apports et limites de l’analyse … · ministère de l’intérieur pour la police, que du...
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APPORTS ET LIMITES DE L’ANALYSE
COMPORTEMENTALE
DANS LA RESOLUTION D’AFFAIRES CRIMINELLES
Policiers-psychologues ou psychologues-policiers ?
Diplôme Universitaire Méthodes Psychologiques en Criminologie
Mémoire présenté par Elizabeth Doise-Foutry
Sous la direction de Monsieur le Commissaire Abdelkader Haroune
FCEP, Université de Lille3 – Charles de Gaulle
Année universitaire 2008-2009
2
Préambule
Le choix de ce Diplôme Universitaire Méthodes Psychologiques en Criminologie est
essentiellement justifié par mon goût pour l’analyse comportementale.
D’emblée, mon intérêt s’est porté sur l’interrogatoire et sur les nouvelles techniques
fondées sur les sciences comportementales. Pour traiter de ce sujet, il aurait fallu pouvoir
effectuer des stages in situ, afin de mesurer les enjeux de telles méthodes et leurs implications
pratiques. Malheureusement, n’étant pas assermentée, je me suis vu opposer un refus, tant du
Ministère de l’Intérieur pour la Police, que du Ministère de la Défense pour la Gendarmerie.
Force m’a été de revoir mon projet, sans pour autant abandonner l’analyse
comportementale. Après une longue réflexion, la seule alternative qui s’est présentée à moi a
consisté à travailler à partir de témoignages écrits, sans parti pris aucun, le seul but étant la
réflexion la plus objective possible sur le phénomène.
Arrivée au terme de l’écriture de mon mémoire, ce qui suit constitue, non pas un
travail de juriste ni même de psychologue, mais le point de vue honnête et approfondi d’une
simple citoyenne qui, tout au long de sa carrière dans l’Education Nationale, a pratiqué de
façon intuitive l’analyse comportementale.
Je tiens à remercier monsieur le Commissaire Haroune pour tout le travail accompli,
pour la variété et la richesse de cette formation, ainsi que toutes les personnes compétentes
qui sont intervenues dans ce Diplôme Universitaire. Merci en particulier à monsieur Jean-
Paul Wuyts qui, par sa gentillesse et sa disponibilité pour répondre aux questions que je lui ai
posées sur son tapuscrit Psy et Flic, m’a été d’un grand encouragement lui aussi.
3
SOMMAIRE
1. Introduction p.4
2. Histoire de l’Analyse Comportementale p.5
3. Cadre : droit, déontologie, éthique p.5
4.1. Définition générale de l’analyse comportementale p.6
4.2. Analyse comportementale et analyse criminelle p.7
4.3. Définition de l’analyse criminelle p.7
4.4. Proposition de définition de l’analyse comportementale en criminologie p.7
4.5. Relation de dépendance de l’analyse comportementale à l’analyse criminelle p.7
5. Champ d’application de l’analyse comportementale p.8
6.1. Méthodologie de l’analyse comportementale p.8
6.2. Rôle de l’analyste p.8
6.3. Préparer l’interrogatoire p.9
6.4. Les techniques d’interrogatoire p.11
7. 1 Pourquoi les faux aveux ? p.12
7.2. Détecter le mensonge p.13
8. L’analyse comportementale p.15
8.1. Théorie p.15
8.2. Cas pratique n°1 p.16
8.2.1 L’affaire Patrick Dils p.16
8.2.2. Discussion : l’analyse comportementale permet-elle d’éviter l’erreur judiciaire ? p.23
8.3. Cas pratique n°2 : Jack l’Eventreur p.24
8.3.1. Présentation p.24
8.3.2. Résultats de l’enquête scientifique p.26
8.3.3 Profil psychologique p.27
8.3.4 Discussion p.29
9. Intérêts et limites du profilage p.30
10. Discussion p.32
Glossaire p.35
Bibliographie p.37
Annexes p.39
4
1. Introduction
Depuis quelques années déjà, je suis familière de l’analyse comportementale. Pas en
ces termes scientifiques qui appartiennent au monde de la recherche, mais plutôt à celui du
profilage, qui est venu enrichir le vocabulaire de la langue française. En effet, à la question
posée à des préadolescents d’une douzaine d’années ‘quel métier veux-tu exercer plus tard ?’,
il y en a toujours quelques uns pour répondre ‘profileur’ ou qui citent le nom de quelque fin
limier, prétendument du FBI, ou encore ‘J’veux faire X-files !’
Entre ces termes issus de la langue véhiculaire d’une part, et de la langue vernaculaire
d’autre part, il y a un fossé que le seul intérêt pour le sujet ne peut combler. Pourtant, chacun
croit tout savoir en ce domaine : ‘j’ai vu, donc je sais, donc je peux faire.’ Les technologies
modernes qui d’un clic vous transportent à l’autre bout du monde vous mettent en
communication avec votre alter ego sur le continent de votre choix en l’espace de quelques
secondes, ou vous permettent d’endosser mille identités en une vie, celle de profileur entre
autres, et vous donnent l’illusion d’être apprenti sorcier, voire maître du monde. Voilà où le
bât blesse : les médias ont pris les professionnels de vitesse et ont rapidement perçu l’intérêt
de ce nouveau mode d’investigation policière. La culture médiatique a pris le pas sur la
science. Notre société n’a pas le temps de réfléchir à ce processus, de l’intégrer, que déjà la
médiatisation dont il faisait l’objet le rabaisse au rang de banal bien de consommation.
Cet engouement pour le profilage, cette caricature parfois de l’analyse
comportementale ne doivent pas nous empêcher de considérer l’intérêt de cet outil en matière
d’enquêtes et aussi de nous interroger sur ses limites.
Pour ce faire, il est nécessaire tout d’abord de resituer l’analyse comportementale dans
son contexte historique, d’en tracer le cadre déontologique, éthique et juridique, de la définir,
en criminologie plus particulièrement. Ensuite, l’étude de quelques cas pratiques permettra
d’évaluer les apports de l’analyse comportementale et enfin, un regard critique sur l’ensemble
aidera à déterminer ses limites et perspectives d’avenir.
5
2. Histoire de l’Analyse Comportementale :
L’Analyse Comportementale trouve son origine aux Etats-Unis dans les années 1960, lorsque
le docteur James Brussel aida à l’arrestation d’un poseur de bombes à New York en dressant
son profil psychologique. Cette affaire, qui durait depuis 17 ans fut ainsi résolue en l’espace
de quelques mois. Depuis cette date, les sciences du comportement ont trouvé leur place
comme outil d’aide à l’enquête au sein du FBI. En France, ce n’est que depuis les années
2000 qu’elles font l’objet d’une réflexion approfondie, avec en 2002 la création du SALVAC,
et en 2003 celle d’un groupe de travail interministériel dont l’objectif a été de définir l’analyse
criminelle et l’analyse comportementale, de leur fixer un champ d’application ainsi qu’un
cadre juridique. Ce rapport a été remis à Dominique Perben, Garde des Sceaux, Ministre de la
Justice à l’époque.
3. Cadre : droit, déontologie, éthique
L’analyse comportementale s’inscrit dans le même cadre que toute enquête policière,
puisqu’elle aide et assiste les enquêteurs dans leur tâche, et lui est par conséquent
subordonnée. Le rapport interministériel du 30 juillet 2003 émet à ce sujet des
recommandations tant au niveau de l’enquête qu’à celui de l’instruction.
Au stade de l’enquête, trois cadres juridiques ont été examinés :
- celui dans lequel l’officier de police judiciaire opère (article 12, 13, 14, 15-1, 16, 17,
18, 224 du Code de Procédure Pénale),
- celui du recours à une personne qualifiée (nécessite l’autorisation préalable du
Procureur de la République, qui serait susceptible de prévenir d’éventuels risques de
dérives préjudiciables à l’enquête, ainsi qu’à la validité de la procédure)
- celui prévoyant le concours d’assistants spécialisés (le groupe de travail a exprimé son
opposition à l’introduction en procédure pénale d’un statut d’assistant spécialisé en
matière d’analyse comportementale)
L’article 114 du Code de Procédure Pénale stipule que ‘Le collège de l'instruction avertit
ensuite la personne qu'elle a le choix soit de se taire, soit de faire des déclarations, soit d'être
interrogée. Mention de cet avertissement est faite au procès-verbal. L'accord pour être
interrogé ne peut être donné qu'en présence d'un avocat.’
6
La loi du 15 juin 2000 limite la garde à vue à 48h, elle permet au prévenu de demander à être
examiné par un médecin quand il le désire. Elle assure aussi la présomption d’innocence et le
droit des victimes, c'est-à-dire le droit de parler à un avocat dès la première heure, afin peut-
être d’éviter les faux aveux. L’enquêteur doit aussi prêter attention aux raisons qui mènent un
vrai faux coupable à s’accuser de ce qu’il n’a pas commis.
D’après l’article 428 du Code Pénal, l’aveu est un élément de preuve parmi d’autres laissé à
la libre appréciation du juge. Cependant, il doit être conforté par des éléments matériels1 .
En tout état de cause, le juge d’instruction doit avoir pour objectif la recherche de la vérité.2
4.1. Définition générale de l’analyse comportementale :
C’est l’observation du comportement d’une personne en fonction des stimuli dans le but
d’aider par des conseils en agissant sur les stimuli afin d’éviter des comportements aversifs.
Elle se fonde sur la relation dite ‘réciproque’ entre l’environnement et le comportement. ‘Les
événements environnementaux contrôlent le comportement, mais le comportement modifie
inévitablement l’environnement. On peut donc considérer que le comportement d’une
personne modifie le comportement d’une autre. Il est impossible de renoncer au contrôle.
Nous influençons le comportement des autres quoi que nous en pensions.’3
‘Le comportement peut être analysé selon plusieurs dimensions : la fréquence, le taux, la
durée, la latence, la topographie et le lieu d’émission.’4
Cette définition est à rapprocher du principe d’échange de Locard, selon lequel tout individu
laisse sur les lieux de l'infraction des traces de son passage (cheveux, fibres de vêtements,
empreintes, traces biologiques) et emporte avec lui des éléments (terre, ADN, fibre etc.) qui
détermineront sa présence et son action sur la scène du crime.
Il est intéressant de noter que ce terme est également utilisé dans des domaines aussi variés
que la bourse, l’économie ou l’aérodynamisme.
1 Ficheau, Aline, Les Erreurs Judiciaires, Mémoire Université de Lille2, 2002, p.12
2 ibid. : p.23
3 Rivière, Vinca, Analyse du Comportement Appliquée à l’Enfant et à l’Adolescent, Presses Universitaires du
Septentrion, 2006, p.26 4 ibid. p.56
7
4.2. Analyse comportementale et analyse criminelle
Si l’analyse comportementale, parfois dénommée ‘profilage criminel’, est basée sur les
sciences comportementales, l’analyse criminelle, quant à elle, est une technique d’aide à
l’enquête fondée sur les nouvelles technologies de l’information.
4.3. Définition de l’analyse criminelle :
EUROPOL définit l’analyse criminelle comme ‘la recherche et la mise en évidence
méthodique de relations, d’une part entre des données de criminalité elles-mêmes et, d’autre
part entre des données de criminalité et d’autres données significatives possibles, à des fins de
pratiques judiciaires et policières ‘.
4.4. Proposition de définition de l’analyse comportementale en criminologie
(rapport Perben, 30 juillet 2003):
L’analyse comportementale est une technique d’aide à l’enquête alliant les protocoles
traditionnels d’investigation, l’analyse de données objectives issues de la procédure, et des
connaissances approfondies en psychocriminologie. Elle est fondée sur des connaissances
liées à la compréhension du comportement humain et pouvant requérir l’accès à des systèmes
automatisés de traitement de données judiciaires. La définition de l’analyse comportementale
permettra d’éviter que soient utilisés pour la poursuite des crimes et des délits des processus
d’enquête ne donnant pas des garanties scientifiques et procédurales.
4.5. Relation de dépendance de l’analyse comportementale à l’analyse
criminelle :
- elle se fonde sur le dossier
- elle bénéficie des progrès techniques
- elle jouit d’une vue d’ensemble, d’une vue globale, d’une hauteur de point de vue
- elle aide à orienter ou réorienter l’enquête
- elle suggère de nouvelles investigations, de nouvelles expertises
- elle met en relation, elle coordonne
- mais elle ne désigne pas le coupable.
8
5. Champ d’application de l’analyse comportementale : où et quand
intervient le criminologue ?5
Le criminologue remet ses conclusions à la police et au juge d’instruction.
Même s’il donne des directives importantes sur la manière de mener l’interrogatoire, le
profilage est utile s’il reste modeste et complémentaire.
Les policiers et gendarmes vérifient les alibis des suspects qu’ils visent.
A ce stade seulement, le criminologue confronte son opinion à celle des enquêteurs.
Les hypothèses de travail sont ou non confirmées par les éléments matériels.
Même si une suspicion pèse sur un individu en particulier, il faut toujours laisser la porte
ouverte à d’autres suspects possibles.
6.1. Méthodologie de l’analyse comportementale6
Elle se déroule comme suit :
- réception du dossier et des éléments de l’affaire, évaluation globale et transport sur les
lieux
- évaluation du mode opératoire, du lieu, du mobile, de la signature criminelle
- examen victimologique, hypothèses, reconstitution chronologique des faits
- examen médico-légal
- reconstitution des faits et construction du profil psychologique probable de l’auteur
- suggestions d’enquêtes et stratégies dans l’orientation des recherches, affinage du
profil en fonction de nouveaux éléments.
6.2. Rôle de l’analyste :
Un criminologue doit ‘approcher’ un individu dans tout ce qu’il est et dans tous ses rapports
avec son environnement (principe des échanges de Locard).
Il a par ailleurs le devoir d’objectivité, le devoir de s’appuyer sur des faits, sur des indices
concrets.7 Il lui faut tout remettre à zéro à chaque nouvelle enquête. Même si les profils
généraux sont précieux et peuvent servir de cadre, ils ne prennent pas en compte les
différences individuelles.
5 Montet, Laurent, Tueurs en Série, Presses Universitaires de France, 2002
6 Toutin, Thierry, Le Profilage Criminel, L’Harmattan, 2000
7 Wuyts, Jean-Paul, Psy et Flic, p.99
9
‘Adopter la manière de comprendre d’une autre personne est la façon suprême de pénétrer son
monde’, a écrit Richard Bandler, co-fondateur de la Programmation Neurolinguistique..
La tâche de l’analyste est de comprendre les fantasmes du criminel. Le fantasme est un
moyen, un processus de contrôle de la situation par la peur et l’humiliation de la victime. Ce
contrôle peut n’intervenir qu’après la mort. Le corps est alors contrôlé à volonté. Dans les
deux cas, l’agresseur domine et éprouve un sentiment de toute-puissance. Le passage du
fantasme au comportement demande un renforcement permanent et donc une succession de
victimes. C’est là tout l’art de l’analyste comportemental, qui doit en outre saisir grâce à la
scène de crime les différences culturelles entre les différents types d’agresseur8, entre
l’agresseur et sa/ses victime(s), et même entre le suspect et les enquêteurs9, afin d’optimiser
l’interrogatoire.
6.3. Préparer l’interrogatoire
‘Le criminologue n’est tenu qu’à une obligation de moyens. Il saura qu’il a utilisé en son âme
et conscience tous les moyens à sa disposition pour éclairer davantage l’instruction. En
revanche, si les enquêteurs négligent cette piste alors qu’elle se révèle être la bonne, leur
responsabilité est lourde de conséquences. […] Le criminologue aura aussi sa part de
responsabilité car il n’aura pas su convaincre10
.’
Le criminologue donne des directives importantes sur la manière de mener l’interrogatoire.
‘Les vrais experts du crime ne sont pas les criminologues : ce sont les criminels eux-mêmes.
Plus nous comprendrons leur logique, mieux nous pourrons lutter contre ce type de criminels.
[…] Un tueur en série n’est pas un meurtrier ordinaire.’
Il existe plusieurs manières d’interroger, non pas une seule et unique, mais cela exige de la
préparation et requiert des aptitudes et un certain talent de la part de l’enquêteur qui, durant
l’enquête, a de multiples rôles à tenir.11
Dans les années 1970, Robert K. Ressler et le Behavioral Science Unit du FBI ont interrogé
un certain nombre de criminels en série dans les prisons américaines afin de mieux
8 ibid., pp.50-51
9 ibid. p.23
10 Montet, Laurent, Tueurs en Série, Presses Universitaires de France, 2002
11 ibid. pp. 7, 10, 28, 33, 35, 37, 39, 75, 178.
10
comprendre leur motivation, leurs émotions, leur mode opératoire, etc. En regroupant leurs
caractéristiques sociales, professionnelles et familiales, c'est-à-dire en en traçant leur ‘profil’,
ils ont ainsi pu les classer en deux catégories : les tueurs organisés ou psychopathes, et les
tueurs inorganisés ou psychotiques. Même si aujourd’hui, ce classement peut paraître un peu
trop rigide, l’expérience montrant qu’il existe divers degrés d’organisation tant dans la
personnalité même des criminels que dans leur histoire criminelle, ces notions sont précieuses
pour la préparation et le déroulement de l’interrogatoire :
A. face à un criminel narcisso-sexuel organisé, le criminologue doit provoquer les aveux.
1. La meilleure façon pour lui d’éliminer ou de retenir le suspect est de discuter avec
lui.
*Si le suspect n’est pas le bon, aucun élément convergent ne rattache l’individu
au passage à l’acte. C’est le flou et le doute.
*Si le suspect est le bon, le spécialiste doit voir en lui l’auteur des faits de
manière évidente, comme une pièce de puzzle manquante qui fait du crime un
tout.
2. Lors d’une audition de police, maintenir le suspect sous pression avec des preuves
tangibles après avoir appris à le connaître. Lorsqu’il sature, il faut avancer vers lui,
pénétrer son espace personnel et le toucher physiquement. La prudence est de mise,
car la réaction peut être explosive. Toutefois, le criminel le plus organisé retrouvera
rapidement son sang-froid et pourra adopter une attitude mutique, et par la suite,
essayer de regagner la confiance de l’enquêteur et de son entourage en se montrant
sous son jour le meilleur ou en suscitant la compassion.
3. En revanche, au cas où le suspect n’aurait pas été identifié, l’aide des médias peut se
révéler particulièrement efficace. En effet, le provoquer a de fortes chances de
l’amener à se dévoiler car il se croit plus malin et plus intelligent ; il est fort probable
qu’il prenne alors des risques qui permettront son arrestation.
B. face à un criminel narcisso-sexuel inorganisé, la méthode la plus efficace semble être
une attitude protectrice, voire empathique, sans agressivité. Le vocabulaire doit être adapté et
l’espace vital du prévenu doit être respecté. L’enquêteur peut le laisser parler en toute
11
confiance pour l’amener à livrer des informations complètes ou partielles. Il peut aussi l’aider
à se remémorer les événements et retrouver ses sensations lors de la scène du crime,
l’angoisse ainsi provoquée l’encourageant à s’exprimer afin de s’en libérer.12
6.4. Les techniques d’interrogatoire
Les enquêteurs doivent commencer l’interrogatoire sur les faits par des questions ouvertes
- donner l’opportunité aux suspects de donner leur propre version des faits
- les interrogateurs doivent se familiariser avec les faits déjà enregistrés ; c’est un
moyen stratégique d’établir si le suspect ment, ou de convaincre le suspect que la
police sait tout et qu’elle ne veut que des clarifications et des confirmations sur les
faits.
- Pas de questions conductrices qui signifieraient que leur opinion est forgée. Pourtant
celles-ci permettent de piéger l’aveu des suspects et permettent d’obtenir des détails
juridiquement pertinents pour évaluer le caractère correct des actes posés par la
sécurité et la police.
Les enquêteurs convaincus de la culpabilité du suspect l’interrogeraient préférentiellement,
afin de confirmer leur hypothèse initiale, négligeant ainsi les éléments pouvant la réfuter.
‘You’re guilty, so just confess !’13
L’amélioration des procédures protégeant les suspects pendant l’interrogatoire a-t-elle
(comme souvent dénoncé par J. Baldwin14
) débouché sur des techniques plus sophistiquées de
manipulation et de tromperie ?
Les enquêteurs échappent-ils au phénomène des stéréotypes sociaux qui guident notre
jugement, et selon lesquels une victime serait plus crédible si son témoignage s’accompagne
de signes manifestes de détresse psychologique ?15
12
On consultera avec profit Psy et Flic, tapuscrit .pdf de Jean-Paul Wuyts, pp.13, 14, 16, 35, 58, 59, 60, 75, 103,
134
13
Meissner, C.A., & Kassin, S.A. (2004). “You’re guilty, so just confess !” Cognitive and behavioral
confirmation biases in the interrogation room. In D. Lassiter’s (Ed.), Interrogations, confessions, and
entrapment, (pp. 85-106). New York : Kluwer Academic/Plenum Press. Disponible en ligne à l’adresse
suivante : http://works.bepress.com/christian_meissner/19/
14
Baldwin, J., Police Interview Techniques : Establishing Truth or Proof, in The British Journal of
Criminology, 33 (3), 1993, pp.325-352
15
Wessel, E., Drevland, G. C. B., Eilertsen, D.E., & Magnussen, S. (2006). Credibility of the emotional
witness : A study of ratings by court judges. Law and Human Behavior, 30(2), 221-230.
12
Ce point de vue n’est pas toujours justifié. Des chercheurs américains ont constaté que la
majorité des enfants qui dénoncent des maltraitances subies le font de manière étonnamment
calme.16
7. 1 Pourquoi les faux aveux ?
Il arrive que des suspects fassent de faux aveux pour de multiples raisons :
- Peur de le garde à vue
- Peur du scandale ; certains avouent pour éviter cela en imaginant rétablir la vérité plus tard,
trop tard !
- Faiblesse de caractère, fragilité inhabituelle (maladie, grossesse ex. Rosalie Gardin et Martin
Doise). Il y a aussi le cas des autistes qui ont tendance à se soumettre pour éviter la
confrontation et le conflit, à la différence des personnes atteintes du syndrome d’Asperger,
peu sensibles à la suggestion dans les interrogatoires.
En ce qui concerne l’affaire de Montigny-lés-Metz, Patrick Dils a été reconnu jeune et
manipulable. Pour commettre le meurtre des enfants, il fallait être fou ou avoir un mobile,
d’après les experts, 2 experts psychiatres et 2 experts psychologues qui sont arrivés aux
mêmes conclusions ‘favorables’ à Patrick Dils. L’un deux a même déclaré : ‘…il me
répondait dans le sens où je voulais.’17
- Mode d’interrogation : * questions conductrices des enquêteurs qui sont sûrs de la
culpabilité mais ne peuvent la prouver avec des indices matériels ; dans un proche avenir,
l’enregistrement vidéo pourra peut-être pallier cette tendance . Cependant, une étude de
Lindholm18
avance que les participants discriminent mieux les propos corrects des propos
incorrects quand les témoignages sont présentés sous forme écrite que sous forme vidéo.
16
Sayfan, L., Mitchell, E.B., Goodman, G.S., Eisen, M.L., & Qin, J. (2008). Children’s expressed emotions
when disclosing maltreatment. Child Abuse and Neglect, 32(11), 1026-1036.
17
Ficheau, Aline , Les Erreurs Judiciaires, Université de Lille2, 2002, p.42 18
Lindholm, T. (2008). Validity in judgments of high- and low-accurate witnesses of own and other ethnic
groups. Legal and Criminological Psychology, 13(1), 107-121.
13
* Réponses forcées : des témoins qui ont deviné (sous la pression
psychologique ou spontanément) des réponses à des questions posées plusieurs fois ont
davantage tendance à réintroduire ces faux souvenirs lors d’interrogatoires ultérieurs, que
lorsque ces questions leur ont été présentées une seule fois.19
.
* Un commentaire négatif ou la présence d’un second enquêteur,
même en l’absence de questions dirigées, aurait tendance à entraîner de nouvelles réponses
moins précises, mais un niveau d’anxiété supérieur.20
7.2. Détecter le mensonge
Il convient de distinguer les faux aveux du mensonge. En effet, mentir implique bien
l’intention de tromper.
Selon le psychologue Aldert Vrij21
, prêter attention aux comportements non verbaux d’un
suspect est une stratégie peu efficace pour déceler le mensonge. Les policiers devraient se
concentrer davantage sur les indices verbaux.
Les personnes ont l’habitude d’utiliser ces conduites d’analyse des comportements non
verbaux (posture, gestes, regard) au cours de leurs interactions sociales pour en déduire les
caractéristiques personnelles de leurs interlocuteurs. Les policiers sont généralement
persuadés de la culpabilité du suspect qu’ils vont interroger. Ils s’attendent donc à ce qu’il nie
verbalement les faits, et ils prêtent donc attention aux signes corporels pouvant le trahir.
Moins les ressources cognitives sont disponibles, plus les personnes se concentrent sur les
indices non verbaux du mensonge.22
19
Pezdek, K., Sperry, K, Owens, S.M. (2007). Interviewing witness : The effect of forced confabulation on
event memory. Law and Human Behavior, 31, 463-478.
20
McGroarty, A., & Baxter, J.S. (2007). Interrogative pressure in simulated forensic interviews : The effect of
negative feedback. British Journal of Psychology, 98, 455-465.
21 Vrij, A. (2008). Nonverbal dominance versus verbal accuracy in lie detection : A plea to change police
practice. Criminal Justice and Behavior, 35(10), 1323-1336.
22
Reinhard, M.A., & Sporer, S.L. (2008). Verbal and non verbal behaviour as a basis for credibility attribution :
The impact of task involvement and cognitive capacity. Journal of Experimental Social Psychology, 44(3), 477-
488.
14
Sporer & Zwandt23
montrent que peu de comportements non verbaux et para-verbaux (c'est-à-
dire accompagnant la parole) sont associés au mensonge : de nombreux stéréotypes ne sont
pas confirmés par la recherche scientifique.
Par ailleurs, d’autres recherches indiquent que des policiers qui se servent d’indices verbaux
sont meilleurs détecteurs que ceux qui utilisent des indices non verbaux. Il existe aujourd’hui
des outils tels que
- le CBCA (criteria-based content analysis) qui code l’entretien selon 19 critères,
indices de véracité. Plus le score CBCA est élevé, plus les propos sont dignes de foi.
- Le Contrôle de la Réalité (Reality Monitoring) qui repose sur l’idée que les souvenirs
d’expériences vécues contiennent un grand nombre de détails sensoriels, spatiaux et
temporels, par opposition aux expériences imaginées ou inventées qui font appel à des
pensées et à des raisonnements.
En conclusion, Aldert Vrij suggère aux enquêteurs de se montrer plus attentifs aux propos
tenus par les suspects, plutôt que de fonder leur conviction sur leur seul comportement, les
aspects visuels du comportement étant de mauvais indices du mensonge.
Vrij, Mann, Kriste, & Fisher24
ont mené deux nouvelles expériences dans la détection du
mensonge dans un contexte légal :
- comparaison de la capacité à inciter un suspect à produire des indices verbaux du
mensonge dans trois styles d’interrogatoire de police différents : collecte
d’informations, interrogatoire accusateur et entretien d’Analyse Comportementale
(Behavior Analysis Interview). Les résultats de l’expérience montrent d’une part que
l’interrogatoire fondé sur la collecte d’informations permet de générer un plus grand
nombre d’indices verbaux du mensonge que le style accusateur. En ce qui concerne
l’entretien d’analyse comportementale, c’est essentiellement dans la phase de collecte
d’informations que les indicateurs verbaux du mensonge sont produits. Ils montrent
d’autre part que le codage Contrôle de la Réalité est plus efficace pour détecter le
mensonge que la technique CBCA.
23
Sporer, S. L., & Schwandt, B. (2006). Paraverbal indicators of deception : A meta-analytic synthesis. Applied
Cognitive Psychology, 20(4), 421-446.
Sporer, S. L., & Schwandt, B. (2007). Moderators of nonverbal indicators of deception. Psychology, Public
Policy, and Law, 13(1), 1-34.
24 Vrij, A., Mann, S., Kristen, S., & Fisher, R. P. (2007). Cues to deception and ability to detect lies as a function
of police interview styles. Law and Human Behavior, 31, 599-618.
15
- aptitude des policiers à détecter le mensonge ou la vérité selon le style d’interrogatoire
adopté. Quelle que soit la méthode d’interrogatoire adoptée, la précision des policiers
dans la détection du mensonge est de 50% en moyenne, ce qui tend à prouver que la
détection du mensonge est une tâche particulièrement ardue. Le niveau de précision de
la détection du mensonge ne différerait-il pas de celui de la chance ? Que peut
l’analyse comportementale dans une telle situation ?
8. L’analyse comportementale :
8.1. Théorie
En l’absence de lien entre l’auteur et sa victime,
lorsqu’il y a défaut de mobile apparent,
en cas de manque ou d’excès d’information pour résoudre l’affaire,
l’Analyse Comportementale est un outil d’aide à l’enquête policière dans laquelle elle prend
tout son intérêt et se fixe les missions suivantes :
1. Réalisation du profil psychologique de l’auteur (à ne pas confondre avec l’expertise
psychiatrique et l’expertise psychologique réalisées en cours d’enquête par des experts auprès
des tribunaux) :
Solide connaissance du dossier (éventuellement déplacement sur les lieux) :
- scène de crime, mode opératoire
- photos et plan de la scène de crime et des environs
- auditions
- enquête de voisinage
- procès-verbaux et rapports des constatations des premiers intervenants
- rapport d’autopsie
- rapport balistique le cas échéant
- nature des blessures et traces de violence ante mortem et post mortem
- analyses biologique et toxicologique
- connaissance des lieux de la commission des faits
- connaissance du moment de la commission des faits
16
- examen victimologique
2. Réflexion sur le mode d’interrogatoire
- qui interroge ? qualités et attitude de l’enquêteur
- qui est interrogé ? âge et profil psychologique du suspect
- où se passe l’interrogatoire ? choix et organisation des lieux.25
- comment interroger ?
*mode d’interrogation : type de questions, gradation des questions, thèmes des
questions
*choix de la stratégie : laisser le suspect dans l’incertitude ou le rassurer, opter pour
une seule entrevue ou plusieurs et leur durée, faire appel à sa conscience, lui parler de
sa famille et de ses enfants, le faire réfléchir sur les conséquences de son acte et sur
son avenir, parfois minimiser la gravité des faits…
- recherche documentaire
3. Analyse comparative avec d’autres affaires similaires
4. Confrontation des hypothèses des enquêteurs et des résultats de l’analyse comportementale
à des fins d’orientation ou de réorientation de l’enquête et d’élimination des suspects
potentiels ne correspondant pas au profil psychologique de l’auteur. L’objectif étant de
s’associer (conseils et suggestions) pour parvenir à mener l’enquête à son terme, il s’agit bien
d’inventorier les différentes pistes possibles et non de prendre position.
5. Rapports avec les médias : quelles informations donner qui pourraient pousser l’auteur à se
dévoiler.
8.2. Cas pratique n°1 :
8.2.1 L’affaire Patrick Dils
En se fondant sur le livre de Patrick Dils, Je Voulais juste rentrer chez moi…, Michel Lafon
et Paul Férel, 2002, on tentera de s’interroger sur ce que l’Analyse Comportementale, si elle
25
cf. Wuyts, J.P., Psy et Flic, p.98
17
avait été développée en 1986 (au moment des faits), aurait pu apporter à la conduite de
l’enquête et à la résolution du meurtre des deux enfants de Montigny-lès-Metz.
Rappel des faits : le 29 septembre 1986, deux enfants, C. Beining et A.Beckrich, sont
retrouvés morts le long d’une voie de garage de la SNCF à Montigny-lés-Metz. Patrick Dils,
alors apprenti cuisinier, âgé de 16 ans, est interrogé car il habite la même rue que les victimes.
Le 30 avril 1987, il est inculpé d’homicide volontaire sur les deux enfants et condamné à la
réclusion criminelle à perpétuité pour meurtre le 27 janvier 1989. Son innocence sera
reconnue le 24 avril 2002, à l’issue d’un deuxième procès en appel.
Il s’agit là d’un cas classique d’intervention de l’analyse comportementale : les faits sont
d’une grande violence, il ne semble pas y avoir de mobile apparent, les indices sont nombreux
sur la scène de crime, mais ils ne désignent pas de suspect particulier.
Choix de l’enquêteur :
l’Analyse Comportementale veille au choix du meilleur enquêteur, c'est-à-dire le plus apte à
mener l’interrogatoire pour en optimiser les résultats et obtenir les aveux.
‘Conclure avec succès une enquête criminelle exige la mise en œuvre d’une procédure aux
multiples facettes, qui requiert de la part de ses acteurs un degré élevé de compétence
professionnelle.’26
L’inspecteur Varlet est décrit par Patrick Dils comme une personne ‘trapue, bien en chair, un
peu négligée (Il faut savoir que Dils est très sensible à tout ce qui touche à la propreté) ; il
transpire et fume sans arrêt, et se montre de plus en plus nerveux’. Dans le numéro de
Libération du 23/06/2001, le journaliste qui suit l’enquête le dépeint ‘rouge, rond, aboyant
plus qu’il ne parle.’
En ce qui concerne le comportement non-verbal, Elodie Dal Sasso27
rapporte, citant Michel
Saint Yves, psychologue judiciaire au service de l’analyse du comportement à la Sûreté du
Québec, et Michel Tanguay, qui a été chef du Module ‘Analyse et Profilage Criminel’ dans ce
même service au Québec, auteurs de Psychologie de l’Enquête Criminelle, les odeurs, les
gestes, les expressions du visage, les attitudes et la voix (hurlements par exemple) peuvent
être le reflet de nos pensées, même pour un enquêteur. Le non-verbal peut influencer la
manière dont le mineur va se comporter au cours de l’audition. D’autres facteurs peuvent
avoir une influence sur ces déclarations, telle la personnalité de l’enquêteur.
26
ibid., p.1 27
Dal Sasso, Elodie, Quel est l’impact du comportement non-verbal de l’inspecteur de police sur l’audition des
mineurs ? Essai empirique, mémoire en criminologie.
18
A propos de l’Inspecteur Varlet, le journaliste de Libération qui suit le procès déclare que ‘le
doute n’est pas son genre’. Patrick Dils qualifie le même inspecteur de ‘manipulateur’ : ‘je
suis dans un piège […], il ne me lâche plus […], il me guette […], il me traque […], il me
répète cent fois la même phrase : ‘tu es arrivé dans la rue, les enfants étaient vivants. Tu es
reparti, ils étaient morts.’[…] La vérité est fabriquée dans sa tête.’
Selon Stephen, CECI, Maggie, & Bruck, les préjugés de l’enquêteur, ‘ses a priori peuvent
influer significativement sur le comportement d’un enfant ou d’un adulte’.
Climat de l’enquête :
l’Analyse Comportementale veille à la qualité du climat, aux dispositions favorables à la
vérité.
Dans l’affaire Dils, comme dans toute affaire, ‘il faut trouver l’assassin. C’est évident, mais
on ne peut pas dire que cette recherche se passe dans le climat de sérénité que réclame une
justice équitable. […] Seulement voilà, les policiers sont sûrement persuadés que si j’ai menti
une fois, je peux cacher quelque chose de plus grave.’. Et cependant, l’enquêteur, questionné
par la Présidente du Tribunal de Lyon sur sa manière d’interroger, répondra qu’il souhaitait
mettre Patrick Dils à l’aise, faire du copinage. ‘Eh bien non !’, écrit Patrick Dils. ‘Son
‘Ecoute, garçon…’, balancé avec une autorité condescendante, a eu sur moi l’effet inverse.
J’ai été terrorisé.’’
Rapports humains durant l’enquête :
l’Analyse Comportementale aide au choix de la stratégie, du thème des questions, de leur type
et gradation, et à l’attitude qu’adopteront les enquêteurs.
Dans le récit que Patrick Dils fait de son interrogatoire, il utilise toute une panoplie de termes
pour qualifier le ‘rapport de forces’ (p.26), le ‘lavage de cerveau’ (p.27), la ‘méthode
sournoise, lancinante’ (p.27), le ‘flot de questions’ (p.27), questions fermées et suggestives
qui ne permettent pas le libre discours de la personne interrogée.
Selon Michel Saint Yves et Michel Tanguay, l’environnement chaleureux d’une audition
augmente la résistance à la suggestion parce qu’elle atténue le sentiment d’intimidation.
Techniques d’interrogatoire :
L’inspecteur Varlet aurait adopté d’autres tactiques, plus sournoises :
- Il se sert des témoignages des parents de Patrick Dils pour faire pression sur lui et le
faire passer aux aveux. Cette théorie de l’effet de la pression des ‘peers’ (personnes ayant
19
autorité sur) sur l’audition des mineurs est développée par Goodman, Bottoms, Schwartz-
Kenney & Rudy.28
A propos du ‘trou de dix minutes dans mon récit. Ils tiennent leur fameuse ‘faille’ ! […]
« C’est ton papa qui l’a dit. Il ment pas, ton papa ». (p.30)
A propos de l’enquête de voisinage, ‘Quand j’entends qu’elle [la mère de Patrick Dils] répond
« Non », je me dis que si elle n’a pas rapporté ma confidence à cette dame, c’est que celle-ci
n’a pas d’importance. Ma mère est une grande personne, elle sait ce qu’elle a à déclarer aux
policiers. Moi, ils ne m’ont pas demandé si j’avais vu ou entendu quelque chose. Alors je ne
dis rien.’ (p.17)
- La privation de nourriture : ‘Moi, je n’ai eu comme repas qu’un morceau de pain sec
et une portion de Vache Qui Rit. Et cela fait déjà deux jours complets que je subis cet
acharnement dans les locaux enfumés de la Police Judiciaire.’ (p.31)
- Les menaces : ‘Contraint par la loi de me laisser me reposer, il me menace une
dernière fois avant de me conduire au dépôt : - Tu as toute la nuit pour réfléchir aux dix
minutes.’ (p.32). ‘Bien que ‘présumé innocent’, je subis des insultes, des brimades, et même
des menaces de mort de la part des policiers.’
- La pression psychologique : ‘Il s’appuie sur cette table de travail, se penche vers moi,
retire la montre de son poignet, plante ses yeux dans les miens et me dit : - Ecoute, gamin. Tu
sais, dix minutes, c’est long […] Effectivement, pendant dix minutes, nous ne disons pas un
mot.’ (p.36) Ces dix minutes correspondent au ‘trou’ dans son emploi du temps.
- La minimisation de la faute : ‘Ecoute, garçon. Ce que tu as fait là, ce n’est pas
grave ! C’est un accident, tu n’as jamais eu l’intention de les tuer ! Tout le monde peut
comprendre un accident, il suffit que tu nous le dises, que tu nous l’expliques. Une fois que tu
nous auras tout raconté, tout expliqué, tu pourras retrouver tes parents, tu pourras retourner à
ton travail. Comme avant.’ Il vient de prononcer la phrase magique. […] Ben oui ! J’ai
avoué.’(p.40)
- La suggestion : ‘Assis face à lui [l’inspecteur Varlet], je répète l’histoire si bien
‘supposée’ par l’inspecteur Marchegay. […] Pour le reste, juste derrière l’inspecteur, scotché
au mur, il y a un plan des lieux du crime, de deux mètres de large sur un mètre de haut, avec
des annotations parfaitement lisibles. J’ai donc face à moi tout ce qu’il faut pour donner des
28 Goodman, G. S., Bottoms, B. L., Schwartz-Kenney, B., & Rudy, L. (1991). Children's testimony for a stressful
event: Improving children's reports. Journal of Narrative and Life History, 1, 69-99.
20
précisions : l’emplacement des wagons, des corps des petites victimes, de leurs vélos
abandonnés, les lampadaires, le trajet supposé du meurtrier…Tout est indiqué ! Je raconte leur
histoire comme je résumerais un film dont le scénario m’a été mis sous les yeux.’ (p.42)
- L’invitation à la confession : ‘Difficile ensuite, pour un jury d’Assises, de croire que
mes aveux ont été extorqués ! Les jurés auront au contraire l’impression que j’ai raconté
l’histoire des meurtres de bout en bout, sans m’arrêter, comme pour me soulager. ‘Libérer ma
conscience’, ont-ils dit.’(p.57)
Comparaison avec d’autres affaires similaires :
l’Analyse Comportementale compare avec d’autres affaires aux caractéristiques similaires.
Elle utilise depuis 2002 le SALVAC, outil de centralisation.
En ce qui concerne l’affaire Patrick Dils, c’est plutôt la méthode empirique qui était d’usage
dans la police à cette époque. Dans le cadre de l’enquête de Jean-François Abgrall sur le
meurtre de l’infirmière Aline Pérès à Brest le 14 mai 1989 par Francis Heaulme, ce dernier a
livré des indices concernant l’affaire de Montigny-lés-Metz. Une reprise minutieuse de toute
l’enquête et la révélation de la présence de Francis Heaulme dans la région au moment des
faits permirent d’innocenter Patrick Dils le 24 avril 2002. Cela est à rapprocher de la
démarche du juge Fourquet qui, en 1897, mena à l’arrestation de Joseph Vacher en envoyant
aux différents commissariats de police le signalement d’un meurtrier en série (environ 30
meurtres entre 1884 et 1897).
Réalisation du profil psychologique :
L’Analyse Comportementale réalise le profil psychologique de l’auteur présumé des faits et le
confronte avec celui des suspects potentiels.
Cette méthode de travail aurait peut-être permis d’éliminer Patrick Dils de la liste des suspects
potentiels. En effet, âgé de 16 ans, il était timide, peu loquace, fragile, immature, d’un âge
mental de 8 ans. Selon les experts, deux psychiatres et deux psychologues, pour commettre
cet acte, il fallait être fou ou avoir un mobile. Tous sont arrivés aux mêmes conclusions,
favorables à Dils : personne jeune et manipulable. L’un d’entre eux déclara même : ‘Il me
répondait dans le sens où je voulais.’
21
Conseils à l’enquête :
Par son travail en parallèle à l’enquête criminelle, et ensuite par la mise en commun et la
confrontation des hypothèses, l’Analyse Comportementale permet de pointer d’éventuelles
zones d’ombre et d’aider ainsi à réorienter l’enquête.
Ainsi, dans l’affaire de Montigny-lés-Metz, le commandant Stragier ‘se rappelle aussi la
conversation qu’il a eue avec trois vieilles dames qui s’étaient rapprochées de lui, lors de cette
reconstitution. […] « Ce n’est pas du tout lui qu’on a décrit aux policiers, il n’était pas comme
ça, le monsieur qu’on a vu avec le vélo. […] Ils nous ont dit qu’on serait convoquées plus
tard, mais ils ne nous ont jamais rappelées »’ (p.157)
En ce qui concerne l’horaire de commission des faits : ‘je ne peux pas être l’auteur des
crimes, puisque je n’étais pas là au moment où ceux-ci ont été commis. C’est d’ailleurs la
version initiale découlant de l’expertise du légiste qui établit la mort des enfants autour de 17
ou 18 heures. Cet horaire n’a été modifié que par la suite, au moment de mes ‘aveux’, pour
leur donner de l’authenticité.’(p.197)
Une autre zone d’ombre concerne le témoignage des voisins ‘bien intentionnés qui se sont
manifestés, comme par hasard, huit mois après le crime. […] Ils ont prétendu s’être souvenus
subitement d’avoir entendu des pleurs d’enfants vers 18h45 le soir du drame. […] Ils étaient
censés être morts aux alentours de 18 heures. […] Pourquoi le médecin légiste aurait-il été
incapable de déterminer précisément l’heure de la mort ? Mieux, la journaliste Karen Aboab
démontre qu’il est impossible, depuis la maison des témoins, d’entendre des voix provenant
du talus, même des voix d’adultes.’ (p.156)
A ce moment aussi, les analystes psychologues auraient pris connaissance du rapport de Jean-
François Abgrall au sujet de Francis Heaulme. Ils auraient pu aussi faire remarquer les
incohérences au moment de la reconstitution des faits, simplement en observant Patrick Dils,
que le commandant Stragier décrit comme ‘un gamin manipulé, en terrain inconnu, allant à
droite ou à gauche, selon le bon vouloir des inspecteurs : un pantin !’
Peut-être se seraient-ils aussi interrogés sur la validité des aveux réitérés de Patrick Dils lors
de la première comparution chez le juge d’instruction en présence de l’inspecteur Varlet.
‘Cette première entrevue a pour but ce que l’on appelle le PV de première comparution : un
interrogatoire en principe bref, généralement en tête à tête avec le juge d’instruction, au cours
duquel on confirme ou infirme les aveux prononcés devant les policiers’. (p.55). A cette
occasion, il n’a plus une personne contre lui, mais deux, cela le terrifie. Il déclare : ‘la juge
enchaîne ses demandes à vive allure, et lorsqu’elle relâche le rythme, c’est Varlet qui prend la
relève et me pose de nouvelles questions. Il s’agit plus d’incitations que de vraies questions.
22
[…] A ce moment-là, je ne vois même pas la différence entre répondre ‘oui’ à un fait affirmé
par quelqu’un d’autre et faire cette affirmation soi-même. […] Je suis un gosse.’ (pp.56-57)
On peut ajouter que, dans un tel climat de pression psychologique, d’autres personnes auraient
reconnu n’importe quoi. A ce sujet, on peut faire référence aux déclarations de Dahina Le
Guennan, victime de Fourniret : ‘j’aurais dit oui à tout, je voulais seulement sortir de ce
bureau.’ Elle était alors seule face au juge d’instruction, avec Fourniret à sa droite,
accompagné, lui, de son avocat, qui disait qu’elle était consentante lors des faits, car elle ne
s’était pas débattue, alors qu’elle était attachée !
Rapport aux médias :
l’Analyse Comportementale ‘gère’ les relations avec les médias. Que dire, que réserver pour
éviter la pression et pour obtenir de nouveaux indices de l’auteur ?
Dans des affaires criminelles retentissantes, la famille, le public, les médias jouent maintenant
un très grand rôle. On pourrait même parler de pression exercée sur les enquêteurs : ‘Mais
tout le monde n’a qu’une envie, je suppose après huit mois d’enquête et deux échecs : faire
‘vite’. Il est grand temps que cette affaire soit bouclée. La population, les médias, les familles
des victimes n’en peuvent plus d’attendre.’ (p.58)
Les journalistes mènent parfois leur propre enquête parallèle. Dans l’affaire Patrick Dils,
Maître Florand, son avocat, est curieux de rencontrer Dominique Rizet, grand reporter au
Figaro Magazine, qui lui a téléphoné la veille. Il vient le voir de la part d’un gendarme de la
section de recherche de Rennes, Jean-François Abgrall, un ami qui travaille sur les meurtres
de Francis Heaulme. Abgrall a appelé le journaliste parce qu’il venait d’entrer en possession
du courrier que Maître Florand lui avait adressé plusieurs semaines auparavant. En réponse à
ce courrier, il a immédiatement envoyé un rapport à ses supérieurs hiérarchiques, les
informant des déclarations troublantes de Heaulme. Le journaliste vient lui demander de
récupérer ce rapport auprès de la section de recherche de Rennes. Cette nouvelle va paraître
dans la presse le 31 janvier 1998 et de nombreux journalistes prendront le relais pour faire
éclater la vérité, entre autres Julien Courbet sur TF1 et Karen Aboab pour l’émission Sans
Aucun Doute. Il est évident que, même si Francis Heaulme avait été à l’origine des faits, étant
désormais en prison, il n’aurait pu se manifester. Il est cependant important de remarquer que
tout ce travail de comparaison et de mise en relation effectué par les journalistes aurait été en
Analyse Comportementale effectué par l’analyste psychologue. Idem pour les témoignages
capitaux des deux pêcheurs, recueillis 15 ans après les meurtres du fait de la médiatisation de
l’affaire.
23
8.2.2. Discussion : l’analyse comportementale permet-elle d’éviter
l’erreur judiciaire ? 29
Quand la vérité judiciaire n’est pas conforme à la vérité tout court, ce sont toujours les mêmes
ingrédients qui sont à l’origine des erreurs judiciaires. En général, dans des faits divers
affreux qui marquent l’opinion publique.
- on ne trouve pas immédiatement,
- l’opinion publique met la pression,
- les victimes sont désespérées,
- le suspect commet parfois de petits mensonges,
- un magistrat peu expérimenté assure l’instruction.
Petit à petit, il y a glissement et on bascule dans l’erreur judiciaire.
Portrait-type de l’accusé à tort :
- personnage faible
- profil pas très engageant
- suspect idéal mais pas irréprochable, il a le profil de l’emploi
- manque de chance impressionnant
ex. : Patrick Dils, un peu ‘benêt’, il ment sur les détails, il a un profil qui fait que ça ne passe
pas auprès du juge pendant l’enquête préliminaire.
Erreur judiciaire même si le raisonnement est logique, les conclusions sont erronées parce
qu’elles reposent sur des bases fausses (enquête)
Maintenant que Patrick Dils a été innocenté et remis en liberté après quinze années de
détention, que l’erreur judiciaire a été reconnue, il est aisé de penser que l’analyse
comportementale aurait permis d’éviter un tel gâchis.
En tout état de cause, si, au moment de l’affaire, elle avait pu suppléer l’analyse criminelle, y
aurait-il eu nécessité à
- réexaminer tout ce qui n’était pas clair, à reprendre les éléments qui n’avaient pas été
creusés
29
D’après les propos tenus par Me Florand sur le site prisons.free.fr/erreursjudiciaires.htm
24
- recourir à des détectives privés et à des reconstitutions privées
- présumer le prévenu innocent
- être convaincant et convaincu
- à démontrer, démontrer encore et démontrer toujours.
- en dernier recours, à faire usage de la médiatisation. C’est l’arme la plus importante
pour clamer l’innocence d’un prévenu.
8.3. Cas pratique n°2 : Jack l’Eventreur
8.3.1. Présentation :
On se fondera cette fois sur le livre de Patricia Cornwell, Jack l’Eventreur, Affaire Classée,
Editions des Deux Terres, 2003.
Un autre exemple d’application de l’analyse comportementale est le profil psychologique que
Patricia Cornwell a réalisé de Jack l’Eventreur, plus d’un siècle après les faits (1888).
Scotland Yard avait été fondée en 1829 par Sir Robert Peel, et la nomination des premiers
véritables détectives du monde anglophone n’était intervenue qu’en 1841 ; quand au bureau
des empreintes, il attendra 1901 avant de voir le jour.
C’est l’inspecteur Frederick Abberline qui sera chargé entre 1888 et 1891 de l’enquête sur
cinq meurtres commis par celui qui signait son courrier à la police du 25 septembre 1888
‘Jack the Ripper’. En fait, c’est l’auteur de 11 agressions sur des prostituées du quartier de
Whitechapel qui était recherché. Abberline travailla avec les ‘moyens’ de l’époque :
l’anthropométrie, qui identifiait les suspects selon certains traits physiques. Cette science
‘n’avait pas seulement des défauts, elle était dangereuse. […] Elle incitait la police à accepter
comme des vérités, inconsciemment ou pas, les superstitions d’une autre pseudo-science : la
physiognomonie, qui affirme que la criminalité, la moralité et l’intelligence se reflètent dans
le corps et le visage d’une personne.’30
160 personnes furent suspectées à l’époque, de Lewis Carroll, auteur d’Alice au Pays des
Merveilles, jusqu’à William Richard Sickert, célèbre peintre impressionniste de l’époque. La
police reçut beaucoup de lettres d’individus prétendant être Jack l’Eventreur. Deux plus
particulièrement (1888 et 1896), qui donnaient des détails sur les meurtres, retinrent leur
attention. Le mode opératoire, la façon dont les victimes étaient mutilées à l’arme blanche,
30
Cornwell, Patricia, Jack l’Eventreur : Affaire Classée, Editions des Deux Terres, 2003, p.214
25
couteau ou scalpel, orientèrent les recherches vers des suspects capables d’utiliser ce type
d’arme : aptitude professionnelle ou geste médical. ‘A la fin des années 1880, le médecin de
division se rendait également sur les lieux où des personnes étaient mortes, et il recevait une
livre et un shilling par cas ; s’il effectuait l’autopsie, il touchait 2 livres et 2 shillings. Mais nul
ne s’attendait à ce qu’il connaisse l’usage du microscope, ni les nuances entre les différents
types de blessures ou de poisons, ou tout ce que peut révéler un corps après la mort.’31
Personne pourtant ne fut inculpé. En 1892, le dossier fut classé, faute d’éléments suffisants.
A la fin de sa vie, Frederick Abberline avoua – tout en gardant le secret – que lui et ses
supérieurs avaient connaissance de certains faits et que Jack l’Eventreur n’était pas un
boucher, ni un juif, ni même un capitaine étranger, et qu’il faudrait, non pas le chercher en bas
de l’échelle sociale, mais bien plus haut. Son journal s’interrompt en octobre 1887 sur une
affaire qu’il qualifie de ‘combustion spontanée’ et ne reprend qu’en mars 1891 avec une
affaire de trafic de bébés. ‘Apparemment, Abberline a choisi de ne pas y inclure les
renseignements dont il savait qu’ils seraient les plus recherchés et les plus controversés de sa
carrière d’enquêteur.’32
Est-ce pour cette raison que Patricia Cornwell, en visite à Scotland Yard en mai 2001, décida
de concentrer toute son attention et son travail de recherche sur Walter Sickert, qui réalisa de
nombreux tableaux de nus, dont ‘les nus de Camden Town’, ‘le meurtre de Camden Town’ et
‘la Chambre de Jack l’Eventreur’. Tous ces tableaux attestent de sa fascination pour le monde
sombre des prostituées de l’East End et son obsession pour les crimes célèbres.
Patricia Cornwell n’est pas un écrivain ordinaire, à plus d’un titre. Auteur de nombreux
romans policiers célèbres, elle délaisse cette fois Kay Scarpetta, son alter ego – médecin
légiste expert – et entreprend elle-même le récit de son enquête minutieuse qui tend à prouver
que Jack l’Eventreur et Sickert ne font qu’un, donnant ainsi plus de crédibilité à son ouvrage.
Dans ce récit, elle met en œuvre les talents et les connaissances accumulées au cours de sa
carrière : - journaliste chargée des affaires criminelles au Charlotte Observer.
- rédacteur technique à l’Institut Médico-légal de Richmond pendant 6 ans.
Elle assiste ainsi à de nombreuses autopsies.
- formation intensive à l’Académie du FBI à Quantico en Virginie.
Pour l’inspecteur J. Grieve de Scotland Yard, spécialiste de Jack l’Eventreur, qui l’intéressa
au sujet, l’enquête de Patricia Cornwell a fait progresser vers la vérité, et nul doute qu’à
31
ibid., p.217 32
ibid., p.232
26
l’époque il aurait fait surveiller Sickert, ses ateliers de l’East End, et il aurait mené quelques
perquisitions dans ses divers domiciles.
Patricia Cornwell a fait le meilleur usage des techniques scientifiques modernes et s’est
entourée pour cela d’experts mondialement réputés. Elle a notamment travaillé avec le Dr
Paul Ferrara pour la recherche d’ADN, et Peter et Sally Bower, spécialistes mondiaux des
papiers et documents anciens.
8.3.2. : résultats de l’enquête scientifique.
- l’ADN : sur deux lettres de Jack l’Eventreur et deux lettres de Walter Sickert, une séquence
d’ADN mitochondrial d’un unique donneur a été retrouvée, éliminant 99% de la population.33
Aucune comparaison n’est possible avec l’ADN de Walter Sickert, puisque ce dernier fut
incinéré à son décès, chose peu courante à l’époque : ‘Notre meilleure preuve est partie en
fumée.’34
- les dessins : les dessins trouvés dans le livre d’or de l’hôtel Lizard, au cap Lizard en
Cornouailles, sont des taches d’encre transformées en personnages comme dans les lettres de
Jack l’Eventreur. Il a été prouvé que Walter Sickert, qui fréquentait cet établissement en
compagnie de ses amis H. James et G. Moore, en était l’auteur.
- les lettres : *on trouve sur certaines lettres de Jack l’Eventreur quelques coups de pinceau
qui se sont révélés être de l’eau forte – que Walter Sickert lui-même utilisait dans son atelier -
et non du sang séché comme on l’avait longtemps pensé.
*deux lettres de Jack l’Eventreur et de Walter Sickert proviennent du même
bloc de papier à lettres de 24 feuillets de marque Gurney Ivory Laid. Une similitude dans le
filigrane, ‘A. Pirie & Sons’, a aussi été relevée. ‘Concernant les meurtres de Jack l’Eventreur,
les preuves scientifiques les plus convaincantes ne proviennent pas de l’ADN, mais de la
comparaison entre les papiers.’35
- la malformation : on sait que Walter Sickert avait été opéré trois fois dans son enfance
d’une malformation du pénis (fistule). Cette malformation, qui pouvait avoir une cause
génétique du côté de sa grand-mère maternelle, était vécue comme un stigmate de la faute de
cette dernière. Cela pourrait expliquer la haine que Sickert vouait aux femmes, ainsi que la
violence des meurtres, selon Patricia Cornwell
33
ibid. p.266 34
ibid. p.270 35
ibid. p.272
27
- les tableaux : outre ‘les Nus de Camden Town’ et ‘le Meurtre de Camden Town’, Walter
Sickert a peint ‘la Chambre de Jack l’Eventreur’, qui était sise à Camden Town, au numéro 6
de Mornington Crescent, dont il avait loué les deux derniers étages en 1906.
Tout ceci est en accord avec l’analyse comportementale, qui :
- se fonde sur le dossier
- bénéficie des progrès techniques
- jouit d’une vue d’ensemble et d’une hauteur de point de vue
- requiert des connaissances documentaires solides et diversifiées sur le contexte
- suggère de nouvelles expertises
- dresse le profil psychologique.
8.3.3 : profil psychologique.
- Jack l’Eventreur (Jack : marin, homme en général / The Ripper : celui qui déchire, qui
arrache). Il concrétisa ses fantasmes pour la première fois le 6 août 1888. Il s’agit là du début
de son activité meurtrière, avec une progression à la fois dans l’activité et l’horreur : ‘J’aime
ce travail, encore du sang’, ‘il m’en faut plus’, écrivait-il à la police.
C’est un individu dérangé et diabolique mu par la mégalomanie, la haine des femmes et un
besoin sexuel irrépressible de tuer et de mutiler. L’inspecteur Abberline le décrit comme un
monstre, un fantôme qui ne laissait jamais ‘le moindre indice’.
Il est aussi intéressant de noter que toutes les victimes de Jack l’Eventreur étaient ou maigres
ou grosses, et âgées d’environ quarante ans.
- Walter Sickert l’homme : il possédait une personnalité multiple, dissociée, sur le modèle de
Dr Jekyll et Mr Hyde. ‘Une partie de lui-même donnait des leçons de peinture à Winston
Churchill, alors qu’une autre partie écrivait à la presse en 1937 pour vanter les talents
artistiques d’Adolf Hitler. […]
Une partie de Sickert faisait croire à ses amis qu’il était un homme à femmes, alors qu’une
autre partie de lui-même les appelait des ‘chiennes’, ou des ‘connes’ dans les lettres de
l’Eventreur, et les rejetait comme des êtres inférieurs, les assassinait, les mutilait, et continuait
à les détruire et à les violer dans ses œuvres.’36
C’était aussi un écrivain obsessionnel, qui prenait plaisir à convaincre, manipuler,
impressionner les gens avec des mots, car il avait besoin d’un public. Il aimait se maquiller et
36
ibid. pp.544-545
28
se déguiser, utilisant un large registre de voix. Il lui arrivait même de se déguiser en chef,
attestant ainsi de ses talents de cuisinier et de son art à manier le couteau. ‘Le Dr Robins a
remarqué de nombreux détails dans le livre d’or […] ; le vandale dit qu’il est le ‘Docteur
Eventreur’ et qu’il a ‘cuisiné un bon plat de viande (ou de chair) en Italie. Scoop ! Scoop !??’’
D’après ce même Dr. Robins, ‘l’Eventreur a tué une femme en Italie et cuisiné sa chair pour
faire un plat délicieux. Plusieurs lettres de l’Eventreur font allusion à la préparation culinaire
des organes de ses victimes. Certains serial killers se livrent au cannibalisme. Sickert peut-
être aussi.’37
On le décrivait également comme un homme doué d’une mémoire prodigieuse, intelligent,
fascinant et rusé.
Il lui arrivait de disparaître pendant des jours ou des semaines sans donner de nouvelles. A ce
sujet, Marjorie Lilly, une artiste qui partagea un temps son atelier et son logement, déclarait :
‘une idée le tourmentait, […] il battait le pavé jusqu’à l’aube.’
- Walter Sickert l’artiste : son talent s’est révélé très précocement. Des croquis réalisés quand
il était enfant représentent déjà des femmes kidnappées, attachées ou poignardées. Toute sa
vie, il a nourri une intense curiosité pour tout ce qui était susceptible d’attirer son œil d’artiste,
ou ‘d’apparaître sur son radar détecteur de violence’. Il aimait peindre des scènes de meurtre,
empreintes de morbidité, de haine des femmes. La plupart d’entre elles dans ses tableaux sont
étendues, nues ; elles semblent mutilées ou mortes. Leur ressemblance avec les photos des
victimes de Jack l’Eventreur prises à la morgue ou sur le lieu des crimes est fascinante. Quand
il les peignait, il se déguisait : ‘l’artiste et amie de Sickert, Marjorie Lilly, se souvenait qu’il
possédait un foulard rouge favori. Tandis qu’il travaillait sur ses tableaux du ‘Meurtre de
Camden Town’ et qu’il ‘reconstituait la scène, il jouait le rôle d’un voyou en nouant le foulard
autour de son cou, en enfonçant une casquette sur ses yeux, et en allumant sa lanterne’’.38
Il
est surprenant de remarquer la similitude avec Jack l’Eventreur : ‘quand l’Eventreur tranchait
la gorge d’une victime, il ne coupait pas le mouchoir, et dans le cas de Rose Mylett, un
mouchoir plié était posé sur son cou. Visiblement, les foulards ou les écharpes symbolisaient
quelque chose pour le meurtrier.’39
Walter Sickert a occupé dans l’East End quatre ateliers dont l’emplacement et l’utilisation
étaient inconnus d’un grand nombre de ses proches. Deux sont situés au 6 Mornington
Crescent, et deux autres aux numéros 18 et 27 de Fitzgerald Street. A cet égard, dans ses
37
ibid. p.432 38
ibid. p.455 39
ibid. p.455
29
mémoires, Marjorie Lilly note que Sickert a un goût pour les sous-sols sombres, ‘immenses,
inquiétants, avec des passages sinueux et un grand donjon noir, qui se succèdent comme dans
une histoire d’horreur d’Edgar Allan Poe.’40
Enfin, Sickert lui-même raconte à l’écrivain Osbert Sitwell une anecdote qui s’est déroulée à
Paris : il a aidé Whistler à lacérer ses tableaux ; ‘le maître était souvent très mécontent de son
travail, et quand tout le reste avait échoué, il détruisait son art. Le feu était une méthode.
Découper ses tableaux en était une autre.’ ‘Sickert avait l’habitude de lacérer ses travaux
quand il décidait de détruire son travail. Un jour, il demanda à sa femme, Ellen, d’aller lui
acheter deux couteaux tranchants et incurvés, comme ceux, précisa-t-il, dont elle se servait
pour jardiner.’41
8.3.4 Discussion :
L’habileté de Patricia Cornwell, la romancière, pourrait laisser à penser que c’est pure fiction
si les personnages de Jack l’Eventreur, Walter Sickert l’homme et Walter Sickert l’artiste se
confondent autant. Cependant, sa solide expérience de terrain, le travail minutieux de
recherche qu’elle a mené, les experts scientifiques et les technologies modernes
d’investigation auxquels elle a eu recours, ne laissent planer aucun doute sur la qualité et la
réalité de ses conclusions. D’ailleurs, plusieurs spécialistes en enquêtes policières, et
l’inspecteur John Grieve plus particulièrement, ont unanimement salué la publication de
l’ouvrage.
Toutefois, une réserve d’importance est à émettre. Dans les principes fondamentaux de
l’analyse comportementale, l’analyste dresse le profil psychologique de l’auteur qui est
ensuite confronté aux suspects potentiels, afin d’éliminer ceux qui n’y correspondent pas.
Jamais il ne désigne le coupable. Dans le cas qui nous occupe, Patricia Cornwell est partie
d’un des 160 suspects et en a dressé le portrait à charge afin de démontrer sa culpabilité.
Aurait-il pu en être autrement dans la mesure où l’affaire date de plus d’un siècle ? Ne s’agit-
il pas d’un cas de résolution d’une affaire ancienne, qui peut faire aussi partie du champ
d’application de l’analyse comportementale ?
40
ibid. p. 321 41
ibid. p.383
30
9. Intérêts et limites du profilage :
A - Intérêts du profilage criminel pour les services d’enquête
o centralise et analyse les informations recueillies (étude rigoureuse des faits)
o rapproche entre elles les affaires élucidées ou non
o oriente et cible les recherches vers des types de personnalité
o intervient lorsque tous les autres moyens ont été épuisés
- Intérêts du profilage psychologique pour les services d’enquête
o aide quand plusieurs suspects sont identifiés
o aide à trouver la meilleure stratégie pour les auditions en fonction de la
personnalité de chacun et avec un contour psychologique :
• biographie familiale
• antécédents judiciaires
• antécédents psychiatriques
• habitudes
• comportements
• contenu du langage et manière de s’exprimer
• examen psychiatrique : état au moment des faits et au moment de
l’interrogatoire, afin d’en adapter la stratégie
Le ‘profilage’ nous est arrivé des Etats-Unis avec vingt ans de retard, où il semble
actuellement marquer le pas. Malgré une certaine méfiance (liée entre autres à l’image
du profiling dans les médias) vis-à-vis de tout ce qui nous vient d’Outre Atlantique et
en dépit de profondes différences culturelles, l’analyse comportementale se développe
peu à peu en France et en Europe ; la politique de la nécessité est partout présente,
mais les nécessités sont différentes dans le monde, l’espace et le temps. Désormais,
impossible d’envisager un retour en arrière, car l’évolution de nos sociétés et de nos
modes de vie génère de nouveaux profils de criminels, tant du point de vue
psychologique que du point de vue géographique. Il est donc important que chaque
pays ‘façonne’ l’analyse comportementale en accord avec sa culture, et dans le même
temps, mette à la disposition du plus grand nombre d’autorités compétentes, grâce à
l’outil informatique, ses questionnements, ses outils et ses conclusions, afin que ‘de
tels crimes ne puissent plus être perpétrés et que justice soit faite.’.
31
B - Limites du profilage selon Sylviane Spitzer, psychologue criminologue, présidente de
l’Association des ‘Profilers’ et Analystes Criminels42
:
° profil flou
° pas de procédure fixe ni standardisée
° pas de contre-expertise possible (revenir sur…)
° pas de travail collégial
° pas de formation. En France, ce sont des psychologues et psychiatres experts
au pénal qui interviennent
° encore trop de crimes et de disparitions non élucidées
° ceux qui se sont fait prendre sont-ils les moins intelligents ?
- Limites du profilage selon Stéphane Bourgoin : ‘Le profil psychologique n’est pas
une science exacte. Un détective doit garder à l’esprit qu’un suspect qui colle au profil
n’est pas forcément le coupable.’
- Limites selon Thierry Toutin : ‘…mais le détective ne doit-il pas garder à l’esprit
qu’un suspect qui ne colle pas au profil peut très bien être le coupable ?’
- Limites de l’Analyse Comportementale :
° s’applique principalement aux crimes violents attestant parfois d’un trouble grave
de la personnalité. Dans des cas plus simples, si l’enquête est bien menée, le
profilage n’est pas d’un grand recours. D’ailleurs, ces affaires parfois laissent peu
d’espace à l’analyse psychologique.
° n’identifie pas l’auteur, n’offre que des probabilités sur celui le plus à même de
commettre un tel acte. Il s’agit d’une science non exacte et donc faillible, qui aide
davantage à orienter ou recentrer une enquête en cours.
° est fondée sur l’efficacité et la conscience professionnelle de l’enquêteur qui
alimente la banque de données, sur l’appel au spécialiste avec la crainte que
l’enquête leur échappe, d’où une certaine fragilité possible.
42
On consultera à ce sujet son site Internet profiling.free.fr
32
° dépend des impératifs de secours qui peuvent modifier la scène de crime et ainsi
modifier le profil du criminel. D’autres modifications peuvent survenir par
malveillance aussi.
° nécessite le plus grand nombre d’éléments, de faits ou de détails, car plus il y a
de renseignements, plus il est facile de dresser un profil.
° est tributaire de la qualité du spécialiste qui dresse le portrait et du partenariat
entre les professionnels d’horizons différents.
° est connotée négativement par l’utilisation du terme ‘profilage’, auquel il
vaudrait mieux substituer celui ‘d’examen technique spécialisé’.
° repose sur une méthode déductive qui s’appuie sur l’interprétation des preuves
légales, mais aussi en partie sur une méthode inductive qui s’appuie sur des
estimations, des prédictions, des généralisations.
10. Discussion :
Le cas de Jack l’Eventreur s’apparente davantage à une affaire d’école et, de par la date de
commission des faits, appartient maintenant à l’Histoire. En revanche, l’affaire Dils semble
plus propice à la discussion parce que plus actuelle.
Etat des lieux au moment du drame :
Quand démarre l’enquête de police sur le meurtre de A. Beckrich et C. Bening en septembre
1986, il n’existe pas de fichier d’empreintes génétiques (celui-ci sera créé dans les années
2000), pas de fichier de renseignements centralisé (le SALVAC verra le jour en 2002) ; seul le
RAID à cette époque (depuis 1985) peut fournir une aide logistique.
L’analyse comportementale n’a pas encore fait son apparition en France ; aux USA, associée
à un système spécifique de traitement de l’information concernant les meurtres en série
particulièrement violents ou à caractère sexuel, ou les deux réunis, elle est en développement
depuis les années 1970.
33
Etat des lieux aujourd’hui :
Le recours à l’analyse comportementale n’est considéré comme utile que dans des cas
complexes avec un mode opératoire particulier. On peut pourtant se demander si elle n’aurait
pas aidé, dans le crime de Montigny-lés-Metz, à répondre à la question ‘qui a pu commettre
un tel crime ?’ après que deux autres suspects, qui avaient eux-mêmes avoué le meurtre des
enfants, eurent été appréhendés puis mis hors de cause.
En effet, l’intervention d’analystes psychologues aurait permis de saisir un ensemble
d’éléments irrationnels et de déterminer la nature de l’acte : crime crapuleux, passionnel,
psychotique, etc. Ceux-ci sont plus sensibles aux éléments relevant de sentiments tels que la
haine, la rage, la peur, la passion, l’amour…, tous indices qui ne constituent pas de preuves au
sens juridique mais aident, par des évaluations (temps passé sur la scène de crime, degré
d’organisation de l’auteur, mobile possible, préparation du crime…), à orienter sur le profil
psychologique, ou au moins à éliminer des suspects potentiels.
Et même si cette aide avait été en place dès les années 85, tous les policiers et gendarmes
français traitant au quotidien d’affaires criminelles n’étaient pas, et ne sont pas encore,
familiers de cet outil, faute de formation suffisante. Un officier de police judiciaire sur le
terrain a-t-il le ‘loisir’, le temps et le réflexe de se mettre à l’écoute de soi, de ses émotions, de
son ressenti sur la scène de crime ? Cela a beau correspondre à sa sensibilité, l’urgence de sa
mission, l’importance de la scène de crime et le recueil des indices lui en laissent-ils
l’opportunité ? D’où la présence possible d’un analyste psychologue, ou d’une personne
spécialement formée pour rapporter tous ces indices immatériels que sont les impressions, les
odeurs, les sensations…
Il n’est peut-être pas opportun de pratiquer l’analyse comportementale pour toutes les
infractions complexes avec une certaine sophistication de la scène de crime ou du mode
opératoire ; cependant,
- développer le profilage psychologique et le profilage géographique pourra dans
l’avenir être gage d’efficacité car les meurtriers évoluent psychologiquement et ne
connaissent plus de frontières.
- Par ailleurs, ne serait-il pas judicieux et profitable que les personnels chargés de
l’enquête – sans avoir la prétention de les transformer tous en analystes psychologues -
reçoivent une formation adaptée à ces situations nouvelles et qu’ils aient accès à
certaines pratiques et certains outils tels que :
34
- constatations objectives (scène de crime, interrogatoire…),
- supports et études théoriques en psychiatrie, psychologie et sciences comportementales,
- éléments de médecine légale et PTS (Police Technique et Scientifique) ?
En tout état de cause, il faut garder à l’esprit que l’objectif essentiel d’une enquête de police
reste bien, au-delà des techniques utilisées, des compétences et du choix des titres des
enquêteurs - ‘policiers-psychologues ou psychologues-policiers’ - la résolution d’une affaire
criminelle simple ou complexe, afin de mettre un terme aux agissements d’un meurtrier et
surtout d’éviter qu’il fasse de nouvelles victimes. Ceci est un principe fondamental qui ne
variera pas dans le temps, mais qu’il faudra adapter aux situations nouvelles que nos sociétés
modernes produiront car ‘le mal, lui, est artiste, créateur, intelligent. Il a mille facettes. Je suis
persuadé que c’est lui qui régit le monde.’, pour reprendre les termes de l’écrivain et
journaliste Martin Monestier.
35
GLOSSAIRE
:
Analyse criminelle : concerne les suggestions et recommandations dans l’enquête:
Analyse victimologique : victime vivante
Autopsie psychologique : victime décédée
Criminel psychopathe
antécédents pénaux
agressivité fréquente
relation extravertie
motivation rationnelle
arme souvent préparée
crime organisé
violence variable
victime connue ou non
complices fréquents
suicide faisant suite rare
se soustrait à la justice
Criminel psychotique
antécédents psychiatriques
agressivité rare
relation introvertie
motivation délirante
arme souvent improvisée
crime désorganisé
violence souvent importante
victime connue, proche
agit seul
suicide faisant suite fréquent
se dénonce à la justice et se laisse arrêter (Benezech, Michel, 1994)
Emotions contre-transférentielles : par exemple du patient vers le psychologue ou le
psychanalyste
Emotions transférentielles : par exemple de l’élève vers le maître
Empreintes digitales ou papillaires : trois zones marginale, centrale, basale
36
La convergence des trois zones crée le dessin du delta fermé/noir ou ouvert/blanc
12 points de convergence exigés par le ministère de l’intérieur (pour la province)
17 points de convergence exigés par la Préfecture de Police de Paris
Même valeur identificatrice, la différence tient dans la technique de comptage
Vocabulaire : îlot ; arrêt de ligne, bifurcation, point, ligne de crête, sillon…
Homicide : atteinte portée à la vie humaine
Homicide volontaire : intentionnelle : meurtre, assassinat si préméditation
Homicide involontaire, non intentionnel : par maladresse, accident, inattention, ou
imprudence
NCAVC : National Center for the Analysis of Violent Crime
BAU : Behavioral Analysis Unit
VICAP : Violent Criminal Apprehension Program
CASMIRC : Child Abduction Serial Murder Investigative Resources Center
Profilage : concerne l’aspect psychologique, psychiatrique, ou psychanalytique dans la
recherche de l’auteur des faits
Risque : trois niveaux, bas, moyen, haut ; il s’agit du risque pris par le criminel pour agresser
sa victime
Victime à bas risque : dont la disparition n’est pas remarquée tout de suite, incapable
de se défendre, vulnérable.
SALVAC : Système d'analyse des liens de la violence associée aux crimes
VICLAS : Violent Crime Linkage Analysis Systems
37
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