le discours de la mémoire
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7/23/2019 Le Discours de La Mémoire
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Le discours de la mémoireAuthor(s): François Jacquet-Francillon
Source: Revue française de pédagogie, No. 165, L'éducation et les politiques de la mémoire ( OCTOBRE-NOVEMBRE-DÉCEMBRE 2008), pp. 5-15Published by: Ecole normale supérieure de lyonStable URL: http://www.jstor.org/stable/41202422Accessed: 14-08-2015 08:10 UTC
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7/23/2019 Le Discours de La Mémoire
http://slidepdf.com/reader/full/le-discours-de-la-memoire 2/12
^M
Le
discours de la
mémoire
WÊÊÊÊ
François
Jacquet-Francillo
questionnons
nouveau ci es
évolutions
e
la
culture colaire.
l
'agit
cettefoisde saisir es
motifs t
les effets observables u
escomptés
-
de
ces récits u
passé
collectif
ue
l'école a commencé
d'intégrer
ous l'intitulé
e
la
«
mémoire
.
De tels
récits
partagent
vec
ceux de
l'histoire,
ussi bien
l'histoire colaire
que
l'histoire
avante,
une ambi-
tionde vérité u mieux de véridicité
et c'est
pour-
quoi
ils ouvrent ans les
programmes
es
rubriques
originales.
Mais es
deux sortesde récits
ivergent
plusieurs
titres.
remièrement,
andis
ue
les récits e
l'histoire
honorentne
xigence
ationnelle
our
arantir
'objec-
tivité es faits
t des événements
ce qui
ne va
pas
sans
discussions,
récurrentes
epuis
le
xixe
iècle,
sur
a
définitiont les limites
e cette
objectivité1)),
les récits
e la mémoire e
déploient
ans la
sphère
du sentiment
our
tteindrea
subjectivité
es
expé-
riences t des
épreuves.
Cette
divergence
st souvent
commentée
ar
es historiens
orsqu'ils
e consacrent
à la défense et illustratione leur
discipline,
nten-
due commeune
spécialité ritique2).
Secondement,
tandis
ue
l'histoire
e
choisit
as
entre es
gloires
t
les hontes,es victoires t les défaites, tqu'elle peutmêmedélaisser les unes et les autres
pour
traiter
des séries de données
-
quantifiées
u besoin
,
la
mémoireemble
préférer
eversant uneste u
passé
collectif les crimes
génocidaires
des États totali-
taires,
es
guerres
oloniales des nationsdémocrati-
ques,
la
répression
militaire
t
policière
es
régimes
de
dictatures,
tc. Certes le recueil
mémoriel,
tile
pour
combler
es
oublis ou les lacunes de
l'histoire,
se tourne ussi vers
es
folklores,
es
patrimoines,
es
traditions
illageoises
u
corporatives,
n un mot es
cultures
opulaires
et
on a
vu
ces derniers
emps
fleurir ans nos
provinces
e modestes musées où
l'on ne nous
épargne
pas
les socs de
charrues,
es
vieux ivres e classe et les robes des mariées
pay-
sannes. Mais la mémoiremontre lusvolontiers ne
attirance
our
es
grandes atastrophes
umaines u
xxe
iècle.
Ces deux
propriétés
e
répondent
le récitde la
mémoire st sentimental t
subjectiviste
ès
qu'il
déroule e
tragique,
a misèredu
peuple
et des hum-
bles
;
le récit
historique
st rationnel t
objectiviste
parce qu'il
dessine soit l'aventuredes
puissants
(dans
la versionTroisième
République),
oit le des-
tin
des sociétés et des civilisations
dans
la version
moderne t
savante).
C'est le récitde
la
destruction es
Juifs
ar
les
nazis qui a imposé depuis deux ou troisdécenniesce vocable de la « mémoire, en
reléguant
elui du
«
souvenir
,
qui portait
usqu'alors
a
charge
du deuil
et de la
dette envers es mortsdes
guerres
précé-
dentes
3).
Ce récit st
élaboré
dès
que
commence
Revue
française
e
pédagogie
|
165
|
octobre-novembre-décembre008 5-15
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le recueil es
traces,
la fin e
la dernière
uerre,
t
mêmeun
peu
avant i l'on retienta date de
création
du Centre e documentation
uive ontemporaine
ar
Isaac Schneersohn n avril
943,
à Grenoble
4).
Mais
la
présence
de ce récit ient ussi à ce
qu'il
a resti-
tué a
singularité
rréductiblee l'événement. 'abord
ilnous a
plongés
moinsdans la
guerre
ue
dans
le
protocoled'un meurtre e masse et, qui plus est,
unmeurtre
ue
son immensité endnon
pas
impen-
sable mais incommensurable
précisons
le
meur-
trede masse est tout fait
pensable puisqu'il
été
réfléchi, édité,
t
peut-être
mêmedécidé avec
oie,
comme
'imagine
mreKertész n relatanton
arrivée
à Auschwitz
5)).
Ensuite,
l
nous a
appris
qu'un
tel
crimeretourne t déchaîne les forcesde la civilisa-
tion
ontre a civilisationlle-même l'administration
pourchasse
es
gens
au lieude leur onner es
droits,
la
police
ou d'autres nstancesde
répression
ibèrent
la violence u lieude la contenir
our
ssurer a sécu-
rité,
es médecins
nfligent
a mort u lieu de
préser-
ver a
santé,
tc.
Enfin,
e récit tiréde l'oublides
anonymes,hommes,femmes, nfants t vieillards
innocents
ui
n'eurent 'autre ause à défendre
ue
leurvie si bien
que
leur
martyrologe
'a
pu
s'écrire
que
du
point
e vue de la souffrancet de la détresse
radicales,
ans aucunesorte
d'apothéose
-
religieuse
ou
patriotique.
'où le recours ux témoins t aux
témoignages
our
tteindre la véridicité
xigible
n
pareil
as
(6).
L'importance
ue
la mémoire e la Shoah a
prise
en France
depuis
vingt
ou trente ns
s'explique
en outre
par
des raisons de
conjoncture.
Dans
les années soixante-dixcommence le lent retrait
simultanédes cultures
politiques
du
gaullisme
et
du communisme ui, en célébrant eurs contribu-
tions à la lutte ontre
'occupant
allemand,
vaient
repoussé
dans les
marges
honteuses
de l'histoire
le sort des victimes
Juifs
t
Tsiganes
principale-
ment)
t les modalitésde leurmalheur. es
mêmes
années,
entrent ans
l'âge
adulte
les enfants
ui,
nés
après
la
guerre,
e
peuvent
n connaître
ue
ce
qu'on
a voulu eur n
dire,
y
compris
dans le cadre
scolaire.
Et
c'est
au même
moment,
ans doute
pas par
hasard,
qu'apparaissent
les
premières
al-
sifications
négationnistes,
'autant
plus
odieuses
que
la dissimulation u crime vait été
tentée
par
les criminels.C'est
donc bien dans ce contexte
que
s'affirmea
volonté
d'exposer
à nouveaux
frais
toute cette histoire, ans l'embellir 'aucun mythe
triomphateur,
t
pour
la défendre
peut-être
ontre
l'oubli mais sûrement
ontre es
suspicions
falla-
cieuses
:
autreraison
de solliciter es témoins t les
témoignages.
HISTOIRE,MÉMOIRES,
DENTITÉS
L'affairee
complique
la
fin
du
xxe
iècle
parce
que
les récitsde la mémoire e
diversifient,
e mul-
tiplient
t
parfois
e concurrencent. es
guerres
de
décolonisation,
t celle
d'Algérie
avant
tout,
ont
engendré ssez de dramespour que les personnes
concernées veuillentes
rappeler
la
sensibilité ol-
lective,
compris
n ranimant'anciens
griefs
nvers
l'État
français.
Alors l'histoire
colaire,
construite
dans le but de transmettrene
image
cohérente t
partagée
de la Nation
7) (quoique
l'école
des Anna-
les,
depuis
les années
trente,
it aussi déstabilisé e
récitd'histoire ollective n s'intéressantmoins la
Nation
u'au peuple
et à la
société,
voire ux struc-
tures
matérielles, ulturelles,mentales,
tc.),
est à
son tour traversée
par
des demandes de mémoire
divergentes,
manées
de communautés
ui
ont
été
meurtries ans
le
passé, séparées
de leurs
origines
(de
leurs
racines
), privées
e leurs déaux.
Ceux qui portent es mémoiresveulent afficher
leur
singularité,
ertes mais
pas n'importe
ù
:
là où se
publient
t se diffusent
ous les récits du
passé,
dans les
universités,
es
académies,
les
médias et
les établissements
d'enseignement.
La
demande mémorielle
raduitdonc une demande
de
reconnaissance,
qui passe
elle-même
par
un
besoin de
visibilité ans
l'espace public, grâce
à
quoi chaque
groupe
peut
démontrer a nécessité
de son
existence
parmi
es autres. C'est ainsi
que
des
populations
u
des minorités
pprimées,
omi-
nées et
rejetées minorités
thniques,
égionales
u
sociales),
pensent
obtenir e
respect
de leur
dignité
grâce
au
statut
qu'on
accorderait
à leur
culture,
leurreligion,eur angue, tc.,dans uneperspective
pluri-
u
multiculturelle,
ébouchant
peut-être
ur
une
politique
e
«
discrimination
ositive
(affirma-
tive ction
8)).
D'aucuns redoutent
ue
ces démarches onfortent
l'égoïsme
des
groupes
fermés
ui privilégient
eurs
traditions
t leurs
sociabilités,
qui protègent
eurs
frontièrest demeurentndifférentes
l'intérêt
éné-
ral.Ce
«
communautarisme
recèlerait
ne tendance
agonistique
n distillant
es sentiments on
pas
tant
d'amourde soi
que
d'hostilité
ux autres. Crainte
sans doute
fondée si les mémoires
ont
captives
des
fanatismes,
vant tout
es
intégrismes eligieux,
parfois ssociés
aux
grands
nationalismes
omme
aux
petites uerelles
de clocher ou de quartier et
crainte
'autant
lus
vive
que
la
doctrine
épublicaine
tentait
e nous en
prémunir
n instaurant
'égalité
es
citoyens.
6 Revue
française
e
pédagogie |
165
|
octobre-novembre-décembre
008
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Mais
justement,
a définitiont la
pratique
de la
citoyenneté
nt
changé
et,
en
changeant,
lles ont
sinon
encouragé
du moinsfacilité es
processus
de
différenciation
ymbolique.
Étaient en
effet nsti-
tués
citoyens
es
individus
uxquels
on
octroyait
es
mêmes
droits,
es
droits-libertés,
n vertu
e leurs
qualités
humaines
énériques
facultés
ntellectuelles
etmorales, tc.), ans teniromptedes rôles ociaux,
des
«
enracinements
dans une
histoire,
ne
culture,
une mémoire. n déclarait es droits
t on
exigeait
des devoirs
n
contrepartie,
ais en faisant bstrac-
tiondes identités
articulières.
r,
'est
imposée
de
nos
ours
une
autre
notion,
ont
peut
rendre
ompte
l'expression
e
«
citoyenneté
ociale
(9)
»
(on parle
dans le même ens d'« attitude
itoyenne
,
de
«
lutte
citoyenne
,
etc.).
Le
citoyen
st désormais elui
qui
détient u
attend e bénéfice de droits ociaux et
culturels,
roits-créancesette
fois,
ui
le
distinguent
des autres ndividus
arce que
les uns et es autres
ne
sont
plus
aisis à
partir
e
qualités
génériques
mais
à
partir
e
qualités pécifiques,
ociales et
culturelles,
positivesmais aussi négatives, ui caractérisentes
groupes
auxquels
ces individus e disent
apparte-
nir
u en fonction
esquels
ils affirmentne identité.
Exemples
les
personnesporteuses
de
tel choix de
vie,
les
gens
de telle
provenance,
mais aussi ceux
frappés ar
telledéfaveur
u tel
ostracisme,
tc.
C'est l'additiondes droits-créances ux droits-
libertés
ui
transformee
paysage
politique
t social.
Et si les
droits-créances
nt
voix au
chapitre
e la
citoyenneté,
'est
parce qu'ils
sont validés
par
ce
développement
modernede l'État
qu'est
l'État
pro-
vidence,
equel
n'entretient
lus
les mêmes
rapports
avec la société. La différencentre a
citoyenneté
classique et la citoyennetéociale de ce pointde
vue,
c'est la différence ntre une collectivité
ni-
fiée dans
l'espace public
de
l'État,
t
une
autre,
ui
s'accommode de la diversité ans
l'espace public
de la société civile. Autrement
it,
la
citoyenneté
classique
instaure
'égalité
des
individus,
lors
que
la
citoyenneté
ociale défend
l'équité
généralisée
entre es
catégories 10).
La
première
ngage
une
vision universaliste e l'intérêt
énéral,
seulement
dessiné
par
la cité
politique
la seconde
prépare
a
reconnaissance
particulariste
es intérêts ttachés
aux différents
roupes pour
mettre n œuvre dans
le
champ
social une
ustice
distributive
ui
organise
la coexistence de ces
groupes,
donc,
a
fortiori,
e
leurs dentités. 'État st tout utant
estionnaire
es
populations u'ilse voulait réateur e la Nation et
ce
faisant,
omme e
souligne
D.
Schnapper,
l
«
cris-
tallise les
appartenances 11).
En
fin
de
compte,
la nouvelle
citoyenneté
ntérineune norme
plura-
liste à où
la
citoyenneté
lassique
avait
fait aloir a
normede la
tolérance,
'État étantvoué
à la stricte
neutralité
12).
Si les mémoires t leurs
égendes
ont
surgi
dans
les univers ducatifs
t
culturels,
e
n'est sans doute
pas
en vertu 'une
simple
ndulgence
es
autorités,
que leursscrupulesauraient endues attentivesux
curiosités
mbiantes
pour
le
passé, pour
les
patri-
moines t les vieilles
ierres,
mais à cause
de la com-
binaison
d'espérances
et
d'inquiétudes
ui
montent
de
la société civile et
auxquelles
nos
dirigeants
e
doiventde
répondre
incités
u'ils y
sont,
en
plus,
par
l'industrie
médiatique, ui
cherche
toujours
de
son côté à satisfaire es
auditeurs,
es
spectateurs
et des clients.
Si
telle est la base de
l'enregistrement
t de l'am-
plification
e la
dynamique
mémorielle,
ue
certains
historiens
voquent
comme une
«
tyrannie
,
on ne
doit
pas
s'étonner
que
les mémoires ient trouvé
grâce
auprès
du
législateur
t aient
pu
accéder
à la
protectione la loi,qui les entoure e précautionst
d'interdictions.
uisque
'État onfortees
groupes ui
réclamenta
jouissance
de droits
ociaux et culturels
(même
i,
en
France,
es droits e sont
pas
accordés
à des
groupes
mais à des
individus,
ucune
minorité
n'ayant
de statut
égal 13)),
alors,
dans le courant
de cette
bienveillance,
'État s'efforcede
réprimer
les offenses
ue
subissentcertaines
mémoires t la
versiondu
passé
fixée
par
leurs titulaires. 'est
à
quoi
concourentes
«
lois mémorielles
promulguées
depuis peu.
La «loi
Gayssot
du 13
uillet
990
introduite délit de
négationnisme
e
l'extermina-
tiondes Juifs
ar
les nazis la loi du 29
janvier
001
certifiea réalité u
génocide
arménien
erpétré
ar
les Turcs la « loi Taubira du 21 mai2001 qualifie
l'esclavage
comme un
«
crime contre
'humanité
;
la loi du 23 février005 affirme
en faveur es
rapa-
triés
d'Algérie,
e rôle de la
présence française
outre-mer...
Il
est bien évident
ue
ces
dispositions
t l'arsenal
juridique
dont elles se dotent heurtent
es intérêts
scientifiques
es historiens
ui
redoutent
e se voir
imposer
des critères e
pensée,
des notions
bliga-
toires,
une sorte de correction e
langage
visant
déterminera
définition,
'explication
u
l'interpréta-
tionde certains aits.Ces
conséquences,
très
réelles,
ne semblent
pourtant as
avoir attiré 'attention u
législateur, lus occupé
à tenir es
promesses
de la
citoyenneté
ociale. Aujourd'hui,ulne peutdire si
et comment boutira a forte
rotestation
n
cours,
qui
ne
ménage
pas beaucoup
de
compromis mais
tous les historiens
'envisagent
as
l'abrogation
e
Le discours
e la mémoire
7
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toutes les lois
mémorielles).
e fond du
problème
demeure
ependant l'impossibilité
ù nous sommes
de consolider t
d'enseigner
une identité ationale
indistincte.
LE DISCOURS DE LA MÉMOIRE :
PARTICULARISME
ET
UNIVERS
AL
S
M
E
La
mémoire st au
premier
ens une faculté ndivi-
duelle du
recueil t du
rappel
des idées
et des faits
du
passé.
Mais
l
est entendu
ue
cettefaculté
ppar-
tient
galement
ux
groupes
sociaux. Dans ce
cas,
elle est
plus
difficile
expliquer
et c'est d'ailleurs
à
quoi
est consacré le livre
e Maurice
Halbwachs,
La mémoire ollective
1950).
Il
y
a en outre deux
états
presque opposés
de la mémoire ollective si
elle a
pour
ontenu es traditions'une
communauté,
elle
est un
héritage
ui
agit
en silence dans le cours
immuable es choses, sous l'autorité es ancêtres t
des
origines
mais si elle
procède
des
stratégies
t
des décisions identitaires 'un
groupe,
elle devient
pour
ce dernier n savoir
de soi
qui
s'établit ous la
légitimité
e l'actuelet
sépare
le
passé
du
présent
et de l'avenir
ce
qui
en fait
un récit
historique
proprementarler.
Enfermer
'analyse
du
phénomène
mémoriel
ans
cette dualité
de la traditiont de la
modernité erait
cependant
ourir
n
risque
on
prendrait
a
seconde,
la
«
mémoire-histoire
pour
une tentativellusoire e
ressasser ce
qui
est
révolu t
perdu.
En
revanche
n
réserverait la
première,
a
«
vraiemémoire
,
puis
à
ses
rejetons rovisoires,
es
«
lieuxde mémoire de
la Troisième épublique âge de la Nation t d'une
identité
artagée, gravée
dans ses monuments
t
célébrée
par
ses
fêtes
,
une
authentique
ocation
retenirt continuer
e
temps
ollectif
14).
Mais la
mémoire,
urtout a mémoire
évralgique
du
xxe
iècle,
a
acquis
une double
signification
ultu-
relle. Comme
indiqué
à
l'instant,
ette conscience
douloureuse u
passé
soutient contrario es
fins t
des idéaux
donc des
espérances
face à l'avenir.
n
conséquence,
elle
procure
ux
groupes
t aux
indivi-
dus une
aptitude
juger
d'eux-mêmes t des autres
-
sur e
plan éthique,politique,
tc.
Élaborer t
légi-
timer es
normesd'existencevalables
pour
e futur
procheou lointain,oilà ce que promete discoursde la mémoire
uand s'y
déposent
es
grands
désas-
treshumains. e
discours
répond
insi
à une condi-
tion
de la modernité
émocratique que
les normes
soient
non
pas
transmises
ar
autorité u
coutume,
mais énoncées dans la discussion et la
critique,
admises et diffusées ur a base
de la libre onviction
individuelle.
Si le
«
devoirde mémoire est un énoncé
typique
dans ce discours
normatif,
'est
que
son contenu
remplit
es deux fonctions xactement
il
fournites
critères e hiérarchisationes époques et des évé-
nements,
depuis
les
plus
terribles
usqu'aux plus
radieux,
t
il
délivre es
principes our
évaluer es
états,
satisfaisants u
insatisfaisants,
e la
société,
de la civilisationt de l'humanité.
Si
on constate
que
le discours de la mémoire
confère
un
pouvoir
de
jugement,
n doit du même
coup
observer eci. D'un côté
il
libère es tendan-
ces
particularistes
voquées plus
haut,
défendre
une
culture,
ne
religion,
ne
langue,
t toutes sor-
tes de
singularités
ans cet univers e
coexistence
des
singularités
ui
engendre,
it-on,
e véritables
«
guerres
e
mémoires
15)
».
D'un autre
ôté,
cepen-
dant,
l recèle des
potentialités
niversalistest
ce,
de façon apparemment aradoxale,au profit e la
visée concrètede la
citoyenneté
ociale
plus que
de
la visée
abstraite e la
citoyenneté
olitique.
ar dans
ce
cas,
ilcontribue la recherche on
pas
de l'inté-
rêt
général
u sens strictmais d'un bien
commun,
n
modus vivendi
our
es
groupes
humains.
t
puisque
en outre
e modus vivendi
rocède
d'une
expérience
historique,aquelle
ient n l'occurrence ux meurtres
de masse
de la seconde
guerre
mondiale,
otamment
la destruction
es
Juifs,
n
comprendra ue
les ten-
dances universalistes u discours de
la mémoire e
soient d'abord
incarnéesdans l'actionde la
justice
pénale
internationale.'est dans
ce cadre en
effet,
à
partir
e
1945,
qu'ont
été énoncées et
appliquées
des normesderechef ffectées 'une validité niver-
selle,
donc adressées
à tous les
peuples,
toutes es
nations
t, au-delà,
à tous
les
âges
de l'histoire
as-
sée et future. es
normes nt té rendues ensibles i
l'on
peut
dire,
travers
es
catégories
u
«
génocide
»
et du
«
crime ontre 'humanité
.
La
naissance d'une
justice pénale
internationale,
processus ongtemps
ésitant,
alentit
empêché par
la
guerre
froide,
emonte u tribunalmilitairenter-
national
nstitué n
1945
par
les
puissances
alliées
afinde
juger
es
dignitaires
azis
(décret
de Londres
du 8
août),
et au tribunalnternational
our
'extrême
Orient,
nstallé
Tokyo
e 19
anvier
946
16) (après
la guerre
e
1914-1918,
es
vainqueurs
vaient ussi
envisagé
'instauration'une telle uridiction,otam-
ment
pour uger
l'Empereur
uillaume
I,
mais cela
n'avait
pas
eu de
suite).
De
telles nstancesont été
créées
à cette
époque pour
sanctionner es crimes
8
Revue
française
e
pédagogie |
165
|
octobre-novembre-décembre
008
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du
passé
proche
et de
nos
jours,
elles sont deve-
nues
opératoires our uger
d'autres crimes
géno-
cidaires,
hélas commis ces dernières nnées. Sous
l'égide
de
l'ONU
et de son Conseil de sécurité été
établi en 1993 le Tribunal
énal
international
TPI)
pour
uger
es crimes ommisdans
l'ex-Yougoslavie,
puis
en 1994 celui
pour
juger
le
génocide
rwan-
dais. La Cour pénale internationaleCPI) est née
de la Convention e
Rome,
signée
le
17
uillet
998
par
120
pays
et ratifiée
ar
60 États n
2002,
de sorte
que
le traité
ntre n
vigueur
ce moment-là. our
la
première
ois,
une telle
ustice peut
êtrerendue e
façon
permanente
17).
La CPI a donc
compétence
pour
es cas de
génocides,
crimesde
guerre,
rimes
contre
'humanité,
rimes
'agression.
Ce
qui
caractérisecette
justice pénale
dès son
origine
militaire,
'est donc
que,
dans le but de
poursuivre
t condamner
es
criminels,
lle a enrichi
le
corpus juridique
de ces nouvelles
catégories.
On sait
que
la notion de
génocide
fut
proposée
par Rafaël Lemkin ans un ouvragede 1944 (Axis
Rule
in
Occupied
Europe 18)) pour
décrire e
pro-
jet
hitlérien
'anéantir es
populations
ntières.La
notion e crime
ontre
'humanité,
ui apparaît
lai-
rementn 1915 dans une
déclaration ranco-russo-
britannique
elativeux
massacres des Arméniens
ar
les
Turcs,
ut nsuiteutilisée
par
les
juges
de 1945.
Mais,
si
importanteu'elle
soit
depuis
le Tribunal e
Nuremberg
usqu'à
la récente ntrée n fonction
e
la
CPI,
elle n'a
pas
été clairement
éfinie,
n
subs-
tance,
si bien
qu'on
discute
aujourd'hui
ncore sur
le sens
qu'on
doit donner u mot
humanité ans ce
cas
(19).
Elle a
simplement
té assortie d'une
liste
qui comprend
assassinat,
extermination,
éduction
en esclavage, déportation,ctes inhumainsommis
contre es
populations
iviles,
ersécutions our
des
motifs
thniques,
aciaux u
religieux.
Il
est facilede voir
ue
le
discours de la mémoire
prend
on essor
dans ces contextes
udiciaires,
sso-
ciés aux
contextes ommémoratifs
très
mportants,
maisdont n
ne ditrien
ci),parce qu'ils'appuie
à son
tour
ur es
catégories
normatives ont
a
principale
est celle du
crime ontre 'humanité. eci
indique ue
le
discoursde la
mémoire,
t l'énoncé d'un
devoir e
mémoire
ui
le
caractérise,
uisent
ux aussi dans la
culture
lus
anciennedes Droitsde l'homme t
par
conséquent
dans
l'éthique
humaniste
ui
est à leur
fondement.
es droitset cette
éthique,
actualisés
et étenduspar la Déclaration e 1948,sont en outre
devenus
a référence
majeure
es
Organisations
on
gouvernementalesui prennent
n
charge
es victi-
mes
des
guerres
u
d'autres
cataclysmes
de notre
époque (20),
si
bien
que
le discours de la mémoire
s'accorde avec le
«
droithumanitaire et avec ce
qu'on peut
aussi nommera
«
moralehumanitaire
,
l'un t l'autre ncarnés
epuis
es années soixante-dix
et les
secours
aux victimes e la
guerre
u
Biafra,
ar
la
figure
u
médecinhumanitaire
qui
est sans doute
le successeur du
philanthrope
u
xixe
iècle
-
premier
à certifiere lexiquede I'« humanitarisme).
D'après
ces
constats,
e discoursde la mémoire t
l'idée d'un devoirde mémoire
euvent
tre
regardés
comme une
mise
en
récit e la moralemoderne ce
qui,
dans
l'expression
devoir e mémoire
permet-
trait nfin
'expliquer
devoir
plus
que
«
mémoire
.
La
pression
des
mémoires 'est donc
pas
seulement
la résultante
es
particularismes
dentitaires elle
participe
e la formation
'une moralité validité ni-
verselle,
pplicable
à l'existence ctuelle et virtuelle
des nations.
MÉMOIREET MORALE
Quelles
sont les
caractéristiques
e cette
éthique
de la
mémoire
t
du devoir e mémoire Une
analyse
prospective
pourrait
eur
attribuer u moins
quatre
séries de
propriétés
ubstantielles
1
C'est une morale écularisée. Elle ne
met
pas
le
sujet
moral n
rapport
vec une
transcendance,
n
idéal divin ses
injonctions
e montrent
as
le chemin
du salut
personnel
t de l'immortalitée
l'âme.
D'une
part,
comme Renouvier t Durkheim nt
été
parmi
les
premiers
y
insister
après Comte),
elle a
pour
destinataireuprême a personnehumaineDurkheim
parlait
d'un «culte de la
personne
humaine
21) »).
D'autre
part,
uivant
une distinctiondmise dans la
philosophie politique
américaine
depuis
J.
Rawls,
disons
que
cette
moraledélivre la fois une version
du Bien n tant
ue
tel,
ui
serait ne manière 'orien-
ter a vie
pour
ccomplir
es
qualités,
ugmenter
a
vertu,
'assurer de sa
dignité,
tc., et, surtout,
ne
version
du
Juste,
entendu comme l'ensemble des
rapports pécifiant
n
mondecommun t le bonheur
possible
dans ce monde.
2.
Les fins
e la
ustice
délimitent
eut-être
e
champ
d'une
«
moraleminimale à vocation
universelle
22).
Cette moralene se réduit ourtant as à uneprocé-dure,c'est-à-dire une
simple
règle
de
répartition
équitable
des
biens
-
statuts,
laces,
bénéfices,
tc.
Car si elle délivre
des valeurs et des normes de
construction
u monde
commun,
lle
prescrit
ussi
Le
discours e la mémoire 9
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des manières de vivre t de
penser personnelles.
Elle
donne des
impératifs
'action,
formuledes
principes
de
jugement
et
sollicite toutes sortes d'émotions et
de sentiments.
On devine
l'apport
du discours
de la
mémoire le
grand
récit,
toujours
à recommencer et
à
continuer,
es insondables
malheurs du
temps,
livre
une
dramaturgie
e la
justice.
En
désignant
ce
qui
est
blâmable, détestable, exécrable, ce récitnous éclaire
sur ce
que
nous
pourrions
malgré
tout
espérer
;
il
sauve notre idéal de
bonheur au-delà de sa chute
dans les
politiques
criminelles t la terreur es totali-
tarismes du
xxe
siècle.
S'explique
alors la connivence du devoir de
mémoire
avec d'autres
principes
moraux,
l'appro-
che
positive
de la solidarité
nous
sommes bien dans
une
morale
typique
de
l'État
providence, qui
propose
l'équité
en
réponse
aux
demandes formées dans
la société
civile),
et
l'approche négative
de
'' anti-
racisme
(23).
En
valorisant l'entente et
l'entraide,
en
dénonçant
les
discriminations,
es
ségrégations
et les
apartheids, toutce qui méconnaît l'égale dignitédesêtres
humains,
ces thèmes nous renvoient u
noyau
commun d'une
éthique démocratique.
En
2008,
lorsque
le
président
Sarkozy
a
présenté
au Conseil
représentatif
es
institutions
uives (CRIF)
l'idée
de
confier des élèves de cours
moyen
la mémoire des
enfants
uifsdéportés,
il
pu
ainsi
expliquerqu'«
ensei-
gner
la Shoah et sa
spécificité,
c'est combattre tous
les racismes... et créer une mémoire commune sans
laquelle
il
ne
peut
y
avoir de volonté de construireun
avenir commun
24)
».
3. Une autre
propriété
de
la
morale sécularisée et
du discours de la mémoireest
contenue
dans les
pré-
cédentes
:
cette
morale
prend
fait et cause
pour
des
sujets qui ont qualité de victimes. Les victimes, ce
sont d'abord les
populations
et les individus
empor-
tés
par
les
entreprises
génocidaires
ou les destruc-
tions militaires mais la
logique
de la solidarité et de
l'anti-racisme eur
adjoint
la familière
déclinaison
de
l'exclu
-
il est
probable que
l'anti-racisme doive son
succès à ce
qu'il
oscille entre l'une et l'autre de ces
idées très
populaires,
la victime et l'exclu. Ici
appa-
raissent de nombreuses
catégories
:
les
chômeurs,
les
sans-abri,
les travailleurs
mmigrés
non encore
intégrés
ou en situation
irrégulière,
es
handicapés,
les accidentés
pourvu qu'on impute
eur accident non
au hasard ou au destin mais à une faute
humaine,
jusqu'aux populations
meurtries
ar
les
catastrophes
naturelles
-
que l'imaginaire
collectif mêle
étrange-ment aux
phénomènes
de
désagrégation
sociale
(et
qui
sont devenues une sorte de
passage obligé
de
la réflexion
thique après
le
poème
de Voltaire ur le
tremblement e terrede
Lisbonne).
Mais en racontant l'histoire des
victimes
25),
en
objectivant
l'avènement du
malheur et de
l'injustice
au cœur de
l'existence
collective,
le
discours de la
mémoire
nous incite à
réagir
à
la souffrance d'autrui
et,
en
quelque
manière,
à
partager
sa
peine.
C'est
dire
qu'il provoque
notre
compassion
et nous intro-
duit à
une
expérience
morale
princeps,
fondée sur
des sentiments. On peut penser qu'il vulgarise ainsi
ce
que
les
philosophes
du
xvme
iècle avaient
compris
dans la notion de moral
sense en
Angleterre
t
dans
le
concept
de la
pitié,
notamment ous la
plume
de
Rousseau,
en France. La
thématique
sera
reprise
en 1840
par Schopenhauer,
contre
Kant,
dans son
ouvrage
sur Le fondement de la morale. La
culture
de la bienveillance
qui
irrigue
dès cette
époque
le
mouvement
philanthropique,
créateur des
«
bonnes
œuvres
»
modernes,
a les mêmes
bases
éthiques
-
comme sans doute les ONG
humanitaires
26)
d'aujourd'hui
ou bien
encore,
par exemple,
des asso-
ciations comme les
«
Restos du cœur
».
Nous attrister u mauvais sort qui s'abat sur notre
prochain,
nous
émouvoir
des tourments
u'il
endure
les bons
esprits
ne
manquent pas
de
protester
ontre
un moralisme
de facture
ussi
vulgaire.
On est tenté de
les suivre
orsque
le
marché des loisirsde masse nous
inflige
es
spectacles
caritatifs
ui
clament en fanfare
les
appels
à la
compassion.
Mais la
tartufferie,
oujours
possible,
ne ruine
pas
à tout
coup
les idéaux
qu'elle
pervertit.
Les sentiments moraux ont bien d'autres
fonctions. Comme l'a montré Charles
Taylor,
ls sont
inhérents à
l'éthique
contemporaine qu'on pourrait
résumer
à
la
proposition
d'une
«
sollicitude
univer-
selle
».
C'est aussi l'avis de Paul
Ricœur,
ui parle
dans
le même sens d'une
«
spontanéité
bienveillante
27)
».
4. En
dernière
analyse,
les sentiments moraux sont
la
pièce
centrale d'une
«
théorie
éthique
»
(expres-
sion utilisée
par
Bernard Williams
pour désigner
l'ensemble
des
principes
et des
croyances
qui
arti-
culent les
injonctions
d'une morale donnée
(28)).
Cette théorie
postule que
tout individu
qui éprouve
sympathie
et
compassion
envers autrui et sa souf-
france
remplit
a condition
subjective
suivante : d'une
part
il
perçoit
en tout autre un semblable et d'autre
part,
il
conçoit
ainsi
l'unité
du
genre
humain
-
qui
leur a
octroyé
les mêmes attributsde
conscience,
de
volonté,
etc.
D'après
cette
théorie,
a
compassion
envers les victimes rend donc
possible
une
double
affirmatione
principe
celle de la similitude ntre es
hommes et celle de leur commune
appartenance
à
l'humanité
-toutes choses
qui justifient
'universalité
des droits humains et les actions en faveur de ces
droits,
omme
celles,
notoires,
de la médecine huma-
10 Revue
française
e
pédagogie |
165
|
octobre-novembre-décembre008
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nitaire
29).
Cette
théorie,
ien
sûr,
ne dit
pas grand-
chose sur la réflexiont la décision
d'agir
pour
un
sujet
donné,
e
qui
serait 'affaire 'une
psychologie
morale
30).
Mais on en a une
saisissante llustration
dans
le récitde sa
déportation ar
Robert
Antelme,
L'espèce
humaine,
ouvrage
écrit en 1946-1947 et
publié
en 1957. Il
s'agit
d'une
protestation
adicale
quidonne l'ouvrage on titre
«
Le
ressortde notre
utte,
xplique
R.
Antelme,
n'aura été
que
la
revendication
orcenée,
t
presque
toujours
lle-même
olitaire,
e
rester,
usqu'au
bout,
des
hommes.Les héros
que
nous
connaissons,
de
l'histoireu
des
littératures,
u'ils
aient crié
'amour,
la
solitude,
'angoisse
de l'être
ou
du
non-être,
a
vengeance, u'ils
se soient
dressés contre
'injustice,
l'humiliation,
ous ne
croyons
as qu'ils
aient té ame-
nés à
exprimer
omme eule et
dernière evendication
un entiment
ltime
'appartenance
l'espèce.
Dire
que
l'on se
sentait alors contesté
comme
homme,
omme membre
de
l'espèce, peut appa-
raître omme un sentiment étrospectif,ne expli-
cation
après coup.
C'est cela
cependant qui
fut e
plus
immédiatementt
constamment
ensible et
vécu,
et
c'est cela
d'ailleurs,
xactement
ela,
qui
fut
voulu
par
es
autres.La mise
en
question
de la
qua-
lité d'homme
provoque
une revendication
resque
biologique
d'appartenance
l'espèce
humaine.
Elle
sert nsuite
méditerur es limites e
cette
espèce,
sur sa
distance
la nature t
sa relation vec
elle,
sur
une certaine
olitudede
l'espèce
donc,
et
pour
finir,
urtout
concevoir ne
vue clairede son
unité
indivisible
31).
»
On
peut
conclure
ue
la
prégnance
e
la victime t
de la compassionenvers es victimes,vec l'incita-tion s'identifierun autre
ouffrant,
e
que
véhicule
le
discoursde la
mémoire
ragique,
outceci assure
la
promotion
moderne
de l'humanité
omme réfé-
rence
morale
uprême.
C'est
la raison
pour
aquelle
la mémoire
ragique
t le devoir
e mémoire e
sont
développés
sous la
référence
ardinale au crime
contre'humanité.
'est aussi
ce
qui
assure
a fortune
de
l'adjectif
t du
substantif
ujourd'hui
ominants
«
humanitaire.
L'humanité st
une
figure
'autorité
morale ans
notre
ulture
émocratique.
elle,
'atta-
chent os déaux
d'elle se
tirent os
valeurs sur
lle,
se fondent
es
justifications
e nos
conduites
32).
Nous
l'invoquons our
garantir
a vérité e
nos
juge-
ments ur
e bien t le
mal,
a
légitimité
es
règles uipeuvent ous orienterers a justiceet nouséloigner
de
l'injustice.
Cette
figure
'autorité
st
peut-être
la
seule
possible
à
l'âge
de
la morale
éparée
de
la
religion,
ffranchiee la
transcendance.
PRÉSENTATION DU DOSSIER
Dans
ce
dossier,
nous avons souhaité donnerdes
points
de
comparaison
ntre es différents
ays
où
l'éducation st saisie
par
es
politiques
e la mémoire.
Ce
panorama
doit e
comprendre
omme une incita-
tion développer es recherches troprares urce
problème
ans les sciences de l'éducation. outefois
nous nous
sommes restreints
l'Allemagne par
B.
Zymek),
a France
par
N.
Tutiaux-Guillon
t
aussi
par
L.
Cajani),
Le
Québec
(par
J.
Létourneau),
a
Suisse
(par
Ch.
Heimberg),
insi
que
l'Italie,
a Grèce
et les institutions
uropéennes
par
L.
Cajani).
Autre-
ment
dit,
pour
ce
premier
our
d'horizon
ui
est loin
de donner
n
bilan,
nous
avons en
gros
privilégié
es
situations ccidentales.
ans doute e
paysage
serait-
il
très modifié
i,
tenant
ompte
de la
«
mondialisa-
tion de la
mémoire dont
parlait
HenriRousso
il
y
a
peu
(33),
notre
egard
ouvrait es
pays
affranchis
de l'ex
empire
oviétique,
u bien
es
pays
d'Améri-
que latine yant ubi diversesdictatures u encore emonde
asiatique qui
n'a certes
pas
été
épargné
par
les
guerres
iviles t les destructionsmilitaires.
Les
auteurs
ollicités e sont attachés
à décrire a
construction
et
ses
aléas)
de la
mémoire ollective
de leurs
pays,
avantd'examiner
'inscription
e cette
mémoire ans
l'univers e
l'éducation,
vec les
ques-
tions et
les
difficultés
ui
en découlent.
Cela
dit,
es
pays évoqués
ne sont
pas
tous
également
oncernés
par
les
tragédies
du
xxe
iècle,
ou ils ne le sont
pas
tous de la
même manière tous
ne vivent
as
dans
les
mêmes conditions
ationales t les mêmes
orga-
nisations
tatiques,
ous ne sont
pas
appelés
à revoir
leur
passé
et
l'enseignement
e
leur
passé pour
es
mêmesraisons etsurtoutlsn'y ontpas incités ar
les mêmes
groupes
de
pression,
u nomdes
mêmes
idéauxvoire es
mêmes
déologies.
On
s'apercevra
ci
que
les
intérêts,
ffirmésomme
tels,
de la
mémoire,
sont
non
eulement ifférents
ais
parfois pposés.
L'Allemagne
dont
traite Bernd
Zymek
a cette
pénible
originalité
'avoir
dû animer utant
e sou-
venirdes
bourreaux
que
celui des victimesde
la
barbarie.
En
outre,
du faitde
la
séparation d'après
guerre
ntre
Allemagne
de
l'Ouest et
Allemagne
e
l'Est,
la
construction
e cette
mémoire ollective
à double
détente a suivideux
chemins très diffé-
rents n
République
fédérale u dans
la
République
démocratique.Ainsi,
a
mémoiredu passé nazi, ycompris e passé transmis
ar
'éducation t l'école,
s'est
constituée outre Rhin
ur
une volonté
propre
à chacun
de ces
régimes
de
justifier
on
présent
et,
qui plus
est,
de
le faire n
opposition
l'autre.
Le
discours de la
mémoire
1 1
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Ce
qui
a encore
compliqué
a
transmission e cette
mémoire
géométrie
variable,
c'est
son
inscrip-
tion
dans le
temps
comme le montre
.
Zymek
a
mémoire ollective llemande a été non
pas
accu-
mulée et
approfondie
mais soumise aux
contextes,
aux
conceptions
et aux
langages
des
générations
qui
se sont succédées
depuis
la
guerre
t
qui
ont
donc renouvelé eur distance, au sens propreet
au sens
figuré,
vec les événements
tragiques.
Il
n'en
demeure
pas
moins
que chaque
génération
fourni es
réponses spéciales
et
marquantes
ur le
plan
éducatif,
éponses
dont a
pertinence
résisté
aux
changements
d'époques
:
ainsi en va-t-ildes
propositions
e l'École de
Francfort,
n
particulier
celles d'Adornodans ses fameuses conférences
e
1959
et 1965.
La France
sans doute été au centrede l'activité
de recherche t de recueil
des traces de
l'appareil
d'extermination
azi.
Cependant,
comme le mon-
tre Nicole
Tutiaux-Guillon,
'irruption
e ces
ques-
tions dans l'univers colaire est plus tardive u'en
Allemagne
si
l'on
excepte
par exemple
l'incursion
du
film uit
t
brouillard,
'Alain
Resnais,
en
1956),
parce qu'elle
a été mise à l'ordre
u
jour
uite à une
évolution es finalités
e la culture colaire t notam-
mentde
l'enseignement
e l'histoire.
ependant
a
référenceux mémoires ouloureuses rencontrét
continue e rencontrer
hez nous de nombreux bs-
tacles,
pour
deux raisons
majeures.
D'une
part
ette
référence
iverge
e la tradition
épublicaine
ui
valo-
riseun
nseignementositiviste
t rationalisteont n
attend a
présentation
'une mémoire nificatrice
e
la Nation. 'autre
part,
oin
u'on
s'accorde dans une
conscience
unique
du
passé,
ilexiste
ujourd'hui
ne
pluralité'intérêts mémoriels, ceuxdes Juifs, es
anciens
colonisés,
des descendants
d'esclaves, etc.,
qui
ne
parviennentas,
semble-t-il,
se réunir ans
un récit
commun,
ut-ce un récit
de la souffrance
des
«
dominés
(mais
rienne dit
que
ces
mémoires
n'aient
pas,
chacune
de leur
côté,
un désir d'attirer
à elles les références
niversalistes u universali-
santes).
Dans cette ituation
outefois,
a
pénétration
dans l'institution
colaire de ces soucis
est réelle t
constante t elle donne ieu
un
grand
nombre 'ini-
tiatives,
ouvent
encouragées
voire encadrées
par
les autorités.
. Tutiaux-Guillonrosse ici
un tableau
global
des
pratiques
n cours et elle
en
analyse
es
principaux
essorts
pistémologiques
t
didactiques
en attendant ue d'autres études nous en fassent
connaîtrevec
précision
es
résultats.
La situation
québécoise analysée
par
Jocelyn
Létourneau
ffre n
contrepoint
ntéressant,
u fait
que
la réforme
n cours des contenusde
l'enseigne-
ment
historique
a
pour prétexte
on
pas
le
rappel
culpabilisant
es malheurs ollectifs u
passé,
mais
plutôt
e
besoin
d'adosser
l'éducation à une
nou-
velle
citoyenneté,apable,
étant donné la caracté-
ristique
de cette
nation
francophone
t
américaine
(au
sens
géographique),
e retenirt
d'enseigner
u
passé à la fois un destin ommun t unepluralitée
cultures onc d'identités. 'auteur
nalyse
le conflit
ainsi
engendré
entre deux
positions.
La
première,
nommée
par
lui
«
conservatiste
,
exige
le maintien
du
programme
lassique
d'histoirenationaleoù la
dimension
rancophone
st dominante la
seconde,
appelée
«
réformiste
,
défend
un
projet
d'histoire
et éducation
la
citoyenneté
ui
intègre
ne vision
multiculturelle
et qui
s'attache
en outre ce
que
les
élèves
«
construisent des
compétences
vantd'ac-
quérir
es
connaissances).
Ceci suffit
suggérer ue,
par-delà
es
arguments
estitués
ar
J.
Létourneau,
la
polémique uébécoise,
dans
son contexte
ropre,
recèle des
enjeux
rès emblables ceux des autres
pays démocratiques, t au premierhef, elui d'as-
surerun traitement
quitable
des
identités,
la fois
pourrépondre
des attentes u
public
t
pour
ur-
monter a
perplexité
ue
soulève
aujourd'hui
e récit
historique
ational.
À
lire
'article e Charles
Heimberg
ous trouvons
en effet
ue
les mêmes
questions
se
posent
en
Suisse.
Ce
pays
présentepour
nous l'intérêt 'avoir
une
organisation
édérale t
pluriculturelle
t d'être
aussi concerné
par
la seconde
guerre
mondiale,
cause
notammentu rôle
oué
par
es
banques
à
qui
certaines amilles
uives
avaient
pu
confier es fonds
avant a guerre. ette situationomplexe t originale
explique
a tournure
rise
en Suisse
par
les discus-
sions
sur e
passé,
sachant
que
cette fois a volonté
d'assumer le souvenir
es
politiques
riminelles
'y
heurte la tentation e
restaurer,
l'inverse,
es
mythes
ondateurs
uxquels
on attribueraitne vertu
unificatrice.'est toutefois
une
prise une
«
crise
»)
de conscience
survenue dans
les années
quatre-
vingt-dix
u'on
doit,
elon Ch.
Heimberg,'exigence
d'une
mémoire
éridique, ritique,
ans illusions
ni
occultations olontaires. es
constats rendent
eut-
être
plausible
un
rapprochement
vec les
conditions
et les
formes
rises
n
Allemagne
ar
a construction
et la reconstructione la
mémoire ollective.Reste
à
aussi à observerusque dans les classes les formesconcrètes, es démarches t les
justifications
labo-
rées et
appliquées
par
es
enseignants
our
tteindre
leurs
buts du travail 'histoirellié à la recherche e
mémoire.
12 Revue
française
e
pédagogie |
165
|
octobre-novembre-décembre
008
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7/23/2019 Le Discours de La Mémoire
http://slidepdf.com/reader/full/le-discours-de-la-memoire 10/12
Avec l'étude de
Luigi
Cajani,
nous concluons
ce
dossier
-
provisoirementspérons-le,
en revenant
sur es
graves
polémiquesqui,
en
Europe,
ont nées
des désaccords relatifs ux demandes mémorielles
des uns et des
autres
sur le
terrain colaire.
Luigi
Cajani
offre ne
chronique
de ces discussions sur
les
programmes
t
parfoisplus précisément
ur tel
ou tel manuel colaire. Ces discussions se sontpro-
duites dans les sociétés et elles
se font ntendre
au cœur des institutions
tatiques
de
l'Italie,
de la
Grèce,
de
la France et leurs onclusions ommen-
cent
d'avoirdes
répercussions
ans les
institutions
communautaires
uropéennes.
On sera donc
une
fois de
plus frappé par
la
similitude t la simulta-
néitéde tels
débats,
malgré
es
divergencespoliti-
ques
et
idéologiques
de leurs
nitiateurs
car,
sous
couvert d'une recherche de
vérité,
'est
toujours
dans la confrontationntreun désir d'unité
natio-
nale)
et un
constat
de diversité
sociétale) que
sem-
ble résider a
dynamique
des conflits.L'étude de
L.
Cajani
est d'autant
plus
éclairante
u'elle
accorde
toute sa
place
à ce conflit secondaire mais en
passe d'occuper
le devant
de la
scène
-
dans
lequel
de nombreux istoriens, otammentmais pas seu-
lement en
France,
se dressent contre les
«
lois
mémorielles
promulguées
par
l'État
pour empê-
cher
'expression
t la diffusion
'opinions
ransgres-
sives,
comme
celle niant 'existencedes chambres
gaz
et de la Shoah.
François
Jacquet-Francillon
Université harles-de-Gaulle-Lille et INRP
NOTES
(1)
Parmi es
ouvrages importants
ur cette
question,
citons
d'abord,
sans doute trop peu lue aujourd'hui, la thèse de RaymondAron,
Introduction
la
philosophie
de l'histoire.
Essai sur les limites
de
l'objectivité historique,
Paris:
Gallimard,
1948. Voir aussi
Paul
Veyne,
Comment
on écrit l'histoire. Essai
d'epistemologie,
Paris:
Seuil,
1971
;
Michel de
Certeau,
L'écriture de
l'histoire,
Paris
:
Gallimard,
1975
;
Antoine
Prost,
Douze
leçons
sur l'his-
toire,
Paris :
Seuil,
1996
;
et Paul
Ricœur,
Histoire t
vérité,
Paris
:
Seuil,
1955
;
P.
Ricœur,
Temps
et
récit,
3
vol.,
Paris :
Seuil,
1883,
1984,
1985
;
et P.
Ricœur,
La
mémoire,
'histoire t
l'oubli,
Paris
:
Seuil,
2000.
(2)
Un
récent
ouvrage,
après
tant
d'autres,
résume bien les
oppo-
sitions
Christophe
Prochasson,
L'empire
des
émotions. Les
historiens ans la
mêlée,
Paris :
Démopolis,
2008.
(3)
L'association Le
souvenir
français
a été créée
en
1887,
donc
après
la
guerre
de
1870,
pour
créer des monuments aux
morts,
entretenir es
tombes des
soldats, etc.,
toutes
choses
qui
se
généraliseront près
la
guerre
de 1914-1918
et
qui
vont
conduire les Comités du souvenir
français
à soutenir 'action
des
municipalités.
(4)
Sur ces
questions,
voir notamment
a reconstitution e
Sylvie
Lindeperg
et
Annette
Wieviorka,
Univers
concentrationnaire t
génocide.
Voir, avoir,
omprendre,
Paris
:
Mille t une
nuits,
008.
(5)
Imre
Kertész,
Être
sans
destin,
Paris
:
Éditions Actes
Sud,
coll.
10-18,
[1975],
1998,
p.
154.
(6)
Cf. Alain
Brossât,
«
Apologie
pour
le témoin
»,
L'homme et la
société,
n°
136-137,2000.
(7)
Jean-PierreRioux a
donné une
précieuse analyse
de cette culture
mémorielle t nationale et
de sa remise en cause
actuelle,
dans
«
Mémoire et Nation
»,
in
Jean-Pierre Rioux et
Jean-François
Sirinelli
dir.),
La France d'un
siècle à
l'autre, 1914-2000,
Paris :
Hachette,
1999.
(8)
Cf. Charles
Taylor,
Multiculturalisme. ifférence et
démocratie
[1992],
Paris:
Flammarion,
1994. Voir P.
Ricœur,
Parcours
de
la
reconnaissance,
Paris
:
Stock,
2004. Sur les
contextes sco-
laires des
propositions
du
multiculturalisme,
oir Jean-Claude
Forquin,
L'école et la
question
du
multiculturalisme.
pproches
françaises,
américaines et
britanniques»,
in
L'école,
l'état des
savoirs,Agnès Van Zanten (dir.), aris : La Découverte, 2000.
(9) Expression
utilisée,
quoique
dans un sens
plus
restreint,
par
Etienne
Balibar,
«
Une
citoyenneté
sans
communauté
»,
in
Nous,
citoyens d'Europe
?
Les
frontières, 'État,
le
peuple,
Paris :
La
Découverte, 2001,
p.
105.
(10) Dominique
Schnapper,
La démocratie
providentielle.
Essai sur
l'égalité contemporaine, Paris : Gallimard, 002.
(11)
D.Schnapper,
idem,
p.
66
;
cf.
p.
47 et
suiv.,
et
p.
65 et
suivantes.
(12)
Cf. Marcel
Gauchet,
La
religion
dans
la
démocratie,
Paris:
Gallimard,
1998,
p.
94.
(13)
On trouve un
exposé
éclairant
des
problèmes
posés par
les
droits culturels et les droits
collectifs dans
Sylvie
Mesure et
Alain
Renaut,
Alter
Ego.
Les
paradoxes
de l'identité démocra-
tique,
Paris :
Aubier,
1999.
(14)
La dualité de
la
«
mémoire-histoire et de la
«
vraie mémoire
»
est
développée par
Pierre
Nora,
dans un texte d'ouverturede son
ouvrage
majeur,
Les lieux de
mémoire,
vol.
1
«
Entremémoire
t
histoire.
La
problématique
des lieux
»,
Paris :
Gallimard,
1984.
(15)
On
peut
se
reporter
ur ce
plan
au bilan nuancé et
pluriel
de
l'ouvrage dirigépar
Pascal Blanchard et Isabelle
Veyrat-Masson,
Les
guerres
de mémoires. La France et son
histoire,
njeux poli-
tiques,
controverses
historiques,
stratégies
médiatiques,
Paris
:
La
Découverte,
2008. Ces
phénomènes
de concurrence ont été
analysés et décryptés dans un premier
emps
par Jean-Michel
Chaumont,
dans La
concurrence des victimes.
Génocide,
Identité, econnaissance,
Paris
:
La
Découverte,
1997.
(16)
Voir
Jacques
Sémelin,
Purifier t détruire.
Usages
politiques
des
massacres et
génocides,
Paris
:
Seuil, 2005,
p.
365 et suiv. Voir
aussi
Y.
Ternon,
Guerres et
génocides
au XXe
iècle,
Paris :
Odile
Jacob,
2007
;
MireilleDelmas
Marty,
Vers un droit commun
de
l'humanité,
Paris
:
Éditions
Textuel,
1996
;
et Israël
W.
Charny,
e
livrenoir de l'humanité.
Encyclopédie
mondiale des
génocides,
Paris
:
Privat,
001 .
(17)
En
1948,
alors
qu'était proclamée
la Déclaration universelledes
Droits de
l'homme,
était
également
instituée
une Convention
pour
la
prévention
et la
répression
du crime de
génocide.
Ce
fut
nsuite la Commission
du droit nternational
CDI)
de
l'ONU
qui
eut
la
charge
d'élaborer un
projet pour
une
juridiction
nter-
nationale
permanente.
Il
y
eut dans le même sens en 1950 une
Convention
européenne
de
sauvegarde
des Droits de l 'homme.
À
l'heure
actuelle,
108
États ont ratifié a Convention fondatrice
de la CPI
;
et le
Canada a été le
premier adopter
une
loi de
mise en œuvre, « Loi concernant les crimes contre l'humanité t
les crimes de
guerre
».
La CPI
juge
des individus omme
c'était
le
cas
à
Nuremberg,
nnovation
ui
était d'une
grande portée
;
et
elle
s'applique
y compris
à
des chefs d'État
(on
a le
précédent
de
la levée de
l'immunitédu
général
Pinochet en
1998),
alors
que
les États sont
jugés
par
la Cour internationalede
justice.
Le
discours de la mémoire 1
3
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7/23/2019 Le Discours de La Mémoire
http://slidepdf.com/reader/full/le-discours-de-la-memoire 11/12
Le
premier prévenu
est
jugé
au début
2009,
c'est Thomas
Lubanga,
chef de
guerre congolais
poursuivi pour
avoir enrôlé
comme soldats des centaines d'enfants de
moins de
quinze
ans,
garçons
et
filles,
es
dernières
étant en outre
asservies,
en
plus
d'être
combattantes,
aux rôles de
cuisinières,
d'espionnes
et d'esclaves sexuelles.
(18)
Rafaël
Lemkin,
Axis Rule
in
Occupied Europe,
Washington,
Carnegie,
1944
;
une version
française
se
trouve
n
partie
dans
:
R.
Lemkin,
Qu'est-ce
qu'un génocide
?,
Paris
:
Éditions du
Rocher,2008.
(19)
Voir
par
exemple
A.
Renaut,
«
Le crime contre
l'humanité,
le
droithumanitaire
t la Shoah
»,
in
Philosophie,
n°
67,
septembre
2000.
(20)
Ce
rôle
important
es ONG
correspond
à une autre nouveauté
typique,
la constitution de fait d'une
«
société civile inter-
nationale
»,
qui
confirme
u niveau transnational cette
fois la
réorganisation
des
rapports
entre
espace public
de l'État et
espace
public
de la société. Avant a création
de la
CPI,
un
mil-
lier de ces ONG se sont
réunies dans une
«
coalition
pour
une
Cour
pénale
internationale et on été
un
partenaire
dans les
négociations ayant
abouti à la création de la
CPI,
au côté
des
représentants
gouvernementaux.
Elles sont
même associées
au
fonctionnement,
uisque
le
statut
de Rome leur octroie une
capacité
de déterminer 'ouverture
d'enquête
en fonction des
renseignements
u'elles
fourniraient.
(21)
Sur une
approche
de l'histoirede cette
morale,
outre de rares
auteurs actuels comme Charles
Taylor,
Les sources du moi.
La formation e l'identité moderne
[1989],
Paris
:
Seuil,
1998
;
voir surtout es textes de sociologie et de philosophie morale
de
E.
Durkheim,
n
particulier,
'éducation morale
[1934],
Paris
:
PUF,
1963.
(22)
Sur cette
notion,
se
reporter
par exemple
à
Monique
Canto-
Sperber,
Le
bien,
la
guerre
et la
terreur,
Paris :
Pion, 2005,
p.
195.
«
Morale minimale est
une
expression qui
a aussi cours
chez des
philosophes
comme Habermas. Ruwen
Ogien,
en a
par
ailleurs
développé
le contenu de
manière
convaincante,
en
insistant ur
le
principe
de neutralité
u
égard
aux
conceptions
du
bien,
dans La
panique
morale,
Paris
:
Grasset,
2004,
p.
129
et
suiv.,
et dans
L'éthique aujourd'hui.
Maximalistes
et
minima-
listes,
Paris :
Gallimard/Coll.
olio, 2007,
chap.
8,
9,
et 10.
(23)
C'est avec la doctrinesolidariste
-
associée à
l'œuvre de Léon
Bourgeois
et
qui
a eu de
grands
effets ur la culture
politique
de
la fin u
xixe iècle
-
que
cette
norme
commence
d'être
comprise
comme
un
principe
de
répartition
es
avantages
sociaux,
sous
la
forme,
non
plus
individuellemais
collective,
d'un
contrat,
ce
qui
surmonte la différence
de la morale du droit
et
augmente
la
capacité
d'action de ce dernier. Voir sur ce
point
François
Ewald,
L'État
providence,
Paris
:
Grasset, 1986,
p.
358 et suiv.
(24)
Cité
par
Michel
Gurfinkiel,
n devoir de
mémoire,
Paris
: Éditions
Alphée-Jean-Paul
Bertrand, 008,
p.
16.
(25)
Ce
qui peut
atteindre
y
compris l'entreprise
de l'histoire cien-
tifique.
Voir
sur
ce
point
une
remarque
de
Stéphane
Audoin
et Annette
Becker,
sur la
guerre
de
1914-1918,
dans
14-18,
retrouver a
Guerre,
Paris :
Gallimard, 000,
p.
8-9.
(26) Une analyse nuancée de la fonction de la pitié dans le cadre
des actions
«
humanitaires
se trouve dans Christiane
Vollaire,
Humanitaire,
e cœur de la
guerre,
Paris
: Édition
de
L'insulaire,
2007,
p.
26 et suiv.
(27)
Ch.
Taylor,
es sources du
moi,
op
cit.,
p.
514,
etc.
;
R
Ricœur,
Soi-même comme un
autre,
Paris:
Seuil,
1990
[septième
et
huitième
études].
La
prise
en
compte
des sentiments moraux
dans
la constitution u
sujet
moral
est à
l'ordre
du
jour
dans les
intéressantes réflexions ur les
pratiques
de ce
que
les
anglo-
saxons
nomment e care
(soin
bienveillant,
ouci des
autres)
:
cf. Joan
Tronto,
Un monde vulnérable. Pour une
politique
du
care
[1993],
Paris : La
découverte,
2009.
(28)
Bernard
Williams,
L'éthique
et
les limites de la
philosophie
[1985],
Paris :
Gallimard,1990,
p.
81-82.
(29)
Ce
point
est
justement rappelé par Rony
Brauman,
dans
son
récent
opuscule,
La médecine
humanitaire,
Que
sais-je
?,
n°
3844,
Paris
:
PUF, 2009,
p.
13.
(30)
Sur cette
question
de la décision et de l 'action morale face aux
persécutions
et aux crimes
de
masse,
voir
l'analyse
de Michel
Terestchenko,Un si fragilevernisd'humanité. Banalité du mal,
banalité du
bien,
Paris : La
Découverte,
2005.
(31)
Robert
Antelme,
'espèce
humaine,
Paris
:
Gallimard,
994. C'est
la finde
l'avant-propos, p.
11. Voir ussi Primo
Lévi,
Si c'est un
homme
[écrit
ussi en
1945-1947],
Julliard,
ress
Pocket, 1988,
p.
26
:
«
II
n'est
pas possible
de concevoir condition
humaine
plus
misérable
que
la nôtre. Plus
rien
ne nous
appartient.
»
et
p.
113,
sur la relation
vec un
SS
:
«
car son
regard
ne
fut
pas
celui d'un homme à
un
autre
homme
;
et si
je pouvais expliquer
à fond
a nature de ce
regard, échangé
comme à travers a vitre
d'un
aquarium
entre deux êtres
appartenant
à deux mondes dif-
férents,
'aurais expliqué
du même
coup
l'essence de la
grande
folie du Troisième Reich.
»
(32)
La
même
idée
est
exposée par
Pierre
Manent,
dans
son
Cours
familier e
philosophie
politique,
Paris
:
Fayard,
2001,
p.
331-332.
(33)
Henri
Rousso,
«
Vers une mondialisation de
la mémoire
»,
Vingtième
iècle,
Mémoires
Europe-Asie,
n°
94,
avril-juin
007.
BIBLIOGRAPHIE
ANTELME
R.
(1994). L'espèce
humaine
[1957].
Paris:
Gallimard.
ARON
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(1948).
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de l'histoire.
Essai sur les
limites de
l'objectivité
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Paris
:
Gallimard.
AUDOIN
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BECKER
A.
(2000).
14-18,
retrouver a Guerre.
Paris
:
Gallimard.
BALIBAR E.
(2001).
«
Une
citoyenneté
sans
communauté
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