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Les FAB –LABS : une innovation sociale 1/9/2013 1

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Dossier documentaire sur les fab labs

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Page 1: Apprendre dans un fab lab

Les FAB –LABS : une innovation sociale

1/9/2013

Denis Cristol

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Page 2: Apprendre dans un fab lab

Article 1 - Lui, président, implantera-t-il des fab labs ?..........................................................................3

Article 2 – Comment un Fab-Lab peut favoriser un renouveau pédagogique ?.....................................8

Article 3 - Des Fab Labs en entreprise ?................................................................................................10

Article 4 - "Le fab lab est un outil pour faire bouger le management" explique Fabien Eychenne, spécialiste de l’innovation....................................................................................................................13

Article 5 - "Fabriquer son futur: les nouvelles tendances de l'innovation numérique et sociale"........16

Article 6 – Un fab Lab dans ma bibliothéque........................................................................................21

Article 7 – Fab Lab squared..................................................................................................................26

Article 8 - Fab Labs: la grande bidouille................................................................................................30

Autres liens...........................................................................................................................................35

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Article 1 - Lui, président, implantera-t-il des fab labs ?http://owni.fr/2012/12/06/lui-president-implantera-t-il-des-fab-labs/

Le 6 décembre 2012 Sabine Blanc

Ce matin, une réunion a eu lieu au cabinet de la ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique sur les fab labs. Une rencontre motivée par le passage du DG de TechShop, une chaine d’ateliers géants pour bricoleurs pointus américaine, la version lucrative des fab labs. Selon nos informations, des TechShops ouvriraient à Paris, Londres, Milan.

Jean, nouvel utilisateur du Fac Lab, le fab lab de l'Université de Cergy basé à Gennevilliers, fabrique une sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser . Le 6 décembre 2012. (cc) Ophelia Noor

Enfin ! Les fab labs et autres lieux dédiés à la fabrication numérique personnelle, sont arrivés aux oreilles du gouvernement français. Ce matin, une table ronde était organisée au cabinet

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de Fleur Pellerin sous la houlette d’Aymeril Hoang, conseiller innovation et économie numérique de la ministre déléguée aux PME, à l’Innovation et à l’Économie numérique.

Les fab labs en route vers le Grand Soir

Le Parti communiste français met le nez dans les fab labs. Avec comme une vieille envie de se remuer un peu le logiciel. Et ...

Intitulé “Développement des fab labs en France”, le séminaire avait surtout pour but de présenter deux visions de la fabrication personnelle, entre gros sous et visées moins directement lucratives. La quarantaine de participants étaient issus du ministère, de l’industrie comme PSA ou SEB et du microcosme numérique start-upers incontournable tel FaberNovel.

Fabien Eychenne de la Fing a d’abord présenté les fab labs, puis Emmanuelle Roux et Laurent Ricard ont exposé un cas concret avec leur FacLab, premier fab lab porté en France par une université. Enfin, Mark Hatch, le DG de TechShop, une chaine d’ateliers géants pour bricoleurs très pointus, est revenu sur sa société. La rencontre était d’ailleurs motivée par la venue de Mark Hatch, il ne s’agissait pas d’une initiative du cabinet.

L’entrepreneur a dévoilé ses plans de déploiement, en présence de Paul Duggan, en charge du développement en Europe : Paris, Londres, Milan… sont en ligne de mire, entre autres.

TechShop, s’il met en avant son côté communautaire – mais quelle société qui ne vit pas sur la planète Mars ne le fait pas ? – est une entreprise classique, déjà forte de six ateliers, tous aux États-Unis. Elle vise maintenant le vieux continent, forte de l’engouement pour la fabrication personnelle, dont les possibilités ont été décuplées par les machines-outils assistées par ordinateur et la force de partage et d’entraide propre à Internet. Elle se décrit ainsi :

Studio de prototypage et de fabrication, hackerspace, centre d’apprentissage, TechShop offre l’accès à de l’équipement et des logiciels d’une valeur d’un million de dollar.

Son appétit de déploiement rappelle celui des pionniers du PC dans les années 70-80. On va changer le monde, en se faisant des dollars au passage, pour votre bien et celui de l’économie en général puisque les TechShops sont des endroits idéaux pour faire du prototypage rapide et donc incuber son entreprise, entre autres. Le premier a d’ailleurs ouvert en 2006 à Menlo Park, au cœur de la Silicon Valley, où les hackers-futurs entrepreneurs tripatouillaient les machines au Homebrew computer Club. Google y serait aussi né, dans un garage bien sûr.

Success story4

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Devant les petits frenchies, Mark Hatch a fait la démonstration de son gros potentiel avec une présentation bien calibrée illustrée d’exemples propres à faire rêver. Une rafale de chiffres à faire pâlir en cette période de crise. Les participants ont pu voir la photo d’Obama au bureau oval tapotant sur son iPad avec une coque DODOcase. Le prototype du DODOcase a été conçu pour moins de 500 dollars et faisait cinq mois après son lancement 1 million de dollars de CA. Sans le TechShop, son idée serait restée au placard puisque sa réalisation requiert une machine qui coûte 25 000 dollars. Il a juste dû payer des frais d’entrée, 125 dollars par mois ou 1 395 dollars par an. Même parcours étincelant pour Square, un lecteur de carte de crédit que l’on branche sur son mobile ou sa tablette. Deux millions d’Américains l’utilisent maintenant, en versant au passage à chaque transaction une commission de 2,75%.

L’entreprise incarne l’état d’esprit maker, si cher aux Américains : une foi en la capacité créatrice qui a fait le succès du modèle américain, cette idée d’une nation qui se forge elle-même. Son slogan en témoigne :

Build your dream here. What do you want to make ?

En face, pour représenter les fab labs, nous avions donc Emmanuelle Roux et Laurent Ricard. Une tout autre vision, même si les deux types de lieux permettent de faire du prototypage rapide et de faciliter de façon générale l’innovation ascendante et la créativité. Déjà, c’est moins l’usine : les machines y sont plus modestes et la dimension reste humaine alors qu’un TechShop fait 1 500 m2.

Gros sous vs charte

Surtout, les fab labs s’appuient sur une charte où les valeurs de partage, d’ouverture, d’entraide et d’éducation sont fondamentaux. On y privilégie les formats ouverts, qu’il s’agisse du logiciel ou du matériel. Ce qui ne veut pas dire pour autant qu’on ne puisse pas y faire développer un produit pour développer derrière une activité, mais ce n’est pas le but final :

Secret : les concepts et les processus développés dans les fab labs doivent demeurer utilisables à titre individuel. En revanche, vous pouvez les protéger de la manière qui vous choisirez.

Business : des activités commerciales peuvent être incubées dans les fab labs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du lab plutôt qu’en son sein et de bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.

En théorie, les fab labs sont ouverts et gratuits, dans la réalité, c’est parfois un mix des deux, car il faut bien financer l’endroit. Au Fac Lab, c’est totalement gratuit, mais trois formations autour des fab labs vont être proposées pour assurer des revenus en ces temps de disette de fonds publics.

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Les différentes étapes de la fabrication de la sculpture en bois (inspiré d'une oeuvre de George W Hart) avec la découpe laser , en passant par le logiciel de modélisation 3D et la découpe de bois. Le 6 décembre 2012 au Fac Lab de Gennevilliers. (cc) Ophelia Noor

Nos deux intervenants ont souligné ces dimensions propres aux fab labs, explique Emmanuelle Roux, en particulier l’aspect éducatif :

J’ai insisté sur l’importance de permettre aux plus jeunes d’accéder à ce genre de lieu. Et il faut mailler tout le territoire, ne pas se cantonner à Paris.

Avis à Vincent Peillon, notre ministre de l’Education qui souhaite refonder l’école, chapitre 42. Aux États-Unis, une association comme School Factory essaye déjà depuis quelques années d’amener ce type de lieu dans l’école, pour favoriser l’apprentissage par le faire, en mode projet et dans une optique de partage des connaissances. Bref l’envers du système français actuel.

S’appuyer sur les EPN

Emmanuelle Roux a attiré l’attention sur les nombreuses structures publique déjà existantes, mairies, écoles et surtout EPN (espace public numérique), qui pourrait accompagner ce développement. Incubateur de fab lab, voilà une belle reconversion potentielle pour les EPN.

Apparemment, le message est passé : “Aymeril Hoang m’a dit qu’il en parlerait à la ministre, il a évoqué la possibilité de visiter le FacLab. Il souhaite aussi avancer la réflexion sur les

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EPN.” Owni est ravi, qui a sollicité le cabinet de Fleur Pellerin pour une table ronde sur le sujet le mois dernier, ainsi que celui de Montebourg, sans succès.

L’impression 3D vend son âme

Le fabricant d'imprimante 3D grand public MakerBot incarnait la possibilité d'un business model basé sur l'open ...

Les préoccupations des industriels n’étaient pas forcément sur la même longueur d’onde. Non pas que ces représentants aient découvert le sujet : travaillant sur la R&D, ils étaient déjà bien sensibilisés. En revanche, les questions de propriété intellectuelle les préoccupent davantage. “Seb était inquiet à l’idée de se faire copier, je leur ai expliqué qu’ils ne pourront pas l’empêcher”.

L’exemple de MakerBot, qui a mis de l’eau propriétaire dans son vin open source, parce que des fonds ont mis gros dessus, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd : pour faire du cash, il faut fermer les modèles ont compris certains dans un raccourci erroné. Les nouveaux outils ne servent à rien si les schémas mentaux et économiques sont toujours ceux du 20e siècle.

Si la Chine ou la Russie se sont déjà engagées dans des plans de subventions à ce type de lieux, tout reste à faire en France. Plus que les sommes mises sur le tapis, l’orientation qui sera choisie sera décisive, création d’euros ou de valeur sociale.

On attend avec impatience le positionnement d’Arnaud Montebourg, qui vantait la troisième révolution industrielle que les fabs labs sont censés porter. Qui sait, François Hollande annoncera peut-être lors de son grand rendez-vous avec la presse :

Moi, président, j’implanterai des fab labs sur toute la France.

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Article 2 – Comment un Fab-Lab peut favoriser un renouveau pédagogique ? http://4cristol.over-blog.com/comment-un-fab-lab-peut-favoriser-un-renouveau-p%C3%A9dagogique

L’un des usages des Fab-Labs est la création d’une approche pédagogique expérimentale. Bien souvent l’apprentissage s’inscrit dans une perspective déductive dans laquelle la leçon précède l’exercice. Le Fab-Lab peut permettre d’entrer dans un autre cycle pédagogique ou l’expérience tactile engage d’abord un processus d’action, de motivation et d’idéation. L’intégration de séquences pédagogiques dans un Fab-Lab peut contribuer à accélérer l’apprentissage par la conjugaison de plusieurs phénomènes ci-après présentés :

1. Tout d’abord rappelons qu’un Fab-Lab peut être appréhendé comme un espace intentionnel de création équipé de machines. C’est potentiellement un espace capacitant c’est-à-dire qui offre des possibilités d’action sur le réel et qui rend capable d’agir.

2. Les fonctions techniques mises à disposition (outil d’usinage, logiciel graphique, imprimante 3D, matériel de menuiserie, ou de découpe automatisé) offre un environnement support à la matérialisation des idées.

3. Le Fab-Lab est un espace de concrétisation d’une idée dans un objet. La création donne le plaisir d’agir.

4. L’espace comprend aussi bien des hommes compétents que des machines. Lorsqu’un utilisateur exprime une idée, les ressources humaines et techniques mises à sa disposition autorisent très vite d’enclencher un cycle essai-erreur de voir les résultats d’une esquisse, et d’ajuster le tir. Ce faisant un tel processus en boucle courte permet de mieux comprendre le rôle de l’erreur dans l’apprentissage. Il désinhibe l’envie d’apprendre car l’aide fournie permet de bifurquer vers une nouvelle possibilité.

5. Le Fab-Lab peut aussi être considéré comme un laboratoire des usages qui s’inventent en émergence par la confrontation d’un utilisateur porteur d’idées et de facilitateurs techniques. Utilisateurs et facilitateurs sont stimulés par un environnement riche de potentialité, de contraintes, de matières, de formes. Le jeu entre le porteur d’idée, le facilitateur, la matière et les machines produit un résultat inattendu. Un ajustement de la situation est produit par bricolage. Un objet qui n’existait pas prend forme sur la base d’un désir ou d’une intuition et d’une adaptation négocié avec le réel.

6. Le Fab-Lab permet d’entrer dans un cycle d’apprentissage par le faire. Le tâtonnement précède la conceptualisation. Le mécanisme d’idéation s’enclenche par la main, par l’appréhension physique du réel qui ouvre d’autres chemins d’accès aux idées que par la seule exposition de concepts abstraits via une conférence ou une vidéo-projection par exemple.

7. La réalisation finale, la concrétisation est un objet, quoiqu’il se passe une réussite, car il s’agit d’une œuvre originale. L’apprentissage procède d’un cumul de réussites petites ou grandes auxquelles s’accrochent les motivations. A partir desquelles on peut dire je l’ai fait moi-même. Cela renvoie au sentiment d’efficacité personnelle décrit par le psychologue Albert Bandura. Cela ancre l’envie de faire un pas de plus.

8. Le Fab-Lab est encore un lieu de rencontre avec des personnes mais surtout avec des logiques différentes. C’est la différence de perception des partenaires impliqués qui fait grandir le potentiel créatif de l’espace. La diversité de façon de penser le monde de

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menuisier, graphiste, facilitateur, participant, commanditaire ouvre des possibilités. Les dialogues préalables à l’entrée dans l’espace constituent les prémices de l’expérience. Les représentations a priori seront modifiés.

9. L’implantation, voire l’encapsulement d’un Fab-Lab dans une école de design, un centre culturel, ou tout autre espace hybride décale les apprenants, les confronte à l’énergie aux circulations aux ambiances d’un lieu intermédiaire : mi- atelier, mi- espace culturel, mi- espace d’apprentissage. Cette implantation renforce l’expérience de ce que signifie partager une différence. Cette différence est une des conditions de la créativité.

10. Les sensations, émotions, couleurs, rythmes, odeurs, personnes qui constituent le Fab-lab tranchent de l’univers aseptisé de la salle de formation, colle au réel et à la matière ouvre des possibilités pour ressentir et agir, autorise un contrepied et in fine de nouveaux sens.

En conclusion une expérience dans un Fab-Lab offre une possibilité de réinterpréter son rapport aux savoirs. L’expérience d’un autre lieu, d’une autre logique, d’un temps dédié à la création dans un environnement facilitant le bricolage d’idée révèle chacun à soi-même et l’autorise à tester ce qu’il n’aurait jamais pu faire seul.

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Article 3 - Des Fab Labs en entreprise ? http://blogs.lesechos.fr/internetactu-net/des-fab-labs-en-entreprise-a13198.html

Par Hubert Guillaud | 13/07/2013 | 06:30 | Lu 2555 fois

Ateliers ouverts dédiés au prototypage rapide, les Fab Labs se multiplient et s’interconnectent partout dans le monde (voir le "Tour d’horizon des Fab Labs" , rapport de la Fing ou le livre de Fabien Eychenne, auteur de ce même rapport Fab Lab : l’avant-garde de la nouvelle révolution industrielle). On les rencontre aussi bien dans les capitales de pays en développement que sur des campus universitaires, ou des quartiers branchés des villes californiennes. Les pratiques à l’oeuvre dans ces différentes formes d’espaces intéressent de plus en plus les entreprises : innovation ouverte, collaboration entre pairs, prototypage rapide en mode “essai-erreur”, documentation ouverte des projets, partage de savoir faire, communautés d’innovateurs, management horizontal, etc.

Plusieurs entreprises envisagent ainsi de s’appuyer sur un dispositif de type Fab Lab pour explorer et tester de nouvelles formes d’innovation plus ouverte, plus agile, plus inattendue.

Dans le cadre de l’expédition ReFaire lancée par la Fing, le Groupe Seb et Renault ont saisi l’opportunité d’expérimenter l’ouverture de Fab Labs en leur sein. Dans quel but, de quelle manière, avec quels (premiers) résultats ? Cette synthèse conclusive de ce travail prolonge le témoignage de ceux qui ont lancé ces premiers espaces en fournissant un premier “guide” à ceux qui souhaiteraient explorer la possibilité de créer à leur tour un Fab Lab au service de leur entreprise.

Un Fab Lab en entreprise, comment faire ?

Si de nombreuses entreprises disposent de moyens de prototypage rapide, peu d’entre elles les ont encore mobilisés dans le cadre d’un dispositif ouvert et souple tel qu’un Fab Lab. On dispose donc de très peu de recul sur leur expérience. Cependant, de l’observation des différents Fab Labs ouverts dans le monde, ainsi que de l’échange entre les participants de l’expédition ReFaire, émergent à la fois une première typologie des Fab Labs en entreprise, et des conditions de réussite.

Trois modèles de Fab Labs d’entreprise

Une entreprise peut développer son propre Fab Lab, collaborer à un projet commun avec différents partenaires, ou même faire le choix de participer à un Fab Lab totalement ouvert.

Le Fab Lab “interne”

Un Fab Lab interne reprend la configuration, outils, pratiques et savoirs d’un Fab Lab classique tel que le définit le MIT, mais se destine en priorité à des collaborateurs de l’entreprise. D’autres participants – partenaires, chercheurs, clients… – peuvent y être conviés, mais dans des contextes et à des fins précises.

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Ce choix facilite le contrôle de la circulation des idées et des projets. Il présente en revanche l’inconvénient de ne pas inviter des énergies et des idées venues d’ailleurs à s’y exprimer et à questionner les certitudes de l’entreprise. Le succès repose alors :

- Sur la capacité d’attirer des collaborateurs très divers (y compris tout en bas de l’échelle), d’organiser le croisement des métiers et des statuts et de donner une vraie chance aux projets de se développer – y compris, pourquoi pas, lorsqu’ils ne sont finalement pas retenus par l’entreprise elle-même (essaimage, publication…) ;- Sur la construction d’une “communauté” d’utilisateurs réguliers, qui peuvent considérer le Fab Lab comme un lieu d’expression, de respiration, d’échanges conviviaux et professionnels à la fois.

Le “Creative People Lab” de RenaultLomig Unger et Mickaël Desmoulins sont les deux porteurs de l’espace de créativité “Creative People Lab” ainsi que sa composante “Fab Lab” interne, en vidéo, ils reviennent sur les apports de cet espace pour Renault : 1ère partie, 2nde partie.

Le Fab Lab “coopératif”

Le Fab Lab “coopératif” est un Fab Lab semi-ouvert vers l’extérieur, souvent créé et exploité en commun par plusieurs partenaires : les entreprises d’une filière ou d’une zone industrielle, les acteurs (entreprises, enseignement, recherche…) d’un campus universitaire, etc.

Du point de vue de l’entreprise, un tel lieu doit favoriser la rencontre avec son écosystème, la collaboration avec la recherche, la conception collaborative (avec ses prestataires et sous-traitants par exemple), l’innovation ouverte (collaboration avec des startups ou des entreprises d’autres secteurs), voire le “prototypage ouvert”. Chacun des participants à cet espace porté par plusieurs acteurs mobilisant son propre écosystème, le Fab Lab coopératif peut produire des interactions riches et des résultats inattendus.

La collaboration du Groupe Seb avec le Master IDEA et la création du Fab LabKarim Houni du Groupe SEB revient sur la collaboration entre le Master IDEA et leur contribution à la création d’un Fab Lab en son sein, en vidéo.

La collaboration avec des Fab Labs “externes”

Dans ce troisième cas, l’entreprise choisit de travailler avec des espaces existants à proximité de ses centres de R&D, de design ou de production, plutôt que de créer son propre Fab Lab.

Cette collaboration peut prendre deux formes distinctes :

- Un partenariat construit entre l’entreprise et le Fab Lab. L’objectif est de se frotter à d’autres formes de collaboration et d’innovation, de rencontrer la communauté des makers (les bricoleurs “pro-amateurs” de l’ère numérique), voire d’en faire partie. L’entreprise peut par exemple accompagner certains projets, apporter son expérience et le savoir faire de ses salariés, mettre à disposition certaines capacités techniques, etc. En retour, elle peut

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s’appuyer sur la communauté présente pour chercher la réponse à des questions difficiles, explorer avec elles certaines idées nouvelles, y détecter des talents et des projets…

- Il peut s’agir plus modestement d’offrir à certains employés de l’entreprise du temps pour développer leur projet, dans un lieu différent de l’entreprise et propice à l’expression de leurs capacités.

Des entreprises comme Ford et Airbus s’intéressent à ce type de partenariat.

__Ford et le TechShop de Detroit : accélérer l’innovation de l’extérieurSortes de Fab Labs commerciaux, les TechShops sont de grands espaces privés (environ 1500 m²) dont le principe fondateur est de rendre accessible et à bas coût un ensemble de machines, d’outils et d’équipements dédiés à la fabrication personnelle. Ils s’adressent aux inventeurs, aux bricoleurs, aux entrepreneurs, aux artistes, aux designers, etc. qui ne disposent pas d’ateliers de fabrication, de matériels, voire des compétences nécessaires pour réaliser leurs projets.

Le premier TechShop a été ouvert en 2006 à Menlo Park (Californie) et accueille plus de 500 membres qui règlent une adhésion mensuelle, bien qu’il existe également un forfait à journée. L’adhésion permet d’utiliser toutes sortes de machines ainsi que tout le petit matériel (oscilloscope, fer à souder, perceuse, etc.). Le TechShop est ouvert 7 jours sur 7 de, 9h à minuit. Il offre également divers services : du conseil pour réaliser ses projets, des cours d’utilisation des machines, ainsi que la réalisation de projets personnels par des professionnels.

A Detroit, capitale de l’industrie automobile Américaine, le constructeur Ford a cofinancé l’ouverture d’un Techshop, pour en faire bénéficier la communauté de makers très actives dans cette ville, mais également ses propres salariés. L’objectif est de permettre aux salariés de s’exprimer, de développer des pratiques innovantes et des projets parfois en rupture, que les modèles organisationnels des grandes entreprises ne savent pas détecter. Selon Ford, le nombre propositions innovantes issues du personnel aurait augmenté de 30% depuis le démarrage de cette initiative.

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La suite des enseignements de l’expédition ReFaire de la Fing sur la création de Fab Labs en entreprise est à retrouver dans l’article intégral : "Que ReFaire ? Pour des Fab Labs en entreprise".

Fabien Eychenne

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Article 4 - "Le fab lab est un outil pour faire bouger le management" explique Fabien Eychenne, spécialiste de l’innovationPar Christophe Bys - Publié le dimanche 30 juin 2013

http://www.usine-digitale.fr/article/le-fab-lab-est-un-outil-pour-faire-bouger-le-

management-explique-fabien-eychenne-specialiste-de-l-innovation.N200328

"Le fab lab est un outil pour faire bouger le management" explique Fabien Eychenne, spécialiste de l’innovation

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Chef de projet à la FING (fondation Internet nouvelle génération), Fabien Eychenne est l’auteur de Fab Lab, "l’avant-garde de la nouvelle révolution industrielle" aux Editions Fyp. Il nous explique en quoi ces nouveaux modes de fabrication inventent aussi le management de demain. D’ores et déjà, de grandes entreprises industrielles s’en inspirent.

L’Usine Nouvelle - Pensez-vous que les fab labs soient l’usine nouvelle du futur ?

Fabien Eychenne - Je ne le pense pas. C’est un endroit où l’on peut faire un prototype. De là à devenir de véritables usines, en l’état actuel, je n’y crois pas. Pour cela, il faudrait un perfectionnement des machines. De plus, ces lieux de sont pas pensés pour de la production de masse. Il y a des expériences intéressantes comme Fab City à Barcelone, qui veut encourager la production locale, mais attendons de voir.

Qu’est-ce qui caractérise un fab lab aujourd’hui ?

L’ouverture avant tout. C’est un lieu ouvert. On y retrouve une partie de l’esprit du Net, avec de faibles barrières à l’innovation. Ensuite, ce qui compte c’est la communauté. Initialement, les gens étaient intéressés par les machines en libre-service pour ainsi dire. Peu à peu, les

possibilités de rencontre et d’échange sont devenues essentielles.

Est-ce que ces caractéristiques ont des conséquences managériales ?

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Tout d’abord, le mot fab lab recouvre des réalités différentes d’un endroit à l’autre. Généralement, ce sont des modes de travail inspirés d’Internet qui se développent : pratiques horizontales, travail entre pairs, fin du travail en silo. Le but est de favoriser toutes les formes de collaboration au sein d’un projet, mais aussi entre les projets.

Une autre singularité porte le nom américain de "Do-ocratie", du verbe to do (faire). Dans un fab lab, celui qui veut s’emparer d’une tâche peut le faire. Il n’y a pas de chasses réservées, de services. Si quelqu’un veut voir les choses changer, il le fait. C’est quelque chose qui vient du web, du monde de l’open source. Récemment je suivais une discussion sur un forum. A une personne qui disait "ce serait bien de faire ça, je vais m’en occuper", une autre a répondu que ce n’était pas l’urgence du moment. A ce moment-là, les autres contributeurs sont montés au créneau pour demander qu’on laisse faire celui qui s’est porté volontaire. C’est vraiment quelque chose de très important dans cette culture.

Y’a-t-il de la place pour des managers dans ces configurations ?

Pas au sens où il serait celui qui décide pour les autres. Historiquement, si je peux employer ce mot pour décrire un mouvement aussi jeune, les fab managers étaient ceux qui avaient les compétences pour faire fonctionner les machines présentes. Peu à peu, leur rôle s’est enrichi, développé. Ils sont devenus des sortes d’accompagnateurs de projets, de facilitateurs. Ceci étant, l’absence d’un manager ne veut pas dire qu’il n’y a pas de règles. Dans un fab lab au Pays-Bas, le prix d’accès est très bas. En revanche, il est demandé à chacun qu’il transmette ensuite gratuitement les compétences qu’il y a acquises.

A vous écouter, on a l’impression que c’est une sorte de monde idyllique. Il n’y a vraiment aucun problème ?

Comme dans toutes les entités sociales, il peut y avoir des tensions entre les personnes évidemment. Plus globalement, on n’a pas encore assez de recul. En France, le premier fab lab a 3 ans à peine. Il est trop tôt pour tirer des conclusions sur leur mode de fonctionnement. Les premiers travaux de recherche en management viennent de commencer. Ils étudient notamment leur contribution dans le processus d’innovations.

Qui va dans les fab labs ? Y trouve-t-on aussi des cadres de R&D ?

Oui, dans certains cas, leurs entreprises les poussent à le faire. Je pense à une très grosse entreprise qui possède pourtant des machines très puissantes pour faire des prototypes . Les process ne sont plus agiles. Au fab lab, les cadres apprennent d’autres façons de travailler. C’est la démarche de Ford à Detroit qui a souhaité que ses techniciens et ingénieurs rejoignent les techshops. L’entreprise souhaite ainsi que ces cadres se frottent à des personnes qui innovent autrement. Elles espèrent bien sûr bénéficier de ces nouvelles méthodes. Pour ces grosses entreprises industrielles, le fab lab est un moyen d’ouvrir, de sortir des process. Le directeur de l’innovation d’Airbus résumait cela d’une formule efficace : aujourd’hui on travaille sur les machines du XXIe siècle avec un management qui date au mieux des années 60.

Justement, que font les entreprises françaises dans ce domaine ?

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Elles prennent conscience que les jeunes ingénieurs ne peuvent plus travailler comme ceux d’avant. Elles ont déjà connu ça, quand sont arrivées les jeunes générations habituées à travailler sur le net, de façon horizontale. Elles ont dû changer les systèmes d’information hyper verticaux. La même chose est en train de se produire dans la production. Le temps où un ingénieur électromécanicien passait sa vie ou presque à améliorer le fonctionnement d’un sous sous-système est révolu. Pour les attirer, puis pour les garder les entreprises savent qu’elles vont devoir s’ouvrir. Ce que les fab labs leur apprennent c’est qu’ils sont un outil pour faire bouger les modes de management et développer la transdisciplinarité.

Ainsi Renault a aujourd’hui un projet de fab lab interne. S’il n’est pas encore ouvert sur l’extérieur, il casse les silos. Le juriste passionné de voitures peut venir proposer des idées et s’il a envie de développer quelque chose, personne ne lui interdit en théorie. La logique à l’œuvre est de développer des pratiques multi-métiers. A terme, ils n’excluent pas de les ouvrir à des fournisseurs ou pourquoi pas à des utilisateurs experts. Aujourd’hui, on est encore au tout début d’une évolution qui pourrait bien être in fine une révolution.

Propos recueillis par Christophe Bys

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Article 5 - "Fabriquer son futur: les nouvelles tendances de l'innovation numérique et sociale"http://www.lexpress.fr/emploi-carriere/emploi/fabriquer-son-futur-les-nouvelles-tendances-de-l-innovation-numerique-et-sociale_1233390.html

Par OliviaLisicki (Express Yourself), publié le 21/03/2013 à 10:26, mis à jour à 15:20

"Fab Labs", mouvement des "Makers", "économie collaborative" ou "BoP": ces tendances, signes d'une vision de l'innovation plus ouverte et inclusive, impactent en profondeur nos modèles économiques, analyse Olivia Lisicki.

Ce que ces modèles partagent est l'enthousiasme et le plaisir d'agir pour co-penser le futur, un plaisir qui devrait être contagieux...

REUTERS/Lisi Niesner

Qu'ont en commun les Fab Labs, le mouvement des "Makers", l'économie collaborative et le BoP? Bien plus que des buzz words, ces nouvelles tendances sont des lames de fond dans nos sociétés qui sont à rapprocher à bien des égards. Symptomatiques d'un mouvement global vers une nouvelle vision et pratique de l'innovation plus ouverte et inclusive, davantage ancrée dans l'écosystème et s'adressant au plus grand nombre, elles préfigurent des transformations profondes dans nos modèles économiques.

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Dans son livre Makers, Chris Anderson décrit l'avènement d'un nouveau monde industriel porté par les fab labs (Fabrication laboratory) ou "Makerspaces", ces espaces ouverts à tous pour réparer, prototyper, fabriquer tout type d'objet de l'artisanat traditionnel à l'électronique high-tech, avec des imprimantes 3D et des découpeuses laser. On peut y dessiner soi-même ses objets ou adapter des plans libres de droit, dénichés sur le web (un vélo, par exemple) et s'entraider entre bricoleurs, designers, artistes, étudiants...

Des lieux pour "geeks"? Peut-être, encore. Certains diront aussi que ces innovations numériques n'ont pas grand-chose de social ou durable. Et pourtant... A travers eux, une nouvelle façon d'agir, d'entreprendre et de consommer émerge, qui rejoint (et doit certainement le faire plus encore) la logique du partage et de l'accessibilité à tous de l'économie collaborative et inclusive.

Le mouvement des Makers, de l'économie collaborative et de "la base de la pyramide" (BoP) ont en commun plusieurs principes et façons de faire:

1/ Des solutions alternatives

Les trois modèles se sont développés comme un mouvement "underground" (Anderson utilise pour les fab labs l'analogie des groupes de rock indépendants, "alternatifs"). Ils s'affranchissent des formats et circuits classiques, interrogent les règles de l'échange marchand. Non pas comme un dogme militant, comme un simple appel du coeur ou à des valeurs écolo-humanistes, mais comme une réaction concrète et rationnelle face aux situations nouvelles et complexes, pour imaginer d'autres possibles et répondre à des besoins qui ne sont pas satisfaits.

C'est la recherche de nouveaux équilibres, repensant les modes d'usages des biens et la création de valeur. Une valeur qui se mesure autrement. A la richesse des interactions sociales qu'elle génère et à celles dans lesquelles elle puise... pour s'enrichir elle-même! Car l'innovation se nourrit des liens sociaux, de la création "avec", du "co-", qui conditionnent son émergence et son succès auprès du plus grand nombre.

Le succès du recyclage d'objets (voir cette étonnante vidéo sur le recyclage dans la construction de maisons), du covoiturage, couchsurfing, coworking... n'est pas seulement l'expression de nouveaux imaginaires de consommation et de la débrouille en temps de crise, appuyée par la puissance du web (proche de la 'bidouille' Do-It-Yourself des fab labs). Bien plus, il marque l'impasse d'une économie à bout de souffle, qui s'est éloignée des besoins réels et de ce qui la fait vivre sur le long-terme: le capital humain.

Se dessinent aujourd'hui les contours d'une autre économie imprégnée de l'esprit du web

Se dessinent aujourd'hui les contours d'une autre économie imprégnée de l'esprit du web, basé sur l'échange, libre, ouvert à tous, où l'essentiel est dans les liens et non dans les biens. "La communauté est l'avantage concurrentiel", dit Anderson, l'échange économique doit

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aujourd'hui capitaliser sur la proximité, le contact étroit avec les clients et les parties prenantes, et se concentrer non pas sur le volume, mais sur la valeur délivrée au consommateur -valeur pratique, économique et surtout symbolique, relationnelle- en remettant ce dernier au centre des offres. Des principes déjà à l'oeuvre dans l'approche social business (entrée du "social" dans la sphère de l'économie): la création de marché est désormais bien appréhendée comme un processus socialement encastré où l'empathie, la confiance et les aspects relationnels dominent.

2/ Des espaces de partage et effets de "crowd"

Dans les trois modèles, on retrouve la volonté de partage à la fois comme finalité (des produits et services qui doivent toucher le plus vaste public possible) et comme mode de travail (non pyramidal, fertilisant les idées des uns et des autres, passant -dirait Jeremy Rifkin- "d'un pouvoir hiérarchique à un pouvoir latéral et collaboratif"). A travers les expériences de l'économie collaborative, Makers et BoP, émerge un nouveau mode de pensée en réseau qui privilégie la transversalité.

Dans les fab labs par exemple, l'information est créée en collaboration avec n'importe qui, partagée avec tous, réutilisée et réimaginée. Ces expériences font prendre conscience de l'importance de l'écosystème, des interactions constantes avec notre environnement extérieur et surtout des opportunités à la clé: ce qui fait la réussite des logiciels libres par exemple, c'est la communauté d'acteurs qui réalise des produits destinés à compléter ou à appuyer le produit de celui qui a mis en accès ses sources.

Dans les fab labs, on peut faire ensemble même si cela est pour soi

Ce qui fait le succès de démarches BoP, c'est la co-construction, c'est tout le maillage avec des acteurs locaux, associatifs, publics... parties prenantes des chaînes de valeur "hybrides". Dans les fab labs, on peut faire ensemble même si cela est pour soi. Selon Jean-Louis Fréchin, ce métissage du collectif et de l'individuel et ces nouvelles organisations sociales et créatives seront la "marque de fabrique des entreprises du XXIème siècle pour gérer les défis de la complexité et de la transformation du monde".

L'appel au groupe, à la foule (crowdsourcing, crowdfunding...), à la pollinisation des idées, à l'intelligence collective est désormais une grande tendance qui traverse tous les milieux pour mettre en commun des moyens, des savoirs et améliorer la recherche de solutions dans différents domaines (1,5 milliard de dollars de contributions collectés en 2011 par les plateformes de financement participatif comme KissKissBankBank).

3/ L'esprit juggad & "grass-root": frugalité, ingéniosité et bottom-up!

L'idée est de faire plus intelligent avec moins de moyens, pour le plus grand nombre, en s'appuyant... sur le plus grand nombre. C'est toute la philosophie de l'innovation indienne qui inspire sa stratégie de développement inclusif, bâtie tant sur la révolution numérique que sur celle du développement durable.

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En Inde, la prise d'initiative des gens par eux-mêmes, dans des situations très contraintes, a conduit à de très nombreuses innovations de terrain (portées par des agriculteurs, des artisans, des femmes dans les campagnes...), qu'un réseau comme Honey Bee oeuvre à connecter pour les développer à grande échelle avec l'appui de la R&D (150.000 innovations connectées à ce jour!).

L'apparition d'une économie de réseau invisible où chacun innove pour s'en sortir

On pourrait comparer ce génie du terrain indien et cette dynamique de réseau (qui pourrait être amplifiée avec des fab labs connectés) à ce qui se passe aujourd'hui dans la société civile en France à travers l'économie collaborative: l'Observatoire Système D qui étudie l'attitude des Français face à la crise constate l'apparition d'une économie de réseau invisible où chacun innove pour s'en sortir, dans une même improvisation créative. Ces innovations partent de 'simples' citoyens cherchant à contourner les difficultés, puis se diffusent par l'échange et l'entraide vers le reste de la société (la plateforme de location d'appartements de particuliers Airbnb, par exemple, intéresse tout le monde).

Cette approche d'innovation ascendante, au coeur de l'économie collaborative, rejoint l'ambition BoP ou Makers, qui se veut organisée du bas vers le haut, en portant une attention prioritaire aux besoins et usages dans la société, et en faisant confiance aux gens pour exprimer leurs attentes et identifier les moyens d'y répondre. "Là où se trouve le problème se trouve aussi le savoir pour le résoudre", disait Gandhi...

Les "Rers", plateforme collaborative où chacun peut apprendre des autres et enseigner aux autres

Comme les fab labs tentent de démocratiser la technologie (la sortir du cercle des geeks ou ateliers de création élitistes) pour que tout un chacun se réapproprie les outils de production et de création, les nouveaux modèles inclusifs transforment les amateurs en professionnels pour porter leurs propres solutions. On peut penser par exemple au Barefoot College, centre d'éducation populaire ouvert à tous, pour tous les domaines (santé, habitat, énergies...). Tout le monde y est à la fois enseignant et élève (à l'image des Rers en France, "réseaux d'échanges réciproques de savoirs", plateforme collaborative où chacun peut apprendre des autres et enseigner aux autres).

Le "collège" dispense un programme pour électrifier des villages en Inde, où les femmes s'engagent, une fois formées, à enseigner la technique à d'autres femmes dans une chaîne d'apprentissage mutuel. Ces "ingénieures aux pieds nus" ont installé des panneaux photovoltaïques dans 574 villages, éclairant 11.000 familles. Ce programme a permis de "démystifier la technologie solaire et démontrer que des communautés pauvres et laissées-pour-compte savent l'utiliser", raconte Bénédicte Manier, auteure de Un million de révolutions tranquilles.

Cette expérience fait écho à l'esprit des fab labs où chacun est tour à tour apprenant et formateur (l'équipement est mis gratuitement à disposition à condition que chacun s'engage à contribuer aux projets des autres et à rendre son travail reproductible). Il s'agit d'aider, là aussi, les gens à réaliser ce dont ils ont besoin, à comprendre le pouvoir de faire cela eux-mêmes (le fameux "empowerment" cher à l'innovation sociale).

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La démocratisation des outils numériques pour la fabrication d'objets permet, selon Anderson, la réappropriation des moyens de production par monsieur-tout-le-monde. L'innovation ne serait ainsi plus l'apanage de privilégiés, mais potentiellement à la portée de tous, l'esprit du web valorisant la diversité des cultures et des parcours, et montrant que les moins favorisés sont, eux aussi, riches de connaissances. L'auteur y voit un potentiel de création illimité. Cette vision est l'avenir pour... 2030 selon une étude britannique de Forum for the Future: y est prédit l'avènement d'un consommateur "autonome", co-créateur de nouveaux modes de production et de distribution.

L'innovation peut être festive

Tous ces modèles bousculent les schémas classiques, et ont un potentiel énorme s'ils appréhendent bien le caractère systémique de l'innovation où dimensions technique, numérique, sociale, durable... forment un tout. Un défi de taille. Mais ce que ces modèles partagent aussi est l'enthousiasme et le plaisir d'agir pour co-penser le futur, un plaisir qui devrait être contagieux et fertile... Comme le dit le philosophe Patrick Viveret: "Il faut concevoir le changement comme un projet d'invitation à la vie, non comme un refus ou un empêchement. L'innovation peut être festive".

Voir tous les articles de OliviaLisicki

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Article 6 – Un fab Lab dans ma bibliothéquehttp://www.echofab.org/wp-content/uploads/Screen-Shot-2012-06-20-at-4.06.59-PM1.jpg

Gaëlle Bergougnoux est étudiante à la maîtrise en sciences de l’information à l’EBSI. Elle termine ses études en effectuant un stage sur le sujet des fab labs à la Division des Quartiers culturels avec Marie D Martel.

La bibliothèque publique, de par son rôle et sa place dans la société a toujours avancé et accompagné les évolutions de celle-ci. Loin de l’image du sanctuaire de livres (ce qu’elle est aussi d’une certaine façon), la bibliothèque s’est toujours renouvelée, s’adaptant et adoptant les technologies de l’heure. Ainsi CD, DVD, Blu-ray, jeux vidéo sont entrés dans ses collections. Ordinateurs et internet ont aussi leur place dans ces lieux publics d’information. Les formations et les activités proposées aux usagers se sont aussi diversifiées, et si l’on y raconte toujours des histoires aux plus jeunes, on y trouve maintenant des soirées jeux vidéo, des initiations à Internet et aux réseaux sociaux. Mais comme l’ont souligné plusieurs auteurs et professionnels du monde des sciences de l’information, la bibliothèque du 21e siècle entre dans une nouvelle ère, qui, de consultation et utilisation, devient participation et création.

Le concept qui a nourri cette réflexion nous vient de la sociologie urbaine et plus précisément de Ray Oldenburg. Dans ses ouvrages Celebrating the Third Place et The Great Good Place, le sociologue y développe l’idée, qu’après le premier lieu (la maison) et le deuxième (le travail), les humains ont besoin d’un troisième lieu, neutre, pour s’y retrouver, interagir, entrer et participer à la vie de la communauté. Oldenburg pense avant tout aux cafés (un certain modèle du café européen), mais aussi à bien d’autres endroits comme le titre complet de son livre l’indique : The Great Good Place: Cafes, Coffee Shops, Community Centers, Beauty Parlors, General Stores, Bars, Hangouts, and How They Get You Through the Day… Pourtant, si la bibliothèque publique ne fait pas partie des espaces qu’Oldenburg propose comme « tiers-lieu » ou « troisième lieu », nombreux sont ceux qui ont vu en elle les caractéristiques idéales pour répondre à ce concept. S’est alors posée la question de la façon dont la bibliothèque publique, qui possède en ses fondements des valeurs idéales pour être ce tiers-lieu, ferait pour en être effectivement un.

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Les fab labs sont une réponse possible à cette transformation nécessaire, ce passage de lieu de consultation à lieu de participation, que vivent les bibliothèques publiques, et orienté bien évidemment vers les usagers. Comme le souligne en effet Jeff Krull, directeur de la Allen County Public Library : « The library is in the learning business, not just the book business ». Et c’est ainsi qu’il explique la présence du conteneur installé dans le stationnement de la bibliothèque et qui contient un fab lab, un « fabrication laboratory », un espace dédié à la fabrication numérique.

Qu’est-ce qu’un fab lab ? Et a-t-il sa place en bibliothèque publique ?

Les fab labs (contraction de fabrication laboratory) sont nés en 2001 au MIT, dans un cours du professeur Neil Gershenfeld intitulé « How to make (almost) anything ? ». On trouve plusieurs définitions de ce type de lieu. Fabien Eychenne, dans un rapport de la Fing (Fab Labs, Tour d’horizon) en parle comme « d’une plate-forme de prototypage rapide d’objets physiques, « intelligents » ou non » (p.7). C’est plus concrètement un atelier de création, fabrication numérique dans lequel on retrouve des machines à commande numérique (imprimante 3D, découpeuse laser, fraiseuse, etc.), des outils (petite électronique, fer à souder par exemple) et bien évidemment des ordinateurs, équipés de logiciels de CAO (création assistée par ordinateur).

Mais un fab lab, c’est aussi et surtout des valeurs. Pour Gershenfeld, le fab lab est « un lieu dans lequel s’expriment la créativité et le partage » (Eychenne, p.20), un endroit qui permet un apprentissage différent, qui veut revaloriser la culture du faire. Le travail en équipe est plus qu’encouragé, l’apprentissage par les pairs quasi inévitable et souhaité. Des réseaux intra fab lab et inter fab labs ont émergé. Quiconque vient utiliser un fab lab lors des journées ouvertes à tous est prié de documenter et déposer son projet sur le(s) réseau(x). Le partage est donc une notion importante. En effet, « un projet a plus de chance de réussir s’il est partagé avec les autres parce qu’il s’enrichit et s’améliore au contact de la communauté » (Eychenne, p.21).

Si les fab labs sont une belle expression du DIY (Do it yourself), ils appliquent également en leur sein le DIWO (Do it with others). Les fab labs peuvent exister sous différents modèles, privés, semi-privés ou publics, soutenus par une école, une collectivité locale, une société, et être ouverts à tous ou seulement pour des étudiants ou des entreprises. Si l’investissement de départ peut être relativement important (environ 100 000$, et avec un budget de fonctionnement mensuel de 5000 à 25 000$), il est tout à fait possible, et l’on voit fleurir sur la toile de nombreuses façons et propositions, de monter un fab lab avec un budget beaucoup plus modeste.

Montréal possède son propre fab lab, échoFab, répondant à la charte du MIT. Il se présente comme « un prototype d’atelier numérique communautaire de quartier » et est ouvert au grand public deux journées par semaine.

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Tout ceci est bien beau me direz-vous, mais quel rapport avec les bibliothèques publiques ?

Si l’on en revient au concept de « tiers-lieu », la bibliothèque ne peut pas éternellement rester un espace d’emprunt et de consommation de l’information sous quelque forme qu’elle soit. Pour devenir ce troisième lieu après la maison et le travail, un lieu dans lequel on se sent bien, pour lequel on a un sentiment fort d’appartenance et qui nous permet de nous ancrer et de participer à la vie de notre communauté, la bibliothèque publique doit proposer de nouveaux espaces de partage, de communication, de création. Les fab labs semblent répondre à ces nouvelles préoccupations. Ils sont des lieux ouverts, prônant l’éducation et l’apprentissage (une littératie technologique et technique) et si les bibliothèques ont démocratisé l’accès au savoir, les fab labs ont « pour objet de démocratiser l’accès aux outils et machines pour permettre les inventions et les expressions personnelles » (Eychenne, p.49).

Plusieurs bibliothèques, pour la plupart aux Etats-Unis, ont ainsi expérimenté le concept du fab lab en leurs murs. Le plus célèbre reste à ce jour le Fab Lab de Fayetteville Free Library. Sa directrice, Susan Considine affirme que les bibliothèques sont là pour donner aux gens l’opportunité d’être ensemble pour apprendre, discuter, découvrir, tester, créer…Et c’est avec cette idée que le Fabulous Laboratory (bien que répondant aux critères du MIT, ce « fab lab » ne veut pas s’appeler ainsi pour se laisser la possibilité d’évoluer selon les exigences de la bibliothèque et les souhaits des usagers) a vu le jour. Lauren Britton Smedley, qui est l’instigatrice du projet, a beaucoup réfléchi à la forme qu’il pourrait prendre, à ce qui appartient à un espace comme celui-ci. C’est finalement un modèle hybride, qui est ouvert aux entrepreneurs. La bibliothèque est ainsi vue comme un centre d’échange de connaissances, ce qui correspond parfaitement aux fab labs et à l’importance qu’ils accordent au partage.

D’autres bibliothèques publiques proposent des espaces de création, des makerspaces (lieu de rassemblement d’une certaine communauté liée par des intérêts communs, où l’on se retrouve pour socialiser, échanger, élaborer des projets, partager et fabriquer). Ainsi la Maker Station de la Allen County Public Library est une sorte de fab lab installé dans une remorque située sur le stationnement de la bibliothèque. Avec l’idée que « anytime libraries come across an opportunity for people to learn and grow, they should do it », son directeur, Jeff Krull, a établi un partenariat avec TekVenture, une organisation sans but lucratif spécialisée dans la technologie et les makerspaces. L’organisation a fourni remorque et équipements, et la bibliothèque un emplacement pour le tout. La Maker Station est ouverte trois jours par semaine au grand public, le reste du temps elle est à la disposition d’entrepreneurs ou de particuliers.

On retrouve aussi des espaces de création numérique, montage de film, photographie, studio d’enregistrement, dans plusieurs bibliothèques aux Etats-Unis, parfois destinés aux jeunes et adolescents en particulier. C’est le cas du YOUmedia lab à la Chicago Public Library ou du Storylab de la Tacoma Public Library. Le Digital Media Lab de la Skokie Public Library, ouvert à tous les usagers de la bibliothèque, possède ordinateurs et équipements pour filmer, photographier, enregistrer. Certains matériels peuvent même être empruntés. I Street Press de la Sacramento Public Library propose des ateliers d’écriture, des

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informations sur la publication pour écrivains en herbe et permet même de publier ses œuvres grâce à une Espresso Book Machine ! Comme le résume cet article, « I Street Press turns readers of books into makers of books ».

Plus proche de nous, le Café de Da de la bibliothèque Ahuntsic a ouvert ses portes en 2011. Il propose rencontres et conférences, mais a initié en 2012 des ateliers de cinéma en direction des 16-25 ans pour leur permettre de réaliser, monter et projeter des films.

Tous ces exemples illustrent l’entrée des bibliothèques publiques dans l’ère de la culture du faire. N’en étant qu’à ses balbutiements, c’est toutefois une période de tâtonnements et de questionnements. Un fab lab a-t-il sa place dans les bibliothèques de Montréal ? Sous quelle forme ? Et pour quels publics ? Comment, après l’âge de l’accès et de la formation que définit Marie D. Martel, passe-t-on à celui qu’elle nomme l’âge de la participation ?

Parues en 2011, les nouvelles Lignes directrices pour les bibliothèques publiques du Québec, rappellent que ces dernières sont « étroitement liée[s] à la vie citoyenne » et qu’elles « contribue[nt] de façon significative au développement culturel, communautaire, social et économique des individus et des collectivités » (p.11). Parmi ses six valeurs principales, on retrouve l’approche participative, la créativité et le développement durable, trois valeurs qui, bien que non mises de l’avant de façon explicite, sont aussi celles des fab labs. Plus loin, les Lignes directrices rappellent que « les ressources technologiques font partie intégrante de l’offre de service de la bibliothèque publique » (p.37).

Lorsque l’on se penche sur la Politique de développement culturel de la ville de Montréal, 2005-2015, il est mentionné comme axes stratégiques pour les bibliothèques qu’il faut « renforcer [leur] utilisation comme outil d’intégration et de développement social » ainsi que leur rôle « comme milieux de vie ». Sans qu’il soit nommé, transparaît dans ces volontés, le concept de tiers-lieu. Pourtant, aucune action concrète n’est proposée pour faire de la bibliothèque publique cet espace particulier.

Les fab labs, de par leurs valeurs et leurs principes, pourraient être une des réponses pour entrer dans l’âge de la participation. Comme le souligne Eychenne, ils encouragent « la créativité individuelle car elle est porteuse de plus de conscience et responsabilité sociale » (p.9). On retrouve dans la charte des fab labs les termes accès, partager avec les autres utilisateurs, éducation, capitalisation des connaissances… La filiation avec les bibliothèques publiques apparaît de plus en plus évidente.

Alors c’est décidé, installons un fab lab dans une bibliothèque !

Avant tout, il importe de se demander sous quelle forme nous voulons implanter ces nouveaux espaces et toutes leurs nouvelles fonctions dans la bibliothèque publique (un webinaire d’OCLC et du Library Journal indique un budget de 10 000 à 50 000$ pour monter un fab lab et un espace nécessaire d’environ 75 m2).

L’expression même de fab lab correspond à l’espace inventé par Neil Gershenfeld et reconnu par le MIT. Les bibliothèques publiques, bien que s’inspirant fortement de sa philosophie et

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de ses principes, ne sont cependant pas obligées de se conformer à tous les points de la charte. Sans doute, vont-elles devoir se pencher et réfléchir à quelle sorte de makerspace elles veulent pour leur communauté et leurs citoyens. On peut même imaginer que les bibliothèques publiques développeront leur propre homologation, répondant ainsi à leurs réels besoins.

Les fab labs possèdent des qualités « humaines » que les bibliothèques publiques vont sans doute pouvoir utiliser. On peut ainsi penser à un partenariat avec des écoles ou certains programmes particuliers, pour revaloriser le travail manuel, ce « faire » qui disparaît des écoles. Les enfants aiment naturellement bricoler (il n’est qu’à voir le succès des petits bricolages qui sont souvent proposés après l’heure du conte), ils sont certainement un public déjà acquis aux fab labs. Les adolescents, et ce n’est pas pour rien que plusieurs bibliothèques américaines ont développé des labs spécifiquement pour eux, sont aussi des usagers à privilégier dans cette entreprise, eux qui délaissent la bibliothèque publique à cet âge particulier de la vie… Plus globalement, le fab lab, un terrain neutre qui propose une littératie nouvelle, où tout le monde se retrouve un peu sur le même pied d’égalité et où chacun est encouragé à partager ses connaissances, pourrait être un lieu de mixité, de réconciliation sociale.

En venant à la bibliothèque pour fabriquer (comme on y vient pour lire), c’est un véritable moyen de s’approprier le lieu qui est proposé ici. En permettant aux usagers de créer, en favorisant l’émergence de projet individuel et communautaire, le fab lab leur offre par là-même la possibilité de s’épanouir personnellement et de faire rayonner la bibliothèque dans sa communauté.

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Article 7 – Fab Lab squaredhttp://fing.org/?-FabLab-Squared,139-

La Fing et plusieurs acteurs de l’innovation, de la création, de l’éducation et de la recherche et des technologies, se lancent dans un projet d’émergence et d’essaimage des Fab Labs en France. Le projet Fab Lab squared a été retenu dans le cadre de l’appel à projets Prototypes Technologiques, lancé par la région Ile de France et Cap Digital.

Les FabLabs, qu’est-ce que c’est ?

Un Fab Lab (abréviation de Fabrication laboratory) est une plate-forme ouverte de création et de prototypage d’objets physiques, "intelligents" ou non. Il s’adresse aux entrepreneurs qui veulent passer plus vite du concept au prototype ; aux designers et aux artistes ; aux étudiants désireux d’expérimenter et d’enrichir leurs connaissances pratiques en électronique, en CFAO, en design ; aux bricoleurs du XXIe siècle…

» Consultez la définition complète et illustrée du Fablab

Les implications du concept au sein de la société

La vie numérique et ses implications sociétales

Le Fab Lab participe de la réappropriation des technologies par les citoyens et les utilisateurs, pour en décrypter le fonctionnement et les détourner à leurs propres fins. Il étend la capacité du numérique à élargir les capacités de participation et d’intervention des citoyens sur leur quotidien, leur environnement immédiat, leur espace de vie. Il est l’endroit où s’inventeront, plus sûrement que dans les grandes entreprises et les laboratoires, les objets et les lieux de demain. Fab Lab Squared démontrera ce potentiel par l’exemple.

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La vie numérique et ses implications urbaine

Le Fab Lab est profondément urbain, il puise sa force dans la densité et la diversité de la ville. En abaissant les barrières à l’innovation dans la conception et la production d’objets et d’espaces physiques, en élargissant les capacités d’intervention des citoyens sur leur environnement proche, il contribue aux piliers économique et social du développement durable. En favorisant la relocalisation de certaines productions, ainsi que le reconditionnement et la réutilisation d’objets technologiques, il contribue à son pilier environnemental et économique.

Le projet Fab Lab Squared

Porté par un ensemble d’acteurs associatifs (la Fing, Silicon Sentier, TMP/Lab, Tetalab, Ping), Entreprises de la recherche (Institut Télécom, IRI) et de l’enseignement (Ensci) qui travaillent ensemble depuis plusieurs mois autour du concept de Fab Lab, le projet Fab Lab squared (au carré) a une double fonction innovante :

Faire émerger pour la première fois en France ce nouveau dispositif d’innovation qu’est le Fab Lab, pour faciliter le prototypage et l’expérimentation d’objets et d’espaces innovants, au croisement du numérique et du physique ;

Enrichir le concept même de Fab Lab en construisant un Fab Lab mobile à dé- ploiement rapide, qui aide à créer d’autres Fab Labs, et qui construit même un certain nombre des machines qui viendront l’équiper.

Objectifs du prototype et enjeux pour le porteur de projet et les partenaires

Le Fab Lab Squared est un prototype de Fab Lab léger, rapide à déployer et démonter, et dont l’une des fonctions est… d’incuber d’autres Fab Labs. Il s’agit donc de définir et d’expérimenter :

L’équipement nécessaire à un Fab Lab permettant de fabriquer "à peu près n’importe quoi" (build almost anything), en cherchant à minimiser son coût : une partie des machines elles-mêmes seront fabriquées dans le cadre du projet.

Les usages concrets du Fab Lab par plusieurs catégories d’acteurs : entrepreneurs, artistes et designers, étudiants, bricoleurs "traditionnels" et technologiques (hackers), et simples amateurs ou citoyens intéressés.

Les conditions de déploiement et d’exploitation d’un Fab Lab : le projet s’auto- documentera et visera à mettre à disposition de futurs Fab Labs le plus grand nombre d’informations techniques, pratiques, méthodologiques, etc.

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Le prototype Fab Labs Squared (FL²) a pour objet de créer la "matrice" technique, servicielle et organisationnelle des futurs Fab Labs qui pourront s’installer dans des universités, des campus d’entreprises ou incubateurs, des lieux associatifs et culturels.

Le programme du projet Fab Lab Squared

Le projet fonctionnera de façon empirique ; dans un premier temps, certains outils du Fab Lab seront produits lors d’un événement public dédié, puis intégrés dans un espace Fab Lab qui sera mis à la disposition du public pendant Futur en Seine 2011, l’évènement dédié aux nouvelles technologies à l’initiative de Cap Digital.

Construction des outils du Fab Lab

Lors d’un événement de la fin 2010, seront produites « à capot ouvert », plusieurs machines à commande numérique indispensables au fonctionnement du Fab Lab :

une "RepRap", imprimante 3D open source ; une "RepStrap", machine capable de produire les pièces destinées à fabriquer la RepRap ; une défonceuse à bois, servant à l’usinage des pièces en bois

La présentation de ce "prototype" du FL² sera ponctuée durant la semaine de plusieurs ateliers ainsi que d’une conférence. Des médiateurs accompagneront le public large (scolaires, étudiants, porteurs de projet, professionnels) à la découverte du FL².

Construction du Fab Lab

Pendant Futur en Seine, le FL² sera un Fab Lab ouvert au public dans un lieu symbolique. Au travers de 4 formats d’animation, il initiera les publics à la fabrication assistée par ordinateur, accompagnera des projets innovants vers la production de prototypes, et incubera des projets artistiques. En continu, il sensibilisera au concept de Fab Lab et rendra compte des résultats de l’expérimentation.

Déploiements ultérieurs

Après Futur en Seine, le FL² formalisera l’expérience acquise, produira une documentation accessible et restituera son expérience lors des Entretiens du Nouveau Monde Industriel.

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L’objectif est de faciliter le déploiement ultérieur du FL2 tres territoires, mais aussi le déploiement autonome d’autres Fab Labs.

En savoir plus

Rejoignez le groupe FabLab sur le réseau social de la Fing Documents de travail sur l’émergence d’un réseau de Fab Labs en France Gershenfeld parle des fablabs à TED

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Article 8 - Fab Labs: la grande bidouille30 juin 2013 à 21:16 http://www.liberation.fr/economie/2013/06/30/fab-labs-la-grande-bidouille_914807

Au fab lab de l'université de Cergy (Val-d'Oise) (Fac Lab. O. Gendrin)

Décryptage : Pas besoin d’être ingénieur pour réparer son ordi ou fabriquer son vélo. Plans et machines sont mis à la disposition de tous sur le Web et dans des ateliers mécanico-numériques qui commencent à essaimer en France.

Par SABINE BLANC

«Do it yourself, do it with others» («faites-le vous-même, faites-le avec les autres») : telle est la devise des Fab Labs, ou Fabrication Laboratories. Vous n’en avez jamais entendu parler ? Normal, le mouvement est encore underground. Créés il y a une dizaine d’années au Massachusetts Institute of Technology (MIT) par Neil Gershenfeld, un professeur de physique qui proposait un cours de prototypage rapide intitulé «comment fabriquer (à peu près) n’importe quoi», les Fab Labs sont les ateliers de fabrication communautaires de l’ère numérique. Leur objectif ? Donner à ceux qui ne sont ni ingénieurs, ni designers, ni même geeks les moyens de fabriquer toutes sortes d’objets manufacturés comme à l’usine. Et ce, en mettant gratuitement à leur disposition le savoir, les procédés et la technologie nécessaires.

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Des plans en open source, quelques machines-outils à commande numérique, un peu d’apprentissage collectif, beaucoup de patience et d’ingéniosité… et voilà un meuble sur mesure, une pièce pour réparer sa machine à laver ou carrément le prototype d’un vélo électrique !

Les Fab Labs se sont mis en tête de transposer au vieux monde industriel la philosophie ouverte et collaborative du logiciel libre. Chris Anderson, ancien rédacteur en chef de Wired, la bible des technofans américains, voit en eux «la prochaine révolution industrielle», celle du XXIe siècle (lire ci-contre). Plus de problèmes de brevets dès lors que les plans et les spécifications d’un fauteuil design ou d’un ampli hi-fi sont mis gratuitement à disposition de tous. N’importe quel bricolo-bidouilleur peut transformer son garage en atelier pour fabriquer l’objet dont il a besoin.

Mais les Fab Labs sont avant tout une expérience collective basée sur le partage de connaissances à l’échelle locale ou planétaire : un objet peut être conçu dans un Fab Lab, fabriqué dans un autre… et amélioré dans un troisième. Pour obtenir le label «Fab Lab», il faut adhérer à la charte du Center for Bits and Atoms, créé en 2001 au MIT, et surtout posséder les machines-outils adéquates : fraiseuse de précision, perceuse à colonne, découpeuse laser… Les imprimantes 3D nourrissent bien des fantasmes (EcoFutur du 1er octobre) mais ne sont guère prisées dans les Fab Labs en raison de leurs capacités limitées : l’impression est lente et elles sont cantonnées au plastique.

Marginal en France, le mouvement commence à essaimer : il existe déjà cinq Fab Labs dans l’Hexagone, et vingt-quatre autres se revendiquent comme tels sans avoir forcément reçu l’agrément du MIT ou l’avoir demandé. Du coup, le sujet intéresse le gouvernement en quête de solutions hétérodoxes pour relancer l’innovation et l’emploi en France. «Nous voulons polliniser le territoire avec des Fab Labs et lancer un grand mouvement d’alphabétisation numérique» : mardi à Bercy, Fleur Pellerin, la ministre déléguée à

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l’Economie numérique, a annoncé avec enthousiasme le lancement d’un appel à projets pour la création d’une dizaine de ces ateliers de fabrication numérique. La sélection devrait intervenir d’ici à mi-octobre. Reste à savoir à quoi serviront ces Fab Labs. Entre geekerie, projets de Géo Trouvetou, et applications concrètes sur le terrain, EcoFutur a passé en revue les usages potentiels.

Apprendre ensemble

La dimension éducative est gravée dans le marbre de la charte des Fab Labs : apprendre, mais surtout le faire ensemble. Vous ne devez pas déléguer la réalisation de votre projet à un utilisateur plus aguerri, mais acquérir les compétences grâce aux membres de la communauté. Le rôle des Fab Labs manager n’est pas seulement de jouer aux profs couteaux-suisses mais aussi de vous aiguiller vers les personnes-ressources. Des ateliers de découpe laser sont par exemple organisés.

Les Fab Labs valorisent l’apprentissage par la pratique, alors que notre système scolaire a tendance à favoriser les savoirs théoriques. Des programmes comme FabLab@School introduisent cette vision de l’apprentissage au sein des écoles. On peut s’en servir aussi pour faire de la médiation scientifique, comme au centre de sciences de Grenoble. «En collaboration avec le service médiation, nous organisons des ateliers pour le grand public : comment faire des haut-parleurs ou des sténopés, un système pour prendre des photos, témoignent Jean-Michel Molenaar, Fab Lab manager, et Catherine Demarcq, responsable animation. Nous sensibilisons aussi les professeurs pour qu’ils montent des projets interdisciplinaires. Certains ont fait des manèges avec des petits, des jeux mathématiques, une camera obscura ou une maquette d’escalier au collège.»

Les Fab Labs commencent aussi à arriver dans les bibliothèques, comme une évolution logique de leurs missions. Dernière en date, et première dans une grande ville, la bibliothèque publique de Chicago, dans l’Illinois, s’apprête à ouvrir le sien.

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Faire son prototype

Grâce aux machines en partage, il est possible de réaliser un prototype de projet. Cette proof of concept constitue une étape incontournable pour vérifier si une idée est viable. A Artilect, un Fab Lab pionnier installé à Toulouse, de jeunes ingénieurs ont développé une première version d’un robot maraîcher baptisé Naïo. Puis, ils ont fait une première levée de fonds via une collecte pour en poursuivre le développement. Car il est possible d’initier des activités commerciales dans un Fab Lab. Mais, comme le souligne la charte, dans certaines limites : «Elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du Lab plutôt qu’en son sein et bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux Labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.»

A Clermont-Ferrand, le projet de Fab Lab est poussé par une jeune habitante de la ville qui déplore que Pôle Emploi ne lui offre pas les mêmes possibilités pour développer un projet. Les Fab Labs pour recréer du tissu économique et de l’emploi ? Les Etats-Unis y croient. Un membre du Congrès américain vient de proposer un «National Fab Lab Network Act» pour développer un réseau en partenariat public-privé et, entre autres, «augmenter l’invention et l’innovation et créer des entreprises et des emplois».

Réparer plutôt qu’acheter

«Il s’agit de créer plutôt que de consommer», dit souvent Neil Gershenfeld. De fait, si les Fab Labs offrent la possibilité de créer des choses, ils permettent aussi de réparer des objets cassés ou de les améliorer : recoudre un vêtement, fabriquer une pièce cassée qui n’est plus disponible en service après-vente, etc. Cette dimension intéresse le gouvernement français qui a affirmé vouloir pousser le consommateur à «connaître les procédures de réparation des outils numériques (dont les électroménagers) pour répondre aux besoins des populations en difficulté».

Répondre aux besoins «non rentables»

Dans son livre Fab, Neil Gershenfeld raconte comment Haakon, un berger norvégien, a développé un système autrement plus efficace que la cloche pour suivre ses bêtes : celles-ci portent un collier émettant un signal radio qu’il reçoit dans sa ferme. Mais les pâturages proches du cercle polaire sont délaissés par les opérateurs, alors «Haakon a dû construire les infrastructures de télécommunication dont il avait besoin». Les industriels ne s’intéressent à un marché que s’ils y trouvent un intérêt économique, ce qui exclut les zones pauvres ou peu peuplées. Les Fab Labs sont une bonne piste pour répondre aux besoins jugés «non rentables», en relocalisant au passage une (micro) production.

Créer du lien social

«On ne parle que de machines, mais c’est un prétexte !» : Pascal Minguet, cocréateur du premier Fab Lab rural en France, à Biarne, dans le Jura, ne plaisante qu’à moitié. Les Fab Labs sont des lieux de rencontre, d’échange, de (ré)insertion, un nouvel avatar des maisons de quartier. «Nous sommes installés dans un village de 350 habitants qui n’a plus de café. Les gens viennent pour discuter, c’est l’occasion de faire des bouffes. Un modéliste ferroviaire

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travaille maintenant avec son voisin, ils ignoraient qu’ils avaient une passion commune. Ils font des ateliers et aident les autres. On organise du covoiturage lorsque nous montons des Fab Labs temporaires. Des gens viennent faire leur CV, on s’appuie sur une association dont le but est de former au numérique», témoigne Pascal.

Le constat vaut aussi dans les villes. Un chômeur ou un retraité peut proposer des ateliers et mettre en valeur ses connaissances et compétences. Une façon aussi de retrouver une place dans la société. Au Fac Lab, le Fab Lab de l’université de Cergy-Pontoise (Val-d’Oise), Josiane, la cinquantaine et des doigts de fée, donne des cours de couture et accompagne qui veut sur des projets : «Je suis dans une communauté où je peux donner un coup de main, pour le plaisir de partager et de transmettre. C’est le lieu qui me convient. Il n’y a pas de jugement de valeurs et moins de tensions que dans le secteur associatif.» En retour, elle a appris à se servir de la découpe laser pour faire une petite série de pochettes en cuir sur lesquelles Fleur Pellerin a flashé lors de sa visite.

Pour en savoir plus : http://fablabo.net/wiki/Fablab_F_aire http://wiki.fablab.is/wiki/Portal:Labs

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Autres liens http://fr.wikipedia.org/wiki/Fab_lab

http://www.faclab.org/decouvrir/le-faclab/

http://www.ensci.com/blog/fablab/

http://lepetitfablabdeparis.fr/

http://artilect.fr/

http://www.fablablille.fr/

http://fablab.ccsti-grenoble.org/

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