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ARCHÉOLOGIE EN NORD - PAS-DE-CALAIS PLACES FORTES DU LITTORAL AU MOYEN ÂGE

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ARCHÉOLOGIE EN NORD - PAS-DE-CALAISPLACES FORTES DU LITTORAL AU MOYEN ÂGE

Àpartir du IXe siècle, les seigneurslocaux édifient des fortifications

pour se défendre contre les raids desNormands attirés par les richesses desvilles et des monastères de la région telsque Bergues, Bourbourg, Saint-Omer,Montreuil… Ces fortifications castrales etabbatiales se trouvent à l’origine de beau-coup de villes. Et au cours de la2e moitié du IXe siècle, on assisteau développement de portus et debourgs castraux le long des voiesde communications fluviales etterrestres. A la fin du siècle, onrestaure également les fortifica-tions datant de l’Antiquité tardivecomme à Boulogne et àThérouanne qui restent le siègede puissants évêchés.

C’est à cette époque aussi que la régionlittorale passe progressivement sousl’autorité des comtes de Flandre, vassauxdes rois de France ; le comté de Flandreva s’étendre jusqu’à l’estuaire de laCanche.

LES CASTRA CAROLINGIENS

1. Le comté de Flandreaux IXe - XIe s.

2. Boulogne : fondationsdu rempart de l’Antiquitétardive.

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Beaudouin II (879-918) est l’initiateurd’une série de fortifications qui

protègent la côte flamande contre lesincursions normandes : les castella recensfacta. Ces fortifications sont construitesen terre et en bois. Les fortifications cir-culaires flamandes (Bourbourg, Bergues,Furnes, Dixmude, Gistel, Oostburg) sontcontemporaines des fortifications édifiéesen Zélande et en Hollande. Domburg,la plus grande des enceintes zélandaisespossède un diamètre de 265 m. La défensedes régions côtières de la Flandreprésente donc un caractère organisé avecun système linéaire de fortificationsconstruites à distance régulière. Ce modèled’enceinte circulaire pourrait tirer sonorigine des enceintes de même typeréalisées sur le littoral saxon à partir duVIIIe siècle, région avec laquelle le littoralflamand et artésien entretenait d’étroitsrapports commerciaux et culturels.

Un grand nombre de ces enceintes adonné lieu par la suite au développementd’une ville, intégrée dans le systèmedéfensif du comté de Flandre, d’autres ontété très tôt abandonnées, une fois passé ledanger viking. A Bergues, l’enceinte étaitconstituée d’un fossé circulaire et d’unrempart de bois. Puis des habitations se

sont développées à l’extérieur du fossé etune rue périphérique s’est établie pourdesservir ces maisons. Furnes, castrumcomtal, Dixmude et Gistel se situentautour de la transgression marine de l’em-bouchure de l’Yser. A Saint-Omer, lecomte de Flandre Beaudouin II a munil’abbaye d’une enceinte vers 900. Par sarelation directe avec la mer par la baie del’Aa, Saint-Omer appartient plutôt au sys-tème de défense côtière qu’à celuide l’arrière-pays. La Flandre intérieurecomme les autres entités des Pays-Basméridionaux ne semble d’ailleurs pas avoirconnu à pareille époque une mise endéfense aussi organisée.

Vers l’an Mil, un nouveau mode apparaîtdans la construction des fortifications :la féodalisation implique l’abandon dessystèmes de défense collectifs et le refugecastral est remplacé par le château privé.La motte castrale est un élément clé danscette évolution. Dans certaines villes, unchâteau à motte est érigé dans le castrumprimitif comme à Saint-Omer, Furnes etGistel. A Bergues, le Burrewal égalementest bâti sur un site plus stratégique à600 m à l’est du castrum. A Dixmude et àYpres, le château à motte est aussiconstruit hors du rempart circulaire.

1. Beaudoin II :Cartulaire de Marchiennes XIIe s.(Archives départementalesdu Nord).

2. Vue de Bourbourg :Gravure de Braunet Hogenberg, 1575.

3. Plan de Oost-Souburg(Zélande - Pays-Bas).

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LE SYSTÈME DÉFENSIF DU IXe S.

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Au XIIe siècle, les comtes de Flandre,Thierry et Philippe d’Alsace, à l’apo-

gée de leur puissance, font assécher leszones littorales et les marais de l’Aa, etfondent des villes fortifiées le long du lit-toral selon un véritable plan d'aménage-

ment du territoire : Gravelines,Dunkerque et Calais.

Gravelines et Dunkerque(mais aussi Nieuport)

constituent ainsi lesavant-ports des villesplus anciennes (Saint-Omer, Bergues, Ypres).La ville se développe

selon un schéma régulieraux rues orthogonales.

Gravelines et Nieuport sont fondées vers1163. Calais est fondé par le frère dePhilippe d’Alsace, Mathieu, comte deBoulogne (1163-1173). Dunkerque,Biervliet et Damme apparaissent vers1180. Les premiers remparts n’étaientprobablement que de simples talus de ter-re palissadés, comme à Gravelines qui,selon Froissart, était “fermés de palis”.

Par ailleurs, l’industrie textile, alimentéepar la laine anglaise, permet à certaines deces villes de se développer rapidement,ainsi Saint-Omer devient-elle l’une desprincipales villes du nord de la France auXIIIe siècle.

LES VILLES NEUVES COMTALESDU XIIe SIÈCLE

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1. Saint-Omer : élévationdu rempart urbain du XIIIe s.

2. Dunkerque : place Jean-Bart,élément du rempart médiévalpré-bourguignon.

3. Dunkerque : plan deDunkerque, Jacob Deventer,vers 1559.

4. Sceau de Philippe d’Alsace.

1. Calais : élément de l’enceintede Philippe Hurepel,début XIIIe s.

2. Montreuil-sur-Mer : porte duchâteau de Philippe-Auguste,début XIIIe s.

3. Sceau de Philippe-Auguste.

Au XIIIe siècle, la région entre pourplusieurs siècles dans un mouvement

de flux et de reflux de souveraineté, ce quiamène à désigner ces territoires commedes “terres de débats”. En 1191, le roiPhilippe-Auguste, après avoir obtenu parmariage le comté d’Artois, décide de réaf-firmer son autorité sur les terres fla-mandes. Pour ce faire, avec l’aide de sesfils, il va mettre les villes du Nord leurappartenant en état de défense.En 1212, Philippe-Auguste récupère lesvilles d’Aire-sur-la-Lys et de Saint-Omer,il y construit un château et renforce aussiles remparts de Montreuil ; puis par la vic-toire de Bouvines en 1214, il reconquiertle comté de Boulogne. Quant à sonsecond fils, Philippe Hurepel, devenu

comte de Boulogne en 1223, il fait rebâtiren 1227 les fortifications de la ville etconstruit un château. L’année suivante, ildote aussi Calais, relevant à présent de lacouronne de France, d’une enceinte depierre et également d’un château.A la fin du siècle, Philippe le Bel (1285-1314) reprend le combat contreles comtes de Flandre et finit pars’emparer de la Flandre wallonne.Sur le littoral, la limite entrela Flandre et la France suitle cours de l’Aa. Les comtesde Flandre contrôlent encoreles villes de Gravelines,Bourbourg, Dunkerque etBergues.

LES FORTIFICATIONS FRANÇAISESDU DÉBUT DU XIIIe SIÈCLE

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Le Pale (enclave en territoire hostile) estdéfendu par une puissante garnison etsept avant-postes fortifiés (Sangatte,Marck, Oye, Fréthun, Hâmes, Guines,Balinghem), signe de l’intérêt porté parla couronne anglaise à cette enclave quilui permet de contrôler la navigationdans le détroit. Calais sera reprise par leduc de Guise en 1558.

La région connaît alors l’une despériodes les plus noires de son histoire :raids anglais, mauvaises récoltes, famineset peste à partir de 1349, dévastent larégion. Les activités textiles déclinentfortement et les villes perdent de leurpuissance comme Saint-Omer ouBoulogne-sur-Mer.

La Guerre de Cent Ans bouleverseà nouveau l'organisation politique

de la région. Dès le début de la guerre,la région littorale, située entre France etAngleterre, se trouve au cœur des enjeux.Après un siège dramatique d’un anet la prise de Calais par Edouard III

d'Angleterre en1347, les Anglaiss'installent pourdeux siècles sur lelittoral. La villeet son arrière-pays immédiat,appelé le Pale,vont demeureranglais pendantplus de 200 ans.

1. Noble d’or : monnaie à l’effigied’Edouard III d’Angleterre.

2. Calais et ses environssous la domination anglaisefac-similé d’une carte médiévale(Archives départementalesdu Pas-de-Calais).

3. Le territoire du Pale de Calaisen 1360.

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LA PRÉSENCE ANGLAISEET LE PALE DE CALAIS

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Après les dégâts engendrés parla guerre de Cent Ans,

le comte de Flandre, puisles ducs de Bourgognedécident d’entourer leursvilles de véritablesenceintes urbaines dèsla fin du XIVe sièclecomme à Bergues,Dunkerque, Furnes,Gravelines, Nieuport ouYpres. Tout le littoral, saufla région de Calais qui resteanglaise, est sous l’autorité dePhilippe le Bon.La région connaît alors une relative paixjusqu’à sa mort en 1467.Mais le mariage de Marie de Bourgogneet de Maximilien d’Habsbourg, futur

empereur d’Autriche, ravive le conflit.Les villes passent tour à tour sous la

domination des Français ou desBourguignons.

En 1493, Maximiliend’Autriche reprendl’Artois, excepté 4 placesfortes qui restent fran-çaises : Hesdin, Aire,Thérouanne et Béthune.

L’artillerie qui se dévelop-pe au cours du siècle suivantva cependant sonner le glas

des remparts traditionnels etl’avènement de la défense horizontale.

La région devient alors le théâtre d’épi-sodes guerriers incessants jusqu’en 1713.

LES FORTIFICATIONS BOURGUIGNONNESDE LA GUERRE DE CENT ANS (FIN XIVe - DÉBUT XVe SIÈCLES)

1. Gravelines - Arsenal - Elémentde tour du rempart du débutdu XVe s.

2. Bergues - Elément de défenseavancée de la poterne desSept-Baraques, XVe s.

3. Sceau de Philippe le Bon,duc de Bourgogne (Archivesdépartementales du Nord).

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2007ARCHÉOLOGIE

ENNORD

PAS-DE-CALAIS

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Crédits iconographiques :2.1 Cartographie Y.Roumegoux, SRA.2.2 Photo Ville deBoulogne-sur-Mer -Service Archéologie.

3.1 Archives départemen-tales du Nord, Musée329/10H323.3.2 Gravure de Braunet Hogenberg, 1575.

4.1 Fouille AFAN - DessinJ.C. Routier, INRAP.4.3 Fouille AFAN - PhotoY.Roumegoux, SRA.

5.1 Sondage SRA -Photo Y. Roumegoux,SRA.5.2 Photo Servicepatrimoine de Montreuil-sur-Mer.

6.1 Cartographie Y.Roumegoux.6.3 Archives départemen-tales du Pas-de-Calais,CPL 1414Fphoto C. Cercy, INRAP.

7.1 Archives départemen-tales du Nord, Musée9/16G103/1114.7.2 Fouille Archéopolephoto Y. Roumegoux, SRA.7.3 Fouille Aspabergphoto Y. Roumegoux, SRA.

ARCHÉOLOGIE ENNORD-PAS-DE-CALAISPublication de la DRACNord-Pas-de-CalaisService régionalde l’ArchéologieFerme Saint-SauveurAvenue du Bois59650 Villeneuve d’Ascq.

Auteurs :Yves Roumegoux (SRA)Lionel Roux (IUFM deGravelines).

Couverture :Vue aérienne de Bergues(© NAI / Archives départemen-tales du Nord, 14Fi 06_05).

Coordination et relecture :Karine Delfolie,Gérard Fosse,Yves Roumegoux (SRA),Solange Leclercq (SMCO).

Remerciements :Christine Cercy (INRAP),Angélique Demon(Ville de Boulogne-sur-Mer -Service Archéologie),Delphine Maeyaert(Service patrimoine deMontreuil-sur-Mer),Jean-Claude Routier (INRAP),Archives départementales duNord,Archives départementales duPas-de-Calais.

Réalisation :Agence Linéal :03 20 41 40 76

ISSN 1765-811X

Dépôt légal : Décembre 2007.Diffusé gratuitement par le SRAsur demande écrite dans lalimite des stocks disponibles.

PROJET CO-FINANCEPAR L’UNIONEUROPÉENNE (FEDER)

LE RÉSEAUDES PLACES FORTES

Le réseau des Places Fortes fédère 25 sites duKent (Royaume-Uni), du Nord Pas-de-Calais(France) et de la Flandre Occidentale (Belgique)liés par leur histoire et par la volonté de préserveret de mettre en valeur leur patrimoine fortifié.Ce réseau est coordonné par trois institutionsterritoriales : le Syndicat Mixte de la Côte d'Opale,le Kent County Council et la Province deFlandre Occidentale. Le réseau est financépar des Fonds Interreg III de l’Union Européennepour la promotion des projets touristiqueset culturels transfrontaliers.Les objectifs prioritaires de ce programmeconsistent à faciliter l’accès aux sites fortifiéspour tout public, à promouvoir ce patrimoinefortifié de la région transmanche comme outilpédagogique auprès des visiteurs et aider leurcompréhension grâce au développement desnouvelles technologies de la communication.

L’ÉTAT ET LE PATRIMOINEARCHÉOLOGIQUE

Le Ministère de la Culture, enapplication du livre V du Codedu Patrimoine, a pour missiond’inventorier, protéger et étudier

le patrimoine archéologique, de programmer,contrôler et évaluer la recherche scientifiquetant dans le domaine de l'archéologie préventiveque dans celui de la recherche programmée.Il assure également la diffusion des résultats.La mise en œuvre de ces missions est confiéeaux Directions régionales des affaires Culturelles(Services régionaux de l’Archéologie).

LE SYNDICATMIXTE DE LACÔTED'OPALE(SMCO)

Depuis sa création en 1996, le Syndicat Mixtede la Côte d’Opale s’est affirmé comme unestructure de débat, de coordination et d’action ;c’est un outil de réflexion, de développementdont la Région Nord Pas-de-Calais s'est dotéeafin de renforcer son littoral. Le SMCO regroupeles Intercommunalités du littoral, les Chambresde Commerce et d’Industrie, les Chambresd’Agriculture, le Conseil Régional Nord Pas-de-Calais et les Conseils Généraux du Nord etdu Pas-de-Calais ainsi que des partenairesflamands. Le SMCO est un initiateur, un porteurde projet, un partenaire de premier ordrepour travailler à l’aménagement du littoralCôte d’Opale, à son rayonnement internationalet dont l’objectif constant est d’améliorerla qualité de vie des habitants du littoral.

Les villes françaises du réseau des places fortes du littoral.