent que la définition du point médian dans

des échelles de type Thurstone n’est pas claire, et qu’elle peut varier selon l’objet

d’attitude. Dans une expérience, ils font varier cette définition explicitement,

associant le point soit à l’ambivalence (« parfois vous penchez d’un côté, parfois de

l’autre »), soit l’incertitude (« vous n’arrivez pas à identifier vos sentiments »), soit la

neutralité (« cela vous est égal »), soit finalement non-spécialiste ou contrôle (« vous

n’arrivez pas à vous décider »). Les résultats montrent que pour certains objets, la

fréquence de choix du point médian dépend de la manière dont il est défini. La plus

choisie est celle définie par « ambivalence », et la moins choisie celle définie par la

neutralité. Les résultats montrent donc que si pour certains objets l’ambiguïté du point

médian peut ne pas poser de problèmes, pour d’autres elle peut masquer des processus

importants, notamment dans le changement d’attitude (l’ambivalence ne

correspondant pas au même stade que la neutralité, par exemple).

2. Indépendance des évaluations positives et négatives.

2.1. Le plan évaluatif bivariant

Cacioppo et Berntson (1994) proposent qu’au lieu d’être systématiquement

activés réciproquement (mutuellement exclusifs et incompatibles), les processus

d’évaluations positive et négative puissent être aussi activés non réciproquement (par

exemple, co-activation ou co-inhibition), ou découplés (un seul est activé). La

« structure évaluative » n’est alors plus sur une seule dimension (une ligne allant de

négatif à positif) mais en deux dimensions. Le « plan évaluatif bivarié » (Cacioppo &

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Berntson, 1994) est délimité par deux axes, l’un représentant l’activation de la

positivité, l’autre l’activation de la négativité (voir Figure 1).

Figure 1. Plan évaluatif bivarié. Adapté de (Cacioppo & Berntson, 1994).

Les évaluations positives et négatives peuvent alors interagir de plusieurs

manières : réciprocité, découplage et co-activité. L’ambivalence se situerait alors dans

ce dernier cas.

2.2. Indépendance fonctionnelle de la positivité et de la négativité

a. Définition

Selon les auteurs, si l’activation réciproque de la positivité et de la négativité

peut être fréquente, les théories selon lesquelles elle est systématique peuvent

empêcher les recherches sur certains processus d’évaluation. Ils parlent

d’indépendance fonctionnelle entre la positivité et la négativité. C'est-à-dire qu’il peut

y avoir des composantes communes aux deux processus, mais ils ne sont pas

identiques. De nombreuses recherches vont dans le sens de leur hypothèse et montrent

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que l’activation de la positivité et de la négativité ne sont pas des « opposés-miroirs ».

Si ce modèle a été remis en question à plusieurs reprises (Green, Goldman, &

Salovey, 1993; Green & Salovey, 1999; Green, Salovey, & Truax, 1999; Russell &

Carroll, 1999), plusieurs recherches empiriques vont dans son sens.

b. Données empiriques

b.1. Au niveau comportemental

Ainsi, dans le domaine comportemental, Brown (1948) a montré une différence

de gradient entre les comportements d’approche et d’évitement chez le rat : il observe

que la force d’évitement augmente plus rapidement que la force d’approche quand la

distance entre l’animal et le stimulus diminue. Plus tard, Miller (1959) a observé chez

le même animal que les processus motivationnels positif et négatif (approche et

évitement) pouvaient être co-activés.

b.2. Au niveau affectif

Dans le domaine affectif, Larsen, Mc Graw et Cacioppo (2001) montrent que la

réciprocité entre « tristesse » et « joie » dépend du stimulus. Ils montrent en effet que

dans certaines situations (après avoir regardé le film La Vie est Belle ou à la remise

des diplômes, par exemple), les participants ressentaient à la fois de la joie et de la

tristesse. Dans un autre contexte, Fong et Tiedens (2002) montrent aussi que les

femmes en position de « haut statut » (manipulé) ressentent à la fois de la tristesse et

de la joie. De plus, elles montrent que cette ambivalence affective dépend du

contexte : elle est plus forte chez les participantes placées en haut statut que chez

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celles placées en bas statut. Cette indépendance des activations émotionnelles

positives et négatives est confirmée au niveau des humeurs par Tellegen, Watson et

Clark (1999).

b.3. Au niveau physiologique

Au niveau physiologique, les recherches sur l’animal et l’humain montrent que

les processus affectifs positifs et négatifs impliquent pour la plupart des régions

cérébrales et des molécules différentes (Cacioppo, Crites, Berntson, & Coles, 1993;

Cacioppo, Gardner, & Berntson, 1999 pour une revue).

b.4. Au niveau motivationnel

Plusieurs recherches montrent que les buts contradictoires n’ont pas une relation

de réciprocité non plus. Ainsi, Eagly et Johnson (1990) ont montré que les femmes

qui gagnent en statut ne changent pas de but mais cumulent les buts interpersonnels et

de performance. Encore, Fong et Tiedens (2002) montrent que cette ambivalence

entre but de relation et but de pouvoir est modérée par le statut.

b.5. Au niveau évaluatif

Le premier à séparer les échelles positives et négatives, Kaplan (1972) obtient

avec 6 échantillons indépendants et différents objets d’attitudes des corrélations entre

positivité et négativité modérées, allant de -.13 à .28.

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Eagly et Chaiken (1993) citent les recherches sur les attitudes politiques de

Kerlinger (1984). Pour celui-ci, le libéralisme et le conservatisme sont des dimensions

relativement indépendantes. Mais il s’agit plutôt là de valeurs, ou de domaines

d’attitudes.

Dans le domaine des attitudes, Katz et Hass (1988) montrent notamment que la

négativité et la positivité envers les Noirs aux Etats-Unis ne sont que modérément

corrélées. De plus, ils montrent qu’elles ont différents antécédents, qu’elles sont liées

à différentes valeurs. Dans leur étude, la négativité envers les Noirs est corrélée avec

l’ « éthique protestante » alors que la positivité est corrélée avec les valeurs

« humanitaires et égalitaires ».

Les recherches de Fazio, Eiser et collègues (Eiser, Fazio, Stafford, & Prescott,

2003; Fazio, Eiser, & Shook, 2004) sur la formation des attitudes relèvent aussi cette

asymétrie : un meilleur apprentissage des objets négatifs que des objets positifs, et une

plus forte généralisation des attitudes négatives que des attitudes positives.

Au niveau implicite, l’utilisation du Test d’Associations Simples (Simple

Association Test ou SAT, Blanton, Jaccard, Gonzales, & Christie, 2006) permet

d’analyser séparément la positivité et la négativité. En utilisant des analyses en

équations structurales et des corrélations, les auteurs trouvent une indépendance des

évaluations positives et négatives implicites envers les Noirs et les Blancs.

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23

3. Ambivalence : Conceptualisations et opérationnalisations

3.1. Distinction entre l’ambivalence et les autres formes de conflit cognitif

a. Distinction entre l’ambivalence et la dissonance cognitive

La notion d’ambivalence se rapproche de la conception d’origine de la

dissonance cognitive (Festinger, 1957). Dans la recherche sur l’ambivalence, on parle

de deux cognitions contradictoires, et on suppose que le conflit entre les deux est

désagréable. Cependant, on peut distinguer l’ambivalence de la dissonance cognitive

sur deux points.

Théoriquement, l’ambivalence pourrait être considérée comme un cas particulier

de la dissonance cognitive telle que vue par Festinger. Un cas particulier où les

cognitions en conflit sont des « cognitions évaluatives ». La dissonance englobe les

cas de conflits entre deux informations contradictoires, ou encore entre une

information ou une évaluation, et un comportement (par exemple, « je suis écologiste

mais je ne trie pas toujours mes déchets »). L’ambivalence en revanche concerne

uniquement les cas d’évaluations contradictoires concernant un seul objet (par

exemple, « j’aime et je n’aime pas m’exposer au soleil »).

Méthodologiquement, les recherches sur l’ambivalence se distinguent des

paradigmes classiques de la dissonance, dans lesquels la contradiction est introduite

expérimentalement. Dans les recherches sur la dissonance, l’expérimentateur

demande aux participants d’adopter un comportement contre-attitudinal, alors que

dans les recherches sur l’ambivalence, le plus souvent, les évaluations contradictoires

sont mesurées.

Le point commun de l’ambivalence et de la dissonance, relevé et montré par

McGregor, Newby-Clark et Zanna (McGregor, Newby-Clark, & Zanna, 1999) est que

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dans les deux cas, pour être « éveillées », les cognitions en conflit doivent être

simultanément accessibles.

b. Distinction entre l’ambivalence et les attitudes duales.

Les attitudes duales peuvent être définies comme différentes évaluations d’un

même objet (d’attitude). L’une est automatique ou implicite, l’autre est contrôlée ou

explicite (Wilson, Lindsey, & Schooler, 2000). Par exemple, quand on change

d’attitude, l’ancienne attitude peut-être remplacée au niveau explicite par une nouvelle

attitude, tout en étant conservée au niveau implicite.

La différence entre les attitudes duales et l’ambivalence est donc que dans le cas

de l’ambivalence, la contradiction est entre deux éléments au même niveau. Jusqu'à

présent, ce niveau est resté uniquement le niveau explicite. Seules les recherches sur

l’ambivalence implicite, qui résulte d’un changement d’attitude, mais qui n’est pas

ressentie consciemment, peut être rapprochée des attitudes duales (Petty, Tormala,

Briñol, & Jarvis, 2006).

3.2. Définition de l’ambivalence

Comme la plupart des propriétés liées à la force des attitudes (Bassili, 1996)

l’ambivalence peut être conceptualisée de deux manières. D’une part, elle peut être

définie de manière structurale, c'est-à-dire dans quelle mesure l’attitude est à la fois

positive et négative. D’autre part, elle peut être définie de manière méta-attitudinale,

c'est-à-dire dans quelle mesure on ressent que son attitude est ambivalente. Ces deux

conceptualisations sont associées à deux mesures différentes. L’ambivalence

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structurale est évaluée par des mesures indirectes, ou opératoires. L’ambivalence

ressentie est évaluée par des mesures directes ou méta-attitudinales.

3. 3. Les mesures directes et indirectes de la force des attitudes

Les différentes propriétés liées à la force d’une attitude peuvent être mesurées

directement ou indirectement (Bassili, 1996). Ainsi, si on veut savoir si une attitude

est forte, on peut choisir de mesurer son accessibilité en enregistrant à quelle vitesse le

participant a répondu (Fazio, 1995). On peut aussi choisir de demander directement au

participant s’il pense que son attitude est forte (ou importante, ou encore s’il y pense

souvent). Selon Bassili (1996), dans la première option, on considère le processus

cognitif comme un « outil », il s’agit de mesures opératoires. Dans la deuxième, on

considère le processus comme un objet, il s’agit de mesures méta-attitudinales.

3.4. Ambivalence structurale.

a. Définition

L’ambivalence structurale désigne dans quelle mesure l’attitude d’une personne

est composée à la fois d’évaluations positives et négatives. Il s’agit alors de la

structure de l’attitude, de quelles composantes elle est formée. Selon les auteurs, on

parle alors d’ambivalence, d’ambivalence structurale ou d’ambivalence potentielle.

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b. Mesure

b.1. Les items

L’ambivalence structurale semble avoir été mesurée avant d’avoir été

véritablement conceptualisée théoriquement. L’intérêt pour l’ambivalence remonte

sans doute à une préoccupation récurrente concernant l’interprétation des réponses au

milieu des échelles sémantiques bipolaires (Kaplan, 1972). Selon l’auteur,

l’inconvénient des échelles bipolaires est qu’une réponse au point médian peut être

interprétée de plusieurs façons : elle peut indiquer la neutralité, l’incertitude,

l’indifférence ou l’ambivalence. Kaplan (1972) propose de séparer les échelles

bipolaires en deux au niveau du point médian, pour former deux échelles unipolaires.

Une échelle concerne les évaluations positives, l’autre les évaluations négatives, ce

qui permet de les mesurer séparément.

Précisément, les instructions de Kaplan sont les suivantes :

Considérant uniquement les aspects positifs d’un concept et ignorant les aspects

négatifs, veuillez évaluer dans quelle mesure ses aspects positifs sont positifs sur une

échelle en 4 points :

0 1 2 3

pas du tout

positif

un peu positif assez positif extrêmement

positif

Puis :

Considérant uniquement les aspects négatifs d’un concept et ignorant les aspects

positifs, veuillez évaluer dans quelle mesure ses aspects négatifs sont négatifs sur une

échelle en 4 points :

-3 -2 -1 0

pas du tout

négatif

un peu

négatif

assez négatif extrêmement

négatif

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A partir de ces deux échelles, un coefficient est calculé pour obtenir un score

d’ambivalence.

b.2. Les formules

Plusieurs formules ont été proposées pour calculer un degré d’ambivalence

structurale. Kaplan (1972) propose tout d’abord de soustraire la « polarisation » à

l’affect total, c'est-à-dire (P étant la somme des évaluations positives, et N celle des

évaluations négatives) :

Ambivalence = (P+N) – │P-N│

Pour Katz et Hass (1988) le degré d’ambivalence doit dépendre de la similarité

et de l’extrémité des réponses sur les échelles positives et négatives, et ils proposent :

Ambivalence = P x N

Jamieson (1991, tel que cité par Thompson, et al., 1995) se base sur les formules

de Brown et Farber (1951) et de Scott (1966) et pense en termes d’évaluations

dominantes et conflictuelles plutôt qu’en évaluations positives et négatives. Il calcule

le rapport entre évaluations conflictuelles et dominantes, et pour renforcer l’influence

de l’intensité (et « pénaliser » l’indifférence), il propose :

Ambivalence = (conflictuelle)² / dominante

Thomson et al., (1995) soutiennent eux que l’ambivalence doit dépendre de

l’intensité des évaluations positives et négatives, et de leur similarité (dans leur

grandeur) :

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Ambivalence = (P + N) / 2 -│P-N│

Enfin, Priester et Petty (1996), après avoir testé les différentes formules

existantes, concluent qu’elles prédisent mal l’ambivalence ressentie. Ils proposent un

modèle de seuil progressif (Gradual Threshold Model) :

Ambivalence = 5Cp – D

1/c 2

Selon les auteurs, l’ambivalence doit augmenter à une vitesse de moins en moins

élevée quand le nombre d’évaluations conflictuelles augmente ; elle diminue avec le

nombre d’évaluations dominantes, quand il n’y a aucune évaluation conflictuelle ; et

quand le nombre d’évaluations conflictuelles augmente, l’impact du nombre

d’évaluations dominantes diminue, jusqu’à un certain seuil au-delà duquel elles n’ont

plus aucun effet.

Dans les travaux présentés ici, nous avons choisi d’utiliser la formule de Griffin

(Thompson, et al., 1995). D’une part, elle est l’une des mesures qui permet le mieux

de prédire l’ambivalence ressentie : Thompson et al. (1995) rapportent une corrélation

de .40, et pour les autres formules de .21 à .37. Priester et Petty (1996) rapportent des

coefficients de .44 à .50 pour la formule de Griffin, et de .42 à .52 pour leur propre

formule, les autres se situant en dessous. Dans l’ensemble, elle semble être celle dont

la bonne validité est répliquée (Priester & Petty, 1996; Riketta, 2000; Thompson, et

al., 1995).

2 Dans cette formule, C et D sont les évaluations conflictuelles et dominantes ; une constante de

1 est systématiquement ajoutée aux scores de C et D ; p = .4, et comme p<1, alors l’ambivalence

augmente en fonction des évaluations conflictuelles, mais à une vitesse décroissante; enfin puisque D a

pour exposant 1/C, les effets des évaluations dominantes sur l’ambivalence diminue quand le nombre

d’évaluations conflictuelles augmente.

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b.3. Limitations

Les limites de ce type de mesures sont qu’elles supposent que les gens sont

capables de donner un sens à cette séparation entre les pôles positifs et négatifs des

échelles. Les échelles sémantiques bipolaires répondent à une organisation naturelle

de la pensée autour de pôles opposés (Breckler, 2004). Ce type de mesure force les

gens à ne pas penser comme ils le font le plus souvent pour juger quelqu’un ou

quelque chose : « J’aime ou je n’aime pas ? ». En effet, il est parfois difficile de ne

pas penser en termes bipolaires : il a été montré que les participants confondent

souvent les mesures unipolaires de « joie » avec des mesures bipolaires de « joie » et

« tristesse » (Russel & Carroll, 1999). De plus, dans la mesure de Kaplan, on force

les gens à se concentrer sur un seul pôle de jugement, tout en leur demandant

d’ignorer l’autre pôle. Il n’est pas certain que cela soit une tâche facile à accomplir.

b.4. La grille d’espace évaluatif

Une façon de remédier à ce problème est d’utiliser la grille d’espace évaluatif

(evaluative space grid, mise au point par Larsen et al. (Larsen, et al., 2009). Il s’agit

d’une grille en deux dimensions. L’échelle (en 5 points) positive est présentée en

abscisse et l’échelle négative (en 5 points) en ordonnée. Le participant doit cocher une

des 25 cases du plan d’évaluation (de la grille) pour exprimer son attitude envers

l’objet. Cette grille permet donc de mesurer le degré de positivité et de négativité

avec un seul item. Le participant ne doit donc ignorer ni ses évaluations positives ni

ses évaluations négatives à aucun moment. Les auteurs obtiennent une bonne validité

convergente, et une bonne validité prédictive, en comparant la grille à d’autres

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mesures de valence et d’ambivalence structurale. Cependant, ils ne mesurent pas sa

corrélation avec des mesures d’ambivalence ressentie. On pourrait penser cependant

que cette grille rend l’ambivalence structurale plus accessible pour le participant que

les échelles classiques, et que donc la corrélation avec l’ambivalence ressentie serait

relativement forte. Ceci-dit, on peut supposer que ce type d’échelle implique un

apprentissage, dans la mesure où un système orthonormé n’est pas connu de tous.

3.5. Ambivalence ressentie.

a. Définition

L’ambivalence ressentie désigne dans quelle mesure une personne a

l’impression que son attitude est ambivalente, ou a l’impression qu’elle est à la fois

positive et négative. Il s’agit alors d’une évaluation de sa propre attitude, d’une

impression subjective. Selon les auteurs, on parle alors d’ambivalence ressentie,

d’ambivalence méta-attitudinale ou d’ambivalence subjective.

b. Mesure

b.1. Les items

La mesure directe de l’ambivalence consiste à demander au participant s’il a

l’impression que son attitude est ambivalente. C’est donc une mesure méta-

attitudinale : le participant doit évaluer sa propre attitude. L’impression subjective

d’ambivalence est estimée par les réponses à des questions concernant la manière dont

on évalue son attitude : par exemple si on a l’impression qu’elle est mitigée, partagée

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ou composée à la fois d’éléments positifs et négatifs (Conner & Sparks, 2002;

Nordgren, et al., 2006; Priester & Petty, 1996).

b.2. Limitations

Le principal inconvénient de ce type de mesure est qu’il nécessite que le

participant soit conscient du processus psychologique « en cours », et qu’il soit exact

dans son analyse de ce processus. Par exemple, dans le cas particulier de

l’ambivalence ressentie, l’individu doit en quelque sorte calculer lui-même une

« formule de Griffin ». Quand on lui demande : « pensez-vous que votre attitude est

ambivalente ? », on peut supposer que l’individu doit penser à ce qu’il trouve positif,

ce qu’il trouve négatif, si les deux sont aussi importants l’un que l’autre et enfin, si en

conséquence, il a une impression d’ambivalence.

Selon Bassili (1996), il est rare que les gens aient un accès direct aux processus

mentaux sous-jacents à leur attitude, et donc qu’ils puissent évaluer directement la

force de leur attitude.

De plus, même si on est conscient que son attitude est à la fois positive et

négative, on peut ne pas vouloir dire qu’on est ambivalent. En effet, il semble qu’il y

ait un aspect normatif à se montrer cohérent (ou consistant) (Channouf & Mangard,

1997), bien que la contradiction semble plus ou moins acceptable selon les cultures

(Peng & Nisbett, 1999). Certaines personnes souhaitent montrer aux autres qu’elles

sont cohérentes, que leurs idées, leurs comportements vont dans le même sens

(Cialdini, Trost, & Newsom, 1995; Tedeschi, Schlenker, & Bonoma, 1971).

Selon Bassili (1996), les mesures opératoires de la force des attitudes prédisent

mieux le changement d’attitude que les mesures méta-attitudinales.

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3.6. Relations entre les deux formes d’ambivalence : différentes mesures et

différents concepts.

La corrélation entre les mesures directes et indirectes de l’ambivalence a

tendance à être modérée (Priester & Petty, 1996; 2001; Thompson, et al., 1995)

Les deux études conduites par Bassili (1996) montrent à l’aide d’analyses

factorielles que les mesures directes et indirectes des attitudes appartiennent à deux

catégories différentes. Selon lui, la différence entre ces mesures tient plus de la

méthode de mesure que du concept mesuré. Nous pensons que ce n’est pas le cas

pour l’ambivalence.

Bassili compare par exemple deux types de mesures de la force des attitudes : la

rapidité de réponse (aux échelles d’attitudes) et l’extrémité (mesurée par une échelle).

Dans ce cas les deux mesures sont très différentes structurellement. Dans le cas de

l’ambivalence, les types de mesures sont moins différents, il s’agit dans les deux cas

d’échelles d’autoévaluations. La structure de la mesure et l’unité sont les mêmes dans

les deux cas. Pourtant les scores de corrélation entre les deux mesures restent faibles

voire moyens dans la plupart des études, (par exemple, dans l’étude de Bassili, ils

varient de .01 à .11, alors que les corrélations entre mesures d’autres propriétés sont

significatives et plus élevées, malgré les différences dans la structure de la mesure).

Nous pensons donc que l’ambivalence structurale et l’ambivalence ressentie ne sont

pas deux types de mesure du même concept, mais deux concepts et deux processus

différents.

Holbrook et Krosnick (2005) se sont, eux, intéressés à l’ambivalence en

particulier. Ils ont mesuré les ambivalences structurale et ressentie concernant

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l’avortement et la peine de mort auprès de 600 participants. Ils ont aussi mesuré leurs

conséquences sur le traitement de l’information et le comportement. Leurs résultats

montrent, à l’aide d’analyses en équations structurales, que pour les deux objets

d’attitude, les ambivalences structurales et ressentie forment deux variables latentes

distinctes mais reliées. Dans la même idée, ils montrent que les deux mesures

affectent différemment certaines variables (par exemple, la perception des medias, la

recherche de nouvelles informations) mais pas toutes (par exemple, pas de différence

concernant la résistance à la persuasion).

4. Antécédents de l’ambivalence

4.1. Antécédents de l’ambivalence structurale

a. Antécédents structuraux

Par définition, pour être ambivalente, une attitude doit être formée à la fois

d’évaluations positives et d’évaluations négatives. Nous avons vu que selon la

formule employée, différentes conditions sont aussi nécessaires. Par exemple, selon

Thompson et al., (1995) la « grandeur » de ces évaluations doit être similaire, et pour

Katz et Hass (1988) ces évaluations doivent être extrêmes.

De Liver, van der Pligt, et Wigboldus (2007) testent empiriquement une

caractéristique structurale des attitudes ambivalentes : la force des associations. Ils

demandent à leurs participants de citer des objets qu’ils considèrent ambivalents (et

non-ambivalents). Ils mesurent ensuite la force des associations positives et négatives

concernant ces objets à l’aide d’une mesure implicite des attitudes (un IAT à catégorie

unique, SC-IAT, Karpinski & Steinman, 2006). A partir des temps de réactions et du

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nombre d’erreurs, ils montrent que les attitudes ambivalentes sont formées

d’associations positives et négatives de même force. Dans une deuxième étude, ils

confirment leurs résultats et différencient les attitudes ambivalentes et neutres : ils

montrent que des amorces positives et des amorces négatives facilitent le traitement

des objets ambivalents, mais pas celui des objets neutres.

Van den Berg, et al. (2005) s’attachent eux au caractère affectif ou cognitif des

attitudes. Ils montrent que les attitudes affectives (envers le don d’organes) sont

ambivalentes, alors que les attitudes cognitives ou générales ne le sont pas.

b. Traits de personnalité

Si aucune recherche n’a spécifiquement considéré l’ambivalence comme un trait

de personnalité, ou créé d’échelle personnelle d’ambivalence, on peut toutefois faire

l’hypothèse que certaines personnes ont plus tendance que d’autres à avoir des

attitudes ambivalentes. Par exemple, on pourrait penser que les personnes ayant un

fort besoin de « clôture » (Neuberg, Judice, & West, 1997; Webster & Kruglanski,

1994) ou de « structure » (Thompson, Naccarato, & Parker, 1989) aient du mal à

supporter l’ambiguïté ou le « désordre » qui peuvent être associés à l’ambivalence.

Deux traits de personnalité ont été associés à une tendance à des attitudes plus

ambivalentes : le besoin de cognition (Cacioppo & Petty, 1982), et la peur de

l’inexactitude3 (Personal Fear of Invalidity, Thompson, et al., 1989).

3 J’ai choisi de traduire « Personal Fear of Invalidity » par peur de l’inexactitude. Les auteurs la

définissent comme une « appréhension envers les erreurs coûteuses » (Thompson & Zanna, 1995). Ils

se basent sur la définition de « Fear of Invalidity » de Kruglanski (voir Kruglanski & Mayseless, 1987)

mais l’adaptent en échelle de personnalité. Les items de l’échelle comprennent par exemple : « Parfois,

dans certaines situations, il y a tellement d’options que je trouve ça déroutant » ou « J’aimerais bien ne

pas avoir si peur de faire des erreurs ».

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Thompson et Zanna (1995) ont mesuré l’ambivalence structurale de cinq

attitudes connues pour discriminer les valeurs politiques (par exemple, envers

l’euthanasie ou l’avortement). Au préalable, ils avaient mesuré chez leurs participants

leur tendance à la peur de l’inexactitude et au besoin de cognition. Leurs résultats

montrent que plus leurs participants ont « besoin de cognition », moins leurs attitudes

sont ambivalentes. En revanche, plus ils ont peur de l’inexactitude, plus leurs

attitudes sont ambivalentes. Ces effets sont indépendants l’un de l’autre.

c. Caractéristiques situationnelles

Dans une deuxième étude, Thompson et Zanna (1995) examinent le rôle d’un

facteur situationnel : l’implication. Les auteurs font deux hypothèses : d’une part, plus

on est impliqué par le domaine d’attitude, plus on devrait disposer d’informations, et

plus le schéma de l’objet devrait être cohérent, donc moins l’attitude devrait être

ambivalente ; d’autre part, plus on est impliqué, plus on devrait être attentif à

l’ensemble des informations, même celles qui ne sont pas cohérentes, donc

l’implication pourrait aussi faire augmenter l’ambivalence. Confirmant leur première

hypothèse, l’implication tend à faire diminuer l’ambivalence. Par ailleurs, ils montrent

un effet modérateur de l’implication sur les effets de la personnalité sur

l’ambivalence : le besoin de cognition et la peur de l’inexactitude agissent sur

l’ambivalence particulièrement quand la personne est impliquée dans le domaine.

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4.2. Antécédents de l’ambivalence ressentie

a. Antécédents structuraux

Pour qu’une personne se sente ambivalente, son attitude doit être ambivalente

d’un point de vue structural. C'est-à-dire qu’elle doit être à la fois positive et négative.

Ceci n’est pas toujours suffisant. Pour être ressentie comme ambivalente, les

évaluations positives et négatives de l’attitude doivent être simultanément accessibles

Newby-Clark, McGregor et Zanna (2002). Dans trois études, les auteurs mesurent

(par des temps de réaction) ou manipulent (par expression répétée) l’accessibilité

simultanée des évaluations positives et négatives de leurs participants envers la peine

de mort et l’avortement. Leurs résultats indiquent que la relation entre ambivalence

structurale et ambivalence ressentie est plus forte quand l’accessibilité simultanée est

haute.

b. Traits de personnalité

La préférence pour la cohérence (Preference For Consistency, Cialdini, et al.,

1995) semble faciliter le sentiment d’ambivalence. Les personnes ayant une forte

préférence pour la consistance ont tendance à ne pas aimer que leurs idées et leurs

comportements soient contraires, ou n’aiment pas se contredire. Newby-Clark et al.

(2002) ont fait l’hypothèse que le conflit entre attitudes positives et négatives serait

plus désagréable – et donc ressenti – chez les personnes ayant une forte préférence

pour la cohérence. Ils montrent en effet que la préférence pour la cohérence modère

l’effet d’interaction entre ambivalence structurale et accessibilité sur l’ambivalence

ressentie : l’accessibilité simultanée des évaluations positives et négatives augmente

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l’ambivalence ressentie particulièrement chez les participants qui préfèrent la

cohérence.

c. Facteurs situationnels

Les recherches portant sur les antécédents de l’ambivalence ressentie portent

essentiellement sur des facteurs situationnels.

Nous avons vu que pour être ressentie comme ambivalente, il n’était pas

toujours suffisant qu’elle soit ambivalente d’un point de vue structural. Mais cela

n’est pas toujours nécessaire non plus. Dans quatre études (corrélationnelles et

expérimentales), Priester et Petty (2001) observent les effets d’une contradiction entre

sa propre attitude et celles de personnes qu’on apprécie sur l’ambivalence ressentie.

Ils montrent qu’indépendamment des effets de l’ambivalence intra-personnelle, le

désaccord entre sa propre attitude et celles des autres fait augmenter l’ambivalence

ressentie. Ils montrent aussi l’effet inverse : un décalage entre sa propre attitude et

celle d’une autre personne que l’on n’aime pas fait diminuer l’ambivalence ressentie.

Concernant l’implication, de Liver, van der Pligt et Wigboldus (2005)

obtiennent des résultats qui confirment la seconde hypothèse de Thompson et Zanna

(1995), mais en ce qui concerne l’ambivalence ressentie. Ils mesurent l’attitude de

leurs participants envers les OGM, et d’après leurs résultats, l’implication fait

augmenter l’ambivalence ressentie. Tormala et DeSensi (2008) montrent eux que

l’implication (et le besoin de cognition) modèrent les effets de la perception d’un

message informatif sur l’ambivalence ressentie : quand on est fortement impliqué, on

se sent plus ambivalent quand on pense que son attitude est basée sur la source du

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message, alors que quand on est peu impliqué, on se sent plus ambivalent quand on

pense que son attitude est basée sur les arguments du message.

5. Conséquences de l’ambivalence

5.1. Effets sur le traitement de l’information

Paradoxalement, l’ambivalence ressentie affecte le traitement de l’information

de deux manières : elle diminue et elle augmente le traitement de l’information liée à

l’objet d’attitude.

Holbrook et Krosnick (2005) observent que plus leurs participants ressentent de

l’ambivalence, moins ils rapportent d’intérêt à apprendre de nouvelles informations

concernant l’objet d’attitude (auto-évaluation). Cependant, l’ambivalence ressentie

n’affecte pas le choix réel de nouvelles informations. Donc, quand les participants

ambivalents ont le choix, ils préfèrent ne pas traiter les informations concernant

l’objet. Il semble que quand ils le peuvent, ils « fuient » l’inconfort lié à

l’ambivalence en évitant ce qui peut le leur rappeler.

Mais parfois on n’a pas le choix : on est confronté à des informations concernant

l’objet qui peuvent rappeler l’ambivalence. Là encore, cette dernière peut entraîner un

« évitement » du traitement de l’information. Zemborain et Johar (2007) étudient la

formation d’impression envers un candidat politique et manipulent le type de source

(des amis ou un programme de radio) du message. L’attitude générale envers le

candidat des participants qui étaient ambivalents au départ est moins influencée par le

type de source que celle des participants non-ambivalents.

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Cependant, nombreux sont ceux qui ont fait l’hypothèse inverse. Ainsi, Jonas,

Brömer, et Diehl (2000) soutiennent que l’ambivalence devrait faire augmenter

l’effort cognitif, et donc favoriser un traitement de l’information approfondi. D’un

point de vue structural, ils pensent qu’on devrait être plus capable de traiter

l’information systématiquement, puisque le schéma de l’objet est plus complexe.

D’un point de vue méta-attitudinal, quand on se sent ambivalent on devrait être plus

motivé à traiter l’information, afin de diminuer l’inconfort lié à l’ambivalence.

C’est le pattern de résultats obtenu par la plupart des études, corrélationnelles ou

expérimentales. Les résultats de Nordgren, van Harreveld, et van der Pligt (2006) vont

dans ce sens : ils montrent tout d’abord que l’ambivalence ressentie est associée à de

l’inconfort, puis testent si cet inconfort est diminué par un traitement plus approfondi

de l’information. Enfin, ils montrent aussi que les effets de l’ambivalence sur le

traitement de l’information sont médiatisés par l’inconfort.

Jonas, Diehl, & Brömer (1997) avaient auparavant utilisé un nouvel objet

d’attitude (une bouteille de shampooing) afin de manipuler le degré d’ambivalence.

Ils ne faisaient pas l’hypothèse d’une médiation par l’inconfort. Pour eux,

l’ambivalence devait faire diminuer la confiance de l’individu dans son attitude, et

donc l’encourager à traiter l’information de manière approfondie. Conformément à

leurs hypothèses, les participants placés dans la condition « ambivalence » furent

moins confiants dans leur attitudes, et traitèrent l’information de manière plus

approfondie (c’est-à-dire, ils rapportèrent plus de pensées liées à l’objet).

Un « compromis » est trouvé par Clark, Wegener et Fabrigar (2008) qui mettent

en évidence un modérateur des effets de l’ambivalence sur le traitement de

l’information. Les participants ambivalents ont tendance à traiter l’information de

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manière plus approfondie quand elle est pro-attitudinale que lorsqu’elle est contre-

attitudinale. Les participants non-ambivalents ont tendance à faire le contraire. Les

auteurs expliquent ces effets par le fait que les participants ambivalents tendent à

penser que les informations pro-attitudinales les aideront mieux à réduire leur

ambivalence.

5.2. Effets sur le comportement

La plupart des recherches portant sur les attitudes ambivalentes et le

comportement (ou l’intention de comportement) utilisent l’ambivalence comme une

variable modératrice. Les auteurs ont étudié pour la plupart les effets modérateurs de

l’ambivalence sur les effets des attitudes sur le comportement ou l’intention de

comportement.

La majeure partie des travaux porte sur le domaine de la santé (par exemple :

consommer de l’alcool, consommer des aliments pauvres en gras, manger 5 portions

de fruits et légumes par jour) et utilisent la théorie du comportement planifié et la

théorie de l’action raisonnée (Theory of Planned Behaviour TPB, et Theory of

Reasoned Action TRA, Ajzen, 1991; Ajzen & Fishbein, 2000; Fishbein & Ajzen,

1974).

Dans leur ensemble, elles montrent que les attitudes ambivalentes sont plus

« faibles » et prédisent moins bien le comportement (Armitage & Conner, 2000;

Conner, Povey, Sparks, James, & Shepherd, 2003; Conner, et al., 2002) et l’intention

de comportement (Armitage & Conner, 2000; Povey, Wellens, & Conner, 2001) que

les attitudes non-ambivalentes. Aussi, l’ambivalence modère la relation entre intention

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et comportement de telle sorte que les intentions prédisent mieux les comportements

quand l’ambivalence est faible (Conner, et al., 1998).

Ces recherches sont toutes corrélationnelles, donc on pourrait penser que l’effet

inverse est possible : c’est parce que les attitudes sont en décalage avec le

comportement qu’elles sont plus ambivalentes. Ou encore, on pourrait attribuer ces

effets à des covariants de l’ambivalence. En effet, les attitudes ambivalentes

pourraient avoir d’autres caractéristiques, liées à la force des attitudes, qui pourraient

atténuer les effets des attitudes sur le comportement, telles que l’instabilité, ou une

moins bonne accessibilité.

Seulement, Armitage (2003) mesure et manipule l’homogénéité des croyances

(ou cognitions : « belief homogeneity ») concernant la consommation d’alcool et

obtient des résultats similaires dans les deux cas : là encore, les attitudes basées sur

des croyances hétérogènes sont de moins bonnes prédictrices de l’intention de

comportement et du comportement que les attitudes basées sur des croyances

homogènes.

Seule une étude contredit ces résultats : Jonas et al. (1997) manipulent l’attitude

de leurs participants envers une nouvelle bouteille de shampooing. Ils comparent la

corrélation entre attitude et intention de comportement dans les différents groupes.

Dans leurs deux expériences, ils obtiennent des corrélations plus élevées chez les

participants placés en condition d’ambivalence que chez ceux placés en condition de

non-ambivalence. De plus, ces effets sont dus à un traitement de l’information

(concernant l’objet) plus approfondi, lui-même dû à un manque de confiance dans sa

propre attitude. Une limite évidente ici est que le traitement de l’information est

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mesuré par une tâche de rappel. Et l’attitude est nouvelle, elle est basée sur

l’information donnée par les expérimentateurs. Il se pourrait alors que les effets soient

dus uniquement à la complexité de l’information : les participants placés en condition

« ambivalence » sont confrontés à une information plus complexe, ils traitent alors

l’information de manière plus approfondie, ce qui renforce le lien entre attitude et

intention de comportement. Ils seraient aussi plus ambivalents que ceux placés en

condition non-ambivalente, sans que cela n’affecte la relation attitude-intention de

comportement.

En résumé, on peut considérer l’ambivalence de deux points de vue : le point

de vue de la structure de l’attitude, et le point de vue de la méta-attitude :

l’ambivalence ressentie. Les attitudes ambivalentes sont globalement des attitudes

plus faibles que les attitudes non-ambivalentes.

Nous allons étudier ici plus particulièrement l’ambivalence ressentie.

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Chapitre 2

Le programme de recherche : antécédents et conséquences de

l’ambivalence ressentie, dans le domaine de la santé.

1. Pourquoi le choix de l’ambivalence ressentie ?

Dans le projet présenté ici, j’ai choisi de m’intéresser particulièrement à

l’ambivalence ressentie. Si l’ambivalence ressentie a été largement étudiée, presque

autant que l’ambivalence structurale, j’ai pensé qu’elle rendrait mieux compte de

l’ensemble des processus liés à l’ambivalence. Aussi, j’ai constaté que certains

aspects fondamentaux de l’ambivalence ressentie en particulier n’avaient pas été

suffisamment documentés.

Le premier concerne ses antécédents, en particulier ses antécédents structuraux.

Puisque ces antécédents semblent être pris en compte dans la définition même de

l’ambivalence - une structure faite d’évaluations positives et négatives – d’autres

aspects structuraux n’ont jamais été testés.

Le deuxième concerne ses conséquences, particulièrement sur l’intention de

comportement. L’ambivalence ressentie est considérée comme un modérateur des

effets des attitudes sur l’intention de comportement, dans le sens ou elle devrait

diminuer ces effets. Ne peut-on pas trouver l’effet inverse dans certaines situations ?

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De plus, l’ambivalence ressentie pourrait aussi avoir un effet médiateur entre les

attitudes et l’intention de comportement.

2. L’ambivalence ressentie comme meilleur indicateur de l’ambivalence

Selon (Bassili, 1996), les mesures opératoires de la force des attitudes prédisent

mieux le changement d’attitude que les mesures méta-attitudinales. Cependant,

comme nous l’avons vu plus haut, Bassili considère que les formes opératoires et

méta-attitudinales mesurent différemment le même concept. Or, nous avons vu que

malgré leurs structures comparables, dans le cas de l’ambivalence, les deux types de

mesures ne sont que modérément corrélés, et cela dans l’ensemble des recherches

existantes (voir chapitre 2, p.23). Je pense que dans le cas de l’ambivalence,

l’ambivalence structurale et l’ambivalence ressentie sont deux concepts différents qui

impliquent des processus (au moins partiellement) différents. Nous ne sommes donc

pas dans le même cas de figure que celui théorisé par Bassili. Pour lui, un concept est

mieux représenté par une forme spécifique de mesure, la mesure opératoire. Ici, il

s’agit peut-être d’un seul processus – évaluer un objet positivement et négativement –

mais nous pensons qu’il s’agit de deux concepts distincts : l’ambivalence structurale

et l’ambivalence ressentie.

Je considère que l’ambivalence ressentie rend mieux compte de

l’ « ambivalence » en général. En effet, il s’agit certes d’une mesure subjective, elle

dépend donc du degré de conscience du processus et d’honnêteté des participants.

Cependant, on peut concevoir que l’ambivalence ressentie est un meilleur indicateur

de l’ensemble des processus psychologiques liés à l’ambivalence. On peut penser que

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l’ambivalence ressentie rend compte à la fois des processus cognitifs (les associations

positives et négatives) et des processus « affectifs »4 (inconfort) (Maio, et al., 2001;

Nordgren, et al., 2006).

De plus, si on revient au plan évaluatif bivarié de Cacioppo et Berntson

(Cacioppo & Berntson, 1994), l’ambivalence structurale et ses mesures ne

représentent que les attitudes situées sur la partie du plan qui se trouve sur la

diagonale partant de l’origine (voir Figure 1 p.10). L’ambivalence ressentie peut, elle,

potentiellement représenter plus de possibilités d’attitudes, sur une plus grande région

du plan.

D’autre part, d’un point de vue technique, concernant les associations positives

et négatives, il n’y a pas de réel consensus concernant la formule utilisée pour calculer

l’ambivalence structurale. De plus, selon Holbrook et Krosnick (2005), les formules

mathématiques utilisées pour calculer l’ambivalence structurale peuvent mal

représenter la manière dont les évaluations positives et négatives sont combinées

psychologiquement par les personnes. Ces mesures qui sont, certes, plus objectives,

pourraient n’être que des représentations artificielles et inexactes des processus.

Les études les plus récentes recommandent de ne pas employer ces formules

mais plutôt soit l’utilisation d’une grille (Larsen, Norris, McGraw, Hawkley, &

Cacioppo, in press) soit de traiter les évaluations positives et négatives séparément

(Locke & Braun, 2009; Ullrich, 2008). Dans ce dernier article, Ullrich montre même

que certains effets modérateurs de l’ambivalence structurale sont en réalité un artefact

de l’utilisation de la formule qui modifie les variances des évaluations positives et

négatives.

4 Je n’entends pas, ici, par processus affectif une véritable émotion ou même une humeur. J’ai choisi

d’utiliser le terme « affectif » ici pour rendre compte du contraste avec les processus cognitifs.

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Enfin, concernant les processus « affectifs », ou de « ressenti subjectif », nous

avons vu que les effets de l’ambivalence sont souvent dus à l’inconfort engendré par

l’ambivalence (Nordgren, et al., 2006; van Harreveld, van der Pligt, & de Liver,

2009). L’ambivalence ressentie rend mieux compte de cet inconfort que

l’ambivalence structurale. Nordgren et al. (2006) ont montré que l’ambivalence

ressentie était associée à de l’inconfort. Hass, Katz, Rizzo, Bailey et Moore (1992)

montrent eux que l’ambivalence, quand elle est saillante, entraine une augmentation

de l’humeur négative. En revanche, quand une mesure opératoire est utilisée, les

résultats montrent que l’ambivalence structurale est négativement corrélée avec les

symptômes physiologiques de l’inconfort (augmentation de la conductance de la

peau) (Maio, et al., 2001). Il semble que les personnes ambivalentes ressentent de

l’inconfort particulièrement quand elles doivent prendre une décision (van Harreveld,

Rutjens, Rotteveel, Nordgren, & van der Pligt, 2009; van Harreveld, van der Pligt, et

al., 2009).

J’ai donc choisi de m’intéresser à deux problématiques concernant

l’ambivalence ressentie, lesquelles ont été peu examinées jusqu'à présent. Ces deux

problématiques concernent d’abord les antécédents, ensuite les conséquences de

l’ambivalence ressentie.

Dans un premier temps, j’ai souhaité me pencher sur les antécédents de

l’ambivalence ressentie car la relation entre ambivalence structurale et ambivalence

ressentie est floue : elle varie d’une étude à l’autre, allant d’inexistante à moyenne.

Malgré cela elle est souvent ignorée, les auteurs choisissant le plus souvent soit de ne

traiter qu’une forme d’ambivalence, soit de seulement mentionner les indices de

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corrélations sans les discuter (voir par exemple Armitage, 2003; Armitage & Conner,

2000; Conner, et al., 2003; Conner, et al., 2002; de Liver, et al., 2005; Lavine, et al.,

1998; Urland & Ito, 2005). Or je considère cette question comme fondamentale dans

la compréhension des différentes formes d’ambivalence, mais aussi dans l’explication

même des conséquences de l’ambivalence.

Dans un deuxième temps, j’ai examiné les conséquences de l’ambivalence

ressentie, particulièrement sur l’intention de comportement. Dans le domaine du

comportement, quand il s’agit de comportement planifié (et non automatique), la

forme subjective, auto-rapportée de l’ambivalence devrait être plus pertinente que la

forme opératoire qui n’est pas forcément consciente chez les participants. Nous avons

vu dans le chapitre précédent que les recherches menées sur les effets de

l’ambivalence sur l’intention de comportement portent surtout sur des effets

modérateurs. L’objectif ici était d’une part approfondir les connaissances sur ces

effets modérateurs, d’autre part d’examiner si l’ambivalence ressentie pouvait affecter

le comportement par d’autres processus tels que la médiation (de la même manière

que l'ont montré Nordgren, et al., 2006, concernant le traitement de l'information).

3. Antécédents de l’ambivalence ressentie

L’antécédent principal de l’ambivalence ressentie semble être évidemment

l’ambivalence structurale. Cependant, nous avons vu plus haut que l’ambivalence

structurale n’était pas toujours corrélée avec l’ambivalence ressentie. C’est pourquoi

j’ai cherché à mettre en évidence certains modérateurs de la relation entre les deux

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formes de l’ambivalence. Le choix s’est porté en particulier sur l’étude des

antécédents structuraux de l’ambivalence ressentie.

Nous avons vu dans le chapitre 1 que plusieurs antécédents liés à la situation ou

à des traits de personnalité ont déjà été mis en évidence (de Liver, et al., 2005;

Newby-Clark, et al., 2002; Priester & Petty, 2001; Tormala & DeSensi, 2008).

Cependant, en dehors de l’accessibilité simultanée des évaluations positives et

négatives (Newby-Clark, et al., 2002), l’influence d’aucune variable structurelle n’a

été étudiée. Selon moi, tout comme celle des attitudes non-ambivalentes, la structure

d’une attitude ambivalente n’est pas limitée à ses évaluations positives et négatives.

Par exemple, on peut considérer dans quelle mesure elle est basée plutôt sur des

composantes affectives, cognitives ou comportementales (voir par exemple Breckler,

1984; Breckler & Wiggins, 1989; Zajonc & Markus, 1982). Cet aspect de la structure

des attitudes a été largement étudié, que ce soit lié à la formation (K. Edwards, 1990;

van den Berg, Manstead, van der Pligt, & Wigboldus, 2006), le changement (K.

Edwards, 1990), ou la force (Chaiken, Pomerantz, & Giner-Sorolla, 1995; Chaiken &

Yates, 1985; Giner-Sorolla, 2001) des attitudes, ou encore leurs effets sur le

comportement (Norman, 1975; van den Berg, et al., 2005). Enfin, plusieurs domaines

d’attitudes ont été couverts, tels que les attitudes politiques (Abelson, et al., 1982), les

attitudes pour la nourriture (Aikman, Crites, & Fabrigar, 2006), ou encore des

attitudes liées à la santé (van den Berg, et al., 2005).

Si cet aspect a été abordé dans plusieurs articles de référence sur l’ambivalence

(Conner & Sparks, 2002; Jonas, et al., 2000; Thompson, et al., 1995), il n’a jamais été

correctement discuté ou testé. Il était donc indispensable d’examiner cette variable

structurelle dans ce programme de recherche. Etant donné qu’elle semble affecter

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plusieurs aspects de la force des attitudes, elle pourrait aussi affecter l’ambivalence

ressentie. Cet aspect sera plus argumenté dans le chapitre suivant, mais on pourrait

supposer qu’une attitude ambivalente basée sur des aspects affectifs sera plus

ressentie (comme ambivalente) qu’une attitude ambivalente basée sur des aspects

cognitifs.

Dans l’étude 1a, l’objectif a donc été d’étudier la différence entre ambivalence

« cognitive » et « affective ». L’une des deux formes d’ambivalence a été rendue

saillante de manière expérimentale, au hasard.

La seconde variable structurelle que j’ai souhaité étudier ici semble triviale : il

s’agit de la proportion d’évaluations positives et négatives formant l’attitude. Elle

semble triviale car elle est prise en compte en partie dans la définition de

l’ambivalence (structurale) et entièrement dans les formules utilisées pour calculer le

score d’ambivalence (voir le chapitre précédent, p. 17). Toutes les formules prenant

en compte les composantes positives et négatives (et non dominantes et conflictuelles)

précisent que l’ambivalence augmente quand le nombre d’évaluations positives et

négatives augmente, et cela en proportions égales (Kaplan, 1972; Katz & Hass, 1988;

Thompson, et al., 1995). C'est-à-dire que les auteurs attribuent systématiquement tous

le même poids aux évaluations positives et négatives. Je considère que ce postulat,

dérivé de la définition même de l’ambivalence, n’est pas toujours vérifié dans la

réalité.

De très nombreuses recherches ont montré dans des domaines variés (évaluatifs,

cognitifs et/ou affectifs) que les aspects positifs et négatifs n’ont pas le même poids. Il

existe en réalité un « biais de négativité » : les aspects négatifs ont plus de « poids »

que les aspects positifs (pour une revue voir Baumeister, Bratslavsky, Finkenauer, &

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Vohs, 2001; et Rozin, 2001). Ce biais n’est jamais pris en compte dans le calcul de

l’ambivalence structurale. Je pense donc que les antécédents structuraux, en termes de

proportion de positivité et de négativité, de l’ambivalence ressentie ne sont pas ceux

postulés par les formules de calcul utilisées. La proportion de positivité et de

négativité devrait donc modérer la relation entre ambivalence structurale (telle que

calculée à l’aide des formules classiques) et ambivalence ressentie, de telle sorte que

la négativité ait plus de poids que la positivité.

Dans l’étude 1b, on a donc fait varier le nombre d’informations positives et

négatives (et donc leur proportion) données aux participants.

4. Conséquence de l’ambivalence ressentie sur le comportement.

Dans un deuxième groupe d’études, les conséquences de l’ambivalence ressentie

sur l’intention comportementale ont été étudiées.

Il est particulièrement intéressant d’étudier les conséquences de l’ambivalence

ressentie sur l’intention de comportement. En effet, nous avons vu que la plupart des

travaux sur les conséquences de l’ambivalence sur l’intention de comportement

montrent un effet modérateur de l’ambivalence sur les effets des attitudes sur

l’intention : les attitudes ambivalentes prédiraient moins bien le comportement que les

attitudes non-ambivalentes (Armitage & Conner, 2000; Conner, et al., 2003; Conner,

et al., 2002; Povey, et al., 2001; Sparks, Conner, James, Shepherd, & Povey, 2001).

Cependant, la plupart de ces études sont corrélationnelles, et les auteurs dichotomisent

l’ambivalence autour de la médiane. Jonas et al. (1997), qui ont, eux, utilisé une

méthode expérimentale, montrent des effets inverses. En outre, nous avons vu que

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l’ambivalence ressentie pouvait avoir un effet principal sur le traitement de

l’information (Nordgren, et al., 2006). Il était donc important d’approfondir les

connaissances de ces effets sur l’intention de comportement sur différents points.

Premièrement, est-ce qu’une attitude ambivalente est systématiquement moins

prédictrice d’intention de comportement qu’une attitude non-ambivalente ? Ces effets,

montrés pour la plupart dans des études corrélationnelles, ne seraient-ils pas dus à

d’autres aspects des ces attitudes ambivalentes ? Par exemple, les attitudes

ambivalentes pourraient être aussi moins accessibles que les attitudes non-

ambivalentes, ou encore la certitude envers une attitude ambivalente pourrait être plus

faible que celle envers une attitude non-ambivalente. Les effets modérateurs sur

l’intention de comportement pourraient être dus à ces variables confondues. Comme

le montrent les travaux de Krosnick et collègues (Bizer & Krosnick, 2001; Krosnick,

Boninger, Chuang, Berent, & Carnot, 1993; Visser, Bizer, & Krosnick, 2006), il

existe différentes formes de force des attitudes, et non un seul concept de « force ».

Donc une attitude ambivalente pourrait ne pas posséder les autres aspects de faiblesse,

tels que l’incertitude, ou le manque d’importance. Par exemple, si une attitude

ambivalente est stable, ou accessible (facile à se remémorer) (Fazio, Chen, McDonel,

& Sherman, 1982; Glasman & Albarracin, 2006), prédit-elle toujours moins le

comportement qu’une attitude moins ambivalente ?

Dans l’étude 2a, j’ai donc souhaité examiner si une attitude ressentie comme

ambivalente peut être prédictrice d’une intention de comportement, si elle est

accessible. On a donc manipulé l’accessibilité des évaluations positives et négatives,

puis on a mesuré les deux formes d’ambivalence et l’intention de comportement.

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Deuxièmement, il était indispensable d’étudier l’ambivalence ressentie comme

modérateur des effets de l’information sur l’intention de comportement. En effet, dans

la plupart des études portant sur l’ambivalence et l’intention de comportement, la

modération est mise en évidence entre les attitudes et l’intention de comportement, et

non entre l’information reçue et l’intention de comportement (voir par ex., Armitage

& Conner, 2000; Conner, et al., 2003; Conner, et al., 2002; Povey, et al., 2001;

Sparks, et al., 2001). Je considère d’une part que d’un point de vue appliqué, il serait

intéressant de mettre en évidence que l’ambivalence affecte les effets des informations

reçues, afin de transposer les résultats à la persuasion à travers des message préventif.

D’autre part, j’ai choisi d’utiliser les informations et non les attitudes comme variable

indépendante pour une question méthodologique et statistique. En effet, l’ambivalence

ressentie dépend, en théorie, ne serait-ce que partiellement, de la structure de

l’attitude. Ou encore, la « méta-attitude » dépend de l’ « attitude ». L’ambivalence

ressentie devrait donc être plutôt un médiateur des effets de l’attitude sur l’intention

de comportement.

Dans l’étude 2b, l’ambivalence ressentie a été testée comme modérateur des

effets de l’information sur l’intention de comportement. On a donc manipulé le type

d’information disponible pour le participant, puis on a mesuré les deux formes

d’ambivalence et l’intention de comportement.

Dans une troisième étude, j’ai finalement examiné si l’ambivalence ressentie

médiatisait les effets des attitudes sur l’intention de comportement, comme suggéré

précédemment. L’ambivalence ressentie est une méta-attitude, ou un jugement de sa

propre attitude (Bassili, 1996). Elle devrait donc être affectée par l’attitude, ne serait-

ce que modérément. De plus, l’ambivalence ressentie devrait affecter l’intention de

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comportement, car elle représente une sorte de « résumé » de l’attitude, et qu’elle est

parfois associée à de l’inconfort (Nordgren, et al., 2006; van Harreveld, Rutjens, et al.,

2009; van Harreveld, van der Pligt, et al., 2009). Selon moi, tout comme

l’ambivalence ressentie affecte le traitement de l’information (Nordgren, et al., 2006),

l’ambivalence ressentie affectera l’intention de comportement. Enfin, les effets de

l’attitude sur l’intention de comportement devraient être médiatisés par ce « résumé »

subjectif de l’attitude, qui le plus souvent est associé à de l’inconfort qu’on essaie de

diminuer (Nordgren, et al., 2006; van Harreveld, van der Pligt, et al., 2009).

Cependant, comme nous l’avons vu dans l’introduction, la relation entre attitude et

méta-attitude, en particulier dans le cas de l’ambivalence, peut être modérée par de

nombreux facteurs, notamment par exemple l’implication (de Liver, et al., 2005;

Tormala & DeSensi, 2008). En conséquence, l’hypothèse est celle d’un processus de

médiation modérée : l’ambivalence ressentie devrait plus médiatiser les effets de

l’attitude sur l’intention de comportement quand on est fortement impliqué que quand

on l’est peu.

Dans l’étude 2c, l’ambivalence ressentie a été examinée comme médiateur des

effets de l’attitude sur l’intention de comportement. De plus, j’ai pensé que

l’ambivalence ressentie pouvait varier en fonction de l’implication. On a donc

manipulé les évaluations saillantes chez les participants (négatives, positives ou

positives et négatives) ainsi que l’implication des participants dans le domaine. Puis

on a mesuré les deux formes d’ambivalence et l’intention de comportement.

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5. Présentation des 5 études

Je vais maintenant présenter le domaine d’application choisi pour la thèse, et les

différentes variables utilisées dans les recherches empiriques (voir Tableau 1 p.49).

5.1. Pertinence de l’ambivalence dans le domaine de la santé

Pour les études présentées ici, le domaine choisi est celui de la santé et de la

prédiction des comportements risqués. De nombreuses recherches sur l’ambivalence

portent sur ce domaine (Armitage, 2003; Armitage & Conner, 2000; Conner, et al.,

2003; Conner, et al., 1998; Conner, et al., 2002; Povey, et al., 2001). C’est un

domaine particulièrement approprié puisqu’à la plupart des comportements risqués on

peut associer des aspects positifs (par exemple le plaisir de prendre l’apéritif avec ses

amis) aussi bien que des aspects négatifs (par exemple l’augmentation des risques de

maladies cardiovasculaires ou hépatiques). Deux comportements ont été choisis pour

les travaux présentés ici : l’exposition au soleil, et la consommation de produits

sucrés5. Nous avons opté pour deux domaines fortement ambivalents, dans le sens

qu’ils présentent des avantages hédoniques immédiats (par exemple, bronzer)

balancés par des risques à plus ou moins long terme (par exemple, des coups de

soleils, une prise de poids, ou des maladies).

5 Seule l’étude 2b du chapitre 3 porte sur la consommation de produits sucrés. Cette étude a été

financée par l’INPES (avec l’étude 2 du chapitre 2), et nous souhaitions étudier deux domaines

différents.

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5.2. Les antécédents de l’ambivalence ressentie.

Dans l’étude 1a, deux formes d’ambivalence étaient comparées : une

ambivalence « cognitive » et une ambivalence « affective6 ». Dans cette étude, j’ai

donc manipulé quelle forme d’ambivalence était saillante pour les participants. Pour

cela, ces derniers étaient répartis au hasard dans deux groupes, l’un dans lequel ils

devaient se concentrer sur les aspects positifs et négatifs de l’exposition au soleil

(ambivalence cognitive), l’autre dans lequel ils devaient se concentrer sur ce qu’ils

ressentaient de positif et de négatif en pensant à l’exposition au soleil (ambivalence

affective). Puis l’ambivalence structurale et l’ambivalence ressentie étaient mesurées.

Le type d’ambivalence devrait affecter la relation entre ambivalence structurale et

ambivalence ressentie de telle sorte que l’ambivalence devrait être plus ressentie

quand les composantes affectives sont saillantes.

Dans l’étude 1b, j’ai manipulé la proportion d’informations positives et

négatives concernant l’exposition au soleil reçue par les participants. Soient les

participants recevaient deux informations négatives, soit deux positives, soit une

négative, soit une positive, soit une positive et une négative. Puis les ambivalences

structurales et ressenties étaient mesurées. Le type d’information reçue devrait

affecter la relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie de telle

sorte que les informations négatives aient plus de poids que les informations positives.

C’est-à-dire que la relation ne soit la même quand la proportion d’informations

négatives augmente et quand la proportion d’informations positives augmente.

6 Ici, j’ai choisi d’appeler ambivalence affective une ambivalence basée sur les composantes affectives

de l’attitude. Je n’entends pas par là une ambivalence au niveau émotionnel (par exemple, la tristesse et

la joie).

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5.3. Les conséquences de l’ambivalence ressentie sur l’intention de

comportement.

Dans l’étude 2a, l’ambivalence ressentie a été renforcée en augmentant

l’accessibilité simultanée des évaluations positives et négatives concernant

l’exposition au soleil (Newby-Clark, et al., 2002). Les participants devaient donc soit

reporter leurs évaluations positives et négatives de l’exposition au soleil sur un seul

questionnaire, soit sur 3 questionnaires. Dans un groupe contrôle, les participants ne

remplissaient pas de questionnaire. Puis les ambivalences structurales et ressenties

étaient mesurées, ainsi que l’intention de s’exposer au soleil. J’ai fait l’hypothèse que

même si l’ambivalence ressentie augmente, quand l’attitude devient plus accessible,

elle devrait être plus prédictrice de l’intention de comportement.

Dans l’étude 2b, on a manipulé la proportion d’informations positives et

négatives concernant la consommation de produits sucrés reçue par les participants.

Soit les participants recevaient deux informations négatives, soit deux positives, soit

une négative, soit une positive, soit une positive et une négative. Puis les

ambivalences structurales et ressenties étaient mesurées, ainsi que l’intention de

s’exposer au soleil. L’ambivalence ressentie devrait modérer les effets des

informations sur l’intention de consommer des produits sucrés, de telle sorte que plus

on ressent d’ambivalence, plus l’information devrait affecter l’intention de

comportement.

Dans l’étude 2c, on a manipulé le type d’évaluations saillantes pour le

participant. A l’aide de questionnaires autobiographiques biaisés concernant

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l’exposition au soleil (Chaiken & Baldwin, 1981), les participants étaient placés en

condition soit d’évaluations positives saillantes, soit d’évaluations négatives

saillantes, soit d’évaluations positives et négatives saillantes. Dans un groupe contrôle

le questionnaire n’était pas biaisé. On a aussi manipulé l’implication des participants

en les impliquant plus ou moins dans les risques liés à l’exposition au soleil. Puis les

ambivalences structurales et ressenties étaient mesurées, ainsi que l’intention de

s’exposer au soleil. Les évaluations saillantes devraient affecter l’ambivalence

ressentie en fonction de l’implication des participants. De plus, l’ambivalence

ressentie devrait affecter l’intention de s’exposer au soleil.

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Tableau 1 : Vue d’ensemble des études menées.

Variables indépendantes Variables dépendantes

Chapitre Etude structure de l'attitude ambivalence structurale

Autre variable ambivalence

ressentie Contrôle perçu

intention de comportement

1a ambivalence affective vs

ambivalence cognitive / /

/

3

1b /

nombre d'informations

positives P et négatives

N: 2N vs 1N vs 1N1P vs

1P vs 2P /

/ /

2a

accessibilité de

l'ambivalence: Forte vs

moyenne vs faible

préférence pour la

cohérence

Contrôle perçu

envers

l’exposition au

soleil

intention de

s'exposer au

soleil

2b /

nombre d'informations

positives P et négatives

N: 2N vs 1N vs 1N1P vs

1P vs 2P /

/

intention de

consommer des

produits sucrés 4

2c

Evaluations saillantes :

positives vs négatives vs

positive et négatives vs

contrôle

Mesurée

Ambivalence =

(P + N)/ 2 -│P-N│

implication: forte vs

faible

Mesurée

/

intention de

s'exposer au

soleil

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Chapitre 3

Antécédents de l’ambivalence ressentie :

Les modérateurs de la relation entre ambivalence structurale et

ambivalence ressentie

7

Introduction

Examinons la plainte du jeune Linus décrite dans l’image ci-dessus. Le cœur de

Linus est fait d’amour et de haine, et il n’aime pas ça. Quand il réalise que deux

évaluations sont en conflit, il demande la paix. Quand réalise-t-on qu’on aime et

qu’on n’aime pas un même objet ? Quand ressent-on de l’ambivalence ? Cette

question fait l’objet des deux études présentées dans ce chapitre. Nous nous

intéresserons aux modérateurs de la relation entre ambivalence structurale et

ambivalence ressentie.

Dans le cas de Linus, on peut penser à un modérateur personnel : d’un naturel

angoissé (particulièrement quand il est sans sa couverture), il trouverait le conflit

entre amour et haine particulièrement désagréable. Ici, je m’attacherai plutôt à des

7 Linus : « Lucy dit qu’une moitié de notre cœur est remplie de haine, et une moitié est remplie

d’amour… Et elle dit que cette haine et cet amour se disputent tout le temps en nous… Toujours en

train de se quereller, de se battre, de lutter… La paix ! »

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modérateurs situationnels, et plus spécifiquement à des modérateurs concernant la

structure de l’attitude.

1. Relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie

1.1. Différences entre les deux types de mesures

Nous avons vu précédemment que Bassili (1996) a détaillé la nécessité de

distinguer les mesures directes (ou « méta-jugements ») et indirectes (ou mesures

« opératoires ») des attitudes, notamment de la force des attitudes.

L’ambivalence ressentie est donc mesurée par des indices « méta-attitudinaux »,

basés sur l’impression subjective des participants concernant leur propre attitude : les

participants doivent établir s’ils ont l’impression d’être ambivalents.

Alors que l’ambivalence structurale est mesurée indirectement, par des indices

« opératoires », c'est-à-dire liés aux processus de jugement responsables de l’attitude :

on mesure les processus d’évaluations positives et négatives. Cette mesure se fait

donc à l’insu du participant, sans demander explicitement son ambivalence.

Nous avons aussi vu dans l’introduction que Bassili considère ces deux formes

d’indices de la force des attitudes comme deux mesures du même concept ou du

même processus. Cependant, Holbrook et Krosnick (2005) ont montré que les

mesures opératoires et méta-attitudinales sont des indices de deux variables latentes

différentes. Si les structures des deux types de mesures étaient très différentes, et

impliquaient des processus très différents (par exemple, des catégorisations rapides,

comme pour les mesures implicites, et de l’autoévaluation sur des échelles), on

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pourrait faire l’hypothèse que les résultats de Holbrook et Krosnick peuvent être

expliqués par cette différence de structure plus que par une différence de concept.

Nous pensons que dans le cas de l’ambivalence, les indices ont une structure

comparable. Le plus souvent, ils sont tous les deux basés sur des échelles

d’autoévaluations en 7 points. Nous pensons donc que les deux formes d’ambivalence

représentent deux processus psychologiques différents.

1.2. Différence entre les concepts

On peut avoir une attitude ambivalente sans se sentir ambivalent ; on peut se

sentir ambivalent sans avoir d’attitude ambivalente. Bien qu’on puisse faire des

évaluations positives et négatives d’un objet ou d’une personne, on peut ne pas être

conscient de cette ambivalence, ou ne pas vouloir l’exprimer. On peut aussi ressentir

de l’ambivalence sans avoir une attitude formée d’évaluations positives et négatives,

par exemple si son attitude est en conflit avec celle de ses proches (Priester & Petty,

2001).

a. Ambivalence structurale sans ambivalence ressentie

Ainsi, on peut mesurer une ambivalence implicite, révélée par une forme

modifiée du test d’associations implicites (Implicit Association Test ou IAT,

Greenwald, McGhee, & Schwartz, 1998) après un changement d’attitude. Cette

ambivalence semble avoir les mêmes effets sur le traitement de l’information que

l’ambivalence explicite (Petty, et al., 2006). Cependant, cette ambivalence n’affecte

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pas l’ambivalence ressentie, telle que mesurée par les indices typiques d’ambivalence

ressentie (Priester & Petty, 1996).

b. Ambivalence ressentie sans ambivalence structurale

Les mêmes auteurs (Priester & Petty, 2001) montrent aussi qu’on peut ressentir

de l’ambivalence quand son attitude n’est pas positive et négative, mais quand elle va

à l’encontre de l’attitude de nos proches. Par exemple, quelqu’un qui aime manger de

la viande mais dont les amis sont végétariens, pourra se sentir ambivalent envers la

viande, à l’occasion d’un repas en commun.

1.3. Une relation qui varie

La relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie n’a été, à

notre connaissance, que peu étudiée jusqu'à présent. Dans certains cas, la raison en est

qu’une seule forme d’ambivalence n’est envisagée dans l’étude : soit l’ambivalence

ressentie (par ex., Conner & Sparks, 2002; de Liver, et al., 2005), soit l’ambivalence

structurale (par ex., Armitage, 2003; Armitage & Conner, 2000; Conner, et al., 1998;

Conner, et al., 2002; Lavine, et al., 1998; Povey, et al., 2001; Urland & Ito, 2005).

Quand les deux types de mesures sont présents, leur relation n’est pas toujours

analysée de la même manière, et rarement discutée. Ainsi, Conner, Povey, Sparks,

James et Shepherd (2003) dichotomisent leurs mesures le long de la médiane et

conduisent des tests-t. De leur côté, Costarelli et Colloca (2004) et Bassili (1996) font

des analyses de corrélations, et Holbrook et Krosnick (2005) utilisent les équations

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structurales. Tous obtiennent des relations de taille modérée. Par exemple, dans les

études consultées, les β se situent entre .43 et .49, et les r entre 0 et .41. Il n’existe pas

de méta-analyse disponible sur ce sujet.

Ces variations peuvent être dues à plusieurs facteurs : différences entre les

mesures, variables individuelles et variables situationnelles. Ces trois types de

facteurs ont été explorés récemment dans différentes études (Newby-Clark, et al.,

2002; Priester & Petty, 1996; 2001; Thompson & Zanna, 1995).

1.4. Pourquoi l’ambivalence serait-elle plus ou moins ressentie ?

Pour pouvoir être ressentie, l’ambivalence doit être accessible en mémoire.

Quand on demande explicitement au participant « pensez vous que votre attitude

envers X est ambivalente ? » celui-ci doit avoir en mémoire non seulement

l’association entre X et son évaluation globale, mais aussi entre X, son évaluation, et

les propriétés de cette évaluation (Bassili, 1996). Par exemple, quand on pose cette

question concernant l’exposition au soleil, le participant ne doit pas se demander

seulement ce qu’il aime et n’aime pas dans l’exposition au soleil (ce qui serait

l’équivalent de l’attitude globale, ou de l’ambivalence structurale). Il doit aussi avoir

en mémoire d’autres propriétés : par exemple quel poids il accorde aux différents

attributs, s’il est sûr de lui, ou encore établir si le conflit est suffisant pour parler

d’ambivalence.

Ce qui n’est pas nécessairement toujours le cas : les évaluations forment

l’attitude elle-même, mais ses propriétés sont secondaires, et on peut penser qu’il

serait trop coûteux de les avoir toujours en mémoire. Bref, selon Bassili (1996),

l’accès aux processus mentaux liés aux attitudes peut être plus ou moins direct, et

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requiert une conscience de ses propres fonctionnements psychiques que les gens ont

rarement.

1.5. Quand l’ambivalence serait-elle plus ou moins ressentie ?

a. Différences interindividuelles

L’ambivalence ressentie est liée à différents traits de personnalité et échelles

psycho-sociales. Thompson et Zanna (1995) ont établi que plus les gens avaient

“besoin de cognition” (Need for Cognition, Cacioppo & Petty, 1982), moins ils

ressentaient d’ambivalence et plus ils avaient “peur de l’inexactitude” (Personal Fear

of Invalidity, Freund, Kruglanski, & Shiptajzen, 1985), plus ils ressentaient

d’ambivalence. Newby-Clark et al. (2002) ont établi que la préférence pour la

cohérence (Preference for Consistency, Cialdini, et al., 1995), modérait les effets de

l’accessibilité simultanée des éléments positifs et négatifs sur la relation entre

ambivalences structurale et ressentie : plus l’accessibilité augmente, plus la relation

est forte. Plus la préférence pour la consistance est importante, plus cet effet

augmente.

b. Variables situationnelles

Newby-Clark et al. (2002), dans trois études, ont mesuré et manipulé

l’accessibilité simultanée des éléments positifs et négatifs des attitudes. Plus cette

accessibilité augmente, plus la relation entre ambivalences structurale et ressentie est

forte.

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Thompson et Zanna (1995) ont montré que plus les participants étaient

impliqués dans le domaine d’attitude, plus ils ressentaient d’ambivalence. De plus,

l’implication augmente les effets des traits de personnalité (besoin de cognition et

peur de l’inexactitude) sur l’ambivalence.

Il a aussi été établi que l’ambivalence ressentie pouvait résulter d’un conflit

interpersonnel (plutôt qu’intrapersonnel) (Priester & Petty, 2001) : plus notre attitude

personnelle est en conflit avec celles d’autres personnes (et plus ces personnes nous

sont proches), plus on ressent d’ambivalence.

1.6. Les modérateurs structuraux de la relation entre ambivalence structurale et

ambivalence ressentie

D’un intérêt particulier, et pourtant peu étudiées, sont les variables propres à

l’attitude elle-même, spécifiquement les variables liées à la structure de l’attitude.

Sans doute sont elles peu étudiées car la structure d’une attitude ambivalente est

présente dans sa définition : l’ambivalence représente le degré de conflit entre des

évaluations positives et négatives. Donc, une attitude devrait être ressentie comme

ambivalente si elle est composée d’éléments positifs et négatifs. Plus ces éléments

sont nombreux, et également nombreux, plus l’attitude sera ambivalente (voir par

exemple Kaplan, 1972; Thompson, et al., 1995). Cependant, il semble que la relation

ne soit pas si simple.

Priester et Petty (1996) ont mesuré et manipulé le nombre de composantes

dominantes et conflictuelles de l’attitude et ont établi un modèle de « seuil » : au

dessous d’un certain seuil de composantes conflictuelles, l’ambivalence ressentie

dépend du nombre de composantes dominantes et conflictuelles : plus il existe de

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composantes dominantes, moins la personne ressent d’ambivalence. Passé le seuil

d’une composante conflictuelle, le nombre de composantes dominantes n’affecte plus

l’ambivalence ressentie. Seules les composantes conflictuelles l’affectent de telle

sorte que plus il y a de composantes conflictuelles, plus on ressent d’ambivalence,

mais plus elles sont nombreuses, plus cet effet diminue (voir la formule chapitre 1, p.

18).

Notons toutefois que ce modèle ne prend en compte ni la valence, ni la nature –

affective, cognitive ou comportementale – de ces composantes dominantes et

conflictuelles. Ce sont ces distinctions que nous voulons étudier ici.

2. Les études présentées ici

Peu d’auteurs ont étudié les éventuelles variables structurelles, propres à

l’attitude, qui pouvaient affecter le ressenti de l’ambivalence. Cependant, il existe des

variables structurelles autres que le nombre d’éléments positifs et négatifs, qui

pourraient interagir avec ce dernier pour influencer le ressenti.

Un des modèles les plus classiques de la structure des attitudes est le modèle

tripartite. Il distingue 3 types de composantes : affectives, cognitives et

comportementales (voir par ex., Breckler, 1984; Breckler & Wiggins, 1989; Chaiken,

et al., 1995; Kramer, 1949; Smith, 1947). Une attitude peut être formée

principalement de composantes affectives, c'est-à-dire qu’on se base essentiellement

sur ce qu’on ressent envers l’objet (par exemple, l’attitude envers les araignées). Ou

elle peut être formée principalement de composantes cognitives, c'est-à-dire qu’on se

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base essentiellement sur les aspects informationnels de l’objet (par exemple, l’attitude

envers une nouvelle assurance pour sa voiture). La plupart des attitudes comprennent

les deux types de composantes. Si les effets de variations dans ces composantes ont

été étudiés dans le domaine de la persuasion et du changement d’attitudes (voir par

exemple Chaiken & Yates, 1985; Norman, 1975), ou de la force des attitudes (van den

Berg, et al., 2006), ils n’ont été que peu étudiés dans le domaine de l’ambivalence, et

jamais dans celui de l’ambivalence ressentie.

Dans une première étude (Etude 1), j’ai donc fait varier les composantes de

l’attitude ambivalente. Le but était d’examiner si une ambivalence basée sur des

composantes affectives serait plus ressentie qu’une ambivalence basée sur des

composantes cognitives.

Dans une deuxième étude, j’ai fait varier la proportion de positivité et de

négativité dans les composantes de l’attitude. Dans la plupart des modèles et des

formules de calcul de l’ambivalence, les auteurs présument que l’ambivalence est

maximale quand les proportions de positivité et de négativité sont égales (Kaplan,

1972; Katz & Hass, 1988; Thompson, et al., 1995). Même Ullrich et al. (2008), dans

leur modèle multivarié, décident de faire le même postulat : les évaluations positives

et négatives devraient avoir le même poids. Pourtant, de nombreuses études attestent

que ce n’est pas toujours le cas. Une littérature riche sur l’asymétrie met en avant

qu’une information négative a plus de poids qu’une information positive : on parle du

biais de négativité (pour une revue de questions, voir Baumeister, et al., 2001; Rozin,

2001).

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Etude 1a : Ambivalence affective vs ambivalence cognitive

1. Introduction

Les recherches sur l’ambivalence prenant en compte la distinction entre

éléments cognitifs et affectifs dans la structure de l’attitude sont rares (Bell, Esses, &

Maio, 1996; de Liver, et al., 2005; Maio, Esses, & Bell, 2000). Pour la plupart, elles

utilisent cette distinction comme modérateur des conséquences de l’ambivalence, sur

le traitement de l’information ou sur le comportement. Nous souhaitons ici étudier ses

effets sur l’ambivalence ressentie. Le but est de déterminer si une ambivalence

« affective » sera plus ou moins ressentie qu’une ambivalence « cognitive ».

Mon hypothèse est qu’une ambivalence « affective » sera plus ressentie qu’une

ambivalence « cognitive ». C'est-à-dire qu’on ressentira plus d’ambivalence si un

objet est associé à des sensations positives et négatives, que s’il est associé à des

caractéristiques positives et négatives. Et ceci parce que les contradictions

« affectives » devraient être plus saillantes, donc plus ressenties, que les

contradictions « cognitives ».

En effet, selon Fazio (1995), les attitudes basées sur des composantes affectives

sont formées d’associations (entre l’objet d’attitude et les évaluations) plus fortes. De

plus, selon van den Berg, Manstead, van der Pligt, et Wigboldus (2006), les attitudes

basées sur l’affect sont plus accessibles que les attitudes basées sur la cognition

(l’accessibilité étant mesurée à l’aide de la rapidité des réponses), et selon d’autres

études, ceci est vrai particulièrement quand l’attitude est ambivalente (Lavine, et al.,

1998). Enfin, dans le cas particulier de l’ambivalence, l’individu est probablement

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plus souvent confronté à des incohérences ou contradictions cognitives qu’affectives :

il nous arrive plus souvent de trouver qu’un objet est utile mais cher, que de trouver

qu’il nous rend triste et heureux à la fois. Les contradictions cognitives, plus

familières, devraient donc être moins saillantes.

En conclusion, pour des raisons de force d’associations, d’accessibilité et de

familiarité, l’ambivalence affective devrait être plus saillante, donc plus ressentie, que

l’ambivalence cognitive.

2. Méthode

2. 1. Participants et procédure

Cinquante-cinq internautes participèrent à l’étude (35 femmes et 16 hommes, 4

participants n’ont pas répondu à la question concernant le sexe) âgés de 18 à 43 ans

(M = 28.8, ET = 4.97). Les participants furent recrutés à l’aide de messages

électroniques envoyés par l’expérimentatrice puis transférés par les participants

(méthode dite « de la boule de neige »). Ils furent répartis au hasard parmi les 2

conditions de l’expérience : ambivalence cognitive vs. ambivalence affective. Ils

répondirent à un questionnaire en 3 parties: un questionnaire concernant leurs

évaluations positives et négatives de l’exposition au soleil et une mesure

d’ambivalence. Pour finir, on leur demandait aussi leur type de peau afin de s’assurer

que les participants étaient comparables du point de vue de l’exposition aux risques

solaires (voir les annexes 1a et 1b)8.

8 Le phototype des participants a été mesuré dans toutes les études portant sur l’exposition au soleil

rapportées ici. Cependant, cette variable n’a affecté aucun des résultats, et ne sera donc pas discutée ici.

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2. 2. Variables indépendantes

a. Type d’ambivalence accessible

Selon la condition, soit une ambivalence structurale portant sur les composantes

cognitives de l’attitude, soit une ambivalence structurale portant sur les composantes

affectives de l’attitude fut rendue plus saillante pour le participant (voir Chaiken, et

al., 1995). Dans les deux conditions, les participants devaient répondre à 8 questions

concernant l’exposition au soleil. Dans la condition « ambivalence cognitive », ils

devaient se concentrer sur les « aspects » positifs et négatifs de l’exposition au soleil.

Les questions étaient formulées de la manière suivante, focalisée sur une évaluation

cognitive (voir annexe 2a (1):

Ne considérez pas les aspects mauvais et concentrez vous uniquement sur les

bons aspects de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose de bon ?

Puis

Ne considérez pas les bons aspects et concentrez vous uniquement sur les

aspects mauvais de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose de mauvais ?

Chaque question était suivie d’une échelle en 4 points. Les 8 questions portaient

sur les aspects suivants : bons/mauvais, bénéfique/dangereux, intelligent/idiot, et

sain/malsain. Dans la condition « ambivalence affective », les participants devaient se

concentrer sur ce qu’ils ressentaient en pensant à l’exposition au soleil. Les questions

étaient formulées de la manière suivante, focalisée sur une évaluation affective (voir

annexe 2a (2):

Ne considérez pas tout ce qui vous rassure et considérez uniquement ce qui vous

inquiète. A quel point vous sentez-vous inquiet(e) quand vous pensez à « s’exposer au

soleil »?

Puis

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Ne considérez pas tout ce qui vous inquiète et considérez uniquement ce qui

vous rassure. A quel point vous sentez-vous rassuré(e) quand vous pensez à

« s’exposer au soleil » ?

Chaque question était suivie d’une échelle en 4 points. Les 8 questions portaient

sur les affects suivants : inquiet(e)/rassuré(e), attiré(e)/rebuté(e),

satisfait(e)/insatisfait(e), et à l’aise/mal à l’aise.

b. Ambivalence structurale

L’ambivalence structurale était mesurée à l’aide de 2 items, sur des échelles en 7

points. Les participants indiquaient dans quelle mesure ils trouvaient l’exposition au

soleil positive puis négative (voir annexe 2b). L’ambivalence structurale était calculée

ensuite avec la formule de Griffin (Thompson, et al., 1995) : Ambivalence = (P+N)/2-

P-N.

2. 3. Variable dépendante

L’échelle d’ambivalence ressentie comprenait 3 items : les participants devaient

répondre sur des échelles en 7 points dans quelle mesure ils pensaient que leur attitude

était mitigée, contradictoire et floue. Ces items étaient présentés dans un ordre fixe

(voir annexe 2b).

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3. Résultats

3.1. Ambivalence structurale (M = 2.67, ET = 2.18, min = -2, max = 7)

Une ANOVA à un facteur (manipulation) montre que l’ambivalence structurale

n’est pas affectée par notre manipulation, F(1, 54)= 1.07, ns.

3. 2. Ambivalence ressentie (M = 3.61, ET = 1.45, min = 1, max = 7)9

Les trois items d’ambivalence ressentie montrent un indice de consistance

interne insuffisant (α=.68). De plus, les corrélations entre items sont significatifs mais

de taille modeste compte tenu du fait qu’ils sont supposés mesurer la même chose (r

compris entre .36 et .48, p<.05). J’ai donc décidé de conduire des analyses de

régression sur les 3 items séparément, en utilisant le type d’ambivalence accessible

(affectif vs cognitif), l’ambivalence structurale, et l’interaction des deux facteurs

comme variables indépendantes.

a. Attitude mitigée (M = 3.98, ET = 1.87, min = 1, max = 7)

Seule l’ambivalence structurale affecte dans quelle mesure les participants

trouvent leur attitude mitigée (β = .25, t = 2.08, p<.05). Aucun effet du type

d’ambivalence accessible n’est observé, ni principal (β = -.12, t = -.51, ns) ni

d’interaction avec l’ambivalence structurale (β = .09, t = .73, ns).

9 La corrélation entre ambivalences structurale et ressentie est de r = .43, p<.01. En détaillant

l’analyse item par item, l’ambivalence structurale n’est pas corrélée avec l’item « contradictoire », r =

.12, ns ; elle est corrélée avec les items « mitigée », r = .36, p<.01, et « floue », r = .55, p<.01.

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c. Attitude floue (M = 3.67, ET = 1.88, min = 1, max = 7)

L’ambivalence structurale n’affecte pas dans quelle mesure les participants

trouvent leur attitude floue : on n’observe pas d’effet principal de l’ambivalence sur

ce score (β = .13, t = 1.12, ns). On n’obtient pas non plus d’effet d’interaction entre

l’ambivalence et notre manipulation (β = .06, t = .49, ns). Seul le type d’ambivalence

accessible affecte marginalement dans quelle mesure les participants trouvent leur

attitude floue (β = .46, t = 1.89, p=.06) : l’ambivalence ressentie est plus forte quand

l’ambivalence accessible est affective que quand celle-ci est cognitive.

d. Attitude contradictoire (M = 3.16, ET = 1.79, min = 1, max = 7)

L’ambivalence structurale affecte marginalement dans quelle mesure les

participants trouvent leur attitude contradictoire (β = .22, t = 1.91, p=.06). Le score

n’est pas affecté par la manipulation (β = .21, t = .91, ns). Le type d’ambivalence

accessible module la relation entre ambivalence structurale et ambivalence ressentie :

l’ambivalence structurale est plus ressentie quand elle est basée sur des éléments

affectifs que quand elle est basée sur des éléments cognitifs (β = .23, t = 2.03, p<.05).

1. Discussion

Les hypothèses de départ ne sont que partiellement confirmées par les résultats

de l’étude : le type d’ambivalence – affective ou cognitive – n’affecte qu’une partie

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des items classiques10

d’ambivalence ressentie. La faible validité de l’échelle

d’ambivalence ressentie dans cette expérience a rendu l’analyse individuelle des 3

items préférable.

Cependant, cette étude permet d’obtenir une première indication que

l’ambivalence affective est plus ressentie qu’une ambivalence cognitive. L’hypothèse

qu’une ambivalence « affective » serait plus ressentie qu’une ambivalence

« cognitive » est confirmée par l’analyse de 1 des 3 items de l’échelle (et

marginalement par un autre). En effet, quand l’ambivalence structurale est basée sur

des éléments affectifs, elle affecte plus dans quelle mesure les participants trouvent

leur attitude contradictoire. Aussi, les participants trouvent que leur attitude est

marginalement plus floue quand l’ambivalence est affective que quand elle est

cognitive. En revanche, l’hypothèse n’est pas confirmée par le troisième item : le type

d’ambivalence accessible n’influence pas dans quelle mesure les participants trouvent

leur attitude mitigée.

Dans cette étude, une des limites est la faible fiabilité des trois items, qui remet

en question notre mesure de l’ambivalence ressentie. Les trois items « mitigée »,

« floue », et « contradictoire » ne partagent pas autant de variance qu’on aurait pu le

penser. Ils semblent mesurer des concepts distincts. De plus, ils mettent en cause des

processus différents, puisqu’ils sont influencés par l’ambivalence structurale et le type

d’ambivalence de manières différentes. Aussi, les conditions de passations sur internet

ne sont peut-être pas favorables à ce type de mesure qui demandent une certaine

concentration.

10

Notons que ces items ne peuvent pas vraiment être qualifiés de « classiques » dans leur version

française, puisqu’ils n’ont pas été validés dans cette langue.

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Etude 1b : Proportion d’évaluations positives et négatives saillantes11

.

1. Introduction

A notre connaissance, les différents auteurs sont d’accord sur le fait que quelle

que soit la mesure de l’ambivalence structurale, celle-ci doit augmenter quand le

nombre d’éléments positifs et le nombre d’éléments négatifs augmentent, et

augmentent « de concert » ou dans les mêmes « proportions ».

Notre objectif ici n’est pas de remettre en question la manière de mesurer

l’ambivalence structurale, mais d’explorer si cette symétrie systématique entre positif

et négatif, postulée dans la mesure, ne biaiserait pas la relation entre ambivalence

structurale et ambivalence ressentie.

En effet, ces mesures ne prennent pas en compte le biais de négativité, mis en

évidence dans de nombreuses recherches (voir par exemple Cacioppo & Berntson,

1994; Cacioppo, et al., 1997; Ito & Cacioppo, 2005; Ito, Larsen, Kyle Smith, &

Cacioppo, 1998) ; (pour une revue de littérature, voir par exemple aussi Baumeister,

et al., 2001; Rozin, 2001). Il a été montré à plusieurs reprises que les informations

négatives ont plus de poids que les informations positives, différence qui n’est pas

présente dans les mesures d’ambivalence structurale.

11 Cette étude a été financée par l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé

(INPES) dans le cadre d’un programme de recherches sur les messages de prévention et attitudes

ambivalentes par rapport aux risques. Elle a fait l’objet en 2007 d’une présentation à la 21ème

Conférence de la Société Européenne de Psychologie de la Santé (EHPS) à Maastricht.

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Prenons l’exemple de la mesure de Griffin (Thompson, et al., 1995) (mais le

raisonnement peut être le même pour les autres mesures) :

Ambivalence = (P+N)/2-P-N

Note : P représente les évaluations positives et N les évaluations négatives

Selon cette mesure, l’ambivalence ressentie devrait être maximale quand P et N

sont grands et

P = N.

Mais, si on prend en compte le biais de négativité, alors P et N ont des poids (w)

différents (respectivement w et W, w<W) et N a plus de poids que P, alors en réalité,

l’ambivalence devrait être plus ressentie quand :

wP = WN

ce qui équivaut à

P = (W/w) N

Et, étant donné que

W>w

alors

W/w>1

donc l’ambivalence devrait être plus ressentie quand :

P>N

En d’autres termes, il devrait y avoir une asymétrie dans la relation entre les

mesures classiques d’ambivalence structurale et d’ambivalence ressentie, de telle

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sorte que l’ambivalence devrait être plus ressentie quand P augmente que quand N

augmente. Autrement dit, les informations négatives, ayant plus de poids, devraient

faire diminuer le ressenti d’ambivalence plus que les informations positives.

2. Méthode

2.1. Participants et procédure

Cent quatre-vingts treize participants (106 femmes et 87 hommes) prirent part à

l’étude. Ils étaient âgés de 15 à 46 ans (M = 25.45, ET = 5.41). Les participants étaient

issus de la population générale et furent recrutés à Paris par des assistants de

recherche. Ils ont rempli un questionnaire en 2 parties : d’abord ils recevaient des

informations concernant l’exposition au soleil, puis ils devaient remplir un

questionnaire sur leur attitude et leur comportement vis-à-vis de l’exposition au soleil.

2.2. Variables indépendantes

a. Information concernant l’exposition au soleil

L’information concernant l’exposition au soleil reçue par les participants était

manipulée. Les participants devaient lire des informations sur le soleil : soit 2

positives, soit une positive, soit une positive et une négative, soit une négative soit

deux négatives (voir annexe 3). Les informations positives concernaient les bénéfices

de l’exposition au soleil, par exemple :

S’exposer au soleil favorise la synthèse de Vitamine D. Son rôle est

indispensable dans l’équilibre du calcium dans le corps et dans la constitution du

capital osseux (augmente la solidité des os).

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Les informations négatives concernaient les dangers de l’exposition au soleil :

S’exposer au soleil augmente le vieillissement précoce de la peau. Rides, perte

d'élasticité, tâches brunes ou déshydratation de l’épiderme sont autant de signes du

vieillissement prématuré de la peau.

b. Ambivalence structurale envers l’exposition au soleil

L’attitude envers l’exposition au soleil était mesurée avec 4 items. Les

participants devaient reporter sur des échelles en 7 points dans quelle mesure ils

trouvaient que l’exposition au soleil était positive, négative, favorable et défavorable.

A partir des scores à ces 4 items, des indices de positivité (r = .77, p<.001) et de

négativité (r = .75, p<.001) ont été calculés, puis entrés dans la formule de Griffin

pour obtenir un indice d’ambivalence structurale: Ambivalence = (P+N)/2-P-N.

2.3. Variable dépendante

L’ambivalence ressentie était mesurée à l’aide de 4 échelles en 7 points. Les

participants devaient dire dans quelle mesure ils ressentaient leur attitude envers

l’exposition au soleil comme ambivalente, floue, confuse et divisée. La moyenne de

ces 4 items était calculée pour établir un indice d’ambivalence ressentie (α de

Cronbach = .79).

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3. Résultats

3.1. Ambivalence structurale (M = 2.68, ET = 1.97, min = -2, max = 7)

Une ANOVA à un seul facteur (le type d’information) révèle que l’ambivalence

structurale n’est pas affectée par notre manipulation, F (4, 189) = .70, ns).

3.2. Ambivalence ressentie (M = 3.40, ET = 1.41, min = 1, max = 7)

Pour étudier les effets de l’ambivalence structurale et de l’information présentée

aux participants sur l’ambivalence ressentie, une analyse de régression à

comparaisons planifiées a été effectuée. Nous faisions l’hypothèse que l’ambivalence

ressentie augmenterait avec le nombre d’informations positives, jusqu’à un certain

point. Les contrastes testés sont représentés dans le Tableau 2. Le contraste de

l’hypothèse est tel que l’ambivalence est plus forte quand les informations positives

sont un peu plus nombreuses que les informations négatives. Les informations

négatives ayant plus de poids, elles font plus diminuer l’ambivalence. Les autres

contrastes testés sont orthogonaux au contraste de l’hypothèse.

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Tableau 2

Contrastes utilisés pour coder le type d’information présenté dans l’analyse des

effets de l’ambivalence structurale et de l’information sur l’ambivalence ressentie.

Type d’informations présentées

Contraste

2 négatives

(2N)

1 négative

(1N)

1 positive et 1

négative (PN)

1 positive

(1P)

2 positives

(2P)

Hypothèse -2 -2 1 2 1

Alternatif 1 -2 2 1 0 -1

Alternatif 2 -1 1 -2 0 2

Alternatif 3 -1 -1 4 -6 4

Les effets principaux de l’ambivalence structurale (centrée, M = 2,68, ET =

1,97) et des 4 contrastes, ainsi que les effets d’interactions, ont été testés dans

l’analyse. Les résultats révèlent que plus les participants sont ambivalents

(ambivalence structurale), plus ils ressentent de l’ambivalence (β = .151, t (189) =

2.96, p <.01). Cet effet est modéré par le type d’information présenté (β = .072, t

(189) = 2.26, p <.05). L’ambivalence structurale affecte d’autant plus l’ambivalence

ressentie que le nombre d’informations positives augmente. Les autres contrastes ne

sont pas significatifs (voir Tableau 3).

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81

Tableau 3

Prédiction de l’ambivalence ressentie en fonction de l’ambivalence structurale

et du type d’information présenté (coefficients non-standardisés)

Variable β t

Contraste de l’hypothèse .107 1.82 ns

Interaction contraste hypothèse*ambivalence .072 2.26 *

Alternatif 1 -.010 -.14 ns

Alternatif1*ambivalence .073 1.93 ns

Alternatif 2 -.017 -.017 ns

Alternatif 2*ambivalence .032 .92 ns

Alternatif 3 -.020 -.733 ns

Alternatif 3*ambivalence .008 .596 ns

Note. * : significatif à p = .02, ns : non-significatif.

Les analyses en pente simple révèlent le pattern suivant à + 1.5 écart-type et -1.5

écart-type autour de la moyenne (d’ambivalence structurale) :

0

0.5

1

1.5

2

2.5

3

3.5

4

4.5

5

2N 1N PN 1P 2P

Amb faible

Amb forte

Figure 2. Ambivalence ressentie en fonction de l’ambivalence structurale et du

type d’information présenté.

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On peut voir que quand l’ambivalence structurale est faible, l’ambivalence

ressentie est peu influencée par le type d’information présenté12

. Quand l’ambivalence

structurale est forte, l’ambivalence ressentie dépend de l’information présentée, de

telle sorte qu’elle diminue plus quand le nombre d’informations négatives augmente

que quand le nombre d’informations positives augmente.

4. Discussion

Dans l’étude 1b, pour la première fois le biais de négativité (Baumeister, et al.,

2001; Rozin, 2001) a été pris en compte dans le cadre d’une étude sur l’ambivalence.

Les résultats de l’étude 1b confirment notre hypothèse d’asymétrie concernant les

effets des évaluations positives et négatives sur l’ambivalence ressentie. Ils permettent

donc deux avancées : d’une part ils confirment l’existence d’un biais de négativité

dans un nouveau contexte, celui de l’ambivalence. D’autre part pour la première fois

le biais de négativité est pris en compte dans le cadre de l’ambivalence.

Selon le modèle adopté par les mesures classiques d’ambivalence structurale,

l’ambivalence ressentie devrait être maximale quand les participants reçoivent une

information positive et une information négative. Elle devrait ensuite décroitre quand

la proportion de négativité ou de positivité augmente, et ce de manière symétrique. En

d’autres termes, la courbe devrait être un U inversé. Or on voit ici qu’elle est

asymétrique : elle est plus prononcée quand il y a plus d’informations négatives :

l’ambivalence ressentie décroit plus vite quand on augmente le nombre

12

L’ambivalence ressentie augmente cependant fortement quand il y a deux informations négatives : on

peut supposer que les participants peu ambivalents envers l’exposition au soleil sont globalement

positifs et ressentent donc plus d’ambivalence quand ils sont face aux aspects négatifs de l’exposition

au soleil.

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d’informations négatives que quand on augmente le nombre d’informations positives.

Ces résultats confirment la présence d’un biais de négativité. Les informations

négatives ont plus de poids que les informations positives, et font plus diminuer

l’ambivalence ressentie que ces dernières.

Locke et Braun (2009) ont aussi remarqué que les mesures d’ambivalence

structurales classiques (Kaplan, 1972; Thompson, et al., 1995) supposent que les

effets linéaires des évaluations positives et négatives sont identiques. Or nous avons

vu précédemment que ça n’était pas toujours le cas, du moins pour les comportements

d’approche et d’évitement (J. S. Brown, 1948).

Ils préconisent alors d’analyser séparément les effets des évaluations positives et

négatives, puis les effets des interactions entre évaluations positive ou négative et

l’équilibre (balance) de l’attitude (déterminé par la force respective des évaluations

positives et négatives). En utilisant cette méthode pour étudier les antécédents positifs

et négatifs de l’ambivalence ressentie, nous pourrions déterminer leur poids (ou leur

importance) respectifs. Mes résultats vont dans le sens de cette recommandation :

étudier les effets séparément permettrait de soit accorder un poids arbitraire mais

différent aux évaluations positives et négatives, soit d’étudier le poids de ces

évaluations, en leur permettant de varier indépendamment.

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Chapitre 4 :

Conséquences de l’ambivalence ressentie sur l’intention de

comportement

13

Introduction

Observons l’interaction entre Lucy et Linus dans l’image ci-dessus. Quand

Linus se rend compte de son ambivalence, il la ressent, il veut la faire diminuer. Que

va-t-il pouvoir faire une fois qu’il se sera rendu compte que pencher la tête ne sert à

rien ?

Les conséquences de l’ambivalence sur le comportement, l’intention de

comportement ou le traitement de l’information ont maintenant été largement étudiées

(voir chapitre 1). Nous nous attacherons dans ce chapitre aux conséquences de

l’ambivalence sur l’intention de comportement, et précisément sur celles de

l’ambivalence ressentie.

13

Linus : « Lucy, je ne veux pas que mon cœur soit moitié amour et moitié haine. Je ne veux être

qu’amour ! » Lucy : « Très bien, Linus… tout ce que tu as à faire c’est te pencher un peu sur le côté…

Tu vois ? » Charlie Brown « Bonté Divine! ».

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85

1. Ambivalence ressentie et comportement

1.1. Les effets modérateurs de l’ambivalence sur le comportement.

De nombreuses recherches sont été publiées sur les effets de l’ambivalence sur

le comportement et l’intention de comportement, sans qu’il y ait à ce jour de véritable

consensus sur ces effets. La plupart des études révèlent que les attitudes ambivalentes

prédisent moins bien le comportement et/ou l’intention de comportement que les

attitudes non-ambivalentes (Armitage, 2003; Armitage & Conner, 2000; Conner, et

al., 2003; Conner, et al., 1998; Conner, et al., 2002; Povey, et al., 2001; Sparks, et al.,

2001). Cependant, Jonas, Diehl, et Brömer (1997) n’ont pas répliqué les résultats

classiques de moins bonne prédiction : ils ont manipulé les attitudes envers un

nouveau produit (un shampooing), et obtiennent au contraire que les attitudes

ambivalentes (ambivalence structurale manipulée) prédisent mieux l’intention de

comportement.

Toutes les études citées précédemment qui reportent une moins bonne prédiction

des attitudes ambivalentes utilisent une ambivalence (structurale ou ressentie)

mesurée, et non manipulée (excepté Armitage, 2003). L’ambivalence peut donc alors

être confondue avec d’autres variables concernant la force des attitudes. Par exemple,

une attitude ambivalente peut être moins accessible (Bargh, Chaiken, Govender, &

Pratto, 1992) ou moins stable (Bassili, 1996) qu’une attitude non-ambivalente. Nous

pensons que dans les études corrélationnelles, les effets de l’ambivalence peuvent être

dus à d’autres caractéristiques de l’attitude, confondues avec l’ambivalence.

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86

Par ailleurs, la plupart des études portent sur une modération de l’ambivalence

sur les effets des attitudes. Qu’en est-il d’effets modérateurs sur d’autres effets sur le

comportement ? En effet, l’ambivalence est la plupart du temps un covariant de

l’attitude. Quand il s’agit d’ambivalence structurale, il s’agit simplement d’une autre

manière de mesurer l’attitude, et quand il s’agit d’ambivalence ressentie,

l’ambivalence et l’attitude sont souvent corrélées.

Etonnamment, peu de recherches portent sur une modération de l’ambivalence

sur les effets sur le comportement d’autres variables, par exemple le type

d’information disponible. Les recherches existant à propos d’une modération de

l’ambivalence sur les effets des informations portent sur les effets sur le traitement de

l’information, ou sur la persuasion, et non sur l’intention de comportement (Armitage

& Conner, 2000; Clark, et al., 2008; Jonas, et al., 1997; Maio, et al., 1996; Maio, et

al., 2001)

1.2. Des effets directs de l’ambivalence sur l’intention de comportement ?

Nous avons vu que dans la plupart des études, l’ambivalence (structurale ou

ressentie) est étudiée comme variable modératrice : on compare les attitudes

ambivalentes et non-ambivalentes concernant leur degré de prédiction du

comportement ou de l’intention de comportement. Le but ici est d’explorer par quel

processus l’ambivalence peut influencer le comportement. L’ambivalence ressentie a

des effets directs sur le traitement de l’information, et médiatise les effets de l’attitude

sur ce dernier (Nordgren, et al., 2006). De la même manière, existe-t-il des effets

directs de l’ambivalence sur l’intention de comportement ?

Page 87: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

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Conner et Sparks (2002) ont montré que l’ambivalence pouvait avoir un effet

direct sur l’intention de comportement. Ils ont mesuré les attitudes (facteurs cognitifs

et affectifs) et l’ambivalence ressentie envers les relations sexuelles « sans attaches »

(« casual sex »). Des analyses de modération par régression révèlent que les mesures

des attitudes prédisent l’intention de comportement de manière significative.

L’ambivalence ressentie explique une partie supplémentaire significative de la

variance : une forte ambivalence est associée à une plus forte intention d’avoir des

relations sexuelles. De plus, l’ambivalence modère l’impact des attitudes

« affectives » mais pas celui des attitudes « cognitives » sur l’intention : une faible

ambivalence est associée à une relation attitude-intention plus forte.

2. Les études présentées ici

2.1. L’ambivalence réduit-elle vraiment dans quelle mesure une attitude prédit

l’intention de comportement ?

Nous avons déjà vu qu’une attitude ambivalente, en situation expérimentale,

pouvait être meilleure prédictrice de comportement qu’une attitude non-ambivalente

(Jonas, et al., 1997). Dans une première étude, l’étude 2a, j’ai souhaité répliquer ces

résultats en manipulant l’accessibilité de l’attitude. Fazio a montré que les attitudes

accessibles prédisaient mieux le comportement que les attitudes non-accessibles

(Fazio, et al., 1982).

En augmentant l’accessibilité d’une attitude, on pourrait donc la rendre

meilleure prédictrice du comportement (ici, de l’intention comportementale), même si

cette attitude est ambivalente. De plus, ici l’objectif est de rendre plus accessible la

Page 88: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

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structure ambivalente même de l’attitude, afin d’éviter que l’attitude plus accessible

soit aussi moins ambivalente (ou plus polarisée). Ici, plus l’attitude est accessible,

plus sa structure ambivalente est accessible, dans le même sens que les travaux de

Newby-Clark et al. (2002). Cette accessibilité devrait augmenter l’ambivalence

ressentie, et rendre l’attitude meilleure prédictrice du comportement.

2.2. L’ambivalence ressentie comme modérateur des effets des informations sur

l’intention de comportement

Dans une deuxième étude, l’étude 2b, le choix s’est porté sur l’étude de

l’ambivalence ressentie comme modérateur des effets des informations présentées sur

l’intention de comportement. En effet, l’ambivalence ressentie étant (souvent) un

covariant de l’attitude, il est plus approprié d’étudier les effets de l’ambivalence sur

l’influence de l’information et non sur celle des attitudes, sur l’intention de

comportement. C’est-à-dire qu’au lieu d’examiner une interaction entre attitude et

ambivalence (qui peuvent être des covariants) sur l’intention de comportement, nous

avons choisi d’étudier l’interaction entre type d’information et ambivalence.

Par ailleurs, d’un point de vue appliqué, concernant la prévention de

comportements bénéfiques à la santé, l’étude des effets des informations sur

l’intention comportementale, et de leur interaction avec l’ambivalence, est pertinent,

au regard des recherches existant sur la qualité du traitement de l’information dû à

l’ambivalence (Maio, et al., 1996; Maio, et al., 2001; Nordgren, et al., 2006). En

d’autres termes : les personnes ambivalentes réagissent-elles de la même manière aux

messages préventifs que les personnes non-ambivalentes ?

Page 89: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

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2.3. L’ambivalence ressentie comme médiateur des effets des attitudes sur

l’intention de comportement

Dans une troisième étude, l’étude 2c, la question était d’établir si l’ambivalence

ressentie pouvait avoir des effets directs sur l’intention de s’exposer au soleil, dans le

sens de répliquer les effets obtenus par Conner et Sparks (2002). De plus, je souhaitais

analyser par quels processus les attitudes pouvaient influencer l’intention de

s’exposer. J’ai examiné si l’ambivalence ressentie pouvait médiatiser ces effets,

comme elle médiatise les effets sur le traitement de l’information (Nordgren, et al.,

2006).

Page 90: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

90

Etude 2a : Une attitude ambivalente peut-elle prédire l’intention de

comportement ?14

1. Introduction

Dans la grande majorité des études portant sur les effets de l’ambivalence sur le

comportement et l’intention de comportement, les résultats montrent que les attitudes

ambivalentes sont moins « bonnes prédictrices » du comportement que les attitudes

non-ambivalentes (Armitage, 2003; Armitage & Conner, 2000; Conner, et al., 2003;

Conner, et al., 1998; Conner, et al., 2002; Povey, et al., 2001; Sparks, et al., 2001).

Nous avons choisi ici d’étudier les effets de l’accessibilité de l’ambivalence sur

l’intention de comportement. Selon nous, augmenter l’accessibilité de l’ambivalence,

sans modifier son degré, devrait renforcer son rôle dans la prédiction d’intention

comportementale, et ce particulièrement quand on a une forte préférence pour la

consistance.

Pour tester cette hypothèse, l’accessibilité simultanée des attributs

contradictoires de l’attitude a été manipulée à l’aide de la méthode d’expression

répétée utilisée par Newby-Clark, et al. (2002). Les participants (N= 96) remplissaient

un questionnaire dans lequel ils indiquaient leurs évaluations unipolaires (positives et

négatives) de l’exposition au soleil soit une fois, soit trois fois. Dans la condition

contrôle, ils ne remplissaient pas ce questionnaire. La préférence pour la consistance a

été manipulée à l’aide d’un questionnaire biaisé. On mesurait ensuite l’ambivalence

14

Cette étude a fait l’objet d’une communication au 6ème

Congrès International de Psychologie Sociale

en Langue Française de l’ADRIPS, à Grenoble en 2006.

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structurale et ressentie envers l’exposition au soleil, l’intention de s’exposer l’été

prochain, le comportement passé et le contrôle perçu.

2. Méthode

2.1. Participants et procédure

Quatre-vingt quinze étudiants de l’Université Partis Ouest (83 femmes et 10

hommes, 2 participants n’ont pas répondu à la question concernant le sexe et ont été

retirés des analyses) âgés de 18 à 48 ans (M = 22.6, ET = 5.54) ont participé à l’étude.

Ils furent répartis au hasard parmi les 6 conditions du plan expérimental suivant inter-

participants: 3 (accessibilité de l’ambivalence: faible vs. moyenne vs. forte) x 2

(préférence pour la consistance: forte vs. faible). Ils répondirent à un questionnaire en

5 parties: un questionnaire concernant leurs évaluations positives et négatives de

l’exposition au soleil, un questionnaire biaisé concernant la préférence pour la

consistance, une mesure d’ambivalence, un questionnaire concernant l’exposition au

soleil (comportement passé, contrôle perçu et intention comportementale), et

finalement des questions concernant leur phototype, leur âge et leur sexe.

2.2. Variables indépendantes

a. Accessibilité de l’ambivalence

L’ambivalence structurale fut rendue plus accessible en demandant aux

participants d’exprimer leurs évaluations contradictoires (positives et négatives)

plusieurs fois (Newby-Clark, et al., 2002). Dans la condition « accessibilité faible »,

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les participants ne remplissaient pas de mesure d’attitude positive et négative. Dans la

condition « accessibilité moyenne », les participants remplissaient 6 échelles

concernant leurs évaluations positives et négatives de l’exposition au soleil. Dans la

condition « accessibilité forte », les participants devaient remplir 3 fois ces 6 mesures

(voir annexes 4a (1), 4a (2), et 4a (3)). La consigne orale était la suivante :

« Ces informations doivent aller à différentes personnes. Je garde cette copie

mais je dois aussi donner ces évaluations à mon directeur de thèse et à l’assistant de

recherche. Je vais donc vous demander de copier ces informations sur deux autres

formulaires. Copiez juste vos évaluations sur chacun de ces formulaires. Faites

attention car les échelles ne sont pas dans le même ordre sur chaque formulaire,

chaque personne a fait son propre questionnaire. Il faut lire attentivement chaque

question et recopier votre réponse ».

Contrairement à la méthode d’expression répétée utilisée par Downing, Judd, et

Brauer (1992), ici, les participants recopient leurs évaluations au lieu de les « ré-

exprimer ». Dans le premier questionnaire, ils entourent un chiffre entre 1 et 4 sur une

échelle ; dans le deuxième, ils doivent cocher une case numérotée entre 1 et 4 ; dans le

troisième, ils doivent écrire un chiffre entre 1 et 4. Pour chaque répétition, ils doivent

retrouver la question dans le questionnaire précédent et recopier leur évaluation. De

cette manière, les évaluations ne sont pas plus polarisées (Newby-Clark, et al., 2002).

b. Préférence pour la cohérence

La préférence pour la cohérence fut manipulée à l’aide d’un questionnaire

autobiographique biaisé. Le but du questionnaire était de focaliser les participants sur

un certain degré de préférence. Deux formes de questionnaires furent distribuées au

hasard parmi les participants, correspondant aux 2 conditions expérimentales:

préférence pour la cohérence forte, et préférence pour la cohérence faible. Les

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participants répondaient à 15 questions sur des échelles en 7 points (pas du tout

d’accord jusqu’à tout à fait d’accord). Les questions concernaient la cohérence entre

leurs idées et/ou leurs comportements (par ex., « Avoir deux idées contradictoires me

met particulièrement mal à l’aise », « J’ai du mal à supporter que mes comportements

contredisent mes idées »).

Les 15 items étaient biaisés par une technique linguistique développée par

Salancik et Conway (1975) (voir aussi Chaiken & Baldwin, 1981). Cette technique est

basée sur le fait que les individus ont plus tendance à admettre adopter un certain

comportement « parfois » que « toujours ». On peut donc à l’aide d’adverbes de

fréquence faire varier la saillance de certains comportements, et influencer ainsi les

attitudes (Chaiken & Baldwin, 1981). La préférence pour la consistance était

saillante dans la condition « préférence forte », l’indifférence pour la consistance

l’était dans la condition « préférence faible » (voir annexes 4b (1) et 4b (2)).

2.3. Variables dépendantes

a. Ambivalence structurale

L’ambivalence structurale envers l’exposition au soleil fut mesurée à l’aide de 6

items, sur des échelles en 7 points. Les participants indiquaient dans quelle mesure ils

trouvaient l’exposition au soleil agréable, douloureuse, plaisante, dangereuse,

bénéfique et ennuyeuse. L’ambivalence structurale était calculée ensuite avec la

formule de Griffin (Thompson, et al., 1995) Ambivalence = (P+N)/2-P-N.

Page 94: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

94

b. Ambivalence ressentie

L’échelle d’ambivalence ressentie comprenait 3 items : les participants devaient

répondre sur des échelles en 6 points dans quelle mesure ils pensaient que leur attitude

était mitigée, contradictoire et floue.

c. Intention de comportement et ses prédicteurs

Les participants devaient finalement répondre à 7 questions concernant leur

comportement passé, leur contrôle perçu et leur intention de comportement

concernant l’exposition au soleil (voir Ajzen, 1991; Ajzen & Fishbein, 2000) (voir

annexe 4c).

3. Résultats

3.1. Analyses préliminaires

Seules les participantes furent gardées pour les analyses, puisque la variable

“sexe” ne pouvait pas être utilisée dans le plan expérimental. D’autant que les

hommes et les femmes n’ont pas les mêmes comportements d’exposition et de

protection au soleil, et ces comportements n’ont pas les mêmes déterminants (Jackson

& Aiken, 2000). Nous avons donc choisi de nous concentrer sur les participantes.

Concernant le phototype, une moyenne des scores aux trois items de la mesure fut

calculée (α de Cronbach =.89), mais le phototype n’a pas affecté nos résultats.

Pour le contrôle perçu, une moyenne des deux items (r = .71, p<.01) fut calculée

(M = 5.58, ET = 1.45, min = 1, max = 7).

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95

3.2. Ambivalence structurale (M = 1.51, ET = 1.57, min = -2, max = 5)

L’ambivalence structurale fut calculée à l’aide de la formule de Griffin:

Ambivalence = (P+N)/2-P-N, où P représente la somme des scores aux échelles

d’attitude positive (agréable, plaisante et bénéfique), et N la somme des scores aux

échelles d’attitude négative (douloureuse, dangereuse et ennuyeuse). Une ANOVA à

2 facteurs inter-participants 3 (accessibilité: faible, moyenne, forte) × 2 (préférence

pour la consistance: faible, forte) ne montre pas d’effet significatif des manipulations

sur l’ambivalence structurale. En particulier, l’augmentation de l’accessibilité de

l’ambivalence n’a pas affecté sa force F(2, 80) = .78, ns. L’expression répétée des

évaluations ne les a pas rendues plus polarisées (Downing, et al., 1992).

L’ambivalence structurale et l’ambivalence ressentie sont moyennement corrélées (r =

.27, p<.05).

3.3. Ambivalence ressentie (M = 2.75, ET = 1.08, min = 1, max = 5)

Un score composite de l’ambivalence ressentie fut calculé à partir de la

moyenne des trois échelles (α Cronbach =.76). Une ANOVA à 2 facteurs inter-

participants 3 (accessibilité: faible, moyenne, forte) × 2 (préférence pour la

consistance: faible, forte) montre un effet principal de l’accessibilité de l’ambivalence

F(2, 80) = 5.41, p <.01. Plus les évaluations positives et négatives sont accessibles

simultanément, plus les participants se sentent ambivalents (M = 2.23, ET = 1.14, M =

3.10, ET = .95 et M = 2.91, ET = .97, respectivement pour les conditions

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96

d’accessibilité faible, moyenne et forte). La manipulation de la préférence pour la

consistance n’a pas d’effet significatif sur l’ambivalence ressentie, ni principal F(1,

81) = 1.11, ns, ni modérateur F(2, 80) = .59, ns (voir Tableau 4).

Tableau 4

Ambivalence ressentie en fonction de l’accessibilité et de la Préférence pour la

Consistance

Accessibilité

Faible Moyenne Forte Préférence pour

la consistance M ET N M ET N M ET N

Faible 2.18 ac .28 13 3.09 a .26 15 2.65 bc .26 16

Forte 2.28 abc .27 14 3.12 abc .31 11 3.23 abc .28 13

Note. Les moyennes dont les indices diffèrent sont différentes à p<.05

3.4. Intention de s’exposer au soleil (M = 4.96, ET = 1.83, min = 1, max = 7)

La moyenne des scores aux deux items fut calculée pour obtenir un score

composite (r = .87, p<.001). L’ANOVA à deux facteurs conduite sur cette mesure

composite ne révèle pas d’effet principal ou d’interaction significatif des

manipulations d’accessibilité ou de préférence pour la consistance, F (2, 83) compris

entre.71 et 1.04, ns.

Une régression linéaire effectuée sur l’intention de s’exposer, avec pour

prédicteurs la manipulation de l’accessibilité et l’ambivalence structurale ne révèle

qu’un effet principal de l’ambivalence structurale (β =-.52, t (82) = -4.38, p<.001). Il

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97

n’y a pas d’effet principal ni de la manipulation (β =.06, t (82) = .27, ns) ni d’effet

d’interaction (β =-.14, t (82) = -.98, ns).

Des régressions linéaires effectuées dans les trois conditions d’accessibilité de

l’ambivalence révèlent que plus l’ambivalence est accessible, plus elle prédit

l’intention de s’exposer au soleil.

En condition d’accessibilité faible, l’intention de s’exposer est prédite par le

contrôle perçu concernant l’exposition au soleil (β =.93, t (27) = 5.76, p<.001), mais

pas par l’ambivalence structurale15

(β =-.2, t (27) = -1.07, ns, R² = .61, F (27) = 19.89,

p<.001).

En condition d’accessibilité moyenne, l’intention de s’exposer est prédite par le

contrôle perçu concernant l’exposition au soleil (β =.57, t (25) = 2.5, p<.05), mais pas

par l’ambivalence structurale (β =-.2, t (25) = -1.16, ns, R² = .31, F (25) = 5.11,

p<.05).

En condition d’accessibilité forte, l’intention de s’exposer est prédite par

l’ambivalence structurale (β =-.64, t (28) = -4.15, p<.001), mais pas par le contrôle

perçu concernant l’exposition au soleil (β =.36, t (28) = 1.86, ns, R² = .57, F (28) =

17.41, p<.001). Plus les participants sont ambivalents, moins ils ont l’intention de

s’exposer au soleil.

4. Discussion

Les résultats de cette étude montrent qu’une attitude ambivalente n’est pas

forcément peu prédictrice d’intention de comportement. Dans cette expérience, plus

15

Nous avons choisi d’analyser les effets sur l’intention de comportement de l’attitude sous sa forme

ambivalente (ambivalence structurale) afin de voir si l’ambivalence augmentait ou diminuait l’intention

de s’exposer au soleil.

Page 98: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

98

l’ambivalence est accessible, plus elle est ressentie. Aussi, plus l’ambivalence est

accessible, plus l’attitude prédit l’intention de comportement.

Une limite de cette étude est qu’on n’ait pas obtenu d’effet direct ou

d’interaction de l’accessibilité sur l’intention de comportement. On ne peut donc pas

affirmer que l’augmentation de l’accessibilité de l’ambivalence augmente les effets

des attitudes sur l’intention comportementale. Aussi, il semble qu’un niveau moyen

d’accessibilité ne soit pas suffisant pour augmenter les effets des attitudes.

Cependant, les résultats de l’étude 2a sont intéressants puisqu’ils vont à

l’encontre de la plupart de ceux obtenus précédemment (Armitage, 2003; Armitage &

Conner, 2000; Conner, et al., 2003; Conner, et al., 1998; Conner, et al., 2002; Povey,

et al., 2001; Sparks, et al., 2001). Ici l’ambivalence seule (manipulée) ne diminue pas

les effets des attitudes sur l’intention de comportement, comme l’ont obtenu Jonas et

al. (1997). Une attitude ambivalente n’a donc pas toujours les caractéristiques ou les

effets d’une attitude faible.

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99

Etude 2b : Effet modérateur de l’ambivalence ressentie sur l’intention

comportementale16

.

1. Introduction

Tout d’abord, nous changeons ici de domaine d’application. Le domaine de

risque considéré dans cette étude est celui du comportement alimentaire, et

spécialement la consommation de produits sucrés. Le domaine de l’alimentation a été

souvent choisi pour des études sur l’ambivalence (voir par ex., Armitage & Conner,

2000; Conner, et al., 2003; de Liver, et al., 2005; Povey, et al., 2001; Sparks, et al.,

2001; Urland & Ito, 2005).

Les études portant sur les effets modérateurs de l’ambivalence ont selon nous

deux limites. Premièrement, quand l’ambivalence structurale est utilisée comme

modérateur des effets de l’attitude sur le comportement (ou l’intention de

comportement, ou même le traitement de l’information), on utilise en réalité un

covariant de la principale variable indépendante : l’attitude. Souvent, l’attitude est

mesurée par des échelles bipolaires « bien-mauvais » ou « favorable-défavorable »,

puis l’ambivalence est calculée a partir de scores à des échelles unipolaires « très

bien-pas bien du tout » et « très mauvais-pas mauvais du tout ».

Je considère qu’il s’agit en réalité pratiquement d’indices différents mesurant la

même chose : la structure de l’attitude, en termes de valence et d’ « éveil » ou

16 Cette étude a fait l’objet d’un financement par l’Institut National de Prévention et d’Education

pour la Santé (INPES) dans le cadre d’un programme de recherches sur les messages de

prévention et attitudes ambivalentes par rapport aux risques.

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100

d’intensité. Donc ces indices doivent partager une grande part de variance, pouvant

être accentuée par un biais de consistance. J’ai donc décidé ici d’étudier les effets

modérateurs de l’ambivalence ressentie.

Nous avons vu dans le chapitre précédent que l’ambivalence ressentie n’était pas

systématiquement corrélée avec l’ambivalence structurale. De plus, elle représente

une évaluation de l’attitude, et non une évaluation de l’objet (ou de la personne, objet

de l’attitude). Elle ne doit donc pas partager une aussi grande part de variance avec

l’attitude que l’ambivalence structurale.

Par ailleurs, qu’il s’agisse d’ambivalence structurale ou d’ambivalence ressentie,

dans la plupart des études, les analyses de modération sont faites à partir de la mesure

dichotomisée autour de la médiane. Ici les analyses seront faites avec la variable telle

qu’elle est mesurée, de manière continue.

Nous passons donc dans un cadre ou les participants reçoivent des informations

sur le comportement en question. L’hypothèse ici est que l’ambivalence devrait

augmenter les effets des informations sur l’intention de comportement. En effet, si les

attitudes ambivalentes sont moins fortes (Armitage & Conner, 2000; Bargh, et al.,

1992; Conner & Sparks, 2002; Thompson, et al., 1995), alors les participants

devraient plus facilement se baser sur les informations disponibles pour prendre une

décision. De plus, l’ambivalence devrait permettre un meilleur traitement de

l’information (Maio, et al., 1996; Maio, et al., 2001; Nordgren, et al., 2006). Les

informations devraient donc mieux prédire le comportement quand les participants

ressentent de l’ambivalence.

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101

2. Méthode

2.1. Participants et procédure

Cent vingt et une personnes ont participé à l’étude. L’échantillon était composé

de 64 femmes et de 57 hommes, âges de 19 à 42 ans (moyenne = 25.5, écart-type =

5.28). Les participants étaient issus de la population générale et furent recrutés à Paris

par des assistants de recherche. Ils ont répondu à un questionnaire en 3 parties (voir

annexe 5a). Ils devaient lire en premier lieu des informations concernant la

consommation de produits sucrés, puis répondre à des questions sur leur attitude

envers la consommation de produits sucrés, puis leur intention de consommer des

produits sucrés.

2.2. Variables indépendantes

a. Informations concernant les produits sucrés

Avant de remplir le questionnaire, les participants devaient lire un texte court

concernant la consommation de produits sucrés. Ce texte comprenait soit une

information positive, soit une information négative, soit deux informations positives,

soit deux informations négatives, soit une positive et une négative (voir annexe 5b).

Les participants étaient répartis au hasard dans ces 5 conditions.

Les informations positives concernaient les bénéfices de la consommation de

produits sucrés, par exemple :

En quantité raisonnable, le sucre (glucose) est une source d’énergie naturelle

indispensable à l’organisme dans une alimentation équilibrée. Le glucose constitue

un « carburant » pour le bon fonctionnement du corps et de l’esprit (capacités

intellectuelles).

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102

Les informations négatives concernaient les dangers de la consommation de

produits sucrés, par exemple :

En quantité excessive, le sucre (glucose) est transformé en graisse que

l’organisme stocke. Il peut être responsable d’un surpoids, d’essoufflements pendant

l’effort, de douleurs articulaires ou d’un taux de cholestérol élevé.

b. Ambivalence structurale

L’ambivalence structurale envers la consommation de produits sucrés était

mesurée à l’aide de 4 échelles en 7 points, deux concernant le degré de positivité

(positive et favorable), et deux le degré de négativité (négative et défavorable) (voir

annexe 5c).

c. Ambivalence ressentie

L’ambivalence ressentie était mesurée à l’aide de 7 échelles. Les premiers items

concernaient dans quelle mesure les participants ressentaient leur attitude envers les

produits sucrés comme ambivalente, floue, confuse et divisée. Puis ils devaient

reporter dans quelle mesure leur attitude était composée à la fois d’éléments positifs et

négatifs, dans quelle mesure elle était mitigée, et dans quelle mesure ils étaient indécis

(voir annexe 5c).

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103

2.3. Variable dépendante

L’intention de consommer des produits sucrés était mesurée à l’aide de deux

échelles en 7 points : « J’ai l’intention de consommer des produits sucrés » et « Je

vais essayer de consommer des produits sucrés » (voir annexe 5c).

3. Résultats

3.1. Analyses préliminaires

Les hommes et les femmes de l’échantillon ne différent pas en âge, ni en

catégorie socioprofessionnelle. De plus, aucune différence entre hommes et femmes,

concernant les variables mesurées, n’a été observée dans cette étude. La variable

« sexe » ne sera donc pas discutée ici.

Un indice d’ambivalence structurale a été calculé en entrant les scores aux

échelles de positivité (r = .66, p <.01) et de négativité (r = .74, p <.01) dans la formule

de Griffin (Thompson et al., 1995) Ambivalence = (P+N)/2-P-N. L’ambivalence

ressentie est représentée par la moyenne aux 7 items (α = .75), et l’intention de

consommer des produits sucrés par la moyenne aux deux items (r = .65, p <.01).

3.2. Ambivalences structurale et ressentie

Deux ANOVA à un facteur (type d’information présenté) indiquent que les deux

mesures d’ambivalence, structurale (M = 2.18, ET = 1.75, min = -2, max = 7) et

ressentie (M = 3.57, ET = 1.00, min = 1, max = 7) ne sont pas affectées par la

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104

manipulation, (respectivement, F(4,116) = 1.53, ns ; et F(4,116) = .38, ns). Les deux

mesures d’ambivalence ne sont pas corrélées (r = .13, ns).

3.3. Intention de consommer des produits sucrés (M = 4.48, ET = 1.62, min = 1,

max = 7)

Le type d’information présenté affecte seulement marginalement l’intention de

consommer des produits sucrés, F(4,116) = 2.11, p = .08 (Tableau 5).

Tableau 5

Intention de consommer des produits sucrés en fonction du type d’information

présenté

Information(s) présentée(s) Moyenne Ecart-type N

2 négatives (2N) 3.95 1.67 22

1 négative (1N) 4.23 1.63 26

1 positive et 1 négative (PN) 4.54 1.46 28

1 positive (1P) 5.27 1.52 22

2 positives (2P) 4.61 1.76 23

Quand on inclut l’ambivalence ressentie dans l’équation, ainsi que l’interaction

ambivalence ressentie * information, l’effet de l’information sur l’intention de

consommer est modéré par l’ambivalence ressentie envers les produits sucrés. Plus les

participants se sentent ambivalents, plus cet effet augmente, F (32,58) = 1.99, p<.05.

Les analyses en pente simple révèlent le pattern suivant à + 1 écart-type et -1

écart-type autour de la moyenne (d’ambivalence ressentie) (voir la Figure 3):

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105

0

1

2

3

4

5

6

7

2N 1N PN 1P 2P

Amb faible

Amb forte

Figure 3. Intention de consommer des produits sucrés en fonction de

l’information reçue et de l’ambivalence ressentie.

Quand les participants se sentent peu ambivalents (à -1 écart-type de la

moyenne) envers les produits sucrés, ils ne sont pas très influencés par les

informations concernant la consommation de produits sucrés qui leur ont été

présentées. Aussi, les informations semblent les influencer dans la direction attendue :

plus il y a d’informations positives, plus ils ont l’intention de consommer des produits

sucrés.

Quand les participants se sentent très ambivalents, (à +1 écart-type de la

moyenne) envers les produits sucrés, leur intention d’en consommer est plus

influencée par les informations présentées. Quand ces dernières sont peu polarisées,

c'est-à-dire en condition d’une information positive, ou d’une information négative,

ou en condition ambivalente, elles influencent le comportement dans la direction

attendue : plus il y a d’informations positives, plus les participants ont l’intention de

consommer des produits sucrés (conditions 1N, PN, et 1P). En revanche, on voit

qu’aux extrémités de la courbe, quand les informations sont polarisées, qu’elles

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106

contiennent soit deux informations négatives soit deux positives (conditions 2N et

2P), alors elles ont un effet sur l’intention de consommer inverse à leur valence : les

informations positives découragent la consommation de produits sucrés, et les

informations négatives l’encouragent.

4. Discussion

Dans l’ensemble, les participants peu ambivalents sont peu affectés par

l’information reçue, sauf quand celle-ci est très négative. Face à deux informations

négatives sur les produits sucrés, leur intention d’en consommer diminue.

En revanche, les participants ambivalents sont plus affectés par l’information.

Quand le texte est peu polarisé (dans les conditions « intermédiaires » 1N, PN et 1P),

les participants ambivalents ont tendance à réagir en accord avec l’information reçue :

plus le texte contient d’informations positives, plus les participants ont envie de

consommer des produits sucrés. Cependant, quand le texte est polarisé, qu’il contient

2 informations positives ou 2 informations négatives, les participants ambivalents

réagissent de manière opposée aux informations : face à deux informations positives,

ils réduisent leur intention de consommer des produits sucrés, et face à deux

informations négatives, ils augmentent leur intention de consommer des produits

sucrés.

Dans les recherches de Clark et al. (2008) les participants ambivalents,

comparés aux participants non-ambivalents, traitaient de manière plus approfondie les

informations confirmant leur attitude. En revanche, ils traitaient de manière peu

approfondie les informations contre-attitudinales. On pourrait rapprocher les résultats

observés ici de ce processus : certaines informations sont mieux traitées par les

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107

participants ambivalents que par les participants non-ambivalents (donc elles

influencent plus l’intention). Mais les informations polarisées, qui pourraient être

considérées comme contre-attitudinales par les participants ambivalents, sont moins

bien traitées.

Ces résultats sont importants d’un point de vue appliqué. Il semble que les

messages de prévention pourraient avoir sur les personnes ambivalentes des effets

inverses à ceux escomptés. Si ces messages sont polarisés, et contiennent

essentiellement des informations négatives, les personnes ambivalentes pourraient y

« résister » en adoptant un comportement contraire à celui recommandé.

D’un point de vue théorique, il serait intéressant d’explorer les mécanismes

responsables de ces effets. Notamment, il faudrait examiner si ces effets sont dus à un

traitement de l’information plus approfondi dû à l’ambivalence (Maio, et al., 1996;

Maio, et al., 2001; Nordgren, et al., 2006; van Harreveld, van der Pligt, et al., 2009),

ou à un traitement de l’information approfondi mais sélectif (ou biaisé) (voir par ex.,

Chaiken & Maheswaran, 1994). De tels résultats porteraient à penser que les attitudes

ambivalentes auraient certaines propriétés en commun avec les attitudes fortes,

notamment d’influencer le traitement de l’information (Pomerantz, Chaiken, &

Tordesillas, 1995).

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108

Etude 2c : Effet médiateur de l’ambivalence ressentie17

.

1. Introduction

Dans la prédiction de l’intention comportementale, je suggère que les effets de

la structure de l’attitude sur l’intention de comportement sont médiés par l’impression

subjective de sa propre attitude, c’est-à-dire par l’ambivalence ressentie. Cette

position est en accord avec les résultats récents sur le rôle de l’ambivalence ressentie -

particulièrement de l’inconfort qui y est lié – dans les effets de l’ambivalence sur le

traitement de l’information. Nordgren, Van Harreveld, et Van der Pligt (2006) ont

trouvé que les personnes ambivalentes font un traitement de l’information biaisé, et

que cet effet était médiatisé par l’inconfort relatif aux attitudes ambivalentes. Aussi,

dans une étude corrélationnelle sur la consommation de viande, Berndsen et van der

Pligt (2004) utilisent deux ANCOVA pour montrer que l’ambivalence ressentie

médiatise les effets des attitudes sur le comportement futur.

La structure de l’attitude, ici dans quelle mesure les évaluations positives et

négatives sont prises en compte pour former une attitude, est selon moi une propriété

trop complexe (au moins au niveau explicite) pour être utilisée directement comme

information pour prendre une décision. Par exemple, imaginez que c’est une belle

journée d’été, et vous vous demandez si vous allez prendre un bain de soleil. Vous

voudriez prendre des couleurs mais redoutez les coups de soleil. Que faites-vous pour

prendre votre décision ? Faites-vous consciencieusement la liste des « pour » et des

« contre », ou essayez-vous de savoir si votre avis est confus, mitigé, ou ambivalent ?

17

Cette étude a fait l’objet d’une communication au 14ème

General Meeting de la European Association

of Experimental Social Psychology à Würzburg en 2005.

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109

Une évaluation méta-attitudinale – l’ambivalence ressentie – pourrait être un

résumé, ou une mesure « ready-made » (voir Bassili, 1996) de la structure de

l’attitude, qui pourrait médiatiser les effets de l’attitude sur l’intention de

comportement.

Thompson et Zanna (1995) ont trouvé que l’implication personnelle pouvait

modérer les effets des antécédents de l’ambivalence (basés sur la personnalité) sur

l’ambivalence ressentie. Je propose que l’implication personnelle pourrait aussi

modérer les effets d’une manipulation des attitudes sur l’ambivalence ressentie. Donc

une forte implication concernant les risques devrait rendre l’attitude envers

l’exposition au soleil plus importante et donc affecter l’ambivalence ressentie.

L’hypothèse est ici celle d’un effet d’interaction entre la manipulation de l’attitude et

l’implication sur l’ambivalence ressentie : les participants dont l’attitude envers

l’exposition au soleil a été rendue ambivalente devraient se sentir plus ambivalents

que ceux dans les conditions d’attitude positive et d’attitude négative, et cet effet

devrait être modéré par l’implication personnelle.

De plus, en accord avec les résultats de Nordgren, et al. (2006) et Berndsen et

van der Pligt (2004), l’ambivalence ressentie devrait affecter l’intention de s’exposer

au soleil.

En conséquence, l’hypothèse principale est que l’attitude va affecter l’intention

de comportement par différents processus en fonction du degré d’implication :

l’ambivalence ressentie devrait plus médiatiser l’effet de l’attitude sur l’intention de

s’exposer en condition de forte implication qu’en condition de faible implication.

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110

2. Méthode

2.1. Participants et procédure:

Cent quarante-quatre étudiants de l’Université Paris Ouest (âgés de 17 à 31 ans,

118 femmes et 31 hommes, 5 participants n’ont pas répondu à la question concernant

le sexe et ont été retirés des analyses) ont volontairement participé à l’expérience,

présentée comme une étude concernant l’exposition au soleil. Ils furent répartis au

hasard parmi les 8 conditions du plan expérimental suivant: 4 (attitude: positive vs.

négative vs. ambivalente vs. contrôle) x 2 (implication: forte vs. faible). Ils

répondirent à un questionnaire en 4 parties: un questionnaire biaisé concernant leurs

habitudes d’exposition au soleil, un texte comportant des informations positives et

négatives concernant l’exposition au soleil, une mesure d’ambivalence, et finalement

une mesure de leur intention de s’exposer au soleil.

2.2. Variables indépendantes.

a. Attitude concernant l’exposition au soleil

L’attitude concernant l’exposition au soleil fut manipulée à l’aide d’un

questionnaire autobiographique biaisé. Le but du questionnaire était que les

participants se concentrent sur une certaine attitude envers l’exposition au soleil.

Quatre formes de questionnaires furent distribuées au hasard parmi les participants,

correspondant aux 4 conditions expérimentales: attitudes positive, négative,

ambivalente et non-biaisée (contrôle). Les participants répondaient à 20 questions sur

des échelles en 7 points (pas du tout d’accord jusqu’à tout à fait d’accord).

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111

Les questions concernaient leurs habitudes vis-à-vis du soleil, en termes

d’exposition (par ex., “je m’expose au soleil entre midi et 16h00 pendant l’été”) et de

protection (par ex., “pendant l’été je me protège du soleil à l’aide d’une crème solaire

d’indice supérieur à 15”). Quinze des 20 items étaient biaisés par la technique

linguistique des adverbes de fréquence développée par Salancik et Conway (1975) et

décrite dans l’étude 2a. Les comportements risqués vis-à-vis du soleil étaient saillants

dans la condition “attitude négative”, les comportements non-risqués l’étaient dans la

condition “attitude positive”. Dans la condition ambivalente, les deux types de

comportements étaient également saillants. Enfin, dans la condition contrôle, les

questions n’étaient pas biaisées : il n’y avait pas d’adverbe de fréquence (voir annexes

6a (1), 6a(2), et 6a(3)).

b. Implication

Après le questionnaire biaisé, les participants devaient lire un texte dans lequel

l’implication envers les risques liés à l’exposition au soleil était manipulée. Le texte

était présenté comme un article de journal et contenait des informations positives et

négatives sur l’exposition au soleil. Dans la condition d’implication forte, la

population à risque pour les mélanomes était similaire à celle des participants (les

étudiants d’Ile de France), alors qu’en condition d’implication faible, la population à

risque était différente (agriculteurs du Manitoba, au Canada) (voir annexe 6b).

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112

2.3. Variables dépendantes

a. Ambivalence structurale

L’ambivalence structurale était mesurée à l’aide de 6 items, sur des échelles en 7

points. Les participants indiquaient dans quelle mesure ils trouvaient l’exposition au

soleil agréable, plaisante, bénéfique, douloureuse, dangereuse et ennuyeuse (voir

annexe 6c). L’ambivalence structurale était calculée ensuite avec la formule de Griffin

(Thompson et al., 1995).

b. Ambivalence ressentie

L’ambivalence ressentie était mesurée à l’aide de deux items. Les participants

devaient dire sur des échelles en 6 points dans quelle mesure leur attitude était

contradictoire et floue (voir annexe 6c).

c. Intention de comportement

L’intention de s’exposer au soleil était mesurée à l’aide de deux échelles en 7

points : « J’ai l’intention de m’exposer au soleil l’été prochain » et « Je vais essayer

de m’exposer au soleil l’été prochain » (voir annexe 6c).

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113

3. Résultats:

3.1. Analyses préliminaires

Seules les participantes furent gardées pour les analyses, puisque la variable

“sexe” ne pouvait pas être utilisée dans le plan expérimental. De plus, les hommes et

les femmes n’ont pas les mêmes comportements d’exposition et de protection, et ces

comportements n’ont pas les mêmes déterminants (Jackson & Aiken, 2000), c’est

pourquoi nous avons choisi de nous concentrer sur les participantes.

3.2. Ambivalence structurale (M = 2.09, ET = 1.64, min = -1.33, max = 5.5)

L’ambivalence structurale fut calculée à l’aide de la formule de Griffin:

Ambivalence = (P+N)/2-P-N, où P représente la somme des scores aux échelles

d’attitude positive (agréable, plaisante et bénéfique), et N la somme des scores aux

échelles d’attitude négative (douloureuse, dangereuse et ennuyeuse). L’ANOVA à 2

facteurs (attitude: positive, négative, ambivalente, contrôle) × 2 (implication: faible,

forte) ne montre pas d’effet significatif des manipulations sur l’ambivalence

structurale, F(7, 109) situés entre .40 et .66, ns. L’ambivalence structurale et

l’ambivalence ressentie ne sont pas corrélées (M = 6.33, ET = 4.9 et M = 2.59, ET =

1.14, respectivement, r = .001 ns).

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114

3.3. Ambivalence ressentie (M = 2.62, ET = 1.12, min = 1, max = 6)

Un score composite de l’ambivalence ressentie fut calculé à partir de la

moyenne des deux mesures (r=.68). Une ANOVA à 2 facteurs inter-participants : 4

(attitude: positive, négative, ambivalente, contrôle) × 2 (implication: faible, forte)

montre un effet d’interaction marginal F(7, 109) = 2.67, p = .052. Les analyses intra-

condition révèlent qu’en condition d’implication forte, les participants de la condition

attitude positive (M = 2.1) ressentent moins d’ambivalence que les participants des

conditions ambivalentes et contrôle (M = 3 et M = 3.18 respectivement, p <.05), mais

pas que les participants de la condition attitude négative (M = 2.31, ns). En condition

d’implication faible, aucune différence significative d’ambivalence ressentie n’est

observée (voir le Tableau 6).

Tableau 6

Ambivalence ressentie moyenne en fonction de l’attitude et de l’implication.

Implication

Forte Faible

Attitude M ET N M ET N

Positive 2.10 a 1.17 15 2.69 abc 1.05 16

Négative 2.31 ac .91 16 2.68 abc 1.17 14

Ambivalente 3.00 bc 1.41 10 2.47 abc 1.23 15

Contrôle 3.18b 1.03 14 2.5 abc 1.08 16

Note. Les moyennes dont l’indice diffère sont différentes à p<.05

On peut s’étonner que les participants dans la condition contrôle soient si

ambivalents. Ceci peut s’expliquer par le fait qu’en condition contrôle, les participants

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115

étaient face à des questions non biaisées, et donc comportant des comportements

risqués et non risqués, et par conséquent des attributs positifs et négatifs de

l’exposition au soleil.

3.4. Intention de s’exposer au soleil (M = 5.51, ET = 1.64, min = 1, max = 7)

La moyenne des scores aux deux échelles fut calculée pour obtenir un score

composite (r=.71). L’ANOVA à deux facteurs conduite sur cette mesure composite

révèle un effet principal de l’attitude sur l’intention de s’exposer F(3, 109) = 2.73, p <

.05. Les participantes de la condition contrôle (M = 6.27) ont plus l’intention de

s’exposer que les participantes de la condition attitude positive (M = 4.88). Les scores

des participantes de la condition attitude négative (M = 5.50) et de la condition

attitude ambivalente (M = 5.63) ne diffèrent pas de ceux des autres conditions.

3.5. Analyse de médiation modérée

Pour tester notre hypothèse que l’effet de l’attitude sur l’intention de s’exposer

est plus médiatisé par l’ambivalence ressentie quand les participants sont fortement

impliqués que quand ils le sont faiblement, nous avons conduit une analyse de

médiation modérée. Pour comparer les effets du prédicteur (l’attitude) en fonction du

niveau du modérateur (l’implication), nous avons conduit une série de 3 analyses de

régression recommandée par Muller, Judd, et Yzerbyt (2005)18

.

18 L’analyse de médiation modérée se faisant à l’aide de régressions, des codes de contraste ont été

associés aux conditions des variables indépendantes. Ces codes correspondaient aux hypothèses de

départ : négatifs pour les conditions « attitude positive » et « attitude négative », et positifs pour les

conditions « ambivalence » et « contrôle ». Ces contrastes peuvent expliquer la diminution du p par

rapport aux ANOVAS.

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116

Une première analyse de régression sur l’intention de s’exposer avec pour

prédicteurs l’attitude, l’implication et l’interaction attitude * implication montre un

effet principal de la manipulation de l’attitude sur l’intention de s’exposer B = 0.246, t

(116) = 2.54, p =.012.

Une deuxième analyse de régression avec pour variable dépendante le médiateur

(l’ambivalence ressentie, centrée) et l’attitude, l’implication et l’interaction attitude *

implication pour prédicteurs révèle un effet d’interaction de l’attitude et de

l’implication significatif B = 0.171, t (116) = 2.57, p =.011.

Enfin, une troisième analyse de régression est conduite avec pour variable

dépendante l’intention de s’exposer au soleil et pour prédicteurs l’attitude,

l’implication, l’ambivalence ressentie et les interactions attitude * implication et

ambivalence ressentie * implication. On obtient alors un effet significatif du

médiateur (ambivalence ressentie) B = 0.361, t (115) = 2.60, p =.01, et il n’est pas

modéré par l’implication B = 0.016, t (115) = 0.12, ns. L’effet direct résiduel de

l’attitude sur l’intention de s’exposer n’est pas modéré par l’implication B = -0.018, t

(115) = -0.17, ns, une fois que l’ambivalence ressentie est contrôlée.

Ces résultats dans leur ensemble montrent que l’effet indirect, via l’ambivalence

ressentie, est plus important quand l’implication est forte que quand elle est faible,

mais que l’effet direct résiduel n’est pas plus important quand l’implication est faible

que quand elle est forte. Ce pattern montre que la médiation modérée n’est pas

prototypique (Muller, et al., 2005). Pour les participants fortement impliqués, la

manipulation de l’attitude affecte plus l’ambivalence ressentie que pour les

participants faiblement impliques, alors que l’ambivalence ressentie affecte l’intention

de s’exposer de manière identique pour tous les participants.

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117

Figure 4. Modèle de médiation modérée des effets de l’attitude envers l’exposition au soleil sur

l’intention de s’exposer dans l’étude 2c. Les paramètres marqués d’une * sont significatifs à p<.05.

4. Discussion:

4.1. Ambivalence ressentie et intention de comportement

Dans cette étude, en condition d’implication forte, les effets de la structure de

l’attitude sont médiés par l’ambivalence ressentie. La démonstration de ce processus

est nouvelle dans le domaine de l’intention comportementale, mais elle rejoint les

résultats récents sur l’ambivalence et ses effets sur le comportement (Berndsen & van

der Pligt, 2004) et sur le traitement de l’information (Nordgren, et al., 2006). La

première a montré avec une analyse de covariance que l’ambivalence ressentie

médiatisait l’impact des attitudes sur le comportement ultérieur. La deuxième a

montré que l’inconfort lié aux attitudes ambivalentes médiatisait leurs effets sur le

traitement de l’information. Les chercheurs ont utilisé le paradigme de fausse

attribution pour montrer que le traitement systématique biaisé de l’information associé

à l’ambivalence servait à réduire cet inconfort. Donc les individus doivent avoir une

idée que leur attitude est ambivalente et l’associer à de l’inconfort pour essayer de la

modifier. Ici, l’étude confirme partiellement que les effets de l’ambivalence sont

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118

médiés par une motivation de recherche de consistance: les effets sur l’intention de

s’exposer au soleil sont dus à l’ambivalence ressentie.

D’un autre côté, les résultats ici vont à l’encontre de ceux de Bassili (1996). Il

obtient que les indices méta-attitudinaux de force des attitudes sont moins bons que

les indices opératifs dans la prédiction de conséquences de la force des attitudes telles

que la stabilité ou la malléabilité. Ici, même si l’impression subjective peut être

erronée (il n’y avait pas de corrélation significative entre l’ambivalence structurale et

l’ambivalence ressentie), elle peut être utilisée comme “outil” dans la prise de

décision.

4.2. Processus de médiation modérée

Les résultats révèlent aussi que le mécanisme de médiation est modéré par

l’implication. Ils suggèrent que la structure de l’attitude peut avoir un effet plus ou

moins direct sur l’intention comportementale. La manipulation de la structure de

l’attitude des participants a affecté leur intention de s’exposer quelle que soit leur

implication, mais le mécanisme sous-jacent différait. Le processus de médiation par

l’ambivalence ressentie dépendait de l’implication: quand les participants étaient

fortement impliqués, leur attitude affectait leur intention de s’exposer à travers la

manière dont ils évaluaient leur propre attitude; alors que quand ils étaient peu

impliqués, leur attitude affectait directement leur intention de s’exposer au soleil.

Les conclusions de cette étude confirment le modèle de van Harreveld, van der

Pligt et al. (2009). Le modèle MAID (model of ambivalence induced discomfort,

modèle d’inconfort induit par l’ambivalence) suggère aussi que les effets de

l’ambivalence (structurale) peuvent être médiatisés par l’ambivalence ressentie, et que

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119

cette médiation peut être modérée. En accord avec leurs résultats obtenus dans des

études précédentes (van Harreveld, Rutjens, et al., 2009), ils proposent comme

modérateur la nécessité de faire un choix ou de prendre une décision : si la personne

doit choisir (tout de suite) alors l’ambivalence devient accessible et elle est ressentie.

Nous montrons ici que d’autres modérateurs peuvent entrer en jeu dans le processus

de médiation.

Maio, Greenland, Bernard, et Esses (2001) ont aussi obtenu des effets directs de

l’ambivalence structurale. Dans une étude sur l’ambivalence envers l’exogroupe, ils

ont obtenu que les effets de l’ambivalence structurale sur l’éveil physiologique et sur

le traitement de l’information étaient indépendants. Ils interprètent ce résultat comme

deux processus distincts: un processus affectif ou “chaud” et un processus cognitif ou

“froid”; l’ambivalence pouvant affecter le traitement de l’information à travers ces

deux processus.

Si on a déterminé ici dans quel contexte l’ambivalence structurale pouvait

affecter l’intention comportementale directement ou indirectement, la question de

processus “chaud” ou “froid” demeure. Une des limites de cette étude est l’absence de

mesure d’inconfort: on ne peut donc pas relier l’ambivalence structurale ou ressentie à

un état désagréable. On ne peut donc pas établir si le processus de médiation modérée

est lié à des mécanismes affectifs ou cognitifs: on ne sait ni si l’implication augmente

l’inconfort ni si l’inconfort affecte l’intention comportementale. Enfin, notre étude

soulève la question de la possibilité d’autres facteurs modérateurs de cette médiation.

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120

Chapitre 5

Discussion générale et conclusion

1. Discussion des principaux résultats par rapport aux problématiques de

départ.

1.1. Les attitudes ambivalentes : une structure qui n’est pas aussi « évidente »

qu’on pourrait le penser.

Les deux premières études présentées dans cette thèse avaient pour but

d'éclaircir les causes de la relation instable entre ambivalences structurale et ressentie.

Elles ont permis de mettre en évidence deux antécédents structuraux de l’ambivalence

ressentie. Ces antécédents n’avaient pas été étudiés jusqu'à présent (Conner & Sparks,

2002; Jonas, et al., 2000; Thompson, et al., 1995; van Harreveld, van der Pligt, et al.,

2009).

L’étude 1a montre que l’origine de l’ambivalence, dans les composantes

affectives ou cognitives, affecte dans quelle mesure les participants trouvent leur

attitude floue et contradictoire. Selon notre hypothèse de départ, une ambivalence

basée sur des composantes affectives est plus ressentie qu’une ambivalence basée sur

des composantes cognitives. Donc deux attitudes qui ont la même « structure

ambivalente » selon les mesures classiques, c'est-à-dire qui sont composées du même

nombre d’évaluations positives et négatives, peuvent ne pas être ressenties comme

étant aussi ambivalente l’une que l’autre. Les évaluations affectives et cognitives

semblent ne pas avoir le même poids dans le jugement de sa propre attitude.

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121

L’étude 1b montre que les évaluations négatives ont plus de poids que les

évaluations positives dans l’ambivalence ressentie. Pour la première fois, le biais de

négativité (Baumeister, et al., 2001; Rozin, 2001) a été pris en compte dans l’étude de

l’ambivalence. Ces résultats remettent en question les modèles classiques de structure

de l’ambivalence, représentés par des mesures qui accordent le même poids à la

positivité et la négativité (Kaplan, 1972; Katz & Hass, 1988; Thompson, et al., 1995).

Ces deux résultats permettent d’étendre les connaissances sur les antécédents de

l’ambivalence ressentie, particulièrement les antécédents structuraux. La structure des

attitudes ambivalentes avait été jusqu’ici « écartée » des problématiques concernant

l’ambivalence ressentie (de Liver, et al., 2005; Newby-Clark, et al., 2002; Priester &

Petty, 2001; Tormala & DeSensi, 2008), sans doute parce qu’elle était postulée dans

la définition même de l’ambivalence. Mes résultats mettent en évidence que la

structure de l’ambivalence ne peut plus être considérée aussi « simplement »

qu’auparavant. L’ambivalence n’est pas affectée symétriquement par la proportion

d’éléments positifs et négatifs comme on le croyait (Conner & Sparks, 2002; Jonas, et

al., 2000; Priester & Petty, 1996; Riketta, 2000; Thompson & Zanna, 1995;

Thompson, et al., 1995), et leur caractère cognitif ou affectif doit être pris en compte.

De plus, ces résultats engagent à utiliser une nouvelle manière de mesurer

l’ambivalence. En effet, les résultats présentés ici vont dans le sens d’une approche

multivariée de l’ambivalence structurale (Locke & Braun, 2009; Ullrich, 2008). Les

résultats de l’étude 1a préconisent de permettre l’étude séparée des effets des

composantes cognitives et affectives, et ceux de l’étude 1b l’étude séparée des

facteurs positifs et négatifs. Une approche univariée de l’ambivalence nécessite alors

l’utilisation de l’ambivalence ressentie.

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122

1.2. Les conséquences sur l’intention de comportement : au-delà de la simple

modération.

Dans la deuxième partie du programme de recherche (Chapitre 4), les trois

études avaient pour objectif d’améliorer les connaissances concernant les

conséquences de l’ambivalence sur l’intention de comportement.

Dans l’étude 2a, puisque l’ambivalence ressentie était manipulée, nous avons pu

étudier ses effets indépendamment d’autres facteurs liés à la force des attitudes

(Krosnick, et al., 1993; Visser, et al., 2006). Les résultats ont montré que

l’ambivalence seule ne diminue pas toujours les effets des attitudes sur le

comportement. Nous avons montré qu’une attitude ambivalente pouvait mieux

prédire l’intention de comportement qu’une attitude non-ambivalente, du moins si elle

est plus accessible. Ces résultats sont particulièrement importants puisqu’ils vont à

l’encontre de l’ensemble des travaux publiés jusqu'à présent, exceptés ceux de Jonas

et al. (1997), et les conclusions de Ullrich et al. (2008).

Les résultats de l’étude 2b ont montré que l’ambivalence ressentie modère les

effets des informations sur l’intention de comportement. Nous avons vu que plus

on ressent d’ambivalence, plus l’intention de comportement est affectée par les

informations. De plus, les personnes ambivalentes semblent s’ « opposer » aux

informations polarisées : celles-ci ont alors un effet sur l’intention de comportement

inverse à leur valence.

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123

Enfin dans l’étude 2c, nous avons montré que l’ambivalence ressentie peut

médiatiser les effets des attitudes sur l’intention de comportement, comme elle

médiatise ceux sur le traitement de l’information (Nordgren, et al., 2006), et ce

d’autant plus qu’on est impliqué dans le domaine. Il semble que plus on est impliqué,

plus on a une impression subjective d’ambivalence, et plus celle-ci médiatise les

effets de l’attitude sur le comportement.

1.3. L’ambivalence ressentie comme meilleur indicateur de l’ambivalence

L’ensemble du programme de recherche souligne donc l’importance de l’étude

de l’ambivalence ressentie dans le domaine de l’ambivalence et plus généralement

celui des attitudes. Il va à l’encontre du modèle de Bassili (Bassili, 1996), qui prône

les mesures opératoires (par exemple, l’ambivalence structurale) plutôt que les

mesures méta-attitudinales (par exemple, l’ambivalence ressentie) dans l’étude de la

force des attitudes. Les résultats obtenus ici indiquent qu’il n’en va pas de même dans

le cas de l’ambivalence.

Nous avons vu dans un premier temps que les mesures opératoires de

l’ambivalence structurale ne prenaient pas en compte certains aspects importants des

attitudes ambivalentes : la « nature » ou l’ « origine » de la contradiction (cognitive ou

affective), ainsi que l’asymétrie de poids entre les évaluations positives et négatives.

L’utilisation de l’ambivalence ressentie peut faire partie des alternatives à ce type de

mesure, tout comme les mesures multivariées (Locke & Braun, 2009; Ullrich, 2008).

Par ailleurs, nous avons vu que la prise en compte de l’ambivalence ressentie

pouvait mettre en évidence des effets spécifiques sur l’intention de comportement :

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124

tout d’abord des effets modérateurs inverses de ceux obtenus dans la plupart des

travaux précédents, puis des effets sur la relation entre information et intention de

comportement, et finalement des effets de médiation sur la relation attitude-intention

de comportement. L’utilisation de l’ambivalence ressentie a donc permis d’éclaircir

les effets modérateurs de l’ambivalence sur l’intention de comportement, et de mettre

en évidence des effets médiateurs. Ces effets ne pouvaient être étudiés avec

l’ambivalence structurale, puisqu’il s’agit d’un covariant de l’attitude.

En résumé, d’un point de vue méthodologique, l’utilisation de l’ambivalence

ressentie offre l’avantage d’éviter les erreurs liées à l’utilisation d’une mesure

univariée de l’ambivalence structurale (les études 1a et 1b, et Locke & Braun, 2009;

Ullrich, 2008). D’un point de vue statistique, elle permet de diminuer le problème de

covariance avec l’attitude elle-même dans l’étude d’effets modérateurs (études 2a et

2c). Enfin, d’un point de vue théorique, l’ambivalence ressentie semble rendre compte

de l’ensemble des processus liés à l’ambivalence de manière plus exacte (études 1a et

1b), elle semble être un « résumé » de l’attitude qu’on utilise parfois pour prendre une

décision (étude 2c), et elle est associée à de l’inconfort (Nordgren, et al., 2006).

2. Limitations

Le travail présenté ici comprend des limitations générales.

Tout d’abord, dans les études présentées ici, le nombre de participants n’est pas

optimal. Particulièrement pour l’étude 2c et l’analyse de médiation modérée,

l’échantillon utilisé est trop petit pour tester ce genre de modèle. Il est donc

indispensable de répliquer les résultats avec des échantillons plus grands.

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Puis, je pense aux limitations liées aux mesures d’ambivalence ressentie

utilisées. D’une part ce type de mesure comprend en soi certaines faiblesses que nous

avons vues dans l’introduction. Par exemple, le participant peut être plus ou moins

conscient des processus psychologiques en cours, ou plus ou moins capable de les

transcrire sur des échelles (Bassili, 1996; Channouf & Mangard, 1997; Cialdini, et al.,

1995; Tedeschi, et al., 1971). D’autre part nous n’avons pas toujours utilisé les mêmes

items dans toutes les études, ceci pour différentes raisons. D’abord, les auteurs

n’utilisent pas tous les mêmes items. De plus, certains items en anglais n’ont pas de

« synonyme parfait » en français, et ce programme de recherche était, à ma

connaissance, le premier sur l’ambivalence en français. Enfin, les tests de fiabilité des

échelles n’étaient pas toujours concluants dans les différentes expériences (voir par

exemple l’étude 1a).

En outre, nous ne pouvons pas conclure face à ces résultats si les effets obtenus

sont dus à l’inconfort lié à l’ambivalence ressentie. Les études présentées auraient

bénéficié d’une mesure d’inconfort, telle qu’une échelle subjective ou une mesure

d’éveil physiologique (Maio, et al., 2001). Ou encore, dans le cas de la médiation

(étude 2c), d’un paradigme de mauvaise attribution (Nordgren, et al., 2006).

Enfin, le même objet d’attitude, l’exposition au soleil, a été repris dans presque

toutes les études du programme de recherches (sauf l’étude 2b, concernant un objet

différent mais similaire : la consommation de produits sucrés). Les résultats présentés

sont-ils spécifiques à cet objet ? Ou au domaine d’étude : les comportements liés à la

santé ? Il aurait été intéressant d’examiner si les résultats sont répliqués dans un

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126

domaine totalement différent, par exemple les attitudes intergroupes (Maio, et al.,

1996; Maio, et al., 2001).

3. Domaines d’application

Les recherches de cette thèse ont permis de confirmer la nécessité de la prise en

compte de l’ambivalence dans le domaine de la santé (Armitage, 2003; Armitage &

Conner, 2000; Conner, et al., 2003; Conner, et al., 1998; Conner, et al., 2002; de

Liver, et al., 2005; de Liver, et al., 2007; Povey, et al., 2001; Sparks, et al., 2001), en

l’appliquant à l’exposition au soleil. Les conclusions présentées ici sur l’importance

de l’utilisation de l’ambivalence ressentie sont capitales dans le domaine de la

prévention des comportements risqués et la promotion de comportements bénéfiques à

la santé.

En effet, concernant la prédiction de comportement, les résultats de l’étude 2a

remettent en question l’ensemble des travaux existant sur l’ambivalence et la santé et

leurs conclusions concernant le rôle de l’ambivalence dans cette prédiction. Les

attitudes ambivalentes ne peuvent donc plus être systématiquement considérées

comme des attitudes faibles. De plus, les résultats de l’étude 2c nous éclairent sur les

processus impliqués dans cette prédiction, et sur l’importance des mesures méta-

attitudinales. Les recherches appliquées concernant le changement d’attitude en

général, les différents stades de changement d’attitude, et l’implémentation de

comportement pourraient bénéficier des résultats présentés ici (Armitage, 2006;

Armitage & Arden, 2007, 2008; Armitage, Povey, & Arden, 2003).

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Concernant les messages de prévention, les résultats des études 1a et 1b

apportent une lumière importante pour les tentatives de rendre les gens plus

ambivalents : nous pouvons penser qu’une communication basée sur les aspects

affectifs sera plus efficace qu’une communication basée sur les aspects cognitifs, et

que des informations négatives auront plus de poids que des informations positives.

De plus, les résultats de l’étude 2b complètent les connaissances sur les effets de

l’ambivalence sur le traitement de l’information (Jonas, et al., 2000; Jonas, et al.,

1997; Nordgren, et al., 2006; Thompson, et al., 1995). Jusqu’ici, on savait que

l’ambivalence engendrait un traitement de l’information plus approfondi. Nous savons

maintenant qu’elle peut aussi entrainer un « rejet » des informations polarisées. Donc,

pour illustrer, si les cibles d’une campagne de prévention sont des personnes à des

stades de changement de comportement « ambivalents » (Armitage & Arden, 2007;

Armitage, et al., 2003) selon le modele transtheorique du changement (Prochaska &

DiClemente, 1983), par exemple les stades de contemplation et de préparation, il

faudra utiliser des informations moins polarisées que pour des stades moins

« ambivalents », par exemple les stades de précontemplation et de maintenance.

Cependant, toujours d’un point de vue appliqué, et particulièrement d’un point

de vue lié à la santé, il serait intéressant de ne pas se limiter à l’intention

comportementale mais de replacer le contexte dans un continuum d’intention. C'est-à-

dire, d’établir si de tels effets peuvent être retrouvés à différents degrés d’intention de

comportement, du simple désir (Perugini & Bagozzi, 2004) à l’implémentation

d’intention (Gollwitzer & Brandstatter, 1997).

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128

4. Les pistes de recherches

Le premier projet de recherche serait de pallier les limitations exprimées plus

haut, en tentant de répliquer les résultats présentés en utilisant un autre objet

d’attitude. L’idéal serait d’étudier un objet d’attitude nouveau pour le participant,

dans un domaine différent de celui de la santé, et donc d’utiliser un paradigme de

formation d’impression (tel que dans Gebauer, et al., 2009). Les études

comprendraient aussi des mesures (objectives ou subjectives) d’inconfort. Cela nous

permettrait de distinguer les effets de l’ambivalence ressentie de ceux de l’inconfort

qui pourrait y être lié, et donc de prédire ensuite, par exemple, des effets différents de

l’ambivalence en fonction de la préférence pour la cohérence.

Les résultats obtenus ici soulèvent d’autres questions fondamentales.

Concernant par exemple les antécédents de l’ambivalence, les résultats obtenus sont-

ils dus à la mesure d’ambivalence structurale employée ? Dans les études à venir, les

évaluations positives et négatives seront prises en compte séparément (Locke &

Braun, 2009; Ullrich, 2008). Concernant les effets de l’ambivalence sur l’intention de

comportement, est-ce que l’intention de comportement peut-être un moyen de « se

sortir de » l’ambivalence ressentie, de faire diminuer l’inconfort ? On pourrait

mesurer si l’ambivalence ressentie ou l’inconfort diminue après que les participants

aient pris une décision concernant leur comportement. Cette diminution est-elle

d’autant plus importante que le participant est sûr de sa décision ? Si se sentir

ambivalent, c’est être « déchiré entre deux lignes de conduites (ou plan d’action) »

(van Harreveld, van der Pligt, et al., 2009, p. 46), alors le fait d’avoir pris sa décision

sur l’action en question, devrait faire diminuer se sentiment d’être déchiré.

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Enfin, plus généralement, les recherches présentées ici invitent à examiner de

manière plus circonspecte les recherches liant les aspects structuraux des attitudes et

les méta-attitudes.

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138

Annexe 1a: Consigne générale utilisée dans toutes les études (excepté l’étude 2b), en

première page.

ETUDE SUR L'EXPOSITION AU SOLEIL

Vous avez accepté de participer à notre étude et nous vous en remercions. Il n'y

a pas de bonnes ou de mauvaises réponses aux questions qui suivent, nous nous

intéressons à vos comportements et à vos attitudes (ou opinions), particulièrement

concernant l’exposition au soleil (dans le but de bronzer, à la plage, la montagne ou

tout autre endroit). Les réponses sont anonymes et serons utilisées uniquement dans le

cadre de notre étude. Vous répondrez aux questions dans l'ordre, sans revenir en

arrière.

Annexe 1b: Mesure de phototype utilisée dans toutes les études (excepté l’étude 2b), en

dernière page.

• De naissance, votre peau est :

très claire de type roux / très claire / claire / mate / très mate / noire

• Sans protection, vous êtes sujet aux coups de soleil de manière :

constante / très fréquente / fréquente / rare / exceptionnelle / jamais

• Pour vous, le bronzage est :

impossible / très difficile / difficile / facile / très facile / très facile et rapide

Age : Sexe :

Annexe 2a (1) Manipulation de l’ambivalence dans l’étude 1a. Condition « cognitive »

Maintenant pensez à l’exposition au soleil, et concentrez-vous sur ses aspects.

1) Ne considérez pas les aspects mauvais et concentrez vous uniquement sur les bons

aspects de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au soleil »

est quelque chose de bon ?

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139

1 2 3 4

pas du tout un peu assez très

bon bon bon bon

2) Ne considérez pas les bons aspects et concentrez vous uniquement sur les aspects

mauvais de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose de mauvais ?

3) Ne considérez pas les aspects dangereux et concentrez vous uniquement sur les

aspects bénéfiques de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer

au soleil » est quelque chose de bénéfique ?

4) Ne considérez pas les aspects bénéfiques et concentrez vous uniquement sur les

aspects dangereux de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer

au soleil » est quelque chose de dangereux ?

5) Ne considérez pas les aspects idiots et concentrez vous uniquement sur les aspects

intelligents de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose d’intelligent ?

6) Ne considérez pas les aspects intelligents et concentrez vous uniquement sur les

aspects idiots de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose d’idiot ?

7) Ne considérez pas les aspects malsains et concentrez vous uniquement sur les

aspects sains de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose de sain ?

8) Ne considérez pas les aspects sains et concentrez vous uniquement sur les aspects

malsains de l’exposition au soleil. A quel point pensez-vous que « s’exposer au

soleil » est quelque chose de malsain ?

Annexe 2a (2) Manipulation de l’ambivalence dans l’étude 1a. Condition « affective »

Maintenant pensez à l’exposition au soleil, et concentrez vous sur ce que vous

ressentez. Lisez les questions suivantes et répondez en sélectionnant un chiffre

entre 1 et 4. Les chiffres intermédiaires vous permettent de nuancer votre réponse.

1) Ne considérez pas tout ce qui vous rassure et considérez uniquement ce qui vous

inquiète. A quel point vous sentez-vous inquiet(e) quand vous pensez à « s’exposer au

soleil »?

1 2 3 4

pas du tout un peu assez très

inquiet(e) inquiet(e) inquiet(e) inquiet(e)

2) Ne considérez pas tout ce qui vous inquiète et considérez uniquement ce qui vous

rassure. A quel point vous sentez-vous rassuré(e) quand vous pensez à « s’exposer au

soleil » ?

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140

3) Ne considérez pas tout ce qui vous rebute et considérez uniquement ce qui vous

attire. A quel point vous sentez-vous attiré(e) quand vous pensez à « s’exposer au

soleil » ?

4) Ne considérez pas tout ce qui vous attire et considérez uniquement ce qui vous

rebute. A quel point vous sentez-vous rebuté(e) quand vous pensez à « s’exposer au

soleil » ?

5) Ne considérez pas tout ce qui ne vous satisfait pas et considérez uniquement ce qui

vous satisfait. A quel point vous sentez-vous satisfait(e) quand vous pensez à

« s’exposer au soleil » ?

6) Ne considérez pas tout ce qui vous satisfait et considérez uniquement ce qui ne

vous satisfait pas. A quel point vous sentez vous insatisfait(e) quand vous pensez à

« s’exposer au soleil » ?

7) Ne considérez pas tout ce qui vous met mal à l’aise et considérez uniquement ce

qui vous met à l’aise. A quel point vous sentez-vous à l’aise quand vous pensez à

« s’exposer au soleil » ?

8) Ne considérez pas tout ce qui vous met à l’aise et considérez uniquement ce qui

vous met mal à l’aise. A quel point vous sentez-vous mal à l’aise quand vous pensez à

« s’exposer au soleil » ?

Annexe 2b Mesure des variables dépendantes dans l’étude 1a

• Je ressens mon attitude (c'est-à-dire ce que je pense, pas ce que je fais) envers

l'exposition au soleil comme :

Pas du tout mitigée 1 2 3 4 5 6 Très mitigée

Pas du tout contradictoire 1 2 3 4 5 6 Très contradictoire

Pas du tout floue 1 2 3 4 5 6 Très floue

Ne considérez pas les aspects négatifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects positifs de l'exposition au soleil.

A quel point votre évaluation de l'exposition au soleil est-elle positive ?

Pas du tout positive 1 2 3 4 5 6 7 tout à fait positive

Ne considérez pas les aspects positifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects négatifs de l'exposition au soleil.

A quel point votre évaluation de l'exposition au soleil est-elle négative ?

Pas du tout négative 1 2 3 4 5 6 7 tout à fait négative

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141

Annexe 3 Exemples de manipulation du type d’information présentée étude 1b

Consigne : Lisez le contenu de l’encadré puis tournez la page pour répondre aux

questions.

Condition 2 informations positives

S’exposer au soleil favorise la synthèse de Vitamine D. Son rôle est indispensable dans

l’équilibre du calcium dans le corps et dans la constitution du capital osseux (augmente la

solidité des os).

S’exposer au soleil est bénéfique pour le moral. La lumière reçue par les yeux joue un rôle

dans la production de la mélatonine (« hormone du bien-être ») qui intervient sur le rythme

biologique et notamment sur le moral.

Condition 1 information positive et 1 information négative

S’exposer au soleil augmente les risques de développer des cancers de la peau

(mélanomes). Ces cancers sont causés par les rayonnements ultraviolets, qui sont à

l’origine de la modification et de l’apparition de grains de beauté.

S’exposer au soleil est bénéfique pour le moral. La lumière reçue par les yeux

augmente la production de la mélatonine (« hormone du bien-être ») qui intervient

sur le rythme biologique et influence le moral.

Condition 2 informations négatives

S’exposer au soleil augmente les risques de développer des cancers de la peau

(mélanomes). Ces cancers sont causés par les rayonnements ultraviolets, qui sont à

l’origine de la modification et de l’apparition de grains de beauté.

S’exposer au soleil augmente le vieillissement précoce de la peau. Rides, perte

d'élasticité, tâches brunes ou déshydratation de l’épiderme sont autant de signes du

vieillissement prématuré de la peau.

Annexe 4a (1)

Manipulation de l’accessibilité simultanée des évaluations positives et négatives

dans l’étude 2a. Condition « accessibilité faible »

Pas de questionnaire.

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142

Annexe 4a (2) Manipulation de l’accessibilité simultanée des évaluations positives et négatives

dans l’étude 2a. Condition « accessibilité moyenne »

1) Ne considérez pas les aspects négatifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects positifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle positive ? (entourez le chiffre correspondant, entre 1 « pas du tout »

et 4 « tout à fait »))

2) Ne considérez pas les aspects positifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects négatifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle négative ?

3) Ne considérez pas les aspects défavorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects favorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle favorable ?

4) Ne considérez pas les aspects favorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects défavorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle défavorable ?

5) Ne considérez pas les aspects dangereux et concentrez vous uniquement sur les

aspects bénéfiques de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme bénéfique ?

6) Ne considérez pas les aspects bénéfiques et concentrez vous uniquement sur les

aspects dangereux de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme dangereuse ?

Annexe 4a (3) Manipulation de l’accessibilité simultanée des évaluations positives et négatives

dans l’étude 2a. Condition « accessibilité forte »

Consigne orale.

« Ces informations doivent aller à différentes personnes. Je garde cette copie mais je

dois aussi donner ces évaluations à mon directeur de thèse et à l’assistant de

recherche. Je vais donc vous demander de copier ces informations sur deux autres

formulaires. » (je donne les formulaires) « Copiez juste vos évaluations sur chacun de

ces formulaires. Faites attention car les échelles ne sont pas dans le même ordre sur

chaque formulaire, chaque personne a fait son propre questionnaire. Il faut lire

attentivement chaque question et recopier votre réponse »

3 questionnaires : questionnaire précédent, puis les deux ci-dessous :

INDICES D’INTERET / EXPOSITION AU SOLEIL

Page 143: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

143

Maintenant concentrez vous sur votre évaluation concernant l’exposition au soleil.

1) Ne considérez pas les aspects favorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects défavorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle défavorable ? (cocher la case correspondante)

1- pas du tout défavorable □

2- un peu défavorable □

3- assez défavorable □

4- très défavorable □

2) Ne considérez pas les aspects négatifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects positifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle positive ?

1- pas du tout positive □

2- un peu positive □

3- assez positive □

4- très positive □

3) Ne considérez pas les aspects bénéfiques et concentrez vous uniquement sur les

aspects dangereux de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme dangereuse ?

1- pas du tout dangereuse □

2- un peu dangereuse □

3- assez dangereuse □

4- très dangereuse □

4) Ne considérez pas les aspects positifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects négatifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle négative ?

1- pas du tout négative □

2- un peu négative □

3- assez négative □

4- très négative □

5) Ne considérez pas les aspects dangereux et concentrez vous uniquement sur les

aspects bénéfiques de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme bénéfique ?

Page 144: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

144

1- pas du tout bénéfique □

2- un peu bénéfique □

3- assez bénéfique □

4- très bénéfique □

6) Ne considérez pas les aspects défavorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects favorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle favorable ?

1- pas du tout favorable □

2- un peu favorable □

3- assez favorable □

4- très favorable □

FORMULAIRE-STATISTIQUES

Maintenant concentrez vous sur votre évaluation concernant l’exposition au soleil.

1) Ne considérez pas les aspects défavorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects favorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle favorable ?

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

2) Ne considérez pas les aspects négatifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects positifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle positive ?

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

3) Ne considérez pas les aspects favorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects défavorables de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de

l’exposition au soleil est-elle défavorable ?

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

4) Ne considérez pas les aspects bénéfiques et concentrez vous uniquement sur les

aspects dangereux de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme dangereuse ?

Page 145: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

145

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

5) Ne considérez pas les aspects positifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects négatifs de l’exposition au soleil. A quel point votre évaluation de l’exposition

au soleil est-elle négative ?

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

6) Ne considérez pas les aspects dangereux et concentrez vous uniquement sur les

aspects bénéfiques de l’exposition au soleil. A quel point évaluez-vous l’exposition au

soleil comme bénéfique ?

(écrire le chiffre correspondant, entre 1 et 4) ____

Annexe 4b (1) Manipulation de la préférence pour la cohérence dans l’étude 2a. Condition

« préférence forte »

Considérez-vous que les propositions suivantes vous correspondent ?

Veuillez répondre en entourant un chiffre entre 1 « pas du tout d’accord », et 7

« tout à fait d’accord ».

1) Je préfère parfois faire des choses qui ne sont pas contradictoires entre elles.

2) Je tolère toujours les gens qui sont constamment en train de changer d’opinion.

3) Il est important pour moi que je sois quelquefois stable en ce qui concerne mes

comportements et mes opinions.

4) Avoir deux idées contradictoires me met parfois particulièrement mal à l’aise.

5) Je n’aime pas toujours les gens qui déclarent détester les émissions de variété mais

qui les regardent souvent.

6) Il m’arrive parfois de ne pas aimer les gens qui se contredisent constamment.

7) Je ne supporte pas toujours de dépendre d’une personne imprévisible.

8) Je tolère parfois les gens qui affichent une opinion politique et qui votent pour

d’autres idées.

9) Je souhaite de temps en temps donner de moi l’image d’une personne dont les

opinions et les comportements sont cohérents entre eux.

10) Quelquefois les gens que je trouve bien sont des personnes dont les

comportements sont stables et prévisibles.

Page 146: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

146

11) Je n’aime pas toujours les personnes qui changent constamment d’humeur.

12) J’apprécie parfois les gens qui sont très cohérents en ce qui concerne leurs projets

de vie.

13) Je considère parfois que la vie d’un groupe est plus agréable si tous les gens

étaient cohérents dans leurs idées.

14) Dans ma vie professionnelle j’aimerais de temps en temps avoir des collègues qui

ne se contredisent jamais.

15) J’ai parfois du mal à supporter que mes comportements contredisent mes idées.

Annexe 4b (2)

Manipulation de la préférence pour la cohérence dans l’étude 2a. Condition

« préférence faible »

1) Je préfère toujours faire des choses qui ne sont pas contradictoires entre elles.

2) Je tolère parfois les gens qui sont constamment en train de changer d’opinion.

3) Il est important pour moi que je sois toujours stable en ce qui concerne mes

comportements et mes opinions.

4) Avoir deux idées contradictoires me met systématiquement particulièrement mal à

l’aise.

5) Je n’aime pas du tout les gens qui déclarent détester les émissions de variété mais

qui les regardent souvent.

6) Il m’arrive tout le temps de ne pas aimer les gens qui se contredisent constamment.

7) Je ne peux pas supporter de dépendre d’une personne imprévisible.

8) Je tolère à chaque fois les gens qui affichent une opinion politique et qui votent

pour d’autres idées.

9) Je souhaite constamment donner de moi l’image d’une personne dont les opinions

et les comportements sont cohérents entre eux.

10) Les gens que je trouve bien sont toujours des personnes dont les comportements

sont stables et prévisibles.

11) Je n’aime pas du tout les personnes qui changent constamment d’humeur.

12) J’apprécie seulement les gens qui sont très cohérents en ce qui concerne leurs

projets de vie.

Page 147: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

147

13) Je considère systématiquement que la vie d’un groupe est plus agréable si tous les

gens étaient cohérents dans leurs idées.

14) Dans ma vie professionnelle je souhaiterais vivement avoir des collègues qui ne

se contredisent jamais.

15) J’ai toujours du mal à supporter que mes comportements contredisent mes idées.

Annexe 4c

Mesure des variables dans l’étude 2a

• Vous avez l'occasion de vous exposer au soleil pour bronzer. Combien de

temps le faites-vous?

- entre 15 et 30 minutes à la suite

- entre 30 minutes et 1 heure à la suite

- entre 1 heure et 2 heures à la suite

- plus de 2 heures à la suite

• Quand vous êtes-vous exposé au soleil pour bronzer pour la dernière fois?

- il y a entre 6 mois et 1 an

- il y a entre 1 et 6 mois

- il y a moins d'un mois

- il y a moins d’une semaine

• Durant le dernier été, combien de jours vous êtes-vous exposé au soleil pour

bronzer (mettre un chiffre) ?

jours

• Pour moi, m’exposer au soleil l'été prochain serait

Impossible 1 2 3 4 5 6 7 Très facile

• Si je voulais je pourrais m’exposer au soleil l'été prochain.

Pas du tout d'accord 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

d'accord

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148

• L’été prochain, j’ai l'intention de m’exposer au soleil.

Pas du tout d'accord 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

d'accord

• L’été prochain, je vais essayer de m’exposer au soleil.

Pas du tout d'accord 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

d'accord

Annexe 5a Instructions de l’étude 2b

Etude sur la consommation de produits sucrés

Vous avez accepté de participer à notre étude et nous vous en

remercions. Il n'y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses aux

questions qui suivent.

Les réponses sont anonymes et seront utilisées uniquement dans le

cadre de notre étude.

Vous répondrez aux questions dans l'ordre, sans revenir en arrière.

Annexe 5b Exemples de manipulation du type d’information présentée étude 2b

Condition 2 informations positives

La consommation de produits sucrés est bonne pour votre santé.

En quantité raisonnable, le sucre (glucose) est une source d’énergie naturelle indispensable à

l’organisme dans une alimentation équilibrée. Le glucose constitue un « carburant » pour le

bon fonctionnement du corps et de l’esprit (capacités intellectuelles).

Les glucides sont nécessaires à la fabrication de certaines molécules, les endorphines, aussi

appelées « molécules du plaisir ». Elles ont un effet tranquillisant et provoquent une

sensation de bien être.

Condition 1 information positive et 1 information négative

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149

En quantité raisonnable, le sucre (glucose) est une source d’énergie naturelle indispensable à

l’organisme dans une alimentation équilibrée. Le glucose constitue un « carburant » pour le

bon fonctionnement du corps et de l’esprit (capacités intellectuelles).

L’excès de sucre peut entraîner un diabète de Type 2, c’est-à-dire non héréditaire). Les

conséquences de ce diabète sont potentiellement mortelles et pas toujours visibles : fatigue à

répétition, mauvaise vue, bouche sèche, picotements.

Condition 2 informations négatives

La consommation de produits sucrés est mauvaise pour votre santé.

En quantité excessive, le sucre (glucose) est transformé en graisse que l’organisme stocke. Il

peut être responsable d’un surpoids se traduisant par un essoufflement pendant l’effort ou

des douleurs articulaires ainsi qu’un taux de cholestérol élevé.

L’excès de sucre peut entraîner un diabète de Type 2, c’est-à-dire non héréditaire). Les

conséquences de ce diabète sont potentiellement mortelles et pas toujours visibles : fatigue à

répétition, mauvaise vue, bouche sèche, picotements.

Annexe 5c Mesure des variables dans l’étude 2b

1) Ne considérez pas les aspects négatifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects positifs du produit sucré (entourez le chiffre correspondant, entre 1 « pas du

tout » et 4 « tout à fait »).

A quel point votre évaluation du produit sucré est-elle positive ?

2) Ne considérez pas les aspects positifs et concentrez vous uniquement sur les

aspects négatifs du produit sucré.

A quel point votre évaluation du produit sucré est-elle négative ?

3) Ne considérez pas les aspects défavorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects favorables d’un produit sucré.

A quel point votre évaluation du produit sucré est-elle favorable ?

4) Ne considérez pas les aspects favorables et concentrez vous uniquement sur les

aspects défavorables d’un produit sucré.

A quel point votre évaluation du produit sucré est-elle défavorable ?

• Je ressens mon attitude (c'est-à-dire ce que je pense, pas ce que je fais) envers les

produits sucrés comme :

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

ambivalente ambivalente

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

floue floue

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150

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

confuse confuse

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

divisée divisée

• Mon attitude (c'est-à-dire ce que je pense, mon opinion) envers les produits

sucrés est composée à la fois de positif et de négatif :

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

• Mon attitude envers les produits sucrés est mitigée :

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

• Je me sens indécis(e) :

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

• J’ai l’intention de consommer des produits sucrés

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

• Je vais essayer de consommer des produits sucrés

Pas du tout 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait

Annexe 6a (1) Manipulation de l’attitude dans l’étude 2c. Condition « attitude positive »

Considérez-vous que les propositions suivantes vous correspondent ? Vous

répondrez en entourant un chiffre de 1=pas du tout d’accord à 7=tout à fait d’accord.

• Je m’expose toujours au soleil plus de 2 heures de suite en été.

• J’évite de m’exposer au soleil entre 12 h et 16 h en été.

• Je m’expose au soleil entre 12 h et 16 h en hiver à la montagne.

• Je m’expose au soleil en hiver à la montagne.

• Je m’expose toujours au soleil au bord de la mer en été.

• Je m’expose à chaque fois au soleil à la montagne en été.

• Je porte parfois attention aux indices de protection des crèmes solaires.

• Je mets de la crème solaire dont l’indice est supérieur à 15 l’hiver à la montagne.

• Je porte de temps en temps des lunettes de soleil quand je vais à la montagne.

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151

• Parfois je porte des lunettes de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, il m’arrive parfois de porter un chapeau.

• J’attrape systématiquement des coups de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, je me protège parfois du soleil avec une crème dont l’indice est supérieur à 15.

• Je pratique des activités de plein air l’été.

• Il m’arrive d’avoir des problèmes de peau liés au soleil autres que les coups de soleil.

• Je continue quelquefois de me protéger du soleil (avec une crème ou des vêtements

longs) une fois que je suis déjà bronzé(e).

• L’été, il m’arrive quelquefois de m’appliquer de la crème protectrice plusieurs fois

dans la journée.

• Il m’est souvent arrivé de souffrir de coups de soleil sévères.

• Il m’arrive de temps en temps de faire des séjours dans des régions très ensoleillées.

• Je vois parfois mon entourage se protéger du soleil par une crème ou des vêtements

longs.

Annexe 6a (2) Manipulation de l’attitude dans l’étude 2c. Condition « attitude négative »

• Parfois je m’expose au soleil plus de 2 heures de suite en été.

• Il m’arrive parfois de m’exposer au soleil entre 12 h et 16 h en été.

• Je m’expose au soleil entre 12 h et 16 h en hiver à la montagne.

• Je m’expose au soleil en hiver à la montagne.

• Je m’expose parfois au soleil au bord de la mer en été.

• Je m’expose de temps en temps au soleil à la montagne en été.

• Je porte systématiquement attention aux indices de protection des crèmes solaires.

• Je mets de la crème solaire dont l’indice est supérieur à 15 l’hiver à la montagne.

• Je porte continuellement des lunettes de soleil quand je vais à la montagne.

• Je porte toujours des lunettes de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, il m’arrive souvent de porter un chapeau.

• J’attrape de temps en temps des coups de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, je me protège toujours du soleil avec une crème dont l’indice est supérieur à 15.

• Je pratique des activités de plein air l’été.

• Il m’arrive d’avoir des problèmes de peau liés au soleil autres que les coups de soleil.

• Je continue toujours de me protéger du soleil (avec une crème ou des vêtements longs)

une fois que je suis déjà bronzé(e).

• L’été, je m’applique à chaque fois de la crème protectrice plusieurs fois dans la journée.

• Il m’est déjà arrivé de souffrir de coups de soleil sévères.

• Il m’arrive très souvent de faire des séjours dans des régions très ensoleillées.

• Je vois toujours mon entourage se protéger du soleil par une crème ou des vêtements

longs.

Annexe 6a (3) Manipulation de l’attitude dans l’étude 2c. Condition « attitude ambivalente »

• Parfois je m’expose au soleil plus de 2 heures de suite en été.

• J’évite de m’exposer au soleil entre 12 h et 16 h en été.

• Je m’expose quelquefois au soleil entre 12 h et 16 h en hiver à la montagne.

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• Je m’expose toujours au soleil en hiver à la montagne.

• Je m’expose parfois au soleil au bord de la mer en été.

• Je m’expose de temps en temps au soleil à la montagne en été.

• Je porte systématiquement attention aux indices de protection des crèmes solaires.

• Je mets toujours de la crème solaire dont l’indice est supérieur à 15 l’hiver à la

montagne.

• Je porte continuellement des lunettes de soleil quand je vais à la montagne.

• Parfois je porte des lunettes de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, il m’arrive parfois de porter un chapeau.

• J’attrape de temps en temps des coups de soleil quand je vais au bord de la mer.

• L’été, je me protège parfois du soleil avec une crème dont l’indice est supérieur à 15.

• Je pratique tout le temps des activités de plein air l’été.

• Il m’arrive fréquemment d’avoir des problèmes de peau liés au soleil autres que les

coups de soleil.

• Je continue toujours de me protéger du soleil (avec une crème ou des vêtements longs)

une fois que je suis déjà bronzé(e).

• L’été, il m’arrive quelquefois de m’appliquer de la crème protectrice plusieurs fois dans

la journée.

• Il m’est souvent arrivé de souffrir de coups de soleil sévères.

• Il m’arrive très souvent de faire des séjours dans des régions très ensoleillées.

• Je vois parfois mon entourage se protéger du soleil par une crème ou des vêtements

longs.

Page 153: Aspects structuraux des attitudes : Antécédents et ... · 1 Sur l’image ci-dessus, Lucy explique à Linus que le cœur est composé d’amour et de haine, et que ces deux sentiments

153

Annexe 6b Manipulation de l’implication dans l’étude 2c. Condition « implication faible »

Communication de l'Association de Communication de l'Association de Communication de l'Association de Communication de l'Association de

Dermatologie du Manitoba (Canada)Dermatologie du Manitoba (Canada)Dermatologie du Manitoba (Canada)Dermatologie du Manitoba (Canada) :::: L'augmentation des cas de cancers de la

peau a été spectaculaire durant les trente dernières années chez les agriculteurs du Manitobales agriculteurs du Manitobales agriculteurs du Manitobales agriculteurs du Manitoba. Le principal facteur de risque dans la survenue du mélanome (forme la plus fréquente de cancer cutané) est l'exposition excessive au soleil. Le signe le plus important est l'apparition de brûlures solaires (dites "coups de soleil"). Si toute personne est susceptible de développer un jour un cancer de la peau, le danger du soleil n'est pas égal pour tous et certaines populations sont particulièrement sujettes au risque. Les agriculteurs à la peau très claire, de type roux, avec des antécédents personnels ou familiaux de mélanome, et ayant beaucoup de grains de beauté présentent un risque élevé. Les expositions intenses sont les plus dangereuses, surtout dans le jeune âge. En dehors des expositions professionnelles (agriculteurs notamment), les expositions deviennent de plus en plus fréquentes, dues en particulier à la mode des vacances au soleil. Ceci dit, le soleil n'est pas à fuir totalement. La recherche scientifique et médicale a permis de mieux connaître les effets positifs du soleil sur l'organisme. Le soleil accroît la production de vitamine D, indispensable à l'absorption du calcium par l'organisme et au maintien de l'équilibre des systèmes cardio-vasculaire et immunitaire. Une exposition au soleil de 15 à 20 minutes suffit à remplir 80 à 100% des besoins quotidiens en vitamine D. Le soleil a aussi des effets favorables sur l'humeur. S'exposer de manière modérée afin d'avoir bonne mine ou obtenir un hâle léger n'est pas absolument nocif. La meilleure prévention du mélanome reste l'auto-examen. La surveillance régulière de sa peau permet la découverte précoce de lésions malignes encore peu profondes. Leur ablation promet alors une guérison dans 95% des cas, sans conséquence esthétique ni fonctionnelle.

Source : Info-Agricoles.

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Annexe 6c

Mesure des variables dans l’étude 2c

Pour moi, m’exposer au soleil est :

- Agréable

- Douloureux

- Plaisant

- Dangereux

- Bénéfique

- Ennuyeux

• Je ressens mon attitude envers l'exposition au soleil comme :

Pas du tout contradictoire 1 2 3 4 5 6 Très contradictoire

Pas du tout floue 1 2 3 4 5 6 Très floue

• L’été prochain, j’ai l'intention de m’exposer au soleil.

Pas du tout d'accord 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait d'accord

• L’été prochain, je vais essayer de m’exposer au soleil.

Pas du tout d'accord 1 2 3 4 5 6 7 Tout à fait d'accord

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