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Lanabellia

Nerougispas

Saison3–Tome2

NishaEditions

Copyrightcouverture:BranislavOstojicISBN978-2-37413-453-6

Havefun!

@NishaEditions

NishaEditions

NishaÉditions&Lanabellia

NishaEditions

www.nishaeditions.com

TABLEDESMATIERES

Présentation1.Entredeux2.Mensonges3.Lamenaceblonde4.SoismonuniqueÀparaîtreExtraits

Parcequelemonden’étaitdifférentqu’àtraverstesyeux.

Entredeux

«Unami,c’estceluiquidevinetoujoursquandonabesoindelui.»JulesRenard

ROSE

Studios,samedi26août,13h26

JecroisquemesjouessontrougespivoinestandisqueGabrielmetraînejusqu’àlavoiture.Jedevraisparticiperauxshootingsunpeuplussouvent…Mêmesic’estlavisitedescoulissesquim’intéresseleplus.J’aiunsourire idiot fiché surmes lèvresque jeneparvienspasàdissimuler. Ilme fait toujoursvivredestrucsdedingue!

Jem’installesurlabanquettearrièredelaCadillac.

–Alorsmonange,tul’astrouvécommentlapetiteséancephoto?–Franchement?

Ilhausselesépaules.

–Sijeteledemande,cen’estpaspourquetumesortesunmensonge.Detoutefaçon,jet’interdisdemementir!

Ilmel’interdit?Iln’estpasculotté,lui!

–Pourquoijetementirais?

Ilsemetàrire.Unriretoutsaufjoyeux.J’ydevineunesorted’amertume.

–Parcequec’esttonhabitude.

Iln’aaucundroitdemesortirça!Surtoutqu’ilestleplusmalplacépouroserunetelleréflexion!

–Jet’arrêtetoutdesuite!Tusaistrèsbienpourquoij’aiagidecettefaçon.C’étaitpourtoi,pourteprotéger.–Pourmoi?EttarelationavecLucas?

Quoi?

OhGabriel,netelancepassurceterrain,ilestbientropglissant…

–Jenet’aijamaismentiàproposdeLucas!Turacontesvraimentn’importequoi!Maisqu’est-cetucherches?Tuasvraimentenviequ’onsedisputepourdeschosesquin’existentpas?Parcequetoi,jetesignalequeniveaumensonges,tuexcelles!Alorsnelaramènepas!

Jecroiselesbrasderagemaisjettetoutdemêmeuncoupd’œilverslui.Ilfixeavecattentionlebasdelavitrecommesiquelquechosedepassionnants’ytrouvait.

–Jenetemenspas.Jenetrouvepasutiled’abordercertainssujets,c’esttout.–Jen’envauxpaslapeine,c’estça?

Ilseretourned’uncoup,leregardvagueettriste.Jeviensderecevoiruncoupviolentenpleincœur.Jemesenstellementnulleencetinstant;jesaistrèsbienqueluirépondreetleprovoquernememèneraàriendu tout.Enplus,c’était totalement idiot.MaisGabriela ledondemefairesortirdemesgondspourunrien.

–Jet’enparlerai,mais…

Je lecoupe,submergéeparun tasd’émotionscontradictoires. Je suis incapablede reniermacolèrefaceàcemur,àcesbarrièresqu’ilérigetoujoursentrenouspourcachersesvraissentiments.Pourtant,jesaisqu’avecunpeudepatience,j’arriveraiàmesfins.J’enlèverailespierresuneparunepourlibérerchacunedesescraintes.Gabrielabesoind’êtrerassuré,ilesttellementabîmédel’intérieur,méfiant.J’aicommel’impressionqu’ilestconstammentsurladéfensive,quepourlui,Lucasresteunemenacealorsilne l’a jamais été.Gabrielme donne sa confiance à petite dose, pas entièrement, pas assez pour qu’ilparvienneàmeparler,àconfiersespeurs.Ilesttempsdepasseràlavitessesupérieure,deluimontrerquejesuisprêteàavanceravecluicoûtequecoûte.

–Etsionallaitpréparermescartons?

Ilhausseunsourcilàmonchangementsoudaindeconversation.Ilsemblesurprisetses traits tenduslaissentplaceàundébutdesourire.

–Tuessérieuse?TuessûredetoiRose?

–Oui!

Jecroisquejel’aicriédetoutmoncœur.Gabrielmefixe,presqueincrédule.

–Monsieur,dois-jemeprocurerdescartons?

Jesourisauxparolesdenotrechauffeurqui,apparemment,asuivilaconversationavecattention.

–J’aicequ’ilfautàl’appartement,Douglas.

Etmerci,non?Jamais?Jem’enchargemoi-même.

–Mercibeaucoup,Douglas.

C’estofficiel, jeparsvivreavecGabriel.Jesautelepas.C’est terminé, jerefusedeperdreplusdetemps.Çasuffitcommeça, lesconneriesdeséparation.Jem’installeet j’y reste !Quoiqu’ilarrive, jen’aspireplusqu’àunechose:passerchaquesecondeauprèsdemonCompliqué.Cettefois,c’estàmontourdem’occuperdelui,detouttenterpourlerendreheureux.Qu’iln’aitjamaisàregrettersadécisiondem’avoirànouveauouvertlesbras.

Arrivéssurmonpalier,Gabrielnes’arrêtepasetentamelamontéed’escaliersquimèneàchezluienseretournant.

–Jerécupèredescartonsàlamaisonetjeterejoins.

J’acquiesceensouriant.Jenel’aijamaisvuaussiimpatient.

–Jen’aipasgrand-chose,tusais.Alorsn’enprendspastrop.

Ilm’offreunclind’œiletsesauvedéjà.J’insèremaclefdanslaserrureetpoussevivementlaporte.Jeviensdefaireunsacrébondenavantdansmapetitevie.

Jem’arrêtenetaprèsêtreentréeetrestestoïqueàlavuedemameilleureamie,enpyjama,lescheveuxhirsutes, accoudée sur l’îlot central, lesyeuxdans levide.Que sepasse-t-il ?Çanevapas, ça, c’estcertain.Jem’approche.Jenesuispascertainequ’ellem’aitentendue.Ellen’estpasdugenreàselaisserabattre.Majoiedevivres’évanouitaussitôt,remplacéeparunsentimentdésagréabledemalaise.

–Aude?

Ellelèvelesyeuxversmoi.Elleapleuré.Untasdescénariosabracadabrantesquesfusentdansmon

crâne,maisj’essaiederepousserlesplushorribles.

–Est-cequ’ilyaunsouciavecCameron?

Ellepoussequelquechoseversmoi.Jehausseunsourcil.Untestdegrossesse?

–Tupeuxregarderpourmoi?

Je ne sais plus quoi penser ! Pourquoi pleure-t-elle si elle n’a même pas jeté un œil ? C’estincompréhensible.Ils’estpasséquelquechoseavecCameron,cen’estpaspossibleautrement.Dequoia-t-ellepeuraujuste?Mameilleureamieatoujoursvouludesenfants.Sionl’écoutait,elleauraitunecrècheà elle seule.Ce revirementde situation estdéstabilisant et jeneme senspasde la contredire.Encoremoinsdelaquestionnervusonétat.J’attrapelebâtonnetblancetleretourne.J’observel’objetsoustouteslescoutures.

–Euh…çafonctionnecomment?

Ellemebalancenégligemmentlaboîte.J’extrais lanoticeetprendsle tempsdebiencomparerpourêtre certaine de ne pas sortir de bêtises. Oh !Mes yeux s’écarquillent face aux deux traits roses. Jerevérifieencore.

OK.Respire,Rose.

Comment lui annoncer ? En cet instant, je ne sais plus trop quelle attitude adopter. J’inspireprofondément.

–C’estpositif.

Elles’effondrelamentablementsur l’îlotenlaissantcognersa têtesur lemarbregris.Jesuisunpeuperdue;incapabledesavoirsijedoisêtrecontente…Oupas…

Jegrimpesur lachaiseàcôtéd’Audeetattrapesamain. Jen’arrivepasàcroirequemameilleureamiesoitenceinte!Maissonétatactuelestplusqu’inquiétant.Audes’esttoujoursextasiéesurlesbébés.Donclà,jenecomprendspasetjesuistotalementpaumée.Cameronestàsoncompte.Toutdevraitbiensepassersic’estlaquestiondel’argentquil’inquièteréellement.

–Dis-moicequ’ilya.–Cameronvamequitter.

Jenesuispascertainedecomprendre.

–Ilt’aquittée?

Ellerelèveenfinlatêteetrenifle.Elleattrapelebâtonnetetl’agitedevantmonnez.

–Ilmelargueraquandill’apprendra!–Neracontepasn’importequoi!Pourquoiferait-ilunechosepareille?Vousêtesbienensemble.

Pourquoiseremet-elleàpleurer?

– Il a déjà quitté une nana parce qu’elle désirait un enfant ! Il n’a pas envie d’être père ! Il veuts’amuser,s’éclater,paschangerdescouches!

Monaffluxsanguins’arrêtenet.Heureusementquej’étaisassise!Jesuischoquée.Laportes’entrouvreetGabrielentreavecuntasdecartonsdanslesbras.J’attrapele testet lefourredanslapochedemarobe.Finilesmensonges?Onverraçaplustard!

–Aude,profitedelasalledebainsavantqueValentinrentre.

Jelapoussediscrètementduboutdesdoigtspourl’inciteràréagir,profitantqueGabrieldéposesonbazardevantl’entrée.Lespupillesdemameilleureamies’agitentuninstant.Puisellesautedutabouretets’éclipse.Jenepréfèrepasqu’illavoiedanscetétat.Surtoutquec’estunpotedeCameronetqu’illuirépéteraitforcément.Cettesituationdevientsubitementencorepluscompliquée.

J’aimerais éviter les questions et ne pas gâcher ce moment qu’il attendait tant. Je tangue entre lebonheur de mon Compliqué et la détresse de ma meilleure amie. Dans ma tête, c’est la bataille dessentiments : le bordel total ! Une part de moi souhaite rester ici pour soutenir et aider celle que jeconsidèrecommemasœur tandisquel’autredésirepartiravecGabrielpournepasperdre lamoindresecondeàsescôtés.

Ilcomprendraitsûrementsijeluiexpliquaislasituation,maisilseraitquandmêmedéçu.Etjerefusequ’illesoit!Danssavie,Gabrielatoujourseul’impressiond’êtrerejetéàcausedesonconnarddepèrealorsavecmoi,ilnepasserapasensecond.Jedoistrouverunesolution!

–Bébé,onattaqueparlachambre?–Oui,commencesansmoi.J’appellejusteValentinavant.

Il attrapequelques cartons et passedevantmoi,mevolant unbaiser aupassage. J’essaie denepaslaissermontroubleparaître.J’ensuiscapable…Jesaiscacherleschoses.

J’attendsqu’ildisparaisseavantd’attrapermonportable.Jetapenerveusementdupiedàl’écoutedelasonnerieetfinispartombersurlamessagerie.

Nemeditespasqu’ilestencoreavecsesnouveauxamis!

Oh,luiaussiilmefaitdugrandn’importequoi!J’insiste.

–Mapoupée!

Jem’éloigneverslaported’entrée.

–Ilfautqueturentresimmédiatement!–Jemecomportebien.Jetelepromets!Pourquoituparlestoutbas?–C’estpastoi,c’estAude.Elleabesoindenous,ellenevapasbiendutout.Ellealemoraldansles

chaussettesalorsramènetesfesses!

Plusieurssecondespassentavantqu’ilneréagisse.

–Euh…ouais.Jetrouvequelqu’unpourmeconduire.Jemedépêche.

Je raccroche et fonce rejoindre Gabriel. Je tends l’oreille en passant près de la salle de bains.J’entendsseulementl’eaucouler.

J’arrivedanslachambre.Toutesmesaffairessontétaléessurlelit.Iln’yapasàtortiller,Gabrielestefficace.Maisunpeumaniaquesur lesbordsquandmême!Toutestcorrectementplié,mesvêtementstriésparcouleur.Bon,jedoismerendreàl’évidence:ilauntoc!Surtoutavecsontrucdespiles.Danssondressing,c’estpareil,toutestclasséparteinte.

–Gabriel,jecroisquetutefatiguespourrien.Jenesuispastrèsordonnée.–Jesuisaucourant.C’estmoiquiramassederrièretoi.

Je rougis légèrement. En y réfléchissant, c’est vrai qu’il n’a pas tort. Et on s’apprête à vivre encouple… Je serai une maîtresse de maison vraiment abominable ! Je tente de l’imiter pour rangercorrectement,maisjeneparvienspasàmeretenirderire.Jen’yarrivepas:ilesttropméticuleux,adroitetrapide.Moi,quandj’essaiederepliercommelui,çaneressembleàrien.Etçamestresse!Jesaisisuncartonetretournetoutlecontenusurlacouette.

Monmaniaquerestemuetuninstant,détaillantcequej’aioséfaireàsonrangementsiparfait.Ilsautesurlelit,m’attrapeetm’entraîneaveclui.Jem’écrouleaumilieudubazar.Ilmebloquesurledos,saisitmespoignetsetlesmaintientsurmonventre.

–Tuméritesunepunition!

Jesourisetmordsmalèvre.Gabrielsepenchepours’enemparerdesesdents.Ilmefixeavecassurance.

–Lâche-moi!

Jerisetmetortille.Envain:iln’estpasdécidéàmelibérer.

–Tuesvachementcrédible!

MonCompliquéestmagnifique,rayonnant.Ilsembletellementheureux.

–Arrête,onestentraindefroissermesvêtements!–Commesicegenredechosest’inquiétaitréellement.

Ils’attaqueàmoncouetjebasculelatêteenarrièrepourluifaciliterl’accès.Ilarriveàmonmentonlorsquelaported’entréeclaque.Lavoixdemonmeilleuramirésonnejusqu’ànous.

–Poupée!

Gabrielgrogneetsedétachedemoi.

–Iln’yajamaismoyend’êtretranquille!

Forcément,ilbougonneetrâle.Jemeredresse.

–Jereviens…Etpuis,plusviteontermine,plusvitenousseronscheztoi!–Cheznous!–Oui,cheznous…Dommagequejetravaillecesoir.–Jepeux…

Jeposeundoigtsursabouche.

–Chut.Nerecommencepasavecça.

Salanguelèchemondoigtetunevaguedechaleurenvahitaussitôtl’intérieurdemescuisses.Jeretired’ungestevifmonindex.Monsieurcommençaitàouvrirlabouchedansl’intentiondelesuceretcen’estfranchementpaslemoment.Dommage…Meshormonesenébullitionsetmoisortonsrapidementdelà.

Valentinhausseunsourcilàmonarrivée.

–Tuesrougecommeunepivoine.Ilsepassequoidanscettepièce?

Ilsetordlecoupourtenterd’apercevoirquelquechose,maisj’attrapesamainpourletirerjusqu’àsachambre.

–Doucement,poupée!–Pasletemps.

Ilnemecontreditpasetrefermederrièrenous.Jem’assiedssursonlit,tapotelaplacelibreàcôtédemoietils’yinstalleenbaillant.

–J’suisnaze.

Jenepassepasparquatrechemins.Detoutefaçon,iladéjàunenuitblancheaucompteuralorsautantêtrebrefpourqu’ilcomprennecorrectementl’information.

–Audeestenceinte.

LeblocagedeValentinestassezimpressionnant:ilaouvertengrandsesyeuxrougisparlafatigueetsabouches’estarrondie.Jeluilaisseletempsdedigérerlanouvelle.

–Onvaavoirunbébé?–Euh…non.AudeetCameronvontavoirunbébé,pasnous.

Ilsecouelatêteavecunsourireidiot.

–Jevaisdevenirtonton!Putain,fautquej’appelleHaley!

Ilcommencedéjààextirpersontéléphonedesonjean,maisjel’enempêche.

–Neteréjouispastropvite.

Ilplisselesyeuxetm’observeattentivement.

–C’estàproposdu«moraldansleschaussettes»?–Oui,elleestpersuadéequeCameronlaquitteradèsqu’ill’apprendra.

Unplis’installesurlefrontdemonamiquisembleenpleineréflexion.

–Pourquoi?C’estridicule!

Ondiraitbienqu’ilestdumêmeavisquemoi.

–Apparemment,ilauraitquittéuneexparcequ’elledésiraitunenfant.–Quelabruti!Tantpispourlui.Jeleremplaceraietc’estréglé!Jefoncelavoir.

AvecValentin,leproblèmeavitetrouvésasolution…Monamiseredresseaussitôt,maisjeleretiensparlereversdesontee-shirt.

–Attends!Moiaussi,j’aiuntrucàt’annoncer.–Quoi,t’esenceinteaussi?

Unénormesourires’accrocheàseslèvres.

–Maisnon,arrêtederacontern’importequoi!

Ilserassiedlourdement.

–Jet’écoute.–J’emménagechezGabrielaujourd’hui.

Pourquoirigole-t-il?

–Non,maistuparlesd’unesurprise!Ça,ons’endoutait!Cen’étaitqu’unequestiondetemps!

Ah…

– Par contre, j’aimerais que Gabriel ne sache rien pour Aude. Je n’ai pas envie de lui gâcher cemomentavecdesinquiétudesquinesontsûrementpasfondées.

Encetinstant,alorsquemameilleureamieestauplusmal,j’ail’impressiond’êtrelapersonnelapluségoïstedumonde.Maiscommentexpliqueràmonmeilleuramiquejesuistétaniséeàl’idéedeperdrelamoindresecondeavecGabriel?Commentmecouperendeuxalorsqu’Audeatoujoursétélàpourmoi?Jesuisconscientequejedevraistoutleuravouer,leurexpliquerquelaviedeceluiquej’aimeleplusaumondenetientplusqu’àunfil.Monestomacsecomprimeetmesdoigtssecrispentsurledessusdelit.C’esttellementdifficile…Jerespirelentementpournepaslaissertransparaîtremoneffortpourréprimerces satanées larmes qui ne demandent qu’à jaillir. Je ne peux pas en parler, c’est trop tôt. Je suis

totalement incapable d’envisager cette réalité. Elle n’est pas la mienne… Une main glisse sur mesépaules.–Neculpabilisepas, jem’encharge.Enplus, tuassûrementraison,elleacertainementenvisagéle

pire sans chercher à en savoir plus.Tu sais comment estAude quand elle a une idée dans la tête.Tuprofites tranquillement de ton déménagement avec l’exterminateur d’iceberg et demain, tu prendras lerelaissileschosesn’ontpasévoluées.

Jeluioffreunpetitsouriregêné.Ilatoujourslesmotsqu’ilfautetceentoutescirconstances.

–Allez,dégage!

Jemelèveetécrasemabouchesursajoueaupassage.

–Tum’appelless’ilyalemoindresouci.

–Pourquoifaire?Tuesnullissimepourremonterlemoraldesgens.C’estmondomaine,pasletien!

Valentinappuiesa réponsed’unclind’œiletmepoussevers lasortie.Aprèssanuitblancheetsonafter ilestencorecapabled’assurer.Oùest-cequ’ilpuise toutesonénergie? Ilest incroyable. Jemeretourneavantdefranchirleseuil.

–Tueslemeilleur.–Ouais,jesais!Allez,dégageoujetefileuncoupdepiedaucul!

Ilme claque la porte aunez et je reste plantée devant commeune idiote.Aude est entre debonnesmains…J’inspireprofondémentavantdetraverserànouveaulecouloir.

J’entredansmachambreetsuisétonnée:Gabrielterminelederniercarton.Ilestvraimentefficace!

Jem’attardesursonsourire,surlapetitefossetteaucoindeseslèvresalorsqu’ilscotchelesrabats.J’aibesoindegravercetteimagedansmatête…Jeveuxancrerchaquesouvenirdansmonesprit,pournejamaislesoublier…

Arrêtedepenseràça,Rose!Profitedel’instantprésent.

Aujourd’hui,c’estunrêvequidevientréalité.Mêmesionpassepresquetoutnotretempsensemble,là,c’est différent. Je vais vivre avec cet homme qui me sourit et me regarde avec amour. Je donneraisn’importe quoi pour que cela ne s’arrête jamais, que cet instant perdure éternellement. Cet instanttellementparfait…

–Prête,bébé?

Ohoui!Plusqueprête!

–Impatiente,même!

Ilsoulèvedeuxcartonsetj’enattrapeunpourlesuivre.

–Onreviendrachercherleresteplustard.Ya-t-ildesmeublesquetuaimeraisemporter?

Jeluiemboîtelepasdanslacaged’escaliers.

–Non,jelaissetoutàAude.Jenepensepasqu’onenaitréellementbesoin.

D’ailleurs, jen’aipasgrand-chosequisoitvéritablementàmoi.Nousavonstoutachetéàdeuxet lereste lui appartient. Et elle aura besoin de rangement avec le bébé. Je n’arrive toujours pas à croirequ’elleestenceinte…

Nousdéposonstoutàl’entréeavecceuxqueDouglasarapportésennotreabsence.Gabrielm’enlaceetposeunbaisersurmonfront.

–Bienvenuecheztoi.–Cheznous!

Sonsourireestsublime.

–Jenetecontrediraipas.

Il s’emparedemesmainset les fixeavec insistance.Qu’est-cequi luiarrive? Ilestétrange…J’ail’impressionqu’ilcherchesesmots.Etpuisd’unseulcoup,ilrelèvelatêteetplongesesprunellesgrisesaufonddesmiennes.Jesuistroubléeparsonsérieux.

–Bébé…Tuasdéjàcomprisdepuis longtempsque les tirades romantiques,cen’étaitpas tropmontruc.Etjesuisconscientquetuméritesmieux…

Lesmots ne sont pas réellement indispensables.Gabrielm’a amplement prouvé cequ’il ressent. Jetentederétorquer,maisilm’enempêche.Lachaleurdesespaumesencerclemonvisage.Sonpoucesuitdélicatementlacourburedemeslèvres.Jesuisincapabledequittersesprunellesenvoûtantes.

–Jeveuxjustequetusachesquej’aibesoindetoi.Jedeviensfouquandtuesloin…Depuisquetuas

jetécetteputaindeballerinequejevénère,jen’aiplusquetoidanslatête.Enpermanence…

Jesuissuspendueàseslèvres,chamboulée,aveclasensationquemonrythmecardiaquesecalquesurchacundesmotsqu’ilprononce.

–Jesaisaussiquecequeturisquesdesubirneserapasfacile.Alorssituveuxchangerd’avis,sachequejenet’envoudraipasunseulinstant.

Mon cœur s’arrête brutalement. Je fronce les sourcils, sens mes jambes ramollir, mais je me faisviolence,meredresseetlefixe,déterminée.

–Jamais!Je…

Seslèvress’écrasentsurlesmiennes.J’écarquillelesyeux.Gabrielm’avolontairementempêchéederépondre.Qu’est-cequ’ilsouhaiteaujuste?Melaisseruneportedesortie?Qu’illareferme!Ilesthorsdequestionque jeparte !Sonbaisermehappe,m’emprisonnepar sadouceur, empêchemacolèredeprogresser, transformemaraisonenungentilpetitmoutondocile. Je tented’attirerGabrielcontremoitandis qu’il se détache et pose son front contre le mien. Son regard hypnotisemes iris, sa voix finitd’abattremonderniereffortpourprotester.

–Bébé,jet’aime…Non.Enréalité,c’estautrechose,quelquechosedebienplusprofond…Aimer,c’estunpeuvaguequandonyréfléchitbien.Jesuisdinguedetoitouteentière,delapointedespiedsàcellesdetescheveux.

Mesjambesflageolent.Seslèvresseposentànouveausurlesmiennesetilmurmure:

–J’aitellementbesoindetoi…

J’ail’impressiond’êtrelégère,extrêmementlégère.J’aimeraisluiavouerquejesuisincapabledemepasser de lui, que rien ne compte autant pourmoi que d’être à ses côtés.Que s’il n’est pas là, je nerespireplus,j’étouffe;qu’ilestmonsouffledevie,montout,laseuleetuniquepersonnepourlaquellemoncœurbatàs’enrendremalade…D’unbras, ils’emparedemataille,mepressecontrelui.Jemeperdsentresesbras,souriscontresabouche.

C’estunmiaulementquim’arracheàmabullecotonneuse.Mespiedsretrouvent la terre ferme.P’titgarsseglisseentrenosjambes.J’ail’impressiond’avoirbuquelquesverrestellementjesuisinstablesurmes jambes… Ma conscience s’est tranquillement installée dans un hamac et sirote un cocktail. Jen’auraisjamaispenséqueGabrielmeparleraitdesessentimentsouvertement,maisill’afaitetjesuistellementsurpriseettroubléequ’aucunmotnesort…

Mensonges

«L’amoursemesureàcequel’onacceptedeluisacrifier.»AvaGardner

GABRIEL

Lieuinconnu,dimanche27août,11h12

MentiràRosen’étaitpasaussiévidentquejel’auraispensé.Luilaissercroirequej’avaisunshootingdedernièreminuteetdécelerladéceptiondanssesyeuxalorsqu’ellepensaitpasserlajournéeavecmoiétait…trèsdéstabilisant.Maiscen’estpascommesi j’avais le tempsde repoussermonprojetàplustard.J’aibesoindelasavoirensécurité,detoutconnaîtred’elle:sonpassé,safamille,sonfutur…Sansmoi.

Elleaemménagéhier,maisnousn’avonseuquepeude tempspournous.Elleest rentréeduSaphirépuiséeeta justeeu le tempsdeseblottircontremoiavantdes’endormir.Etvuque jesuispartiauxaurores…Jemerattraperaicesoir.Jepenseégalementralentirleboulot.D’ailleurs,jenesaistoujourspassij’aienviedesignercefoutunouveaucontratdepub.LesecondscénariopourleparfumrisquedenepasdutoutplaireàRose…Jenesuispasspécialementemballénonplus.Embrasseruneautrefemmequ’elle,mêmesicen’estqueducinéma,nemetentepaslemoinsdumonde.Etpuis,j’imaginedéjàsaréaction disproportionnée. Mais voilà, ils me proposent une somme difficilement refusable. Alors jetangueentredeuxeaux…

Larouteestlongueetceputaindemaldecrânerevientàgrandpas.Jeneconnaispascecoin,jen’enavaisd’ailleursjamaisentenduparler.Unpetitbledperduaumilieudenullepart…Pluslaroutedéfile,plusjemesensmal.Jesuismêmeobligédemettremeslunettesdesoleilalorsqueletempsestplutôtgrisâtre.MonGPSannonceencorecinqminutesdetrajet,maisladouleurmetordleventre.Jedévied’unbrusquecoupdevolantetm’arrêteencatastrophesurlebas-côtépourgerbermestripesdansunfossé.Latêtemetourne…

Jevacille,m’appuieunmomentcontrelavoiture,inspireetexpireplusieursfoisavantdemerasseoirsurmonsiège.Putain,ilmefautuneclope!Jefouilledanslaboîteàgantoùj’avaisplanquéunpaquetetunbriquet.Jesorsunecigarette,l’allumeettireunelatte.Rosemelereprocherait,maisbon,cen’estpasçaquimetuera!Jerigoleàmonhumournoiràlacon.Jetireuneautrelatteetbalancelemégot.Malgré

monétatlamentable,jememotivepourreprendrelaroute.

Jecontinuemarouteetmegaredevantuneviellemaison,àl’adresseindiquéeparmonGPS.J’observeunmomentlesalentours,déserts.

Ehbien!C’estgai,ici!

Onsecroiraitenpleinfilmd’horreur.Jeneseraismêmepasétonnéd’apercevoirunrevenantouunzombiàlacondéambulerdevantmoi.Bonallez,j’arrêtemondélire!

Jem’enfiledeuxchewing-gumsavantdedescendre.Jem’étire : jesuiscassépar laroute.Jesavaisqu’aveccettemigrainepourrie ilauraitétépréférablededemanderàDouglasdemeconduire,mais jepréfèrequ’ilgardeunœilsurRose.Onnesaitjamais.

J’avancedansl’alléeetmeretrouvefaceàuneportequidevaitêtreblancheàl’origine.J’appuiesurlasonnetteetattendspatiemment.Putain, j’espèreque jene suispasvenu jusqu’icipour rien !Çacognesévèredansmatête.

Ah,enfin!Laportes’ouvresurunhommequiparaîtêtreplusvieuxquesonâge.Ilasouffertdanslavie,çaseremarqueaupremiercoupd’œil.Monespritsechargedurestedel’analyse:sonteintlégèrementviolacélaisseprésagerqu’ilneboitpasquedelatisaneetsonalluredesplusnégligéequ’iln’acertainementpasdefemme.Ilsembleassezbourru.Ceneserapasaisédelepousseràparler,jedoislajouerfine.Etjesaisexactementcommentfairepourentrerdanscettebaraque.

–Bonjour,jechercheuncertainIlanRods.

Levieuxmetoise.Jem’efforcedeparaîtresympa.Cequiest intéressantdansmonmétier,c’estquej’arriveàadopterlesexpressionsdontj’aienvie,commeunmasqueinterchangeable.

–Qu’est-cequevousluivoulez?–Jesuislepetitamidesasœur.

Samainatremblée…Ilsaitdequijeparle.Aumoins,jenesuispasvenupourrien.

–Ilanestfilsunique,jevouspriedepartir.

Jebloquelaporteavecmonpiedquandiltentedelarefermer.

–VousconnaissezRose,n’est-cepas?

Sonregarddevientfuyant.

–Allez-vous-en!

Ilessaiederefermerunenouvellefois,maisjenecèdepasetinsisted’unregardappuyé.

–Jenevousdérangeraipaslongtemps.J’aibesoind’ensavoirplus,pourelle.Ilanaccepteraitpeut-êtredemeparler?

Ilsembleenfinserésignerpuisouvrelaporteengranddansunlongsoupir.

–Entrez.

Jem’exécuteetilm’inviteàm’asseoirsurlecanapé.

–Uncafé?–Volontiers.

Ils’éclipseentraînantlespieds.J’observelemobilierprécaireetremarqueaussitôtlesphotossurlacheminée. Je me redresse pour y jeter un œil. Il n’y a que des photos du même garçon à des âgesdifférents.Ilalesmêmesyeuxqu’elle…Levieuxrevientavecdeuxtasses.

–C’estIlan,monfils.–Ilsseressemblent.–C’étaitunbongarçon.

Jepourraismecontenterdenerienajouter,ayantdéjàconnaissancedelavérité.Maispourlemettreenconfiance,afinqu’ilselivre,jedoisutilisersessentiments.

–Pourquoiparlez-vousdeluiaupassé?–Ilannousaquittés…ilyatroisans.–J’ensuisnavré.

Ilseperdlonguementdanssespenséesenfixantlesphotos,l’uneaprèsl’autre.Jemerendscomptequeje tape nerveusement du pied sur le sol. Mais qu’est-ce qui m’a pris, sérieusement ? Remuer lessouvenirsdouloureuxd’unvieuxdéjàsuffisammentabîménememèneranullepart.

–Laisseztomber.J’aidelaroute,jevouslaissetranquille.

Ilseredresseenmêmetempsquemoi.

–Terminezaumoinsvotrecafé.Jenereçoisjamaispersonne…Jevousparleraiunpeud’IlanetdeRose.

Jemerassiedsaussitôt.Levieuxsembledésespéré,cequimemetpassablementmalàl’aise.Pasquejesoissentimental,maisvoirlesgenschialer,trèspeupourmoi:lesmerdes,onenatousàgérer,àdesdegrésdifférent,c’estcertain.Etj’enaidéjàeuassezpourm’intéresseràcellesdesautres.Lapetitevoixdansmatête,étrangementtrèsressemblanteàcelledeRose,mepousseàunpeudesympathie.Pastropnonplus,maismacuriosité,elle,finitdemeconvaincre.

Jemeréinstalleconfortablement,attrapelatasseetavaleunegorgée.Ilestdégueusoncafé.Jereposelebreuvageinfâme.

–Votrefilsconnaissait-ill’existencedeRose?

Levieuxretombesursonfauteuilàfleurs.

–Oui,bien sûr. Ilsontcinqansd’écart…Enfin, avaient…Sellya, leurmère, etmoi sommes restésensemblependantdixansavantqu’ellerencontrecetype!

Sesmainssecrispentsurlesaccoudoirs.Unecertainerancœursembleprésente.Ilchercheàsecalmer,maisjenesuispasdupe.Ilfautquej’ensacheunpeuplus.

–Ques’est-ilpassé?–Jen’étaisqu’unsimplegaragiste.Nousvivionsdansunpetitappartementetjedoisavouerqu’avec

les fins demois difficiles, notre couple battait de l’aile.Nousnousdisputions souvent et jemanquaiscruellement de tact. Et ce gars-là est arrivé avec sa sublimemaison, son poste haut gradé, ses bellesparoles…

Ilseraclelagorgeavantdereprendre.

–Jel’aivuarriverdeloin.IltournaitautourdeSellyacommeunvautour.Ellen’étaitpaslegenredefemmeàregarderlesautreshommes,maisilyavaitce«jenesaisquoi»entreeux.Jesavaisdéjàquej’avaisperdulabataille.Pourtant,ellenecédaitàaucunedesesapproches,nemementaitpassursestentatives,mais je crois bien qu’à l’époque, elle l’aimait déjà…Attendez, je vousmontre une photod’elle!Sellyaétaitvraimentunefemmemagnifique.

Levieuxserelèveetpartfouillerdansuntiroir.J’avaleuneautregorgéeengrimaçantetvérifiemontéléphoneaucasoùRoses’inquiéterait.Jesouris.Apparemment,elles’estmiseentêtedepréparer lerepasdecesoir.Ladernièrefoisétaitassezmémorable.

Il se rassiedetme tend laphotoque j’attrapeaussitôt.Leportrait crachédeRose. Impressionnant !Peut-êtreunpeuplusronde,avecdeslèvresplusfines,maislereste,c’esttoutelle.

–Effectivement.

Jelaluirends,maisilrepoussemamain.

– Donnez-la-lui. Je suis certain qu’elle sera heureuse de l’avoir. Vous savez, c’était vraiment unepauvrepetite.

Ilatoutemonattention.Sonregardinsistantm’inciteàrangerleportraitquejeglissedansmaveste.

–Racontez-moi.–Sellyaesttombéemaladepeudetempsaprèslanaissancedelapetite.Unesaloperiedecancer.Elle

n’arrivaitplusàgérersesdeuxenfantsdoncIlanestvenuvivreavecmoi.George,sonnouveaumari,acommencéàperdrelespédales.Jecroisqu’ilétaitautantamoureuxd’ellequejel’étais.Iln’allaitplustravailler et a commencé à boire. Rose a atterri plus d’une fois ici quand samère était incapable del’assumer.Etpuis…Elleestdécédéeunmardimatindejuin,Roseavaitàpeinetroisans.

Ilmarqueunepauseetglissenerveusementunemainsursanuque.Jedéglutis.Lasuiterisquedenepasmeplaire…

– Ilan a très mal vécu le décès de sa mère et la séparation d’avec sa petite sœur : il est devenuinsupportableet lesréclamaitsanscesse.J’étais totalementdésemparéfaceà lasituation.Jebataillaisdes jours entiers pourqu’il voitRose,maisGeorge s’enfermait avec elle et nevoulait voir personne.Franchement,àlafinj’emmenaismonfilsàreculons.Lapetiteétaittotalementlivréeàelle-même.J’étaisécœuréparl’étatdelamaison,iln’ouvraitmêmepaslesvolets.

Moncœurseserreetmespoingsavec.

–Pourquoivousn’avezriententépourlasortirdelà?

Montonestplusbrutalquejelepensais,cequinesemblepaslechoquer.

– J’ai prévenu les services sociaux, j’aimême donné régulièrement de l’argent à leur voisine pourqu’elles’occupedeluipréparerdesrepas.MaisGeorgeavendusamaisonenàpeinequelquesmois.Iladisparudelacirculationaveclapetite.J’aijusteapprisbeaucoupplustardparlesjournauxqu’elleluiavaitétéenlevéeetplacéedansunorphelinat.L’articledétaillaitcommentunevoisineavaitdécouvertlapetite.C’étaithorrible…

Jelecoupe.Jerefused’enentendreplus!

–Etvotrefils?

Ilsoupire.

–J’ailuiailaissécroirequ’elleavaitétéadoptéeparunetrèsbonnefamilleetqu’elleétaitheureuse.Cette décision de lui cacher la vérité était ridicule. J’aurais dû lui avouer la vérité,mais c’était tropdifficile.Ilnel’auraitpassupporté.–Qu’est-ilarrivéàIlan?

Ses yeux sont tristes,mais il ne semble plus avoir de larmes à verser. Lesmiens dévient vers lesphotosdufrèredeRose.

–Suicide.

Lecoupestdifficileàencaisser.Jesavaisqu’ilétaitdécédé,mais j’ignoraiscomment.Putain,c’estpaspossible!Etmoi,j’annonceçacommentàRose?Non,c’estsimplementimpossible…J’envoieleminimumdeconsciencequejepossèdeauplacard:cequ’elleignorenelaferapassouffrir.Lesilencequis’estinstalléestdésagréable.Ilmeresteunequestionlaplusimportantedetoute.

–Personnen’a recueilliRosequandon l’a envoyéeà l’orphelinat.Mais est-cequ’il lui restede lafamillequelquepart?

Son signe négatif de tête finit d’abattre tousmes espoirs…Mamain tremble sur l’accoudoir. Je laglissedanslapochedemonjean.

–Sellyavenaitdel’assistance,elleaussi.EtGeorge,illuirestebienunfrère.Parcontrecen’estpasuntypedesplusfréquentables.

Jegrimaceetmelève,çasuffit.Jesaluelevieuxquimeserrelamainavecbeaucoupd’entrain.Prêtàmelancerdansl’allée,jemefige.Ilfautquejeposecettefichuequestion.

–Vousl’avezpousséeàpartiraveclui,n’est-cepas?

Ilsemblesurprisetgrimace.

–Jevoulaissonbonheur.Jel’aipousséeàcroirequejen’avaisplusdesentimentspourelleafindeluifaciliterleschoses.

C’est bien ce que je pensais…Aucune utilité d’en ajouter plus.Ni pour lui, ni pourmoi. Je foncejusqu’àlavoiture.

JefixeavecattentionletableaudebordoùtrônefièrementlebâtonnetblanctombédelarobedeRosedans la chambre. Quand compte-elle me l’annoncer ? La chair de poule envahit mes avant-bras, sepropage comme une traînée de poudre jusqu’à ma nuque. Elle sera seule pour assumer… C’estimpensable ! Les paroles du vieux trottent dans ma tête, se mélangent. Il s’est sacrifié pour rendreheureuse cellequ’il aimait.Etmoi, quoique je fasse, jepiétine.Leplanpour trouverquelqu’unde safamille afin de prendre soin d’elle est irrémédiablement tombé à l’eau. Ses amis sont fiables pourl’instant…Maisunefoisencouple,avecleursproblèmes,toutpeutchanger,chavirerenunclaquementdedoigts.Ilnerestequ’unesolution,unesolutionquimetordlestripes,accentuecettenauséequinemequitteplus.Jeglissenerveusementmesmainssurmonvisage.Monpoings’abatsurlevolant.

–Putaindeviedemerde!

J’ai envie d’une course de bagnoles…Deme défoncer avec je ne sais quoi ou encore jouer à larouletterusse…J’aienviededéfierencoreunefoiscetteputaindemortquisefoutdemagueule!Elledoitbiensemarrercetteputeàjoueravecmoicommeça!Elleveutvraimentmefoutreàgenoux!

Jereparsetm’arrêteencheminpourm’acheterunsandwich.Unefoiscedernierpayé, jemarcheunpeu etm’assieds sur un banc. Je sorsmon téléphone en croquant unmorceau. Je tente de tendre unepercheàRose.Jesaisqu’ellenousprépareunrepaspourcesoir,ellel’annoncerasûrementàcemoment.Jesuiscontentd’êtretombésurcetrucavant…Ellem’auraitsortiçasansquejesoispréparé,jenesaispasdutoutcommentj’auraisréagi.J’auraissûrementtoutcasséderage.Jetapotepourluirépondre.

[Aurais-tuquelquechoseàm’annoncer?]

Jerelis.Unpeudirect,cetruc.Détournonsl’attentionavecunpetit«PS».

[PS:Dis-moiquetuesàlamaisonetnuesoustarobe…]

J’envoie!J’imaginedéjàsatêteetjesouris.Asseztraîné,ellememanqueetj’aiencoredeuxheuresderoute.Jerebroussecheminetpassedevantuneboutiquedefringuespourmioches.J’observeuninstantlavitrine.Jenecomprendspascommentc’estarrivé…Enfinsi,jesais,jenesuispasidiot!Lapilule,cen’estpasducentpourcentsûr,maispourquoiçanousarrivealorsque…

Arrêtedetetorturer,bordel!

Jemedétourneetfoncedroitdevantmoi.Jejettelerestedemonsandwichdansunepoubelleetgrimpedansmacaisse.J’allumeuneclopeetenfonceletestdegrossessedansmavesteencuir.

J’enaimarredemeprendrelatête,jerentre!

Lamenaceblonde

«Pourl’amourd’unerose,lejardinierdevientl’esclavedemilleépines.»Anonyme

ROSE

Àl’appartement,dimanche27août,9h25

J’ouvreunœiletm’étire.Àplatventreetlamoitiéduvisageenfoncéedansmoncoussin,jesoupiredesatisfaction.Jemesenstellementbien…Jetapotelaplaceàcôtédemoiduboutdesdoigts.Ilestdéjàparti…

C’estquoicetruc?J’ouvremondeuxièmeœiletsoulèvematête.UneroseestàlaplacedeGabriel.Unsourireilluminemonvisage.Jem’assiedsetattrapelepetitmotposéàcôté.

Bébé,Jesuispartitrèstôt.Tuesmagnifiquequandtudors.PS:J’aipréalablementenlevélesépines,jesupposequecelas’estavéréutile.PS2:Teregarderdormirnue…Tun’imaginesmêmepasl’effortsurhumainnécessairepour

réussiràm’extirperdecelit.

Jemelaissetomberenarrière.Cemecestunemerveille…Mamerveille.

Jemeblottiedansmafélicitépendantunedemi-heure.J’embrassel’oreiller,merouledanslesdrapsetcontemplelafleur.Jeréalisequelbonheurceserademeréveillerchaquejourdanscelit.MêmequandmonCompliquén’estpas là àmon réveil, il a unepetite attentionpourmoi.Mon sourire idiot nemequitteplus,maisjem’encontrefiche.Jen’aijamaisétésiheureuse,combléeetamoureuse!J’aipresqueenviedelehurleraumondeentier!

Unéclairdeluciditétraversesoudainmonespritembruméetlesévénementsdelaveillereviennentaugalop.

Aude,merde!

Jemeredressed’uncoupetfoncejusqu’àlasalledebainscommeunedératée.Punaise,ilestdéjàdixheures ! J’espère qu’elle ne bosse pas cemidi… Jeme douche rapidement, improvise un chignon etdévaledéjàlesescaliersenmétal.Jemefigenetaumilieudecesderniers:saletédevertige!Jevacilleuninstant.Ilfaudraitvraimentinstallerunerampe!

Je reprends doucement ma descente et manque de déraper sur un des jouets de la boule de poils.Décidément,lajournéecommencefort!Jevérifiesesgamelles,maisGabriels’enestdéjàoccupé.Enyregardantdeplusprès,jedécouvredesbabiolesentoutgenredisséminésdansl’appartement.Jesouris.MonCompliquénel’avoueracertainementjamais,maisjecroisqu’ilestgagadesa«bestiole»commeilaimel’appeler.Surl’îlotdelacuisine,jedécouvreuneautredesesattentions:matasseetmonsachetdethé.Pourlecoup,jeverraiçaaprès.J’aidéjàperduassezdetemps.Jemedépêched’attrapermaclefetfonceàl’étagedudessous.

C’estlatignasseébourifféedeHaleyquim’accueille.Ilzappe,tranquillementassissurlecanapé,encaleçon. C’est un peu gênant, je dois bien l’avouer, mais je pense que je suis dans l’obligation dem’habituer:mêmesijenevisplusici,jenecomptepasdéserterleslieux.EtçaneseracertainementpasladernièrefoisquejecroiserailecopaindeValentinàmoitiéàpoil…Parcontre,çan’enlèverienaufaitquejesuistoujoursaussimalàl’aiseensaprésence.Étrangement,aujourd’hui,sonregardestunpeudifférent.Oualors,c’estàcausedelatenue…

–Salut,Rose.

Jesursauteetsorsbrutalementdemespensées.

–Euh…salut.Audeestlà?–Elledort,jepense.Jenel’aipasvueentoutcas.–EtVal?

Ilsouritensegrattantlescheveux.

–Ilestenmodeétoiledemerdanslelit.

Tu m’étonnes ! Deux journées bien remplies, une nuit blanche et Haley qui débarque, c’est plusqu’évidentqu’ilestKO!Jesuisprêteàparierqu’onne leverrapasavantce soir ! Je foncedans lacuisine pour allumer la cafetière. En attendant que cette dernière s’arrête, je jette des coups d’œil àHaley,toujoursconcentrésurl’écran.Ilseretourneetnosregardssecroisent.Toujourslemêmefrissonétrangequis’emparedemanuque.Cettesituationduredepuistroplongtemps…J’aibesoindesavoircequisetramederrièretoutça.

–Rose,tunevoudraispasvenirt’asseoiruninstant.J’aimeraisteparler.

Jerestesurpriseparsademande.Ilm’adevancée…Jenesaispassicelaestunebonnechoseousijedoismeméfier.Aprèstout,c’estlepetitamideValentin.S’ilétaitloucheouunpeutordu,monmeilleuramiseseraitdéjàinquiété.

Lentementetpassûredutout,jelerejoinsausalonetm’assiedssurlabanquette.Ilseseraithabilléqueçam’arrangerait,maiscen’estpaslemomentdeluidemanderd’enfileruntruc.

–Arrêtedemordillertajoue,jenecomptepastemanger.

J’ail’airsiinquiètequeça?

–Non,bienentendu…C’estjustequenousdeux,nousn’avonsjamaiseul’occasiondediscuteretjecroisquej’aibesoindecertainséclaircissements.–Justement,jesouhaitaism’excuserpourmoncomportementétrange.

Unvaguedesoulagementmetraverse.Jerestetoutouïetandisqu’ils’accoudeaudossieretm’offreunsouriregêné.

–Onnepeutpasdirequejem’ysoispriscommeillefallait.Déjà,j’aiététrèssurprisquandjet’airencontrée.Jen’avaisjamaisentenduparlerdetoietapprendrequeGabrielavaitenfinlaisséquelqu’unentrerdanssaviem’acarrémentlaissésurlecul.

QueGabrielnesoitpassociable,onacompris,paslapeinedelerabâcher.Allonsdirectementaubut.

–Pourquoitentais-tudememettreengardecontrelui?

Haleyinspireprofondément.

–Cen’étaitpasmonintentionpremière.Jenesavaispascommentaborderlesujet.Nousnoussommesrencontrésdansdesconditionsunpeuspéciales.Entrel’hospitalisationdeGabrieletmabelle-mèreaubordde lacrisedenerfs, j’étaisunpeuàcôtédemespompes…Enréalité, jecherchaisseulementunmoyendeteprévenirpoursamaladieetj’aid’abordcherchéàtecerner.J’étaispersuadéqu’ilnet’enparleraitpas.Tuvassûrementtrouverçacon,maisjetiensmalgrétoutàluietçam’auraitemmerdéqu’ilsouffreàcaused’unefillesortiedenullepart.

Mabouches’entrouvre.Lepoidsdesadéclarationeststupéfiant.Jeneconnaispasleurhistoire,maisàtraversGabrieletsonrefustotaldeconsidérerHaleycommesonfrère,jenem’attendaispasdutoutàça.

– Je comprends ta surprise. C’est une longue histoire. Je vais essayer d’être bref pour que tucomprennes.

J’acquiesce même si je ne suis pas certaine de souhaiter connaître ce passé que mon Compliquéchercheàeffacer.

–Gabrieln’estpasceluiquetoutlemondepense.Vudel’extérieur,ilparaitsanscœur,agressifetsansaucunrespectpoursafamille,maisilestloind’êtrecommeça.Cen’estmêmepasvolontairedesapartpuisqu’ilestpersuadéd’êtreunconnard.Notrepèren’yestpasétranger,ilfautdirecequiest…Maistoutçan’estqu’unefaçade,Rose.Gabrielavaitseulementbesoinquequelqu’unluimontrecomments’yprendre, ou plutôt que quelqu’un lui donne l’envie de dévoiler son vrai visage. C’est clair qu’il secomporte souvent commeunenfoiré. Il n’yvapasparquatre cheminset il estmême trèsblessantparmoment,maisnous,onleconnaîtetonpasselargementau-dessusdetoutça.

JecomprendslesproposdeHaleyetsuismêmeétonnéedecetteluciditéalorsqueGabrielesttrèsduraveclui.

– Mais pourquoi refuse-t-il de te considérer comme son frère dans ce cas ? Et comment tu peuxaccepterqu’ilterenie?–Ceseraitreconnaîtrequ’ilaunefaiblesse.Gabriels’esttoujoursbarricadé:pasdetendresse,pasde

motsgentils.Maissanslui,onneseraitpascequ’onestdevenus.AvecJosh,nousserionssûrementdeuxtypescomplètementdésaxés,perturbéspartoutcequis’estpassédansnotremaison.Mêmeaujourd’hui,onnesaitpastout…Notrefrèreatoutmisenœuvrepournousprotéger,pourqu’onserendecomptederien.Saufqu’engrandissant,nousavonscommencéàremarquerdeschoses.Gabriela toujours joué lerôledetamponentrelesconneriesdenotrepèreetl’étatmentaldecellequin’arrivaitpasànousélevercorrectement car elle était dépressive la plupart du temps.C’est ironique, n’est-ce pas ? J’ai eu deuxmèresdansmavieetaucunedesdeuxn’étaitcapabled’assumerlerôle.SiÈveselevaitlematin,c’étaitgrâce à lui. Si on arrivait à l’heure à l’école c’est parce qu’il préparait tout… Si je suis parvenu àdevenirinterneensoinspalliatifs,c’estparcequ’ilatoujoursétélà.

Àchacundesesmots,lepuzzles’emboîte.J’imaginecepetitgarçonsolitairequiaprisenchargesamèreetsesfrères.Jesuisémued’apprendreàquelpointilatoujoursétécombatif.Jecomprendsmieuxmaintenantsoncôtéprévoyantetattentionné.Enréalitéilatoujoursétécommeça.LeriredeHaleymesortdemespensées.

–Enfintoutçapourdirequejemesuiscomportécommeunpsychopatheavectoi.

Jeluisouris.

–Tum’enlèveslesmotsdelabouche!

Iltendsamainversmoi.

–Onoublietoutetonrecommence?

Jem’enempareetlaserre.

–Avecplaisir.EtavecValentin,commentçasepasse?

Lapetitelueurquiilluminesonregardparlepourlui.

–Onadéjàquelquesprojetsetj’espèrebienqu’ilsaboutiront.Maisonveutyallerendouceur.

Jecroise lesdoigtsmentalement. Je l’espèrede toutcœur.Maintenantque j’aiappris toutça, jemedemande si je serai capablede rapprocher lesdeux frères.MonCompliquéchangede jour en jour, ilfinira peut-être par le reconnaître comme tel. Quoique… Il est tellement têtu que je ne suis pluscertaine…

Haleypianotesursontéléphoneetmonattentionestattiréeparl’écrandetélévisionoùunejeunefemmeorganiseunepetitesurpriseàsonpetitami:elleenfileunerobesexyetluiprépareunmagnifiquerepaspoursefairepardonnerjenesaistropquoi.Lascènemetrottedanslatête,medonnequelquespetitesidées.Oui,cesoir,c’estmoiquimechargeduprogramme!

Onseréveille,magrande!Lerepas,latenue,latotale!

ÀnousdeuxGabriel : jen’aipasoublié le coupdesmacaronis au fromage ! Je lui envoieunpetitmessagepourleprévenirquejecomptecuisiner.Jenesuispasdouée.Ça,c’estcertain,maisj’opteraipourquelquechosedefacileetsurtoutmangeable!

Uneodeurmechatouillelesnarines.

Mince,lecafé!

JemelèverapidementtandisqueHaleyestdenouveauconcentrésursonfilm.Lacafetièreaterminésontravaildepuisdéjàunbonboutdetemps:j’attrapeunplateauetorganiseunpetitdéjeunerpourmonamie.

Jefileaussitôtdanslachambred’Audeenprenantbiensoindenepastoutrenverser.Toutlemondesaitquelesplateauxetmoiavonsbeaucoupdemalànoussynchroniser…Jemesouviensunjour,dansundemespremiers boulot : jeme suis prise les pieds dans une chaise.Résultat des courses :mes troisclientsétaientrecouvertsdebièreetjemesuisretrouvéeavecuneentorsedupoignet.

Jedéposeleplateausurlacommodeetgrimpesurlelit,àcôtédemameilleureamie.Jelapoussedu

boutdesdoigts.Savoixensommeilléerésonnedanslapièce.

–Cameron…Arrête,jedors…T’eschiant!

Jepouffederireetelleredresselatête.Sesyeuxpapillonnentuninstantavantqu’ellenesedonnelecouragedeseredresseretdes’asseoir.

–Qu’est-cequetuficheslà?

Jemerelèveetrécupèremasurprisepourluiplacersouslenez.

–Petitdéj’aulit!Aveclescomplimentsdelamaison!–Ah,lavache!Maisilvapleuvoirdesgrenouilles!

Jegrimace.Elleabuseunpeu!Maraisonmefixeenhaussantunsourcil.OK,j’avouequej’aiencoredesprogrèsàfairedececôté-là,maissonsouriretrahitsasatisfactionfaceàmonpetitgeste.Jemordsmalèvre:jenesaispascommentaborderlesujetplusquesensible.Jeconstatequ’elleaunemeilleureminemalgrésesyeuxbouffis,sescheveuxenpétardetsonoreillerrecouvertdetracesdemaquillage.

Je triture mes doigts en attendant qu’elle avale quelques gorgées de café. Au final, c’est elle quicommence.

–J’aiparléavecValentinunebonnepartiedelanuit.

J’espèrequemonchampionafaitdesmerveilles.

–Alors?Tutesensmieux?–Jegardelebébéquoiqu’ilarrive.

Jeluisouris.

–TucomptesquandmêmeenparleràCameron?

Pourquoigrimace-t-ellecommeça?

–J’aipétélesplombsavantmaconversationavecVal.Jel’aiinsultédetouslesnomsparmessage.–Ill’amalprisalors?

Lagrimacesedéforme.Ellevaréussiràmefoutrelatrouillesiellecontinue!

–Jeneluiairiendit.Jel’aijusteinsulté.

Elleestfolleouquoi?

Pasderemarquesdéplacées,Rose!

Dutact…

–Qu’est-cequ’ilarépondu?

Ellehausselesépaulesenmedésignantsontéléphoneéteint.OK.Surcecoup,c’estmalbarré.Siellel’agresse avantmêmede lui avouer, la suite ne risque pas d’être prometteuse. J’attrape le portable etl’allume.Ellemetoiseavecdegrosyeux,maisn’intervientpas.Letéléphonevibreimmédiatementsanss’arrêter.Aïe !Vingt-quatre appels en absence et dix-huitmessages de lamême personne :Cameron.J’ouvreledernier.

Cameron[Putain,maisdis-moioùj’aimerdé,bordel!!!!!Jepassetevoiraprèsleboulot!]

Audeattendpatiemmentmaréaction.

–Ilcompteveniraprèsletravail.Jepensequetuserasobligéedeluiavouerlepourquoiducommentdetaréaction.–J’ailatrouille.

Jene trouvepasquoirépondre.J’aibeaum’améliorer, réconforterquelqu’unn’est toujourspasmonpointfort.Jemelanceavecunephrasebateau.

–Jesuiscertainequetoutsepasserabien.

Ellerepousseleplateauetselèved’uncoup.

– De toute façon, qu’il soit content ou pas, il s’en accommodera. Autrement, j’ai beau l’aimer, ildégagequandmême.Pointfinal!Jenel’obligeraipasàresteravecmoi,maisjeneluipermettraipasdemedemanderd’avorterpourqu’onresteensemble!Jefilemedoucher.J’airendez-vousavecSam.Onaprévuunaprès-midishoppingetjenecomptepaschangermonprogramme.Tutejoinsànous?

ShoppingplusSam?Autantmedemanderdefaireunstrip-teasesuruneplacepublique!

–Euh…Nonmerci.

Àpeineréponduqu’elles’échappedelachambreenm’envoyantunbaiser.

–Mercipourlep’titdéj’!

Eh bien… Ça, c’est une décision des plus radicales ! J’en reste pantoise sur le lit. J’espère queCameronvaréagiretassumersesresponsabilitésparcequelachuterisqued’êtrebrutale…Audeabeausortir les crocs et jouer la dure, je la connais et la suite des événementsm’angoisse. Elle essaye derelativiser,maisjesaisqu’ellenesupporteraitpasqu’illarejette…Maisenattendant,restonspositiveletempsquelescartesnesontpassurlatableetqueleprincipalintéressén’apasencoreabattulessiennes.

Restezen,Rose!

***

Unpetitrepassurlepoucedansmonnouvelappartementetj’entreprendsdefouillerdansmescartonsrestésàl’abandonafindechoisirunetenuepourmonpetitprogrammedusoir.JepréfèremepréparerenpremierpuisquejenesaispasàquelmomentGabrielrentrera.J’auraisbienbesoindeValentinsurcecoup!Jecommencepar lessous-vêtementset lesdéballesur lesol. Jedécouvredesbasdont j’avaisoubliél’existenceetlesobserve.J’enenfileunavecunpeudemaletmontemedétaillerdanslemiroirdudressing.C’estplutôtpasmal,maisavecdesballerines, jenesuispascertaineque le résultat soitterrible…Me voilà à quatre pattes aumilieu des chaussures à les essayer les unes après les autres.Aucunenemeconvient.Bon,tantpis,jeresteraipiedsnus!Çacommencemal…

J’hésitesurlacouleurdemesdessousquandmontéléphonem’avertitdel’arrivéed’unmessagequejem’empressed’ouvrir.C’estGabriel!

[Aurais-tuquelquechoseàm’annoncer?]

Qu’est-cequ’ilraconte…Luiannoncerquoi?Jesuisconscientequejenesuispastrèsaltruiste,maisdelààcroirequej’aiquelquechoseàluirévélerparcequejemelancedanslacuisine,ilnefautpasabuser!Lasuitedumessagemelaisselefeuauxjoues.OK.Ilveutlajouercommeça?Jeleprendsaumot:desbasetpasdesous-vêtementspourmoiaujourd’hui!

Cettefois,jecomptebientesurprendre!

J’enfile la robegrisperleultramoulantedenotre soiréeauDiamantetm’observequelques instantsdanslerefletdelabaievitrée.Plutôtsexy.

Je fonce jusqu’à la salle de bains pour finir de me préparer. J’ai décidé de mettre le paquet !

J’aimeraisunsublimemaquillageetunejoliecoiffure.

Oui,oui,c’estbienmoiquiaiprononcécesmots!

Maistouteseule,çaneserapasdelatarte!Lenouveaumiroirdelasalledebainsestgénial.J’adorelespetiteslumièresautour.Encoreunepetiteattentionpourmoi…

Jemereconcentresurlemiroir.Épreuvenuméroune:lemaquillage!

J’appliqueunespècedetrucbizarresurlapeaudemonvisage:jecroisquec’estlefonddeteint.OK,c’estpasmal!J’attrapel’eye-lineretessayedel’appliquercorrectement.Aprèsquelquessecondes,jeme rends compte que je tire la langue enmême temps.Comme si ça allaitm’aider !En tout cas, j’aivraimentdumal!OK,l’autreœilmaintenant.

–Ahnon,putain,j’aidépassé!Merde!Merde!Merde!

Jedénicheuncotontigequej’humidifiedansmabouchepourtenterderectifierletir.Jerecule,plissele nez.Mouais, bof ! Je reprends cet horrible applicateur et tente de limiter les dégâts. J’en trembletellementjesuisstressée.

Jemeredresse,m’observe.Pastropmal.Uncoupdemascara,maintenant.Jefixelerimmelavecsabrosseultra technologiqued’unairdubitatif.Merde,unpeignepourcil,quoi !Quia inventéce truc?Bon,pasgrave.Jemelance:c’estpartipourunbrushing,unemiseenplisdescils!Mince,pourquoiilsneseredressentpas?Jenevaisquandmêmepassortirlesèche-cheveux!

Aie!

Oh,bordel,c’estdangereuxcetruc,j’aifaillimedécollerlarétine!Jebloqueuninstantsurlerésultat.J’aiunénormedoute : c’est à quelmoment qu’ondoit apposer le fard à paupières ?C’était peut-êtreavant?Ah,c’estpasvrai!Çayest,çam’énerve!Jetapedupiedettrépigne.

–Ah,putain!Çamestresse!

Rose,calmetoi,tuvast’ensortir!

Maraisonavecsonmaquillageimpeccablelèvelesyeuxdesonbouquinetsemoqueouvertementdemoi. Je grogne, puis respire un bon coup et sors les rouges à lèvres demamagnifique trousse noire,cadeaudemonCompliqué.J’étudieattentivementlesteintesetmelaissetenterpardurouge.Aller,jemelâche!

–Non,bordel!C’estpasvrai!

J’aiencoredépassé!JeressembleauJokermaintenant!Derage,jebalancetoutdanslelavabo.Maispourquoi suis-je aussi nulle ? Je ne suismêmepas capable deme rendre belle pour lui ! Je suis unecatastrophe…Une bonne à rien… J’ai envie de chialer…Trop de chosesme perturbent, j’occulte etocculteencore,j’ailesnerfsquilâchent…

Ressaisis-toi!

Jemelancedansquelquesexercicesderespiration,lesdeuxmainsappuyéessurlelavabo.Jerangemonbazar.Gabrielm’abienspécifiéqu’ilramassaittoujoursderrièremoialorsmaintenant,jemeprendsenmain.Jemecoiffeplus sereinement. J’auraisaimé lissermescheveux,mais ladernière fois, j’yailaisséunemècheentière.Doncsijeveuxéviterdemeretrouverchauve,ilvautmieuxrestertranquille!

J’observelerésultatfinal,maisj’enlèvefinalementlerougeàlèvres.Çanemeconvientpasdutout!Cettefois,jesuispresquesatisfaite.Pasentièrement,maisvuquejenesuispascapabledemieux…

Maintenant,épreuvenumérodeux:lerepas!

J’observel’intérieurduréfrigérateurquiesttoujourspleinàcraquer.Quis’occupedescoursesici,d’ailleurs?CeseraitDouglasqueçanem’étonneraitmêmepas.

Jechoisisdequoipréparerdes toasts.Aumoins,ça, jesuiscertainequeceseracomestible.Jefileallumerlamusiquepourcomblerlevidedel’appartementetsuisagréablementsurprised’entendremongroupepréféré.JemetrémoussesurduMuseenretournantverslacuisine.Jechantonneeninstallantmeschefsd’œuvresdansdesplats.Mespetitstoastsenplace,j’ajoutedepetitestomatescerisepourdécorer.Duvin!Ilnousfautduvin!Jefouillepartout,maisjen’entrouvepas.P’titgarsestallongéàunmètredemoietobserveattentivementchacundemesmouvements.

–Oh,toi,j’aicompriscequit’intéresse!

Jeluitendsunmorceaudejambonetilseprécipite.Encorequelquespetitsmorceaux.

–Çaresteentrenous!

Jelecaresseenrigolant.Puissoudain,c’estl’illumination:lesbouteillessontforcémentàlacave!Jefonceversl’entréeetôteletrousseaudelaserrure.Petitsoucitechnique,jenesaispasoùsetrouvecettefameusecave…Maisdanslalogiquedeschoses,ellesetrouveausous-sol.

J’entrouvre laporte.P’tit gars s’empressede se faufiler entremespieds et se sauveà toutevitessedans les escaliers. Je reste dubitative.Est-ce que je dois lui courir après ou le laisser vivre sa vie ?Aprèstout,Gabriell’autoriseàsortiralorsjesupposequejen’aipasàm’inquiéter.J’empruntelemême

chemin.Laporteduhallétantrestéeouverte,lechatestsûrementdéjàloin.Paracquisdeconscience,jebloquelaporteavecuncaillouaucasoùilaimeraitrentrer.

Jedescendsencoreunétageet lèvedesyeux inquietsvers la lumièrevacillante etbourdonnantedunéon.Décidément,lescavesetmoi,cen’estpasunegrandehistoired’amour.Machairdepoulesoudainem’arracheunfrisson.Plusviteterminée,plusviteremontée!Laporteestfermée.J’essaierapidementlesclefs les unes après les autres jusqu’à entendre le cliquetis salvateur. J’émerge dans un petit couloiroppressantetdécouvredeuxautresportes.Forcément!J’aitellementdebolqu’ilfallaits’yattendre!Etc’estrepartipourlejeudelaclef!Jem’acharnesurlapremière.

Allez,bonsang!

Jesurveillesansm’enrendrecomptel’entréeducoindel’œil.

Celle-ci,non.L’autrenonplus.

Maisàquoiserventtoutescesclefs,sérieusement?J’abandonneetessaiel’autreserrure.Bingo!Dupremiercoupenplus!Jecherchel’interrupteuràtâtonsetappuiedessus.Desrayonnagesentiersdebouteillesapparaissent

enfacedemoi.Impressionnant!Commentchoisirunvinquiconviendrait?Surtoutsouscettepoussière!Je frottequelquesétiquettes sansqueçam’aidepourautant.Tantpis. J’enattrapedeuxauhasard :unblanc et un rouge. Je referme soigneusement, mais rapidement et regagne le hall. Un bruit attiremonattention.Jepasselatêteaudehors.

–P’titgars?

Je tends l’oreille, les miaulements en réponse proviennent d’en haut. Apparemment il est déjà deretour.Aufinal,jesuissoulagéequ’ilsoitrevenuaussirapidement.

Je remonte en fredonnant et souriant. J’ai vraiment hâte que Gabriel rentre et découvre ma petitesurprise.Arrivéeenhautdesescaliers,jemefige.Unefemmesetientdevantnotreporteavecmonchatdanslesbras.

Quic’est,celle-là?

Elleme détaille de haut en bas et je l’imite. Jem’attarde sur ses longs cheveux blonds et son airjuvénile.Troublée,jemanquedelâcherunebouteille.Cettefillemeressembletroppourquecesoitunecoïncidence.Elleal’airaussiinterloquéequemoi.Savoixromptnotreaffrontementsilencieux.

–Quiêtes-vous?

Elleresserrelechatetmeregarded’unairhautain.

–Jepourraisteposerlamêmequestion!

Laglaceenvahitmesveines.Moncœurcognedouloureusementdansmapoitrine.Ellemeressemble…

Gabriel,qu’est-cequetumecaches?

Lapeurmetordsubitementleventre.

–JeviensvoirGabriel.J’aicroiséP’titgarsdanslequartieralorsj’enaidéduitqu’ilétaitici.Onétaitcensésseretrouveràsonautreappartementhier,maisiln’yavaitpersonne,alorsjemesuisinquiétée.

Sesmotsbourdonnentétrangementdansmesoreilles.Jesuisenpleincauchemar…

JeviensvoirGabriel…

Unvoilebrouillemavue.

Onétaitcensésseretrouver…

Ma gorge se serre tandis que je reste obnubilée par P’tit gars dans ses bras. Gabrielmementiraitdepuisledébut…

Maisputain,c’estqui,cettefille?

***

GABRIEL

Lieuinconnu,dimanche27août,17h13

Finalement, jem’arrêtedansuncentrecommercial. J’aimerais lui acheteruncadeau. Je suis certainqu’elle râlera,mais c’est plus fort quemoi.De toute façon, j’ai pleind’excuses à balancer : c’est uncadeaupournosretrouvailles,pourl’emménagement,pourluimontrerquej’adoresesinitiativespourmeplaire…

Ah,etpuismerde,jen’aipasbesoind’excuses!Jefouilledanslecoffrepourdénichermacasquettequejevissesurmatête.Jepositionnemeslunettesnoiressurmonnez.C’estpartipourunbaindefoule!Je fonce,passe lesportes tournantesetobserve lesvitrinesdesgaleriesmarchandes.Qu’est-ceque je

pourraisluioffrir?

Réfléchis!

Jesouris,j’aimeraislavoirporterdesescarpins…Jechercheuneboutiquedechaussuresententantdepasserincognito.Untasdegonzessesmereluquesansaucunegêne.Jemerenfrogneetmeretiensdenepas les insulter. J’aime tellement le regard deRose. Il est si différent de celui de toutes ces femmesinsipides…

Ah,enfin!J’entredansunmagasin,ôtemeslunettes,parcoursrapidementlesalléesetm’arrêtenet.Jereculed’unpas. Ilssontparfaits !De jolisescarpinsgrisavecunpetitnœudà l’arrière.Jecherche labonnepointure,attrapelaboîteetmedirigeverslacaisse.Montéléphonevibre.C’estCameron…Déjàtroisappels.Retourdansmapoche.

Lananaderrièrelecomptoirsourittellementquejesuisenmesuredecomptersesdents.Jerèglemonachat.Ellecontinuedemedévisager.Ellemestresse!

–Çayest!J’aitrouvé!Vousêteslegarsdelapub!Oui,voussavez,celleoùlavoitureexplose!Jepeuxavoirunautographe?

Ilnemanquaitplusqueça!

–Non,vousvoustrompez.Jesuisgaragiste.

Elleblêmit.

Jesais…T’esdéçue.

Enattrapantmonsac, j’aipresqueenviederiredevantsaminedécomposée.Directionlasortie!Jesuiscoupédansmonélanparmontéléphonedansmapochequivibreencontinu.Maisilcompteinsisterencorelongtemps?J’attrapemonportable.

–Qu’est-cequetuveux?–PutainGabriel, jepète lesplombs, là!Audem’alaissédesmessagesdedingueetellenerépond

plusdepuis!

Jegrimace.Monpoteestsalementpaniqué.

–Quelgenredemessages?

Jem’appuiesurlavoiture.

–Ellem’ainsultédeconnard,desalecon,delâcheetj’enpasse…–Qu’est-cequet’asencorefoutu?–Rien,justement!Jetejure,jenevoispasdutout.Jenel’aimêmepastrompée!Rien,jetedis!Je

metiensàcarreau,cequiestassezrare,etjereçoisça!Jecomprendsriendutout,mec!

Commesilà,toutdesuite,j’étaisenmesuredet’apporteruneréponse!

–Creuse-toilacervelle.Ilyabieneuquelquechose.Ellenet’insultepaspourleplaisir.–Paslamoindreidée.Qu’est-cequetuferaisàmaplace?

SiRosem’insultaitcommeça?Cen’estpassongenre.Maisdansunesituationpareille,jelâcheraistoutetjefonceraislaretrouver!

–Foncechezelle.–Etsiellen’yestpas?–Ehbient’attends,groslourdingue!–OK.Bon,j’yvaisalors.Merci,Gab!

Jeraccroche.Cameronestirrécupérable…Etmaintenant,jerentre!

Unefoisarrivé,jemegaredevantl’immeubleetattrapelecadeau.Jesuisvictimed’unviolentvertigeensortantde lavoiture,dessueurs froidesprennentd’assautmanuque. Jevacilleavantdem’appuyercontrelafaçade.Monrythmecardiaqueestàchieretmesjambesontdécidédefairegrève.J’extirpeànouveaumontéléphonedemapocheententantdem’asseoirsurlamarchesansm’écrouler.

–DocteurDévraux,j’écoute.–C’estGabriel,ilmefautquelquechoserapidementpourlesmigraines.–Bonsoir,Gabriel.Jepréféreraist’examinerd’abord.–Jen’aipasletemps.Desantidouleurssuffiront.–Gabriel,j’insiste.Jedoistevoirettulesais.

Jeserrelesdents.

–Etqu’est-cequeçachangera?Unmiracleàmeproposer?Cen’estpasvousquim’avezpréciséqueçaneservaitàriendemepointertouteslessemaines?Alorsneperdonspasnotretemps.Lesmédocssuffiront.

Unsoupirrésonnedanslecombiné.

–Jen’aijamaisvuquelqu’und’aussitêtuquetoi.Est-cequetuasd’autressymptômes?Vomissements,vertiges,insomnies?

Jesuisconscientquejejoueaucon,quementirnem’avancerapasàgrand-chose,maisc’estmanature.

–Non,justedesmigraines.–Envoie-moiquelqu’un,jepréparecequ’ilfaut.Etjenet’aipasinterditdevenir.Admetsquetuétais

insupportablequandtuécrivaistathèse.Maisjetepréviens,tudoisabsolumentconsulter.Tunet’esdéjàpasprésentéàtondernierrendez-vous.–J’enprendraiunautre.Douglaspasserademainmatin.–Gabriel.Si tessymptômess’aggravent,appelle-moioumafemmesi tun’arrivespasàmejoindre.

J’acceptedeterendreservicecettefois,maisilesturgentd’effectuerd’autresexamenspoursavoiroùtuenes.

Nem’emmerdezpasavectoutça!

–OK!Ilfautquejeraccroche.

Je fourre mon portable dans ma poche et tente de reprendre mon souffle avant de me redresserdoucement.

Jegrimpedifficilementlesescaliersenm’aidantdelarampe,nepensantplusqu’àuneseulechose:Rose.Cettesaloperiedansmesveinesmetordlestripes,tentedemefoutreKO,demebalanceràterre.Etj’aibesoindeRosepoursurmontertoutça!Deseslèvressurmabouche,desapeaucontremapeau,deladouceurdesonâmecontrelanoirceurdelamienne.J’aibesoinqu’elleéradiquecettemerdequimebouffe!Elleestlaseulecapabledemesoulager.Lelieninvisiblequinousunitestbienpluspuissantquen’importequelmédicament.

Laported’entréeestrestéeentrouverte…Quesepasse-t-il?Jem’appuieauchambranleenentrantetmonsangseglaceàlavuedesdeuxfemmesaumilieudemonsalon.

Bordel!

La tension est électrique. Leurs deux visages braqués sur moi ont déjà balancé leur sentence :coupable!

Jeneparvienspasàrégulermonsouffle.Matensionchutebrutalementetmesphalangesblanchissentsurl’embrasure.Jesuisàlalimitedumalaise…J’auraisdûanticiper.J’aireculépourmieuxsauter:jenem’attendaisvraimentpasàcequeçaaillesiviteetsurtoutpasqueRoseetJudeseretrouventfaceà

face.

Merde,j’avaisrendez-vousavecellehier!

C’étaitvraimentledernierdemessoucisetilestentraindedevenirlepiredetous…Aucunedesdeuxneparle.Ellesmefixentenattendantuneréactiondemapart.J’inspire, tented’accrocherleregarddeRose,maiscelui-ciseveutfroidetaccusateur.J’avanceverselle,abandonnemonsacsurlefauteuil.Matentativepourlatoucherestrapidementavortée:ellemerepousse.

–Quiestcettefillepourtoi,Gabriel?

Sa voix tremble imperceptiblement et ses mains aussi. Que répondre sans que les choses nedégénèrent?Moncerveauestcongestionnéparladouleur.Jeplisselesyeuxetmelaissetombersurlecanapé.J’aibesoind’êtreassis.

–Rose,jeteprésenteJude.Elles’occupedeP’titgarsquandjesuisendéplacement.

Judemetoiseenfronçantlessourcils.

–Etelle,c’estqui?

Jen’aimêmepasletempsd’ouvrirlabouchequeRosehausselavoix.

–Jesuissapetiteamie ! Jenevaispas te le répétercent fois !Gabriel,pourquoin’est-ellepasaucourant?–Jen’ycroispas.Gabriel,etnotrerendez-vousalors?

Je serre lesdents.Ellesmevrillent les tympansàhurler commeça.Ma tête risqued’exploserd’unmomentàl’autre.J’attrapeRosedejustesseparledosdesarobe.

–Lâche-moi!

Ellesvonts’égorgersijeneréagispas.–Rose,calme-toi.Jel’airencontréequandonétaitséparésetàvraidire,jen’aipaseul’occasionde

t’enparler.

JudecroiselesbrasderageetRoseseretournevivementversmoi.

–C’estçataréponse?Tun’enaspaseul’occasion!Tutefousdemoi?Jecroyaisqu’aucunefillen’étaitlabienvenueici!C’étaitdéjàellequiavaitsonnéladernièrefoisàl’interphone,n’est-cepas?

Leurscrisrésonnentviolemmentdansmoncrâne…

–Bébé,iln’yajamaisrieneuavecelle.Jude,bordel,expliquelui!–Mais quelmenteur…Bien sûr que je suis déjà venue ici !Et plus d’une fois !Tu joues à un jeu

dangereux,Gabriel!Tum’aslaissécroirequ’ilyavaitquelquechoseentrenousalorsquetuenavaisuneautre!

Quoi?MesyeuxdévientversRose,horrifiée,quiplaqueunemainsursabouche.

Stop!Là,c’esttrop!

Jemeredressed’unbondetm’avancedroitsurJude.D’instinctellerecule,buttecontrelemur.

–Pourquoiest-cequetumens?

Ellemedéfieenredressantlementon.

–Jenemenspas!Onavaitrendez-vous!Ettafaçondemeregarderparlaitd’elle-même!

C’estfoutu,jesuishorsdemoi!Ceneseraitpasunenana,jel’auraisdéjàencastréedanslemur!

–Tuveux savoir pourquoi je te regardais commeça ?Certainement pas parceque tumeplaisais !Seulementparcequetuluiressemblaisetqu’ellememanquaitàencrever!Jen’enaistrictementrienàfoutredetoi!Iln’yaqu’elleetceseratoujourscommeça,fourre-letoidanslecrane!

JehurleaprèsJudequiseratatineaufuretàmesurealorsqueleslarmescoulentsursesjoues.Rienàfoutre,j’enchaîne!Jeluicrachemahaineauvisage.

–Pas lapeined’espérer !Tucroisquoi?Tune luiarrivesmêmepasà lacheville.Personnene laremplacera jamais ! Et n’osemême pas envisager foutre lamerde, parce que ça ne changera rien.Tun’aurasaucunechance.Jamais!

DesmainsattrapentmonbrasetlavoixdeRoseretentitdansmondos.

–Gabriel,calme-toi,s’ilteplaît.

Jemeretournebrusquement.Rosereculeenmedévisageant.Jeplisselesyeuxàladouleurvivequitranspercemestympans.J’attrapemoncraneàdeuxmains.Jenesupporteplusladouleur!

Laported’entréeclaqueviolemment.Jecroisquel’autreestpartie.

Arrêteztoutcebruit,jedeviensdingue!

Soismonunique

«Créer, c’est se souvenir : cette proposition concerne l’acteur plus que tout autre créateur. Lamémoireestaucœurdesonart.Elleestsoninstrumentetsamatièrepremière.»DanielBesnehardROSE

Àl’appartement,dimanche27août,19h25

Quesepasse-t-il?Gabrielestfigédepuisplusieursminutesaumilieudusalon,latêteentresesmains.Macolèreadisparuauprofitdel’inquiétude.Jeleconduisaucanapépourl’asseoiretilseblottitcontremoicommeunenfant.C’estdéstabilisant…Jenel’aijamaisvusivulnérable.Lesexplicationsattendrontunpeu.Jeglissemamaindanssescheveux.Jesuisperdue…

Les minutes passent, longues et inquiétantes… La tête de Gabriel est calée sur ma poitrine. Sarespirations’apaiselentementtandisquesamainserrefortementlamienne.Est-cequ’ilsouffre?Ouest-ce qu’il craque tout simplement ? Je ne sais pas etmon cœur tremble pour lui. J’ai tellement peur…Mêmesij’essaiedemeconvaincreducontraire.

–Gabriel?

Ilrelèvelentementlatête.Sesmagnifiquesyeuxsontrouges.Ilapprochedemeslèvresetjefermelesyeuxpourprofiterdesonbaiser.Maconsciencemeconseille fortementd’oublier la scèneprécédente.Quelleidiotejesuis!Cettefillem’acomplètementperturbéesurl’instant.Lasurprisem’afaitperdrelespédales.

–Tuesvraimenttrèsbellecesoir,monange.

Gabrielseredresseetobservel’îlot.Oui,ilfautabsolumentpasseràautrechose!Cettesoiréedevaitsepasserautrement.J’ail’impressionquelesorts’acharnesurnous.Nosmomentsàdeuxnouséchappentbien trop souvent. Je me lève aussitôt et remarque qu’il me déshabille du regard. Ça me plaît. Latransitionestbrutale,maisjesaisqu’iln’apasmentitoutàl’heure.Sacolère,sasurpriseetsafaçondemeregarderetde la regarderelle.Cette fille, il s’en fiche. J’aiconfianceenGabriel.Surtoutqu’àcestadedenotrerelation,desavie,àquoicelaluiservirait-ildemementiroud’avoiruneaventureavecuneautrefemme?Nousavonsdéjàassezdemalàgérernotreproprerelation.Jesuisstupided’avoircru

lecontraire…

Nousgrignotonscommesiriennes’étaitpassé,tranquillementinstallésànosplacesrespectivesdanslacuisine.Enplus,jesuisraviedeconstaterqu’ilappréciecequejeluiaipréparé.

–Attends,bébé.J’aiuncadeaupourtoi!

Il sautedeson tabouret.Uncadeau? Ila recommencé ! J’espèrequ’ilaété raisonnablecette fois !Quandilm’aoffertleportable,jenesavaisplusoùmemettre.Cepetitbijouadûcoûterunefortune!Maisjecommenceétrangementàm’habitueràtoutescespetitesattentions.Etilal’airtellementcontentàchaquefoisquejeculpabilisedelepourrirpourça…

Ilmetendlepaquet,lesyeuxpétillants.Ilestpresqueplusimpatientquemoi.J’ouvrelesachetpourydécouvriruneboîteàchaussures.Jesourisenl’ouvrant.

–Ellessontmagnifiques!Jepeuxlesporter?

Illèvelesyeuxauciel.

–Ellessontàtoi.

Il enattrapeune, l’enfileàmonpied,puis reproduit lemêmegeste avec l’autre. Ilmepousse àmeleveretj’observemespieds.Jenemesenspastrèsstableetéclatederire.Jetentequelquespassoussonœilamuséetécartelesbraspourtenterdegarderl’équilibre.Pastrèsglamour,toutça!

–Jepensequej’auraibesoind’unpeud’entraînementsijeneveuxpasmetordreunecheville.–Ons’habituevite,rassure-toi.

Jehausseunsourcil.

–Tuasdéjàessayé?

Ilexplosederireetsecouenégativementlatête.

–Non,défautprofessionnel.Jetravailleavecdesmannequinsdepuisdesannéesalorsjecommenceàenconnaîtreunrayonsurlesujet.Maistugardesçapourtoi!

Tiens,enparlantdemannequins.J’aiunequestionquimebrûleleboutdelalanguedepuisdesheures.Jemerassiedsetilm’imiteaussitôt.

–Gabriel,j’aimeraistedemanderquelquechose.

Ilenfonceunpetitfourdanssaboucheetsucesondoigtd’ungestenaturel.Moncerveauestprocheducourt-circuitalorsquejefocalisesursongeste.Ilmedéstabilise.C’étaitquoimaquestiondéjà?Ahoui!

–Est-cequetuaseudesrelationsavecd’autresfemmespendantnotreséparation?

Jeretiensmonsouffle.

–C’estpasfauted’avoiressayé.

Jemanquedetomberdemontabouretsouslepoidsdesonaveu.Untasd’imagesplusécœuranteslesunesquelesautrestraversemonesprit.TashaetJudeprennentd’assautmespensées.Maisqu’est-cequim’apris?J’auraismieuxfaitdelafermer…Jeravalelabiledansmaboucheetsoutienssonregard.

–Ettucomptesmepousseràcroirequ’ellesontrefusé?–Non.C’estmoiquin’aipaspu.

Soncalmem’énerve!Etsesréponsesencoreplus!Commenta-t-ilosé?

–Jerêve!Tuasessayé?Alorsquemoi,jenepensaisqu’àtoinuitsetjours,àm’enrendremalade!

Putain,c’estdégueulasse!

Gabrielselèved’uncoupetarpentelesalon.

–J’essayaisdet’oublier.Jesuishonnêteavectoi,Rose.Tumeledemandes,jeteréponds.Cen’estpastoiquim’asdemandéd’arrêterdetecacherleschoses?

Encore mieux ! Et moi qui pleurais comme une idiote ! La déception m’envahit et les larmes memontentauxyeux.C’esttellementdifficileàencaisser.J’aienviedeluicollerunegifle.Jesuisfurieuse,jalouseàl’idéequ’ilaitposésesmainsetprobablementmêmeseslèvressuruneautrequemoi!

–Jetedéteste!

Jerefused’enentendreplus!Ilfautabsolumentquejem’éloigne,quejemecalme.Jefoncedéjàverslaported’entréeenmetordantleschevillestouslestroispas.C’estcertain,ilnem’apascachélavérité.Ilnes’estrienpassé.Maisilm’aquandmêmefusillélecœur!

–Rose,reviensici!

Jemeretourneetluiadresseunregardfroidremplidereproche.Direquej’étaisaudixmillièmedessousetqueluitentaitdesetapertoutcequibouge!

–Vatefairevoir!

J’ouvrelaporte,maisGabriels’emparedemonpoignetetmeretournebrusquement.Jeclignedesyeuxfaceàsonairgrave.Jemedébats.Sesmainsm’enempêchent,bloquentmesbraslelongdemoncorps.

–Çasuffit,Rose!Maintenant,tum’écoutes!

Pousséeparlaragequis’estemparéedemoi,jenedesserrepaslesdentsetletoise.Maraisonadéjàenfilésesgantsdeboxe.

–J’aitentédet’oublier.Ouais,c’estvrai…Jeneleniepas.Parcequejevoulaisautrechosepourtoi!Terends-tucomptequetuneserasjamaismafemme?Quenousn’auronspasd’enfants?Quenousnevieillironspasensemble?Ouais,jesouhaitaisquetuaiestoutça.Etpas…ça.

Ilmelâcheetsedésigne,d’unemainsurletorse.

–J’étaisincapablederesterloindetoi.Sij’aiagicommeça,c’étaitpourtefoutrelapaix.Tucroisquec’est facilepourmoi ? Je t’offrequoi, sérieux?Unemoitiéde cadavre !Bon sang, sois réaliste,Rose!

J’entrouvrelaboucheetlarefermeaussitôt,incapablederépondrequoiquecesoit.Jen’arrivepasàenvisagercetteréalitéparcequeje larefuseenbloc.Etpourtant,c’est lavérité :pasdeprojet,aucunrêve d’avenir… Ma lèvre inférieure tremble nerveusement alors qu’il caresse mes bras, tente dem’apaiser.Jetangue,complètementperdue,etm’appuiesurlemeubled’entrée.J’inspireprofondément,évite son regard braqué surmoi. Il attendma réaction. Je suismême certaine qu’il préférerait que jeprenne la sortiede secoursqu’il a sciemmentévoquée lorsdenotredernièreconversation.Maisc’esthorsdequestion!Jenel’abandonneraipas,jamais!J’enseraisincapable.Jerelèvelenezetcroisesonregard voilé, étrangement vide de toute émotion : un puits sans fond. Comme si les mots que jem’apprêtaisàprononcerpouvaientluiextirpersonderniersouffledevie…

–Je suisconscientede toutcequeça implique,Gabriel. Je suisprêteà levivreavec toi. Jusqu’aubout.Etoui,jeleveux,aucasoùceseraitunequestion.–Quoi?–Oui,jeveuxdevenirtafemme.

Ilrecule,medévisage,lesyeuxgrandsouverts.

–Je…Enfintu…Turacontesn’importequoi.Onnepeutpas.–Biensûrqu’onpeut!

Ilritnerveusement,s’arrêtenet,secouelégèrementlatête.

–Tun’espassérieuse?–Si!Jedoism’exprimerdansquellelangue?

Pourquoisemble-t-ilaussidésespéré?D’unseulcoup,j’aipeurqu’ilmerepousse…

–Jenesaispas.Nousn’auronsjamaisletempsd’organiserunmariage…Ettavieaprèsça…Je…

Ilpanique,netrouveplussesmotsetn’osemêmeplusmeregarder.Cesoir, jedécouvreunGabrieldéstabilisé.UnGabrielquidoute,quiapeur…Jenecomptepasabandonner.

–Gabriel,pourunefois,c’estmoiquiteledemande:as-tuconfianceenmoi?

Je rêvaisd’unedemandeenmariageunpeudifférente,maisc’estmort. Ilpensequesavieestdéjàterminée…Donccettefois,c’estmoiquiprendslescommandes!Letempsestnotreennemi,maisilesthorsdequestionquel’onsepriveàcausedeça!Nousvivronsaujourlejour,maispleinement.Gabrielestpersuadéqueplusrienn’estaccessible.Jevaisluiprouverlecontraire.

Déterminée,jetraverselapiècesurmeséchasses.Cen’estpastrèspratique,maisj’avouequej’aimebeaucoupcecadeau.Jem’emparedemontéléphoneetcomposeunnuméro.

–Poupée,je…–Valentin,tutetaisettum’écoutes!Jeseraibrèvealorssoisattentif.Tuasunedizainedejourspour

organisermonmariage.

Les hurlements de joie à l’autre bout de la ligne m’obligent à reculer le combiné de mon oreille.J’attendsunmomentquemonmeilleuramisecalme.Ilestcomplètementsecouédubocal!Jel’imaginesautantpartoutdansl’appartementdudessous.Jeglousse.

–Valentin?C’estbonpourtoi?–Ah,maislaisse-moitranquille!J’aiduboulot,j’aiunmariageàpréparer,moi!

Jesouris.Jesavaisqu’ilseraitlapersonneidéalepourça.

–Jet’adore.

–Moiaussi,beauté!Tuneregretteraspas!–Auplussimple,Valentin!–Oui,oui,t’inquiète.

Jem’apprêteàouvrirlabouche,maisj’entendsdéjàlebipquim’annoncequ’ilvientdemeraccrocherau nez. Je n’ai pas le temps de réagir quemes pieds décollent du sol et jeme retrouve projetée surl’épauledemonCompliqué.Qu’est-cequiluiprend?

Il fonce sur le palier, ouvre la trappe puis grimpe à l’échelle avecmoi installée surmon perchoir.Forcément, ce satané vertige n’a toujours pas préparé ses valises et jeme cramponne au tee-shirt deGabrielàlavueducarrelagequis’éloigne.Jesuisunpeudésorientéequandilmedéposesurlaterrasse.Quemevautcerevirementdesituation?Jesuisdéconcentréeparlavuedesétoilesparsemantleciel.JedélaissefinalementmacontemplationetcherchemonCompliquéquiadisparudemonchampdevision…

Moncœuraunraté:iljoueàl’équilibristesurlereborddutoitterrasse.Jemeretrouvequelquesmoisenarrière,quandilétaitperchésurceluiduSaphir.Cesoir-là,Gabrielm’avaitfichueunetrouillebleue.Iltendlamainversmoi.Oh,la,non!Jesecouenégativementlatêteenreculantd’unpas.

–Rose,tusaistrèsbienqu’ilnet’arriverarien.

C’estvrai…maiss’ilcroitquec’estfacilepourmoi,ilsetrompe.Hésitante,jetendsmesdoigtsenavant… J’ai lemauvais réflexe de jeter un coup d’œil vers le bas. Ilm’en empêche et redressemonmentondanssadirection.

–Regarde-moi.

J’obéis,ancremesprunellesauxsienneset,quelquepeutremblante,accepted’êtreguidéejusqu’àcequemesdeuxpiedsseretrouventsurcesatanémuretau-dessusduvide.Jerestefigée,fermelesyeuxettentedemaîtrisermonrythmecardiaque.Jenecrainsrien!J’inspireprofondémentunbold’airfraisetles rouvre. Où est passé Gabriel ? Mes pupilles s’agitent, mais sa main tient toujours fermement lamienne.OhmonDieu!Complètementretournée,jeplaqueunepaumesurmabouche.Ilestàmespieds,ungenouàterre.

–Rose,accepterais-tudedevenirmonunique?

Sonquoi?

–Tonunique?

Ilsourit.

–Oui,monuniquedésir,monuniqueamour,monuniquefemme…

Oh,monCompliqué,tuesvraimentmagnifique,merveilleuxettoujoursaussisurprenant.

J’aimecettedemandeplusquetout.J’aimeabsolumenttout:ledécor,sesyeuxremplisd’amourpourmoi,sonpetitsourireaccrochéauxboutdesessublimes lèvres…Jegravel’instantdansmamémoire.Mêmemessensations,jelesenregistre.Jesouhaitequecemomentresteintactàjamais…

–Rose?

Maconsciencem’envoieunseaud’eauenpleineface.Monvisages’illumine,jesouris.

–Oui,jeleveux.Maisseulementsituacceptesdedevenirlemien.–C’estimpossible,Rose.

Cen’étaitpaslaréponsequej’attendais…Jeperdsmonsourireinstantanémentetfroncelessourcils.

–Maisqu’est-cequeturacontes?Biensûrquesi!Pourquoilaréciproqueneseraitpaspossible?–Parceque,bébé…Aprèsmoi,tuaurasuneautrevie.–Non!

Jerepoussecatégoriquementcetteidéeetsecouenégativementlatête.Ladétressem’attrapeàlagorge.Iln’yaetn’yauraquelui.C’estcommesimondestinétaitécrit,qu’ilnepouvaitenêtreautrement.Jerefused’envisagerl’après.Gabrielseredresseetsamainvientcaressermajoueavecdouceur.

–Rose,jet’aimeplusquetout,maisjesuisconscientquetuasunavenirquit’attend.Jeveuxquetuvives,monange.Trèslongtemps,même.

Jamais!C’esthorsdequestion!C’estimpossible,impensable…Jesuisincapabled’aimerquelqu’und’autre.

–Non!Jet’interdisd’oserdiredeschosespareilles!Tuesmonunique,Gabriel!Queçateplaiseounon!

Sesdeuxpaumesseposentsurmesjouesetsesyeuxtranspercentlesmiens.

–Monange…C’estdouloureuxpourmoid’imaginerça,maisj’aimeraisquetuessaies.

Leslarmesmemontentauxyeux.

– Je n’essayerai rien du tout ! Tu ne comprends pas ! Si toi tu n’es plus là, il n’y aura personned’autre…Jamais.C’estjusteinconcevable!

Unepluieacidecoulesurmesjoues.Gabrielnecomprendpasquemoncœurestàlui,toutcommemonâme.Sanslui,jesuisvide,insignifiante,etcomplètementperdue…

–Nepleurepas,bébé.Jesuisdésolé.J’aimeraisseulementquetutefassesàl’idéequ’uneautreviet’attend,mêmesitugardestoujoursuneplacepourmoiici…

Unedesesmainsquittemajoueetseposesurmapoitrine.Moncœurbatirrégulièrement,monsangnecirculeplusdansmesveines.

Pourquoinem’écoute-t-ilpas?Pourmoi,c’esttellementlimpide:ceseratoujourslui,toujoursetàjamais…Jemedouteque lespersonnesquiviventcegenrededrame tententde reconstruire leurvie.Maisqu’yaurait-ilàreconstruire?

JenepeuxpasreconstruireGabriel!

Ilestmontout,mavie.Aprèslui,jeneseraisplusqu’untasdegravats…Jeseraiabîmée,estropiée,maisjenedésireraipourrienaumondeoubliercequirestera:lessouvenirsdemonbonheur,denotreamour.

Gabriel reste muet. Il essuie mes larmes du bout des doigts et m’entraîne pour m’asseoir sur labanquette chocolat qui trône toujours sous sa tonnelle. Il s’installe près demoi en serrantmes doigtstremblants.

***

GABRIEL

Surletoit,dimanche27août,21h34

Qu’est-cequedixjoursdansunevie?Riendutout.Quelquessouvenirslointainsoualorsdesjoursdeboulot dont on ne se souvient même plus. Sauf que pourmoi, tout est différent : chaque seconde estdevenueprécieuse.Dix jourspourqueRose soitheureuseetqu’elle réaliseun rêveauquel je n’avaisjamais songé. Ce petit bout de femmem’a totalement transformé : elle a fait demoi un homme biendifférent.

Moi,GabrielAlcott,anticonformistesefoutantouvertementdecesconnerieslà,j’aireçuunuppercutenpleincœuretlesdésirsdeRosesontdevenus,enuninstant,miens.C’estdingue,jecroisquejedésireencoreplusqu’ellecemariage.Maislemomentn’estpasaussimagiquequ’illedevrait.J’aitentédelui

ouvrirlesyeuxsurl’avenir,qu’ellecomprennequejeneseraipastoujourslà,saufquejem’ysuismalpris.Comment lui fairecomprendrequej’aibesoindesavoirque tout irabienpourelle?Maintenant,elleestdéçueetlatristessesursonvisageestinsupportable.Jemesecouementalementafinderectifierletir.Cen’étaitpaslejourpourabordercesujet.Pourletact,cen’estpasencoreça…

–Rose,jedésireêtretonunique…Est-cequetuveuxtoujoursdemoi?

Je l’aiperturbée, lui aigâchécemoment important.Qu’est-cequine tournepas rondchezmoi ?Àcroirequej’aimetoutfoutreenl’air!Rosemetoiseetravaleunsanglot.

–Tum’énerves,Gabriel!Épouse-moietarrêtedefairechiertonmonde!

Tesdésirssontdesordres,monange…

Jel’attrapeetlasoulèvepourqu’elleseretrouvesurmoi.J’adopteunairfaussementmenaçant.

–Jet’interdisdeparlercommeça!

Ellesourit…J’ail’impressiondedéteindreunpeusurelle…Etj’aimeplutôtça…Mesdoigtscourentsur ladentelle…Ladentelle ?Mon intérêt seporte immédiatement sur l’ourletde sa robe légèrementretroussé, laissantapparaître lehautd’unbas…Intéressant.Jedétaillesa jambejusqu’aujoliescarpinquejeluiaioffertetquiluisiedàravir.

–Lève-toi!–Quoi?

Ellem’observeavecdegrandsyeux.Elleestàmillelieuxd’avoirlesmêmespenséesquemoietresteprobablement concentrée sur notrediscussion,mais je suis déjàpassé à autre chose…Une chose trèsattirante:soncorps.

–Mets-toidebout,là,devantmoi.–Mais…–Obéis!

Elleseredressed’uncoupdevantmontonsec,nesachantplusoùelleenest.J’aimeladéstabiliser.Elle rabaisse sa robe en se dandinant, mal à l’aise. Je la contemple sans un mot et elle cherchedésespérémentdansmonregarduneréponseàsesquestionssilencieuses.Jem’installeconfortablementsurlecanapé,lesbrassurledossier.J’écartelesjambesetellecommenceàserenfrogner.

–Gabriel,qu’est-ce…

–Chut…

Sonpetitnezseretrousse…Tropcraquante.

–Rose,remonte-moiunpeucetterobe.

Elleobserveleboutdetissuquilacouvrepuislèvelesyeuxversmoiavantdelaremonterlégèrement,semordantlalèvreetsesjouesdéjàrosies.

–Encore.

D’instinct,elleobservelesalentours.

Jesuisleseulspectateur,bébé…

Roseesttoujourstrèsdocilequandj’emploiecetimbredevoixetelleexécutemonordresanstenterderétorquer.Ladentelleapparaîtbientôtsursescuissesblanchesetdélicates.Matempératurecorporellegrimpeenflècheetmeshormonesdemâledominantmedictentmesactespourmonplusgrandplaisir.

–Tourne-toi.

Ellesouritfaceàmonregardchargédedésiretexécuteundemi-tourenremontantencoreplussarobe,medévoilantlanaissancedesesfesses.Jehausseunsourcildesurprise.Mesdoigtsseresserrentsurledossier:elleneportepasdeculotte.Jedéboutonnemonjeandevenud’unseulcoupbientropétroit.

Ellecontinuesonpetittourensetrémoussant.Jeladévoredesyeux.Mafuturefemmeestmagnifique…Terriblementsexy…

Elle s’avance lentement versmoi, attendantmon accord que je ne lui donne pas. Je reste statique,concentrésurcecorpsquidéconnectemoncerveaudelaréalité.Rosepasseoutremonattenteetcontinuedansmadirection. Jedétaille chacunde sesgestes lorsqu’ellegrimpe surmoi.Ses lèvres impatientess’attaquent immédiatement à mon cou. Ma peau s’enflamme sous chacun de ses baisers. Je lâche ledossierpourglissermesmains sur sescuisseset caresser sesbas, ladentelle. Je remonte jusqu’à sesfessesetsoulèveletissujusqu’àsataille.J’aventureunepaumesursapoitrinegonflée,lourdededésir,etsuisplusquesatisfaitdedécouvrirqu’elleneporteaucunsous-vêtement.Plusriend’autren’existequesoncorpssurlemien.Montee-shirtsemblelagêneretRosechercheàs’endébarrasserauplusvite.Ellelebalanceetsejettesurmontorse,boucheenavant.Ellefrottelentementsonintimitésurmonérectionàtraversletissudemonboxeretdéclencheenmoiuneirrésistibleenviedelarenversersurcefauteuil.Sijem’abandonnaisàsescaressespressées,jepourraisjouirsansmêmelapénétrer.Roseacepouvoirsurmoi,maisjepréfèregarderlecontrôle.

J’attrape sonmentonentremonpouceetmon indexpourpossédercettebouchequim’appartient. Jeglisseunemainentresescuissestrempées,arrêtantimmédiatementsesmouvements.

–Soulève-toi.

Monanges’exécute,seretrouvantàgenoux,jambesécartéesetmainsposéesdechaquecôtédemoisurledossierducanapé,offerteàmoi.Jegrogneintérieurement,satisfaitdecettejolieposture.Jeportedeuxdoigtsàmabouche,lessuce.Sabouches’entrouvredevantcegeste.J’investisl’intérieurdesescuisses,écarteseslèvresetyinsèremesdoigts,lacaresse.–Enlèvetarobe.

Elles’endébarrassedansungesteélégant,medévoilantsapoitrinegonflée,pointantversmoi…Pourmoi.Jeluiarracheungémissementquejesavoure.

Roseestdivinesouslalumièredelapleinelune,lesyeuxembuésparleplaisirquejeluiprocure.Jeprofited’unsecondgémissementpourintroduiremesdoigtsenelle,transformantcebruitplaisantenunpetitcridivin,maiscontenu.

–Laisse-toialler,bébé.

Sonbassinrejointmamain,onduleetjemedélecteenlacontemplants’abandonner,lâcherprise.Ellebascule la tête en arrière. J’en profite pour attaquer la peau fragile de son cou, alternant baisers etmorsures.Putain, je suisaccroà sapeau !Soncorps tremble sousmes lèvres.Monpouce rejoint sonpointsensible,propulsesonorgasme.Sonsouffleestcourtetlemiendevienterratique.Ellesecambred’uncoupetc’estl’explosionenmoi.Jelaveuxtoutdesuite.J’aibesoind’êtreenelle.J’ôtemesdoigtspourmedébarrasserdemonboxeretlapénètreenuncoupdereins.Soncriestplusfrancalorsqu’unsifflementfiltreentremesdentsenréponse.Putain,quec’estbond’êtreenelle!Migraineenvolée,tousmessoucisévaporés,iln’yaqu’elle…Absolumentplusriend’autren’existe.Jelaretiensempaléesurmoipourprofiterdecemoment,pourluipermettredes’adapter,demesentirl’emplirentièrement.Sesparoissecontractentdélicieusementetjefermelesyeuxuninstantpoursavourercemoment.Elletentederemuer,maisjel’enempêche.

–Gabriel…

Jemedélectedechacundesesfrissons,desonimpatience.

–Soissage…

Jeprendstoutmontempspourlagoûter,poursavourersonparfumvanillequimerendcomplètementdingue.

–S’ilteplaît…

Elle est àbout,mais j’aimeraisqu’ellemedésire encoreplus. Jeveux lamarquer,qu’ellen’oubliejamais ce que « Nous » signifie. Je la relâche le temps d’un seul aller-retour délicieux et la bloqueaussitôtpourm’attaqueràl’autrecôtédesagorge.Uneplaintesortdesagorge.Jelalibèreunesecondefois, lui permettant de remonter et descendre, ses parois se contractant autour de mon sexe. Je lamaintiensànouveauparlescuisses,empêchanttoutmouvement.

Haletante,Roseplantesesyeuxsuppliantsetdésespérésaufonddesmiens.

Moiaussijetedésire,bébé!

Je lui donne un coup de reins qui me balance une décharge électrique jusque dans la colonnevertébrale.Soncrirésonneautourdenous,accentuantmonplaisir.

Jeserrelesdentssoussesonglesquim’agrippent,quipénètrentmapeau.Jelamaintienscontremoiunmoment et recommence lemouvement. Je laveuxaubordde la jouissance leplus longtempspossiblepourqu’unefoislibre,celadécuplesessensations.J’aienviedeluifaireperdrelatête.

Nem’oubliejamais,monange.

Aucoupsuivant,elleprononcedesparolesincohérentescontremonoreille…

***

ROSE

OhmonDieu ! Jene saisplusoùm’accrocher. Je suis sur lepointdenon-retourà chaque foisqueGabrielsedécideàm’accorderunmouvement.Haletanteetdépasséeparmonenvieincontrôlabledelui,j’enfoncemesonglesdanssapeau,réclamantdelesentirbougerenmoi.Qu’ilmebriseencorecommeunelamedefondsurl’océan.Moncerveauaperdutoutessesfacultés,maraison,toutemorale.Ilpeutfairedemoicequ’ildésire,jeluiappartienstoutentière.Jecriequandils’enfonceànouveauenmoi,matêtebasculantenarrièrealorsquesabouchetorturelapointedemonseinavecavidité.Ilseretire.

Non,maisnon!

Jesuisperdue,jen’aiplusaucunsensdelaréalité.

Non!

Désespérée,jecherchesonregardalorsqu’ilmesoulèvepourmereposeràgenouxsurlabanquette.

Gabrielseredresse,sedébarrassedeseschaussuresetdurestedesesvêtements.Jenemelasseraijamaisdelecontemplernu.Cethommeauncorpsàsedamner.Ilinstallemesmainssurledossierenposantdedélicatsbaiserssurmanuque.Sespaumessuiventmescourbestandisquesalanguedescendlelongdemacolonnevertébrale,m’arrachantdestressaillementsàn’enplusfinir.

–Putainbébé,tuestellementbelle!Tellementdouce…Parfaite…

Savoixrauquerésonneenmoicommeunedoucemélodie.Saboucheetsesmainsseposentsurmesfesses.Jetremble,mecambrepourm’offriràlui.Jesuiscomplètementàbout…Jefondsdel’intérieur,espérantqu’uneseulechose:queGabrielmepossède.Ils’amuseàmemettrehorsd’haleine.J’aibeaulesupplier,ilcontinuesonmanège.Jetressautelorsquesalangueglissedélicatementlelongdemafente.Mespoingsserefermentsurledossieretungémissementdeplaisirm’échappe.Sesdoigtsécartentmeslèvresetsaboucheenserremonpointsensible,tellementsensiblequejeretiensuncrisoussessuccions.Jenesuisplusrien,àboutdenerfs.J’enfoncemesonglesdansletissuchocolatducanapé,maisGabriels’arrêteencore.

–Bordel,Gabriel,prends-moi!

Ilémetungrognementrauque…terriblementsexy.Ilvamerendredingue!

–Patience,monange.

Je suis désespérée…Mes hormones le réclament, hurlent, s’affolent dans tous les sens.Mon sangbouillonne.Sonsexecaresseenfinlemien.Jemordsfortementmalèvreetpoussemesfessesenarrière.Jerisquedefondreenlarmess’ilnesatisfaitpasmesattentesimmédiatement.Enunepoussée,ilestenmoi.Mesterminaisonsnerveusess’accordenttoutesenmêmetempsetjemecontracteautourdeluidansun soupire de satisfaction. Il se retire et s’insère une seconde fois, fortement, profondément, puis unetroisième.Unevaguemesubmerge.Jehurlesonnomsousleplaisirquiestmontéenmoi,mepoussantauborddelafalaise.Jejouissansaucuneretenue.C’esttellementbon…

J’ai du mal à retrouver ma respiration. Mes jambes tremblent, mais ses mains me maintiennentfermement par les hanches alors qu’il recommence ses coups de reins, encore et encore… Je ne suismêmepasremisedemonorgasmequejesensunsecondarriverenforce.

Oh,cen’estpaspossible!MonDieu!

Je creuse un peu plus les reins. Il n’y a plus que le bruit de nos gémissements et de nos corps quis’entrechoquent. Toutmonte enmoi à une vitesse affolante, je suis submergée de sensations. Son râlepuissant résonnedanschaquepartiedemoncorps. J’exploseet leplaisirdéferle enmoi.Monsouffles’échappeentremeslèvresentrouvertes.Gabrielcontinuedebougerenmoi.Jesavourelasensationdecesexegonfléenmoiquiprolongemonplaisir.Underniercoupdereinspluspuissantetsesdoigtsse

refermentbrusquement.Sadoucechaleurenvahiemonventre…

Jelâchetout,incapabledemesoutenir,etm’écroulecommeunepoupéedechiffonsurlecanapé.Sapeau vient délicatement épouser celle de mon dos. Mon corps émet de petits tressautements et larespirationsaccadéedeGabrielcaressemoncou.Je lesenssourirecontremapeauet jesourisàmontourpendantquesesdoigtss’entremêlentauxmiens.

Jemelaissebercerparsesbaiserssurmesépaules.

–Jeseraiscapabledetefairel’amourjoursetnuits.–Jenetiendraisjamaislacadence.

Sabarbesurmapeaunuelorsqu’ilritmechatouille.

–Tuesdéjàfatiguée?

Ohnon,nemeditespasqu’ilcompteremettreça!

–Épuisée,vidée,maispleinementsatisfaite.

Ilseretireetjegrimace.Jedétestecettesensationdemanquedansmonbasventre.Gabrielmepousseà pivoter sous lui. Ses lèvres cherchent aussitôt les miennes, j’aime le voir passionné, si détendu,paisible.Sabouchesedétacheetilm’observeattentivement.

Jeglissemesdoigtsdanssescheveux.Ilsontbienpoussé…

–Tun’asvraimentrienàmedire,bébé?

Jerestedubitative.Qu’est-cequ’ilentendparlà?Jeneluicacherien…Jerepenseaumessagereçuplustôt…Gabrielsecomporteétrangement…J’avoueêtretotalementpaumée.

–Euh…non.

Le pli qui s’installe sur son frontm’inquiète. Il se redresse d’un coup pour enfiler son caleçon. Jel’imiteenattrapantmarobe.

–Gabriel,nejouepasàça,s’ilteplaît.Dis-moicequetusous-entends,ceseraplussimpleaulieudetefermer.

Ilm’arrachelarobedesmains.

–Lèvelesbras.–Non!Réponds-moid’abord.–Turisquesd’attraperfroid.Letempss’estrafraîchit.

Ilsefoutdemoiàchangerdesujetcommeça?Ilnecomptepasrecommencersonpetitmanège!

–Maistuvasarrêterdeteconduirecommeunabrutietparler?

Ilmedévisage,froncelessourcils.Jesaisqu’ildétestequ’onluitiennetête,maislescachotteries,çavabiencinqminutes.

–Lèvelesbras!

Jem’exécute, pas parce que j’abandonne,mais parce qu’effectivement, je commence à ressentir lefroidd’unepetitebrisesurmoncorpsnu.Ilsedétourneensuite,maisjelerattrapeparlebras.

–Situcomptestefermercommeàtonhabitude,jetepréviens:j’emballemesaffairesetjeretourneavecmescolocs!Sionsemarie,j’exigequetuarrêtesdetecomporterdecettefaçon!

Ilsefigeetsedécideenfinàmeregarder.

–Pourquoitunemeparlespasdubébé?

Qu’est-cequ’il raconte? Ilauraitentenduquelquechosequand ilnousa rejointsquand j’étaisavecAude?Impossible…Ilécouteraitauxportes?

–Quoi?

Ilhausselesépaules.

–Tuaspeurquejenel’acceptepas?

Qu’iln’acceptepaslebébéd’AudeetdeCameron?Mais…maisqu’est-cequ’ilraconte?

–Gabriel,explique-toi.Jenecomprendsrien!

Ilcontractelesmâchoires.

–Putain,arrêtedemeprendrepouruncon,Rose!J’aitrouvéletestdegrossesse.Ilesttombédetarobe!

Jerestecommeuneidiotefaceàlui.Notrebagarresurlelit…J’aidûleperdreàcetinstant…Labelleidiote… Moi qui cherchais à lui éviter des soucis supplémentaires, j’en ai créé d’autres bien plusimportants.

–IlestàAude,cetest.Jel’aijustecachédansmapochequandtuesarrivé.

Ilsoupiredesoulagement…Enfin,jecroisquec’estdusoulagement.

–J’aipenséquetuappréhendaismaréaction.Jesaisquej’aiuncaractèredemerde,mais…

Ilestperturbé.Iln’arrêtepasdeglissersamaindroitedanssescheveuxetsursanuque.Uneénormetensionémanede lui et le sexen’a apparemment rien arrangé. Il est à bout de nerfs,même ses doigtstremblent.Gabrielnel’avouerapas,maisilréprimesesbesoinsparcequ’ilestavecmoi.Quandilesténervéilrecherchetoujourslamêmechose:lessensationsfortes.

–Motoouvoiture?

Ils’arrêtenetetmedévisageunmomentavantderépondre:

–Voiture.–OK,onyva!

J’enjambel’échelle.Jem’efforcedenepasregarderenbas.

–Commentça«on»?–Jeviensavectoi.Jetesuisdanstoutestesfolies,jeterappelle.–Rose,non!

Jesauteetilmerejoint.

–C’estcommeça,Gabriel.Tudevrast’yhabituer.

Jepousselaporte.Ilmesuitencaleçon,sesvêtementsetseschaussuresdansunemain.Heureusementqu’onn’apasdevoisinesdepalier!

–C’esttropdangereux,bébé.

Jemedressesurlapointedesorteils,tentantdemegrandiraumaximum.J’afficheunairsérieuxetlefixebiendroitdanslesyeux.

–J’enaibesoinaussi.Alorshabille-toi!Jemontemechanger.

Jene lui laissepas le tempsd’ouvrir labouche, tourne les talonset fileà l’étageendirectionde lasalledebains.

J’enfiledessous-vêtements.Jegrimaceenmerappelantquej’aijetémonjeanàlapoubelleetfinisparopterpourunslimnoir.Jepasseensuiteuntee-shirt,enfiledesballerinesetressorsaussisec.Jefouillemespochesàlarecherched’unélastiqueetimproviseunchignon.Jedévalelesescaliersd’unpasferme,maisjeralentis.Putaindevertige!

Gabriel,quisemblaitêtreautéléphoneavecquelqu’un,raccrocheetfourresonportabledanssonjeanaumomentoùjelerejoins.J’attraperapidementunevesteetmonsacàmain.

–Tuesprête,bébé?–Ouais,bébé!

Ilhausseunsourcil,mejaugedehautenbasavantd’ouvrirlaporteavecunpetitsourireencoin.Nousdévalonslesescaliers,sonbrasagrippantfermementmataillepourm’accompagnerdansladescente.Oùest-cequ’ilm’emmène?Ilyadesétagescachésdanscet immeublemaparole!Ahoui,forcément,unautresous-sol,suis-jebête!Oùrangerait-ilsesbolidessinon?LaplupartdutempsilsegaredevantouDouglasnousdépose.Jen’aijamaiseul’occasiondevenirici.J’observel’immensepièceetmesyeuxs’arrêtent sur unvéhicule accidenté abandonnédans un coin et recouvert de poussière. Je ne parviensmêmepasàendéterminerlacouleur.

–Tuaseuunaccident?–Sionveut.

Ses joues secreusent. Ilm’ouvre laportièrede laNissanGT-R. Jem’installe sur le siègepassagerpendant qu’il grimpe au volant. Le moteur ronronne divinement. L’adrénaline m’envahit aussitôt.Deviendrais-jecommelui?Gabrielm’attacheavantd’embrayer.

–Raconte-moi.

Laportedusous-terrains’ouvreetnousnousengageonssurlaroute.

–Jel’aidéfoncéeàcoupdebattedebase-ball.

Ah ! J’aurais pu imaginer quelques scénarios, mais franchement, celui-ci ne me serait pas venu à

l’esprit.Est-cequejedevraisêtrechoquée:sûrement.Est-cequejelesuis:non.Toutbonnementparcequedepuisl’épisodedelacave,plusrienn’estenmesuredemesurprendre.Gabrielestimpulsif,maisçanemedérangepas.Jesuisjustecurieusedesavoircequil’amisdansunétatpareil.

–Pourquoi?–C’étaitmapremièrevoiture.J’étaisunpeuéméchéetpuisvoilà.–Etlavérité?

Ilsouritunbrefinstantetsonexpressionchangedutoutautout.Elledevientgrave,plussombre.

–C’étaitmapremièrevoiture.J’avaisbu.Jevenaisdetrouvermamèrecomplètementeffondréeparcequemonpèrel’avaitencoretrompée.

LesdoigtsdeGabrielresserrentlevolant,sesjointuresdeviennentblanches.

–Pourquoireste-t-elleaveclui?–Jenesaispastrop…J’ail’impressionqu’elleestperduequandceconnardn’estpaslà.

Je connais ce sentiment douloureux et impossible à contrôler, mais supporter ça… J’en seraisincapable.L’aimerait-elleàcepoint?

–Ellel’aime.

Il grimace et accélère d’un coup. Je m’accroche aux harnais par réflexe. J’aurais peut-être dû metaire…Enfin,ilfautvoirleboncôtédeschoses.MalgréquejesoispeinéeparlasituationqueGabrielsupporte,nousavonsréussiàéchangerquelquesmotssurlesujet«famille»sansdéclencherd’ouragan.Maconsciences’enfileunecoupedechampagne!

Lesilences’installe.MamainglissesurlacuissedemonCompliquéetj’observelaroutebalayéeparleslumièresdeslampadaires.Nousnecroisonspersonne.C’esttellementpaisible…Jesuisjustebercéeparlebruitdumoteuretsapuissancequirésonnedansmesoreilles.

–Alorscommeça,Cameronvaavoirungosse?

Jemeretourne.Ehmerde!Aude!Avectoutça,jen’aipaspenséàprendredesesnouvelles!J’extirpemontéléphone,maispasdechance:jen’aiplusdebatterie.Quellepoisse!

–Ças’avèrecomplexe.–Iln’estpasaucourant,jesuppose.

Jemedemandebiencommentças’estpassé.

–Normalement,àl’heurequ’ilest,si.–Jecomprendsmieuxsoncomportement.–Pardon?–Ouais,ilm’aappelécomplètementpaniqué.Tacopinel’aapparemmentinsultésansraison.

Jegrimace. Il fautbienavouerqu’ellen’yestpasalléedemainmorte sur lecoup.L’inquiétudemegagne.

–Elles’estemportée.Elleapeurqu’illarejette.Ilauraitsoi-disantquittéunedecesexàcausedesondésird’enfant.

Pourquoirigole-t-il?

–Iln’yriendedrôlelà-dedans!–Cameronestspécial.Lefaitqu’ilsoitavectacopinedepuissilongtempsestdéjàunexploit!–Ettucroisqu’ilprendrabienlanouvelle?–Aucuneidée!Onn’abordejamaiscegenredesujet.

Ilnem’aidepasdesmasses,là…J’aivraimentbesoind’envoyerunmessageàAudepourluipréciserquejepenseàelleetpoursavoirsitoutvabien.

–Jepeuxempruntertontéléphone?

Ilmetendl’appareiletjetapoterapidementunpetitquelquechoseenespérantqu’ellenedormepasencore.

Nous nous garons aumilieu de nulle part et je reste étonnée de n’apercevoir personne au point derendez-vous.Jenereconnaispasl’endroit.Rienàvoiravecceluidelapremièrefois.J’ail’impressionquelaroutesinueusequisedressefaceànousestencoreplusimpressionnante,plusabrupte.Gabrielsedétacheetjel’imite.J’aienfintrouvélatechniqueaveccessatanésharnais.

–Oùsontlesautres?

Saboucheglissedansmoncou.Jefrisonnependantqu’ilgoûtemapeau.

–Hmm…Tusensbonlesexe,bébé.

JeserrevivementlescuisseslorsquelesimagesdemoisurlecapotdelavoitureavecGabrielentremes jambesécartéesme traversent l’esprit.Oh…Jecroisque j’aidécouvertcequ’était réellementunfantasme!Undoigtglissesurmajouerougie.

–Eh,disdonc,bébé.Tupensesàquoi?Tonattitudeesttrèsintéressante.

C’estsiflagrant?

–Je…euh…rien.Étrangement, je suis gênée. Les prunelles grises inquisitrices de Gabriel me sondent, cherchent à

devinermespensées,maisjenemesenspasencorecapabled’exprimeràhautevoixcequimetraversel’espritetmefiledesvapeurs.Sonregardseveutdeplusenplusdéterminé.

–Jesuispourtantcertainquec’esttrèsintéressant.

Leronronnementd’uneautrevoituresegarantàcôtélepousseàsedétacherdemoi.JesursauteàlatêtedeChadapparaissantderrièremavitre.Ilestvraimentflippant,cetype!Unfrissonglacialparcourtmondos.Meshormonessontpartiesseplanqueraussisec.Jesuisconscientequ’ilnemeferarien,qu’iln’ajamaisétéagressifavecmoi,qu’ilnem’ajamaismanquéderespectnonplus,maisc’estplusfortquemoi:ilestimpressionnant.

Il salueGabrielpuis retourneauvolant. Jem’attacheànouveau tandisqu’un type sortdubolidedeChad. Je suppose que c’est lui qui est chargé de surveiller et empêcher les voitures d’emprunter lecheminpendantlacourse.L’ascensioncommence.J’appréhendeunpeu,maispasautantquelapremièrefois.

Tout est différent quand je suis avecmonCompliqué.De toute façon, j’ai confiance.Une confianceaveugle en lui,même si je sais très bienque c’est dangereux, que les accidents n’arrivent pas qu’auxautres.Pourtant,sonattitude,sesgestesprécisnemefontpasdouterunseulinstantdelui.Laseulepeurquiresteestmonvertige.Jelacombats,maiselleestforte,trèsforte.Ellemetienttoujoursàlagorge,néanmoinsellen’aurapasledessussurmoi!J’éviteraijustederegarderlevideetmeconcentreraisurlaroute.

–TuasdemandéàChaddenousrejoindrejustepourunecourse?–Ouais.–Toutlemondecèdetoujoursàtescapricescommeça?

Nousnousalignonssurunelignededépartimaginaire.

–Chadesttoujourspartantpourcegenredechoses.Cen’estpaslapremièrefoisqu’onimproviseau

derniermomentjustepoursedétendre.

Étrange façon de se détendre…Lemoteur voisin rugit. J’ai bien l’impression que notre adversaires’impatiente.

–Tuasencorelapossibilitédechangerd’avis,bébé.

Jeremarquequej’aicrispémesdoigtssurlesiègesansm’enrendrecompte.

–Horsdequestion!

Ma tête est propulsée brutalement contre le siège lorsque le bolide s’élance sur l’asphalte.Gabrielaccélère, mais il reste derrière la voiture bleue électrique de Chad. Mon cœur bombarde dans mapoitrine.Jeconcentremonattentionsurlaroute.Qu’est-cequ’ilfiche?Ilestbienplusprudentquejenel’auraisimaginé.

Monregardsetourneversladroitel’espaced’uninstant.Levides’empressedemehappercommeunaimant.Moncorpssevidedesonfluidevital.C’estuneffortsurhumainquejedéploiepourarrachermespupilles dilatées à ce spectacle.Ma raison s’accroche désespéramment àmon harnais etme toise detravers. L’arrière de la voiture dérape dans un virage en épingle, mais la maîtrise de Gabriel estimpressionnante.

Ilpouvaitledépasserlà,jenecomprendspas!

–Maisdouble-le,bonsang!

Je me surprends moi-même par ma réflexion formulée à haute voix. Je remarque immédiatementl’hésitationdeGabrielàsesdoigtss’agitantnerveusementsurlecuirnoirduvolant.

–Fonce!

Mon cœur exécute un looping dans ma poitrine lorsque Gabriel se débride et se lance enfinvéritablementdanscepetitdueldesplusdangereux.Ilneluifautpasplusd’uneminutepourdépassersonadversaire.Jefermelesyeuxalorsquenousfrôlonslebordduprécipice.J’enaidessueursfroides,maisles sensations ne sont pas si désagréables. Bien au contraire… Si je fais abstraction de ma phobie,l’adrénalinequime traverseàchaquevirage,à la routequidéfileàunevitesse folleesteuphorisante.Monsangbouillonneetjen’aiqu’uneenvie:franchirlaligned’arrivéeenpremier!

J’exultelorsquelecrissementdepneusdûaufreinageprendd’assautmestympans.Mamainseposeparréflexecontre lavitrepour tenterdemaîtriser la forcecentrifugede lavoiturequi tournesurelle-mêmeavantdepilernet.Jememetsàrirepresquenerveusement.Gabrielsedétache,m’attrapepar la

nuqued’ungestevifetprécisetsejettesurmabouche.Waouh…J’enlèveàtâtonsmonharnaispourmerapprocheretm’accrocheràluialorsquenotrebaisers’intensifie,plustorrideetindécent.

Nosmainsexplorentavecpassion lecorpsde l’autre jusqu’àceque jemeretrouveperchéesursesgenoux.Quelqu’unfrappeaucarreauetGabrieltendsonmajeurdevantlavitre.Sonautremainretientmanuque pour m’empêcher de m’échapper. Il grogne quand ma bouche se détache avec difficulté de lasienne.Frontcontrefront,ilplongesonregardardentaufonddemesiris.

–Ondescend,onsedébarrassed’euxetonreprendoùonenétait.

Danslavoiture?Vraiment?Jesourisetmordillemalèvreenfantasmantsurlesimagesvagabondantdéjàdansmonesprit.Jem’extirpedubolideàcontrecœur,encoresecouéeparl’adrénalinedelacourse.Jeserrelescuisses,dévoréeparmonenviedeGabriel.Ilmerejointavecunpetitsourireencoinchargédesous-entendus.

Chads’approcheetjereculeaussitôtversmonCompliqué.Jen’avaisjamaisremarquélescicatricessursonvisage…Unfrissondésagréablemeparcourt.

Gabriel observe son téléphone unmoment avant de le porter à son oreille. Il balance un « ouais »agressifàsoninterlocuteur.Ils’écarte,maisjelecollecommeunesangsue.UntêteàtêteavecChadnemetentevraimentpas.

–Oh!Jenecomprendsrien,parlemoinsvite!

JesursauteimmédiatementetdévisageGabrielquis’empressedemedécolleretdemetournerledos.Qu’est-cequisepasse?Sonexpressionnecessedevarierentrelacolère,l’inquiétudeetl’agacement.

Jen’aipasletempsderéagir,nid’émettrelamoindreinterrogationquejecroiseunregarddesplusglacialalorsqu’ilraccroche.Matempératurecorporellechutebrutalement.

–Chad,tularamènes!

J’écarquille lesyeuxet tentedem’imposerquandGabriel seprécipite auvolantde savoiture.Desbrasm’encerclentetm’empêchentdebouger.Jen’ailedroitàaucunregard,aucuneattention.Jetentedemedébattre,rageethurleun«lâche-moi»danslevide.Bonsang,maisquesepasse-t-il?Oùva-t-il?

Lespneuscrissentetlebruitdumoteurm’estlimiteinsupportable.Pourquoim’abandonne-t-ilcommeça?MonDieu!EtavecChadaufinfonddenullepart!

Impuissanteetemprisonnée, jenequittepaslavoituredesyeux.Jelasuis jusqu’àcequ’ellefinissepardisparaîtretotalement.

Retrouvezletome3dèsle2mars!

Quelquesextraits

GetHigh

AvrilSinner

Raphaëlle, surfeusebretonneexiléeàParis, contrôle savieavec rigueur.Mais lorsqu'elle rencontreEdern et Jean, deux amis sombres et mystérieux, notre héroïne perd tous ses moyens et se laisseembarquerdansunerelationsulfureuse.Raphaëllearrivera-t-elleàsurvivreàcetriangleamoureuxsansoublierquielleest?

ParAvrilSinner.

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Extrait

Presque19heures…Bougerdececanapédanslequeljemevautredepuisaumoinscinqheures,voilàcequ’ilfaudraitquejefasse!Maisnoussommeslundi.Jenetravaillepasaujourd’huietalternealorsentremonlitetmoncanapé.Fumer,lire,refumer,regarderunesérieetéventuellementmanger.C’estàçaqueressemblentmesweek-endsdepuisaumoinssixmois.Messemainesnesontpastrèsdifférentesnon

plus.Saufqu’ilmefautsortirpouralleraucentremédicaldanslequelj’aimoncabinetdepsychologuedepuisunan.

Jem’extirpe enfin demon refuge et quitte le salon en direction dema chambre. Le regard perdu àtraverslafenêtre,jescrutelesgensmarcher,latêterentrée,lesmainsenfoncéesdanslespoches.Ildoitfairefroid.Noussommesennovembre,j’ailaflemmedequitterlachaleurdemonappartement.

Installéedanscedeux-piècesparisiendepuismaruptureavecMarc,jepensesouventàlui…Tropàmongoût.Noussommesrestésamis,maiscelafaitsixmoisquejenel’aipasvu.Depuisqu’iladécidédevivresonrêve:surferdanslesplusbeauxspotsdumonde.Lui,aumoins,ilasufairequelquechosede cette rupture.Moi, jeme demande parfois si c’était la bonne décision et commence à croire qu’ilresteramonseulgrandamour…Jel’aiconnuàdix-huitansetmisfinànotrerelationàvingt-six.Huitansà vivre une histoire au début passionnelle, compliquée, devenue progressivement confortable… Noscaractères forts et indépendants conjugués ànotrepassionpour le surfnousont rapprochés,mais celanousaaussiamenésàsouventnousaffronter.Jenesaispluscombiendefoisnousnoussommesséparéspourtoujoursrevenirl’unversl’autre.Cettefois,c’estdifférent.

Quandnousavonsaménagéensemble,nos affrontements sontdevenusdes compromis.Disonsplutôtqu’incapablesdenousquitternousavonsoptépourle«onnes’imposerien,onn’exigerien».Toutestalorsdevenucalmeentrenous.Tropcalme.Commeunemersansvagues.J’aifiniparnepluslevoir,neplus rien ressentir, juste savoir qu’il était là. Nous avons vite basculé dans l’ennui, le rien. À rêverd’avant… Deux surfeurs, natifs des côtes escarpées de Bretagne, échoués sur une plage de la Côted’Azur.

Jesuispartieunsamedisanschercherleconflit,ensilence.Unsursautdeviem’afaitprendrecettedécisiondansl’espoirderéveillermesémotionséteintes.Provoquerunetempêtesurcetocéansansvie.C’estcequ’ils’estpassé.Dumoinslapremièreannée.

Ilyad’abordeulasouffrance,lemanque.Uneprofondetristessemêléeàl’angoissed’êtreloindelui.Mais,aumoins,jeressentaisquelquechose.Puis,avecl’aidedemestroisamiescélibataires,jemesuisréinséréedans laviesociale, lemondedesvivants.Leréveil futbrutal.J’aimalnégocié lavague.Ledésirdesortir,parler,manger,baiserm’aexploséeenpleinefiguretombantalorsdansl’excèsinverse:j’airencontrétropdegens,tropbu,tropfumé,tropcouchéàdroiteetàgaucheavecdesmecsquejenesupportaispasplusdequarante-huitheures.Mêmesicettepériodeaétéintenseetriched’enseignements,j’enressorsaujourd’huifatiguée,blasée.Celan’afaitqu’accentuerl’idéeden’êtrepluscapabled’aimercommej’aiaiméMarcautrefois.Suis-jecondamnéeàl’ennuisurleplansentimental?

Aujourd’hui,mevoilàrevenueaupointdedépart.Depuisquelquesmois,jesuisdenouveauélectro-encéphalogrammeplat,commeanesthésiée.Plusaucunressenti,nienvie,nidouleurs,niexcitation.Maispourl’instant,çameplaît.J’enarriveàcroirequejem’auto-suffisetsouhaitequepersonneneviennetroublermaquiétude.Jenelepermettraipas.Vivreseule,totalementindépendantemeravitmêmesijeflirteparfoisavecl’isolement.

Nefermepastaporte

Lanabellia

EmilyvitavecsasœurTracy.Depuispeu,latranquillitédelajeunefemmeestremiseenquestionparDévinDaney,lepetitamidesonaînée.Emilynelesupportepasetils’amuseàlarendredingue.Elleestintrovertie,ilestdévergondé.Elleaimelire,ilpassesontempsàjouerdansunbaravecsongroupe.Ellecherchequelqu’undedouxetattentionné,c’estunbadboy.Emilyn’arienàvoiraveclui,alorspourquoisesent-elleautantattirée?Finira-t-elleparsuccomberàsoncharme?

ParLanabellia.

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Extrait

1.Lapinsmouillés

Ah!

Ma sœur arrive avec son horrible et tout autant détestable petit ami : Dévin Daney. J’attrapemonromanetmeplongedansmalecturepourévitertoutediscussioninutile.Tracyestdéjàentraind’arpenterlesalondelongenlargeenhurlantaprèssonDévin.Jel’observediscrètementpar-dessusmonbouquin:elleesténervée.Seslongscheveuxblondsflottentderrièreelleetsescourbesvoluptueusess’agitentdans

touslessens.

– Tuesunenfoiré,Dévin!Jen’arrivepasàcroirequetuaiesosérecommencer!

Etc’estreparti!

L’incriminé,quantàlui,s’esttranquillementinstallésurl’accoudoirducanapéetal’airdesefoutrecomplètementdelaénièmecrisedejalousiedemasœur.Jenecomprendspascommentelleréussitàlesupporter. Ils sont ensemble depuis sixmois et il l’a déjà trompée cinq ou six fois, sans compter sesroulagesdepellesintempestifsàdroiteetàgauche…

Ellepoursuitsapetitecriseetnil’unnil’autrenes’intéressentàmoi,cequim’arrange.Sij’aibiencompris, cette fois, elle l’a chopé dans les toilettes d’un bar en train de draguer une des serveuses.Connaissantmasœur,draguersignifieplutôtqu’ilavaitsalanguedanslabouchedeladiteserveuse.

Il faut avouerqueDévin est vraimentun trèsbel homme. Il est grand et sublimementbienbâti.Sescheveux,d’unbeauchâtainfoncé,sontcoiffésunpeun’importecomment,maiscelan’entacheenriensonstyledebadboyténébreux.Etpourneriengâcher,sesyeuxgrissontunepuremerveille.Maisc’estsanscomptersoncôtéinsupportable,désagréableetgrossier.Dévinestimbudelui-même,ilnerespecteriennipersonne.

Jenelesupportepas!

Ma sœur fonce à l’étage, excédée par le comportement léthargique de son petit ami.Ce dernier sevautresurlecanapé,justeàcôtédemoi.J’aidéjàenviequ’ilquittelamaison.

– Salutdindon,tulisquoi?

Enquoiçaleregarde,sérieux?IldoitavoirleQId’unehuître.

– Rien.

Je me recule et tente de reprendre ma lecture, mais c’est peine perdue, car le livre m’échappesoudainementdesmains.

– Dracula!

Ilexplosederire.

– Rends-moiça,Dévin!

Ilselèveetfeuillettelebouquinensedandinantdevantmoidanssonjeansnoir.

– Alorscommeça,tuaimeslessuceursdesang?

Rienquelesondesavoixm’irriteauplushautpoint.

– Tun’esqu’uninculte!Tun’yconnaisrien!

Ilretournelelivre.

– C’estdequicemachin?BramStoker?Hum…

Ilreplongelenezdedansens’installantàcôtédemoi.

– Allez,rends-le-moi,s’ilteplaît.– Non,jelegarde!

Illerangeàl’intérieurdesavesteencuiretsemetàrireunpeutropexagérémentàmongoût.

Quelcon!

Lespiaillementsdemasœuremplissentdenouveaulapièce.

– Dévinqu’est-cequetufabriques?Laisse-latranquille.Tuestoujoursentraindel’emmerder!Fermemarobeplutôt!

Ilselèveets’exécuteavecunsourireaucoindeslèvres.

– Tunepréfèrespasquejetel’enlève?

Ellegloussecommeuneidiote.Sacolèreestdéjàbienloin.Elleestfolledelui,commelaplupartdesfillesde lavilled’ailleurs. Jeneme fatiguemêmepasàessayerde récupérermon livre. Je saisdéjàqu’ilnemelerendrapas.Masœurattrapesavesteavecgrâceetl’enfile.

– Emily,onrentrerasûrementtard,est-cequ’Edpassecesoir?– Non,jenepensepas.

Edward est mon copain depuis trois mois. C’est un garçon charmant et très gentil que j’appréciebeaucoup, mais ce n’est que le début de notre relation et nous ne souhaitons pas nous étouffer

mutuellement.

– Tuasenviedenousaccompagner?Ilyaunconcertcesoir.– Nonmerci,jepréfèrelire.– Emily,sorsunpeu!Tuesunvrairatdebibliothèque!Éclate-toi,bonsang!

Elle n’insiste pas face à mon désintérêt. Je jette un regard noir à Dévin qui me toise plus quenécessairedel’autrecôtédelapièce,unsouriresatisfaitfichésurlevisage.Ilsedétournesubitementetfonceendirectiondelasortie,Tracyluiemboîtantlepas.

Quandj’entendsenfinlemoteurdesaFordMustangShelby,jesoupiredesoulagement.

Vivreencolocationavecmasœurétaitunebonneidée…audépart,avantqu’elleneparvienneàmettrelamainsurDévin.Cequiluiaprisaumoinsdeuxansetluiavaluunnombreincalculablededéceptions.

Maintenant,jedonneraistoutpourhabiterseule.Maishélas,mesmoyenssontlimités;jesuisvendeusedechaussuresdanslagalerieducentrecommercialdelaville.Masœurytravailleégalement,maisdanslaboutiquedecosmétique.Ellearéussiàdécrocherunplein-tempsetmoiseulementunmi-temps,cequilimitemonirrésistibleenviededéménager.

C’estdommage,parceque lapetitemaisonquenousavonsdégotéeestvraimentsympa.Nousavonsdeuxchambresàl’étage,pastrèsgrandes,maissuffisantes,plusunequinoussertdedébarras.Lesalonestplutôtspacieux,bienqu’unpeuvide.Nousavonsquelquesmeublesderécupération,maisl’avantagec’estqueleménageestrapide.Lacuisine,parcontre,esttoutepetite.Ilyajustelaplacepourunetableetdeuxchaises.Alors,laplupartdutemps,nousmangeonssurlatablebassedusalon,ons’ysentmoinsàl’étroit.Etlepetitbonus:laterrasse!

Jesoupireetfixelaporte,désespéréedenepasavoirmonlivre.Frustrée,jedécidedemecoucher,histoiredenepasm’ennuyer.

***

Unbruitfracassantmetireviolemmentdemonsommeil.Qu’est-cequ’ilsepasseencore?Jejetteunœilauréveil:quatreheuresdumatin.J’enfilemeschaussonsetsorsdemachambre.

– Qu’est-cequevousfaites?

Dévinestallongéàplatventredanslesescaliersetmasœuressaiedeletirerparsaveste.

– Aide-moiaulieudemeregarder!

Jedescendsàcontrecœuretobserveuninstantlecorpsétalédetoutsonlongsurlesmarches.

– Onneréussirajamaisàlemonter,Tracy.Vusonétat,ceseraitmoinscompliquédeletraînersurlecanapé.

Dévingrogneententantdeserelever,maissoneffortnesertstrictementàrien.Ilesttellementbourréqu’ils’écroulelamentablementaumêmeendroit.

Cen’estpaspossible.Quelboulet,sérieux!

Collection«Nisha’sSecret»

Obsessionsinsoumises,Mael–AngelArekin

Obsessionsinsoumises,Rory&Max–AngelArekin

Obsessionsinsoumises,Yano–AngelArekin

Jeuvespéral–AngelArekin

Àpleinesmains,Elsa–EvadeKerlan

Dévorerduregard,Milia–EvadeKerlan

Irrésistible,Natalia–EvadeKerlan

Semettreauparfum,Josh–EvadeKerlan

Frissonsdenuit–CindyLucas

Joueaveclefeu–CindyLucas

Pactesensuel–CindyLucas

Ungoûtd’interdit–CindyLucas

Déclencheurdeplaisir–TwinyB.

L’artiste–TwinyB.

Orgasmesnocturnes–TwinyB.

Plaisirsmasqués–TwinyB.

Pariàtrois–OlyTL

SoumiseAïko–OlyTL

Soumissionaquatique–OlyTL

Yoga&supplices–OlyTL

ZeusDating–EvadeKerlan

Songed’unenuittorride–JoyMaguene

Lilas–OlyTL

Collection«DiamantNoir»

LaChute,saisons1et2–TwinyB.

BlackSky–TwinyB.

Nerougispas,saisons1et2–Lanabellia

Nefermepastaporte–Lanabellia

Play&Burn–FannyCooper

Alia,lesvoleursdel’ombre–SophieAuger

Betrayed–SophieAuger

Journald’ungentleman,saisons1et2– EvadeKerlan

LoveonProcess– Rachel

GetHigh–AvrilSinner

LoveBusiness–AngelArekin

Surtonchemin–MikkySophie

Collection«FeelGood»

HollywoodenIrlande–ElisiaBlade

Séduire&Conquérir–ElisiaBlade

LeGoûtduthé,celuiduvent–EveBorelli

Aprèsl’obscurité–EveBorelli

L’Étreintedesvagues–OliviaBillington

Collection«Nisha’sDream»

Olympe–CindyLucas

Auteure:Lanabellia

Suiviéditorial:ValentinMoulinetLaëtitiaHerbaut

NishaEditions

21,ruedestanneries

87000Limoges

N°Siret82113207300015

N°ISSN2491-8660

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