les erreurs et les stratégies d'orthographe chez les élèves du
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ALPHONSE-DONALD NZE-WAGHE
LES ERREURS ET LES STRATEGIES D'ORTHOGRAPHE CHEZ LES ÉLÈVES DU PREMIER CYCLE DU SECONDAIRE
DU GABON
Thèse présentée à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval dans le cadre du programme de doctorat en didactique
pour l'obtention du grade de Philosophiae doctor (Ph. D.)
DEPARTEMENT D'ETUDES SUR L'ENSEIGNEMENT ET APPRENTISSAGE FACULTÉ DES SCIENCES DE L'ÉDUCATION
UNIVERSITÉ LAVAL QUÉBEC
2011
©Alphonse-Donald Nze-waghe, 2011
«L'orthographe persiste et signe: bête noire des élèves et des pédagogues. Qu'elle soit d'usage (normes lexicales) ou d'accord (conventions morphologiques fondées sur les règles de la grammaire), elle demeure, en effet, la principale pierre d'achoppement de la maîtrise de la langue. »
M. Séry
RÉSUMÉ 1
Dans le domaine éducatif, le phénomène des erreurs d'orthographe est l'une des
préoccupations majeures dans les pays francophones. Au Gabon, où nous avons réalisé
notre investigation, les élèves éprouvent de difficultés à orthographier correctement des
mots. C'est au constat de leurs faibles performances en orthographe que nous sommes
parvenu à poser la problématique des erreurs d'orthographe au premier cycle du
secondaire. Cette recherche vise à identifier et à classer, à partir de la typologie des
erreurs de Catach (1980), les différentes erreurs d'orthographe que les jeunes scripteurs
commettent dans leurs écrits.
Pour, y parvenir, nous avons organisé, pour un échantillon de 783 élèves de 6e (lere année
secondaire au Québec) et de 3 e (4eme année secondaire au Québec) de niveau collège du
Gabon, une dictée et un entretien métacognitif tel que le conçoit Jaffré (1999 et 2003). Il
en ressort, comme l'avaient déjà, ailleurs, démontré certaines études (Bétrix, 1991), que
la zone morphogrammique, notamment la grammaire, reste celle qui serait la moins bien
maîtrisée chez les jeunes scripteurs gabonais.
n
RÉSUMÉ 2
Cette recherche nous a permis de cerner les difficultés d'apprentissage de l'orthographe,
d'identifier les différents types d'erreurs existants ainsi que les stratégies orthographiques
des élèves du premier cycle du secondaire du Gabon.
Pour traiter cette problématique, nous nous sommes servi de la typologie des erreurs
d'orthographe de Catach (1980) et de l'entretien métacognitif conçu par Jaffré (1981)
dont le but est de donner la possibilité aux élèves de pouvoir justifier leurs graphies à
l'issue d'une dictée.
Notre recherche concerne 783 élèves issus des établissements des provinces de l'intérieur
du pays et de Libreville à qui nous avons fait passer une dictée comprenant différents
points du système orthographique. 59 d'entre eux ont ensuite passé un entretien
métacognitif au cours duquel ils se sont prononcés non seulement sur les difficultés
auxquelles ils font face en orthographe, sur ce qu'ils pensent de l'orthographe mais aussi
sur les stratégies orthographiques qu'ils déploient à l'écrit. Une analyse du discours des
élèves sur l'orthographe a été réalisée. Les 724 autres élèves des classes de 6e et de 3e
n'ont participé qu'à la dictée.
La recherche montre que les erreurs d'orthographe les plus fréquentes dans les écrits des
élèves gabonais sont d'ordre morphogrammique. Ces erreurs morphogrammiques
regroupent les erreurs grammaticales et lexicales. Parmi les erreurs morphogrammiques
recensées, la proportion des erreurs grammaticales se montre plus élevée. Parmi ces
erreurs grammaticales, la part belle revient aux erreurs d'accord et aux erreurs de
conjugaison. Les erreurs de morphologie lexicale touchent surtout l'ignorance de la
famille lexicale.
En deuxième position arrivent les erreurs dites phonogrammiques, suivies des erreurs
phonétiques, logogrammiques, idéogrammiques et, enfin, non fonctionnelles. Toutes ces
erreurs ont été analysées statistiquement afin de déterminer leur proportion, leur moyenne
et leur écart type.
m
Grâce aux logiciels SPSS, SAS et Excel, adaptés aux recherches statistiques, un certain
nombre d'analyses a été réalisé. Des comparaisons entre différentes variables, notamment
sur l'âge, le sexe, le niveau d'études et le degré de compétence ont été établies. Enfin,
certaines corrélations significatives ont été observées entre différents types d'erreurs.
iv
AVANT-PROPOS
La production d'une thèse de doctorat exige une discipline personnelle, du temps, du
courage, de la persévérance et d'un entourage marqué des femmes et des hommes
exceptionnels. C'est ce monde qu'il me revient de remercier présentement.
Cette thèse n'aurait pu être possible sans l'appui de mes professeures et professeurs de la
Faculté des Sciences de l'Éducation, et particulièrement des membres du jury qui se sont
rendus disponibles pour suivre, lire et évaluer ce travail.
Nous voudrions d'abord exprimer notre profonde gratitude à Claude Simard, directeur
peu commun de cette recherche. Sa rigueur, ses conseils, ses remarques et ses
encouragements stimulants nous ont permis de nous remettre en cause et d'intégrer de
nouveaux paradigmes, notamment la posture neutre d'un chercheur. Nous tenons de
manière particulière à le remercier pour la patience dont il a su faire preuve et pour la
confiance qu'il a bien voulu nous accorder tout au long de ce périple. L'intérêt réel qu'il
a manifesté durant ces quatre années nous a servi de stimulus pour mener à terme ce
travail.
Nous remercions ensuite Martine Mottet, co-directrice de cette thèse. Grâce à sa
prodigieuse expérience d'enseignante et chercheure, et à sa maîtrise de l'outil
informatique, cette thèse a pu avoir la forme finale qu'elle présente maintenant. Malgré
ses multiples occupations, elle a pu nous donner le meilleur d'elle-même en nous
accordant le temps nécessaire qui nous a conduit vers le bout du tunnel.
Nos remerciements vont aussi à l'endroit de Pauline Sirois, examinatrice de cette thèse.
Ses enseignements, ses suggestions constructives nous ont amené à enrichir certains pans
de notre travail. Merci Pauline.
À Éric Falardeau, examinateur de cette thèse. Sa rigueur nous a fait relire le texte plus de
six fois en vue d'échapper aux mailles de son filet. Merci d'avoir donné de votre temps et
de votre méthode à travers d'innombrables suggestions pour bonifier ce travail et enrichir
notre réflexion.
Notre reconnaissance va également à l'endroit de Marie France Morin qui nous a fait
l'honneur d'accepter d'agir en tant qu'évaluatrice externe de cette thèse. Son prodigieux
travail sur l'enseignement de l'orthographe au primaire a été d'un grand apport à cette
thèse. Nous vous en remercions particulièrement.
Que Jacques Désautels, Simon Larose, professeurs à la Faculté des Sciences de
l'Éducation, trouvent ici l'expression de notre déférence.
Nous tenons également à exprimer toute notre reconnaissance à Hélène Crépeau,
consultante statisticienne à l'Université Laval, qui nous a aidé dans les calculs statistiques
de nos données et nous a permis un tant soit peu de nous familiariser avec quelques
fonctions du logiciel SAS.
Nous adressons nos remerciements au Programme Canadien de Bourses de la
Francophonie (PCBF) dans son volet de l'ACDI qui a financé et a suivi de bout en bout
le cheminement de ce travail, ainsi que le Ministère de l'Éducation Nationale du Gabon
pour avoir autorisé son agent à relever de nouveaux défis.
Pour leur participation et leur implication remarquables, qu'il nous soit permis de
remercier toute la communauté scolaire du Gabon, notamment les lycées Bantsatsa de
Port-Gentil, Eugène Amogo de Franceville, Charles Mefane de Lambaréné, Richard
Nguéma Békalé d'Oyem; à Libreville, les lycées National Léon Mba et Nelson Mandela,
et les CES Alenakiri et Angondjé.
Nos remerciements vont également à l'endroit de tous nos compatriotes à Québec et
particulièrement à Célestin Andzang, Didier Kaba, Mélari Boucka, Bernard Segna,
vi
Édgard Bissélou, Ghislain Olui, Liliane Mbazogue, Clotaire Assoume, etc. Leur chaleur
et leurs conseils pendant nos moments de solitude et de stress nous ont toujours revigoré.
Enfin, nous ne saurions terminer notre propos sans exprimer notre reconnaissance à
Aboui Ondo Sonia Edwige, notre épouse. Tu as su conduire le bateau familial en période
de houle comme d'accalmie, qui ont émaillé ces moments d'absence. Pour ton soutien, ta
compréhension et ton sens de l'humour auprès de tes enfants en manque de leur père,
daigne trouver ici notre profonde gratitude. Bily, Lévy, Ronald et Arlain... merci pour
votre soutien. Que ce travail, réponse à vos incessants « papa, tu rentres quand! », et
raison de mon absence prolongée au foyer, vous serve d'exemple pour la réalisation de
vos rêves.
vu
TABLE DES MATIERES
RESUME 1 II
RÉSUMÉ 2 m
LISTE DES GRAPHIQUES XI
LISTE DES TABLEAUX „ XII
INTRODUCTION 1
CHAPITRE I _ : 6
PROBLÉMATIQUE ET CADRE THÉORIQUE 6
1. PROBLÉMATIQUE „ 6
1.1. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES 6
1.2. PROBLÈME DE RECHERCHE : LA FAIBLESSE EN ORTHOGRAPHE DES ÉLÈVES GABONAIS DU PREMIER CYCLE DU SECONDAIRE 7 1.3. BUT DE LA RECHERCHE 1 0 1.4. QUESTIONS DE RECHERCHE i l 1.5. PERTINENCE DE LA RECHERCHE 12
2. CADRE THÉORIQUE 13
2.1. DÉFINITION DES CONCEPTS D'ORTHOGRAPHE ET D'ERREUR 13 2.1.1. Définition du concept d'orthographe 14 2.1.2. Définition du concept d'erreur 16
2.2. LE CHAMP DE LA DIDACTIQUE DE L'ORTHOGRAPHE 20 2.3. STRUCTURE DE L'ORTHOGRAPHE FRANÇAISE ACTUELLE , 22
2.3.1. Les travaux de Blanche-Benveniste et Chervel 22 2.3.2. Le plurisystème de l'orthographe française de l'équipe HESO 24
2.4. ACQUISITION DE L'ORTHOGRAPHE :. 27 2.4.1. L'importance du contexte morphologique et du type de tâche mis en lumière par les travaux en psychologie cognitive sur la gestion de l'attention 28 2.4.2. Les conceptions des élèves révélées par l'entretien métagraphique 28 2.4.3. Les débuts d'apprentissage 29 2.4.4. Le développement de la conscience métalinguistique 30 2.4.5. Le développement de l'orthographe au fil de la scolarité 31
2.5. MODÈLES DE DÉVELOPPEMENT DES COMPÉTENCES ORTHOGRAPHIQUES CHEZ LES ENFANTS 32 2.5.1. Le modèle à trois pas de Frith 32 2.5.2. Le modèle à six pas de Frith 36
2.6. TRAVAUX SUR LE COMPORTEMENT DU SCRIPTEUR ADULTE 38 2.7. ANALYSE DES ERREURS 40
2.7.1. L'effet de régularité ... 40 2.7.2. L'effet de fréquence 42
2.8. BREF EXAMEN DE QUELQUES TYPOLOGIES EXISTANTES EN LANGUE FRANÇAISE 44 2.9. TYPOLOGIE DES ERREURS PROPOSÉE PAR NINA CATACH 48
CHAPITRE II 58
MÉTHODOLOGIE .....58
Vl l l
1. TYPE DE RECHERCHE 58
2. POPULATION À L'ÉTUDE 59
2.1. POPULATION CIBLE 59 2.2. ÉCHANTILLONS ET MÉTHODES D'ÉCHANTILLONNAGE 60
2.2.1. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour la dictée 60 2.2.2. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour l'entretien métagraphique 64
3. INSTRUMENTATION ET COLLECTE DES DONNÉES 66
3.1. DICTÉE 67 3.1.1. Texte de la dictée : Une route périlleuse 67 3.1.2. Présentation de la dictée 67 3.1.3. Déroulement de la dictée 70
3.2. ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 71 3.2.1. Entretien métagraphique 71 3.2.2. Déroulement de l'entretien métagraphique 73 3.2.3. Protocole de l'entretien métagraphique 74
4. TRAITEMENT, ANALYSE ET SYNTHÈSE DES DONNÉES 76
4 . 1 . ANONYMAT DES PARTICIPANTS 7 6 4.2. TRAITEMENT DES DONNÉES DE LA DICTÉE 77
4.2.1. Correction des copies 77 4.2.2. Élaboration de la base des données 78 4.2.3. Validation de la codification des données 81 4.2.4. Analyse statistique des données 81
4.3. TRAITEMENT DES DONNÉES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 81 4.3.1. Enregistrement des données 81 4.3.2. Transcription des données 82 4.3.3. Analyse des données 82 4.3.4. Validation de la codification des données 83
5. FORCES ET LIMITES MÉTHODOLOGIQUES 83
5.1. FIABILITÉ 84 5.2. VALIDITÉ INTERNE 86 5.3. VALIDITÉ EXTERNE 87
6. CONSIDÉRATIONS ÉTHIQUES 87
7. MODE DE PRÉSENTATION DES RÉSULTATS 88
CHAPITRE i n : ........90
ANALYSE DES RÉSULTATS : 90
ANALYSE DES DONNÉES QUANTITATD/ES ISSUES DE LA DICTÉE 90
1. RÉSULTATS GÉNÉRAUX 90
2. INFLUENCE DES VARIABLES DU SEXE ET DU NIVEAU SCOLAIRE 111
3. CORRÉLATIONS ENTRE LES DIFFÉRENTS TYPES D'ERREURS 115
CHAPITRE IV 120
ANALYSE DES DONNÉES QUALITATIVES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTACOGNITIF. 120
1. RAPPEL DES BUTS DE L'ENTRETIEN 120
IX
1.1. RAPPEL DES MODALITÉS MÉTHODOLOGIQUES ET DU PROTOCOLE D'ENTRETIEN 121
2. RAPPEL DES CARACTÉRISTIQUES DES ÉLÈVES DE L'ÉCHANTILLON RESTREINT 122
3. SÉLECTION DES ÉLÈVES POUR L'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 124
4. PERCEPTION DE LA COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE DES ÉLÈVES 125
4.1. PERCEPTION DES ÉLÈVES À L'ÉGARD DE LEUR COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE 126 4.2. PERCEPTION DES ENSEIGNANTS À L'ÉGARD DE LA COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE DE LEURS ÉLÈVES 130
5. OPINION DES ÉLÈVES SUR LE DEGRÉ DE DIFFICULTÉ DE L'ORTHOGRAPHE. 135
6. RELATION ENTRE LA PERCEPTION DES ÉLÈVES DE LEUR COMPÉTENCE ORTHOGRAPHIQUE, LEUR OPINION FACE À LA DIFFICULTÉ DE L'ORTHOGRAPHE ET LEURS RÉSULTATS À LA DICTÉE.™ 138
7. LES STRATÉGIES DÉCLARÉES 141
7.1. LISTE DES STRATÉGIES ET GRILLE DE CODAGE 142 7.1.1. Liste de stratégies d'ordre général 142 7.1.2. Liste de stratégies d'ordre spécifique 145
7.2. ANALYSE DES STRATÉGIES DÉCLARÉES 148 7.2.1. Analyse des stratégies d'ordre général 148 7.2.2. Analyses des stratégies citées en lien avec les sous-systèmes de l'orthographe 155
8. COMPARAISON DES ÉLÈVES FORTS ET DES ÉLÈVES FAIBLES 161
8.1. COMPARAISON DES MOYENNES DES FORTS ET DES FAIBLES 162 8.2. COMPARAISON DES STRATÉGIES DES FORTS ET DES FAIBLES 163
CONCLUSION GENERALE „ ...170
ANNEXES _. .. 183
ANNEXE 1 : PROTOCOLES D'ENTRETIEN MÉTAGRAPHIQUE 184
ANNEXE 2 : DEUX EXEMPLES DE DICTÉE CORRIGÉE 189
ANNEXE 3 : DEUX EXEMPLES DE VERBATIM COMPLET ..192
ANNEXE 4 : DOCUMENTS OFFICIELS 203
BIBLIOGRAPHIQUES „ 208
LISTE DES GRAPHIQUES
Graphique 1. Distribution générale des erreurs d'orthographe 88
Graphique 2. Les erreurs phonétiques 94
Graphique 3. Les erreurs phonogrammiques 96
Graphique 4. Les erreurs morphogrammiques 98
Graphique 5. Les erreurs morphogrammaticales 100
Graphique 6. Les erreurs lexicales 102
Graphique 7. Les erreurs logogrammiques 103
Graphique 8. Les erreurs idéogrammiques 105
Graphique 9. Les erreurs non fonctionnelles 106
xi
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1. Modèle à six pas de Frith (1985) 34
Tableau 2. La typologie de Catach (1985)... 52
Tableau 3. Établissements scolaires de Libreville et des provinces 59
Tableau 4. Niveau scolaire des sujets 60
Tableau 5. Répartition des sujets selon le sexe 61
Tableau 6. Age des élèves de 6e , 62
Tableau 7. Âge des élèves de 3e 63
Tableau 8. Questions posées au cours du premier volet de l'entretien métagraphique 72
Tableau 9. Plan de codification 76
Tableau 10. Nombre total des erreurs (toutes catégories confondues) 87
Tableau 11. Moyenne des erreurs par catégorie 89
Tableau 12. Les erreurs phonétiques 93
Tableau 13. Les erreurs phonogrammiques 95
Tableau 14. Les erreurs morphogrammiques 97
Tableau 15. Les erreurs morphogrammiques grammaticales 99
Tableau 16. Les erreurs morphogrammiques lexicales 101
Tableau 17. Les erreurs logogrammiques -. 103 r
Tableau 18. Les erreurs idéogrammiques 104
Tableau 19. Les erreurs non fonctionnelles 106
Tableau 20. Comparaison des moyennes selon le sexe 108
Tableau 21. Comparaison des moyennes selon les niveaux d'enseignement 110
Tableau 22. Les corrélations entre les différents types d'erreurs .. 113
xii
Tableau 23. Caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint 119
Tableau 24. Caractéristiques des élèves de l'échantillon complet 119
Tableau 25. Classement des élèves selon la moyenne du groupe 121
Tableau 26. Perception des élèves très forts et forts à l'égard de leur compétence orthographique 122
Tableau 27. Perception des élèves moyens à l'égard de leur compétence orthographique 123
Tableau 28. Perception des élèves faibles et très faibles à l'égard de leur compétence orthographique 124
Tableau 29. Perception des élèves et compétence réelle en orthographe 124
Tableau 30. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves très forts et forts ....'. 127
Tableau 31. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves moyens. 128
Tableau 32. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves faibles et très faible 129
Tableau 33. Perception des enseignants à l'égard de la compétence réelle des élèves en orthographe 130
Tableau 34. Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe en fonction de leur niveau d'habileté 131
Tableau 35. Compétence des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe 134
Tableau 36. Rendement des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe 136
Tableau 37. Les stratégies générales (pour la correction de l'ensemble d'un texte ou sur la résolution d'un problème relatif à un mot) 139
Tableau 38. Les stratégies spécifiques aux différentes composantes du plurisystème de l'orthographe 142
Tableau 39. Stratégies d'ordre général en lien avec la question de « Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible? » 145
Tableau 40. Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un problème en orthographe? » , 148
xiii
Tableau 41. Stratégies spécifiques en lien avec les sous-systèmes orthographiques ....152
Tableau 42. Comparaison des moyennes selon le niveau de compétence (faible ou fort) 158
Tableau 43. Comparaison des stratégies des forts et des faibles 159
xiv
INTRODUCTION
L'échec scolaire constitue un phénomène préoccupant dans la plupart des pays africains
et particulièrement au Gabon. Pourtant, la loi 16/66 du 9 août stipule, entre autres, que :
l'enseignement est obligatoire et gratuit de 6 à 16 ans, sur toute l'étendue du territoire, que celui-ci vise à permettre l'épanouissement de l'enfant et de l'adulte aux plans intellectuel, moral et physique, sans distinction de sexe, d'origine sociale, de nationalité, d'appartenance ethnique ni religieuse ou de race [ . . . ] .
Ainsi le Gabon atteint-il le taux de scolarité parmi les plus élevés d'Afrique
subsaharienne, avec plus de 90 % à la fin des années 1970, et une parité filles/garçons
quasi parfaite, alors que certains pays, anciennes colonies françaises, eux aussi, n'en sont
qu'à 30 ou 40 % du taux de scolarisation, avec un très grand écart entre filles et garçons2.
Un certain nombre de moyens tant matériels (l'octroi gratuit des fournitures scolaires),
organisationnels (l'entrée obligatoire à l'internat des élèves en classe d'examens, mesures
actuellement abrogées) que financiers (l'octroi des bourses,, encore d'actualité, à tous les
élèves admis en classe supérieure du secondaire au supérieur) sont également mobilisés
pour rendre possible l'accès aux différents savoirs que véhicule l'école.
Dans son volet relatif aux objectifs, l'enseignement du français au second cycle du
secondaire au Gabon vise:
en premier lieu à donner à tous les enfants et adolescents la maitrise de l'expression orale et écrite de la langue utilisée de nos jours et leur permettre ainsi de communiquer, c'est-à-dire d'écouter, de parler, de lire et d'écrire avec rigueur et profit [...]3. (p. 1)
1 Loi cadre sur le système éducatif au Gabon reprise dans États Généraux de l'Éducation et de la Formation, tenus du 17 au 23 décembre, Libreville, 1983 2 Ibidem 3 L'enseignement du français au premier cycle du secondaire, Ministère de l'Éducation Nationale, Institut Pédagogique National, Libreville, 1983
1
Cette volonté officielle de l'État gabonais à créer des conditions favorisant la maitrise du
français par ses citoyens reste cependant au stade des vœux pieux. Même si depuis 1990
le Gabon a connu un changement notoire sur le plan politique (il est passé d'un système à
parti unique à un multipartisme démocratique), la loi 16/66 réglementant l'éducation n'a
pas du tout changé, en dépit de séminaires, de réformes (approche par objectif versus
approche par compétence au cycle primaire, l'avènement du système turn-over au
second cycle, etc.) et de l'organisation d'états généraux de l'éducation (1982 et 2010).
Beaucoup d'efforts restent à consentir dans l'acquisition de l'écrit. Le constat que nous
faisons dans ce domaine est malheureusement décevant en classe de français où le
problème des erreurs d'orthographe est sérieux.
Certaines études menées par des chercheurs gabonais corroborent cette situation dans
différentes matières d'enseignement (Dadoté, 20045, Endamane, 2004 ; Ndemba, 2004 ;
Nguimbi, 2004 et 20078.)
En français, le problème d'orthographe demeure l'une des sources des difficultés chez les
élèves tant au primaire qu'au secondaire. Mais qu'est-ce que l'orthographe?
Le mot orthographe dérive des éléments d'origine grecque ortho et graphia : ortho
« correct » et graphie « écrire ». C'est la manière d'écrire un mot qui est considérée
comme la seule correcte, selon le Petit Robert9. L'orthographe intervient en lecture
4 Pour pallier le phénomène des effectifs pléthoriques lié au manque de structures, le gouvernement gabonais a mis en place un système rotatif des élèves dans les plus grands établissements scolaires de Libreville. Ce système dénommé turn-over favorise la mobilité des élèves qui n'avaient plus de salles de classe fixes. 5 DADOTÉ, A. D. K. (2004). Le commentaire composé : difficultés de sa mise en œuvre chez les élèves de second cycle et pistes de solutions didactiques. Actes du colloque, Université Laval, (p. 20-23) 6 ENDAMANE, R. (2004). L'enseignement de l'écriture du récit dans les lycées et collèges de Libreville : problèmes de méthodologie. Actes du colloque, Université Laval, (p. 24-26)
NDEMBA, J-J. (2004). Les causes du redoublement : points de vue d'élèves d'un lycée gabonais. Actes du colloque, Essai de maîtrise, Université Laval, (p. 126-129)
8 NGUIMBI, A. (2004). L'enseignement des œuvres intégrales dans les lycées et collèges publics du Gabon : analyse d'une pratique. Actes du colloque, Essai de maîtrise, Université Laval, (p. 30-33) NGUIMBI, A. (2007). Les représentations des enseignants de français et des élèves du secondaire à propos de l'enseignement des textes littéraires. Thèse de doctorat, Université Laval.
Le Nouveau Petit Robert (2007), Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, 40e
édition.
comme en production. Dans le premier cas, elle conditionne la reconnaissance des mots
et évite qu'ils soient confondus les uns avec les autres (saint, sein, ceint...). Dans le
deuxième cas, elle renvoie à la nécessité pour celui qui rédige de retrouver une à une et
dans l'ordre toutes les lettres qui constituent le mot graphique selon la norme adoptée
(Erhi, 1997). L'orthographe recouvre deux dimensions principales reconnues
traditionnellement : l'orthographe d'usage ou lexicale « graphie usuelle des mots », c'est
l'orthographe qui concerne la partie fixe des mots, telle que donnée dans un dictionnaire;
et l'orthographe de règle ou grammaticale « graphie variable des mots selon leur rôle et
leurs relations dans la phrase ».
À cause de ses multiples subtilités et irrégularités, l'orthographe française est considérée
comme l'une des plus compliquées. Les scripteurs francophones doivent acquérir des
connaissances orthographiques toute leur scolarité durant. C'est une compétence
rarement complètement acquise, selon Éric Lambert10. Il n'est donc pas étonnant de
constater que beaucoup d'élèves éprouvent de véritables difficultés tant en production
écrite (rédaction, argumentation, dissertation) qu'en orthographe proprement dite dont le
rite essentiel reste la dictée. Au Gabon, de la 6e à la 3e du secondaire, la note zéro sur
vingt (00/20) est celle qui est généralement décernée aux trois quarts des apprenants en
orthographe. Il faut dire cependant que ce système de notation ancien présente des failles
docimologiques importantes.
Le manque d'archives au ministère de l'Éducation nationale ne nous permet pas d'avoir
des données chiffrées précises sur le phénomène de l'orthographe. Cependant, les
conseillers pédagogiques en matière de français reconnaissent, pendant des séances
d'animations pédagogiques ou lors des corrections d'examens, que le problème de
l'orthographe est très préoccupant au Gabon.
Les études montrent que le problème d'orthographe est quasi général dans le monde
francophone. Au Québec par exemple, les résultats aux épreuves de français du ministère
10Éric Lambert, Professeur à l'I.U.F.M d'Orléans-Tours, lors d'une conférence donnée à l'espace Mendès France, dans le cadre des animations « d'écriture à Poitiers » sur / 'acquisition de l'orthographe et les problèmes qui accompagnent cet apprentissage, février 1986
de l'Éducation en 3e année et 6e année du primaire indiquent année après année que les
élèves éprouvent des difficultés dans le maniement du code de la langue et que la maîtrise
de l'orthographe est l'élément de l'épreuve de français où les résultats sont les plus
faibles. D'après une étude datant de 1995, 52,6 % des élèves sont classés fragiles ou
incompétents11.
Le contexte gabonais s'avère assez particulier par rapport à des pays francophones
comme la France ou le Québec. Le Gabon évolue dans un contexte bilingue, en ce sens
que le français est une langue seconde pour les élèves. Ils ont pour la plupart une autre
langue maternelle (fang, mpongwé, mbédé, punu, kota...), ce qui pourrait augmenter les
difficultés d'apprentissage du français écrit,
L'objectif premier de notre recherche est de cerner les types d'erreurs que commettent les
élèves du secondaire gabonais. Pour y parvenir, nous nous sommes inspiré de la grille de
Catach (1980) qui nous a permis de classer les différentes erreurs enregistrées et de les
analyser. Nous avons voulu aussi cerner les stratégies orthographiques de nos sujets. À
cette fin, nous avons eu recours à l'entretien métagraphique tel que le conçoit Jaffré
(2003). Cet outil a permis aux élèves de verbaliser et de justifier leurs graphies au sortir
d'une dictée.
Le premier chapitre de ce document est consacré à la problématique et au cadre
conceptuel. La problématique présente le contexte de crise de l'orthographe dans lequel a
germé notre réflexion, et précise les objectifs, les questions de notre recherche ainsi que
sa pertinence. Le cadre conceptuel, quant à lui, présente d'abord de façon synthétique les
concepts d'orthographe et d'erreur, recense ensuite les différentes études menées ces
dernières années sur l'acquisition de l'orthographe, résume enfin la théorie du
plurisystème orthographique de Catach (1980) qui constitue la base référentielle de notre
travail.
11 Commission des États généraux sur la situation et l'avenir de la langue française au Québec (2001).
Le deuxième chapitre se focalise essentiellement sur la méthodologie empruntée dans
cette recherche. Celle-ci se veut descriptive et est fondée sur une approche mixte, vu
qu'elle s'intéresse à des données à la fois quantitatives et qualitatives.
L'analyse quantitative nous a permis de relever et de classer les erreurs d'orthographe
chez 724 élèves de 6e et de 3 e secondaire, et nous a amené à faire des comparaisons à
partir des variables sexe, classe et degré de compétence des élèves. Ces résultats sont
vérifiés par des tests statistiques à partir des logiciel SPSS et SAS.
L'analyse qualitative, pour sa part, s'est intéressée à l'analyse du discours recueilli lors
de l'entretien métacognitif organisé avec 59 élèves issus du grand échantillon, à leurs
perceptions et à celles de leurs enseignants sur leurs habiletés en orthographe ainsi
qu'aux stratégies qu'ils ont pu mettre en place en situation d'écriture.
Les troisième et quatrième chapitres présentent les résultats de cette étude. Le chapitre III
est consacré à l'analyse des données quantitatives issues de la dictée et regroupant tout
l'échantillon, soit 783 participants. Le chapitre IV fait état de l'analyse des données
qualitatives recueillies à partir de l'entretien métagraphique organisé avec 59 sujets, forts
ou faibles.
La conclusion fait la synthèse, résume les faits saillants de notre étude. Elle met
également en exergue les retombées et les limites de cette recherche tout en proposant
quelques pistes didactiques susceptibles d'aider les membres de la communauté éducative
dans le processus de renouvellement ou de recadrage des stratégies d'enseignement.
CHAPITRE I
PROBLÉMATIQUE ET CADRE THÉORIQUE
1. PROBLEMATIQUE
1.1. Considérations générales
Le problème des erreurs d'orthographe constitue un phénomène récurrent qui n'a cessé
de susciter des commentaires et l'intérêt des membres du secteur éducatif dans bon
nombre de pays francophones. En plus des constats faits, les commentaires font émerger
des débats parfois passionnés affirmant, à tort ou à raison, que le niveau des élèves en
orthographe a considérablement baissé.
L'intérêt, quant à lui, se manifeste par la diversité des recherches consacrées en
orthographe ces dernières décennies tant sur la nature ou l'origine des erreurs
d'orthographe que sur les mécanismes d'acquisition-apprentissage du code graphique
chez les jeunes scripteurs. Peuvent en témoigner, les travaux de Fayol et Largy (1992),
Fayol et Perfitti (1997), Simard (1997), Cogis (1998), Gombert (1990), Erhi (2000),
Brissaud (2000), Jaffré (2003), etc.
Par ailleurs, d'autres chercheurs se sont intéressés aux modèles théoriques pour le
classement des erreurs en orthographe, notamment en vue d'élaborer des instruments
diagnostiques, qui pourront servir de guide pour la préparation de procédés correctifs
adéquats. À cet effet, un certain nombre de typologies ont été élaborées par des
chercheurs tels que Debyser, Houis, Rojas (1967), Guion (1973 et 1979), Bartout,
Piacere, Brunelle (1977), Catach (1980), Farid (1983), etc.
Malgré les avancées significatives dans la compréhension des procédés d'acquisition-
apprentissage de l'orthographe, le problème des erreurs orthographiques reste
préoccupant dans la plupart des pays francophone et singulièrement au Gabon. C'est au
constat d'un tel phénomène que nous sommes parvenu à poser la problématique des
erreurs d'orthographe au premier cycle du secondaire du Gabon.
1.2. Problème de recherche : la faiblesse en orthographe des élèves gabonais du premier cycle du secondaire
Nous avons pris pour point de départ de notre recherche un constat relatif à la baisse de
niveau en orthographe fait par la quasi-totalité des enseignants de français réunis au cours
d'une animation pédagogique tenue au lycée Nelson Mandela en 2005. En général, ces
enseignants ont observé que la plupart des élèves du premier cycle éprouvent des
difficultés en orthographe tant en orthographe d'usage (rédaction correcte des mots de
vocabulaire) qu'en orthographe grammaticale (accord des mots dans la phrase). De la 6e à
la 3e, la note zéro sur vingt (00/20) est celle qui est décernée aux trois quarts des
apprenants en orthographe lexicale et grammaticale. Sans jeter l'anathème sur les seuls
élèves car cette situation pourrait s'expliquer par bien d'autres facteurs (mode
d'évaluation approximatif, enseignement inadéquat, complexité du système
orthographique...), nous voulons surtout cerner les différents aspects liés directement aux
erreurs qu'ils commettent.
Avant d'entreprendre notre recherche doctorale, nous avons organisé une collecte de
données sur l'orthographe (expression écrite et dictée) à travers différents établissements
(publics et privés) de la capitale Libreville : deux dictées (une en 6e D du lycée National
Léon Mba sur un texte de huit lignes du niveau 6e tiré de l'œuvre romanesque de Joseph
Owono intitulée Tante Bella, où il y avait dix mots ou groupes de mots fautifs à corriger;
une autre en 3e du collège privé St-André sur un texte de dix-sept lignes du niveau 4e tiré
de Maimouna12 d'Abdoulaye Sadji). Les résultats enregistrés sont parlants : sur 48 élèves
de 3e, 44 ont eu 00/20 et aucune note supérieure ou égale à 10/20; en 6e D par contre, 12
élèves ont obtenu la note 00/20 et 6 ont pu dépasser la barre de 10/20, et ce, pour une
dictée pourtant préparée trente minutes auparavant. Précisons que dans le système
scolaire gabonais, en dictée comme en expression écrite, les devoirs sont notés sur vingt.
Seules les erreurs d'orthographe lexicale et grammaticale sont sanctionnées : en dictée,
l'erreur d'orthographe lexicale enlève un point, alors que l'erreur grammaticale en retire
deux.
Pour ce qui est de l'expression écrite, la 5e G (lycée national Léon Mba), la 3e F (lycée
Nelson Mandela) et la 3e (collège St-André) étaient concernées. Les notes, très faibles
pour le collège St-André, sont les suivantes : sur 46 élèves, 6 seulement ont pu franchir la
barre de 10/20. En 3e F du lycée Nelson Mandela, 9 élèves ont pu dépasser 10/20. Au
lycée national Léon Mba, par contre, la poire a été sectionnée en deux : 20 élèves ont des
notes inférieures à 10, les 20 autres ont obtenu plus de 10.
Même si notre faible échantillonnage ne nous permet pas de généraliser cette situation à
l'ensemble du pays, notre expérience sur le terrain nous a permis de mesurer également
l'ampleur du problème qui touche la quasi-totalité des établissements de Libreville.
Pourtant, ceux-ci sont, de loin, les mieux pourvus du Gabon puisqu'ils sont mieux
équipés en matériel didactique (manuels scolaires, ordinateurs, bibliothèques...) et en
12 Sadji, A. (1958). Maïmouna, Présence Africaine, p. 38-39. Ce roman est un « classique africain » étudié en classe de quatrième dans le programme préconisé par le ministère gabonais de l'Éducation nationale.
8
personnel enseignant, vu que beaucoup d'entre eux préfèrent exercer dans la capitale. Les
établissements de l'intérieur du pays restent quelque peu oubliés et le pourcentage
d'échec y est plus élevé.
Au cours des séances de correction d'examens (BEPC1 , BET14, BAC15...), les plaintes
des enseignants quant aux erreurs que commettent les élèves sont récurrentes. En dépit
des séminaires, des séances d'animation, des concours d'orthographe organisés
respectivement par les autorités ministérielles, l'Unesco et la Francophonie chaque année,
le problème de l'orthographe reste entier dans le système éducatif gabonais.
Une réforme sur l'évaluation en orthographe serait même amorcée actuellement par les
autorités du ministère de l'Éducation nationale. L'on se demande sur quoi exactement
évaluer : sur des compétences enseignées, c'est-à-dire vérifier des connaissances acquises
sur des points grammaticaux ou orthographiques bien précis, ou sur des connaissances
générales en sanctionnant systématiquement toutes les erreurs.
Cette situation interpelle donc tous les acteurs de l'enseignement du français et nous
amène, en tant qu'enseignant, à réfléchir sur le sujet et à prendre des initiatives visant à
l'améliorer. C'est pour cela que nous nous sommes penché sur ce problème. Ainsi,
contrairement aux autorités ministérielles qui ont tendance à se focaliser directement sur
l'évaluation, nous souhaiterions d'abord identifier les raisons qui expliquent ce
phénomène, les analyser dans la perspective d'améliorer les performances des élèves en
orthographe.
13 BEPC : Brevet d'Études du Premier Cycle. 14 BET : Brevet d'Études Techniques. 15 BAC : Baccalauréat (Dernier diplôme de l'enseignement secondaire, qui donne accès aux études supérieures)
13. But de la recherche
L'orthographe désigne l'ensemble des normes qui règlent la façon d'écrire dans une
langue. Dès qu'une langue dépasse le simple cadre dialectal ou régional, son nombre de
locuteurs devenant plus important et son statut se renforçant, on est contraint de fixer des
règles afin de faciliter la compréhension mutuelle des locuteurs. C'est le cas de la langue
française dont les règles d'orthographe ont été établies clairement.
Or, l'application de ces règles d'orthographe semble tellement approximative chez les
élèves qu'on s'interroge sur la véritable origine de cette situation, chez les concepteurs de
règles, chez les enseignants qui assurent l'acquisition-apprentissage ou chez les élèves
appelés à se les approprier. L'orthographe française pose un problème fondamental chez
les apprenants lié à ces deux aspects essentiels : la compréhension des règles et leur
application en production écrite.
Au Gabon, comme on vient de le souligner, dans une classe de cinquante élèves environ,
on peut enregistrer une trentaine d'élèves ayant la note zéro sur vingt (00/20), et moins de
quinze celle de dix sur vingt (10/20). Nous avons aussi remarqué qu'à l'annonce d'un
devoir relatif à l'orthographe (rédaction, texte argumentatif, dictée, etc.), les élèves
exprimaient une sorte d'angoisse, de stress indescriptible. Cette situation ne peut nous
laisser insensible. C'est pour cela que nous avons jeté un regard sur le phénomène de
l'orthographe, à notre avis très important dans le processus d'appropriation d'une langue.
Le but de notre réflexion est de savoir comment un élève qui a eu l'occasion
d'appréhender les règles d'orthographe pendant les cours peut être incapable de les
appliquer correctement lors des devoirs et/ou des interrogations écrites. Plus précisément,
10
nous voulons mieux connaître l'ampleur du problème en cernant la nature et la fréquence
des erreurs commises.
Notre étude vise une meilleure compréhension des erreurs d'orthographe chez les élèves
du premier cycle du secondaire gabonais. Autrement dit, notre objectif est d'étudier la
non-maîtrise de l'orthographe chez ces jeunes scripteurs, en relevant les différentes
erreurs qu'ils commettent, en les analysant, en les classifiant et en les comparant à celles
commises par les élèves d'autres pays francophones. Nous voulons donc adopter une
perspective surtout descriptive d'analyse d'erreurs. Nous y reviendrons dans la partie
méthodologique.
1.4. Questions de recherche
La question des erreurs d'orthographe est complexe du fait qu'elle pose le problème de
l'apprentissage, de la compréhension et de la mémorisation des règles et de leur
réutilisation en contexte de production. Ce problème touche surtout les principaux acteurs
du système éducatif en l'occurrence les enseignants, les élèves et leurs parents pour le
suivi à la maison, et l'État à travers les programmes qu'il élabore, les priorités qu'il se
fixe et les méthodes pédagogiques qu'il recommande.
Dans notre étude, nous nous concentrerons sur les élèves. Nos questions et sous-questions
de recherche sont les suivantes :
- Quels sont les types d'erreurs que les élèves gabonais du premier cycle du
secondaire commettent dans leurs écrits ? Quelle est la fréquence par type d'erreur?
11
- Quelle est l'influence des facteurs du sexe et du niveau scolaire sur la fréquence et
les types d'erreurs?
- Quelle est la perception des élèves gabonais du premier cycle du secondaire quant
à leur propre compétence orthographique et quant à la complexité de l'orthographe
française?
- Quelles sont les stratégies qu'ils déploient pour orthographier? Quelles sont celles
que déclarent les élèves forts et les élèves faibles?
1.5. Pertinence de la recherche
L'importance de l'orthographe ne peut plus être remise en cause de nos jours. Elle est une
nécessité dans le cadre de la communication écrite. La norme orthographique facilite
l'intercompréhension dans la mesure où elle est connue et respectée par l'ensemble des
sujets. Les exemples suivants sur les cas d'homonymie (l'attente, la tente, la tante; ou
mer, mère, maire, etc.) sont parlants à ce sujet. La moindre erreur d'orthographe peut
dérouter le lecteur. En clair, l'orthographe conditionne la reconnaissance des mots et
évite qu'ils soient confondus les uns avec les autres (Erhi, 1997).
De plus, elle est investie d'une valeur sociale marquée. En effet, pour quelqu'un qui
adresse une lettre d'embauché à un chef d'entreprise par exemple, il aura plus de chance
d'êtreretenu, si sa lettre est dépourvue d'erreurs que si elle en était truffée. Dans un
curriculum vitae ou dans un rapport que l'on est amené à rédiger, on doit toujours faire
attention à l'orthographe.
Il appert que l'orthographe joue un rôle fondamental dans les échanges par écrit, et l'on
peut dire que s'appliquer en orthographe c'est, non seulement s'engager, s'affirmer
comme scripteur conscient, mais aussi faciliter la tâche de celui qui va vous lire. On
12
comprend mieux alors l'importance avérée de l'orthographe dans notre société où l'écrit
joue un rôle majeur.
Par ailleurs, d'après les informations que nous avons reçues du ministère de l'Éducation
nationale, notre ministère de tutelle, il n'y a pas encore eu de recherche à proprement
parler au niveau du Gabon sur les erreurs d'orthographe au premier cycle du secondaire.
Notre étude viendra combler ce manque d'information.
2. CADRE THÉORIQUE
Dans la seconde partie de ce chapitre, nous présenterons les données théoriques sur
lesquelles notre étude s'appuie. Nous définirons d'abord les concepts d'orthographe et
d'erreur. Nous situerons la didactique de l'orthographe dans laquelle s'inscrit notre
recherche. Nous examinerons ensuite la structure du système orthographique du français
contemporain. Nous exposerons les principales données issues des travaux sur
l'acquisition-apprentissage de l'orthographe, sur le comportement du scripteur adulte
ainsi que sur l'analyse des erreurs. Enfin, nous présenterons diverses typologies d'erreurs
proposées pour le français et nous justifierons le choix de la grille de Catach (1980) que
nous avons retenue.
2.1. Définition des concepts d'orthographe et d'erreur
La maîtrise du français à la fois à l'oral et à l'écrit constitue l'un des objectifs
fondamentaux inscrits dans les programmes d'enseignement de cette discipline dans les
pays francophones.
13
Au Gabon, les différentes matières d'enseignement sont dispensées en français. On
comprend alors le caractère central qu'occupe le français dans le système éducatif
gabonais.
Dans cette section, nous définissons les concepts d'orthographe et d'erreur.
2.1.1. Définition du concept d'orthographe
Définir le concept d'orthographe semble à première vue facile. Mais quand on demande
aux gens de dire ce qu'ils entendent par l'orthographe, personne n'y parvient clairement.
C'est ce qui ressort d'une étude16 citée par Catach (1991) où de nombreuses personnes
ont été interrogées (enseignants, secrétaires, gens du livre, élèves du CM2 aux classes
terminales) et où les réponses les plus significatives se ramènent à celles-ci :
« Y'a un code et ce code orthographique il faut le connaître.»
« L'orthographe pour moi...c'est...j'allais dire : c'est comme ça. »
« Y'a un code bon ben il existe. » (p.8)
On constate que les trois énoncés montrent la difficulté de formuler une définition élaborée,
cohérente et significative de l'orthographe au point où l'on parle de « définition impossible ».
Dans ces trois énoncés, nous retenons également la récurrence d'un mot qui apparait dans
deux des trois définitions, c'est le mot code. Le code, de manière générale, renvoie à un
ensemble des lois et dispositions, un ensemble de règles, de préceptes, de prescriptions
16 MILLET, A., LUCCI, V., BELLIEZ, J. (1990). Orthographe mon amourl Presses universitaires de Grenoble, France, cité par Catach (1991), p. 8
14
relatives à une matière, à un domaine. Celui qui nous concerne est le domaine orthographique.
C'est donc un système rigoureux de relations structurées entre signes, ensemble de signes et
contenu. Dans cette veine, Catach (1980) considère que l'orthographe est une :
Manière d'écrire les sons ou les mots d'une langue, en conformité d'une part avec le système de transcription graphique adopté à une époque donnée, d'autre part suivant certains rapports établis avec les autres sous-systèmes de la langue (morphologie, syntaxe, lexique). Plus ces rapports secondaires sont complexes, plus le rôle de l'orthographe grandit, car un tissu d'antagonismes se crée entre les relations phonie-graphie et les autres considérations entrant en ligne de compte. L'orthographe est un choix entre ces diverses considérations, plus ou moins réglé par des lois ou des conventions diverses, (p. 16)
Pour revenir sur la notion de code que d'aucuns semblent assimiler à l'orthographe française,
Catach (1978) précise que :
L'orthographe n'est pas seulement un code ou une institution sociale, mais un ensemble complexe de signes linguistiques. Trois éléments sont reconnus comme indissociables: les phonogrammes, les morphogrammes et les logogrammes. À côté de ces trois éléments essentiels au système graphique, arrivent les lettres étymologiques et historiques, (p. 53-57)
Nous y reviendrons plus en détail dans la section relative au système orthographique
établi par Catach et toute l'équipe HESO (Histoire et structure des systèmes d'écriture).
Retenons ici que le concept d'orthographe renvoie à l'idée de plurisystème, aux rapports
grapho-phonétiques et à d'autres aspects, grammaticaux, lexicaux, étymologiques et
historiques.
15
2.1.2. Définition du concept d'erreur
De manière générale, on entend par erreur tout écart à une norme, ici la norme
orthographique. Une erreur orthographique peut toucher les divers plans du système
linguistique, phonologique, morphologique, lexical.
En pédagogie autrefois, l'erreur avait une connotation foncièrement négative. Elle était
considérée comme une « faute » qu'il fallait absolument sanctionner. De même, dans le
courant de pensée behavioriste, l'erreur est considérée comme ce qu'il faut
nécessairement corriger, voire punir. Dans le modèle d'enseignement préconisé par les
behavioristes, l'erreur doit être évitée à tout prix. Cet enseignement/apprentissage basé
sur les exercices, les répétitions et le renforcement positif ou négatif doit amener l'élève à
produire seulement des formes correctes (l'apprentissage programmé de Skinner).
Cette conception de l'erreur a été repensée durant les dernières décennies par bon nombre
de chercheurs tel que Reuter (2005). Sans nous attarder sur la distinction que l'auteur
établit entre le concept d'erreur et celui de dysfonctionnement, nous signalons tout de
même que Reuter (2005) préfère la terminologie dysfonctionnement à celle d'erreur car,
selon lui,
la notion d'erreur est trop restrictive (elle réfère plutôt à ce qui est localisable et faux) alors que le terme dysfonctionnement serait moins réducteur et établirait un lien plus étroit avec celui de fonctionnement, manifestant ainsi qu'ils sont associés et participent de l'activité même.
Nous n'insistons pas sur cet aspect purement terminologique, nous revenons, dans le
cadre de la clarification des concepts convoqués dans notre étude, sur la définition de
l'erreur que l'auteur considère comme un dysfonctionnement. Reuter pense que :
16
un dysfonctionnement (à valeur) didactique est une partie ou la totalité d'un produit, situé dans et relevant d'un espace d'enseignement et d'apprentissage disciplinaires, estimée problématique (inadéquate / inappropriée), en fonction d'un code de référence didactique déterminé.
Autrement dit, une erreur est un écart, une situation qui se démarque de la norme établie
ou du code unanimement respecté par les usagers de la langue française.
Reuter pense, en outre, que l'importance de l'erreur varie selon un certain nombre de
paramètres : le statut (enseignant / élève), la tâche mise en place (dictée / rédaction) et la
discipline (orthographe / mathématique). Il convient donc de tenir compte de tous ces
paramètres et de préciser qu'un dysfonctionnement est toujours non seulement situé,
c'est- à -dire en lien avec son espace social rigoureusement limité et précisé, mais aussi
construit dans la mesure où il est basé sur des valeurs, des normes jugées importantes
d'une institution donnée (ici l'école).
Enfin, en lien avec les théories didactiques préconisées par la forme scolaire (espace d'apprentissage structurant de manière formelle la relation maître/élèves) qui les autorise, Reuter avance que :
d'une certaine manière, les dysfonctionnements justifient l'enseignement. Pourquoi enseignerait-on des savoirs ou des savoirs faire qui ne poseraient aucun problème aux élèves? Dans la perspective des théories actuelles de l'apprentissage, ils sont encore considérés comme des modalités de fonctionnement : on apprend avec / contre ses difficultés, via des tâtonnements, des restructurations, des régressions... Ils (les dysfonctionnements) constituent enfin, pour les maîtres notamment, des outils de guidage pour déterminer des objectifs, des démarches ou des situations de travail ou déterminer niveau et classement des élèves.
Cette conception de l'erreur comme outil de guidage pour les enseignants est
également celle d'un grand nombre de chercheurs qui pensent aussi que l'erreur est
un outil qui permettrait à l'enseignant de mesurer la compréhension de ses élèves
(Astolfi, 1975). En didactique par exemple, la conception constructiviste considère
que l'erreur est forcément présente dans l'apprentissage scolaire perçu comme un
17
processus au cours duquel les connaissances nouvelles émergent des connaissances
anciennes sur la base d'une remise en cause ou d'une complexification de celles-ci.
L'erreur est donc le signe des difficultés que l'élève doit résoudre pour avoir une
connaissance nouvelle. On parle ainsi du conflit cognitif que l'élève doit résoudre.
La correction d'une erreur par un élève montre qu'il est venu à bout des difficultés
qui l'empêchaient d'accéder à de nouvelles connaissances en construisant de
nouvelles stratégies.
À cet effet, Bachelard (1938) pense « qu'il n'y a pas de vérité sans erreur rectifiée ». On
pourra dire que l'erreur est le point de départ d'une vérité qui, elle-même, est la forme
finie des erreurs rectifiées. Bachelard explique encore qu' « on connaît contre une
connaissance antérieure, en détruisant des connaissances mal faites, en surmontant ce qui,
dans l'esprit même fait obstacle ». Cette notion d'obstacle se trouve au cœur de sa
réflexion épistémologique.
Sans entrer dans les grandes théories développées par Bachelard (1938) et reprises par
Fabre (1995) sur les caractéristiques des obstacles, nous nous limitons à la définition
étymologique, non moins équivoque, selon laquelle l'obstacle, « obstare » en latin,
évoque « ce qui se tient devant, ce qui obstrue le passage ». Or sur le plan intérieur,
« l'obstacle n'est pas ce contre quoi viendrait buter la pensée, mais il réside dans la
pensée elle-même, dans les mots, dans l'expérience quotidienne... ». Autrement dit
l'erreur - considérée comme un obstacle à la connaissance - fait partie de l'acte de
connaître et, selon Bachelard (1938), elle est « l'ombre portée de la raison ».
Quant à Piaget (1975), il pense également qu'au lieu de rejeter les erreurs des élèves, on
doit plutôt les exploiter. Il insiste cependant sur le fait « qu'on ne doit pas brusquer les
étapes ». À la suite de l'idée d'obstacle développée par Bachelard (1938), Piaget met
l'accent sur celle de « scheme », centrale dans sa réflexion scientifique. Le mot scheme,
18
du grec skhêma, signifie forme ou figure; les deux aspects ayant un statut abstrait et
s'opposant à l'action. Les schemes désignent la structure générale commune à un
ensemble d'actions. Ils correspondraient à une schématisation des actions ou des
opérations par la répétition, par les diverses répliques de la même action. « Ils se
caractérisent par le fait qu'ils se conservent dans leurs répétitions, se consolident par
l'exercice et tendent à se généraliser au contact du milieu, donnant alors lieu à des
différenciations et des coordinations variées. D'où l'apparition de nouvelles conduites,
qui s'élaborent à partir des schemes initiaux et de leurs interactions adaptatives avec le
milieu » (Legendre-Bergson, 1980). Les schemes pourraient donc être considérés comme
les moyens qui permettraient à l'élève de pouvoir appréhender les situations et les objets
auxquels il est confronté. À cet sujet, Rabardel (1995) écrit : « les schemes répondent à
« une organisation active de l'expérience qui intègre le passé », à « une structure qui a
une histoire et se transforme au fur et à mesure qu 'elle s'adapte à des situations et des
données plus variées ».
On peut donc interpréter les erreurs des élèves chez Piaget comme la manière dont les
schemes sont organisés à différents moments de leur évolution, de leur âge puisque ces
schemes se transforment en fonction des interactions, des contextes, des milieux, etc.
Conclusion sur les concepts d'orthographe et d'erreur
Nous abordons le concept d'orthographe dans la perspective de Catach (1978 et 1980),
qui soutient que l'orthographe est un système de signes indissociables de nature diverse
(phonologique, morphologique...) régulé par des conventions sociales.
Quant au concept d'erreur, nous retenons que deux postures se dégagent principalement.
Les positivistes (Skinner), qui pensent que l'erreur est « une faute » donc à bannir dans le
19
processus d'enseignement/apprentissage, et les constructivistes, à l'instar de Piaget
(1975), qui expliquent que l'une des sources du développement des connaissances est liée
au déséquilibre (erreurs) né des interactions de l'enfant avec l'expérience et son milieu.
Piaget affirme que : « la source réelle du progrès est à rechercher dans la rééquilibration,
non pas naturellement d'un retour à la forme antérieure d'équilibre, dont l'insuffisance
est responsable du conflit auquel cette équilibration provisoire a abouti, mais d'une
amélioration de cette forme précédente. Néanmoins, sans le déséquilibre, il n'y aurait pas
eu de rééquilibration majorante ».
Ainsi, dans notre travail, nous avons orienté notre réflexion selon la perspective de
Reuter (2005), d'Astolfi (1975), de Bachelard (1938), de Piaget (1975), qui considèrent
que l'erreur est un outil pour enseigner, et qu'il faut non pas la rejeter mais la prendre en
compte pour construire de nouvelles connaissances. Dans le cadre de l'orthographe qui
nous concerne, l'erreur nous permettra d'apprécier l'évolution de l'élève dans son
processus d'apprentissage.
Nous allons maintenant nous intéresser au champ de la didactique de l'orthographe.
2.2. Le champ de la didactique de l'orthographe
La didactique de l'orthographe se situe dans le champ général de la didactique du
français. C'est un domaine encore jeune mais en plein essor.
La didactique de l'orthographe se fonde sur les travaux en lien avec les recherches
relatives à l'étude du système d'écriture du français et de son appropriation. Celles-ci ont
connu un développement important ces dernières années. On pense, par exemple, aux
20
recherches de Jaffré (1992), de Haas (1999), de Sautot (2002), de Morin, Parent et
Montésinos-Gelet (2006), etc.
Les études se concentrent tantôt sur les méthodes d'enseignement ou les stratégies
d'apprentissage, tantôt sur l'analyse du traitement des erreurs d'orthographe, etc.
Les recherches sur l'acquisition de l'orthographe initiées au primaire (Fayol et Perfitti,
1997; Jaffré, 2003; Brissaud et Jaffré, 2003) se sont étendues au secondaire (Alain Delsol
1998; 2003). Ces travaux seront commentés dans une partie subséquente.
De même, un certain nombre d'outils de référence ont vu le jour dans le domaine de
l'orthographe, à l'instar de l'Échelle d'orthographe lexicale (Pothier et Pothier, 2003)
dont le rôle est de préciser les pourcentages de réussite orthographique à chaque niveau
de la scolarité élémentaire pour plus de 11 000 mots. Citons le cas du MANULEX (Lété,
2004) capable de fournir la fréquence de 48 900 formes orthographiques différentes.
En dépit du manque de recherches en didactique de l'orthographe destinées à tester, par
exemple, l'efficacité d'un dispositif didactique innovant, quelques propositions
didactiques se sont tout de même signalées. C'est le cas des travaux de Cogis (2005), de
Pelletier et de Deun (2004) et de Morin et Montésinos-Gelet (2007).
Un autre problème important concerne l'intégration des réformes orthographiques dans le
système scolaire, notamment des rectifications de 1990 . Ces rectifications
orthographiques ont fait l'objet d'une publication récente (Contant, 2009).
17 Organisées en France par le Conseil supérieur de la langue française, les réformes orthographiques de l'orthographe française ont été adoptées dans toute la francophonie, mais comme recommandations officielles simplement. Le rapport du conseil supérieur de la langue française a été publié dans les documents officiels le 6 décembre 1990.
21
Nous passons maintenant aux principales études sur la structure du système
orthographique du français contemporain.
2.3. Structure de l'orthographe française actuelle
23.1. Les travaux de Blanche-Benveniste et Chervel
Blanche-Benveniste et Chervel (1968) ont été parmi les premiers linguistes français à
s'intéresser à la description de l'orthographe. Ils ont fait une étude approfondie de la
valeur phonique des lettres. Ils distinguent la valeur de base, la valeur de position, la
valeur auxiliaire, la valeur zéro et la valeur de digramme.
La valeur de base est la valeur phonique générale d'un graphème. La valeur de base de c
est /k/ et non /s/, parce que sa valeur Isl est limitée au cas où il est suivi des graphèmes e
et /, alors que sa valeur /k/ est possible dans tous les autres cas : ca, co, eu, cl, cr, ch, etc.
La valeur de base d'un graphème est donc liée à un certain nombre de contraintes.
La valeur de position concerne la position du graphème dans un mot. Entre les valeurs de
base et les valeurs de position, il y a des relations d'ordre phonétique. Par exemple, le
graphème s, dont la valeur de base est Isl, vaut /z/ entre deux voyelles : poison s'oppose à
poisson. De même, le s de liaison a toujours la valeur de position : quels ennuis; le s final
du premier mot devient phonétiquement /z/.
22
On parle de valeur auxiliaire quand un graphème influe sur la valeur d'un graphème
voisin sans être lui-même prononcé. C'est le cas de u de guérir. Le caractère auxiliaire de
u suppose que le graphème précédent est susceptible de valeurs de position. Il y a donc
complémentarité entre les deux phénomènes.
La valeur zéro est, quant à elle, attribuée à un graphème qui ne se prononce pas dans un
mot. C'est le cas de h dans rhume et humide, de d dans lard, etc. Les graphèmes à valeur
zéro peuvent occuper n'importe quelle position dans un mot.
Les valeurs de digramme concernent l'amalgame de deux lettres au moins. Cela touche
en français particulièrement les voyelles. C'est le cas de e et w dans le mot feu. Dans leur
fonctionnement phono-graphique, les deux segments restent inséparables puisque ni e ni
u ne peuvent avoir séparément la valeur loi qui résulte de leur juxtaposition. Il y a
environ une trentaine de groupes de ce type qui peut réunir aussi des lettres
consonantiques (ai, au, oi, ei, œ, ph, etc.). Sont également classés dans cette catégorie les
trigrammes (-ill- dans le mot mouiller /muje/, la valeur de 1)1 correspond à l'ensemble du
segment), et les tétragrammes, qui sont plutôt rares (-illi- dans le mot quincaillier
/kekaje/), etc.
Au terme de cette analyse du code phonographique menée en 1968, Chervel et Blanche-
Benveniste n'ont pas hésité à faire des propositions de simplification du système
orthographique français. Ils ont en quelque sorte devancé les rectifications 19.
orthographiques de 1990 dont les plus importantes concernent d'abord le trait d'union,
le pluriel des mots composés, l'accent circonflexe, le participe passé de laisser suivi d'un
18 Rectifications orthographiques de 1990, Orthographes nouvelles et rectifiées publiées au Journal officiel du 6 décembre 1990. Source : Conseil international de la langue française, 11 rue de Navarin, 75009, Paris; http://www.sdv.fr/orthonet
23
infinitif (exemple : elle s'est laissé mourir). Toutes ces rectifications ont été validées par
l'Académie, et beaucoup de lexicographes les ont intégrées dans leurs dictionnaires.
Nous nous appesantirons surtout sur les travaux de l'équipe CNRS-HESO, qui ont mis en
évidence plusieurs systèmes dans l'orthographe française à la suite des travaux du
linguiste russe V. Gak (1975).
2.3.2. Le plurisystème de l'orthographe française de l'équipe HESO
Ainsi que nous l'avons déjà indiqué, selon Catach (1980) et ses collaborateurs de l'équipe
H.E.S.O (Histoire et structure des systèmes d'écriture), l'orthographe peut se définir non
seulement comme un code ou une institution sociale, mais aussi comme un ensemble
complexe de signes linguistiques. L'orthographe française est vue ainsi comme un
système structuré mettant en jeu les diverses composantes de la langue : la phonologie, la
morphologie, la syntaxe, le lexique.
Les phonogrammes
Les phonogrammes servent à la transcription des sons. Ils correspondent aux graphèmes
qui représentent les phonèmes. Ils ont donc une fonction essentiellement phonique. Par
exemple, le phonogramme p a pour fonction d'assurer la prononciation du phonème /p/.
Ils constituent pour le français les fondations du système. Cependant, l'usage des
phonogrammes est irrégulière, un phonème pouvant être transcrit par plusieurs
phonogrammes (loi par o, au, eau...), et peut être soumis à certaines règles de la position
et au contexte (e devant double consonne transcrit le phonème /e/). Mais il y a aussi,
24
auprès de ces graphèmes centraux, d'autres graphèmes secondaires appelés
morphogrammes.
Les morphogrammes
Ce sont les graphèmes qui ont une fonction essentiellement morphologique. On en
distingue deux types : les morphogrammes grammaticaux et les morphogrammes
lexicaux. Les premiers renvoient aux graphèmes qui s'ajoutent aux mots pour marquer le
genre et le nombre, notamment des noms et des adjectifs, ou pour marquer les diverses
flexions verbales. C'est le cas du s du pluriel étendu à la série des noms et des adjectifs,
qu'il soit prononcé ou non (des jeunes insouciants). Dans les femmes jouent, trois
morphogrammes grammaticaux, inaudibles, traduisent le nombre dans le groupe nominal
et la marque du pluriel (-ent) dans le groupe verbal.
En ce qui concerne les morphogrammes lexicaux, on les reconnaît à partir de la marque
graphique dérivationnelle. On parle ainsi des mots de la même famille morphologique.
Par exemple, la lettre p du mot camp trouve sa justification dans la formation des mots
comme camper, campement. À côté des morphogrammes, il y a également les
logogrammes dans le système orthographique français.
Les logogrammes
Encore appelés « figures des mots », les logogrammes sont des graphies globales
permettant la distinction de certains homophones. Parmi eux, on distingue les
homophones-hétérographes (pin/pain; mots/mata; vert/ver/vers/verre, etc.) et les
homophones-homographes (par exemple les mots timbre/timbre : verbe timbrer et timbre
25
vocal, pêche/pêche « verbe pêcher et le substantif désignant un fruit, etc./ Les
homophones-hétérographes se prononcent de la même façon, mais se distinguent à l'écrit
sur le plan formel comme sur le plan sémantique. Alors que les homophones-
homographes s'écrivent de manière identique, mais ont de sens différents.
Le système orthographique français est complété par des graphies qui rappellent l'origine
et l'histoire des mots qui constituent son répertoire.
Les lettres étymologiques et historiques
L'orthographe française a été marquée par une longue tradition conservatrice et
étymologisante qui explique la présence d'un nombre important de graphies anciennes
héritées de l'histoire de la langue ou rappelant des langues sources et dont la maîtrise
suppose une certaine érudition. Sur le plan étymologique, c'est le cas des graphies dites
« grecques » telles que : théâtre, rhume; ou « latines » comme le maintien dxxp dans loup
(dérivé du mot latin lupus). Sur le plan historique, la double transcription de /s/ dans les
verbes en -eler, -eter (redoublement de la consonne : j'appelle, accent grave : je pèle)
s'explique par le fait qu'avec l'apparition de l'accent à la Renaissance certaines séries
verbales ont été accentuées alors que d'autres ont conservé l'ancien mode de transcription
par la double consonne.
De façon générale, on peut dire que l'orthographe française est dans l'ensemble
phonogrammique. Plusieurs recherches menées par l'équipe HESO se sont accordées à le
démontrer. En effet, le premier sondage statistique réalisé en 1972 sur un total de 3346
mots (cinq textes différenciés sur le plan de la langue ou du type de discours) relève
16 347 graphèmes. Les résultats montrent que les phonogrammes représentent 83% des
mots repérés et classés. Quant à la deuxième enquête, réalisée pour compléter la
première, elle présente les résultats statistiques à partir des 3724 mots de l'Échelle
26
Dubois-Buyse19 . Ces résultats montrent aussi que 83 % des graphèmes utilisés sont des
phonogrammes. Quant aux morphèmes lexicaux et grammaticaux, ils représentent
respectivement 3 ou 4 % des graphèmes et des logogrammes ont la même proportion
(Honveault, 1995). Toutefois, selon Véronis (1986), les règles phonographiques ne
permettent d'écrire correctement que 50 % des mots en français en raison de l'existence
de plusieurs irrégularités.
Ainsi, le plurisystème de l'orthographe française est fort complexe et par conséquent
difficile à maîtriser. Catherine Brissaud (2003), Marie-France Morin (2006) et beaucoup
d'autres chercheurs se sont penchés sur la question de son acquisition.
2.4. Acquisition de l'orthographe
Bon nombre de chercheurs ont effectué des travaux dans le domaine de l'acquisition de
l'orthographe. On relève, entre autres, les travaux de Fayol et Largy, 1992 ; Fayol et
Perfetti, 1997; ceux de Jaffré, 2003; Brissaud et Jaffré, 2003; Nunes et Bryant, 2004;
Malatesh Joshi et Aron, 2005, etc. Ces recherches sont centrées sur les savoirs, les
procédures et les difficultés de l'apprenant.
Loin de nous l'idée de prétendre à la présentation exhaustive des recherches dans le
domaine de l'acquisition de l'orthographe. Nous nous limiterons, en nous référant
notamment à la synthèse de Fayol et Largy (1992) et Largy (1995), à dégager les traits
essentiels de ces recherches.
19 L'Échelle Dubois-Buyse a été réalisée, entre autres, par Ters, F., Meyer, G., Reichenbach., D. (1977)., liste de fréquence particulièrement importante, puisque prise en grande partie dans le vocabulaire le mieux connu des enfants.
27
2.4.1. L'importance du contexte morphologique et du type de tâche mis en lumière par les travaux en psychologie cognitive sur la gestion de l'attention
Un certain nombre de travaux comme ceux de Fayol et Largy (1992) et de Largy (1995)
ont montré que les performances orthographiques dépendent largement des conditions de
production et des structures morphosyntaxiques, et que la mise en œuvre de l'accord à
l'écrit n'est pas facile. Dans ces études, on demande par exemple aux participants
d'écrire des phrases comme Le chien des voisins arrive, où deux noms de nombre
différent peuvent être des sujets possibles, ce qui peut induire un conflit d'accord. Les
phrases sont de plus présentées sous plusieurs modalités : exercice à trous, dictée de
phrases, dictée de phrases avec tâche secondaire, etc., le but étant de voir, à partir du
niveau de surcharge cognitive qui pèse sur le scripteur, comment il parvient à partager
son attention sur plusieurs tâches à là fois. Des manipulations sur d'autres structures ont
été effectuées telles que la place du verbe, le contexte sémantique, la place des
homophones, etc. On a constaté entre autres que les élèves de 13 ou 14 ans font des
accords dits de proximité {il les mangent) ; ceux de 10 ans connaissent le phénomène de
surgénéralisation du - s nominal au verbe (il les manges), surtout quand le verbe a un
homophone nominal (il les timbres). Ainsi il est apparu que le type de structure
linguistique où doit se faire la réalisation de l'accord ainsi que le type de tâche qui
l'accompagne exercent une influence décisive dans le comportement orthographique de
tout scripteur.
2.4.2. Les conceptions des élèves révélées par l'entretien métagraphique
D'autres travaux ont porté moins sur les facteurs externes comme les structures
linguistiques que sur les raisonnements et les conduites internes de l'apprenant. Pour ce
faire, le groupe de linguistes dénommé LEA (Linguistique de l'Écrit et Acquisition) que
dirige Jean-Pierre Jaffré a utilisé l'entretien métagraphique. Il s'agit d'un entretien au
cours duquel l'élève est amené à justifier ses choix graphiques après avoir écrit un texte
28
(Jaffré, 2003; Jaffré et David, 1999). La méthode de l'entretien métagraphique a révélé
une variété de conceptions mises en place par l'élève dans le processus de réalisation des
accords en dehors de l'enseignement reçu; par exemple, chez de jeunes sujets, la lettre e
est la marque de fille, ce qui donne une sexualisation de l'énoncé (Cogis, 1998).
L'entretien métagraphique permet donc d'apprécier la parole du sujet, les procédures et
les stratégies personnelles mises en œuvre pour résoudre ses problèmes orthographiques.
2.4.3. Les débuts d'apprentissage
À la suite des travaux de Ferreiro (Ferreiro, Gomez Palacio, 1998), certains chercheurs
francophones se sont intéressés à l'acquisition du lire/écrire chez les tout-petits
(maternelle et première année primaire), à la conceptualisation du système d'écriture chez
les jeunes scripteurs. Pour voir comment le jeune enfant s'approprie le système
d'écriture, les chercheurs ont eu recours à des tâches diverses et variées.
À Lyon, Jean-Marie Besse a mené des recherches sur l'écriture du prénom (Besse, De
Gaulmyn et Luis, 1993; Bess, 1993). Montésinos-Gelet (1999) a observé, elle, la
construction phonogrammique de l'écriture chez des enfants de la maternelle. En Suisse,
les stratégies d'apprentissage de l'écriture et de copie de mots en situation de production
de texte ont été le but de l'étude qu'ont menée Laurence Rieben et Madelon Saada-
Robert (1997). Au Québec, Marie-France Morin (2004) a travaillé avec les enfants de la
maternelle et de la première année du primaire sur la conceptualisation de la dimension
morphogrammique de l'écriture (le nombre plus précisément). De cette étude, il ressort
que les élèves de lere primaire sont capables d'utiliser les marques du nombre en lecture;
toutefois, ils ne justifient pas clairement leur choix, ayant une conscience
métamorphologique peu avancée. Une des propositions didactiques issues de ces
recherches concernent la pratique des orthographes approchées en début d'apprentissage
de la lecture et de l'écriture (Rieben, 2003; Montésinos-Gelet et Morin, 2006).
29
2.4.4. Le développement de la conscience métalinguistique
Depuis longtemps, il a été démontré que les habiletés métalinguistiques sont intimement
reliées à l'apprentissage réussi de la lecture (Lundberg, Frost & Peterson, 1988; Gombert,
1990; Lecocq, 1991; Rieden & Perfitti, 1989). Les habiletés métalinguistiques sont
définies comme étant la capacité de réfléchir sur la langue, d'en identifier les
composantes et de pouvoir les manipuler de manière contrôlée (Gombert, 1990). Parmi
les habiletés métalinguistiques, l'habileté métaphonologique (ou la conscience
phonologique) correspond à la capacité d'identifier les phonèmes inclus dans les mots et
à les manipuler de façon consciente.
Le lien entre la conscience phonologique et l'écrit s'explique par le système alphabétique
que nous utilisons. La mise en œuvre du principe alphabétique nécessite d'être en mesure
de segmenter le langage oral pour y repérer les phonèmes, puis de les associer aux
graphèmes correspondants. En fonction de cette caractéristique, on peut aisément
concevoir qu'une certaine sensibilité à la structure phonologique des mots facilite
l'acquisition de l'écrit. Ainsi, des études longitudinales ont montré que des lacunes en
conscience phonologique en lre année entraînent un retard dans l'apprentissage de la
lecture (Juel, 1988; Sprenger-Charolles, Béchannec & Lacert, 1998). Par ailleurs, un
entraînement en conscience phonologique à la maternelle augmente les performances en
lecture en lre année (Lecocq, 1991). Un minimum de conscience phonologique est donc
utile pour lire.
De plus, le contact avec l'écrit favorise le développement des capacités
métalinguistiques. Nombre d'études ont ainsi rapporté une augmentation considérable du
niveau de la conscience phonologique des élèves après quelques mois d'enseignement
formel à la lecture et à l'écriture (Délisle, 2003; Sprenger-Charolles et al, 1997). Cette
augmentation ne peut être attribuée à un effet de la maturité, puisque les adultes illettrés
éprouvent de grandes difficultés dans les tâches de conscience phonologique (Morais,
1994). La conscience phonologique pourrait être à la fois un préalable et une
30
conséquence de la langue écrite (Tunmer, 1989) et exercerait donc une influence dans
l'acquisition du système d'écriture et de l'orthographe.
2.4.5. Le développement de l'orthographe au fil de la scolarité
Plusieurs études longitudinales ont été conduites auprès de populations scolaires de la 2e
primaire au secondaire, notamment sur la dimension homophonique du français écrit.
À Toulouse, la recherche menée par Alain Delsol (1998, 2003) a porté sur l'homophonie
en /se/ ou /sel (ses/ces, c 'est/s 'est, sais/sait). Le but de cette étude était de voir comment
peut se faire l'acquisition des différentes graphies de cette syllabe orale, du CE2 à la 4e
du collège français. Il en ressort que les erreurs des élèves vont en diminuant et qu'à la
dernière étape de leur apprentissage ils ne commettent plus d'erreurs quel que soit le
contexte.
Dans une recherche franco-québécoise (Chevrot, Brissaud et Lefrançois, 2003; Brissaud,
Chevrot et Lefrançois, à paraître) sur l'acquisition des flexions verbales en ld de la 3e
primaire à la 3 e secondaire, les chercheurs ont tenté de mettre en évidence le problème
fréquent de l'opposition modale -é/-er. Les chercheurs relèvent que les élèves de la 3e
primaire sont plus portés vers la graphie -er. Ils constatent aussi que la forme en -é
devient plus disponible chez une majorité d'élèves de la 4e primaire, et que
l'augmentation des erreurs en -é est liée à une surgénéralisation de l'accord avec le sujet
(les erreurs du genre les filles ont/vont 'mangées augmentent en 4e et 5e primaire, que la
cible soit -é ou -er). Cette tendance à souvent accorder avec le sujet laisse penser que les
élèves, à partir de la 4e primaire, ont plus de facilité à accorder le participe passé avec
l'auxiliaire être, alors qu'ils ont des difficultés à ne pas l'accorder quand il suit avoir.
31
Il apparaît donc que l'orthographe du verbe n'est pas acquise en fin de scolarité primaire
et qu'il convient de limiter ses exigences durant les premières armées de l'apprentissage
de l'écriture. Toutes ces études montrent que l'apprentissage de l'orthographe française
est semé d'embûches, et que son acquisition ne peut s'effectuer que sur une longue
période pendant tout le primaire et le secondaire, et même au niveau supérieur.
2.5. Modèles de développement des compétences orthographiques chez les enfants
En plus des études sur des points particuliers relatifs à l'acquisition de l'orthographe dont
il vient d'être fait mention, plusieurs modèles généraux de, développement des
compétences orthographiques ont été proposés. Nous allons présenter les travaux de Frith
(1985), qui décrivent comment les enfants utilisent différentes procédures en orthographe
au cours de leur apprentissage. Cette auteure postule que les apprenants passeraient par
une série de stades. Chaque stade est caractérisé par un certain nombre de procédures qui
doivent être maîtrisées avant de passer au stade suivant. L'auteure propose deux modèles,
à savoir : le modèle à trois pas et celui à six pas.
2.5.1. Le modèle à trois pas de Frith
Frith (1985) a été l'une des premières chercheuses à proposer que la lecture et
l'orthographe suivraient le même schéma de développement en trois phases, à savoir :
logographique, alphabétique et orthographique. Chaque phase correspond à une stratégie
dominante.
32
La phase logographique
Elle renvoie à l'usage des logos comme moyen de faire des associations directes entre
une forme visuelle et un sens. En effet, avant tout apprentissage formel, les jeunes enfants
âgés entre trois et six ans peuvent reconnaître certains mots par le biais de certains traits
visuels et du contexte dans lequel les mots se trouvent. La reconnaissance de ces formes
se réalise à partir d'indices divers à la fois inhérents au mot lui-même (Byrne, 1989/1991)
et au contexte (Gough et Juel, 1989/1991). C'est le cas des couleurs vert et blanc qui sont
indispensables à l'identification dePerrier, tout comme rouge et blanc le sont pour Coca-
cola (Morton, 1989). Les enfants utiliseraient pour reconnaître ces mots familiers la
procédure logographique, encore appelée stratégie visuelle (Goswani & Bryant, 1990),
qui consisterait à retenir par cœur les premières lettres ou groupes de lettres saillants, par
exemple, la présence d'un P suffit à lire Paul, même si c'est Pierre qui est écrit.
Par ailleurs, certaines contraintes telles que le nombre et l'ordre des lettres ne sont pas
considérées dans cette phase. Ainsi, ppaa, pap, paap, ...pourront être identifiés comme
correspondant à papa. À cette phase, les enfants n'effectueraient pas encore un traitement
linguistique des mots mais auraient recours à un traitement pictural, et cette procédure
serait la même que celle qui permettrait de distinguer deux dessins (Dermont & Gombert,
2004).
Dans ce modèle de Frith, durant la phase logographique, l'aspect orthographique n'est
pas précisément défini (Martinet, Bosse, Valdois & Tainturier, 1999). Cette étape pré
alphabétique correspondrait au moment où l'enfant est encore incapable d'écrire « par
cœur » son prénom et quelques mots familiers tels que maman, papa et les prénoms de
certains de ses amis.
33
La phase alphabétique
Encore appelée phase phonologique, la phase alphabétique est caractérisée par
l'exploitation systématique des correspondances entre phonies et graphies (grapho-
phonologiques). Cette phase commence quand les enfants découvrent que l'écriture
transcrit la langue orale. Cette découverte est favorisée soit par la maturité ou
l'expérience de l'enfant, soit par la régularité du système orthographique. Les mots
seraient décodés lettre à lettre. Cette procédure permet de prononcer tous les mots. En
revanche la prononciation obtenue n'est pas nécessairement conventionnelle, surtout
lorsque la graphie du mot est éloignée de sa prononciation (cf femme, chaos).
Cette phase alphabétique comporterait deux voies de traitement de l'orthographe (Bary,
1994). L'une effectuerait des appariements sons-lettres (assemblage); l'autre procéderait
par récupération directe des items stockés en mémoire (adressage). Les orthographes
dites opaques soulèvent des problèmes lors de l'apprentissage chez l'enfant et même, en
cours de rédaction, chez certains adultes. Ces difficultés proviennent des irrégularités
dans les appariements sons-lettres. Ces irrégularités se manifestent tant en lecture,
lorsque les mêmes suites de lettres se prononcent différemment (par exemple, ch dans
arche et orchidée) qu'en orthographe lorsque la même configuration sonore se transcrit
par différentes suites de lettres (/àV—► an, en, am, em). Cependant, le poids cognitif
nécessaire à l'assemblage par l'adulte expert est différent de celui de l'apprenant, dont
l'apprentissage de l'écrit peut être lent et fastidieux. Pour l'adulte expert, cette procédure
est déjà automatisée et nécessite moins d'attention pour traiter les mots, ce qui n'est pas
le cas chez l'apprenant qui doit mobiliser toute son attention pour être capable de lire et
d'écrire un texte. Toutefois, la procédure phonologique ne suffit pas pour être capable de
lire tous les mots écrits en français ou de les orthographier. D'autres procédures
s'imposent nécessairement au lecteur/scripteur francophone.
.34
La phase orthographique
La phase orthographique ne succède pas brusquement à la phase alphabétique. Toutes les
deux s'interpénétrent très tôt et conduisent au fonctionnement en parallèle chez l'adulte
des procédures d'assemblage et d'adressage en lecture/écriture (Kreiner, 1996) comme
on le verra plus loin. Cette phase s'amorce et se développe chez l'enfant lorsque les
règles d'usage de la procédure phonologique sont bien acquises, autrement dit lorsque la
lecture et.l'écriture conventionnelles ne s'effectuent plus par associations simples et
régulières entre configuration sonore et configuration de lettres. Ainsi, Henderson et coll.
(Beers, 1975, 1980; Gentry, 1977; Beers, 1980; Beers, Beers et Grant, 1977; Beers et
Henderson, 1977; Henderson, 1980, 1981, 1992; Henderson et Beers, 1980; Schlagal,
1989; Templeton et Beers, 1992) ont relevé que les orthographes des enfants évoluaient
très progressivement de la grande section maternelle aux dernières années du primaire.
Elles passent notamment d'une notation phonétique à l'intégration régulière des marques
orthographiques. De la sorte, les enfants sont capables d'analyser les mots en différentes
unités orthographiques de taille diverse et de fonction différente. Ces unités dont ils
tiennent maintenant compte peuvent être les morphèmes flexionnels (les verbes en er font
leur imparfait en ais, ait, aient...), les morphèmes dérivationnels (sabot —» sabotier,
galop —* galoper) et les consonnes doubles.
De plus, ce stade se caractérise par l'apparition des traitements analogiques, c'est-à-dire
écrire des mots nouveaux par analogie à ceux qui ont été rencontrés précédemment
(Martinet et al , 1990).
En somme, le modèle de développement proposé par Frith (1985) suggère que
l'acquisition/apprentissage en lecture et en orthographe se déroule en trois phases,
corrélativement liées, en ce sens que la maîtrise de l'une donne accès à la suivante. Aussi,
la complémentarité de l'apprentissage de la lecture et de l'orthographe reste l'une des
données majeures de la recherche.
35
2.5.2. Le modèle à six pas de Frith
Pour aller plus loin dans l'analyse du développement des stratégies à l'écrit chez les
enfants, Frith (1985) propose une deuxième version du modèle, cette fois, à six pas,
comme nous pouvons le voir dans le tableau ci-après.
Tableau 1
Modèle à six pas de Frith (1985)
Phase Lecture Écriture
la
lb
2a
2b
3a
3b
Logographique 1
Logographique 2
Logographique 3
Alphabétique 2
Orthographique 1
Orthographique 2
(Symbolique)
Logographique 2
Alphabétique 1
Alphabétique 2
Alphabétique 3
Orthographique 2
Ce modèle à six pas développe le premier modèle en distinguant la lecture et l'écriture. Il
a été exploité par Sirois (2004) dans une étude sur les enfants malentendants. Frith pense
qu'une stratégie n'est pas adoptée simultanément en lecture et écriture. Elle définit
plusieurs degrés ou différents niveaux d'expertise pour chacune des stratégies, et suppose
qu'un certain niveau de maitrise doit être atteint dans l'un des deux domaines, la lecture
et l'écriture, pour que la stratégie soit adoptée dans l'autre domaine (Casalis, 1995; Frith,
36
1985; Sprenger-Charolles & Casalis, 1996). À chacun des stades, il y aurait d'abord
divergence entre stratégies utilisées en lecture et en écriture, puis convergence :
En bref, la stratégie nous apprend qu'à chaque phase il y a une première étape où il y a divergence entre les stratégies utilisées pour lire et écrire, puis une étape où il y a convergence. Le progrès développemental est envisagé comme un équilibre entre l'écriture et la lecture. La lecture est déterminante pour la stratégie logographique, alors que l'écriture l'est pour la stratégie alphabétique et, de nouveau, la lecture l'est pour la stratégie orthographique. (Frith, 1985, p. 311).
Le modèle développemental de Frith soutient que l'apprentissage de la lecture et de
l'écriture s'effectuent en trois principales étapes et que chacune dépend de la maitrise de
la précédente. Il appert donc que la lecture et l'écriture se réalisent de manière
complémentaire, « chacune agissant à certains moments précis comme stimulateurs de
l'autre » (Laplante, 1998 : 35).
Cependant, s'il est vrai que nombre de travaux appuient le modèle de Frith (1985) et
soutiennent toute sa description, il n'en demeure pas moins que d'autres le critiquent. En
effet, le modèle de stade suppose que le passage d'un stade au stade suivant ne peut se
faire que si les compétences liées au stade antérieur sont parfaitement maîtrisées. Ainsi,
les enfants n'utiliseraient la procédure lexicale que tardivement puisqu'ils doivent
d'abord maitriser l'étape phonologique.
Or, certains travaux ont montré que les enfants sont sensibles, dès les premiers
apprentissages, aux différents types d'informations orthographiques et morphologiques
(Deacon & Alegria, 1996; Sanguin-Bruckert & Bruckert 2004; Sénéchal, 2000). De plus,
ces auteurs ont insisté sur le recours à l'utilisation d'analogies lexicales plus que les
modèles en stades ne le suggèrent (Gombert, Bryant & Warrick, 1997; Goswami &
Bryant, 1990; Martinet et a l , 1999). Alégria et Mousty (1996) pensent que la procédure
phonologique et la procédure lexicale fonctionneraient simultanément :
37
Il n'existe pas de « lecteur alphabétique » ni de « lecteur orthographique » mais des mots pour lesquels le lecteur possède une représentation orthographique et qui seront probablement identifiés par cette voie et des mots pour lesquels il n'en possède pas et qui seront identifiés par la procédure d'assemblage. Parler de stade introduit une notion incorrecte. Elle renvoie, par exemple, à l'idée qu'un lecteur ayant atteint le stade orthographique se serait débarrassé du processus d'assemblage phonologique, (p. 113).
Parallèlement, de nombreux auteurs ont récemment suggéré que l'apprenti scripteur et le
scripteur expert utiliseraient de façon simultanée la procédure phonologique et la
procédure lexicale en fonction de la fréquence des mots qu'ils ont lus et écrits
auparavant. Par ailleurs, comme l'orthographe renvoie pour celui qui rédige à l'exigence
de respecter l'ordre des lettres qui constituent le mot (Erhi, 1997), certains chercheurs ont
du mal à concevoir l'utilisation d'une procédure logographique en orthographe (Goswami
& Bryant, 1990; Sprenger et Charolles et a l , 1997).
2.6. Travaux sur le comportement du scripteur adulte
Beaucoup de chercheurs se sont penchés sur la question du traitement de l'écrit chez le
scripteur expert. Ces études ont mis en lumière une variété de modèles éclairant le
comportement du scripteur adulte, dont le modèle à double voie qui a été mentionné
précédemment.
Le modèle à double voie
Les recherches menées en psychologie cognitive et en neuropsychologie indiquent que le
traitement de l'écrit par l'adulte expert s'effectuerait selon deux voies. Cette théorie,
encore appelée dual-route model, a d'abord été élaborée en lecture (Coltheart, 1978) et a
38
été adaptée par la suite en écriture (Barry, 1994). Les promoteurs de ce modèle
soutiennent qu'il existerait deux procédures distinctes susceptibles d'amener les
apprenants à traiter récriture, à savoir : une procédure lexicale et une procédure
phonologique.
La procédure lexicale, appelée aussi procédure d'adressage, est une opération à partir de
laquelle le scripteur adulte parvient à récupérer l'orthographe du mot connu stocké dans
sa mémoire. Nous disposerions ainsi, d'un lexique mental, stock de représentations
phonologiques ou orthographiques récupérables en fonction des besoins du scripteur.
Tout se passe en fait comme si le scripteur cherchait la représentation graphique du mot
dans sa mémoire de la même manière qu'il le fait dans un dictionnaire. Selon ces
chercheurs, seule la procédure lexicale permet d'écrire correctement les mots irréguliers,
à l'instar de femme, chorale, schéma, etc., dont certains graphèmes doivent être
mémorisés en bloc.
Les chercheurs ont postulé l'existence d'une autre procédure que le scripteur expert
emploierait surtout pour les mots peu familiers ou inconnus. Cette deuxième procédure
repose sur la conversion des phonèmes en graphèmes. Le mot à écrire est d'abord
segmenté à l'oral en phonèmes. Ensuite, ces derniers sont mis en correspondance avec les
graphèmes directement reliés à la mémoire graphémique. Une fois ces relations réalisées,
les segments sont immédiatement assemblés puis traduits en mots écrits. Cette procédure,
dite d'assemblage, ne traite efficacement que les mots réguliers, dont la transcription se
fonde sur des correspondances graphophonétiques courantes. Quand il s'agit des mots
irréguliers comme chorale, les sujets peuvent avoir tendance à se tromper, par exemple
écrire * coral, ignorant la graphie grecque particulière ch.
39
2.7. Analyse des erreurs
L'analyse des erreurs orthographiques a mis en évidence deux facteurs intervenant dans
le comportement orthographique des scripteurs : l'effet de régularité et l'effet de
fréquence.
2.7.1. L'effet de régularité
L'analyse qualitative des erreurs orthographiques permet de déterminer la procédure qui
a été appliquée par le scripteur lors du traitement des mots. Les erreurs commises sont
généralement classées en deux ordres : soit phonologiques, soit phonographiquement
acceptables. En effet, quand la prononciation d'un mot conduit à une forme phonologique
différente du mot dicté, on parle d'une erreur phonologique. C'est le cas des erreurs de
substitution de graphèmes représentant des phonèmes différents telles que (vache pour
tache), d'omission (brache pour branche), d'ajout (prorte pour porte) et de déplacement
(talbe pour tablé). Ces erreurs phonologiques indiquent que l'élève éprouve des
difficultés de traitement phonologique. Par contre, une erreur est dite
phonographiquement acceptable lorsqu'elle conduit à une chaîne de lettres pouvant être
prononcé comme le mot dicté, à partir de l'application des règles de correspondances
phonologiques (Tumner, 1989). Il s'agit des erreurs de régularisation observées dans la
production de mots irréguliers tels que *fam pour femme qui, phonographiquement, est
acceptable. Selon les chercheurs, les élèves qui commettent des telles erreurs
comprennent le principe alphabétique, maîtrisent la procédure phonologique pour
orthographier, mais ils ont des difficultés à pouvoir traiter les unités orthographiques. En
revanche, les élèves qui font plusieurs erreurs phonologiques semblent utiliser une
stratégie orthographique plutôt qu'une stratégie phonologique axée sur les règles de
correspondances phonographiques (Frith, 1980; Launey & Valdois, 2004).
40
Pour étudier le développement des procédures utilisées par les élèves en vue de pouvoir
lire et orthographier, Sprenger-Charolles, Siegel et Béchenec (1997) ont suivi une
cinquantaine d'élèves francophones de la lre à la 4e année. Ces élèves ont participé à des
séances de lecture (lecture des mots et des pseudomots) et d'orthographe (dictée des mots
et des pseudomots). Les mots et les pseudomots (mots inventés) retenus pour ces séances
ont été rigoureusement contrôlés selon leur fréquence, leur régularité et leur lexicalité.
Les chercheurs ont émis les hypothèses suivantes : si les enfants ont recours à la
procédure phonologique pour traiter les mots, ils éprouveront des difficultés avec les
mots irréguliers ; de plus, la fréquence d'un mot ne pourra pas influencer la lecture et
l'écriture d'un enfant qui utilise cette procédure; par contre, si un mot fréquent tel que
femme est mieux lu ou mieux orthographié qu'un mot rare comme nœud, ou si un mot
(porté) est mieux traité qu'un pseudomot (lorté), peu importe sa régularité entre les
phonèmes et les graphèmes qui le composent, c'est un indice que l'enfant utilise la
procédure lexicale.
L'analyse des performances des élèves montre que la plupart des élèves francophones
utilisent la procédure phonologique après le quatrième mois d'enseignement de la lecture
et de l'écriture, car les mots réguliers ont été mieux lus et écrits que les mots irréguliers
dans l'étude. On a relevé des erreurs de régularisation (album a été lu [albym] ou écrit
*albomé). Les mots fréquents et les pseudomots n'ont pas été mieux traités que les mots
rares ou l'ensemble des vrais mots. Ces résultats montrent que les enfants francophones
ne transitent pas par la phase logographique comme le suggère le modèle de Frith (1985)
avec les anglophones, mais entrent immédiatement dans la phase alphabétique. Selon les
résultats obtenus lors de la deuxième prise de mesure à la fin de lre année scolaire, il
apparaît qu'un lexique orthographique se met en place progressivement, notamment pour
ce qui concerne la lecture. Mais, cette procédure ne peut remplacer totalement la
procédure phonologique puisque la tendance à mieux lire les mots réguliers et à faire des
erreurs de régularisation sur les mots irréguliers s'est avérée plus forte à la fin de la lre
année.
41
D'autres chercheurs ont voulu identifier l'utilisation par les enfants des informations
phonologiques, orthographiques, morphologiques ou visuelles contenues dans les mots
pour les orthographier correctement (Waters, Bruck et Malus-Abramovitz, 1988). Ils ont
administré une dictée, dans laquelle les mots avaient été choisis, à plus d'une centaine
d'élèves anglophones de la 3e à la 6e année du primaire. Cinq classes de mots ont été ainsi
dictées aux élèves, à savoir : les mots réguliers (must), les mots réguliers dont certains
phonèmes peuvent être écrits de différentes façons (street ou streat), les mots
orthographiques pouvant s'écrire selon les règles orthographiques (patch), les mots
morphologiques (grammar) et les mots étranges (ocean). Les résultats indiquent que tous
les élèves, quel que soit le niveau scolaire, ont un meilleur rendement dans l'écriture des
mots réguliers, suivis respectivement des mots réguliers avec différentes graphies
possibles, des mots orthographiques, des mots morphologiques et des mots étranges. On
peut donc dire qu'en orthographe les élèves utilisent plus efficacement la procédure
phonologique.
Toutefois, l'effet de régularité n'est pas le seul aspect dégagé par l'analyse des erreurs
produites par les élèves. Certains chercheurs ont aussi observé l'effet de fréquence.
2.7.2. L'effet de fréquence
La fréquence est considérée comme une variable importante dans le cadre des études sur
les connaissances orthographiques tant chez les scripteurs adultes que chez les apprentis
scripteurs. Selon les modèles à double voie (Barry, 1994; Coltheart, 1978), un mot
fréquent, connu du scripteur, est souvent mieux orthographié qu'un mot rare grâce à
l'utilisation de la procédure lexicale pouvant lui permettre de retrouver sa représentation
orthographique stockée en mémoire.
Share (1999) a suggéré que le processus par décodage en lecture fonctionne comme un
mécanisme d'auto-apprentissage qui permet à l'enfant d'acquérir des connaissances
42
orthographiques spécifiques nécessaires pour être habile en lecture et en orthographe.
Ainsi, même un jeune scripteur peut avoir des connaissances orthographiques bien
précises (spécifiques) pour des mots auxquels il a été fréquemment exposé. Share (1999)
a montré que des élèves hébreux de 2e année du primaire étaient capables de reconnaître
plus rapidement et d'orthographier aisément des pseudomots qu'ils avaient lus six ou huit
fois dans un texte trois jours auparavant. Ce résultat a également été observé en anglais
par Cunningham, Pery, Stanivitch et Share (2002). Ainsi, la fréquence d'exposition d'un
mot se révèle comme un facteur important dans le développement des compétences
orthographiques.
De même, Sprengher-Charolles, Siegel, Bechennec et Serniclass (2003) ont mené une
étude longitudinale auprès d'élèves francophones de la lre année. Ils n'ont pas obtenu
l'effet de fréquence au milieu de la lre année, suggérant que les élèves n'utilisent que la
procédure phonologique pour écrire les mots, qu'ils soient fréquents ou rares. Ce n'est
que lors de la deuxième prise de mesure à la fin de la première année scolaire que l'effet
de fréquence des mots est devenu significatif. Cet effet était plus grand pour les mots
irréguliers que réguliers. On a constaté que les élèves étaient sensibles à la fréquence des
mots après dix mois d'apprentissage de l'écrit.
Martinet, Valdois et Fayol (2004) ne retrouvent pas ce résultat pour les élèves de la lre
année. Les chercheurs reprochaient à l'étude de Sprenger-Charolles et al,. (2003) d'avoir
classé les mots avec des échelles de fréquence utilisées pour les scripteurs adultes (Trésor
de la langue française, 1971). Dans leur étude, la fréquence relative des mots choisis
pour la dictée a été cette fois-ci rigoureusement contrôlée par l'analyse des livres de
lecture des élèves. Une bonne moitié des mots était considérée comme étant de haute
fréquence (maison, trois, vert) et l'autre moitié, de basse fréquence (sortie, épée, loup).
Les résultats de cette étude indiquent que les mots irréguliers fréquents ont été mieux
orthographiés que les mots irréguliers de plus basse fréquence après trois mois et neuf
mois d'apprentissage.
43
On constate que si les mots sont véritablement connus par l'apprenti scripteur, il est
capable de mobiliser des connaissances orthographiques pour les orthographier
correctement.
Conclusion sur les compétences orthographiques chez les élèves
Les différents modèles de développement de compétences orthographiques chez les
apprenants que nous avons parcourus montrent une opposition évidente entre les
partisans des modèles classiques d'acquisition de l'orthographe (Frith, 1985, et al.), qui
postulent que l'utilisation de la procédure lexicale (stade orthographique) ne surviendrait
qu'une fois la procédure phonologique maîtrisée, et les autres chercheurs, qui suggèrent
qu'un scripteur peut bien passer à l'étape orthographique avant d'avoir maîtrisé la
stratégie alphabétique (Snowling, 1994, Alegria «fe Mousty, 1997, Cassar & Treiman,
2004).
Les travaux sur l'analyse des erreurs ont eu recours à différents instruments de
classification des erreurs. Nous examinerons quelques typologies en nous concentrant sur
celle de Catach, qui nous servira pour notre recherche.
2.8. Bref examen de quelques typologies existantes en langue française
Comme nous l'avons déjà indiqué, le problème des erreurs d'orthographe est un
problème récurrent. Il se pose à tous les niveaux (maternel, primaire, secondaire et
universitaire), à tous les cycles et à tous les secteurs de l'enseignement (privé et public).
Son impact est tellement important qu'il ne laisse aucun membre du système éducatif
indifférent.
44
Par ailleurs, beaucoup de chercheurs se sont penchés sur ce phénomène et ont proposé
des outils pour recenser et analyser les erreurs d'orthographe. Parmi ces chercheurs se
trouvent, par ordre chronologique des travaux, Debyser, Houis et Rojas (1967), Guion
(1973 et 1979), Bartout, Brunelle, Piacere (1977, Farid (1983), et Catach (1985).
Dans le but d'analyser les erreurs d'orthographe commises par les élèves du secondaire
des lycées et collèges du Gabon, nous procédons, dans cette partie, à une présentation
globale des différentes grilles d'analyse, avant de cerner celle que nous retiendrons pour
les fins de notre étude.
Nous avons d'abord analysé la typologie de Debyser et al. (1967), axée sur la langue
seconde que nous aurions bien voulu exploiter. Mais celle-ci présente des aspects qui
dépassent largement notre objet d'étude, par exemple des erreurs de construction
syntaxique ou d'impropriétés lexicales. Nous remarquons, en outre, que le classement
proposé n'est pas toujours juste. Prenons par exemple les phrases suivantes : le carreau e±
cassé; je suis voyagé; s'était beau; le jour ou je viens, etc. Ces phrases sont classées par
les auteurs comme faisant partie des erreurs de structure. Pour notre part, nous pensons
que ce sont des erreurs phonologiques, car « et » est simplement confondu à « est » dans
la première phrase. De même, la phrase s'était beau n'a rien à voir avec la structure à
partir du moment où l'ordre syntaxique est bien respecté. C'est encore une confusion
homophonique. Par contre, je suis voyagé pose moins un problème de structure que celui
de la non maîtrise des auxiliaires. C'est donc un classement somme toute hétérogène.
Nous avons ensuite examiné la grille d'erreurs proposée par Guion (1973 et 1979). Cette
typologie recense principalement cinq catégories d'erreurs à partir de codes permettant
une identification rapide, à savoir : les erreurs d'oreille (O), les erreurs d'accents et de
signes (A/S), les erreurs d'usage (U), les erreurs d'accord (Acc) et les erreurs de sens
(Sens), pour ce qui est de la grille élaborée en 1973 et destinée essentiellement au cycle
45
primaire. Quant à la typologie élaborée par le chercheur en 1979 et adressée au cycle
secondaire, les catégories sont ramenées à quatre : Usage (U), Homophones
grammaticaux (H/G), Marques du genre et de nombre (GN) et enfin Formes verbales
(FV). On relève encore dans cette grille une certaine imprécision, comme on le verra un
peu plus loin.
Nous avons aussi examiné la typologie de Farid (1983). En dépit de ses nombreuses
classes (9 au total), elle ne se démarque pas considérablement de celles de Guion. Il
ressort de ces deux typologies que le classement adopté par les chercheurs est un
classement traditionnel. Elles présentent aussi un certain nombre de confusions.
Chez Guion par exemple, les erreurs dues à une mauvaise prononciation (journal//'ow«a/,
proprdprope), les erreurs dues à des règles de lecture mal maîtrisées (vaisselle/vawe/Ze)
et les erreurs d'individualisation des mots (Yarmo'xrellarmoire, l'écrevisse//es crévisses )
sont rangées dans la catégorie des erreurs d'usage. Pour notre part, nous pensons que les
deux premières catégories devraient être classées comme erreurs d'ordre phonologique;
alors que les erreurs d'individualisation des mots ne sont rien d'autres que des erreurs
d'ordre idéographique.
Chez Farid, les erreurs de signes auxiliaires sont toutes des erreurs qui signalent un cas de
confusion (père/pére), d'omission (mere/mère), ou d'ajout (achat/achat) des signes
d'orthographe (accent aigu, accent grave, accent circonflexe; la cédille; l'apostrophe; le
tréma; le trait d'union). Cet ensemble est quasiment identique à celui proposé par Guion
(1973 et 1979) et il recouvre exactement les mêmes réalités. Nous reviendrons plus tard
sur toutes les critiques formulées à ce sujet. Rappelons simplement que la dite catégorie
serait plus explicite si les erreurs étaient réparties en fonction des diverses composantes
orthographiques dont elles dépendent précisément : composantes phonologique,
morphologique, idéographique.
46
Nous avons aussi examiné la typologie de Barthout et al. (1977), qui est surtout
linguistique, mais qui comporte elle aussi quelques confusions. Par exemple, j ' a i écrit à
ma tente/tante; l'élève répond à son mètre/maître; il fallait nous mètre en position/mettre,
etc. Ces erreurs sont rangées dans la catégorie des erreurs au plan syntaxique ou
relationnel (p. 63). À notre avis, ces erreurs pourraient, bien sûr, entraîner des
modifications de sens si on ne s'arrête qu'à l'orthographe du mot homophone.
Cependant, nous pensons que l'enfant ne confond pas en réalité la signification des mots
homophones s'il les connaît déjà, il y a confusion de graphies mais non de sens. On
devrait donc ranger ces erreurs dans la catégorie des erreurs lexicales et non au plan
syntaxique ou relationnel. Pour plus de détails sur ces différentes typologies, nous vous
renvoyons au mémoire de Sabine Brunet (1987).
Tous ces auteurs emploient le terme « faute » dans leurs typologies. Pour ce qui nous
concerne, nous retenons, dans notre recherche, le vocable d' « erreur », car la faute
comporte une connotation morale; alors que l'erreur orthographique, terme plus neutre,
n'a rien à voir avec la morale, c'est tout simplement un écart par rapport à une
convention graphique.
Enfin, nous avons examiné la typologie de Catach (1980). C'est une typologie fortement
linguistique qui nous a servi de guide. Les critères d'analyse de cette typologie reposent
principalement sur deux aspects essentiels : la nature des erreurs et les causes de ces
dernières. L'intérêt que présente cette typologie tient en plus à ce qu'elle suggère des
mesures correctives. Ainsi, les erreurs à dominante phonétique peuvent indiquer les
lacunes relatives à la discrimination auditive chez les élèves; les erreurs à dominante
phonogrammique montrent l'ignorance de la transcription des sons; les erreurs à
dominante morphogrammique sont susceptibles de signaler les difficultés d'accord
47
grammatical ; enfin, les erreurs sur les homophones, sur les idéogrammes et sur les lettres
non fonctionnelles sont des indices de confusion ou d'oubli.
Cette grille théorique peut être appliquée à tous les ordres d'enseignement et à plusieurs
formes d'activités d'écriture telles que la dictée ou/et la production libre. Cette souplesse
d'adaptation fait de cette typologie un outil que nous avons retenu pour le classement des
erreurs d'élèves gabonais du premier cycle du secondaire.
Toutefois, dans la typologie proposée par Catach, nous ne nous sommes pas intéressé à
tous les idéogrammes. Nous n'avons retenu que la majuscule, l'apostrophe et le trait
d'union qui ont une incidence certaine sur les erreurs d'orthographe liées à notre
recherche. Nous présentons ainsi la typologie proposée par Catach (1980).
2.9. Typologie des erreurs proposée par Nina Catach
La typologie des erreurs proposée par Nina Catach s'appuie essentiellement sur la
description élaborée par l'auteure du système orthographique de la langue française, que
nous avons résumée plus haut.
Deux typologies des erreurs d'orthographe ont été élaborées par Catach. La première,
(Catach, 1980 a) regroupe les différentes erreurs d'orthographe en deux grandes parties.
1. les erreurs extragraphiques traitant des problèmes d'ordre phonique ou phonétique
(oral), d'ordre calligraphique (absence ou adjonction de jambage, inversion de lettres,
etc) et des problèmes concernant la discrimination et le découpage de mots. 2. les erreurs
graphiques proprement dites relevant des autres niveaux du système graphique,
48
notamment les erreurs d'ordre phonogrammique, morphogrammique, logogrammique,
idéogrammique et non fonctionnel.
Sans revenir sur la distinction bipartite des erreurs, la deuxième typologie de Catach
(1980 b), celle que nous avons retenue pour les fins de notre recherche, présente les
différents types d'erreurs en six catégories, à savoir: 1. les erreurs à dominante
phonétique, 2. les erreurs à dominante phonogrammique, 3. les erreurs à dominante
morphogrammique, 4. les erreurs concernant les homophones, 5. Les erreurs concernant
les idéogrammes et 6. les erreurs concernant les lettres non fonctionnelles. Cette
typologie et assigne à chaque catégorie ou sous-catégorie un code d'identification
facilitant grandement l'identification des erreurs. Sans entrer dans les détails illustrés
dans chaque catégorie d'erreurs, nous nous limitons dans notre présentation succincte aux
aspects globalisants.
Les erreurs à dominante phonétique
Ce sont des erreurs qui relèvent de la reconnaissance ou de la mauvaise prononciation des
sons. Plusieurs causes peuvent expliquer ces erreurs. Il peut arriver que l'élève ne
perçoive pas la différence phonique entre sa prononciation et la prononciation normale du
mot (*tortoir/dortoir; *pormenade/promenade). Tout comme il pourrait s'agir d'une
mauvaise articulation du mot par l'enseignant. Dans cette catégorie, on trouve des erreurs
d'omission ou d'adjonction de lettre (*maitenantl*arbruste pour maintenant/'arbuste), de
syllabes (*bienteur pour bienfaiteur); des erreurs de confusion (s*puplierlpublier;
*carlcal; *quillerlcuiller, etc.). Si l'élève appréhende bien les sons des mots, les
reconnaît et les discrimine, il pourra assurément les orthographier avec plus de facilité.
La lecture peut aider à résoudre ce genre de problèmes puisqu'elle permet à l'élève de
visualiser les sons afin de pouvoir établir leurs rapports avec les graphies
correspondantes.
49
Les erreurs à dominante phonogrammique
On appelle erreurs phonogrammiques, les erreurs phoniques dues à une mauvaise
transcription des sons. L'élève qui commet ce type d'erreurs connait généralement les
sons, les discrimine parfaitement, mais n'arrive pas à les transcrire correctement. Il existe
deux types d'erreurs phonogrammiques : les erreurs qui altèrent la valeur phonique des
mots et celles qui ne l'altèrent pas. Parmi les erreurs qui altèrent la valeur phonique, nous
avons les cas d'omission (* mer itel mérite; *brilerl briller; *gér iri guérir; *asislassis) ou
d'adjonction (s*cheuveulcheveu; *exciste/existe; *sçorelscore, etc.). Nous avons ensuite
les cas de confusion (*oisisl oasis; *paillelpaye; * serai/serrai), etc. Nous avons enfin les
cas d'inversion (idoitlidiot; èlévelélève; vielle/veille), etc.
Les erreurs phonogrammiques n'altérant pas la phonie regorgent également de cas
d'omission ou d'adjonction (*sin/sein; *crillerlcrier; *guorillelgorille; *pensser/penser),
et de confusion (*invantairelinventaire; *noillerlnoyer; *pharmatie/phamacié), etc.
Il s'agit dans cette catégorie, comme dans la précédente, de problèmes de reconnaissance
des sons (cheuveu pour cheveu) et d'ignorance des règles qui régissent les rapports entre
les sons et les graphies correspondant à ces sons. Si l'élève ne sait pas que le yod se note
ill; que devant e, i Igl se note gu et qu'entre voyelles Isl se note ss, il aura du mal à venir à
bout de ces erreurs phonogrammiques.
Les erreurs à dominante morphogrammique
Cette catégorie d'erreurs rassemble à la fois des erreurs grammaticales et lexicales. Sur le
plan grammatical ou encore des morphèmes grammaticaux, l'auteure évoque des
50
problèmes portant sur les marques du genre, du nombre et des flexions verbales.
Précisément, elle aborde la relation mal établie entre les éléments d'une même phrase (les
maison *incendiés), les confusions dans les formes du pluriel (*caillous, *bijous), entre
le nom et le déterminant (la routes, les passager), etc.
Notons que cette catégorie présente une variété de cas d'accord grammatical (adjectifs,
noms, sujets, verbes). Elle intègre également les problèmes de conjugaison et d'accord
des participes passés, etc. Compte tenu de la densité de cette catégorie, nous ne pourrons
pas présenter tous les cas qui l'illustrent dans le tableau synthèse présenté plus loin.
Toutefois, nous avons ajouté un cas d'accord dont le numéro est 30111 concernant
l'accord des mots invariables (*nerveusements, *brutalements). Ce cas d'accord,
apparaissant dans notre dictée, ne figure pas clairement dans la typologie de Catach (1980
b), à moins de l'insérer dans la rubrique autres (30123).
En parlant de morphèmes lexicaux, l'auteure insiste sur cinq cas susceptibles de causer
des problèmes d'orthographe aux élèves : la non-reconnaissance des mots (un *névier/un
évier); l'ignorance de la famille lexicale (*inabituellinhabituel), l'ignorance des préfixes
et des suffixes (*anterremantlenterrement), l'ignorance du maintien ou non du radical
(*insupor table/insupportable) et l'ignorance des lettres finales justifiables
(*instinl instinct).
Nous pouvons dire de manière générale que les erreurs de cet ensemble qui concernent
les morphogrammes grammaticaux sont principalement dues à la non-maitrise et à la
non-application des règles d'accord. Les erreurs concernant les morphogrammes lexicaux
résultent, quant à elles, des confusions dues aux difficultés de pouvoir discriminer
51
distinctement des mots, et à la non-reconnaissance des signes dérivatifs, des graphies
figées de préfixes et de suffixes, etc.
Les erreurs concernant les homophones
Encore appelées erreurs logogrammiques, les erreurs concernant les homophones sont les
erreurs de confusion graphique. Autrement dit, ce sont les erreurs portant sur les mots qui
se prononcent de la même façon mais qui s'écrivent de manière différente. On en
distingue trois types principalement : les homophones de discours (/ 'arme/larme, encore
sage/en corsage), les homophone lexicaux (voie/voix, chant/champ, bout/boue, fond/font,
maitre/mètre, etc.) et les homophones grammaticaux (a/à, et/est, ce/se, ces/ses, s'est/ces,
son/sont, on/ont, leurs/leur, etc.). Les erreurs de cette catégorie sont dues à
l'incompréhension du texte, à l'ignorance du mot et de la graphie dénotant son sens, et à
la non-prise en compte du contexte dans lequel ce mot est employé.
Les erreurs concernant les idéogrammes
Sont appelées erreurs idéogrammiques, toutes les erreurs concernant les signes
diacritiques, à savoir : les accents, l'apostrophe, le trait d'union, tous les signes de
ponctuation (le point, la virgule, le point-virgule, etc.), la majuscule en tête de paragraphe
ou après un point ou au début d'un nom propre. Ce sont des signes qui ne sont pas en fait
orthographiques en tant que tels puisqu'ils n'appartiennent pas à l'alphabet. Les
idéogrammes relèvent d'un aspect beaucoup plus stylistique, typographique ou
syntaxique.
52
Dans notre étude, nous ne nous sommes pas intéressé à tous ces signes diacritiques, nous
nous sommes limité à ceux qui ont une incidence sur les erreurs d'orthographe, tels que
le nom propre (Toyota et Libreville), la majuscule en tête de phrase ou après un point (Le
chemin formait un passage...) et l'apostrophe (l'épaisse/*lépaisse). Le choix des ces
signes dans notre étude tient à leur rôle éminemment informatif dans un texte. La
majuscule permet de pouvoir distinguer des sens dans une phrase (l'État/l'état).
L'apostrophe éclaire sur la délimitation des syntagmes ou sur le sens des mots
(d'instinct/*dinstinct, l'arme/larme), etc.
Les erreurs concernant les lettres non fonctionnelles
Dans cette catégorie, nous trouvons les consonnes grecques (*téâtrel théâtre), les
consonnes latines (*sculterlsculpter), les consonnes simples ou doubles difficilement ou
non justifiables (combatif 'avec un t mais combattre avec deux t), les fausses etymologies
(s*domterldompter), les finales particulières (*abrit/abri, *peure/peur) et quelques
voyelles (douçâtre/*douceâtre). Beaucoup de lettres de cette catégorie sont jugées
farfelues et compliquent inutilement les graphies de certains mots. Nous pensons que
cette dernière catégorie mérite d'être restructurée car certaines situations ou certains cas
signalés devraient se retrouver ailleurs. C'est le cas de la voyelle numéro 60 (douceâtre)
qui illustre bien ce qu'on peut appeler la surcharge visuelle, et qui serait mieux dans la
catégorie des erreurs phonogrammiques, puisque nous avons un cas d'adjonction de la
cédille et d'omission de la lettre e. Nous comprenons que l'attention de l'auteure s'est
plus focalisée sur la surcharge graphique notée par l'adjonction e, a et l'accent
circonflexe sur â. Selon Catach, ces lettres ne servent strictement à rien sur le plan du
système, et ne constituent qu'une inutile surinformation optique.
Pour conclure, nous pouvons dire que cette typologie des erreurs orthographiques
élaborée par Catach touche l'ensemble de structures linguistiques et constitue un outil
53
pertinent pour le classement des erreurs d'orthographe. La quasi-totalité des erreurs
répertoriées dans notre étude y sont illustrées. Pour cela, comme nous l'avons déjà
signalé, nous faisons de cette typologie (voir tableau ci-dessous) la base référentielle de
notre étude. Pour notre recherche, nous avons utilisé la grille de Catach (1985 b)
intégralement, sauf pour la catégorie des mots invariables, que nous avons ajoutée.
54
Tableau.2
TYPOLOGIE DE CATACH (1980 b)
I. E R R E U R S À D O M I N A N T E P H O N É T I Q U E ... (L'élève peut entendre mal ou mal prononcer les sons.)
10 . Omission ou adjonction
100 lettre maitenanl ; arbrusle
101 syllabe bienteur fi bienfaiteur
M Confusion 110 soûrde-sonore 1100 p b p u p l i e r
. 1101 t-d tortoir 1102 f-v valfe 1103 autres
111 liquides 1-r car f= cal
112 nasales m-n nimer
113 semi-voyelles quiller fi cuiller
114 voyelles défini fi défunt
I L . E R R E U R S À D O M I N A N T E P H O N O G R A M M I Q U E (L'élève connaît les sons sans connaître leur transcription) '
■ • . »
20 Altérant la valeur phonique
voyelle digr.vocal.(l) accent
semi- . voyelle
consonne -igr.conson.(2) cédille
consonne •'•• simple ou- •
'double
2 0 0 . Omission ou adjonction .. .'■'
2000 bœf mérite cheuveu suite
2001 briter piaille fi paille
2002 exès gérir reçu
,exciste score
2003 énui fi ennui asis f assis sossie fi sosie
201 . Confusion
2010 " oisis y oasis . n i j£ né
2011 paille jt paye
2012 (Cf. 11}
2013 serai fi serrai
Z0? Inversion
2020 tdo'tt ?f idiot élève
2021 vielle , fi veille
2022 dantné ceuillir
(1) Digramme vocalique : couple de lettres-voyelles correspondant a un seul son. (2) Digramme cohsonantique : couple de lettres-consonnes correspondant a un seul son
55
j
IL ERREURS À DOMINANTE PHONOGRAMMIQUE (L'élève connaît les sons sans connaître leur transcription
21 voyelle semi- consonne consonne simple N'altérant pas la digr. vocal. voyelle digr.conson. ou double, phonique accent cédille justifiable
210 2100 2101 2102 2 1 0 3 ^ Omission ou sin fi sein joailler fiket pensser adjonction il ut ; ab'tme criller guorille enffermer
' ■ < œuil ; éteau fumer 21000 binette
pingoin récit 21030 aléger allourdir
211 2110 2111 2112 Confusion blême noiller pbarmatie
. invantère ■ L ' v
III. ERREURS À DOMINANTE MORPHOGRAMMIQUE (L'élève ne respecte pas l'orthographe des éléments non phonétiques)
30 Les morphèmes grammaticaux " . . •
300 Relation mal établie entre : ■ ' ■ • ■ • .
3000 Les catégories gram. 3002 adj. et nom 3004 P.P. et nom Des ombres passes. . 30020 juxtaposés " sans auxil.(3002)
3001 Confusion dans lès 30021 non juxtaposés 30040 avec être formes du pluriel 3003 sujet-verbe 30041 avec avoir
- chevaus, v.erroux 30030 juxtaposés ; '- . , sans C.O.D 3010 Nom et déterminant 30031 inversés 30042 OO.D: après
Nom 30032 non juxtaposés 30043 C.O.D. avant la routes, lés rue 30044 verbe pronominal les gens....il... "* : « , . ■ •
3011 Nom, ad}. 3012 Mode 3013 Groupe-désinence + complém. . 30120 inf.-part. Il crit, geind -•-'""'
Soin f^^Ct, .«.vrtr.«b\cj 30121 inf.-ind: sac de bille 30122 ind.-cond. 3014 Temps .. .pleine de truite 30123 autres criai.fi criais
31. Les morphèmes lexicaux
310 Non-reconnaissance 312 Ignorance 314 Ignorance des des mots des pré/suffixes lettres finales un névier anlerremant justifiables
un marchant couvefs, blan
3 1 1 . Ignorance de la 313 Ignorance du famille lexicale maintien ou
. ïnabité non du radical -. : ■ nous vogons 1
56
IV. ERREURS CONCERNANT LES HOMOPHONES
40 Homophones de discours
41 Homophones lexicaux
42 Homophones grammat
* l'arme fi larme chant-champ 420 a/à encore sage fi ■ • vote-voix 421 et/est en corsage vain-vin 422
423 424 425 426
ce/se ces/ses ou/où on/ont son/sont
• *. " V 427
428 ni/n'y
. autres
V. ERREURS CONCERNANT LES IDÉOGRAMMES
50 Omission ou adjonction 500 Majuscule 501 Apostrophe 503 Ponctuation 5000 M' propre/commun 502 Trait d'union 5030 Le point 5001 En tête de § ou 5031 La virgule
après/un point - '•• ■. - 5032 Autres signes 51 Confusion 510, Erreurs de signes
VI. El ÎIREURS CONCERNANT DES LETTRES NON FONCTIONNELLES
: r 612 Fausse étymologie
4>0 Voyelle 61 Consonne domtef (domitare). douçâtre 610 Çons. grecque 613 Cons, simple ou
'*?'■■■ ' .-•■; (douceâtre) téâtre double difficilement * # •611 Cons. Latine justifiable
combatif, imbécilité, :fJ*À | '*' . . ' . sculter justifiable combatif, imbécilité,
s * .- boursouffler i 614 . Finales particulières
abriti frai, petere
57
CHAPITRE II
METHODOLOGIE
Nous exposons, dans ce chapitre, la démarche méthodologique sur laquelle repose cette
étude. Nous présentons le type de la recherche que nous avons menée; la population à
l'étude; l'instrumentation et la collecte des données; le traitement, l'analyse et la synthèse
des données; les forces et limites méthodologiques; les considérations éthiques; et, enfin,
le mode de présentation des résultats.
1. Type de recherche
Notre étude consiste en une recherche exploratoire descriptive et mixte. Son caractère
exploratoire tient du fait qu'elle traite d'un sujet encore peu exploré par les chercheurs.
Son aspect descriptif, quant à lui, repose sur le fait que nous avons effectué la recension
d'erreurs d'orthographe commises par des élèves gabonais, ainsi que le relevé des
perceptions, opinions et stratégies dont ils nous ont fait part à l'égard de l'orthographe.
Par approche mixte, nous entendons une approche où des données qualitatives sont
jumelées à des données quantitatives afin d'enrichir les perspectives (Tashakkori et
Teddie, 1998) et les résultats de la recherche. Moss (1996) souligne d'ailleurs que ces
deux approches, lorsqu'elles sont jumelées, permettent effectivement « d'avoir une vision
plus complète et plus nuancée d'un phénomène qu'on cherche à comprendre » (p. 22).
Comme le signale Van der Maren (1997), nous souhaitons privilégier le croisement
d'instruments de collecte des données, afin de tirer profit de leur avantageuse
complémentarité. Ainsi, notre étude s'appuie d'abord sur l'approche quantitative, soit
58
l'analyse statistique des erreurs d'orthographe recueillies à la suite d'une dictée, mais
aussi sur l'approche qualitative, soit l'analyse des transcriptions des entretiens
métagraphiques menés après la dictée.
2. Population à l'étude
Le problème des erreurs d'orthographe concerne, sans nul doute, tous les acteurs du
système éducatif d'un pays, à savoir les élèves, les enseignants, les personnels de
l'administration scolaire (conseillers et inspecteurs pédagogiques), les parents d'élèves et
les politiques. Cependant, pour aborder notre problématique, nous nous intéressons
principalement aux élèves, ainsi que nous allons le voir dans les sections suivantes où
nous présentons la population cible, les échantillons et les méthodes d'échantillonnage
que nous avons adoptés dans cette étude.
2.1. Population cible
Notre étude porte sur les élèves de 6e année (l re année secondaire au Québec) et de 3e
année (4e année secondaire au Québec) d'établissements secondaires de Libreville et des
provinces du Gabon. Le choix de ces classes tient à leur situation particulière dans le
système éducatif gabonais. En effet, la classe de 6e marque la fin du primaire et le début
du secondaire. Nous souhaitons donc vérifier la maitrise d'un certain nombre de
connaissances à cette étape du cheminement scolaire des élèves. La classe de 3e, quant à
elle, constitue la fin du premier cycle du secondaire. C'est aussi la classe où
l'enseignement systématique de la grammaire prend officiellement fin puisqu'on suppose
que les élèves de ce niveau sont suffisamment outillés à cet égard.
59
2.2. Échantillons et méthodes d'échantillonnage -
Notre recherche comporte deux phases : 1. la dictée à laquelle ont été soumis tous les
sujets de notre étude; 2. l'entretien métagraphique auquel ont participé un sous-groupe
des élèves ayant fait la dictée. Nous présentons dans les pages qui suivent l'échantillon et
la méthode d'échantillonnage pour la dictée, puis nous faisons de même pour l'entretien
métagraphique.
2.2.1. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour la dictée
Nous avons recruté 783 élèves pour la dictée. Ces élèves faisaient partie de classes de 6e
et de 3e dans des établissements situés à Libreville et dans les provinces du Gabon.
Notons que le nombre des participants n'était pas déterminé d'avance. Tous les élèves
volontaires des classes choisies faisaient partie de facto de l'étude.
Notre échantillon est un échantillon de convenance (Patton, 1990). Cela signifie que nous
avons recueilli nos données dans des établissements publics et des classes où nous avons
recruté des sujets sur le seul critère de leur accessibilité, autrement dit, dans des
établissements publics et des classes où on nous a permis de le faire.
Établissements d'enseignement
Nous avons ainsi mené notre étude dans des établissements publics, c'est-à-dire des
établissements qui sont complètement sous la tutelle de l'État. En effet, dans l'univers
scolaire gabonais, il y a une variété d'établissements ayant la tâche de dispenser
l'éducation aux élèves : les établissements totalement privés, les établissements
60
confessionnels à caractère public, c'est-à-dire les établissements auquel l'État gabonais
fournit uniquement du personnel enseignant, et les établissements publics, entièrement
sous la charge de l'État. Signalons toutefois que l'État a un droit de regard sur ce qui se
passe dans les établissements privés, surtout sur le plan curriculaire.
Nous avons sélectionné des établissements publics, car nous appartenons à cet ordre
d'enseignement et que, pendant les dix années d'enseignement que nous avons passées au
secondaire, nous avons régulièrement observé le problème des erreurs d'orthographe sur
lequel nous réfléchissons dans le cadre de cette étude. Il faut préciser aussi que les
établissements publics sont les plus nombreux.
Nous présentons ci-dessous les huit établissements scolaires qui ont participé à notre
étude, à raison de deux classes par établissement (une classe de 6e et une autre de 3e). Ils
sont situés dans cinq des neuf provinces les plus peuplées du Gabon. Quatre
établissements sont à Libreville (Lycée20 National Léon Mba, Lycée d'Application
Nelson Mandela, le Collège d'enseignement secondaire (CES) d'Agondjé et le CES
Alenakiri). Notons que la ville de Libreville constitue, à elle seule, le bassin éducatif le
plus important du pays. Les quatre autres établissements sont de l'intérieur du pays
(Lycée Bantsatsa de Port-gentil, Lycée Eugène Amogo de Franceville, Lycée Charles
Mefane de Lambaréné et le Lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem).
Comme le montre le tableau ci-dessous, les élèves de notre échantillon sont également
partagés entre des établissements de Libreville et de l'intérieur du pays. Nous avons
procédé ainsi, car nous souhaitions obtenir, malgré le fait que nous avions un échantillon
de convenance, une certaine représentativité des élèves de l'ensemble du Gabon.
20 Au Gabon, certains établissements appelés « lycées » peuvent comprendre des élèves de niveau collège (de la 6e à la 3e secondaire) avec de véritables élèves de lycée (de la seconde à la terminale comme en France).
61
Tableau 3
Établissements scolaires de Libreville et des provinces
Nom de l'établissement
Situation géographique
Nombre total d'élèves de
l'établissement
Nombre d'élèves
ayant fait la dictée
Pourcentage des élèves
participant à l'étude
Lycée National Léon Mba (LNLM)
Centre de Libreville
5265 88 11,2%
Lycée Nelson Mandela (L.A. N.M)
Centre de Libreville
1593 80 10,2%
CES Angondjé (CESA)
Au sud de Libreville
1574 101 12,9%
CES Alenakiri (CESAL)
Au Nord de Libreville
1760 124 15,8%
Sous-total 4 10 192 393 50,1 % Lycée Batsantsa de Port-Gentil (L.POG)
Est du Gabon (côte Atlantique) 2426 110 14,0 %
Lycée Eugène Amogo de Franceville (L.E.F)
Sud-Ouest du Gabon 2175 85 10,9%
Lycée Charles Mefane de Lambaréné (L.E.L)
Centre du Gabon 1581 97 12,4 %
Lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem (L.E.O)
Nord du Gabon 1488 98 12,5 %
Sous-total 4 7 670 390 49,8 % Total 8 17 862 783 100 %
Même si tous ces établissements bénéficient du statut d'établissements publics du fait
qu'ils reçoivent des subventions de l'État gabonais, les problèmes de logistique restent
importants : manque de photocopieurs, de bibliothèques dignes de ce nom, de manuels
récents, de connexions Internet, etc.
Soulignons que les établissements de l'intérieur du pays, à quelques variantes près (Lycée
Eugène Amogo de Franceville), ne sont pas dans une situation reluisante. La vie scolaire,
liée généralement à celle des populations, est difficile. Celles-ci vivent de l'agriculture de
62
subsistance, de la pêche et de petits commerces. Le lycée est fréquenté en majorité par les
élèves des familles modestes et par les enfants des fonctionnaires en service dans la
localité. Les moyens d'accès à un certain nombre d'outils pouvant favoriser
l'apprentissage sont donc limités. Les établissements sont dépourvus de la logistique de
pointe et de matériel didactique adapté. Les quelques manuels scolaires usagés, qui
meublent les rayons de ce qui fait office de bibliothèque, datent du siècle dernier. C'est
dans ces conditions qu'étudie la population cible, à quelques différences près.
Niveau scolaire des sujets
Voyons maintenant comment les élèves de notre échantillon se répartissent par année
d'études. Le tableau ci-dessous montre que les élèves du niveau 6e sont un peu plus
nombreux que ceux du niveau 3 e.
Tableau 4
Niveau scolaire des sujets
Élèves de 6e Élèves de 3 e
Nombre Pourcentage Nombre Pourcentage
432 55,2 % 351 44,8 %
Sexe des sujets
Pour ce qui est du sexe des sujets, le tableau ci-dessous présente la proportion des filles et
des garçons ayant participé à la recherche. On constate que l'échantillon est quasiment
équilibré, les filles étant légèrement plus nombreuses que les garçons (51 % contre 49 %).
63
Tableau 5
Répartition des sujets selon le sexe
Sexe Nombre Pourcentage
Garçons 384 49%
Filles 399 5 1 %
Total 783 100 %
Voyons maintenant ce qu'il en est pour l'entretien métagraphique.
2.2.2. Échantillon et méthode d'échantillonnage pour l'entretien métagraphique
Parmi les 783 élèves ayant fait la dictée, 59 ont aussi participé à un entretien
métagraphique. Nous avions demandé à chacun des 16 enseignants de choisir quatre
élèves dans leur classe; cependant, cinq élèves se sont désistés.
Les quatre élèves que l'enseignant de chaque classe devait choisir se répartissaient de la
manière suivante : deux élèves forts et deux élèves faibles. Selon Patton (1990), il s'agit
là d'un échantillon à cas intenses ou échantillon d'intensité :
Intensity sampling involves the same logic as extreme cases sampling but with less emphasis on the extreme. An intensity sample consists of information-rich cases that manifest the phenomenon of interest intensively (but not extremely). Extreme or deviant cases may be so unusual as to distort the manifestation of the phenomenon of interest. Using the logic of intensity sampling, one seeks excellent or rich examples of the phenomenon of interest, but not unusual, (p. 171)
64
Âge des sujets
L'âge faisant partie de la vie privée, plusieurs élèves risquaient de ne pas se sentir à l'aise
de le révéler, surtout les plus âgés qui ont accusé un retard dans leur scolarité. C'est pour
cela que nous nous sommes abstenu de demander l'âge des élèves sur les copies de
dictée. Par contre, à deux, lors de l'entretien métagraphique, il était plus facile d'aborder
le sujet. Les données sur l'âge concernent seulement les élèves interviewés.
Les tableaux suivants présentent l'âge des sujets par niveau d'études. Les élèves de 6e ont
entre 11 et 15 ans. L'âge normal étant pour ce niveau de 11 ou 12 ans, on peut dire que la
plupart des élèves de 6e de notre échantillon (68,9 %) présentent un retard scolaire de un,
deux, voire trois ans. Les élèves de 3e, eux, ont entre 14 et 18 ans. Comme l'âge normal
pour ce niveau est de 14 ou 15 ans, on constate aussi qu'une bonne proportion de nos
sujets de 3e (43,3 %) accuse un retard scolaire de un à trois ans. Ces retards sont courants
dans le système scolaire gabonais en raison de différents facteurs, comme la
fréquentation irrégulière due notamment à des problèmes de transport, les effectifs
pléthoriques, le manque de matériel pédagogique, etc.
Tableau 6 Age des élèves de 6e
Age Nombre d'élèves Pourcentage 11 5 17,2 12 4 14,0 13 10 34,5 14 7 24,1 15 3 10,3
Total 29 100,0
65
Tableau 7 Age des élèves de 3
Age Nombre d'élèves Pourcentage 14 6 20,0 . 15 11 36,7 16 4 13,3 17 7 23,3 18 2 6,7
Total 30 100
Conclusion
Notre étude vise les élèves de 6e et de 3e année secondaire de l'ensemble du Gabon, qu'ils
soient de Libreville ou des provinces. Au total, 783 élèves provenant de huit
établissements différents (quatre à Libreville et quatre en province) ont fait la dictée et 59
d'entre eux, considérés par leurs enseignants comme forts ou faibles, ont participé à
l'entretien métagraphique. Dans le premier cas, nous avons sélectionné un échantillon de
convenance et, dans le deuxième, un échantillon d'intensité.
3. Instrumentation et collecte des données
Pour répondre aux questions de recherche, nous avons eu recours à deux outils de
collecte des données, à savoir une dictée et un entretien métagraphique. Nous décrivons
ces instruments dans les pages qui suivent. Nous précisons aussi les conditions dans
lesquelles se sont déroulées les deux phases de la collecte de données.
66
3.1. Dictée
Nous présentons le texte de la dictée, puis nous décrivons l'intérêt de la dictée en général
et de ce texte en particulier, en tant qu'instrument de collecte des données sur les erreurs
d'orthographe et, enfin, nous faisons état des conditions et du déroulement de la collecte
des données.
3.1.1. Texte de la dictée : Une route périlleuse
Ce texte de 126 mots est un extrait légèrement adapté de l'œuvre intitulée Le bourbier de
l'écrivain gabonais Armel Nguimbi Bissiélou (1995).
Les roues de la Toyota mordaient nerveusement la route tantôt pierreuse, tantôt nue qui
menait vers la capitale Libreville. Le chemin formait un passage étroit dans l'épaisse
forêt vierge qui couvrait la région. La voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant
les montées abruptes. Mes compagnons et moi étions basculés à gauche, puis à droite,
puis réinstallés brutalement sur nos sièges. Les voyageurs à bout et sans voix portaient
d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri. Le chauffeur ralentissait
devant les trous, freinait et repartait pour stopper à nouveau quelques mètres plus loin.
Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie! Il était
insupportable de plonger son regard dans ces gouffres menaçants!
3.1.2. Présentation de la dictée
Nous rappelons que la dictée est un exercice qui a l'avantage d'être bien connu des
élèves. Ainsi, elle ne nécessite pas d'explications particulières, car ils en font
régulièrement dans les classes gabonaises.
67
Par ailleurs, la dictée est un exercice spécifique de contrôle de l'orthographe pouvant
mettre en lumière la compétence orthographique des apprenants, leurs forces comme
leurs faiblesses. C'est dans cette perspective que nous l'avons retenue dans le cadre de
notre étude. Notre objectif consistait à voir quelles sont les différents types d'erreurs
d'orthographe que les apprenants commettent au cours d'une dictée en vue de les relever
et de les classifier de manière appropriée.
Le texte que nous avons choisi est relativement accessible du point de vue de la
compréhension pour les élèves de 6e et de 3e. Il présente en outre l'avantage de pouvoir
intéresser les élèves en raison de son caractère haletant.
De plus, il illustre un éventail de problèmes liés au lexique et à la grammaire en
adéquation avec les prescriptions curriculaires en vigueur au Gabon. Dans l'élaboration
de l'exercice, qui a servi d'épreuve unique pour les deux niveaux, nous avons pris en
compte les besoins de notre recherche, c'est-à-dire que nous avons légèrement modifié le
texte initial, afin de vérifier certaines difficultés orthographiques auprès des élèves.
Ce texte couvre une grande partie des sous-systèmes orthographiques, à savoir :
Les phonogrammes
• phonème [e]: menait, forêt, vierge, freinait, mètre
• phonème [5]: compagnon
• phonème [a]: nerveusement, tantôt, menaçant
• phonème [e] : chemin, main
68
Le mot compagnon nous donne l'occasion de voir si l'élève sait utiliser la règle de
position pour la transcription des voyelles nasales : m devant p, b ou m et n devant les
autres lettres.
Quant aux mots nerveusement et menaçant, ils nous permettent de vérifier si l'élève
distingue bien le [à] du participe présent (-anf) et le [à] de l'adverbe (-ent).
Les morphogrammes grammaticaux
• relation sujet-verbe
o non juxtaposés avec écran : les roues de la Toyota mordaient
o juxtaposés : le chemin formait
o accord avec le relatif qui : des précipices qui bordaient la route
• adjectif épithète
o séparé du nom : la roue ...tantôt nue
o juxtaposé au nom : les montées abruptes
• participe passé avec être : mes compagnons et moi étions basculés
• distinction infinitif-participe : étions...réinstallés,pour réprimer un cri
• déterminant et nom : la route, des bruits, quelle peur!
• distinction des formes de pluriel : des trous et non des *troux
69
Les morphogrammes lexicaux
• famille lexicale : instinct (instinctif)
• connaissance des préfixes et des suffixes : insupportable
• lettre derivative justifiable : étroit, bruits, regard
Les logogrammes (homophones)
• voix/voie, bout/boue
Les idéogrammes
• majuscule : Libreville, Toyota
• apostrophe : l'épaisse, d'instinct
3.1.3. Déroulement de la dictée
La collecte de données portant sur la dictée s'est déroulée dans les salles de classe des
établissements scolaires, aux heures normales de cours. Après le contrôle des élèves par
l'enseignant, nous avons procédé à la distribution des feuilles doubles et des stylos. Nous
avons rappelé aux élèves de s'identifier clairement sur les feuilles de dictée. Puis, nous
avons commencé la dictée proprement dite en lisant d'abord le texte au complet. Ensuite,
nous l'avons relu, une unité de sens à la fois, en reprenant trois fois la même unité. Enfin,
nous avons relu le texte au complet. Nous avons alors laissé aux élèves quelques minutes
pour se relire, se corriger et compléter les espaces laissés éventuellement en blanc.
70
3.2. Entretien métagraphique
Outre la dictée, nous avons utilisé, pour notre étude, un deuxième instrument de collecte
de données : l'entretien métagraphique.
Nous présentons donc dans cette partie l'entretien métagraphique comme outil
d'enseignement et de recherche, puis le déroulement des entretiens que nous avons menés
et, enfin, les détails du protocole d'entretien métagraphique que nous avons élaboré.
3.2.1. Entretien métagraphique
L'acquisition d'une langue écrite s'avère un travail long et laborieux pour le jeune
apprenant, surtout quand il s'agit de la langue française dont le système orthographique
est complexe (Catach, 1980). La maîtrise de l'orthographe française est un problème qui
n'est jamais totalement résolu. Du primaire au supérieur, l'on s'accorde à reconnaître son
importance et sa difficulté.
Le constat est régulièrement fait : l'orthographe pose des problèmes aux élèves. Ces
problèmes sont bien identifiés et bien connus. En Suisse, par exemple, Bétrix et al.
(1999) ont montré que les erreurs d'orthographe se concentrent dans la zone des
morphogrammes, ces zones silencieuses à l'oral mais qu'il faut cependant noter à l'écrit :
il n'y a que Topaze21 pour prononcer le « s » final de « moutonsss » révélant, ce faisant,
21 Dans la pièce de Marcel Pagnol, intitulée Topaze (1928), Topaze est l'instituteur. Au cours d'une dictée et alors qu'il circule dans sa classe, il s'aperçoit que les élèves commettent l'erreur de mal accorder le pluriel de « mouton ». Il prononce alors « les moutonSS », puis « les moutonSSS » jusqu'à ce que les élèves réagissent. En référence à l'œuvre de Pagnol, l'effet Topaze est une déviance dans la posture d'accompagnement pédagogique du tuteur qui se caractérise par le fait d'émettre des signes conscients et inconscients afin d'éviter que l'apprenant se trouve en échec.
71
l'un des nombreux problèmes que l'écriture du français pose aux élèves et, d'une manière
générale, aux scripteurs.
L'une des solutions au problème orthographique a été d'associer l'élève à compréhension
du phénomène, de travailler avec lui pour savoir comment il s'y prend pour écrire des
textes. D'où la mise au point de l'entretien métagraphique élaboré par Jaffré (1999) et
son équipe LÉA (Linguistique de l'Écrit et Application). La démarche associe un double
recueil des données : texte écrit par l'élève dans un cadre d'atelier d'écriture et entretien
mené avec l'élève pendant ou juste après la production graphique.
Jaffré (1999 et 2003) s'inscrit dans la lignée de Karmiloff-Smith (1992), qui considère les
enfants comme des informateurs à part entière. Ces auteurs estiment qu'il y a une
interaction entre expérience et connaissance, et que le sujet joue un rôle essentiel dans la
réorganisation de son expérience. Pour Jaffré (1999) et son équipe, les entretiens
métagraphiques apportent des informations sur la « géographie procédurale » des
compétences dont dispose le sujet en orthographe, et les erreurs assorties des
commentaires des sujets sont l'indice immédiat des problèmes que leur pose tel ou tel
aspect linguistique.
L'entretien métagraphique est donc un outil de clarté cognitive d'un double point de vue :
d'abord, c'est un outil qui permet de mieux connaître les démarches orthographiques des
scripteurs; ensuite, on constate qu'il est un outil important pour l'élève lui-même qui est
amené à expliciter les chemins qu'emprunte sa réflexion, à verbaliser son raisonnement
ou ses représentations.
C'est toute l'importance de l'entretien métagraphique, en ce sens qu'il est le moment où
les élèves clarifient leur procédure de résolution des problèmes orthographiques.
72
L'entretien permet donc de comprendre les erreurs des élèves. Dans la pratique
d'enseignement, grâce à l'entretien métagraphique, on passe du comptage du nombre
d'erreurs à un classement des erreurs (typologie) et, enfin, à la compréhension de l'erreur
par la recherche de son origine (étiologie).
Par conséquent, on peut dire que l'entretien métagraphique est un instrument précieux qui
permet à l'élève de verbaliser la représentation qui sous-tend son erreur et constitue en
même temps une voie vers la résolution du problème. Tant que l'élève croit savoir, il ne
s'interroge pas. Mais dès lors qu'il explique et que, chemin faisant, il peut constater que
la procédure qu'il utilise n'est pas adaptée au problème à traiter, il peut alors se remettre
en cause et s'interroger sur la langue, condition nécessaire à de nouvelles acquisitions.
L'entretien métagraphique au cours duquel l'élève est amené à justifier délibérément ses
choix graphiques après avoir écrit un texte (Jaffré, 2003; Jaffré et David, 1999) permet à
celui-ci de pouvoir réorganiser ses connaissances.
3.2.2. Déroulement de l'entretien métagraphique
Immédiatement après avoir terminé la dictée avec tous les élèves d'une classe, nous
avons réalisé l'entretien métagraphique avec quatre d'entre eux. Rappelons que ce sont
les enseignants qui avaient identifié ces élèves, les classant comme forts ou faibles.
Comme il a été dit, cet entretien métagraphique auprès des élèves avait pour but de nous
aider à mieux connaître les conceptions et les stratégies de ces derniers face aux
différentes erreurs recensées en orthographe, et ce, afin de nous aider à expliquer
certaines graphies erronées produites par les élèves à l'issue de la dictée.
L'entretien s'est déroulé en deux étapes. Nous avons d'abord posé à l'élève des questions
générales qui nous ont renseigné sur ses perceptions quant à l'orthographe française et
sur ses propres comportements orthographiques. Nous sommes ensuite revenu avec
73
l'élève sur la dictée qu'il venait de faire et nous lui avons posé, à partir des graphies qu'il
avait produites, des questions qui nous ont permis de savoir comment il avait procédé
pour orthographier le texte dicté.
Les silences et les hésitations des élèves nous ont amené à relancer certaines questions, à
les reformùler, afin de permettre aux élèves de mieux comprendre de quoi il était
question. Pour eux, cela représentait, nous semble-t-il, le temps requis pour réfléchir sur
la question posée avant d'y répondre.
3.2.3. Protocole de l'entretien métagraphique
Le protocole comporte deux parties. Dans le tableau ci-dessous figure la liste des
questions que nous avons posées, au cours du premier volet de l'entretien, afin de saisir la
relation des élèves avec l'orthographe, notamment leur perception de leur rendement en
orthographe, leur opinion quant au degré de difficulté de l'orthographe et leurs stratégies
générales dans différentes situations d'écriture.
74
Tableau 8
Questions posées au cours du premier volet de l'entretien métagraphique
1. Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe? Pourquoi?
2. Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? Pourquoi?
3. Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?
4. Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?
- pendant que tu écris?
- après avoir fini d'écrire?
5. Que trouves-tu facile en orthographe?
6. Que trouves-tu difficile en orthographe? Note. Si l'élève a de la peine à nommer les différentes zones de l'orthographe, le chercheur pourra lui
fournir des précisions :
- la conjugaison;
- l'accord de l'adjectif;
- l'accord du verbe;
- l'accord du participe passé;
- les lettres que l'on n'entend pas à là fin des mots.
Ces questions sont inspirées de Bétrix-Koehler (1991)
Le deuxième volet du protocole d'entretien a consisté à amener les élèves à justifier leurs
graphies et leurs stratégies spécifiques liées aux sous-systèmes de l'orthographe
française, à savoir : les phonogrammes, les morphogrammes grammaticaux et lexicaux,
les idéogrammes et les logogrammes, à partir des cas qui sont présentés aux pages 67 à
69. Nous avons donc pu recueillir, à chaud, les justifications de certaines graphies -
justes et erronées - produites par les élèves pendant la dictée. Nous donnons en annexe
deux exemples de verbatims.
75
Conclusion
Deux instruments de collecte de données ont été retenus pour cette étude : la dictée et
l'entretien métagraphique. La dictée nous a permis de recueillir les données sur les
capacités orthographiques de l'ensemble des participants. De plus, grâce à l'entretien
métagraphique, nous avons recueilli les déclarations d'une partie d'entre eux sur leur
rapport à l'orthographe et sur leurs conceptions et stratégies face à certaines graphies
illustrant les diverses zones du système orthographique.
Nous allons maintenant voir comment nous avons procédé pour le traitement, l'analyse et
la synthèse des données.
4. Traitement, analyse et synthèse des données
Nous abordons dans cette section les aspects liés au traitement des données recueillies.
Nous décrivons d'abord les mesures prises pour assurer l'anonymat des participants, puis
le traitement des données issues de la dictée et de l'entretien métagraphique.
4.1. Anonymat des participants
Pour garder l'anonymat chez les participants comme ' l'exigent les services de
réglementation des questions éthiques, il a fallu attribuer un code à chaque sujet.
76
Pour les élèves n'ayant fait que la dictée, ce code est composé de ce qui suit : le numéro
du sujet, son sexe, sa classe et son établissement. En voici un exemple : 2. F. 6. L.EO (2e
élève, fille, de la classe de 6e du lycée Richard Nguéma Bekale d'Oyem).
Pour les élèves ayant aussi participé à l'entretien métagraphique, ce code est composé de
ce qui suit : le numéro du sujet, son sexe, sa classe, son statut ou degré de compétence
estimé par l'enseignant (F majuscule pour fort ou f minuscule pour faible), son
établissement et son âge. En voici un exemple : 21. G. 3. F. L.POG - 18 ans (21e élève,
garçon, de la classe de 3e, fort en orthographe, du lycée Batantsa de Port-Gentil).
4.2. Traitement des données de la dictée
Nous présentons dans cette section, la manière dont les copies de dictée ont été corrigées,
d'une part, et les différents éléments qui ont prévalu dans le processus d'élaboration de la
base des données, d'autre part.
4.2.1. Correction des copies
Guion (1973) considère qu '« un mot est juste ou faux; dès qu'il n'est plus
rigoureusement juste, il est faux ». C'est dire que tout mot analysé du point de vue
orthographique est juste ou faux, il ne peut être à moitié juste ou à moitié faux. Ce
principe ne veut pas dire pour autant qu'on doit compter seulement une erreur par mot. Il
importe de relever toutes les erreurs contenues dans un mot erroné afin de les répartir
dans les catégories auxquelles elles correspondent. C'est ce principe qui nous a guidé tout
au long de cette étape réservée à la correction des copies.
77
Comme nous l'avons signalé plus haut, la grille utilisée pour le classement et la
codification des erreurs lors de la correction des copies est celle de Catach (1980 b), qui
reconnaît divers types d'erreurs dont les principales sont en lien avec les phonogrammes,
les morphogrammes grammaticaux ou lexicaux, les logogrammes et les idéogrammes.
Nous donnons en annexe deux exemples de copies corrigées et codifiées.
La correction des copies s'est déroulée en deux temps. Les copies des élèves retenus pour
passer l'entretien métagraphique ont été corrigées séance tenante, c'est-à-dire
immédiatement après la dictée. Puisqu'il s'agissait de corriger quatre copies par classe
(deux copies d'élèves forts et deux copies d'élèves faibles), la tâche prenait peu de temps.
Les autres copies ont été corrigées plus tard, une fois toutes les données collectées.
Une deuxième correction, considérée comme une validation interjuge, a été réalisée par
deux doctorants de la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université Laval pour
assurer la validité de la correction. Chacun d'eux a corrigé une dizaine de copies. Le
degré de validité a tourné autour de 95 %.
4.2.2. Élaboration de la base des données
Grâce au logiciel SPSS, nous avons ensuite élaboré une base des données des 783
participants. Nous tenons ici à remercier chaleureusement M. Simon Larose, professeur à
la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université Laval, pour sa précieuse
collaboration.
Toutes les données ont été codifiées à l'aide des variables suivantes : le sujet, le sexe,
l'habileté en orthographe, la classe, le nom de l'établissement d'attache et la ville de
78
l'établissement, de même que les différents types d'erreurs. La variable âge n'y figure
pas parce qu'elle ne concerne que les élèves ayant passé l'entretien métagraphique. Elle a
été introduite plus tard dans le processus de traitement des données. Rappelons que les
variables statut (niveau d'habileté) et âge concernent exclusivement les élèves ayant
passé l'entretien métagraphique.
Le tableau suivant présente le plan de codification.
79
Tableau 9
Plan de codification
Variable Valeurs de la variable
Sujet Numéro de l'élève
Sexe 1 = garçon
2 = fille
Statut l=fort
2 = faible
Classe 1 = classe de 6e
2 = classe de 3e
Etablissement 1 = Lycée Batsantsa de Port-Gentil (L.POG)
2 = Lycée Eugène Amogo de Franceville (L.E.F)
3 = Lycée Charles Mefane de Lambaréné (L.E.L)
4 = Lycée Richard Nguéma d'Oyem (L.É.O)
5 = Lycée National Léon Mba de Libreville (LNLM)
6 = C.E.S Agondjé de Libreville (C.E.S. A)
7 = Lycée d'Application Nelson Mandela Libreville (L.A.N.M)
8 = CES Alenakiri de Libreville (C.E.S.A.L)
Ville 1 = Port-Gentil
2 = Franceville
3 = Lambaréné
4 = Oyem
5 = Libreville
Type d'erreur Erreurs phonétiques
Erreurs phonogrammiques
Erreurs morphogrammiques
Morpho-grammaticales
Morpho-lexicales
Erreurs logogrammiques
Erreurs idéogrammiques
80
Variable Valeurs de la variable
Erreurs non fonctionnelles
4.2.3. Validation de la codification des données
Un autre chercheur a vérifié la justesse de la codification des données. C'est d'ailleurs au
cours de l'une des ces séances de vérification que nous nous sommes aperçu de l'absence
de la variable classe, qui a été ajoutée dans une deuxième étape de codification.
4.2.4. Analyse statistique des données
Avec l'aide d'une statisticienne de l'Université Laval, nous avons procédé à l'analyse
statistique des données à l'aide des logiciels SPSS et SAS et à la production des tableaux
et des graphiques présentés dans cette thèse.
4.3. Traitement des données issues de l'entretien métagraphique
Dans cette section, nous décrivons comment nous avons procédé pour l'enregistrement,
la transcription et l'analyse des données issues de l'entretien métagraphique.
4.3.1. Enregistrement des données
Étant donné que nous faisions les entretiens métagraphiques pendant les heures de cours,
il n'était pas rare que des élèves des classes voisines, à ce moment-là sans surveillance,
fassent du bruit, ce qui a un peu nui à la clarté de nos enregistrements sonores même si
81
nous avons utilisé un enregistreur numérique performant. Cependant, ces faiblesses
mineures n'ont pas compromis l'analyse des données.
43.2. Transcription des données
Nous avons transformé le discours oral en discours écrit de la manière la plus classique
qui soit, c'est-à-dire en transcrivant mot à mot le discours des élèves, et ce, afin de
rassembler tout le matériel verbal de la manière la plus fidèle possible. Pour cela, nous
avons gardé les silences, les hésitations et les répétitions des élèves, en fait tout l'univers
verbal dans lequel se sont déroulés les entretiens métagraphiques. Nous voulions par là
garder toutes les conditions dans lesquelles se sont produits les discours.
43.3. Analyse des données
Pour analyser les données issues des entretiens métagraphiques, nous avons procédé en
deux étapes, selon en gros les deux parties de l'entretien. À l'aide d'un tableau où nous
avons consigné les réponses de chaque sujet par question (voir annexe), nous avons
d'abord analysé les réponses aux premières questions d'ordre général concernant les
perceptions des élèves quant à leur propre habileté orthographique et à leur opinion face à
la complexité de l'orthographe française. Nous avons ensuite analysé les stratégies
orthographiques qu'ils ont déclarées, les stratégies générales en premier lieu puis les
stratégies spécifiques en relation avec les sous-systèmes orthographiques. Pour l'analyse
des stratégies, nous avons utilisé une liste codée qui a été établie d'après les études
antérieures et les verbatims des sujets. Pour plus de précision sur l'analyse des entretiens,
nous renvoyons le lecteur au chapitre IV.
82
43.4. Validation de la codification des données
Nous avons vérifié l'analyse et le classement de nos données de l'entretien avec un autre
chercheur de l'Université Laval.
Conclusion
Nous avons corrigé les copies de la dictée, avons élaboré le plan de codification des
données et codifié l'ensemble des données issues de la dictée. Une validation interjuge a
montré la justesse de la correction. La codification des données a également été vérifiée
par un tiers. Nous avons procédé ensuite au traitement statistique des données.
Pour ce qui est de l'entretien métagraphique, nous avons transcrit fidèlement les
enregistrements sonores et analysé les verbatims à l'aide d'un tableau classant les
réponses de chaque élève aux deux parties de l'entretien (performance orthographique
estimée par l'enseignant, rendement réel d'après les résultats, opinion face à
l'orthographe, stratégies générales et stratégies spécifiques).
5. Forces et limites méthodologiques
Toute recherche comporte des forces et des limites méthodologiques. Voyons-en d'abord
les forces.
Nous avons soumis un nombre très imposant d'élèves à la dictée (N=783). De plus, nous
avons procédé à des entretiens métagraphiques avec un nombre appréciable d'élèves
(N=59).
83
Nous nous sommes par ailleurs fondé sur une approche méthodologique mixte dont
plusieurs auteurs mettent en évidence les bénéfices, notamment Mark et Shotland (1987),
ainsi que Caracelli et Greene (1993). Reichardt et Gollob (1987) préconisent même
l'utilisation de méthodes aux « faiblesses opposées » pour que la synthèse des résultats
soit plus révélatrice. Par exemple, dans le cadre de notre étude, les données provenant de
la dictée réalisée avec un grand nombre d'élèves ont révélé des résultats qu'il serait
difficile d'expliquer sans, au minimum, aller interviewer les élèves, afin de mieux
comprendre leurs réponses. Les entrevues effectuées sont venues appuyer les résultats
statistiques obtenus, rendant ainsi « vivantes » les statistiques établies.
Il nous est cependant impossible de généraliser les résultats obtenus à l'ensemble des
élèves du Gabon étant donné que la technique d'échantillonnage que nous avons dû
adopter (soit l'échantillon de convenance) rend, par définition, la généralisation des
résultats plus difficile. Nous estimons par contre que nos résultats sont certainement de
bons indicateurs des compétences orthographiques des élèves du Gabon, étant donné la
taille de notre échantillon pour la dictée.
5.1. Fiabilité
On parle généralement de fiabilité d'une étude quand il y a une certaine cohérence entre
les objectifs de la recherche, son déroulement et les résultats obtenus. Cette cohérence
n'est possible que si la technique ou l'instrument de collecte des données est apte à
recueillir les mêmes informations à chaque fois que les mêmes phénomènes investigués
se manifestent. C'est ce qu'affirment Karsenti et Savoie Zajc (2004, p. 143) qui pensent
que le critère de fiabilité porte sur la cohérence entre les questions posées au début de la
recherche, l'évolution qu'elles ont subies, la documentation de cette évolution et les
résultats de la recherche.
84
Partant de ce principe, nous pensons que nos instruments (la dictée et l'entretien
métagraphique) nous ont permis de recueillir des informations fiables, des données
cohérentes sur les erreurs d'orthographe à chaque fois que le besoin s'est fait sentir. Tout
comme nous sommes convaincu que nos questions de recherche sont en lien avec les
résultats de cette étude. La première question et sous-question de recherche (quels sont
les types d'erreurs que les élèves gabonais du premier cycle du secondaire commettent
dans leurs écrits?) trouve sa réponse dans le chapitre III qui recense avec précision les
différents types d'erreurs d'orthographe auxquels les élèves gabonais sont confrontés. La
sous-question de recherche (quelle est la fréquence par type d'erreur ?) a fait également
l'objet d'un traitement minutieux puisque les résultats de notre étude indiquent par ordre
d'importance numérique les erreurs les plus en cause dans les écrits des élèves gabonais.
La deuxième question de recherche (quelle est l'influence des facteurs du sexe et du
niveau scolaire sur la fréquence et les types d'erreurs?) a été examinée avec attention
puisque les résultats de notre étude montrent clairement, dans le chapitre III, que les
comparaisons établies entre ces différentes variables sont en relation avec le phénomène
des erreurs d'orthographe. La troisième question (quelle est la perception des élèves
gabonais du premier cycle du secondaire quant à leur compétence orthographique et
quant à la complexité de l'orthographe française?) a fait, elle aussi, l'objet d'un
traitement rigoureux puisque les résultats de notre étude présentent, dans le chapitre IV,
les perceptions des élèves à l'égard de leur compétence orthographique et leur opinion
sur le degré de difficulté de l'orthographe française. La quatrième question et sous-
question de recherche (quelles sont les stratégies qu'ils déploient pour orthographier?
Quelles sont celles que déclarent les élèves forts et les élèves faibles?) sont aussi en lien
avec les résultats de notre étude, qui donnent, à partir des analyses pertinentes, les causes
du phénomène des erreurs orthographiques, et classifient dans le chapitre IV les
différentes stratégies déclarées par les apprenants gabonais interrogés.
85
5.2. Validité interne
La notion de validité interne renvoie, selon Legendre (1993), au fait de « bien mesurer ce
qu'on veut mesurer ».
Ainsi, dans le but d'assurer la validité interne de notre étude, nous avons d'abord testé
notre texte de dictée auprès d'une dizaine d'élèves de notre ancien établissement
secondaire, qui ne faisaient pas partie des établissements retenus pour notre recherche.
Les erreurs relevées étaient pratiquement les mêmes que celles que nous avons recueillies
pendant la collecte des données proprement dite.
Ensuite, nous avons fait un essai d'entretien métagraphique avec les mêmes élèves.
L'objectif de cet essai était de mesurer la validité interne de nos différents outils de
collecte de données en vérifiant le degré de difficulté de notre dictée, le degré de clarté du
protocole d'entretien, en identifiant les questions et les termes qui pourraient poser
problèmes, afin de les reformuler au besoin. Vu que les questions s'adressaient à des
élèves de 6e et de 3e, il n'était pas rare que les participants gardent le silence ou nous
disent « qu'entendez-vous par là? ». Par exemple, la question formulée de la manière
suivante : « Que trouves-tu facile en orthographe? » a été jugée par plusieurs comme trop
générale. Il fallait ajouter : l'accord des déterminants, des adjectifs, des verbes, la
conjugaison, etc., ce qui nous a permis de reformuler certaines questions, de clarifier
certains points en ajoutant « c'est-à-dire » ou encore « autrement dit ».
D'autres questions ont nécessité l'ajout de mises en situation pouvant permettre d'éclairer
l'élève. C'est le cas de la question sur le mot « insupportable » formulée originellement
de la manière suivante : « Que représente in dans le mot insupportable? » qui est devenue
simplement « pouvez-vous me décomposer le mot insupportable? ou encore « comment
86
ou de quoi est formé le mot insupportable? ». Les élèves ont en effet trouvé ces
formulations plus simples.
53 . Validité externe
Il est question de validité externe ou intrinsèque lorsque les résultats d'une recherche
scientifique peuvent être transposables dans un autre milieu, à d'autres populations ou à
d'autres contextes. Les chercheurs se préoccupent habituellement de cet aspect dans le
but de pouvoir généraliser les résultats de la recherche. Notons au passage que la validité
interne et externe sont liées. « Les spécialistes de recherche appliquée doivent vraiment
s'assurer de la validité interne de leurs résultats, s'ils ont l'intention d'en généraliser
l'application à d'autres populations ou à d'autre situations » (Martella et al, 1999, p. 47).
Dans le cadre de notre étude, si les résultats donnent un éclairage valable et pertinent sur
les erreurs d'orthographe d'élèves de 6e et de 3e de l'ensemble du Gabon, ils ne peuvent
être généralisés dans tout le pays pour les raisons que nous avons invoquées plus haut.
6. Considérations éthiques
Le comité d'éthique de l'Université Laval assure la protection des personnes contre les
risques de la recherche. La défense de l'intégrité physique et morale des participants à
l'étude en est l'objectif fondamental.
Avant d'effectuer le voyage sur le Gabon où devait se passer la collecte des données,
notre étude a été soumise à l'appréciation du comité d'éthique de l'Université Laval afin
d'avoir son approbation. Étant donné que notre recherche impliquait la participation de
mineurs, nous avons rédigé des formulaires de consentement à l'intention de leurs parents
87
ou représentants légaux (mandataires légalement désignés, tuteurs). D'autres formulaires
ont également été rédigés à l'intention des étudiants majeurs. Tous ces formulaires ont été
dûment remplis soit par les participants eux-mêmes ou encore par leurs parents ou
représentants légaux. (Voir en annexe l'attestation d'approbation livrée par le comité
d'éthique).
Nous nous sommes aussi conformé aux règles d'éthique relatives à la protection et à la
conservation des données relatives aux participants à l'étude, y compris leur anonymat.
7. Mode de présentation des résultats
Nous présentons dans les chapitres III et IV les résultats de notre recherche, ainsi que
l'analyse des données et l'interprétation que nous en avons faite. Pour faciliter la lecture
et la compréhension de nos travaux, nous exposons les résultats obtenus pour chaque
instrument de collecte de données en suivant la chronologie de notre travail. Ainsi, dans
le chapitre III, nous commençons d'abord par les résultats issus de l'approche
quantitative, c'est-à-dire les résultats de la dictée. Nous abordons ensuite, dans le chapitre
IV, les résultats issus de l'approche qualitative, qui ont été recueillis lors de l'entretien
métagraphique.
Enfin, chaque fois que cela était possible et pertinent, nous avons ajouté des tableaux
pour simplifier la lecture des résultats.
88
Conclusion du chapitre sur la méthodologie
Rappelons que nous avons présenté le type de recherche que nous avons menée, la
population à l'étude, ainsi que les échantillons et techniques d'échantillonnage liés à
chacune des deux grandes phases de notre recherche, soit la dictée et l'entretien
métagraphique. Nous avons de plus décrit nos instruments de collecte de données, ainsi
que le déroulement de chacune des étapes de recueil de données. Nous avons aussi fait
état des forces et limites méthodologiques de notre recherche, et nous avons rappelé les
considérations éthiques auxquelles nous nous sommes soumis. Enfin, nous avons
brièvement exposé le mode de présentation des résultats que nous avons choisi. Voyons
maintenant quels sont les résultats de notre recherche.
89
CHAPITRE III :
ANALYSE DES RESULTATS :
ANALYSE DES DONNÉES QUANTITATIVES ISSUES DE LA DICTÉE
Nous procédons dans cette partie à l'analyse statistique, axée sur les données
quantitatives et réalisée à partir des résultats issus de la correction des copies de dictée.
Nous faisons d'abord une présentation générale des différentes erreurs ciblées dans cette
étude, avant d'entrer dans les détails concernant les différents sous-systèmes
orthographiques et les relations des erreurs avec les variables comme le sexe et le niveau
scolaire. Enfin, nous bouclons ce chapitre en présentant les corrélations entre les
différents types d'erreurs ainsi que le seuil observé pour indiquer si elles sont
significativement différentes de zéro.
Pour l'analyse des résultats globaux et par sous-système, nous fournissons d'abord un
tableau présentant les résultats des élèves, puis un histogramme montrant la distribution
des erreurs.
>
1. Résultats généraux
Le tableau 10 présente le nombre d'erreurs d'orthographe commises par les élèves. Ce
nombre varie entre 1 et 92 par élève, pour une dictée de 126 mots.
90
Tableau 10
Nombre d'erreurs (toutes catégories confondues)
Nombre Nombre Nombre Nombre
d'erreurs d'élèves % d'erreurs d'élèves •/. 1 3 4 48 12 1,5
2 1 1 49 11 1,4
3 10 1.3 50 8 1,0
4 8 1,0 51 7 0,9
5 9 1.1 52 10 U . 6 6 0,8 53 4 0,5
7 14 1,8 54 5 0,6
8 13 1,7 55 7 0,9
9 19 2,4 56 4 0,5
10 12 1,5 57 11 1,4
11 20 2,6 58 6 0,8
23 19 2,4 . 59 5 0,6
24 13 1,7 60 9 1,1
25 10 U 61 6 0,8
26 9 1,1 62 3 0,4
27 14 1,8 63 7 0,9
28 21 2,7 64 2 0,3
29 10 1,3 65 3 0,4
30 13 1,7 66 4 0,5
31 18 2 3 67 2 0,3
32 17 2,2 68 4 0,5
33 8 1,0 69 2 0,3
34 12 1,5 70 4 0,5
• 35 9 1,1 71 5 0,6
36 16 2,0 72 5 0,6
37 17 2J2 73 3 0,4
38 17 2,2 74 1 0,1
39 6 0,8 75 1 0,1
40 13 1,7 76 2 0 3
41 8 1,0 78 2 0JÎ
42 15 1,9 81 1 0,1
43 11 1,4 82 1 0,1
44 8 1,0 84 1 0,1
45 13 1,7 88 1 0,1
46 12 1,5 92 1 0,1
47 11 1,4
Total 783 100
91
Graphique 1: Distribution générale des erreurs d'orthographe
100-
80-
! t 60-
O
ë LU
40-
20-
Moyenne =31,33 Ecart type =18,51
N=783
- , - , ■ ■ ■ ■ , ■ ■ ■ ■ , ■ ■ ■ ^ - ^ r
0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 100,00
Erreurs
Comme le montre le tableau 10, aucun élève n'a eu zéro erreur. On s'aperçoit que trois
élèves, soit 4 % des élèves, ont commis une seule erreur d'orthographe. Il ressort
également que 12,1 % des élèves se trouvent dans la tranche de 1 à 10 erreurs ; 23 % dans
la tranche de 11 à 20 erreurs; 17,5 % dans la tranche de 21 à 30 erreurs ; 17 % dans la
tranche de 31 à 40 erreurs; 13,9 % dans la tranche de 41 à 50 erreurs; 8,7 % dans la
tranche de 51 à 60 erreurs; 4,7 % dans la tranche de 61 à 70 erreurs ; 2,8 % dans la
tranche de 71 à 84 erreurs et 0,2 % dans la tranche de 88 à 92 erreurs.
Quant au graphique 1, il présente la distribution générale des erreurs d'orthographe
enregistrées dans cette étude. Cette distribution ne suit pas tout à fait la courbe normale.
On constate que le sommet du graphique se trouve dans l'intervalle de 0 à 20 erreurs.
92
Une grande concentration se situe autour de la moyenne générale des erreurs
d'orthographe, soit M = 31,33. Il apparaît que la montée de la courbe (de 0 à 20) se fait
de manière plutôt abrupte. Cela s'explique par le nombre réduit d'élèves ayant enregistré
peu d'erreurs d'orthographe. La descente est, par contre, progressive. Cela est attribuable
au grand nombre d'élèves ayant eu un nombre important d'erreurs d'orthographe, et au
fait qu'à mesure que le nombre des erreurs augmente, celui des élèves diminue
graduellement.
Voyons maintenant les moyennes des erreurs par catégorie.
Tableau 11
Moyenne des erreurs par catégorie
Variable Moyenne
E. phonétiques
E. phonogrammiques
E.morphogrammiques
• d'ordre grammatical
• d'ordre lexical
E. logogrammiques
E. idéogrammiques
E. non fonctionnelles
3,03
11,68
12,53
9,98
2,55
2,72
1,11
0,359
Moyenne générale des erreurs
31,33
À la lecture du tableau 11, il apparaît que les erreurs morphogrammiques obtiennent la
moyenne la plus élevée en dictée chez nos sujets, soit 12,5. Elles sont talonnées par les
erreurs phonogrammiques avec une moyenne de 11,7. À l'intérieur des erreurs
morphogrammiques, ce sont les erreurs de type grammatical qui présentent la moyenne la
plus élevée par rapport aux erreurs de type lexical (10 contre 2,5). La moyenne générale
des erreurs est élevée, soit 31,33 pour une dictée de 126 mots.
93
Dans la région de Québec, Boilard-Gameau (1985) a mené une recherche auprès d'un
échantillon de 118 élèves de cinq classes de sixième année primaire de 11 à 12 ans. Elle
compare deux méthodes de français au primaire : la méthode dite nouvelle et la méthode
traditionnelle. L'approche nouvelle est centrée sur la production et la compréhension de
discours. L'ancienne approche, par contre, accorde une place de choix à la grammaire et
à l'analyse grammaticale. L'épreuve employée par la chercheuse était une composition
libre (un texte au choix parmi divers types de textes, dans une période normale de classe,
c'est-à-dire 50 minutes). L'auteure a choisi elle aussi la typologie de Catach pour
classifier les erreurs des élèves. L'étude montre, comme pour notre échantillon gabonais,
que les erreurs concernant les morphogrammes et les homophones grammaticaux sont les
plus fréquentes avec 45,5 %, devant les idéogrammes (28 %) et les erreurs d'orthographe
lexicale (16 %). La moyenne des erreurs est cependant nettement moindre (14,3 sur 100
mots écrits contre 24,9 chez nos élèves gabonais si on ramène leur moyenne d'erreurs sur
100). Il faut remarquer cependant que cette étude porte sur des élèves du primaire et non
du secondaire ainsi que sur des compositions libres et non sur une dictée, ce qui constitue
une situation d'écriture laissant plus de liberté aux sujets scripteurs de choisir les mots et
les structures qu'ils maîtrisent.
Toujours au Québec, Conrad Bureau (1985) a observé que les élèves du cours secondaire
font, en moyenne, 37 erreurs par copie, soit environ 18 erreurs par « page composée. »
L'auteur ne signale pas cependant le nombre de mots équivalant à une page composée, ce
qui rend la comparaison de ces moyennes difficile. On peut imaginer malgré tout qu'une
page composée est sans doute aussi longue sinon plus que le texte de notre dictée, ce qui
permet d'avancer que les sujets du secondaire québécois étudiés par Bureau ont commis
moins d'erreurs que nos sujets du secondaire gabonais. La grammaire représente encore
une fois la source principale des erreurs, et ce, pour toutes les années du secondaire (35,8
%). Précisons cependant que le terme « grammaire », même s'il renvoie pour l'ensemble
aux accords, recouvre également des faits de langue qui ne ressortissént pas tous à
l'orthographe comme la concordance temporelle et modale. Par ailleurs, l'étude de
Bureau porte sur des compositions et non sur une dictée.
94
D'autres études sont parvenues à des résultats similaires, c'est-à-dire où les erreurs
morphogrammiques, notamment grammaticales, sont plus importantes. C'est le cas de
Roberge (1984), de Ouellet (1997) et de Bétrix (1989), dont nous présentons brièvement
les résultats.
Roberge a mené une étude comparative entre deux groupes d'élèves : un groupe d'élèves
de septième année, le groupe de 1961 (groupe I), et un autre d'élèves de première année
du secondaire, celui de 1982 (groupe II). La question qui a servi de point de départ à cette
étude comparative était de savoir si l'orthographe des élèves québécois était meilleure ou
pire qu'avant. Une dictée de 117 mots a été administrée aux deux groupes. Cette
comparaison a permis à l'auteur de constater que l'orthographe a subi une chute verticale
à quelques vingt ans d'intervalle. Pour ce qui concerne la similitude de cette étude à la
nôtre, il ressort que pour les deux sexes « Les erreurs grammaticales sont plus
nombreuses que les erreurs d'usage» (p. 30).
Les rapports du ministère de l'Éducation du Québec, Résultats des élèves à l'épreuve
obligatoire d'écriture de sixième année primaire (Ouellet et Provost, 1997a) et Résultats
des élèves à l'épreuve obligatoire d'écriture de troisième année secondaire (Ouellet et
Provost, 1997b) ont aussi révélé que la grammaire était au centre des difficultés
auxquelles les élèves des deux ordres étaient confrontés en orthographe. Pour la 3e
secondaire, ordre qui concerne plus spécifiquement notre étude, le rapport québécois
révèle que 91,7 % des élèves atteignent le seuil de réussite en orthographe d'usage contre
seulement 50,8 % en orthographe grammaticale. C'est en fait l'orthographe grammaticale
qui constitue le critère le moins réussi des 9 critères analysés. Par ailleurs, il est difficile
de comparer les résultats de ces rapports du ministère de l'Éducation du Québec avec les
nôtres sur le plan de la moyenne générale des erreurs. En effet, les deux épreuves sont
différentes (texte/dictée), les erreurs ne sont pas classifiées à l'aide des mêmes
instruments, et les calculs effectués ne sont pas les mêmes, le nombre d'erreurs dans la
95
grille du MEQ par copie étant converti en pourcentage de réussite et non pas calculée en
soi.
En Suisse, Bétrix Koehler (1991) rappelle qu'une étude qu'elle a menée en 1987 a permis
de constater que les élèves de 3e et 4e primaire commettent le plus grand nombre
d'erreurs dans la morphogrammie grammaticale. Dans son étude sur les élèves vaudois
de 5e et 6e primaire pour laquelle elle a utilisée aussi la grille de Catach (1980), elle arrive
à la même conclusion :
Dans l'ensemble, on peut dire que le profil des erreurs varie peu entre la 5e et la 6e. En terme (sic) de proportion, les erreurs concernant les morphogrammes grammaticaux sont de loin les plus nombreuses. Chez les 6e, quasi une erreur sur deux est de ce type (sur 15 erreurs, les 6e font en moyenne 7 erreurs en grammaire) et chez les 5e, deux cinquièmes des erreurs sont également grammaticales (en moyenne 9 erreurs sur environ 23). (p.27)
C'est dire que la zone morphogrammique, notamment grammaticale, reste celle qui est la
plus touchée par le phénomène des erreurs d'orthographe tant en Occident (Europe et en
Amérique du nord) qu'en Afrique. Le problème des erreurs grammaticales concerne
même les meilleurs élèves, car les rares erreurs qu'ils commettent relèvent pour la plupart
de ladite zone. D'autre part, Bétrix-Koehler (1991), comme Boilard-Garneau (1985), a
trouvé une moyenne générale d'erreurs nettement moins élevée que la moyenne de notre
échantillon (15,4 sur 118 mots, soit 13 sur 100, contre 24,9 sur 100 pour notre
échantillon). L'étude suisse concerne l'ordre primaire et non secondaire, mais elle a porté
sur une dictée comme dans le cas de notre recherche. Par contre, l'étude comparative
québécoise menée par Roberge a trouvé une moyenne du groupe de 1982 de première
secondaire de 33,10 sur 117 mots, contre 31,33 sur 126 mots pour notre étude. Il faut dire
que les sujets de l'étude de Roberge ont deux ans de scolarité de moins que la moitié des
nôtres environ et que le texte à la base de la dictée de cette étude montre un niveau de
difficulté, notamment de vocabulaire, un peu plus élevé que le nôtre par rapport à l'âge
des sujets.
96
De façon générale, on observe que, toutes choses égales par ailleurs, les élèves gabonais
seraient globalement plus faibles en orthographe que les élèves du secondaire et, même
dans certains cas, du primaire, qui ont participé à des études sur l'orthographe au Québec
et en Suisse et que les erreurs qu'ils commettent le plus fréquemment touchent les
morphogrammes grammaticaux.
Examinons maintenant les erreurs des élèves par sous-système orthographique, en
commençant par les erreurs phonétiques.
Les erreurs selon les sous-systèmes orthographiques
Tableau 12
Les erreurs phonétiques
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 176 22,5 1 145 18,5 2 116 14,8 3 97 12,4 4 75 9,6 5 36 4,6 6 42 5,4 7 29 3,7 8 6 2,0 9 8 1,0 10 7 0,9 11 7 0,9 12 6 0,8 13 7 0,9 14 2 0,3 15 3 0,4 16 2 0,3 17 6 0,8 18 1 0,1 20 2 0,3
Total 783 100
Ce tableau présente les statistiques des erreurs phonétiques du type * destin au lieu
d'instinct. On constate qu'une proportion assez élevée d'élèves (22,5 %) n'ont commis
97
aucune erreur dans cette catégorie. De leur côté, 72,9 % des élèves ont eu entre 1 et 10
erreurs de type phonétique. Le reste, soit 5,5 %, se situe entre 11 et 20 erreurs.
-5,00
Graphique 2: Les erreurs phonétiques
Moyenne =3,04 Ecart type =3,392
N=783
0,00 5,00 10,00 15,00 20,00 25,00
Erreurs phonétiques
Ce graphique est d'un genre assez particulier par rapport à la courbe normale. On
constate que le nombre d'élèves n'ayant pas beaucoup d'erreurs d'orthographe est
important, le sommet du graphique étant en effet placé sur zéro. La majorité des erreurs
de cet ordre se trouvent dans l'intervalle allant de 0 à 4 erreurs. On remarque une forte
concentration d'erreurs autour de la moyenne (M = 3,04). La distribution des erreurs est
plus progressive à partir de 5 erreurs jusqu'au maximum de 20 erreurs. Le nombre peu
élevé d'erreurs dans cette catégorie indique que la dictée ne comportait pas beaucoup de
mots pour lesquels les élèves auraient pu hésiter sur le plan de la discrimination auditive.
98
Comme ils étaient en situation de dictée, ils pouvaient s'appuyer, pour la transcription
des mots, sur la prononciation de l'enseignant.
Tableau 13
Les erreurs phonogrammiques
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 16 2 1 14 3,1 2 24 3,1 3 29 3,7 4 42 5,4 5 43 5,5 6 44 5,6 7 45 5,7 8 37 4,7 9 38 4,9 10 40 5,1 11 38 4,9 12 48 6,1 13 32 4,1 14 26 3,3 15 33 4,2 16 39 5,0 17 35 4,5 18 28 3,6 19 20 2,6 20 29 3,7 21 11 1,4 22 19 2,4 23 9 1,1 24 12 1,5 25 6 0,8 26 7 0,9 27 7 0,9 29 3 0,4 30 2 0,3 31 1 0,1 32 3 0,4 33 1 0,1 35 1 0,1 36 1 0,1
Total 783 100
À la lecture de ce tableau sur les erreurs phonogrammiques (par exemple, *épaice), on
constate que seulement 2 % des élèves n'ont commis aucune erreur dans cette catégorie.
99
Cependant, 45,5 % des élèves se trouvent dans la tranche de 1 à 10 erreurs et 48,9 % dans
la tranche de 11 à 20, et on relève même 7,1 % dans la tranche de 21 à 30 erreurs.
Graphique 3: Les erreurs phonogrammiques
50-
40-
Sr 30-«-• U ë UJ
20-
10-
42,00
24,00
il n
32,00
n 35,00
29,05
1 1200
T -10,00 0,00 10,00 20,00 30,00
Erreurs phonogrammiques
- H - j , z-rcrtluinjijinnl
40,00
Moyenne =11,68 Ecart type =6,904
N=783
Ce graphique présente des bâtonnets de hauteur irrégulière. Cette irrégularité pourrait
s'expliquer par le fait que la maitrise des phonogrammes par les élèves varie selon les
correspondances graphophonétiques en cause, qui sont très diverses en français. Certains
élèves peuvent bien connaitre les graphies pour tel phonème, mais hésiter encore pour le
choix de la graphie pour tel autre phonème. On remarque une forte concentration autour
de 10, la moyenne des erreurs de ce type étant de M = 11,67. La courbe, légèrement
abrupte à la montée (de 0 à 10) par rapport à la courbe normale, est plus progressive à la
descente.
100
Tableau 14
Les erreurs morphogrammiques
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 4 0,5 1 23 2,9 2 25 3,2 3 48 6,1 4 46 5,9 5 47 6,0 6 33 4,2 7 31 4 8 34 4,3 9 32 4,1 10 34 4,3 11 31 4,0 12 41 5,2 13 33 4,2 14 28 3,6 15 29 3,7 16 29 3,7 17 40 5,1 18 17 2,2 19 16 2 20 28 3,6 21 17 2,2 22 20 2,6 23 13 1,7 24 9 Ul 25 11 1,4 26 15 1,9 27 13 1,7 28 6 0,8 29 6 0,8 30 7 0,9 31 2 0,3 32 2 0,3 33 5 0,6 35 4 0,5 36 1 0,1 37 2 0,3 39 1 0,1
Total 783 100
101
Graphique 4: Les erreurs morphogrammiques
Moyenne =12,53 Ecart type =8,052
N=783
-10,00 0,00 10,00 20,00 30,00 40,00
Erreurs morphogrammiques
Le tableau 14 et le graphique 4 présentent le nombre d'erreurs et la distribution des erreurs morphogrammiques à la fois d'ordre grammatical (type : la route *nu) et lexical (type : *instin). Très peu d'élèves n'ont commis aucune erreur dans cette catégorie, soit 0,5 % ; c'est le taux pour zéro erreur le plus bas que nous ayons enregistré de tous les types d'erreurs. On constate sur le tableau que la tranche de 1 à 10 erreurs comprend 45,1 % des élèves, celle de 11 à 20 erreurs 37,8 % et celle de 21 à 39 erreurs 15,6 % des élèves.
Quant au graphique, relativement similaire au premier, on relève la présence des bâtonnets d'une hauteur en dents de scie comme dans le cas des phonogrammes. Cette
102
irrégularité pourrait tenir à la diversité des règles morphogrammiques du français, qui ne
seraient pas maîtrisées également par les élèves. Le sommet se situe entre quatre et six
erreurs. On constate une forte concentration autour de la moyenne, la plus élevée de
l'étude, soit M =12,53.
Tableau 15
Les erreurs morphogrammaticales
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves % 0 11 1,4 1 39. 5 2 64 8,2 3 49 6,3 4 52 6,6 5 39 5 6 39 5 7 45 5,7 8 36 4,6 9 41 5,2 10 38 - 4,9 11 37 4,7 12 27 3,4 13 32 4,1 14 28 3,6 15 35 4,5 16 20 2,6 17 29 3,7 18 17 2,2 19 22 2,8 20 18 2,3 21 16 2 22 U 1,4 23 7 0,9 24 7 0,9 25 4 0,5 26 4 0,5 27 7 0,9 28 3 0,4 29 1 0,1 30 2 0,3 32 1 0,1 33 1 0,1
Total 783 100
Parmi les erreurs morphogrammiques, on constate, à travers ce tableau, que seulement
1,4 % des élèves n'ont commis aucune erreur grammaticale. La tranche de 1 à 10 erreurs
103
comprend 56,5 % des élèves, la tranche de 11 à 20 comprend 33,9 % des élèves, celle de
21 à 33 comprend 8,4 % des élèves.
Graphique 5: Les erreurs morphogrammaticales
Moyenne =9,98 Ecart type =6,841
N=782
0,00 10,00 20,00 30,00
Erreurs morphogrammaticales
La forme de ce graphique sur les erreurs morphogrammaticales ressemble à celle du
précédent sur la morphologie en général. La courbe, qui devrait avoir la forme d'une
cloche régulière, a plutôt une montée abrupte avec des bâtonnets de hauteur assez
irrégulière. Le nombre d'élèves ayant enregistré peu d'erreurs grammaticales est réduit,
ce qui explique cette situation. On constate une forte concentration dans l'intervalle de 0
à 10 erreurs. Comme dans le premier graphique, la courbe présente aussi une descente
plus progressive du fait d'un nombre important d'erreurs enregistrées à l'intérieur de ce
104
sous-système. La similitude entre la forme du graphique 1 et 4 est sans doute liée au fait
que les erreurs grammaticales sont les plus nombreuses chez les sujets.
Tableau 16
Les erreurs morpholexicales
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves % 0 87 11,1 1 184 23,5 2 168 21,5 . 3 134 17,1 4 101 12,9 5 45 5,7 6 33 - 4,2 7 14 1.8 8 11 1,4 9 3 0,4 11 1 0,1 12 1 0,1 15 1 0,1
Total 783 100
Contrairement au tableau précédent où nous avons une forte proportion d'erreurs
grammaticales dans plusieurs tranches de 10, ce tableau des erreurs lexicales présente des
tranches d'erreurs beaucoup plus limitées. On constate que 11,1 % des élèves n'ont
commis aucune erreur dans cette catégorie. La tranche la plus dense (de 1 à 10 erreurs)
comprend 88,6 % des élèves, alors que celle de 12 à 15 n'en a que 0,2 %.
105
Graphique 6: Les erreurs lexicales
Moyenne =2,55 Ecart type =1,96
N=783
10,00
Erreurs morpholexicales 15,00
La moyenne des erreurs lexicales (M = 2,55) est l'une des plus faibles de cette étude. Les
erreurs enregistrées se trouvent concentrées dans l'intervalle de 0 à 4, le sommet du
graphique se situant autour d'une erreur uniquement. Encore une fois, la descente de la
courbe est plus graduelle, en escalier, que ne l'est la montée.
Les résultats des élèves en morphologie lexicale sont nettement meilleurs qu'en
morphologie grammaticale. La dictée présentait bien sûr beaucoup plus de cas concernant
des règles grammaticales, mais elle comportait quand même une dizaine de mots dont la
transcription demandaient des connaissances d'ordre morpholexical (étroit, bruit,
instinct, insupportable, regard, menaçant, etc.).
106
Tableau 17
Les erreurs logogrammiques
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 115 14,7 1 161 20,6 2 151 19,3 3 116 14,8 4 81 103 5 55 7 6 51 63 7 25 3,2 8 16 2 9 9 1,1 10 1 0,1 11 2 0,3
Total 783 100
Graphique 7: Les erreurs logogrammiques
20C-
150-
O O t t 100-lU
50-
T 0,00 3,00
" ^ l - T ô o l —
l 6,00
T 9,00
Moyenne =2,72 &arttype=2,213
N=783
12,00
Erreurs logogrammiques
107
Ce tableau et ce graphique présentent les statistiques et l'allure de la courbe des erreurs
logogrammiques de type les voyageurs sans *voie. Il ressort du tableau que 14,7 % des
élèves n'enregistrent aucune erreur dans cette catégorie. La tranche la plus importante,
allant de 1 à 10 erreurs, comprend 85 % des élèves.
Sur le graphique, on remarque, comme dans la situation précédente, une forte
concentration d'erreurs autour de 2, où nous avons le sommet des bâtonnets. La
distribution de la descente du graphique est encore progressive. La moyenne des erreurs,
relativement faible, est de M = 2,72. Il s'agit donc d'une catégorie qui causerait peu de
problèmes aux élèves. Il faut dire cependant que la dictée ne comportait que deux cas
d'homonymie. Nos résultats devraient être vérifiés avec plus de cas.
Tableau 18
Les erreurs idéogrammiques
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 305 39 1 234 29,9 2 158 20,2 3. 53 6,8 4 19 i 2,4 5 7 0,9 6 3 0,4 7 2 03 8 1 0,1 9 1 0,1
Total 783 100
108
Graphique 8: Les erreurs idéogrammiques
400-
TU rrzn Fôôl
300-
H -
TU rrzn Fôôl
Effe
ct
O
TU rrzn Fôôl
1305,001
TU rrzn Fôôl TU rrzn Fôôl
|234.00|
TU rrzn Fôôl
100-
TU rrzn Fôôl
| l 58 .00 |
TU rrzn Fôôl TU rrzn Fôôl 153,001
TU rrzn Fôôl T««ilQT_rp!_ rr. TU rrzn Fôôl 0 r I 1 1 UJ | i,uu| I ' ' T l
Moyenne =1,11 Ecart type =1,243
N=783
-2,00 0,00 2,00 4,00 6,00 8,00 10,00
Erreurs idéogrammiques
Ce tableau et ce graphique présentent les statistiques et la courbe des erreurs
idéogrammiques de type les roues de la *toyota. On constate, sur le tableau, que 39 %
des élèves n'ont aucune erreur dans cette catégorie. La tranche de 1 à 9 erreurs comprend
une proportion assez élevée, soit 61 % des élèves. On remarque, pour ce qui est du
graphique, que le sommet se trouve au niveau de 0. La moyenne des erreurs pour ce type
est de seulement M = 1,10, avec une forte concentration dans l'intervalle de 0 à 2.
Comme pour les logogrammes, les idéogrammes poseraient donc peu de problèmes aux
élèves.
109
Tableau 19
Les erreurs non fonctionnelles.
Nombre d'erreurs Nombre d'élèves %
0 617 78,8
1 128 163 2 32 4,1 3 4 0,5
26 1 0,1 51 1 0,1
Total 783 100
Graphique 9: Les erreurs non fonctionnelles
600-
t j 400-
ë LU
200-
1 __*__ 1 20,00 40,00
Erreurs non fonctionnelles
+4*84- T 60,00
Moyenne =0,36 Ecart type =2,106
N=783
110
Ce tableau et ce graphique très particulier par rapport aux autres donnent des
informations face aux erreurs non fonctionnelles (du type quelle *peure de regarder...).
Il se dégage à la lecture du tableau qu'un fort taux d'élèves n'a commis aucune erreur
dans cette catégorie, soit 78,8 %. C'est le pourcentage le plus élevé de réussite pour tous
les types d'erreurs présentés dans cette étude. Les élèves qui ont commis des erreurs dans
cette catégorie se retrouvent principalement dans la tranche de 1 à 3 erreurs, soit 20,5 %.
La moyenne des erreurs du type non fonctionnel est de M = 0,36 comme c'est indiqué sur
le graphique. C'est la moyenne la plus faible de notre étude. Il faut dire que cette
catégorie touche des graphies hors-système qui concernent un nombre relativement limité
de mots.
2. Influence des variables du sexe et du niveau scolaire
Après cette partie réservée à l'analyse statistique des différents types d'erreurs liées aux
sous-systèmes de l'orthographe, nous allons maintenant analyser les variables sexe et
niveau scolaire des élèves. Nous faisons des comparaisons entre ces différentes variables
afin de déterminer si elles sont en relation avec le phénomène des erreurs d'orthographe.
Le test t de Student22 a été appliqué afin de déterminer si la différence entre les moyennes
des élèves, selon les variables précitées, est significative ou non. Le seuil critique de
signification a été généralement fixé à 0,05.
Le test de Student avec variance inégale a été utilisé lorsque c'était approprié.
111
Tableau 20
Comparaison des moyennes selon le sexe
Sexe N Moyenne Écart- type t dl Seuil observé
E.phonét garçon 384 3.3099 3.57030 fille 399 2.7744 3.19300 2.209 764 .027*
E.phonogr garçon 384 12.0234 7.30478 fille 399 11.3459 6.48583 1.371 762 .171
E.morphogr garçon 384 13.1120 8.36663 fille 399 11.9774 7.70610 1.975 781 .049*
Morpho.gram garçon 383 10.6005 7.12195 fille 399 9.3784 6.51320 2.501 767 .013*
Morpho.lexical garçon 384 2.5339 2.01402 fille 399 2.5739 1.90975 -.286 781 .775
E.logogram garçon 384 2.8620 2.28269 fille , 399 2.5890 2.13877 1.728 781 .084
E.idéogram garçon 384 1.0625 1.20324 fille 399 1.1554 1.28028 -1.045 781 .296
E.non.fonct garçon 384 .2995 .58386 fille 399 .4160 2.89469 -.774 781 .439
TotaLerreurs garçon 384 32.6380 19.42628 fille 399 30.0752 17.51595 1.936 765 .053
* I I L'astérisque indique une différence significative.
Ce tableau compare les erreurs selon le sexe, c'est-à-dire entre les filles et les garçons. Il
ressort que les filles, de manière générale, commettent moins d'erreurs que les garçons en
dictée.
Le test statistique, dont le seuil critique est fixé à (p< 0,05), montre des écarts significatifs
pour les erreurs de types phonétique et morphogrammatical.
Ce résultat rejoint celui de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler (1991) selon laquelle
les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons pour l'ensemble des catégories
en orthographe, la différence étant statistiquement significative (t =-5,72 p<0,01).
112
C'est également le cas de l'étude comparative menée par Chervel et Manesse (1989).
Cette recherche sur la compétence en orthographe des jeunes Français du XIXe et du XXe
siècle révèle entre autres que les filles des années 1873 et 1987 se montrent plus
performantes en orthographe que les garçons. Cette étude compare les filles et les garçons
de différents établissements, de différents niveaux (CM2, 6e, 5e, 4e, et 3e) et de différents
âges (de 9 à 17 ans). Il ressort, selon ces auteurs, que :
La supériorité des filles est en moyenne de trois points et demi. Leur taux de supériorité s'élève à 1,25. Cette supériorité est attestée dans toutes les classes, mais elle s'affirme particulièrement en 6e et 5e, où l'écart entre les deux sexes est de cinq points. Elle est au contraire minime en CM2 (un peu plus d'une demi-faute). L'atténuation de cet écart en 4e est due essentiellement à l'orientation en fin de 5e, qui frappe surtout les garçons, (p. 96).
Au Québec, Franchie Olivier (1989) montre aussi dans son étude sur Le scripteur de
sixième année et ses stratégies en orthographe lexicale que les performances sont
supérieures chez les filles, cette fois-ci en orthographe lexicale. Les filles font en
moyenne 2,51 erreurs d'ordre lexical pour les dix-sept mots de la dictée, alors que les
garçons font en moyenne 3,29 erreurs. La différence n'a cependant pas fait l'objet d'un
test de signification.
Le chercheur Bureau (1985), dans son étude sur des élèves québécois du secondaire, fait
la même constatation. Il affirme en citant d'autres études québécoises portant sur le cégep
et l'université :
On doit conclure que le paramètre sexe a une influence sur la qualité de la grammaire écrite et de l'orthographe au deuxième cycle du secondaire. Fait intéressant, on a observé des différences significatives analogues en faveur des personnes du sexe féminin et pour les mêmes catégories dans deux autres enquêtes : EFEC au niveau collégial et EFEL au niveau universitaire, (p.68)
Après cette comparaison entre la moyenne des filles et celle des garçons en orthographe,
113
nous allons maintenant voir ce qui en est entre les niveaux 6e et 3e
Tableau 21 Comparaison des moyennes selon les niveaux d'enseignement
Classe N Moyenne Écart -type
T dl Seuil observé
E.phonét classe de 6e 432 4.2824 3.76932 . classe de 3 e 351 1.5043 1.98404 13.229 678 .000*
E.phonogr classe de 6e 432 15.3356 6.40192 classe de 3 e 351 7.1766 4.37951 21.101 760 .000*
E.morphogr classe de 6e 432 16.9282 7.39423 classe de 3 e 351 7.1254 4.93457 22.146 754 .000*
Morpho.gram classe de 6e 432 13.5856 6.44895 classe de 3 e 351 5.5229 4.16608 21.111 745 .000*
Morpho.lexical classe de 6e 432 3.3032 2.00884 classe de 3 e 351 1.6325 1.43983 13.530 770 .000*
E.logogram classe de 6e 432 3.6898 2.23058 classe de 3 e 351 1.5328 1.49797 16.118 756 .000*
E.idéogram classe de 6e 432 1.5255 1.37066 classe de 3 e 351 .5983 .81479 11.737 720 .000*
E.non.fonct classe de 6e .432 .4375 2.51137 classe de 3 e 351 .2621 1.45787 1.159 781 .247
TotaLerreurs classe de 6e 432 42.0278 16.56427 classe de 3 e 351 18.1681 10.61415 24.401 743 .000*
*L'astérisque indique une différence significative.
À la lecture de ce tableau, on constate que la moyenne générale des erreurs en classe de 6e est nettement plus élevée que celle de la classe de 3e. Les élèves de 6e commettent beaucoup plus d'erreurs d'orthographe que leurs aînés de 3e. Les moyennes des deux groupes (6e et 3e) sont significativement différentes pour toutes les catégories, sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas de différence significative (.247 en 6e et .223 en 3e). On peut donc dire que la scolarité a un effet bénéfique sur le rendement orthographique des élèves.
Nos résultats rejoignent ceux de l'étude suisse de Bétrix Koehler (1991). Il ressort en effet de cette étude que les élèves de 6e année primaire réalisent de meilleures performances en orthographe que les élèves de 5e année primaire :
114
Nous voyons donc que les élèves de 5e font en moyenne 23 erreurs, alors que ceux de 6e n'en font « plus que » 15. On peut donc parler d'une amélioration sensible des résultats moyens des élèves de 6e. En d'autres termes, les élèves de 6e font un tiers d'erreurs en moins que les 5e. (p.10)
3. Corrélations entre les différents types d'erreurs
Enfin, nous bouclons cette partie en présentant, à l'aide du tableau 22, les corrélations
entre les différents types d'erreurs examinés dans cette étude, ainsi que le seuil observé
pour indiquer si elles sont significativement différentes de zéro.
Comme le montre le tableau 22, les corrélations entre les différentes variables sont assez
élevées, variant en effet de .40 à .97. Seule la catégorie des erreurs non fonctionnelles ne
semble pas être en lien avec les autres catégories.
Les plus fortes corrélations sont notamment observées entre les erreurs
phonogrammiques et les erreurs morphogrammiques (.738) et morphogrammiques
grammaticales (.729), autant de secteurs fondamentaux de l'orthographe, et entre les
erreurs morphogrammiques grammaticales et les erreurs logogrammiques (.612), sans
doute à cause du nombre assez élevé de cas d'homonomie grammaticale en général et
dans la dictée en particulier (une dizaine environ). Les corrélations sont cependant moins
fortes entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs morphogrammiques lexicales
(.474), ce qui peut s'expliquer du fait que les phonogrammes sont liés à la transcription
des sons alors que les morphogrammes lexicaux sont en général muets. La corrélation est
également modérée entre les erreurs logogrammiques et les erreurs morphogrammiques
115
lexicales (.410). Dans la dictée, il n'y avait que deux cas d'homonomie lexicale ; dans le
système orthographique, il existe par contre un nombre assez important de cas
d'homonymie lexicale, dont la distinction ne repose pas cependant systématiquement sur
des éléments de morphologie lexicale.
116
Tableau 22
Corrélations entre les différents types d'erreurs
E.non E. phonét. E.phono. E.morpho Morpho.gr Morpholex E.logog E.idéog fonct. Total des e
E.phonét Correlation Pearson 1 .463.**) .604.**) .573.**) .510(**) .354.**) .311.**) .010 .684.**)
Sig. .000 .000 .000 .000 .000 .000 .785 .000 N 783 783 783 783 782 783 783 783 783
E.phono Correlation Pearson .463(**) 1 .738.**) .729.**) .474.**) .614.**) .449(**) .121.**) *) Sig. .000 .000 .000 .000 .000 .000 .001 .000 N 783 783 783 783 782 783 783 783 783
E.morpho Correlation Pearson .604.**) .738.**) 1 .970.**) .691.**) .621.**) .472.**) .094(*
*) *) Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .008 .000
N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 Morpho.gr Correlation
Pearson .573.**) .729.**) .970.**) 1 .532.**) .612.**) .466{**) .025 .911(**)
Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .487 .000
N 782 783 783 783 782 783 783 783 783 Morpholex Correlation
Pearson .510.**) .474.**) .691.**) .532.**) 1 .410(**) .271.**) .074.*) .646.**)
Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .039 .000
N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 E.logog Correlation
Pearson .354.**) .614(**) .621.**) .612.**) .410.**) 1 .392.**) .059 .714(**)
Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .101 .000
N 783 783 783 782 782 783 783 783 783 E.idéog Correlation
Pearson .311.**) .449.**) .472.**) .466.**) .271.**) .392.**) 1 .080.*) .549.**)
Sig. (2-tailed) .000 .000 .000 .000 .000 .000 .026 .000
N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 E.non.fonc t
Correlation Pearson .010 .121.**) .094.**) .025 .074.*) .059 .080.*) 1 .119.**)
Sig. (2-tailed) .785 .001 .008 .487 .039 .101 .026 .001
N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 Total.des erreurs.
Correlation Pearson .684.**) .891.**) .934.**) .911(**) .646(**) .714.**) .549.**) .119.**) 1
Sig. (2-tailed)
.000 .000 .000 .000 .000 .000 .000 .001
N 783 783 783 783 782 783 783 783 783 ** La corrélation est significative au niveau 0.01. * La corrélation est significative au niveau 0.05.
117
.-
Conclusion
Au terme de cette analyse des résultats du troisième chapitre, issus des données
quantitatives, nous rappelons que ces résultats relèvent de l'échantillon général, et que
nous ne revenons que sur des aspects qui nous permettent d'avoir une vision globale de
ces derniers.
D'abord, les statistiques globales des erreurs d'orthographe examinées dans cette étude
montrent que l'intervalle regroupant le plus grand nombre d'élèves, soit 23 %, se situe
entre 11 et 20 erreurs. La moyenne des erreurs est de 31,33 pour un texte de 126 mots.
Ensuite, en présentant la moyenne des erreurs par catégorie, il apparait, comme l'avaient
déjà montré nombre d'études, que la moyenne des erreurs morphogrammiques
(grammaticale et lexicale) est la plus élevée, soit 12,53. Elle est suivie de la moyenne des
erreurs phonogrammiques avec 11,68. La moyenne des erreurs non fonctionnelles est la
plus faible avec 0,35.
Les graphiques de ces différentes variables montrent de façon générale qu'une grande
concentration de sujets se situe autour de la moyenne, la montée de la courbe se fait de
manière abrupte, alors que sa descente est plus progressive, ce qui révèle qu'il y a peu
d'élèves ayant commis un nombre réduit d'erreurs, les sujets assez rapidement se
regroupant autour de la moyenne puis s'en éloignant progressivement.
En comparant les moyennes des variables sexe, il apparait que les filles commettent
moins d'erreurs d'orthographe que les garçons en dictée. Le test statistique dont le seuil
118
est fixé à 0,05 montre des écarts significatifs pour les erreurs de types phonétique et
morphogrammique.
Nous avons également comparé les moyennes selon les niveaux d'enseignement des
sujets. Il ressort que les élèves de 3e s'en sortent mieux en orthographe que leurs cadets
de 6e. Les moyennes des deux groupes sont significativement différentes pour toutes les
catégories, sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas
de différence significative (0,240 en 6e et 0,223 en 3e).
Enfin, nous avons présenté les corrélations observées entre les différentes variables. Il
apparait que celles-ci sont assez élevées variant de 0,40 à 0,97, sauf la catégorie des
erreurs non fonctionnelles qui ne semble pas être en lien avec les autres catégories.
Nous présentons, dans le chapitre subséquent, le deuxième volet des résultats de notre
étude.
119
CHAPITRE IV
ANALYSE DES DONNEES QUALITATIVES ISSUES DE L'ENTRETIEN MÉTACOGNITIF
Dans ce chapitre, nous procédons à l'analyse des données qualitatives issues de
l'entretien métacognitif au cours duquel les élèves ont pu expliquer leurs choix
graphiques après la dictée. Rappelons que notre échantillon est de 59 élèves de 6e et de 3e
de lycées et collèges du Gabon.
Après avoir précisé de nouveau certains aspects méthodologiques, nous examinons
d'abord les perceptions des élèves, ensuite celles des enseignants sur les habiletés
orthographiques de leurs élèves, et enfin, l'opinion des élèves quant à la difficulté de
l'orthographe française. Nous présentons par la suite les stratégies d'ordre général qu'ils
mettent en place en situation d'écriture, d'une part, et celles qui sont en relation avec les
sous-systèmes de l'orthographe, d'autre part. La comparaison des moyennes des élèves
forts et des élèves faibles, et celle des stratégies déclarées par ces mêmes élèves (forts et
faibles) bouclent ce chapitre.
1.' Rappel des buts de l'entretien
Comme le dit Jaffié (1999), l'objectif général de l'entretien métagraphique est de donner
à l'élève l'opportunité d'expliquer ses choix graphiques. C'est dans cette perspective que
nous avons organisé des entretiens métacognitifs auprès d'un petit nombre d'élèves
choisis parmi tous ceux qui ont participé à notre étude.
120
De manière plus spécifique, nous voulions, au cours de ces entretiens, cerner les
perceptions des élèves à l'égard de leur compétence orthographique; recueillir leur
opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe; faire l'inventaire des stratégies
générales auxquelles ils recourent en situation d'écriture (rédaction ou dictée); et enfin,
faire l'inventaire des stratégies spécifiques qu'ils emploient en lien avec les différents
sous-systèmes de l'orthographe, soit les phonogrammes, les morphogrammes
(grammaticaux et lexicaux), les idéogrammes et les logogrammes. Mais comment se sont
déroulés ces entretiens métagraphiques?
1.1. Rappel des modalités méthodologiques et du protocole d'entretien
L'entretien comportait deux étapes.
La première consistait à poser aux élèves six questions réparties en trois blocs. Le
premier bloc comprend deux questions (1 et 2) d'ordre général portant sur les perceptions
des élèves quant au niveau de difficulté de l'orthographe française et leur propre maitrise
de cette orthographe. Ces questions avaient pour but de mettre l'élève à l'aise et de mieux
connaître sa relation avec l'orthographe française.
Le deuxième bloc comprend également deux questions (3 et 4) qui portent sur les
stratégies générales qui pourraient être mobilisées en situation d'écriture.
Le troisième bloc enfin, comprenant lui aussi deux questions (5 et 6), se focalise sur
l'identification des rubriques que les élèves trouvent plus difficiles en orthographe
(conjugaison, accord du sujet, accord du verbe, accord du participe passé, etc.).
121
La deuxième étape de l'entretien porte spécifiquement sur des mots de la dictée et amène
les élèves à verbaliser sur leur manière d'orthographier. Le questionnaire utilisé est centré
sur les problèmes liés aux sous-systèmes de l'orthographe. Dix questions ont été posées
aux élèves pour examiner ces problèmes répartis en quatre groupes :
A. Les phonogrammes (2 questions)
B. Les morphogrammes grammaticaux (4 questions)
C. Les morphogrammes lexicaux (2 questions)
D. Les logogrammes (2 questions)
Pour plus de détail sur cette étape de l'entretien, le lecteur voudra bien se référer au
chapitre II sur la méthodologie.
Nous mettons en annexe quelques extraits de l'entretien métagraphique et présentons,
dans la section ci-dessous, les caractéristiques des sujets ayant participé à l'entretien.
2. Rappel des caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint
Afin de bien interpréter les résultats de l'entretien métacognitif mené auprès de notre
échantillon restreint et, surtout, de vérifier s'il est possible de généraliser ces résultats à
notre échantillon complet, nous rappelons les caractéristiques des 59 élèves rencontrés
individuellement, puis les comparons à celles des 724 élèves n'ayant fait que la dictée.
Voici d'abord les caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint.
122
Tableau 23
Caractéristiques des élèves de l'échantillon restreint
Sexe Provenance Niveau scolaire Garçon Fille Libreville Province 6e 3e
Nombre 26 33 29 30 29 30 Pourcentage 44,06 55,93 49,15 50,84 49,15 50,84
On constate que notre échantillon restreint compte plus de filles que de garçons. Par
contre, la provenance et le niveau scolaire ne présentent presque pas de différence : on
note une différence d'un seul sujet de part et d'autre. Qu'en est-il de l'échantillon
complet?
Tableau 24 Caractéristiques des élèves de l'échantillon complet
Sexe Provenance Niveau scolaire Garçon Fille Libreville Province 6e 3e
Nombre 384 399 393 390 432 351 Pourcentage 49,04 50,95 50,19 49,80 55,17 44,82
En ce qui concerne le sexe pour le grand échantillon, les filles sont légèrement plus
nombreuses que les garçons (51 % contre 49 %). Les élèves de Libreville sont légèrement
plus nombreux que ceux de l'intérieur du pays (50,19 % contre 49,80 %). Quant au
niveau scolaire, nous constatons que les élèves de 6e sont plus nombreux que ceux de 3 e
(55,17% contre 44,82%).
Au regard de ce qui précède, nous pouvons dire que notre échantillon restreint ressemble
d'assez près à l'échantillon complet avec quelques différences non marquées. Sur le plan
de la provenance, les chiffres sont à peu près les mêmes. L'échantillon complet présente
un petit écart quant au nombre d'élèves de 6e et ceux de 3e alors que dans l'échantillon
restreint les deux groupes s'équivalent. Sur le plan du sexe, l'échantillon complet
123
présente sensiblement le même pourcentage entre les filles et les garçons, tandis que dans
l'échantillon restreint on compte environ 11 % de filles de plus que de garçons.
Ces constats nous amènent quand même à interpréter les données issues de l'entretien
métagraphique avec prudence quand à leur généralisation possible, étant donné les
quelques écarts entre les deux groupes de sujets.
3. Sélection des élèves pour l'entretien métagraphique
Pour les fins de l'entretien métagraphique, nous avions demandé aux enseignants de
choisir des élèves forts et des élèves faibles dans leur classe. Afin de vérifier si ces élèves
étaient effectivement forts et faibles, nous avons examiné les résultats qu'ils ont obtenus
pour la dictée. Nous constatons qu'ils ont fait en moyenne 22,12 erreurs. Or, les élèves de
notre échantillon complet ont, pour leur part, commis en moyenne 31,33 erreurs. Les
sujets qui ont participé à l'entretien métagraphique seraient donc dans l'ensemble plus
forts peu rapport aux sujets du grand échantillon. Cette différence nous incite encore à la
prudence quant à la généralisation des résultats obtenus à l'entretien métagraphique.
Nous avons répartis les élèves ayant participé à l'entretien métagraphique en cinq
groupes autour de la moyenne des erreurs comme le montre le tableau suivant.
124
Tableau 24 Classement des élèves selon la moyenne du groupe (22,12 erreurs)
Très forts Forts Moyens Faibles Très faibles
Nombre d'erreurs 1-5 6-10 11-25 26-40 41-81 Nombre d'élèves 5 13 23 10 8 Pourcentage d'élèves 8,5 % 2 2 % 39% 17% 13,5 %
Ce classement révèle que cet échantillon restreint a une distribution plutôt normale et
n'est pas divisé en deux groupes contrastés (forts et faibles) comme ce qui avait été
demandé initialement aux enseignants. En effet, la plus grande proportion des élèves
ayant pris part à l'entretien métacognitif, soit 39 %, revient aux élèves se situant autour
de la moyenne générale de l'échantillon restreint. Nous examinerons plus loin la justesse
de l'évaluation des enseignants quant à la compétence de leurs élèves en orthographe.
Même si nous avions demandé aux enseignants de répartir les élèves en deux groupes,
soit les forts et les faibles, conformément aux résultats que nous avons effectivement
obtenus, nous retiendrons désormais trois catégories d'élèves : 1. les très forts et les forts;
2. les moyens; 3. les faibles et les très faibles.
Notons aussi que, en raison des objectifs de notre recherche, nous n'analyserons à
certains moments que les résultats des élèves appartenant aux catégories 1 et 3, soit les
très forts et forts ou encore les faibles et très faibles.
4. Perception de la compétence orthographique des élèves
Voyons maintenant comment les élèves évaluent leur compétence orthographique,
comment les enseignants évaluent la compétence orthographique de leurs élèves et,
125
surtout, comment ces évaluations sont conformes ou non aux résultats obtenus pour la
dictée.
4.1. Perception des élèves à l'égard de leur compétence orthographique
Pendant l'entretien métagraphique, nous avons posé aux élèves la question suivante :
« Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe?». L'objectif poursuivi était de
savoir ce que l'élève pense de lui-même en orthographe, quel rapport il entretient avec
l'orthographe.
Voici les données que nous avons obtenues pour les élèves très forts et forts :
Tableau 26
Perception des élèves très forts et forts à l'égard de leur compétence orthographique
Elève Perception de l'élève
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'élève
31 Fort 3 'Très fort Estimation juste 43 Fort 4 Très fort Estimation juste 46 Fort 1 Très fort Estimation juste 1 Fort 7 Fort Estimation juste 2 Fort 7 Fort Estimation juste 5 Fort . 7 Fort Estimation juste 19 Fort 9 Fort Estimation juste 23 Fort 8 Fort Estimation juste 10 Moyen 3 Très fort Sous-estimation 15 Moyen 4 Très fort Sous-estimation 12 Moyen 10 Fort Sous-estimation 30 Moyen 9 Fort Sous-estimation 39 Moyen 6 Fort Sous-estimation 47 Moyen 6 Fort Sous-estimation 48 Moyen 10 Fort Sous-estimation 50 Moyen 9 Fort Sous-estimation 57 Moyen 6 Fort Sous-estimation 6 Faible 8 Fort Sous-estimation
Nbre Forts = 8 Moyens = 9 Faibles = 1
18 Surestimation = 0 Estimation juste = 8 Sous-estimation = 10
126
Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves sont forts au regard des résultats de la dictée,
alors que seulement 8 se percevaient forts. Ainsi, chez les élèves très forts et forts, nous
constatons que 8 élèves ont une estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe
et 10 d'entre eux se sous-estiment.
Voyons maintenant ce qu'il en est de la perception des élèves moyens quant à leur
compétence orthographique.
Tableau 27
Perception des élèves moyens à l'égard de leur compétence orthographique
Elève Perception de l'élève
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'élève
3 Fort 14 Moyen Surestimation 7 Fort 14 Moyen Surestimation 16 Fort 11 Moyen Surestimation 17 Fort 14 Moyen Surestimation 24 Fort 11 Moyen Surestimation 25 Fort 22 Moyen Surestimation 26 Fort 12 Moyen Surestimation 38 Fort 13 Moyen Surestimation 42 Fort 19 Moyen Surestimation 51 Fort 21 Moyen Surestimation 58 Fort 18 Moyen Surestimation 11 Moyen 12 Moyen Estimation juste 54 Moyen 16 Moyen Estimation juste 4 Faible 23 Moyen Sous-estimation 8 Faible 20 Moyen Sous-estimation 9 Faible 15 Moyen Sous-estimation
20 Faible 12 Moyen Sous-estimation 28 Faible 23 • Moyen Sous-estimation 29 Faible 15 Moyen Sous-estimation 34 Faible 25 Moyen Sous-estimation 35 Faible 19 Moyen Sous-estimation 49 Faible 13 Moyen Sous-estimation 53 Faible 22 Moyen Sous-estimation
Nbre Forts = 11 Moyens = 2 Faibles = 10
23 Surestimation = 11 Estimation juste = 2 Sous-estimation = 10
127
À la lecture de ce tableau, nous constatons que 23 élèves sont moyens. Parmi eux, 11 se
surestiment, 10 se sous-estiment et seulement 2 élèves font une estimation juste de leurs
propres habiletés en orthographe. Enfin, qu'en est-il chez les élèves faibles et très faibles?
Tableau 28
Perception des élèves faibles et très faibles à l'égard de leur compétence orthographique
Elève Perception de l'élève
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'élève
33 Fort 68 Très faible Surestimation 32 Fort 28 Faible Surestimation 52 Moyen 50 Très faible Surestimation 22 Moyen 81 Très faible Surestimation 27 Moyen 27 Faible Surestimation 44 Moyen 26 Faible Surestimation 14 Faible 57 Très faible Estimation juste 18 Faible 47 Très faible Estimation juste 37 Faible 62 Très faible Estimation juste 45 Faible 57 Très faible Estimation juste 56 Faible 59 Très faible Estimation juste 13 Faible 37 Faible Estimation juste 21 Faible 40 Faible Surestimation 36 Faible 29 Faible Estimation juste 40 Faible 33 Faible Estimation juste 41 Faible 34 Faible Estimation juste 55 Faible 36 Faible Estimation juste 59 Faible 33 Faible Estimation juste
Nbre Forts = 2 Moyens = 4 Faibles = 12
18 Surestimation = 7 Estimation juste = 11 Sous-estimation = 0
Il ressort de ce tableau que 18 élèves sont faibles ou très faibles. Parmi eux, 11 ont une
estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe et 7 se surestiment.
Nous allons par la suite comparer les perceptions des élèves et leur compétence réelle en
orthographe.
128
Tableau 29 Perception des élèves et compétence réelle en orthographe
Perception de l'élève Justesse de la perception de l'élève Résul
tats pour la dictée
Fort Moyen Faible Surestimation Estimation juste
Sous-estimation
Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts
8 44% 9 50% 1 6% 0 0% 8 44% 10 56%
Elèves moyens
11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 % 11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 %
Elèves faibles ou très faibles
2 11% 4 22% 12 67% 7 39% 11 6 1 % 0 0 %
Tous les élèves
21 36% 15 2 5 % 23 39% 18 30% 21 36% 20 99%
L'examen du tableau synthèse ci-dessus nous amène à constater que les élèves très forts
ou forts ont tendance à se sous-estimer, et cela, dans une proportion assez importante (56
%). Cependant, 44 % ont une perception juste de leurs habiletés en orthographe.
Pour ce qui est des élèves moyens, la tendance est à la surestimation ou à la sous-
estimation de leurs propres habiletés en orthographe, soit 48 % et 43 %.
Quant aux élèves faibles ou très faibles, on constate qu'un grand nombre d'entre eux ont
une estimation juste de leurs propres habiletés en orthographe (61 %) et qu'ils ont
également tendance à se surestimer (39 %).
De manière générale, nous constatons donc une variation dans l'auto-évaluation des
élèves en orthographe selon le niveau d'habileté. Les élèves très forts et forts ont souvent
129
De manière générale, nous constatons donc une variation dans l'auto-évaluation des
élèves en orthographe selon le niveau d'habileté. Les élèves très forts et forts ont souvent
tendance à se sous-estimer. On constate que les élèves moyens se déclarent eux-mêmes
rarement moyens et qu'ils ont plutôt une forte tendance à la surestimation ou à la sous-
estimation. Par contre, les élèves faibles et très faibles ont une perception relativement
bonne d'eux-mêmes en orthographe, même si plusieurs se surestiment également. Si on
ne retient que les deux extrêmes, on peut dire que les élèves faibles se reconnaissent
généralement comme faibles alors que les forts sont plus ambivalents, s'auto-évaluant
moins souvent justement et ayant plus souvent tendance à la sous-estimation.
4.2. Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique de
leurs élèves
Pour choisir les élèves de l'échantillon restreint, nous avions demandé aux enseignants
d'identifier les élèves forts et les élèves faibles. Qu'en est-il de la perception des
enseignants à l'égard de la compétence orthographique de leurs élèves?
130
Tableau 30 Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves
très forts et forts
Elève Perception de
l'enseignant
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'enseignant
46 Fort 1 Très fort Estimation juste 31 Fort 3 Très fort Estimation juste 10 Fort 3 Très fort Estimation juste 43 Fort 4 Très fort Estimation juste 15 Fort 4 Très fort Estimation juste 47 Fort 6 Fort Estimation juste 39 Fort 6 Fort Estimation juste 57 Fort 6 Fort Estimation juste 1 Fort 7 Fort Estimation juste 2 Fort 7 Fort Estimation juste 5 Fort 7 Fort Estimation juste 6 Fort 8 Fort Estimation juste 23 Fort 8 Fort Estimation juste 30 Fort 9 Fort Estimation juste 50 Fort 9 Fort Estimation juste 12 Fort 10 Fort Estimation juste 19 Faible 9 Fort Sous-estimation 48 Faible 10 Fort Sous-estimation
Forts = 16 Faibles = 2
18
Surestimation = 0 Estimation juste = 16 Sous-estimation = 2
Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves ont un statut très fort ou fort d'après leurs
résultats à la dictée. Leurs enseignants font 16 fois sur 18 une estimation juste des
habiletés de ces élèves en orthographe et seulement 2 d'entre eux sous-estiment leurs
élèves. Que disent-ils des élèves moyens?
131
Tableau 31
Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves
moyens
Elève Perception de l'enseignant
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'enseignant
16 Fort 11 Moyen Surestimation 24 Fort 11 Moyen Surestimation 20 Fort 12 Moyen Surestimation 26 Fort 12 Moyen Surestimation 11 Fort 12 Moyen Surestimation 38 Fort 13 Moyen Surestimation 3 Fort 14 Moyen Surestimation 7 Fort 14 Moyen Surestimation 17 Fort 14 Moyen Surestimation 9 Fort 15 Moyen Surestimation 54 Fort 16 Moyen Surestimation 58 Fort 18 Moyen Surestimation 42 Fort 19 Moyen Surestimation 8 Fort 20 Moyen Surestimation
51 Fort 21 Moyen Surestimation 53 Fort 22 Moyen Surestimation 25 Fort 22 Moyen Surestimation 4 Fort 23 Moyen Surestimation 34 Fort 25 Moyen Surestimation 49 Faible 13 Moyen Sous-estimation 29 Faible 15 Moyen Sous-estimation 35 Faible 19 Moyen Sous-estimation 28 Faible 23 Moyen Sous-estimation
Forts = 19 Faibles = 4 23
Surestimation = 19 Estimation juste = 0 Sous-estimation = 4
Nous constatons à la lecture de ce tableau que 23 élèves ont un statut moyen d'après leurs
résultats de la dictée. Les enseignants font 19 fois sur 23 une surestimation des habiletés
de ces élèves en orthographe et 4 d'entre eux les sous-estiment. Qu'en est-il des élèves
faibles?
132
Tableau 32 Perception des enseignants à l'égard de la compétence orthographique des élèves
faibles et très faibles
Elève Perception de
l'enseignant
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Justesse de la perception de l'enseignant
32 Fort 28 Faible Surestimation 59 Fort 33 Faible Surestimation 55 Fort 36 Faible Surestimation 18 Fort 47 Très faible Surestimation 56 Fort 59 Très faible Surestimation
'33 Fort 68 Très faible Surestimation 44 Faible 26 Faible Estimation juste 27 Faible 27 Faible Estimation juste 36 Faible 29 Faible Estimation juste 40 Faible 33 Faible Estimation juste 41 Faible 34 Faible Estimation juste 13 Faible 37 Faible Estimation juste 21 Faible 40 Faible Estimation juste 52 Faible 50 Très faible Estimation juste 14 Faible 57 Très faible Estimation juste 45 Faible 57 Très faible Estimation juste 37 Faible 62 Très faible Estimation juste 22 Faible 81 Très faible Estimation juste
Forts = 6 Faibles = 12 18
Surestimation = 6 Estimation juste = 12 Sous-estimation = 0
Le tableau ci-dessus montre que 18 élèves ont un statut très faible ou faible d'après leurs
résultats de la dictée. Leurs enseignants font 12 fois sur 18 une estimation juste des
habiletés de ces élèves en orthographe et seulement 6 d'entre eux les surestiment.
Le tableau suivant résume les données relatives à la perception des enseignants quant à la
compétence orthographique de leurs élèves.
133
Tableau 33 Perception des enseignants à l'égard de la compétence réelle des élèves en
orthographe
Perception de l'enseignant Justesse de la perception de l'enseignant Résultats pour la dictée
Fort Moyen Faible Surestimation
Estimation juste
Sous-estimation
Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts
16 89 % 0 0 % 2 1 1 % 0 0% 16 89% 2 1 1 %
Elèves moyens
19 8 3 % 0 0 % 4 17% 19 8 3 % 0 0% 4 17%
Elèves faibles ou très faibles
6 3 3 % 0 0 % 12 6% 6 3 3 % 12 67% 0 0 %
Tous les élèves
41 69% 0 0 % 18 30% 25 4 2 % 28 47% 6 10%
Nous constatons à la lecture du tableau ci-dessus que les enseignants ont une perception
relativement bonne de leurs élèves forts et très forts en orthographe. Sur 18 élèves forts et
très forts, les enseignants font 16 estimations justes des habiletés de leurs élèves (soit
88,88 %), seulement 2 sous-estimations et aucune surestimation.
De même, dans le cas des élèves faibles et très faibles, les enseignants font 12 estimations
justes de leurs habiletés en orthographe sur 18 (soit, 66,66 %), 6 surestimations et aucune
sous-estimation.
Par contre, chez les élèves moyens, les perceptions des enseignants sont erronées dans
une proportion importante (19 surestimations sur 23, soit 82,60 %).
134
Par contre, chez les élèves moyens, les perceptions des enseignants sont erronées dans
une proportion importante (19 surestimations sur 23, soit 82,60 %).
Les enseignants semblent donc avoir plus de facilité à bien évaluer les élèves qui ont un
rendement contrasté, puisqu'ils arrivent plus souvent à distinguer les forts et les faibles,
groupes d'élèves qui se démarquent naturellement en classe.
Leur difficulté à reconnaître les moyens tient sans doute, en partie tout au moins, à la
consigne qui leur a été donnée de choisir seulement des forts et des faibles. Certains
enseignants ont même affirmé, lors de la sélection des sujets de l'entretien, ne pas avoir
de véritables forts en orthographe, ce qui laisse supposer qu'ils ont dû choisir parmi le
bassin des moyens. En tout état de cause, en dépit du la consigne donnée, on peut dire
que les enseignants ont de la peine à évaluer justement le rendement des élèves moyens.
5. Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe
Dans le souci d'avoir une idée plus précise sur le rapport de l'élève à l'orthographe, nous
avions posé, lors de notre entretien, une question (Q.3) liée au degré de difficulté de
l'orthographe. Cette question sur l'opinion de l'élève en orthographe est formulée de la
manière suivante : « Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? ».
Certains pensent que l'orthographe est facile (1), moyennement facile (2) et d'autres la
trouvent difficile (3). Le tableau ci-après donne les proportions de leurs déclarations.
135
Tableau 34 Opinion des élèves sur le degré de difficulté de l'orthographe
en fonction de leur niveau d'habileté
Opinion des élèves Résultats
pour la dictée Facile Moyennement
facile Difficile
Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts
12 6 7 % 2 1 1 % 4 22%
Elèves moyens 13 56,52 % 1 4,5 % 9 39% Elèves faibles ou très faibles
7 39% 2 1 1 % 9 50%
Tous les élèves 32 54 % 5 8% 22 37%
Il ressort de ce tableau que, dans l'ensemble, plus de la moitié des élèves interrogés, soit
54 %, trouvent l'orthographe facile, en dépit des résultats plutôt faibles relevés dans
l'échantillon. Nous pensons que, par sentiment de désirabilité sociale, ils voulaient
projeter une image positive d'eux-mêmes auprès du chercheur. Il estpossible aussi que
les sujets croient vraiment que l'orthographe française est plutôt facile, auquel cas ils
n'auraient pas une perception juste de cet objet d'apprentissage surtout quand on
considère leur rendement plutôt faible.
Pour mieux apprécier leurs points de vue sur le degré de difficulté de l'orthographe, nous
avons comparé les élèves en fonction de leur niveau d'habileté (forts, faibles et moyens).
Les élèves forts ont un point de vue relativement cohérent avec leur bon rendement. Sur
18 élèves, 12 pensent que l'orthographe française est facile, soit 67 %; 2 élèves pensent
qu'elle est moyennement difficile et 4 estiment qu'elle est difficile, soit 22 %. Qu'en est-
il des élèves faibles?
Chez les élèves faibles, les points de vue sont plus dispersés. Sur 18 élèves, 7 pensent que
l'orthographe française est facile, soit 39 %; 9 élèves la trouvent difficile, soit 50 %, alors
que seulement 2 élèves pensent qu'elle est moyennement difficile, soit 11 %. Nous
constatons qu'une moitié des élèves faibles reconnaît que l'orthographe est difficile, ce
136
qui est conforme à leur rendement. Mais l'autre moitié présente un avis qui n'est pas
véritablement en relation avec leur rendement en orthographe.
Pour ce qui est des élèves moyens, leur position face au degré de difficulté de
l'orthographe est plus tranchée. Sur 23 élèves, 13 pensent que l'orthographe française est
facile, soit 56 %, 9 estiment qu'elle est difficile, soit 39 %, alors qu'un seul élève pense
qu'elle est moyennement facile, soit 4,5 %. L'ambivalence de leur opinion tient peut-être
à leur rendement mitigé, ni fort ni faible. On aurait pu aussi s'attendre à plus d'avis
favorables étant donné que les élèves moyens arrivent quand même à s'en sortir avec
l'orthographe.
En définitive, de manière générale, les perceptions des élèves sur le degré de difficulté en
orthographe ne sont pas justes. Plus de la moitié estiment que l'orthographe française est
facile (55,17 %), alors que leurs résultats à la dictée sont plutôt faibles.
Contrairement à nos sujets qui considèrent majoritairement l'orthographe française facile,
des spécialistes comme Catach (1980) et Goosse (1995) affirment pourtant que
l'orthographe française est compliquée et difficile à maitriser.
De même au Québec, dans une enquête menée par Simard (1994) sur la réforme de
l'orthographe, bon nombre d'enseignants de français considèrent que :
L'orthographe française est difficile, tant sur le plan lexical que sur le plan grammatical. Fortement corrélées (r = 0,60, p = 0,0001), les deux dimensions de l'orthographe sont évaluées à peu près de la même façon, sauf qu'on peut noter que l'orthographe grammaticale suscite un plus haut taux de réponses « très difficile» (16,1 % comparativement à 7,7 pour l'orthographe lexicale), (p. 299).
En France, un sondage publié dans la revue Lire, cité par Simard (1994), a, elle aussi
révélé que la population française en général juge difficiles l'orthographe française et la
grammaire du français, et ce, dans une proportion plus forte que pour le groupe
d'enseignants québécois (environ 70 %).
137
Il conviendrait que les élèves gabonais aient une perception plus juste de l'orthographe
française à travers l'enseignement qu'ils reçoivent, ce qui probablement les amènerait à
s'investir davantage dans l'apprentissage de cet objet complexe.
6. Relation entre la perception des élèves de leur compétence orthographique, leur opinion face à la difficulté de l'orthographe et leurs résultats à la dictée
Le tableau suivant compare, pour tous les élèves ayant participé à l'entretien, leur propre
évaluation de leur rendement orthographique avec leur opinion sur le niveau de difficulté
de l'orthographe en tenant compte de leurs résultats à la dictée.
Tableau 35
Compétence des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe (liste de tous les élèves)
Elève Perception de l'élève
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Opinion de l'élève sur l'orthographe
1 Fort 7 Fort Facile 2 Fort 7 Fort Facile 3 Fort 14 Moyen Facile 4 Faible 23 Moyen Difficile 5 Fort 7 Fort Facile 6 Faible 8 Fort Difficile 7 Fort 14 Moyen Difficile 8 Faible 20 Moyen Difficile 9 Faible 15 Moyen Facile 10 Moyen 3 Très fort Facile 11 Moyen 12 Moyen Difficile 12 Moyen 10 Fort Facile 13 Faible 37 Faible Difficile 14 Faible 57 Très faible Difficile 15 Moyen 4 Très fort Facile 16 Fort 11 Moyen Facile 17 Fort 14 Moyen Difficile 18 Faible 47 Très faible Difficile 19 Fort 9 Fort Facile 20 Faible 12 Moyen Facile 21 Faible 40 Faible Difficile
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Elève Perception de l'élève
Nombre d'erreurs
Résultat pour la dictée
Opinion de l'élève sur l'orthographe
22 Moyen 81 Très faible Facile 23 Fort 8 Fort Facile 24 Fort 11 Moyen Moyennement 25 Fort 22 Moyen Facile 26 Fort 12 Moyen Facile 27 Moyen 27 Faible Difficile 28 Faible 23 Moyen Facile 29 Faible 15 Moyen Difficile 30 Moyen 9 Fort Difficile 31 Fort 3 Très fort Facile 32 Fort 28 Faible Moyennement 33 Fort 68 Très faible Facile 34 Faible 25 Moyen Difficile 35 Faible 19 Moyen Difficile 36 Faible 29 Faible Facile 37 Faible 62 Très faible Moyennement 38 Fort 13 Moyen Facile 39 Moyen 6 Fort Facile 40 Faible 33 Faible Difficile 41 Faible 34 Faible Facile 42 Fort 19 Moyen Facile 43 Fort 4 Très fort Moyennement 44 Moyen 26 Faible Difficile 45 Faible 57 Très faible Difficile 46 Fort 1 Très fort Difficile 47 Moyen 6 Fort Facile 48 Moyen 10 Fort Moyennement 49 Faible 13 Moyen Difficile 50 Moyen 9 Fort Facile 51 Fort 21 Moyen Facile 52 Moyen 50 Très faible Facile 53 Faible 22 Moyen Facile 54 Moyen 16 Moyen Facile 55 Faible 36 Faible Facile 56 Faible .59 Très faible Facile 57 Moyen 6 Fort Difficile 58 Fort 18 Moyen Facile 59 Faible 33 Faible Difficile
Les données du tableau ci-dessus se retrouvent synthétisées dans le tableau suivant, qui
regroupe les élèves forts, moyens et faibles.
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Tableau 36
Rendement des élèves, perception de leur compétence orthographique et opinion sur le degré de difficulté de l'orthographe
Perception de l'élève à l'égard de sa compétence orthographique
Opinion de l'élève sur le degré de difficulté de l'orthographe
Résultats pour la dictée
Fort Moyen Faible Facile Moyennement facile
Difficile
Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Nbre % Elèves très forts ou forts
8. 44% 9 50% 1 6 % 12 67% 2 1 1 % 4 22%
Elèves moyens 11 4 8 % 2 9 % 10 4 3 % 13 57 % 1 4 % 9 39% Elèves faibles ou très faibles
2 1 1 % 4 22% 12 67% 7 39% 2 1 1 % 9 50%
Tous les élèves 21 36% 15 2 5 % 23 39% 32 54% 5 8% 22 37%
Ce tableau nous montre que les perceptions des élèves quant à leur compétence
orthographique ne cadrent pas totalement avec leurs compétences réelles ni avec leurs
opinions sur le degré de difficulté de l'orthographe.
Sur 18 élèves forts en orthographe, 8 seulement estiment l'être, soit 44 %. Par contre, leur
jugement quant au degré de difficulté de l'orthographe est plus conforme à leurs résultats,
67 % la voyant facile.
Les élèves moyens ont des perceptions très peu justes de leur rendement orthographique,
soit 9 % de bonne estimation, et un jugement sur le degré de difficulté de l'orthographe
plutôt mitigé, 39 % la trouvant difficile et 57 % facile.
140
Par contre, les élèves faibles ont une bonne perception à l'égard de leur compétence en
orthographe, soit 67 %; ce qui n'est pas le cas de leur jugement quant au degré de
difficulté de cette même orthographe puisqu'ils la jugent facile dans une proportion de 39
% malgré leurs faiblesses.
7. Les stratégies déclarées
Dans cette section, nous examinons la nature et la fréquence des différentes stratégies que
les élèves déclarent utiliser dans des situations orthographiques. Cette analyse nous
permettra de compléter les données quantitatives relevées dans le chapitre III
relativement à l'ensemble de l'échantillon, et de mieux comprendre le comportement
orthographique de nos sujets.
En lisant le verbatim des entretiens et en nous référant à des auteurs qui se sont intéressés
aux stratégies orthographiques (Olivier, 1989; Brissaud et Bessonnat, 2001; Brissaud,
2002; Fayol et Jaffré, 2008), nous avons pu relever une trentaine de stratégies chez nos
sujets. Nous avons ainsi travaillé à partir d'une grille de codage mixte, c'est-à-dire
composée en fonction des écrits scientifiques et des thèmes émergeant des déclarations
d'élèves.
Nous avons deux grandes catégories de stratégies : les stratégies d'ordre général, c'est-à-
dire celles qui ne portent pas sur des composantes précises de l'orthographe et que les
élèves disent employer au cours d'une dictée ou d'une rédaction, et les stratégies
spécifiques, celles qui sont directement liées aux sous-systèmes de l'orthographe sur
lesquels les sujets ont été précisément interrogés lors de l'entretien sur la dictée (les
phonogrammes, les morphogrammes, les logogrammes et les idéogrammes). Nous
donnons dans les pages suivantes la liste des stratégies et leurs codes.
141
7.1. Liste des stratégies et grille de codage
Ainsi que nous l'avons signalé ci-dessus, notre grille comporte deux sections, la première
concerne les stratégies d'ordre général, la seconde, les stratégies spécifiques en lien avec
des sous-systèmes orthographiques.
7.1.1. Liste de stratégies d'ordre général
Pour les stratégies d'ordre général, nous avons posé deux questions aux élèves. La
première, formulée de la manière suivante : « Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est
écrit le plus correctement possible? », devait amener les élèves à indiquer des stratégies
pour la correction globale d'un texte ou d'une dictée (partie A du tableau 37). La
deuxième question, formulée comme suit : «Que fais-tu si tu as un problème
d'orthographe? », devait amener les élèves à indiquer des stratégies concernant la
correction d'un mot donné faisant problème (partie B du tableau 37).
142
Tableau 37 Stratégies générales (pour la correction de l'ensemble d'un texte ou la résolution
d'un problème relatif à un mot)
Code Stratégie Exemples de verbatim A- Pour la correction globale d'un texte composé ou d'une dictée
1. Vérifie les accords pendant qu'il écrit J'essaie de voir mes accords pendant que j'écris (Sujet 1).
2. Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois)
Je relis mon texte plusieurs fois en cherchant à voir le sens logique du texte. (Sujet 4). Après avoir rédigé, je relis mon texte. (Sujet 47).
3. Ne se relit pas C'est pendant que je rédige, parce que je ne me relis pas. (Sujet 3) Je ne me force pas souvent. Parfois je ne me relis même pas. (Sujet 49)
4. Fait appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et d'orthographe d'usage)
Je fais appel à toutes mes connaissances d'accord et d'orthographe d'usage. (Sujet 32)
5. Vérifie un certain nombre de points particuliers à la suite comme les accords, les verbes, l'accord du participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le genre, le nombre, la formation des mots
Je surveille d'abord les temps de verbes, les accords par rapport au sujet.(Sujet 7) Je regarde les sujets des verbes, la formation des mots, l'accord des participes passés, les lettres qui ne se prononcent pas (Sujet 38).
6. Essaie de tenir compte de la prononciation du professeur (en dictée)
J'écoute bien quand le prof va relire pour avoir la bonne orthographe. (Sujet 47) A ce niveau, il y a toujours des hésitations, mais on essaie d'écrire par rapport à la prononciation du prof. (Sujet 33).
7. Utilise un dictionnaire Je regarde le dictionnaire. (Sujet 20) Je cherche le mot dans un dictionnaire. (Sujet 34).
8. Suit son instinct [Devant un problème d'orthographe] je suis ce que me dit mon instinct. (Sujet 9) C'est venu comme ça. (Sujet 10).
9. N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction
Si c 'est en rédaction, je n 'utilise que les mots dont je suis sûr de l'orthographe. (Sujet 48)
10. N'emploie aucune stratégie particulière
[Pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible] je ne fais rien de spécial. (Sujet 6)
143
B- Devant un mot donné 11. Laisse un vide (passe) puis revient à la
fin Je laisse un espace pour ne pas être en retard Je reviens à la fin de la dictée pendant la relecture pour bien réfléchir. (Sujet 50). Je laisse d'abord un espace pour ne pas perdre le fil de la dictée. Puis, je reviens à la fin de la dictée sur ce mot. (Sujet 43).
12. Écrit le mot puis y revient immédiatement
[Pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible] Je corrige les mots immédiatement. (Sujet 56).
13. Ecrit le mot puis y revient à la fin J'écris d'abord le mot et je reviens sur ça à la fin de la dictée. (Sujet 45).
14. Ecrit le mot de différentes manières et choisit celle qui semble la bonne
Quand j ' a i un problème en orthographe sur un mot, je l'écris de plusieurs manières jusqu'à voir celle qui correspond à la réalité. (Sujet 17) J'écris le mot plusieurs fois et je choisis par la suite la bonne orthographe. (Sujet 44).
15. Écrit le mot comme il l'entend J'écris le mot comme j'entends. (Sujet 14) J'écris comme j'entends, même si je ne connais pas le mot, j 'écris quand même. (Sujet).
16. Ecrit le plus simplement possible le mot sur lequel il hésite
J'écris le plus simplement possible les mots sur lesquels j ' a i des hésitations. (Sujet 41)
17. Réfléchit, se concentre pendant qu'il écrit dans le cas d'un mot difficile
Je réfléchis pendant que j'écris. (Sujet 24) Je réfléchis au même moment que je rédige mon texte, s'il y a un problème je le résous au même moment pour ne pas y revenir plus tard. (Sujet 59)
18. Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du mot, dérivation)
Je réfléchis sur l'origine du mot, sur son radical, etc. (Sujet 28)
19. Demande à un pair Je peux le passer à mon grand frère pour corriger. (Sujet 8) Quand j ' a i un problème d'orthographe, j'essaie de demander à ma camarade. (Sujet 36)
144
7.1.2. Liste de stratégies d'ordre spécifique
Au cours de la seconde étape de l'entretien métagraphique, les élèves ont fait état d'un
certain nombre de stratégies devant des cas plus spécifiques en lien avec les sous-
systèmes de l'orthographe. Afin de distinguer facilement les stratégies qui sont liées aux
sous-systèmes des stratégies de la partie générale de l'entretien, nous avons utilisé des
codes supplémentaires. Les sous-systèmes concernés sont identifiés par des indicatifs
initiaux, soit la valeur 3 qui identifie les phonogrammes, 4 les morphogrammes
grammaticaux, 5 les morphogrammes lexicaux, 6 les idéogrammes et 7 les logogrammes.
Par exemple, la stratégie 320 est la stratégie 20 de la liste des stratégies spécifiques
(« Applique la règle d'usage devant/? et b »), le 3 étant l'indicatif des phonogrammes.
Voici la liste des stratégies déclarées liées aux sous-systèmes orthographiques avec les
codes retenus pour les identifier.
145
Tableau 38
Stratégies spécifiques aux différentes composantes du plurisystème de l'orthographe
Sous-système
Stratégie Exemples de verbatim
320 Applique la règle d'usage devant p et b
[Pour justifier la transcription du son [5] Ben...làj'applique la règle qui dit que n devant p devient m. (Sujet 1) C'est parce que le premier [o] est précédé de p. La règle dit que quand le son [ô] est placé avant les lettres p et b, alors [5] s'écrit om. (Sujet 24)
321 Justifie la graphie -ment par la classe grammaticale du mot (adverbe de manière en -ment) (cas des phonogrammes en [a])
Nerveusement est un adverbe en -ment qui s'écrit généralement m-e-n-t, alors que menaçants est un adjectif qualificatif. (Sujet 12) Nerveusement est un adverbe de manière qui s'écrit toujours en -ment, tandis que menaçants est un adjectif qualificatif, il s'écrit avec - ant parce qu 'il vient du verbe menacer. (Sujet 28)
422 Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur
Nue s'accorde avec la route qui est un nom féminin. C'est pourquoi nue prend e muet à la fin. (Sujet 2) [Pour l'accord de l'adjectif abruptes]. Disons que je l'accorde avec les montées. (Sujet 12)
423 Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet
Mordaient et bordaient, ces deux mots sont des verbes conjugués à l'imparfait de l'indicatif. Leurs sujets sont au pluriel. C'est pour cela que je les ai mis à la 3e personne du pluriel. (Sujet 12) Ah!... alors sur le plan de l'accord, les deux verbes sont à la troisième personne du pluriel, parce que leurs sujets sont au pluriel. Pour mordaient son sujet c 'est les roues de la Toyota,-pour bordaient le sujet c 'est les fonds noirs des précipices. (Sujet 2)
424 Accorde le verbe par la reconnaissance du sujet en posant la question qu 'est-ce qui?
Ici, on dit les roues de la Toyota mordaient ...dépose la question qu 'est-ce qui mordaient? Réponse : les roues. Donc, mordaient s'accorde avec les
146
roues... (Sujet 1) 425 Justifie l'accord du participe passé
avec être par sa mise en relation avec le sujet
Le participe passé employé avec l'auxiliaire être s'accorde en genre et en nombre avec son sujet. Ici, nous avons un sujet pluriel (nous), donc basculés se met au pluriel. (Sujet 3)
426 Justifie l'accord du participe passé avec avoir par sa mise en relation avec le complément d'objet
Cas qui n'apparaît pas dans la dictée.
427 Justifie l'accord par la distinction de la catégorie grammaticale
Nue 5 'accorde avec la route parce que c 'est un adjectif qualificatif. (Sujet 53) C'est parce que le mot basculés est un participe passé employé avec l'auxiliaire être. // s'accorde en genre et en nombre avec son sujet. Ici, son sujet c 'est mes compagnons et moL Donc, le participe passé se met au pluriel. (Sujet 53)
428 Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une préposition) ou la position du mot (après un verbe conjugué, le second verbe est à l'infinitif)
[Pour justifier la terminaison er du verbe réprimer] C 'est parce qu 'il y a la préposition pour placée avant. (Sujet 4) C 'est à cause de la préposition pour. La règle dit que quand une préposition est placée avant un verbe, ce verbe se met à l'infinitif. (Sujet 9)
429 Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la terminaison erlé
Souvent quand j ' a i des difficultés à écrire ce genre de verbes, les verbes du premier groupe, je remplace ce verbe par un verbe du troisième groupe. (Sujet 5) Je l'ai écrit ainsi (à l'infinitif) parce quej 'ai essayé de le remplacer par le verbe faire, et ça a marché. La phrase devenait ...pour faire. Donc, je me suis dit que le verbe était à l'infinitif. (Sujet 17)
530 Recourt à la famille lexicale ou à la formation du mot
Périlleux. Je ne suis pas sûre de son orthographe. Je suis partie de son radical péril. (Sujet 50) Insupportable est formé du préfixe in-, de la racine support et du suffixe -able. (Sujet 7)
631 Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie, logogrammes)
On peut d'abord dire que ces deux mots sont des homonymes. Le premier mot, il s'agit du timbre vocal, il s'écrit v-o-i-x. Le deuxième mot, c 'est la route, lui, il
147
•
s'écrit v-o-i-e. (Sujet 1 ) Je les écris différemment parce que ce sont des homonymes. Le premier mot fia boue) fait allusion à la terre pâteuse, alors que le deuxième mot (à bout) fait allusion au comportement des personnes, la nervosité. Je l'écris avec b-o-u-t (Sujet 2)
732 Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) (cas des idéogrammes)
C'est parce que d'abord, ce mot [toyota écrit avec t minuscule] est un nom commun de voiture. En plus, il est placé au milieu de la phrase... (Sujet 59) J'écris le mot toyota avec t minuscule parce qu 'il est placé au milieu de la phrase. C 'est une marque de voiture...la voiture est une chose. (Sujet 6)
7.2. Analyse des stratégies déclarées
Dans la section qui suit, nous allons présenter, au regard de cette grille, quelles sont les
stratégies déclarées par les' élèves et à quelle fréquence. Nous commençons par les
stratégies d'ordre général.
7.2.1. Analyse des stratégies d'ordre général
En vue de savoir comment pourraient procéder les élèves pour résoudre les problèmes
orthographiques de façon générale, nous leur avons posé deux questions. Ce sont les
réponses à ces questions que nous allons maintenant aborder.
Analyse des stratégies déclarées en lien avec la question « Que fais-tu pour t'assurer
que ton texte est écrit le plus correctement possible? »
En posant cette question très globale, nous voulions voir les différentes stratégies que
pourraient mobiliser les élèves pour orthographier correctement au cours de la production
d'un texte (rédaction, argumentation, etc.) ou au cours d'une dictée.
148
Nous présentons ci-dessous, par ordre de fréquence décroissante, les stratégies que les
sujets ont citées en réponse à cette question.
Tableau 39
Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu pour t'assurer que
ton texte est écrit le plus correctement possible? »
Rang Stratégie
Nbre
d'élèves
% d'élèves
(N= 59)
1 Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) 27 45,76 %
2 Vérifie les accords pendant qu'il écrit 14 23,73 %
3 Essaie de tenir compte de la prononciation du prof (en
dictée) 7 11,86%
4 Fait appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et
d'orthographe d'usage) 6 10,17
5 Utilise un dictionnaire 3 5,08 %
6 Suit son instinct 3 5,08 %
7 Ecrit le mot comme il l'entend 3 5,08 %
8 Vérifie un certain nombre de points particuliers à la
suite comme les accords, les verbes, l'accord du
participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le
genre, le nombre, la formation des mots
2 3,39 %
9 N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction 2 3,39 %
10 Ecrit le mot puis y revient à là fin 2 3,39 %
11. Ne se relit pas. 2 3,39 %
12 Laisse un vide (passe) puis revient à la fin 1 1,69%
13 Ecrit le plus simplement possible le mot sur lequel il
hésite
1 1,69%
14 Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du
mot, dérivation)
1 1,69%
15 Demande à un pair 1 1,69% Note. Le total des pourcentages ne donne pas 100 étant donné qu'un même élève a pu citer plus d'une stratégie et que certains élèves
n'ont cité aucune stratégie.
149
À l'examen de ce tableau, il ressort que quatre stratégies générales ont été principalement
déclarées par les élèves (de 6 à 27 occurrences). Les autres stratégies n'ont été citées que
de une à trois fois, ce qui constitue une. occurrence vraiment trop réduite pour être
significative et faire l'objet d'un commentaire.
Parmi les stratégies les plus citées, la relecture apparait de loin comme la plus fréquente.
Environ la moitié des sujets (45,76 %) disent en effet l'utiliser. Cette stratégie est certes
importante, mais demeure très globale et ne permet pas de résoudre des problèmes
orthographiques précis. On peut en effet relire un texte sans pour autant détecter les
erreurs et les corriger. Nous verrons dans la section sur les stratégies spécifiques si nos
sujets pensent à utiliser des moyens de correction vraiment en lien avec des problèmes
orthographiques particuliers.
La deuxième stratégie la plus déclarée est « Vérifier les accords pendant qu 'il écrit »,
(23,73 %). L'indication de cette stratégie montre l'importance de la grammaire dans les
conduites orthographiques d'un certain nombre de sujets. On sait que les graphies
grammaticales sont responsables de la majorité des erreurs chez toutes les populations
confondues. Cette stratégie reste cependant générale et encore une fois on peut se
demander si elle suffit réellement à résoudre un problème orthographique d'accord en
raison de la variété des règles grammaticales particulières à respecter. Nous verrons dans
la section sur les stratégies spécifiques si les sujets disent employer des stratégies
relatives aux différentes règles d'accord (du verbe, du déterminant, de l'adjectif, du
participe passé).
La stratégie qui arrive en troisième position avec 11,86 % est « Essaie de tenir compte de
la prononciation du prof. ». En raison des écarts importants entre phonie et graphie en
français écrit, cette stratégie ne peut guère être efficace si nous considérons notamment le
cas très fréquent des lettres finales qui ne se prononcent pas sur le plan lexical (instinct)
150
ou grammatical (les désinences verbales : ils parlent). La seule prononciation du
professeur ne peut certes pas venir à bout de ce problème.
La stratégie « Fais appel à toutes ses connaissances (règles d'accord et d'orthographe
d'usage » se trouve en quatrième position avec seulement 6 occurrences (10,17 %). On
peut penser que l'élève, lorsqu'il orthographie, mobilise l'ensemble de ses connaissances
orthographiques, mais pour en être sûr, il faudrait savoir à quelles stratégies précises en
lien avec les différentes composantes de l'orthographe il peut penser. Nous pourrons
mieux répondre à cette question en examinant les résultats de la section sur les stratégies
spécifiques.
En conclusion, on constate d'abord que les stratégies générales les plus importantes que
cette question a suscitées concernent la relecture et la vérification des accords. Cependant
ces stratégies ne sont pas déclarées par une majorité de sujets, peu à peine la moitié pour
la première et par environ le quart pour la seconde. Les autres stratégies, même celles qui
arrivent en 3e et en 4e position que nous venons de commenter, montrent des occurrences
faibles et même très faibles (de 1 à 7 sur un total de 59 sujets). On pourrait affirmer que
les sujets interrogés ont à l'esprit un nombre limité de stratégies générales.
151
Analyse des stratégies déclarées en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un
problème en orthographe? »
En posant cette question, nous souhaitions que les élèves nous donnent les différentes
stratégies qu'ils pourraient mettre en place lorsqu'ils sont amenés à écrire un mot dont ils
ne maîtrisent pas l'orthographe. Au départ, 19 stratégies générales étaient possibles
d'après le tableau 37, mais trois n'ont eu aucune occurrence à cette question.
Tableau 40
Stratégies d'ordre général en lien avec la question « Que fais-tu si tu as un problème
en orthographe? »
Rang Stratégie
Nbre
d'élèves
% d'élèves
(N = 59)
1 Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) 11 18,64%
2 Laisse un vide (passe) puis revient à la fin 10 16,95 %
3 Écrit le mot comme il l'entend 9 15,25%
4 Essaie de tenir compte de la prononciation du prof (en
dictée) 6 10,17%
5 Ecrit le mot de différentes manières et choisit celle qui
semble la bonne 6 10,17%
6 Vérifie les accords pendant qu'il écrit 5 8,47 %
7 Réfléchit, se concentre pendant qu'il écrit dans le cas
d'un mot difficile
3 5,08 %
8 Écrit le mot et y revient immédiatement 3 5,08 %
9 Écrit le plus simplement possible le mot sur lequel il
hésite
2 3,39 %
10 N'emploie aucune stratégie particulière 1 1,69%
152
11 Utilise un dictionnaire 1 1,69 %
12 N'emploie que les mots dont il est sûr en rédaction 1 1,69%
13 Ecrit le mot puis y revient à la fin 1 1,69%
14 Vérifie un certain nombre de points particuliers à la
suite comme les accords, les verbes, l'accord du
participe passé, les lettres muettes, les terminaisons, le
genre, le nombre, la formation des mots
1 1,69%
15 Réfléchit sur la formation du mot (origine, radical du
mot, dérivation)
1 1,69%
16 Demande à un pair 1 1,69% Note. Le total des pourcentages ne donne pas 100 étant donné qu'un même élève a pu citer plus d'une stratégie et que certains élèves
n'ont cité aucune stratégie.
Il ressort que les stratégies citées pour cette question présentent des occurrences plutôt
faibles, aucune ne dépassant 20 %.
Six stratégies ont enregistré des scores plus ou moins importants, allant de 5 à 11
occurrences. Ce sont ces stratégies que nous examinerons.
La stratégie « Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) » est la plus
déclarée par les élèves, mais seulement dans 18,64 % des cas. Cette stratégie apparaissait
déjà en première position pour la question précédente. Que cette stratégie soit citée à la
suite de l'une ou l'autre question s'explique aisément du fait que la relecture peut porter
sur l'ensemble ou sur une portion limitée du texte. Comme il a été dit plus haut, cette
stratégie de relecture ne donne pas suffisamment d'outils garantissant la résolution de
problèmes orthographiques précis.
153
La stratégie « Laisse un vide (passe) puis revient » arrive en 2e position avec une
proportion quand même réduite de 16,95 %. Cette stratégie montre que certains élèves
peuvent se placer dans une situation de doute orthographique. Mais moins d'un
cinquième d'élèves l'ont citée.
La troisième stratégie la plus signalée par les élèves est la stratégie « Écrit le mot comme
il l'entend». Ainsi que nous l'avons expliqué ci-dessus, le recours à la prononciation
n'est pas toujours utile pour orthographier en français en raison des écarts marqués qui
existent entre l'oral et l'écrit. Une bonne discrimination auditive est essentielle pour
identifier la nature et la position des phonèmes à transcrire. Cependant, une fois les
phonèmes bien discriminés, la question de leur transcription reste entière, un même son
pouvant être écrit de différentes manières en français. Le problème est aggravé par les
nombreuses graphies morphologiques muettes dont il a été question plus haut.
La quatrième stratégie est la stratégie « Essaie de tenir compte de la prononciation du
professeur (en dictée) » (10,17 %). Cette stratégie renvoie encore une fois au difficile
rapport phonème-graphème en français. Le recours à la prononciation ne peut résoudre
véritablement un problème orthographique comme celui d'instinct/*instin et de
nerveusement/* nerveusemant. Par ailleurs, on comprend pourquoi ces élèves mentionnent
la prise en compte de la prononciation du professeur, car, comme l'a souligné Catach
(1980), plusieurs erreurs d'orthographe à dominante phonétique peuvent être commises
par les élèves qui entendent mal. Certains ont pu écrire par exemple destin au lieu
d'instinct. Signalons que le caractère inconnu du mot instinct pour plusieurs élèves a pu
rendre plus difficile sa discrimination auditive chez ceux-ci.
La cinquième stratégie est la stratégie «Écrit le mot de différentes manières et choisit
celle qui semble la bonne » (10,17 %). Cette stratégie, connue des scripteurs avertis,
permet, à l'examen de plusieurs transcriptions d'un même mot, de récupérer en mémoire
154
l'orthographe du mot en question. Mais elle n'est employée que sporadiquement par nos
sujets.
La sixième stratégie que nous commenterons est « Vérifie les accords pendant qu 'il
écrit » (8,47 %). La mention de cette stratégie, qui figurait en 2e position à la première
question, montre encore que le problème d'accord est pregnant en orthographe française.
Dans l'ensemble, les élèves, d'après leurs verbalisations, ne semblent pas disposer d'une
grande variété de stratégies générales pour résoudre des difficultés orthographiques face à
un mot donné. Certaines stratégies d'ordre phonétique, qui cumulent le nombre
d'occurrences le plus élevé pour cette question (15 occurrences au total), nous paraissent
même peu fonctionnelles étant donné les différences marquées entre le français oral et le
français écrit.
Si on regarde l'ensemble des réponses fournies pour les deux questions, la relecture
apparait être la stratégie la plus connue des élèves. Nous allons voir, dans la section
subséquente, comment les élèves peuvent s'autocorriger en se relisant, en examinant les
stratégies qu'ils citent face à des problèmes spécifiques d'ordre phonogrammique,
morphogrammique (grammatical ou lexical), idéogrammique et logogrammique.
7.2.2. Analyses des stratégies citées en lien avec les sous-systèmes de l'orthographe
À la suite des questions que nous avons posées durant l'entretien sur des points précis du
texte de la dictée en lien avec les sous-systèmes orthographiques, nous avons recueilli 16
stratégies ayant une certaine fréquence (de 6 à 43 occurrences), dix spécifiques aux sous-
systèmes comme celles qui sont formulées dans le tableau 38, mais aussi six d'ordre
155
général qu'on retrouve dans le tableau 37, telles que « écrit le mot comme il l'entend » ou
« utilise un dictionnaire ».
Pour tous les sous-systèmes de l'orthographe, nous ne présentons que les stratégies les
plus récurrentes dans le tableau 38. Précisons que dans le tableau ci-dessous, la valeur 0
représente une stratégie non citée et 1, une stratégie citée par les sujets.
Tableau 41
Stratégies spécifiques en lien avec les sous-systèmes orthographiques
Sous-sytème Stratégie citée (1)
ou non citée (0)
Fréquence %
Phonogrammes
Stratégie « Applique la règle devant p et b »
Phonogrammes
0 17 28,81 %
Phonogrammes 1 42 71,19%
Phonogrammes Stratégie « Justifie la graphie -ment par la classe grammaticale du mot (adverbe de manière en —ment),
cas des phonogrammes en [a ] »
Phonogrammes
0 29 49,16%
Phonogrammes
1 30 50,84 %
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet »
Morphogrammes
grammaticaux
0 16 27,12%
Morphogrammes
grammaticaux
1 43 72,88 %
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le sujet »
Morphogrammes
grammaticaux
0 21 35,60 %
Morphogrammes
grammaticaux
1 38 64,40 %
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur »
Morphogrammes
grammaticaux
0 31 52,54 % Morphogrammes
grammaticaux 1 28 47,46 % Morphogrammes
grammaticaux Stratégie « Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une préposition) ou la position du mot (après un verbe
conjugué, le second verbe se met à l'infinitif) »
156
0 41 69,49 %
1 18 30,51 %
Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »
0 42 71,19%
1 17 28,81 %
Stratégie « Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la terminaison -
er/-é » 0 43 72,88%
1 16 27,12%
Stratégie « Justifie l'accord par la distinction de la catégorie
grammaticale »
0 45 76,27 %
1 14 23,73 %
Morphogrammes
lexicaux
Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »
Morphogrammes
lexicaux
0 31 52,54 %
Morphogrammes
lexicaux
1 28 47,45 %
Morphogrammes
lexicaux
Stratégie « Utilise un dictionnaire » Morphogrammes
lexicaux 0 52 88,13 % Morphogrammes
lexicaux 1 7 11,86%
Morphogrammes
lexicaux
Stratégie « Suit son instinct »
Morphogrammes
lexicaux
0 53 89,83 %
Morphogrammes
lexicaux
1 6 10,16%
Logogrammes
Stratégie « Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie, logogrammes) »
Logogrammes
0 18 30,50 %
Logogrammes 1 41 69,49 %
Logogrammes Stratégie « Essaie de tenir compte de la prononciation
du professeur »
Logogrammes
0 53 89,83 %
Logogrammes
1 6 10,16%
Stratégie « Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale
157
Idéogrammes
du mot (nom propre/nom commun) »
Idéogrammes
0 46 77,96 %
Idéogrammes 1 13 22,03 % Idéogrammes Stratégie « Utilise un dictionnaire »
Idéogrammes
0 50 " 84,74 %
Idéogrammes
1 9 15,25 %
Dans notre analyse, nous examinerons d'abord chaque sous-système puis nous ferons des
remarques générales concernant l'ensemble des données recueillies.
Dans le cadre des phonogrammes, la stratégie « Applique la règle devant p et b» est la
plus citée des élèves, soit dans une proportion de 71,19 %. Pour justifier l'orthographe du
phonème [5] dans compagno/is, près des trois quarts des élèves disent en effet utiliser la
règle de position qui stipule que devant/) et b le son [5] s'écrit om. La deuxième stratégie
la plus déclarée pour les phonogrammes est la stratégie « Justifie la graphie -ment par la
classe grammaticale du mot (adverbe de manière en —ment), cas des phonogrammes en
[a] ». La question était de savoir comment distinguer le phonème [a] dans les mots
nerveusement et menaçant. À la lecture du tableau, il ressort qu'un peu plus de la moitié
des élèves ont déclaré la stratégie de l'identification de la classe grammaticale, soit 50,84
%. Comme le signale le sujet 12 « nerveusement est un adverbe de manière en ment qui
s'écrit généralement m-e-n-t», alors que menaçant est un adjectif qualificatif. » On
remarque que pour les phonogrammes, aucune stratégie générale n'a été citée, même pas
celle qui consiste à prendre en compte la prononciation. Aucune stratégie générale n'est
apparue sans doute parce que les cas soumis étaient très circonscrits. Il faudrait dans une
étude ultérieure explorer davantage les stratégies des élèves en rapport avec les
phonogrammes pour voir notamment s'ils sont capables d'émettre diverses hypothèses
orthographiques pour un même son sans que n'interviennent des règles d'usage comme
celle de p/b pour les voyelles nasales ou la distinction de deux graphies marquant deux
classes grammaticales différentes.
158
En ce qui concerne les morphogrammes grammaticaux, six stratégies spécifiques ont été
citées. Les trois premières obtiennent des fréquences assez importantes, entre 50 et 75 %
environ. Ces fréquences élevées n'ont rien d'étonnant, car les stratégies en question sont
reliées aux structures de base de la phrase française, soit la relation sujet/verbe et les
relations au sein du groupe nominal. Les trois dernières stratégies spécifiques ont été
citées beaucoup moins souvent, entre 25 et 30 % environ. Deux de ces stratégies
concernent des cas plus ciblés, soit la reconnaissance de l'infinitif en -er et sa distinction
d'avec le participe en -é . La stratégie grammaticale la plus récurrente reste la stratégie
« Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le sujet », avec 72,88 %. Ce
résultat révèle la prégnance de cet accord fondamental dans l'esprit de la grande majorité
des élèves. Curieusement, la stratégie « Écrit le mot comme il l'entend » arrive en
cinquième position sur sept dans ce groupe morphogrammique grammatical, avec près de
29 %. Cette stratégie d'ordre général n'est pourtant pas pertinente pour le traitement des
morphogrammes puisque la plupart de ceux-ci sont muets.
Face à des cas de morphogrammes lexicaux, les sujets ont déclaré utiliser des stratégies
surtout générales. Aucune stratégie spécifique en lien avec cette composante
orthographique n'a été citée de façon significative. La question portait sur l'orthographe
du mot instinct et sur la formation du mot insupportable. Pour instinct, nous voulions voir
si l'élève était capable de trouver par dérivation les lettres finales qui ne se prononcent
pas (instinct!instinctif), et pour le mot insupportable, notre but était de vérifier si l'élève
pouvait expliquer la construction du mot (préfixe -in, base support et suffixe -able).
Seulement trois sujets ont dit employer la stratégie spécifique « Recourt à la famille
lexicale ou à la formation du mot », alors que celle-ci représente l'une des stratégies
appropriées pour régler les problèmes orthographiques de cet ordre. Les sujets ont
curieusement cité surtout la stratégie générale « Écrit le mot comme il l'entend » dans une
proportion de 47,45 %. Comme il a déjà été dit, le recours à la prononciation, même pour
orthographier des unités lexicales, n'est pas pertinent en raison des correspondances
graphophonétiques irrégulières et des lettres derivatives muettes en français. Les deux
autres stratégies générales citées, « Utilise le dictionnaire » et « Suit son instinct », sont
159
beaucoup moins fréquentes (respectivement 11,86 % et 10,16 %). On peut remarquer que
la vérification dans le dictionnaire n'est pas une conduite à laquelle pense la très grande
majorité des sujets.
En ce qui concerne les logogrammes, la stratégie le plus souvent déclarée est la stratégie
« Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase (cas d'homonymie,
logogrammes) », soit 69,49 %. La deuxième stratégie citée, nettement moins appropriée,
est « Essaie de tenir compte de la prononciation du professeur (en dictée) », dans une
proportion de seulement 10,16 %. La question portait sur la justification de l'orthographe
des logogrammes voie/voix et à bout/boue. Le recours au sens de la phrase est certes
d'une grande utilité pour distinguer les différents logogrammes.
Pour ce qui est des idéogrammes, enfin, la stratégie la plus fréquemment citée est
« Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom
commun), cas des idéogrammes », mais dans une proportion de seulement 22,03 %. La
stratégie qui vient en deuxième place est « Utilise un dictionnaire » (15,25 %). Pour cette
rubrique, la question portait sur les lettres majuscules des mots Libreville et Toyota.
Moins d'un quart des élèves pensent à vérifier la classe grammaticale d'un nom pour
savoir s'il prend une majuscule (les noms propres prennent une lettre majuscule, les noms
communs s'écrivent avec une lettre minuscule). À propos du nom Toyota, plusieurs sujets
ont affirmé que ce mot n'était pas un nom propre parce qu'il désignait une chose,
commentaire qui laisse supposer que dans les représentations de plusieurs élèves le nom
propre est associé seulement aux êtres animés.
D'une manière générale, on constate que, même dans la partie de l'entretien où on
s'attendait à des stratégies plus spécifiques sur des cas bien précis, les élèves déclarent,
dans une proportion variant de 10 à 50 % environ, un nombre non négligeable de
stratégies d'ordre général (six cas sur seize, voir tableau 41) et que certaines de ces
160
stratégies générales liées à la prononciation sont inadéquates (quatre cas sur six). On peut
émettre l'hypothèse selon laquelle plusieurs élèves ne semblent pas disposer d'un bon
répertoire de stratégies spécifiques capables de les aider à résoudre des problèmes
orthographiques reliés aux différents sous-systèmes du français écrit. Cette faiblesse se
remarque notamment pour la zone des morphogrammes lexicaux où seulement trois
élèves sur 59 ont pensé à la stratégie fondée sur la famille lexicale et la construction du
mot. C'est dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que les élèves citent le
plus des stratégies spécifiques. Par exemple, près de 75 % d'entre eux pensent à la
vérification de l'accord du verbe avec le sujet. Cette prégnance du grammatical est
certainement à mettre en relation avec la tradition pédagogique dans laquelle ils ont
évolué, qui y met. beaucoup d'accent. Il reste que les données recueillies concernent
uniquement le discours tenu par les élèves sur les stratégies qu'ils disent employer, mais
les résultats plutôt faibles obtenus à la dictée laissent croire que dans la pratique de
l'écriture ils mettent plus ou moins en application les stratégies qu'ils peuvent déclarer.
Pour terminer ce chapitre, nous allons comparer les données recueillies pour les 18 élèves
forts et les 18 élèves faibles dans le cadre de l'entretien métagraphique, afin de voir si des
différences significatives existent entre les deux groupes. Signalons que, pour cette partie
de l'analyse, nous avons écarté les données obtenues auprès de 21 élèves moyens.
8. Comparaison des élèves forts et des élèves faibles
Deux étapes principales caractérisent cette phase d'analyse. La première porte sur la
comparaison des moyennes obtenues pour la dictée par les élèves forts et faibles de
l'échantillon de l'entretien métagraphique. La deuxième, quant à elle, se focalise sur la
comparaison des différentes stratégies déclarées par les élèves forts et faibles.
161
8.1. Comparaison des moyennes des forts et des faibles
Tableau 42 Comparaison des moyennes selon le niveau de compétence (faible ou fort)
seuil Statut N Moyenne Ecart-type T Dl observé
E.phonét Fort 18 1.28 1.27 4.35 18.6 0.0004* faible 18 7.44 5.88
E.phonogr Fort 18 2.22 2.65 5.22 25.9 0.0001* faible 18 9.17 4.99
E.morphogr Fort 18 5.33 5.11 4.65 26.2 0.0001* faible 18 17.06 9.40
Morpho.gram Fort 18 3.28 3.77 4.51 23.9 0.0001* faible 18 12.12 7.20
Morpho. lexical Fort 18 1.83 1.86 4.18 34 0.0002* faible 18 5.33 3.03
E. logogram Fort 18 0.78 1.72 3,29 34 0.0023* faible 18 2.39 1.17
E. ideogram Fort 18 0.44 0.70 0.67 34 0.50 faible 18 0.61 0.77
E.non.fonct Fort 18 0 0 1.46 17 0.16 faible 18 0.11 0.32
Total.erreurs Fort 18 10.56 9.49 5.24 25.1 0.0001* faible 18 36.67 18.9
* L'astérisque indique que la différence est significative.
Ce tableau présente les catégories d'erreurs commises par les élèves dans la dictée selon
le niveau de compétence de ceux-ci. Il compare les moyennes des élèves forts et celles
des élèves faibles ayant passé l'entretien métagraphique sur un total de 18 sujets pour
chaque groupe. Il en ressort que les élèves forts ont commis de façon significative moins
d'erreurs que les faibles au total et pour la majorité des catégories (phonétique,
phonogrammique, morphogrammique grammaticale et lexicale). On remarque cependant
que la différence entre les moyennes des erreurs logogrammiques, idéogrammiques et
non fonctionnelles n'est pas significative. On constate, enfin, que pour les élèves faibles,
les erreurs morphogrammiques sont, de loin, celles qui sont les plus nombreuses et qu'ils
ont plus de problèmes au niveau des morphogrammes grammaticaux. Les données de ce
162
tableau montrent donc que les deux groupes de sujets sont très contrastés sur le plan du
rendement orthographique.
8.2. Comparaison des stratégies des forts et des faibles
Nous voulons, dans cette section, comparer les stratégies des élèves forts et des élèves
faibles. Nous n'avons retenu que les stratégies les plus citées par les sujets.
Tableau 43
Comparaison des stratégies des forts et des faibles
Sous-sytème Stratégie citée (1)
ou non citée (0)
Élèves très
faibles et
faibles
Élèves très
forts et forts Total
Phonogrammes
Stratégie « Applique la règle devant p et b »
Phonogrammes
0 6
33,33
3
16,67 9
Phonogrammes 1 12
66,67
15
88,33 27
Phonogrammes
Total 18 18 36
Phonogrammes
Stratégie « Justifie la graphie -men grammaticale du mot (adverbe de mai
cas des phonogrammes en
! par la classe tière en -ment), [a]»
Phonogrammes
0 15
83,33
8
44,44 23
Phonogrammes
1 3
16,67
10
55,56 13
Phonogrammes
Total 18 18 36
Stratégie « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation
163
Morphogrammes
grammaticaux
avec le sujet »
Morphogrammes
grammaticaux
0 7
38,89
4
22,22 11
Morphogrammes
grammaticaux
1 11
61,11
14
77,78 25
Morphogrammes
grammaticaux
Total 18 18 36
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le sujet »
Morphogrammes
grammaticaux 0 10
55,56
4
22,22 14
Morphogrammes
grammaticaux
1 8
44,44
14
77,78 . 22
Morphogrammes
grammaticaux
Total 18 18 36
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en relation avec le nom donneur »
Morphogrammes
grammaticaux
0 14
77,78
6
33,33 20
Morphogrammes
grammaticaux
1 4
22,22
12
66,67 16
Morphogrammes
grammaticaux
Total 18 18 36
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »
Morphogrammes
grammaticaux
0 9
50,00
15
83,33
24
Morphogrammes
grammaticaux
1 9
50,00
3
16,67
12
Morphogrammes
grammaticaux
Total 18 18 36
Morphogrammes
grammaticaux
Stratégie « Identifie l'infinitif d'après l'entourage (présence d'une
préposition) ou la position du mot (après un verbe conjugué, le
second verbe se met à l'infinitif) »
Morphogrammes
grammaticaux
0 12
66,67
14
77,78 26
164
1 6
33,33
4
22,22 10
Total 18 18 36
Stratégie « Substitue un verbe du premier groupe par un verbe du second ou du troisième groupe pour identifier la
terminaison -er/-é » 0 15
83,33
11
61,11 26
1 3
16,67
7
38,89 10
Total 18 18 36
Stratégie « Justifie l'accordpar la distinction de la
catégorie grammaticale »
0 15
83,33
13
72,22 28
1 3
16,67
5
27,78 8
Total 18 18 36
Morphogrammes
lexicaux
Stratégie « Ecrit le mot comme il l'entend »
Morphogrammes
lexicaux
0 8
44,44
11
61,11 19
Morphogrammes
lexicaux
1 10
55,56
7
38,89 17 Morphogrammes
lexicaux Total 18 18 36
Logogrammes
Stratégie « Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase
(cas d'homonymie, logogrammes) »
Logogrammes
0 9
50,00
1
5,56 10 Logogrammes
1 9
50,00
17
94,44 26
Logogrammes
Total 18 18 36
165
Idéogrammes
Stratégie « Justifie la lettre majuscule par la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) »
Idéogrammes
0 14
77,77
15
83,33 29
Idéogrammes
1 4
22,22
3
16,66 7
Idéogrammes Total 18 18 36
Idéogrammes Stratégie «Utilise un dictionnaire »
Idéogrammes
0 13
72,22
16
88,88 29
Idéogrammes
1 5
27,77
2
11,11 7
Idéogrammes
Total 18 18 36
Sur le plan des phonogrammes, la différence pour la stratégie « Applique la règle d'usage
devant p et b » n'est pas significative entre les élèves forts et les élèves faibles (p = 0,
39). Cependant la stratégie « Justifie la graphie -ment adverbe en ment par la classe
grammaticale du mot » est beaucoup plus citée par les forts, la différence, selon le test
statistique, étant significative (p = 0,0060). Cette dernière stratégie suppose effectivement
une connaissance métalinguistique plus poussée.
Pour les morphogrammes, sur sept stratégies citées, une différence significative entre les
forts et les faibles s'observe pour seulement deux stratégies. Les forts citent trois fois plus
souvent la stratégie « Justifie l'accord de l'adjectif ou du déterminant par sa mise en
relation avec le nom donneur » (p = 0,0239), tandis qu'un faible sur deux, contrairement
à environ un fort sur cinq, cite la stratégie dysfonctionnelle «Écrit le mot comme il
l'entend» (p = 0,0552). En ce qui a trait aux autres stratégies grammaticales concernant
les accords du verbe et du participe passé avec être ou la reconnaissance de l'infinitif en -
er, même si les différences obtenues ne s'avèrent pas significatives, on peut remarquer
que les bonnes stratégies sont presque toujours plus fréquentes chez les élèves forts, sauf
166
dans le cas de la stratégie de la prise en compte de l'entourage et de la position pour la
reconnaissance de l'infinitif en -er, où les élèves faibles l'emportent (33,33 % contre
22,22 %).
Sur le plan des morphogrammes lexicaux, la seule stratégie citée assez souvent par les
sujets est la stratégie « Écrit le mot comme il l'entend ». Elle ne présente pas de
différence significative entre les élèves forts et les élèves faibles (p = 0,60). Comme il a
été dit plus haut, le recours à la prononciation n'est guère approprié pour la morphologie
lexicale. Et pourtant presque autant de forts que de faibles la citent (7 contre 10). Ce
résultat pour le moins surprenant révèle que le sous-système des morphogrammes
lexicaux pourrait être la partie de l'orthographe française la moins bien maitrisée par
l'ensemble des élèves gabonais, quel que soit leur niveau de compétence. Cette hypothèse
pourrait être vérifiée dans une étude subséquente compte tenu des limites de notre
recherche quant aux possibilités de généralisation de nos résultats.
Pour les logogrammes, la stratégie «Justifie la graphie par le sens du mot dans la phrase
(cas d'homonymie, logogrammes) » présente une différence significative en faveur des
forts (p = 0,0128).
Enfin, sur le plan des idéogrammes, aucune différence significative n'est relevée pour les
deux stratégies le plus souvent déclarées, soit la stratégie « Justifie la lettre majuscule par
la classe grammaticale du mot (nom propre/nom commun) » et la stratégie «Utilise un
dictionnaire ». Contre toute attente, on relève cependant une plus forte récurrence de ces
deux stratégies dans le discours des élèves faibles.
En conclusion, on peut dire que des différences entre les forts et les faibles sur le plan des
stratégies déclarées existent mais ne sont pas très grandes malgré le fait que l'échantillon
167
retenu montre des résultats contrastés entre les deux groupes quant aux moyennes
d'erreurs relevées. Seulement quatre stratégies sur douze montrent des différences
significatives. Ces quatre stratégies touchent la plupart des sous-systèmes
orthographiques, soit les phonogrammes dans un cas, les morphogramme dans deux cas
et les logogrammes dans un dernier cas. Dans trois cas, il s'agit de stratégies
fonctionnelles qui sont plus citées par les forts et, dans un cas, il s'agit d'une stratégie
inadéquate relative à la prononciation souvent plus citée par les faibles. Même si les forts
l'emportent pour la plupart des autres stratégies pour lesquelles aucune différence
significative n'a été relevée, il reste que les faibles l'emportent contre toute attente pour
certaines bonnes stratégies comme la prise en compte de l'entourage et de la position
pour la reconnaissance de l'infinitif en -er (domaine des morphogrammes grammaticaux)
ainsi que la prise en compte de la classe grammaticale ou le recours au dictionnaire pour
la lettre majuscule des noms propres (domaine des logogrammes). Quoique les
différences entre les deux groupes ne soient pas marquées, il convient de souligner que la
stratégie dysfonctionnelle du recours à la prononciation pour les morphogrammes
grammaticaux et lexicaux est plus souvent citée chez les élèves faibles.
Conclusion du chapitre
Au terme de cette analyse, nous voulons rappeler que les résultats issus de l'entretien
métagraphique ne peuvent être totalement généralisables, à cause du nombre limité de
l'échantillon (N=59) et des quelques écarts qu'il présente par rapport au grand échantillon
(N=724). Nous devrons donc les considérer avec prudence. Dans cette conclusion, nous
tiendrons particulièrement compte des deux grands groupes forts et faibles.
On retiendra que la perception des élèves en orthographe varie selon leur degré de
compétence. Les forts ont tendance à se sous-estimer, alors que les faibles ont en majorité
une perception plutôt juste de leurs habiletés en orthographe. Quant aux enseignants, ils
ont une perception relativement bonne de leurs élèves dans le cas des deux groupes
contrastés (forts et faibles).
168
Pour ce qui est des perceptions des élèves sur le degré de difficulté en orthographe, plus
de la moitié estime que l'orthographe est facile, alors que les résultats de la dictée sont
plutôt faibles. Cette perception ne correspond pas à la complexité reconnue du système
orthographique du français.
Parlant des stratégies que les élèves déclarent mettre en place pendant des situations
d'écriture, les stratégies générales de la relecture et de la vérification des accords sont les
plus citées, alors que sur le plan spécifique, c'est-à-dire les stratégies liées aux sous-
systèmes de l'orthographe, c'est dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que
les élèves en citent un plus grand nombre et avec des fréquences souvent plus
importantes, à savoir : les stratégies sur l'accord du verbe avec son sujet, l'accord du
participe passé et l'accord de l'adjectif et du déterminant. On note cependant que les
élèves déclarent, là aussi, un nombre non négligeable de stratégies d'ordre général, où on
s'attendait à des stratégies plus spécifiques. C'est dans le domaine des morphogrammes
lexicaux que les élèves, qu'ils soient forts ou faibles, ne semblent guère disposer de
stratégies pertinentes.
Enfin, en comparant les stratégies des élèves forts et celles des élèves faibles, on
s'aperçoit qu'il y a des différences, mais qu'elles ne sont pas importantes. C'est
notamment dans le domaine des morphogrammes grammaticaux que cette différence est
significative mais avec deux cas seulement sur quatre pour l'ensemble des sous-systèmes.
169
CONCLUSION GENERALE
Les recherches en orthographe montrent que le domaine connait un essor marqué au
regard du nombre et de l'intérêt des travaux et de l'implication des chercheurs, des
enseignants, des acteurs de la communauté éducative cette dernière décennie. Ces
recherches s'enchainent, se succèdent mais ne se ressemblent pas. Jaffré (1992) avait déjà
prédit l'explosion des recherches en orthographe quand il déclare que : « Dans le
domaine de l'orthographe, le grand chantier des prochaines années concernera
l'acquisition chez les enfants de l'école primaire et du collège. » (p. 142)
Si l'on veut résoudre les problèmes de l'enseignement-apprentissage de l'orthographe
française, nous pensons, comme Jaffré, que c'est depuis le cycle primaire et au premier
cycle du secondaire qu'il faut commencer par focaliser nos efforts. C'est dans cette
perspective que s'inscrit cette recherche.
Dans cette section nous jetons sur l'étude un regard rétrospectif qui consiste à rappeler
nos questions de recherche formulées au début de cette thèse, nous faisons ensuite une
synthèse des résultats enregistrés, tout en mentionnant leurs limites et leurs retombées.
Nous terminerons en rappelant quelques propositions didactiques venant des chercheurs
importants en orthographe et en suggérant des pistes personnelles à la lumière des
résultats recueillis liés au contexte gabonais.
Rappel des questions de recherche
Diverses initiatives ont été prises pour améliorer la qualité du français écrit des élèves.
Enquêtes, études, se succèdent dans le but de favoriser l'acquisition de l'orthographe
chez les élèves. L'on se demande pourquoi bon nombre d'élèves du premier cycle du
secondaire, notamment du Gabon, arrivent à réciter les règles d'orthographe
(grammaticale et lexicale) sans être capables de les appliquer dans leurs productions
écrites ou en dictée. Le triangle didactique qui montre le lien étroit entre les différents
170
acteurs impliqués dans le processus enseignement-apprentissage nous permet de cerner le
problème des erreurs d'orthographe dans cet espace car une défaillance d'un seul maillon
pourrait avoir des répercussions sur d'autres (Halte, 1992; Simard, 1997; Jonnaert et
Vander Borght, 1999). C'est dans cette optique que nous avons pensé opportun de
questionner les élèves, premiers responsables du phénomène des erreurs d'orthographe,
dans leur rôle d'apprenants de règles d'orthographe et de producteurs de textes écrits.
Comment expliquer que les règles d'orthographe enseignées, renforcées à partir des
séances d'application en classe ne soient pas correctement appliquées dans les travaux
écrits? Quelles sont les erreurs d'orthographe auxquelles les élèves sont réellement
confrontés? Quels sont les types d'erreurs les plus fréquents dans leurs écrits? Quelles
stratégies emploient-ils pour orthographier?
Synthèse des résultats de la recherche
Dans la présente recherche, nous nous sommes intéressé aux différentes erreurs
d'orthographe que commettent les élèves des classes de 6e et de 3e du niveau collège du
Gabon. Nous sommes parti de la typologie de Catach (1980) pour relever et analyser les
diverses erreurs.
Catach présente le système orthographique comme un système mixte constitué de trois
composantes principales : les phonogrammes (la transcription des sons), les
morphogrammes (les morphèmes lexicaux et grammaticaux) et les logogrammes (la
distinction d'unités sémantiques). Nous nous sommes penché sur toutes ces composantes
et même sur les idéogrammes (les signes diacritiques tels l'apostrophe et la lettre
majuscule) et les lettres non fonctionnelles (les lettres d'origine gréco-latine, des fausses
etymologies, les finales particulières).
L'analyse des résultats obtenus de cette étude nous permet de faire un certain nombre de
constats. Le premier est que les élèves gabonais du premier cycle du secondaire ont
réellement des problèmes en orthographe car l'intervalle regroupant le plus grand nombre
171
d'élèves (23 %) se situe entre 11 et 20 erreurs. La moyenne des erreurs est de 31,33 pour
un texte relativement court de 126 mots.
Ensuite, en présentant la moyenne des erreurs par catégorie, il apparait, comme l'avaient
déjà montré nombre d'études, que la moyenne des erreurs morphogrammiques
(grammaticale et lexicale) est la plus élevée (12,53). Elle est suivie de la moyenne des
erreurs phonogrammiques (11,68) et de la moyenne des erreurs phonétiques (3,04). Les
moyennes des erreurs logogrammique et idéogrammique sont respectivement de 2,72 et
1,11. La moyenne des erreurs non fonctionnelles est la plus faible avec 0,35.
Les graphiques de ces différentes variables montrent de façon générale qu'une grande
concentration de sujets se situe autour de la moyenne (31,33), ce qui révèle que très peu
d'élèves ont commis un nombre réduit d'erreurs.
On constate que les erreurs morphogrammiques sont, de loin, celles qui sont les plus
nombreuses et que les élèves ont plus de problèmes au niveau des morphogrammes
grammaticaux (avec une moyenne de 9,98), comme l'avaient déjà montré d'autres études
antérieures (Bétrix Kohler, 1991, et Monballin et Legros, 2001 )23
Dans le grand échantillon, les filles se montrent plus performantes en orthographe que les
garçons. De manière générale, elles commettent moins d'erreurs qu'eux dans leurs
dictées. Le test statistique, dont le seuil critique est fixé à (p < 0,05), montre des écarts
significatifs pour les erreurs de type phonétique et morphogrammique, notamment
grammatical. Ce résultat rejoint celui de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler.(1991),
de Chervel et Manesse (1989) en France, de Olivier (1989) et de Bureau (1985) au
Québec.
Au niveau des classes (6e et 3e), on constate que la moyenne générale des erreurs en
classe de 6e est nettement plus élevée que celle de la classe de 3e. Les élèves de 6e
commettent beaucoup plus d'erreurs d'orthographe que leurs aînés de 3e. Les moyennes V .
23 . Monballin, M, et Legros, G. (2001). La maîtrise langagière à l'entrée des études supérieures : mythes, constats et essais d'intervention, Correspondance, vol. 6, avril,
172
des deux groupes (6e et 3e) sont significativement différentes pour toutes les catégories,
sauf pour les erreurs non fonctionnelles où les deux groupes ne présentent pas de
différence significative (0,24 en 6e et 0,22 en 3e). On peut penser que la scolarité a un
effet bénéfique sur le rendement orthographique des élèves. Nos résultats rejoignent une
fois de plus ceux de l'étude suisse menée par Bétrix Koehler (1991). Il ressort en effet de
cette étude que les élèves de 6e année réalisent de meilleures performances en
orthographe que les élèves de 5e année.
Nous avons pu faire des corrélations entre les différents types d'erreurs pour pouvoir
mesurer le lien ou l'écart qui existe entre eux. Les corrélations entre les différentes
variables sont assez élevées variant de 0,40 à 0,97. Seule la catégorie des erreurs non
fonctionnelles ne semble pas être en lien avec les autres catégories. Les plus fortes
corrélations sont notamment observées entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs
morphogrammiques (0,738) et morphogrammiques grammaticales (0,729) et entre les
erreurs morphogrammiques grammaticales et les erreurs logogrammiques (0,612). Les
corrélations sont cependant moins fortes entre les erreurs phonogrammiques et les erreurs
morphogrammiques lexicales (0,474) et les erreurs logogrammiques et les erreurs
morphogrammiques lexicales (0,410).
Au niveau du petit échantillon, c'est-à-dire les 59 élèves qui ont passé l'entretien
métacognitif, nous avons remarqué, de manière générale, qu'il y a quatre groupes
d'élèves : les élèves très forts, les forts, les moyens, les faibles et les très faibles. Les
perceptions des enseignants, pour déterminer les élèves issus de ces différents groupes,
sont relativement justes pour deux principaux groupes (les faibles et les forts). On
constate que les enseignants savent déterminer les élèves forts (89 %) et faibles (67 %),
mais ils éprouvent des difficultés à déterminer les moyens (surestimation dans 83 %),
groupe numériquement le plus important.
Chez les élèves, on rémarque une grande variation dans leurs perceptions de leurs
performances en orthographe. Les élèves très forts et forts se sous-estiment (56 %). On
173
constate chez les élèves moyens une tendance à la surestimation (48 %) ou à la sous-
estimation (43 %) de leurs habiletés en orthographe. Par contre, les élèves faibles et très
faibles ont une perception généralement juste d'eux-mêmes en orthographe (61 %),
même si une proportion considérable se surestime (39 %).
En ce qui concerne les stratégies déclarées par les élèves en situation orthographique, on
constate que les stratégies d'ordre général comme « Lire et relire son texte, une ou
plusieurs fois, pendant ou après l'avoir rédigé » ont été citées par beaucoup d'élèves. Un
nombre non négligeable de scripteurs expriment également le souci de veiller aux
accords, au lexique et à la sémantique. Ce souci est exprimé à travers la récurrence des
stratégies de la liste des stratégies générales, notamment les stratégies « Vérifie les
accords » et « Se relit après avoir écrit le texte (une ou plusieurs fois) ».
Au niveau des stratégies en relation avec les sous-systèmes de l'orthographe, on
remarque que les stratégies les plus déclarées sont la stratégie « Applique la règle
d'usage devant p et b » pour les phonogrammes (71,19 %), pour les morphogrammes
grammaticaux, les stratégies « Justifie l'accord du verbe par sa mise en relation avec le
sujet » et « Justifie l'accord du participe passé avec être par sa mise en relation avec le
sujet » (72,88 % et 64,40 %), pour les logogrammes, la stratégie « Justifie la graphie par
le sens du mot » (69,49 %) et enfin pour les idéogrammes, la stratégie « Justifie la lettre
majuscule par la classe du (nom propre/nom commun) » (22,03 %).
En ce qui concerne les stratégies déclarées par les élèves forts et faibles, la tendance
générale est que tous ces élèves emploient quasiment les mêmes stratégies, sauf avec les
morphogrammes grammaticaux où la différence se trouve plus ou moins significative en
faveur des élèves forts. - .
Ehfin, contrairement à l'écart observé dans le grand échantillon entre le rendement des
filles et celui des garçons, nous constatons que la différence n'est pas significative chez
les élèves qui ont passé l'entretien métacognitif. Tout comme la variable sexe n'a aucune
influence au plan des différentes stratégies que déploient les élèves forts et faibles qui se
174
sont prêtés à nos questions. Nous pensons que cette situation pourrait s'expliquer par le
caractère plus réduit de ce sous-échantillon.
Cependant, il y a une différence significative entre les moyennes des résultats à la dictée
des élèves forts et celles des élèves faibles ayant passé l'entretien métagraphique. Les
élèves forts ont commis de façon significative moins d'erreurs que les faibles pour la
majorité des catégories (phonétique, phonogrammique, morphogrammique grammaticale
et lexicale). La différence entre les moyennes des erreurs logogrammique,
idéogrammique et non fonctionnelle n'est pas significative.
Les limites de la recherche
Sans méconnaître l'impératif lié au temps de réalisation de cette étude, le fait de n'avoir
pas questionné les enseignants reste la première limite. En effet, acteurs compétents dans
leur domaine, les enseignants représentent un pôle important, sinon incontournable, du
triangle didactique (Halte, 1999, Simard, 1999, etc.)..Ne pas solliciter leurs points de vue
ni questionner leurs pratiques, en vue d'avoir leurs positions sur le phénomène des
erreurs d'orthographe, laisse une partie inachevée pour la présente recherche.
La deuxième limite de cette recherche peut être le manque de relance sur certaines
questions. Certains élèves, lors de l'entretien métacognitif, se montraient peu bavards,
peu engagés dans la discussion. Nous pensons que nous avons manqué de spontanéité
pour rebondir sur certaines de leurs réponses jugées quelque peu évasives afin de les
amener à parler davantage. Il est vrai que cette situation s'explique en partie par le temps
relativement court alloué à cet entretien métacognitif (de 15 à 20 minutes par élève).
Mais ces limites n'enlèvent en rien la pertinence de cette étude, vu ses spécificités tant
organisationnelles (ou institutionnelles), que contextuelles. Sur le plan organisationnel, la
présente recherche est financièrement soutenue par l'ACDI dans son volet du PCBF.
Cette institution exige la réalisation d'une thèse en quatre ans au plus. Il est donc
impensable dans ces conditions d'organiser une collecte de données encore plus vaste que
celle que nous avons réalisée.
175
Les retombées
Les retombées de cette étude seront cernées sur deux dimensions principalement : sur le
plan international et national.
Sur le plan international, cette étude révèle les difficultés auxquels les scripteurs gabonais
font face dans leurs dictées, difficultés liées à l'acquisition et à la manipulation de la
langue française, à l'instar des élèves de tous les autres pays de la Francophonie. Cette
recherche, qui se veut pionnière en matière de l'enseignement-apprentissage au Gabon,
permettrait aux institutions internationales telles que la Francophonie et l'Unesco de
repenser leurs méthodes en matière de coopération culturelle, en revisitant certains
procédés qui, pour le moment, se limitent à l'organisation des concours d'orthographe et
à la promotion de la création libre (poèmes notamment).
Sur le plan national, la présente étude pourra servir d'aiguillon dans le cadre des réformes
à venir liées à l'enseignement de l'orthographe. Elle présente, de manière claire, les types
d'erreurs d'orthographe et l'ampleur du phénomène dans le système éducatif et pourra
susciter la relance du débat sur le plan des définitions des priorités du système éducatif
gabonais.
Cette recherche permettra, enfin, à nos collègues d'interroger leurs pratiques - qui n'ont
pas été visitées, de les adapter à quelques méthodes susceptibles de favoriser l'acquisition
des stratégies capables d'améliorer la situation orthographique dans laquelle se trouvent
les élèves gabonais du second cycle du secondaire. Ainsi, avons-nous pensé à quelques
propositions didactiques en vue d'aider les collègues à aider les élèves face au
phénomène des erreurs d'orthographe.
Les propositions didactiques
L'intérêt d'une recherche tient non seulement aux questions examinées mais aussi à ce
qu'elle suggère des mesures correctives (Catach, 1980). C'est dans cette perspective que
176
nous faisons quelques propositions didactiques sans prétention d'exhaustivité aucune.
Dans cette section, nous formulons deux types de propositions didactiques : les
propositions didactiques émises par les chercheurs du domaine et nos pistes didactiques
personnelles en lien avec les résultats de la présente recherche et à notre contexte.
Nous présentons d'abord les orientations didactiques de Charmeux (1979), Catach
(1980), David, Guyon et Brissaud (à paraître), Allai, (1997); Allai, Bétrix Kohler,
Rieben, et al, (2001), avant de faire état de nos propres propositions.
Charmeux (1979) définit l'orthographe comme l'entrée dans le fonctionnement de la
langue écrite. L'orthographe est l'épiderme de l'écrit, en ce sens qu'elle est l'aspect
immédiatement perceptible de l'écrit.
L'auteure ne partage pas l'approche préconisée par Benveniste et Chervel qui soutiennent
que la réforme phono-graphique de l'orthographe soit l'unique solution pour résoudre les
problèmes orthographiques. Charmeux trouve qu'il est préférable de faire observer l'écrit,
tel qu'il est, de façon autonome, sans se préoccuper des correspondances
phonèmes/graphèmes. Elle privilégie tout d'abord la réforme de l'enseignement de
l'orthographe et pense que :
Si au lieu de poser que l'orthographe française devrait correspondre à la prononciation, pour découvrir avec tristesse qu'il n'en est rien la plupart du temps, on observait l'écrit tel qu'il est, de façon autonome- quitte à repérer beaucoup plus tard qu'il existe certaines corrélations entre sons du langage oral et les signes de l'écrit- on éviterait aux enfants et aux adultes bien des tourments, (p. 29)
Pour Charmeux l'enseignement de l'orthographe devrait contenir, d'une part, des
situations de communication (textes libres, compositions, etc.) et, d'autre part, des
activités de structuration dont l'objectif serait de permettre l'acquisition de techniques qui
rendraient possible la maîtrise du fonctionnement de l'orthographe. Ces dernières
activités devraient apprendre à l'élève à se servir de l'orthographe et non à savoir
l'orthographe.
177
Charmeux pense ensuite que l'élève s'approprie l'orthographe par des exercices pratiques
de rédaction surtout. C'est pour cette raison qu'elle déconseille la dictée qui est la parole
de quelqu'un d'autre. L'apprenant subit passivement la dictée qui ne favorise pas la
maitrise de renonciation. Si on vise la maitrise de l'orthographe, c'est au travers de
renonciation qu'il faut l'envisager. D'où la nécessité de fournir aux élèves des occasions
nombreuses et variées de communiquer par écrit.
En France, Catach et l'équipe HESO préconisent deux approches : l'approche technique
et l'approche ludique. Face à la réputation d'austérité, d'exigence et de rigueur que les
élèves intègrent sur l'orthographe, les auteurs suggèrent de varier les modes de travail en
proposant toute une batterie d'activités différentes : les combinatoires, les tableaux à
double entrée, les schémas fléchés, les intrus, les ensembles, les vrais ou faux, etc. On
peut, dans le souci de réconcilier rigueur et créativité, « essayer de mettre l'orthographe
en jeux sans rien renier de ses enjeux ». Il s'agit, à partir d'activités en apparence
gratuites, de mobiliser ses compétences en orthographe, de jouer avec les contraintes de
l'orthographe, d'en prendre conscience afin de résoudre un problème d'écriture.
David, Guyon et Brissaud (à paraitre) ont mis en œuvre une séquence didactique en 5e
primaire dont l'objectif était d'apprendre aux élèves à utiliser la procédure analogique qui
consiste à remplacer une forme ambiguë par une autre forme plus transparente
phonologiquement (par exemple prendre/pris à la place de trouver/trouvé). Les auteurs,
qui reconnaissent la persistance de cette difficulté au lycée et même à l'université (Lucci
et Millet, 1994), concluent à l'efficacité de la séquence didactique où alternent exercices
d'écriture et exercices de conceptualisation de procédures par des reformulations orales et
écrites.
En Suisse, une étude comparée, en 2e et 6e primaire, a été menée sur deux approches : une
approche spécifique de l'orthographe et une approche intégrée à des activités de
production écrite ou dans des situations exigeant à la fois écriture et lecture (Allai, 1997;
24 CATACH, N., DUPREZ, D. Et LEGRIS, M. (1980). L'enseignement de l'orthographe, Dossiers didactiques Nathan (non réédité) cité par Brissaud (2001), pp. 115-117.
178
Allai, Bétrix Kohler, Rieben, et ai , 2001). On conclut à l'efficacité de l'approche
intégrée chez les plus âgés seulement et on préconise l'utilisation conjointe de deux
méthodes par une articulation entre activités décrochées et démarche globale de lecture-
écriture.
On voit donc que toutes ces multiples façons d'aborder les problèmes d'ordre
orthographique en situation de classe montrent à la fois des principes communs et des
oppositions.
Un premier aspect concerne la relation phonie-graphie. Certains auteurs comme
Charmeux soutiennent qu'il convient d'examiner, du moins en début d'apprentissage,
l'écrit spécifiquement sans relation avec la prononciation en raison des grands écarts qui
existent entre le français oral et le français écrit. Les recherches récentes sur la
conscience phono logique indiquent cependant que les jeunes enfants doivent comprendre
le principe alphabétique assez tôt et avoir une juste perception des unités sonores pour
pouvoir maitriser les correspondances graphophonétiques de l'orthographe française, la
composante phonographique, rappelons-le, réunissant l'essentiel des unités graphiques de
notre langue. Les travaux cités de David et al. révèlent d'ailleurs que l'apprentissage est
facilité quand les élèves peuvent compter sur un appui oral. D'autres auteurs comme
Catach insistent plutôt sur le caractère pluridimensionnel de l'orthographe et proposent
des interventions didactiques variées de prise de conscience et de maniement pour chaque
sous-système orthographique.
Un autre aspect important touche l'opposition entre activités spécifiques d'orthographe et
approche intégrée aux pratiques de discours. Les dernières recherches tendent à montrer
que les deux méthodes doivent être combinées, particulièrement durant les premières
années d'apprentissage.
Quelles sont les pistes didactiques que nous pouvons proposer face à la situation
spécifique du Gabon que nous avons déjà présentée plus haut?
179
Pistes didactiques issues de la présente recherche
L'examen des résultats que nous avons obtenus sur la question des erreurs d'orthographe
chez les élèves du premier cycle du secondaire du Gabon nous amène à faire un certain
nombre de propositions didactiques orientées à la fois sur les pratiques d'élèves et des
enseignants. Pour être plus concret, nous ferons souvent un retour sur les résultats
observés à propos des différentes catégories du sous-système de l'orthographe en
fonction de l'ampleur du problème.
Nous avons constaté en effet que les erreurs morphogrammiques, notamment
grammaticales, sont les erreurs auxquelles les élèves du premier cycle du secondaire sont
le plus confrontés au Gabon comme dans le reste de la francophonie. Certains arrivent à
réciter les règles de grammaire mais ne les appliquent pas correctement en situation
d'écriture. Nous pensons que la manière dont l'enseignement de l'orthographe se fait est
en partie responsable de cette situation. Les enseignants devraient mettre plus d'accent
sur la composante grammaticale et aborder son enseignement dans une perspective de
compréhension et d'intégration. L'enseignement au Gabon est un héritage de
l'enseignement traditionnel de la France. L'enseignement de l'orthographe, en France, a
longtemps été focalisé sur la simple mémorisation des règles et des mots. Même s'il y a
pu avoir une amélioration des méthodes d'enseignement dans la métropole,
malheureusement, cette amélioration n'a pas connu le même rythme dans tous les pays de
l'espace francophone, notamment au Gabon. Une grande attention des enseignants
devrait être consacrée aux activités visant la compréhension des principes et des règles
gouvernant le système morphogrammique d'ordre grammatical ainsi qu'aux activités
d'application en classe, soit dans des exercices spécifiques, soit en lien avec la production
de textes, cela pour tenir compte des données de recherche citées ci-dessus montrant
l'importance d'une approche intégrée qui est complétée par des activités spécifiques
d'acquisition.
Le deuxième problème, relevé par ordre d'importance, concerne les phonogrammes, liés
notamment aux géminées (lettres doubles). Beaucoup d'élèves connaissent les mots, les
180
perçoivent bien auditivement, mais n'arrivent pas à les orthographier correctement. C'est
le cas, dans notre texte de dictée, de pierreuses, réinstallés, insupportable, chauffeur,
stopper et gouffres que certains élèves écrivent piereuses, reinstates, insuportable,
chaufeur, stoper et goufres. Les doubles consonnes constituent une grande difficulté pour
l'ensemble des francophones, étant donné que la gemination n'existe pratiquement pas en
français oral. D'après les graphies produites par les élèves, l'appariement
phonèmes/graphèmes est bien réalisé par la majorité d'entre eux. Le problème est
certainement celui de la mémorisation des doubles consonnes comme graphème d'un
phonème consonantique unique. Nous pensons que la connaissance de la famille des mots
est un moyen susceptible de permettre aux élèves de pouvoir mieux mémoriser les
graphies de ces mots à double consonne et d'éviter ainsi ce type d'erreurs d'orthographe.
Le recours à la famille lexicale, à part quelques exceptions, peut aider à retrouver
l'orthographe d'un mot (pierreuse en tant que dérivé de pierre prendra deux r;
réinstallés, dérivé du mot de base installer, s'écrira avec deux l). De plus, l'apprentissage
de règles d'usage permettrait aux élèves de savoir qu'une voyelle ne porte pas d'accent
graphique si elle est suivie d'une consonne doublée (pierreuse et non pierreuse).
Un autre problème concerne aussi les phonogrammes. Les élèves ont du mal à
discriminer les graphèmes transcrivant un même phonème comme an~en. Une étude plus
systématique des correspondances graphophonétiques au primaire à l'aide de l'alphabet
phonétique international (API) pourrait aider les élèves à maîtriser celle-ci.
Il serait souhaitable aussi d'introduire dans le système éducatif gabonais l'entretien
métacognitif que l'enseignant pourra mener individuellement avec des élèves faibles ou
organiser avec toute la classe à l'issue de la rédaction d'un texte ou d'une dictée dans
l'optique de susciter une confrontation entre élèves et de favoriser un questionnement sur
les mécanismes de la langue et sur les difficultés à surmonter (Haas, 1999; Cogis et
Brissaud, 2003; Brissaud et Bessonnat, 2001).
181
Actuellement, l'orthographe à l'école gabonaise est évaluée de façon uniquement
sommative (avec le fameux zéro sur 20). Pour diminuer la peur de l'erreur et de sa
notation négative, on pourrait organiser des activités d'évaluation formative centrées
uniquement sur la régulation des apprentissages, en vue de permettre aux élèves de
pouvoir s'exprimer sur leurs graphies, de les justifier devant tous les camarades et, ce
faisant, pouvoir mieux préparer l'évaluation sommative à venir. Jaffré (1999) a envisagé
cette méthode dans le cadre de la recherche, nous la préconisons non plus seulement à des
fins de recherche mais aussi pour l'enseignement-apprentissage. Les contours d'une telle
démarche restent à préciser.
Enfin, l'État gabonais aura un rôle important à jouer en vue de minimiser le problème des
erreurs d'orthographe chez les élèves du secondaire. Le ministère de l'Éducation
nationale devrait davantage tenir compte des réalités contextuelles qui font que le français
est une langue seconde au Gabon. La grande majorité de nos élèves sont en contact avec
le français seulement à l'âge scolaire, soit à partir de 6 ans. La réorganisation par l'État
du cycle préscolaire ou pré-primaire qui, pour le moment, est en grande partie sous la
gestion du privé et est réservé à une minorité permettrait à l'ensemble des enfants de
commencer plus tôt l'apprentissage du français et même de développer une conscience
phonologique plus solide. Le ministère de l'Éducation devrait également revoir ses
programmes à la lumière des avancées de la recherche actuelle en orthographe et soutenir
les enseignants par un programme de recyclage sur les nouvelles méthodes
d'enseignement de l'orthographe
182
ANNEXES
183
Annexe 1 : Protocoles d'entretien métagraphique
184
Protocole d'entretien
Enregistrement
Chaque entretien sera enregistré au magnétophone. Vérifier avant chaque entretien l'état
du matériel (appareil, pile, cassette...).
Déroulement
- 2 étapes principales :
1) le questionnaire général portant sur les perceptions des élèves quant au niveau de
difficulté de l'orthographe française et de leur propre maitrise de cette orthographe ;
2) la dictée et la verbalisation des élèves sur leur manière d'orthographier
l r e étape : les questions générales
Ces questions doivent permettre de mettre l'élève à l'aise et de mieux connaître sa
relation avec l'orthographe française.
1. Saluer l'élève.
2. Lui expliquer en gros l'objectif de l'entretien en insistant sur le fait qu'il ne sera pas du
tout noté, qu'il s'agit plutôt d'un entretien de recherche qui vise à mieux comprendre
comment les élèves de son âge orthographient, et que les réponses qu'il fournira ne seront
pas connues de son enseignant.
185
1. Lui poser les questions suivantes
1. Est-ce que tu te trouves bon ou faible en orthographe? Pourquoi?
2. Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile? Pourquoi?
3. Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?
4. Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?
- pendant que tu écris?
- après avoir fini d'écrire?
5. Que trouves-tu facile en orthographe?
6. Que trouves-tu difficile en orthographe? Note. Si l'élève a de la peine à nommer les différentes zones de l'orthographe, le chercheur pourra lui
fournir des précisions :
- la conjugaison;
- l'accord de l'adjectif;
- l'accord du verbe;
- l'accord du participe passé;
- les lettres que l'on n'entend pas à la fin des mots.
Ces questions sont inspirées de Bétrix-Koehler (1991)
2e étape : la dictée et l'entretien métagraphique sur celle-ci
1. Donner la dictée ainsi (prévoir papier et crayon) :
- Demander à l'élève de s'identifier sur la feuille de dictée.
- D'abord lire le texte au complet.
- Ensuite relire le texte par unités de sens, chacune reprise 3 fois.
- Enfin relire le texte au complet.
- Donner à l'élève quelques minutes pour se relire et se corriger.
186
Dictée : Une route périlleuse
Les roues de la Toyota mordaient nerveusement la route tantôt pierreuse, tantôt nue qui
menait vers la capitale Libreville. Le chemin formait un passage étroit dans l'épaisse
forêt vierge qui couvrait la région. La voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant
dans la boue les montées abruptes. Mes compagnons et moi étions basculés à gauche,
puis à droite, puis réinstallés brutalement sur nos sièges. Les voyageurs à bout et sans
voix portaient d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri. Le chauffeur
ralentissait devant les trous, freinait et repartait pour stopper à nouveau quelques mètres
plus loin. Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie !
Il était insupportable de plonger son regard dans ces gouffres menaçants !
2. Poser les questions suivantes à l'élève dans cet ordre, sans jamais utiliser de
métalangage et sans jamais lui indiquer si ses graphies sont bonnes ou mauvaises :
A. Phonogrammes
1. Si l'élève a bien écrit compagnon, lui demander pourquoi il a écrit
différemment le premier [5]: de com et le deuxième [5]: gnon.
Si l'élève n'a pas fait la différence entre les deux graphèmes, lui demander s'il est
certain de son orthographe et pourquoi il a écrit le mot de cette façon.
2. À propos de nerveusement et de menaçant, demander à l'élève qui a bien
orthographié de justifier les deux graphies de [â] (-ont et de -ent). À l'élève qui
n'a pas bien fait cette distinction, lui demander s'il est certain de son orthographe
et pourquoi il a écrit les deux mots de cette façon.
B. Les morphogrammes grammaticaux
3. (Sujet-verbe) Demander à l'élève d'expliquer pourquoi il a écrit de cette façon
mordaient dans la phrase Les roues de la Toyota mordaient la route... et
187
bordaient dans la phrase Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices
qui bordaient la route !
4. (Adjectif épithète) Demander à l'élève pourquoi il a écrit nue de cette façon
dans la première phrase. Même question pour abruptes dans la 3e phrase La
voiture faisait des bruits monstrueux en gravissant les montées abruptes.
5. (Participe passé avec être) Demander à l'élève pourquoi il a écrit basculés de
cette façon dans la 4e phrase Mes compagnons et moi étions basculés à gauche ,
puis à droite.
6. (Distinction infinitif-participe) : Demander à Félèves pourquoi il a écrit
réprimer de cette façon dans la 5e phrase Les voyageurs à bout et sans voix
portaient d'instinct la main à la bouche, comme pour réprimer un cri.
C. Les morphogrammes lexicaux
7. (Famille lexicale) Demander à l'élève pourquoi il a écrit instinct de cette façon
dans la 5e phrase Les voyageurs à bout et sans voix portaient d'instinct la main à
la bouche, comme pour réprimer un cri et s'il est certain de son orthographe.
8. (Connaissance des affixes) Demander à l'élève pourquoi il a écrit [s] de'cette
façon dans insupportable de la dernière phrase 77 était insupportable de plonger
son regard dans ces gouffres menaçants.
D. Les logogrammes
9. Demander à l'élève pourquoi il a écrit voix de cette façon dans la 5e phrase Les
voyageurs à bout et sans voix portaient d'instinct la main à la bouche, comme
pour réprimer un cri. Et pourquoi il a écrit voie de cette façon dans la 7e phrase
Quelle peur de regarder les fonds noirs des précipices qui bordaient la voie !
10. Même question pour boue dans la 3 e phrase La voiture faisait des bruits
monstrueux en gravissant dans la boue les montées abruptes. Même question
pour bout dans Les voyageurs à bout et sans voix...
188
Annexe 2 : Deux exemples de dictée corrigée
Premier exemple : copie d'un élève de 6e
Deuxième exemple : copie d'un élève de 3e
189
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Annexe 3 : Deux exemples de verbatim complet
Premier exemple : verbatim réalisé avec un élève de 6e
Deuxième exemple : verbatim réalisé avec un élève de 3e
192
Premier exemple
45.G.6. f -LNLM
12 ans.
C : Est-ce que tu te trouves fort ou faible en orthographe?
E : Je suis faible.
C : Pourquoi?
E : Parce que ce n'est pas ma matière.
C : Ah oui! Quelle est alors ta matière?
E : Les maths.
C : Trouves-tu l'orthographe française facile ou difficile?
E : Oui, c'est difficile.
C : Pourquoi?
E : Euh...comme ça...
C : Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est rédigé le plus correctement possible?
E : Je relis mon texte.
C : Que fais-tu si tu as un problème en orthographe pendant que tu rédiges?
E : J'écris d'abord le mot et je reviens sur ça à la fin de la dictée.
C : Que trouves-tu facile en orthographe?
E : Rien. Tout est difficile.
Nous allons le vérifier avec le texte de dictée de tantôt.
193
A. Les phonogrammes
C : Prenons le mot compagnons. Nous avons le son [5] à deux niveaux dans ce mot.
Pourquoi l'écris-tu différemment? (L'élève a écrit compagnions).
Ce qui m'intéresse surtout c'est la manière dont tu écris le son [5] à ces deux endroits (-
comp et -gnon). Pourquoi [5] est-il écrit différemment?
E : (Longue hésitation).. .Parce que c'est comme ça que ça s'écrit.
C : Passons à nerveusement et menaçants. Nous avons le son [a] dans ces deux mots.
Pourquoi ce son [a] est écrit différemment?
E : Longue hésitation...
C : Quelle est la nature de nerveusement?
E : Long silence...
C : Quelle est la nature de menaçants?
E : Aucune réponse.
(Les deux mots sont bien écrits mais menaçant n'est pas accordé)
B. Les morphogrammes grammaticaux
C : Regardons mordaient et bordaient. Pourquoi écris-tu ces deux mots de cette façon?
(L'élève a écrit mordait et bordait).
E : J'écris mordait ainsi parce qu'il s'accorde avec Toyota. C'est la Toyota qui mordait.
C : Et bordait, pourquoi l'écris-tu avec ait?
E : Euh...aucune réponse.
C : Passons au mot nue. Pourquoi l'écris-tu ainsi?
E : Bein...il s'accorde avec tantôt.
C : Es-tu certain de son orthographe (l'orthographe de nue)?
(Nue est bien accordé).
E:Oui.
194
C : Passons à basculés. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?
E : Hésitation...
C : Qui sont basculés?
E : Mes compagnons...
C : Alors, est-ce bien écrit?
E : Non.
C : Pourquoi?
E : Il fallait mettre r à la fin.
(L'élève a écrit basculée).
C : Prenons le mot réprimer. (L'élève a écrit déprimer). Que veut dire déprimer?
E : Aucune réponse.
C : Pourquoi as-tu mis déprimer au lieu de réprimer?
E : C'est ce que j 'ai entendu.
C : Passons au mot abruptes. Es-tu certain de l'orthographe de ce mot? (L'élève a écrit
abrupte mais sans s).
E : Oui.
C : Qu'est-ce qui est abruptes?
E : Les montées.
C : Alors, pourquoi écris-tu abrupte sans 5?
E : Aucune réponse.
C. Les morphogrammes lexicaux
C : Prenons le titre de la dictée, une route périlleuse. Pourquoi écris-tu le mot périlleux de
cette façon? (L'élève a écrit périeusé).
E : J'ai écrit comme j 'ai entendu.
C : Quel est le radical de ce mot?
E : Je ne sais pas.
195
C : Regardons le mot cri. (L'élève a écrit crie). Pourquoi l'écris-tu ainsi?
E : Parce que ce mot vient du mot crier.
C : Passons à instinct. (L'élève a écrit destin). Pourquoi écris-tu destin au lieu d'instinct
(de instinct).
E : Je ne pouvais pas savoir que c'était avec l'apostrophe. Moi, j 'ai pensé au mot destin.
C : Et le sens? Et le contexte? Les deux mots ont-ils le même sens?
E : Non.
C : Regardons le mot passage. Pourquoi l'écris-tu de cette façon? (L'élève a écrit
pasage).
E : C'est par rapport à la prononciation du prof. J'écris ce que ce que je comprends.
C : Prenons tantôt. Pourquoi l'écris-tu de cette façon? (L'élève a écrit tanto).
E : Parce que c'est comme ça que ça se prononce.
C : Passons aii mot insupportable. Comment est formé ce mot? (L'élève a écrit
insuportable).
E : Il est formé d'un préfixe insuppor et du radical table.
D. Les logogrammes
C : Prenons vote et voie. (L'élève a écrit sans voir au lieu de sans voix). Pourquoi écris-tu
voir à la place de voix?
E : Je n'ai pas bien compris.
C : Passons à boue et bout. Pourquoi les écris-tu de cette façon? Es-tu certain de
l'orthographe de ces mots? (L'élève a écrit la bout et about).
E : Non, Mr.
C : Pourquoi les écris-tu de cette façon?
196
E : J'écris comme je connais.
Fin de l'entretien.
Remarque : Même si cet élève déclare des stratégies pertinentes (laisser un espace pour
revenir après, relire le texte plusieurs fois), il reconnaît que son niveau est fragile en
orthographe et l'explique par le manque d'intérêt accordé à cette matière. 58 erreurs
d'orthographe ont été relevées sur sa copie : 26 erreurs morphogrammiques (avec 21
erreurs grammaticales et 5 erreurs lexicales), 15 erreurs phonétiques, 15 erreurs
phonogrammiques, 1 erreur idéogrammique et 1 erreur logogrammique.
197
Deuxième exemple de verbatim
1. F. 3. F-L.POG 17 ans
C : Est-ce que tu te trouves bonne ou faible en orthographe?
E : J'essaie de tenir.
C : C'est-à-dire?
E : Euh...je me trouve quand même bonne.
C : Pourquoi?
E : Parce que j 'ai d'abord de bonnes moyennes...Et puis, parce que j'adore le français.
Donc, je fais tout pour avoir de bonnes notes en orthographe.
C : Est-ce que tu trouves l'orthographe française facile ou difficile?
E : Ce n'est pas du tout difficile pour celui qui connaît ses règles d'orthographe et de
grammaire. Et puis, il faut surtout beaucoup lire pour maîtriser les règles et l'orthographe
des mots qui existent, comme c'est ce qui cause beaucoup de problèmes.
C : Est-ce que tu maîtrises ces règles?
E : Non. Juste un peu, pas toutes.
C : Pourquoi?
E : Parce que je suis pas très portée sur la lecture. La plupart du temps, je ne lis que
quand on me donne un livre à lire ou alors si je m'ennuie, je prends un livre et je lis.
C : Que fais-tu pour t'assurer que ton texte est écrit le plus correctement possible?
E : Euh...je n'ai pas une manière particulière ...euh...j'essaie de voir mes accords...
C : Que fais-tu si tu as un problème d'orthographe?
E : J'essaie de surveiller mes accords pendant que j'écris et après, je me relis pour
surveiller la logique de la phrase.
198
C : Que trouves-tu facile en orthographe?
E : Les accords des participes passés.
C : Que trouves-tu difficile en orthographe?
E : Ce sont des mots, certains mots ne s'écrivent pas comme on prononce. Ces mots-là
trompent. On pense que c'est comme on a prononcé, alors que c'est pas ça.
C : As-tu un exemple de ce genre de mots?
E : Euh.. .non pas en tête.
C : Prenons le texte que nous venons d'avoir en dictée.
A. Les phonogrammes
C : Intéressons-nous d'abord au mot compagnons. Es-tu certaine de son orthographe?
(L'élève a écrit compagnants).
E : Non. Je peux dire que c'est l'un des mots qui me trompent. Quand on dicte le mot
compagnon, on peut penser qu'il y a ant, alors qu'on dit compagnon, donc on.
C : Ok, un autre aspect c'est que dans ce mot, il y a le son [5] à deux niveaux. Pourquoi
l'écris-tu différemment?
E : Bein.. .là j'applique la règle qui dit que n devant/? devient m.
C : Passons à nerveusement et menaçants. On a le son [a] dans ces deux mots. Pourquoi
les écris-tu de manière différente?
E : Pour écrire nerveusement, je me base sur le fait que le mot a déjà son radical...
C : Quel est ce radical?
E : nerveux, nerveuse. Puis après je cherche à mettre le suffixe en rapport avec le mot lui-
même. Ce suffixe c'est ment. C'est pourquoi ça fait nerveusement.
C : Alors, quelle est la nature de ce mot?
E : C'est un adjectif qualificatif.
199
C : Et menaçant?
E : menaçant est un adverbe.
C : Es-tu certain de ce que tu dis?
E : Oui, bon. Je suis pas très bonne en orthographe.
C : Pourquoi l'écris-tu avec an au lieu de en par exemple?
E : c'est parce qu'il y a c cédille.
B. Les morphogrammes grammaticaux
C : Ok. Prenons d'abord le mot voiture. Pourquoi l'écris-tu avec s à la fin? (L'élève a
écrit la voitures).
E : (sourire...) en fait, je suis distraite de nature. Et puis, je n'ai même pas relu ma dictée.
C : Ok, si tu avais relu ton texte, comment tu l'aurais écrit?
E : En fait, il n'y a pas d's.
C : Prenons mordaient et bordaient. Pourquoi les écris-tu ainsi? Es-tu certaine de leur
orthographe?
E : Oui, j ' en suis certaine.
C : Pourquoi les écris-tu de cette façon?
E : Ici, on dit les roues de la Toyota mordaient...je pose la question qu'est-ce qui
mordaient? Réponse : les roues. Donc mordaient s'accorde avec les roues.
De même, je pose la question qu 'est-ce qui bordaient la voie? Réponse : ce sont des
fonds noirs; donc, bordaient s'accorde avec les fonds noirs.
C : Prenons le mot nue. Comment justifies-tu son orthographe? Pourquoi l'écris-tu de
cette manière?
E : nue s'accorde avec la route.
C : Pourquoi?
E : Parce que nue ici est un adjectif qualificatif.
C : Passons au mot abruptes. Es-tu certaine de son orthographe?
200
E :Non...
C : Pourquoi?
E : Parce que j 'ai d'abord mis a préposition; après, j 'ai effacé. En fait, je ne connais pas
ce mot. Je l'entends rarement, j'avoue.
C : As-tu une idée du sens de ce mot?
E : Euh...on peut dire une voie cabossée, bosselée, dangereuse, selon le contexte.
C : Passons à basculés. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?
E : Parce qu'il s'accorde avec nous.
C : Pourquoi s'accorde - t-il avec nous justement?
E : C'est un verbe conjugué...euh...un participe passé employé avec l'auxiliaire être. Il
s'accorde alors avec son sujet.
C : Lequel?
E : mes compagnons et moi...sujet pluriel.
C : Passons au mot réprimer. Pourquoi l'écris-tu de cette façon?
E : C'est parce que le verbe est précédé de la préposition pour. Donc, il se met à
l'infinitif.
C. Les morphogrammes lexicaux
C : Regardons le mot instinct. Es-tu certaine de son orthographe?
E : Oui.
C : As-tu déjà rencontré ce mot au cours de tes lectures?
E : Oui.
C : Peux-tu me donner un autre mot de la même famille qu'instinct?
E : Inceste... euh... instinctivement.
C:Ok.
C : Passons à insupportable. Es-tu certaine de son orthographe?
E : Oui.
201
C : Pourquoi l'écris-tu de cette façon? De quoi est-il formé?
E : Ce mot est formé d'un radical support^ du préfixe in et du suffixe able.
D. Les logogrammes
C : Passons à voix et voie. Pourquoi écris-tu ces deux mots de manière différente?
E : On peut d'abord dire que ces deux mots sont des homonymes. Le premier mot, il
s'agit du timbre vocal; il s'écrit v-o-i-x. Le deuxième mot, c'est la route; lui, il s'écrit
v-o-i-e.
C : Passons à boue et bout. Pourquoi les écris-tu de manière différente?
E : Je les écris différemment parce qu'il y a une différence entre eux. La différence qu'il
y a c'est que la boue c'est la terre mélangée avec de l'eau; il s'écrit b-o-u-e et c'est un
GN.
Alors que à bout est un GNP et signifie fatigué, dépassé; ça s'écrit avec à (préposition) b-
o-u-t.
Fin de l'entretien
Remarques : Cette élève associe lecture et orthographe. Elle a une bonne connaissance
grammaticale, de bonnes stratégies pour éviter des erreurs d'orthographe. Mais ses
explications sont chancelantes. Par exemple quand, elle justifie l'usage dés sons an et en
par la présence de c cédille.
On remarque également qu'elle établit mal la relation entre le nom et le déterminant (la
voitures). On constate, enfin, qu'elle a des problèmes de discrimination phonologique.
Au regard des erreurs d'orthographe qu'elle a commises en dictée (7), elles se
répartissent de la manière suivante : 4 erreurs morphogrammiques essentiellement
grammaticales, 2 erreurs phonogrammiques et 1 erreur phonétique.
202
Annexe 4 : Documents officiels
1. Lettre d'approbation du comité d'éthique de l'Université Laval
2. Lettre du Vice-doyen de la Facultés des Sciences de l'Éducation de l'Université Laval au Secrétaire Général du ministère de l'Éducation nationale du Gabon
3. Lettre du Secrétaire Général du ministère de l'Éducation nationale du Gabon au Vice-doyen de la Faculté des Sciences de l'Éducation de l'Université Laval
4. Autorisation d'accès dans les établissements scolaires du Gabon
203
UNIVERSITÉ
LAVAL VV^-f^ctorit t U rfcb-nC** *t I U Comrt/ HHMHPHI éi b nÉH-B
Québec, le 26 février 2008
! Monsieur Alphonse-Donald' Nze-Wagbe Monsieur Claude Simard 2096, boul. René-Lévesque Ouest Québec (Québec) G1V2K9
Objet: Projet <de recherche intitulé : Les erreurs d'orthographe dans les productions écrites des élèves du premier cycle du secondaire du Gabon (Numéro d'approbation : 2008-027)
Monsieur, /• . — """• ' . ' • . • • • ; •'-.' -SU '. ïfi¥ï} ■■■■. : . '
Le Comité d'éthique de. la recherche en psychologte'eien scieBèèsde fléë-ieatron a pris connaissance du projet cité en objet ainsi que dc votre réponse à sa correspondance du 20 février 2008 pour laquelle il vous remercie. Le Comité considère que les. précisions apportées et les modifications effectuées au formulaire de consentement satisfont à ses demandes. Par conséquent, le Comité approuve ledit projet pour une période d'un an, soit jusqu'au l " m a r a 2009.
Toutefois, si les entrevues se déroulaient dans un local distinct, le Comité vous demande d'indiquer cette information sur le formulaire de consentement. Il est important de retourner au Comité la version finale du formulaire dé consentement mentionnant le numéro d'approbation (2008-027) suivi de la date d'approbation qui est celle de la présente lettre, faute de quoi le projet pourrait sembler ne pas avoir été approuvé par le Comité.
Le Comité d'éthique devra être informé et devra réévaluer ce projet advenant toute modification ou l'obtention de toute nouvelle information qui surviendrait à une date ultérieure à celle de la présente approbation et qui comporterait des changements dans le choix des sujets, dans la manière d'obtenir leur consentement ou dans les risques encourus; De plus, le Comité doit être avisé si le projet de recherche est interrompu pour une raison quelconque, qu'il soit financé ou non, y compris en raison de la suspension ou de l'annulation d'approbation d'un organisme subventionnaire.
Le projet devra être réévalué un an i partir de cette date d'approbation, te chercheur indiquant brièvement l'évolution et le déroulement de sa recherche, le nombre de participant, recrutés et si le projet se déroule comme prévu. Un formulaire de demande de renouvellement est disponible sur lé site Internet du Comité à l'adresse suivante : http://www.cerul.ulaval.ca.
Veuillez agréer, Monsieur, l'expression de nos sentiments les meilleurs. y - .
Armelle Spain, présidente Comité d'éthique de la recherche en psychologie et en sciences de l'éducation Maison MchaeNJohn-Brofjhy 418 656-213lrposte 4506 2241. chemin Siinte-foy Télécopieur : 418 656-2840 Quebec M M 01V 0*6 c e f e v t r . i i - . w _ c _ . . «NAD* www cerul-tarai ca
204
mom UNIVERSITE m l LAVAL
Faculté des sciences de l'éducation Vice-decanal aux études supérieures, à la recherche età la formation continue
Québec, le 20 novembre 2007
Monsieur Le Secrétaire Général ' y . DU Ministère de l'Éducation nationale De rinstnicjtion civique Et de l'Éducatiorvpopulaire du Gabon
Objet : Cueillette des données
Monsieur |é Secrétaire Général,
La présente est.pour vous demander d'autoriser une cueillette des données dans différents lycées et collèges de votre pays par Monsieur Alphonse-Donald NZE-WÂGHE en vue de la réalisation de son projet de thèse de doctorat à l'Université Laval. Ce dernier désire travailler sur les erreurs d'orthographe dans des productions écrites des élèves. Cette recherche nécessite des enquêtes dans la période de février-mars auprès des acteurs concernés, à savoir ; les élèves et les enseignants du cycle secondaire."
>• L'autorisation sollicitée est exigée par l'Université Laval et le Programme canadien de bourses de la Francophonie (PÇBF) qui veulent s'assurer que les autorités compétentes dans le pays d'origine du candidat apportent les appuis nécessaires à ia réalisation dé son projet de recherche. -" ' V - . . ' \
Lé candidat devra également s'assurer d'obtenir les autorisations rrôcessaires du Comté d'éthique de l'Université Laval. " . ' .
Veuillez agréer, Monsieur le Secrétaire Général, l'expression de ma considération distinguée. . ' - - . . ' •
èrV Pierre Page Vice-doyen aux études supérieures, à la recherche et à la formation continue
PP/nc i i
Pavillon des Sciences de l'éducation Local 234 .
- -ûébec (Québec) 61I.7P4 CANADA
418 656-2131, poste 3421 Télécopieur: 418556-73.7 Rera.Rage@fse.tdaval.ca www.fse.u1aval.ca
205
Ministère de l'Éducation Nationale, de l'Instruction civique, ■.".. chargé de l'Éducation populaire
REPUBLIQUE GABONAISE Union -Travail- Justice
SECRÉTARIAT GÉNÉRAL
NO 5 0 4 0 MENICEP Libreville/le 0 6.DEC. 2007
Objet : Cueillette des données de Alphonse-Donald NZE-WAGHE au Gabon
Le Secrétariat Général
Monsieur Pierre Page Vice doyen à la recherche
et aux études de 2e et 3e cycles Université Laval Québec- Canada
Monsieur le Vice doyen,
J'ai l'honneur d'accuser réception de votre correspondance dû 20 novembre 2007 relative à la collecte des données de Monsieur Alrjhonse-Donald NZE-WAGHE, candidat au doctorat en didactique du français, activité prévue à partir du mois de février 2007.
En conséquence, c'est avec grand plaisir que nous allons accueillir Monsieur NZE-WAGHE et mettrons à sa disposition, dans la mesure de nos moyens, ce dont il aura besoin pour mener à bien sa cueillette des données.
Veuillez agréer, Monsieur le Vice doyen, l'expression de ma considération distinguée.
Sidoine MBOUNAVS
206
MINISTERE DE L'EDUCATION NATIONALE. ET Œ L'INSTRUCTION CIVIQUE
REPUBLIQUE GABONAISE UNION-TRAVAIL^USTrCE
SECRETARIAT GENERAL
DIRECTION GENERALE DES ENSEIGNEMENTS ETDELAPEOAGOGIE
DIRECTICf. DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE GENERAL
N_4_3 /MENIC/SG/DGEP/DE2
AUTORISATION D'ACCES
Je soussigné, Directeur dès Enseignements du Second Degré Général, autorise Monsieur Alphonse-Donald NZE-WAGHE, candidat au doctorat en didactique du français à .'Université Laval Québec, à procéder, dans le cadre de ses recherches, à la collecte des données au sein des établissements cie Libreville et des provinces qu'il aura ciblés. ',."
Eh fot cie quoi, la présente autorisation est établie, sans rature ni surcharge, pour servir et valoir ce que de droit. . • ■ . ■ %. '
Fait à Libreville, le 04/4/08
Gabriel NANG MINTSA ii
i 1
Copies: - SG
} ATCR - DGEP
207
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