LA NOUVELLE

REVUE Française

ANDRÉ DHÔTEL

Poèmes

CAHIER 10 SANS TITRE

Ah comment ne rien fairese demandait le philosophealors que le lièvre fouregardait la roséesur la pointe d'une fétuque.

Comment une goutte d'eaufigure le monde entieren son idéale sphère

que pénètre l'éclat du rêve.C'est le problème majeurà ne jamais résoudre,disait le philosophe.

Saurons-nous jamais si la voiede l'universel destin

peut se révéler par un gesteinutile et charmant

d'une fille qui passeet vous prie de vous taire?

Mais quelle honte j'ai travailléau lieu d'aimer la vie.

L'orgue de barbarielui-même n'en pouvait plusd'avoir moulu la Walkyrie.

CHANTI

Les devoirs de l'été ne sont très gais jamaisMoi, Jean, cancre charmant, je vous raconteraiEn vers alexandrins tant soit peu détraqués

Le professeur dicta « Chaque jour d'aventureDécrivez une merveille de la nature »

Des merveilles hélas, nulle part je n'en voisMon amie Rose a dit « Regarde devant toi

Toi devant moi tu crois donc être une merveille?

Tu m'insultes, dit Rose. Où trouver ma pareille?Non tu n'es pas malin » Et je restai sans voix.

CHANT II

Sans voix et sans idée, je vais sur le marché« Monsieur le brocanteur, dans vos papiers pêchez-moi, s'il vous plaît des devoirs d'occasion–J'ai mieux, dit-il, un livre sur les chats, les lionsLes grenouilles, les ours, mais encore un traitéPour savoir leur parler et puis les écouter.Il suffit en cela d'un peu de politesseEt de flatter d'abord ceux à qui tu t'adresses.

CHANT III

Ainsi pourvu je pris un chemin campagnard.Une grenouille coassait dans une mare.

Sur mon traité je lis « Princesse on pourrait croireQue vous parlez fort bien le grec ou le chinois »Elle me crie «Je parle mieux le français que toiSais-tu que ce matin ma sœur en grand déboireChassée par un gamin sur un arbre sautaPuis dans un beau nuage où seule elle restaPetite sœur là-haut faites crever la pluieSur ce jeune benêt. C'est moi qui vous en prie»Et jusqu'aux os je fus trempé, jusqu'aux oreillesIdiot devant la nature et ses merveilles.

Tout mouillé aussitôt j'ai rencontré un loir« Tais-toi » murmura-t-il sans le moindre bonsoir

«Je m'exerce à dormir pour le prochain automneMais, Seigneur, qui peut faire mes devoirs, personne?

Il répond qu'un devoir ça se fait en dormant« Tu regardes une goutte d'eau juste avantQuand tu t'éveilles tout est écrit dans ton coeur»

Alors donnez-moi vite un exemple, Seigneur»« Voici. Goutte d'eau vermeille

Tu reflètes le monde entierLe soleil, la lune, l'oseilleEt l'oiseau d'or du cerisier

Mon garçon, si tu te rendorsTu pourras chercher l'oiseau d'or. »

Dormant debout je vis un loriot doréSe poser sur le bois d'un grand cerf égaré.« Nommez-moi Majesté, dit le cerf. L'autre jourCerné par une chasse, il le faut bien, je coursJusqu'à la ville où j'entre dans une mercerie.Mes cors ont accroché des rubans. Je sortis.Des soldats passaient dans la rue. Je les suis.À cause des rubans je fus cher aux biffins

CHANT IV

CHANT V

La Nouvelle Revue Française

Rutger Kopland (Goor, 1934) est l'auteur de neuf recueils de poèmes dontune anthologie (Songer à partir) a paru en 1986 aux éditions Gallimard,dans une traduction de Paul Gellings.

De Paul Gellings, nous avons publié en mai dernier (n° 472) une suitede Poèmes traduits par l'auteur.

Pour la constitution de cet ensemble, nous remercions de leur aimable

autorisation les éditions De Arbeiderspers et Em. Querido, à Zwolle.

La vie des Lettres

Dans la vitrine d'une boulangerie-pâtisserie de Vanves, non loin du beauLycée Michelet, on peut admirer le diplôme (Palme d'Or) décerné le 27 octobre1989 à M. Frank Lefèvre, en tant que Boulanger le plus sympa. Ce diplômeest accompagné d'un poème, que voici

Il fait marcher sa femme à la baguette,Chez lui c'est bizarre, il vit avec des bâtards.

Il ya même des religieuses qui attendent les clients.Il est toujours dans le pétrin malgré l'argent qu'il gagneEt fait Paris-Brest en un éclair.

Le pompon

Relevé par un lecteur d'Annemasse, ce passage d'un article paru dans lecatalogue du dernier salon du Livre de Genève (La formation, virtuositéexigeante)

« La formation devrait sans aucun doute répondre aux besoins de touscomme l'exploit de Guillaume Tell qui enthousiasme ses proches par uneaudace incomparable ou comme Chopin qui amène au délire les spectateursaprès l'exécution d'une œuvre musicale savante. La formation exerce, à vraidire, une virtuosité différente, exige une autre audace. Sa vocation réside danssa durée, elle prépare la personne à répondre aux questions qui surgirontdemain, elle entend, comme une confidente, les interrogations que l'on portelongtemps en soi, les hésitations qui agissent comme une note qui nonseulement touche mais résonne dans l'espace des futurs. La formation commela liberté nous crée et mobilise en nous-mêmes les meilleures ardeurs de

notre détermination et les plus belles espérances de notre intuition. Laformation prend le chemin de notre perfectionnement comme le fleuves'engage vers la mer. La formation remplit une fonction, indique un parcours,renseigne sur les ouvertures, souligne l'évolution d'une aptitude, devientl'alliée précieuse. La formation semble importante si on l'observe dans l'instantd'une vie, là où elle la traverse dans le sens de la longueur.»

La question cynégétique

Dans une plaquette publiée « chez l'auteur », M. Robert Moggiari, deVillefranche-de-Rouergue, se prévaut d'avoir inventé la cartouche sans plombs.