fichte - sur la revolution francaise
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CONSIDERAT tONS
SUHLA
RÉVOLUTION F RAMCAISE
OEUVRES COMPLÈTES DE KANT
Tf!«tu!tMfnfrM~is
PM JULZS BAn~I
AVKCDES )MTRODUC'nOP!SAMA!.YT!QHKSKT C!UTtQUKS.
OMvrngea t~u! ont d~J~ par«.
CMtTtOUKDUJUGEMENT,suivie des Observations sur les spntimpnt!; du beauet du sublime. t8i6, 2 vol. iu-8*.
KïAMENDKLACHtTtQUEDUJUGEMENT.1850, î VO).
CRtTtQUKUHLAnAtso~tpftAUQUE,précédée des t-'otidcmetttsde la métophy-stquc des moBurs. i8t8, t vol.
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KAKT,SA~tEKTSAUOC~tKE,1 vol.
Ce dernier volume servira de résuméet de conclusion tous les travaux
précédents.
Porit. tmprittifrie du L. M~ttDKtT,ru< Mignoa,t.
CONSIDÉRATIONSMST)!<t!t:!t
A BïCTÏHM LES JU6EMEMTS ?0 PUBLIC
suat.A
REVOLUTION
FRANÇAISE
pn~cKDKta
DE LA REVENDICATION DE LA LIDERTË DE PENSER
J AUPRÈS DES PURGES DE t.'EUhOPE QUI L'ONT OPPRtMÈE JUSQU'tCt (i7'-<3)
PAR J. H. FICHTE
Ira(to!t(ttt'.Uift))and
Par ~Htew BAHMt
AVEC UNE t~THODUCTtO~ DU TRADUCTEUH
PARISF. CHAMEROT, LIBRAIRE-ÉDITEUR
RUK DU JAnDINËT, 13
4859
a
INTRODUCTION DU TRADUCTEUR.
FtCH'H.: ET !.A REVOLUTIONFnANÇAtS!
On sait avec (}uct (;mhousiasmo ta Re\'u!uUon française fut ac-cueiHieen Attemagne, surtout pnnni k's {tenseurs. Ha y voyaient lusignal d'une nouvcHoRéforme, qui, cnu~nt dans la société'tous tesvestiges do la barbarie, allait renouveler les institutions ci'i!eset po-litiques sur le modetcdes ide<'sdo la raison. J'ai montré ailleurs (~comment Kant en sa)ua t'auroro que)!e harmonie existait est ptfetcntr&ies principes do sa philosophie et ceux que proclama notre ré-votutton, et comment coXe.ci a son tour ne fut pas sans innuencosur !o dcvdoppemont des idées politiques du philosopho attemand,soit qu'elle tes connrmat par l'autorité de ses sanctions, soit qu'elleles modifiâtpar le spectacle des oxcès ou elle s'emporta plus tard. Hm'avait paru curieux do p!ac«r le père de la philosophiecritique enprésence do la Révolution française, et do étudier sous cet aspect.
ne )osera pas moins, ce me semble, d'envisager sous le mémo as.pect tephitosophe Fichto. ce disciplo si original dn Kant, ce nohtoesprit, ce grand cœur. Cette nouvelle ëtudo a mémo un intérêt deplus nous avons anaire ici à un penseur, qui, tout jeune encore aumoment ou éclate la névotution française, commo son vieux mettreKant, la salue avec enthousiasme (~); mais, no se laissant pas si viteen'c.tyoret décourager, no craint pas d'en faire t'upo'ogio dans letemps même ou ses déchirements et ses violences la compromettentle plus aux yeux du monde, et qui p!u.i tard. quand t'csprit de laRévolution,connsqué par !a force mi!i)airo, a fait place au pouvoird'un conquérant, prend une part active au soulèvement dol'Allema-
(1) /~ue~e Paris, i5 mars i8!;6.(2) Auxnumsde liant et do Fichtc, il faut ajouter ceuxdo Schellingot
de Hegeh At'époquc ou 6c!:)taht Uuvotutionfrançaise, ces <teuxderniersétudiaient à t'uuivertitc doTubinguo, et, d'après le témoignagede leurscondisciples,ils se Stgnatercntparmi tes hcrautstes pluszetcsde la Hbcrtcet de t'cgatito. !t fat'a!t menicqu'un dimanchematin ilsallèrent,en com-pagniedoSchi!h:)',planterunarbre dola tibcrtt':dans ut)Cprairievoisinedeta vittc.Ainsila noyotutionfran'aise a eu, nu moins ù "es dchuts, !e pr).viléged'exciterà la fois t'cnthousiasmcdes quatre ~ctuesqui formenttecycleglorieuxde la philosophieattemandp.
ïNTRonuc'noNnu Tt!DrcTr:m.Il
~no contre Nitpoiuon.ut su montre un dM ~tos .trdcnts ch~m~ons dolu cuusc naLiunhtu.t-'ichte, en on'ot, n'Étmt~ass~utotnont un rare es-
prit, mai:!Ut)t)vo)ot!to~nergiquo. Il no ~parait, pas la pensée de
)'HCt.)on.et!)asutut-)t)ô)no!~irhtjroï<p)Utnent.quan<tioscir('on-'stances i'ontupputoadescondro (tuns t'arcne. Nous o'anronsttoncpasseu!on)e:)t a nous occuper du ses punscf's, nous vorrons uussi utŒuvre.
Avant d'exposer les jugements quo b'ichte porta d'abord sur taHovotution française, et lus pr'ncipcs qu'été lui sucera, partuns anotre aise de son origine, do son éducation, de son caractère et descirconstances ou il se trouvait nu moment ou il prit ta ptumo pour ladéfendre (t).tt est bon de connaitre l'homme, pour mieux com-
prendre le livre.Né le t9 mai t762, a Hammonau, vi!!ago do la haute Lusace,
situé ontre Hbchotrswot'da et Putsnit/, Johann GotUich ~ichte reçutde ses parents ces traditions d'honnêteté ot.do vertu (tuidistinguaientbeaucoup de familles de cette riche et bette contrée. Son père,Christian Fichte, qui descendait d'an ser~ont suédois venu dans lu
pays avec t'armée do Gustave-Adolphe, et qui faisait un petit com-merce do rub~msde laino, était un hommed'une probité sévère, d'unevolonté ferme, d'une parole à toute épreuve. Sa mère, fittù d'un com-
merçant. de Putsnitx, patron du jeune Christian, avait dû lutter long-temps contre l'orgueil du co bourgeois de petite ville pour épousercelui qu'ette aimait; et cet orgueil, no se laissant tléchir qu'à moitié,no lui avait pas permis de rester a ta ville avec fon mari il fattut
que cetui-ci temmenatau vithge paternel. C'était une femme d'un
esprit vif et, d'un caractère indépendant. Jamais personno no res-sembla ptus usa mère pur l'esprit, te caractère et les traits du \isageque notre philosophe a lit sienne. On raconte que. quand il futvenu au monde, un grand-oncto materne), r~oommn pour sa piété etsa sagesse en (ptotque sorte prophétique, voulut. ma!gr6 soncxt-rem)'
vieillesse, assister au baptême: s'etantagonounh'! au pied duberceau,
(!) Pour cette partie de mot! tr!)it, commepour tout ce que j'ai ditplusbas des dernièrcsanr~cade Ftchtcjc n'ai eu qu':) suivreet à résumert'ouvrngcque son nts ;t consacra a sa n~fno:rc 7<j/«!hn~o«ne~/<c/<fc'~Z.c&cn«M~~(tt~c/tcr ~rt~T(.t. '2 \o). Sutxbach,t830 et !83t.Cettebiographie,écrite avecautant uc talentque de piutt'-n)iatc,m~ritcraHbien d'être traduifepn français il y a peude Hvt'csaussi intcressanttt.
!'tCHT! KTt.A HHV()H!')'t~NMtA~'(JAtSt. i!!
il hénitte nouveau.neetpréditqu'iif.)uit unjourt'urgueitet tajoiudesuMparents. Cette prédiction, quo suivit do près ta mort du vieillard,parut commela dernière tueur d'un espri!pr6t a quitter tu terre, aussiexerça.t-ette une grande intlucnce sur ta conduit des parents al'égard do leur ent.)nt, et par suite sur son avenir. Son père résotutdo tuteur s~-sinclinations et ses goûts su tnanit'estur un toute tibor~-il rcccnnuUuontô~combien co~enfanNa rcssembiuiLpou a ceux quiim~aie)~ vonus~suitec~en g~~rn) tous les autres, fuyant lejeu, cherchunL ta sotit~u, iofuLurphitoMpho aimaUa se ptot~erdansdo profondes r6verius. Il passait souvent des heures entières, sur lacolline, a reganter dans to tointain et a méditer, et, plus d'une fois,après te coucher du soleil, te berger du vitta~u dut tarract~r a sussolitaires contotnpt~tions pour le ramènera la maison putornette. Cesheures de son enfance lui laissèrent, un souvenir qu'il se plaisait plustard u évoquer. tant il y avait trouve du charme et sans doute deprofit Son père ot te pasteur du vitta~ furent,ses premiers précep-tours. tt les donnait parla précocité de son esprit. C'est pur ta qu'at'agode huit à neuf ans. il attira unjour t'attuntiond'un seigneur duvoisinage, du baron de Alittitx, qui voulut bien se charger de sonédu-cation. Gtaco à la ~nerosh6 de ce soigneur, t'entant put suivre laroute ou t'appelait son génie.
Le baron, dont te château était situé près do Mciszen, confiad'abord le jeune Fichte au pasteur do Niedorau, village voisin decenevittc. Ct)pasteur nt sa femme, qui (.taient eux-mêmes sansfa-millo, mais qui avaient un grand amour pour les enfants, entoureront.des plus tendres soins tour petit pensionnaire. Fichte passa chez euxles plus belles années de sa jeunesse, et c était encoreta un des sou-venirs qui charmaient te plus son âge mur. Malheureusement t'ex-cdienL pasteur ne pouvait conduire son étevo au deta de certainséléments; aussi, a peine celui-ci cut-it accompli sa deuxième année,qu'it engagea te baron do Miititz à le placer dans quetqu" maisond'instruction ou l'enfant put suivre les études pour lesquelles il semontrait si heureusement doué. Son bienfaiteur le fit donc entrerai'écotomunicipale de Meisxen,et, bientôt après, à cello de Pforta, présdo I~aumbourg.
Pour un enfant qui avait jusque-ta vécu à la campagne, courant.libremont.a travers les montagnes et les boi.- et trouvant toujours ulU maisondes visagessouriants et t'aHectionla ptus tondre, c'était unerutto épreuve que cette rcctusiun dans lus sombres murs d'un col-tége, ou peur mieux dire, d'un couvent. Lu jeune r'icttte pleura
tSTf~m'c't'tt~ ut'T<nrr.THm.
.unt'rcment tout ce qu'd avait perdu. L'('')('optus:~é(p)itui fut
duoné pour compagnondo cettute et pour mentor (suivant l'absurde
re~temcnt aturs en usa~c dans cette maison), no fit qu'accrcttrc son
ch~s'in et son désespoir. en t'acc<:b)antdu mauvais traitements. Lo
pauvre enfant résotut do fuir. N'osant retourner chez son protecteur
ouchex te pasteur do Nidcrau. du peur d'être ramené u Pforta, il
iorma tu projet 'te chercher quoique ïtc déserte ou il put vivre n la
tnmm'rcdc H~bin~on. profita dom'd'un jour()uprom~nndo pour
s'eva()ur, et. g:'gna !n route de N'utnbour~. Muis,s'étant arrêté sur
te sommet,d'une rianto ccttinepour y adro~cr su prière à Uiouavant
<tepoursuivre son chctnin, t'itnngc de ses paronts, le souvenir do
Jour t.ondros'-epour !ui. t'idcc du chagrin qui tt's accabterait, qui tes
tuerait pcut-etro. quand its npprendrutcm sn disparition, ta crainte
de no tes revoir jamais, toutes ces pensées s'emparèrent tout à coup
de son esprit et tirent tomber j-nre'otutton. !t rentra aucottege.
La. conduit devantte recteur, ittuiparta aven tant do franchise et
do candeur que cctui-ci, profondément touche, loin de to punir, lui
promit sa protection et lui donna un memeur camarade. A partir de
ce moment, tejeune Fichto se livra a t'élude avec ardeur et y ftt de
rapides progrès. !.o travail occupait, atimentait, dcvetoppait son
esprit; it ramonabientôt te contentement dans sonamo.
C'était t'ppoqueoù un esprit nouveau commençait a se répandre en
Anomagno, attaquant partout t'aveugle respect de l'autorité, t'amour
de la routine, la manie do l'imitation, et retrempant la littérature
et la phUosophioaux sources d'une pensée vraiment libre et originato.
Maisplus cet esprit suumuit avec force,plus les adeptesdu passé cher-
chaient a y sjustrairo lus jeunes générations. Wietand, Lessing,
G~the, presque tous tes écrivains de ta nouvctto Attemagnoétuient
sévèrement interdits a t'forta. Mais contre un esprit do ce genre les
murs mêmesd'un cotté,;e sont d'impuissantes barrières; et, en pareit
cas, los ptus sévère-!interdictions ne servent qu'à exciter davantage
la curiosité des jeunes ~cr~. Fichteeut même ici pour complice un
do sesjeunes ma!trc- ~raco a sa comptaisance. il put tire certaines
feuittcs potemiquesoù Lessin~ poursuiv.tit t'intoicranco et todogma-
tisme pcdantesquc dans h<personne (tu pasteur GoDze;ce fut pour
fui te commencement d'une nouvctto vie into)tcctuetto.Cctto lecturo,
en offet, évoitiadans son esprit, avec te sentiment do t'indepondanco
absolue de la pcnsco, te besoin d'une liberté itmnitéod'examenet do
recherche. C'est ::ans doute aus?i à t'imprcssinn que ces fcuittes do
Le'ing pro !i) ont sur ccttejeono i~mequ'it faut attribcor, au moins
FiCHTH KT i.A H~VOUJTiU~ ~A~(:A!S! V
en partie, ces irnits dû resgembtanccque t'en a remarques entrer
manière d'écrire, surtout dans ta polémique, et cette de cet.auteur.
Tctte fut t'admir~tion quit ressentait pour fui, quitte promit
de:'emettroenrout.o;dèsquit pourrait voy.'ger,1 a:indu)':dtcrtrouver et.de jouir de t'entreticn d'un si grand homme. Matheurcuse-
ment. il no lui fut. pas donné d'exécuter co projet. d'abord t argentlui munqua, et bientôt une mort.prématurée vint enlever Leasing à
i'Attomagne.
Qu<)t)dcet ecriv.dn tnourut, t''ichte utait, dcpu(!)un an,:t i Univer-
sitc d't6n<),où il étudiait la thcotogic.Kn choisissant. ceUo facuttc,il avait moins ucout~ son ~ontp~rsonnut <tnc)u Y(cu de sos parentset. do sonpère adoput'. Une tuttcctudc ne pouvait~Uisf'airutongtonpsune intettigcnconus~i phitosophiquc mai? tes doutes mêmes qu'dtesuscita dans son esprit rcvcicrcnt en fui ct:)tinunerent lu ))hi!osophe.
I<cprobt~nequi parait, avoir surtout, attiré son attention, à cetto
époque ou la rcncxion to dutachait de ta 'hcotogic pour tu tourner
Yors ta philosophie, c'est celui de la liberté de la vo!untc,c!.particu-Heremcnt la dif'icuttu de concitiorcctto Hbert6 avec la nécessite do
i ordreuniversel. Ainsi, dès son début, hchtc se sent attira versect-to
grande ideo do la tibertu, dunt il t'eraplus turd, a ta suito de Kant, la
ctcfde vouto de toute sa philosophie.Mais, à co premier moment, il
résolut te problème dans te sens de la phdosophic de Spinosu, bien
qu'it no connut pas alors Spinosa plus que Kant. Un prédicateur,versé dans la philosophie, auquel il communiqua un jour ses idées,
lui apprit, qu'ctte:; n'ct.tit-nt autres que ccties du cetebro philosophehoHandais.C'est,ainsi que sonattention fut. itttirésm ce penseur, dont
!onom no lui était~connu que commecelui du plus abstrus des athées.
n se mit alors a étudier t'7~/<~«f.qui nt sur lui une profonde im-
pression et le conHrma dans ses premières idées. Pourtant il y avait
en lui quoiquechose qui protestait contre cette doctrine: celait te
sentiment énergique et indostractibte de son indépendance et do s~
liberté; ce sentiment, !o spinosismo ne pouvait pas ptus t'expliquer
que t'abolir. C'est par ta que t-'i<:htereconnut te vice du système do
Spinosa, et qu'en so rapprochant de Kant, il trouva !o fondementde
sa propre doctrine. Comment unhomme doué d'une Lcttoénergie de
caractère aurait-it pu rest-c'rspinosisto il s~ntuit trop bio't on lui-
méme cet en</)~ que niait S[)ino~apour te rejeter a son tour comme
une vaine illusion. !t no dira donc pas que la liberté n'est rien, mais
plutôt,qu'ettë est.tout.
t'<'ndant~)ot''i(;))t(:ctudinitet méditait ainsi à !c:)a, un grand
iN'm'thm.tK~ t)t''i)!ur<:Ti-:m.Vt
"~d)t()ur)t}\intff-:tpj)er:itj)ur'ii~('nhit'r)tait('ut-,utsovitabandunnoatui'm~nx'.Mais t('sdif{icuttcs~)ntru)c.qucHosit(.uth)utternpartir <)t)ce moment et qui !p poursuivirent pcmtant p!usieurs an-nées, ne purent ébran~r son ('our.)gc: elles nu servirentqu'~ exerceret a dûvetoppcr la pt)iss:)ncodo sa votent. (:o fut pour hn une rudeéco!e. mais saiutairo. et tout a fait on harmonie avec k' r6to (luit'att~ndai'. R~t-H montre ptns hrd autant d'indppcndnnccdans lapcn~oo et d'f)0)-~ic d~ns la conduit, si los épreuves qu'i) travorsndans sa jeunesse n'eussent aussi fortement trempé son caractère?Après avoir achevé ~s études universitaires, Fichto rompHt, pon-dant plusieurs années, tes pénibtos fonctions de précepteur dansdiverses maisons de la Saxo; puis, souhaitant une position qui luitai~t. ptus de toisiret dd )ibcrt6, il songea ;'<l'état do pasteur, etécrivit au président du consistoiro do Sax~pour le prier de lui faci-liter h's tnoyonsd'y parvenir. Maissa demande ne fut pas accueillie:on avait, a (-0qn'i! pittatt, (piques doutes sur son orthodoxie théo-togiquo. Rebute de cecotô, Fichte. à bout de ressources, se voyaitdans la situation la ptus critique; mais sa nort6 naturelle, d'autantplus ombrageux qn'it 6<aitplus malheureux, i'etnpôehaiLde s'ouvriraux.tutroset détour rovcfer son denumenL Lejourannivorsairo do sunaissance, do t'annén )788, le trouva dans cotte atï'reuse situationmais ce même jour lui apporta une plancho do salut on lui offritune piaco do précepteur à Zurich, chez te propriétaire do t'h6te! det'~pée. Bien qu'i! se fût promis de no jamais quitter sa patrie, ilaccepta avec reconnaissance un oxil qui !o sauvait do la misère etdu désespoir. It ne savait pas encore que son séjour à Zurich allaitdécider du bonheur de toute sa vie, en lui donnant l'occasion do con-naître !a nob)ofemme qui devait un jour, après do nouvpHeset rudesépreuves, charmer son existence pt tui assorercoqu'it avait si long-temps rêvé une position indépendante.
Il y nvait à Zurich un beau-frc.-o de Ktopstock, dont la maisonétait le centre d'une sf)ci~ d'étito. Fichto était naturellement. appeté àfaire partie de cotte sociotc il y fut introduit par Lnvater. Lui-même,admirateur p~sionné du chantre dp !aMosaiade, de ce patriotiqueot pieux écrivain qui avait ouvert une nonvene carriôro à la poésiegermanique (t), il devise sentir singuiieremont attiré vers la maison
(<) Ons.)it .p.e Khtpstocktut aussi t'un des admirateurs, et t'on pour..-n.t.hrchm.tMchanh~dot.-t H..v<.)uti.),,fr.)n.;a..se.E.. t788. t'iuustrcp~-tc. aturs ..gc d..piu~.)e.soixautca. cumpoMune Mo a<~ ~t~
Ft<:ti'tHKTt.)tK\<)).r)')ON )''HANt:A!St' Vt!d'un hotnmo qu~snn .xttniration pour ce grand poète avait conduit u~uscr sa sœur
.)oh:)n!~).(:L'th~-in'itpHtS(juan'iri(-htc arrivai f~Zurich muisottc avait laissé 'mofitte, tn~'iticredes nohtos St'ntimontsdo sa mère, la consolationet f'irguei) de son pcro. M Rahn. Si codernier avuit pu s'enthousiasmer pour une sccur do Ktopstock qu'ilno connaissait pas, mais dont. te poète iui vantait. tos vertus et le mé-rite, quelle improssion nodurentt pas faire our le cœur de notre jeuneAt!emand la vue et la conversation do cotte digne niôco du grandhomme<I! ne tarda pas a l'aimer, et il n'eut pas de peine a s'en faireaimer. U avait rencontra lit femmequi lui convenait éprouvée o))o-mômo.dan.sson enfance, par te mameur, animéedos sentiments reli-gieux tosph)sc!ov6s, aimunto et dévouée jusqu'à l'abnégation, telleétait colle qui devait devenir la compagne de sa vie. H n'est pas sani;intérêt do remarquer que t'amour du Fichto pour la nièce de Ktop-stock est contemporain clos sentiments de sympathie et d'enthou-siasme qu'excita en lui la Révolution française. Ces deux rayonscchaun'ercnt en même temps sa jeune âme à l'espoir du bonheurdomestique que lui promettait t'union de deux cœurs si bien faits t'unpour t'autrp, se joignait en lui colui de la régénération publique dont!a Révolution française <emb!ait donner le signal, et cette doubleperspective t'animait d'une double ardeur. Chezlui l'amour n'étouffaitpas, mais semblait piutôt fomenter la passion du bien public. Ce futl'année même do son mariage qu'il publia ses CoMt(~-o«on<Mr7~o~<<tûn~-(ïHp~t'sc,et son ~<scou~ a«r ~'ber~ de ppMer; maisnous ne sommes pas encore arrivés à cette heureuse époque de sa
t'OM~r,rempHcdu plusnoMoenthousiasme;et en 1790, il dcdta à La Ro-chefoucautdune admirablepiècedû vers ou il reprochen sa patriede s'ctrolaisséedevancerpar tnFrancedanslacarrièrede h )ihertc.o2Gaont <?92,un décret de t'assembtcctc~ishttivot'étcva avecplusieursautres hommoacctÈbrcs.an rang do cituyetihaxçais. Ktopstockadrosaa,te 19 novembresuivant, :t Roland,ministred~ la t!6pub!i<~te,une tcttrc ou il exprimaitsareconnaissancepourcette ~or<at<seprowo~on, et rnppelaitqu'il avait étéun dos premiers àcetebrcr t'auroro do la liberté française. !tcst justed'ajouterq)teles excèsde li H6votutionmodiuôrcntplus tard soasentiments,et changèrenten tarmcsde douteur les larmesde joie que t'avcnemcntdela ttbert6lui avaitfaitrépandre.Voyezsurcepoint untrès intéressant articlepubliéparM.Carnot, en <843, dans la /~M<t<nd~d<!Mfe(t. p. 3??),sous ce titre Les échosde la /{euo<M«onfrançaise 0~ /U~no~ne. Cetarticledevaitservir d'introductiona un ouvrageque M. Carnotse proposaitalors de publier sur r~«e~~jyncpeM<fan( ~cn-c délivrance,maisque depuisil a mathcurcuscmcntlaissé dormir dans ses cartons, sauf unnouveaufragmentpubm',en ~850, dans la At~er~dcpenw (t.Vt, p. 281),sousce titre t'/i~HM~nc auat<<l'invasion/an~Mc.
vin ÏNTHODUCTiONDUTHAUUUTKUn.
vie. Avantd'y parvenir, il avait encore de bien rude:; épreuves a tra-verser.
Apres deux ans de séjour à Zurich, plus que jamais fatigue dumétier do précepteur domestique, et impatient d'ailleurs do se faireune positionet un nom qui lui permissent d'épouser cellequ'it aimait,Fichto quitta la Suisse pour retourner on Allemagne. Après s'êtrearrêté il Stuttgart, où il avait à s'occuper d'tmo bonne œuvre, et àWeimar ou il espérait voir Goethe et Herder, il se rendit à Leipsick,où il croyait trouver plus facilement tes ressources qu'il cherchait.Bien qu'il eût emporté plusieurs lettres de Lavatcr pour divers per-sonnages, soit fierté, soit discrétion, soit l'un et t autre ensemble,Fichte, avant départir, n'avait pas ose faire appel pour tui-méme aucrédit dont jouissait l'illustre pasteur de Zurich auprès des grands do
t'Attomagno. Il le fait, pour la première fois, dans une lettre datéede Loipsick il prie Lavator de vouloir bien songer a lui, s'il entend
partord'uno éducation à faire dans quelque grande maison, ou dequelque jeune prince a accompagner soit l'université, soit en
voyage En mémo temps il médite plusieurs projets qu'il communi-que à sa fiancée, celui, entre autres, de fonder un journal destiné àpréserver le public, et particuticrementtes femmes,du danger de cer-tains livres, en leur offrant des lectures plus saines et plus utiles.Mais il fallait pour cela trouver un éditeur. En attendant, il composedes nouvelles, et même une tragédie, bien qu'il ne se sente guère népour ce genre de littérature on lui dit que cela conviendrait beau-
coup mieux aux libraires. Mais. quelques difficultésqu'il trouve a socréer des ressources et une position, il s'enrayer l'idée do retournerdans son pa~s pour y poursuivre ta carrière ecclésiastique: it veutavant tout conserver t'indépendanco de sa poaséo. < Sans doute,écrit-it. nos jeunes ecclésiastiques d'aujourd'hui, dont l'esprit est cul-tivé par l'études des hautes sciences, ont dos iumières et une con-naissance rationnetto do la religion qu'on no trouverait, au mémodegré, dans aucun autre pays do t'Europo. Mais ils sont oppriméspar une inquisition pire que celled'Espagne; et. soit quo ta force leurmanque tout à fait, soit qu'ils ne puissent se passer de leur place,tandis qu'on peut très bien se passer d'eux à causedu grand nombred'pcctésiastiques, ils plient sous le joug et font leshypocrites.–Dansune pareille situation, une révolution est sans douteimminente; maisquand? et comment Bref, je ne veux pas étro ecclésiastique onSaxe? Deux mois plus tard, sa résolution est un peu obrant~ i)accepterait une position ecctc~astiquo (tans son payn,s'it pouvait
t-'t<:im':KTi. i~VutCTh'NFhA~<Si.: !Xobtenir. Hun voit bifn encnro ks <jifticu)tus.mais il esp~ tes
vaincre. « La tumiero, s'écrier, il, !utte mait)tct.:)ntavec forée contreles ténèbres. et japerçois t'aubede meitteurs jours.. Du resto ~asi-tuation est tet!o qu'i) irait u~me en Russie ou en Hspagne. s'il ytrouvait uneplace. H faut voir, dans ses h'ttro~ a sa Hancée. avec<)uctcourage il supporte le présent. quotte confiance il montre en l'avenir,et quotto tendresse du cœur.se joint en lui à) énergie du carnc<èro.
Ce fut au o.i!tcu des (hfticuhc, et d~ incerU'udes de co ~jout aLeipsick que Fichte commençaa <Hudiprlaphilosophie de Kant. Nu!todoctrine no convenait mieux a son caractère et il sa situaHoo pré.sente il y retrouvait,j ima~c précise et tununeusc de cet empirodo la volontéet de cette dignité morato(tont il a\uit dcja ut. si vifsentiment, pti) y puis:)it t.<force nécessaire pour supporter avpc so-renite!esdifticu!tos et ~deceptionsqui le poursuivaient. Au~i hem!-il )ohasard, ou plutôt la Providence qui )..i a fait connaitrc la phi.tosophiu Motionne, dans )o temps n.6tno ou i) avait bR~oind~trosoutenu parque!quo d~c de fou. Cette philosophie, ecrit.i). u ~anancéedans son
cnthousia.mo,cuttop)<itosophiedompte t'imo~inut!()t).qui c))c/.moia toujours été trcs puissante; elle assure lu prepond~rance de t'cntcndement, et elle c:c\o t'esprit a une hauteur cx~mor-dinmre au-dessus do toutes lei choses terrestres. J'y ai puis6 unemorato plus noblej et, grâce à elle, au lieudo m'occuper des chosesextérieures, je m'occupe davantage do t..o:-mcme. Cette étude tt.tdonn6unotranquittitc que je n'avais pas encore ~ontie; je )uido:sd'avoir vécu ~s p)us hou~ux jours dans situation extérieure ht plusmcertaino (1). H se promet de h<icon~acr~ au moms ptusicursannées de sa vie, et de n'écrire do to~temps~ur aucun autre (~jt-t."Dto est difficile au delà de toute expression, et c)te a bien hesoind être rendue plus claire. Fichte no se préoccuped'ai!)curs icique ducôte pratiquede cette phitosoph.o <.h.s principes en sont sans (toutodesspecuiations fatigantes pourt'espritet ~ans innuencodirecte sur h)Viehumaine, mais tes conséquencesen sont extrêmement importantes
(!) ciJevisdans un..oth eaumonde, ~r.t..te.nco.-c. depuisnue j'ai )u~?~ ~< Propo.i.io, q. je tenai. pou i,,c.brantabtcssontebrant.cs p.u.. moi des chosesdontje croyaisnu'de lie,
pourraientf" cumn.c. p.r c.cn.p~ r cehbert6absoh.c.dudcyo.r. etc.. ,c s.t maintenantdcmomrcc..et jesens p!~ heures On “<.am:.it cu. ~,<.t.-c.ppctpour -huL1..ctte fore. n.,us.tonne ..e sy.t~mc. Q.,d)oh.n.-dic io:, pour o.lnmorale et rcnvcr~ d.e. fon~ment~ et ou < c uti:enaccde tous tc~dtcttou'):)it-cs!«
~TtU)nrc'H<)t\ m'TH.\))Ut:T):t'x
d'<sunsiect(.'())'tk'ss()ur(-('s't('t.)))!t)i!)iusontc()rr<tmpues.ctcosc.rait. je crois, rt'nttr~ .m monde un ~raod service que d'exposer eusconséttuoth'esavec une extrême dar)é. «("ust maintenant (;u'it com-
pren(t combien ii or) an, torsqua ta suite de Spinosa, i) se prononçaitpour!') système do lit nécessité. u Jo suis maintenant tout a fait con-
vaincu, s'écrie-t-it, quêta volontéhumaine est tibre, et que ta Undonotre existence n'est pas tebonheur. mais ce qui nous en rend di-gnes. Unenouvottchunier s'csUniK'ditns son ~pr.'L revem! dosonnrronr. il ro~ro~.odavou-chorch~ a !a faire par~~cr aux nu~res. et ilvomh-aiUnaint.onanHos rotirer. Dis.ucrtt-itamadomoiseHeHahn,dis il ton cher père, quoj'aun~ commo io tnien, quc,dans nos rechor-ches sur <anécessite de toutes ~s actions humaines, quoique rigou-reux que fussent nos raisonnements, nous nous trompions, parcoquonous partions d'un faux principe, x !t demande mémo pardon a safiancée do ravoir outragée hors du vrai par ses assertions sur latibertc.H montreif'i toute tacandeurdeson âme, ctt'on voit en mémo
temps combienétait sérieuse et.di~nc (tolui !a jeunefilleavec laquelle itavait pu avoir de têts emrotiens et a qui il adressait un pareil ianga~o.« Ne crois désormais que ton sentiment, quand mêmetu ne pourraispas réfuter tes sophismes qu'on y oppose; i)s doivent d'aitteurs êtreréfutes, et ils te sont déjà. Il est vrai qu'on n'en comprend pas encorela réfutation. ') Mais il a un regret plus amer encore, parce que les
conséquences ont été plus ~ravo<;et qu'il no peut y remédier autant
qu'it le voudrait, Je vois combien sont tristes les principes quej'avais auparavant par t'exempte d'un ami très cher qui les a reçusdo moi il y a longtemps, sans être en état do tes bien saisir, et quoces principes ont conduit à d'autres, qui n'étaient plus les miens etqui d'ailleurs n'en dérivent pas nécessairement. !t n'est pas heureuxmaintenant, et il ne trouve pas en lui do connotation, parce qu'il estincrédute. H voudrait do meiiteurs principes, et il ne peut les com-
prendre. Ce qui m'afuigo, c'est do ne pouvoir lui prêter te secoursqu'il attend de moi à cet é~ard, parce qu'il est à Dresde ot moi ilLeipi.icL n Voilà donc Fichte devenu t'adopte de la philosophie doKant;i il en veut être aussi t apôtre, tt n'a plus d'autre but que dotravadter a en populariser tes principes et à lui donner, au moyendet'étoquoncc.uuo influence active sur le cœur humain. Ainsi t'éludede la philosophie kantienne no t'empêchera pas de cultiver les heu-reuses dispositions qu'il se sent pour t'étoquence; mais la première<-nfournissant il ta seconde la matière la plus subtime, furtinera etennoblira sa parotc. et cette-ci a son tour lui servira à propager
H':tm-:Kt LA ~UJT))~'n{.(:Si-: XI
t'autro.0uette.)d)nimb!t'pr(.p:tt-!itiun()<)t)r un prétticateur! (-:<)-i)na t.tts encore )-"m.t)('c.t'.)p:<-d)catiun.h)(' si, dit-d.j~nosuis p.tsdestine a cotoft)t'o,jaurai du moins jaconsotation d'avoirfait tout ce qui dépendait de mu', pour m'pn rendre capabto. Lereste n'e-stpas mon attire. ?t-'ichte resta ainsi ptongé dans i'étudede ia philosophie kantienne pendant tout !o temps qu'it pass.) aLeipsick n y consacrai tes loisirs que lui taissaipnt les tenonsqu'ti (huumt pour \tvr< Il composi) tu~neun e~H sur la OrX~M<fM~t)~n<. Il avait pnsc~ ouvrage pour tHxto de ses premierscommpouurcs, a cause dca vuu~ sys~'tn.tUqucs .jt)'it conUontsurt'ensptouto dot.tphitosopuiu, tcttc que Kunt.la con(;oit()). !t songeaità Hvro)'~ travail a t'impr~sion, quand unnnouvotfo épreuve io ror(;ado renoncer a eu projet et d'ajourner encore )n bonheur auquof ilcroyait toucher.
L'étude du h) phdosophiodcKant n'avait fait qu'exutter son amourpour s:) (ti~ne fianccc. Jamais Il no s'est senti autunt de L-oura~o,jamais ih)a eu autant de confianceen J'avcttir.Hien donc qu'it nosoit ~ucro ph)s avancé (tans ses a{rair(~mat~-ie))es (~t'a son départde Zurich, il ne veut plus tarder davantage a cpouser cetto qu'Hs'est choisie pour conpo~nc et qui a été la prcmi~o a )o rappoter.
Le~"mi)rs<79t.iNuiécritq))'Hscrn)ibronhfin()nmoisctqu'itest (~cidé a rotournor Muprcsd'ette. Il va enfin router te bonhcurdomo~iquo (juetui n'sprve un marine si bien assorti, et, danscottounion mûmo,trouver t'indépondancooUe repos nécessaires aux tra-vaux qu'il médite; mais voilaqu'au momont m~meoù il satuc leport, un coup do vent rt-n repousse. A peine a-t.it annoncé sonretour a sa fiancée, qu'une fatale nouvdio vient tout d'un coup ron-verser ou ajourner ses desseins il apprend que son futur beau-pèro n perdu sa fortune par suite do ta banqueroute d'une mai.sonà iaquouc il avait confié son avoir, et qu'd se voit menacé de finirses jours dans te besoin. Cetévénement condamnait Fichte a diiTérorson marirtgeavecmadetnoiset!p Hahn, et a recommencer cette viede tabeur, do privations otd'angoisses qu'it ne connaissaitque trop !tavait assox de ccura~e pour supporter son propre m.dhfjur niais cequi )'aft)igcait in plus, c'était,do no pouvoir venir en aide h des per-sonnes sichcros, ou au moins do ne pouvoir vivre auprès d'eues pourpartager tour sort. Loin de ta. il lui futtut s'étonner encore davan-tage. et atter jusqu'en Poterne pour trouver tes moyens d'existence
(!) Vcyoi:)uun~r<n~)~ ( r<<~«cd<tjt~~t~ Con~M~OM,?. 3m.
iM'hU~L'CTtu~ DU TttADtCTKURXH
fpn lui étaiont redevcnus nectaires lu neco~it~ lui lit accepter unep)ucede précepteur dans une famillo nchto d.) ce puys. Mais do non.vot'esdeceptions t'attendaient à Varso.'ie. Son air sérieux ot grave ledéfaut de soupière et do tk.xibd.te int.cront à on caractère, enfinsa mauvaise prononciation française. tout cela, des la premièreentrevue, dcph.t à la comtesse potonaiso qui devait lui confiort'ûducationdoson fils. Htto laissa voir Fichte sondésappointement,sans toutefois lui ddctaror qu'otte refusait du le recevoir mais notrephilosophe n'éuit pas hommo à accepter uno situation hun.itiantoquelque pauvre qu'it fut. !t écrivit à la cointo~soune lettre trèst)ero.afin de rédamer tes égardsqui lui étaient dus, si l'on consentaita retnptoycr, ou, dans )e cas contraire, une indemnité. Pour touteréponse. comtesse lui fit pro'nettre s~ protection auprès d'autresmaisonsdo Varsovie. Fichto déclara bien huutqu'it no voulait pasêtre traite comme une <.Mo passée de mode que l'on cède à ceux aqui elle petit encore convenir, et il lit sonner aux oreillos do la com-'csse un mot auquel elle n'était sans doute pas accoutumée: il pnrtade son droit. Commeelle n'entendait pas ce tungagc, il la menaça destribunaux et la fon.-a ainsi à s'exécuter. L'indemnité qu'il en reçutpouvait le conduire une coupte de mois. !t prit le parti do retournerdansson pays, et de s'arrêter, en passant, à Kœnigsberg. afind'v voirlegrand philosophe dont il était l'admirateur et le disciple.
La première visite qu'it fit a t ittustro vieillard no repondit pas àson attente. Kant, qui ne savait pas encore à quel homme il avaitaffairo,le reçut froidement. Mécontent do celto première entrevue,maisespérant obtenir un -mcittour accueil en se faisant mieux con-naître, Fichte écrivit, en quelques jours, d'après les idées do Kant,uneCn~f/Mc</<'(o«~ les )'ct'<nboa, et )a lui envoya en guise do tottrofto recommandation. Ce moyen réussit. Charmé do ce travail oùil retrouvait t'echo do sa pensée et voyaitpoindre un nouveau talentphiiosophique, Kant reçut Fichte avec beaucoup do bonté, quandcehn.ci lui vint faire une nouvelle visite. Invite a dtnor chez lui, Fichteoubliabien vite son premier désappointement J'ai trouve, ccrit-itduns tejo'n'nat où il consignait alors ses observations et ses imprcs.sions de c))a<!uojour,j'ai trouve en Kant un homme très agréable ettrèsspirituel j'ai reconnu en lui dos traits dignes du grand espritqn'it a montrô dans ses ouvmgcs. u
Mathcuro~cment tes soucis tes plus poignants se méfient au ptoi-sir (ju'i) trouvaiLdaoa lit societedc Kattt et dos amis de ce philosophe.Avt'L-qucttc punibtoémotion nctit-on p:)stcs tigm's sui~ntcs, écrites
HCHTE ET L\ )!H\'<)H'T{r~ FHA~CAtSK. XHt
dnns sonjournat u !n date du 28 août )79) a J'.n commencé hiernrevoirmaC'r<(~t<t' de nouvcH~pensées, vraimentbonneset profondes,tcsoutpresontéesamoi, et m'ont,nudheurcusement convaincu quemontravuih'tait tout a fuit superHcie). Je \ouhis aujourd hui poursuivrentcsnouvcitcs recherches mais je m'en suis senti tottemontdétournépar mot) imagination que jon'ui rien pu fair~ do toute )a journée.J'ai calculûqu'il ne me reste plus de moyens de subsistance quepour (juatorxojours. Je mosuis déjà trouve, i! est vrai, dans desembarras déco genre; mais c'était dans mapatrie pt puis, à mesurequ'on uvancoon âge et qu'on se fait do l'honneur un sentiment plusduhcat, cela devient de ptuson plus dur. Jen'ui point pris doresotution. et je n'en puis prendre. Je ne m'ouvrir:)! pas uu pas-teur Borowski, :) qui Kant m'a renvoyë.; si je m'ouvre nquelqu'un,ce no sera qu'a Kant iui-memo.
!<a<surecependant par tes manières franches et toya'es do !'oxcet-tont pMtour, Fichte se décide u lui faire l'aveu de su situation, et illento quu!que$ autres dém.u'ches. Mais rien no se pn'sentp, pasmcn)ouno ptacc do précepteur. Incupabto do travailler :m milieu ducette affreuseincertitude, hots d'état m6mc do jouir do la société desnouveaux amis qu'i) s'e~ faits à Kœnigsberg, it songea regagnerson pays mais il lui faut pour cda quelque argent. A qui s'adresser,sinon Kant Il se dirige vers sa maison, dans l'intention dos'ouvrir a lui mais, chemin f:)i~ant,le ca'ur lui manque, et il prendle parti d'écrire ce qu'ii n'osodiro de vive voix. La lettre qu'il écriviton cette ctrconstanco a été insérée tout :)u )ong dans sa biogra-phie(~) elle montre ciairemont combien il lui en coûtait d'adressera Kant une demande do co genre, et e)to témoigne la plus exquisedélicatesso jointe h plus nob!ofierté. Des to tendctnain, Fichte estinvité chez Kant. Ce)ui-ci le reçoit avecsncord'atité ordinaire, maislui déclarequ'it n'a pus pncore pu prendre do réso!u)ion .tu sujet desa demande, et qu'it ne sera pas en mesure d'y satisfaire avant unequinzaine do jours. Orques jours après, il j'invite do nouveau,et cette fois lui dedaro qu'i! ne peut t'obtiger de sa bourse, mais onmême temps il lui indique un moyen qui pourrait le tirer d'embarrascc serait de vendre au tibruiru Hartung, par t'intermédinire du pas-tcur Borowski, le manuscrit de sa C7-<~ Je <o«~ /M ~f<-~om. Fichte parle de te retoucher « t! est bien écrit, n lui répondKant. « Itst-cc vr.'i? au écrit Fiohto dans son journal « c'~st
(') !Ml7T-t8i. 1
tNTRUÏ~JC'noN DU TftAUUCTEUn.XtV
ourlant Kant qui du, et ce jugement du grand philosophe tuconsotedu refus qu'il vient d'en ~~oyer. Pourcomhtedem.'theur.to tibraire iiurtut~. (;ue Kant. h)i av.ut désigné, était alors absent
deKœnigsberg. Cependant .us ressotirce.sdiminuaient d'une manièreemayante. Aujoufd'hu', ccrit-it dans sonjournat, a ta date du
<3 septembre, je voûtais travaitt'ir, et je no fuis)-ic)). Le découra.43 svptumbrc, ju vuulai~ truvaitlur, t;t ju no fuia r~isa.Lo clécour~-~en~m. s'est cmpin'~de moi. Commet c<;h finira-t-i)? Quodo'K'n-drui-jo dans huit jours? Tout mon m-~ot .sera alors épuisa.. »
Ueurou~t)tenL, ici commua Lcipsick, un thomuot m6tneou sa si.Htutionparaissait,to ph)s deauspér~c, unu nouvctte phmcho du s.duts'ottrait u h)i: unu p)nce du prompteur chex )o comt~ do Krokow,dans te voisina~ du Dantzick. lui fut propose par )u prddJL-~teurSchutz; ~rucu a ia rccutotnaodattO))d~KunL, tes conditions tes ptushonorabtus lui 6t.)i~nt(tHotes. Qucttotjuo fut.sa r~pu~nanco pource
~cnrc do (onctions, ceLtcptace )o tirait d'un terribtu ontbarr~ ut,cette fois d'aincut's. il n'ont qu'a seieticitor: it trouva dans ianuusondu cotnto o).tic la comtesse Krokow tt)plus ahnabto accueil et les ro-Jations tes plus :<~rc.tbtus.
Tandis quit jouissait,de eu bonheur inespéré, sa CW<«~ (~ (ou~
ft!ue~«oM~,in)pt nncoa Hut!u,obtonai). unsucées qui (tëpassait toutessos espérances. Ici cncoro Fichto avait oud'abord a tuttcr contre du
graves dtfncuhes. Lo tivro, avant,d'&trcimprime, avait dû 6tre sou-mis a la consuro, et te doyen de ta facutt~ do theoto~ie, charge do
l'examiner, avait refusé i'<Mtpr<Mtu<«<'a cause d unuassertion qui luscandahsait. Quettcét.ntd~nc cette dangereuseassertion ?C'6tait.cottcidoo, empruntée a Kant, qu'une retigion qui se donne pour rcveteene doit pas se prouver par h's miractes ahcgués en sa faveur, mais
uniquement, par son contenu c'est-à-dire par tes idées qu'eneonsoi.,no. On demanda a hchte des changements et des suppros-sions. t) dectura qu'it uimuit mieux renoncer a pubiio!' son travail
que d'a!terer t'ex~'e~ic!) de sa ponsce. La nomination d'un nou-veau doyen, moins timoré, mit fin a toutes ces difficultés, oùSchuizotKanttui-momo étaient intervenus, et. l'ouvrage put enfin
paraitre. Lo hasard ntqu'it parut,d'abord sans nom d'auteur, et cotte
circonstance, indépendante do la \'o!ont6de Fichtc, assura to succès
do son Hvrc on l'attribua a Kant, dont i) rappùtaiten etTetles idées
et te tangage, et on no !')i épar~nn pas les éloges. Kantse fit un de-
voir d'en renvoyer l'honneur nFichte, et de désigner pudiquementson jeune ami comme fauteur dn livre. Mais ce livre avait fait son
chemin, cLceux mémo qui, te croyant do Kant, t'avaient te pius
FtCUTE ET !.A fU~VOLUTÏONPHANÇAtSK. XV
vante, étaient interesst' a te soutenir pour justifier leur mépris et
sauver leur sagacité.Il ne manquait ptus a Ficbto qu un bonheur, etcctui-ta allait sui-
vra tes autres. Par ses soins et son économie, madetnois('ttoMnht)
était parvenue sauver uoo partie de la fortunede son poro, ut o)te
avait encore <u!~t))ont6ce qu'eue ~n avait consorvo. Une pouvait de
nouveau otrrir a Fichte un sort indépendant auprès d e!<e; nu! ob-
stade ne s'opposait plus à leur union. Fichte rutom'na donc enfin a
Zurichpour y consommer co Utaria~e tant dCi-iruet tant ajourna.t) fut cct6br6 au moisd'octobrf de t'anneo 1793.
Anranctu onhn des soucis de tu vie matcricjto, mais jeune encore
(iiavaitators trenteetunan~), Fichtepeut désormais suivre tibrement
sa vocation. Sa première occupation est d'écrire en faveur (te la li-
bort6et du droit. ScsCon«~t'r«<(o~ sur /<t/o~<f<ott /'r~np<m«,ainsi
que sa /~Ut'h(~C(t<'b~(~<«~~f<'<f<e~s<'r, qui en est un quelquesorte !o prctudo, parm'pnt, je t ai ()~j dit, t'annce tnc'no do son
mariage. C'est ainsi (juo, loin do s endormir au soin du bonheur, il
consacrait les premiers toisirs que lui créait sa nouveHe situation a
ta cause dont il avait fait le but do sa vie, a la défense de la venteet de ta justice. Voitat'hommo; passons à t'ouvre.
n.
Il est. bien évident que celui dont nous avons raconté la jeunesseut retracé le caractère devait r~scntir h) plus vivo sympathie pourla Révofutionfrançaise.' Qu'on se représente Fichte, (!'apres tout ce
que nous en avons dit: doue du ptus t~'au ~onioutdu cœur to ptusNcrcL toptusnobio, tourna, pu!'suite, vnr&tes chosesntoratcsptus on.core que vers tapurospccutation, éprouve et pour ainsi dire trempepar )<;tnutheur qui n poursuivi sa jeunesse, t'in'topendanco person-none, la dignité mora)e, t'atnour de la tiberte et do h) )t)-t.icc sont,chez lui de veritab!es passions, que !'t'()e de h phiiosophio ()<Kan!.vient bientôt oxattcr jusqu'à t'enthousiasme. Qu'onn'eUt) maintenantcet homme, ainsi né f-t.ainsi formé, en présence d'une Hévotution quine s'annoncepas seutomont comme un changement a opérer dans taconstitutionpartic'.uiered'un peupte, m.us commeune reconstruction()o!a société tout enticre sur )cs bases du droit naLuretet de la justiceabso)ue, comme un at)'ranchisse<nentgênerai, commeune pauhgenc-sie de t'humauité, et qui, pour marquer d abord ic but de sa mission,
!N'mODUCT!ON DU THAn'JCTEUit.XVf
commence par une déclaration des ~.o.~ <~ /to~ d« c«~quitte emprunte a ta phitosophie; et qu'on se demande quette~im-pro~ion doit produire un têt événememsur âme du jeune phitoso-ph'3"Stta K~'oiution française apu émouvoir a ce point.des vioittardstc~ quj Kant et Ktopstock. duquoi eutttousiasmo no remptira-t-ettopas le cœur d'un jeûna hommo tôt que Fichte? Et.si tes premiers nesoient pointage premnnir contre i'ittusion de si bol!es promesses,comment to dernier ttendr~L-it comp:o des difucuttes que la réalitéopposeMtifi~t? H n'est pas moins scduiLqu'oux par les dëbu~sde laRevo)ut:ot),ni moinsconfiant dans t'avenir qu'oHopromctau\ peuples."h'juge comme cu~eHe hti~embtc un richu tableau sur ce grandtexte: tes droits de!homme eL la dignité de t honnno; e~ommoeux, il y voit le prélude d'une transfurmution gcucrate « Les chosesno sauraient demeurer comme elles sont actuettc.r.cn~: j'en ai pourgarant ccUe étincello divine qui brille en notre cœur.. Mais. tandisque, décourages pur tes violées qui souillèrent la cause de la hé.votution. !e\~ux
p~LeeUevieu~phitusophonotinronLpas longtempscontre ta brutalité des faits, le neveu de Ktop~ock e~ to disciple doKant. Quittant, encore do toute t'ardour de ta jeunesse et munid'ailleurs d une singuiière énergie de caractère, conserve ses sym-pathies a la Hcvotut:onet prend ta pturno pour en défendre les prin-cipes. sinon les actes, devant t Europe enrayée. !t est mémorabte queson ouvrage sur la Hevotution française est précisément Je 1793 (<).i/ttoure do la déception viendra aussi pour tui, et quand arriveracette déception, hétas trop bien jusUfieu, il ne .dëptoierapas moinsd'énergie contre l'autocratie napoléonienne qu'it en montre main.tenant on faveur de la Révolution française; mais tant que cette.cin'est pas devenue la proie d'un despote conquérant elle no cesse delui inspirer un xete ardent et te:; plus nobles espérances.
i-'ichtono ferme point les yeux sur tes violenceset les crimes qui,dans te temps même ou i! écri~, se commettent en Franco au nomde la liberté mais il en fait remonter litresponsabilité a ceux qui ontprétendu arrêter le progrès de l'esprit humain, et qui ont systémaH-
(!) M. Qumct'a compare que~uc part (~Mt0~cc< Italie, O~-Mco~ t. p. n~) Kantn la C.on~ituantc,et Fichtcà la ConYontion.Il y a bien h, en effet, quc~ue ana)o{:!c;et, au pointde vue pomiqucnr:a)grcde notablestthcrgencos. afnnitéssont manifestes. Maisque<hrcdu parallèleou Henri Mdnc compare!'œuvrcde Kant à celle de !aCo~'nnot). et Ficlitei'<~apo!<on?t) est vrai que !c spn-itue!ont!que a prissointm-.n~nedc no~ortir (<'A</<<c, p. t3U) qu'ila fait cette cun).poratïonptuapar phiMtttunc que a~ripuscmtf)'.
F!CMTR ET LA RÉVOLUTION FHAKCAtSE. XV!!
quement retenu !o peuple dans t'ignorancc, ut il en tire une grande!<;c' c'est que. si ion veut prévenir !osrcvotutions viotentes, ilfaut ouvrir les digues que l'on no cesse d'opposer à la marche dol'esprit humain, et instruire solidement h) peuple do ses droits et doses devoirs. Do cette manière, quand it en viendra à modtfior saconstitution, il n'embrassera pus ta licenceau thu du la liberté, et parsuite no sorapas exposa à rétrograder. Ècbiror le peupleet travaillerau progrès par ta propagaHond(~ lumières, tdcjtdonc, scion richto,t'uniquo moyen d éviter u t'avenir.tes désor(!res que l'on reproche àla Hcvotmion franc''iso. Autrement il nrrtvcra partout ccqu: se pro-duit en Franco tocours de la nature, violemment comprime, briseratous les obstacles, et l'humanité tirera de ses oppresseurs la plusterrible vengeance. Mais pour travaitter ainsi au progrès et éclairerle peuple, une chose est indispensable, une chose sans taquette nulprogrès regutier n'est possible et qui esL comme le principu de toutle reste, je veux dire la liberté do penser, ce céleste Pa:tadium det'humanitc, comme t'appotto Fichte après Kat)t (1)., Le premier soinde notre philosophe est donc de lu revendiquer auprès des princesdo t'Europe qui t'ont opprimée jusqu'ici.
Fichtepart de ce principe que la liberté de ponsor est un droitt~a~Mu6~, et il en conclut que nul prince n'a to droit de la sup.primer ou do la restreindre'.
Qu'est-ce eii ctïet que ta liberté do penser-? C'est un dos caractèresqui distinguent t'homme de l'animal c'est un otëmottoMcntiot desa peraonoatHe c'est la condition do son indépendance et de sa di-goité. Il ne saurait donc renoncer à cette facuho sans abdiquer sontitre d'homme, son rang (Je personne. 9a quatité d'être moral. Latiberte de pensor n'est donc pas seulement pour chacun de nous undroit incontestable, mats c'est un droit qu'il ne nous est pas permisd'aliéner.
Lorsque Fichte revendique la tibertc de penser comme un droit~t'énabte, cen'ost passeutomcntta faculté do penser tibromentpoursoi-mêmequ'itrccta!ne, mais celle do communiquer aux autres notrelibré pensée. La première n'est rien sans la seconde, et colle-cin'est pas un droit moins évident et moins inatiénabte que cet!e.!à.
On conteste ce point, en se fondant sur ce quete droitdecommu~Mt()ueraux autres nos pensées suppose le consentement des autres a
(!) Voyezt'opu:cute de Kant, intituK f)<'ce proroge fc/nMM/~ro~MM(AcoWo,w~u Mevaut t «t pt'(~<<?Me,que j'ai trathtit ù la suitedetaDd~t'<no~d~,p.~70.
tee ù la
6
ÎNTHODUCTfON DU THADUCTEUH.XV!H
recevoirnosdons. Ceta étant, dit-on, tu société ncpeut-etto supprimerune fois pour toutes ce consentement, ut exiger do chacun do sesmembres la promesse donc communique! absolument a personne sesconvictions? En raisonnant ainsi, on oublie qu'it est do notre desti-nation d'user librement de tout co qui peut servit- h notre cultureintellectuelle et morate, que, par conséquent, il no nousest pas permisde renoncer au droit de recevoir des autres les iumièrfs qui noussont nécessaires, et que si notre droit do recevoir est inaliénable,leur droit de donner ne t'est pas moins.
Mais, dit-on, nul n'a le droit do distribuer du poison, t.e poisontvoilà le grand mot des ennemis de la tibrc pensée; et co mot, si vieuxqu'il soit, n'est point encore use pour eux, nous en savons quoiquechose. Reste à savoir seulement comment ils s'y prendront pourprouver que ce qui est pour les uns une nourriture excellente est unpoisonpour les autres, et que tes philosophes sont, d'intention commede fait, de véritables empoisonneurs. Pour parier sans métaphore,le poison, c'est t'orreur, et t'erreur, c'est le contraire do la vérité'Or, disent-ils, si vous avez le droit de répandre la vérité, vous n'avezpas celui dopropager t'erreur.
Fort bien, mais faut-il que nous tenions pour vérité tout ce qu'illeur ptaït d'appeler vérité, et que nous rejetions comme faux cequ'ils nous donnent comme une erreur? Quel critérium nous offrent-ils pour distinguer sûrement l'erreur de la vérité !t y a, disent-ils,des erreurs anciennes et depuis longtemps réfutées. Mais réfutéespour qui Pour eux sans doute; s'en~uit-it qu'cttos le soient aussipour noua ~?
Que parle-t-on d'ailleurs d'erreur ou de vérité! ït s'agit bien decela pour les princes Toute la question pour eux est d'assurer leurdomination, et pour cela it ne leur suffitpas d'opprimerlos corps s'ilsn'asservissent aussi les esprits. En p:)r.itysant dans leurs sujets tepremier principe de l'activité spontunée, la pensée; en ne leur per-mettant pas de se hasarder penser autrement qu'ils no l'ordonnent,ils en font précisément les machines qu'ils veulent avoir, et ils peu-vent s'en serviratour gré.
il est fâcheux seulement que le droit ne soit pas ici d'acord aveclours prétentions. Pour qu'ils eussent le droit do déterminer ce quenous déviions admettre comme vrai, il faudrait qu'ils tinssent cedroit de la société et que celle-ci l'eût acquis par un contrat. OrFichte n'a pas de peine à prouver qu'un pareil contrat ost mo*raloment impossible c'Mt-à-dirc ittogitimo et non avenu, tt tui.
HCHTE ET ï.A RÉVOU'TtON BANCALS! XtK
suffit pour cela de rappeler que lit facutté do penser librement t<tdo communiquer ttbrcmont sa ponséu est un droit inaiiénabto det'homme.
Les princes auxquels on tient co langago ont une réponse touteprête c'est pour io bien de leurs sujets qu'ifs tour otem tu libertéde penser, comme on enlève il des enfants un jouet dangereux et,&l'appui de cotte assertion, ils étaient complaisamment tous tes mauxqu'enfante cette nberté. LaUévotution française leur fourbissait alorsuu argument qu'its ne pouvaient manquer d'invoquer: « Vous or-donnez, iourdit Fichte, vous ordonnez à vos gazetiers de nouspei~dro, sous des couleurs de feu, tes désordres ou se jettent des espritspartagés et échauués par tes opinions. Vous nous montrez un peupledoux, tombé dans une rage do cannibales, altéré de sang, insensibleaux larmes, courant avec ardeur à des exécutionscommea des spec-tacles, promenant en triomphe, avec des chants do feto, les membresdéchirés ot encore fumants de ses concitoyens, ses enfants enfinjouant avec des têtes sanglantes comme avec des toupies.? Que ré-pliquer a un pareil argument? On pourrait rappoler d'abord tes f~esplus sanglantes encore que )o despotisme et lu fanatisme réunis ontdonnées à ce mémopcup!o, et montrer que ces désordres ne sont pasles fruits de ta liberté do penser, mais les conséquences du long es-clavage qui avait si longtemps peso sur les esprits. On pourraitprouver ensuite qu'en dépit de cet exempte, la tiberte de penser, laliberté de penser sans limites, sans obstacles, peut seule fonder otassurer !obiendos ~tats, et confirmer cctto vérité pari histoire. « Jopourrais, ajoute Fichto, vousdesigner do grands et de petits pays quicontinuent de neurir grâce a d)o. ou qui, grâce a elle, sont devenusflorissants sous vos yeux, c Mais, en vrai disciple de Kant, il se
préoccupe moinsdu bien-être des hommesque do leur droit et do !eutdignité. C'est au nom do cott<)dignité et de ce droit qu'i) revendiqueici la liberté do penser.
A ce sujet, il rappotto aux princes qu'ils ne sont pas chargés dov~Her au bonheur de l'humanité, mais seulement, do défendro ses
droits, et que, par conséquent, leur premier devoir est de les respec-ter eux-mêmes. Il no s'agit pas pour eux d'être bons, mais d'êtrejustes. Qu'ils laissent a Dieu sa tacho et qu'ils se contentent du rote
qui leur est dcvotu: il estassez subtimo. Fich~ s'étcvc étoquemmentcontre cette basse théorie qui fait duprinco une sccondu Providence-.!t la renvoie aux courtisans qui s'avilissent et sèment ta corruptionpour se pousser :utx honneurs et aux richesses, et il p~rto ici .mx
INTRODUCTtON DU THAD~CTEUR.XX
princes et aux peuples t'austère tangage d'un hommolibre, d'un vé-
ritabtedémocrato.
Je n'ai voulu, dans les lignes qui précÈdent, qu'indiquer tes prin-cipes sur lesquels Fichto s'appuie dans son ~cox~~tr~ liberté <~
~MW je n'ai cherché à en reproduire ni l'argumentation, si serrée
et si vive, ni l'ironie mordante, ni la rnateéloquence. Dotelles chosesne s'analysent pas. Chacun peut tire ce discours, sinondans h} texte,du moins dans ma traduction et chacun, jo t'espère, ony reconnais-
sant les qualités que j'y signale, rendra hommage au sentiment quia inspiré l'auteur: un profondamour de la tibortc de l'homme et de
M dignité.
La /!fue~d<cf<t<o<K~lu ~~r<<<depo~Mt*n'est qu'un discours les
CoMat~rn~omdM<t<~c.s « nc~/tor les :<~<MtfH~du pM~<c <ur
/Ï~o~<<ton/<'<!t<cft<scsontun véritable ouvrage. Matheureusement cet
ouvrage est resté inachevé Fichto s'est borne a ctabtir les principesqui, selon lui, devaient servir h apprécier la téghiniitéde la Révolu-tion française ii a négtigé d'appliquer !ui-me<ncces principes al'examen do cotte révolution et de soi actes. Mais, si son ouvrageainsi restreint n'a pas pour nous tout l'intérêt historique qu'il devrait
avoir; tel qu'il est, il forme un des plus curieux monuments do cette
philosophie politique qui a produit la Révolution française ou quocelle-ci a suscitée à son tour. Fichte en effety discute,avec beaucoupd'élévation et de force, les plusgraves questions qui occupassentalorsles esprits, comme celles du principe de la souveraineté, du but do
l'État, de t organisation dola société, des rapports do i'Ètat et de
l'Église; et ces questions, que notre révolution a pour ainsi dire
jetées dans le monde, sont encore pour la plupart à l'ordre du jour.On peut contester quelques-unes de ses sotutions; on ne peut nier
que. indépendamment de ~mour de la liberté, de t égaiité, de l'hu-manité qui y respire, ettoj :)Csuient dé fuites avec une grande vi-
gueur d'argumentation, et que t'élude n'en soit très profttMbteà tousceux qui s'intéressent à ces problèmes. !t n'est pas sct'tement cu-rieux de voir un penseur tel que Fichte traiter de si tinporthutosquestions, au moment mêmeoù la Révolution françaiseles tranchaitd'une façon si éclatante; mais je ne connais pas do texte plus propreà susciter la rénexion, a tourner l'esprit du c6té des principes, àéclairer les avenues do la politique.
ï.a première question que pose Fichte, est cettedo ~vo:r d'après
FÏCHTE HT LA tŒYOLUTIOK FHANÇAISE. XXt
quelsprincipes t'n pensât il faut juger tes révolutions, C'pst, se!on
lui, f.'u'e de s'entfndre sur ce premier point qu'on a débité tant de
sophisme:;sur la Hévotution française: «Tcitoost, dit-il, !.t source
la plus féconde de tous ces sophismes insipides où s'égarent a chaque
instant non-~eutement nos beaux messieurs et no? bettes dames,
mais encore nos écrivains les plus vantés, quand ils jugent ce grand
drame que IiiFrance nous a donné de nos jours. Fichte veut donc
que l'on commence par rechercher d'après quitte espèce de règles il
faut juger une révolution, ou, en d'autres termes, à que! point de
vue on doit se placer pour l'apprécier convenablement. Cct!e rocher-
cho formel'introduction do son travail.
Maisd'abord doquoi parto-t on au juste, quand on entreprend de
juger une révolution? S'agit-it do la ~(ttnttc do cetto révolution,
ou s'agit-il (le sa angcsae? Ce sont là doux questions fort distinctes,1
et qu'il faut bien se garder de confondre. La première est une ques-
tionde droit it s'agit do savoir si en général un peuple a le droit de
changer pa constitution, ou si en particulier il a le droit de le faire
d'une certaine façon; la seconde est une question d'habileté a-t-il
choisi les meilleurs moyens d.ms les circonstances données? Ces
deux questions bien distinguées, il faut voir d'après quels principes
ondevra les décider.
H y a des gens qui n'admettent pas do loiséternettes du droit, et i
q))ifont du succès la pierre do touche de la justice. Ces gens-là, t
commedit Fichtc. attendent t'éséncment pour donner à un bandit
io titre de héros ou celui de meurtrier (t). est un grand homme,
un sauveur, un Dieu, s'il réussit; it eût été un brigand, un malfai-
teur, un scélérat, s'il eût échoué. Fichte ne veut pas discuter avec
ces gens-tà mais il on est d'autres qui, tout en reconnaissant au
moinstacitement des lois primitives et étcrnottes, croient devoir de-
manderà l'expérience la solution de ta double question dont il s'agit
ici. Ce sont ces derniers que Fichto voudrait convaincro.
C'est donc à t'oxpérioncoqu'it appartient, suivant eux, de répon- ¡
dro &cotte question Un peuple a-t-il le droit do changer sa consti-
tution, et, en particulier, de la changer d'une cortaino façon? Mais
qu'est-ceque cette expérience qu'ils invoquent? S'agit.-il doces pré-
tendus principes que nous recevons d'aburd do nos pères ou do nos
nôtres, que nous retrouvons ensuite chez tous ceux au milieu des-
quels nous vivons, et qui, s'incorporant de plus on plus à notre être,
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hvmui~'nu~ uu m~bucTKUh.XXtt
exercent sur nos jugements une inMucncodont nous no nous rendonspas compte? C'est ainsi, par oxomplo,que beaucoup do gens on sontarnvés a croire do très bonne foi qu'un homme peut être ta mattred un autro homme qu'un citoyen a droit, par le seut fait do sa nais.sance, a certa.ns privitcgcs (~o n'ont pas ses concitoyen qu'unpn~e est destine a f~ire te bonheur de ses sujets; ils ne songentguère a remonter aux causes qui égarent leur jugement. Ce ne sontsans doute pas ces préjuges que ton invoque sous le nom d'expé.r.encu? Sor.ucnt.co par hasard ces irions que produit en nous lesentunent obscur do notre intérêt, et dont il nous est si difficile denous préserver, mémo avec esprit le plus lucide et la meilleurevotons ? A forcede nous présenter à nous-mêmeset do présenter auxautres sous un manque honorabte ~s prétentions de notre 6go.smonous en faisonsdes prétentions t~tunes, et nous crions a l'injustice,quand on no fait souvent que nous ompêcher d'ctro injustes. Cen'est donc pas lu non p!us ce que nous consumerons, quand il s'agitdu droit nous no repousserons pas ~oins rinûuencedo t'intéret quecelle des préjuges. Quo signifie donc cette expérience que l'on invo-que ? C'est to témoignage de !)~o<
Mais, si c'est sur l'histoire que nous devons nous r~ter, quand ilsa~t de décider une question do droit, il y aura donc autant dorègles qu'il y a de sièdes; carre~érionce dont l'histoiro est ledépôt s'accrott avec chaque siècle. A cecompte nos droits et nos de.vo.rs ne sont plus aujourd'hui ce qu'ils étaient il y a cent ans et ilsM seront plus dans cent ans ce qu'iront aujourd'hui. Et non-seu-lement il y aurait autant de règles que de sièclos, mais il y onauraitautant que d'individus; car on ne saurait exiger que tout le mondeconnaisse toute l'histoire du passé, et la somme de nos connais-sances h~toriques din-ére néccssaire.nent en chacun de nous. Enoutre, les hommes n'ont pas toujours eu pour se guider te (lambeaudo !h.ston.e car l'histoire eue.me~e a eu son commencementAvant cette époque, il n'y avait donc pas de règles pour e~, etnous n'en avons pas non plus pour ~précier la légitimité de leursactos.
Aprèsuvo.ra.ns: réfuté !e système de ceux qui voûtent qu'onprenne t tnstoirepour juge dans la question de droit. Fichte romonte~rnen~o aux principes auxquels nous dovons ramoner toutes nosrecherches surja tcgiLin~ ou mégitimito d'un acte libre, et il ontrouve la source dans la forme ori~iro et immuable du moi hu-main, !t déduit de cotte forme t'idéedudevoir et cctto dudroit, Dans
t-C!tTK F.TLAHKV~H'TtON!'H.\KÇAtSE. \X!!I
cetto déduction, q"e jo me borno a indiquer, on reconna!t ht morate
do Kant et. jusqu'à son tan~agù(t).Fichte veut doncquc, pou:'apprccier la tegitimited'uno rcvoiution,
ou pour résoudre ta question do droit (p)'ette soulève, on oxclue ab- f
sotument t'oxpériencoot t'tustoire, et qu'on s'appuie uniquement sur j
ces principes que la raison reveto pr<ot'<et qui cons'.ituentce qu'it
appetteta forme originaire do notre espriL Mais sur le secondpoint,
c'est-'a-diro sur !a maniërod'apprécier ta sa~osse ou t'habiter d'une
révolution, il so montro tnoins dédaigneux de t'cxpdrienee et de
t'histoire, sans toutefois leur faire une hion tar~e uarL Mreconna!t.
ouo, quand il s'agit doju~cr, non pas ta bonLcdu but que poursuit
uoesocictôenchangean~sa constitution,–c'est, encore ta unuquestion
purement morate.–mais cette des ntOt/~tslos plus propres a atteindreIce but, une certaine c~t<~M~cc~p<'r~e~~(' (~ <'<tfnu/tt<tr<f«neest t
n<~eos<aire.Par t~ t''ichto n'entend pas cotte qui résulte do t étude
desditï'eroncesquo!e8iecte, toctimat, les occupations introduisent
entre los hommes. Selon lui, ces diu't'rences, peu considérantes en
comparaison de ta somme dos qualités communes, doivent s'effacer
de plus en plus avec losprogrès de la civilisation on tous cas, il est
aiitdd'apprendre à tas connaitro et a en tirer parti les moyens do
s'on servir, dit-il, sont des expédients mosqxins otinsignifhtnts. La
connaissance qu'it recommande, c'est colle que chacun peut puiseron soi-même, en ctudiaxt son propre cœur. MObserve.toi toi-memo,"1)
tette sera donc ici la maxime du politique. Cette connaissance n'a
rion~ demetcr avec t histoire vulgaire: ette est t'œuvro du penseur
quis'ohsorvotui-meme; mais Fichte ajoute que l'histoire, bien traitée,
poutservir a t'enrichir et a ta connrmer. Cette-ci en en'etnousmon-
troquetquochoseque t'exp6ricnco quotidienne ne nous apprend pas:elle nous fait voir ce que peuvent les Amesprivitcgiées dans des cir-
constances extraordinaires eito nous peint t'humanite dans son habit
de fête. Voiià t'onseignement qu'it lui faut demander; Fichte ne !ui
rcconnattguère d'autre utihte.
Arrêtons-nous un instant pour jugor a notro tour tes ideea quenousvenons d'exposer, ~khte a raison de vouloir que t'en distinguer
soigneusement ces deux choses la légitimité d'une révolution et ta
sagesse, c'est-à-dire l'opportunité et t'habitete de cotte révolution.
première est une question de droit, ct*it suffit pour la résoudro
d'en appeler au tribumd do la raison; la seconde est uno question de
(t) Voyexpa~ 7t-75.
INTRODUCTION DU TRADUCTEUR.X\!V
prudence, et ton no saurait y répondre sans recourir à l'expérience.Après avoir établi cotte lumineuse distinction, t''ic)tteavait beau jeupour faire à t'expcriencc et h l'histoire la part qui leur convientau tioudo cela. il en restreint singuticrement le rôto. Sans doute il ya tottosorte d'expérience et d'histoire qui est ici absolument stérileje conviens volontiers qu'it n'importe guère do savoir combien il ya eu do grandes monarchies ou que! jour u eu lieu la batailla do Phi-
tippes.Jajouterai même que ce qui a réussi aux uns pouvant ne pasréussir aux autres, il est purfois dangereux do suivre do trop prèsles tenons de l'histoire, bien qu'on ne puisse raisonnablement nier
qu'il n'y ait on générât beaucoup a tirer dot'expérience d'autrui. Mais
que dcmande-t-on, quand on renvoie à expérience et à i'histoireceux qui ventent entreprendre ou ju~er une révolution? On lour de-mande (le bien savoir à quel peuple its ont affaire, c'est-à-dire debien connaltre son caractère, ses qualités et ses défauts, sonpassé,ses traditions et ses habitudes, le degré do civilisation où il est par-venu, etc. !t est trop évident que, si l'on ne tient compte do ces
éléments, on n'aboutira a aucun résultat solide. Voilàen que! sens le
problème posé par Fichte devient un problème historique. Or c'estici que sa théorie me parait surtout en défaut. H fait beaucoup tropbon marché de la connaissance expérimentai, je no dis pas do
t'honnne, mais des hommes, tt n'est pas vrai que les différences quiexistent entre eux soient si insigniHantes, et qu'il soit si faciled'ap-prendre à tes connaître et à en faire usage. Fichte ne parle que do
celles que)e siècle, tectimat, les occupations introduisent entre euxil oublie celles que la nature a établies ettc-mcme entre les divers
peuples et qui constituent te génie particulier do chacun d'eux. Tan-dis qua les premières sont superficielles et passagères, les secondessont profondes et indestructibles: il n'y a quota fusion des races
quite:) puisse effacer. Toute révolution, toute constitution nouvelle
qui, quelque conforme qu'ct)e soit au droit absolu, n'est pas en har-monieavec le génie propre ot te degré do civilisation du peuple oùelle se produit, ne porte que des fruits avortés.
Je sais quets prétextes l'esprit de routine et d'égoïste conserva-tion puise dans ce qu'on nomme l'expérience. Cela est ainsi depuisdes siècles; donc cela doit être ainsi et ne saurait être autrement.Malheurau téméraire qui ne respecte pas ce que le tempa a consacré 1Et voilà comment se perpétuent les abus les plus odieux et tes ini-
quités les plus révoltantes. Contreces prétendussages qui repoussent,au nomdu passé, toute idée de réformo,déclarent impraticables tous
FICHTE ET LA HÉVOLUTÏON FnANpAISH. ~xv
tjs projets qu'on leur propose et no trouvent. /<t<M6~'que M <~< .«!
/t)~, Fichte a mitto fois raison. !) faut t';ur rappeler bien h:n)t, puis-
qu'ils t'oublient, qu'il y a un droit absolu, que ce droit e~t impres-
criptible, otqu'i! n'y a pas do fait. qui puisse prévaloir contre lui. Sur
ce point, Fichto est.admirable; c'est vraimentte phitosophodu droit.
Mais, ce point accorde, il n'en reste pas moins que, quand il s'agttdo changer ta constitution d'un certain peupte ou do juger sa révo-
lution, il faut, tout on prenant pour modèle l'idéal du droit, avoir
égard au caractère et a t'otat decopeupte, et on ce sens Mro appetà t'histoiro. C'est qn'i) no s'agit ptm icisetdemunt du droit pur, mais
du droit applique, et que, pour apptiquer )edroit, c'est-à-dire pour)e faire passer de)a théorie dans la pratique, il f.mt bien tenir comptedo lamatière à laquelle on!'app!iquo. Voilà ce que, dans sonenthou-
siasmo philosophique pour )o droit absotu et dans sa h.uno pourt'adoration aveugto ou intéressée du fait, Fichto a beaucoup trop
ncghgé.t!so rattache donc cxctusivcment a ce qu'on a nomme plus tar<t )
t'co~ p/x'/oM~t~Kc par opposition a t'co~ ~t~oW~«o.Mais il ne I
pouvait alors diriger ses armes contre )a doctrine que t'en a depuis
particulièrement désignée sous ce durnicr titre, puisqu'elle ne s'était
pas encore produite. Chose curieuse, ce fut précisément sous t'in-
<1uencode!a réaction que le despotisme impcri.d excita en AHcma-
gne contre les idous françaises,quo naquit cette nouvotto cco)ohisto-
rique, beaucoup plus savante et beaucoup plus rcdoutabto que colle
que Fichte attaque ici. D'après cette école, )e droit rationnel, tel quel'ont conçu !aphi)osophicdu xvttrsicctc et lu liévolut ionfran~ifc. est
unelettre morte il n'y a deree! et de vivant que le droit qui sort de
la coutume et de son d6ve)oppomcntnature). Toute tcgistation quii
n'en dérive pas est artincietto et stérito. Dans ce système, il est ri-dicu!ede par)erdo!'innucnccde):) phdosophiefurtcsinstitutions; )e
progrès du dro:t n'est possible que par une sorte do végétation na- l
turo))e, somb!<d)!eà cello de la planto. A cette école, qui supprimelarègle du droit au profit du fait brutal, et enteve h !a tihroinitia'ivcdeshommes consultant )a raison toute action rceHe dans le propresde leurs lois écrites, il faut opposer tes principes si etoqucmmentdéfendus ici par Fichte: la grandeur de l'idée du droit et lapuissancede la liberté humaine. Le reproche d'inconséquence adro'sc parFichte aux empiriques, partisans du hasard et ennemis de ta t.hi!oso-phie, peut aussi s'appliquer à ces sectateurs de la fatalité, quidccta-ront la philosophie, c'est-a-dirc ta libre cutturo do la raison, impuis-
INTRODUCTION !)U THADUCTEUn.XXV!
saute a faire le bien, tandis (juo d'un autre côte ils ta dénoncent.commeun Huaupour tes socictcs. MQuusignitiont, peut-on leur direen tournant contre eux tes parois do t''ict)tc, tf~eroment modifiées,
(rncsignifient ces avert~scmcnts t{uevous prodiguez aux peuples
pour !os mettre on ~ardo contre les fallacieuses promesses des philo-sophes ?Tot)ex-ous donc trntiquiHe5,ottaissM faire votre. v6g6-·
tation. Si k's philosophes réussissent, its nuruotou raison s'its noréussissent pas, c'est qu'ils auront ou tort. H no vous appartient pasde les repousser ;i!s seront bion jn~s pm'!o fait.. Tot~ cela est vrai;mais. pour 6ti'ejuste, il faut ajouter que, si t'ecoto historique est
absurde ot inconséquente dans ~on principe, ce principe n'est lui-même que !'oxagération ()'un etétnentdont ~iuhto et t'écotephitoso-
phiquo n'ont pas tenu assez de compte.Sauf cette réserve, je m'associe ptoinomont aux principes et aux
vœux exprimas ici par ~ichtc. Comme )u:, je repousse cotte ligno dedémarcation que l'on voudrait 6tahtir,d.)ns tes recherches potitiques,comme dans les recherches rcti~ieuse:), entre tt's vérités exotériqueset tes voritt's esotériques c'est surtout on politique qn'i! importe de
rappeter quo la vérité n'est pas le patrimoine exclusif de l'écolo,mais h) bien commun do l'humanité. Comme lui, j'appo))o de tousmes vœux tadinusion gcn<h'a!odes tumieres, qui, en cc!airant.deptunen plus les hommes sur leurs devoirs et leurs droits, les rondTatou-
jours ptuscupabtes dû travaittcr a la reforme do lours institutions.Comme lui enfin, j'invoque ardemment le règne du droit, et jem'écrierais avec lui: « 0 droit,sacré quand donc te roconnaitra-t-on
pour ce qun tu os, pour le sceau do la divinité empreint sur notrefront? Quand s'inctinera-t-on devant toi pour t'adorer? Quand nouscouvriras-tu comme d'une <;ôk'steô~ido, dans co combat do tous te{;intérêts de la sensihttito conjurés contre nous et quand nos adver-saires seront-ils pétrifiés par ton scut aspect? Quand les cœurs bat-tront-ils a tonnom, et quand )cs armes tomberont-ettes des mainsdu fort devant les rayons de ta majesté ( <)? Cotte invocation est-elle moins opportune aujourd'hui que clansles jours de tourmente oùFichte t'écrivit?
(t) Cette apostrophede Fichte«ttdroit rappellecelledo Kantau devoir,dansla Cr)<«yMefïela rfn.fnnp)'f«~xc(p. 2t!9dematradactiun), et celle-ciété évidemmentinspircc par cette do Jcan-JacquoaHousscauà la con-acicnco,dans la Professionde fuidu vicairesavoyard.On peut dire eil unsensque Fichteest le philosophedn droit commeKant est celui du devoir;maisil ne faudraitpas poussertrop tuincetteopposition,car topronier nesépare pasplusle droit du devoirque le secondne sépare le devoirdu droit.
ncHTi': i':T LA HEYOUi'i'h~ t'-HAM~AiSt' ~X\'tt
Maisce ne sont encore la que dos prolégomènes. Fichtc a montré
d'après quels principes on doit, selon lui, juger tes rcvotutions, i!faut maintenant poursuivre ces principes dans teur application, dotelle sorte qu'une révolution étant donnée, on soit en état d'en bien
apprécier la légitimité. Mais J'abord un poup!o a-t-U en générât iodroitde changer sa constitution politique? Tctto est la première ques-tion qui se présente.
Copoint nous paratt aujourd'hui si ectatant et si incontestable; ilest, chez nous, tcttomcnt entre dans l'opinion publique, tellement
passé à l'état d'axiome, qu'it no nous semble mémo pas fairel'objet d'utio question. Maisquot'on se reporte a l'époque où Fichtoécrivait son ouvrage le droit qu'a tout peuple de changer saconstitution pohtique était atorn audacieuscmont nié au profit dudroit divin des rois, et ceuxqui voûtaient l'exercer avaient a le dé-fendre non.scutomont par la ptume, mais par les armes. Qu'on se
rappottula manifeste du duc de Drunswick, cet insolent dcn dos roisa t'ind~penduncodos pcupte~ et la guerre faite à la franco au nomdos droitsdes souverains' Est-il besoind'ailleurs do remonter jusquo-!a? Aujourdhui mémo, en ptein x)x*siècle, eu droit qui nous paraîtsi évident est-il reconnu partout comme il l'est chez nous? Allezdemander à la cour do Home si le peupto romain a le droit do sedonner un autre gouvernemont que celui du saint.pero. Laissons decôté topape n'y a-t-il plus do souverains qui invoquent leur droitdivin? Cen'est donc pas, même do nos jours, une question tout à faitoiseuse que celle à laquelle Fichto a consacré son premier chapitre.Telle est la force dos préjuges ot dos intérêts qu'il n'y a point de
droit, si lumineux qu'il soit et si solidement assis qu'il paraisse, quin'ait toujours besoin d'être défendu. En tous cas, c:ost t'ccuvre dela philosophie do rechercher les principes de tous nos droits, et deiesétabtir ainsi eux-mêmes aussi exactement et aussi ctairotnontquepossible. Voyons donc quels sont tes principes sur lesquels Fichtefonde le droit dont il s'agit ici. Co droit est incontestable, mais les
principesd'où il le déduit sont sujets à discussion.Il rappellod'abord ce principe, enseigné par Rousseau, que ta so-
ciété civite et politique se fonde sur un contrat. On a, il est vrui,attaqué cotte proposition, en l'interprétant comme si elle exprimaitl'origine réot!e dos sociétés politiques. It est trop évident, dit fortbien Fichte, pour quiconque examine nos constitutions politiques ettoutes celles dont l'histoire afaitmentionjusqu ici, qu'ottes nofurentpast'Œuvred'unodétiberation ré~echie, mais unjeu duhasard ou l'effet
INTRODUCTION DU TRADUCTEURXXV!
d'une violenta oppression. ~Hes se fondent tnutes sur !o droit duplusfort. Mais là n'est. pas la question il no s':)git pas ici do ce qui estou a été. mais de ce qui doit Otre; Hno s'ngit. p.<sdu fait, mais dudroit. Or, en droit, il est incontostabtMqu'une société civitono peutse fonder que sur un contrat entre ses membres, et qu'un ~tat agitd'une manière injuste, quand il impose a ses citoyens des lois aux-
qudtes its n'ont pas consenti, au moins ultérieurement.Mais d'ouPichte déduit il ce principe, et comment Fontend-it?
C'est ici qu'est la difficulté. L'homme, en sa qualité d'être raisonna-b!o, est exclusivement soumis a la loi morato nul n'a te droit doluion imposer une autre. Mais, commecette loi te laisse, en beaucoupde cas, libre d'agir comme il lui ptatt, il peut bien alors conclure telscontrats qui lui conviennent sur les choses qui restent à sa disposi-tion. Seulement il nofaut pas oubtierque, s'il contracte ainsi quoi-que nouvello obtigation, c'est qu'il ta bien voulu, puisqu'on dehorsde la toi morato, il n'y a do loi pour lui que celle qu'il s'impose atui.meme: nul hommene peut recevoir de loi quo do tui-momo; ot,quand il s'en laisse imposer une par une volontéétrangère, il abdiquesa qualité d'homme et se ravale au rang de la bruto. Or, selonFichte, la législation civile ou politique a uniquement pnur domaineles choses que la loi morale abandonne à notre liberté, ou, comme i!dit, les droits (~'dnf~/Mde t'hommc. Tout le reste appartient &uneautre législation, a la législation morate, qui n'a rien de communavec la première et qui ne la regarde en rien. Les lois positives,ne faisant que regter l'exercice do ces droits aliénables, ne sont doncobligatoires pour nousque parce que nous nous les imposons à nous.mêmes, et, par conséquent, une constitutionciviton'est légitime qu'au.tant qu'otte est volontairement acceptée par tous ceux dont elle doitrogter les rapports, c ost-à-dire qu'autant qu'elle se fonde sur uncontrat.
De là aussi dérive, selon notre philosophe,!o droit qu'a tout peuplede changer sa constitution comme i! t'entend. Puisqu'elle résulteelle-même d'un Ubrocontrat, il dépend toujours de la volonté descontractants de ta modifier comme il leur plait. !t n'y a mêmepaslieu raisonnabtemont de pos~r la question.
Ainsi, dans la théorie de Fichte, la société civile est, en droit, uneassociation toute volontaire, et ce qu'on nomme constitution politi-que n'est que le contrat librement conclu entre les membres de cetteassociation pour en régler les conditions, d'ou il suit qm'otte peuttoujours être modifiée.
XXIXFÏCHTE KT LA HÉVOUJTtON FRAKCAISE.
Quiconqueno se laisse point aveug!cr par les préjuges accordera
à Fichto qu'une constitution poiitiquo, pour être vraiment tégttime,
exigo en effet lu libre adhésion de ceux qu'ette est appelé à r~gir, et
qu'en co sons elle se fonde sur un contrat et do co principe, qui se
déduit tuiméme de la Hberié et de la dignité inhérentes à la pcr.sonne humaine, il conclura qu'une constitution peut toujours être
modifiée par le libre consentement, de ceux qui hj reconnaissent pourloi. Jusqueià nous sommes d'accord avec t~iehto mais il est un point
que nousne saurions lui accorder, et qui à son tour entraîne certaines
conséquences fort graves que nous aurons à rolover p!ns tard. La
constitution politique n'a pas scutcment pour but, comme t'affirme
Fichte. do régler dos choses que la raison abandonne à notre tiborté;maissa principale fin est de protéger les droits do chacun contre la
fraude ou la vio!onco des autres, et do faire partout respecter la
justice. Or, comme le maintien de ces droits ou do la justice n'est
possibfoque dans lit société civile, t'ctat. de nature étant nécessaire-
ment un état de guerre et d'iniquité, il suit que c'est pour tes sociétés
humaines et pour tous ceux qui en font partie un devoir commandé
par la juslicomême, ou, comme dit Kunt, un d~uon'(~ <o<<, de se
constituer en sociétés civiles ou politiques, et que ce devoir, comme
tous les devoirs do droit, nous peut être légitimement imposé par une
contrainte extérieure. Sans doute chacun ost libre do quitter la so-
ciété qui no lui convient pas et d'en chercher une autre qui lui con-
vienne mieux mais, à moins do vivre tout seul dans une Hedéserte,
nut no peutse soustraire a l'obligation de reconnaUrodeslois publiques.C'est !a ce que Kant a parfaitement compris ()), et t'en peutici cor-
riger le disciple par le ma<tro. 11n'est donc pas exact d'assimitor ta
société politique à toute autre association, et le pacte civil a tout
autre contrat. Cette association est exigée one-n~me par la justiceou par le droit; et, s'il dépend do ses membres de la constituer do
teHeou to!)cfaçon. il ne dépend pas d'eux do n'en constituer aucune:
ils manqueraient ainsi au plus impérieux des devoirs. J accorde quela société civile se fonde sur un contrat, mais a condition qu'onm'accordera quel'institution do ce contrat est obligatoire. Il est bien
vrai que toutes !os lois positives, même celles qui regtent les appli-cations de la justice et sont destinées a lit garantir, supposent t ad-
hésion des citoyens qui doivent vivre sous ces lois, puisque autre-
(t) Voyezla Doctrined« drof. p. 2';7 a SOSde ma traduction, et mon/<~a~ïe cr~MC de cet ouvrage, p. t.xx)et suivantes.
INTRODUCTION THADUCTËUR.XXX
ment, sous prétexte de tes protéger dans l'exercice de lours droitson pourrait bian les opprimer on leur imposant des lois arbitraires etinjustes, et le fait n'est pas inouï mais eo n'est pas seulement parceque nous nous :os imposons à nous-momes quo te.~lois positives sontobligatoires pour nous, c'est aussi parce qu'elles sont l'expression etla garantie nécessaire do litjustice et du droit. La théorie exposéeiciparFichte est insoutenable, et tui-memo, commeon le verra plusloin, na point tard6 à t'abandonner, mais mathouroMsementpour sejeter dans une autre extrémité.
Qu'on ne l'oublie pas d'ailleurs: si Fichto ne reconnatt dans tasociété civile d'autre principe d'obligation que lit libre volonté descitoyens, c'est qu'il borne la législation civile aux choses qui nerelèvent en eu'ot que de notre volonté, et qu'il met a part tes droitsinaliénables ou imprescriptibles de l'homme,lesquels n'ont besoin,selon lui, d'aucune sanction publique. Su théorie n'a donc rien decommun avec celle de ces politiques qui confondent en nous t'hommeet le citoyen et soumettent notre personne tout entière aux décisionsd'une volonté arbitraire, qu'ils décorent du titre de volontégénéral.Fichte n'admet pas plus la tyrannie dela volonté générale que celled'aucune volontéparticulière, puisqu'il place au-dessus do toutes leslois positives les droits imprescriptibles de l'hommo, et puisque,dans la sphère ou il réduit la législation civile, lit volontégénératenedevient une loi pour chacun de nous qu'autant qu'otto exprime sapropre volonté. Dans ce système, une majorité, quelque imposantequ'elle soit, no saurait m'obliger, si je n'y ajoute ma propre voix.Lathéorie do Fichto est donc fondée sur un principe absolument con-traire à toute espèce do despotisme mois ettooubtioque la justice,dans ses applications sociales, a besoin d'être représentée et garan-tie par dos lois positives, sans quoi l'arbitraire ot la violence régne-ront bientôt parmi les hommos et, pour soustraire la société à latyrannie des lois et dos pouvoirs pubtics, elle la ramène à l'état denature ou la réduit en poussière.
Certes, Fichte a beau jeu contre la plupart dos gouvernementsqui ont existé jusqu'ici parmi les hommes, n a raison de lourdemander où sont leurs titres à notre reconnaissance, et (le teurreprocher amèrement leurs vues égoïstes, leur esprit do conquêtejoint a leur esprit do domination, leurs attentats contre la liberté dela pensée, ceprincipe vilal de toutes les autres libertés, leur corrup-tionmorale, etc. Ce no sont pas là do vaines déclamations ces accu-sations, inspirée., a Fichte par le plus pur sentiment moral, ,,e sont
F!CHTR KT LA nHVOï.T!ON FRANÇAISE. XXXt
pas soutenant fort éloquentes sous sa ptume; ettes no sont, ttétas'
que tropjuatm. It n'es! fille trop vrai quo CMgouvernomonts ont on
générât étrangement abusé doteur pouvoir, qu'il-! l'ont presque tou<
jours mis au service de tours passions ou de tcui's intérêts priver, et
qu'itsso sont faits tes tyrans do ceux dont ils étaient chargés do dé-fendre lit liberté elles droite. Quand on parcourt t'histoire, et que,ce terrible témoignage à la main, on remonte le long Gotgottta de
l'humanité, on comprend la réaction qui se fit au xvuf siècle, dans
l'esprit do certains penseur; contre la société civile, et qui lesrejetavers l'état do nature. Mtpourtant, il faut bien le rcconna!trc, si ar-
bitraires et si violents qu'ils fussent, ces gouvernements valaientencoremieux qu'un état de nature ou il n'eut existé d'autre Joi quela force.
Fichte soutient ensuite quo le but dernier do toute constitution
politique doit être la culture do notre tibertc, et finalement cetteliberté même, c'est-a dire t'indépendancu absolue de notre moi a
t'égard do tout ce qui n'e:.t pasla loi do la raison. Admettons que teldoiveêtre en cnet le but final de toute constitution politique si ta
sociétécivileest unmoyen indispensable relativement a cette un,c'o~tdonc un devoir pouf nous d'organiser ta société civile, au moins a
titre de moyen. Que devient alors cette assertion, que la législationmorale ne regarde en rien la législation civile, puisque cettc-ci n'ost
que t'exécution d'un ordre prescrit par la première ? Mais, âpresavoir trop séparé la législation civile do la législation morale, I''ichte
n'assigno-t-it pas ici a la constitution politique un but ptacé en dehors
do sonchamp? La société civitua essontiollementpour fin de garantirles droits do chacun, et par conséquent do faire que chacun puissesuivre librement sa destination. Mais cela fait, elle n'a point à s'oc-
cuper do la façon dont il nous conviendra d'user do notre liberté
cela no la regarde plus. Si ce but iinat, ajoute Fichte, pouvait
jamais être atteint, il n'y aurait plus besoin de constitution politique;la machinos'arrêterait, puisqu'aucune pression n'agirait plus sur
elle. La loi universotto de la raison réunirait tous les hommesdans
une profonde harmonie de sentiment, et nulle autre loi n'aurait ptusa vcitier sur tours actes. 11n'y aurait plus lieu d'étubtir aucune
regte pour déterminer ce que chaque membre de ta société devrait
sacrifierde son droit, puisque porfonnc n'exigerait plus qu'il noserait
nécessaire, et que personne ne donnerait moins. Commetous seraient
toujours d'accord, il n'y aurait plus besoin do juges pour terrnittor
leurs différends. » Cctto idée remplit Fichte (l'enthousiasme, et, tout
INTRODUCTION DU TRAt)L'CTEUn.xxxn
on reconnaissant qu'elle no se révisera jamais comp!ct<tnont, itérâtque rhumamtô s'en rapproctte.-a toujours (lavabo. H a exprimeamours !a m~mopensée, en disant que !obut de tout gouvernementtest de rendre la gouvernement supcrUu (t).. J-admotsco principeon un sens le propres dos constitutions pondues consiste certaine~monta a~-anchir do plus en plus l'individu, et à lui !ais.er do plusen ptus !o hbro gouvernement do tm.me.no. do telle sorte que t'tttat,quia t origine s'o.t emparé de i'hommc tout entier, doit nnir par luirestituer toute son autonomie. Mais ceta vcut.i: dire que t'Etat soitune formeaccidentel et transitoire de la société? Oui, si par ÈtaLon entend cette sorte de gouvernement qui a )a prétention do diriger
hommecomme un enfant. Non, si l'on veut designer par )a l'on-semble des !oi. et des pouvoirs pubtics qui ont pour but d'assurer lerespcctdes droits de chacun. Le premier doiLs'cnaccrdoptusonptusavec le progrès dos sociétés le second est une condition nécessairede la vie soaate fondée sur ta nature humaine, il no dispara!trnqu'avec elle. CctuUa pejt convenir aux sociétés mineures: il doitsevanomraumomentou eHesat~ignont lour majorité. Mais.m~jeures ou mmeures, ta société humaine ne saurait vivre en dehors dudermer. )t est beau do poursuivre un idéal encore faut-il qu'ilsoit, je no dis pas parfaitement reuti.abto(it e.t de litnature même dei'tdcat do ne) être pas), mais du moins conforme a la nature do t êtreauquel il doitservir de type. Or, t'humant étant donnée, je conçoisbien un Mat idéal mais je no conçois pas comme l'idéal d'une so-ciété humaine l'absence do tout r:tat. Fichto oubtio donc ici iescond.tions dothumanité et, quoi qu'H en (i.se, son .deai n'est (~ unbeau revo.
L3Sdissentiment que jo viens de marquer ont des conséquencesqui se retrouveront dans toute la suite de cotte étude mais ils nefont rien a la question dont il s'agissait dim'; ce premier chapitre. J!n'en reste pas moins que nulle cnnsUtution potitiquo n'est immuabtoqu'il est dans leur nature il toutes dû se modifier, et qu'une c!auseqm dcctarerait immuahte une certaine constitution serait en contra.diction narrante avec t'esprit mémo do t'humanité. Tout en faisantmes r~ervt.8 sur certains principes de !a Utéoriede Fichte, je nopuis qu apptaudir à ces conclusions.
II somb!e que la question posée par lui soit maintenant épuisëe,
(t ) VoycxlesAcpMa«tr J~t~M d.<~M~ r/.o~'M /e«,-M.prononcéesHt~a en t79t, p. :)2 de ta traductionde M. Niculas.
HCHTE ET LA !ŒVCU!T!ON FRANÇAIS! XXXHt
c
et qu'il no reste plus rien à y ajouter. Atais, comme on soutient,(juetu droit qu'a un peupte de changer sa constitution peut être aliéné,notre phitosopttoentreprend de réfuter cette opinion, en examinant
successivement toutes tes tnanieresdont il pourrait t'être, et en mon-
trant que, dans chacun de ces cas, il demeure inatiénabtc, on dépitdo toutes les conventions contraires. C'est ainsi qu'it a été conduit a
tracer ici le plan qu'il se proposait do suivre dans te reste de son
ouvrage (t), etqu'itn'a exécute qu'en partie. Pour nous, nous
pourrions nous on tenir ta, s'il no s'agissait que do défendre un
droit incontestable à nos yeux contre des objections condamnées
d'avance; mais les questions subsidiaires que Fichtese trouve ainsi
amené à traiter sont si intérc&santes et si graves, et il tes traite
tui-mémod'une façon si curieuso, que nous no saurions nous dis-
penser de le suivre jusqu'au bout.
Le but du troisième chapitre est de prouver que le droit de changerla constitution politique no peut ctre aliéné par un contrat de tous
avec tous. Je no conteste pas cotte proposition, mais seulement la
théorie sur laquelle Fichto t'appuie, qu'it expose ici avec une préci-sionnouvette et dont il déduit hardiment !es conséquences, qui, selon
moi, le condamnent.
Fichto se plaint de la confusion d'idées qui naît dû-sens équivo-
que du mot société. H a raison: il importe de bien distinguer la
société civile do toute nuire espèce de société, malheureusement la
distinction qu'il propose, loin do résoudre la question, ne fait quel'embrouiller davantage. II signato técuoit; mais, pour t'éviter, it se
jette dans un autre. C'est qu'il so fuit une fausse idée do la société
civitoou de t'~tat. Selon lui, la société civile n'est qu'une espèce par-ticulière do société fondée sur un contrat spécial et rentrant ainsi
danscettesortcd'association qui en générât se fonde sur un contrat.
Doces deux espèces de sociétés, cette qui se fonde sur un contrat en
générât et celle qui on particulier se fonde sur le contrat civil, il dis-
tingue une autre espèce do société qui est indépendante de tout
contrat, et. ne reconnut d'autres lois que celles du droit naturel.
C'est ici, selon lui, le domaine du droit naturel tes deux autres es-
pèces do sociétés, tout en restant soumises a ses lois, appartiennentà dos clomainesqui ont leurs objets propres, celui des contrats en
générât, et celui du contrat civil en particulier. Ainsi ta matière du
contrat civil est, selon Fichte, absolument distincte de cette du droit
()) Voyezle chapitrem /t ~c<OM<lerc~c de cellercc/tCt'c~,p. t30.
INTnouUC'HOM ht) TR~UCTEUB.XXXtV
naturot, et ta société civi:o n'o~t qu'une espèce particutioro d'asso-ciation, arbitraire et conventionnetto,comme toute autre, comme unesociété cofnmorciatcp:)r exempte. Voii~bien l'orrottr que nouaavons
déjà relovée. L'institution dot'Ètat n'est nuttemont arbitraire, maisnécessaire: c'est te droit tui-tnôme qui t'exige. et sa première finost (t'eu assurer te respect. Lo ct~ampdo la société civile est donc
précisément cctui du droit nattu'ot eoluiquo Fichto lui assigne n'ost
que t'accessoiro. nontoprincipal. Quecotte société, une fois consti-tuée, pronno les mesures qui lui conviennent rolativement tôt o'ttel objet.,h t'mdustrit), par exomple, ou n l'agriculture, ou a t'educa-tion, ou a t'ombe)!issomont des villes, elle ost sans doute parfaite-mont tibro n cet égard, pourvu qu'oUo ne viole en cola aucun
principe du droitnaLuro! mais ce n'est pas lit le but principa) de soninstitution. On pourrait diro quo le but de t'élut est d'abord la ga-rantie de tous !o3 droits, et accessoirement!a prosperit6 de la société.
D'après cette dénnition, t'~tat n'est plus, comme dans !a théorie doFichto. quctquc chose do purement arbitraire: il est (~ fh'~t. Sansdoute !o droit naturo) est au-dessus det'~tat, puisqu'il doit lui servirde principe et de règle; mais que serait unesociétéou il ne trouverait
point :-agarantie dans une loi potitivoet daas une puissance pubtiquo?2~ichtua be.tudire sans exagérer la méchancetéoriginelle dof'hommo,on peut affirmer quo cet ôtatdo nature serait nécessairement un étatde guerre, et que la force brutato on serait la souio loi. Qu'ondehorsde lasociété civile, comme au soindo cotte société, les hommes no laissent pas d être soumis aux toisdu droit nature), cela est tropévident;mais à quoi servent ces lois, et que deviennent nos droits récipro.ques. s'its sont toujours il lit merci du caprice et de la violencedochacun? Ne dites donc pas que t'~tat transgresse sos timitcs, quandil s'empare d't domaine du droit natm'o) il est au contraire surson véritabk; tcrratn. Ju rectmn.'is avec vous qu'il est de aa natureenvahisseur, ~tquo, si on le tai~so fniro, il empiétera bientôt jusquesur te domaine de ta conscience ronformons-tedonc, autant quepossible, dans ses limites mais ses nmitos, ce sont précisémentcelles du droit nature). Tout )o reste lui doit demeurer étranger; oudu moins n'être pour lui qu'un accessoire et un moyen, qu'it aban-donnera do ptus en ptus a la liberté iadividueno. Rn ce sens, il est
juste de distinguer deux espèces do sociétés ta société civile, qui a
pour fin la garantie des droits de t'hnmme, et hors de taque))eon peutdire qu'il n'y a pas de salut pour le droit, et, sous la surveittancaot la
protection dos lois et de la puissance publiques qui constituent cette
F!CHTH ET LA HKVOLUTtON t-HA~ÇALSK. XXXV
société, cotto autre sociétéon tus txxnmosn'ont.plus d'autres rotations
que cettos qu'il icur pbtt doformer entre eux, suivant tcurconsciunce
ou leurs goûts, ou lours intérêts, et qui se subdivise d'après ces
diverses rotations. Tettes sont los société!: religieuses, tittéruires,
industriattes, etc. Voita l'ospêco do sociétéqui a pour champ to
domaino dus contrats, c'est-n-dire celui de la tiburtu individuelle;
le domaine du droit naturot est le champ do t'autru, cetto-ci n'est.
donc plus arbitraire et puromonu convontionnutte. Sund oUe toute
autre 8oc!étôserait impo~iN.o il n'y a pas do contrut s~rioux entre
lesindividus sans une puissance pubtiquo qui gat-amisso le r~pect
doa droits de chacun mais te! est aussi Je rûte auquel il convient
que !'Ètat po réduise de plus on plus. 7<~ .S(!j"c<c<t<m)<<«.
Fichtea bien raison do revendiquer les droits pt'imitifsdu l'homme
contre ioa prétentions exorbitantes de t ~tat, en monlrant que ces
droits sont antérieurs et supérieurs à toute constitution civik. Il de-
ternunc supérieuromonti'origine du droit do propriété, en lui donnant
pour ptincipo la libro activito de t hommeapp)iquant ses forces à la
tnatièrchruto et lui communiquant sa/b~xo, t:'est-a-<tiroon unmoth<
travail, et sur ce point sa théorie corrige ou compteto heureusement
celledo Kant. It rotevo justement la contradictiott,ronouvot6edenos
jours, où tombent, sans s'en apercevoir, ceux quidénient à l'individu
le droit de propriété, qu'ils accordent a t'Ëtat. tt ncrcfuto pas avec
moins de raison le sophisme de ces écrivains franc-ais qui soutien-
nent que tous les hommesont droit il une egatoportion do terre, et
que tout le soi do la terre doit être partagu entre eux par portions
égales. Tout cela est excellent. Non, ce n'est pas i ~tat qui est ta
source du droit de propriété, pas ptus qu'il n'est la source do tous
nos droits primitifs. Mais, tout en admettant cette vérité, n'est-it
pas juste do reconnaître que, si le droit de propriété ne dérive pas
de t ~tat, it no saurait trouver do garantie et do sécurité que dans
t'~tat, oLquo dès-tors il n'en est pas au~i ab&otumentindépendant
que Fichte le soutient ici? H est impossibto d'admettre que chacun
puisse, quand bon lui semble, auranchir sa propriété, avec sa per-
sonne, do toute loi civile, et qu'it lui suffisedo déchu-or qu'il cesse
de fairo partie do t'~tat auquel il a appartenu jusqu'alors, pour
n'avoir plus désormais rien a déméter avec lui au sujet de la pro-
priété qu'il possède sur le sot mémo occupé cet ~tut. Tetio osf
pourtant la conséquence a laquullo conduit la théorie do Fichte sur
lit nature de t'~tat. Dans cott~ théorie, que nous avons \'uo repnraitru
de notre temps, t'~tat n'est plus qu'une sorte d'assurance mutuotk:
t~TnOÏU'CT!~ ÏU' THADL'CTË~.X\t
entièrement libre et toujours révocat~tea votonto.commetctte ou teitosociété que nous voyons fonctionner sous nos yeux. !) n'y a qu'unepetite difficulté c'est quo, sans un pouvoir public fhorgé de fairorespecter tous les droits et exécuter tous les contrats, tous lesdroitset tous les contrats sont ittusoires ~). Je conçois bien une sociétéd'assurance dans un ~atrégutièroment organise; maisôtczt'Ètat,comment cette société serait-elle possible '?
Nous venons de toucher une des conséquences de la thënrio duFichto. S'il a bien vu l'origine du droit do propriété, il n'a pas sureconnaitre les rapports néco~airos do la propriété individuelle avectasociétécivite,fnutcdosctrc fait une idée juste de la nature det'État: il t'atfranchit do toute obligation, ne reconnaissant d'autreloi quêta volontédu propriétaire, H est curieux de te voir exaltor àce point tes droits de ta propriété individueHe dans le lumps mêmeoù les représentants de la He\o!ution française connsquaient losbiensdes ombres. H est. fâcheux seulement qu H n'ait pas Juge a propos do
s'expliquer sur cet acte, si contraire a ses principes.'< Si Fichto exagère iosdroitsde la propriété ind.viduettoen facedesjustes exigences de lit société civilo, on revanche il ~n restreintl'étendue outre mesure, en retranchant t'hcrédhc du nombre desdroits naturc)s,p-)ur en faire un droit purement civil. Selonlui,dans l'ordro nature), chacun est le légitime héritier do chaquemort; car, des que quelqu'un sort de cemonde, il y perd tous ses droits,et sa propriété, devenue vacante, passe à celui qui se l'approprie lepremier. Le droit d'hérédité est une institution do l'ordro civil desti-née à remédieraux désordres qui pourraient résulter de l'exercice dece droit qu'a chacun d hériter de tout mort: devenus citoyens, teshommes échangent ce dernier contre le premier, it y aurait beaucoupà dire sur copoint. Il faudrait au moins distinguer o~re te droitd'héritage et cotui de transmission héréditaire. Si, dans l'ordre na.turel, on peut me contester te droit d'hériter des biens do mon père,comment contester a mon père todroit do m'instituer son héritier?Ce droit n'ost-it pas la conséquence naturelle du droit do propriété,et n'est-ce pas porter atteinte a celui.ci quo de repousser cetui.ta?Sans doute cedroit ne saurait s'exercer régulièrement que dans t'~tatcivil; mais on en peut dire autant du droit de propriété tui-mcmo:en est-il moins un droit naturel? Tout cela serait fort intéressant àdiscuter, mais tout cela mentraînerait beaucoup trop loin, et il faut
(!) '< L'ordreaoci.)!, dit fort bien Koussca)!dans le Co~'<~ MCtft/(<-hap.t', p~tundroit sacr6 fnnsert de ba~eu tou!<tp«nutrea.<.
FtCHTK HT 1.A hHVULL'nON Ft<AN~A!St' XXXVt!
quejo me hâte. Ho!evons aussi, en passant, une singulièro idée
de notre philosophe: à t'entendre, tespurent n'ont,pas, selon te droit
naturel, un droit exclusif sur leurs enfants, ci f~r~ <~ pn~ ils
no se tes approprient. qu on exerçant, tes premiers sur eux un droit
qui appartient à tout le m~nde. On no conçoit guère comment une
idée aussi bizarro a pu nattre dans un esprit, aussiétovc et au~sisain?
~Mn«(~ne6ott«s <~rt)o<m//ORtcr«s.
La conctusionit hquette ~ichtc aboutit, soit.qnit considère la pro-
priété, soit qu'ii regarde la culture acquise par l'individu dans la
société, c'est que chacun a !cdroit de sortir de t'~tat, quand bon )m
sotnbto,sans être tenu à aucune obligation envers lui. Fichte est plus
près do la vérité dans co qu'il dit do la culture que dans ce qu'il ditdo la propriété mais là même sa pensée n'est pas exempte d'exagé-ration. S'il est vrai que la culture doive émaner plutôt de t'individu
que doÉtat, n'est-il pas vrai aussi que, dans certains cas, comme
quand il s'agit do civiliser un peuple encore barbare, t'Ètat peutrendre do grands services par son initiative et sa puissance di-
recte, et que, dans tous les cas, il est ta condition nécessaire, je ne
dis pas te principe moteur, do tout progrès parmi tes hommes?
J'avoue que je ne vois pas trop qxetto action tËtat pourrait nous
intenter au sujet do la culture que nousavons acquisesous sa protec-tion ou mémo par ses soins, mais est-ce qu'en réalité nous ne lui
devonsrien? Il est bon do vouloir anranchir l'individudo toute in-
juste oppression dot'État, mais ne nous rendons pas à notre tour
t'.oupabtosd'injustice ou d'ingratitude envers lui. !t serait curieux de
rapprocher de ces pages véhémentes où Fichto dénie a !'État toute
espècede droit sur l'individu le tangngcque, dans le Criton de Platon,les Lois tiennent à Socrato pour le dissuuder do se soustraire par la
fuitcat'arretquite frappe. Ici t'Èt~t est tout; chcx Fichte, il n'e~t
ptus rien. Co sont deux mondes opposés. Je dirais que !a théorie dt;
!ichte représente te progrès et les tendances du monde moderne,
comme cette do Socrato représentait les besoins du monde ancien,si notre philosophe no se laissait omporter aux dernières limites de
t'~d<~(fu(t~Hte.Mais il exagère à <'opoint son principequ'il la fausse
et le rend insoutenable.
Voyezen effet à quctto conséquence il arrive il suffit de l'énon-
cer, pour condamner la doctrine qui la contient. Si la société civile
est une association entièrement arbitraire, et si l'individu no doU
absolument a t'Ëtat que ce qu'il veut bien lui donner, chacun peut,a chaque instant, non-soutomentso retirer do t'associâtion, et, a{m<<
x\x\m 1~'TtKHtt(:T!<~Dt''mA!nCTRUH
quitter )oso!. vivre intendant du t'Etat, mais, avec !e concoured'autres citoyens, en former un autre dans le mémo lieu, de tellesorte qu'i! y aura deux !tuts !'un il c6)é do l'autre, ou phttot l'undans t'autrc. Qu:.nd jo dis doux avec Fichte, je pourrais tout aussibien dire mi))n,et. it nume contredirait pas; car te droit est le mêmepour tous, et, en vertu do ce droit, t'r:)at pourra se décomposeron nut.tnt (tt':t<tts indépendants qu'il yauradcvotontésdivpr'~tt.tes. Mais, sans pousser si loin la conséquence. bornons.nous auxdeux États (!uc suppose notre phttosopho. !/idne d'un État dansi'Ëtnt o~.e)te;)dmissib)o? Fichtc nodissimutopas i'objuctton, maisit neaen efTrnyopas. D'abord, selon lui, il y a ta undroit )'nvio!ab)oEnsuite ied~gcr n'est pus si ~rand qu'on se t'imagine. D'ait!ours!ofait d'un Élut dans )'~ut n'est pas une chose aussi inconnue dans~os sociotcs; pourquoi invoque-1.on ici to principe qu'on sait bienouhtior on d'autres cas t''ichte cite a ce propos un certain nombred'exemptes: t'arma, la nobtesse, le clergé, les corporations (<).Maisces exemples mêmes tournent controiui: ils témoignent préci-sément en faveur de ce principe qu'il no doit point y avoir d'Étatdanst'État.
Je reviendra), avec Fichte !ui-n)émo, sur !a nobtosso et le cterséauxquetsitsa consacré doux chapitres spéciaux; mais je no puispasser outre sans rappe!er ce qu'il dit ici de )a profession militaire,telle qu'otte est organisée dans la plupart dos États modernes.
Quand une profession échappe au tribuna! commun et re)6ve d'untribunal particu!ier quandles lois do ce tribunal sont très di~renteitdes lois universelles de toute moralité, qu'elles punissent avec uneextrême dureté ce qui serait à peine une faute aux yeux des der-nières, tandis qu'cHes forment les yeux sur des attentats que les
(i) A ces exemptes.Fichtojoint celui des juifs. Jo no comprendspastrop je avoue, commentlesjuifs po..vcntformerun Ëtatdans i'État si onn. ~rr~o pas adroit, civ.ts et politiquesdont jou.MentJes autrescitoyons.Vout~-vo~ <,u'i!.ne fassent point un ~t dans t'Et.t, donnez-:enr ces droitset rangez,te. sousla loi commune,commel'exigela justice.Ma),c'est prec ~n~ a q..oi F.chtc ne con~ontpas. Onest étonnédo voirun esprit .i~s.dc touLpr~6 résideranno idée .UMijuste etau~, ..mpte On ne sut-exptique~ pas, si t'on ne savait jusquepoint tc.jn.s ct~t .d6te~en Atk-m~ne. J'admets que cettehainene f.Upastout a fait.s~ raisonmais commentFichtono so~e-t.Hpas que tes dehmtsqu'on imputeaux juifs viennentpréci.émontdot-op-pressionque leur a fait subir t-mto!en.ncochrétienne, et que l'on n'ae droitde reprocheri1des homme,tes vicesqu'ils ont pu con ractc~ansla ~rvitude oudansrabaissementou on tes a retentis.
) tCHt'H KT t.A. HKVOt.UTtON ~HAf~~AtS)-: \\XtX
autres puniraient sévoremont, cott" profession entretient, un intérêt.
particulier et une morale particutirre, et ette pat un dangereux État
dans t'Ëtat. VoitHdos pareils qui mériteraient d'être gravées en
lettres d'or il la porte de toutes tes casernes.
Seton Fichte, un ~tat n'est pointdangereux par cela seul qu'il est,
sous le rapport de l'espace, dans un autre ~tat, mais parce qu'il a un
intérêt oppoaé&l'autre. Mais comment ne voit-il pas que deux ~tats
ne peuven!.exister l'un dans i'autro sans avoir (tes intérêts opposéset sans devenir hostiles l'un a l'autre. Si cota arrive, dira-t-i), c'est
quits ne se conforment pas a h) loi du droit nature), qu'il dépendd'eux de suivre que chacun soit juste, et tout ira bien. Sans doute,
mais comme vous ne sauriez raisonnablement espérer que, dans un
paroi!état de choses, chacun sera juste; comme vous no pouvez au
contraire on attendre que !o désordre et !a guerre, il faut bien con-
venir qu'il est contraire au droit. Ce que Fichto nous présente ici
commeun état juridique, c'est quoiquechose do pire encoreque l'état
do nature, c'est l'anarchie organisée, et l'on sait trop où conduit
l'anarchie.
1.o pian que Fichto s'est trace (4) t'amené a mettre en présencedu droit dorévolution les privilèges que s'attribuent certaines classes
de la société, particulièrement ta noblesse. Tel est t'objet de deux
chapitres distincts qui, avec un dernier chapitre consacré à l'Église,
formèrent un second volume, publié uttériouromont(2).
L'inégalité qui résulte, non dos din'érences que la nature, !a con-
duite ou les accidents do la vie établissent entre les hommes, mais
des privitegos que s'attribuent certains individus ou certaines classes
de lusociété, est une iniquité qui ne peut manquer de soulever les
protestations des libres penseurs. Ceux du xvtn" siècle avaient un
sentiment trop profond du droit et do l'égalité des hommesdevant le
droit, ils avaient, aussi un trop ardent amour de t humanité pour ne
pas s'attaquer à un tel vice de la constitution des peuples, de que~ue
autorité que le couvrit t'antiquité do lit loi et do l'usage. Ce vice
d'ailleurs était devenu tellemont révottant, surtout on Franco, qu'il
ne pouvait plus être longtemps souffert. L'indignation du peupto ap-
puyait ici les réclamations des philosophes. Co fut là, comme chacun
sait, l'une (les principalescauses do la Révolution française (3).
(t) Voyezpage tH3.
(2) Voyezle paragraphequi terminelu troisièmech:<{'ih'c,page 189.
(t) Voyezsur ce point t'ouvragoai neuf et si intcrésanntde M. de Toc-
~aevine t'Ancien~~)cc< ~o<<t<<on.
HNTMODUCTtONDU TRADUCTEUR.Xt.
Dans le temps mémo ou. pn dépit <:etoutes los résistances cettegrande révutution rétablissait dans notre constitution civilo la loi del'égalité, si tot~temps et si audacieusomcnt vidée, l'iniquité qu'elleefTac-aiten Franco continu.ut do subsister en Attemagnc,où la har.die~e de t'uction est bien loinde répondre à celle du ta pensée. Ens'élevant a son tour contre cotte injuste constitution do la sociétéFichto combattait un r~inic oncoro debout dans une grande partiedo l'Europe. défendu a\cc acharnement pur toutes tes personnesintéressées à tomaintenir, et qui aujourd'hui mômen'a pas entière-rcmont disparu.
A ceux qui contestent la tégitimité do leurs privHcges,tes privitu-~ios objectent le contrat qui lie onver. eux les autres citoyens. Celleobjection n'arrête po~ntFichte. qui pose on p~ncipo que tout contrutpeut toujours être resitie, et qui voit là un droit matiénabte dol'homme. Que ron accorde ou non co principe gênera), il est un pointqu'on no saurait contester, c'est qu'il n'y a point de contrat quipuisse consacrer d'injustes privitegoset que tout contrat de ce genreest nul et non avenu.
t)
Les privilégies se rejettent sur tour droit personnel eux seuls, àles entendre, ont la mission do rcmptir d:<ns tÉtat les fonctions dontils sont investis. Mais Ficbte prend la liberté do leur demander d'outour vient ce droit qu'ils s'arrogent sur tours concitoyens. Ils !'on)disont.Hs, reçu on héritage. Mais comment un droit sur des per'sonnes, peut-il so transmettre de père en fits ? Pour que ce droitsubsiste, ne faut-il pas que les personnes qu'il continue do tier con-sentent à sa transmission ? On répondra que cela n'importe pas, desque, de part et d'autre, les conditions restent les mêmes. Cetteréponse pourrait être admise, si ta personne à laquelle s'appliquo ledroit transmis restait toujours la mémo mais la personne change.Or nul n'a !o droit de léguer des charges à un autre, si celui-ci neconsent a les accepter. < Comment admettre, dit fort bien Fichtoqu'on puisse prendre te premier venu et lui dire J'avais des droitssur quelqu'un il s'y est soustrait par §a mort; it faut que satisfac-tion me soit donnée. Viens, tu me tiendras lieu de lui, toi! Maisme dis-tu, il m'n renvoyé à toi.– Je suis fâché {dorsque tu te soishissé tromper, car il n'avait pas le droit de disposer de moi per-'-onne n'a ce droit que moi-mémo. Mais tu es son n)~. Oui,mais non pas sa propriété. En sa qualité d'administrateur d~ tesdroits, il t'a compris avec lui dans le contrat, pondant ta minorité.
U a bien pu le faire pour tout le temps que je resterais mineur,
HCHTE HT LA RKYOLU'HOK t'HANÇAÏSK. XL!
nu'is non pas au de!a.A prient, me voilà majeur et administrateur
do mes droits, et je ne t'en donne aucun sur moi.
Los sophistes do l'ancien régime font ici une étrange confusion
ils assimilent los personnes aux choses. Comme les choses no s'ap-
partiennent pas dettes mêmes, <'ttes peuvent sans doute se trans-
mettre par voie d'héritage mais tes personnes qui s'appartiennent
no sont point une propriété qu'on puisse échanger, vendre, donner,
léguer. On conçoit bien le d<oit d hériter dt's premières, mais non
celui d'hériter dos secondes et des obligations que d'autrcs leur ont
imposéesou qu'i! tour a ptu de contracter. Four a 'mettre un paroit
droit, il faut supprimer toute égatité entre les hommes, ou, ce qui
revient au même, n'admettre entre eux d'autre égalité que cette que
~ur reconnut ~hso é~dite devant Dieu. 0" sait trop ou a con-
duit ce système i! n'ya pas d iniquité sociatc qu'it n'ait sancttuce.
Fichte passe ensuite en revue les droits dont certaines classes ou
certains individus privitégiés se prétendent ex(:tu:ivement investis,
et quo nous avons pu en effet leur céder, mi'is que nous pouvons
aussi leur retirer, le jour ou cda nous convient son but est de
rechercher (me!dédommagement teur serait du en pareil cas.
S'il est un droit incontos'ubte, c'est. celui do repousser par la force
!osinjustes attaques dirigées contre notre personne, notre propriété,
notre vie..V<'nt~)'~'<ts, ditlit Justice (<), maiselle ajoute cette res-
triction Nisi ~Cf~~«a ~t~-tu, c'est-à-dire a moins quo tu neso's
injustement attaqué, ou, en d'autres termes, d:ms te cas de légitime
dcfensc. Or ce droit naturel de se défendre soi-mêmepar la force, ce
droit qui est en quelque sorte le droit du droit et qu'on ne suur:ut
refusera t'hommo sans désarmer le droit tui-mcrne, Fichto reconnut
que nous pouvons, et j'ajoute pour ma part que nous devons le dé-
téguor à d'antres, je veux dire une puissance pubtiquo. mais sous
deux réserves la première pour lu cas d'urgence, la seconde pourl'
celui ou te Pouvoir charge du soin de nous défendretournerait contre
noua la force dont nous t'avo~m~esti a cetenet. !t est bien évident
que,dans l'un et t'autre cas, nou~. rentrons nécessairementen posses-
sionde notre droit. On n'a guère étevé de duuteau sojeLdu premier
cas, mais il n'en est pas de même du second. Quelque cctat<u)tque
soitici le droit, on t'a nié formellement, et, dans la plupart des Etat-,
ilfait ptaccnu principe de t'inviotabititodes~uveruin: Le recours
a la force contre tes abus do la for.-e n'en c~t pas moins un droit
()) ~ico'o)), ~c o/7<c<.<,thre ch~.
tNTHUDt'CTtON DU TttAUUCTK~.Xt.it ·
nature! qu'aucune constitution no saurait nbotir; cela est plus ctuirque :o jour. Que l'on cherche les moyens ()o se défendre, sans dés-ordre et sans bouleversement, contre tes attontHts du Pouvoir su.prôme, rien de mieux, et c'est une question qu'ont sagement résoluecertaines constitutions républicaines maia, ai co droit peut êtrer~gté, it ne peut. être supprimé. ici Fichto est entièrement dans levrai, et l'on pourrait a son tour t'opposer il Kant. Dans son amourdo l'ordre légal, qu'i) voudrait préserver <!otout retour vers l'état denature, ce philosophenie !o droit si explicitement réctamé par Fichte iil invoque cet argument, que. dans t'exorcicc d'un pareil droit,
peuple serait tout h la fois juge et partie (<). Mais il no s'aper-çoit pas que ce qu'il dit du peuple, on peut tout aussi bien l'appliquerau souverain, et lui rétorquer ainsi son argument. JI est curieux donoter quo c'est précisément sur cet argument ainsi retourne queFichto s'appuie pour soutenir !o droit qu'i! revendique. Mais, nel'oublions pas, il no parte ici do cedroit, qu'ii regarde comme évidentet inattaquable, que pour arriver à cotte .tutre question on dépos-sédant le souverain du droit que nous lui avons concedô jusqu'ici,({ue!tecompensation lui devons nous? Sur ce point, comme sur !aquestion de savoir si les anciens privilégiés ont droit à quelque dé-dommagement et a que!dédommagement, son tangage, il faut bien le(hro, a toute t'aproto dol'époque revotutionnaireau milieu de laquelleil écrivait, et qui ne laissait guèro do ptaco a la pitié. Ici et là, ii seretranche dans to droit strict, c'est-diro dans le sent droit que com-prennent les époquesdo ce genro. La douceur, les tempéraments, lestransactions peuvent convenir à une sage et prudente réforme; lesrévolutions no connaissent plus ces ménagements. Tant pis pourceux qui, en résistant aux réformes, provoquent les révolutions.
Fichte a bien raison de s'élever contre ce régime de tyrannie etdo prtvitpgoa cheztes uns, do servitude otd'entraves chez tes autres,qui a si longtemps posé sur les sociétés humaines, et de lui opposerle principe vivinantdo ta tibert~ a Rendezlibre, a'~crie-t.it, t'échangedo nos facultés, cet héritage nature! do l'homme, C'est ta on effetqu'est la justice, et c'est ta qu'est le sa)ut. Mais, il côté de ce prin-cipe si simple et si fécond, on voit poindre ici tos idées qui, en sedéveloppant dans aon esprit, le Imusseront plus tard de l'indivi-dualisme !e plus outré au plus outré socialisme, ît est bien évident
(t) Voyezsor ce pointmon /t~~ cr~uo de lu Po~e dMd~,p. c, cxxxt et t.Lxxx,et le travail quej'ai pubtiodam ta Met;McdpParis aurÀ(tM<c<M~t'fo<)<«0ft/'MNc<t~c,p. t98 et suiv.
~t.inMCHTKK't'i.A itHVOt<UTtUNFHÀN~AiSK.
que tout homme a !o droit do vivre, et pur conséquent do ne pan
être privé par ses semblables des choses nécessaires à sa vie. H
suit do là qu'une constitution sociale qui enlève aux uns co qui leur
est nectaire, ou, ce qui revient,au mémo, les moyens de l'acquérir,
pour donner aux autres !o supornu, ou (tu'une société organisée de
tctte sorte que certains privilégiés s'engraissent au détriment do leurs
concitoyens, est une société ma! fuite et qui doit être réformée. En
face d'une société de ce genre, Fichto a donc raison do revendiquer
les droits du travail. Ce!an'est que juste, mais il no !o serait pas do
demander compte il t'~<~ d'un mal dont il ne serait pas fauteur, et
do lui imposer la charge de pourvoir aux besoins de chacun. J'ajoute
que ce serait !a un sur moyen d'étouffer dans les individus toute
activité et toute prévoyance, et par suite de pousser !a société tout
entière à sa ruine. !t est bon que chacun n'ait à compter que sur
soi-même. J'ajoute enfin que le despotisme le plus absolu serait la
conséquence nécessaire d'un pareil état de choses. Voilàdo simptesrénexiohs qui n'auraient point du échapper à un esprit aussi pénétrant.
que Fichto, surtout aun hommoqui connaissait &ibien, par sa propre
expérience, la puissance d'une volonté énergique, et qui, dans cet
ouvrage m6mo, préconise si haut te principe do la liberté indivi-
duone. Pourquoi ne l'ont-elles pas arrêté sur !a pente gtissante où il
se place dans cet ouvrage, et où il se hissera glisser un jour jusqu'à
cette monstrueuse organisation sociatoqu'i! a appelé lui-même t'~ai
/frM!d.En faisant ces réserves sur certaines idées dont je trouve ici le
germe otdonton verra plus loin les conséquences, je ne prétends pas,
pour ma part, opposer une fin do non-recovoir au problème de la
misère. Je crois au contraire qu'il n'y en a pas de plus grave et do
plus pressant, mais je repousse d'avance toute doctrine qui, pour le
résoudre, tend a étouffer dans t'homme le principe mémo dot'acti-
vitô, sacrifie le premier do tous les biens, la liberté, et conduit
droit au despotisme.
Jusqu'ici Fichte n'a encore parlé que des classes privilégiées en
générât, it arrive maintenant à la noblesse, dont il recherche l'origine
et discute lesprétentions en un chapitre spécial. La partie historiquedo ce chapitre paratt aujourd'hui superficielle et paradoxale mais,
si l'on se reporte à l'époque où elle a été écrite, &cette époquesi peu
favorable aux ca!mes et impartiales investigations de l'histoire, et si
t'on songe en outre que, de nos jours même, après toutes ces pro-
l'ondesétudes auxquelles ont été soumis l'origine et ledéveloppement
des peuples et de leurs institutions, plusieurs dos points discutés par
~TRODUCTIUN DU TRADUCTEURxu\
t-'icht~ne sont pas encore parfaitement éclaircis, on jugera son tra-hit avec plus de faveur que de sévérité. La thèse qu'il soutient ici,c'est que tes pcupt.'s anciens et tes nations barbares d'où sont sortisles peuples modernes, n'ont connu d'autre noblesse que cette quirésido dans l'illustration personno:toou transmise, ou, comme il ditla No~Md'o~uo~, et que la nobte~so /h<(«'r<! do droit est uneinvention du moyen ugo. Or. sans parler de la Grèce, ou il y eutcertainement à t'origine dos famittes royales, on ne peut nier qu'aRome, du moins sous tes rois et dans les premiers temps do la Repu.bliquo, il n'ait existé une véritable aristocratie héréditaire, et quocette aristocratie, quoi qu'en dise Ficht~(<), n'ait été d'abord un deséléments do ta constitution do l'État. Quant aux Germains, la ques-tion semble d'abord plus défiche. Tout te mondeconnaît cette phrasedo Tacite ~< ex «o~utc, d«c<'Nc.r u<«~~«Mt<m (2). Maisquesignifie au juste ici cette expression :n~M«s.~ Désigne.t-ette,comme le prétend Fichte, l'illustration personnettc qu'un chef s'étaitacquise on conduisant heureusement ptusicurs expéditions ? Cetteinterprétation es~ tout à fait conjecturale, et etton'est guère vraisem-btabto. Mais ne pourrait-elle du moins designer cette ospécod'tHus-tration que certains individus tiraient do leurs aïeux ou peut-êtresimplement de tour père, et qui les désignait particulièrement auchoix de leurs compagnons, ~ansêtre devenue pour cela un droithéréditaire dans leur famitte?!) n'y a rien dans la phrase de Tacited'où l'on pui:so justement inférer t'existenco d'une noblesse hérédi-taire. Mais si l'on ne peut rien conclure de cotte phrase, il n'en estpas moins étabti qu'il a existé, chez tes premiers Germains, unevraie nobtosse de droit, soit dans certaines familles royales (3). soit.dans d'autres maisons privitégi''es (4), soit mémo dans certainesclasses fermées au reste de la nation (5). Qu'importo maintenant que
(t) !'n.c 237.(2) DeMton&t~Ce~<nt0'<, cap. 7.(3) Onrctrottt'cdes (Mmmcade ce genre chez presquetous les peuples
gennaim, tes Lombard, les Huths,les Ostt-ogoths,les Bavarois,tesSaxonstes At~to-Saxons,les Prunes, etc.
(4) Par exemple,les cinq maison privilégiéesdont il est questiondansla toi des Bavarois /~<sunt quasipr<~<po~ ~~of/oa, qui ~Mtttde~nerc dMca~.M<$c~~<<~M'K /tonor~t co/tcedf~us, «c dMp<aMcoM.~MoHCMac<<(t~<. L. Bajttw.,xx. J'empruntecette citation a t't~wef~M<n~<<M~)on~c<<ou<n~<cMnc.p~r Lchunrou,p. 4H.
(!;)Voyezte mémoirede M.Mi~netsur t'introductionde t'anciomeCer-(5) Voyezle mémoirede M,~Iignetstir l'iiilrodtictioiitic l'ancienne(;91'-tnanicdaos la sociétécivitisec(~ntou'M ~or«yt«M, collection Charpen-tio). At'Hp,)uide ses assertiottssur la constitution~obtique desSaxons,
PtCHTK ET LA R~'OLU'nO~ PHANÇAtSK Xt.V
Montesquieu ait bien ou mal interprète cette phrase do t'hi~toficn
Tégan reprochunt h t'archovequo tt6bon soningratitude à t'egard de
Louis !e Débonnaire ~c« <<'/~<'r«~, non xo~~t' <y«odt~):)s~~
t~<pM<<t~'<u/<'nt(<)? Qu'importo que la preuve qu'il tire de t'ucto
de partage do Chartomagne, rapproché du traité d'Andety, soit ou
non concluante (~)? Los faits sont et devant ces faitsla thèse i
absotuo de t-'ichtc ne peut plus so soutenir. Que chcx te.. France,
mémo après la conquête do la Gante,;) n'y c~t point, un dehors des
famittos roya!e3,une nob'cssc h6r6ditaircde droit, et que cette no.
btcsso ne soit devenue une in:.tim(ion civile que beaucoup ptus tard,
cela para!tvraisombtabte; mais là m6me il faut faire une exception
pour la royauté, et cette exception suffirait pour renverser la théorie
do Fichte, D'aillcurs, con~rnonousvenons dole rappeler, telle n'était
pas la constitution de tous les pcuptcs gormaniques. Il est singu-
lier qu'après s'être retranché, con~ncil t'a fait d'abord, sur le terrain
dos principes et du droit absolu, t.'ichtoait cru devoir s'engager dans
cotte obscure question de t'histuirc de la noblesse, tt veut entever
leur argument à cos politiques qui, se fondant sur ('equ'ot)e uoxisté
chez tous tes peuples, on cooduont qu'ctto doit nécessairement
faire partie do tout État. Mais que lie t~sc-t.it la question de
fait pour attaquer la conséquence? Bestant sur son propre terrain,
il serait beaucoup plus fort. !t no tarde pas, du reste, y rentrer
afin d'examiner t'uno après l'autro, au pointde vue du droit, toutes
t.s prétentions et toutes les pr~atives de la nobtessO.Ici nous ne
pouvons plus qu'applaudir a sa critique et a ses conclusions.Pour-
suivant des prétentions ridicules ou des iniquités révoltâmes, il a
pour lui le bon sens et la justice, et il en soutient la cause avec une
remarquable éloquence. Toute cette partie de son chapitre sur la
l'illustre historien cite (p. i08) te :'as~c vivant d'Adamde Hrcme
(~. eccl., t.b. !): ~u.< /<ur «<nM~ pars in c~u~M~
conjMomn~'opr'~ sortis terminus <rn'x/e!'a<,M~ ~o&<<~f!<~)~~dt<Mi
«~ore~~c<~t&<'rh~ratH, Nt-cr~s co~xn~ntMr~cWo<<'<scru«aONC<«(p.
(t) En touscas, t'imerpr6taHon<t"cFichteendot'nc à sontour (p. 24!<)
est tout à fait forcée,Il n'y a que deux <jX)')icationspossibles celle de
Montesquieu,pou)-qui ce discoursprouve formellementdeux ordres do
citoyenschcxt~ Francs(~oyez~f< desAo~,)iv. X\X, ch. xxv).(.'tcelle
(le l'abbéDubos,rapportéeet coutt'attuc:)tortouà raison parMontcsqmcu
(ibid.) « Ce passage, selon rahb6 t)ubos, prouve seu)ofnc<ttque tes
citoyensnés libres raient qualifiés de nobtes hommes dans l'usage du
monde, nobte.hommeet ttommené tibt-cont siguinc longtempsla même
choso,Il
(2)Voye?:t'« dfï ~.o~,liv. X\X!,chnp.x~tv,et Fichtc,p. 2t7.28t.
XLVI !NTROUUCTION DU THADUCTKUn
nobtosso est certainement une dos censures les ptus vigoureuseque le sentiment de la justice ait inspirées comre cette institution.Je voudrais pouvoir ajouter qu'elle n'a plus aujourd'hui qu'un intérêt
historique.Fichte sa demande quels sont, il t'égard de la noblesse, losdroi~
d'un peuple qui veut réformer sa constitution. My a deux choses à
distinguer ici les Litresdont so décorent ceux qui se disent nobles,~t les prérogatives ou les privilèges qu'ils s'arrogent. Quant auxtitres nobiliaires qui no sont que do vains noms, il n'approuve pasqu'on tes supprime par voie de décret < Des décrets do ce genre,dit-il avec raison, agissent très efficacement, quand ils ne sont pasnécessaires, et fort peu quand ils le sont beaucoup.. D'a'itours cetane lui semble pas conforme au principe de ta liberté naturelle a Jene comprends pas, dit-il, comment i'~tat peut défendre à un conci-
toyen du porter a t'avetur un certain nom, ou comment il peut dé-fendre ù sos concitoyens de t'appeler désormais do ce nom, quandils sont accoutumés à te nommer ainsi et qu'its le font,de leur pleingré. < Mais, ajoute-t-i), je vois bien comment il peut ou bien
permettre aux classes jusquo.tà inférieures do ne plus se servir docertaines désignations à l'égard des classes jusque-là supérieures,ou bien même permettre à tous ceux à quicela fait plaisir deprendredésormais les mêmes désignations. Que le seigneur de X*~ ou tochevalier, ou to baron, ou le comte duY** continue d'ocrn'c sonnomcomme l'a fait jusquo-tà, ou même qu'il y ajoute encore une fouled'autres noms, cela me parait fort peu important mais qui pourrafaire un reproche à t'Êtat de permettre et do recommander a tous les
citoyens do nommer le seigneur do X~ ou le comte de Y~* tout
simplement, M. X*~ ou M. Y* ou de leur promettre son appuicontre te soi-disant gentilhomme, lorsqu'ils useront do la permis-sion Ou même qui pourrait lui défendre d'élever au rang de nobtestous les citoyens, depuis )o plus ékvé jusqu'au plus bas, et parexemple de permettro à un pauvre pâtre de se nommer baron oucomte, d'autant do baronies ou do comtés qu'il voudra? Ladistinctiondisparaîtra d'eite-meme, quand elle ne sera plus une distinction, etchacun se nommera d'un nom aussi court qu'il pourra, quand lalongueur do son titre ne lui servira plus de rien.. Fichte pose icila règle que doit suivre on cette matière tout État démocratique etlibre. It n'y a pas besoin do décret qui interdise aux citoyens d'ac-coler certains titres a leur nom il sufnt que personne ne soit forcédo tes attribuer à ceux qui s'en veulent parer, et qu'il soit permis
xLvnnCUTE ET LA HÉVULUTtON FHANÇAÏSK.
chi'cun <on prendre do semb!ab!ea si bon lui scmbte; en un mot,
il suffit do tour retirer t'appui de la toi ils tomberont d'eux-tnemes.
A plus Forto raison, Fichte ne saurait-H admettre (}uedans un état
démocratique, h) gouvernement se réserve !o droit do sanctionner
ou d'interdire los titres <)c nobtosse après une enquête préatah!o,et d'en créer au besoin do nouveaux.
Los titres do nob!esso, n'ayant qu'une valeur d'opinion, doivent.
être abandonnas a t'opinion c'~t a etto do tes conserver ou do )es
abotir; maisi! n'en osLpd~dc tncmo do~ pr~rogat.ivosr6u!)osou des
privi)6gosqui 0)tt pu y ctro a~achos ici t'~at n parfaitoment !o
dtoi~d'intervenir pour rt~<)b!ir i'é~a!i!.eo~ sati~airo la jusLice. Les
privi~ges contre tesquots ~ichtose)ôvuavcc .tuLantde raison que de
forfo, ou d'autos non moinso~tioux,ont.disp:trude notre su!, ~r.lcoa tuRevotution française; et-,quoi qu'aient, pu faire ou que puissent.
tenter cuccro lospartisr'ns ou tes successeurs do t'ancicn régime, ils
n'y rcHeuriront ptus. L'egaHtecivUeest, on peut !o (tire, une conquctoassur6o en Franco que n'on pouvons-nous dire autant do la
tibcrt6) Maisces privitpges, notre philosophe les voyait survivre,
autour de tui, a la révolution qui tes avait c\termines chcx nous, et
il fa))ait qu'ils fussent bien vivaces, puisque, h t'houre qu'i! est, ils
subsistent encoredans une partie do i'Rnrope. Les pages de Fichto
qui nous occupent en ce moment n'étaient donc pas uno vaine d6c!a-
nmtion,et elles ont encore aujourd'hui leur a-propos. Un tous cas,on nous remettant sous les yeux toutes tes prétentions du régimecontre tcque! ones sont dirigée! eHos nous fontmieux comprendre la
sympathie ou la haine que la ttevotution frnnraiso excita en At)o-
magnodans los diverses ctasses do la société. Combien en on'ct ne
devait pas être odieux un privilège tel que cetui que Fichte met an
premier rang dos prétentions de la nobtcsso, !e privitege dos biens
nobtcs,c'est-à-dire te droit réserve aux seuts gentilshommes de pos-séderou d'acquérir certains biens. !t n'a pas de peine montrer
t'injustteed'un paroi!priviiego. H n'a pas moins beau jeu contre !o
système dos corvées et !e prétendu droit dosMuc/t~ f~e/<-r( t), et il
poseici que!ques principes aus~i simptcs (juejustes pour mettre un acetétatde chosessans porter atteinte au droit do propriété. Dira-t-on,avecle droit traditionnp), que tocuitivatcur, qui n'a pas la propriétéduso!, appartient !ui-mémeau sol, et qu'i) est ainsi une propriété du
seigneur? Fichto répondavec toute la phitosophiodu xvm"siecte, que
(t) Voyezta note de la page 279.
~'TnonUCT!ON DU THADUCTRL'n.XLVHt
tout homme a la propriété individuolle do sa propre pcrsonno. etque nul nopeut avoir do droit irrcvocabto sur la personne d'autrui.'-Ce seigneur ne pourrait pas dire J'ai p~yo~en achetant te bien,un droit do propriété sur la personne de mes serfs. Nu! n'a pu luivendre un paroil droit, car nul no t'avait. S'i! a paye qudque chosepour cela, il a otu trompe, et c'est à t acheteurqu'il doit s'en prendre.Qu'aucun État no vienne donc so vanter do sa civilisation, tantqu'i!taisso subsister nudroit aussi indigne do t'hommo, ot que quotq.t'unconserve to droit de dire a un autre ?'« MKt~u-<t'< MUneautreprétention do h) noblesse est d'occuper exclusivement toutes teshautes positionsd.ms te gouvcrncmpnt.et dans l'armée. Fichte relèvesupcricuremcnt tout co qu'i) y a d'injuste et de pr~judiciabtea t Étatdans une telle prérogative. S'il faut so gnrder do lui attribuor lapossession (~c!usivodos fonctions qui exigent des talents supérieurs,tui laissera t-ondu moins ces canonicats et ces prébendes qu'il lui aconvenu de se réserver? Sans entrer encore dans la question desrapports de t'f~iseet do rÈtat, qui viendra tout à t'heurc, Fichten'hésite pas à répondre que ce sont là des biens dont la sociétu a ledroit do disposer, et qu'oHe a un meitteur usage à onfaire « D'abordle payement convenabtodos instituteurs du peuplo; puis, s'il restequelque chose, los récompenses accordées aux savants et tes secoursdonnes aux sciences..Hnfin la pretontion de la noblesse à l'endroitdes charges dt'cour lui su~ero les ptu~ judicieuses ré~exions (<).Mais je ne puis m'arrêter sur tous ces points, et jo me hâte d'arriverau dernier chapitre ou Fichto truite avec une singulière originalité etune extrême hardiu.so la question do i'Ëgtisc considérée au point dovue du droit do révolution, ou en générât la question des rapports det'Ègtiseetdo l'Étal, c'est-à-dire un problème politique qui est encorea l'ordre du jour en Europe, et qui on France même n'est pas encoredéfinitivement resotu.
Avant de chercher quels sont les rapports de t'Égtise et do l'État,Fichte se demande ce que c'est quo t ~gtise, a quctte idée etto répondet qm'! systcmo dérive de cette ideu. La réponse qu'il fait à cottc
question n'est cortumementpusaussi profonde qu'inguniouso,mais etteest irtattuquable en ce sens qu'otte maintient à t'Ëgtiso son v6rit:)b!ocaractère celui d'une puis?anco purement spirituello. Selon Fichto,le principe do t'Ègtigo n'o~t autre chose que Je besoin qu'éprouventtous les hommes do s'accorder entre eux sur certaines idées (cet!cs
())Page2<)~.
xuxFtCHTE KTLA HHVOU'Tt~ !nANf:À!8E.
</
do Dieuet de la vie future) dont ils nopouvant se passer, mais dontils ne sauraient prouver la valeur objective ni par t expérience, nipar )o raisonnement. Croyant à la venté do ces idées. ils croient onmémotemps qu'il doit y avoir harmonie à lour égard entre tous les
esprits do là l'idée d'une ~c )<tu~<&/c,qui unit tous tes ctrpsraisonnable!?au sein d'une mcrne croyance; mais, ne pouvant dé-montrer cette vérité d'une manière parfaitement certaine, cette im-
puissance mémotes pousse à chercher dans le consentement les unsdes autres une prouve extérieure qui leur tienne lieu de toute autre,et par suite à créer eux-mêmesce qu'ils cherchent do ta l'institutiondot'J~M u<a< c'est-à-dire d'une société ou tous s'accordent dansla même pro/cMto~de /b( et qui rc~se ainsi cotte Église invisibledont Us avaient l'idée, mais qui n'était otto-meme qu'un objet de
croyance. L'église visible se propose donc pour but l'accord, et, co
quiest la conséquencedo cet accord, la confirmation de lu croyance.Ellesuppose, par conséquent, une profession de foi qui soit la Mt<~o
pour tous, et quion môme temps soit parfaitement st~rc de ta partdo chacun; sans cette unanimité et sans cette Sincérité, t'~gtisomanquerait son but. Mais comment s'assurera-t-otto de la sincéritéde tous ses membres à l'endroit d'une professionde foiqui, pour êtreunanime, doit être déterminée et prescrite. C'est ici qu'est la difn-cutté. Pour la résoudra, il faut d'abord qu'olle s'attribue à ette-memocette magistrature morale que tous )ps hommes attribuent a Dieu,commeau rémunérateur et au vengeur suprême, et qu'elle s'arrogele droit de condamneroud'absoudre enson nom.C'est là la loi fonda-mentale de toute Église vraiment conséquente; elle ne peut se main-tenir qu'à cette condition. Mais touto difficulté n'est pas encore levéopar là, car l'Église ne saurait pénétrer dans t'intériour dosâmes. Par
que! moyen parviendra-t-otte donc à juger sûrement de lit pureté dola foi, do manière à pouvoir exercer ce droit do condamner ou d'ab-soudrodont elle se prétend investie. Ce moyen, etto le trouvera pré-cisément dans une profession de foi disposée de telle sorte qu'il n'yait pas lieu de révoquer on doute l'obéissance de ceux qui s'y sou-mettront. Ainsi t'étrangeté même des dogmes qu'ptto imposera aux
intelligenceset la sévérité des pratiques auxquelles elle assujettira tesvolontédlui seront de sûrs garants do leur soumission. Ce moyen des'assurer de la Métité de ses membres est en même temps pour elleun moyen de les attirer et de les fortifier dans leur foi; car c'est unfait incontestabtp, bien qu'il paraisse contradictoire, que plus sont
inc.royah!ostes choses dont on fait dos artich's de foi, plus on obtient
INTRODUCTION DU TRADUCTEUR.L
aisément créance. Coux-ta sont donc mat avisés qui veulent fairoa
l'incrédulité sa part, dans l'espoir (!osauver le reste; ils no voient
pas qu'ils perdent tout. Tout ou rien, telle doit être la maximed'une
véritable église. De même, c'est une inconséquence et une abdica-
tion que de renoncer, comme font les Ë~tises protestantes, nu droit
de condamner ou d'absoudre au nom do Dieu. Une église n'est donc
conséquente que si elle enseigne que hors de son sein il n'y a point
de salut, et que si elle juge ici.-bas à la place do Dieu. A cet égard,
t'Ëgtisc catholique est. selon FichLo,lu soule Église consét;uen'e.
Maisce modèle de conséquence s'est montri; lui-même fortinconsé-
quont en un point on voulant donner à ses condamnations d'autres
effetstemporels que ceux auxquels ses membres consentent à so sou-
mettre, non-seulement l'Église catholique s'est rendue coupable
d'injustice, et a excité contre elle la haino et l'horreur, mais elle a
agi contrairement au but mmne de son institution elle a produit
tout justement ce qu'elle devait empêcher, l'hypocrisio.
L'espace me manque pour examiner ici le parallèle établi parFichte entre le Catholicismeet le Protestantisme je me contenterai
de faire remarquer que la logique n'est pas toujours te meilleur guide
pour bien juger des choses de ce monde. Je n'examinerai pas non
plus t'idée que se fait notre philosophe de t'Ëgtise en gênerai on
peut reprocher aux principes sur lesquels il s'appuie et d'où il déduit
tout son système de manquer de largeur mais, quoi qu'on pense de
ces principes et do ce système, Fichte n'en est pas moins dans le
vrai en établissant que t'Ègtiso est un pouvoir purement spirituel, et
qu'ette n'a aucune autorite temporelle. Voilà du moins un point par-faitement acquis, et d'ou il a parfaitement raison de partir pour
traiter la question des rapports do l'Église et de l'État.
Les rapports de t'Êtat avec Église doivent se régler sur ceux
dos individus avec elle. C'est donc au droit naturel qu'il faut recourir
ici, puisqu'il est la loi fondamcntato à taquetto sont soumis tous les
hommesdans leurs rapports réciproques. Tcne est la règle queFichte
se trace, et qui est en effet la vraie règte à suivre en cette matière;
seulement, comme on le verra tout à l'heure, it ta fausse parfois dans
ses applications, faute de tenir compte de t'intorvention nécessaire de
l'État. Quoi qu'il en soit, il est d'abord évident que l'Église n'a pasle droit d'imposer sa foi à quelqu'un par la contrainte physique, ou
de le soumettre à son joug par la force. Toutes les fois qu'elle agit
ainsi, elle viole la liberté humaine, c'est-à-dire !o droit naturet, et
mérite d'être traitée en ennemie. H suit du même principe que
FIOtTE ET LA U6VOU!T!ON FUANÇAISH t.!f
chacun a lu droit de refuser obéissance à t ~tise, des qu'ft le juge a
propos, et que cettu-ui n'a pas !o droit do le contraindre par des
moyens physiques a rester dans son sein. Qu'otte te maudisse, l'ex-
commumo,!edamne tant qu'elle lie fait.tun.ber sur lui que des fou-
dres spiritudtes, cite est parfaitement tibre mais. si ses malédictions
vontjusqu'a porter atteinte onsa personne jq'jetquodroitdot'bommu,
ettocommet une injustjce ou un crime. Toush'sincrédutM, (lit fort
bien Fichte, que !a ~ainto toquisition a condunutés pour leur incré-
duti~ persévérante, ont 6~ assassines, et la sainte ~ghscapostotiquo
s'est baignée dans des torrents du sang humnin injustement versés.
Quiconquea été, pour son incr~iutitc, poursuivi, chusse, depoutHéde
sa propriété et de ses droitscivits par tescommunions protestantes, t'a
été injustement. Les hrmos des veuves et des orphelins, lessoupirs de
la vertu opprimée, tesmatcdictions de t ttUtnanitepèsent sur oUes..·
!t suit encore du même principe que les individus peuvent former
autant d'Ëgtises particulières qu'it tour convient, sans que colle dont
ils se sont détachés ait te droit de les on empêcher par des moyens
physiques.!t est maintenant aisé de voir quets doivent être tes rapports de
t'Ègtiso et de l'État. L'État n'a point a intervenir dans le domaine
det'Ègtise, tant que celle-ci ne sort pas du monde invisible, ou,
commenous disons, du spirituel ce serait empiéter sur un domaine
qui lui est absolument étranger, où il n'a rien a voir et qu'it ne doit
mémopas connaître mais, si t'Ëgtiso porte atteinte a quoiqu'un des
droits de l'homme et du citoyen, si etto empiète elle-
même sur :e domaine do t'Ètat, il a (tes tors le droit et te devoir
d'intervenir pour réprimer une toile usurpation. Ainsi, soton t''ichte,
qui prend ici une position inexpugnable, t'~tat et t ~tiso sont deux
sociétés absolument distinctes t'uno de t'autro, ayant chacune son
domaine; t'une dans le monde invisible, t'autro dans le monde
visibte, et n'en pouvant sortir sans manquer a leur missionet sans
violer le droit. Au lieu do distinguer et de séparer ainsi t'~gtise et
t'Ëtat. on a imaginé entre eux une certaine attiance on vertu de la-
quelle l'État prêto amicalement a t'~gtise sa puissance tomporeUo,
tandis que do son côté t'Ègtise prête à t'Ëtat son autorité spirituelle,
si bien que les devoirs de foi deviennent ainsi dos devoirs civils,
les devoirs civils, des pratiques de foi. Fichto nôtrit étoquemment
cette singulière alliance, qu'on a vantée comme le prodige de la po.
titique, mais ou t État et t'~gtise se dégradent et s'anaibtissont éga-
Icment. Jo ne puis citer tout ce pacage, mais j'on veux transcrire
d*
tNTHODUCT!~DUTMDL'CTEUH.U[I
au moins ces quelques tignes a !) convient sans doute h certainsÉtats du nous promem-e une récompense dans i'autro vie. lorsqu'ilsnous prennent tout dans cetto-ci; ou de nous menacer do l'enfer,<tuandnous no voûtons pas nous soumettre a tours injustices eta leurs violence:). Que croient.iis donc eux-mêmes, eux qui semontrent si franchement et si librement injustes? On ils no croientni au cio) ni à l'enfer, ou ils espèrent s'arranger avec Dieu et tirertour personne d'adiré. Mais si nous étions aussi habiles qu'euxUn peu plus bas, Fichto se demande pourquoi ce sont ordinairementlos LouisX!V et leurs pareil qui s'intéressent si vivement pour iosalut dos autres.
Jusque.!a il est dans le vrai, mais n'en sort-il pas et no se con-tredit-il pas lui-même, lorsqu'il admet que, quand t'~tat juge dan-goreuses certaines opinions, il peut refuser le titre do citoyens à tousceux qui y sont notoirement attaches, et que par conséquent, entemps de révotution. il peut rayer certaines doctrines religieuses quijusqu'alors n'avaient exclu personne closdroits civils, mais qui luiparaissent maintenantcontraires à ses nouveaux principes, et exigerde tous ceuxqu'il admet dans son sein leur parolo clu'ils ont renoncea ces doctrines? Pour bien comprendre ici la pensée de Fichte etrester juste envers lui, il faut se rappeler que, dans sa théorie, i'Étatest une association purement volontaire et indépendante de touteconditionde lieu, de <o)tosorte que chacun peut entrer dans t'Étatou on sortir, comme bon lui sembto; que t Ëtat, de son côte. peutadmettre ou rejeter qui il veut, et que. dans tous tes eus. chacun ale droit de conserver, avec sa liberté naturelle, sa propriété sur tosol. Cette idée de t ~tatost sans doute chimérique; mais une foissupposée, etto explique et atténue l'erreur où Fichte tombe ici. Pournous, nous dirons Laissoxchacun tibrede croire ce qui lui convient,n'excmoxqui quo ce soit pour ses opinions, et n'exigez de personneaucun engagement a cet égard mais obligez tout le monde a res-pecter les droits do chacun. Je no me dissimule pas les dtfficuttés ettes péri's que peut .susciter a t'~at une Ëgtise qui se dédaro l'en-nemie do toute liberté et do tout progrès; mais, pour écarter cesdifficultéset cespérils, il n'y a pas besoinde violenter los consciences,il suffit do faire appct aux principes du droit tout à l'heure invoquéspar Fichto.
C'est encom h la tumiero de ce; principes qu'il fa .1 résoudre unegrave question qui se pr~cntc ici, et qui. après avoir étc tranchée.dans le sens que chacun sait. par la Uévotution française, agite
MCH't'K HT t.A hHVCLU'i'iUNt'H.\NCA!SK Litt
aujourd'hui encore les esprits en plus d'un pays de t'Kurope.Si t'Élise est une puissance purement spirituotte, si elle n'a do
forcer et d~ droits que dans te monde invisible, il s'ensuit. qu'elle no
peut rien posséder dans le monde visible, il titre d'Oise. Voitace
que Fichte cotnmenco parétablir, d'accord en ce point avec Kant (<)
et les philosophes français, tt en tire cette conséquence que les con-
trat par tesqueis certains biens terrestres ont ~te cèdes a t'~gtise
en échange des biens co)ostesqu'ctte promet sont nuts ot non avenus
pour t'Ètat.qui ne connatt pas t'Ègtiso, et qu'i! (:st tenu do protéger
dans la revendication do tenrs biens tous ceux. qui réctament son
appui contre tes prétention-; de i'~tise. Selon Fichto, tout contrat
conclu avec t'~tise, reposant uniquetnont~ur une certaine foi, n'a
do valeur que pour ceux qui ont cette foi si cctui qui l'u conclu cesse
de croire, ou si son héritier n'a plus la mOno foi, il est dégagé do
toute obligation, et l'État, pour qui t'~gtiso et les prétentions de
i Ëgtisen'existent pas, doit t'aider dans tomaintien de son droit.
Sauf la rédaction qui pourrait être modifiée,il me parait impossible
de ne pas accorder a Fichto les principes qu'it met icionavant, et tes
conséquences qu'il en tire. Mais,torsqu'ii prétend que non-seute"
ment le légitime héritier a le droit do roprcndro a t'~gtise le bien
dont elle est en possession, sauf a dédommagerle tenancier, s'il a
amétioré ce bien, mais que, quand il n'y a personne qui puisse
prouvert'antériorité do sesdroits, le tenancierdc F~gtiseest, aux yeux
du droit nature!, le vrai propriétaire, et quo par conséquent il a le
droit de s'approprier ce que t'~gHse lui il donné il ferme, Fichtc va
beaucoup trop loin, et celaparce qu'it considèrele droit naturel d'une
façon tout à fait abstraite, comme s'il n'appelait pas nécessaire-
ment l'intervention de t'Ètat. est pourtant bien évident que, si
l'on noveut livrer la terre au pillage et semer la guerre civile dans
la société, on no peut attribuer aux particuliers le droit de s'appro-
prier tes biens de l'Église, et que ce droit no peut appartenir qu'à
!tat, c'est-à-dire à la société tout entièro, qui disposera ensuite de
cesbiens comme elle t'entendra. Nous retrouvons ici litconséquence
de co défaut que nous avons plus d'une fois relevé dans la théorie
do Fichte t'Ëtat n'y est pas un étémcnt nécessaire de ta société;
il n'en est qu'une forme arbitraire et conventionnelle. De là ces
conclusions extrêmes, qui, si elles pouvaient se traduire en fait,
tourneraicHt contre la justice dont i''ichtedéfond les droits, et qui
(i) Voyezla ~oc~)0 (ht droit, ~t(t~t<Mca~t(:<!<<uM,p. 2HC.K~
'ic omtt'aductiott.
)y)'):<un'):')'t<~ m- Tn.\u)'crt-:t'!tuv
tout au moins manquent do va!enrprntiquc.Co défaut éclate plusmanifestement encore duns los pa~s qui terminent te chapitre ett'ouvrée. L'état, tôt que t'entend notre phitosopho. suppose l'una-nimité, et tous c~ux qui cessent d'y adhéreront to droit do reprendreleur propriété et pur consé(tuont ta piu't qu'ils ont fournie pour le!)ien commun. Si donc tous no sont p.)s d'accord a l'endroit dot'~tise, si tpp uns voûtent y rc-ster fidétes, tandis que les autresventent s'en détacher, ceux qui t'abandonnent om )o droit do luireprendre co ({uitour revient à chacun pour teur part do la fortunepubtiquo "consacrée !'tf'tse, et do se coaliser pour faire vatoirce droit. Il se former.) ainsi doux ~tats qui se c.onduit'untdiver-sement a !ard do !'f';gtiso. Maiscetto hypoth~o d'un État dans)'~tatest.eHoadmissibio, et ce quo Fichto pr~cho ici, sans s'enapcr-ccvoir, n'~st-cc pas la guerre civi)e?
!ci s'arrête roovrugo qu'it nvait entrepris sur la Révotution fran-çaise. Il est fâcheux qu'it t'ait taissc itttorrompu, et qu'après avoirëpuige la question dodroit en mutile de révolution, qu'it n'a n)6mopas traitée entièrement (~), il n'ait pas aborde la question do sagessepratique, et n'ait pas examine ensuite, a la tumiere dos principesjuridiques et po!itiquos précédemment établis, tes toisot tes actes do!a Rcvotutton française. Car tôt est te plan qu'il ayait conçu, et qu'its'était d'abord proposé d'exécuter. Ce ptan ptait grand!ose maisd'une exécution si difficile que t'en n'a pas do peine h comprendreque Fichte n'ait pas cto jusqu'au bout. Peut-être d'ailleurs jugea-t-i!qu'i! n'avait pas encore, suivant les expressions dont il s'étaitnaguère servi tui-memo (2). toutes tes données nécessaires pourjuger impartialemont notre révolution. Peut-être aussi ne tarda-t-ilpas a s'apercevoir que los fondements do t'cdincoqu'i! voûtait e!ovorétaient trop étroits, et que, mafgn. foutes los excellentes choses qu'i!avait pu dire en faveur du droit individuet, sa théorie de !'Ëtat était)nsoutenab!o. est certain que son ouvrage, ~)peine pub!ie ne !esatisfaisait pas !ui.meme. Dès <794, il te jugeait déjà avec une cer<taino sévérité, comme on peut le voir par une tettro à Roinhotd, insé-rée par Fichte te fi!sdans ta biographie de son père (3). avoue ques'd avait a recommencer son travail, il rédigerait tout autromen~on
«)~près
le plan qn'.t avait trac~ tui-m~mcdans le chapitre n de Mnouvrage(p. i33), il lui restait à traiter la q~ion des rappor~u peu~avecle souvcrn.n, au pointde vue .h. droitde rovojution
~y~la de P~~r, p..i.(3) Page 2:
t-tUH'KET i.A RHVOLUTtONFt<A'St;A<S! LV
chapitre sur h' noblesse, mais il croit avoir dit sur t'~gtiso ptusicurs
choses ttouvottos. t'tus tard, (p~nd il eut a so défendre contre cette
ttunate accusation d'athéisme que t'orthodoxio t'ptigiouse, trop sou-
vent appuyée par t<;scepticisme satisfait, aime a lancer contre les
phitosophos, il t:rut dovou' si'oxptiqucr sur cet ouvrage qu'on lui jetait
à la teto il le prôspntaiL alors comme fessât d'un jeune homme
obignôdo sn patrie, ne dépendant d'aucun État, et qui, voulant
repousser t'oxugcrauon des défenseurs du pouvoir abso!u, s'était
laissé entraîner tui-mûmo à une certaine oxagcrution, pour rétablir
t'equitibro.Cet ouvrage et son discours sur la hberte dopenser lui valurent le
renom (le démocrate ot do jacobin, titre équivoque, comme dit Fichte
te fils, mais dangereux. Aussi attribua-t-il à cette cause l'accusation
d'athéisme qui fut plus tard dirigée contre fui-,et, dans sa défense,
jugca-t-it aussi a propos de s'expliquer ta-dessus (~). Mais à cette
époque les idées de r'ichte s'ôtaient déjà singulièrement modifiées,
comme on va le voir tout Mt'heuro.
Ma!gre tout ceta, quelque incomptot que soit l'ouvragede Fichto,
et quelques erreurs qu'on y puisse relever, il respire un sentiment si
énergique de la liberté et des droits de t homme,le soufl1omorat y
est si puissant et t'ctoqucnce on est si grande, qu'on le lit encore avec
plaisir, avec entraînement, avec profit. Et puis c'est un si curieux
monument que ce tivro d'un jeune homme, qui sera bientôt un
grand philosophe, écrivant à Dantxick et on Suisse sur notre révotu-
tion, que le public français me saura gré, je l'espère, do le lui avoir
fait connaître.
ni.
H n'est pas do mon sujet de suivre Fichte dans les circonstances
ultérieures de sa vio, si intéressantes qu'elles soient, et dans les
ouvrages qu'it a consacres depuis a la politique et au droit, jusqu'à
l'époque ou il prit part à !a tutto de l'Allemagne contre la France
impériale mais je no puis me dispenser d'indiquer les modifications
que, dans cet intorvatto, t'experience et do nouvellesréflexionsavaient
amenëes dans sa pensée sur les questions vitalos que nous l'avons vu
traiter dans ses Con«(~'ft<tOMst<r Révoltitioit~'a~fa~c.
Deuxouvrages importams se rattachent a cette époque. Le premier,
pub!ie en t796, est une théorie du droit nature!, connue d'après les
(t) /Nd., p. 225.2'
!NTRODUCTtON DU TRADUCTEUR.LVI
principes de la ~oNn~ <~/«~'Mcc(t), c'est-à-dire du nouveausys.terneque Fichte avait fait paraître dans les deuxannées précédenteset oii il prétendait reprendre et compter la philosophie do Kant.Cotte Utéorio du droit naturel n'est donc que do trois années posté-rieure aux ~cr~o~ aur TÏ~t~M~'oo~'fut~t~; mais les idéesdo Pichte sur t ~tut et sur tes rapports do t'Ètat avec l'individu sont
déjà entièrement transformées. C'est ici t'ouvre d'une pensée plus'nure, d'une rénexion plus profondo, d'une phitosophie plus savante,sinon toujours plus pratique. Aussi, dans sa réponse a l'accusationd'athéisme, Fichto rcnvoic-t.itacot ouvrugo, comme :')h dernièreoxpresion do sa pensée, ceux qui lui objectent son livre sur la Mevo.tution française.
Dans ce nouvel ouvrage, Fichte so rapproche dos idées do Kantt dont il s'était écarte dans lu précédent, commeje l'ai indiqué plus
haut. t) croit maintenant, avec fauteur do t ~M. ~r p(t~ p~p~<«'~ (2), que i état do nature est un état de guerre et d'iniquité,et que par conséquent les hommes ont le droit do se contraindre tesuns los autres à sortir de cet état et à instituer entre eux tordrecivit, que l'union panique ne peut, à la vérité, po fonder que surun contrat primitif, mais quo ce contrat est une chose dont t'insti-tution est absolument nécessaire; enfin que le peuple no peut pasexercer lui-mémo te pouvoir exécutif, mais qu'il le doit déléguer (3).Ainsi, tandis que. dans ses CoMh/i'~x~ <Mr<«~o~<<oM/ran;-a~,Fictuo faisait de t'État quelque chose do tout à fait arbitraire et con.vennonnet, it en reconnatt aujourd'hui l'absolue nécessité au pointdovue du droit tui-meme: il voit tmn a présont que le droit no sauraitse maintenir entre les hommes en dehors de la société civile, c'cst-à-
t dtre sans lois positives et sans pouvoirs publics. En cela donc ilretourne cila théorie do Kant muis, en mente temps qu'il s'v rat.tncho. il on signale l'insuffisance. Cette théorie démontre bien lanécessité do la société civile ou de t'Ètat en générât, mais elle n'ex-
ni~ est intitulé ~'<droit tlatuI'ol d'apros~pn'M~ la"? scienco. C~Mt~ coMp/<Mde Fichte,t. H!.
(2) C'est 'e cité par Fichte commerenfermant l'expressiondesouv~ sur droitet '? car, à il composasonouvragesur le droit il pouvuitconnattreic~~~M~~anAy.v. doctrinedu droit, (lui P'ent la m&meannée que sonpropreva~urVoilàce qu'il ne fautpas oublier pourapprécierce livre à sa justevaleur.
H~S, Introduction,Ht: des Huppurtsde haut théoriedudroit avec celle de 'ticncit~plushaut,
HCHTE ET LA hÉVOLUTtON t-'HAN~AISH LVH
ptique pas !e rapport do l'individu avec un certain État en particu-lier. En outre, son principe fondamontat do l'accord do la hborté do
chacun avec celle do tous est purement formel, ot ne détermine nul-
tpment tes rapports qu'implique cetto idén un peuple, une nation.
Uest certain que, si le principe de la théorie do Kantest inattaquable,elle i besoin ette-memo d'être étendue et comptetéo(~).
Matitoureusemont ~ichto n'a p~s toujours raison dans la critique
qu'it fait do cetto thcorio et dans le3 corrections qu'it y apporte.Kst-ce un défaut, par oxen)p!e, oa n'est-ce pas p)nt6tun mérite que
déposer on principe, comme le fait Kant(~) après Montesquieu,Rousseauet tant do publicistes, la séparation du pouvoir executifet
du pouvoir !egis!atif. Comment Fichte ne voit-il pas qu'attribuer le
pouvoirlégislatif au chef du pouvoir exécutif, c'est constituer le des-
potisme? Jo lui accorde que la séparation de ces deux pouvoirs no
serait pasà elle seu!euno garantie suffisante du droit; mais le droit
sera-t-il plus sûrement garanti, quand ils seront confondus dans les
mêmes mains'? Je sais bien que Fichte veut que la constitution à
taquette le peuple devra obéir soit soumise au sunrago du peupte;
mais cotto condition du sunrago populaire est-elle etto-memeune
garantie suffisante, ou nepout-etto devenir un redoutable instrument
entre les mains do la tyrannie? Fichte ne i-ombtopoint avoir prévu
cotte difficulté, qui nous caute aux yeux, a nous autres. Mcherche
une autre garantie contre tes abus du Pouvoir dans l'institution d'une
magistrature suprême étuo périodiquement par le peuple et chargée
de survoiller le pouvoir exécutif, de le suspendre au besoin et docon-
voquor la nation, Cette magistrature, à taquctte il donne te nom
d'éphoriu, n'était pas sans analogie avec ta~rtcco~n~nau'e
du ptan que Sioyos avait proposé à la Conventionon 179t, c'est-à-
dire un corps do représentants ayant la missionspéciale de juger etdo
prononcer sur tes plaintes en violationde la constitution qui seraient
portéescontre tes décrets de !a tégistaturo (3). Mais t'éphorat do
richto, comme tajurio constitutionnairede Sieyès, succombe devant
la très simple objection que Thibeaudau adressait à cette dernière,
en disant à la Convention(4) « On prétend que la jurio constitu-
(t) Voyezmon .(M~ cn<«y<e(~ la /)oc<«')e~Mdro< p. Ct.xvtt-
0<XXt.
(2) Doctrine dMdro~. p. 172; .~o~e o-t~MC, p. Lxxvn et
p. Ct.XHV).
(3)Voyezsur ce point la ren.arqu.tbto//<~o<rcdM~MuentetMM<~r'o-MWKntt'cc~franc< par M.Duvo~icrde Hauranne,t. p. 367.
(~ p. 37'2.
t~THOmJCTIUN !)U TKADL'CTKUR.LMU
tionnaire retiendra les autres pouvoirs dans leurs limites. Soit; mais,si tajuriesortdes siennes, qui est-ce qui réprimera sonusurpation?On no résout pas ta difficulté, on tarecule. C'est l'histoire du mondeportée par un étéphant, toquet est porté par uno tortue et ta tor-tue, sur quoi repose.t-ctte ? tt est juste d'ajouter queFichte a u'aitotut-mômeson éphorat comme la Convention a traita la jurio coosti-tutionnairo de Sioyès il t'a retiré dans une seconde théorie dudroit, dont nous dirons un mot plus tard.
Maisce n'esUa qu'un détait. Coqu'il importe surtout de rem.ir-qucr, c'est que Fichte, après avoir si complément att'ranchi t'indi-vidu do t'Ètat, t'y incorporf maintenant tout entior.fpour l'au-tour des CoN~d~-tt«o~st«- lit /~o~<M ~Yt<f, rËtat n'haitqu'une association accidontotte, toujours révocabto et toujours divi-sible; pour l'auteur des~<<~ dro<n~(M~, c'est un toutorganique dont les individus sont los parties et ou tous viennent sefondre on un môme corps. En passant du premier de cos ouvragesau second, on quitte une théorie qui pousse t'individuatismeasesdernières limites pour entrer a pleines voiles dans la doctrine qu'ondésigne aujourd'hui sous le nom do socialisme. Nous retrouvonsici la théorie du Con<r<~~c~ mémo Fichte t'exagère a certainségards. Ainsi, lui qui exaltait si fort tes droits do la propriété indi<viduollo on face des prétentions de l'état, il reproche il Rousseaud'admettre un droit de propriété antérieur ait contrat social. Dans sanouvelle théorie, il ne peut y avoir do propriété avant cecontrat. Enrevanche, tetto est litnature do ce contrat, quit doit fournir il chaquecitoyen une propriété (<). et qu'il implique une assurance mutuellocontre la misère (2~ Nous pourrions montrer, sans sortir do cetouvrage/a queHosconséquences co principe conduitnotre philosophe,mais nousen trouvons un exempte plus éctatant encore dans le secondouvrage, dont. il nous reste a parier.
Cet ouvrage, qui formait une sorte d'appendice à tn théorie dudroit et qui parut en ~800, est intitulé t'J~f c~nw-ct~ ~~(3).Fichte nous explique tui.mémo co titre en quelques ligues qui rac-compagnent. H entend par État commercial fermé un État dont loscitoyens n'ont de rapports d'industrie et de commerce qu'entre eux,et par conséquent sont p)ac6s sous une loi de prohibition absolue'interdisant toute exportation aussi bien que toute importation. C'est,comme on le voit, tout juste te contre-pied du libre échange. Fichto
(i) Page204. (2) Pa~ciOS.(3) Œufr~ c<wtp~M,t. t!), 387.
HCUTH KT LA UH\'OLUTKtN FhAN~tSH. ux
reconnaît bien qu'un ~tat de ce ~nro n'est pas immédiatement et
absotument réatisabto mais il est, soton lui, l'idéal dont tons tes
gouvernements doivent travaiDer M rapprocher do plus en plus.
L'État, tôt qu'it !o conçoit et te décrit, est l'État rationnel.
Lu société so divise naturollement on plusieurs classes ceux
qui produisent 2" ceux qui transforment tes produits naturels, tes
artisans, les artistes, les industriels 3" ceux qui vendent ou échan-
gent tes produits naturels ou !os productions do l'industrie, les com-
merçants. Quant aux fonctionnaires de toutes sortes, comme tes ma-
gistrats, les instituteurs, les guerriers, ils ne sont que les serviteurs
do la nation. H s'agit d'établir un juste équilibre entre ces diversos
classas, au moyen de l'équilibre de la production et do laconsom-
mation. Ce double équiiibro est le problème fondamental do l'éco-
nomie politique. Lo résultat sera d'assurer a chacun, en retour de
son travail, une part proportionnelle a tous les produits naturels et
a toutes !osproductions do l'industrie. Mais ce résultat no peut être
atteint que si la valeur relative dos choses est déterminée par t'État,
et si tout commerce immédiat avec les étrangers est interdit aux
individus. Que s'il est nécessaire do faire dos échanges avec t'étran-
ger, c'est au gouvernement do s'en charger, comme c'est a lui qu'il
appartient do déclarer la guerre et do contracter dos alliances.
CcHocurieuse théorie dans les détails économiques do taquotte il
m'est impossible d'entrer, mais où l'on retrouve toutes tes idées du
socialismecontemporain, repose sur deux principes fondamentaux.
Lepremier, c'est que la propriôt6 ne consiste pas dans un droit ex-
clusif sur les choses, mais dans le droit d'exercer librement son
activité dans une sphère déterminée, ce qui suppose nécessairement
t'httervontion de t'~tat; et te second, que t'~tat doit a chacun do ses
membres une portion (les richesses produites par la société tout
entière. Ce dernier principe, qui tui-môme est un corollairo du pre-
mier, est ce que l'on a désigné do nos jours sous !o nom do droit au
travail. Fichto a bien compris que te droit au travail implique l'or-
ganisation dut travail, et que l'organisation du travail exclut te tibro
échange. Il a devancé, comme on tovoit, certaines écoles socialistes
de notre temps.It est facile do relever les erreurs et les dangers do cotte théorie.
E!te a été tout récomment encore l'objet d'une réfutation approfon-
die ~); mais, hl'époque même ou elle parut, elle n'avait pu échapper
()) i'ar le docteur Schconcr, dans un ntc:noirc publié par la &'octe'(c
!:STitOtHJC't'it)N UL' Tn~DUCTKUiLLX
uux s~érités do ta critique. Bien que Fichte regardât son ~<o<coHt-wcrct't~/~t'MK!comme le meilleur do ses ouvrages (t), c'est celui detous qui fut témoins bien accueilli du ses contemporains il ne sou-leva point seulement dosohjections, mais une foule de raitterios. Celase conçoitaisément. Fichte, du reste, semblait en avoir pris d'avanceson parti, en déclarant que son siècle n'avait pas la gravite né-cessaire pour accupittir convenablement un projet qui, au tiendo tout livrer a la ruse et au hasard, soumettait l'activité humaineaux lois les plus sévères (2). On lui reprochait de proposer un planirréatisabto, et l'on a cru le justifier en répondant qu'il n'avait lui-même présente ce plan que comme un idént propre à servir de règlepour juger et corriger la société, mais qu'il serait toujours impos-sib)o do réaliser entièrement. H faut bien s'entendre a ce sujet, tt estbeau sans doute à un phitosophc, j'ajoute mémo que c'est son devoirle plus ctevo de chercher en tout l'idéal, et ce ne serait pas une objec-tion sérieuse que celle qui reprocherait a jnnothéorie do n'être pasentièrement réalisable, car il est de la nuturo mémo do l'idéal de no
pouvoirjamais être entifrement reatisé du moins faut-il que l'idéal
proposé ne soit pas unfaux idcat, c'est.a-diro une conception contraireaux lois et aux bornes eternettos de la nature humaine, ou une vainefantaisie de l'esprit, en un mot une pure utopie, maisqu'il puisse êtrevraiment conçu comme un idéal pour l'humanité. Un ideat de l'État
étant donné, la question n'est donc pas de savoir si cet idéal est ounon entièrement réalisablo (je ne dis pas sans application possible),mais s'il est ur<«ou /«t<;c.Or, la question étant ainsi posée à l'endroitde la théorie de Fichto, on ne saurait hésiter a la repousser, au moinsdans ses moyens. L'idcat est certainement, que, dans les sociétés
humaines, chacun puisse arriver à vivre de son travail, mais non pasque chaque État se forme à tous les autres, et que, dans chacun
d'eux, tout soit fixé et rcgtc comme dans un couvent ou dans unecaserne. C'est bien plutôt le contraire qui doit ôtro le but de la
politique.On a signale avec raison une certaine analogie entre les idées de
t'~a< co~«TC<(d~rM<<et le ~«<<~te con<<nc~o<inauguré dix ans
après par le fameux décret de Berlin. Je ne crois pas, pour ma part,
que la théorie du philosophe attcmand ait pu avoir la moindre in-
~MtCttMdo~a<<t</<yued'c'cM~mopoN~uc. Voir, a cesujet, dansle./OMn«!<de.!fcono~MtM,t. XXVt,p. 233, un articlede M.ChcrbutHcz.
<')) Voyezla t'refaccde Fichte leHts,p. xx\viH.(~) ChapitretUt, p.S!0.
HCHTE ET LA RÉVOLUTION mAN~:A!S! LX!
nuencc sur l'établissement de ce système: mais on no peut nier qu'il
nu h) réntisat, on partie, sur une plus va~tc echetto, et. l'on ne sau-
rait prétendre que cette épreuve pratique tui ait etn favorable.Tout )e
monde est d'accordaujourdhui pour condamner )obtocus contincntat
comme unodes mesures tes plus fâcheuses du régime napoléonien.
Maisquelles ()ue soient les erreurs de Fichte, erreurs qu'il est en
\crit~ trop facile do relever. il faut lui savoir gré do son ardeur M
soulevercertaines questions qui préoccupent,aujourd hui à juste titre
tous lesamisde l'humanité. Hapu se tromper sur ta nature de quet-
ques principes, et du ces principes~ n)~t définis, tirer des consé-
quences inudnnssibtes, u~'is le sentiment do la dignité et des droits
du travait, la sympathie pour les souffrancesdes classes inférieures,
l'amour du progrès, tous ces sentiments, qui ne sont chez i''tchto
qu'autant do traductions du sentiment mora), sont en lui si profonds
et si nobtos,qu'ils font ou~ier bien des erreurs. Sans douto il a fait
fausse route; mais il a remue, un des premiers, des problèmes d'où
dépend l'avenir des sociétés humaines, et dont notre siècle semble
particulièrement destine upoursuivre ta solution.
IV.
Transportons-nous maintenant dans t'anneo 1806, a la veillo
de !a bittaitte d'!cna. Qucts étaient a cette cpoquo les sentiments dû
Fichte u t égardde la hL-votutionf)'an(:3isc.si t'en peul encore appeler
do ce nom te régime qui la représentait alors. Nous sommes bien
loin de ces jours ou la Franco, a travers des discordes et des vio-
lences.interiourps, travaillait a so constituer d'après !c:t idées de
tinorte, d'égalité et do fraternité dont ctto avait f.ut sa devise, et où,
pure de tout esprit de conquête, ctte no fuirait ta guerre que pour
défendre son indépendance contre les rois co.'tises. La liberté, pro-
ctan)ecpar la H6vo!ution, :t fait ptaco à la servitude tout se courbe
et se tait sous tejoug d'un chef militaire, devenu le mattre absolu de
la Franco. Où sont maintenant ces droits de l'homme et du citoyen
pour lesquels to cœur de nos pères et celui do Fichto battaient na-
guère t'unisson ? Jamais la dignité humaioo, jamais ta vie publique
ne fut ~touneosous un despotisme ptus savamment organise. L'cga-
lité conquise est.ettcdu moins rcspCL'tuc'?LnHcvo'utio))nvaitdetruit
la noblessede t'ancit'n K'gimc, t't~mpirc pn a créé une autre ù son
profit. Et ce duspotisinc ne p<'scpas seutemcnt sur la France, il
ommit t'Europe et ta faronnu u son ima~e )c& puuptcs gémissent
!NTRODUCT!ON DU TRADUCTEUR.LX!t
sous le régime militaire de l'empire français, ou so voient menacésdans tcur indépendance. I/atïranchissemont générât, annoncé etcommencepar la Hévotution, s'est change en uno immense oppres-sion. Faut-H s'étonner, âpres cela, si ceux mémos qui ont le plusappidudianotre Kévotution sont maintenant nos plus ardents en-nemis, je veux dire les ennemis do Napoléon et de ses soldats!Autant, on ~790, Fichto a vu avec chagrin la l'russe tourner sesarmes contre lit Hévotutionfr.m<uise. autant, en <80H it ta fétic.tod'entrer dans lu nuuvetto coalition souievéopar l'empire. C'était alorsla lutte dotous les rois contre un peupto émancipe; c'est aujourd'huicolle dotons tes peuples contro un despote conquérant. Pour t-'ichte,comme pour tout bon Attomand, ta cause qui va se décider sur techamp de bataitton'est autre que eelledc t indépendancenationale, dela tn~rté germanique et parsuito de la civilisationotte-mômo. Aussinotre philosophe pitrtagoa-t-it t'enthousiasmo universot. torsquo tocabinet doBerlin, demeuré noutrodepuis lapaix de Mate(juittet t79H),mais de plus on ptusofrraycpar !'nccrois::omentindéfini de t'empim~se décida enfin, après bien dos hésitations, a se liguer avec la Russiepour chasser les Français det'Attûmagno. Maisil n'était pus hommea st~eontentet- de former dos vœux stériles il conçut to projet dos'associer a la tutto, autant qu'il était en lui en entretenant te fousacré dans les cœurs par des discours patriotiques it aurait mômovoulu accompagner t'urmco. ann d'être mieuxa portée d'agir parsa parole sur les défenseurs do sa patrie.
Les !igncs suivantes, écrites u cette époque, montrent bien quotteétait alors l'ardeur des sentiments de Fichte, ot quoi beau rôlerôvait ce phitosopho, digne d'un autre âge
« Si l'oratour ost condamné à se contenter do parler, s'il nopeutcombattre avec vous dans vos rungs, et témoigner de la vérité doses principes en bravant les dangers et la mon, c'est uniquementla faute de son époque qui u séparé la destinée du savant de celle duguerrier. Mais il sent que, s'il avait appris a porter les armes, il nete céderait en courage à personne. Aussi regrctto.t-it que son sicclene lui permette pas, comme au temps d Eschyto ou de Cervantes,do confirmersa parole par ses actes. H voudrait pouvoirfaire rovivroco temps; et, dans les circonstances actuelles, qui imposent à savie une nouvelle tache, il aimerait bien mieuxagir que parier. Mais,puisqu'il lui faut aujount hui so contenter do parler, il voudrait aumoins faite jaillir de sa parutotos glaives ot ta foudre. It souhaiteaussi qu'il y ait pour lui quelque danger a la faire. Dans le courant
F1CHTE ET LA RÉVOLUTION FRANÇA!SE. LXIII
t!e ces discours, il exprimera, sous son nom, avec toute la clarté et
toute l'énergie dont il est capable, des vérités qui conviennent ici,
mais qui devant le tribun.d de l'ennemi méritent ta mort. Maisce ne
sera pas pour lui une raison do se cacher lâchement itjuro publi-
quement de vivre libro avec sa patrie ou de mourir avec elle. b
Il faut te reconnaître, c'cat pur su faute qu'a l'exception(loquet"
quos individus, la nation allemande s'est attiré le sort qui vous met
aujourd'hui les armes nia main, et ettomérite, hé'as! tematheur que
vos victoires, osperons-te, détourneront -d'otte. Sacrnior à ta mol-
tesse a la tacheté, a t incapacité oser préférer à t'/ton~xr la fortune
et la vie aimer mieux souffrir et tomber lentement dans un opprobre
de plus en plus profond, quo de prendre la résolution énergique de
tout sacrifier à i'honneur, c'est là une bassesse qui tient pour oxat-
tation et trouve môme ridicule tout effort tenté pour sortir de cette
honte.
nQuet doit être au contraire le caractère du guerrier? H faut qu'it
soit capable de se sacrifier it est fait pour cela. Les nobles senti-
ments, tejuste amour de l'honneur, la grandeur d'Amequi t'élèveau-
dessus do la vie et de ses jouissances no l'abandonneront jamais. Une
morale énervante et une misérabte sophistique ne sauraient avoir
d'accès auprès de vous leurs adeptea les plus considérables et les
plus puissants devraient du moins chercher a tes 6'oigner do vous.
o Vous avez aujourd'hui l'occasion, et vous ne la laisserez cer-
tainement pas perdre, de vous assurer que cette valeur est bien la
vôtre. ~< le combat et on vue de la guerre ne pas chanceler et
ne vouloir que la guerre, mais en calculer fermement ot avec ré-
flexiontoutes les conséquences. P~<<«n<la guerre conserver dans
la météotout son sang-froid, et jusque dans la mort, songer a la
victoire, a la patrie, aux chosesdémettes. Personne n'a une plus belle
occasion que vous; aussi êtes-vous dignes d'envie. Mais par cet
exemple soul vous agirez aussi sur les autres vous donnerexdu nerf
et do la force au reste de la nation, qui est an'aisseet comme mort.
L'ami de t humanitéet des Allemands tourne vers vousses regards
avec confiance. Son espoir, naguère abattu, se reporte sur vous.
Puiasé.je vous parler de vivovoix et m'inspirer do vos regards t
Quedu moins l'amour qui nous est commun réveitte la lettre morte,
que nos sentiments communs me servent d'interprètes auprès de
VOUS)cLI
Le projet quo Fichte avait conçu d'accompagner t'armée comme
INTRODUCTION DU THADt'CTEUÎt.LXJV
une sorte de Tyrtée philosophe était trop en dehors do nos ptatsusages modernes pour avoir quelque chance d'être adopté. Onrendithommage aux nobles intentions de Fichte, mais on repoussa sa pro-position. L'ami qui lui transmit il ce sujet tes remerdmentsdu roine savait pus alors combien il avait raison d'ajouter «Peut-êtredans la suitu aurons.nous besoin de votre étoquonc.e..D Ongocroyaitsur du succès.
Le <7 octobre, Fichte passait la soirée avec les siens chez unami tous les c<Burs étaient. remplis d'espoir; et l'on buvait autrtomphodo i armée, dont on attendait des nouvelles d'heure enheure. Cotte d'une grande défaite tomba tout il coup, comme unebombe, au milieu de ce cercle joyeux, et les amis se dispersèrentpour courir aux informations. Les bruits étaient fort contradictoirespendant que les uns parlaient d'une déroute, d'autres annonçaientune victoire. Les autorités de la ville faisaient courir ce dernier bruitafin do pouvoir se préparer plus facilement à la fuite. Ce ne fut que!e lendemain matin que Fichto apprit toute la vérité par son amiHufetand. Les espérances dont on s'était berce étaient anéanties la.sécurité avait fait ptace à la terreur. On savait qu'aucune armée necouvrait la capitale, et l'ou s'attendait a voir parattro au premier jour!'avant.garde de l'ennemi. Toutes les autorités, toutes les personnesdo distinction se préparaient à fuir. Fjchtp, suivant la parole qu'ils eta.tdont.ee à tui.mcmo. n hésita pas un seul instant sur te partiqu'il avait à prendre il résolut do partager le sort de t'État. qu'ilregardait comme !o rempart do la civilisation et dola liberté Hufo-land et lui convinrent, ce jour mémo, do se rendre ensemble surles bords de t'Odor. afin d'y attendre les événements. Mais unepensée tes tourmentait que deviendrait teur famille au milieu d'unoville devenue la proie de t ennemi? La femme de Fichte prit alors larésolution de rester seule et de veiller à la fois sur les deux maisons,de telle sorte que la famille do Hufetand pût quitter Berlin. « Ettacrut, dit son fits, devoirce sacrifice à son mari, auquel elle conseit-lait elle-méme la fuite, puisque la fuite n'était possible pour lui qu'acette condition. a
Fichte s'arrêta d'abord à Stargard, en Poméranio il espérait en-core qu'une nouvelle bataille viendrait tout réparer mais bio~tapprenant la capitulation du prince de Hohoniohe et celle mêmedeBlücher, il gagna Kœnigsberg. La patrie do Kant lui offrit une chairede philosophio,
Pendant son ~jourd~ ccUe.vi))p, Fict~o puh!.aun ct.rieux
F!CHTH !:T I.A ItHVOi.UTION FHANÇAtS! LXV
e
écrit sur Machiavel (~), qui était plutôt uneu'uvropotiti<p)o qu'uneétude historique. Hn le voyant faire !aputo~ie de cet écrivain, on
éprouve d'abord un sentiment do surprise; mais on nu tarde pas à
s'expliquer cette étrange syrnpattne. Dans l'autour (tu Pr~cc, Fiohtovoit un patriote qui veut avant tout t'independanco de t'ïtatie, et donttout te ::y~temo politique s'oxp'ique par en principe. On conçoit deslors quc~ gémissant tui-meme sous le jou~ de t'etran~cr, et sou.
haitunt aussi par dessus tout t.'frranchissemcnt do son pavs, il sesento attiré vers Machiavel. H nu se trompe pas sans doute en luiattribuant un ardent patriotisme, mais est-il aussi bien dans te vrai,
quand it cherche à expliquer par lit toute ia politique do son tivrc du
~'tttcc(~)? En tous cas, il scmNc oublier ici la fin ne justifie pasles moyens. Mais tel est eu'et do l'oppression ctran~ere, qu'une fait
dévier iesespritstesptus honnêtes. Exaspère parées saturnales do litforce dont il voit le spectaclo autour do lui et dont sa patrie est h)
première victime, Fichte !ui-memoen est vonu à ne reconn~tro ptus,dans tes relations des peuples cotre eux, d autre loi que le droit du
plus fort, à anranchir le prince, dans ses rapports avec les autres
~tats, de toutes les règles de la moratevatgairo. et a poser comme
principe do toute potitiqup extérieure cette maxime dangereuseS«<uaet dfcus pop«~ ~u/x'eMtM esto. N nofaudrait pas, uta vérité,
prendre trop à ta lettre ces sombres paroles que t indignation et le
désespoir arrachent a Fichto en ce moment, et )a manière dont il
applique a son temps la potitiquodo Machiavel. Son machiavélismen'est certainement pas aussi noir qu'it en a l'air nous en verronsbientôt la preuve dans sa conduite même cequ'it vent au fond. c'est
rappetordans les âmes cette énergie indomptable que rectamc la dc-fonsedo ta patrie, et qui est devenuesi rare. Saisit s'égare en faisant
appel à la poliliquo du publiciste italien, phts propre certainementa démoraliser les âmes qu'a les régénérer, et il n te tort de s'ap-proprier quelques-unes des maximes les plus péritteuses du livredu Fn~e. t''ichte semble s'accuser tui-memcen partant de ceux
qui autrefois, dans la chaleur do la lutte, ont exatte outre mesureles principes do lu Révolution française sur tes droits do t homme,sur la liberté et t'e~atite de tous, et leur ontt attribue ptusde
portée qu'its n'en ont réellement. Tout en reconnaissant que 'ces
principes sont les éternelles et inébrantabtes bases de tout ordre
(t) ÛH'<t.'rMco~'p~cf, t. Xt, p. 40).(2) t''ich'cn'estpnstt'prcruiprttuiait tenté cettec\ptic:ttion.Yoyexsurce
pointt'cxcctto't cit.'pitt'cconsacraa Mactxavctpnr~. Jnoct, dans r//<t-~«'c (<c j)/t).'0!0p/t<c~ro~e c<~oftN~NCqu'H VK'ntde p)tt')ier.
INTRODUCTION DU TRADUCTEUR.LXVt
sociat et qu'aucun État n'a te droit de les vioter, il leur reprochemaintenant d'être impuissants a fonder et à diriger un ~tat, et il
pense que l'exagération qu'on on a faite a exercé une très fâcheuseinttuonce. Mai?, exagération pour exagération, mieux v.tut mittefois cette-ta que celle qui pousse au machiavélisme.
Fichte pcbtia encore, pondant son séjour a Kœnigsbcrg, deuxDialogues.sur p<~<<<' << son c(ut~-t«~ (t). Le premier de ceadialogues, qui avait été compose a Hortinpendant la paix, ayait pourbut do montrer en quoi consiste lu vcritabte patriotisme, comment ilost une détermination nécessaire du cosmopati.me, et quels devoirsil impose a tous tes Attemands. L'auteur defmit le patriote celui quiveut que tobut do l'humanité soit d'abord atteint dans la nation dontil est membre; et comme, seton lui, c'est uniquement.par la scienceque l'on peut désormais arriver a ce but, comme il lui semble enoutroque t'Attemagnoest la patrie môme de la science, il on conclutque le développementet la propagation de la science est !o premierdevoir du patriote attomand. Le second dialogue, écrit à Kœnigsbergsous t'innuuncodes ôv~nemontaqui étaient venus depuis modifiersiprofondément la Prusse, est destine a comptéter les idées expriméesdans le premier, et il les approprier aux circonstances présentes.Fichte y traite dos obligations particulières que les dangers de lapatrie imposent aux patriotes et tandis quo, dans le précédent dia-logue. il n'admettait que !e patriotisme attem.)nd on général, la né-cessité le force maintenant à rcconnattro un patriotisme prussien.Mn il cherche te moyen do régénérer t'Attcmagno, et ce moyen, ilcroit le trouver dans un système d éducationqui, fondé sur les prin-cipes do Pcstatox/i, formerait des générations entièrement nouvo!)es.Nous retrouverons bientôt dans tes ~co~ ci /« n«f<on«~ft~fles 'idées que Fichto indique duns ces dialogues; il y môte ici cor.tainos réflexionssur sa propre philosophie, qui foraient sourire plusd'un lecteur français, mais qui montrent jusqu a quel point il pre-nait son œuvre au sérieux, et combien te savant ou le philosopheseconfondait on lui avec le patriote. Commela ptupart des Allemands,Fichto est tout d'uno pièce il n'y a on lui qu'un homme. Mais, ilfaut le reconnaître, cet homme est aujourd hui bien ditTérontdo ceque nous t'avons vu dans ses Ct~«/<'r«(~s .s«r ~/{f'uo/(~t /Wtn-~c. Dans cet ouvrage, il poussait l'individualismejusqu'à ses der-nières limites une paroille doctrine étouffait néces.saircment touteespèce de patriotisme. Ici, au contraire, nous avons anuire au pa-
(t) Œt<n~ co~< t. Xt, p. 22t.
PICHTE ET LA. RÉVOLUTÏON FRANÇAISE. !.XVH
trioto te plus décidé et. to plus .u'dont, un pourrait presque dire h)
plus étroit, et tctto est. maintenant pour lui ta nécessite du puLriu.
tistno,qu'ityraménectysacrifietout(!).t''ichto no jouit pas tongtemps du ropos que seu'btait lui pro-
mettre !.tvitte6toi~néo oui! s'était réfugié. Vainqueur des Hussesa
Hytau.Napotcoi tM poursuivit,jusqu'à Kœni~sborn. Us braquèrent,
du haut dus nun's do cette vitte, une nombreuse artitterie, et, tes
habitants épouvantés se demanderont s'ils n'attaient pa-.éprouver te
sort. de Lubcck(2). Heureusement Napctéon se contenta d'envoyer
tes cavatiers (te Murât jusqu aux portes de K'm~sborg. et prit la
réso!ution do se retire'' ~orsses cantonnements. Les habitants de la
vittorespireront, et. bientôt tous )os ca'urs prussiens se reprirent a
espérer. Mais )a prise do Danixick et ta bataitte do Friedtand nrcnt
de nouveau tomber tout espoir, et te traité do Titsitt, qui en rut ta
conséquence, réduisit la Prus'c de moitié.
Laveitten~mcdotajournécdei'')iedtand, Fichtc avait quitte
KŒnigsberg pour Copontta~ue. Ce fut dans <~ettocapitato (~t'it at-
tendit la conclusion de la paix, c'est-à-dire une solution qui, quoique
amèroqu'eno fût pour lui, devait cependant tuipermuttro du re-
tourner a Bortioauprès de sa femute et de son enfant. H les rejoignit
ontin dans les derniers jours du mois d'août ~807.
Fichto retrouvait, aussi a Berlin Jean de Mutter, avec (pu il était
fort étroitement iié et sur te caractère duquel il sembtc être fait
de singulières ittusions. Au mois de juin précédent ce savant av<'it
prononcé, dans une séance publique de l'Académie det!er!jn,
un
(t) HnHtt.poottantce n~mo hiver <tf;mo') !807 qn'it pass.)a Kœni~berg, Fichtcconçutet entreprit unouvragepottti'juettcstmc.')retc\cr ft :c
ranim'tes espritsen Auctnu~hc,en tcur montrant,te but n('('ur~ti\'tf't'tles moyeusderattcindrc; n):usil !)'<-<)'crhit <tn<;~uctquc.~h'n)';uts, quiétaient restes induits, et que sont)~ a pnbU.spuut-):)prcu'i<)'ct'uis<tans
soncxccUcnteéditiondes Œ'«r<< eu~). <~/«/)~ (t. YH,p. 'Hl).doces fragmentsest c~acrc a la rcn~io))qui <'ot)\if'nt!)ar('(n)httqttcnHemande.Ficht~n'abandonnepas le princij'c<tt;lu iibcrtc de ccn~ic))''f!,
fju'ita autrefoissi ettergiqucmcnt(tct'cmfnet auquct il est.''est' thtrtntoutf!
sa vie; mais il oe sépare plusr!is(; et t'Rtat, commeil !(' taisaitu.tnsses
('om~e<-a(~))Sït<t'/M /{t'uofn~'on/'tn<);-f«.<c.C'est que t'~tat, tt't qu'it te
conçoitaujourd'hui, impliqueh rcH~ion.CcHcque devrait rccomtaitro,actontui, ta constitutionde la n:pnbtiqttcattfmande, ce serait,une sorte du
christianismeunivcrse!(pti s'etcveraif au-dessus dus trois grandes com-
nmtuonsdéjà existantes, maissans les opprimerle moinsdu mondeet en
générâtsans vio)cnteraucune conscience,t'nrtant <tccette idée, t-'tchteva
jusqu'à t'cgter tousles detaitsde cenouveaucuttc, la ror)nc<)uscotises,tes
jourset t'orth'cdesccremonies.etc.Kousvuitabientoi)) 'tu dernierchapitretic sonlivre sur la Révolutionfrançaise.
(2) VoyezThiers,~<s<o<rcdMC'o~u~< ~c r/n'c, t. Ytt.p. 337.
~Tm)t)t'(:TI'~ DU THADUCTHUR.!H
discours sur ta gtoirodo Frédéric te Urand, duntquetqucs passagesavaient scandatise tus patriotes attemands. Ficttte avait, tu ce dis-cours a Copenhague; mais. tout en r~reUa'itcespassugcs, qu'ilrejetitit d'aitteurs sur te compte dos circonstances, il en avuit touéce <}u'itappelait. !a tt'ndance La tendance de ce discours, écri-vait.it a m) ttotmno d't'tnt, est évid~mmcot d'inspirer aux vain-queurs prés'-intsdu respect pour tes vaincus, do ruv~'itteren ceux-cile courage et la confiance en cux-mcmo;. ut do tes sauver du déses-poir. o Untoctne temps, appronant de Jean du lutter tui-)~mo quitson~cai~a(tuincr Dcrtin pour Tubit~uo, i! avait fait tout ce quiavaitdépendu de lui pour io conserver a ta h-ussc. ~ais ses icMrcs arri-vërcnt trop tard, et, quaod il rentra fui.même a Rer!in. it n'était plustemps. Copcndujft les sentiments que lui tc.ooigna Jean do lutterdans t'intimité ou ils vccm'ent (tuotqucs tnois encore :)va))t do sequitter pourjamnis, ne tirent que te confirmer dans ta bonneopinionqu'it en avait concuo. Mais Ficttto n'etnit-it pas ici la dupe de sonbon et ~randcœur? Jt faut bien te dire Jean de Mutterctuitunhomme d'uno deptorabte faiblesse. Quctte fut en ctret la conduite docet écrivain? Apres avoir montrf, d'abord au so-vicc do t'Autriuhcpuis au service de ta Prusse, la plus grande ardeur contre tadornenation française, i! se laissa séduire par Nupot~on, et passa au ser-vice du nouveau royaumo de Westphatio. On dira qu'on se soumet-tant au vainqueur, il avait tes txcitteuros intentions, qu'il espéraitpouvoir ainsi se rendre utile sa patrie, etc. Nous connaissons cosbonnes intentions.ta; cttos n'ont que trop souvent servi de prétexteaux cœurs tacttcs ou aux ambitieux vulgaires. Qu'ifs satisfassentleur vanité ou tcur cupidité, !!oit, mais qu'ils nopartent pas do tourdévouement à la chose pubti~me,quand ils no font que sacrifier tourhonneur a tour intérêt.'
Déchue deaa puis-anco oxtérioure et de son importance politique,ta Prusse prit alors une nohtc réaotution, cettu do se reformer et do
sodévpitoppcrat'intcriourp.u'tacutturcintdtcctueite.otdosemettre, de co cuLe, a la t~tcdo t'Attema~ne. Pouratteindrocc but,on songea d'abord a établir u Burtin une univorsité qui fortnat uncorps animé d'un esprit tout nouveau, approprié à t'etat présent etaux progrès do la science, capable non-scutompntdo donner aox étu-diants les premières notions, mais donrir aux savants eux-mêmesles moyens do pousser toujours plus avant leurs connaissances, etqui fut a<a fuis un asitc pour la libre recherche dans toutes les di-rections, et un rempart contre ta barbarie mititoirc, ators déchatnoosur i'tiuropc. Fichto fut ch<)rëé de tracer unp):)n quirépondt~a
IICHTE KT ï. HKVOï.UT!0\ !'HANf:À!SR. L\!X
celle id6e.Cetui qu'il rc'tigt'a et qui fut.pubtieptus tard (<)se faisait
remarquer par cette c)e\\)tion et. cette uri~inat!te qui caractérisenttoutes ses(Pu\'rcs; mais il n'était pas suftisnmmcntpratique, et il no
put.être exécute. Notre phitosophen'eneut pas moinsune très grandecttrt'Si-aiutaireinnuencesur tes débuts de t'Univer&6 de Uertin
non-seuh'tnentpar t'enscigncment qu'it y (tonna a titre de professeurdo pttiiosophie,mais encorepar la nmniero dont.if t a(!tninistra,pen-dant les deux premicres anuces. en quatre df rcc~ur. Il s'apptiqnaeneHct a ~t.nut1'crdans ('uHc insLimtion naisN::)!~ctes vices qui ont
trop souvent (!6shunor6les univcrsit.t's.'ttcmunttc~ la discordo qu'on-
gundrait partnih's ututtiattts it'a())'it.()(;('o('por:)!ion, et toduc),co
procède barbare dont its<faisaient un si ft'Ct~tcnt usa~upour turnuncr
leurs qucroUes; )c recteur do !a nouvûttc uni\'cr~it6entreprit do sub.
~tituert'union n la division, au duc) un(rf~t<n~<<t~u«'ur,on un mot,des mœurs dignes et humiuncs u de urut.t!es et sauvages habitudes.
Mais avant d'être appo)~par te choixdo ses co))t~ues aux fonc-lions do recteur, c'est-dire uvant mc<noquo la nouvc!)eUniversité
fut organisée, t''ichte en avait déjà inaugure i'cnscignetnent par les
p!us magnifiques et tes ptus patriotiqncs tenons. C'e~t a cette cpoque
qu'appartiennent tes/J'CMi()'.stW«<t«< <cH)«~f/<' (~),quc t~AXemandNregardent encore, avec raison, comme un dos chefs-
d'œuvre de t'etoquonco germanique~!). tts furent prononces dans
t'hiverde <807 n t808, ators que tes troupes fri)n(;aiscscontinuaient.
d'occuper la capitatc dota Prusse ptusd une fois ta paroto ardente do
t'orateur fut couverte par le bruit des tambours et des trompetk's de
nosrégiments qui passaient dans tes rues voisinesdu pahis de t'Uni-
vcrsite. ~tran~e contraste que celui (le cette musique brutato quicetébrait te triomphe do laforce, et décente nob!eetoquencc qui pro.testait, au nom du droit national, contre tes violences de t'esprit de
conquête! Ou ptutôt, singulier accord que celui de ces deux chosessi disparates, dont t'une fanait si vivement sentir aux Prussiens tcur
abaissement, pendant que t'autro chf.'rchnitu raviver et a exattcr en
eux l'esprit publicnaviveret exalter chcx tes Attemands l'esprit national, tel était en
effette but des discours que prononf.a notre phitosophe. des qu'it put
roprendro la paroto (4). Il fit de sa chaire de Hertinuno tribune du
()) AStttttgard, chcxCotta, en t8)7. Voyez/<c/t~ ~en, p. !H9.(2) ûf~u'esco~e~.t. V! p. 257.
(3) Voyez)'t~otr~e<o <<<a<Mrc~~cmn~dcau d<.r.nct(U<c~c~tc~c,parJutianSchmidt, thr!)ii!0t).Lcipsick,)8XC.
(4) LesD<!cot~\<a la xft/to~a~e~~nt~eso rcUcut, ù ccrhins cg'ar(!s,:mxA~OHSque t-'ichtcavattfaites ù Ucrh", en tbOt, suuscc titre yY<u~
IK'mODL'f:T!C)NDUTHADL'CTEUH.LXX
haut dutaquotte il s'adressait toute t'Atiema~no,qu'it aurait voulu re-h'vor et ~auvt'r. H soufrait ptus (~tepersonne de ta dc~radation do sapatrie, et i) s'aft~i~eait amèrement, do voir s'ecrouh'r avec ta Prussete dernier rempart du tindependam'e germanique; mais, au tieudos'at)andonncr au découragement et au dôsespoir. outunt. d'.mtrcssuc-combaif'nt, il puisait dans son chagrin de nouvelles forces, et so sen-tait anitne d'un courage indotnptabte. Mais quoi remède opposer aun si~r.tnd de'astrf? Les moyens :tu.\quets on avait eu recoursjusque- n'avaient servi qu'itgraver !e maL La fauLo,so!onFichLe,en c)ait aux hommes, a h'ur corruption ou a tcu!' moUcsso. !t fai)aitd'jnc ('.ommcnccrpar tc~nercr te pays tout entier, si !'ot) voutaiUetirer df t'abinin ou il s'était taissë tomber. C~tait ia, dans la pensée du
phi!osopho, le scut moyen dû ~atut qui restât, oncoro u t'AXemagne.Mais comment proparer cotte rénovation absotuo do t'espriL pubiiccotte vio toute nouvcuo qui rendrait a ta nation attomandeson ind6-pendauco et sa dignité? H n'y avni). aussi pour cela qu'un seulmoyen c'était, un systemo comptet d'éducation publique qui rompttentieremen!. avec te pass6 cL communiquât,aux jeunes ~nerationsi'psprit qui avait manque aux anciennes. Cotte idée, que nous avonsdéjà si~natcedans los /<~of/;<~pubtiespar Fichte pondant sonséjoura Kœni~sbcr~, fortne le prindpat thème desRs /)<scoN~ ~o~<t~<(m~ Maihcu''cu-cmcnt le système propose par fichto avait ledéfaut d'etru impraticabte. Ho~ardant ta ~cnerat-ion présente commeabsotutm't't perdue, H voûtait en former uno toute nouvelle, et, poury arriver, il proposait do séparer, suivant ta méthode de t'estatoxzites enfants de tours parents; mais, en admettant même comme juste
cftr~oW~t~s du ~c~s prc'~<<(Œu~'M co~~es, t. VH); mais ilss'en cca:-tcnt!)nssid'une f<x;ontrès rcm:tr<tunh!oet montrent une foisdoptns co)))bic)ttesKh''e:)<)enotrephitosophfse <nodinatcntsous rinnucttco<)c<!cvcno~ctttscontemporains.f)nnstes /.<'p~y)sd(!t807 commedanscc!iesd<'t80t, i'ichtcae)) vueic <iCv~u))j)RntRtitde t'espace humainepar la plusgrande cutturc pu~ibtc de nosfncutt~'s.Mais, dans les ~-f«~ Mrac~'tS-<~MM(ht~;M ~r~«<, t'F:t:)tp;n-f;utqu'Udonnaitpour modètoa l'hutna-oitM,et '[)tilui j);n-:u~sait(icvoir~U'cte cuuroonctncntdu christinnismesurla terre, cxctuait t'id)'!cct t'innour de ta patrie :que!tc place pouvah-itrester, en eUft, a cette ctroito idcc et à cet amourjaloux au seind'unecommunionpom.xntcet sccifdccotnmo ccuc qu'it rêvait aiors? Dans les~<M«~('t~~<{<to~(~~Mndc, au contraire, il p)'6scntct'id6cmRmedela patrie commeun des ~emc~tsessentictset un des moyensles pluspuis-sants <tuduvctoppctneutde t'espace humnnc, et te patriotisme le plusardeutcst lescumneutqu'il voudrait,à cette heure, exciter dans ieaâmescomtnûc'catcchti qui iuspircses discours. Lcs/.c~mde 1804 étaient'commeoudirait aujourd'hui,d'un /t)4~nua<o; sesf~coMr! de 1~07 sontd'un pa(r<o<e.
I-'ICHTE ET LA RKVOt.tJTtON FRANÇAISE. LXX!
et comme possible ce procédé par trop Spartiate, où pouvait-on
prendre tes maitrescttar~cs do furmer la jeunesse, sinonprécisémentdans cette génération qu'it accusait. d'être irrémédiabtcmeut cor-
rompue? Cette objoctio't rtait sans répiiquo tt serait sans doute ab-
surde du nior t'immense intbienco de i éducationsur la jeunesse, et
par suite sur t'avenir d'un peuple mais au moins faut-it que la so-
ciété existante se fasse ette-mému iinstrumcttt de cette éducation
autrement cette'ci est impossd)tc ou doneure stéritc. C'est unom'rour
conununea beaucoup do t'eform:'teurs (Htodc croire la toute-puis-sance dos combinaisons :u'ttticicH~s.Fichtc est ptns (!'unc fois tombo
duns cette erreur, et nous en avons ici un nouvel oxcn)p!e. H faut
avouer que to sens du concret, ou. en d'autres termes, te sens
pratique lui manquait. Mais, si te système d'éducation nationatoqu'ii
proposait comme t'unique moyen do t'é~nerorctdo sauver la nation
attemande 6tait tout à fait.chimérique, t'etcvation de ses id(''es, t'ardeur
de son patriotisme, te sentiment de la servitude qui pesait, sur son
pays, lahaine de ta force brutato qui s'ébattait autour de !ui. toutceta
communiquait Hses discours une vie et une grandeur qui tes ont ren-
dus immortels. Je voudrais au moins en donner uno idée par quel-
ques extraits.
Le huitièmediscours est undos ptus remarquables. Fichte s'y pro-
pose de montrer co que c'est qu'un peupto, dans !o ~;randsons de co
mot, etcoquoc'estquci'amourdeta patrie. Hetevet'idce exprimée parce mot de peuple bien au-dessus de cotte de t'~tat, tôtqu'on t'entend
ordinairement. Tandis quo t't~tat.ne vise qu'a un certain droit et n'a
d'autre finque la paix intérieure et te hien-ctro do chacun, un peuple
représente Internet et le Divin sur la terre c'est a ce foyer sacré
que s'attumo t'amour do ta patrie. Notre philosophe invoque ici los
plus ~étalants exemptes après avoir rappotu t'hcroïsme do ces pro-testants qui verseront k'ur sang pour une cause dont ils ne devaient
par voireux-mcmos te triomphe, il remet sous les youx do la nation
atiemande celui de ses ancêtres, tes anciens Germains. Ce pas-
sage mérite d'être tittératement traduit.
« C'est dans cette foique nos ancêtres communs los ptus anciens,
ces Attomands que les Homains désignaient sous te nom do Ger-
mains, otqni ont servi do souche a ta civilisation moderne, ont cou-
rageusement résisté aux conquérants du monde. N'avaient-itsdonc
pas devant les youxte degré supérieur do prospérité ou étaient arri-
vées, à coté d'eux, les provinces romaines, les plaisirs ptus délicats
donton y jouissait, et, par-dessus te marché, des lois,dos tribunaux,
dos faisceaux et dos haches en abondance ? Les Homainsn'étaicnt-its
~TRODUCT!OK DU TRAHL'CTEUn.LXXH
pas as~'z disposesa los admettre nu partage do toutes ces faveurs ?
La plupart do tours propres princes, pour pou (pt'its su laissassent
persuader quo ta guerre cuntrnde tels bienfaiteurs dot humanitéétait
une réb~ttif'n, no leur om'.ucnt-i's pas des preuves vivantes do cette
<'tcmcnceromaine (p)'on teur vantait si fort? Ceuxqui se montraient
favorables aux cooqm'Tantsct) rccovaiMnt(tes titres de roi, des com-
mandcmeuts danseurs armées. des bandeaux sucres; ut, s'ils venaient
a être chasses de cbcx eux, ils trouvaient un rofugo ot dos moyensd'oxistcnccdanstuscotonios roniaincs. CesvieuxGern.ains ctaient-its
dune absotut~ent ntscnsibtesiinx avantages do taciviHsationromaine,
parcxott)p!e a la supériorité des armées romaioos, ou un At'minius
rnûme no dédaignait pas d apprendre iomcut'r des armes. Gardons-
nous do leur imputer aucune ignorance ou aucune negugencc do co
genre. Leurs descendants, (tes quits ont pu faire sans dommage
pour tcur tiberte, se sont appropria !acivilisation romam~, dans la
mesure où eue était compatibte avec tours quatites propres. Pour-
quoi doncont-Hs soutenu, durant. {)!u:-ieursgénérations, une guorre
sangtat~e qui se renouvehit toujours avec leurs forces? Un écrivain
romajn met ces purok's dans la bouche do tours chefs « Quo vous)~resto-t-i!, sinon de ~urder votre tiberté ou de mourir avant d'otro
') esdaves (t)? La tiborte pom'eux consistait à rosier Attomands,a continuerde regicr leurs adirés pareux-m6mes, avec uncenMre
indépendance et suivant )eur propre esprit, a poursuivre leur pro.
grès dans la civilisation conformément n cet esprit, et à trans-
mettre tcur indepcodunce a tour postérité. L'esctavuge gisait a tours
yeux dans toutes ces faveurs que tes Romains leur apportaient, et
qui auraient fait d'eux autre chose quo des Allemands, des domi-
Homains.Ils supposaient apurement que chacun préférerait la mort
acettedegradation. Hanesoot pn:!tousmorts, otits n'ont pas connu
t'esctavage, et ils ont tcgue tu liberté à fours enfants. C'est à leurrésistance perseveranto qjio to monde moderne doit d'être ce qu'itest. Si los Romains étaient venus à bout de tes subjuguer aussi, et,suivant leur pratique ordinaire, do losdétruire comme nation, tout le
développement ut~rieur do l'humanité aurait suivi une direction
diueronto et qui certainement n'eut pas été moitteurc. Nous leur
devons, nous, les derniers héritiers de leur sol, de !our tangue et de
tours sentiments, nous leur devons d'être encore des ADemanda',
toujours portés par te courant d'une vie originale et indépendante;nous leur devons tout ce que nous avonsété depuis comme nation
()) /~<t<J~t rc~;(MM~~«aw~e <<<«~M, aul~or<<t~c!er~<M'n
(Tacite,~nno~, tiu. tf, chap.xv.)
F!(:HTE ET LA m~'CH.UTtON FKAKC.USR. LXXIH
et, si ce n'est pas fait de mus, si ht dernière goutte du ::an~ qu'ilsttous ont transmis n'est point encore turie, nous teur devrons tout
cequo nous serons plus tard.*n
Lo trei/.iemo discours se perdit, on no sait comment, entre les
mains do tu censure ()).Fichte, qui n'en avait point conserve les
notes, dut, pour rcmpiir ta tacune, en faire un resmuc d'après ses
souvenirs. Quedevait donc être te discours prononce,quand te.r)'sum6
est déjà si cloquent?;? Notre philosophe attaque avec une grandevivacité co revo d'une monarcttio universettc qui, dans la politiquealors triomphanto, tendait h se substitue:' au principe de t'equitibroet se jouait durespect des nationalités. H proteste contre ce rêve au
nom de l'ordre divin qui a établi une extrême diversité entre tes
peuples comme entre les individus, et qui veut que chacun puisse
se cléveluppors'.nvantson propre caractère; au nom de i etut présentdo la civitis~tion européenne, qui repousse la batharie et lit violence;au nom enfin de tous !os sentiments d'humanité que !anature a gra-ves dans notre cfrur. et qu'il faudrait commencer par y etouner.
montre ce que devraient être des hommes capables doservir d'instru-
ments a un nouveauconquérant du monde, et comment les moyensiraient ici contre !o but « Avec de pareits hommes, s'écrie-t-il, on
pourrait bien piller et. dévaster la terre et la transformer en unanreux chaos, mais on n'en saurait faire une monarchie universelle. J)
J'aurais désire pouvoir mettre tout ce passade sous tes yeux du !ec-
tcur, mais il est trop ton~ et t'espace mo manque. Je veux au moins
reproduire inte~ratemcnt cctui ou Fichtc n~trit !osécrivains a)!e-
mands qui no rou~isi'aiontpas de cctcbrcr te génie du conquérantfrançais (2)
Cequi nousrabaisse surtout aux yeux do t étranger,c'est de des-cendre à !e flatter. Certains d'entre nous s'étaient déjà rendusmcpri-?ab!es et ridicutcs. en ~'avitiss~ntjusqu'H offriren toute occasion un
grossier encens aux princes qui gouvernent le pays, et jusqu'à neconnattre plus ni raison, ni bienséance, ni décence, ni goût, quandils croyaient pouvoirapporter à tours pieds un discours natteur. Cette
coutume a disparu depuisquelque tems, ut ces grands eto~es se sont,
pour la plupart, changes en invectives. Cependant, pour ne pasen perdre en quelque sorte l'habitude, nous avons donné a notreencens une autre direction nous t'avons envoyé du côte ou soufflemaintenant la puissance. Le premier défaut était déjà de nature
n amigcr tout Allemand sérieux, mais la chose restait entre nous.
(1) Voyez!arote .Jeh)p. t80. (~) !'agc ~8.
INTRODUCTIONDU THADIJCTKL'ILLXXtV
Voulons-nous maintenant propre t'~trangora témoin do cotte busse
manie qui nous pousse i) Hatter, en tn~mo temps que do notre
extrême inhabitctHen ce ~enrc, et ajouter ainsi nu spectacle d'un
avilissemont méprisabte ce)ui d'une ridicuto gaucherie? !) nous
manque en enet dans cet ('mp)oi la tinesse que possède t'ctrnnger,
et, pour parvenir a nous faire ~'ou!cr, nous nous rendons tourds et.
emphatiques nous débutons on d~inunt notroh6ros ou en to ptaçunt.au ran~ des astres. Ajoutuz à cela que nos uattencs ont l'air de nous
ôtro arrachées par la frayeur. Or il n'y a rton de plus ridicule qu'un
peureux qui vante la gr~co et li beauté do cctui qu'it tient en réalité
pour un monstre, et qui, on !oftattant, n'a d'autre but que do se s'au-
vor de ses griues. o
Il faut citer encore, cle ce discours, la péroraison qu'un récent
historien de la tittcmturo a)hnn:)nde()) conseille a ses compatriotesd'inscrire sur des tabtes d'airain, et que nous ferions bien ausside méditer. <tNon, s'ccrio Fichte on finissant, non, AHemands,hommes honnêtes, sérieux, sensés, ne souffrez pas qu'une telle
déraison s'empare do votre esprit ni qu'une telle sottiHure uetrisso
votre langue, si bien faite pour l'expression de la vérité. Laissons à
!'ctranger cette coutume de pousser des cris do joie a chaque nouvel
événement, do se créer tous les dix ans une nouvct'e mesure do
la grandeur et do nouveaux dieux, et do décerner il des hommes
destouan~es qui sont autant de blasphèmes. Gardons notre vieillo
mesure do la grandeur qu'it n'y ait de grand pour nous que ce qui
porte en soi les idées capables do faire !o salut des peuples, ou queles actes qu'elles inspirent et quant aux hommes vivants, laissons
a !a postérité !e soindo tesju~or. e
I<oquatorzième discours sort do conclusion a tous les autres. J'on
extrais un passager) où Fichte uétrit, éloquemment cette doctrine
fataliste que tant. do ~cns invoquent pour excuser teur inertie ou
teurtachoté, et oui! s'applique à réveiitor dans tes urnes le sentiment
do la puissance humaine. Cesont encore ta des parolos dont, à notre
tour, nous pourrions bien faire notre profit< 0 je vous en conjure, no vous laissez pas aller a la négligence,
en abandonnant le soin do votre salut a d'autres personnes, ou à
quelque chose qui no réside pas en vous-mêmes, ou en vous en re-
mettant a la sa~e~seaveugle du temps, comme si les générations se
faisaient d'ettcs-memos, sans aucune participation dos hommes, au
moyen de je ne sais quelle forceinconnue. Je ne me suis pas lassé,
(1) M. Schmidt, dansl'ouvragecité plushaut.
(2) Page4 87.
FICHTE ET LA nÉVOLU'HON FHANÇAISE. LXXV
dans ces discours, (le vous inculquer cette idée, querien no peut.vous
aider que vous-mêmes, et jo crois nécessaire do vous le répéter jus-
qu'au dernier moment. La ptuin et ta rosée, la s~éritite et t'abon-
dancedos années peuvent,bien eh'c produites par une forcequi nous
est incot.nuo et qui n'est pas on notre pouvoir mais !a vie qui ap-
partient en propre aux hommes, mai~ teï. rapports doshommes entre
eux, co sont les hommes qui se tes font a eux-momes, et non pas une
puissance ptacée on dehors d'eux. S'its tombent sous lejoug de cette
puissance mystérieuse, c'est que tous ensemble ils sont avcugtcs et
ancrants; mais il dépend d'eux do n'etn) pas ignomnts et aveugles.Le degré plus ou moins bas ou nou~ tomberons peut sans doute dé-
pendre on partie de cotte puissance inconnue, et on partie surtout de
t'intctjigenco et do la bonne votonto de ceux auxquets noussommes
soumis; mais de nous retevcr, cetu dépend do nous scu!s; et certai-
nement, il no nous arrivera plus rien de bon que si nous nous le
procurons a nous-mcmes, et surtout si chacun parmi nousagit-poursa part comme s'il était seul, et comme si le salut des races futures
reposait uniquement sur lui. Voilà ce que vous avez à faire.; voilà
coque cesdiscours vousconjurent de faire sans retard. Ils vous adju-rent, vous; jeunes gens, etc.
Et reproduisant toujours la !ncme (onnutû Ces discours vous
adjurent (~<Me7fodea~'sc/t~dren f«c/t), Fichto s'adresse ainsi suc-cossivomentaux jeunes gens. aux vieillards, aux hommesd'anaires,aux savants et aux écrivains, encore dignes do ce nom, aux princesderAttomagneotat'A)!emagnecnticrc,enfm,ata postéritéeUe-memoet aux étrangers et dans chacun de ces groupesd'hommes il chercheà faire vibrer los plus hautes cordes do t'amo ot du cccur.
Tels sont ces discours, que l'on pourrait appoler tesphitippiquesdo!'At!otn.'gno.On s'étonne que Fichte ait pu les prononcer dans unevillt)occupée par les soldats de Napoléon. Hst-ce que tes espionsfrançais qui assistaiont à ces leçons n'entendaient pas t'attomand?ou bien la police impériato jugea-t-eHo plus politique do faire ta~sourde oreille? Fichte d'ailleurs était prêt à tout il n'était pashomme reculer devant i idéed undanger porsonnel, quand it s'a-
gissait do faire le bien. It écrivait, à cette occasion, cesbelles paroles,qu'il s'adressait à iui-mémo (<) f Voiciquoi doit étro ton uniqueprincipe dodétermination Peux-tu espérer produire parta conduiteun bien plus grand que to péril auquel tu t'exposes. Le bien est
enthousiasme, exaltation mon danger personnel ne doit pas ~re
(1) FtC/Ke't~an, p. ?28.
!~Tnr)!)U(:T!ON !)U THAD!.T.TKUfLLXXVt
mis on ti~no décompte; il pourrait avoir au contrairodos cn'ets fort
avantageux. (Juant a ma fummoet a mon fits, t'ussistancodo ta nationno tour manquerait ct'rtuincment p:)s, et h) (fumier aurait i'avunta~od'avoir pour pure un martyr. Ce i.erait ta te moitk'ur sort. Je nesaurais mieux employer ma vie. < Mais il ne fut pas mémo inquiet~.Ct<oseptus curieuse encore, tordue t)avoust mondacnscmbte tusécri-vains les plus considérables de Uurtin, Schmutx, itaost~in, WotfSchtuicrmactx'r, afin du t(~ efTravcrpar s~s menaces, il no fut pasappc)cavt)c tesauti'es a comparaiu'o devant to sabro du vainqueur;et cependant il utait !o scut qni eut parh; pubtiquenicnt contro ladomination ctran~O-o, ut ses discours, imprimés aussitôt apr~s nvoirété prononce?, avaient en Aitcmagne un immottserotentissemont.
Co retentissement no fut pas perdu. Les /)~cot<r&ci /« ft«<)<~M~'MtM/tducontribuèrent certamoment à entretenir dims los amusle feu sacr6 qui devait bientôt ra!)umer t'incendie. Bien que Ficbte,ne comptant plus alors sur te succès des armes, con::ei)tataux At!o-mands de renoncer a un moyen qui les avait si ma! servis et dotravaitterav.tnt tout. a se rp~onérer eux-mêmes, il était trop évi-dent que, si quetque occasion favornbto se présentait, il serait h)premier à pncoumgcr un r.ouveau soulèvement. En attendant, sesdiscours, iusctrdus par toute t'AHomagno,mais surtout en Prusse,continuaient d échauffer dans )cs cœurs to sentiment do t'indepon-danco nauonato et la haine de ta domination étrangère. Fichto nocessa d'aitteurs de poursuivre par tous tes moyens en ?on pouvoirte but qu'its'ct.)it propo-c; il fut un des principaux instigateurs docette opposition permanente dont la Prusse et sa capitale no tar-dèrent pas a devenir te contre, au miticu do t'Attomagneabaissée ou
conquise. Aussi finit-it par exciter tes ombrages (tu gouvernementfrançais, qui n<)~u<'r~avait fuit mine de no pas prendre garde a lui:son nom fut prononce devant Napoléon commecetui d'un dos plusredoutables adversaires de t'Hmpirc. Un ami, M. do Vi!)crs(<), l'en
informa, et lui donna to conseil do ne pas attendre t'approche des
Français, mais de s'enfuir en Hussio; il lui représentait qu'avec)a violence qui marquait tes pas de Napotéott, un simplo soupçon,surtout clans les circonstances présentes, pouvait sufnro pour te
perdre (2). Fichto répondit a M. do Vittcrs qu'it lui était très
(t) M. de ViUcrs,e)ni{{rt!français,réfugiéen .Utcmagneet devenu pro.feaacurà (.œtti~uc, est le prctoicrqui ait entreprisde faireconnaîtrea laFrance la philosophiede Kant. Son trav:ut, pub!i6a Meti!,remonte ùt'annt'c t80!.
(2) On sait, en ctïet, quêtaétaient tes proeettcsdo Napotuon(voir enparticulier la Correspondancedu roiJoseph~.Knvoici un exempteentre
FtCHTR ET UKVOI.L-TiCN FnANC.USK. LXXVII
reconnaissant do Favis, mais qu'il était fermement rc'sotu a no pasfuir: su vie, disait-it, appartenait, il ht science et. a sa patrie, et !e
moyen do teur être utitc n'était pas do prendre )a fuite, mais dorester à son poste et do poursuivre son enseignement, quoi qui! <'n
put adve:)it'. Le dangor, d'aiXeurs, fut bientôt ecartu par tes nou-veaux rapports qui s'etai'hrent. entre ht Prusse et la Franco, et
quand h's troupes françaises tritv(-rscrent Hor!in pourl' so dirigervers )a Russie, l''ichten'cn avait ptus rien a craindre.
Mais!anouvc!tecamp~gtteou s'engageait Napoteonétait (te nature
a susciter bien des relions dans i esprit de notre philosophe et a
réveiner ses espérances. H sentait, que (ptctque chosedo décisif so
préparait pour t'Huropo. Si, disuit-iia ses amis, ht Hussicsuccombe,hnsatiahto ambition du vainqueur nu connattru ptus de bornes, et. )e
poussera certainement a sa perte. Une monarchie universcno n'es~
ptuspossibtc: comment un seul peuple pretcndrait-H gouverner
t'Europe dttnsun temps ou chaquo ~tat a ta conscicncc(!esa force et.
sent tout lu prix do t'independanco. C'est, il des idées ptusetevô~s
qu'appartient aujourd'hui t'empire du monde. Que si Napoteon est
vaincu, sa défaitesera )osigna! du sa chute. Cottedcfaite,d'aiheurs, lui
paraissait infuinibie, si seutcment taHussio pavait être persévérante,si elle ne se htissatt.point décourager par quotques échecs inevitab!cs
au début, si e)!ono se hâtait pa:; do concturo !a paix. Happuyait son
opinion sur coqu'it était, impossibtede conquérir cetitnmensepays ou
dete conserver longtemps;et il ajoutaitque i'impatiencede Nupotcon
après ses premieresvictoirosh:i ferait, aisementoubtier)es pr~citutionsnécessaires. La guerre d'Espagne, ajoutait-i), a déjà fait tomborune
partie déco prestige auquel est attacha le bonheurde Napoteon eno
a montre qui) n'était, pas aussi incapab!c do faute qu'on se fêtait.
figure. Qu'a la faute poiitique qu'it a commise en ï'~pagnc vienne se
joindre quelque faute mititairc un peu cchttantc, on cessera aussi dele croire invincible, et il sera perdu. Or c'est, ce que peut. faire jus-tement,espérer te nouveauchamp de bataitte qu'i! s'est choisi. TeHcs
étaient !es pensées que t''ichto exprimait en toute occasion, et quel'avenir devait bientôt confirmor. Aussi suivit-il avec te plus vif in-
térêt tes événements du la guerre. Lorsqu'un des premiers de Berlin,
nuHo,qui n'est pent-ctrc pas t)6s connu, ma)!!que Fichtene (tevait pasignorer. Hn1806, le tibraircP:um, de Kurcmher~,pubtia une brochurecontre la dominationfrançaise.Somme(t'en dénoncerfauteur, it refusadeparler; Napok';on)c ut alors fusincr sans jugement, (~ctacte inquatiftabtcest consiste, sur la f.t<;n<)ed'une maison voisiocdo S:uut-Seb:'td,part'ittscriptiottsuivante <est (tanscette maisontux:demeurait./c«4/'a~hbrairc,qui périt, en )80'?,vi':timcde la tyranmede Kaj'otcon.u
INTRODUCTIONDU TRADUCTEUR.Lxxvm
il apprit par un courrier français qui traversait la ville en toute hâte,la prise de Moscou la seule inquiétude qu'it manifestât fut qu'aprèsla chute do leur capitale, les Kusses ne songeassent à faire la paix.
Ce quit avait prévu ne tarda pas à se réaliser tu campagne deRussie frappa d'un coup mortel ta puiss.mco de Napoléon, et ou-vrit une cro nouvelle à la Prusseet à t'Attomagne. Lo 2Sj:)nvip[- 3,te roi do Prusse transporta tout a coup sa résidence à Urcstuu, d'oùsembla bientôt partir un appet a ta jeunesse pour ta détenu de lapatrie.. On ne pouvaitguère douter, dit Fichto te fils, du vrai sensdo cette parole, de ce sens désire de tous, et jamais peut-dre tamémo pensée, la môme ré~otutionne s'empara aussi subitement dotoutes tes âmes, uniesd'un muetaccord, que dans ces jours mémora-bles, a Cependant Fichto envoya un do ses étéves à Urostaupourcon-na!tre d'une manière plus précise tes desseins du gouvernement, ttapprit que la guerre contre la France était décidée, et qu'une dernièreiuttosc préparait. !t forma alors la résolution d'y prendre partsetonses moyens. 11interrompit donc les tecons qu'it faisait ilcette époquesur la ~oc~-t'ncJe .soc~c~,et dans le discours où il fit ses adieux
itsesé!eves(~févriert8t3), il leur exposa tesmotifsquitogui.daiejtt et les principesqui, dans les circonstances présentes, devaientdiriger tous los amis deta civilisation( ), En mémo temps ilconsignaitdans te journal de sa vie la délibération intérieure ù taquf~tc il s'é.tait livré avant de prendre une résolution aussi importante. En lisantces pagesdo son journal reproduites par son fils, on est frappé de tasévérité scrupuleuse avec taque!!o il s examinait tui-méme, sondaitla pureté de ses motifs, et, en véritable kantien, cherchait à dégageron lui les proscriptions cludevoir do toute inclination personnelle. Lodessein auquot il s'arrêta rappelait celui qu'it avait déjà fortné quet-quos années auparavant il voûtait agir par la parole sur les défen-seurs de sa patrie, et pour cela se faire admettre dans les rangs det'armée en qualité d'aumônier (2). Mais la proposition qu'it fit à ce
(i) Ceuxqui savent l'allemandpeuventm-cce discoursà la )!udu qua-trième volumedes~nurcx co~p~c~e Fichte,pnt')iec.pm'sonttts. Cdui.cien a cité au!.3tttuctqucap:)S3:)gesdans la biographiede son père (p. 553).Je n'y retrouve pointtes parotcat'apportccspar M. Uarchoude t'cnhocn,dans son/o<t'e de la p/«~op/)<o««ewo~~o(t. t, p. 3<j(,) (.Lecuurs seradoncsuspendujusqu'à ht lin do la campagne nous le reprendru~ dansnotre patrie devenuelibre ounousseronsmortspour reconquôrir sa li-bertc. C'était bien ta sansdoutete sentimentqui animait i-'ichte~maiscesparoles tncmcset la scènequi suit semblentune inventionde l'historien.
(2) Nousavons peine, uous autresFrançais, à nous expliquerune pa-rcittc résolutionchezun philosophetel que Fichtc. Maisen Attetnagno,ledivorcede la théologieet de la philosophie,mêmede luphitoaoptuela plus
FICHTR ET LÀ REVOLUTIONFRANÇAISE. LXXIX
sujet fut rujetée, ?oitque la chose en etto-mcmofut jugée impossible,soit que lesconditions qu'it y mettait tu rendissent impraticable.
Si t''ichtodut renoncer au projet que sonpatriotisme lui avait sug-
géré,'it eut, a cette époque même, te honheur do rendre u son paysun important service. Dansios derniers jours do février, tacapttatodf:la Prusse était encore occupée par une fuibto garnison française,
qui, matgré quetques préparutit's fie départ, no semblait, pas devoirla quitter do sitôt. Cependant on savaitquo les Russes approchaient,et quelques Cosaques, poussant ieuru chevaux jusque dans ta ville,s enbrcuientd'y semer )o désordre et do soulever ies citoyens. Déjàl'on cherchait a désarmer les soldats isolés, a jeter les caissonsdans
la Spree, il enctouer les canons. L'ctrervesccnce croissait de j~ur on
jour il ne lui manquait plusqu'un plan commun et un signal. Dansces circonstances, titi homme audacieux et un certain nombre do
jeunes gens, entra!nés il sa suite par tour ardeur patriotique, for-mèrent to projet de massacrer la nuit la garnison française et d'in-cendier ses magasins ils espéraient que le peuptc, excite par cet
exempte, se lèverait en masse, et que tegouvernement tui-mcme setrouverait ainsi forcé du sortir de ta réserve qu'il avait cru devoir
garder )usquR-t~ Toutes les dispositions étaient prises, et t'en n'at-tendait plusque la nuit fixéopour l'exécution de ce projet, lorsqu'undes jeunes conjurés, un étcvo de t''ichto, ne pouvant supporter do
sang-froid la pensée d'un paroi! guet-a-pons, résolut do consulterson maitre sur la légitimité de cet acte. Ce jeune hommeétait d'ait-leurs ptoin de bravoure, comme il to prouva bientôt do la façon tu
plus éctutante dans la campagne où il servit en qualité de volontaire;ce n'était donc pas la crainte du danger, mais sa conscience qui letroublait, tt att~ trouver Fichto, et, âpres Savoir interrogé on ter-mes généraux sur ce que la moratité et la religion permettaientcontre l'ennemi, il finit par lui rcvéter tout le complot. Fichte,
ranonncHcctla ptus tmrdic, n'est jamais aussiubsutu'ju'cnFrance eUcspeuventfi)n'ofort mauvaismcn~c, tn:us cttcsn'cncontimtOttp:~momsdcvivreensemble.f)':)ineurs, Ht'6po.;ucdtjt)tit~'n~iUt'i, la phitosuphifdcFichte,cotrantdnnitune troisi~neet demicrcpcriuUt:,avaitpris uxc(m'ec-tion rctigienscet my~i'tuc. C'estta pct'ioucqui s'ouvre pnr les /.e{'(~&A<trla vie~co~enret~e,pt'onottcccsu t:e)'nnen t8nu. Voycxla traductionqu'ena donnéeM.HouiHiccunt8t5,ct) y joign.ott,uutrc son/iM~<-p~o~, une/n~'o~:«o~do M.Fichtele ms.–Dans son/t<ru;)(M, M.itoutHicrr.tp-pelleunf<ntquicaractérisebienla guerre onI-'ichtc~m'aitvouhtrempHrtesfonctionsd'numunior c'est que les sotdutsde la tandwchrde !8t.t por-taient sur leur shakoune croixet le noutde uicu, et qu'Usavaientdansleur gitjcrocurtmattuutcompos6n tcut'usttgcen tbrtncdc catuchismc, ettoutrenHitide tbrmutcsrelieuses et bibii'['tes.
INTRODUCTIONDU TRADUCTEUn.LXXX
enrayé, représenta au jeune ttommotout ce que ce projet avuitd'odieux et d'insensé, et il courut aussitôt chez te chef de la poticoprussienne, pour l'informer (ie ce qui se préparait et l'inviter à enempêcher l'exécution. !) fut décide qu'un étoignerait tout dourc.ment, en les charmant do quelque mission, le chef du complot nttes principaux conjura; dont tu courte et tes forces pourraient êtreutilisés dans une meitteurc occasion. Ainsi i-'ichtu sauva sa patried'un crime, et., on peut le dire aussi, d un grand matt~ur, carsaosdoute lu cttatunent no se serait pas fait attendre te corps du vico-roi d'Italie était encore a cette époque sur !cs bords do t Oder, et iln'eut pas manque de se jotor sur Uertin pour en tirer uno échéantevengeance.
t''orcé do renoncer :t la mission patriotique qu'H avait espéré pou-voir remplir dans) armée, r'ichte se retourna du cut6 de t'ensci-gnement. et, des l'été do la mé:no année, il remonta duas sa chairoon présence d'un auditoire encore nombreux. Le sujet de ses nou-vcno leçons était te/<«~ur< (~ <'<'<«<;<~<<~«« r~he (~ t'u~o~~ ).On peut dire que, depuis ses Co~Mt'n~'o~ st~- ~t /NNof) ~'«n-{-awjusquaux tenons dont nous partons, la philosophie du droit et
detapohtiquoaététobjetdes méditations de toute sa vie; il en fai-sait comme le corollairo de la Dc<<c ~c science, et il aimait à yrevenir, soit pour préciser ses théories ou en tirer de nouvc!!esapp!i-cations, soit pour les approprier aux circonstances présentes. On avu, dans le cours do cette étude, combien d'écrits ou de leçons serapportenta ce but. En t3t~, pendant le scmea~'ede Pâques, itavaitencore consacré ses leçons au droit nature!, et la théoriequ'it avaitalors exposée (2) était comme une nouvelle rédaction des A~n<'n<sdu droit n«<«~, pubtiés en <79G. Kn revenant encore une fois, e)i~8~3, sur le même sujet, il trouvait là une occasion toute naturefio
d'exposer ses vues sur les événements qui agitaient alors ie monde,et d'entretenir dans !a jeunesse les sentiments qu'appelait t'heuro
présente. Les leçonsqu'it fit cetto~poquc sur t /J<'cd'«ne ~T<~t~rrc méritent de ngurer à coté des D~coM~ o Haf<o)ta~(f-tn~c (3). CUes renferment un remarquable portrait de Napoléon,qu'il m'est interdit de reproduire ici.
.·C'est ainsi que Fichte nourrissait dans ies ~me3ce saint enthou-
(!) Œx).')-~ comp~c.~t. !V,p. 3H7.(2; /)as .S~t f/cr /{cc/t~~c/)rc,f~'M-'r~ccwp/~t, t. X.(3) Ces truts /.c~n.!ont ~c traduites en françaispart.
Lortct, en t8~t(3) CesIruis l.cyonsorVb:é tradui!C8c-rifrançaispar M.Lorlct, en 1831(Lyon, Loun Habcuf).
FtCHTK ET !.A HÉVOU'TK)~ !nANC.SK. LXX~t1
siasmoque réclame la patrie à t'heuru des crises suprêmes. L'exai-
tution était d'aitteurs générate peuple et bourgeoisie, étudiants et
maîtres, tous brûlaient d'un mémo feu. !)') pacifiquus savants, do
braves pères de famille so montraient prêts h exposer leur vie sur
!ochamp do bataitto. Lesprofesseurs de t Université, voulant qu'au.cune considération porsonnettc no put comprimer leur dévouement
a la chose publique, formerpnt une attianco par laquelle ils s'enga-
geaient solennellement a pourvoir aux besoins des veuves et dos
enfants de ceux d'cntro eux qui périraient dans )a lutte. On aime
a retrouver au bas de cet acte mcmorabte les noms tes plus ittustres
dans les annales de!a science et do t'enscigncmcnt Fichto, Savigny,
Neandor, Schteiermachcr, etc. Je ne sache pas d'exempte plus proprea donner une idoo des sentiments qui animaient alors i~psprits.
Les revers mêmes qui survinrent et !u trevo qui !ossuivit ne refroi-
diront pas l'ardeurdc Fichto. Toute son inquiétude était que le gou-vernement prussien, décourage, no songeât a faire la paix. !t n'était
besoin, répétait, il, que décourage et de persévérance n'ayant plusl'habitude dela guerre, il fallait commencer par apprendre a vaincre,
ot ce qu'une première campagne n avait pu faire, une seconde l'ac-
complirait. a Du courage donc, et point do paix, telle était sa de-
vise. tt comprenait quo l'houre do t'affranchissement était arrivée, et
que si on la laissait échapper, elle ne reviendrai) plus, Au~si vit.it
avec joie la reprise des hostilités. Pour lui, son plan était de ne pas
quitter Bortin, tant quecette capitale serait exposée aux attaques de
l'onnemi, et, après avoir éloigné sa femme, de partager le sort de la
milicebourgeoise qui devait assister les troupes do ligne dans la dé-
fense de la ville. Le danger qui parut quelquo temps imminent fut
écarté par les victoires do G rosxbeeren et de !)ennc\vitz; mais la
guerre, on s'éloignant de Berlin, y laissa un autre néau, un mal
contagieux, dont Fichte devait être ta victime.
A la suite des sanglantes batailles qui avaient eu tiou dans les
environs et des fatigues de cette rude campagne, les hôpitaux mili-
taires de la ville s'étaient remplis de blessés et do malades; le ty-
phus sévissait dans les rangs do t'armée. Bientôt les secours orga-
nisés ne suffirent plus, et les magistrats durent faire appoi à la bonne
volonté des habitants. La femme do Fichto fut une des premièresà s'offrir pour soigner les malades et dans cette fonction, qui sem-
blait d'abord au-dessus do ses forces, etto montra un dévouement et
une charité admirables. Après cinq mois entiers passés ainsi dans les
hôpitaux, olle se sentit etto-méme atteinte du mal qu'etto avait si
longtemps bravé pour soulager les autres. Etto s'en rotcva, mais0 C>
LXXXH tNTRODUCTtONDU TRADUCTEUR.
pour voir son mari succomber à la maladie qu'il avait à son tour con-tracte auprès d'elle.
Au commencement du semestre d'hiver, Fichte avait repris encoreune fois ses leçons a l'Université, et jamais son esprit ne s'étaitmontré plus dispos et plus net. It mc<iitaitpour sa doctrine une der-nière forme, qui devait lui donner lu ctarté suprême, une totto clarté,disait-il, qu'un enfant morne ta pourrait comprendre. Aussi for-mait-il le projet de se retirer t'été suivant dans co charmant paysqu'on appelle la Suisse saxonne, pour y travailler tout a son aise etdans le cahne le plus profond il t ouvrage qui devait couronner sacarrière d'écrivain. Ce fut an milieu do ces travaux et de ces pro-jets que la mort te vint frappt'r. Lu maladie do sa femme lui avaitcausé tes plus vives inquiétudes mais te jour même ou ullo courutle plus grand danger, toujours esclave de son devoir et toujoursmattro de tui-meme, il avait eu ta force de s'urrachcr du chevetdo lamalade pour aller faire sa icçon à t'Univorsité, et cependant il avait
sujet de craindre de la trouver morte a son retour. Quand il lu v)t
sauvée, il nu stutpas résister a sa joie comme il avait su résister a son
chagrin, et, dans l'ivressse de son bonheur, il se pencha vers olle
pour la bénir comme un don que Dieu lui rendait. Peut-être, ajouteson fils, après avoir raconté cette scènedont il fut le témoinattendri,peut-être fut-ce dans ce moment qu'il s'inocuta le germe do lamaladie. D'une constitution robuste, Fichto n'avait été gravementmalade qu'une seule fois dans sa vie, au printemps de 808, a lasuite des épreuves et des fatigues quo tes événements do cotte époquelui avaient fait subir mais sa forte nature avait fini par triompher.Cette fois, la maladie fut plus forte que sa nature elle l'abattit il untel point qu'etio no lui laissa plus que de rares moments lucides.Son fils profita d'un do ces moments pour lui nnnoncor que Btuchcrvenait du passer Io Rhin et que tes alliés étaient entrés en France.o Cofut, dit-il, sa durnifre joie sur terre, o Qudquo humiliant quesoit pour nous le souvenir de t'événement qui Jui causait cotte der-nière joie, elle était chex lui trop naturetto et trop légitime pour quenous songions ta lui reprocher. A qui la f:)uto si le grand philo-
sophe, qui dans sa jeunesse avait cétébru la Hévotution francise,ae réjouissait, à son lit do mort, de nos revers et de t envahissement
de notre territoire? Cette joie sembla le suivre jusque dans son dé-
lire il croyait parfois assister a une bataitto où la victoire restait il
son drapeau. D'autres fois, c était contre son propre m.'t qu'it s'ima-
ginait lutter, et il lui semblait qu'it en triomphait par ta force dosa
votonté, et que son esprit sortait vainqueur du combat. Ataisétait-ce
F!CHTE ET LA ÉVOLUTION FRANÇAÎSE. LXXXH!
J'espoir d'une guerison terrestre, ou n'etait-cu pas p!ut6t cetuid'unudctivrance spirituelle qu'il exprimait u son fils peu de temps avantdo mourir? Commecetui-ci lui présentait, une potion « Laisse cela,lui dit-t! en le regardant avec sa tendresse habituetto, jo n'ai plusbesoin de remède, ~o sons que je suis guéri. MIl allait 6tro en effet
gucride tous !osmaux do cette vie il mourut dans la nuit du 27 jan-vier ~814. !t n'avait pas encore accompli sa cinquante-deuxièmeannée.
UneYotontc ferme et incbran!ab)o, jointe à un esprit capab!e des
plus hautes idées et à uncceuranin~ des sentiments losplus purs etles plus noblos, te! fut en résumé tocaractère du Fichtu. De ta chezlui eotto exattation soutenue, cet enthousiasme catmc, si t'on peut.parler ainsi, cedévouementrenechi pour tout cequi est grand et vrai-ment bon la vcritc, ta liberté, la justice, l'humanité, ta patrie. Delitaussi immense innuoncequ'i! cxcr<;asur la jeunesse do son pays,et qui t'a fait célébrer par l'ouquc, dans son Sigurd, comme le pro-phète des temps modernes. On peut le comparer encore a certainshérosde Ptutarquo incapable non-~utcment de toute faibtesso, maisde toute hésitation, il suivait avec uno fermeté inflexiblela ligne qu'ils'était tracée tui-même, et ni les attaques, ni les suffrages extérieursno pouvaient rien sur sa conviction et sa conduite. Je l'ai déju ditil était tout d'une pièce; et, a t'exempte des sages do J'antiquité, il ne
séparait pas la pensée de l'action. Aussi so montra-t-it grand patriotenon moins que grand penseur, et, on tout, homme do bien autant
que philosophe. Son extérieur répondait a son caractère soncorps,
.petit et ramassé, mais robuste, se distinguait par la vigueur dos mus-des et la richesse du sang c'était un corps de fer au service d'unevolontéde fer; sa démarche était fet'moet décidée sa parole graveet puissante. Tout en sa personne annonçait t'cncrgic, ta résolution,la conviction. En un mot, le physique, chex lui, rellétait to morat,et manifestait clairement cet ompiro do l'esprit sur la matière, oùtondaient toutes ses pensées et tous ses cnorts.
Son caractère se reflète aussi dans sa doctrine, et t explique en
partie. L'idée d'une activité spirituene, tihrcct. indcpcndantf, ost to
principe, t'amo, ta substance do sa métaphysique, do sa morale etdo ses théories politiques. Htto est te fond commun qui persiste aumilieu de ses variations, et y maintient t'unitc. Les variations desa doctrine politique s'expliquent cites-m~mcs par cottes de sasituation porsonnette et des événements contemporains, ou en géné-
rât par faction d'une méditation ptus profonde mais ces formes
INTRODUCTIONDU TRAÏ)L'CTE!Jt{.LXXXIV
diverses partent du même principe et tendent au mémo but la
dignité et t'indépendance du moi humain. Dans sa jeunesse, ators
quo les plus rudes épreuves ont développéen lui uu plus haut degréla conscience de son individualité et de sa force, et qu'it no relèveencore d'aucun gouvernement, non-seulement il ombrasse avec en-thousiasme los principes do liberté et d'édité proclamés par ta Ru.votution française, mais it exatto a tel point les droits do t't~tUt'dM
qu'il supprime presque i'Ètat. Un pou plus tard, devenu professeurdans une des p!us importantes Universités do t Allemagne, de nouveticsréflexionst'amènent a reconnaître la néccasité juridique de !<<«, etil passe alors d'un extrême individualisme à un extrême socialismemais le but qu'il poursuit est toujours le même c'est toujours le!ibre développement do )a peraonnc bumainoqu'il a en vuo. Seule-
ment, ce qui !ui apparaissait naguère comme un obstacle à ce libre
deve!oppRmen~ lui en semb!u 6trc maintenant un instrument indis-
pensable il faut d'abord affranchir les hommes du joug dégradantdo la misère, si l'on veut qu'ita puissent développer en toute fibortéleur personnalité mor<do et il n'en voit pas d'autre moyen que d'at-tribuer a t État ~organisation du travail et la repartition des produitsde l'association. Plus tard encore, torsque les envabissementsdo la
domination française attaquent ou menacent la liberté germanique, et
particulièrement la Prusse,!idée de la pt~nesemontroàtuicotnmeune des formes nécessaires de la vie de l'humanité, et la cause de
l'indépendance nationale ne trouve pas de champion plus ardent; mais,en défendant cette indépendance contre les attentats d'une puissanceétrangère, il ne fait encore que défendre l'autonomie de la personnehumaine, dont elle est à la fois la condition et t'image. Le patrio-tisme de Fichte, comme son individualisme, comme son socialisme,a sa source dans un profond sentiment do respect pour la dignité denotre nature, it s'est sans doute trompé plus d'une fois et en dessens divers sur les conditions d'exercice de la tiberté humaine, maiselle est le principe do toutes ses théories. Ceprincipe est assez grandpour rachater et au besoin pour corriger ses erreurs.
REVENDICATION
DELAUBËRTËDEPENSERDELALIBI*j-.J.J ~4AUPRES
DESPHINCESDKL'EUROPEQUî L'(~'T OPPHLM~R JUSQU'iCti
DISCOURS
.Y<M<<Mtp<ce~, et ~ftx~ttM o~tc<:/t)t~.
Hë)iopo!is, l'an (k'rn:cr(tes t~ncbrcs (1793).
PhËFACE
Il y a 'tes savants qui croient nous donner une très
haute opinion de !a solidité do !eur esprit en rejetant aus-
sitôt, comme pure déclamation, tout ce qui est écrit avec
quelque vivacité. Si par hasard ces fouinesviennent a tom-
ber entre les mains d'un (te ces hommes profonds, jp te
préviensqu'elles n'ont pas pour but d'épuiser une si riche
matière mais seulement d'en recommander chaudement
quelques idées a un public peu instruit, mais qui du
moins, grâce à la hauteur ou il est place et a la puissancede sa voix, n'est pas sans influence sur le jugement. gé-ttcral. Ce n'est point avec des formes savantes qu'on a
ordinairement prise sur ce public. Que si ces graves
esprits ne découvrent pas dans ces feuilles la moindre
u'acc d~un système plus solide et {dus profond, s'ils n'ytrouvent même pas le moindre signe qui leur paraisse
digned'tmc plusampie r(''ncxion,la faute en pourrait bien
être en partie a eux-mêmes.
C'est une des propriétés caractéristiques de notre a~e,d'aimer a ianccr te Marne sur les princes et les grands.Est-ce !a légèreté qui nous porte ,a faire des satires
contre eux, ou croit-on se reicver soi-même par la gran-deur apparente de son objet? Cela est doublement frap-
pant dans un siècle où la plupart des princes allemands
cherchent à se distinguer par leur bonne volonté et leur
popularité; ou ils font tant pour détruire l'étiquette quiformait autrefois un si profond abîme entre eux et leurs
A UH\'HM)tC\TtUN
concitt~L'ns, et qui tuur est devenue si importune a eux-
mêmes; un ennn hcaucoup d'entre eux se donnent l'air
d 'estimer les savants et la science. Si t'en ne peut se
rendra eu témoignage devant sa propre conscience, quet'en est sûr de sut, et que, toutes les conséquences que la
propagation des vérités utiles pourrait attirer sur sa tête,un saura tes supporter avec autant de dignité qu'on en
aura montre a les (tire. que l'on s'en remette alors a la.
générosité de ces princes si gravement accuses, ou quel'on reste plong'édans une insigninante et stérile obscurité.
L'auteur (le ces feuilles ne croit offenser, par sesassertions
ou par son ton, aucun des princes de la terre, mais au
contraire tes obliger tous. Il n'a pu sans doute ignorer te
reproche adresse a un certain grand Ktat,d'avoiragi contre
les principes qu'il cherche à établir ici; mais il savait bien
aussi que des Mtatsprotestants voisinsl'ont bien pis encore,sans que personne s'emporte a ce sujet, parce que l'on y estaccoutume depuis longtemps. Il savait qu'il est plus facile
de chercher ce (pu ou ne doit se faire que de
juger avec impartialité ce (lui se /< réellement, et sa
position lui refusait les ~w~~ nécessaires pour établir de
ce dernier cote un jugement solide. II savait que, quandmême tous les actes ne se pourraient défendre comme tels,
les mobiles de ces actes n'en seraient peut-être pas moins
très nobles; et, en ce qui nous concerne, il est pleind'admiration pour cette ingénieuse bonté qui, en feignunt.
d'essayer de nousravir un bien au sujet duquel une longue
jouissance nous avait refroidis, a voulu réveiller notre es-
time pour lui et nous exciter à en user avec plus d'ardeur
il est confondu devant cette rare grandeur d'âme, qui fait
pte, de propos délibère, on s'expose, soi et ses amis, au
.langer d'être méconnu, accusé, haï, et cela uniquement
DELA UnERTKDR PE~SKH 5
pour favoriserlepro~resdeslumieres. Hsavaitenuuqueces
feuilles mêmesfournissent a cim'tue l~tat l'occasiondesn'ee
<1eprouver la pureté de ses intentions /<K~' c<~
de M~c/c <y~'w~les ~j~'M~ <y«' les ~~«/6'
~~??<c/ < les /<<' t/ efc/c~, 'c.
Un Ëiat on de ~H'~ feuiHcssont imprun~'s et vendues
puhH(;uf;mcn<.ne cherche pas a ctonUcr tes lumières. Si
l'auteur 't l '1 {1 iltli ;lilllc si 1'()I't1 vt~rit~,l'auteur s'est t!'0tnp< M.Ct'anx,qui aime si i<'rt !a vente,
ne tardera pas a !e i-eiutcr. Cen'est donc point pour des
raisonspolitiques, mais titteraires,qnc fauteur ne fait pas
connaître son nom. Hse nommera sans cramte a quiconque
aura le droit de l'interroger a ce sujet et te fera comme
il faut; et, quand le moment en sera venu, Hse nommera
sans qu'on le lui demande car il pense, avec Housscau,
que ~o~ /~w~~ ~wïe doit ~M~' c-e<y!~7
Nous ne voulons pas rechercher ici jusqu'à quel point
l'humanité est moins malheureuse sous la plupart de ses
constitutions politiques actuelles qu'elle ne le serait en
dehors de toute constitution; il suint qu'elle le soit., et
qu'elle doiveretrc le domaine de nos constitutions poh-
tiquesest celui de la peine et du travail; celui de la jouis-
sance n'est pas de ce monde. Maiscette même misère doit.
être pour elle un aiguillon (lui l'excite a exercer ses forces
par la lutte, et a se préparer a la jouissance futur:; par
une victoiredifficile.L'humanité devait être malheureuse,
maisellencdevait pas rester malheureuse. Lcsconstituttons
politiques, ces sources de la misère publique, ne pouvaient
sans doute jusqu'ici être meilleures, autrement elles le
seraient, mais elles doivent toujours s'améliorer. Or,
aussi haut que nous puissions remonter dansl'histoire de
l'humanité, cela est arrive, et, tant qu'il yaura une histoire
de l'humanité, cela arrivera de deux manières ou bien
0 REVENt)!C~T!ON
par des bonds violents,on bien par un fu'o~res insensibie,lent, mais sur. En procédant par bonds,par ebratdemeutset bouleversements violents, un peupte peut faire, dansl'espace (t'un demi-siecie, plus de pas en avant qu'il n'enaurait fait en dix siècles, en revanuh< eu denu-siedeest plein de souurance et de misère mais il pt.ut aussirésumer en an'ierc (te tou~ autant et retomber dans !abarbarie où il était piun~ nnitc aus jdus tut. L'iu'stoit-cdu monde fournit des preuves de t'un et de Fau~'e cas.Les évolutions violentes sont toujours uncuupi.asardeuxde l'humanité; quand eues réussissent, la victuire obtenuevaut bien les maux qu'eiles ont causes; mais quand ellesf!chouont, vous ne faites que vous précipiter, a travers iamisère, dans une misèreputs grande. licst plus sùrde pout.suivre peu a peu ta propagation des lumières et par euesle perfectionnement de la constitution politique. Lespro-grès que vous faites sont tnoins rcmarquabies, pendantqu'its arriveut; mais regardex derrière vous et vousvc.rr<'xune longue étendue de chemin parcourue. C'est ainsi que,dans notre siècle, surtout en Anomale, l'humanité a faitun grand chemin sans aucun bruit. Uest vrai que les con-tours gothiques dei'ediuce sont encore visihjcssur presquetous les côtes, que tes nouvcHesailes sont loin d'être re-liées en un tout harmonieux et solide; maiseUcs existentpourtant, et commencent à être habitées. Les vieux châ-teaux de brigands tombent de toutes parts. Si l'un ne noustrouble pas, its deviendront de plus en plus déserts, etseront abandonnes aux oiseaux ennemis de la humere,aux chauvcs~ourisetaux hiboux. Lesnouveaux bâtiments,'au contraire, s'étendront peu a peu et finiront par formerun ensemble re~uncr.
Telles étaient nos espérances, et ces espérances, vou-
PE LA LIBERTÉ DE PRNSEH. 7
drait-on nous les an'acher en étouffant notre liberté de
penser? Kt pourrions-nous nous les laisser ravir?–
Lorsqu'on arrête le propres de l'esprit Immain, il ne peutarriver que l'une de ces deux choses ou bien, ce qui est
le plus invraisemblable, nous demeurons ou nous étions,nous renonçons a toute prétention de diminuer notre
misère et d'augmenter notre bonheur, nous nous laissons
tracer des limites que nous nous engageons âne pas fran-
chir;–ou bien, ce qui est beaucoup plus vraisemblable,le cours de la nature, que l'on vent arrêter~ brise violem-
ment et détruit tout ce qui lui fait obstacle, l'humanité se
venge de ses oppresseurs <!e la manière la plus cruelle,les révolutions deviennent nécessaires. Undrame terrible
en ce genre nous a été donne de nos jours; on ne s'en est
pas encore applique la leçon. Il est grand temps, si
toutefois il n'est dej~ trop tard, d'ouvrir les digues quel'on continue d'opposer a la marche de l'esprit bum:un,
en dépit du spectacle que l'on a devant les yeux, si l'on
ne veut pas qu'il les rompe violemment et qu'il jette la
dévastation dans les champs d'alentour.
Vous pouvez tout livrer, ô peuples oui tout, pourvu
que vous n'abdiquiex pas la liberté de penser. Continuez
d'envoyervos filsà la guerre pour se couper la gorge, en
de sauvages combats, avec des hommes qui ne tes ont
jamais oncnses, ou pour être dévores par les maladies
contagieuses, ou, si vous l'aimcx mieux, pour ramener
l'ennemi, comme un butin, dans vospaisibles demeures;
continuez d'arracher de la bouche de votre enfant affame
votre dernier morceau de pain pour le donner au chien
du favori; donnez, oui (tonnez tout; mais gardez seu-
lement ce céleste palladium de l'humanité, ce gage qui
nous promet un nuire sort que celui de souffrir, de tout
REVENDICATION8
supporter, d'être écrases jamais. Les générations futures
pourraient vous reclamer d'une manière terrible ce nue
vous avex reçu de vos pères pour le leur transmettre. Si
ceux-ci avaient été aussi lâches que vous, vous seriez
demeures dans la servitude la plus honteuse (pu puisse
peser sur l'esprit et le corps vous serieztoujours tes
esclaves d'un despote spirituel? Us ont arrachepar de
sauvants combats ce qu'un peu de fermeté de votre part
sufnrait a conserver.
Ne haïssez pas vos princes pour cela; c'est vous-mêmes
que vous devriez haïr. Une des premières sources de votre
misère, c'est que vousvous faites une idée beaucoup trophaute cl'euxet de leurs auxiliaires. H est vrai qu'ils fouil-
lent de leurs mains infatigables les ténèbres des siècles
demi-barbares, et qu'ils croient avoir trouve une perle
précieuse, quand ils ont découvert la trace de quelquemaxime de ces vieux temps; –il est vrai qu'ils s'estimentt
fort sa~es quand ils sont parvenus a g-ravcr dans leur
mémoire une de ces maigres maximes; mais tcncx pourcertain que, sur ce qu'ils devraient savoir, sur leur véri-
table destination, sur la dignité elles droits de l'homme,ils en savent beaucoup moins que le plus ignorant d'entre
vous. Gomment pourraient-ils en apprendre quelquechose?–eux pour qui l'on a une vérité particulière, quin'est pas deternunee par les principes sur lesquels sefonde
la vérité huniainf universelle, mais parla constitution, la
position, le système politique de leur pays; eux :'tqui,des leur enfance, on dépouille soigneusement la tête de
toute forme humaine en générât, pour lui en donner une
ou il ne puisse entrer qu'une vérité de ce genre,–a quil'on imprime cette maxime dans le cœur, a l'âge ou il estle ptus tendre a Tousles hommes que vous voyez,Sire,
HHLAHHERTHDEPENSRn. 9
y.sont !a pour vous: Ussont votre propri'te(1). Ktquand
même its t'apprendraient, comment pourraient-iis :)voir
titiorcedeh* comprendre?-- eux dontonaemousse
artiticieMementi'csprit par un~morate endormante, par
des ptaisirs pretnatures, et, quand Us n'y étaient pas dis-
poses, paf des superstitions rétrogrades. On est tente de
rc~u'dcrcotnnm un )nn'acte permanent (!c la I~'ovidcncc,
({n'Hyait,<tannt'hi~oh'e incutnpat'abtc!n<:nt.ptns de princes
thibtcs qnc(!(~ princes tm'chants; quant, a moi, j<' compte
anx princes ~ous tes vices qu'ils n'ont p:~ pour autant (le
vertus, et je leur sais ~l'e df tout le mal qu'its ne me font
pas.Kt on tenr persuade, a ces princes, d'opprimer la tit)crte
ile penser; tuais ne ct'oycx pas(pte ce soit a cause de vous.
Vons pourriez bien penser et chercher et prêcher sur les
toits ce que v~us voudriez tes sateHitesdu despotisme np
se mettent point en peine de vous h'nr puissance est
beaucoup trop fermement etabtie. Que vous suyex con-
vaincus ou non de !a te~itinutc de ion's prétentions, que
~m'importe! us sauront bieu vous contraindre par le
déshonneur, par la faim, par ta prison, par l'echafand.
Mais si dans vos recherches vous faisiez un grand hruit,
hien qu'i!s ~ar(tent soi~nensemi'nt l'oteint' du prince,
H se pourrait cependant que qnetque parole maUteu-
reusc arrivât jusqu'à tui,i qu'H cherchât a s'éclairer, qu'il
devînt enfin plus sa~e, et qu'it reconnu) ce qui est mi!e a
sa tranqninite et a ta votre, ~h t)ien voita tout ce qu'its
veulent vous empêcher de faire, et. voi!a, ri pcuptes! ce
dont vous ne devez pas vous laisser empêcher.
Criez, criez sur tous les tons auxorcines de vos princes,
(1) Ce sonlles parolesquele gouverneur(te LomaXVadressait
cetenfant royalau milieud'un grand concoursdepeuple.
10 REVENDICATIONDE LA UBERTÉ DE PR~t-n.
jusque ce qu'ils entendent, que vous ne vous laiss~'ex
pas ravir la liberté de penser, et prouvez-leur par \otro
conduite combien cette déclaration est scricuse. Ne vous
laissez pas enrayer par h crainte du reproche d'indiscré-
tion. Comment donc pourriez-vousêtre indiscrets ? Serait-
ce envers l'or et, les diamants de la couronne, envers la
pourpre du manteau de votreprince ? I\on, mais envers
lui. Il faut avoir bien peu de confiance un sui-ineme pourcroire qu'on peut dire aux princes des choses qu'Us ne
savent pas.Et surtout, vous tous qui vous en sentez ia force, de-
ctarex ta ~u<'m; ta plus implacable a ce premier pt'L'ju~c
d'où dérivent tous nos maux, a ce llcau qui cause toute
notre misère, cette maxime enfin que la destination du
prince est de veiller a notre Poursuivez-la, a
travers tout le système de notre savoir, dans tous tes
recoins ou elle se cache, jusqu'à ce qu'ehe ait disparu de
la terre et qu'eue soit retournée dans t'enter, d'ou eue est
sortie, ~ous ne savons pasce <pti peut assurer notre bon-
heur si leprince le sait, uts'il est là pour nous y conduire,
nous de\'ons suivre notre ~uide tes yeuxfermes. Aussi tait-ii
de nous ce qu'il veut et, quand nous l'interrogeons, Hnous donne sur sa parole que ce qu'il fait es~ncccssah'e a
notre bonheur. 11passeune corde au cou de t'humanitc et
s'écrie a Allons, tais-toi, tout.cela est pour ton Jbion(1.).»
Non, prince, lu n'es pasnotre ~< De nous atten<
dons le bonheur; de toi, la protection de nos droits. Tu
ne dois pas être envers nous tu dois être juste.
(i) C'estceque lebom't'MUde t'!n(p't~HoadtSHitf) donCatiosen
ziccotiipli.qs.intiiiie(utivre(lecegeiire. I)e cittelleiiierveilletisefiiconaccompHtsantunen'tm'ede cegenre. t)c qncHe)nerveit)ensefi)con
potn'tantMrencontrentdesgensdediversmétiers:
lis sont passas, ô peuples!l ces temps de barbarie, oui'on osait vousd~ciarer nu nom de Dieu que vous êtes (1rstroupeaux ptaces tout exprès sur in terre pour être lesesclaves d'une douxairn~de créatures privilégiées, pourporter iou's fardeaux, pour servir hurs ptaisirs, pourtuer a leur place que Dieu teur a transmis son droit in.contestable de propriété sur vous, et ru'etant ses repré-sentants, ils vous tourmentent pour vos oecbes vertud'un droit divin. Vous te savcx, ou vous pouvez vous en
convaincre, si vous ne )c savez pas encore vous n'e.tes
pas même ia propri~t< de Dieu, mais la iibertt'' (~u'ii vousa donnée ~st un sceat! qu'it n profbnd~tuent ~rnv(''dansvotre cœur, et qui vous détend d'appartenir a tout autre
qu'~ vous-mêmes. Aussi ne se basardent-us plus a vousdire « Nous sommes plus torts que vous nous aurions
pu vous tuer depuis longtemps, nons avons eto assexbons pour ne pas le taire in vie que vous vivez est donc
nnc~-raccque nous vous avons faite. Maiscette vie, nousne vous Pavons pas accorda a titre gratuit, nous vousl'avons donnée en fief il n'y a donc pas d'injustice a
exiger que vous ta consacriez a notre service et, si nousne pouvons p!us en faire usa~c, nous avons bien b' droitde vous la reprendre. » Si l'on accorde quelque vateur a''cttc manière de raisonner, vous avez appris que c'estu~s- qui êtes les plus forts, <'t que cf sont MAz'qui sont
DtSCOUHS
nEVENn!CAT!ONi5
les plus taihics; que leur force ne réside que dans voshrns,
et que vous n'avez qu'a laisser toml)erceshras pourqu'ilsS
sentent leur misèreet teur délaissement. Voilace que leur
ont montre des exemptes qui tes font encore trcmhter.
Vous ne les croirez pas davantage. quandits vous diront
que vous êtes aveugles, (tenues de secours, ignorants, et
que vousne saunez pas vous dn'i~er vous-rucmes s'ns ne
Yous ~uidaieu~ comme de petits entants, de leurs mains
patcrnettes ils ont montre de nos jours par des bévues
que teplus sunpic d'entre vous n'eut pas commises, qu'ils
n'en savent pas plus que vous, et qu'its se précipitent, et
vous avec eux, dans le malheur, parce qu'ils croient en
savoir davantage. N'écoutez pas plus longtemps de sem-
blables duperies oscx demander au prince qui veut vous
gouverner ~p ~c/ J?'o~ il vous commande.
Par droit de s~cce~'o~ disent quelques suppôts du
despotisme, mais qui ne sont pas ses défenseurs les plus
intelligents car, en supposant que votre prince actuel ait
pu hériter un tel droit de son père, qui a son tour le
tenait du sien, et ainsi de suite, ou celui qui fut le pre-
mier le prit-it; et s'il n'en avait aucun, comment put-il
transmettre le droit qu'il n'avait pas?– Et puis, ô ruses
sophistes croyez-vous donc qu'on puisse recevoir des
hommes en héritage comme un troupeau de moutons ou
comme un pâturage ? Lavérité n'est pas une chose aussi
superncieHc que vous le pensez il faut la puiser plus au
~ont!, et je vous prie de vouloir bien prendre un peu de
peine pour ta chercher avec moi (~).
(i) Jedemandequ'onnelaissepasde côté,maisqu'onliseattetUi-
vementccUccourtedéductiondesdroits,desdroitsinaliénableset des
droits idienables,du contt':)t,dch société,desdroitsdesprinces,
qu'ons'enpénètrebien,et qu'onh conserveMëtement,parcc/nt'an-
f)H LA LtDKHTË DK l'KKSHR. 13
L'homme ne peut être ni le~ue, ni vendu, ni donne il
nu saurait être la propriété (!e personne, puisqu'il est etdoit rester son propre maitre. porto au fond de son
cœur une étincelle divine qui l'élevé au-dessusde ranimai
et ie fait citoyen d'un monde dont Dieu est le premiermembre; cette étincelle, c'est sa conscience. Celle-ci
lui ordonne absolument et sans condition de vouloir telle
chose, de ne pas vouloir telle autre, et cela /c~/ et
</c~w<~y' <*y?ïo?<t'~y~<sans aucune contrainte exté-
rieure. Pour qu'il puisse obéir a cette voix intérieure,–
(pu lui prescrit des ordres absolus, –il faut qu'il ne suit
pas contraint extericure<ncnt, qu'il soit libre de toute in-
nucnce étrangère. Nul autre n'a donc le droit de disposerde sa personne il doit a~ir de lui-même, en se reliantsur la loi qui est en lui il est libre et doit rester libre.MTt'a d'ordre a recevoir que de cette loi intérieure, car
elle est son unique loi,–et il se met en contradiction
avec elle, quand il s'en laisse imposer une autre, il
anéantit en lui l'humanité, et se ravale au ran~ des ani-
maux.
Si cette loi est son unique bi, il peut faire ce qu'ilveut partout ou elle ne parle pas il a ~'o~a tout ce qui
n'est ~M~e~/Mpar cette loi unique. Or tel est précisé-ment le cas de ce sans quoi il n'y a pas de loi possibleen général, je veux dire de la /~e~ et de la ~c~o~/~e; tel est en outre celui de ce que la loi or</ow~ dans
la sphère de ce qui~'c~~ ~<~M. On peut donc dire
que l'homme a droit aux conditions sans lesquelles il ne
trpmcntlasuiteseraitinintehigibieet sansfondement. II n'estpasmauvaisnon plus,sonsd'autresrapports,de sefaireune bonnetbisdesidéesprécises cesujet,ne fut-ce,par exemple,que pourne pasdéraisonnerdansunesociétédegensinstruits.
HKVËNDICATIONi/t
pourrait a~ir conformément a son devoir, et aux actions
que ce devoir exige. Il ne saurait abdiquer de tels droitsils sont !<~< Nous n'avons pas le droit de les
aliéner.
.t'ai également droit aux actes que !a loipermet simple-ment mais je puis aussi ne pas user de cette permissionde la loi morale alors je ne me sers pas de mon droit,
je t'abandonne. Les droits (!c cette seconde espèce sont
donca/«M/M; mais il fautque l'homme les cede~o/
/<cy?i~~ I1 ne doit jamais être force de les aliéner
autrement il serait contraint par une autre loi que par la
toi intérieure, et cela est injuste de la part de celui quiexerce cette contrainte, et de la part do celui qui la subit,
quand il peut faire autrement.
Si je puis céder mes droits ~<~ sans aucune con-
dition, si je puis en /<~ acautrui, je puis aussi ne
les céder que sous condition; je puis les ~c~~c/' contre
des droits aîicnes par d'autres. C'est de cet échange de
droits aiien~bles contre d'autres droits aliénables que ré-
sulte le contrat. Je renonce a l'exercice de l'un de mes
droits sous la condition que l'autre renonce également a
l'exercice de l'un des siens.–Les droits que l'on peutainsi aliéner dans un contrat ne peuvent être que des
droits à des ~c~ CdC~c~~ et non à des ~e~ ire-
~W~<?. Dans ce dernier cas, en cnet, aucune partie ne
pourrait s'assurer si l'autre remplit ou non les conditions.Les sentiments intérieurs, lasinccrite, le respect, l'amitié,la reconnaissance, l'amour, se donnent librement on neles acquiert pas commedes droits.
La ~oc~ civile se fonde sur un contrat de ce genre,sur un contrat de tous les membres avec un, ou d'un avec
tous, et elle ne peut se fonder sur rien autre chose, puis-
DH LA LIBERTÉ DE PENSEE. 16
qu'il est absolument contraire au droit de se taisser im-
poser des lois par un autre que par soi-même. La légis-lation civile n'a de valeur pour moi que parce (me je t'ac-
cepte volontairement, il n'importe pas ici par quel
signe, et que je me donne ainsi la loi a rnoi-m~me. Je
ne puis me laisser imposer une loi sans renoncer par ta a
l'humanité, a la personnalité et a la liberté. Dans cecon-
tratsocial chaque membre cedequctqucs-unsdcses droits
alienaldes, a la condition que d'autres membres céderont
aussi quelques-uns des leurs.
Quand un membre n'observepas son contrat et reprend
sesdroits aliénés, la société reçoit alors un droit, celui de
le contraindre a l'observer par la lésion qu'elle inHigeaux
droits qu'elle lui a garantis. Il s'est volontairement soumis
a cette lésion par le contrat. De la vicnt le pouvoir c~-
CM~Cepouvoir exécutif ne peut être exerce sans détriment
parla société tout entière; il est donc délègue a plusieurs
membres ou &un seul. L'individu auquel il est délègue
s'appelleprince.Le prince tient donc ses droits de la délégation de la
société; mais la société ne.peut lui déléguer des droits
qu'elle n'a pas elle-même. Laquestion que nous voulons
traiter ici, savoir « Un prince a-t-il le droit de limiter
notre liberté de penser ? ? se fonde donc sur celle-ci
«UnÉtat pourrait-il avoir un pareil droit? ?
Lafaculté de penser /c~ est le caractère qui dis~
tingue l'intelligence de l'homme de celle de l'animal. Il
y a aussi des représentations dans la dernière; mais elles
se suivent nécessairement, elles se produisent les unes
les autres, comme dans une machine mouvement en
produit un autre. C'est le privilège de l'homme de résister
i6 HEVENDICATIOM
par son activée a ce mécanisme avouée de l'association
des idées un se l~orne un esprit purement passif et de
donner au cours de ses idées une direction déterminée
par sa force propre, suivant sa libre volonté; plus on main-
tient en soi ce privilège, plus on est homme. La faculté
qui en rend l'homme capable est précisément celle par la-
quelle il t'c~ liln'ement. I.a manifestation de ia liberté
dans ta penscc, tout aussi bien que dans !e vouioir, est un
etement essentiel de sa personnalité eHe est !a condition
nécessaire qui seule lui permet de dire « Je suis, je suisun être agissantpar mi-même. » Cette manifestation neiui
garantit pas moins que t'autrc le tien qui ie rattache au
monde spirituel et n'etahiitpas moins raccont entre ce
monde et tui car ce n'est pas seutcmcnt i'itarmonimtans
le voutoir, mais aussi i'harmome dans la pensée qui doit
dominer dans ce royaume invisible de Dicu.jOui~ cette
manifestation (le la liberté nous prépare a une manifesta-tion plus continue et plus puissantede cette même libertéen soumettant librement nos préjuges et nos opinions a la
loi de la vérité, nous apprenons déjà a nous incliner et a
nous taire devant l'idée d'une loi en général; cette loi
dompte d'abord notre cgoïsme, que la loi morale veut
gouverner. L'amour libre et désintéresse de la veritc spé-culative pour la vérité eIJe-memeest la préparation la plusn'uctucusc a la pureté morale des sentiments. Et ce droitsi ctroitenicnt lie a notre personnalité, a notre moralité,ce moyen que la Sagessecréatrice nousa donne tout exprèspour travailler a notre ennoblissement, nous aurions pul'abandonner dans un contrat social? Nous aurions eu ledroit d'aliéner un droit, inaliénable? Mais la promesse
que nous aurions laite d'y renoncer aurait-elle si~nih<autre chose que ceci « Nous promettons de devenir, en
M; MUmn'HDHPKKSt. 17
entrantdansvott'esociftc civile, des créatures sans raison;
nous {n'omettons d'être des animaux, ann que vous ayez
moins de peine a nous dompter ? Et un pareil contrat
serait h'~itimc et v:dabtc?
Mais<tuc veut-on donc? s'ecrient-iis. Ne vous avons-
nous pas (tonneassezpubUquemeni.et assezsoiennenement.
ia permission de penser librement?– Oui, nous voûtons
bien en convenir; nous voûtons bien en'acer <!e notre
mémoire les timides tentatives qui ont été i'aitcs pournous ravir notre mciueurc ressource nous voulons
bien oubner avec que! soin on cherche a ramener tes
anciennes ténèbres sur chaque hnnierc nouvcHe(~);–nous ne disputerons pas avec vous sur des mots uni,vous nous avez permis de/cr, parce que vous ne pou-viez nous en empêcher; mais vous nous détendez de
communiquer nos pensées; vousne nous enlevezdonc pasledroit imdienabtc de penser librement, vous nous retirez
simplement cehn de communiquer notre libre pensée.Nous vous te demandons, pour être certains de ne pas
discuter avec vous sur rien, –avons-nous originairementun tel droit?– Pouvons-nous te prouver?–Si nous
avons droit a tout ce que lu loi morale ne dépend pas, outrouver une défense (te cette ici qui nous interdise de
(r'mnnmiquer nos convictions? Ouest !c droit qu'auraitautrui de détendre une p:u'eiHc communication, de ta
regarder comme:une oubnsc a sa propriété? Les autres,
(t) C'estainsifuruncdoctrineqxisembleavoirdtufaitetoutexpiespournoosdciivtCfde t.)tn:dcdictionde la loiet nousramenersousicpthtdpc(lela ttbctH!,a servi d'nppttid'.thord )a thcotogiesco!asti-<ptC,–ettout récemment.ntdespotisme.–Uestindignedeshonxncspoosantsdcramper:)u pieddes nùoespourso))icitcrt:tpermissiondedevenu'!csmurcitfpicd')desrois.
2
Hh:VEM)!C.no~i8
direx-v'~s. peuvent être truubtes paria dans tajouis-sam'e <tnbonheur fonde sur ies convictions un ils ont vécu
jusqn'.dors, dans tcm's i~reahiesiHusions, dans leurs doux
rêves. Mais <-<n)nne)u peuvent-Usetrc ainsi tronbh's
par unmseu! fait, s'its n(.'m't''ct)'ntct~ pas, s'tis ne i'ui~
poitit attc-ntton a mus parûtes, s'Hs ttc les adnu~cnt pandans tcut'esprit? S'itssunUr~uhtt''s, c'est qu'Us se h'uu-
Hclit ~ux-nn~ncs; < 't\'sL pas tnui (pu tes trouble. C'c~
icii<~ r~ppurLd~d'jtHK'ra rcct'Vtur.ai-ju pas le droit
d'' partager nn'n pain a\ mt autre, <t<'t<' inisscr su
chantât'a nx'n t'eu, et attumur sunnatttbcana ina lu-
nucrc? S'il nu veut pas de tnun pain, il n'a (ju'a lie pastendre la tnain pour te recevoir; s'i! ne veut f~s (!c ma
hatcnr, qu'ii s'eiui~ne de mun i'cu je n'ai certainement
pas !cdruit)!eini imputer n~sduns.
Toutefois, connue ce droit de iibrccunt)nunicatiun ne
fin fondu point sornn ordre, mais seutetncnt sur nnp
pertnission de ia ici mot-atc, et <)ne, par conséquent, con-
sidère <jn hn-metne, il n'est pasinatienahic; eonune, en
outre, t~onr (lue rexercice de ce droit soit possible il iaut
nécessairement que ceini au(pnJ je nt'adresse consente a
recevoir mes dons, on jmurnnt bien concevoir tjue h
société eut supprinn' une t'ois pour toutes ce consente-
ment, et (m'ette entexi~e de chacun den tncnthres qu'eiteadmettait dans son sein la promesse de ne communiquerabsolument a personne ses convictions, –il ne faut sans
doute pas prendre trop a ta lettre une pareine renonciation,en t'entendant d'une manière ~enende et sans aucune
cnnsidcration de personne :!es privilégies de i'~tatn~
versent-its-pas.en e~'et, les trésors de leur corne d'abon-
dance avec toute ta Hher:dite possible, et s'iis en ont re-
tenu jus(fu'ici les ptus rares merveille~ ne devons-notos
DKL.\ UBHRTÉDEPKNSK~. i9
pasnous un rendre uniquement a notre opiniâtreté et à
notre entêtement? Maisaccordons toujours ce que nous
pourrions ne pas accorder aussi absolument, que nous
ayons pu, en entrant dans ta société, renoncer a notre
droit de communication. A ce droit est oppose celui de
/c ~cc~o~ le premier ne peut être aliène sans
que le second le soit aussi. Accordons que vous ayez eu
le droit de me faire promettre que je ne partagerais
mon pain avec personne auriez-vous donc eu aussi
celui de forcer le pauvre affame a mander votre bouillie
malsaine s'il n'aime mieux mourir? Voulez-vousdéchi-
rer ce beau lien qui unit les hommes aux hommes et fait
que les esprits s'épanchent dans les esprits? Voulez-vous
ravir l'humanité l'échange le plus digne d'elle, le libre
don et la libre acceptation de ce qu'elle a de plus noble?
Maispourquoi parler le langage du sentiment a vosco~ura
endurcis? Qu'un raisonnement sec et aride, contre lequel
se briseront tous vos sophismes, vous prouve l'illégiti-
mité de votre prétention? Le droit d'accepter libre-
mont tout ce qui nous est utile est un élément de notre
personnalité il est dansnotre destination d'user librement
de tout ce qui peut servir à notre culture spirituelle et
morale; sans cette condition, la liberté et la moralité
nous seraient des dons inutiles. Une des sources les plus
fécondespour notre instruction etnotre culture est la com-
munication des esprits avec les esprits. Nous ne saunons
abandonner le droit de puiser à cette source sans abdi-
quer notre spiritualité, notre liberté, notre personnalité:
il nenous est donc pas~s d'y renoncer; il n'est donc
pas non plus permis aux autres d'abandonner /< droit
d'y laisser puiser. Si notre droit de /'<~u~' est inalié-
nable leur droit de ~w~' ne l'est pas moins. Vuut!
~0 HK\KM)K.:ATiUK
savez bien vous-mêmes si ?~<~~~M/~ nos dons. Vous
savez si nous (tonnons des ptaces et des dignités a ceux
qui font semhhmt de se laisser convaincre par nous, si
nous excluons de ces dignités et de ces places ceux quin'écoutent pas nos i''runs et ne lisent pns nus écrits; si
nous injurions puhhquemcnt et si nous pourchassonsceux qui écrivent contre nos principes. Expiiquex-nous
dune, si vous le pouvez, pourquoi i'on ne se sert de vosécrits que pour empaqueteries nôtres, et pourquoi nous
avons de notre cet' ies ptus fortes têtes et les meilleurs
cŒursqui soient dans les nations, tandis que vous n'avez
du votre que ies imheciies, tes hypocrites, les lâches écri-
vains.
Mais, dites-vous, nous ne vous défendons pas du tout
de partager votre pain soutenant vous ne devez pasdonner du poison. Comment donc suis-je si sain et si
fort, moi qui lais ma nourriture quotidienne de coquevous nommez du poison? Devais-je prévoir que te taihie
estomac d'un autre ne supporterait pas cette même nour-
riture? Est-ce moi qui l'ai tué en la lui (A~ ou
n'est-ce pas lui qui, en la ~a~c~, a été l'auteur de sa
mort? S'il ne pouvait pas !a digérer, il n'avait qu'a ne pasen mander je ne l'ai point ~uc (~) il n'y a que vous
qui ayez ce privilège. –Ou, en supposant même (me.j'eusse reenement tenu pour du poison ce que j'ai donné
aux autres, et queje ie leur eusse donne dans l'intention
de les empoisonner, comment vouiez-vous me te prou-
(1)f. i''ichtcfaitsur cemotlit rc.n.nquesuivante En-foncer(tunsla ttonchc(k'. enfant delabot)i)ncqm<<''te d'abordbienm~chcc,c'estceque, (!.)nsles provincesOMcchsef.'it encore,onnomme~o;<cn. .h~<~t' wM(ongaveuusai)desoiesavecdelitpâtée.
HHt.A Un!nnn!pt.Sf-:H. 21ver? Qui peut. être mon ju~e a cet <~ard, en dehors d~
ma conscience? Cc)a s«it (fit ttourtimt sans p:u'abo!e.
J'ai sans (toute ie droit der<pa!!<<re ia ï;c7' mais non
pasi'c?~Oh pourvous qui parlez ainsi, que peut donc signifier
!a~?–Que peutsignitter i'e~? Ce n'est pas sansdoute ce que nous autres nous tenons pour têt; autre-ment vous auriez compris que votre restriction supprimetoute la permission, que vous nous reprenez de ta main
gauche ce que vous nous avcx donné (te la main droitequ'i! est absolument impossible de communiquer la vérité
quand il n'est pas permis aussi de pr~pa~er des erreurs.–Mais je vais me faire comprendre de vousplus daire-ment.
Sans doute vous ne parlez pas ici de ta vérité .pc-tive; car vous ne voûtez pas dire que j'ai bien le droit de
n'pandrc ce que~'c tiens pour vrai en mon nme et con-
science, mais non pas ceque ~M~ïc regarde commeerroné et taux. Sans un contrat entre vous et moi, vousn'avez aucun 'h'oit d'exiger de moi lavéracité: carceHe-ciest un devoir purement intérieur, et non pas un devoirextérieur. Mais avec ie contrat sociat, vous n'êtes ~uerc
plus avances; car vous ne sauriez vous assurer que je
remplis ma promesse, puisque vous ne pouvez lire dansmon cœur. Si je vous avais promis d'être veridique et
que vous eussiez accepte ma promesse vous seriez sans
doute trompes, mais par votre faute je ne vous auraisrien promis, puisque, par ma promesse, vous auriez reçuun droit dont l'exercice est physiquement impossib!c.Je suis sans doute un homme méprisable quand je vous
trompe volontairement, quand, sciemment et de proposdeubcre, je vous donne l'erreur pour m vérité; mais je
HRVENDICATION22
n'offense ainsi que moi-même, et non pas vous je n'en
dois compte qu'à ma conscience.
Vous partez donc <!eh vérité (~'c~f; et cette vérih''
est.? dites,osa~essoplustes du despotistne,vousqui n'êtes
jamais embarrasses pour une dénnition elle est l'ac-
cord (te nos représentations des chuses avec les choses en
soi. Le sens de votre prétention est donc celui-ci je
rougis pour vous, au non) dequijeparte.–st ma repré-
sentation s'accorde réellement,avecta chose en soi je puis
la répandre mais si elle ne s'accorde pas réeUementavec
elle, je dois la parder pour moi.
L'accord de nos représentations des choses avec les
choses en soi ne saurait être possible que de deux ma-
nières si tes choses en soi étaient réalisées par nos repré-
sentations, ou si nos représentations étaient réalisées par
les choses en soi. Commedans notre faculté de connaitre
les deux cas se présentent, mais se confondent,si bien, quenous ne pouvons plus les séparer distinctement l'un de
l'autre, il est clair que la vérité objective, dans le sens le
plus étroit du mot-,est en contradict-ion directe avec l'en-
tendement de l'homme et de tout être fini; que par con-
séquent nos représentations ne s'accordent jamais et ne
peuvent pas s'accorder avec les choses eu soi. Ce n'est.
donc pas dans ce sens du mot que vous pouvez nous de-
mander de répandre la vérité.
Pourtant il y a une certaine façon nécessaire dont les
choses doivent nous apparaitre a tous, en. raisonde la con-
stitution de nutre nature; et en tant que nos représen-tations s'accordent avec cette forme nécessaire de la
faculté (le connaitre, nous pouvonsaussi les appeler objec-tivement vraies, eh entendant par objet non pas la
chose en soi, mais une chose nécessairement, déterminée
DRLA UnRHTÉPE PEN~RH. 23
par tes lois de notre taout< de connattre et par celles de
l'intuition (un phénomène). !'j!ce sens tout ce qui est.
constitue suivant une perception exacte par tes lois néces-
saires de notre faculté de conuaiire, est vérité objective.–Outre cette vérité applicalde:m monde sensilde, il y ctt
a encore nne, dans un sens intinimpnt phtsci~vc d)! mot
ici, ~n fiU't, nous ne connatssnns pas d'abord par ta pûr-
ception la nature donncp des cho~s, ma~ tt'msd~v~ns ta
/)/'o~~ nous-mêmes par la spontancitY'!a p!us pur~ d
!a phts itbrp, contortm''ment aux concepts or~inair''s du
droit et (le l'injustice. Ce qui est f'ont'orme a ces conceptsl'est pour tous tes esprits ef pnnr te père (tes esprits; et
tes vérités de ce ~cnre sont pour ta plupart très tacites a
connaître et très sûres; notre conscience nous les dicte.
Ainsi; par exemple, c'est une vérité éternelle, humaine et
divine a la fois,qne l'homme a (lesdroits inaliénables, que
la liberté de penser est un de ces droits,–(fue celui entre
les mains duquel nous remettons notre puissance pour
défendre nos droits a~it avec une souveraine injustice,
quand il se sert de cette même puissance pour opprimer
ces droits et particulièrement la liberté de conscience,t~es
vérités morales ne sonnrc'nt point d'exception; elles ne
peuvent jamais être problématiques, mais elles se laissent
toujours ramener au concept du droit dont la valeur est.
absolue. Ce n'est donc pas des vérités de cette dernier''
espèce que vous parlez, elles vous tiennent d'ailleurs
fort peu a c(et)r, et vouscond:nnuent souvent intérieure-
ment car il n'y a point de controverse possible a leur
~jet vous parlez de la première vérité humaine. Vous
demandez que ~o! ~'<7~~ y'/c~ < ~e .s'~
~P M~'C~ZW~MY/C~ CO~/O/7/C~ lois ~C~A'
~c ~c~M. Vous êtes ~-cncreux, vous êtes de sa~es
nHVENDtCATïON2Aet bons pères de l'humante vous nous commande d'ob-server toujours exactement et de eonchu'c toujours exac-tement; vous nous défendezde nous tromper nous-mêmesann <}uenous ne propagions pasd'erreurs. Nohtestuteursnous voudrions bien ne pas le faire; ceia ne nous est pasmoins contraire qu'avons. Le malheur estseutementquenous ne savons pas quand nous errons. Ne pournez-vous pas, pour que votre conseil paternel ne fut pointperdu pour nous, nous donner un sur critérium de ia ve~rite, toujours appticaHe et toujours infaiHihic?
Aussiy avez-vous déjà songe. Nous ne devons pas, parexemple, dites-vous, répandre des erreurs anciennes etdepuis longtemps réfutées. –.Des erreurs ~?<~ sont-eites réfutées? Si ces réfutations ~0~ frapjtaien!par icur évidence, si elles Mo~ satisfaisaient, pense/-vous que nous soutiendrions encore ces erreurs? Crovex-vous que nous aimions mieux errer que de juger saine-ment, déraisonner que d'être sages, et que pour admettreune erreur, il noussufnsc de la reconnaitre pour te!te?Vous imaginez-vous que par pure méchanceté et pourtourmenter et chagriner nos bons tuteurs, nous nous phu-sions a répandre dans le monde des idées que nous savonsbien nous-mêmes être fausses?
Ces erreurs sont depuis longtemps réfutées, nous dé-clarez-vous sur votre parole. !t faut au moins qu'ellessoient réfutees~y ~o~, puisque vous voulezsans douteen user honorablement avec nous. Ne pourriex-vous nousdire, ô ii!ustrissunes enfants de ia terre, combiende nuitsvous avezpassées au miucu des plus sérieuses méditations,pour trouver ce que n'ont pu découvrir encore tantd'hommes qui, n'ayant pas, comme vous, les soucis du
gouvernement, consacrent tout leur temps aces sortes
DH L. HBRHTH DE PHKSHn. 25
(Jerecherches? Onbien t'auricx-vous trouve sans aucune
rencxion, sans aucune instruction, parla seule grâce
de votre divin génie? Mais nous vous cotnprcnons, et
depuis longtemps déjà nous aurions du exposer vosvéri-
tables pensées, au lieu de vous engager dans ces recher-
ches trop arides pour vous et vos satellites. Vous ne
partez pas du tout de ceque nous nommons, nous autres,
vérité ouerreur ;–quc vous importe? Quiaurait vou!uque
l'cspoirdn pays consumât en d'aussi sombres spéculations
les années qu'il devait passer dans le repos pour se pré-
parer aux fatigues du pouvoir? Vous avez partage entre
vous et vos sujets tes facultés de l'esprit humain. Vous
leur avez laisse la ;p,–mais non pas, il est vrai, pour
vous,ni pour eux-mêmes, cardans vosgouvernements elle
n'est pas du tout nécessaire qu'ils pensent pour leur
plaisir, s'ils le veulent, pourvu que cela n'ai pas d'autres
conséquences. Vousro~ pour eux. Cette volontécom-
mune qui réside en vous détermine donc aussi la vérité.
Cequi est vrai, c'est donc ce que vous voulezqui soit vrai;
ce qui est faux, ce que vousvoulez qui soit faux.–~o:
~M le vouiez-vous? C'est ia une question dont nous
n'avons pas a nous inquiéter, ni vous non plus. Votre
votontc est, comme telle, l'unique critérium de la vérité.
Il en est de nos pensées comme de notre or et.de notre
argent: elles n'ont de valeur qu'avec votre poinçon.
L'administration de l'Etat exi~e sans doute une pro-
fonde sagesse, car il est notoire que tes plus sages et les
meilleurs d'entre les hommes ont toujours été appelés a
la diriger; si cependant un ûRii profane osait jeter un
sur ses mystères, permettez-moi ici quelques
timides observations. Peut-être me natte-je trop, mais il
me semble apercevoir quelques-uns des avantages que
REVENDICATION26
vous avez ici on vue. Il vous est facile de soumettre nu
jou~ tes corps de vos sujets: vous pouvez charger (t'en-
traves et de chaînes tours pieds et leurs mains; vous
pouvez aussi les empêcher par ia crainte (!e !a faim
ou de ia mort de <!ii'ece qu'ils ne doivent pas dire.
Maisvous ne pouvez pourtant pas toujours être la avec
vos chaînes et vos entraves, ou avec vos valets de bour-
reau –vos espions aussi ne sauraient être partout, ct un
gouvernement si pénible ne voushisserait pas le moindre
!oisir a consacrer aux votuptcsde ce monde. Hvous faut
donc chercher un moyen de les asservir d'une manière si
sûre que, même en l'absence de vos entraves et de vos
chaînes, ils ne respirent plus autrement que vousne te leur
commandez. Paraiyscx en eux le premier principe de l'ac-
tivité spontanée, teur pensée; qu'ils ne se hasardent plusa penser autrement que vous ne le leur ordonnez, direc-
tement ou indirectement, par vos edits de religion ou
par leurs confesseurs; ils deviendront alors tout a fait ces
machines que vous votdez avoir, et vous pourrez vous en
servir a votre ~n' J'admire dans l'histoire, qui est votre
étude favorite, la sagesse des premiers empereurs chré-
tiens. La verito changeait avec chaque nouveau gouvcr-npment eUe changeait même une coupte de fois sous
.<!<?~/gouvernement, pour peu qu'il durât. Vous av~x
pris t'esprit do ces maximes, mais pardonnez, sije me
trompe, a mon inexpérience en votre art, vous n'y avez
pas pénètre assez profondément. Onlaisse trop longtempssubsister comme lavérité une sente et mêmevérité; c'est
une taute qu'a commise la politique moderne. Le peuples'est enfin accoutume a cette vérité, et l'habitude qu'il a.
d'y croire passe pour une preuve a ses yeux, tandis qu'ilne devrait y croire que sur la foi <Icvotre autorite.
DE LA. LIBERTÉ DE PENSER. 27
0 princes, imitez donc entièrement vos dignes modèles:
rejetez aujourd'hui ce qu'hier vous ordonniez de croire,
et ce qu'hier vous condamniez, autorisez-le aujourd'hui,auu que vos sujets ne perdent pas l'habitude de penser.
que votre volonté est l'unique source de la vente. Vous
n'avez, par exemple, que trop longtemps voulu qu'un fut
égal trois; il vous ont. cru, et malheureusement ils s'y
sont si bien accoutumes, que depuis longtemps ils vous
refusent la reconnaissance qu'ils vous doivent et s'imagi-nent t'avoir eux-mêmes découvert. Vengezvotre autorité
ordonnez une bonne fois qu'un soit un, non pas, sans
doute, parce que le contraire est absurde, mais parce quevous le voulez.
.levouscomprends, comme vousvoyez; mais j'ai auairc
a un peuple indiscipline, qui ne s'cnquiert pas de vosdes-
seins, mais de vos droits. Que dois-je repondre?
C'est une incommode question que celle du droit. Je
regrette d'être ici force de me séparer de vous, avec (lui
j'ai marché jusque-là si amicalement.
Pour que vous eussiez le droit d'établir ce que nous
devrions admettre comme vérité, il faudrait que vous
tinssiezce droit de la société, et que celle-ci l'eut acquis
par un contrat. Un tel contrat est-il possible? Lasociété
peut-elle laire a ses membres une condition, non pas
précisément de cro~'c certaines propositions, car elle nu
saurait jamais s'assurer rle cette croyance comme senti-
ment intérieur,–mais au moins de les reconnaitre exté-
rieurement, c'cst-a-dirc de ne rien dire, de ne rie!)écrire,
de ne rien enseigner co~e elles?–J'exprime le principe
aussi doucement que possible.
Un tel contrat serait physiquement possible. Pourvu
que ces dogmes inattaquables fussent déterminés avec
HEVR~ntCATtON28
assezde prccisiunet de nettetépour que l'on p~t con-vaincreincont~tab!ementquoiqu'und'avoir partecontreeux,- et vousavouerezque cen'est pasdemanderpeudechose,on pourrait sansdoute l'en punir commed'uneactionextérieure.
~faiss'il estaussimoralementpossible,c'est-à-diresi!a sociétéa le droit d'exigerune pareiUepromesseet sises membresont celui de !a faire, certains droits dei'hommc qui sont ina!ienab!esnese trouvcront-Hspasaïienesdansuncontratdece~cnre, cequi nedoit avoirbeu dansaucuneespècedecontrat,et cequi rendle con-trat ii~itime etnon avenu?- La libre rechercheappli.quee tous!esobjetspossiblesdeia reucxion,danstoutesles directionspossibleset a l'inuni, est certainementundroit de t'bommc. Nul ne peut déterminer mon choix,ma direction, meslimites que moi-même. C'est ce quenous avonsprouvep!ushaut. !t n'est doncp!us ici qncs-Hon que de savoir si l'on nepeut pass'imposera soi-mêmede tcucslimites par un contrat. On pourrait bienen imposera sesdroits sur desactesextérieursqui neseraientpasordonnes, mais simplementpermispar !a!oi morale. Dansce dernier cas, rien ne nous pousseaagir engênera:querindination; or cetteinclination peuttbien, ou h loi morale ne la limite se limiter cHc-memepar une loi qu'eue s'imposevolontairement.Maisi! n'en estpasdemêmedeslimites fixéesà la réflexiondésquenousysommesarrives,quelquechosenouspoussecertainement contintiei, notre marche, a franchir ceslimites, Anousavanceraudelà,je veuxdire resscnccdenotre raison,qui tendal'innni. estde la naturedecettefacultédene pasreconna:tredelimites absolues;et c'estpar1~qu'eHeest!araison,c'estpar !a que l'hommeestun
DK LA UUKinÉ UK PK~'SHH. 2~
être raisonnable, libre, indépendant. La recherche pous-sée a l'inuni est donc un droit ~<2/M~/e de l'homme.
Un contrat, par lequel on s'imposerait ici certaines
limites, ne signiuerait pas, il est vrai, directement Je
veux être un anima!, niais il reviendrait a dire Je ne
veux être un être raisonnable que jusqu'à un certain point
(a supposer que ces propositions privilégiées par l'État
aient réellement une valeur universelle pour la raison hu-
maine, ce que nous vous avons accorde avec une foule
d'autres dinicultcs); des que je serai parvenu a ce point,
je redeviendrai un animal sans raison.
Or, s'il est prouve que le droit de pousser ses ?'cc/c~M
au delà de ces résultats établis est inaliénable, il estprouveaussi que celui de faire ces recherches p~c<~Mï~ ne l'est
pas moins. En cnet, celui qui a le droit pour fin l'a aussi
pour moyen, si nul autre droit ne lui fait obstacle. Or
un des meilleurs moyens d'avancement pour l'esprit, c'est
de se laire instruire par les autres. Chacun a donc ledroit
inaliénable de ?'cc<?i~' a l'innni des instructions don-
nées. Si ce droit ne peut pas dire supprime, celui qu'ontles autres de ~ow~' des instructions doit aussi être ina-
liénable.
La société n'a donc nullement le droit d'exiger on de
recevoir une promesse de ce genre. Cette promesse est
contraire a un droit inaliénable de l'homme aucun
membre n'a le droit de faire une pareille promesse; car
elle est en opposition avec la personnalité des autres, et
elle tend a les mettre en ~encrai dans l'impossibilité d'agir
moralement. Quiconque la fait a~it contrairement au
devoir; et, des qu'il le reconnaît, c'est son devoir de
reprendre sa promesse.Vousvous enrayez de la hardiesse de mesconséquence~
REVENDICATION30
ô amis et serviteurs des ténèbres; car tes gens de votre
espèce sont faciles :'i enrayer. Vousespériez que je me
réserverais, <tu moins, quoique prudente restriction
« 6'~<o~ ~/c~/M. x; que je laisserais encore
ouverte une petite porte de derrière pour votre serment
religieux, pour vos livres symboliques, etc. Et quand
j'aurais cette porte, je ne voudrais pas vous l'ouvrir ici
pour vous être agréable c'est précisément parce qu'on
s'est toujours conduit si doucement avec vous, qu'on vous
il toujours trop laissésmarchander, qu'on a toujours évité
avec le plus grand soin de toucher aux ulcères qui vous
t'ont le plus demal, qu'on a voulu blanchir votre noirceur
de nègres sans vous mouiller la peau, c'est précisément
pour cela que vous êtes devenus si hautains. Vousdevrez
désormais vousaccoutumer insensiblement a regarder la
vérité sans enveloppe. -Mais je ne veux pas non plus
vous laisser sans consolation. Que craignez-vous donc
(le ces pays inconnus, situés au delà de votre horizon et
ou vous n'irez jamais? Demandez donc aux gens qui les
visitent si l'on risque si fort d'y être mangé par desgéantede l'ordre moral, ou avalé par des monstres sceptiques.
Voyez ces hardis circumnavigateurs tourner autour de
vous ils sont aussi sains moralement que vous-mêmes.
Pourquoi craignez-vous donc si fort les lumières qui écla-
tcraif'nt tout Acoup, si chacun y concourait pour sa partautant qu'il serait en lui? L'esprit humain ne procède eu
général que par degrés il va d'une clarté a une autre
vous continuerez de ramper au milieu de votre époque;vous conserverez votre petite troupe d'élus et la convic-
tion de vos rares mérites. Et s'il fait parfois un grand
pas au moyen d'une révolution dans les sciences,–soyezaussi sans crainte a ce sujet. Si le jour luit pour d'autres
UH LA Ub~TË UK PMNSEh. M
autour de vous, vous et. vus chers élevés, vous tiendrez
vus faibles yeux dans un crépuscule commode;même,
pour votre consolation, il fera encore plus sonujre autour
du vous.Vous devez le savoir par expérience Est-ce que,
depuis les vives lumières qui uni éclair)''les sciences, c'est-
à-dire surtuuL depuis une dizaine d'années, robscuntu
n'est pas devcnne plusgrande encore qu'aupaï'avant dans
vos esprits?
Ktinaintenant, u princes! permeHex-tnui de me t.uur'
ner de nunvean vers uo~. Vous nous prédisez qu'une
tnisere sans nomsera te t'rnit.de la ii!jert.cde penser ini-
mitée. C'est uniquement pour notre bienque vous vousont'
parex de cette liberté et que vous nous l'enlevez, comme
on enlevé a des entants un jouet dangereux. Vous ordon-
nez i'tvos ~azetiers de nous peindre sous des couleurs de
feu les desordres ou se jettent des esprits partages et
echaunus par les opinions. Vousnous montrer un peuple
doux, tumbc dans une ra~e de cannibales, altère dcsan~,
insensible aux larmes, courant avec ardeur il des exécu-
tions comme a des spectacles, promenant en triomphe,
avec des chants de fête, les membres déchires et encore
fumants (le ses concitoyens,ses eni'ants ennn jouant avec
des têtes sanglantes commeavec des toupies. Nous ne
vousrappellerons pas, a notre tour, les fêtes plus san-
glantes encore que le despotisme et le fanatisme reunis,
comme de coutume, ont données a ce même peuple;
nous n'ajouterons pas que ces desordres ne sont pas les
fruits de la liberté de penser, mais les conséquences du
lon~esclavagequi avaitprécédemment pesé sur les esprits;
nous ne vous dirons pas qu'on n'est nuUe part plus
tranquille que dans le tombeau.ious vous accorderons
!U':V!KU!(:TIOK32
tout, nous nous jetterons repentants dans vus bras, et.nous vous prierons, en ptcurant, de nousabriter sur votrecœur paterne! contre tous les maibem's qui nous mena-
cent, aussitôt que vous aurez repondu a une question
respectueuse.0 dites vous qui~ d'après ce que nous apprenons de
votre bouche, ave/a veiHer,comme des dieux tutciaircs,sur tebonheur des nations; vous qui,– vous nous l'avezsi souvent,assure,–faites de ce bonheur !e but suprêmede vos tendres soins, –pourquoi, sous votre subtime
~ardc, les inondations rava~cnt-eltes encore nos champset les ouragans nos phmtations? Pourquoi les nammes
sortcnt-cUcs encore de la terre, et nous devorent-eHcs,nous et nos maisons? Pourquoi t'epec et les épidémies
cmportent-eHes des miiMersde nos enfants chéris? Or-
donnez donc d'abord a t'ouragan de se taire vous com-manderez ensuite a la tempête de nos opinions déchaî-
nées. Faites d'abord tomber la piuic sur nos champs des-
sèches, et donncx-nous le soleil bienfaisant quand nousvous en prions; vous nous donnerex ensuite ta véritévivifiante (1). Vous vous iaiscx. Vous ne le pouvexdonc pas ?
(i) Votrenmi,!c oUitjucdun"2C1,danslecuhiur(t'uctoiu'e(telaA. L.X.,ne ventp.): il est \):ti,q)trron cotnp.u'ctes t'cvohnion~t)u\plu~nOlIll'~lIesn¡¡hu'cls.A\'PoCsapcrmi6siou,c()JI~idérécscommeplléllU-pt)cno)t)ct!csnatm'cts.Avecs!)petmi<~ion,c(u)si(!urdcscomtnep/<c~u-
t~t'nM,c'cst-u-dhcnopont de vnc,nonde kurs principestnornux,maisdeicursetTctsdans!cmondescnsibtc,h'srcvohtUonssontccrt:<i-netncntsoumisesauxloisde lanature.~M.snettourrexpashu indt.qucr ic livreoulaphccduthre ou ilpeuts'encotnaincrc,et je nedois pasic fane ici. Kn~nu'a), ous pourriezfaireentendresousmainacetamiqu'itdevraitser~oudrc.')entrerpiusavantdansr~udcde la pttitosophic.Ators.avecsp.scono.tissanccsetcndûp.set sonlan-H~gcvirit,Hconduiraitvosaffaireset en metnetempscciiesde l'itu.
DE LA UBEHTH DH l'ENSER. 33
Ehbien!s'ihaunetrequilcpuisseree!lemcnt;qui,du sein de la dévastation, tasse sortir de nouveaux mondes,et de la pourriture tire dos corps vivants; –qui élève deriants vignobles sur des volcans 'teints,qui veuillequedes liommcs habitent, vivent et. se réjouissent sur des
tombeaux, vous irriterez-vous parce que nous lui lais-serons aussi le soin, le plus petit de ses soins, de détruire,d'adoucir au moins ces maux que nous attire l'usage du
privilège qu'il nous a donne et qu'il a marque de son
sceau divin, ou, s'il /<~ que nous les souu'rions, de les
appliquer ;'t une plus haute culture (le notre esprit parle moyen de notre propre force?
11est hon, princes, que vous ne vouliez pas être nos
neaux il n'est pas bon que vous vouliez être nus dieux.
Pourquoi ne voulez-vousdonc pas vous résoudre a vousabaisser jusqu'à nous, il être les premiers entre des
e~aux? Le gouvernement du monde ne vous réussit pas,vous le savez Je ne veux pas vousreprocher–mon c~urest trop ému "-les bévues que vous avez commises jus-qu'ici tous les jouis, les plans ma~ninques que vous avez
changes tous les quatre ans, les monceauxde cadavres devos soldats que vous comptiez sûrement ramener en
triomphe. t.ln jour vous embrasserez avec nous une
partie du ~rand plan, du plan certain et avec nous vousvous étonnerez d'avoir concouru aveuglement, par vos
tnnmtuheuncoupplus!j:<hitcmpm(ju'itnel'a f.Htjosqtric:. Vousnesaurieznvuit'nncmciHcut'c.uniequelaphilosophie,si unuet n~uem'nesontpaspotn-voussynonymes,t~oigtu'x.vot~doncde cettefaussei'micqui depuissa naissancea toujoursété au servicedu premiervenu,qui s\'st faitemployerparchacun,et parqui, iin'y a paselicoi-cbiluiiglelnl)s, 011volisa soliiiiisut[jotig(I'tilillill)ile,coliiiiieencoresilongtemps, on uoN&a sonnnsaujougd'un habite,connueMt<saoumeUexmaintenantro~pct~MparcHc.
3
hMVHKMCA'nuN
entreprises, A des tins auxquelles vous n'aviez jamais
songé.Vous vous ctos grossièrement trompes nous n'attcn-
dons pas le bonheur (te votro main, nous savons bien quevous êtes des ~<~Mcs nous attendons la protectionet la restitution de nos droits, que vous ne nous avez en-
levésqnp par erreur.
Je pourrais vous prouver que la liberté de penser, la
liberté do penser sans obstacles, sans limites, fonde seule
et assuro le bien des Ktats; je pourrais vous démontrer
cela du la manière la plus évidente par des raisons irré-
futables je pourrais vous le montrer par l'histoire je
pourrais encore vous désigner de grands et de petits pays
qui continuent de Heurir, ~race a elle, ou qui, ~race a
elle, sont devenus Mûrissantssous vos yeux; mais je ne lu
ferai pas. Je veux vous présenter la vérité dans sa beauté
naturelle, et non la faire valoir auprès de vous par lestrésors qu'eUe vous apporte en dotJ'ai meilleure opinionde vous (me tous ceux qui ont a~i autrement. J'ai con-
fiance en vous; vous entendez volontiers ia voix scvcrc,mais amère, de la veritu.
M?!C<?, le ~'0~ <0/)/ ~O/y'C/~C~
</c~c/ e/ c~ ~c /« ~6 /~7~'c, ~c
~s~~ le /f~'?'< y~~ï~M~c les ?~o; ~'6~c-
~«/o~r toi et ~?/«/ ?/ï~ï<? ~6'u~ ~p
seveli sous /c< ?' avec ~c~/c. A~'z'e/s'~P ces )'< ?!Zde ~)~ &0?'/et < ~P M CP~~C~
.<c ce/< ?/~~7/c?'~<y~/ ~\<~s-
~C ~<~~?'~S?'<'6~<?r~(~.
Queserait d'ailleurs le bonheur de la terre que vous
nous faites espérer, ai vous pouviez réellement nous le
donner? Sentez-vousdans VOHcœurs, vous qui pouvez
DK LA UHEhTÉ DE PHNSËK.
jouir de tout, rc que ta terre a de joies? Voussuuvem~
vous des joies passées? Méritaient-elles les peines qu~vous vous êtes données pour en jouir? Valaiont-elles
l'amertume et le debout qui en ont suivi la jouissance? Htvoudriez-vousaUronter encore une ibis tous ces maux paramour pour nous? Oh croyex-ic.tous les biens que vous
pouvez nous donner, vos trésors, vos rubans, vos cordes
brillants, ou lu prospérité du commerce, la circulation de
l'argent, l'abondance des ressources de la vie,–tout cela,commejouissance, mérite la sueur des nobles, tout cela
mérite vos soins, mais ne mérite pus notre reconnais-
sance. C'est uniquement comme instruments de notre
activité,ou comme un but plus rapproche vers lequel nous
courons, que ces choses ont quoique valeur aux yeux d~
t'être raisonnable. Notre unique bonheur sur cette terre,
si toutefois c'est là du honneur, c'est une sponta-néité libre et sans obstacles, une activité émanant de notre
propre forceet poursuivant des fins qui lui sont propres,sous la condition du travail, do la peine, de l'cubrt.
Vousavez coutume do nous renvoyer aussi a un autre
monde, maisvous en laites ordinairement la récompense
des vertus passives de l'homme, do sa résignation.–Oui,nousélevons nos regards vers cet autre monde, qui n'est
pas aussi profondément sépare do celui-ci que vous le
croyez, vers ce monde ou nous avons dés ici-bas droit de
bourgeoisie,car nous en portons déj~ le titre grave dans
notrecœur, et nous ne voulons pas nous le laisser ravir
par vous. Là les fruits de notre M' non de notre
passivité, sont dés a présent mis en n'serve ils y mû-
rissent a un soleil plus doux que celui de ce climat. Per-
mettezque nous nous préparions ici a en jouir par un
travail assidu.
HMVKNDICATiUN3C
Vous n'avez dune, o princes! aucune espèce de <M'/
sur notre tit)ert< de penser, ni celui de décider ce (pu est
vrai ou taux, ni celui de dètcrmmer les objets (le notre
recherche ou d'en nxer ies limites, ni celui de nous em-
pêcher d'eu conummiquer ies résultats, vrais ou faux,
y/~ ou c~it~<' bon nous semble. Vous n'avez pas non
plus d'M~a l'égard de cette liberté; vosoldi~ationsse rapportent uniquement a des Uns terrestres, et non a
cette finsupra-terrestre (te la diuusion des hunieres. Vous
pouvez vous conduire a cet e~ard d'une manière toute
passive; ce soin ne vous regarde pas. '–Mais peut-êtreseriez-vous tentes de taire plus que vous n'y êtes obliges.Kh bien soyons ce uuc vous pouvez faire.
Vous êtes, il est vrai, ti princes! des personnes subli-
mes; vous êtes rccHctuenties représentants de'ia divinité,–non en vertu d'une suumuite inhérente a votre nature,
non couuuc renies charges de vciiicr au ~/<f~' de
i'tKtmanite, mais parce que vous avez la mission su-
bhme (le defcudrc les droits que Dieu lui a donnes, et
parce que cette mission place sur vos epautcs une fouie
de devoirs diiucucs et indispensables. Quenc plus grande
pensée que de se dire a soi-même Des millions d'hom-
mes se sont adresses il moi en me disant Vois, nous
sommesd'une race divine, elle sceau de notre origine est
marque sur notre front; /~<~ ne savons pas défendre
la dignité que ce ~ceaunous confère; nous ne savons pasdéfendre les droits que nous avons apportes en dot sur
cette terre; nous ne le savons pas, yio~ qui .so~~p~
des ~7/ noustes déposons donc entre tes mains:
qu'its te soient sacres en raison de leur origine, défends-
ies en notre nom,–sois notre protccteu. jusqu'àce quenou~ ret."unnons (tans ia maison de notre véritable père!
DR t.A LÏHEHTK D!: P!S)-:){. 37
Voftsdistribuez des fonctionset des dignités put)tiques,vousrépandez des trésors et (tes marques d'honneur, voussecoure t'indi~ettt et vousdonnez du pain au pauvre;–mais <cst un grossier mensonge de vous dire que ce sont!a des bienfaits. Vous ne pouvez pas être bienfaisants. La
fonction que vous donnez n'est pas un présent ({ue vousfaites c'est une partie de votre fardeau que vouschar~cxsur les cpautes df votre concitoyen, quand vous la con-
nex nu plus Ji~nc; c'est unvoittue vus faite) a la socicte
et au plus di~ne, (ptand vous le donnez a ceiui (pti t'est
moins. Les marques d'honneur que vous distribuez ce
n'est pas vous qui les distribuez ettes utaicut déjà décer-
nées Achacun par sa propre vertu, et vous n'êtes que tes
suhnmes interprètes de cette vertu auprès de ta société.
L'argent que vousdistribuez ne ~t jamais te votre c'est un
bien qui vous a été conue, un bien que la soci<t(''a déposeentre vos mains pour venir en aille a tous tes besoins,c'est-à-dire aux besoins de chaque individu. La société te
distribue par yos mains. Celui (fui a faim et à qui vous
donnez du pain en aurait si i'union xociatene l'avait pasforce te donner; la société lui rend, par votre inter-
médiaire, ce qui lui appartenau. Quand vous faisiez tout
ccta avec une sagesse toujours ctairvoyantc, avec une
conscience toujours incorruptible, que vous ne vous trom-
piezjamais, que vous ne vous égariez jamais, vous ne
faisiezque votre devoir.
Vous voulez faire ptus encure? Eb bien i vos conci-
toyens ne sont pas seulement des concitoyenspour vous
danst'Htat; ils le sont aussi dans le monde desesprits, ou
vousn'ave/ pas un rau~ ptus eteve qu'eux. Sous ce rap-
port, vousn'avez pas de prétentions a etr'vcr sur eux, ni
eux sur vous. Vous pouvez chercher ta vérité pour vous,
nHVENDïCAT!0!S38
ht garder pour vous, en jouir autant que votre capacitévous le permet ils n'ont, pas !e ptu~ petit mot a vous direta-dcssus. Vous ponvcx taisser leur recherche suivre fndehors (!f vous ]a route qui lui piait.sans vousen inqui~-t~r !o inoins (tu monde. Vous n'aven p~ besoin d'apjtti-'ju''t' au propos (tes hunicrcs !a pm~ancc-, i'innu~ncc,i'autorit~ que ia socictt'' a nusp entre vos mains; careu n'est pas pour ccta nn'cHc vous t'a donncc. Coquevous faitfs ici pst uniquement par honno volonté, c'estdu supernu de votro part; dan3 cette voi~ vous pouvezrppt!ement hicn niL'ritcr de !'huntanit6, envers taque!!evous n'avez d'aiitcurs que des devoirs indispensables.
Honorex et respectez pcrsonneUcmont ia v<rltô, et.re-
marquez ceci Nous savons hion que vou<;êtes nos
og-auxdans b monde dos esprits, et que !n vérité n'estpa? plus sanctifiée par h) respect dn plus puissant souve-rain que parl'homma~c du dcmicr homme du peuple:que ce n'est pas cHc d'aiUcurs, mais vous-mêmesque voushonorez par votre soumission; et pourtant nous sommes
parfois assez disposes, et beaucoup parmi nous le sont
toujours–a croire qu'une vcrit~ emprunte un nouveaulustre a redat de celui qui lui rend hommage. Hendezcette opinion tuile jusqu'à ce qu'eit~ disparais~faitescroire a vos penp!es qu'il y a encore quelque chose de
plus snhumc que voua, et. qu'it y a des lois nncorc p!usctevcus que !cs vôtres. Inclinez-vous putditp~ment aveceux devant ces lois, et ils (''prouveront pour ol!ea et pourvous un respect plus profond.
écoutez votontaircment la voix de la vérité que! qu'ensoit l'objet, et iaissfx-ta toujours s'approcher de votretroue, sans craindre qu'e!!e ne t'ccîipso. Voutez.vous vou~cacher d'ette.comtne les oiseaux de nuit fuient !a iumiero ?
DH LA UDKHTÉ DK PEKSEH.
(~'avez-vous a <~ncraindre s! votre cœur est pur? Soyezobéissants, si cite (h'*sapj)ronv~vosresotutiuns; r<'tirex
vos erreurs, si ehc vuus en convainc. Vous n'avez ri<~ a
ris(p)cr ici. Nous savions bit'n (~uevous <tie/ (.teshommes
mortels, c'est-à-dire <ptn vnus n'étiez pas infaiuiides;ce n'est pas votre aven qui nous rapprendra. Une tcHc
soumission ne vous déshonore pas; an contraire, phtsvous êtes pu~sams~ptus et!cvous honore. Voustournez
continuer de suivre vosmaxhncs; (pu pourrait vou.scn
empêcher? Yous pourriez rester injustes sciemment et de
propos délibère; qui oserait vous en blâmer tout haut, et
vous le reprocher en face? Maisvousprenez la libre réso-
lution– de vous honorer vous'memcs et d'agir juste-
ment; et par cotte soumission a la loi du droit, laquoitcvous fait tes égaux de vos derniers esctaves, vous vous
placezen même temps au rang des plus nohtcs esprits quisoient dans !c monde.
C'est a votre naissance que vous devez ta subtimito de
votre, rang terrestre et tous vos avantag'es extérieurs. Si
vous étiez nés dans la cabane du bercer, cette mémo main
qui aujourd'hui porte lesceptre porterait !a houtetto.Tou!
être raisounabtc honorera en vous, Acause de ce sceptre,la société que vous représentez, mais non pas vous en
Vt''rite.Savez-vous a qui s'adressent nos profondes r<v'
ronces, notre attitude respectueuse, notre humhh' ton ?
Aureprésentant de la société non pas Avous. Revêtez un
homme do paine do votre habiHemeut royat, ptaccz vott'c
sceptre dans !a main <!ece tTtanm'qum,asscycz-!csur votre
trône, et taissez-nous devant lui. Pensez.vous que nous
remarquerons i'abscncc de ce soumc invisible qu~ne (toit
émaner que de votre royale personne~ que notre échina
sera moins uexible, notre attitude moins respectueuse,
nHVÏ~DtCATION~0
nus paroles muins timides? Ne vous est-il donc jamais ar-rive de vous demander ce que vous devez a vous-mêmesde ce respect qu'un vous témoigne, et comment on voustraiterait si vous n'étiez qu'un de nous?
Vous ne l'apprendrez pas de vos courtisans. Pour peuqu'ils remarquent que cela vous fait plaisir, ils vous jure-ront que c'est uniquement vous et votre personne, et nonJe prince en vous, qu'ils aiment et honorent. Vous ne l'ap-prendriez même pas d'un sa{?e,si jamais un sa~-epouvaitvivredans l'atmosphère qu'on respire a la cour. Interpolpar vous, il repondraitau représentant de ta société, nona vous. L'avantage que nous avons parfois de voir notrevaleur personnelle dans la conduite de nos concitoyens anotre égard, cummc dans un miroir,–cet avantagen'estaccorde qu'aux personnes privées on n'estime tout hautles rois a leur véritable valeur que quand ils sontmorts.
Si donc vous voulezune réponse A cette question, quimérite bien qu'on y réponde, c'est a vous-mêmes qu'illa faut demander. Vosconcitoyens vous estiment presqueau même dc~rc que vous te feriez vous-mêmes si vousvous examiniez, non pas a travers le prisme de votre
amour-propre, mais dans le pur miroir de votre con-science. Voulez-vous donc savoir si, clans!c cas ou la cou-ronne et le sceptre vous seraient enlevés, celui qui chante
aujourd'hui des hymnes en votre honneur ne compose-rait pas des satires contre vous; si ceux qui maintenantvous funt place avec respect ne se précipiteraient pas survos pas pour vous insulter; si l'on ne rirait pas de vous le
premierjour, si l'on ne vous mépriserait pas froidement le
second, et si le troisième on n'oublierait pas votre exis-
tence, ou bien si l'on honorerait encore en vous l'homme,
HKL\ LinEHTKDHPE~S! Al
qui pour être ~rand n'avait pas besoin d'être roi in-
terrogez-vous vous-nternes. Si vous ne voulez pas ia pre-mière de ceschoses, mais ta dernière si vous voûtezquenous vous ttonorions pour vous-tnemcs, il iau! que vous
soyez honorabtes. Or rien ne rend i'houune honorahte,
que sa libre soumission a ia v~'itc û! au (!roit.
Vous n'avez pas le droit <!odétruire ccnc lihrc soumis-
sion mais itvous est pennisuc tu favoriser,–et vous no
le pouvez, pour ainsi '!irc, que par l'iut<)'etque vous ymontrez vous-m~ncs, par t'obuissitnccaveciaquc!!cvousen
écoutez les rcsu!tats. Quant aux marques d'honneur que
vous pourriez accorder:'t ceux qui aiment ta v/'ritc et quila citcrchcnt, i)s ~n ont rarcïncnt besoin pour les
autres, ils n'en ont jamais hesoin pour ~nx-n~mcs.
Leur gloire ne dépend pas de vos signatures et de vos
sceaux elle réside d~nsle ca;nr de leurs contemporains,
qu'ils ont ~ctaires; dans le !ivrc de la postérité, qui a!!n-
mera son flambeau a leur tampc; clans le monde spiri-
tue!, oit tes titres que vous donnez n'ont aucune valeur.
Les récompenses, mais que dis-je, les récompenses?–les dedommag'emcntsqu'on !eur utn'e pour le temps qu'ilsont perdu au service des auh'cs sont hicntnin d'acquitterles obtig-ationsque !a societt'' a conh-actL'esenvers eux.
Ils trouvent en eux-mêmes de p!))Shautes récompenses
jevenx dire une plus libre activité, et un phts ~rand déve-
loppement de leur esprit, ~csr~ompcnscs-ia, ils n'ont
pas besoin de nous pour se les procurer. Pour tes autres
dedomma~cm<'nts, ayez soin de les leur onrir (te telle
sorte qu'its ne tes déshonorent pas, maisvous honorent.;onrcx-Ics-Iuur comme des hommes libres il des hommes
libres, si bien qu'Us puissent aussi les refuser. Ne les leur
donnez jamais pour les acheter; vous n'achèteriez pas
REVENDICATION
alors des serviteurs de la vérité ceux-ci ne sont jamaisa vendre.
Dirigez tes rochcrchcs de l'esprit d'investigation versles besoins les plus actuels et tes plus passants do l'hu-
manité; maisdirigez-les d'une main douccct sage, nonen souverains, mais en libres collaborateurs, non en des<
potes des esprits, mais en bons associés. La contrainte est
iatate a la vérité; cette-ci ne pf~ t!eurir que dann !aHhrcatmo~pherp de sa patrie, te inonde des esprits.
Et surtout,– apprenez ennn connattrc vos v~'itabtcs
ennemis, ceux qui seuls se rendent, coupables envers vousrie tese-majeste, ceux qui seuls portent aUcinte a vos
droits sacr~ et a votre personne. Ce sont ceux qui vous
conseillent de laisser vos peuples dans l'aveu~ctnont et
l'ignorance, de répandre parmi eux de nouvelles erreurs,
d'entretenir soigneusement les anciennes, d'empêcher otde défendre la libre recherche en tout g'enro. Ils tiennentvos royaumespour des royaumes do ténèbres, qui ne peu-vent absolument subsister a la lumière, ils croient que vos
droits ne peuvent s'exercer que dans les ombres de la nuit,et que vous ne sauriez gouverner que des aveugles et
des sourds. Celui qui conseille a un prince d'empêcher,dans son peuple, le probes des lumières, lui dit en face
« Tos prétentions sont de tetle nature, qu'elles révoltent
la raison de tous les hommes il faut que tu lY'tontles;tes principes et tes actes ne souffrent pas la lumicre ne
permets pas a tes sujets de s'éclairer, si tu ne veux pas
qu'ils te maudissent; tes facultés intellectuelles sont fai-
bles ne permets pas a ton peuple de s'instruire, si tu ne
veux pas qu'il te méprise. Les ténèbres et !a nuit, voila
ton élément: il faut que tu cherches a les répandre au-
tour de toi le jour te forcerait Afuir. ?
DM LA LIBERTÉ DE PENSEH. A3
!t n'y a que ceux qui ont une vraie confianceen vouset
une vraie estime pour vous, qui vous consentent de ré-
pandre ics mmieres autour de vous. Ils tiennent vosdroits
pour teitement fondus, qu'aucune lumière ne ocut !eur
mure vus(k's~ctuspour tclieutent ho!ts, qu'ils ne peuvent
que ~ner au ~raud jour; votre cceur pour îeuemcnt
noble, que vous-mêmesvous sauriez voir vos iautesa cotte
tumicre,et({uc voussouhaiteriez même de tesvoir fuindetes pouvoir corriger. Ils exigent de vous que, comme la
Divinité, vous habitiez dans la lumière, atm d'engager tous
les hommes a vous honorer et a vous aimer. l~coutez-tes
seulement, et ils vous distribueront tours conseil sans
demander ni louante ni salaire.
CONSiDKRATiONS
DEST~EES A ÏŒCTIFIER LES JUGEMENTS !)U PUHLÏH
SUttt.A
RÉVOLUTIONFRANÇAISE,')
t~ËtACE
LaRévolutionfrançaiseintéresse, ce me semble, l'hu-manité tout etttn''re.Je ne parte pas des conséquences
politiquesqu'elle a eues pour la France aussi bienque
pour les Ët:Usvoisins, et qu'elle n'aurait peut-être pasproduites si ces derniers ne s'en étaient mctés de leur
propre chefet n'avaient eu en eux-mêmesuneconnance
irrcnuchic.Tout cela estbeaucoupen soi, maisn'est rienau prixdequelquechosed'incomparablementplus impor-tant.
Tant que les hommesne seront pas pluss~geset plusjustes, tous leurs cn'orts pour se rendre heureux serontinutiles.Ils ne sortiront des cachots du despotismequepours'entre-tuer aveclesdébrisde leurs chaines.Maisils
seraient tropAplaindre si leur propre matheurou si lemalheurd'autrui, les avertissantà temps, nepouvait lesramenerenfinà la sagesseet a la justice.
Aussitousles événementsde ce mondemeparaissent-ils des taMeauxinstructifs, que le grand Instituteur del'humanité exposedevantelle, afin qu'elle yapprenne ce
qu'ellen besoinde savoir. Nonqu'cHel'apprenne r/'c~:nousne trouveronsjamais dans l'histoire du mondequece que nousy auronsmisd'abordnous-mêmes mais,en
s'appliquanta juger les événementsréels, clle tire plusaisémentd'eUe-mémelestrésorsqu'elle recèle.C'est ainsi
queJlaRévolutionfrançaiseme sembleêtre un riche ta-
CONSïDÉnA'HUNSA8bleau sur ce ~rand texte les droits de l'iiomme et ladignité de l'Jtommc.
Mats!c but n'est certainement pas qu'un petit nombred'élus sachent, ce qui nh'-rite d'être su, et que, dans cepetit nombre, un plus petit, nombre encore rissent enconséquence. La science des devoirs, des droits et de tadestinée de l'homme au delà (tutombeaun'est pas le pri-vilège exclusif de l'école le temps viendra ou tes gar-diennes de nos enfants tour apprendront a par!eren leurinculquant (tes idées justes et précises sur les dcu.\ prc-nners points; ou les mots devoir et droit seront les pre-miers qu'elles tes exerceront a prononcer, et oit cette ter-rible parole a Cela est. injuste, sera le seul châtimentqu'eltes leur appliqueront. Que i'ecotc se contente doncde garder avec honneur !cs armes dont cUca besoin pourdéfendre ce bien commun de l'humanité contre tous lessophismes ultérieurs, qui ne s'eievcnt que dans son seinet qu'eUe seutepourrait répandre an dehors; mais que lesrésultats mêmes soient communs, comme l'air et la lu-mière. Ce n'est qu'en propageant ces résultats, ou plutôten écartant les tristes préjuges (pli les ont jusqu'ici em-pêchés de se développer dans les âmes, que ses propresconnaissances deviendront vraiment claires, vivantes ettccondcs. Tant que vous parlex de ces choses dans vosécoles avec des ~cns du métier et suivant la forme pres-crite, cette forme vous lait illusion aux un~et aux autres;une fois que vous êtes d'accord Ia-dcssus,vons vous adres~sez réciproquement des questions auxquelles il vous se-rait diHicilede donner une réponse claire. Maisintrodui-sez dans vos entretiens sur la conscience, sur le juste et
l'injuste, une mère éprouvée par les douleurs de l'enfan-tement et accouturnée a l'éducation des enfants, un gucr-
St'R L.\ !CLUT!ON FHANÇ.USH. /t9
4
rier blanchi au milieu des dangers, un di~ne campagnard,et vos idées gagneront en clarté, en môme temps quevous éclah'cirey. les leurs. Mais ce n'est pas encore là le
plus important. A quoi bon ces lumières, si elles ne
pénètrent pas en générât dans ta vie? Kt comment peu-vent-elles y pénétrer, si elles restent étrangères a la plusgrande partie des hommes? Les choses ne peuvent de-meurer comme elles sont actuellement; j'en ai pourgarant cette étincelle divine qui brille en notre cœur, et
qui nous reporte vers un être souverainement, juste etsouverainement puissant. Attendrons-nous pour bâtir quenos cabanes aient été emportées par le torrent déborde?Voulons-nous faire des leçons sur la justice A de farou~ches esclaves, au milieu du san~ et des cadavres?!! est
temps de (aire connaître au peuple la liberté il la trou-vera des qu'il saura ce qu'elle est, et de cette manière iln'embrassera pas la licence au lieu d'eue, et ne reculera
pas de moitié en nous emportant avec lui. Il n'y a pas de
moyen capable de détendre le despotisme; peut-être enest-ilquelqu'un pour persuader au despote de s'affranchirde sa longue misère, car en nous faisant du mal il serend encore plus malheureux que nous, de descendrevers nous et de devenir le premier entre des égaux. Entous cas, il y a un très sur moyen d'empêcher les revo*lutions violentes, mais il n'y en a qu'un c'est d'instruiresolidement le peuple de ses droits et de ses devoirs. LaRévolution française nous fournit a cet cgard des indica<tions et des couleurs propres A rendre le tableau écla-tant pour les yeux les plus faibles; une autre révolution,incomparablement phts importante que je n'ai pasbesoin ici de désigner autrement, nous en a fourni lamatière.
CONSIDÉHATtONS50
Les signes (lu temps ne sont pas en général restés ina-
perçus. Certaines cttost'ssont devenues la conversation du
jour; auxqueUe~on ne songeait pasauparavant. Desetttre-
tiens sur les droits de l'homme, sur la lilterté et l'égalité,sur la sainteté des contrats, sur !a religion du semant,
sut' les loadements et les limites des droits d'un monar-
que, viennent quelquefois, dans des cercles brillants ou
obscurs, détourner la conversation des modes nouvelles
et des vieilles aventures. On commence a s'instruire.
Maisle tahieau que nous avons devant les yeux ne sert
pas sculonent a notre instruction il nousdonne aussi
l'occasion (le sonder exactement les esprits et les ccaurs.
D'une part, l'antipathie pour toute indépendance de la
pensée, le sommeil de t'esprit et son impuissance suivre
même une courte série de raisonnements, les préjuges et
les contradictions (lui se sont répandus sur tous nos frag-
ments d'opinions;–d'autre part, les enorts de certaines
gens pour qu'on ne dérange rien a leur douée existence,
Fc~oïsme paresseux ou insoicnt, ta peur de la vérité ou la
persistance à fermer les yeux quand sa lumière nous con-
trarie –tous ces vices ne se revêtent jamais plos mani-
festement que quand it est question de ces objets si lumi-
neux et d'une portée si générale les droits de l'homme
et les devoirs de l'homme.
Contre te dernier de ces maux, il n'y a point de remède.
Celui qui craint la vérité comme son ennemie, celui-là
saura toujours la tenir a distance. Elle a beau le suivre
dans tous les coins et recoins ou il se. cache, il trouvera
toujours un nouvel abri danë le fond de son cœur. Qui-
conque a besoin d'une dot pour épouser la beauté céleste,
n'est pas digne d'elle. Si nous cherchons a faire entrer
un certain principe dans ton esprit, ce n'est pas du tout
SL'H LA HÉVOt.UTtON !H.\NÇA!Sf': 61
parce qu'il est.le principe mais parce (fu'it est vrai; si le
contraire (~tait vrai, noust'iuculquerions le contraire',parce
qu'il serait vrai, et sans nous pi't'ot'cupcr ()esa nature ou
de ses conséquences. Tant que tu ne te tonneras pas acet amour de ta vérité pour elle-même, tu no nous seras
Iton a rien; car cet amour est ta première préparationcelui de ta justice pour dtc-mcmc; il t'st !c prunier p:~vers inpureto du caractère uc to vantu pas de la possédertant que tu n'ns pas tait ce pas.
Contre le prenne!' tn.djc veux dire contre ics préjugeset l'inertie de l'esprit, n y a un moyen t'instruction et
t'aide d'un ami.. Je voudrais être cet ami pour celui qnien aurait besoin et.n'en trouverait pas de meilleur sous la
main. Tel est te motif qui m'atait écrire ces feuilles.
J'ai indiquesoit dans l'introduction, soit dans le second
chapitre, le plan de mon travail. Ce premier volume ne
devait être qu'un essai, et c'est pourquoi j'ai dépose in
plume après avoir écrit la moitié du premier livre. JI
dépend du public que je lu reprenne, ne t'ùt-ce que pour
achever ce premier livre. Knattendant, la nation Iran'
C:usepourrait bien nous fournir une plue riche matière
pour le second, qui doit nxer les principes nécessaires a
l'appréciation de la sagesse de sa constitution.
Si ces fcuitics viennent a tourner entre les mains de
vrais savants, ils verront très aisément sur quels tonde"
mcntsje me suis appuyé; pourquoi, au lieu d'adopterune mcthode strictement systématique, j'ai conduit mus
pensées suivant un fil plus populaire; pourquoi je n'ai
jamaisdétermine les principes avec plus de précision quene ~exigeait le besoin du moment; pourquoi j'ai laisséea
<'t la d~ns le style plus d'ornement et de t'enqu'il n'ctitit.
peut-être nécessaire et ils comprendront qu'une apprf'
53 cû~!nf:n\Tto~· · Il 8'- 1 » J_
ciatiuu véritablementphitosophique
de ce travail ne
sera guère possible que quand le premierlivre sera ter-
mine.
Quant aux lecteurs ignorants ou a moitié savants, j'ai
encore quelques remarques extrêmement importantes
taire /« c~'co~~c~i avec laquelle cna doit !y </e
ce livre (1).
Si, après tout ce que j'ai dit jusqu'ici, j'assurais encore
A meslecteurs que je tiens pour vrai ce que j'ai écrit, je
ne mériterais plus d'être cru. J'ai écrit avec le ton de la
certitude, parce que c'est fausseté que de faire comme si
l'on doutait quand on ne doute pas. J'ai mûrementrene-
chi sur tout ce que j'ai écrit, et c'est pourquoi j'ai des
raisons pour ne pas douter. Or il suit bien de !a queje ne
parle pas sans renexion et que je ne mens pas; mais il ne
s'ensuit pas que je ne ~<? /?e point. J'ignore si je me
trompe ou non; tout ce (meje sais, c'est que je ~o~'<~
ne pas tnc tromper. Mais quand je me serais trompe, cela
ne ferait rien a monlecteur; car je ne voudrais pas qu'il
acceptât mes assertions sur maparo!e, maisqu'ii renéchît
avec moi sur les choses dont je lui parie. Fusse-je assuré
que mon manuscrit contrnt lavérité la plus pure et la plusclairement exposée, je lc jetterais au feu si je savais
qu'aucun lecteur ne dut se convaincre de cette vérité parsa propre renexion. Ce (lui serait vérité ~o~'MO!, parce
que je m'en serais convaincu, ne devrait être pour lui
qu'opinion, itmsion, préjuge, tant qu'i! n'en aurait pasencore jugé par lui-même. Un Ëvan~ite divin même
n'est vrai que pour celui qui s'est convaincu de sa vé-
rité. Or, quand mes erreurs ne seraient pour le lecteur
(1) Je demande instamment qu'on ne n''gHgc pas ces rfmarq)~.
sm!.AnKVOH;'nuNm.~c.ust' 53qu'une occasion de découvrir lui-même la pure vente et,
de me la communiquer, il serait et je m'estimerais moi-
même assez recompense. Quand elles n'auraient même
pascet avantage, si seulement elles l'exerçaient a penser
par mi-même, !e pront serait déjà assez ~rand. En gêne-
ra!, un écrivain qui connatt et aime son devoir a pour but.
d'amener le lecteur, non pas a croire a ses opinions, mais
seulement a les examiner. Tout notre enseignement doit
tendre à réveiller l'indépendancede la pensée; autrement
nous faisons un dangereux présent a l'humanité en lui
oiu'ant le plus beau de nos dons. Que chacun ju~c donc
par lui-même s'il se trompe, peut-être en commun avec
moi, j'en suis fâche seulement qu'il ne dise pas que jel'ai trompe, mais qu'il s'est trompe lui-même. Je n'ai
vouludispenser personne de ce travail de penser par soi-
même un écrivain doit penser f/cu~ ses lecteurs, mais
non/MM?'eux.
Donc, quand même je me serais trompe, le lecteur n'est
pas du tout oblige de se tromper avec moi; mais je dois
aussil'avertir de ne pas me iaire dire plus que je ne dis
réellement. Il trouvera dans le cours de ce livre des pro-
positionsqui seront plus tard mieuxprécisées comme le
livren'est pas uni et qu'il y manque encore d'importants
chapitres, le lecteur peut bien attendre que les principes
qui y sont déjà poses soient détermines d'une manière
plus précise encore par leurs applications ultérieures;
jusque-là je le priede s'exercer lui-même, s'il le veut bien,
par l'essai de ces applications.
Maisoui! se tromperaitleplus grossièrement,ce serait s'ilvoulaitse hâter d'appliquer ces principes a sa conduite en-
versles États actuellement existants. Que la constitution de
la plupart de ces États ne soit pas seulement extrêmement
t)/t CO~StUÉHATiDNS
défectueuse, mais encore extrêmement injuste, et qu'ette
porte aitomtu ildes droits inaliénables dont l'itummene doit
passe laisserdopoui!!er, c'est sans doute ce dont je suis in-
timement convaincu, et. ce dont j'ai travaille et.travaillerai
Aconvainc: paiement te lecteur. Mais il n'y a pour te
momf'nt qu'une clfiosea taire leur égard accordons-leur
en (ptc nous ne devons pas nous laisser prendre de force,
bien convaincus qu'en ceta Us ne savent pas cux-mcmos
ce qu'ils font; mais en même temps travaillons acquerh'd'ah')r(t !a connaissance et ensuite l'amour de !a justice,
et a h's répandre tous deux autour de nous aussi loin qno
ponts'eten<h'enotre ccrctc d'action. La dignité de la tibcrte
doit s'eteverdc bas en haut; mais t'atTranchissement ne
peut venir sansdesordre que de haut en bas.
« Quand même nous nous rendrions dignes de la liberté,
tes monarques ne nous permettraient pas d'être tibrcs. a
Ne crois pas cela, 6 lecteur! L'humanité est restée jus-
qu'ici fort en arrière pour tout ce qui lui est nécessaire;
mfus, si je ne me tais pas tout a fait iiiusion, le moment
est venu ou t'aurorc va parattrc, et te grand jour la suivra
en son tenq)s. Tes sages ne sont en gênerai que les aveu-
glesconducteurs d'un peuple plus avcug'tcencore; tes pas-teurs en sauraient-Hsdavantage ? eux qui, pour !a plupart,sont ctevcs dans i'oisivctc et dans i'ignorancc, ou qui, s'ils
apprennent quelque chose, n'apprennent qu'une vérité
arrange tout exprés pour eux; eux qui, comme on sait,
ne travai!tcnt plus a leur propre culture, dos qu'ils ont
commence a gouverner, qui ne lisent aucun écrit nouveau,
si ce n'est tout au plus quetquos pages bien sophistiquéeset bien dctayccs, et qui sont toujours en retard sur leur
siècle, au moins de toutes les années de leur re~ne. Tu
penses bien qu'après avoir si~né leurs ordres contre la
~H LAtŒVULUTH)~H<ANÇ.USK. 55
liberté de penser, et livre dus combats un tant d'hommes
sesont entretues, il ne leur reste plns(pt'à s'en aller durmir
tranquillement, en se disant qu'Us un! vécu un vrai jour
t)csouverain, un jour agréable à Dieu et aux hommes. H
nu sert à rien de parler; car (pu pourrait crier assez haut
pour frapper leur oreille et pénétrer jusqu'à leurcceur
on passant par leur intelligence? Il n'y a que l'action quiserve. Soyezjustes, ô peuples! et vusprinces ne pourront
pas persévérer tout seuls dans l'injustice.Encore une remarque générale, et je laisse le lecteur a
ses propres réflexions!–Une lui importe pas de çon-
naitrc mon nom; caril ne s'agit pasici d'apprecierla véra-
cité d'un témoin, maisde savoir si les principes, qu'il doit
examiner lui-même, ont ou non quelque valeur. Maisil
était très important pour moi de songer, en composantcet écrit, a mon siècle et à la postérité. Ma re~tc comme
écrivain est ceUc-ci N'écris rien dont tu aurais a rougira tes propres yeux.l'~t l'épreuveque je m'impose a cet e~ardestdans cette question: Pourrais-tu vouloir que ton siècle
et, s'il était possible, toute la postérité, eussent que c'est
toi qui as écrit cela? J'ai soumis !c présent écrit a cette
épreuve,et il l'a trcshie~ supportée.c puis m'être tromp<
Dèsque j'y découvrirai des erreurs, ou qu'un autre m'en
montrera, je m'empresserai de les retracter; carii n'y a
pas de déshonneur a se tromper. Je me suis sérieusement
attaquea l'undes sophistes de l'Allemagne cela ne désho-
nore pas, cela honore celui (pu n'aime pas la vérité ahnc
sonennemi, il sera le premier auquel je me nommerai,
s'il a quelque raison de l'exiger. Défendre une erreur quel'on tient pour une erreur, en embrouillant artificieusc-
tnent les questions,en recourant a d'insidieux stratagèmes,
cilmettant de cote, s'il le faut, tout principe de moralité;
CONStDÉHATtOKSSLH LA !ŒOLUTIU?< FKANÇAtSH60
fouler aux pieds la morale et ses fruits les plus saints, la
religion et la liberté de l'homme, voil.~ce qui est désho-
norant, et voila ce que je n'ai point fait. Moncœur ne medéfend donc pas de me nommer. Mais,dans un temps oùun savant ne rougit pas, en examinant l'ouvrage d'unautre savant, de l'accuser de haute trahison, et où il pour-rait bien yavoir des princesqui accueillissentune pareilleaccusation, le lecteur comprendra que la prudence com-mande l'anonyme a quiconque est jaloux de son repos.Pourtant je prends a l'égard du public l'engagement d'hon-
neur, que j'ai pris avec moi-même, de me faire connaitrccomme l'auteur de cet écrit, soit dans le cours même dema vie, soit aprèsma mort. Les rares personnes qui pour-raient me rcconnaitre d'une manière ou d'une autre, ver-ront trop bien que rien dansces feuillesne lesautorise a ne
pas respecter les motils qui m'ont fait garder l'incognitoet qui leur sont inconnus.
L'AUTEUR.
INTRODUCTION
D'At'HHSQUELSPtUKCtPËSFAUT-ILJUGERLESREVOLUTIONS~
Ce y est arrive est chose de savoir, non de juge-ment. Sans doute, même pour découvrir et discerner cette
vérité purement historique, nous avons grand besoin du
jugement; nousen avons besoin, pour apprécier soit
lapossibilité ou l'impossibilité physiquesdes chosesmêmes
qui nous sont données comme des faits, soit la bonne foi
ou la capacité des témoins qui en déposent; maisdés quecette vente est une ibis établie, et que nous nous en som-
mes convaincus, le jugement a fait son oeuvre,et nous la
confionsà notre mémoire comme un bien désormais clair
et assuré.
Maisautre chose est cette appréciation de ta crédibilité
d'un fait, autre chose l'appréciation du fait lui-même,
la réflexion dont il est l'objet. Danscette seconde espècede jugement, l'esprit rapproche d'une certaine loi le lait
donné et déjà reconnu vrai pour d'autres raisons, afin de
justifier soit le faitpar son accord avec la loi, soit la loi
par son accord avec le fait. Dansle premier cas, il faut quela loi, qui sert d'épreuve au fait, soit antérieure à ce fait
et qu'on lui reconnaisse une valeur absolue, lavaleur
d'une loi sur laquelle le fait doive se régler, car elle ne
tire pas sa valeur de l'événement, mais c'est l'événement
qui lui emprunte la sienne. Dans le dernier cas, on trouve
<:)~S)UK)tA'i'K~So8
Ia!t'iette-meme,(msonptusoumoinsde~enera!ite,enla comparant avec te fait.
Hien nu jette plus de confusion dans nos jugements, (~
ne n<ms empêche davantage de nous entendre nous-
mêmes et de nous faire enten<)redes autres, <jue (te ne~li-
~er cetteimportante distinction; que de vouloir jn~'er
sans savon' proprement a quel point devupnons jugeons;
que d'en appeter, an sujet de certains faits, a des lois, a
des vérités ~enrrates, sans saY"ir si nons cuntrotons te fait
par la toi, on ta loi par te fait, si nous employons t'eqncrrc
on ic ni a ptomh.
Tene est la source la pins fécondede tous ces soptnsmcsinsipides où s'égarent a chaque instant non-seulement nosbeaux niessieurs et nos heitcs dames, mais encore nosécrivains les plus vantés, quand ilsjugent ce grand drame
que la France nous a donne de nos jours.
Lorsque pour nous rapprocher de notre objet il
s'agit d'apprécier une revointion, il n'y a que deux ques-tions possiides, rnne sur sa /e, l'autre sur sa
~p. Dansta première, on peut demander, on bien en
générai si un peuple a le droit de changer à son gr~ sa
constitution, ou bien en particniier s'il a le droit de leiaire d'une certaine manière déterminée, Al'aide de cer-taines personnes, avec certains moyens, suivant certains
principes. La seconde question revient à cciïe.ci Les
moyens adoptés pour atteindre le but que l'on se proposesont-ils !es mciueurs? ou, pour la poser comme ie veut
l'équité, étaient-ce les meilleurs ~a~ <~<WM~M~~o~c~ ?
D'après quels principes aurons-nous à juger ces ques-tions? Aquelles lois rapporterons-nous les faits? Ades lois
que nous tirerons de ces faits, uusinon de ces laits mêmes,
sm ).\HHV«t.rt'tUN t-HAK'tSK 59
du moins de faitsd'expérience en générât, ou Ineu a des
lois éternelles, qui n'en auraient pas eu moins de valeur
quand il n'y aurait en absolument aucune expérience, ou
qui n'en conserveraient pas moins !a même videur quand
toute expérience viendrait a disp:)rattre? Dirons-nous Ce
qui est arrive te plus souvent est juste; et déterminerons-
nous le bien mond d'après ta majorité des actc~ c~mme
on détermine dans tes concites ms dogmes ec't'iesiai:tiqucs
d'après !a majoritédes veix? Dirons-nous: (!e qui réussit est
sa~e?Oubien, réunissant tesdeux questions, p!acerons-nous
dans te succès la pierre de touche de ta justice et de la
sagesse,et attendrons-nous l'événement, pour appt'tcr un
brigand héros uu meurtrier, et Socratc un tnatfaiteur ou
un vertueux philosophe?Je sais que beaucoup doutent qu'it y ait en ~encrai des
lois éternelles de la vérité et du droit, et n'admettent
d'autre vérité que cette (lui est déterminée paria majorité
desvoix, d'autre bien moral que celui qui résulte du cha-
touillement plus ou moins vil des nerfs. Jo sais qu'ils ab-
diquent ainsi leur spiritualité et teur nature raisonnable,
et qu'ils se transforment en animaux que l'impressionextérieure détermine irrésistiblement au moyen des sens,
en machines que meut fatalement l'engrenage d'une roue
sur une autre, en arbres on la circulation et la distilla-
tion des sucs produit lu fruit de la pensée; je sais que,
par cette assertion, ils se réduisent immédiatement eux-
mêmes à la condition de toutes ces choses, pour peu que
leur machine à penser soit bien reliée. Il n'entra pasdans
mon dessein de prendre ici contre eux-mêmes !a défense
dû leur humanité, et du leur prouver qu'ils ne sont pas
des animaux privés de raison mais de purs esprits. Si
l'horloge doleur esprit vabien, ils ne sauraient comprendre
CU~StUHh.Vi'K~Sco
nos questions, et prendre part a nosrecherches. Comments'elevcraient-ils aux idées de la sagesse ou (tu droit?
Maisj'en vois d'autres qui, tout en défendant expres-sément ces lois primitives (tu monde des esprits, ou du.moins en les acceptant tacitement lorsqu'ils n'ont pasencore pousse ieurs recherches jusqu'à cette extrême li-mite, et tout eh construisant sur des Ibndements que leurfournissent ces principes, se sont dej:'t décides en faveurd'un jugement qui se règle sur les lois de l'expérience. !!sont pour eux le public instruit, (mi voudrait Lien fairevaloir sa connaissance des choses, cette connaissance quilui tient si fort a cœur, Usont le public dissipe et super-ficiel, qui redoute tout travail d'esprit, et veut voir,entendre et toucher tout avec ses yeux, ses oreilles et ses
mains; ils ont les classes favorisées, qui attendent de l'ex-périence passée un jugement avantageux;–ils ont toutde leur cote, et il semble qu'il ne reste plus de phce pourl'opinion contraire. -Je voudrais être lu, je voudrais trou-ver accès clans l'âme du lecteur. Quedois-je faire? Essayersi je ne trouverai pas quelque moyen de me concilier lafoule.
La question de savoir si un peuple a le droit de changersa constitution, –ou cette question plus particulière, s'ila le droit de le faire d'une certaine façon, doit donc, ales entendre, être résolue aumoyen de l'expérience, et c'estréellement au moyende l'expérience qu'on en cherche lasolution.Dans la plupart des réponses qu'on a faites aces
questions et que l'on y fait encorechaque jour, on a, encfïet, suivi des principes d'expérience, c'est-à-dire ici,pour
<R t. !ŒYÔH"r!ONFn.~C.USK 6t
prendre ce mot dans son sens te plus général, ~o~o~~o/~ <y~c?tM/~~f/«'< 6< /<*~c~/~<~w/yc ~o~
~P; ~~M/<'S~WC~ ~~J'6'C~M ~C
~<~c, ~M/y~c ~M~/csc~Ct'?'/MMc/6'~c~ <y~'<f~.t'e/~ y~/?'e </<' /?'6'<<?~ et ces
princtpes ont sur ces solutions une influence qui s'exerce
de deux manières, ou ~o/w~Me~, ou ~o/o/c-
et Muccc~/Mc~~c<
Les principes d'expérience ont sur !cs jugements quenous portons une inuuence dont nous n'avons pas con-
science, parce que nous ne Jes tenons pas pour des prin-
cipesd'expérience, pour des propositions que nous avons
admises sur la foi de nos sens, mais pour des principes
purement spirituels ctetcrncHcment vrais.–La seule au-
torite' de nos pères ou de nos maitres nous tait admettre
sans preuve, comme principes, certaines propositions quin'en sont pas et qui ne sont vraies qu'autant qu'ettes peu-vent être dérivées de principes encore plus e!evcs. En
entrant dans le monde, nous retrouvons nos prétendus
principes chez tous les hommesavec lesquelsnous sommes
en rapport, parce qu'eux aussi les ont admis sur la foi de
leurs parents et de leurs maîtres. Personne ne les contre-
disant, nousne nousapercevons pas de ce qui leur manquedu côte de la certitude, et nous ne sentons pas le besoin
de les remettre l'examen notre ibi en l'autorité de nos
maîtres est complétée par ccMcqui s'attache au consente-
ment gênerai. Nous les trouvons partout connrmcs par
l'expérience~ et cela précisément parce que chacun les
tient pour des loisgénérales, et règle sur eux sa conduite.
Nous en faisons nous-mêmes la règle de nos actes et
de nos jugements, et a chaque nouvelle application ils
s'unissent plus inumf'ment a nntre moi, et unissent
CONStDHHATïONS02
par s'y incorporer, a tel point qn'ds ne disparaîtraient
qu'avec iui.
Tet!e est foraine du systèmegénérât de t'opinion popu-iairc, dont on nous donne ordinairement les résumaispourdes sentences dn sens commun; mais ce sens commun ta
a ses modes tout aussi inen ({ne nus n'a~ et nos frisures.
–il y a vin~t ans nous tenions pour malsains les eon-
('omtn'esnonpt'cssm'<s, illlyllll'll'lltllcesont ies concombres
pressures que nous tenons pour mu!sains; et cela par les
tnemes raisons (pu ibnt (pt'aujoun!'hui encore ta plupartd'entre nous pensent (ju'un homme peut être le ~<<'
d'un autre homme, qu'un citoyen peut, par le iaitdesa
naissance, a certains privite~es (pte n'ont passes concitoyens, <prun prince est destine n iaire ie
de ses sujets.
Essayez un peu, –je vous ie demande n vous tous quijoignez a la profon(!eur de Kant ia méthode popuhure de
Socratc,–essayez de déraciner la prcnnere propositionde l'esprit incuite d'un propriétaire d'esclaves, ou ia se-conde de celui (l'un ancien noble ignorant; prcssex-iede questions, de questions faciles a entendre même pourun entant. JIcomprend vosprémisses, il vous les accordetoutes avec une entière conviction;–tirez a présentla conclusion redoutée, et vous admirerez comment cet
homme, jusque-ta si clairvoyant, est devenutout à coup siabsolument avenuequ'il ne peut p!ussaisir ie lien si ciairde votre conséquence avec votre majeure. C'est qu'aussivotre conséquence est reeUemcnt en contradiction avec6w<simple bon sens.
Or ces propositions,-qu'eues soient ou non exactessoi, c'est-à-dire qu'eues se déduisent des principes aux-
quels on les ramené, ou qu'eues leur soient contraires,
SL'H !.A !ŒVCLUT!ON FHANC.USK. (~
ces proposions sont, (tu ununs pour celui qui tes a
admisessur !a fui de ses maures, de ses concitoyens ou
de son expérience, de simph's principes d'expérience, et
tous !cs jugementsqu'H y fonde sont desjugements d'ex-
périence. J'indiquerai, dans le cours de ce trayait, plu-sieurs préjuges potititpu's (te ceuu espèce, ~~y~< du
moins pour celui qui ne tes a pas examines ~c~'c-
w~, et je chercherai jusqu'à quet point ils s(mt exacts.
Tene est l'inuucnce que la sensihinte, cet instrument
de l'expérience, exerce a notre insu sur notre <~e;
dans les jugements tient il s'unit ici. KHeen exerce
une autre non moins inaperçue et tout aussi puissante sur
notre t~/M~, et par ia sur notre ju~emcnt~au moyen dusentiment obscur de notre intérêt.
Notre jugement dépend très souvent de i'im pulsionde
nospenchants, et cela est vrai slirtout en matière de droit.
Les mêmes injustices nous semblent beaucoup plus dures
quand elles ~o:~ frappent quequand elles frappent autrui.
Oui, notre penchant fausse souvent notre jugement a un
degré beaucoup p!us eteve encore. A force (te présenteraux autres et de nous présenter enun a nous-mêmes sous
un masque honorahte tes prétentions de notre cgotsiuc,nous en faisons des prétentions et nous crions
at'injusticc quand on ne fait souvent autre chose que de
nous empêcher d'être injustes. Ne croyez pas cependant
que nous Ycuhons vous tromper; nous nous sommes
trompesnous-mêmes longtemps avuntvous. Nous croyons
très sérieusement a la ie~itimite de nos prétentions; en
cherchant vous faire illusion, nous ne faisons pas sur
vousnotre premier essai it ya longtemps que nous nous
faisonsillusion à nous-mêmes.
On traite t~/o/ï~'r~~ et avec conscience !es ques-
ÇA CO~!DËRAT!0~
tiens dont il s'agit par des principes d'expérience, quandon veut les résoudra au moyen des faits de l'histoire.
Hest itimcitc de croire que celui qui tente une solutionde ce genre ait proprement conscience de cèdent il s'agit;
c'est pourtant ce qui apparaîtra clairement dans ta
suite.
Croyons-nous donc traiter ces questions par les prin-
cipes dont nous parlons? par des principes que nous avons
admis sur la foi d'autruiPMais si ces principes eux-mêmes
étaient faux, la solution que nous y fondons serait aussi
nécessairement fausse.Sans doute ceux dont l'autorité
nous a servi a former notre système d'opinions les tenaient
pour vrais; mais s'ils se trompaient? Sans doute notrenation et notre siècle les tiennent aussi pour vrais; maisne savons-nous pas, nous qui savons tant de laits,ne savons-nous pas que l'on reconnaît généralement pourvrai à Constantinopic ce que l'on reconnaît générale-ment pour taux a Home?–. Ne savons-nous pas qu'il ya quelque cent ans on regardait généralement commevrai à Wittemberg et a Genève ce que l'on y tient au-
jourd'hui non moins généralement pour une erreur
funeste ? Si nous étions transportés chez d'autres nationsou dans un autre siècle, conserverions-nous encore nos
principes actuels, bien qu'ils se trouvassent alors en con-tradiction avec l'opinion générale, c'cst-a-dire avec la
pierre de touche qui nous sert à discerner la vérité? Oubien ce qui aurait été vrai pour nous jusque-là cesse-rait-il de rétro? Notre vérité se régle-t-cuc sur le tempset les circonstances ?
Quelle espèce de réponse cherchions-nous donc pro-prement ? Une réponse bonne uniquement pour notre
siècle ou pour les hommes dont les opinions s'accordent
St!R LA !ŒOH"TtON FKA~ÇAtSK. 65
5
avec les nôtres? Nous aurions pu alors nous épargnerla peine de !a chercher; ils résoudront sans nous la ques-tion exactement connue nous. Ou bien voulions-nous
une solution bonne pour tous les tempset tous les peuples,bonne pour tout ce qui est homme? Nous devons alors
l'établir sur des principes dont la valeur soit universelle.
Accordcrons'nous une innuencc a notre ~/c~ quandc'est de ~'o~ qu'il s'agit?–ou, en d'autres termes, ferons-
nousde notre inclination une loi morale universelle pourl'humanité tout entière? II cstvrni, û chevalier de la
toison d'cr, qui n'es rien de plus que cela, –il est vrai,
et personne ne te le conteste, qu'il serait tort désagréable
pour toi (le voir tout a coup disparaître du monde le
respect qui s'attache a ta haute naissance, a tes titres et
a ton ordre, de n'avoir plus a conqjter pour être honora
que sur ton mérite personnel, et de perdre tous ceux de
tes biens que tu possèdes illégitimement; il est vrai
que tu serais le plus méprisable et le plus pauvre de tous
les hommes, que tu tomberais dans la plus profonde
misère mais pardonne, la question n'était pas de savoir
si tu serais misérable ou non; il s'agissait de notre droit.
Tu penses que ce qui te rend misérable ne saurait être
juste. Maisvois ces esclaves moriaillables que tu as
opprimes jusqu'ici; ce serait véritablement les rendre
fort heureux que de partager entre eux ceuxde tes trésors
que tu possèdes ajuste titre; de taire de toi leur esclave,
comme ils ont été les tiens jusqu'ici; de prendre tes fils
et tes filles pour en faire leurs valets et leurs servantes,
comme tu prenais toi-même leurs filles et leurs fils
pour en iairc tes servantes et tes valets; de t'imposer
la charge de leur le gibier, comme ils te l'ont
rabattu jusqu'ici; ils nous crient: le riche, le pri-
CONSIDÉRATIONS66
vifegi~ n'appartient pas an peuple; il n'a point de part
aux droits universels des hommes. Tel est /c~' intérêt.
Leurs raisonnements sont aussi sondes que les tiens, us
pensent que ce qui les rend heureux ne peut pas 6tre in-
juste. Devons-nous ne pas les écouter? Permets donc que
nous ne t'ccoutions pas non plus.
Il est dil~cile, même avec la meilleure volonté et l'esprit
le plus lucide, de se préserver de cette secrète illusion de
la sensibilité. On ne devrait écouter en cette recherche
aucun noble (i),aucun militaire d'un Etat monarchique,
aucun houunc d'aitaires au service d'une cour déclarée
contre la Révolution française (2). Le vulgaire bourgeois
qui ~enut sous le poids des lourds impots, te paysan sou-
mis au joug, le soldat meurtri de coups s'en mêleront-ils
donc? Ou faudra-t-il les écouter, s'ils le font? Celui
qui n'est ni oppresseur, ni opprime, dont les mains et le
(i) Je parle de celuiqui n'est que nobte. Le public allemandhonore
en beaucoup d'hommes appartenant aux plusgrandesmaisonsune plus
haute noblesse, celle de l'esprit, et je t'honore certainement autant que
personne. Je me borne icià nommer le &(~o~de Knigge et le noble
auteur des Pe~cM ~'«~ ~n'u/e f~not's sur les or~M pcrn~<-
~t~, etc.
(2) A plus forte raison un te! homme ne dcvrait-it pas se faire, dans
le plus important des journaux savantsde PEuropc, le juge des écrits
qui se rapportent à ces questions, et par conséquent l'interprète
apparent de l'opinion nationate.–Pour moi,du moins, si i'ou trouvait
cet écrit digne d'être mentionne, je prie que i'on me fasse grâce du
jugement des empiriques. Ils seraient jhgcs en leur propre cause.
Qu'on me dopnc pour juge un penseur spéculatif, ou qu'on ne m'en
donne aucun. Pourtnnt toute rcgte a ses exceptions. Je fais, par
exemple, le pins grand cas de l'ouvrage de M. Brandes, secrétaire
intime de cbanccttctie en Hanovre, sur la Hevotution française. On y
sent un esprit indépendant et honaete, et l'on n'y t émarge aucun
détour de mauvaise foi.
<m i. n~vo~TfON rnAi\'c.St.: 67
patrimoine sont purs clupi!!a~'edes nations, dont la t~te
n'a pas été façonna des sa jeunesse sur la fonnc ccnven-
tionncHe de notre siècle, dont iecu~u'est r<'mph d'un
chaud mais cahne respect pour h dignité et les droits de
Fbommc, cetni-ta seu! peut être ju~e ici.
Tehcs sont les secrètes illnsions de lits~nsibititc. On en
appuie évidemment a son t(''moi~na~c, quand on veut
résoudre la question /?~' /o~ Est-il vrai cepen-
dant qu'i! ait pu reeuement y av'ir des hommes~des
hommes d'un esprit juste, des savants, qui aient cru
repondre par ce qui est on a été a cette question qu'est-
cequi < être? –Ce!a est impossible; nous ne !es avons
pas bien compris; ils ne se sont pas bien compris eux-
mêmes. Sans nous en~a~'eravec eux en de rigoureuses
démonstrations, ce qui est ici tout fait en dehors de
notre plan, nous voulons seulement chercher a leur faire
comprendre clairement leurs propres paroles.
Lorsqu'ils parlent de ce qui r~ ~'c', ils veulent
exprimer immédiatement par là quelque chose qui ~c~/
~c~/rc~c~~ car pour ce qui est nécessairement
comme il cst~et ne peutahsohuncnt pas être autrement,
nul homme raisonnable ne recherchera si cela r~ être
ainsi ou autrement. Ils reconnaissent donc immediatc-
tYtent~en appliquant cette expression a certaines choses,
qu'elles sont ~< ~'ccM~ ~c/A'.
Ils ne peuvent vouloir et ils ne voudront attribuer cette
indépendance on cette Mc~c, c'est tout un–, a rien
autre chose qu'aux resolutions des êtres raisonnables, ies-
~t einem So~
~t'n ~nJerM<'{/~A:ùnNen.3 tF~ ~0 ~M WM~.
~o~.
CONS!DKHAT!OKSes
quelles a ce titre auvent être appelés dos Ilsreconnaissent donc de libres actions dans les êtres raison-nables.
Ils veulent chercher si ces actions doivent être ainsi ouautrement, c'est-à-dire rapporter a une certaine régiel'action donnée d'une manière déterminée et porter unjugement sur l'accord de cette action avec cette règle.Ord'ou tireront-ils cette règle? Ce ne sera pas de l'action
qu'il s'agit de juger d'après elle; car l'action doit êtrecontrôlée par !a règle, et non la règle par l'action. Cesera donc d'autres actions libres données par l'expérience?
Peut-être veulent-ils abstraire ce qu'il y a de c<wwïïMclans les mobiles de ces actions et les ramener ainsi a une~J qui leur serve de loi? Ils ne seront pas du moinsassez injustes pour vouloir juger un être libre d'après uneloi qu'il ne saurait prendre pour règle de conduite,par la raison qu'elle lui serait inconnue; ils nejugcrpntpas l'orthodoxie du patriarche Abraham d'après l'edit dereligion qui gouverne la Prusse, ni la légitimité de lades-truction des Cananéenspar le peuplejuif, d'après !esmani-lestes du duc de Ih'unswick contre les Parisiens. Ils ne sau-raient demander a cet être qu'une chose, savoir s'il apronte de toute l'expérience (fui a pu s'amasser jusqu'à
son siècle, et s'il a suivi la loi qui en résulte. Il faut doncqu'ils établissent une loi propre a chaque siècle pourles actions libres des êtres raisonnables. Suivant euxnous avons aujourd'hui de tout autres droits et de toutautres devoirs que nos pères d'il y a cent ans; suivanteux, tout le système moral du monde spirituel sera com-plètement changé dans cent ans, en raison de l'accrois-sement de l'expérience; et eux-mêmes, s'ils parvcnainta un âge aussi avancé, condamneraient alors ce qu'ils
SLH L.\ Hh:VOLUT!ON H~USH GO
déclarent juste aujourd'hui, et déclareraient juste cequ'ils
condamnent en ce moment. Maisque dis-je, chaque
siècle 11 faut qu'ils admettent une loi particulière pour
chaque individu, cari! est impossibleque chacun soit aussi
fort qu'eux en histoire, et ils n'exigeront sans doute (leper-
sonne qu'il lire ses rentes de conduite d'événements qu'il
ne connaît pas. Onbien est-ce un devoir pour nous d'être
des historiens aussi profonds qu''eux, afin(te ne pasdemeu-
rer dans cette grossière ignorance de tous nos devoirs?
Enfin, comme leur expérience s'arrête quelque part,
ils arrivent nécessairement à un point.ou ils ne peuvent
plus indiquer d'expérience antérieure. D'âpres queues lois
jugeront-ils alors?–Ou bien cesseront-ils ici d'apprécier
toute action libre au point de vue du devoir? S'arrétc-
ront-ils, par exemple, devant la première resolution
d'Adam, puisqu'il leur est impossible de citer des expé-
riences qui lui seraient venues de ses ancêtres et d'après
lesquelles il aurait du se diriger ?
Telles sont les contradictions où tombent ceuxqui veu-
lent qu'on réponde par l'expérience a la question de droit,
et elles seraient beaucoup plus choquantes si par bonheur
pour eux ils n'étaient inconséquents, et si leur cœur ne
leur jouait le tour de sentir plus juste que leur tête ne
pense et que leur bouche ne parle. Nous voyons en effet
qu'ils jugent assez généralement les libres actions de tous
les peuples et de tous les temps d'âpres les mêmes
principes, sans paraitre craindre d'être contredits par
l'expérience de l'avenir, et que ce qu'ils intitulent fausse-
ment preuves historiques ou déductions historiques n'est
autre chose pour eux dans la pratique qu'un choix d'exem-
ples qui servent a représenter d'une manière sensible des
principes primitifs.
CONSIUHhATiONS70
Parfoisaussi i!s contbndcnt notre question aveu coMe-ci,qui un est tout a fait ditïerente 6~<«'~ ~c/~
/M/e~Tant que ia première n'a pas ut)';ptcinemcntrésolue, il n'y a pas lieu de poser la seconde.–11 est clair
pour tout esprit, même sans culture, qu'autre chose esttaire son devoir et autre chose chercher son intérêt d'unemanière raisonnable; t'~uote seule était capable d'ob-scurcir cette vérité et de fermer les yeux à ia lumièredu soleii. Chacun se!it, quand même il ne l'avouerait
pas toujours, que c'est souvent un devoir de sacrifierson intérêt bien entendu, que nous sommes touta tait libres de le sacrifier même en dehors de ce cas,et que nous n'avons a en repondre a personne qu'Anous-mcmc, tandis qu'au contraire les autres peuventexig'er de nous quoique chose de conforme au devoir etie réclamer comme une dette, it y a !a deux questionsessentiellement distinctes.
Or, s'tis nous accordent reeHement qu'il y a un </cuo~'de ce ~enre qui puisse être exige au nom d'une loiuniverseltement valable,– et un ~!<u~' ou un/~i-
~M'~ qui dépende de cette loi, et s'its ne jouent pasavec les mots, ils nous accordent aussi que cette loi nesaurait dériver de l'expérience et qu'elle ne peut pas êtresanctionnée par elle, mais que, servant elle-même de
principe une c~ic appréciation do tous les faits de
l'expérience qui y sont soumis, ce ~'c, elto doit être
conçue comme indépendante de toute expérience et commeélevée au-dessus d'elle. Que s'ils ne nous accordent pasqu'il y ait un tel devoir, pourquoi donc se mêlent-ilsd'une recherche qui dés tors n'existe absolument pas pour
A*~~f/tM So~ett.
/)<e~ o~ A~c/)t<r/'cn.
SL'R LA. tŒVOLUi'tON FHAKCAtS! 71
<
eux et.(nn n'est a leurs yeux qu'une chimère? Qu'ils nous
laissent poursuivre tranquillement ~e œuvre, et qu'ils
continuent la leur!
La question du </e~'?' et. (tu ou, ce qui est la
même chose, comme on le verra bientôt, la question du
fM ne ressort nullement du tribunal de l'histoire. Les
réponses de celle-ci ne s'appliquent pas du tout a notre
question; elle nous repond sur tout, excepte sur ce
que nous voudrions savoir; et ce serait une ridicule
méprise quo de coudre a notre question la réponse
qu'eUe nous fournit. Cette question ressortit a un autre
tribunal que nous rechercherons. Nous verrons plus
bas si la seconde question, celle de la prudence, relève
aussi du même tribunal, et a quelles conditions.
Nous voulons donc juger des laits suivant une loi qui
ne saurait dériver d'aucun l'ait ni être contenu dansaucun.
Oudonc pensons-nous prendre cette loi? Ou croyons-nous
la trouver? Sans doute /e ~M, puisqu'il ne faut
pas songer a la chercher hors de nous; non pas, il est
vrai, dans notre moi, en tant qu'il est forme et laçonne
par les choses extérieures au moyende l'expérience (car
celui-là n'est pas notre vcritabte moi, il n'est qu'une ad-
dition étrangère), mais dans sa forme/c et ~rc;
dans notre moi tel qu'il serait en dehors de toute ex-
périence. La seule dinkulte ici, ce semble, c'est de le
dégager de toute addition étrangère venant de notre édu-
cation, et d'en obtenir la forme originaire dans toute sa
pureté. –Si nous découvrions en nous quelque chose qui
ne pût absolument dériver de l'expérience, comme étant.
d'une tout autre nature, nous pourrions conclure certai-
nement que c'est la notre forme originaire. Or c'est ce
que nous trouvons réellement dans cette loidu devoir. Si
CO~StDËRATtOK~72
cette loi est en nous, et c'est un fait qu'été y est,
puisqu'elle est toutAlait contraire Ala nature (te l'expé-rience, elle no peut être une addition étrangère apportée
par l'expérience, maiscHe doit être ]a forme pure de notre
moi, L'existence de cette loi en nous, ~e /< nousconduit donc a la forme originaire de noire moi, et decette forme originaire de notre moi se déduit Ason tour
l'apparition de la loi dans le fait, connue l'c/~ ~?M~c.
Pour écarter même le plus léger soupçon de contra-diction avec moi-même, j'ajouterai tout exprès une re-
manpte l'existence en nous d'une tct)eloi, en tant queiait, est sans doute, comme toutes les choses de fait,~o~e a notre conscience par t'cxpericncc (intérieure);c'est par l'expérience que, dans lescasparticuliers, quand,par exemple, nous sommes entraînes par quelque cou-
pable penchant, nous avons conscienced'une voix inté-rieure qui nous crie Ne fais pas cela, ce n'est pasjuste;l'expérience nous montre certaines manifestations parti-culières, certains cn'ets particuliers de cette loi dansnotre
cœur, mais elle ne les ~yo~ pas pour ceïn. Elle en estabsolument incapable.
Or cette forme originaire, <y~M~e de notre moi
exige que celui-ci lasse accorder avec elle ses ibrmes
c~<yc~/c.s, lesquelles sont detcrminces par l'cxpcrienccet la déterminent à leur tour, et c'est pourquoi elleprendle nom de c~~w/6'wc~ elle l'exige absolument
pour tous les esprits raisonnables, attendu qu'elle est !aforme originaire de la rais'on c~ soi, et c'est pourquoielle porte le titre de loi; et elle ne l'exige que pourles actions qui dépendent uniquement de la raison et nonde la nécessite physique, c'est-a-dirc pour les actions
SL'BhA HHVOUJTiONFHANCAÏSE. 73
!ibres, et c'est pourquoi e!te se nomme loi ~!o~ Les
expressions qui servent !e plus communément a designerla manifestation de cette loi et sous !esquc!tcs elie est
connue m~ne de rhumme !e pins ignorant, sont celles do
M'~c/c~cc, de ~~f ~?', de ?'c/oc/<~ ~<c~<'?~'son
de ~c/~ /c7'?'6', etc.
~e que cette loi nous commande est appelé en gêneraiune chosey?~/<?,un r/eu~ ce qu'elle nous défend, une
chose <c, M~~Y~'?'~ f/e~~ï'?'.Nous devons faire ia
première, nous ~c ~ct' faire la seconde. Si, en
quaHte(t'ctrcs raisonnables, nous sommes absolument et
sans aucune exception soumis a l'empire de cette loi,nousne pouvons~'<?, cow~' tels, ~o?~~ ~~c<~c<?«~'eta ou ellc se tait, nous ne sommes donc soumis à aucune
loi, nous~o~uo~. Tout ce que la loi ne défend pas, nous
pouvons le faire. Tout ce que nous pouvons faire, nous
avons le ~o~ de le faire, puisque ce pouvoir est /<time,
Cequi dans notre nature est une condition sans !aquc!~la loi n'y serait pas possible en gênerai, se trouve com-
pris,aussi bien que ce qu'elle ordonne reeUcment, avec ce
qu'cHc se borne a permettre, sous l'idée de ce
pas ~e~/M par la loi; nous pouvons dire, par censé"
quent, que nous avons le droit d'être des êtres raison-
nables, que nous avons celui de faire notredevoir; tout
commenous pouvonsdire que nous avons le droit de faire
ce que permet la loi morale.
Maisici se présente une distinction essentielle. Ce quela loi morale ne fait que nous permettre, nous avons le
droit de le faire; mais nous avons aussi le droit opposeau précèdent, celui de ~e pas le faire. La loi morale se
tait, et nous rentrons tout fait dansnotre libre arbitre.
CONSiUËi~TiU~S7A
Nous avons aussi le droit de faire notre devoir; mais
nous n'avons pas le droit oppose a celui-là, celui de ne
pas le faire. De même nous avons le droit d'être des êtres
libres, muraux mais nous n'avons pas celui de ne pasl'être. Le droit est donc ires dînèrent dans les deux cas
dans le premier, il est réellement amrmatif; dans le se-
cond, il est purement négatif. J'ai le droit. <.leinireec que
permet, la loi morale, signine il dépend de moi de le
faire ou de ne pas le faire j'ai le droit d'être libre et de
faire mon devoir, signifie seulement rien ne peut m'en
empêcher, personne n'a le droit de m'en empêcher. Cette
distinction est innnhnent importante a cause de ses con-
séquences.Tels sont les principes auxquels nous devons ramener
toutes nos recherches sur la légitimité ou l'illégitimitéd'un acte libre; les autres n'ont absolument aucune va-
leur. Il faut. qu'elles remontent, jusqu'à la forme origi-naire de notre esprit, et elles ne doivent pas s'arrêter aux
couleurs que leur communiquent le hasard, l'hnbitude,les préjuges issus d'une erreur involontaire ou propagesa dessein par l'esprit d'oppression. (Elles doivent s'ap-
puyer sur des principes p?'/< j'entends des principes
pratiques, et. nullement &ur des principes empiriques.)Celui qui n'est pas d'accord avec lui-même cet cg'nrdn'est pas encore mur pour le jugement dont il s'agit ici.
Herrera dans les ténèbres et cherchera son chemin en
tâtonnant; il se laissera entraîner au torrent de l'associa-
tion de ses idées, et attendra que sa bonne fortune le
jette sur le rivage; il entassera au hasard des matériaux
hétérogènes dans l'ordre ou il les aura tirés de la surface
de sa mémoire il ne sera compris de personne et ne se
comprendra pas lui-même, et il obtiendra les sum'ages
SUh LA DÉVOLUTION Ht~NÇAtSH. 75
du pnbtic mondain qui se reconnaît en lui. Ataisiln'entre
pas dans mon dessein de raconter l'histoire des auteurs
qui ont écrit sur ce sujet.
Lu seconde question qui pouvait se présenter dans l'ap-préciationd'une ruvolutton concernait~ M~c~f; il s'agitde savoir si l'on a choisi les meilleurs moyens, du moinsdans les circonstances on l'on so trouvait pour atteindrele but qu'un se proposait.
Et ici nos grands connaisseurs serrent leur~ rangs plusetroitcment encore, bien surs que cette question une
question de sagesse relevé uniquement de leur tri-bunal. L'histoire, s'ecrient-ils, l'histoire est la surveillantede tous les temps, l'institutrice des peuples, l'intaillible
prophetcsse de l'avenir; mais, sans écouter leurs dé-
clamations, décomposons la question dont il s'agit et
voyonsquelles questions y sont rcin'ermees de cette ma-
nière, chacun pourra prendre pour lui ce qui lui appar-tient, et nous pourrons alors dire deux mots de cette
histoire qu'ils vantent si tort.
Pour apprécier le rapport des moyenschoisis avec un
certain but, il faut avant tout juger la honte du but lui-
même, et la honte du but, dans le cas présent, est celle
d'une chose qui doit servir de principe a une constitu-
tion politique. Cette question Quelle est la meilleure
mi do l'association politique? dépend de Ja solution de
celle-ci Quelle est la Un de chaque individu? La réponsecette dernière question est purement morale et doit se
l'oadersurla loi morale,qui seule gouverne l'hommecomme
CUNS!DÉH\TtO~S7~
homme, et lui impose un but final. La condition qui en
dérive immédiatement, et sans laquelle il n'y a pas d'as-
sociation politique moralement possible, c'est que !c but
final de cette association ne soit pas contraire celui queta loi monde présent a chaque individu et que, pouratteindre te premier, on n'entrave pas ou ne détruise pusle second. Un but final qui pèche contre cette règle fon-
damentale est déjà condamnable en soi; car il est injuste.Maisil faut, en outre, pour que l'association tout entière
ne soit pastout a fait sans but, qu'il seconde le but dernier
de chaque individu. Seulement, comme cela se peut faire
a bien (tesdegrés et qu'il n'y a pas ici de degré suprêmea indiquer, puisque cela monte a l'infini, la honte du but
final, a ce point de vue, ne peut se déterminer suivant une
règle fixe, mais elle est susceptible de plus ou de moins.
Or, une fois admis que le but final de l'humanité, prise
individuellement et en général, ne doit pas être déter-
mine d'après des lois d'expérience, mais suivantsa forme
originaire, l'historien n'a rien a faire ici, si ce n'est tout
au plus de nous fournir des matériaux pour comparer le
plus ou le moins dans les diverses constitutions politi-
ques. Encore craignons-nous qu'il ne perde sa peine a
chercher ces matériaux dans l'histoire des États qui ont
-existéjusqu'ici, et qu'il ne revienne chargé d'un inutile
butin.
La seconde question consiste a comparer les moyenschoisis avec le but, afm devoir si les premiers serappor-tent au dernier, comme les causes a leur effet. Or cet
examen peut réellement se faire de deux manières ou
bien an moyen de /o~ c/c~~ co/ï~c~ ou bien li
/<f/e de cas 6f/M/O~C6'.
Lorsqu'il s'agit de moyens a employer pour atteindre
St!!t LA HHVOU'TïCN Pn\NÇA!SK. 77
un certain but dans une association politique, les objets
auxquels s'appliquent ces moyens sont particulièrementles âmesdes hommes, chez (mi et par qui ce but doit être
atteint. Or ces âmes sont entraînées, mises en mouve-
ment, déterminées aa~ir suivant de certaines rentes gé-nérâtes, que nous pourrions bien appeler des lois, si nous
les connaissions sumsammcnt. Je ne parie pas ici de cette
première loi fondamentale do l'humanité, qui doit tou-
jours déterminer ses libres actions, mais de ces rentessuivant lesquelles i'honnnc, non plus seulement l'homme
originaire et pur, mais l'homme forme par l'expérienceet par les additions des sens, peut être détermine, et en
particulier doit l'être pour s'accorder avec cette Ibrmc
primitive. Car, de même que tous tes esprits sont e~aux
quant a la forme originaire de !a raison, tous les hommes
le sont aussi quant a certaines autres formes sensibles de
l'esprit. Les dinercnces que le sieetc, le climat, les occu-
pations introduisent en eux sont réellement peu considé-
rables, en comparaison de la somme de leurs qualités
communes, et ~~c /ro~ r/e c~c c/t~
~C6'?' ~<?~ 6' sous l'innucncc do sa~cs consti-
tutions. 11est aise d'apprendre a les connaitrc, et les
moyens de s'en servir sont des expédients mesquins et
insigniuants; mais il n'est pas aussi faciled'achever l'étudede leurs formes générales.
Or c'est ici qu'intervient rccHcmcnt l'expérience, non
pas celle qui consiste a savon' combien il y a eu de
grandes monarchies, ni quel jour a eu lieu la bataille de
Philippcs, mais une expérience bien plus voisinede nous
cow~?cc e~c:r~c~<c ~e /M<? ~w~~
/:r/~n<n~<'e~~t<~<
CONSÏD~nATIONS78
Sois pour toi-même le plus ndète des compagnons,suis-toi dans les recoins les plus caches de ton cœur, et.
surprends tons tes secrets, en un mot, ~<?w~ ~o
co~c~ï~ –voila h' premier principe de cette
science de i'nme. Les repues que tu tireras de cette obser-
vation de toi-même sur le cours de penchants et de
tes inéquations, sur !a forme de moi sensible, s'éten-
dront crois-le bien a tout ce qui porte ngurc !m-
mainc. Tous les hommes te sont semblah!es en ce point.Fais bien attention que je dis ~? ce En cuet,
tu es peut-être sincèrement résolu a suivre toujours lavoixde ta conscience; tu sais te respecter toi-même, et tu es
un honnête homme..Te ne te consci!!e pas d'avoir la
même conhancc~dansl'honnêteté du premier venu. Peut-
être ne ticnt-Hpour mat rien de ce qui lui cstutite, et est-il
tout aussi fermement rcsotn aobeir a lavoix de son intérêt.
L'e~oïsme est le mobile de ses actions, comme le respectde !a loi est celui des tiennes. Maistu peux croire sûrement
que cesdeuxmobitessi difTerentsvousconduiront tous deux
Al'action par des chemins assezsemblables. –D'ai!!eur~,en consultant l'histoire de ton ca'u! peut-être bien tesouviendras-tu d'un temps ou tu n'étais pas beaucoup
mciHcurqu'it ne t'est aujourd'hui; peut-être bien tcrap-peneras-tu comment tu es peu Apeu revenu a la raison,et de quelle manière tu t'es rct'aitune nouve!te existence
spirituelle, n suivra aussi ta même marche, bien quene partant pas précisément du même point, s'i! doits'améliorer un jour; et ii faut que tu t'aides ase dirigerdans cette voie, si tu veux concourir a son amélioration.
C'est d'après les règles de cette science de l'am~, les-
quelles se rapprocheront du rang- des lois, ~racc a uneobservation sa~e et persévérante, c'est d'après ces rèe'Ics
SURLAÉVOLUTIONFnAN(:A!SE. 70qu'il faut examiner les moyens choisis dans une constitu-
tion pour atteindre son Lut nual. H faut rechercher si, sui-
vant l'analogie qui existe en gênera! entre les hommes
sensibles, ces moyens peuvent produire et produirontsur eux l'effet qu'on en attend cette manière de ju~erest la plus solide, la plus infaillible, !a plus lumineuse.
L'historien vulgaire n'a rien il y voir; elle <~st!'œuvre du
penseur qui s'observe lui-même.
Un second moyen de chercher une réponse a la ques-tion dont il s'agit, c'est de ,<y< ~Y~ r~ c~ ~~M-
/~M~. Le principe de cette manière de ju~'cr est cehu-
ci des causes analogues ont produit autrefois certains
effets; donc elles produiront encore maintenant dcscucts
analogues. Or cette espèce de considération semble au
premier aspect purement historique, mais il y a ici plu-
sieurs remarques a faire.
D'abord, comme on ne saurait indiquer que des causes
simplement analogues, et jamais absolument !es mêmes,
on ne peut aussi conclure qu'a des effets analogues et
jamais a des effets identiques. Maiscomment donc savez-
vous en quoi l'effet attendu sera réellement semblable a
l'cuct donne, et en quoi il en sera différent?–ou ce quesera cet!c din'erenco? L'histoire ne vous enseigne ni l'un
ni l'autre; si vous vonlex le savoir, il faut que vous le
cherchiez a l'aide des lois de la raison.
Ensuite, sur quoi donc se fonde, en général, votre con-
séquence, 6' ~c des causes analogues auront des
effets analogues? Pour que cette conséquence soit légi-
time, il faut que vous supposiez tacitement que l'eHet est
réellement lie aux causes par une loi universelle et appli-
cable dans tous les cas, et qu'il en resuite d'après cette
loi.
COISStDËRA/nOKS80
Voyez donc, vous qui soutenez que cette manière de
juger est la seule bonne ou au moins la meilleure,
voyez jusqn'ou nous sommes d'accord et ou nous com-
mençons &nous séparer. Vousadmettez comme nous une
loi et son universalité; m:us vous ne vous soudez pas de
la chercher. Vous ne voulez que l'enet; h",raison de
l'cnct avec la cause est ce qui vous intéresse le moins.
Pour nous, nous cherchons ta loi même, et de la cause
donnée nous concluons l'enet suivant Ja loi. Vous vendez
des marchandises de seconde main; nous tirons les nôtres
de prcntierc. Qui de nous, a votre avis, reçoit les meil-
leures et au plus juste prix? Vous observezen ~ros, vous
regardez du haut d'un donjon les flots de peuple qui se
pressent sur le marche; nous entrons davantage dans le
détail, nous prenons chacun en particulier, et nous l'exa-
minons, Qui de nous, je vous le demande, aura le plusde connaissances?
Et si vous tombez sur un cas qui ne se soit pas encore
présente dans votre histoire, que ferez-vous alors? Je
crains fort que la question des moyens a suivre pouratteindre le seul vrai but d'uilc constitution politique ne
vous ofh'c précisément ce cas. Je crains que vous ne cher-
chiez en vain une unité de but dans tous les Ktats quiont existé jusqu'ici dans ces Etats que le hasard a
formes et que chaque siècle a rapièces et raccommodes
avec un humble respect pour les mânes des devanciers;dans ces Etats dont la plus Jouable qualité est d'être
inconséquents, puisque plusieurs-de ieurs pï'incipcs~
pousses jusqu'au bout, auraient, écrase l'humanité et lui
auraient enlevé tout espoir de se relever jamais; –dans
ces États ou l'on ne rencontre guère d'autre unité quecellequi reunit les diverses espècesd'animaux carnivores,
SUR t.A HHVULUTtONi-'H.(JA!Sh:. 8i
6
et qui t'ait que le plus t'ail)le est man~e par le pins fort et
man~<;ason tour un plus taible que lui. Je crains (pie
vous ne trouvie/ dans votre lustoire aucun reusei~'ne-
ment touchant tus effets du certains mobiles sur tes
liommes, t)arce<tue les lx''ros (te cette Instoirc ont oublie
de lesappliquer au co'm-Immain. Il vous faudra dune
vous cuntcnt.<'r d'une R'cttcrctK: si la recherche
~~M~M'/ n\'st pas possitdc.
Kt,. puisquu tnms en sounnus sur un texte si riche,
cncurc deux inuts a ce sujet it ea est. de i'inunanitc
en gênerai (.«Hune de t'individn. CeHe-ta est t'urniec,
cunnne cetui-c:, par ies eYenements de sa (turee. Nuus
avons comptetetnent onbtie les eireunstances de nos prc-
nnercs années. Sunt-eHespour ceta perdues pour nous?
et, parce que nous ne les connaissons pas, toute la
direction originelle et individneUe de notre esprit y a-t-
elle moins son principe? Ponrvu que eeHe-ci nous reste,
une nous importe te reste? Nous arrivons a l'adoles-
cence, et nos petites actions, nos petites peines se gravent
d'une manière durable dans notre mémoire. Cependant,
c;race a elles, nons taisons un pas de plus dans notre
éducation, et, des que nous avons lait ce pas, nous com-
mençons a rougir de nos caprices et de nos folies d'en-
fant; le sonvenir de ce qui a précisément servi a nous
rendre plus sa~es nous devient odieux a cause de n"trc
plus grande maturité, et nous l'oublierions volontiers si
nous le pouvions. Le temps ou nous nous en souvenons
avec indifférence vient plus tard; il vient quand ces
:mnecs nous sont devenues étrangères et que nous ne nous
regardons plus comme le même individu. L'humanité
1)~-is ètl,t~ oit 'l'ne semble pas et.re encore parvenue il l'a~e ou l'on ap-
prend à rougir; autrement elle se vanterait moins de ses
8~ Cf'~)t)Kt<n)h\S
<ph)i!s d'entant, et ettc attacherait moins de prix a h'~
compter.
tin'yariendimsrhnmanitequisuit vraiment te hene-
ncedet'a~eet(te!'experience<pteceqniyrester'e!h.
rnent. comme bien acquis. tt nous importe moins <!n navrm'
<v/M~«' Rih; y cs{ arriva', et notre rut'iositc tronvcmit
d'ait~urs {tf'u du r~nsct~'nomcnts :'t ce sujet dans les his-
toriens ordinaires. Ms nous décrivent dans tons !curs
détails ics echat'anda~es e! tes machines extérieures
i!s ne pouvaient voir avant ce merveittenx travail eotn-
ment nne pierre se joint a nnc antre. C'est pourtant iace
que nons aurions bien vouhi savoir. Pour ce (pn est de
t'echatauda~e, ~i sodemcnt t'edincc était construit, on
pourrait l'enlever (1).
Fant-d donc laisser t'histoire tout a tait de côte? Oh non,
seutemont il tant la tirer de vos mains, puisque vous restez
eterne!!emcnt entants etnue vous ne pouvez taire autre
chose qu'7'y! puisque vous ne savez que ~'ccuM'r
(i) Comme nous n'écrivons pas id un traite contre l'histoire, pia.
f;<ns en note ce qui suit « Nous nous servons de l'histoire, entre
autres choses, pour admirer ta sagesse de !a Providence dans t'ex<
t:nt!on (te son vaste pian. ') MMisce!a n'est pa&vrai. Vous vou)ex
~tmpkment udmh'er votru propre pcnutration. l! vous vient par hasard
une id'!c; c'est Min-'i<tuc vou-.fcripx si vou.sctic~ ta Providence.–On
pourrait montrer, avec beaucoup phts (te vraisemblance, dans te cours
(ttt'ont suivi jusqu'ici les destinées de l'humanité, le pian d'un ctrc
méchant et ennemi des hommes, qui aurait tout dispose pour ia plus
grande corruption et la plus urandc misère morale possible. Mais ccta
ne serait pas vrai non plus. ha seule chose vraie, c'est qu'une muhipHdtë
infinie est donnée, qui n'est en soi ni bonne, ni mauvaise, mais quidevient l'une ou l'autre par la iibrc appiication des êtres raisonnabics,et cHe ne deviendra pas meiHcurc, en enet, avant que f!o<~ ne le soyonsdevenus.
S! LA HÉVOLUTtON FHANÇAiSK 8:~
et que vous êtes incapables de/~w/ puisque enun
votre puissance er<a)rice lapins haute ne sort pasd''!< n fnu! taretuettre entre tes mains du vrai
philosophe poiir que, dans ce spectac!e<)e marionnettes
q!u attire vos yeux par ses couteursvariet's,H vous montre
!a preuve ~etataute que tous tes ctx'mitts ou) (''()''tentes et
qu'aucun n'a conduit au iuu.et pour (pu' vous cessiez
''nHn (!c(t(''ct'i('t' sa).)'t!h)'.h', iam<th<)<!(;d<'sp!'t!K'ip<'s,an profit f!('iaY~t!'<~<'(.'H<'(!<'stat~!n!('tU(')Hs.(v<t~i(~.H
faut !a !'cmcHrc ~ntt'c ses maitts pom' (juc, <)ansl'aiphah~'t
qun vous avcx :'i ~tudifr, ii vous tracf <'n rott~c <(U)'!)p)~s
caractères que Vous ptUSSK?/<tistiu~ a tcur oo'th'ur, et)
attendant que vous ayez appris A les reronnattrcaleur
ibrrnc'propre.
Eue lui servira a enrichir et a t'onth'tuer et) (terni'T.'
analyse !a connaissance experitnentate (te i'ann'. Pour ap-
prendre à connaurc l'homute en gênera!, t'homme dans
les circonstances ordinaires, il n'y a pas hcsoiu d'une
science historique hien étendue, (chacun a sou {u'opre
<cpnr, et les manières d'agir de ses <!euxvoisins de (troite
''t de ~'aucue hu our~nt un texte iuepuisahte. !\tais cerpte
peuvent dans des circonstances extraordinaires h's âmes
privitég'iecs, ~'expérience quotidienne ue nous !'appren(!
pas. De pareiHes âmes, placées dans (tes circonstances quii
développent et revêtent toute ienr puissance, on n'eu
rencontre pas tous les cent ans. Pour apprendre a ies con-
naitre~ pour apprendre a connaître t'humanite dans son
habit de fête, nous avons besoin des instructions de i'his'
toire. Voudriez-vous bien me dire ce que nous avons
~ne sous ce rapport avec votre manière de traiter l'his-
toire *ct me nommer les Plutarques que vous nous avez
formés ?
t~SiDHUA'HUISSh/t
l'<nvérité, il est ditncile de résister a son indi~nution"u df ne pas éclater de rire, suivant qu'on a la Inle ou la
rate {'tus susceptible, quand un entend les deelautations
de nos savants contre l'applicatiou des principes ra-
tiunnels aux choses de la vie, et tes violentes attaques de
nos empiriques contre nos plulosopin's, counnc si entre
la théorie et la pratique il y avait une opposition uter-
nelle. Mais je V(ms prie, d'après quelle idée conduise/-
~~«~ donc vus an'aires <tansta vie? Les livrez-vous catie-
retnentausuuim- aveulie du Itasard, on bien, puisquevotre tan~a~e est ordinairement si pienx, a la direction
de ia Providence ou oien vous diri~ex-vous d'après des
relies? Dansle prenner cas, que signinent ces avertis-
sements que vous prodiguez aux peuples pour les mt.'ttreen ~arde contre les t'aHaeieuses promesses des phitoso-
phes? Tenex-vouLSdonc trampn!tes, et taissex taire votre
hasard. Si tes phibsophes réussissent, ils auront eu rai-
son; s'ils ne réussissent pas, c'est qu'ils auront eu tort.
Il ne vous appartient pas de les repousser; le hasard tes
jugera bientôt. Dans le second cas, d'où tirez-vousdonc vos rentes? De l'expérience, dites-vous. Mais si cela
si~nine que vous tes trouvex toutes formulées par des
hommes qui vou~ ont précède, et que vous !es admcttc/
sur la i'oi de ieut- parote, –je vous demande abrs ou
''es hommes eux-mêmes tes ont prises. Vous n'avez pasavance d'un seut pus. Si ce n'est pas ia ce que vou~voûtez dire, il J'aut que vous commenciez parjurer l'expé-rience, que vous rameniex sous certaines unités les laits
divers qu'eHe contient et que vous en tiriez vos régies.Cette méthode que vous avez a suivre ne saurait a son
tour dériver de l'expérience, mais la direction et les pasvous en sont prescrits par une lui orig-inah'e de !a raison,
srn r. nKvnn'ïm~ FRANC.us! 85
que Fecete vous a tait connaître soxs !<'nom de ionique.Maiscette !oi ne vous donne que ta forme de votre ju~<ment; cite ne vous fournit pas te point de vue d'ou vousvouie'juper tes tai!s. Hvous tant, disais-je, ratnenertest:nts divers sous certaines unit<St)('ern)in<es, et c'est c<'que vous ne contesterex certainonent pas, si vous compre-n~ ccH~exproMiru). Sinon, r<<h'hisspx..y un ppu. Cotn-n~nt arrive-vous (tune a f'psi<)<~s<)tni!<?(:(; n'pas~n JH~'ant. cp (pn y,H~c-s!(jonn, ,):ms t'p<rt<'ttcc, <-a!-<apossihitit<<!cc~ju~mc!)t mr'nt.' h-spt-rsn~~sc, <'onnnnvnusdnvcx ravoir compris par c~ qui a et'Ht. tn'au)~"nc qn'eHcs se tr~vcnt. dans votr<'att)f o)-ipinnir..m.m)e~avamtoute expérience, et vous av<j))p< .t'apn's~ih'ssans Je savoir. L'expérience en ene-mrme est une boneremplie de caractères jetés pe!e-m~e; <(.st t'esprit hu-main qui seul donne un sens a ce chaos, (pu eu tire iciune tliadc, et. !a un drame historiHuea la Sctdeut.ert.Vousne vous ~tes donc pas rendu jostir-ea vous-mêmes;vous êtes plus philosophes que vous ne te pensicx. Vousnous rappelez le ma'tre Jourdain de la comédie vousavez philosophe toute votre vif sans vous en douter. Par-donnez-nous donc un pèche que vous ave/. commis avecnous.
Voulez-vous que je vous dise ou est te vrai point dudehat entre vous et nous? Vous n'avex sans doute pas enviede vous brouiHer tout a fait avec ]a raisnn, mais vous nevous sonciexpas non ptus (te vous hrouiiter entièrement.avec votre exceHente amie, madame !a routine. Vousvoulez vous partag-cr entre les deux; et, r-nvous plaçantrentre deux maMresscsaussi intraitables, vous vous mettexdans cette situation désagréable de ne contenter ni l'uneni l'autre. Suives donc phuot résolument te sentiment de
~O~StHHKATIONSS()
n'counaissaurr- qui vous ptu'te vers ta dernière~ et nous
.HU'~nsaho'saquoi n"uscut)'uiravo)re)~ard.
.\t0)sv"u'h'n'))~ t<it'u,'tit<'s-\<'us,a~'it'un peu raison-
o.(t'!t'nn't!t,o)aisn<'upastoutatai!aunoiu <)ucie!.i~)r)
tuon! i\tais pourquoi vu))sarrcte/-v"us juste aux umites
que vous avez <tx<t's? t'ourquoi ne vus reut'ermez-
vtu)sp:tsdaus des uuutesp!us'troites encore? Pourquoi
n~tait)'s-V('nsj)ns<'ttcm'<'(tu<u<~pasan'h'ta?Vonsnc
sam'ie/ .tth'~uer ce sujt~ on princip<: raisumtahtc, putsquc
v'xts ithami~nncx f't iat':nsun.(.)r,quc vout(~-v<L)nst'
punttrc sur <')'~oint, av'~ ntti~s qui souL tt~ccurd avcr
vous sur !a<'hus<'im~Ht.)nuisnun pas sm'it~Htnhcs;–
tlllc, vuulc~tJtl~ lnur' l't~(n_·Ilrt.·, il c;l.~s tU;lériçl;ur~ t:rLstinésque \uutcz-v<~tst('urt'(''pu!)ttn', a (;cs(t(')fens(;)n's obstines
<)u passt'' t''t qu'i! est ? Vous vous tnen<;x eu quereHc avec
!uuL ic mund< et. v«us i'cstex seuis et sansréponse.
Vous msistez cependant nus {)t'incipcs piniosophiques,
sf'htn vous, ne sauratoH passer (tans ta vie; nos thuories
sont a ia vcrit.< irrniut.tt)!cs, tuais cUos ne sont
Vous ue les ju~t'x s~ns <!ontc amsi qu'a con-
<)itio!! qtx' y'?~ ~<? il <?.s/ ~c/ car
aut.rcnx'nt \'uttf assortion seraitbeaucoup trop hardie.
~tais (pn vous oit donc que !es choses (tuivent reste!'
aiusi? ~))i \us a 'hnc to)u''s pour t'accommoder et hon-
siH< o'uunt' vus te iaitus, pour ajuster ainsi de non-
veaux tu"rcc.u)x;'t uu vieux manteau tt'Ut')uHt' pour
taire <;<'tt<' tessivf, sans mouiitcr ta peau de personne?
<Jui donc vous a assure que de cette manière la tnachine
ue'tomt'ertUt tout a tait. en pourriture, que les trous ne
s'agrandiraient pas, <pte te ne~re cesserait d'être nn
ue~re? Parce que vous avez tait <tes sottises, taut-it que
u')'us portions fane?
Maisvous ~A'5 que tout reste sur t'ancieu pied voi!a
Sun LA RHVOH!Tt()N PHANCAtSt.: 87
pourquoi vous nous r<sistez et pourquoi vous vouserriezque nos principes sont inexee.utahtes. !~hbien! utuntrezdu moins (tu !a trauciuse et ne dites p!us Nous neM~ pas exécuter vos
principes: maisdite~seutemeut,
comme vous !e pensez Nous m;~~6 pas b~sexécuter.'Ces cris contre i'impossiiuhte (t~ c~ qui ne vous pj.tX
pas, vous ne les puusscx pas aujourd'hui pour Ja prenti~refois; vous !es avez pousses (le tont ~mps, .-haquc roisqu'un honunc courageux et. rcsoiu est venu parnu vouset vous a dit coHunent vous (leviezvous y prendre pourmieux conduire vus an'aires. Pourtant, tua~-re vos crisbien des choses sont.dev'nucs recnes, pendant que vousvousen démontriez i'itnpossihiiite.–C'est ainsi <{u'Hn'y apas longtemps vous criâtes un honnne, qui suivait notrevoie, et qui n'avait d'autre turt que de ne pas ia suivre.jusqu'au bout /c~A</o~cc6' y~ est
C'est-à-dire, vous repundit-ii très justement /~M-~o~ ce < Depuis ce temps.Ja, t'expericnce, taseule chose (lui puisse vous rendre sa~es, vous a apprisque ses desseins n'étaient pourtant pas si impraticahies.
Rousseau, que vous ne vous iassex pas d'appeler unrêveur au moment même ou ses rêves se n'ansent sousvos yeux, eu~beaucoup trop de ménagements pour vous, u
empiriques ce tut la sa faute. Onvous pariera tout autre-
mentqu'il ne vouspariait. Sons vosyeux,et je pm'sajoutera votre honte, si vous ne te savez pas encore, ~'esprit hu-mam, revente par Rousseau, a accompli une œuvre quevous auriez déclarée <!e toutes les choses impossibles !aplus inmossibie, si vous aviez (''te capabtes d'en com-p..voir i'i(h''e il s'est mesur< !ui-meu)e. !'cudant qm' vous
eptuchez encore tes termes dei'Avertiss<'ment,– pendau)que vous ne remarquez ri<'n, quevous ne pressentez rie))
co~sinÉnATtf~s88
_pendant que vous vousatfubtcx, comme d'une peau de
tiun, de deux on trois lambeaux détaches de t'ouvre
entières–pendant ({n'en toute inmicenceet on toute
simpticitevous en pcnsex suivra les principes,
ators que
vous y commette/ tes bévues tes plus ~sstct'<~ p~mhutt
ce tcrnps-ia pcut-~tm(tes honun<'s jeunes''t p!~H!S(h'
force se Honn'is~nt-ns<'nsik'nt'f'(!~t'~spr:t(tuH'anint~,
prc~cntantfmilnencc (~n'ite t'xcrcct'a sut' te systc!
<)H
savoir hmnant dans toutt~ ses )):u't~s,t~nt~~Hc
création nouvcttc de la p(;nsL'c tuHnaincqu't'Hc op<r<'ra<'t
qu'Us montreront u't jour. P!us d'nne fois encore, vous
serez forces de vous trotter !es yeux pour vous convaincre
que vous voye/ bien, cotume it vous arrive cha<pte <bis
qu'unede vos impossibuites devient une rea!ite.
Voûtez-vous me-surer les forces (i'un homme sur ccHes
d'un enfant? Croyez-vous qu'un ttonxnc iihro n'aura pas
plus de puissance qu'un honnne. cndtaine? Jugex-vons
des forces que nous donnera une grande rcsouition par
ccUesque nous avons tous tes jours? Que voutcx-vous
donc avec votre expérience? i\ous montre-t-ene autre
chose quedes enfants, des esclaves enchaînes ou des
hommes de tous tes jours?
Vousêtes sans doute desju~es compétents pour appré-
cier les limites des forces humaines Courbes sous iejou~
de l'autorité, autant que vous te permet !a ftexihihte de
votre échine; penihteruent serres dans une forme de
pensée artistement imaginée, mais contraire a !a nature;
dépourvus de toute pcrsonnatite a force de vous être im-
bus de principes étrangers, a force d'avoir piie sous tes
plans d'autrui, a force d'avoir obéi a tous les besoins (tu
corps; incapables désormais de donner a votre esprit un
essor pms ctcve et d'avoir de votre moi un vif et noble
S!'H L.\ HKVOL!'T!ON FnA!S'(:A!Sr.: 89
.-cntim~t, ~)cs-v<ms pn .tat(icju~.r dc.-cque~nt
'n'? Vos fon-css.)ut-)tcs, pn ~n.rat, ta incsnrc
.st<u-s!)mn.-un~?Av~-v'u)sj~n.)ts<'ntcndn f~mir
r.-n!c(t'(.r (tu~'tH.'? .te rdni (~m inspire, non (tes
chants, tnais <!cs arh-s. Av~-v<.ns {n-cs.-rt! v.~t-c amc un
pnci~h!u~j~<n.~c~Yuns,~)~mvih'r~u~n~.)t
<t<ptt<t<~ toutes t~inf-Hnmions scusi})! an travers <tctons J<~uhstad~s, a
`I'ai(!i'(!'un(;
httU~s.ant(~jus-
<t"'a <{t!~ vous pnsst~ cH<in vous .(-ript- /6. r~'c/ /Y.n!s
s.~tcy.-v.s~pahh.s dcdi~ en tac~au<iMp<~ :«T)t
peux «~tu..r,t))ais')«nct).m~tnn.s.,tu!i,,n?.)Sivous
n'avt. )~s<-<-tt<' vertu, si vnus tn' pouv< t'avoir,
.toi~h.v.s d<- (ti, ,t
,.st trop saiot ponr vous.
L1)<)HHtt. <-c <tu'i)~ (~(jnantt il(tit:j~nc
r't'st <ju'it oc {~s.
H!.
Tout jugement étaitahsoiuntentin.possihte tant que
nous n'avions pas vide ta <p)estion de savoir <)evant quo!sh-ihunaux nous devions porter notrp nfthi~. Mainten.int
(n!f'c~t<'({t~tton<'st <ranch'c,H s'en c!~un~ antre'm'H faut r~ondrf; aussi pom't~n.cn.ta! d~~f'runju~mpnt soiiuf' et cons<<tm't)L rt~!<~(h) ran~- fie nos <~u\trthunanx co)!)p(''h}nts f.t <)<;ia hH'-rardtic' .!c icurs sen-tences. Je m'cxp!i<j)tc.
Un~ action {~ut ('r~ h'<s prudente en rncn~ t~mpstrès injuste; tt')t)i autre cot< nous pouvons avoir <!roit aune chose (tout n serait j)ourtant tort imprudent, du taireusa~c. Les deux tribunaux rendent des sentences toU alait indépendantes t'unr; de t'nutre:its!)c.suivent pas dutout les même. tois, et ne n'pondcnt pas du fout aux
(:ONS)DÉ~T!ONS90
mêmes questions. Pourquoi donc h' oui "n te non qui
conviennent a t'nm' conviendraient-ds aussi ne~essaire-
)~~ent:rau!re? Or, si u'msnons adressions aux deux tri-
bunaux dans t'inteution de rester m'trer.unduite sur tes
réponses<m'' nous en r<~cevrions,ct);ue t'nn permitou
commandât ce<tue t'autre détendrait, auquetdes deux
<!cvriuns-n<'us obL'n'?
~a sentence d~ ta raison, en tant <tu'cHcs'H()n(;aux
ac~st!ht'(~(!<'s<(;ssph't!n<'ts,t'snnt('d)St.)tn~<'tuni-
Vt'rseH' ff (!u'Hc ontunn'~toit ahstdunh'ttt '~rc ta~; cf
(tn't'Hn {~t'tnc~ ne <~uL t'f'm'ontn'r ahs~tmncnt aucun uh-
stach'. La d<'cisi'm (t<; ta ~rmh'nc~n't'st (}n'n!
c~~7;
si m'us sonnncs )trn<~nts,n'nts tK'.mamtucrons certai-
nement. pas <i~ i'('!C(~!t<'r; si n<ms n<; te sommes pas
antant <pm v'~ns, si tn~ts ne pttss~dnns pas votre anthme-
ti(;u.;en matière <t'inh''t'ets, c'~a est s:ms doute t:U;!)cnx
pom' nous, mais Yuus n'avcx pas!e th'oit de uous/~r~'
a être prudents.Si donc ta l'd mut':de,in~en'o~ee par
hd, te repond que tu ne peux pas taire ceta, tunethus
pan te taire et si la voix de la prudence~c cric non
moinshaut: -Fais-h',it Y vade tes phts grands intérêts;
<'n ne !<' taisant pas, tu perdrastout t"n bien-etr<~
tu tomberas dans la ~us profomte misère, te!non(!e
s'écroulera sur toi et) t)icn! laisse te mcndc s'ecrontcr
et. ensevetis-toi sons ses ruines avec la conscience de
<et d'rtrc d'un meincur
sort.
Si au contraire ta loi morate te repond: tu peux,–
ators va, et prendscunseit de ta prudence: cht't'che tes
avantages, balanec-ies ensendde, choisis te plus impor-
tant, et juuis-e.u t'n tonte conscience; ton oeur t'-te
permet.
S!)H LA HÉVOLUTION FHANCA~K 9t
Mais si nous n'avions <ieve ta question que pon'ju~ert'aetion d'un autre, ()uedt'vt-ions-u<u)s taire d.mst<'<-asou ta toi morah'et ta prudence vi'eraioM des réponses'<ti)r"rent<'s? A-t-it a~-i injustement, son action récrite.'dors toute ttutt-ettaine, et, si cett.e injustice nousatteint.)m<'œt-r.'ctton (h; n.)! j).n-t.N'a-~tl a~ (;uc (t'mK; mattierc
tm{<t'ud<ntc,sa com!ut!c tnri-i~ simpicm<'nt noU'~biiunc; inous pum-t-h)ns toot an plus lui h'ttxn~t. ()~ la L-om~as~sion et. tui souhaiter tm tnciHf.m-~)rt, m.-tisnous ne sau-rions tm reUrci-
n')U'<'<'s!mtc~,msqH'ttn':( p,)itHy,h'.iaioi.
Mais, ô t,rait pt-ufumt, n'ait. cach('' (~ iricHa~aLtc d~ta coi'mpHontxnHa-inc! nuusain:«n.stoujuui\s.ni<.n\être t~ons ({u'~re jus~; nuxs aitnons tnic~x donner l'a)).ntône qnc ~ayer )ïus dfjt~js! ~uus ~'mmes ~m''reu\envers ce maUteurcux, c'es~sun {dus ~t-and hi~n que nuus
cherchons, cL nous vouions ie rcmeHredans h' chemin,faih~-il empiover des moyens violon~s.
Savons-nous donc si sûrement ce qn'cxi~' bonhcut-on -s-~ malheur? Peut-être trouverions.nous s'.uve-rainonont malheureux (tans sa sihtation; savons-nousdonc si, avec les qualités <{uilui sont propres, :tvef- ses
forces, avec ses dispositions, il se trouve aussi matheu-reux?Nous attachons (i'aiHeurs ta)H d'importance aux dij-ierences individueiies des hommes et nous Y comptons si
<ort; pourquoi donc oublions-nous ici notr~ pro})rc prin-cipe? Avons.nous donc une loi ~'nerato pourju~er dubonheur? Un fant-ii ta chercher?
Mais d\)u vient ce trait ~nerat de i'ho.nmt', d.-vnu-ioir mesurer la direction individueiie des autres sur t:)sienne propre, et d'aimer tant a taire puureus des pians'pn n'ont d'autre det'ant que de n'être bons que e
CONStDËRATÏONS92
Le timide indique au bnrdi.etle harJi au timide, te
cbeminqu'd suivrait sansdoute bu-meme; mais mattiem-
au pauvre diabte qui écoute un si bon conseit li ne sera
jamais son maure, et, pour avoir a~i une seule t'oisen
mineur, il aura toujours i)esuin d'une tutelle. « C'est c<'
que je ferais, si j'étais Parmemon, disait Alexandre; ft
ttans c<'moment-t:'t il se montrait p!us phitosophe qn'i! ne
t'a <k'' peut-être (tuns tout le reste (te sa vie. Sois tout
pour tcu-meme, ou tu ne seras rien. Htautrcconnaitre
<tansce trait une déformation scnsib~' d'une quatite i'on-
d.unentah; de notre nature spirituettc ie besoin d'etahiir
i'hannonte dans tes modesd'action (tesêtres ra~onnahtes,
comme te!s.
Mais supposons que vous puissiez prouver, œ que
vous ne fcrcx jamais, (ptecet homme se rend nécessaire-
ment maihcureux par sa conduite,– supposons que vous
vous sentiez entrâmes par la générosité de votre eœm'
a retenir sur le bord <!c l'abtmc, ne pouvex-vous
avoir ~i moins la patience d'attendre que vous vous
soyez consultes vous-metnes sur ta /c<e de vos ac-
tions?
JI invoque une permission de la seule loi qui vous
obn~c, ainsi que lui. Si cette loi est reettement votre
unique loi commune, ators ia permission qu'il invoque
est un û~'6' pour vous. t~aIci veut qu'il ne soit soumis
a aucune autre loi qu'a ctie-rncmc! Dans le cas présent
enc se tait et par conséquent i'anranchit de toute autre
obligation, et vous voutcx le contraindre a subir une ici
nouveuc. Vousretirez ators, ~e uo~ ~c c/ une
permission donnée par la loi celui que la loi veut libre,
~o~, vous le voutexobti~e; vous désobéissez~o?~c.9
à la loi; vous etevez /M/ au-dessus de cet m
-SUn LA HJSVOLUTiU~ i-'HANCAtSK. 93
(te ta divinité, car eUe-meme ne rend aucun être heu-
reux contre sa votonte.
Non, créature raisonnable, Lune peux rendre personne
tteureux contre son (h'uit, car ccia est injuste.
OdrotL~acn' ({nand donc te reconnahra-t.-un ~uurcc
que tu es, pour ie sceau de la divinité empreint sur nutre
fr<HU?truand s'inciinera-t-on devant toi puur t'adurcr?
<,)uan<tnous couvriras-tu, cunnnc d'une céleste e~idu, dans
ce combat de tous ics interet-s de ia sensihiute conjures
contre nous, et quand nos adversaires scront-its pctrines
par ton sent aspect? Quand les cœnrs battront-iis a ton
nom, et quand les annes totuhcrunt-eiies des ntains du
tort devant ics rayons de ta majesté ?
~v.
Cette introduction, consacrée aux prolégomènes, r<
ctamcencore une petite placepour l'observation suivante,
qui ne concerne pas proprement il est vrai, les principesde notre jugement, mais te droit même du jugement
pubtic.On introduit aujourd'hui dansles recherches politi<ptes
ht pratique autrethis en usa~c dans tes recherches reli-
gieuses on trace une ii~nc de démarcation entre tes vé-
rités ~'o/< et ies vérités M~c~~M, c'est-a-(tirc-"
(.'ar tu ne dois pas comprendre, puhhc iHettr< pourquoit'on évite avec tant de soin de s'exprimer ctaircment,
c'est-a-dirc entre les vérités que chacun peut savoir, parce
qu'il n'en résulte rien de bien consolant, et d'autres vé-
rités qui, hélas! sont tout aussi vraies, maisdont personnene doit savoir qu'elles le sont. Tu vois, cher puhlic,
CONS!I~!tAT!ONS
combien tes l'avons se jouent d<- toi; etdanstasimjdi-
<-Ht'' d'entant, tu te réjouis des miettes qu'ils taisent
tomber pour toi de tem'taide somptueuse. Ne te fie pas
''u\: ce <pu te cause une joie si francité n'est que t'exo-
terique; tu devrais voir d'abordl'esoterique, mais H
n'est pas pour toi.'(Les trônes desprinces, disent-ils,
sont et doivent être eternefs: ~et, (!anst('H!'pnnspc,H<
~nt~ndcnt par prince tcut adtninistrah'nrdes!<tis. ~i!
n'\ a qu'un peup:<' ~nvcrn~ qui puisse ~tre libre," Il
disent-its; c'est-à-dire, penscnt.ii~un peup~~ouvRt'nr
par ses propres hus.
Aussi bien cst-t'c un dt'vcs vieux <t~tauts,()htunn)es
pusiHaniiut's! d<; nous chuchoter dans t'orcith~d'un air
tnystcriuux, ce (;uc vcus a\'< nni par découvrir. <.<Mais,
mais, ajoutez-vutts L'n aUcctaut te ton de h prudence,
qu<' <-eia u'aiite pas ))tus h~in, ma chère commère. Ce(t<-
conduite tt'est pas di~ne de !'t)onMt«~ ce (m'it dit, chacun
doit. le savoir.
« Mais il serait tort dangereux (tue chacun ie sùL .j
Que ce soit ta ton dernier souci, si tu n'es pas charge de
veiiter au bien <~s mondes. La vérité n'est pas te patrimoine
exctusit'des ccotes elle est le bien coinmnn de t'hutnanitc;
e!!e nous a 6t(' ftonnee par notre père commun comme un
précieux apanage, comme le plus intimemoyen (te com-
munication ttesesprits avec les
esprits. Chacun a é~ate-ment le droit de la chercher, d'en jouir et d'en user dans
la mesure de sa capacité. Tu n'as pas te droit de t'en em-
pêcher cela estinjuste; il ne t'est pas permis de te
tromper, de ic rendredupe d'aucun
tnenson~e fût-ce
dans la meitleure intention. Tu ne sais pas ce qu'il v a de
bon pour lui; mais tu sais que tu ne dois jamais mentir,
jamais parler contre ta conviction. En revanche, nous ne
Stt! LA «RVUt.UTiftNPnANCAtS! ~h
pouvons pas uuu {dus te turcer a fui dire ta vérité; tu
peux garder ta convietiou p'mr toi; uous n'avons ni te
'eu,nite<t!'<'itdet'iu-ra('tterdet<tu~me.–Mais/v'"x!at!)i dire. Vois-tu avec deptaisir que je sois si hou?
N'ai-je pas te droit (h' faire ce que je veux de ce quim'appartient? Peux-tu rempecher sans injustice, sans
iujustic(~ envers moi, p'ns(fue tu me disputerais ainsi tetihre usa~ <!<'ma propriété, et par <'ons<ftuent un droi!(te l'homme; sans injustice envers anh-oi, puisque tute priverais (t'unnxn'fn qui hu est. iihrL'rm'm..n'en d'ar-river a un p!u.s haut 'te~-edecuitureinteHectueti~PTu
n'aspasat'oecuperttecequipeutresuuerdetua cum-
tnunicatiott ton unique suu~i duit ~tre de ne rien faire
d'injuste.
Mais et! resuttcrait-it (hnc reotienmnt des cons<qncnce.saussi terrihtes, uu n'est-ce pas ton itna~inatifUi eehaun'ee
tpti prend des aites (te ntotdins pnurdes géants? La(tiffusiun generaie de la vérité <ptie!e\e et enn<d)!i~n<d!'e
esprit, qui nous instruit de nDs droits et (!c nos devoirs
nui nous enseigne n'ouvertes meiNeurs moyens demaintenir les premiers c). de rendre ta prntiquc des sc-conds féconde pour ie ~enrc humain, cette diffusion
pourrait-eiie avoir <tes cons~tuenccs fâcheuses? P(mrceux-Ia peut-être qui voudraient nous retenir a jamais au
ran~ des animaux, ann (te nous imposer a jamais !eur
jou~- e! de pouvoir nous (~or~er a ienr hetn-e? Et pour
cenx-iamemcsqueHesconsequencesam'ait-eHe, sinon peut-être de les forcer a choisir un autre métier? Hst-ce !a iemalheur que vous craignez? La-dessus nous ne sommes
point du tout d'accord avec v'ms; nous ne craignons j)asce malheur. Ohtpuisse se répandre sur tous h's hommesla ph.ts ~mineuse, la plus vivifiante connaissance de ia
COKSiUKH~TtUNS96
vente; puisent toutes i~-s erreurs, tons tes fn'eju~es dis-
{':n'nitre()e!asui-iacedu ~lohe! Ce serait d.jaiecietsnria terre.
~n (temi-savoir, des propositions (ictacth'-cs sans aucun"vue d'enscn)t)!c, qui f!oH"nta!asui-)'acc(te!am.moiro
<~<t~Iah<tucherepro(hutsansquerinteHi~'uc<' ..nrc-tir" ia tuoindt~ tmni~-u, m' sot~ pnut-~h-c passans (hn~r;nmiscu nu sont {.as nua t'iusd~cuima~anccs. L'm'tn-o-
i'Lhsittunquc nous n'avons pas d<dm~' de s~s principeset dunL nous n'avuns {.as ('ndu'a~u !c~ cons~'qucHccs,une proposition dunt nous ne cutnpn'Hun~ pasthUout k'sens. -Mais itou, ces prot.ositions sont c!k's-tnon<'s
inoircnsives; (itk's sont dans ra!n~ cotnmc nn capiLd'nort, sans inihtcncc aucune. Ce sum !cs passi<~ns (jni les
'ncncm en avant pour paHicr tcnrs excès. Si ciicsn'avaient pas ce prétexte, elles en chercheraient un
autre, et, si elles n'enH'onvaientpas, elles s'en passe-
raient.
Nousne vous avons donc. tait ancutt tort? Si vos con-naissances étaient solides, vous n'en auriex pas ne~les conseqnenc.s, et vous sanricx ({ne, les conse-
q'tenccs de toute vérité, cites ne peuvent être que saiw-tah-es. Vous ave/. tout au pins saisi au vot quoique iamhcau'!ont ta i'.u-ine étrange vous a teUenient en'raves (jue vousFavex écart)' coinnie Lme sainte relique., de vos profanesyeu\. Nous serons donc désormais moins avides de vosveriu-s esoteriques. Vous nous donnex en toute conscience,je ie crois, tout ce que vous avc/; et, si vous iet-mex vos
conrcs, c'est ttour que nous ne voyons pa.s qu'ils sont vides.
Voila, ô bienfaitrice de Hunnanitc, o verit. vivifiante,comment se conduisent avec toi ceux qui se nomment tes
prêtres. Parce qu'ils ne t'ont jamais aperçue, its te ca-
sm LA nb:VUt.L"nu~ i''H.(J.SH. ;)7
I"nmi<'nU')rr.)nh''i)h'nt.Tn<.s{)<~n-cn.\nn(!ct)nm<-ntn'mi
')csitutu)n).'s.Hsst'st)tttt:)ittt''unc im:~<' <t(.'buis,({t)'j~
.t(!ut'cttta)apinct\)!snL'i:ununt!'cnt:mp(~)pt~dans tt's
grandes r~'h'.s .jnc (tu (-uh'< (!m ~o,sc vit satHvitnt. (.~
nn'n~ccHt (~ m(n't<~)!cum}uc userait toucht') !cm- .m-hc
.suntc. ~h'n)e!sunt('t'n)~tj,'m- jon~hu'tt.~MonH-c-toi'
:ntntiH('n<t('!)uus(htnst<)u~t:)Sp!n<icu!a(it!(j[uctuns1~ pcnph.'s t~ t'L'n(!cnt
h<)tnn:c
CONSIDÉRATIONS
SL'itLA 1%
RÉVOLUTION FRANÇAISE
LIVRE PREMIERMe t'<t)~eet)tMMt do la Mf;t<tmt<t dnne r~eJxOef
CHAPITRE PREMIER
fK PEUPLE A-T-jL KN CË~ËHAL, U: DROtT DMCHANGER5Â
CONSTITUTIONPOU'ftQUE?
« On a dit et répété depuis Rousseau~ que toutes les
sociétés civiles se fondaient~ /6' ~c~~6', sur un con"
trat;? ainsi parle un de nos nouveaux professeurs de
droit naturel. Mais je voudrais bien savoir ou sont les
géants contre qui est dirigé cette lance. Ce n'est pas du
moins Rousseau qui l'a dit(i); et si quelqu'un l'a dit de-
(1) I! faut avoir fait de son C'o/<~ ~oc~ une cmdc bien supctii-cielle,on ne le con)~!)t'cque pur les citationsdes autres, pont-y trouvercela.Auchapitre premier du premier livre, il annonce afnsi sonsujetCOUMENTce c~Mn~/)en<y'M<-t</f<t'~J<' ~~nore. Qu'est-ce<yt~'peulle fMtffe L~O!T<5tR?/€ cro~ ~OMUOO'~Ot<~re CËTTH~MP~/t'on.EtH recherche ainsidans tom le livre, non p.<sle f~it,mais ie droit.
Mais il parie toujoursen narrateur du progresde i'i)umanite. HEh bien ? est-ce ce qui vous trompa, mes~eurs Vousdites bien
'SH)Ki!m~S!<)()
puist~"u.ss''au,n'<pteuju'un a dit une chose qui ne vaut
pas ia peine de tant s'ecitauner. H est trop évident pour
'pucun(ptee\a)uinen<ts constitutions potitiuues et toutes
ceiiesdoittt'histoire a tait mentionjus(pt'ici, qu'eHesneturent pas i'o'uvre <t'nne dehhcration renechie, mais nn
jeu'!u hasard ou l'eth't d'une vioiente oppression. Kth's
se tondent tontes sur /c< <6' s'Hest pcimis<)e}~noncct'cc binsphetnc, puurics rendre odieuses.
Mais ~n'< ~o// une sucietc civitc ne puisse ~e
t~nd~rqu)' sur un cun~'Ht cnh'c s<sn!cmbi'es~ctquctotttt'~t:~se «'nduisc d'une nnuHCt'cinjuste et pudte cunu'c ic
pr<'tnict'(h~itdct'!tuntarntc, contt'c ledmi~dc t'huntani~'
.s'M,en nu ch<'t'ch:mt.pus, du moins uncricui'cmcnt,!nconse'nt<'nt<'Htd<'chacunde ses tncnthrcsaiont.ccqu'i!\<'n~(h''C))r(.'rdutih'<'~c !ui,c'<~ ce qu'i! est i'aci!~(!cdL'-
tnunh'cr (te ia façon iapius clan')! auxus))i'its in~nc i<'s
ptusfaihh's.
St~ en )'nut, i'h'mHnc, omm~' ~tt'c ruisuimabtc, <'st
smunis ahs'dumcnh't ''xctnsivdncnt atatui tnoraiu, il n''
saurait ctt'~sumnis a am'nnc autre, et nut n'a le droit de-
tentt'r de lui rn itHpuser une autre. La ou su loi raftran-
chit, it('stcn!i)''r<'m<'nt tihrc; ta ou ettchn donne une
pertnissiou, dte !e renvoie a sa voionte et i'ob!i~cen ce
casa ne r''ccnnaitr'' d'autre h'i t~te cette volonté. Mais
preci~in<'nt parce <j)t'ctte laisse exeiusivetnent a sa Yo-tontc ie droit de décider ia conduite <ju'i!lui ptairade
\'OIlS.Ul~IJI(!SIl11('1'11ill'I'inE ~allsrecoudl'chaqucfuisÍIcette111'é.vottit-n~mesn tt< an'ivu«, suusrccum'j)'ct'aqucfuisu(.cUept''nuion o~toirc <'Ath!de t'cndt'ccitdt'cpm'un c.\ct))i)!cccUcpropo-sitton,que vusfaibk'~tntc!)tgcncMoc comprcndtuientpasauu'etnctt!,supposons(~M~t«~c«&«/~)q()'Hsoit :)r<iv<vous.noexsans<tout<'assezde vivacitéd'espritpom ccht.')
~c~er~c~c.
St'R t.A nthOU'TtON FH.<tSt.: 10!I
suivre en cette circonstance, it peut aussi s'abstenir (h.faire ce qui tut est permis. S'ih'st de t'iutt'-ret tt'un autre
<tretju'i!neh';fasse pas, cehti-ci peut te prier (tes'eu
abstenir, et ie premier a parfaitemext te droit de ra-
i'attœ.sm'cette prière, (quelquechose de son <!roitstrict;-mais Une doit pas se laisser contraindre.–Niant
qu'i! M~vW~ librement a t'autrc t'<'xcrci<;t'(!c son 'h'ott.N jH't)t.aussi conchtt~ av~chti !)n rcttan~' <)<'<!roits; il
j~ut, ''nquf'tqth's" son droit.–Tu (iesit~s
quc je n'<~<~T<'pas (~tains (!<'nu's <tt'oits, parce <p<t't'nxf'rcit'c t'en est pt'i''jm!iriahtt'; or !u as aussi (!cs()mi~.dont t'exerciez m'est prejudicinhtc; ch hien! t'cnom'c aux
tiens, et je renoncerai aux miens.
Qui donc nie fait la loi dans ce contrat? moi-mêmeévidemment. Nul homme ne peut.e!t'c ohn~e que parhu-même ;md homme ne peut reccvon' de toi que (te lui-même. Que s'il se laisse imposer une loi par une vutonte
étrangère, Habdique sa dignité d'homme et se rava!c au
rang-de ia brute, et. c'est ce qu'ii ne lui est pas j~rmis defaire.
Autrefois, pour le rappeler en passant,– un croyait1
devoir remonter, clans ie droit, naturei, a un état pri-mitif des hommes, a un état de nature; aujourd'hui, on
s'emporte contre cette méthode, ct l'on y trouve l'originede je ne sais combien d'absurdités. Et pourtant c'est tascutebonne pour découvrir te fondement de i'ohuga-tionde tous les contrats, il faut concevoir!'homme comme
n'étant encore oblige par aucun contrat extérieur, commen'étant soumis qu'~ ta loi de sa nature c'est-à-dire a ialoi morale; et c'est !a 1' ?M~ «Mais cet étatde nature dont vous parhx ne se rencontre pas dans ie
monde ree!, et ne s'y est jamais rencontre.)) Quand
CONSIDÉRATIONSK)2
cela serait \r<< qui vous dit donc de chercher vos
tdcca dans te mond'' r~el? Faut-il donc que vous voyiextour? n est f~citeuxsans doute qu'il n'existe pas! H n'en
f7c~ pa~ moins exister. A la vérité, nos judicieux pro-
fesseurs do droit naturel croient encore que tout homme,
des sa naissance, est oldi~e :'t l'Etatet envers l'Rtai pourles services qu'it en a rccHcmentreçus. MaHtcureusement,
on met toujours ce principe en pratique, avant de i'etabiir
théoriquement. L'Ë~t n'a demande a aucun de nous son
consentement; mais il aurai) du te Cau'c,et ron pourrait
dire que jusque-ia nuus sommes restes dans l'état de na-
ture, c'cst~dire que, n'étant assujettis a aucun contrat,nous ne retenons que de la toi morah). Mais nous revien-
drons sur ce point.
C'est donc uniquement parce que nousnous rimposon~&nous-mcrncs qu'une loi positive est obMgatoire pournous. C'est notre volonté, c'est notre résolution, consi"
(!6rcecomme durable, qui est !o législateur, et il n'y ona
pasd'autre. Tout autre est impossible.~uUe volontéétran-
gère n'pst unt' loi poumons; celtemême de la divinité ne
le serait pas, si elle pouvait être dinerente de la loi de la
raison.
MaisM. le secrétaire intime de chancellerie, Rehberg,a fait sur co point une importante découverte c'est queRousseau a confondu la ~o/o~e ~p~yx/c avec notre na"
turc morale, pn vertu de laquelle nous ne sommes et ne
pouvons être soumis n aucune autre loi qu'A celle de la
mison pratique. Je ne veux pas rechercher ici ce queRousseau a dit ou pense; je me demande seulement ce
que M. R. aurait du dire. La législation do la raison
pratique n'est pas suuisantc, selon lui, pour fonder un
iStat;la législation civile fait un pasde plus elles'applique
SUn !.A MÉVOLUTtONFR~ÇA!SK. loades choses que première abandonne ù notre volonté
C'ct.t ce que je p~nso aussi, et je croi~ que M.
aurait pu étendre encore davuntag-c cette proportion etdire on gênera! Laloi morale de ia raison no regarde en
rien !a ~islation civito; ello est parfaitnutcnt comptersans e!t<~c~!a dernière <ait (ptclquo chose de supeWhtetde funeste quand o!~ prétend hn donner une t)cuve!te
Mnctton. Ledomaine do in !o~s!at{on cm!') c~ ce que laraison laisse hhro; i'ohjot de ses d~poahion~ ce )i:on<loi
</r<M'~~p/o. Jusqnc-ià,M. R. a raison,et il nous pardonnera d'avoir h'aduit sa pen~ en un tan-
8~e piu« précis, puisque iui.m~mo hait si fort l'obscu-rité chez les autres. Mais il conctut Puisque ccHe tegis-taMona pour fondement quoique chose de tout il fait
voiontatre en soi, donc. mais je ne puis comprendrebien clairement ce qu'H on conclut. Or je demandais
Queique soit l'objet de ces lois, f/'p~ vient ~o~ /<'Mro<<-
~~? Je ne ~aisquelle répugnance M.R. peut avoir
pour le mot <contrat a il se dômene en des pages entières
pour y échapper, mais, Ah fin, p. 60 (4), il est force
d'accorder que, ~t~c c~0 ~c, la société civile
peut être considérée comme une association volontaire.
J'avoue que je n'aime pas ce «d'une certaine manière ?
f<ttoute cetteengeance, Si tu as une ideo solide, et.que tu
vouUtesnous en fajre part, alors parie avec netteté et, au
lieu do ton d'une certaine mamero, ?u trace une h~up
précise; que si tu ne sais rien, uu que tu n'oses peint
pnr!er, tais.toi tout (ait. ji ne faut rir'n faire ~tdemi.
Lit question était donc de savoir d'ou vient t'ohu~atiou
qu'imposent leslois civites. Je rcponds Det'acceptation vo-
(1) De tc'o/?M/tarc/<M«<r /« /o/«<t'~M /w~Mpa~
COX<HDKn.\TK~SiO/t
lontairedoceslois par l'individu; et te droit de nereeon-
naitre aucune autre loi que ce)tequ'on s'est donnée a soi-
même; est le principe de cette ~w~?<~</ /6',//M/c de Housseau, qui n'est pas notre nature rai-
sonnable même, main qui est fondée sur le premier p<!n!at de sa loi, toque! exi~ (Ut'CHCsoit notr<' ?~/y~' loi.Mais au lieu, soit de rer'onnattt'e ce droit, soit d'en dé-
montrer rinnnitc par des t~incipes primitits ()e !a raison
purp. M. R. nous raconta une tbu!c de choses que nous
écouterons une autre fois. Ktran~pr, </6'~)<?hu demandions-nous, et i! nousdébite des histoires sur
6'<?~7 est, afinde nousfaire oublier pendant ce tcmps-tanotre importune question.
Pour mettre te publie à même de ju~er ec qu'il doit
attendre de la so!idi!e d'un écrivain (pu hu impose parson ton tranchant, et ne cesse de se plaindre du habHta~e
iade, superficiel intoterabic/des autres, je parcours le pre-mier passageque je rencontre. Page /t5, il dit «Supposez
qu'un certain nombre d'hommes, qui vivaient.indépen-dants les unsa côte des autres, se reunissent pour s'occuperen commun(le t'ordre intérieur a établir entre eux et (te
la défense a opposer aux ennemis extérieurs. )) H re-
connatt bien iciun contrat social, non pas seulement d'unecertaine manière, mais pleinement. Un (les voisins re-
fuse (t'entrer dans l'association propost'c. n trouve ensuite
avantageux de s'y adjoindre. Mt)isii n'a p!us ic droit dele demander.)) De demander ~02? de s'y adjoindre? !ine dépend que de lui de !e proposer ?N'a-t-H point le droitde se resou(!rc hn-memc à se présenter, et a prier la so-ciété de l'admettre dans son scin?Voita quelles négligencesse permet ici un écrivain, qui a d'ailleurs bien montre
qu'il était maître de sa langue. Veut-il dire qu'il n'a
srt:).nKY«!.r't'n~ ~n.~cAts! )0o
p!u.s (!roit d'exiger /w/Mais je vous prie,
est-f'e qu'it avait re droit auparavant? Avait-i!, antérieu-
rement u tout(-ot)tr:u,uu<iti)')e prétention sur ta so-
ciété? (7cst ainsi qu'un .cri! d'une manirre(''<{u:voqm-,
–(lit'ai-jf pat- ~not-ntx~' .m avp<- t-n~\ion?– .')<in <!c fnirp
passer ut«'{t!'op)~it~n )'.u)ssp, <'t<!))~<'Hth~(h'rc!(~
p!'<~f)S!tif)n UHf'r<Hts<<{u<'n(');tj))i, <h'-n))'')))<~ rc~t'nnt
thus~, <tt)nnd sa )<t:<j<'H~s~nnt \-raip:<.t!s< nhtt~
maintenant, t'ontim~-t-it, ().' s'an-umtn.Hh'rtt~conttt-
)i<msr{nHHisttntp:u-ttf'tt~t''r'n<')tN':tt<ps,<'tqt))p('ut-(~rc'!ui pnnti~pnt phts <hn'~s
qu'aux {mh'<) 1) L<'s r<m()!tions
spcciatompnt coHYPnnf's avec hu h)t paraisspnt p!us dures
qup(œsn)~m('sc()ntti<ts?)auxat!trcs? Jo pensais qufles autres n'<a~n! pas sootoisaux
m(''m<?sc()n(H<K)t)s, mais
a d'an!f's, h~f{)tt'tt)'s Haif~tt pins (!<'nr.'s;<
et non pas scut~m') (d'une )ttani)''n' rotative) pa!T<
qu'eitos itii paraissaifn! phts dmTs. Kn vita ass~x sur ia
nc~ig'enccdc t'pxpr~sion. Venons maintpnantata chose
mémo. Pourquoi (tonf-sprait-ii~~?!~ pourquoi w~-
~~?/? S'it pst oh)i~' ntaintcnant, il aurait ()u t'etro aussi
auparavant, dans tf ras ou it aurait ptu !a socit't< df'Jui l
imposcrdus conditions ptus dures. Dircx-vous fpt'r'nc n'r'n
avait pas ic droit?–Mais aiors it n'est ohii~ ni mainte-
nant, ni auparavant. Les('~n<titionssont-eJHest!'op dures,
ii a parfaitement if fh'oit de renoncer a entrer dans !a so-
ciété. Lui et e!te sont deux commerçants qui estiment
leur marchandise fmssi ttautqu'Us espèrent pouvoir Ja
vendre. Tant mieux pour celui qui ~ne quelque citose
dans le marche! Qui donc aurait du etab!irietaux des
marchandises ? La question est seulement de savoir s'it
n'y a point de droits qui soient inahenabies d'eux-mêmes
et dont !'ahena)ion rendrait tout contrat iu~itimcet non
CON~D~TtONStOO
avenu. M. h. ne saurait résoudre ce)tu questit'n avec
tousses exemples; il tnut qu'ii s'en~a~e avec nous dans tu
spéculation ou qu'il se taise.
J'aurai plus d'une fois encore i'ccc.tsion de revenir sut'
cet écrivain, qui meconnait !u pointen hti~e et tribnnat
clui nondut perp~neUt'mont de en (nu a ce qm
qm cont~nd de nouveau tonton tes choses (juc Hou~
seau et ~cs successeurs ont dtstu~nnoschftmjo distin~m'
ici; qui cherche dans ta sod(''tcrot'i~inc dudroihUapro.
pric~ du so~ et (fui nous tio a i'~ta~ d<s notre nais~ath'c,~an~aucune cooptation de notm part.
Si !'obM~ation qui s'attache aux contrats sociaux r<~
suit'' uniquement (h! !a voionto dos contractants, et qu~ccU-evolonté puisso changer, il est ciair que t'~tt~ ques"tion Pcuvent~its changer tcur contrat? revient oxacte-
mont a ceuc-ci Peuvent~its conchn'e, en g'cncnd, un
contrat? Toutemodiucationdu premier contrat t~t un nou-
veau contrat, ou rancien est pjus ou moins, sinon tout
t'ait, annute, pius ou moins connrnio. Leschan~ementaetles connrmations tirent .teur obn~ation du consentement
des contractants an second contrat. Hn'y a donc p(~même
lieu raisonnabtement de poser une tcno question. j!
re8un.e immédiatement de ce qui précède que tousïoscon'
tractants doivent être d'accord, et qu'on ne peut arracher
(te t'oree à aucun son adhésion autrement une toi lui su'
rait prescrite par quctqur' autre chose que par sa vo-
tonte.
« Maissi c'était une condition (tu ('outrât d'être etcrnoi
et immuable? Je ne veux pas rechercher ici si un contrat
éternel, que le consontempnt même des deux parties nesaurait supprimer, n'est pas en gênerai quelque choRcdp
contradictoire. Pour rendre in discussion phm féconde,
SUR LA RÉVOLUTIONFH~Ç~I.SE. 407plus lumineuse et p!us intéressante, je vais droit au cas
présent, et je pose cette question Une association po!i-tiquc immuabh) n'est-cHc j)as <tuctquc chose de contra-
tHctutreetd'impu~ihtc? Et comme toute notre recherchese ~ndo ~ur des principes moraux, itn~ pout ~re ici
question que (!c contradiction morah~ d'impossihiMtuntoratc, La question revient donc proprement a celle-ci':L'ifnmutahihtu (t'nnc constitution pontique n'cst.eUcpascontrairo a ja dcstinaiicn que h loi morale assigne a i'hn'tnanitc?
Rien dans !c'monde ~en~~e, rien dans notre vie,dan~nos actions ou nos passions, aucun phénomène, en un
mot, n'a de vaiour qu'autant qu'U concourt a la cutturc.
Ln jouissance n'a par cité-même aucune valeur; ene en
acquiert une tout au phi&comme moyen do vivifier et do
renouve!er<nos forces pour lu culture.
LacM/c, c'est l'exercice de toutes les facultés on vuede ta hberte absolue, de l'absolue indépendance par rap-port à tout ce qui n'est pas nous-mêmes, notre moi pur.Je m'explique.
Si notre vrai but. final nous est assigne par et dans ta
forme de notre <noipur (I), par h loi morale qui est en
nous, tout ce qui en nous n'appartient pas a cette forme
pure, ou tout ce qui fait de nous dos êtres sensibles n'e~
pas une fin on soi, mais seulement un moyen par rap-port Aune fin plus ~!cvec, u notre fin spirimeHe. L'être
sensible, en euet, ne (toit jamais nous. déterminer, mai~il doit toujours être détermina par quelque chose <!epiunc!cv~ en nous, par la raison. I! ne doit jamais .~ir qur'1
(i) Le!cctcura d~se famHhrisct'aveccesexpressions(tansi'fntt'o-<tnctfonautrementil ne comprendrapa~cechapitre,ni aucundes
'«nvants,etce)npar''nproprefaotc.
C'~SmHHATtONS~08
sur !'ord rode la raisun, jamais autrement que suivant h)
r)'c qu'elte ht) proscrit. Nous pouvons dire de !a seu-
sibilih'' ce que, dans Marmoutei, ce sauvage dit du dan~'rdans son chant funèbre <'Desque nous fumes nos, it nous
a)~ftaaunton~ t'ttt'mhtethtctoHiahbert~ett'c~'ta-
va~ (''taiont <~t j<'u. Si htt's tPphtsfDt'L n"un diti!,
jt'Sf'rai~~n<~chh'<J<~h)Ut'rait't'cp<t))rt<u!)ntr<st!tih'
~rv~)'nr; ntaisjcs)tis!<n!J«ut'st)ns'pr\'ito))t'm<<tnh'nt.<'<ttes qu'on t'c'tachu on ~u xxut jf'ug, jfin'<'mp<t!l<'<'onh'<'mon maitrt' <'t.m<mvaiti<mcnr.Si c'est m~i qui te
terrasse, je t'ouh'ag-erai, te f~sth~torerai, !c buterai aux
pie(!s.(~nnmc tu ne peux m'Hh'Rd'aucune uti!it< j'useraide mon droit de vainqueur pour chercher ~t'ancnmir
comptetemenL ))
Or dans c~ combat il don arriver deux chosesa la sen-sibiiitr. !t faut (t'ahord <m'<d!csoit domptée et suhju~<<et!ene doitpius commander, mais oheir; cHc ne doit
ptus prétendra nous prescrire nos nns ou les stipuler.Têt est !e premier acte de ram'anchisscment de notre
moi la M/ de ta scnsibihte. Mais tout n'est
pas fait encore. Il ne sunit pas que la sensibilité ne soit
ptus maîtresse, il faut encore qu'cHe soit servante, et
servante adroite et capabte; il faut qu'ette soit utite. Pour
arriver a ce but, vous mettrex toutes ses facuites en réqui-sition, vous !os faconnercx de toutes manières, vous ies
rjeverex et !es forti<iere/a !'infini. C'est !e second acte de
t'affranchissement (te notre moi la c~?~'<9 de la sensi-
biute.
Qu'onme permette deux remarques a ce sujet. D'abord,
quand je parte ici de ia sensibitite, je n'entends pas sim.
ptement par !a ce que t'ou désignerait, fort hien d'ai!!eur~sous ce nom, !es facu!tcs iuf)''rit!ures(!er<une~ ni a )dus
SU. LA t~VunTtU.\ m.):)Si-: ~u
furte raison tes fa.-uitescorpordtes de t'homme. far oppo-sition au moi pur, jet-attache a iasensihitit.tout ce qui'f'Ls mi-même ce moi pm-, et par conséquent toutesh's facultés corporeites et spiritucttes qui trouventêtre dr-tLïminees par quelque chose d'ext('.rieura nous et en tant<I~cs peuventl'être. Tout ce qui est susceptible d'être~nne, tout ce qui peut être exerceet fortifie en fait par-tie. Seule, ia forme pm'c <!<'no[r<' moi ~s~ susijcptiN'''at)cunucuhm'c u~c~ahsutmttcnLitmnuahtc. Datf.sc''
sct~duii~t, !a cuivre <)<l'esprit,ou <!ncœur, ~ari.'spcnsucs les p!us pures ou par les plus subtintes ima~u.s<tcta rcti~ton, n'app.u-ticm pas tnuiij.sa la culture (!uia suu~
sibHitc, de re~'c ~usibic en nous, que l'uxcrcicc <.t~pi~dsla danse.
En second Heu, pcut.-etr)- (n)dqu'mt pcnscra-t-i! quu('~ exercice cLce perfectionnement des tacultes sensiblesdont je parie pourrait bien être un moyen d'accroître laforce même de Ja sensibilité et, de lui dom~r de nou-\d!es anues contre Ja raison. Il n'en est nen. L'indisci-p!inc est le caractère propre de ta sensihUit.c c'est par laseulement (jn'etie est forte des <jucvous lui arrache/'-et itistrument, e!!eper<!toute sa puissance.–Toute cette''uttm'e se fait au moins suivant des rentes, sinon suivantd' icis, en vue de certaines nns, et par cons'<tuent au
'Huinsd'mtemani'-rere~diere; elle donne en<juetnuesurte a la sensibilité t'uniforme de ta raisun; ies armes<meceUe-ciiui fournit ~ont inoifensivespour cite et nesauraient la Ldesser.
Grâce au souverain exercice (te ces deux <h'oits du
vainqueur sur la sensibilité, l'homme deviendraitc'cst-a-dire (pt'it ne d<pen(!rait pms<pte de mi-même,de son moi pur. Chaquefois que dans son cœur il dirait
CONSIDÉRATIONSno
Je fc~, il pourrai dire, au regard du monde des phé-nomènes C'est./< Sans l'exercice du premier de ces
droits, il ne pourrait, pas même ~o~ ses actes seraient
détermines par tes impulsions extérieures qui agiraientsur sa sensibilité; il serait un instrument qui resonnerait
toujours a l'unisson dans le grand concert du monde sen-
sible et qui ne manquerait jamais de rendre le ton qu'il
plairait l'aveugle Destin du tirer de lui. Si maintenant,
après avoir exerce le premier droit, il ne faisait pas va-
loir le second, il pourrait sans doute vouloir agir par lui-
même mais sa volonté serait une volonté <il voudrait, et ce serait tout. Il serait un maître, mais
sans serviteurs; un roi, mais sans sujets. Il resterait
encore sous le sceptre de 1er du Destin; il serait encore
rivé a ses chaines, et son vouloir ne ferait queles agiter
vainement. Le premier acte du vainqueur nous assure le
~M' le second, celui qui consiste Aenrôler et a équi-
per nos forces, nous assure le ~o~y.Cette culture en vue de la liberté est le seul but final
possible de l'homme, c~ /<?/~ ~M'ï7c~ une ~c <~
//wï~c sensible; mais ce but final sensible n'est pas encore
le but final de l'homme en soi il n'est que le dernier
moyen pour atteindre un but final plus clevc, son
but final spirituel, a savoir la parfaite concordance de sa
volonté avec la loi de la raison. Tout ce que riiomme fait
doit pouvoir être considéré comme un moyen d'arriver
dans le monde sensible a ce dernier but final; autrement
ses Œuvres sont sans but, ce sont des oeuvres déraison-
nables.
Sans doute la marchequ'a suivie jusqu'ici le genre Im-
main a tendu vers cette fmJ–Mais je vous prie, ôillustres
tuteurs de rhumanitc! ne vous hâtez pas trop de prendre
SCtt t. XHVOLUTÏOK PHA~'Ç.USK. i~
ces prêtes pour uu homma~ rendu a votre sa~e direc-
tion, et attendex encore un peu avant de me ranger si
complaisamment daus la ciassc (!<vos Matteurs. Laissez-moi d'abord vous expliquer tout doucement ce que peu-vent raisonnahicment signifier ces paroles. Quand jerénéchis sur cette marche de l'humanité, et que j'ad-mets qu'elle peut avoir eu un but, je ne saurais, dansmon examen, (;n assigner raisonnablement un autre quecelui dont il est ici question, puisqu'il est.!<jseul possible.~c ne dis donc pas que vous ou tout aut.rc être, vou'!ayez conçu ce but d'une manière préciseet que vousayexdirige la marche en conséquence; je dis seulement queje le conçoisd'une manière précise afin de pouvoir porterun jugement sur la nna!ite de cette marche. « elleavait été reeUement dirige, en vue de cette un, par unêtre raisonnable, n'aurait-i! pas choisi les moyens !es ptuspropres a l'atteindre?))» VoitAce que je me demande. Jene dis pas <~? cela ait et~ ainsi qu'en sais-je ? Et quetrouverai-je dans cette recherche?
Et d'abord, personne cultivé, mais il faut quechacun se c~c Toute conduite purementpassive est justement le contraire de la cunure; ce!!c~cia son principe dans l'activité pcrsonnche, et cette activitéest aussi son but. ~ucun pian de cuiture ne peut doncêtre étabn de tcne sorte qu'il soit nécessaire de ic rem-plir il s'adresse a la liberté et dépend de l'usage de !ahberté. La question doit donc être poséeainsi Ya.t.ii eudes objets ou les êtres libres aient pu exercer leur activitépersonnene en vue du but nnal de la culture?
Et que pourrait-il y avoir dans le monde entier du !'ex<périencc qui ne fournît a des êtres voulant agir l'occa-sion d'exercer leur activité? Il est donc aisé de répondre a
CO.~iDÉhAT~SH2
la question qui vieni d'être puso~car<'t)u it'est pas inop-portune. (Jui veut se cuttiver se cultive a propos <!etuut.
La guerre, dit-on, cultive, et, il tantt le rucunuaitre, et!
dispose nos âmes aux sentiments et aux :t(-tesltcro)'ques.au tHcpt'isdu danger et de la mort, au <icdaint)<'si~un.s
chaque juur ''xpus~s au ~Hh)~ a une ~y!j)(<athicpk!:?jM'oiundcj)om' t'x~ ce (jui porte fa ti~un' humaine, par~c<tuc (les ~uHl'anccs ou dc~ pct'its cotnmutts nous rap-
p!'t)chent(tavauta~t't<'s unsdcs:mtt-cs. ~ais ne prenezpas cuta pour nn ~Opt; <!cvoh'c ~an~unmirc amuur dc~
combats, pour unn humble priuru que la pauvre b!tu~-nite vous adresserai par ma bouebc, a<iu que vous neeessiexpas de la dechu'er par (kSpUerres sanglantes, i~a
guerre ne porte a l'héroïsme que les âmes qui en ont
déjà lescnutnein elle excite dansles cœurs sans noblessel'amour du piua~e et de t'oppression du taibie. ~Hu a
produit des beros et de taches voleurs, niais dans quetieproportion? Si i'oM ne vousju~t'ait (pte d'après ce
principe~vous resteriez blancs connue nei~c, quand meinevous seriez plus mauvais que ne vous le permet ta t'ai-btesse de votre siec!c. Le plus dur despotisme cultive.
f/esc!ave voit <!ansia sentence 'te murt que jn'unoncecontre tui son tyran l'arrêt de i'mnttuahteJestnt, et il s'ho-nore p!us par ta hbre soumissiott de sa vuiunte a ia iata-iite inc\orabte, qu'il nepeut être nL'tripar (juoique ce soitau monde. Le destin qui tire aujourd'hui l'e~avc de la
poussière pour le placer sur tes dt~res du h'onc, et qmdemain te fera (te nouveau rentrer dans son neant~ nelaisse a t'homme rien autre rho~ que rhommc. De ta
chez tes Sarrasins et tes Turcs cette douceur (lui respiredans leurs romans, et ce dévouement aux étrangers et auxmalheureux qui donune dans leurs actes. Voila ce que
SUR LA RÉVOLUT!ON FRANÇAISE. i!3
8
produit l'idée du destin citez ces nobles peuples, cette
même idée qui fait du vil Japonais un meurtrier résolu,1
parce qu'il ne craint pas les reproches de sa conscience.
Soyez donc aussi despotes. Si nous le voulions d'ailleurs,nous trouverions moyende nous periectionnermemc avecun de vos lacets de soie autour du cou.
Les moyens (le culture ne manquent donc jamais;mais ici s'élève la seconde question sont-ils réellement1
employés? Dans la marche qu'a suivie jusqu'ici l'espace
humaine, peut-on indiquer un progrès vers la parfaite
liberté?–Ne vous laissezpas effrayer par cette recherche;nous ne jugeons pas, comme vous, d'après te résultat.Si aucun progrès remarquable ne nous apparaît, vous
pouvez dire hardiment c'est votre faute, vousn'avez pasmis en usage les moyens qui étaient a votre disposition
et nous n'aurons a répondre a ce!a rien de solide, c'est-
à-dire rien du tout, car nous ne sommes pas des sophistes.Maisce progrès se montre bien réellement, et c'est ce
que l'on devait attendre d'ailleurs de la nature de
l'homme, laquelle ne saurait absolument rester station-
nairc. Les facultés sensibles de l'humanité ont certaine-
ment été cultivées et fortinccs de bien des manières de-
puis le moment ou nous pouvons commencer a suivre sa
marche. Devons-nous vous en remercier, ou bien a quien tiendrons-nous compte?
En fondant et en gouvernant vos Ëtats vous êtes-vous
donc réellement propose pour but unal de rendre notre
culture possible et facile? J'examine vos propres explica-tions Ace sujet, et aussi loin que je puis remonter, je ne
vous entends parler que du maintien de vos droits et det~o~'ehonneur, que du soin de venger vos offenses. H
semble ici qu'en construisant votre plan vous n'ayez point
CONSIDÉRATIONSliA
son~e a le moins du monde, mais & vous seuls, et
que nous n'y soyuus admis que comme des instruments
pour uns. On si parfois un sentiment généreux se
place sur vos lèvres, vous ne partez que du bien-être devos udelcs sujets. Pardonnex-nous si votre générositém'us es!, un peu suspecte, (~umd vous poursuives pournous un but que nous puursmvons bien nous-mêmes,la jouissance sensible.
Peut-être cependant n'avex-vous d'autre tort que de
ne pas savoir vousexprimer peut-Ctre vosactes valent-ils mieux que vus paruies. Je cbet'chc dune, autant queceta est possible a travers le labyrinthe de vos détours,au miiicu de la nuit profonde et du mystère que vous
répandez sur votre marche, je cherche, dans les maximesde vosactes, l'unité qui pourrait leur servir de but. Je
cherchû religieusement, consciencieusement, et je trouve:la ~oMu~</ f~'c ~/o/~ < l'~c~-&~?~~e </c~ Je prends te premier butlcomme un moyen pour notre fin suprême, la culture dela liberté, et j'avoue ne pas comprendre comment il peutêtre bon pour le propres de notre activité propre quepersonne n'agisse par soi-même si ce n'est vous com-ment il peut être utile l'anranchisscmcnt de notre vo-
lonté, que sur tout votre sol personne n'ait de volonté
que vous; comment, pour rétablir sa pureté, notre moi
peut avoir besoin que vous soyez les seules âmes et quevous mettiez des millions de corps en mouvement. Je
rapproche le second but de notre hn dernière, et iciencore je n'ai pas assez de pénétration pour apercevoirce que notre culture peut gagner à ce que votre volontése substitue ou non a quelques milliers de volontés de
plus. Croyez-vous que l'idée de notre digmte. s'élèvera
SUHLAH~OLUTtONFh~~U.USH ~5
beaucoup parce que notre maure possédera do nombreux
troupeaux?Nul assurément ne comprendra tout cela, s'il n'est.
assez Itcureux pour être initie aux profunds secrets de
votre politique (1), surtout itu lin Ibnd de tout, au mys-
tère de l'equilil~'e européen. Vous voûtez que votre vo-
lonté soit souveraine dans vos États aiin de pouvoir, au
caa oit quelque danger menacerait i'eumtihru, y tnirc tacc
i1 l'instant avec toute l'énergie de cette voiontc; vous
voulez (lue votre État soit aussi puissant au dedans et
aussi étendu au dehors que possible, atm d'avoir une très
grande ibrce à opposer à ce danger. Le maintien de cet
equihbre est votre dernier but final, et les deux autres
buts sont des moyens d'y atteindre.
Serait-ce donc reeuement tH votre but nnal?
Permettex-moi d'en douter encore un moment. De qui
donc cet équilibre a-t-it tant il craindre, sinon de vos
égaux? U faut donc qu'il y en ait réellement parmi eux
qui cherchent a le troubler? Or quci est te but iinal de
ces perturbateurs? Sans doute cctui-ta même que vous
poursuivez comme un moyen pour votredernier but nnai
la souverainet6 ia plus étendue et la plus illimitée.
Il faut pourtant déterminer a peu près combien grande
doit être la puissance de chacun des ~tats auxquels la
politique impose le maintien de cet équilibre, pour que
les plateaux de la balance n'inclinent pas plus d'un côté
(<)Unesecrètehorreurt'cmparede l'vcrivaincituptushaut, lors-
(nrHentend(Urc quctqu'tmquele simplebonsenssunitpourcom-
prendrecequ'tt luia ct<!J~sqtx't~ dlniellede comprendre.J'nvoue
quejepartagecetteophion. « ~ais legoûtde ta profondeury pas-
aera ondeviendraaupcrnckt,si l'on ditcda touthaut!a Que
M.H. taisaeà sonadversairelesoind'y p'cndregardet
CONStHHHATtONS~6
que (te l'autre. C'est la que vous trouvez votre limite
précise allez jusque-la, et laissez aussi !es autres s'avan-cer tranquillement jusque-lA, si vous n'avez réellementd'autre but que l'équilibre et si vous êtes tous d'hon-nêtes ~-ens.–Mais un autre, dites-vous, a transgressecette limite; il ~ut que nous la transgressions a notretour, a<in que l'équilibre interrompu soit rétabli. Siles ptateaux avaient été d'abord bien équilibrés, vousn'auriez pas eu besoin de franchir la limite; vous auriezempêche que l'autre ne la franchit. Vous êtes suspects dene l'avoir laisse faire que pour avoir aussi un prétextede transgresser vos limites et pouvoir aussi rompre l'équi-libre a votre tour car vous vous nattez secrètementd'avoir l'avantage sur ce téméraire et de faire quelquespas de plus que lui. Ona vu dans notre temps de grandespuissances s'allier pour se partager entre elles certainspays, afin de maintenir l'équilibre. !I n'en auraitpas moins subsiste, si aucune d'elles n'avait rien pris.Pourquoi choisir le premier moyen de préférence ausecond? Jl se peut sans doute que vous vous con-tentiez d'être les conservateurs de cet équilibre, tant quevous n'avez pas assez de force pour remplir un rôle quevous aimeriez bien mieux, celui de le détruire, et quevous soyez charmés d'empêcher les autres de le déran-ger, afin que vous puissiez le faire un jour vous-mêmes.Maisc'est une vérité démontrée par des raisonset par l'histoire tout entière, que ~cw/~ce </c~M/c~
~oy~-c/<~ c~ < ~tc ~M~c <7/ec~c/~ ~/M/'c/~ ï/<~c//c. Nos politiques
l'avouent eux-mêmes très naïvement en parlant des (tan.gers qui menacent i'équiHbrc ils supposent très certai-nement citez les autres ce qu'Us ont eux-mêmes sur !a
sm LA HËVULUTl~N t-'UANCAtSt: 4d7
conscience) Un ministre doit rire en entendant un autre
ministre parler sérieusement de cet équilibre; et ils
doivent rire tous deux en nous voyant, nous antres, quine possédons pas nn pouce de terre et n'avons point,de
pension a gagner, les smvrc avec candeur dans leurs
graves recherches. Si aucune des monarchies modernes
ne s'est notablement rapprochée du but n atteindre, ce
n'est certainement pas le t~ mais Ic~M~o~' (pu lui
a manque.Mais quand il serait aussi vrai que cet équilibre est
votre dernier but unat qu'il est certain qu'il ne l'cst pas,il ne s'ensuivrait pas qu'il dut être le nôtre. Nous, du
moins:,nous i'cronsde ce but mêmeun moyen pour notre
but final; nous, du moins, nous nous demanderons pour-
quoi donc l'équilibre doit cire maintenu.
-Des qu'il sera détruit, dites-vous, il s'élèvera une guerreterrible d'un contre tous. et cet un engloutira tous les
autres. Quoi vous craignez si fort pour nous cette
unique guerre, qui, si tous les peuples étaient unis sous
un seul chef, enfanterait une paix perpétuelle! Vous
craignez cette unique guerre, et pour nous en préservervous nous engagea en des guerres interminables!1
Vous craignez que nous ne soyons subjugues par une
puissance étrangère, et pour nous garantir contre ce
malheur, vous aimez mieux nous subjuguer vous-mêmes!
Oh! ne nous attribuez pas avec tant de confiance votre
manière de voir les choses Il faut bien croire qu'il vous
est plus agréable de nous subjuguer que de laisser :t
d'autres ce soin; mais nous ne savons pas pourquoi cela
devrait nous être aussi plus agréable. Vous avez le plustendre amour pour notre liberté vous voulez en être les
seuls maîtres. La destruction absolue de Féquilibrc
(:()NS!UÉhATtUNSlis
européen ne sera jamais aussi funesteaux peuplesque no
Fa <~<le maintien de ce malheureux équilibre.Maiscomment et pourquoi est-il donc nécessaire que
cette guerre, cette conquête universelle suive la suppres-sion (le l'e<piilibre invo(}ue?Qui donc ia préparera? Un
des peuples qui sont n'anchemcnt dégoûtes de vos guerres,et qui se seraient déjà volontiers cultivés dans l'état de
paix'? Croyez-vous qu'il importe beaucoup A l'artiste ou
au paysan de l'AHema~nuque l'artiste ou le paysan de
la Lorraine ou de l'Alsace trouve, dans les manuels de
géographie, sa ville ou son village au chapitre de l'empire
allemand, et qu'il laissera la son burin ou sa charrue pourse donner ce plaisir? Non,celui qui soulèvera cette guerre,ce sera le monar(}ucqui se trouvera le plus puissant, une
t'ois l'équilibre renverse. Voyezdonc comme vous raison'
nez et comme nous raisonnons a notre tour. Afin
qu'une monarchie n'engloutisse et ne subjugue pas tout,il taut, dites-vous, qu'il y en ait plusieurs assez fortes
pour se maintenir en équilibre; et afin qu'elles soient
assez fortes pour cela, il faut que chaque monarquecherche a s'assurer au dedans la souveraineté, et à étendre
de temps en temps ses limites au dehors. Nous, au
contraire, nous raisonnons ainsi cette tendance conti-
nuelle a s'agrandir au dedans et au dehors est un grandmalheur pour les peuples.S'il est vrai qu'ils soient obligesde le subir pour en éviter un autre incomparablement
plus grand, cherchons donc la source de ce plus grand
malheur, et détournons-la s'il est possible. Nous la trou-
vons dans la constitution de la monarchie absolue toute
monarchie absolue (c'est vous-mêmes qui le dites) tend
incessamment il la monarchie universelle. Tarissons cette
source, et notre mal aura perdu sa raison d'être. Quand
SUR LA t~VOLUTtUN FH.Si-;ii9
personne ne songera plus Anous attaquer, nous n'aurons
plus besoin d'être armes; alors les guerres terribles que
nouRsupportons, et, ce qui est encore plus terrible, ce
pied de guerre sur lequel nous restons toujours, afin
d'empêcher la guerre, tout cela ne sera p!us nécessaire;
des lors aussi il ne sera plus nécessaire que vous tra-
vailliex aussi directement a la souveraineté de votre vo-
~nte. –Vous dites Puisqu'il faut qu'il y ait des monar-
chies absoutes, il faut bien que l'espèce humaine s'attende
a soufn'ir une quantité innombrable (te maux. Nous re-
pondons Comme l'espèce humaine ne veut pas s'mtfrir
cette innombrable quantité de maux, il ne doit point y
avoir de monarchies absolues. Je sais que vous avexpour
soutenir vos raisonnements des armées permanentes, de
la grosse artillerie, des chaînes et des cachots; mais ds
ne m'en paraissent pas plus solides.
Honneur a qui de droit; justice il chacun! Le l'rottc-
ment des nombreuses roues de cette machine europf'enne,
de cette ingénieuse invention de la politique, tenait tou-
jours en baleine l'activité de la race humaine. C'était,
au dedans et au dehors, un combat perpétuel de forces
opposées. Au dedans, ~race au merveilleux mécanisme
de la subordination des rangs, le souverain pesait sur les
rouages les plus voisins de lui, ceux-ci a leur tour sur
ceux qui leur étaient immédiatement subordonnes, et
ainsi de suite jusqu'aux esclaves qui cultivaient la terre.
Chacune de ces forces résistait a l'action et pesait a son
tour de basen haut; et ainsi s'entretenait, par le jeu varie
de la machine et par l'élasticité de l'esprit humain qui
l'animait, ce merveilleux mécanisme, qui dans son en-
semble péchait contre la nature et rendait, pour peu
qu'il ~écartât d'un pointées produits les plus divers:
CONStDÉRATIOISS120
en Allemagne, une république fédérative; en France,une monarchie absolue. Au dehors, ou il n'y avait pasde subordination, l'action et la réaction étaient détermi-nées et entretenues par la tendance perpétuelle a la mo-narchie universelle, laquelle, pour n'être pas toujoursclairement conçue, n'en était pas moins le dernier butde toutes les entreprises, anéantissant ia Suède dans lasérie politique, afiaiblissant.l'Autriche et l'Espagne, tirantdu néant ta Russie et la Prusse, et donnant aux phéno-mènes morauxde l'humanité un nouveaumobile d'actions
héroïques, l'orgueil national sans nation. L'examen de ce
jeu varie peut procurer a l'observateur une jouissanced'esprit qui excite sa pensée, mais il ne saurait satisfaireie sage et l'instruire de ce qu'il a besoin de savoir.
Ainsi donc, quand même nous aurions avancé notreculture du côte de la liberté, non-seulement ~o~ vosconstitutions politiques, mais encore l'effet même deces constitutions, nous ne vous en devrions aucune re-
connaissance, puisque tel n'était pas votre but et que vousvous proposiez tout le contraire. Vous aviez pour butd'anéantir dans l'humanité toute liberté de volonté, a
l'exception de la vôtre; nous avons combattu contre vous
pour cette liberté, et si nous avons été les plus forts danslutte nous ne vous devons certainement rien pourcela. il faut reconnaître, pour vous rendre pleine jus-tice, que vous avez cultivé &dessein quelques-unes denos facultés, mais pour les rendre plus aptes à vosfins,et non aux nôtres. Vousen avez tout a fait usé avec nouscomme nous aurions du le faire avec nous-mêmes. Vousavez soumis notre sensibilité, et vous l'avez contrainteà reconnaître une loi. Après l'avoir soumise, vous l'avez
façonnée de manière à la rendre propre a toutes sortes de
SUR nÉVOLUTION FnAN(:SE. d2i
uns. Jusquc-1~ tout était bien, et si vous vous en étiez
tenus la, vous auriez été les vrais tuteurs de l'huma-
nité. Mais c'était votre raison et non !a nôtre, votre vo-
lonté et non ia notre, qui devait, en maîtresse suprême,
fixer ses fins a cette sensibilité soumise et laconnée. Aiin
de nous rendre plus dociles a vos ordres, vous nous avez
fait enseigner toutes sortes de sciences, dont la forme et le
contenu avaient été arranges tout exprès d'après vos plans.
Vous nous avez iait apprendre toutes soutes d'arts, ann
que nous puissions vous désennuyer, vous et votre entou-
rage, ou afin que nous vous fournissions, a vous et aux
instruments d'oppression qui sont entre vos mains pour
vous suppléer au besoin, l'éclat qui vous sert a éblouir les
yeux du peuple. Ennn, et c'est la le chef-d'œuvre dont
vous vous félicitez le plus, afin d'avoir des machines
que vous pussiez employer contre tout ce qui ne voudrait
pas reconnaître votre volonté pour loi, vous avez instruit
des millions d'hommes dans l'art de se tourner sur un
signe à droite ou &gauche, de se serrer les uns contre les
autres en forme de muraille pour se séparer ensuite tout
à coup et égorger leurs semblables avec la plus terrible
dextérité. Voilà, si je ne me trompe, tout ceque vous avez
fait à dessein pour notre culture.
En revanche, vous l'avez aussi arrêtée & dessein ce
n'est pas sans raison que vous avez retenu nos pas et jeté
des chausse-trappes sur notre chemin. Je ne veuxpas vous
rappeler ce qu'a fait l'idéal de toutes les monarchies,
celle qui en représentait les principes de la manière la
plus forte et la plus conséquente, la Papauté. C'était 1A
un désordre dont vous étiez innocents; vous étiez alors
vous-mêmes des instruments dans une main étrangère,
comme nous le sommes aujourd'hui dans la vôtre. Mais,
CUNStUÉRATtOMS122
depuis que vous êtes libres, jusque quel point vos prin-cipes se sont-ils écartes de ceux de votre ~rand maitrc,auquel un petit nombre seulement parmi vous (1) témoi.
gnent la reconnaissance qui lui est due? !<'airedépendre!e~ opinions de l'homme d'une autorité étrangère, afind'étouner en lui le germe de toute activité personnelle etde le rendre purement passif, tel ctait le principe sur
lequel se tondait cette terrible monarchie universelle, etavec ce principe, aussi vrai que l'ait jamais été un principeinventa par l'esprit, de renier, se maintient ou s'écrouleinévitablement la monarchie absolue. Celui qui ne peutdéterminer ce qu'il doit croire n'entreprendra jamais dedéterminer ce qu'il doit taire maiscelui qui aurancbit son
intelligence affranchira bientôt aussi sa volonté, Voila,ô immortel Frédéric! ce qui sauve ton honneur dans le
jugement de la postérité; voilà ce qui t'éléve au-dessusde la classe des despotes dévastateurs, et te place dans In
glorieuse série de ceux qui ont préparé les peuples à laItberté. Ton esprit clairvoyant ne pouvait manquer d'aper-cevoir cette conséquence naturelle pourtant tu voulus
que l'intelligence de tes peuples fut libre; tu voulais doncnécessairement qu'ils tussent libres eux-mêmes, et s'ilst'avaient paru murs pour la liberté, tu la leur aurais
donnée, au lieu de te borner à les y façonner au moyend'une discipline parfois un peu dure. Maisvous autres,que faites-vous? Vous vous conduisez sans doute d'unemanière conséquente, plus conséquente peut-être quevous ne vous en doutez vous-mêmes; car ce ne serait pasla première fois que quelqu'un aurait trouvé dans son in-stinct un guide plus sûr que dans son raisonnement. Vous
<i) Cependantou commence&reconnaître et &remplir ton devoir.
srK LA HKVUt.UTtON Fn~N(,tSt'1-23
voûtez dominer il vous faut d'abord soumettre l'intelli-
gence (teshommes des que celte-ci dépendra de votre vo-
lonté, te reste suivra sans peine. La monarchie absolue ne
saurait subsister a coto de l'absolue liberté de penser. Vous
le savez, ou le sentez, et vous prenez vosmesures en con-
séquence. Ainsi, un jour, pour vous citer un exemple, un
homme de cœur se leva du sein de l'esc!ava~e spirituel,
un homme qui, s'il paraissait aujourd'hui, se verrait au-
jourd'hui condamna a descendre dans les caveaux où vous
enterrez les vivants, et arrachant de la main des despotes
romains le droit de prononcer sur nos opinions, il le
transporta un livre mort. C'était assez pour un premier
pas, d'autant plus que ce livre laissait une vaste carrière
à la liberté de l'esprit. L'invention du livre vous plut, mais
non pas la vaste carrière. Vous uc pouviez faire que ce
qui était arriva ne le fut pas, mais vous prîtes vos me-
sures pour l'avenir. Vous renfermâtes chacun dans l'es-
pace qu'avait embrasse son esprit en cet essor des esprits
Vous l'entourâtes, comme un revenant qu'on exorcise,
de distinctions et de clauses; vous enchaînâtes a ces
clauses son honneur et son existence civile, et vous lui
dites Puisque malheureusement tu es ici, nous voulons
bien t'y laisser, mais tu n'iras pas plus loin que ces pieux
que tu voislà plantés et alors vous fûtes plus assurés
que jamais de notre esclavage spirituel nos opinions
étaient rivées a une lettre dure, innexible. Que ne nous
avez-vous laisse le juge vivant fie nos opinions N'étant
entraîné par aucune contradiction, il aurait suivi, du
moins à quelque distance, la marche de l'espèce humaine,
et nous serions véritablement plus avances aujourd'hui
que nous ne le sommes. Cefut là votre coup de maître
Tant que nous ne comprendrons pas qu'aucune chose
CONSt!)KHAT!ONS42A
n'est vraie parce qu'elle est dans un livre, mais que telivre est vrai, saint, divin, si i'on veut, parce que ce quis~ytrouve est vrai, vous pourrez nous tenir attaches acette unique chaîne.
Vous ètes restes ici, vous êtes restes en tout nde!cs ace prmcipe. Vousavezplante des pieux dans toutes les di.rections que peut prendre l'esprit humain pour indiqucrles ventes privilégiées, et vousy avez poste de doctes spa-dassins chargés de repousser quiconque voudrait a!tcr audelà. Comme vous ne pouviez pas espérer que cc~ cham-pions à gages auraient toujours le dessus, vous avez, pourplus de sûreté, établi une haie communatc entre les pieuxet vous avez place des gardiens aux portes. Vous pouvezbien sounrir que nous prenions nos ébats dans l'intérieurde cette enceinte; vous jetez même parmi nous quel-ques liards, quand vous êtesde bonne humeur, pourvoiamusera nous les voir attraper, mais matheur a celuiqui se hasarde hors de cet enclos, ou qui, en gênera!,ne veut reconnaître d'autre enceinte que ccHcde l'esprithumain Si quelqu'un parfois se glisse a travers la haie,c'est que ni vous, ni vos gardiens ne le remarquez. Toutce qui tend d'ailleurs a rétablir ta raison dans ses droitsopprimés, a placer l'humanité à ses pieds, à faire quecelle-ci voiepar sespropres yeux; ou, pour vousdonnerun exemple qui vous convainque a l'instant, des re-cherches comme celle-ci, tout cela n'est à vos yeux quefolie et abomination.
Tel serait donc'!c compte que nous aurions à régtcravec vous au sujet des progrès que nous avons faits dansla culture sous vos constitutions politiques.–Je laisse decôte l'influence de ces constitutions sur notre culture mu-rale proprement dite je ne veux pas vous rappeler ici la
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 125
corruption morale qui, partant de vos trônes, se répandtout autour de vous, et dont les degrés peuvent servir à
compter les milles que l'on a encore a iairc pourarriver
à vos résidences.
Une chose est maintenant établie si la culture de la
liberté (1) peut être l'unique but final de la constitution
politique, toutes les constitutions politiques qui ont pourfin dernière lebut précisément opposea celui-là, à savoir
l'esclavage de tous et la liberté d'un seul, la culture de
tous en vue des lins de ce seul individu, et l'etounement
de toutes les espèces de culture qui peuvent conduire a la
liberté d'un plus grand nombre, toutes ces constitutions
ne sont pas seulement susceptibles de changement, mais
elles doivent aussi être réellement changées. Nous voici
donc arrives a la seconde partie de la question s'il yavait uneconstitution politique qui poursuivit évidemmentce but par les moyens les plus surs, cette constitution ne
serait-elle pas absolument immuable?
(!) !ci encore it pourrait bien y avoir un malentendu, je ne dis pas
de la part du publie ignorant, mais du côt<!des savants. Il doit rcsuttcr
clairement de tout ce qu'ona vu jusqu'ici de ce traite, queje distingue
trois espèces de liberté la tibcrtc <ra~cen<~n<~c, qui est la même
dans tous les esprits raisonnantes, ou !a /MCM~c<~c<reune Mu~ept'e-
Mu'ercet <'t<(~en~an<e,la liberté co.~)!O~~Me,c'est-à-dire l'état OM
l'oiane ~~en~ )'<~e~)~)< de rien hors f/e aucun esprit ne la
possède, que l'esprit infini, mais elle est le dernier but de la culture
de tous les esprits hnis; la liberté ~oft~Mc, ou le droit de ne Te-
connaftre (~aM<feloi ~ue celle g~'on s'est donnée Mt-Mefne. Elle
doit être dans tout Ëtat.–J'espère qu'it n'y a plus lieu pour personne
de douter de iuqucite de ces libertés je veux parier. Si quelqu'un
était tenté de confondre ce que je distingue, et cela peut-être pour
me punir ensuite de sa propre faute, puisse cette note lui servir de
barrière ï
CONStUÉHATiONS126
Si tesmoyens convenables avaient été réellement choi-sis, l'immanite se rapprocherait peu a peu (tu son grandbut; chacun de ses membres deviendrait do plus en plus!ibre, et les moyens d<mt !~si)uts seraient atteints n'au-raient plus d'usage. Dans le mécanisme.d'une telle consti-tution politique, chaque rouage ~arrêterait et serait
supprime ù son tour, puisque celui qu'il mettait directe-ment en mouvement cummcnccrait a se mouvoir par sa
propre lorce. Si le but nnal pouvait jamais être partaite-ment atteint, iln'y aurait plus besoin de constitution poli-tique; la machine s'an'ctcrait, puisqu'aucune pressionn'agirait plus sur elle. La loi universelle de la raisonréunirait tous les hommes dans une pariaitc harmonie de
sentiments, et nulle autre loi n'aurait plus a veiller sm'leurs actes. Il n'y aurait plus lieu d'établir aucune règlepour déterminer ce que chaque membre de la sociétédevrai sacrilicr de son droit, puisque personne n'exige-rait plus qu'il ne serait nécessaire, et que personne nedonnerait, moins. Comme tousseraient toujours d'accord,il n'y aurait phts besoin de juges pour terminer leursdinerends.
C'esUci que l'adorateur de l'humanité ne saurait jeterun regard, même rapide, sans sentir son coeur pénètred'une douée nammc. Je ne puis encore achever cette es-
quissc.je n'ensuis encore qu'a broyer mcscoulcurs. Mais,je vous prie, ne vous laisscxpas s! vite em'aycr par cettesentence: autant de têtes, autant de sentiments. Vous
croyez peut-être qu'elle est contraire à cette autre l'hu-manité n'a nécessairement, ne doit avoir et n'aura qu'unseul bul final, et non-seulement les fins diverses que lesdivers individus se proposent pour l'atteindre s'accorde-ront entre elles, mais elles s'aideront et se soutiendront
SUR LA RÉVOLUTtON PRAN~USK. 127
les unes les autres?–Pas le moins du monde. Ne souffrez
pas que cette consolante perspective soit troublée par cette
réflexion chagrine cela ne se réalisera jamais. Sans doute,
cela ne se rcaliserajamais complètement; mais–ce n'est
pas seulement ici un doux rêve, une espérance décevante,
c'est un principe certain qui se tonde sur le progrès né-
cessaire de l'humamté, elle doit se rapprocher, elle se
rapprochera, il faut qu'elle se rapproche toujours davan-
tage lie ce but, Eue s'est ouvert à ta fin sous vos yeux un
passade; elle a obtenu, au prix d'un rude combat contre
toutes les forces intérieures et extérieures conjurées pour
la perdre, quelque chose (mi, du moins, vaut mieux que
vos constitutions despotiques, lesquelles tendent à dégra-
der l'humanité. Mais je ne veux pas anticiper sur mon
sujet, je ne veux pas moissonner avant d'avoir semé.
Nulle constitution politique n'est immuable; il est dans
leur nature à toutes de se modiner. Une mauvaise, qui va
contre le but final nécessaire de toute constitution politi-
que, duit être changée; une bonne, qui y tend, se change
clle-mémejla première est un feu de paille pourrie qui
fume sans donner de lumière ni de chaleur il faut l'étein-
dre. La seconde est une lampe qui se consume elle-
même, a mesure qu'elle éclau'e, et qui s'éteindrait si le
jour paraissait.La clause qui déclarerait le contrat social immuable
serait donc en contradiction flagrante avec l'esprit même
de l'humanité. Dire je m'engage a ne jamais rien chan-
ger ni laisser changer dans cette constitution politique,
reviendrait à dire je m'engage à n'être plus un homme
et, autant qu'il dépendra de moi, âne pas souffrir que
quelqu'un le soit. Jeme contente dû rang d'animal savant.
Je m'oblige et j'obligetous les autres a en rester au degré
128 CONSIDÉRATIONS
de culture on nous sommes parvcnus.tA l'exemple desIlcastors qui bussent aujourd'hui exactementcomme leursancêtres d'Ji y a mine ans, {~l'exemple des abeilles quidisposent actuencmcnt leurs alvéoles comme ies abeiiicsd'autrefois, nous voûtons que notre fnconde penser, quenos maximes theoretiqucs, politiques et morales, restentdans mine ans ce qu'cHcs sont aujourd'hui. –Kt si unengagement de ce ~enrc avait etc pris, serait-il vatabic?Non, homme, tu ne pouvais pas promettre une pareincchose; tu n'as pas le droit d'abdiquer ton humanité. Tapromesse est contraire au droit, et par conséquent nonavenue.
L'humanité aurait donc pu s'oublier elie-mcme a cepoint qu'elle aurait renoncé a l'unique privilège qui hdistingue des autres animaux, au priviiége de se perfec-tionner a l'infini, qu'elle aurait abdiqué pour toujours savoionté sous ie joug- de fer des despotes, et qu'eue se se-rait engagée Ane le briser jamais?–Non, ne nous aban-donne pas, pattadiumsacr~ de l'humanité, pensée conso-lante, qui nous persuades que de chacun de nos travaux etde chacune de nos sounrances sortiront pour nos frèresune perfection nouvelle et un nouveau plaisir, que noustravaillons pour eux et ne travaillons pas en vain, et qu'àcette même place où nous nous donnons aujourd'hui tantde peine, oit nous sommes fou!és aux pieds, et–ce quiest pire que ccta–ou il nous arrive d'errer et de faillir
grossièrement, une race neurh'a un jour, qui pourra toutce qu'elle voudra, parce qu'elle ne voudra rien que debon, tandis que dans des régions plus élevées nousjouirons du bonheur de notre postérité, et que nous re-trouverons dansses vertus tous les germes que nousauronsdéposés en elle Vivino on nous, 6perspective de ce temps,
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 120
le sentiment de notre dignité, ctmontrc-nous-ia du moins
dans nos plans, alors même que notre état actuel lui est
contraire. Inspire-nous la hardiesse et l'enthousiasme dans
nos entreprises; et si l'un de nous en sortait meurtri, que
dej~ soutenu par cette première pensée «j'ai fait mon
devoir,~ il soit encore reconforte par cette seconde
« aucune des graines que je semé n'est perdue dans le
monde moral; j'en verrai les fruits au jour des gerbes,
et je m'en tresserai des couronnes immortenes. ))
Jésus et Luther, défenseurs sacres de la liberté, vousqui,dans les jours de votre abaissement, vousprécipitant, avec
une force gigantesque, sur tus fers qui enchaînaient l'hu-
manité, les avez brises partout oit vous les avez touches,
jetez, du haut des sphères que vous habitez, un regard
sur vos descendants, et réjouissez-vous a !a vue des se-
mences déjà levées et qui commencent à se balancer <m
vent. Bientôt un troisième libérateur, celui qui acheva
votre (ouvre, celui qui brisa les dernières et les plus fortes
chaînes de l'humanité, sans qu'elle le sût, et peut-êtresans qu'il le sut lui-même,sera réuni a vous. Nous le pleu-
rerons, mais vous lui marquerez avec joie la place qui
l'attend dans votre société, et le siècle, qui saura le com-
prendre et reproduire son imag'c, vous en remerciera.
CO!<S!DÉHATION$130
CHAPITRE Il.
PLAN DE TOUT LE RESTH HE CHTTU RHCHK~CHE.
Celui qui dérive ses propositions des principes primitifsde la rnison, au moyen d'tme déduction rigoureuse, est
déjà assure d'avance de leur vérité et de laiaussete de
toutes tes oitjeetions (pt'on peut jour adresser: ce qui ne
saurait subsis~'r a côt~ (!'e!tL'sdoit 6h'c ~ux il peut k'
savoir, sans tucn~cn avoir entendu par!fr. Sidonc, dans
!c chapitre prccedcnt, il a cto déduit de principes ~'rimi-tirs de'ce pCnrcpar des raisonnements exacts; en a-t-ii
et~ ainsi? c'est ce (ptcjc husse a ïa sagacité des penseurs!e soin de décider; dis-je, il a été démontre que!c droit qu'àun peuple de changer sa constitution politiqueest un droit inauenable, imprescriptible, toutes !cs objec-tions (pte t'oh <eve contre l'imprescriptibintedecedroitsontcertainement capticuseset se fondentsur une !ausseap-
parence. Toute recherche sur !a légitimité des révolutions
en gênerai, ot par cons(''nuent<!echacune en particulier~serait dune dose, si nous voulions prendre les choses A
r''xtr'me rigueur; et(pticonque serait d'uncautreopimonaurait ou hienainousmontrer quetque faute dans nos prin-
cipes ou <tansnos conséquences, ou hien a abandonner
son opinion comme fausse et inexacte, quand même il ne
remonterait pas jusqu'à la fausse apparence surJaqucHec!Icse fonde,Il n'est passupcrfhi de rappeler et d'inculquercette idée toutes les foisque l'occasion s'en présente, afin
que notre public –je ne songe pas ici seulement au pu-
blic non, philosophique–s'accoutume insensiblement
SL'HLA n6v6t.t)TtnNFhAKCAtSE. t~
reunir en un corps (le systèmeses convictions et ses (ai-
mons sons des principes termes et durabif's, et perde le
goût de coudre ensemble des lambeaux déparâtes, et de
disputer d'une tuaniere sophistique. Ce qui est dérive par
une exacte déduction d'une proposition démontrée est
vrai, et vous n~'n't'nyet'cx p~tc pehsuu!' !<u en lui en
montrant le côte <!an~erpnx;!c contrais ~t taux et doit
~trc abandonna quand ïï~mû r:~p (tu ~oh~ tct'rcstrc pa-
raïtt'ait tourner sur ce point.
Mhis, comme cette cun~quenco nécessaire n'est provi-
soirement et ncserapent-ctrede longtemps encore qu'un
souhait pieux,on rendrait au publia dans t'~at actuel des
choses, un fort mauvais service, si on ie hissait J:~après
avoir etabMles premiers principes duju~etnent qu'it doit
porter, et qu'on lui remit ahu-memc le soin d'appHquer
ces principes et d'y ramener te reste de ses opinions, oit
de ju~er d'après eux. Nous ferons donc ce que notre de-
voir d'écrivain ne hous obii~e pas strictement de taire
nous rechercherons toutes tesobjections qu'on peut élever
contre t'ituprescriptibilitc du droit dont il est ici question,
et nous en découvrirons ta {ausscapparence.
Toute ~<~t~ï devrait être tirée de principes ration-
nels primitifs, puisque !a preuveen acte tir(''e.KHcdevrait
montrer que la culture (te ta hhcrte n'est pas io s<;u!but
final possible de- !a société civile, que ce n'est point un
droit ihauenabtë de l'homme de progressera l'infini dans
cette culture, et que t'immutahitite d'une constitution po-
ntifjue n'est pas contraire a ce progrès a l'inuni.
Commeune telle réfutation n'a pas encore été possible
jusqu'ici, puisque personne, que je sache du moins, n'a
encore mis ces propositions dans cette liaison, je n'ai A
m'occuper d'aucune. Tout c-cquej'avais a faire, c'était de
CONStDHHATtON!432
montrer au contradicteur futur ce qu'on attendait de luic:tr le contradicteur ne le sait pas toujours; et c'est ce quej'ai tait.– Toute autre réfutation est impossible.
Maisles malentendus sont possibles. C'est.ce qui arriveparticulièrement quand on dit: « Il faut bien que le droit
qu'a un peuple de changer sa constitution politique soitaliénable, puisqu'il a été ?'c~/ï/ » Une pa-reille objection révèle la complète incapacité de sonauteur en cette matière, en montrant clairement qu'il nesait pas môme de quoi il s'agit. Si, en elict, nous avionsatm'me qu'il est contre la loi de la nécessite natus'eued'aliéner ce droit, qu'il ne jM~/ pas
1 être aliène (quel'aliénation est~c~c/~ impossible), la réponse quise fonderait sur ceque cette aliénation M?'cc' 6'M
pour en conclure qu'elle ~c~ avoir lieu, serait décidé-ment triomphante; mais comme nous n'avons rien anu'mede semblable, commenous nous sommes borne a dire
que cela est contre la loi de la moralité, que cela ne
pas arriver (que cela est ~o~<~6'~ impossible), nous nesommes points atteint par une objection tirée d'un toutautre monde. Jl arrive malheureusement dans le monderéel bien des choses qui ne devraient pas arriver; maisdece qu'une chose arrive, il ne s'ensuit pas qu'elle soit
juste.Pourtant on insiste en disant que ce droit a été aliène;
nous ne nous bornerous donc pas à montrer en généralque cette assertion doit être fausse, mais nous la dépouil-lerons peu à peu et pièce a pièce de sa fausse apparence.
Une tellealiénation ne poun'aitavoirculicuquc~' co~-c'est ce que M. Robber~ même accorde pleinement
i
~~î'o n<c~~
SUR L\ nHVOUJTtON !'HAKÇA!SK i33
~'N~cc~~MCM~M'<(mand ilpense (pte personne ne le
remarquera. Siquelqu'un se montre plusexi~eantencore,
je leprie de s'en tenir an cotmnencement (te monpremier
chapitre, jusqu'à ce (Illej'aie mis a nu les derniers so-
pitismes élevés contre cette proposition. Le droit pourrait
avoir été alicne ~cs 7~< ~<' /'7~ m(nnc, on
~M'M~ c~ (/c/ de Dans r~tat, il pourraitl
Favoir ctc par te contrat (le avec tous, on par ccmi
dcsc/~c~o~ ~<c /~c~~M~u~~ïcc~, ou avec
des CM~'< ou avec ?<<7c<y~, le .so~<;c?<?~.Kn
dehors de l'Etat, il pourrait avoir ctc alicno ~ï~?'M
~a~. Ënnn, dans tous ces cas, it pourrait t'avoir ctc
/OM/one/t?~
En examinant l'objection qu'on nous oppose, nous
aurons a répondre a deux questions. La première est his-
torique Ce!aa-t-ii rcencment eu !icu; peut-on indiquer
un contrat de ce ~cnre ? La seconde, dont il taut de-
mander la somtion au droit naturel, est ceHe-ci ~eia
dcvait-H et pouvait-il' avoir lieu ce c~ Le lecteur
sait d'avance, par ce que nous avons déjà dit, ce (pu;
seront nos réponses; il sait que nous n'entreprenons pas
ces recherches pour ju~cr nos principes, mais pour les
rendre plus churs par t'app!ication. Si donc il espère
trouver dans les chapitres suivants des explications plus
iavorahles a ses préjuges, nous lui conseillons en toute
sincérité de jeter la le livre, Amoins qu'il ne l'ait déjà
fait.
Mr/cn.
13~ CUPJStDEMATIOM~4
(UiAPtTHKiU.
!.Ht'ROtï t)HCHANt.EH!.ACONST'T~TtONPp~TtQUK~~T-U<
ÈTRKAL~N~P. UNCQNTt~rDKTOUS~VMTQU~}?
La nature va de l'obscurité Ah lumière en passant parie crcpuscutc je ne puis conduire mes lecteurs par un
autre chemin que celui de la nature. J'ai parte dans ce qui
procède du droit qu'a un peuple de changer sa constitua
tiun politique, et je n'a: pas dit cô que c'est que !e peu"
pie. Ce qui serait partout aineurs une grande iaute n'en
est ptus une, quand ia nature de la chose l'emporte.Tant que i'on n'envisage lagrande société, rhmnanité en-
tière, ou, si l'on veut, tout ie royaume des esprits,
qu'au regard de ta toi morate, il faut le considérer comme
nn individu. La loi est la rnetne, et dans son (hnnaine il
n'y a qn~~e v'donte. Il ne commence à y avoir p!usicursindividus que quand cette loi nous tait passer dans le
champ du tib)'e arbitre. Ce champ est le domaine du con-
trat; it tant plusieurs individus pour te conctum. Si a la
fin de ce chapitre i'idec du peupte reste e~cM'cindéter-
minée, n'est alors que j'aurai tort.
Une supposition domine tout ce chapitre, c'est que tous
h's membres de rKtat sont e~aux connue tels, et que dans
le contrat social aucun n'a promis ptns que tous les autres.
(~c ceta soit ou doive être ainsi, c'est un point qucj~ ne
veuxpas taire passer artincieusemcnt; j'aurai .'t en parierdans te chapitre suivant. Pour le présent, je ne cherche
que ceci s'il en est ainsi,qu'en resLdtcra-t-it par rapporta la mutat)iiit6 de la constitution?
Le droit de changer la constitution politique pourrait
SUtt LA PKVOUJ'~UN i-'HAK~AISh:. ~6
c~re cède par le co!)trat de tous avec tous du plusieurs
ntanieres soit que tous eussent promise tous de ne la
changer jamais, soit que tous eussent promis il tous de HQ
pas lu faire sans le consepteme~tdc chaque individu.
Qua:4 a la première promesse, on a déjà montre plus
haut, en t'envisageant nu point de vue (te sa ~e,
de son pbjct, que l'inunutabilite d'une constitution est,
abonnent inadmissible, puisqn'eUe irait diructetnent
contre tebut supt'en:e de i'tnuuanite. Au point de vue de
la /b~!c, tou~auraieut fait a tous cette promesse; ce se-
rait ia Yolontccommune le peupte se serait dotm6
~c une prumessc. Maissi plus tard la vutontt:commune,
la volonté de tous était de changer ta constitution, qui
donc aurait te droit de s'y opposer? Un tel contrat est
en oppositionavec la condition fonnc~e de tout contrat,
a savoir qu'it y ait au moins doux personnes morales. Ici
n'y en aurait qu'une te peuple. Cette supposition
est donc imposst~e en spi et contradictoire, et il ne reste
p!ns que seconde, a savoir que dans !e contrat sociat
rengagement ait été pris de ne pas cttan~er la constitu-
tion sans ta volonté ~encrate, sans ia volonté de tous, ou
que tous aient promis à chacun de ne pas changer !a con-
stitution sans son consentement,particuner.
Soit que l'on envisage ht nature de !a chosepu notre
propre nature, Hsentie résulter des principes etahhs p~us
haut qu'une promesse de ce ~enre doit avoir et< faite dans
contrat sqcial, et qu'eue doit être vahddcet ohii~atoire.
E~ç~cst vraiou n'est ~as v'ai, suiy~pt qu'on ~eprend de
telle ou telle manière. Maiscomme notre habitude n'est
pas de laisser te lecteur prendre la chose comme il le
veut, il nous faut avant,tou~analyser un peu la proposi-
tion t~nu~. Cette ~rome~se en contient deu~ la
CONSÏDKHATÏONS136
première, que tous ~w~ (l'ancien sansle consentement de chacun; et la seconde, qu'ils ne con-traindront aucun citoyen a ~~p~c sans son consente-ment ce qu'its voudront mettre de nouveau Ala place.
La seconde partie (le !a promesse, a savoir que de nou-velles dispositions ne doivent obliger personne sans sonconsentement, ne peut être raisonnahlement insérée dansle contrat; le contraire, comme on Fa montre plus haut,serait la violation du premier de tous les droits deFhommc. Cemiqui me promet (tans un contrat de ne por-ter atteinte en moiu aucun droit inaii~nablene me prometrien il y était obligé antérieurement a tout contrat. Quer~tat r:ut promis ou non, aucune disposition nouvellen'oblige le citoyen de t'anciennc constitution sans sonconsentement, et cela nonpas en vertu d'un contrat, maisen vertu du droit (!e i'hommo.
Quant a la première partie de ia promesse, il scmhteau premier aspect que Ja question soit tout aussi facile arésoudre et qu'eHe doive être résome exactement de tamême manière, et je prévois que la plupart de mes iec-teurs, qui pensent avec moi, lui donneront !a même solu-tion. « Les institutions déliât, diront-Hs,sont des condi-tions du contrat social tous se sont engagés envers tousà remplir ces conditions; si quelques-uns les supprimentsans le consentement des autres, ils rompent ainsi !econtrat de leur côté et agissent contrairement aux ob!i-gations qu'Usy ont contractées. Il va donc de soi-mêmequ'aucune institution dans FËtat ne peut-être suppriméesans le consentement de tous. e
Si ces conclusions étaient aussi parfaitement rigou-reuses, notre théorie courrait un grand danger. Nonqu'eue eût a craindre d'être renversée, mais elle pourrait
SUR LA DÉVOLUTION FRANÇAISE. i37
hien mériter le reproche de n'être pas applicable dans la
vie. Quand vous auriez démontre avec la dernière évi-
dence que, en vertu du progrès (!c la culture exige par !a
loi morale, toute constitution politique doit être modinee
et améliorée de temps en temps, comment cette amé-
lioration pourrait-elle jamais se réaliser dans le monde
réel, s'il fanait qu'au sujet du moindre changement chaque
membre de l'I~at donnât d'abord son adhésion? Ht que
serait notre preuve, sinon un artince d'école, un argument
sophistique? Mais avant de conclure si rapidement,
pénétrons d'abord dans la nature du contrat un peu plus
profondément qu'on ne le fait d'ordinaire.
Si, comme il faut l'c/c en effet, nul contrat ne
porte sur les droits naturels de l'homme, un contrat me
donne sur quelqu'un un droit que je n'aurais pas d'après
la sente loi de la raison, et ce quelqu'un contracte envers
moi une obligation qu'it n'avait pas davantage d'âpres
cette loi. Qu'est-ce donc qui lui impose cette obligation?
Sa volonté car, oit la loi morale se tait, rien n'oblige
que notre propre volonté. Mon ~'6~ se fonde sur son
o&o~, c'est-a-dirc en dernière analyse sur sa volonté,
puisque c'est sur celle-ci que se fonde la première. S'il
n'avait pas cette volonté, je n'acquerrais pas de droit.
Une promesse mensongère ne donne pas de droit.
Qu'on ne se laisse point effrayer par l'apparente dureté de
ces propositions. Cela est ainsi, et il faut hien dire les
choses comme elles sont. La moralité, la sainteté des con-
trats sauront bien se sauver de nos raisonnements.
Je fais une promesse en échange d'une autre. J'ai réel-
lement. l'intention de la tenir; par conséquent, je m'im-
pose a moi-mcmc une obligation, et je donne a un autre
un droit. L'autre n'avait pasla même volonté, et il ne m'a
CUNS~KM'~K~138
donne aucun droit. M'a4-il trompe? insidieuse-
ment dépouille d'uil droit?
« Je n'ai pas, d'âpre le d~'oitnature), de droit absolu
a ta véracité d'au~ut. ~i l'on m'afait une promesse men-
songère, je ne puis n)e plaindre d'aucune lésion, tant que
parce~ promesse je nosuis en~a~e a aucune prestation. D
A}nsi s'exprunc ie ptus pcnen'ant et te pins conséquentden nia!t!'esen droit natm'<dque nous ayons jusqu'ici (1).Ce qui va suivre sera un commentaire et au besoin une
rectincation de ces propositions.
tjuand je lui f(s une promesse sincère, admettais-je
qu'it mentait, ou n'admeHais-jepas pmtotqu'i~ était aussi
sincère que moi? Si j'avais suppose qu'i! mentait, lui
aurais-je promis sincèrement, aurais-je eu a~ors ta vu-
lon~ de tenir ma promesse? Mavolonté était donc condi-
tionnée. Le ~'M'/ (me je lui donne par ma ~/<c est
conditionne!. S'i~mentait, il n'a acquis aucun droit, puis-
que je n'pn ai acquis aucun. pas </<'co~
co~«, puisqu'~7~'y < droit co//i~M~~M~et d'<-
~~o~ co~c~
Vous me dites Quand mcrne il mcntirait, je ne vcu~
pas être un menteur; sa mauvaise foi ne doit pas m'enle-
ver ma bonne foi; je veux tenir toyaiement ce que j'ai
pron)js et vous faites bien seulement il ne faut pas
m~er les idées et confondre le domaine dHdroit naturel
~vec celui de la moralu. Ce n'est pas une dette quevous lui payez vous ne lui deviez rien; c'est un don quevous lui faites, Vous tenez votre promesse,J non pour
(1)M.Schmatz,dunssonD~ M~Mr~pu)'. Qu'i!mepermettedelui témoignericimonestime.Quiconques'yconnaitverrabienquecen'est pasd'aprèsses principes,maiNd'après lesmiensque je fai-
9P~)e
< n~OHi't'tOK t-ANU\tSE. ~39
suture a son droit il n'en avait aucun, mais pour con-
server Festh~e de vous-même. U vous impose peu que
yous soyez ounon t~prisaMe a ses yeux; mais H yons
itnportc beaucoup de n~ l'être pas aux vôtres.
La vcracitc est donc lu condition exclusivedu contrat.
Si l'un des deux nevput pas tenir pa~ct &ptu~ ~~e
rai~)~ st tous deux ne vouant, pa~ tt n'y a pas d~
cuntra~ c~uctu.
Tous les (icux~nt~nce~s :m uttunen~dc ia pt'OtUpssc.
Il y a cnn'c eux uu c(uurat. tts ~t~nvont, et. t'nn <tundeux
ou tou~ tc~deux se rav~cnL r~pï'cnnL'nt tcu'' votontc
~ans ~.ur cûeuf. Le cuivrât est ann'dn les pt'unu~sp~
sunLcomme non avenues, car h dron et ruh~aHon ~<nt
guppnu'
Jusqu'~i tout se passe da;)s !e doutain~ du trd)un;d in-
tcnsur. Chacun saH ce qu';t pcnsp tm-n~tno; nta~ per-
sonne nHsait ce que pense au~'m. Nul ne sa~ n'~ «
répHenient ou s'~ un contnd, excepte cpiui qui
ppnetrc ta fois dans tnbunat int~'ieur de tous deux,
ta pu~ance cx<cuHyede ta morate, ~aeu~t
Mair~ennntt'nn ~ut ce qn'd a pronns, et ia chose passe
dans te tnoude des phenomc~s. (Ju'est-ce qui st~ de
la, et.qu'est-ce qui n'en suit pas? Sans doute ii montre
clairement et évidemment par cet acte qu'i) était de bonne
foi et quH a cru l'auto aussi,ioyat que ~i-rncme, qu'd
(~trerM~cnt lié avec jui par un contrat, qu'd
croit lui avojr (jonne un droit sur soi et en avoir reçu un
–Mais par ce dro~ sur rau~'e,
s'ii ne i'av~Lpus auparavant, ou seulement le ~<e-
s'it ne Favaitqn'~ mojtie. (~otnrncntcc)a serait-il ppssiLie?
sa voion~ que rautre He~ne sa promesse n'est pas
obUgatoirc pour celui-ci, tan~ <tue ce dernier pavait
CO~StDKHATtUNS4AO
douter de la reaHte de cette votonte, elle ne t'est pas de-venue davantage parce que la réalité s'en est manifestée(tans le mondedes phénomènes. Dans un cascomme dans
l'autre, il n'y a toujours que sa volonté; et une volonté
étrangère n'oblige jamais. Ou, pour rendre toute
échappatoire impossible, acrnucrt-i! par !a manifesta-tion extérieure de sa véracité u~ droit absoluA!a véracitéde l'autre, c'est-à-dire i'obiip-e-t-it par sonacte aréellement ce qu'ii a promis, et a s'obliger par~~)/~? Si je n'ai jamais un droit absolu a !a véracitéd'autrui, comment puis-je l'acquérir par mapropre véra-cité ? Ma moralité ob!~c-t-eue les autres la même mo-rante? Je ne suis pas l'exécuteur de !a loi morale en gê-nera!; c'est Dieu c'est a lui qui! appartient (le punir lafausseté. Je ne suis que l'exécuteur des droits qui me sontaccordes parla loi morale, et parmi ces droits ne se trouve
pas celui de surveiHer ln sincérité des autres hommes.
Ainsi, même en tenant de mon côte ce que j'ai promis,je n'acquiers donc pas le droit d'exiger que enfasse autant du sien, si sa libre volonté, dontje ne con-nais pas la direction, ne m'a pns donne et ne me donnepas ce droit. Mais l'autre, en me manquant (le pa-role, me fait tort de ce que j'ai fait pour lui. Commentavec de pareils principes quctqu'un oscra-t-i! encoreconcture un contrat? Qu'on fasse encore un pas dans
l'application de ces principes, et tout sera clair, et la diui-cu!te sera résolue d'une manière satisfaisante.
J'ai exécuté ma promesse dans la pensée que l'autreavait droit a cette exécution, que celle-ci n'était plus~'<?~, qu'elle était ~c~, que les forces que j'y app!i-quais et les fruits de cette application de mes forces étaientJa propriété d'un autre. Je me suis trompé en ce point:
SUR L.\ HHVOUJTtON FRAN~AtSE. iAl
ces choses étaient miennes, puisque l'autre, ne m'ayant
point donne de droit sur lui, n'en avait point sur illoi.
Ellesétaient miennes aux yeux du ju~e suprême de toute
moralité; nul esprit tmi ne punvait savoir a qui elles ap-
partenaient. L'autre n'exécute pas sa promesse, et des !ors
ce qui n'était connu juque.la que duju~c suprême se ma-
nifeste aussi dans te monde des phénomènes. En n'ex<cu-
tant pas sa promesse, il ne tait pas que t'execution de la
mienne ~~c/t~c ina propriété elle Fêtaitdes te com-
mencement; il faitseulement connaître qu'elle est mienne.
Je conserve ma propriété; –le fruit de l'exécution m'ap-
partient. Mêmece qui, danst'application de mes forces,
a été dissipe en pure perte est ma propriété. Peu m'im-
porte que cela soit perdu cela ne devait pas t'être. Je le
retrouverai dans les forces de l'autre; j'ai recours sur
elles. Je puis le contraindre une compte réparation
du dommage. Or, si je n'ai rien perdu par son manque
de parote, il n'a rien ~ne. Nous sommes replaces tous
deux dans t'etat qui a précède notre convention; tout est
non avenu, et il en devait être ainsi, puisqu'il n'y avait
pas de contrat entre nous.
C'est seutcmcnt en exécutant comp!etcment sa promesse
pour sa part que l'autre fait de l'exécution de la mienne
sa propriété. EHec~ sienne, en vertu de ma libre vo-
lonté; mais personne ne savait qu'elle le fùt, a l'exception
de celui qui connait les coeurs et qui savaitque cet homme
exécuterait sa promesse. En l'exécutant, il fait voir dans le
monde des phénomènes que l'exécution du la mienne est
sa propriété.–Aux yeux du tribunal invisible, le contrat
est conclu des que les deux parties ont la volonté sincère
de faire la chose promise; il ne commence dans le monde
des phénomènes que quand les deux engagements sont
CO!SS!D~HAT!UNSiM
pleinement exécutes. Le moment qui t'institue ici !'a-
nRantit.
~ppuquohs cela A "ne association durable pour desservices réciproques, comme !e connut sociaH Tous
ont dohne tous un droit sur eux-mêmes, et en revanche
oH ont reçu ut! sur les autres; au moins !c peut-on sup-
poser, puisqu'i! faut admettre (pte ce sont des g-cnsioyaux.Ï!s ont montra dans ïe mondn des ph~hom~ncs (pritsl'étaient ils ont rempH h'ut's engagements chacun pour$a par{, ch agissant, en s'abstenant, eh se soumettant aux
peines h~aics toutes les fois qu'ils s'étaient abstenus
quand ils devaient a~ir, ou qu'Us avaient a~i quand i!s
devaient s'abstenir. Tant que personne ne témoigne parses paroles ou par ses actes que sa voionte est changée,il !hut admettre qu'it est dans te contrat.
MaintenantFun vient-it Achanger de voionte, partir(le cp moment il n'est plus, auxyeux du tribuna! invisible,soumis au contrat; il n'a plus (te droit sur t't~at, i'~tath\'n a plus sur lui. Il témoigne son cttang'cmentdc vo-
lonté ou bien par une déclaration publique, ou bien en
cessant de fournir son et en ne se soumettantt
pas, en cas de contravention, a la peine !e~aie (4). Quel
(i) Unmot seulement en note S'ii en est ainsi, pourrait.on uire<
qukfthque devra être puni sorUra (!<'l'association, et atnsi la punitiondeviendra tout a ra!t iin~&~ibte. Je hc t'ccntc iias devant ta cdhsd-
qnchce ~ticonque te veht; le ~cut, et r~tit ne ~nt le pttntf Mt~ nnp8onvcrd!ne tnju~tee. t'prsonnc ne saurait ratMnnabkmctH se ~on-
mem<' a !a punHion, que potn-ponvch' cont!nnc) de rester dans t'~tat.
Que (tcvicnt avec cela la pc!ne de mort? Oh !t n'y avait pas besoinde ce détour pour montrer que cette peine, apptiquëc aux infractions
civ!)cs, est une abomination.
Un citoyen potte-t.ii atteinte, daos la aocietc, a des droits inaiie-
SUh LA nÊVôLtitiON fhANÇAtSË d~
rapport a-t-il maintenant avec l'État et t'Ëta~ avec lui?
Les deux parités ont-elles encore des droits et des dcVoirs
réciproques, et lesquels?
évidemment elles sont retournées l'une par rapport a
l'autre au simple état de nature; la seule loi (jui leur
soit encore commune, c'est la toi monde. Nous avons vu
plus haut ce qui est de droit, aux termes de cette toi,
dans te cas ou, l'une des parties ayant exécute sa pro-
messe, l'autre n'exécute pas ta sienne ta reprise dn pro.
<hut de l'exécution et ta réparation du dommage.
Mais est-ce donc ici réellement te cas? Si dans un
contrat social tous ont des droits et des devoirs égaux,
et dans le présent chapitre il n'est question que de cela,
et si chacun se soumettant a ta punition eh cas
d'omission exécute fidèlement ce qu'il doit taire, sui-
vant te temps, te lieu et tes circonstances, je ne vois pas
comment ils peuvent jamais avoir de compte a rc~tet'
ensemble. Vous avez tait jusqu'à présent pour moi ce que
vous deviez moi de même. A partir de ce moment vous
tic thites phts rien, ni moi non plus. Il y a parité entre
nous nous sommes quitte a quitte. Il se peut, si vous êtes
de grands calculateurs eh matière d'e, que je sois en
reste avec vous sous ce rapport. Mais il ne s'agit pas de
Celamaintenant; il s'agit du Si je m'étais trouvé,
dans la situation d'avoir faire pour vos intérêts plus
~URvous ne pouviez faire pour les miens, c'eût été mon
uevoir de le faire; c'eût été t'<? <~ de l'exiger; je
n'aurait aucune restitution a t'eclamer, ca~ce que j'aurais
nabtesde t'hommc(etnon passeutement desdroitsr<!suUantd~n
contrat),il n'est plusc< il est ennemi;et lasociet<ïne lui fidt
paspa~t'ersoncrime.<'n<;set;<~e de lui,c\'st.~direqn'ctiete traite
câpres!aloiqu'i)a hn-memeetabitc.
CONSIDÉRATIONS1AA
fait pour vous n'c~t plus été mien aux termes du contrat,c'eut été votre proprietc. Pouvez-vousrevem!iquer ceque vous avex iait. pour moi?– C'est bien ma propriété.
Cette dernière rctua~tue découvre dune pleinement iafausse apparence de tous les sopbismcsque t'un tire, cun-tre le droit qu'à ie citoyen de changer sa constitution, du
lon~-chapitre des grands bienfaits dont il lui est redevabte.On ne parle que de reconnaissance, d'équité, et l'on ne
compte que sur (tes (tons pieux; mais, dans un jugementde ce ~eïn'e, ce n'est pas de cela qu'ii s'agit il s'agit dudroit strict et (!ecréances a taire valoir. Mettons d'abordce compte au net nous verrons ensuite ce qu'i! nous res-tera a donner. Vouicz.vous un (le ce que jeviens de direPVoyex cet écrivain a peine a-t.H achevé ses
plaintes sur les sermons insignifiants et sur les sainics
plus ou moins spiritueiics des dec!amatcnrs qui confon-dent !a morale et la politique, qu'il nous invite à ne pasnous servir de la culture que nous devonsa notre bonnemère pour lui déchirer les thmcs mais laissons lesenfants jouer avec leur mère, et parlons de la chose enhommes r
Quels seraient donc les services au sujet desquels l'État
pourrait nous intenter une demande en restitution? C'est
uniquement a iacondition que vous soyez des membres de
l'Etat, qu'H vous a octroyé toute votre propriété, suivant
quelques-uns, ou au moins, suivant d'autres, la pro-priété du sol, car, selon eux, le sol lui appartient; et cesderniers ne sont vraiment pas plus généreux que les pre-miers. Tandis que les uns nous laissent tout nus, les au-tres nous renvoient a !'air; car la terre et iamcr sont déjàoccupées, et mumc ce qui n'est pas encore découvert estdonne d'avance par le pape, en vertu du droit divin. S'il
d/<5SUR LA REVOLUTION FHANÇAtSE.
fallait prendreces menaces au sérieux, nousdevrions as-
surément renoncer a l'envie de sortir jamais de la société
civile. Cherchons quel est le fondement du droit de pro-
preté en général, et de la propriété du sol en particulier;
ce sera le moyende rendre la choseclaire.
Nous sommes originairement notre propriété a nous-
mêmes. Personne n'est notre maître, et personne ne peut
le devenir. Nous portons au fondde notre coeur les lettres
de franchise qui nous ont été données sens le sceau de
Dieu. C'estlui-mémequi m'a affranchi et qui m'a dit «Ne
sois l'esclave de personne. Quel être anrait le droit de
faire de moi sa propriété?A~ï~ sommes notre propriété, dis-je, et j'admets ainsi
quelque chose de double en nous: un propriétaire et une
propriété. Le moi pur qui est en nous, h raison est la
maîtresse de notre sensibilité, de toutes nosfacultés spiri-
tuelles et corporelles; elle peut s'en servir comme de
moyens pour toutes les fins qui lui plaisent.
Autour de nous sont des choses qui ne sont pas leur
propriété &elles-mêmes, car ellesne sont paslibres; mais
elles ne sont pas non plus originairement la notre, car
elles n'appartiennent pas immédiatement ai notre moi
sensible.
Nous avons le droit d'appliquer nos propres forces sen-
sibles à toutes les fins qui nous plaisent et que la loi de la
raison n'interdit pas. Or la loi de la raison ne nous défend
pas d'employer, comme moyens pour nos fins, les choses
qui ne s'appartiennent pas a elles-mêmes, et de les rendre
propres à nous servir de moyens. Nous avonsdonc le droit
d'appliquer nos forces a ces choses.
Quand nous avons donné à une chose la forme d'un
moyen pour nos fins, aucun être ne peut l'employer, sans
~0
CONSIDÉRATIONSiA6
dépenser pour lui le produit de nos forces, et par consé-
quent nos forces eUes-memes, qui sont originairementnotre propriété, ou bien sans détruire cette forme, c'est-à-dire sans suspendre nos forces dans leur-libre action
(car it ne sert a rien de dire que l'action immédiate denos tbrces est passce; notre action dure tant ~ue dure son
cn'et). Or c'est ce que ne peut taire aucun ~trc raison-
nable car la ici moralo lui détend de détruire le libre
produit d'un agent Hbre et à cette défense correspond ennous un droit, celui d'empêcher une telle destruction.Nous avonsdonc le droit d'exclure tous les autres(lel'usaged'une chose que nous avons façonnée au moyen de nosfacu!tMet a iaquoite nous avons donné notre forme. Etc'est co droit qui dans les choses a'appeHc ia~n'
Cette formation des choses par notre propre force estle véritable principe du droit de propriété muis c'estaussi le seu! qu'admette le droit naturel (i). M. Rehbergaurait donc pu trouver moins naïf ce qui est dit dans iaRevue potitique de Schicezer, à savoir que quiconquene travaille pas ne doit pas manger. ?–'Quiconque netravaille pas peut sans doute manger, si je veux bien luidonner quoique chose à mander mais il n'a aucun droitlitla nourriture. Il n'a pas le droit de dépensera, son usageles forces d'un autre si personne n'est assez bon pouragir volontairement à sa place, il clevra employer aespro-pres tbrces à se chercher ou a se préparer quelque chose,sous peine de mourir de iaim, et cela fort justcrnent.
Mais l'homme ne peut rien produire de nouveau, rien
créer, remarque M. Rehbcrg: H faut que la matière a ia-
«) (? qoe !t<<Schmatz MtntXe <iccM~<~M fohdcen (annuité surla /by~~<oft.
S!'R LA nÉVOU!T!ON FnA~C.\tSK w
quelle il donne sa t'omis ait exista préalablement. Si donc
il peutetabtir ht légitimité de ses patentions sur la forme
(tes choses, il ne saurait jamais prouver son d~'oitde pro-
priété sur ta matière. Nous avons cto ~ritablement
aun~é de voir M. H. tirer une fausse conséquence de la
seule observation qui fut judicieuse dans tout son livre et
qui pût le conduire des développements instructifs. Il
applique en enet cette observation a la propriété du sot
et comme,selon cotte observation, personne, en droit na-
ture!, ne peut être propriétaire du sot, il pense que nous
devons tenir ce droit de l'État.
M.R. n'a pas pousse assez loin les conséquences de son
principe. Ce n'est pas seulement !e solqui est une matière
que nous ne produisons pas; tout ce qui peut être notre
propriété a pour fondement une matière de ce ~enre, qui
existe absolument sans notre coopération.–L'habit que
je porte était sans doute la te~itime propriété du tadieur
qui l'avait façonne, avant de devenir la mienne par suite
d'un marche; le drap qui a servi a le faire était la pro-
priété du fabricant, avant d'arriver au tailleur; la laine
dont ce drap a été tissu était la propriété du possesseur
du troupeau qui Fa fournie; ce tronpeau, son mattre
l'avait formé des brebis qu'il avait héritées ou acquisespar
contrat; la première brebis fut la propriété de celui qui
l'avaitapprivoisée et nourrie mais d'où venait cette pre-
mière brebis ? KHeétait une matière organisée sans sa co-
opération. Si r~tat l'a transmise au premier possesseur,
c'est sans doute aussi a la faveur dcl'~tat que je dois mon
habit. Quandjesortirai de l'association, ilme leferaretirer.
Mais, avant toutes choses, commentl'Mtatacquiert-il un
droit que n'a aucun des membres individuels dont il se
compose? Nul n'a, dites-vous, de droit de propriété sur
CONSIDÉRATIONSiA8
ht matière mais comment tous, en unissant leurs droits,en pourraient-ils faire sortir celui-là? De plusieurs partieshomogènes pouvez-vous former un tout qui soit d'uneautre nature que les parties? Si chacun versait du rhumdans un bol, cela ferait-il du punch? Votre raisonne-ment est illogique.
Il faut le reconnaître on ne saurait établir l'existenced'aucun droit de propriété sur la matière M~~e telle,et il est aisé de montrer ce qu'il y a de contradictoiredans un droit de ce genre. Ce droit est en contradictionavec l'idée de la matière brute dans le sens où l'entend ledroit naturel. Si l'on ne peut en effet s'approprier leschoses que par la formation, nécessairement tout ce quin'est pasencore forme, tout ce qui est brut n'est pas en-core approprié, n'est la propriété de personne. Nousavons un <o~ ~r~'ï~o~ sur la matière brute, etun <<M/~û~csur la matière modifiée parnoustLepremier signifie la possibilité morale; le second, la réa-lité morale et physique. Si vous ne pouvez nous prendrela matière sans prendre aussi la forme,et que vous n'ayezpas le droit de nous prendre cette forme, nous ne dispu-terons pas avec vous sur !a propriété de la matière conçueindépendamment de la forme; il nous suffit que vous ne
puissiez ~<?//<c~ pas la séparer. Si elle n'est pas notre
propriété, elle n'est pas non plus la vôtre; et puisque vousdevez nous laisser la forme, il faut aussi que vous nouslaissiez la matière. On peut dire, sinon d'une manière
rigoureusement philosophique, du moins par une figureexacte, que Dieu est le propriétaire de la matière brute,qu'il a investi chacun de nous de tout le domaine de lamatière existante, que la loi de la liberté gravée dans notrecœur est sa lettre d'investiture, et qu'il nous transme.t la
SUH L<\ MMVUnj'tlUN FMAN~AiSK. i&U
possession réelle au moyen de notre formation. On au-
rait donc pu trouver moins triviale cette antique pensée
seulement il ne faut pas dire que nous avons hérite cette
investiture d'Adam ou des trois fils de Noc. Nous ne
l'avons pas hcritce chacun !'a immédiatement acquiseavec le don de la liberté morale.
Et comment en serait-il autrement? Si la matière brute,
comme telle, pouvait être la propriété de quelqu'un,
comment donc arriverions-nous jamais a avoir une pro-
priété ? Que pourrions-nous donc nous approprier? Cher-
cher une preuve du droit de propriété sur la matière,
c'est vouloir supprimer en ancrai toute propriété.
Tout homme, pour appliquer ces principes a la pro-
priété foncière, a originairement un droit d'appropria-
tion sur tout.le sol de la terre. Si personne ne tait valoir
ce droit dans toute sonétendue, cela est dû en partie à la
faiblesse naturelle de chacun, et en partie a ce que cha-
que individu a le même droit; là où un autre a déjà
occupé le sol, il n'y a plus rien a occuper pour moi. Dira-
t-on, comme le soutiennent quelques écrivains français,
que tous les hommes ont droit à une égale portion de
terre, et que tout le sol de la terre doit être partage entre
entre eux par portions égales? Il faudrait pour cela que
chacun eùt sur le sol de la terre, non-seulement un~'o~
~o/M'oM, mais encore un ~'o~ réel de /~oWe~.
Maiscomme l'homme nejait d'une chose sa propriété par
l'appropriation qu'au moyende son travail, il est clair que
celui qui travaille plus doit aussi posséder plus, et que
celui qui ne travaille pasne possède rien légitimement.–
Représentez-vous une foule d'hommes arrivant dans une
ne déserte et inculte, avec des instruments de labourage
et (resbêtes de trait. Chacun place sa charrue oit il veut
l&U ~NSii~H.mu~
ia ~u' ei~t, aucune autre ne pem ~u'c. Chacuniaboure
ce qu'il peut, et celui qui, le soir, aura deu'iche h plus
~'andc cte-nduc, po~6(tc h~ithnemcnt la pius ~t'anduétendue. VoitamauUciïautriie unticru labourée. Celui
qui aura dormi le juur'uc po~scjera ï'icn, et cc(a justc-rucnt.
M. en posant (1) la question desavoird'ou~'ou~/le droit(2) do travaiHer les objets (;ui no nous appartien-nent pas, –question a iaqueucj'ai répondu plus haut, et
qui avait été déjà traitée sotidetnent,par exemptedans
te ~< de M. Schma!x(3), y introduit un
M~~c/c/t (') accentue, qui veut être décisif, mais
qui n'incline pas le plateau de la balance de l'épaisseurd'un cheveu. Desque j'ai immédiatement dans les mains
un morceau de matière brute, tout autre en est exclu,car it ne saurait ie travaiHer sans me t'arracher, ce qu'iln'a pas le droit de faire. Si, pendant que je voulais le
prendre sur ia terre, Uavait etc ptus prompt que moi a
le saisir, ce morceau serait entre ses mains, et c'est ~M
qui en serais exclu, Tant qu'il était encore sur le sol,nous y avions tous deux un e~at droit; a présent j'ai ic
droit exclusif, ~«A ~e/c~cw/c 7~c/ ou, connue
dirait M. R. ~~c/c/tc /<cc/~ ("), de le
(i) PaRci3 de sontivredëj~cit~.
(~)Voyexdoncd'' quoilesgensse notentI
(~)M.H.qm'aitd~ th'ecetivreavantd'ëcrhctesien,oule réfuter,s'it l'avait)u.
(*) « Rxctusivctttcnt.o Voyezlanoteci-dessous.(*")Je suisobttgcd'iuu'oduh'edans)c texte ces expressionsaHc-
nmndcs,ne trouvantpasdansnotre tanguede motscorrespondants.i''ichtecxptiqttetui même,danstanotesuivante,tesensdet'expressionftUMc/~tM6~par opposition«Ma~c~t~eM(/.
«~<~c/<cA, dit-il, revienta M«~cA~<)', commesi celui
SUB LA HÈVQLUTiOMFHANÇAtSH.
travailler je le tiens immédiatement dans mes mains~
Il ne parle pas d'ailleurs de choses que l'onpuisse avoir
immédiatemententre les mains. Bien qu'il parie on géné-
ral d'objets, ceschoses no semblent pas convenir ah pro.
fondeur de ses raisonnements; c'est du solde la terre qu'il
tire sonexemple. «Sije veux ensemencer un champ, e~~
~cA~' et qu'une autre personne, n'ayant pas do champ
convenable, ou préterant celui-là, veuille aussi lecultiver,
d'après quelles raisons décidera-t-on entre nous ? Telle
est la question qu'il pose. Si la pièce de terre sur ia-
quene porte la question est rconement un champ laboure,
e~ ~e~ (ou cemot n'est-il employéici que pour remph~
cer les autres qui sont usés?), la décision est iaciie, et l'on
pourrait dire que celui qui l'adresse n'oBtpas digne d'une
pdponse.Le champque désigne lemot~tc~' est nécessaire-
ment tabouret il faut doncque quelqu'un l'ait labouré ce
quelqu'un est propriétaire d'après le droit naturel, et nul
autre no voudra se donner la peine inutile et illégitime de
le cultiver encore une fois. Tout champ laboure a un pro~
priétaire, aussi certainement qu'it est un champ labouré
qui travailleunechoseprétendaiten <a exclu,etnonpatonexclure
tui-n~tMtouslesautres. Avectoutautt'eë~<n, ~j~utei'~chte,
uaenareDIc<:rluqu':~rau une <cunc déplacée;tnatselleestju~tc
rëgartt(!'u~tt0!nmcqut traite lesuuf'cssur ce ton.A/~t't't~M<'n«yMC
~MoM!o~n<oûcpede Mr~nest. n
Le mot~c/Mf,dont se sert rëcrivatndt<!etattaquapar i'chtc,
signineproprementterrelabourée.Onva voirpourquctJ'aid~ intro-
dutfeicidansmontextecemotallemandet onindiquerteson!)(tans
cettenutc.aVoyezla noteprécédente.3Je ne puisrendreautrementccMcphrasedu texte,où Fauteur
fait sortir du mot lui-mêmel'explicationde sonsenspropre
~c/fcfist Mn~McA'c~.
152 CONStDÉRA.TIONS
il n'est plus une matière brute, mais il a une (orme.M. R. vent commencer par ~Mc~c/tc~ le champdont il
s'agit (si tout cela et si même son livre entier a uneautre raison d'être que cette chère co~ ~cc~); pourcelail fautqu'il ait été toutfraîchemcnt labouré. Cela,pen-serais-je, serait une raison suffisante pour exclure tout au-tre de la culture de ce champ. Pourtant nous ne vou-lons pasprofiter, un stratagème d'avocat, de l'inhabiletéde notre avcrsaire; nous voulons chercher Liinstruire.–
Quand même le champ n'aurait pas été fraîchement la-
bourc, quand bien même il ne l'aurait pas été depuis un
grand nombre d'années, le premier travailleur ou son re-
présentant demeure toujours le légitime propriétaire, tant
qu'il reste sur le sol le moindre cnet du premier travailet quand pourrait-il jamais disparaître ? Si la trace ex-
térieure en est enaccc, celui qui s'empare de ce champ,sans rien savoir du travail dont il a été autrefois l'objet,est un possesseur de bonne foi, mais non pas un légitime
propriétaire. 11doit cesser son travail u la première récla-mation du véritable propriétaire.
La question suivante de M.R. a un sens plus juste, etnous l'admettons, quelque suspecte que la rende sa pa-renté avec la première. « Comment, demande-il, prouve-rai-je a l'aide de la raison pure, que ce sol sur lequel setrouvent deux personnes appartient à l'une plutôt qu'al'autre?)) Nous admettons, avant de nous engager dans la
question, que le motsol signifie ce qu'il doit signifier non
pasun champ labouré, mais une pièce de terre inculteou qui n'a pas encore été travaillée; et alors la questionmérite une réponse.–Quel est donc ce sol dont il parle?Est-ce ce seul et mêmesol sur lequel se trouvent lesdeux personnes? Où le borne-t-il donc? Ou le distingue-
SUK LA RÉVOLUTtON FRAN~AtSK. 455
t-il d'un autre qui n'est plus ce même sol sur lequel elles
sont toutes deux?Son imagination ne lui aurait-elle point,
par hasard, joué le tour de lui représenter, sans qu'il y
songeât,des clôtures, des fossés, des lisières, des homes?
Il ne peut rien y avoir de pareil, a moins que le sol ne
soit déjà occupé, et n'appartienne exclusivement soit a
l'un, soit a l'autre, ou à leur défaut, à un troisième. Ne
parlons donc plusde sol; parlons plutôt de /~cc. Deux
individus ne peuvent pas occuper ensemble une seule et
même place cela est contraire a la loi de l'impénétrabi-lité de la matière. Dès que l'un se trouve a une place,l'autre en est exclu celui-ci ne peut s'y mettre sans re-
pousser le premier, et c'est cequ'il n'a pas le droit de faire.
Chacunest le légitime et exclusif propriétaire de la placeou il se trouve, si cette place n'avait pas déjà un proprié-taire. Il l'est devenu par cela seul qu'il s'y est mis. Mais
sa propriété ne s'étend pas au delà de ce qu'il peut couvrir
de son corps. blaintenant l'un trace un sillon. Ce sillon
est sien; il est le produit de son travail. Il avait le droit,en vertu de sa nature raisonnable, de tracer le sillon.
H ne peut pas, dites-vous, prouver sa propriété sur les
mottes de terre.–Cela lui importe peu. Il est du moins
le propriétaire du sillon qu'il a forme avec les mettesde terre prenez-lui donc les mottes de terre, mais laissex-
lui le sillon Son voisin trace aussi un sillon tout à
côté du sien. Il en a bien le droit mais il ne peut tracer
ce sinon, là ou le premier a tracé le sien, sans détruire
celui-ci, et c'est cequ'il n'a pas le droit de faire. Ainsi
se résout d'une manière satisfaisante la question de savoir
pourquoi, sur un sol inoccupé, la place où quelqu'un se
trouve et le sillon qu'il y a tracé lui appartiennent, et
n'appartiennent pas à celui qui n'y est pas et qui n'a pas
CONStUÉHA'ttONSioAtracé de sillon, et nous venonsde danser une des impo~sibititésdeM.h.
Kn général, te légitime propriétaire de ta ~~<~forme est le propriétaire de ta chose. Je donne à un or-
~n morceaud'or que je possèdetégitimement,soit pari'etfet do mon propre travail, soit en vertu d'un marche,et je le charge de m'en faire une coupe. Je lui ai promisun certain prix pour ce travaii il semble qu'il y ait uncontrat entre nous. !1apporte ta coupe, et je ne lui donnepas te prix convenu. 11n'y avait pas de contrat entrenous son travaii était sien, et reste sien. Maisl'or est-il mien? J'ai te droit de le reprendre, si je puis Je fairesans prendre en même temps ia coupe on sans ta dé~trnh'e. S'il veut me dédommager de ma perte, il n'y arien a dire Acela; mais je n'ai pas te droit de revendi-quer sa coupe. est le possesseur de ia dernièreibrme; car c'est avec mon consentement fm'i! a donné safor~e a mon or. S'ii n'en était pas ic possesseur légitime,s'ii avait fait de mon or une coupe sans mon consen-tement, it faudrait qu'il me rendit i'or, avec ou sans satbrme.
Detout cela il résuite clairement que ce n'est pas FËtat,maisja nature raisonnable de l'homme en soi qui est tasource du droit de propriété, (ptc nous possédons indu-bitablement certaines choses en vertu du droit purementnaturel, et que nous pouvons légitimement exclure tousles autres (te la possession de ces choses.
Maisàquoi, dit-on, cela peut-H nous servir, &nous quisommes nés dans l'État? Accordonsque nous aurions puacquérir une propriété en vertu du droit purement na-turel, et le faire d'une manière tout a fait indépendantede l'État. Maisce n'est pas ainsi que nous avonsacquis ia
SUH LA hKVOLUTiUN FhANCAtSH. 1&5
notre; nous ta devons aux institutions (!e l'Ëtat, et nous
devrons la lui restituer, si nous rompons nos bons avec
lui. Nous verrons si cette appréhension est fondée.
Noussommes sans doute nés pauvres, nus et dénués de
secours. Quant a ce que l'État prétend avoir tait pour h)
développement de nus facultés, en disant que, s'il n'avait
rien t'ait, nousserions encore en ce moment aussi pauvres,
aussi nus et aussi dénués do secours, nous nous occu-
perons plus tard (te cette assertion. Sautons a présent par~
dessus les années ou l'homme n'est encore qu'un animal
(ténue de secours voil:~nos facuMesdéveloppées, nou~
voila capables de nous aider nous-mêmes: je saurai hieo
reconnaitrc plus tard les services que rËtat nousa rendus
ici, s'il est possible de les apercevoir. Voi~ donc nos fa-
cultés développées nousvoulons nous approprier quelque
chose nous jetons les yeuxtout autour de nous, e~ nous
voyons qu'a l'exception de l'air et dola lumière, tout a son
propriétaire si la lumière et l'air n'en ont pas, c'est par
cette simple raison qu'ils ne sont susceptibles d'aucune
forme étrangère. Nous poumons parcourir toute la terre
sans y rien trouver sur quoi nous eussions à faire valoir
notre droit d'appropriation, qui s'étend sur toute matière
brute. 11n'y a presque plus de matière brute. Nous
en prendrons-nous l'Ëtat, comme s'il avait tout conus-
qu~, et qu'il ne nous eut plus rien laisse? Non, nous
ferions preuve ainsi d'une grande incapacité, et nous
montrerions que nous ne comprenons rien à la chose. Ce
n'est pas l'Etat qui a déjà <-outpris en sa possession ce
sont les individus. Leur chercherons-nous querelle, parce
qu'ils ne nous ont pas attendus,–parce qu'ils n'ont pas
compte sur nous, avant que nous ne fussions? Hevendi-
querons-nous un droit que nous aurions eu dansle monde
CUNSIDÉKAT!ONS15()
des phénomènes, avant d'y paraître. H est vraiment dom-
mage pour nous que toutes les placessoient déjà occupées;mais aussi pourquoi ne sommes-nous pas nés plus tôt?Nous n'avons pas le droit de chasser quelqu'un de sa
place, parce qu'il nous en faut une. C'est nous de faireen sorte d'arriver Atemps. Cela nous regarde.
Or c'est ici, pense-t-on, que l'Etat intervient. H nousinstitue d'abord copropriétaires du bien de nos parents,quand ils en ont, et héritiers de ce bien après leur mort.
Il serait généreux de la part de l'État de remédier a unmal qu'il n'a pas causé, comme nous venons de le :'econ-naitrc. Mais qu'on me permette de faire une question en
passant pour réveiller l'attention Ou donc l'Ëtat a-t-i!
pris le droit de me donner d'abord la copropriété, et en-suite la propriété entière d'un bien étranger? Tous pen-sent-ils avoir un droit que n'a aucun individu ? N'ai-je pasdéjà dit que, si chacun se bornait à verser du rhum dansun hol, il ne pourrait en résulter du punch!
Nous verrons quand il sera question de culture, quelleest, d'après les principes du droit naturel, la nature de la
copropriété des enfants sur le bien de leurs parents. A
présent parlons de l'héritage. !I n'y a pas, dit-on, dansle droit nature!, de droit d'hérédité. Hé?– li y en a untrès grand, très étendu seulement il faut savoir saisir lesidées dans leur pureté et ne pas permettre l'imaginationd'y mé!erdcs élémentshétérogènes empruntésàl'habitude.
Dès que quelqu'un sort du monde des phénomènes, il
perd ses droits dans ce monde. Sa propriété redevientcomme de la matière brute, car personne n'est plus pos-sesseur de sa forme. L'humanité tout entière est la légi-time héritière de chaque mort car l'humanité tout en-tière a un droit illimité d'appropriation sur tout cequi n'a
SUR LA RÉVOUIT!ON FRANÇAISE. i&7
pas de possesseur. Quiconque se l'appropriera réellement
le premier en sera le légitime propriétaire. C'est ainsi
que la nature prend soin de rappeler peu a peu de la
scène les anciens possesseurs pour laire place à ceux
qu'elle produit ensuite. La nature et la loi morale sont
ici parfaitement d'accord. La première est dans cette cir-
constance ce qu'elle devrait toujours être, la servante de
la seconde. Tu ne dois chasser personne de sa place,
dit la loi. Mmsil me faut une place, dis-tu. Voicita
place, dit la nature et elle culhute celui que tu n'avais
pas le droit de culbuter (1).
Cette course précipitée, mais peut-être vainc, vers une
possession, ces rivalités et ces inimitiés qui doivent en
résulter, tout cela ne nous plait pas, dirent les hommes,
lorsqu'ils devinrent citoyens, et en cela ils parlaient bien.
Que chacun prenne ce qui est le plus près de lui; de cette
façon, il s'épargnera a lui-même la course et l'épargneraaux autres. Qu'il prenne ce qui était dans la cahanc et
autour de la cabane de son père; chacun de nous renon-
cera a son droit d'appropriation sur cette possession
vacante, si lui-même veut renoncer à sa part de droit
d'appropriation sur le bien de tout autre concitoyenmort.
Tu n'as donc pas reçugratuitement le droit civil d'hé-
rédité tu l'as échangé contre un droit aliénable de
l'homme, celui d'hériter, si tu le peux, de tout mort.
Dèsque tu t'es abstenud'occuper la succession des autres,
pendant que tu as vécu dans l'État~ tu as rempli ta con-
(i) Lemaitreendroitnaturelque j'ai ionean commencementdu
premierchapitre,n'intcrprete-t-Hpas ceciet lasuitecommesije ra-
contaisun faithistorique,commesi, suivantsonexpression,Jepen-saisquecelaestarrivéclansle fefnp~ Je ne trouvepointdansmes
cahiersderenseignementa cesujet.
CONS!DÊnAT!ONR468
dition, et l'État la sienne. Ton héritage paterne! t'appar-particnt, en vortu (tu connut que tu as rempli. Possède-le en toute conscience, même quand tu sortirais de i't!tat-s'il le revendique, exige de lui a ton tour tout ce que tnaurais pu t'approprier, pendant ce temps-là, de la succes-sion des citoyens morts, et i! te !c laissera.
La seconde manière d'arriver dans l'état une pro-priété c'est le travail appuyéd'un contrat. Le simple tra-vail donne rnrement on ne donne jamais une propriétédans l'Etat car i! y a rarement ou il n'y a jamais de ma-tière brute. Tout ce.que nous vouions travailler a déjà saforme; or nous n'avons pas le droit de le travailler sansle consentement du propriétaire de la dernière forme. Sicelui-ci nous ch:tr~e (le travailler !a chose a notre tour,moyennant un dédommagement pour la force que nous ydépenserons etqui est originairement notre propriété, cequi passe de sa propriété dans nos mnins devient nôtreau moyen d'un contrat et du trayait. Il nous le vend.S'it consent à ceque noustravaillions !a chose a nôtres'(le seul fait de la prendre est dej:~ une peine dépensée),sans rien exiger de nous en échange, la chose même de-vient aiors nctre, comme par l'CHct d'un contrat et dutravail. En enct, avant que nous y eussions dépense une
peine, nous ne pouvions pas le forcer a tenir sa promesse'il pouvait n'avoir jamais eu la volonté de nous donner lachose ou avoir change de volonté, et alors elle ne serait
pas nôtre, comme on l'a vu par les explications précé-dentes. Mais,comme il ne reçoit rien en échange (tans sa
propriété, il ne nous la vend pas; il nous la donne.–
L'héritage et le contrat de travail embrassent toutes lesmanières d'arriver dans l'Etat à une possession. Le com-merce n'est qu'un contrat d'échange sur des objets dont
SUR LA RÉVOLUTÏON FRANÇAISE. i69
la possession suppose déjà l'héritage ou io contrat de
travail.
<tMais ces contrats sont conclus dans l'État, sous la
protection de l'Etat, (frace l'existence (te l'État, dont le
premier contrat est te fondement <!etous ceuxqui peuventvenir ensuite; par conséquent tout ce que nous obtenons
par ce moyen, nous le devons a l'état.))–Kn voilà beau-
coup a ta fois, et cota e~t vite concluI Il nous faut du
temps pour débrouiller toutes ces choses.
D'abord je dois relever ici une confusion d'idées q~i, ace qu'il me semble, a généralement domine jusqu'à ce
jour et qui est tellement passée dans la tangue, qu'il est
diflicilcde trouver un mot qui y mette fin. Le mot « so-
ciété ? est en cu'et la source de cette fâcheuse équivoque'.On l'emploie tantôt connue signifiant des hommes unis
en ~encrai par un contrat, tantôt comme désignant, on
particulier des hommes unis par un contrat civile c'est-a-dirc l'Etat; et l'on saute ainsi par-dessus une question
importante, celle qui concerne les hommes qui, bien loin
d'être unis par un contrat civil, vivent a côte les uns des
autres et entre eux en dehors de tout contrat. Je distinguedans ce mot de société deux sens principaux il signified'abord une relation physique (te plusieurs personnesentre elles, qui ne peut être que leur rapport réciproquedans l'espace; et ensuite une relation morale, le rapportde droits et de devoirs réciproques. C'est dans ce dernier
sens qu'on a employé le mot de société, et l'on a lait
déterminer ces droits et ces devoirs par des contrats, soit
en gênerai par un contrat quelconque, soit en particulier
par un contrat civil. Et ainsi toute société résultait et
devait nécessairement résulter d'un contrat; sans contrat
il n'y avait pas de société possible.
160 CONSIDÉRATIONS
Pourquoi donc a-t-on oublié si complètement le pre-mier sens du mot société? Des êtres qui ne sont pas
simplement des corps ne sauraient être dans l'espace,même comme corps, sans relations morales entre eux.
Fort bien, maisalors cette vieille idée d'un état de nature,cette guerre de tous contre tous qui y serait de droit, ce
droit du plus fort qui devrait régner sur ce sol, tout cela
est taux. Deux hommes ne pourraient pas, pensait-on,
s'approcher l'un de l'autre de !a largeur d'un pied, sans
que chacun d'eux n'eut parfaitement le droit de tenir
l'autre pour une excellente trouvaille, de s'en emparer etde le rôtir. Mais peut-être aucun d'eux ne saurai t-H au
juste s'il serait le plus fort; alors ils devraient sedire l'un A
l'autre «Neme mange pas, ô monbon, je ne te manderai
pas non plus; et Apartir de ce moment, ils n'auraient
plus le droit de se mander, puisqu'ils se seraient promisde ne pas le faire; et, bien qu'ils eussent en gênerai par-faitement le droit de se manger, ils n'auraient plus celui
de ne pas se tenir parole. Ils pourraient alors vivre
tranquillement entre eux. 0 profonde philosophie! Même
dans les systèmes où cette idée est tout a faitabandonnée,les conséquences prochaines ou éloignées s'en font en-core sentir,
II est sans doute possible aux hommes, j'entends mo-
ralement possible, de vivre en société dans le premiersens du mot, c'est-a-dirc de vivre a côté les uns desautres et entre eux, sans former une société dans le se-cond sens que vous attachez a ce mot, sansêtre unis parun contrat. Ils ne sont pas alors sans droits et sans devoirs
réciproques. Leur loi commune, qui détermine assez
exactement ces droits et ces devoirs, c'est la loi de la
liberté, ou ce principe « Ne trouble la liberté de per-
SUR LA DÉVOLUTION FRANÇAISE. 161
sonne, alors qu'elle ne trouble pas ia tienne. & Mais
!c hommes so~i~c~ (h~nca ce principe, s'ils
n'y étaient contraints par des lois ? Ne se soucieraient-ils
pas toujours plus de ce qu'ils pourraient que de ce quiteur serait permis? ))–Je sais que vous ne manquez ja-mais d'en appeier a !a méchanceté ori~ine)te de l'homme,
chose dont je ne puis me convaincre; mais suit ces lois
de contrainte ont aussi leur valeur dans l'état de nature;
je puis légitimement contraindre quiconque trouble ma
liberté a la rétablir en elle-même et. dans toute !a pléni-tude de ses en'ets. s Tu en as /c </?M/; tnais cst-tu sur
de ~o~uo~' toujours être leplusl'ort? c-–Vous ne pariex
jamaistptede cequ<'je serais ou de ce queje suis, je parte<)ece que je (~'r~ SiJa ici morate gouvernait in nature,
je toujours !e p!us fort, des que j'aurais raisoncar je (/o~ l'être. Vous me transportez sans cesse dans ie
domaine de la nécessité physique. Un peu de patience,e! je vous aurai enlevé l'objection que vous avex dans le
coeur, sans m'enter avec vous dans l'examen de l'hy-
pothèse de ce que l'homme ~c~c/~ dans l'état
de nature.
Les hommes peuvent aussi vivre en société dans le sc-
c<mdsens que vousdonne:<ace mot, c'est-a-dircetre lies
par un contrat en gênerai, sans former précisément,un
~tat, sans être unis par un contrat civil. La légitimité d'un
contrat en général n'est pas d'abord déterminée par une
espèce particulière (te contrat, par le contrat civil; ce
serait (rappelons-le aussi en passant pour ceux qui, de cette
manière, verront ta chose plus clairement) un cercle vi-
cieux manifeste. ,\ous faisons un contrat stipulant,quetes contrats en, général doivent être valables, et.ce même
'entrât est valable, parce que, en vertu de noire contrat,11~1
~hA'nu~.s1~
tescontrats hj sont en ~encnd. ~i, comme on t'a tuontre
phh)haut, il y a une chose exactementdéterminée par la
!"i morale c'e~t lu réciprocité des services, ou bien !a
restitution de ce que l'un a reçu de l'autre et la réparationdu dommage qu'on lui a cause.Cen'est pas du t'Ëtai que
je tiens le droit de réclamer ucth; réciprocité un ccUn
ruparation, maisje l'ai reçu du pcrc cutufnun des espritavecla liberté qu'H m'a donnée en dot.
Je n'ai pas entrepris cette analyse pour h; seut plaisirde la iairc, mais pour en tirer une conséquence impor-tante. Si l'Etat ne peut ni nous retirer ni nous donner
les droits qui sont notre propriété originaire, il iaut quetoutes ces relations persistent rcenement dans !a société
civile. Je ne puis pas posséder comme citoyen, c// y~'
/c/, un droit que je possède comme homme; et je ne
puis avoir déjà possède connue homme le droit que je
possède a titre de citoyen. C'est donc une grande erreur
de croire que l'état naturel (le l'homme est supprime parle contrat civil; it ne peut jamais être supprime, il passeet subsiste sans interruption dansl'Etat. –L'homme dans
i'Ëtat peut être envisage sous divers rapports. D'abord
comme un être isole, seul avecsa conscienceet le suprêmeexécuteur des décisions de ~aconscience. C'est la sa piushaute juridiction toutes les autres relations sont subor"
données accnc-ia. Ici nut etran~er(ia divinité n'est point
pour lui une étrangère) ne saurait être son ju~e. La
loi, au nom de iaqueUe parie te juge invisibte de <'etri-
hunat, est la loi morate, en tant qu'eue se rapporte sim-
ptement au monde spirituet; sous <'e premier rapport il
e:)tc~ it peut ensuit être envisagé counne ctant
ex société, ou comme vivant au milieu d'autres individus
dc~on uëpccet Sous ce i'appurt, sa lui est ia lui moraic,
SUh LA HËVULUTiUN i''H.Ai~i' 16S
'jn tant. qu'elle détermine te monde des pitenutm'nes, <'t.
''Ht's'appelle alors droit naturel. Devant ce tril<'malexté-
rieur, chacun de ceux aveclesquels il vit es!,sonju~e. Sous
<crapport il est /<c.–Maintenant il conclutdes con-
trats. Le cliamp des contrats est h' monde des piten"-
menes, en tant qu'il n'est pas parfaitement détermine par!aici morale. Sa loi dans ce champest la volonté (lavolonté atïrancinc de toute loi). S'il ne peut retirer sa
volonté sans porter atteinte a la liberté d'autrni, sa vo-
lonté n'est plus libre elle rentre suus la loi, ut il i'auL
qu'elle se rc~le sur la loi. Descontrats de ce ~cnru, il en
pcu~conclure autant et d'autant d'espèces qu'M!c veut.
Parmi eux il peut conclure aussi ce contrat particulierd'un avec tous et de tons avec un, que l'on nomme le
contrat civil. Le champ de ce contrat est une p:u'tic arbi-
trairement choisie dans le domaine du libre arbitre, il yaune loi et des droits, comme dans le contrat en ~encrai,dont celui-ci constitue une espèce. En tant que l'honnne
est soumis a ce contrat, il s'appelle ô'yc~. Si l'on veut
rendre visible la circonscription et le rapport du ces
divers domaines/que l'on trace un cercle. La surface en-
tière sera le domaine de la conscience. Que dansl'inté-rieur de ce cercle on en trace un autre beaucoup plus
petit celui-ci embrasse le monde visible, cette partie du
domaine de la conscience a laquelle il se rapporte et qui
comprend le droit naturel, la loi des devoirs parlaits. Quedans l'intérieur de ce second cercle on en trace encore un
troisième il représentele droit de contrat, compris dansla conscienceet le droit naturel. Ennn tracez un dernier
cercle, plus petit encore, dans l'intérieur du troisième, etvousavex en particulier le contrat civil, compris dans ic
ressort d's précédents. Pour rendre ma peusee plus
CONSIUÉRATÏONS1~
.scnstNc, jn me pcrm~th-ai de joindre ici la h~urc aui.vante:
Il nu reste p!us qu'une chose a remarquer, c'est qncles M'ibunaux supérieurs étendent invisibiemcnt leur res-sert A travers in ebamp des inférieur, et. que i~dt-cihm-turci, tneme dans son t'essor!, ne prononce <n~ sur tics
objets <jue !a conscience a iaisscs tibres, etc. Les cerclesintérieurs n'embrassent pas du tout ce que les cercles ex-térieurs embrassent dans leur périmètre; mais dans ce
périmètre se rencontrent des objets tout autres sur ies-
'ptetsees derniers étendent ieur juridiction. Pour rendreeeta tonta fait sensible, il faudrait puser ({natre cercte.d'- <-e~enre, tes uns au-t!essus des autres. Ledomainrde ta consfienL-e embrasse tout ceiui du cotdrat civil, !e'noins. ndoit<!tre permis a chacun de.se retirer du cen'tr<-
versiacirconterence, et metnedesortir<tudoma)'net!u droitnature!, s'ih'eut vivre dans une ne déserte, mais il ne sort.jamais du domaine de la conscience, parce qu'd n'est pasun animât. ~u'onju~e maintenant de que! droit i'Etat.
sun !.A HËVO!.UT!ON FHANCAtSR. !65
ttout ~(I«man~cstcc~n<tnt rpnt'crmt''<!an~ t<'phts'h'<'it
)'si)nc'trans~r<'ss''srs ti))tit<'s; ih'h''n:h)' acn\:uH!r
)-h:unp<!es contrats'~t~tt'r:)),~t'hn tn~m'<tn droit na-
))trt'<'t.itph~t:'tDit'u,j)tStt))'t<'f'tni)t<'t:tru))s<'K'!u'(<).
J) Ce n'est qu'en distinguant cesditlerents (tomainf'.s que t'en
detneic tes sopt)ismes de ce rtt'~ieur Rre< <'t <te son digne (tiscipte.
Si tu gagnes ton premier procès, dit te sophiste a son discipte, tx me
paieras cent talents; si tu te perds, tu ne me paieras rien; et il t'in-
struisit dans son art. t.e n)a!tre cm besoin (Pm'~pm k p:ncn)Ct)t
n'in-t'ivai: p:ts: it .tppch son discip~ f!cv!))Hle tribun.'t. 0 j"
dh-i), il f:n)t qn'it me paie en tous <'ns )cs (Ct:t ).)!cms, t'tt vertu <k
voh'c sentence, si vous if'condanuu'x~p~yct'on vertu d<*no))c
contrat, s'H gagne son procès car il :un'n ~K~~ '< sa prôniez
a<îai)'c. ~on, répondit te di~nc discipto, je ne paierai rie)) en aucun
cas je ne paictai pas, en vertu de votre scntcnfe, si \ot)c jo~ment
nrcst favot'ahte; je ne paierai pa'} davantage, s'it m'est contraire, en
verm de notre contrat, cat- ators je n'aura pas gagn~ !na ptenncn'
an'airc. Les juges,– c'ct.tient des/\theni''ns, d~darO'cnt qu'Us ne
pouvaient rendre aucune décision. Tons tes tcctfurs, qu'its tne
pardonnent si je tes examine parfois a t'itnpt'ovistc, tous tes tecteurs
qui ont compris ta précédente théorie jugeront ce pt'occs du premier
coup d'œi). S'Hs ne !c jugent pas, c'est qu'ifs ne l'ont pas comprise
qn'its la méditent alors, jusque ce qu'its soient en état de )c juger!
Oui ne voit que te vieux et le jcttnc sophiste etnbrouittcnt t'atToirc
en voûtant passer d'un domaine dans un autre, et que k vi<'u\ avait
prépare cette confusion par la singulière condition qu'it avait mise
dans te contrat. Chacun d'eux prétend se réfugier (tans le domaine de
t'~tat, si son adversaire le poursuit sur celui des contrats, et clans le
domaine des contrats, si l'autre te poursuit dans te champde t'~tat
et, si cela tcur est permis, its ne se rencontreront jamais. Que ne tes
avez-vous renvoyés devant tcnr véritable tribuxat, ôj~es athéniens! t
Il n'y a point d'aréopage qui puisse dire ce qui est de droit dans tes
contrats; cette toi est plus ancienne qnc tout areop.tge. )/an'airc pré-
sente n'est pas du ressort <te votre tribunat ce n'est pas un procès
ncnvoyez-tcs, et dites au discipte de remptif tu condition du
rontm) dans un t'~r/e procès re n'est pas vous ato s, c'est la chose
~NS!f)ÉhATtONS
t:equej'ai acquisdans l'Ktat. pendant ma vie, par quel-
que contrat, je h' possèdedonc comme//o~ non comm<'
~o~. ~e fallait-il pas que je t'nsse une personne mo-
rate pour pouvoir conclure un contrat? Mais comm<'
citoyen, suis-je dune une pt'rs'ttuu' nnn'ah'? Ai-j)\ a ) r
titrf\, t)t)'' ii! Yoh)nt<?0 nr'n, <'pn'cs! qu'' <)<'mon
un!))))a\'c<' h'us qn'' natt ccHf tttmvcHcppi'sotnh'murak'<\'st <tcta vohtttt~'!<'tous quût'csuttc ccth' d'' t'KtaL.Sij<-
puis Ct~K'tut'~nn contrat, en ~encra~ je ttois ie conchtre
c~mm~ttomn~; j'' rtf pms ic faire commocitoyen.–Ccht!
qui t'a condn avec tn~i ne !'a t:ut f~atcmcnt <pu'o~mm'
homme, r') cc!a t~ar h même raison.
Mcmfquand j'ai condn !e contrat avec i'Htatjf' n'ai pnic conctnrc qu'' commehomme, et la chose est pour ainsi
dire ph~ évidente encore dans ce cas que dans ie précè-dent. Les deux décisions volontaires qui constituent k
(.outrât sont ceHede et !a mienne. Si mavoient'
était renferm'e dans cène (te t'~tat, ii n'y avait qu'um-
votonte l'État a conclu nn contrat avec lui-tneme, ce quiest contradictoire. Des que j'ai rempli mon engagement~t qnc l'État a rempli le sien, le contrat est exécute: le
service auquel je me suis en~a~e appartient :'t l'état, et
celui que F~tat m'a promis m'appartient.
Mais,dit-on, si l'État n'intervenait tu aurais beau
conclure descontrats connue homme,tu ne pourrais ~nere
comptersurla sainteté de ces contrats. Si l'autre ne tenait
pas sa parole, tu aurais sans doute, d'après le droit natu-
rel, !<'droit de le contraindre a rendre cequ'il aurait reçu1
)n6tncq't! prononcerate jugement.Quete maHt'cvienne,c!qn'itn'-
f'tamedet'~tat,~ott~<.< ~'c~<n~f~ce~N(~<f~~r<'< )n<))sCt't)''
~ro~c~'f)~ ~o' 7'a<Kre/<~<t/«*M<t/t~'~pr~ fo~
<N. vousttvcx:)to)'sHn<'an'aire jnsquc-t~vn~sn'enavi~ pns.
sun !.A n~voMiT~N pHA~~ust.: !~7
et a reparer !e dommage qu'it t'aurait cau~e; mais h) ne
«eraispeut-~tre pas toujours te ptus tort. Ch't'~tat t'est :')
)a place. !t t'aidedans ton droit, qup ht peux toujours nom-
)ner un droit (!e l'homme il te pr~te secours quand
quelqu'un menace ce droit; la crainte de FËtat t'ait
qu'on y porte plus rarement atteinte et nous nous rap-
procherions ainsi de {'objectionque nous avons promis
plus haut de réfuter.
Contrequi l'Ëtat a-t-i! protêt mon droit.?–Contre un
étranger ou contre un citoyen?–S'il l'a protège contre
un étranger, it y était ob!i~' par le seu! contrat. J'étais
{dorsdans le contrat, .rappartcnais moi-même au corps
protecteur, soit d'une manière, soit de l'autre, –ne fut-
ce qu'en ne lui suscitant aucun trouble. J'aidais a proté-
ger aussi !es droits des autres citoyens. J'ai rempH mon
ofnce, et l'état le sien. C'est une anairc unie. Notre con-
trat est exécute, et chacun garde ce qui hu appartient.–
Si je sors du contrat, le devoir parmit qu'a !tat de pro-
t~er mon droit cesse assurément, puisque je renonce
celui de protéger le droit des autres. C'est Amoi de voir
!'<m'aider moi-même.
S'i! m'a protège contre un concitoyen, je répète a!ors
ce qui précède, mais j'y ajoute beaucoup plus.–J'ai con-
clu le contrat avec quelqu'un qui était mon concitoyen et
!e votre, comme un hommeavec un homme. C'est le droit
naturel et pas un autre, qui est ici notre toi. !t me Icse
et se met ainsi, a mon égard, en état d'hostiiite. J'ai !e
droit dete traiter en ennemi, jusqu'à ce quej'aie recouvr<
ma propri<t< tout eutier<Yousnevou!c/pnsqueje trait''
~'fltl'E', f'.flnf;lLfV'f~11 f'll (!fltll!Ili!`~ rll1 1.' l ~lllv-votre concitDyr'u en enm'mi? Eh bien, aidex-mo! vous-
u)~mes pacifiquementdaus utuu droit. Des que v'usprr-
ue/ son parti,eu m~mp~chaut d~ poxrsuivr'' !t!t))c-
CONSIDÉRATIONS108
ment mon droit, l'amure devient la vôtre. Vousn'êtes tousdésormais qu'une seule personne monde accusée devant!etribunal du droit naturel; et je suis ta seconde personnemorale qui accuse. Je ne suis plus maintenant citoyen.Heime~re/-moi pacifiquement dans mon droit, ou jeporte la guerre chez vous. Que je sois votre concitoyenou un étranger; que je sois sorti de votre Kta! ou queje n'en aie jamais fait partie,7 H n'importe pas icidans cette action je ne suis pas du tout citoyen. « Com-ment ? A toi tout sent veux-tu déclarer ta guerre a toutl'état? Tu seras certainement le plus iaible? ') Kh bien ?Vousêtes-vous unis pour être injustes, et entre-t-on dansvotre société pour pouvoir voter impunément? Si c'estainsi que vous philosophex.jc vous laisse et poursuis munchemin.
Jl est prouve maintenant que toute propriété que nousavons acquise dans F~tat et qu'il a protégée pour nous,demeure justement notre, alors mêmeque nous sortonsde l'État; et nous arrivons au second objet, pour lequelil nous menace d'une demande en restitution, a la cM/
que nous y avons acquise. –Quelque terrible que fut te
premier procès, celui-ci l'est encore beaucoup plus. Sil'on nous avait entièrement dépouilles comme on nous en
menaçait, et qu'on nous eut citasses de !a terre et de ia
mer, nous aurions peut-être trouve un moyen de nous
échapper dans l'air, et d'y exister paisiblement. Maislors-
qu'il s'agit de nous enlever toutes nos habitudes de corpset d'esprit, il n'y a pas d'autre moyenque do nous frapperla tête avec un lourd marteau.
L'Ëtat réclame donc notre culture comme son bien. Sinous ne pouvons la lui restituer, nous lui restons enubai-nés sans retour. Nous avouons qu'il a trouve un moven
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. ~69
le meilleur, le plus bienfaisant, dira-t-it.–de nous riverAlui a tout jamais. Que dirons-nous? Irons-nous reven-
diquer tes droits de l'humanité? Nous hu devons, sinon!a facutte d'être des hommes, (ht moins !a conscience de
cette humanité même.– Honore en moi t'humanite, dis.
tu;–ingrat, repond t'Ëtat, serais-tu donr un homme, si
je ne Gavaisfaçonne pour ceia? Tourneras-tu contre moiles droits que j'ai fait moi-même valoir en toi? Oh, si jene t'avais jamais fait sentir que tu es p!us qu'un anima!,
je n'aurais pas aujourd'hui tant d'embarras avectoi.
Ainsi donc~ o ~tat~tunem'as etevequc pour queje fusseuti!e .*ttes fins, et non aux miennes.Tn m'as traite
commeun morceau de matière hrute, qui devait te servir
a quelque chose. Aprésent, je me donne a moi-metuc mes
uns, e~veux ics poursuivre moi-même. Ce n'est pas pource!aque tu m'as cuitive, dis-tu.–Bien. Je ne tiens donc
pas de toi cette espèce de cutturc, et je ne te la rends pas.Pourvu que tu me laisses ccue-ci.je te (tonne maparolede ne jamais employer– celle qui se rapporte /<~fins.
La culture que lu m'as donnée, ne me t'as-tu donc don-
née que sous !a condition que je t'appartiendrais iljamais?M'as-tu donc demande si jesouscrivais a cette condition?
Ai-je donc detihere sur la chose, et dit oui? –J'arrive
an'ame dans i'h6te!tcric des peterins. Je trouve juste de-
vam ma place un ptat de Jentittes, je m'empresse de le
prendre pour moi, et je remercie dans mon cœur ie bien-
faiteur inconnu qui nie le donne. Tu sors de ta cachette,t.u mets ta main sur moi et me dis Tu m'appartiens
pourquoi as-tu ~out(''de ce plat? tu viens de vendre ton
divin droit d'amcsse.–Ceta n'est ni ~en'reux, ni juste.Mais si tll m'avais interroge, si je t'avais repondu, si
nous avions reeUement conch) un contrat, jusqu'en ce
cnNSm~ATfONS-t70
entrât aura!t-tt don? pu s'tendre? Tn m'aurais dit: jeveuxte transformer, d'animal purement passif, euttomme
ft~issant par hu-meme, et je t'aurais promis de ne jamais
a~irparmoi-meme?Tu m'aurais dit je veux te mettre en
état de ju~er par toi-même, et j'aurais pris envers toi
t'en~agemcnt sotcnnet de ne jamaisju~-erpar moi-fncmc?
–Tu reconnaissais (me j'étais encore incube, car autre-
ment pour(fuoi aurais-tu voulu me cultiver? Mais avant
que tu n'eusses mis la main a l'œuvre, peuvais-je jn~eret
approuver ta constitution? Et. comment donc !e puts-j~
aujourd'hui, mon cher? Achevé d'abord ton oeuvrethis d'abord de moi un être raisonnable, nousverrons en-
suite. Tupeux sans doute teproposer accessoirement pourbut de me rendre, par la culture que tu me donnes, ca-
pnb!ed'apprécier !a bcaut6 et l'cxcettence de ta constitu-
tion, et de m'apprendre At'aimer par conviction; mn!s
tu ne saurais m'y obliger d'avance, a moins que par ha-
sard tu ne veuiltes, non pas me cultiver, mais me perver-tir et me dénaturer, non pas exercer ma vue, mais me
mettre des verres de conteur devant tes yeux. Donne-moi
la cuttuTcque tu m'as promise. Siette me conduit Aaimer
ta constitution, tu auras atteint ton but. Si cite ne m'yconduit pas, ou bien la prétendue culture que tu m'auras
donnée ne vaudra rien, et tu n'auras pu tenir ta parole;ou bien eue vaudra quoique chose, et c'est alors ta consti-
tution qui ne vaudra rien. Puis-je faire un meiHeurusa~edu don quej'ai rer-u de toi que de travaitier a ta propream~ioration? Maispourquoi repondre aux ~ens dans
leur tan~a~e? Pourquoi buter avec les sophistes surteur
propre terrain? Hsdi~ereut de bien ptus grosses contra-
dictinns que ceUe-fi. Je p~rte:'t cetui qui cherche mipar-thtetnent ta vcrit'
SUH L.\ n~VOU!T!OMPR\N(:tSt: 171
La euknre ne s'applique pas a l'homme, comme un
manteau aux épaules nues d'un paratvtiqHe-.Fais osa~etir. tes mains, saisis le vêtement et tiens-te terme, serre-It-
autour de tous les ptis de ton corps, eu sinon tu laisseras
toujours des parties nues et tu auras h'oifi.Coque je suis,
c'est. en dennitive a moi que je !e dois~ sije suis quetque
ehuse par moi-même. S) je ne suis <{U(?!nufchose que
~t'ace a une autre chose; si je ne suis, {'ar exemple,
qu'un mcubte qui orne la chambre et en tirf hti-meme :'(
son tour son ptus ~'rand éclat, ouunn epec~qui ne Nesse
que dans une main vivante, ou une fh'ttequi ne rend ses
doux sons que sur tes Jevrcsd'un virtuose, sn\'e/ sfn'sque
jamais je ne sortirai de votre chambre, je ne m'échapperaide votre main, je ne me soustrairai a vos ievres. Si r'est
l;t~~r~tyl~~tu ns tait l riloi, ~i1, ~csi o'r~,t mvclm,j';lit:'t<~que <uas tait de moi, u Mt. si c'est ta )'eque j'aijaiss' taire de moi, tn pourras en répondre devant uu
antre tribunal; mais, du moins, je ne t'nppoHet'aijamais7
jw;tiec, Quicunqun
1LIiHl'IH\ t'ulllll'(~ v
a 1l'I::tillen justice. Quiconque tourne sa ruiuu'e t'outre r~ta)
ne la tient pas de l'État; et quiconque tient sa cuttm'e df
t'~tat ne la tourne pas contre lui.
Faut-il que je dise tout a mon tectenr? faut-it qu'iciencore j'applique la distinction déjà (tevetoppeeentre ta
société et l'Htat? La culture ne peut ~ti'e donnée ni par
t'une, ni par l'autre personne n'< odtive. La premier''fournit des moyens do culture incomparablement p!usnombreux et plus utiles que le sccon< L'innuence de
l'une et de l'autre sur notre cutture se comporte comme
tours domaines respectifs.Je ne rappellerai pas ici cette tendam'e primitive,de ht
nature scnsitde de l'homme, quii in porte a d<p"uiHertoute sa l'orcc devant l'infirmité, et <tni fait qu'a !'aspec)de ta faiblesse elle ne sent rien qo~dcta pitir! ~st-c''
cr~stn~AïtOKs17~
!natnisL'ni~ttS(<itnpnt.siun?Jcncrapp('tt<Taipasu't instinct. animât <p)t t'<'u.ssf'i'h«Hmh~'t:)im~t~~'~trps auxquds il a dunm- te jnm.. Ks~-c.- i'~tat, qm nous a
'incr?J..n..n~~craipasquc~mm.~uun hummc vient an mum!<~ est m'~ssaircmuïU un mo.
ttK.-nt d~ joi.. p(.m- mn~atnt-c humaine, cari! ta sunta~
'nnfat'(!c-anaccahtant<~(!np'ti~nantf'sdthtit'm-s;
ne t'appeU~nu pns <jn~ tua prcnn<t'<' ititprdsi.m, :m s.tt'Hr
''n~mdc ma m.i-c, m'a mis dans nn (!uux t'app.u-d~tn~ni'aisanc~ r/'t-~ro~Hc av~cc~h~ <-t'<att:rc humaine: p~
t"'a(iunnt''tanonmhu'c,<~j~ rai<h';Hvt'<')m punissun lait (t).Est-('~i'{~at qui m'a <h)tHt< <-<'tt)'sainte ioii
t'atut'd~?Jcn<'rapp('H<'raipas!out (-ia, cat'j~n.'
v'')t.\ pas <-0t)~<h'ot' tf-t l'homme cumm~ un animai, tnais
(!) 'fa tttctc a pnut.~rp Oon~< un nuire tn.~cn <t.' .s'ot d~annsso.t'ot.~h-c n-t.~tk vunht ne tk.H .-ecevo!. de loi, attn de n':noi) rtc..te donner, .~ids t.d.ssons ce).) Tu bien en uoc t)t)nn.ce; v~.t-cn iu~merOcr. ou, si elle est motK', va vprspr une tanxc sur son tumhc.n..Elle a hc.ut :)voh- (tlé, au\ yeux (le tons les hnmmo.s. une cr~am)..)t)cpt-i.snb)<; elle a hein) avoir vcr.s('(hns ton corps, avoc son lait, !<'v<'nin qui .1d.!d))r<! tes ncr~ jnsqn'ft posent et les (h'c))irct-a jusqu'autombeau, tout cela n'est rien elle n'en a ~as moins fait ce qu<. tam<')-c n'a point v,dn fa))-c; elle a anache a ton c<j'ut-!u bout de taHt-andccha!nc. (nti part (le !~tct-))it<! et reliera cnhn tous h~sCtt-e.sauproniet' anncao cd~ <)n tHo-c ~ctnngc (tes bienfaits.
Va, trait nign, va dechirf'r le cœor d<: toute mère; mais ne pars passans lui porter h: baume de cette pensée consolante que le moyenmais aussi .s~/ moyen d'euaccr entièrement le passe, c'c.st deréparer te pins comp~n'ment possihlc le dommage caus<! et (te faimmieux a t'avenir, ou, quand ceta n'est ptus possible, de se bien per-suader qu'on nuirait autrement, si tes mem's circonstances se pr.-sentaient, et d'avertir et d'encom-ager tes antre.s. Rt puisses, tuators te htcsser profondément, aftn d'cxtit~er le vieux mai et d<' teHuerir!
SUitL\ MËVOLUTIONFRAK~AtSi: J73
connue un esprit; je ne veux pas parier des impuisions desa nature sensible, mais de ses droits.
i\lon entrée dans te inonde des phénomènes est duc aune main étrangère, et cette main/en s'oln'ant il mui,m'a (tonne sur ctic des droits incontestables. i\e m'y as-tuattire que pour me laisser périr sans secours? Je pouvaisbien périr sans toi. Tu m'as promis de me soutenir si tune me tiens pas parole, je t'uccuserai de tous tes maux
que je sounrirai depuis le moment ou tu m'as attire a talumière du jour jusqu'à celui un je lui dirai ad'eu..j'ai ledroit d'accuser, car je porte en moi ce cachet de !a raison
qui t'est si bien connu.
Mes premiers vagissements annoncent au monde des
esprits qu'un d'eux vient d'entrer dans le monde des phé-nomènes, et qu'il veut y l'aire valoir ses droits c'est une
déclaration, une proclamation solennelle de ces droits
pour toute la nature; c'est une prise solennelle de posses-sion. Je n'avais pas d'ailleurs d'autre moyen d'en prendrepossession que ces cris impuissants; je ne puis rien de
plus. Tui qui les entends, reconnais eu moi tes droits, et
empresse-toi de les protéger jusqu'à ce que je le puissemoi-même. Ce sont les droits de l'humanité entière quetu détends en ma personne.
Tel est le principe qui h'~ithne h' pouvoir d<'s parents.Si quelqu'un portant un visage Immain est incapable dedétendre ses droits d'homme, l'humanité tout entière a I<;droit et lu devoir de les exercer a sa place, tis sont un
patrimoine commun, et la delense de ces droits est lecommun devoir de l'espèce entière; y porter atteinte,
c'est porter atteinte a toute l'espèce. Une chose sur
laquelle toute l'humanité a des droits communs échoit acelui qui s'en empare le premier. Ce qui est dépourvu de
CU~H)KHAT!UMS17A
raisondevient une propriété; une personne incapabled'user
de ta raison nu saurait être elle-n~me une propriété, mais
sesdroits deviennent lapropriété de celui qui s'en empare.H s'en empare par cela même qu'il les exerce. La sage-
femme, qui m'a fait voir le jour et qui m'a introduit dans
te monde des phénomènes, y a exerce mon premier droit.
J'avais droit a un lieu dans l'espace. Je no pouvais pas ie
prendre moi-même; elle l'a fait pour moi, en me plaçantla ou je ne pouvais me placer moi-même. Si elle n'avait
pas promis à mes parents, par un contrat, de leur céder
son droit sur moi si elle n'avait pas agi, en générai, en
vertu de ce contrat, au nom de mes parents, mes droits
seraient devenus les siens par ce prenner exercice qu'elleen aurait fait; mai~ de cette manière ils appartiennent a
mes parents. Je puis justement occuper les droits de
tout entant, si étranger qu'il soit, dés que je le prends a
s«n entrée dans le monde, et nul contrat ne m'oblige A
l~s restituer. Si généralement les parents s'emparent des
droits de leurs entants, cela vient de ce qu'a leur naissance
ils sont les plus procès d'eux, qu'ils les précèdent et
qu'ils ont déjà lait d'avance des préparatifs pour les rece-
voir dans le monde. Cela est donc accidentel. Selon le
droit naturel, ils n'ont pas un droitt exclusif sur leurs
enfants, a titre de parents. Ce n'est qu'au moyen de l'oc-
cupation qu'ils se font un droit de propriété de leur droit
d'appropriation, lequel leur est commun avec toute l'hu-
manité. Je laisse au lecteur ic soin d'appliquer cette
théorie a ceux qui sont devenus fous, et je le prie d'es-
sayer par là s'il l'a bien comprise.
Quand je me suis approprié les droits d'un être raison-
nable qui n'a pas l'usage de sa raison, ils demeurent
miens a l'égard du toute prétention étrangère, précisé-
St!h t. hKVULU'nu~ m.~(.:AiSt< i7o
ment parce qu'ils m'appartiennent. –Tn desires prendres'ms t~ protection eu jeune entant dont j'ai légitimement
uccupe les droits. Et quand Luserais son j)ere ou sa mère,
j'ai lu droit de dire non. Si ce jeune entant n'hait pas
incapable de parier, mais qu'il lut ma<trede sa raison, il
aurait bien le droit, de te dire Je ne veuxpas de ta pro-tection. Ur, s'il n'est pas douteux qu'il eut ce droit, jel'ui, puisque ses droits sont les miens; et c'est connue
exécuteur de ses droits que je te dis Je ne veux pas de
ta protection. Si tu veux traiter avec moi il cet e~ard, tu
ic peux et je le puis aussi; niais nul autre que lui n'a le
droit de les réclamer de moi. A mesure que ~a raison se
développera,il les exercera l'un après l'autre; il s'anran-
chh'a peu a peu de mon moi, ann de s'en former un quilui soit propre; et ce signe m'avertira sufnsarnment de
ne pas empiéter sur les droits d'autrui; si je passe outre,il me fera justement rentrer dans mes linutcs. Je sais
que depuis longtemps l'état a pris diverses dispositionssur les points dont il est ici question, mais je sais aussi
que depuis longtemps l'État a travaille de toutes manières
a iairc de nous des machines, au lieu de personnes agis-sant par elles-mêmes.
Si je me suis charge des droits d'un entant, je me suis
charge aussi de ses devoirs, qui seuls lui confèrent des
droits. C'est dans son âme que j'agis, et ma raison prendabsolument la place de la sienne. Je me suis charge de
ses obligations Hl'égard des autres. Cet entant t'a porté
quelque dommage; ton dommage doi~etre reparc; tu nesaurais t'en prendre a lui il n'est pas nnutre de sa raison.
C'est a moique tu t'en prends, a moi qui me suis engagea avoir de la raison pour lui. Je suis en quelque sorte t):(
caution auprès de toi. Ju me charge de se~obligations
CONStDÉRATIOKS176
envers lui-même, qui sont beaucoup plus levées encore,de ses retapons avec la loi monde en soi. il est destine a
poursuivre paria culture ie but suprême de tous les êtres
moraux. Pour en être capable, il faut avant toutes choses
qu'il puisse vivredans le monde des phénomènes oit il est
admis Je lui dois son entretien, car il se !e doit.a lui-même,à s-.t 1 -~tec.
j'~ -ti 1.' lut j'agis a sa place, i~n revanche, j'ai le droit de m'appro-prier les productions de ses facultés, au moment ou ellesse développent; car ses facultés sont les miennes. C'estce qu'on nomme la copropriété dans l'état de nature;tnais il serait plus juste de l'appeler droit de cojouissance,car quiconque ne peut occuper ne saurait avoir une véri-table proprit'te, et l'enfant ne le peut pas. –11 a le devoiret le droit de chercher et d'employer les moyens de cul-turc. Je me suis charge, a sa place, de ses devoirs et deses droits; il a donc le droit parfait d'exiger de moi ces
moyens, autant qu'ils sont en mon pouvoir. Jl ne dépend
pa~dc ma bonne volonté, mais c'est pour moi un devoir
impérieux de travailler de toutes mes forces a sa culture.Onpourrait dire, je ne mentionne ceci qu'en pas-
sant, que le fardeau de la tutelle des entants étant,
d'après notre propre déduction, beaucoup plus ~t'and que<c médiocre avantage qu'il procure, on ne trouverait pasuisement quelqu'un qui voulut s'en charger, si l'état n'in-
tervenait il propos et s'il n'en faisait un devoir civil aux
parents; mais ici se montre une fois de plus votre me-tiance a l'égard de la nature humaine, que vous lie cessezde calomnier, après l'avoir ~-atec par vos institutions
civiles, qui empiètent incessamment sur un domaine
ctran~er. Toutes ses tendances primitives sont bonnes etne deviennent pernicieuses que parce que vous les avezfaussées. –Chacunveut être le chef; on aime mieux pro-
i77SUR LA RÉVOLUTION FRANCISE.
tc~er que d'être protêt. On s'eteve ainsi il ses propres
yeux,et t'en acquiert devant soi-même une certaine im-
portance. Chacun aime a se reproduire dans tes autres, et
afairedesquahtesqui ies caractérisent ta copie des siennes.
Cesdispositions primitives, excettcr'tes taut(m'ettpsn'em-
piètent pas sur tahherted'autrui, nous pousseraient tou-
jours a nous charger des enfants, n nous reproduire nous-
mêmes en eux et a nous etevera nus propres yeux, si
vous n'aviez trouve !c mathcureux secret de nous faire
chercher notre ~toire dans ce qui nous abaisse et.nous
avitit, et de nous rendre l'apparence qui nous fait briller
aux yeuxdes autres plus a~reabie que ~'honneur qui nous
relevé aux nôtres, en u): mot. si vous n'aviez en'ace de
notre âme notre notdc orpucit pour y substituer votre
pueri te vanité.
Voiia ce qu'ont t'ait pour uuji mes tuteurs, et ils n'ont
fait que leur devoir. Atais eux-mcutes vivaient dans la
société, et quiconque avait un point de contact avec eux
concourut il rue tonner; chaque mot prononce servit aussi
a développer mes capacités. (.traces soient rendues il la
bonne nature ouat'hcureux hasard qui m'a fait naitrccn
société, si ce n'est pas !a ce qu'Us se proposcreut potjr
hut; grâces soientrenducs en uuireaieur honnevotonte,
si te! fut en ''net teur hut.–C'est une aumône qu'ils ont
donnée au pauvre par pure honte; et' n'est point une
ftettc qu'ils ont pay<e,et je !eur otu'e !a seuie chose ({ui
se puissedonuer en présent, tuon t'emerciment. Mais
(pt'adonc i'~tat a faire ici? S'il ne peut pas prouver que
ta société eu j~'nerat n'existe que ~race a lui, les mérites
de ta société ne sont pas les siens. Or il ne peut pas le
prouver:nous avons établi qu'it n'existe lui-même que
grâce la société. <~u'it remercie hu-memc !a société de
12
~ur~uÉM'noNs178
ce qu'il lui doit; nous nous :n'ran~cru)ts bien avec ullc
sans son intermédiaire.
Maismon horizon s'étend; me voici arrive aux limitesd'une culture intellectuelle pins élevée. Je trouve des
écoles inférieures et supérieures, prêtes a me recevoir.
Celles-ci, au moins, existent-ellesen vertu desinstitut ionsde l'Etat? il ne serait pasdimcile de montrer qu'eues nesont pas elles-mêmes (les instituts de l'Ktat, mais de !a so-
ciété, et que leur existence ne se tonde pas sur !e cuun'ntl
civil, mais sur d'autres contrats particuliers (te sociétés
plus ou moins grandes; qu'il faut tout au plus y attribuer
aux soins de l'Etat ce qui abaisse l'esprit et comprime sonlibre essor, ici la discipline monastique, ta ia surveillanceexercée sur l'orthodoxie en tout ~enrc, rattachement a ce
qui est ancien y~'c~ qu'il est ancien, les méthodes d'eu-
sci~nemcnt et les manuels oniciels. Mais je ne veux pas
prendre tout à l'extrême rigueur; uue fois du moins jeveux abandonner l'Etatau penchant qui le porte as'uttri-huer tout le bien qui est dans la société, et a expliquertout le mal(luis' trouve sestout le mal qui s'y trouve par notre résistance a ses salu-
taires dispositions. Je veux qu'it ait fnndeces instituts, qu'ileu ait appeléet paye les maures. Je ne lui rappellerai même
pas que, mal~rctousscssoius.je neseraisjamaisdevenu ni
instruit, nisa~e.sijc n'y avais employémes propres t'acut-
tes. Je veux même qu'il possède h' pouvoir df rendre les
hommes sa~cs contre leur volonté, et qu'il nous en donne
(les preuves éclatante dans ses sublimes appuis, dans ceux
eu laveur desquels il a déployé tout son savou'-tair'd.msJf3S'enfunts£le8e~prilu:es et dans ~anohle~~e,les enfants de se" princes et dans .sanoblesse.
A-t-il donc vraiment appelé et paye nos maitrcs? r~t-
ce son appel qui a mis en eux cette capacité qu'ils mon-.trent à pénétrer dans le fond de notre âme, et a répandre
SLH LA tŒVULUTIOM m.ÇAÏ!SE. 170
en nous leur esprit cette tendre sympathie qu'ils nous
témoignent comme a des enfants de leur esprit? Est-ce
somnis6ralde salaire (pu tes a d~domma~es (tes mille de-
sacrements de leur état, de tous les soucis nt des peinescoutinuelles qu'ils "nt. eus :'tsuppc-rtcr, qui tes a récom-
penses d'avoir maintenu l'esprit humain à la hauteur ouil était parvenu, ou tnCmede lui avoir donne unesi puis-sante impulsion? Oh! croycx i'Ktat sur toute autre chose
que surceia Cetuiqu'un esm'it <'hir <'tHexibte,qu'un coeur
cchautTcpar ic sentiment de ta dignité itumaine n'a pas
depuis longtemps prédestine aux ionetions d'instituteur
des itommcs, a beau y utrc appete. il ne sera jamais a la
hauteur de ces fonctions.Tout ceque vous pourrez faire,c'est de remplir une ptacc vide avec un homme qui, s'it
ne s'y est pas senti depuis Jon~temps déjà invite de plushaut, en cearte un ptus di~ne et occupe inutitcmet)t sa
phce. La iihrc communication de ta vérité cstic plus beauHcnqui forme ie monde des esprits; c'est un secret quepet'sonne ne connaît ilmoins de t'avoir reçu. Lavérité est
tepatrimoinecommundc ce monde supérieur; eueest. hbrecomme i'air~ et des myriades d'êtres peuvent en jouir en
mono temps sans ~c dévorer. Vous m'en distribuez ma
part, non comme ma propriété, mais commeun ~ag'esa-cre qui doit passer a vos arrière-neveux. Je le transmet-
trai, je dois te transmettre; heureux sij'ai pu le faire fruc-
tifier entre mes mains. C'est ainsi seulf'ment que je puispayer ma place dans te monde des esprits. Je paie sansdôme ma dette, mais ce n'est point a toi, ô État; ton
royaume n'appartient pas au monde avec tequel j'ai des
comptes a rester.–Tu parles de paiement? Tes mandats
n'ont aucune valeur dans ce monde-la, et l'instituteur de
l'humanité se fait payer en une monnaie que tu n'as point
CUN~IDK~A'HOKS180
frappée. Toutes tes fois qu'il communique ta vérité a un
autre, il n'~uit iui-meme une nouveite dtuminati~n,et chaque''coherqu'iHui convertit hn découvre en e!te
unenouvcHefact'. Tuutesh'sj<m's et toutes Jes récom-
penses que tu peux hti donner ne sont rien au prix de
cènes qu'it ~oùte de nouveau cttaqucjour," a produire
rhartnom<:<tc!apcn~<~ et a iunttrc un ('spnLhumain avec
te Stcn. Lc~pcrs~m-<~ <~u.'tu pouvais h)i onvrirsu!' ce
court <'spaœde ta \i<' ne sunt )icu en unnpataisun des
rennes; Use dit q<n' h's truits de ses travaux dun'ront
dan~<tur)Ht<~ et qu< dans ta ~t'~ innnic d<s cn't. c~
des cause' rien de ('<'qu'il aura aj)purt< ne sera perdu
puur te pet't'ectiunneoK'ntde t'espece hunmine. Le jeunehomme n'est pas pius ~rand que sun ina)tre. tam qu'ii
re~tej<'UHC<!teh';v< et fju'ii ne pnuLqu'imiter; tuais !e
mattre serait ~t'and <~ ttcurcux, s'it pouvait retntre tons
seseteves ph.tsgrands qu'd ne t'etaiUui-tnemc.Oueis ~or-tnes de dignité et de honheur pour tes hommes il Ycrruit
sortir de ta graine qu~'Haurait semée! Que mon nom
disparaisse a jamais, et que tes synahcs dont il se composene retentissent plus sur ies ievres de ia postérité, pourvu
que dans ceMegrande chainc du pcrteetiutmement de Ja
race de tnes frères mun existence forme unanneau auquelse rattachent (t'autres anneaux, jusque dans t'eiernite.
Oucceta suit, etjeeunse'ns quepersonn'' n'en sache rien.
~on, esprits (tes siècles passes, vous t-ousdont tes om-
hres voni~'nt invisibles autourde moi, ~recs et Humains,
dont tes écrits encore vivants ont provoque tes premiersessais de mon esprit, vous qui avex insensih)<nentJ'ait
eroitre dans mon arne cette hardiesse, ce mépris de ia
ruse, du danger et de ta mort, ce sentiment du tout ce
qui est ~rand et fort,– et vous qui vivez encore en par-
St n L.~ KHVOU'T~N Fn.)Sr:. 48t
)i< vus, tues autres m:utres, sous ta conduite de qui je
rh<'r<'he<t<'<u'<'t'haq))eju)u')p)''n'rerptuspr)d''mdt''tnent
dartsiauatur''dt')n'tr<'<'sp!'it)'td''S)'sidt''<'s,et:'tmed)''ti-vr''r toujours da<anta~ed<'stn'j))~t''s<'nrat'iu's;–t)'inde
m~icette honteuse p''ns'cd'av<'ir tout pavt''ave<-tcsquei-
qnes~ros S(U)sque j'ai d<!nu's peur v"s'rits.~tt(n es-
prit en ce!num<'n<s'env<deav<'c.:trdt'))!'v''rsvt<st«ud)eaux
{n);"nnus,'H) vers iesvines que v'ms habitez, et dont me
séparent des terres et des mers; it voudrait, ph'in d'une
émotion t~ute virile, vous remercier sur vus ttunheaux~
ou vous serrer ta main, en vus disant: vous êtes mes
pères, une partie <h'votr~ <'s{n'itc::<)pass' en mni. –Et
v'ms d~ntj~ri !<n t<~h'cuns orah's, toi snrtxnt, rospcc-
tahic('L)ntJ''s pt'nst''<'ss<;<h''r'nhtnU)a)tncniuu:'R-
tnct~a trayt'rs ftcs champs <!<'ruses, «nt. <I'ah'n'~t'cH!e
m<'H'~priLde son I~n~S)Hn!neit, et !ni ont permis (tos~
Lfonveriui-tnemt', ppnt-eh'e m<'scra-t-i! encore d<'mmde
vousrcm~rcict'. C'est ia satan'c (jt)ivo'<sptait.
C'esLdonc hi';a vainement 'pm l'Ktat revendiqua une
cutture fp.t'itne m'a f~asdonnée, <'tqu'it ne pouvait pas
me donner; c'est vainement qu'il m'accuse de tourner
contre hu un don oui ne vient pas de lui. ~ttacun
a parfaitement le droit de sortir de t'~tat, des qu'it ie
vent; il n'est retenu ni par le contrat civit, qui n'a de
valeur qu'autant qu'il le veut, et dont les comptes peu-
vent se rester a chaque moment ni par des cmut'ats par-
ticuUers sur sa propriété ou sur sa cuMure acquise sa
propriété reste sienne sa culture (pu ne se hisse pas
d'aincurs détacher de lui, ne donne pas a H~tat ie droit
de se plaindre de ia violation d'un contrat ou de crier ù
l'ingratitude.Siun individu peut sortir de l'État, plusieurs le peuvent.
):u~n~nATtt)!\s1~
.Ur ceux-ci rentrent, F~ard I<'suns dt's autres ou &
i')~ard deFKtat qu'ils ahaudonnent, da!)s te simple droit
de nature. Sice)t\ qui se sonts<par<sveuten) s<-réunirpius~troitemput et courhreuu nouveau centra! civit nn\r"n-
(!it!onsqm Ir'm' ron\nn<'nL its f'n ont p!tWatt<'n~!t)h
(trf)t),pnv'~u du dro~ natur< (hns !n (!<un:m~fhu}ndils ~on! i~ntr' Un nnnvf'l K~tt.s'csL t'm'm' La r<vo-
tu<L q'n pour m<))ncntn't'mbras~ pncorp qu'une
pnrtic, ps! ac<~mp1t'?.–H est dp !a natur~dc chaquer<vchuion de fau'cqup l'on s'a<rranchissode l'ancien couh'a<,et qup l'on s'unir au moy~n d'un nouveau. Ces doux
chosessont !~it!mc~, et par conséquent aus~i toute )'evo-
tution oit oncs arrivent r'u!i~mcn~ c'cs~-a-dirc eu
vertu de !a !ihrp.votont~.
Jusqu'à pissent il y a encore douxÉtats run a côto de
l'autre rt Fun dans l'autre, qui sont entre eux comme
tou~Ifs hitats, <pst-a-dirc cnmmc des individus vivant
sous !a simple loi du droit naturel indépendamment de
tout C(~ntratpartiodipr. Mais ici je rencontre une ob-
jection puissante, ecue des dangers d'un Ëtat dans rËtat.
ce qui serait icievidemmeut te cas.–Je me suis impart'Pt je suis entr~ dans une nouvenc union. Mes deux voi-
sins fie droite et de ~'auehesont encore dans l'ancienne:
et tout est metc ainsi sur toute une immense (''tendue.
Queues contusions et quels désordres nf vontt pas en
résulter
ISeeommence/ donc pas toujours par demander ce qui~<i! d'une chose, mais cherchez avant tout ce quevousavczou non le r/ de faire, pourle dutourner. Vou?i
ne pouvez pas tn'empecher de sortir de votre union et
d'entrer dans une nouveitc; vous vioteriex en moi uu
droitderhommc. Jene puispas davantage vouscontraindra
SL'n ftÉVOLUTTONFRA~C.\)SK 18S
:') quitter l'ancienne et a entrer avoc moi dans la nou-
velle je vicierais en vous le môme droit. Nous devons
donc nous arranger tous deux du mieux que nous pou-
vons et supporter ce que nous n'avons pas le droit d'cm<
rn~chcr'.11sa l~eut~)iE~ncln'il nr1srlit lms ;iârusll)lod lln 1·~tatpocher. ii se peut.bien qu'il ne soit pas agréable &un Etat
de voir un autre l!tat s'élever dans son sein mais la n'est
point la question. KM<*est de savoir s'il a te droit de. l'em-
pêcher; et a cette question je reponds: non.
Mais,je vous prie, est-il donc nécessaire, est-il m~mc
vraisemblable qu'il en rcsutterait beaucoup de mal? Vous,
qui craignez tant le danger d'un parcit état de choses,
n'avez-vous donc jamais songe a votre propre situation,
et n'avcz-vous jamais découvert que ces dangers vousme-
nacent cent t'oisdavantage?
Au sein de presque tous les pays de l'Europe s'étend
un ï!tat puissante anime de sentiments hostiles, qui est
continuellement en guerre avec tou~ les autres:, et qui,
dans certains, opprime terriblement !cs citoyens: je veux
parler des Juifs. Je ne crois pas et j'espère démontrer
dans la suite que si cet Ëtat est a ce point redoutable, <;e
n'est pas parce qu'il forme un État sépare et fortement
uni, mais parce qu'il est fonde sur h haine de tout le
genre humain. Quepouvait-on attendre d'un peuple dont
le moindre sujet fait remonter ses aïeux beaucoup plus
haut que nous ne faisons remonter, nous autres, toute la
chaîne de notre histoire, et cite comme sa souche un (''mir
beaucoup plusancien qu'etle,–chose que nous avonsad-
mise nous-mêmes parmi nos articles df~toi; qui voit
dans tous les peuples les descendants de ceux qui les ont
chasses d'une patrie qu'ils aimaient jusqu'au fanatisme;
qui s'est condannK''a un t))is'rab!e cnmtnt'rce ou le corps
s'anais~' et eu l't'sprit s<'t''rmr' tout uoh~ sputimr'n),
CONSIDÉRATIONS184
et qui y est condamne; qui est exclu par je lien le plusfort qu'il y ait dans l'humanité par sa région, de nosbanquets, de nos plaisirs, de ce doux échange de ~aitedes cœurs entre eux; qui nous tient tuus loin de luiijusque dans ses devoirs et ses droits, et jusque danslame du père commun; que pouvait-on attendre d'untel peuple que ce que nous voyons? Dans un Ëtat ou leroi, tout absolu qu'il est, ne saurait m'entevcr la cabanede mon père et ou je maintiens mon droit contre un mi-nistre tout-puissant, le premier juif a qui cela plaM medépouille impunément. Vousvoyez tout cela comme moiet vous ne pouvez le nier, et vous prononcez !es mots sidoux de tolérance, de droits de l'homme et du cituyeu,tandis que vous violez en nous les premiers droits del'homme. Vous avez tant d'indulgence et de honte pourceux qui ne croient pas enJc.sus-Christ.que vous n.' pou-vcx leur donner assez de titres, de dignités, de placesd'Iionneur, tandis quevous insultez publiquementceuxquicroient en lui, mais non pas exactement comme vou~, etque vous leur enlevez leur honneur civil et le pain qu'ilsontdtgnemcnt gagne! Ne vous souvient-il donc plus icide l'État dans l'Etat? Ne vous vient-il pas a l'esprit <me,si les Juifs, qui, sans vous, sont citoyens d'un Etat plusfort et plus puissant que tous les vôtres, reçoivent encorede vous le droit de cito dansvos États,ils fouleront a leurs
pieds tous vos autres citoyens (1).
(1)LoindecesQuittes,commeil est loinde tnonc~ur. lesoufncempoisonnéde Mntot<h-:<ncc!LeJuifqui, ,)g,c lest-cu-nnchcmcntssolides,on pourr:)itmêmediremft'.tnchisMNcs,qo'il trouvedcv.)nth)i,arrivejusque r<0«r~r~ ~~<c~ ~~n)M </<'la u~ estun héroset un saint.Je ne saispass'it yena eu otts'i)yen a. Je lecroirai,desq)tcje ie verrai.Sculementqne t'en neme
SUR LA REVOLUTION FRANÇAISE. 185
A côte de ceux-ci s'est forme au milieu des monarchies
mihtait'cn un Ktat. presque aus~i tci't'i!)!e:!c mintuitc.
Fat't'L'nctin~mc de fp(ptt!nd~;a condition si ftm'p, je
(tonne pas un~ belle apparence pour ta rcatitc. Que les Juifs ne
croient pas Jésus Christ, qu'iis ne croient pas mOnc u hicu, s'ils te
veulent, pourvu qu'iis ne croitut pus a deux lois moratcs distinctes et
u un t!ieu ennemi des hommes. tts doivent avoir tes droit'; dos
hommes, bien qu'Us ne nous tes accontent pas; car ils de;!
hommes, et teur injustke ne nous autorise pas kur t'essenthh.'i. ~c
contn'ins aucun Juif con'.rc si) votont~. e! ne soutTre pas que cc!a
arrive, (juand tu es le mieux })iuc~ pou) t'cmpcchpr tu lui (tois ccta
absohttnent. S! tu as man~ hier et qu'ayant faim aujourd'hui lu h'idcs
de pain que pour aujourd'hu!, douncs'en au Juif qui a faim MC«t<!de
toi, s'ii n'a pasmangOnet'; pncch, tu agiras très bien. M.)is quant
&leur donner dcsjdroits civits, je n'en vois pour t~a part aucun autre
tnoycnquc de !cur couper ta tête tons une heuc nuit et d'en mettre
&la p)acc une autre ou il n'y ait ptus aucune idée juive. Autrement je
ne sache pas de moyen de nous défendre contre eux, sinon de conquérir
pour eux h'ur tctt'c promise et de tes y envoyer tous.
La toierancc qui rc~nc en juvcur des Juifs d:)ns les Ï~tats ou il n'y
en a aucune pour !cs tibrcs penseurs, montre ctaircment le but que
l'on se propose.–Le maintien de ta croyance intéresse si fort ton cœur
puterne!. vois ces Juifs ils ne croient pas en générât a Jésus Christ;
tu ne dois pas !e sounrh', et j~ vois que tu les accabks de bienfaits,
« Oh iis ont de !a superstitiu)), et cela me suQlt. Crois a Xoroastrc ou
&Confucius, a Moïse ou .ahu)n( t, au pape, a Luther ou &Catvin, cda
m'est '~a!, pourvu que tu croies a une raison étrangère. Mais tu veux
avoir /o<tnede ta raison, et c'est ce que je ne soun'tirai jamais.
Hcstc enfant, autremcxt tu arriverais au niveau de um tête. » Je ne
veux pasdirc que ~on doive poursuivre tcaJuifs po'u' )enr croyance, mais
je dis qu'on ne doit en gênera! poursuivre personne pour cette raison.
Je sais que, devant phts!eurs tribunaux savants, ii vaudrait mifnx
attaquer la morale tout entière et son tmit te plus saint, ia religion,
que ta nation juive. Je teur dirai que jamais un Juif ne m'a trompe.
parce que je ne me suis jamais th! avec aucun, que plus d'une fois j'ai
pris som ma protection, &mes risques et pcrits, dt's Juift que t'ou tra-
coNStoAnA'noKsi8C
veux dire une discipline rigoureuse et tes fois draec-
niennes qui posent sur hu, te soldat ptaf~ sa ptoire dans
sa dégradation, et it trouve <t'aith!urs un dL'donuna~men).a tous tes ennuis d<~s«u (''tat (tans i'itHpttnih'' assurée :t ses
attentats contre I<'s bourgeois et ies paysans. Ce grossier
personnage, ce d<'un-harhare (-mit (p)c son uniforme lui
(tonne une ~pt'rior!~ incontestabtp ~ur ic paysan crain-
th'ct toujours c~'ayc, ctcchu-cts'cstunc trop heureux s'il
peut supporter ses !a<jnmenes, ses insuhcs ~t ses ou.
trag'es, 8a!!s utre en nutrc traîm'' par hu et rou< (!e coupsdevant son di~no commandant. Le jcnn~ ofucier (pu a
plus d'ancctrcs, mais pas plus de cu!tut'o, s'imagine fptc'son nmud d't';puc l'autorise a regarder d'un air rameur,u insulter et a repousser !e tnarchand, ie di~nc savant,l'homme d'Etat qui a ren<!u de grands services, c) quimême l'emporterait peut-être sur lui en fait. de ~'nea-
!ogic n~ se permet-il pas aussî de corriger il coups de piednos jeunes étudiants pour leurs 'tourdcrics~)!
cassoit, et qu'ainsi ce n'est nucnnc animotin! parHcnH<!rcqui me fait
par!o'. Ce qocj'a! dit, je !c tiens pour vrai; je t'ai dit, parce que j'aicru nectaire de ie dire j'ajoute que h conduitede beattcoop d'ëcri.vainsmodernesà regard des Juifs me p:)ra!ttr~s Inconséquente, et queje crois avoir le droit de dire c<;</«<}je penseet comme je le pens(\Que celui a qui cela ne convient pas n'injurie pas, ne calomniepas, ne fasse pas de sentiment, n~is qu'<7 ~/<~ les faits ~)r(ic<~Ctt~.
(t) Quiconquea vu certaines garnisons, sait qn'ii n'y n pas !d unseul trait qui ne puisse ôtre appuyé par de nombreux exemples. Jereconnais d'ailleurs que cet état entretient et nourtit plus d'une noblevertu; j'avoue même qu'une resoiution prompte et h:trdfn, qu'unemate franchise, que les agréments (ie la vie de sodete ne se rencon-trent plus gucre, de notre temps, qoc chez certains omciers cuit)~.et j'rn témoigne nn respect plus profond .')tous les dignes hommes df
SUR LA RKVOt.T!0~ FK~Nr.\tSt: 487
La noblesse est hcancoup moins dangereuse, depuis
qu'elle n'est plus exclusivementen possessiondes ridtcss'~
ctqu'eltone tient plus dans ses maius avares la cutture
des potpl'~s mineurs, mais f'Hcest toujours uu t~tat dans
l'état, separ<c qu'eHe e~tpar son esprit de caste, par ses
marm~s c'ntœ sut (~ par te pri\H~c qn' a <nc<n'c
d'cccupor ~ul'~ certaine fonctions; en irmscas <u'
bonne qnc 1~o't le peuple a bosom d'un rempart do ce
genre contre le despotisme-.–c ne rapppUc pas !a pu~.
sancc tcrrihtc et permanente de la hi~'arcinr', parcf' que
j'6cr!s itnm~Hatcmont pour des pa\s protestants; maiss!
notre der~ par cette snhnrdmation qu! le soumet a la
senleant"rit< des consistotres supérieurs, des consistotres
et dessuperintendants, par son tribunal sépare et par ceth-
maximeqni re~ne encore p~et lu, de n~ pas annoncer cer-
taineschoses (~adet Ascalon,fiepenrde prêter a rire aux
Philistins, en un mot pnr son Ktat a part, si, dis-p\ ttn'op-
prime pas plus ouvertement et plus durement les citoyens
qui en sont exclus, cda ne pronvo rien de plus, sinon quu
!a Ht~ormatton a rccticmcnt introduit un mcincur esprit
dans le Christianisme. Et n'est-il donc pas arrivu il notru
cet~at (jucje conna~ouqm;Jene connuispHs. Atatsle ju~cn~tH
6<!nérMtnedépendpasici<tnplusonmoins~randnombt'f:d'exemptes;
n reposesurdesprincipes.Quanduneprofession<kh:)ppcau uibun:d
comnmnet rc!cvcd'mt tribunatpatticuticrquandk'shosde<:t;hi
bunatsont très diil'erentesdes loisunivctsciicsde tout'' tucruhh'
qu'cncspunissentavecuneextrêmedurct' cequi scraH peineune
fauteauxycu\desderniOes,tandisqu'cHc.sferment.lesyeuxsurdes
attentatsque ics autrespuniraientsévèrement,cetteprofessinnentre-
tientun !uter6tparticulieret unetuoruieparticuiit're,c) cite est un
dangereuxEtatdansl'i~Mt.J/itonuucquisuit~csoustraiteauxentra!-
nouentsd'unepareiiicconstitutionn'enest(jnepiu~ooith' maisil ne
détruitpasla re~e il n'estqu'uneexceptiot).
CO~StDKtUTtf~Si8S
clergé lui-même d'entraver le pro~t'~s de t'esprit Immain.
et de s'opposer avec sueccs a d'importantes am<liora-
tions?–' Les traeasscrit's m't'dui!~ par l~s corporation:!
(tes artistes et (tes artisans s<mt moindres; mais un jps
sentirait hi~n <tavan).~e si t\'u n'uvai! a tuth'r f'mtrc t!~
phts ~Tnmis iL'~mx. 0
Voih't autn!it't'~ta)sd:utsi'~)a), <;nitt'utW pns s<')~ctncn<
un inh' ~p;tr< m:tis un int<n't t'ontrairc a ('chti 'le
tuns Ips nnh'ps citnYt'ns; jp n~ ):n~ ici ({n'indiquer ces
\)'ih''sf;n pn~nn!, !n:tisj<" les ranh'n<'rai :'t!cnrs pt'inripcs
dans ïe chapih'û sniva! si j<j revois m'-s !')cicms. Ce sont
des États t'('tcmcnt hostih's. Puur~noi d~nc n'est-ce
qu'ici qu'on oubtic son principe?
L'n Ktnt n'r'~t p~int dnngcrcnx p.'H'ccta scu! qu'it est,
sous !erapport de 1'~pfK~ dans un autre ~taL; mais parce
qu'il a un inturut oppose a l'autre. Ur, si tous les États,comme des hommes isotes, sont soumis a !a loi du droit
nature!, et si cette loi détend absolumenta. chacun d'on~
traver la hhertu le~iume d'autrui~ en tan~ qu'eUe n'en-
trave pas la sienne, une opposition de ce ~<'ru'ene peut
s'etevcr, a moins que les membres de l'un des deux !~a!s
ou de tous les deux ne se soient cn~a~es a être injustes.Ils ne devraient pas ruh'c ce n'est donc pas a la tyranniedes circonstances, mais A leur mauvaise votonte qu'ilsdoivent s'en prendre. Si tous riaient justes, ils pourraient
poursuivre les oeuvresles plus diverses, en se mêlant tes
uns aux autres et en restant toutefois sépares les uns des
autres.
~'avez-vous jamais vu dans diverses contrées de l'Anc-
ma~nc, les terres qui ~nnssent sous !cjou~ d'un despote,
petitou grand, traversées par icschamps hunis d'un princedouxet humain, et l'esclavenctri labourer tranquillement
sun LAiŒOi~TU)NmAN<ISt: 189
il cote du paysan robuste'? En sortant du territoire d'une
ville iutperiale, uu le paysan bien m'uni, cultive et ho-
nora ne truuve pas nouveau d'être votre e~al, puisqu'il
cstitomme, n'ctes-vuus jamais entres sur un autre dont
it's limites St'ut marquées partout non plus parles armes
(te l'~mpir' tuais par l'image de ht main suus ta hache
et de !'esda\'e cnchauie a iahruueUe~ ut eu yuus rencon-
tn;x dt's nuuuicsdcss~chccsct ccuvci'tes de hainons~ uui,a iavue dcY~tt'c ttabi~ tirent leur miscrahtc J~nnctavant
metnu que vous ne h?sayux aperçus? Les derniers \i\eut
paisiblement a cote des prenhcrs et panui eux, et ils ver-
sent maintenant leur dernière goutte de san~ pour celui
qui a vendu leurs pt'L'dcccsseurs.il y a Lien ici divers Etats
dans le même espace, et il n'en résulte aucun conflit entre
cu~.
Ceux qui sont sortis de l'ancienne uniun peuvent dune
en former une nouvelle et fortiner leur lien par l'adjonc-
tion volontaire d'un plus grand nombre ils en uni par-
faitement le droit. Si cniin l'ancienne union n'a plus d'ad-
hérents~cl si tous se sont volontairement tournes vers une
nouvelle, la révolution c~~c est h~itimcment ac-
complie.Ici je dépose la plume, pour la reprendre, si je trouve
que montravail n'a pas ctu inutile, et si le public repond
un foispar le fait au reproche qu'on lui adresse si souvent,
de n'être pas encoremur pour des recherches de ce ~cnre;
sinon, je dirigerai ma course vers d'autres sphères.
CO~tDKRATiO~i90
CHAPmtK i\.
UK'3CLASSASt'RtVtHt(.U~S', f.:N<j~Ni~R.\L,FAKRAPPORT
AU Dm)! DUm~OLUitON.
Jus(pt'a prient nous n'avons ou qu'a suivre ta granderoute, la route unie du droit naturel; mais a partir de ce
moment, it faut que nous nous en~a~ions au tnitien dus
sombres dptitusdes opinions ~cthx~tcs, a U'avurs~sbt'ons-
saiHcs <'t h's (''pin<'sd'une pontique a demi barbare. Je
dois prier !c icctcur, qui m'a suivi jusqu'ici, dcrc<h~nh!crde patience <'t<!pctmra~ n n'est pas facitc de t'air~pa-raHre <'n toute nbcrte de\ant !c tribunal (h' ta raison
rf'rtaines opinions si peu accoutumées a en partcr h tan-
~a~e, de venir encore ''n aide il leur incapacité, J'etrc a
ta fois d/'t'en<uui'de l'accuse e! ju~e impartial. Du tnoins
n'ai-je pas l'intention de jtroc~der inequitahicmcnt sui-
vant ta maxime qui veu~que le ju~e tienne chacun pouraussi honnête que possihtc, je prêterai partout auxaccusestes meiHem'esraisons que je pourrai trouver; et si leur
cause n'est pas alors soutenahie, a plus forte raison ne
j'est-eit'' pas lorsqu'elle a recours des arguments plusmauvais eno're.
Les citoyens des c/c.s ~c<?A'~ sont ceux envers
qui les autres sont tenus a certains onices particuliers,
que tes premier?)ne tcur rendent pas, mais en échange
desquels its sont peut-être tenus eux-mêmes a certains
omcps, qu'itsne reçoivent pas non plus desautres citoyens.
h~ ~CM ~t~'M(~<.
/<«.~c?e'c/tnc~.(~«rf/cr.
sm LARÉVULUWMt'hA~~AbK 1~1
–Ke nous montrons pas ici tropsévères à l'endroit do ces
offices auxquels les citoyens des classes supérieures sont
obligés de leur côté Comptons-leur même, s'ils le veu-
lent, pour des ulMcesde ce genre leur condescendance a
recevoir des moindres citoyens certains témoignages
d'honneur et à y attacher du prix, on la peine qu'ils se
donnent puur user des prérogatives que nous leur avons
accordées, pour utiliser nos services et pour dépenser les
revenus qui leur sont ah.mdonm's. Que ces droits et
ces obligations réciproques ne puissent se fonder que sur
un contrat, et que la valeur uu la nullité de ce contrat
particulier dépende de ces principes des contrats en
général que nous avuns développés plus haut, c'est ce qui
saute immédiatement aux yeux de chacun, ~ans autre
explication.La plupart des attaques que l'on a diri~éc~ cuutrf; la
valeur de cette espèce de contrats semblaient venir de ce
que l'on doutait si les services échangés entre tes citoyens
des hautes classes et les autres pouvaient être rcpardcs
comme équivalents, ou si les uns n'avaient pas une va-
leur intrinsèque incomparablement plus uievéc que les
autres; si les citoyens des classes supérieures payaient
réellement par leurs onk'es ceux qu'ils avaient re~us
des derniers, ou s'ils n'étaient pas encore beaucoup en
reste avec eux s'il v avait réellement échange d'avan-
tages, ou si l'une des deux parties n'était pas avantagée
au delà de toute mesure. Ou n même soupçonné que, la
plupart du temps, c'est réellement le dernier c~s qui a
lieu, et c'est pourquoi l'on a désigné Ie~ citoyens des
classesdistinguéeg sous Icnomde~ Je ne nicrui
point, pour ma part~ que je n'aie le même soupçon; qu'il
me soit donc permis d'employer des présent rette dc~
CONSIDÉRATIONS192
nomination, sauf a la justiiier plus tard. D'après les prin-cipes que nous avons établis et développes plus haut,celui-là est avantage an de!a de tuutc tncsure, f'n laveurde qui nn droit inaliénable a été aliène. Il n'y a pas de
compensationéquivalente possil~lcpour nn tel droit; il nenous est pas permis de l'abdiquer, si nous ne voulonscesser d'être hommes; un contrat ou il est abandonm'est
par cela sent nul et non avenu. Nous pouvons donc,d'après nos précédentes considérations, poser cette con-dition essentielle de la valeur de tout contrat-de-privi-leg-c
(.<«~o~7~<c de /7~~c~'y soit aliéné.Cette condition est d'une grande portée; mais elle est lasetile. Nous pouvons abandonner nos droits aliénables dela manière et.auxconditions que nous voûtons; nouspuu-vons les donner gratuitement: celui auquel nous lesdon-nuns n'a qu'à les prendre pour lui, cUc contrat est exé-cute et passedans le tnondc des phénomènes.
C'est un droit inaliénable de l'homme de résilier cha-cun de ses contrats, des qu'il le veut, iut-H seul a levouloir; l'indissolubilité .~t l'cternited'un contrat cho-quent ouvertement le droit de l'humanité en soi. C'est ceque nous avons déjà montre plus liant pour le contratcivil eu particulier, en considérant sa matière, son butnnal; il est facile de le tn~ntrer pour tous les contrats engénéral, a l'aide des principes prec/'dcounent <tablis, enconsidérant la l'orme du contrat en soi.
r;n cllet, dans le contrat le libre arbitre des deuxparties est le fondement des droits et de l'obi~ation. Jl aété démontre plus haut qu'un contrat ne peut porter que
D~n~<t~Mn~Wr<
SUnLÀKÉVOLUTiONFHÀN~AtSE. 193
sur des choses qui dépendent de notre volonté, laquelle
est changeante, et non sur celles on notre volonté doit
être irrévocablement déterminée par !a loi morale. Il a
été prouve au même endroit que~des que ia volonté d'une
des deux parties change sur l'objet du contrat les droits
et les obligations réciproques sont supprimes, et pat
conséquent le contrat lui-même. Il ne reste donc plus ici
qu'une seule question a résoudre, celle de savoir si par
hasard un homme n'aurait pas le droit de s'obliger
d'avance a /«*~ï~~ c/< M ï~/o~~ sur un certain
objet, comme il est oblige, par exemple, de ne jamais
changer sa volonté de faire son devoir. De la solution de
cette question dépend celle de la question proposée, a
savoir si l'immutabilité d'un contrat est ou non conci-
liable avec le droit inaliénable de l'humanité. En enet,
comme la persistance du droit et de l'obligation dans le
contrat ne peuvent se l'onder que sur ta persistance delà
libre volonté, Fimmutabilité d'un contrat présuppose né-
cessairement la promesse que l'on ne changera jamais sa
volonté sur l'objet du contrat. Je conclus un contrat
immuable, cela veut dire je m'engage ne jamais chan-
ger ma volonté actuelle sur les objets compris dans le
contrat.
La ~o/o~e en soi est, en tant que telle, complètement
affanchie de la loi obligatoire de la raison, sa direction
dépend des causes physiques qui déterminent la mesure
de notre pénétration. Je prends la résolution qui me pa-
rait la plus utile et la plus avantageuse, et j'en ai parfai-
tement le droit, grâce a la permission de la loi morale.
Mavolonté change nécessairement scion que mes lumières
~<c t~t~tr.
i3
CUNStDÉHA'HOMSH)/t
croissent un décroissent.La t~romessedo ne jamais chan-ger de volonté reviendrait Acelle de ne jamais au~menterct p"rfcctionner ses lumières. Maisaucun homme n'a ledroit de faire une pareille promesse. Chacun a le ~<w,et par conséquent aussi le droit /<c, do travaillerindenniment A son perfectionnement et de suivre tou-jours ce qui lui j~u-aitle meilleur. 11a donc aussi le droitmaiicnab~ do charnel- sa volonté suivant ie de~rc de sonperiectionnement, maisii n'a nullement celui des'obh~ra no la changer jamais. Lit dause qui stipute qu'un con-trat,dc quelque nature qn'iisoit, doit être immuable,estdonc tout a lait Vaineut sans valeur, puisqu'elle porte at.teinte à un droit inaliénable de l'homme; elle est absolu-ment comme si chc n'existait pas.
Cependant une des deux parties ne peut résilier a eHe~cuie !e contrat mémo le plus nuisible, sans se soumettreaux conditions exigées pour toute résiliation de ce~cnrc.Quoique frustré que tu sois, non-seulement tu n'as pas tedroit d'exiger la restitution de ce que l'autre s'est une ibisapproprié de ton plein ~re mais tu es même tenu dereparer le dommage qu'il a évidemment reçu pour avoircompte sur la persistance de ta bonne volonté, que tu asretirée. Ce qui est fait est fait c'est Atoi de mieux prendretes mesures pour l'avenir. Tu as donné des droits dont tune pouvais rien faire; a présent tu as appris à les mieuxemployer: exige qu'on t'en rende l'exercice, mais ne teplains pas qu'on ait abusé de ta propriété, a laquelle tune songeais pas tu ne doist'en prendre qu'~ toi seul. Tu asvendu de nobles privitéges pour un plat de lentilles; tues certainement frustra si tu le reconnais, reprends cesprivi~cs, et ne touche plus aux lentilles. 11serait suu-vet-amemcnt injuste de t'obliger a rester Ibu, purée que
SUHLARÉVOLUTIONl'~A~ÇAtSE. ~)&
tu l'as été une fois; mais il ne l'est t'as du tuut de te
faire supporter les conséquences de ta folie passée.
Aussitôt dune ({ucte citoyen non-privil'~ie commence
remarquer qu'il est lèse par le contrat conclu avec le
privilégie, il a parfaitement le droit de résilier ce contrat
préjudiciable. U dégage l'autre partie de sa promesse, et
de son côté reprend lu sienne. Ou bien il renonce tout a
fait aux services auxquels l'autre s'était engagé, parce
qu'il croit pouvoir s'en passer ou bien il songe à les ob-
tenir a un prix moins élevé. Il ne trouve plus, par exem-
ple, qu'il soit si honorable pour lui qu'une poignée de
nobles ou de princes entretienne à ses frais une cour
brillante, ou qu'il soit si avantageux pour le salut de sun
âme qu'une troupe de bonzes s'engraisse de lu substance
de ses terres ou bien il cherche a obtenir le service
militaire dont il a besoin a des conditions plus suppor-
tables il en chargera celui qui lui fera les conditions les
plus douées. Qui pourrait empêcher l'État d'agir ainsi?
Je dis l'État;– tant que j'ai devant moicette puissante
objection, que le privilégié étant lui-même citoyen de
FËtat) il faut bien admettre que, sans son consentement,
on ne peut rien décider, au sujet de la suppression de ses
priviléges, qui soit universellement obligatoire. Mais
cela n'est pas vrai le privilégie, en tant qu'il est pri-
vilégié, n'est certainement pas citoyen. I! a conclu, dites-
vous, un contrat avec les autres citoyens. Mais celui-là
pouvait-il conclure un contrat comme citoyen, qui n'avaitt
pas de volonté propre, et qui ne devient une personne
morale qu'en s'unissant avec tous les autres? Il était par-
tie, lorsqu'il conclut son contrat; il l'est en tant que ce
f/yt&c~n~t~fe.
œ~si~ÉhA'noKslue
contrat doit être résilie par l'autre partie, il ne pourra
que se taire, tant ({U'ondélibérera sur la résiliation du
contrat. Quand la chose sera décidée, il reprendra son
droit de voter comme citoyen. Si l'on a~ite la questionde savoir comment et quelles conditions les fonctions
qu'il laisse vacantes devrunt être remplies, il peut alurs
dire son opinion. Si, par exemple, la question s'élève
sur la noblesse, il a bien le droit de dire il faut qu'il yait des nublesdans notre Htat, mais il ne peut pas dire
.je veux être un des nobles de l'Htat.
Mais nos privil~ies s'y prennent autrement. Lorsquenous résilions notre contrat avec eux, et que nous vouions
remettre à d'autres leurs unices moyennant des condi-
tions plus douées, ils nous objectent leur droit personnelde remplir ces onicesa l'exclusionde tous les autres, d'où
il suivrait qu'il serait interdit a tous les autres de s'en
mêler. Si on leur accorde cela, nous voila moinsavancés
qu'auparavant nousdevons continuer do recevoir d'eux
ces services. Nous n'avons pas le droit de les supprimerils sont désignes pour les remplir nous ne devons les
conner à aucun autre ils sont <~c/M~'uey/~ désignes
pour cela nous ne pouvons pas marchander avec eux
ils empêchent toute concurrence, ils nous vendent leurs
services au prix qu'ils veulent, et nous n'avons rien a
lairc qu'a les payer.–Ne voulons-nous plus, par exemple,dans notre cdince politique, de ces ornements qui ne
sont que des ornements; « non, disent-its, il laut qu'il
y ait des ornements de ce genre, car ?ïo~ sommes là
pour les former ;s'~ disparaissaient, ~M6 disparaîtrionsaussi. ))–-i{ien, répondons-nous, mais pourquoi laut-il
donc que vous soyez? « Parce qu'il taut qu'il yait des or-
nements, ? répliquent-ils?–Nous voulons supprimer les
SUH L.\ HÉVOLUTïON FHANÇAISK 197
choses inutiles. «Non, disent-ils, ces chosesne sont pas du
tout inutiles; elles ~0~.9sont utiles. ? Oui, mais ro~\
a quoi servez-vous donc?– Nous servons a les utiliser.
Et de cette ~acon nous n'avons pas avance d'un seul pas.
!1 nous faut donc chercher, sans les écouter davantage,
quel est proprement ce droit qu'ils mettent en avant?
Us l'ont exclusivement eux seuls le possèdent. Qm
sont-ils donc, eux? Qu'est-ce donc qui les distingue de
tous les autres, qui ne sont pas eux? Quel est leur signe
caractéristique? 11ne faut pas le chercher dans ce con-
trat préalable que nous voudrions résilier; leur droit doit
être antérieur a tout contrat conclu avec eux. Ce doit
donc être un droit inné, un droit qui leur ait été trans-
mis héréditairement. Or nous ne connaissons de droits
innés que les droits universcisdc l'homme, etde ces droits
aucun n'est exclusif. Il faudrait donc, en dénnitivc, que
leur droit eut été acquis, sinon par eux, du moins par un
autre, qui le leur aurait transmis, et encore faudrait-il qu'il
eût été acquis par voie de coy~ puisque nul droit sur
des personnes ne peut être acquis autrement.–Nous ne
chercherons pas maintenant quel peut être ce contrat il
résulte clairement de ce qui précède que nousaurions par-
faitement le droit de supprimer et d'anéantir l'obligation
qu'il nous impose nous ne voulons parler à présent que
de cette singulière transmission du droit, dont on présup-
pose ici la légitimité.
Tout droit sur des personnes repose sur une obligation
dé l'autre partie, et ici, comme il ne s'agit nullement
d'un droit naturel de l'homme, mais d'un droit acquis du
citoyen,suruncobligation imposée, non parla loi morale,
mais par la libre volonté il suppose par conséquent un
contrat. Dire que le droit est /s', c'est dire qu'~
CONSIDÉRATIONS198
/MW/emet M7~aM~'C/)~C, M~CC, </<7/?~le 6'0/
Il est évident que cela no peut se faire sans que ta
partie obligée en ait co~a~~cc; autrement comment
saurait-elle envers qui elle doit remplir son obligation?
Cela ne. peut se faire non plus sans son co~e/ï/~c~
ce qui résulte immédiatement de notre système, puis-
que ce' n'est que par sa volonté persévérante que le con-
trat aurait persiste même avec le premier contractant
mais nous pouvons iciabandonner ce point a notre adver-
saire. Si, peut-il dire, la partie subrogée dans le contrat
Fa été aux y~~M conditions, cela doit être parfaitement
indilTércnt a l'autre partie, tant que celle-ci reste ~!<?
~CM/<*et ~~e personne.Mais dans la transmission du droit dont il s'agit ici,
clans 1' du f~'oï/ pratiquée par nos États, elle
ne reste pas une seuic et même personne; il faut aussi
que celui qui s'est charge de l'obligation ait mis une
autre personne Asa place dans le contrat. S'il y a réel-
lement un contrat entre une partie privilégiée et une
partie frustrée, il est a présumer que le représentant du
privilégie est entre librement et volontiers dans le con-
trat mais le représentant du frustre y est-il entre aussi
volontiers ? Le frustre pouvait-il transmettre tout à lai!
arbitrairement son obligation a un autre, sans lui de-
mander s'il voulait l'accepter? Qu'est-ce qu'être obligr
par une volonté étrangère ? ~c ~/o/~ ~cy'c ~<
~w~.< c'est le premier principe de tout droit de contrat.
Le privilégie peut bien nier que le frustré pendant sa
vie ait le droit de résilier son contrat, quand bon lui
semble; mais dés que ce dernier vient à mourir, son obli-
gation cesse alors à coup sûr, puisqu'il ne peut plus in
remplir. Celui qui est sorti du monde des phénomènes
SUH LA n~VOH!T!ON FnANCAtSK h)~
a perdu ses droits et se trouve affranchi (te ses ohu~a-
tions. Que le privite~i~ !e poursuive (!ans t'autre moud'\
et qu'it y tasse valoir ses prétentions sur lui, s'il le peut
il ne saurait plus t'atteindre <!anscelui-ci. Maiscom-
ment admettre qu'on puisse prendre !e premier venu et
lui dire Savais des droits sur quelqu'un; il s'y est sous-
trait par sa mort il faut quesatisfaction me ~oit donnée.
Viens, tu mo tiendras lieu de lui, toi --Mais, me dis-tu,
H m'a rcnvoyc a toi. Je suis fâche ators que tu te sois
tnisse tromper, car il n'avait pas !e droit (!e disposer de
moi; personne n'a ce droit que moi-même.–Mais tu es
sonfils; –oui, mais non passa propriété.–En §aqu:dïted'administrateur de tes droits, il t'a compris avec lui dans
le contrat, pendant ta minorité. Ha bien pu !e faire
;)our tout le temps que je resterais mineur, mais non pasau de!a. Aprésent, me voilà majeur et administrateur (te
mes droits, et je ne t'en donne aucun sur moi.
Est.-ce par renet d'une absurdité a peine concevable,ou bien est-ce dans l'intention bien arrêtée, mais peu
honnête, d'embroui!!er la recherche et d'y lisser la défi-
nition qu'il n'espérait pas obtenir par des principes, qu'iiest arrive a M. Bcbber~ ("!)de comprendre, sans autre
distinction, sous l'expression de ~'o~ //<~7/c, !e droit
d'hériter (les ~'w, qui ne s'appartiennent pas propre-ment a eUcs-memcs, et échu d'hériter des ohH~anons de
~?'M~<~ qui pourtant s'appartiennent? .t'aurais f't'uqu'i!
y avait une distinction assez manifeste entre ces deux
droits, le premier qui est bien fonde, et le sceoud qui r's!
imaginaire et contraire a la raisou. La !<g'itiutit~du droit.
civild'hériter cxclusivemcntdes chosesae tedevetopp~epius
(1) PuRC37 df son ëcrtt (t~j~ f-tt~.
CO~S!nRnAT!ONS200
haut (p. i!)C~58). Elle se fondait sur un contrat du tonsles citoyens entre eux, par loquet ils s'engag<'aientaced<'rieurdroit c~/wï~ (t'iteredite sur tes bi~nsde morten ecltange du droit e~d'Iteredit~ sur tes biens decp~z'~ morts. !Is n'avaient point a s'inquiéter (te l'objetdu contrat, oudes biens; Usétaient très certains que ceux-ci ne réclameraient point contre leurs disposition?. La
légitimité d'un droit héréditaire sur des obligations im-
posées a des personnes ne pourrait se fonder que sur uncontrat des citoyens prrvitegies s'engageant À céder leurdroit c<ww~ d'hérédité sur les obligations de les
citoyens frustres et opprimes, en echangedu droit <d'hérédité sur les obu~ations dec~6 citoyensfrustreset opprimes. Oi\ si ce droit connnun d'iteredite que t'on
présuppose, et qui aurait et6 échange contre un droit ex-
clusif, ne se fonde pas lui-même sur le droit du plus furt,sur la loi de la guerre de tous contre tous; si, connueil le faut bien croire, il ne s'agit pas ici d'un contrat de
brigands qui separtagent paisiblement leur butin dans une
caverne, afin de ne pas se jeter les uns sur les autres le
poignard a la main et de ne pas se tuer entre eux –sur
quoi, je lé demande, pourrait-il se fonder, sinon sur uncontrat préalable avec les citoyens frustres, s'engageant ane jamais réclamer lesdroits qu'iisauraicnt cèdes?–Mais,–outre que, d'après ce qui a été dit plus haut, un con-trat de ce genre est en soi de nultc valeur, puisqu'un droitinaliénable de l'homme, celui de changer de volonté, y estaliène,–d'où viennent donc après la mort des premierscitoyens privilégies, les autres citoyens? d'ou naissent les
obligationsdont ils doivent hériter. S'inquietera-t-on toutlaussi peu des personnes sur lesquelles cites doivent peserqu'on ne s'inquiète des choses dans le contrat d'hereditr
SURLAnÉVOt<FT!Or<FHA~CAtSE. 201
sur les choses? Sans doute on n'hésitera pas a n-pondre
oui n cette question, dans un systetueoul'on n'admet
,t'auH~e~alit' entre tes Itonunes quel'~alit< devant Dieu,
parrapp.n-t a l'élise; ct, d'après ce système, on devrait
ausst répondre oui a ta question ne savoir si tes hommes
mêmespeuvent, comme nne propriété, se transmettre par
voie d'héritage, s'échanger, se vendre, se donner.
«Quand ils'a~t, ditMontesquicu.de prouver des choses
si claires, on est sûr ile ne pas convaincre. Ponr moi, je
ne me disshmde en ancunc iaron que je mets ici en avant
deschosesqui choquent violemmentles opinionsgénérâtes
des penptcs, once que t'on décore même du beau nom
de sens commun. Maisque m'importe? Prenez ta peine de
t-emonter aux principes et renver.sex-ks; ou si vous les
taisscx debout,tenez pour certain que tout ce (pu en dérive
au moyende déductions exactes, est nécessairement exact,
et que votre opinion, qui y est contraire, est nécessaire-
ment fausse, et cota quand même, depuis te commence-
mentde l'espèce humaine jusqu'à ce jour, tous tes hommes
auraient été de votre opinion. Dans tous les Htats qui 'mt
existé depuis le premier peuple législateur que nous con-
naissions, depuis les t~yptiens, il a été admis que le lils
est tenu de subir a son tour les obligationsde son père, et
c'est pourquoi ceux qui ne pensent pas par eux-mêmes,mats
sedéterminent d'après des autorites, croient que cela doit
être vrai. Maisdanslaplupartdes t;tats qui nous ont trans-
mis leurs opinions avec leurs lois, ne r~ardait-on pas
aussi connue légitime que te père repoussât son cnl'ant
nouveau.ne, ou qu'il le punit de mort quand il était de-
venu ~t'and, sans que personne eut le droit de lui en de-
mander la raison ? Comment se lait-il que cette dernière
opinion ne se soit pas maintenue a co)o de ta première?
CONSIDÉRATIONS202
t~st-ceque par hasard toutes deux ne reposent pas surle même principe a savoir que l'enfant est une propriétédu père, qui en peut disposer a son ~rc ? Ou bien est-ce qu'it est plus dur d'abandonner et de laisser périr un
jeune enfant, qui n'est pas encore parvenu a ta ptcmoconscience de hu-mome, et qui pcut-ctrc souffre moins amourir qu'un pigeon qu'on e~orj~e, ou d'arracher toutd'un coup par une prompte mort Atoutes les peines do )avie un entant déjà ~rand, que de le forcer, sous peine do
mort, quand il a pleinement le sentiment de sa force et doson droit, a rester esclave tout le tempsde sa vie?–Celavient de ce que !e Christianisme a introduit parmi vousune nouvelle opinion, ce n'est pour vous qu'une opi-nion, touchant t'immortatite de notre âme et i'in-fluonce de notre conduite ici-bas, surtout de notre der-nière heure, sur te sort de cette âme dans une autre vie,et,que cette opinion est en contradiction avec une loi aussiarbitraire sur ta ~c /~M< Maislemême Christianisme,ou plutôt ses serviteurs, vendus au despotisme, ont ou-hh~ de propager une opinion qui fut en contradictionavec une loi tout aussi arbitraire sur la /~7c /<M~~cet le philosophe ne saurait commandera l'opinion popu-laire comme !e divin Rnvoye.–Surte premier point, vousave/ laisse modiner <'pfragment de vos opinions incohé-rentes par une région ptus humaine et ptusdouée; maissur te second, vous restez toujours udete aux grossièresidées de ces demi-sauvages qui viennent de faire te pre-micr pas pour se déshabituer de la chair humaine. Quelautre système, en effet, peut vous déterminer, si ce n'estcelui qui cherche a tirer d'un opprime, qui ne promet pasun bon repas, tous les autres avantftg'cspossibles; quiexi~e de lui ta promesse d'un esclavage perp~uci, en lui
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE 203
interdisant ju&'qu'auvœu de redevenu' libre et qui, quand
l'opprime a t'ai!,cette uromess' lui tait promettre que ses
enfantsseront aussi les esclavesdesenfants de l'oppresseur,
–et, aprôs lui avoir arraclie cotte nouvelle promesse, lui
fait encore promettre lamente servitude pour ta troisième
génération, puis pourla quatrième, puis pourta cinquième,
onnn pour toutes les générations possibles l'innni ?
Et quelqu'un peut-il taire une pareille promesse autre-
ment qu'en présence du feu et de la broche ou ildoit être
yo~–Y()ii:\ vos autorites!
L'intrépide h. lui-même veut bien ne pas refuser
toutes lumières aux hommes qui, en voyant appliquer de
tels principes a l'état présent du monde, sentiraient quel~
que ebosp se soulever dans leur cceur il consent a rm pas
tcur fairp;un crime ~tcssentiments pénibles qu'its éprou-
veraient en pareille circonstance mais sabonté n'est pas
de tondue durée. « Tout ordre civil, dh-il, devien' abso-
lument impossible,si ce qu'un aïeul, fut-ce un mittion d'an-
nées auparavant, a fait peut-être par nécessite (ilveut dire:
quoi il s'est oblige) (.1),ne lie passes derniers héritiers.
Nulr~tat ne pourrait subsister, si tes enfants ou tes autres
héritiers n'étaient obliges de prcndrf la place du defunU'Il
Celaveut-il dire qu'aucun des l~tatsactuellement existants
ne peut subsister tel qu'il est, si sa constitution ne de-
meure pas ce qu'elle est actuellement; il a parfaitement
raison, mais nous n'avions pas besoin de sa pénétration
pour découvrir cette vérité. Que si cela si~mne qu'on ne
saurait concevoir en général d'union civitesanscette dis-
position, et que cene-ci est contenue dans l'idée <lccctte-
(1) Page CO. On ne p~tt gn~'c n-anscrircune )igncd'~cet
homme,qui necesse(tecriercontrete bavard.~o te vague,sansse
voirobttRéde non-iget'sesexpressions.
CONSt!)ÉnATÏONS20h
la comme sa marque distinctive, j'en conclurai que la so-ciété civile est en soi tout a fait contraire a !a raison et au
droit, et qu'on n'en doit tolérer aucune.–H lautqu'ityait une constitution civile; orcc!a n'est pas possible sans
injustice; donc il laut qu'il y ait des injustices commises.Te! serait te raisonnement (!cM. h. Je raisonnerais toutautrement il ne faut pas qu'il y ait d'injustices commises;or il n'y a pas de constitution civile possible sans ce!a;donc il ne doit. point y avoir de constitution civile. Ladé-cision de notre ()ebat dépendrait alors de la réponsecette question le dernier but nnal de l'espèce humaineest-il de vivre en société civile, ou de vivre justement?
Ce n'est pas ici le lieu (t'examiner en elle-même cetteassertion de M. R. a savoir qu'aucune constitution
politique n'est possible si l'on ne rend héréditairesles obligations civiles. Je ne parle pas encore des
dispositions possibles d'une constitution politique déter-
minée, mais des conditions qui, seules, rendent morale-ment possibles toute constitution politique en général.
Jusqu'ici nous avons recherche la valeur des contratsde privilège au point de vue de /c~b;p, et nous avonstrouve que non-seulement il n'y a point, comme on le
prétend, de transmission héréditaire des priviléges, mais
que même le premier contractant peut, dés qu'il ie veut,résilier tout contrat par lequel il se croit frustré, Nousavons faitremarquer que, dans ce cas, la partie qui résilieie contrat est obligée a restituer ce qu'elle a reçu, et a
réparer le dommage cause. Pour pouvoir estimer cette
réparation, nous avons encore a examiner les contrats de
privilège au point de vue de leur /c/'c possible, c'est-à-dire par rapporta leurs objets. Nous ne devons ad-
mettre, pour chaque contra! de ce ~-enre,qu'un seul objet
SUKLAHÉVOLUTtONI''R.\NÇ.\iSE. 205
possible, avant même de le trouver dans sa série. En
etïet, croirait-on peut-être, les membres communs de
l'État pourraient avoir, dans un contrat, ccde exclusive-
ment :*)une classede citoyens privilégies ou même a un
seul privilégie lu droit de (.'hanter quel<mccnosL'a la.con-
stitution de l'Etat. Si un pareil contrat était conclu, tous
les autres contrats de privilège seraient par la même, en
tant que taisant partie de la constitution de l'état, aner-
mis et rendus inviolables pour les citoyens exclus. S'ils
n'avaient pas le droit de rompre le premier sans un de-
domma~ctuent préalable, ils ne pourraient non plus rési-
lier aucun des autres contrats de privilège, parce que,
pour la résiliation du premier, il ne peut y avoir de dé-
dommagement équivalent possibleque le maintien desau-
tres, et par conséquent de ce contrat lui-même.–Mais un
pareil contrat est déjà par lui-même nul et non avenu,
précisément parce qu'il rend immuables pour une partie
desconcitoyens tous les autres contrats de privilège, et que
par conséquent il supprime le droit inaliénable qu'a
l'homme de changer de volonté. Dire je renonce abso-
lument au droiLde changer quelque chose a cette consti-
tution, et je le transmets a un autre, cela revient a dire
je ne modifieraijamais ma libre volonté sur les obligations
qui m'y sont imposées; ce que je tiens aujourd'hui pour
utile et nécessaire, je le tiendrai pour tel, tant qu'un cer-
tain autre le tiendra pour tel.–Or une pareille promesse
n'est-cllc pas contraire a la raison? Un contrat de ce genre
n'a pas plus de valeur que s'il n'avait pas été conclu; il
n'empêche donc aucun membre de l'Etat de résilier ses
contrats de laveur.
Il n'y a, dans cecontrat, comme dans tous les contrats
en général, que les droits aliénables qui puissent être ce-
~f)6 CONSn~HATïONS
d~s. Si t'en avait un til conducteur qui sorv!t a découvrir
tous les droits aliénables, il n'y aurait donc pas cluplus
sur moven d'épuiser tous les objets possibles des con-
trats do privil~e, comme en ancrât (te tous les contrats.
Les droits aliénables sont tous des modincations de nos
droits inali~nattles. Ceux-ci peuvent être exerces de di-
verses nmnicrcs; chaque espèce d'exercice est un droit
libre; mais pf'cisement parce qu'il y a plusieurs droits
de cette espèce, il n'y en a aucun qui soit inan6nabie en
soi. Si je ne t'exerce pas d'une manière, jo l'exerce d'une
autre je dois certainement l'exerce!'de quelque manière,
car ïe droit primitif est inaliénable.
Tous les droits primitifs de l'humanité peuvent se ra-
mener aux deuxclasses suivantes /? ~e la ~~ï~-
/</c ~<' et /o~ ~e ~< c/c~e
La forme de mon moi pur est déterminée d'une ma~
nicre immuable par la loi morale qui est en moi je dois
Gtrc un moi, un être agissant par lui-mctne, une per-
sonne, je dois toujours vouloir mon devoir; j'ai donc
le droit d'être une personne et celui de ~o~ mon de~
voir. Ces droits sont inaliénables, et il n'en résulte point
de droits aucnables, puisque mon moi n'est susceptible
sous ce rapport d'aucune modification. Tout ce qui en
moi n'est pas ce moi pur lui-même est sensibilité (d~ns le
sons le plus étendu du mot, c'est-dirc partie du monde
sensible), et par conséquent changeant. J'ai le droit de
ramener, par un travail graduel, mon moi changeant a
cette forme donnée du moi pur (ce qui est une modinca-
tion) j'ai le droit de /c mon devoir. Comme cette
tonne pure de mon moi est déterminée d'une manière
7<ecA<eder u~ue~n~e~tcAc~t~c~et<.
~pc/)~ der ~e)'«7)t~f~'e/te~~<nn~c~~Ct'<.
SU; L\ RÉVOLUTÏON FH.AtSK. 207
immuable, la forme a produire dans mon moi sensible est
aussi déterminée par ta d'une manière immuable (a savoir
dans l'klee). Le droit (te faire tnon devoir n'est pratical)te
(me d'une maniera et n'est susceptible d'aucune ntodi-
iication; par conséquent il n'en résulte point de droits
aliénables. Maisil reste encore dans ce moi sensible
une toute de modincations qu'on ne saurait rapporter A
ces formes immuables du moi pur, (te modulations sur
lesquelles l'immuable loi morale n'établit rien, et dont
ta détermination dépende par conséquent, de ma volonté,
laquelle est elle-même changeante. Kncette quaMtc,e!ie
peut déterminer ces modincations do diverses manières
chacune est un droit pour elle, mais toutes sont en sut
tuicnahtes~et c'est ici que nous entrons dans le champ
des droits :diénabies.
Cette volonté modifie soit mes facultés int('ricurc< rc
qui existe déjà dans mon esprit, soit mes facultés exté-
rieures corporelles. Je puis, par rapport aux premicres,
diriger mes considérations sur un certain point, rencchir
ot juger sur tel objet ou sur d'autres; je puis m'y porter,
parce que je désire ceci, que je repousse cela, que j'ho-
nore celui-ci, que j'estime moins celui-là, que j'ahnc
i'un, que je hais l'autre. Comme ce sont la des modifica-
tions changeantes de mon âme, mes droits sur ces modi-
fications ne sont pas inaliénables au point de vue moral,
mais ils le sont au peint de vue physique. J'aurais hk'n lu
droit de les aliéner, mais je ne puis pas le faire, parce
qu'aucune volonté ctrangerc ne pourrait savoir sij'ob-
serve ou non l'obligation contractée envers elle. On
pourrai dire, par u~ure, que nous les aliénons souvent a
nous-mêmes~ à notre jugement. Celui-ci nous conseille
quelquefois de détourner notre pensée d'un certain objet
CONSiDÉHATIONS208
pour la porter sur un autre, et la libre votonte change cehonconscit un une loi pour nous (I).–On ne saurait donc
s'enter juridiquement par aucune promesse a vouloirrenechir sur certaines chosesseuiemcntetdans de certaines
limites, a voutoir s'attacher de cœur a un autre, i'aimcr,
i'ttonorer; car, suppose même que cela dépendit absolu-
ment de notre votonte, comment l'autre poun'ait-it s'as-
surer que nous lui tenons parole?11ne reste donc,en fait de droits qui puissent être atiencs
par un contrat, que ceux que nous avons sur t'usa~e denos facuites corporeUes, sur nos actions extérieures.
Nos actions s'appliquent aux ~c~o/~e~ ou aux 6'ô'<Nous n'exerçons sur les personnes ni un droit ni
un droit acquis, Le premier de tous les droits, celui de
se défendre soi-même par la force, !e droit de guerre peutt
être cède à un autre, mais a deux conditions. Nous de-
vons ~M/'M<snous réserver, ou 'plutôt nous conservons
toujours nécessairement, mêmesans aucune réserve ex-
presse, te droit de nous défendre en personne, d'une part,contre une attaque soudaine, qui nous expose a une perte
irréparable, ceUede la vie,et qui ne nous permet pas d'at-tendre des secours étrangers, –et d'autre part, contre lesouverain défenseur de nosdroits. Lepremier de ces droitsn'a jamais fait i'objct d'un doute, bien que d:ms la plupartdes Mtatsil ait été sin~diercment an'aibii par certaines
(i) MaUteut-cusemcntje suis ici complément mintcHigibtcpourtousceuxquin'ontpasencoreconscienced'une tiht'cvoton~capabtede dicterdeslois,maisqui sontconstammentconduitsparuneima-ginationaveugle,suivaitle torrentde t'associationde ieursidées.!\tuisla fauten'enestpasa moi. Ladirectiondes penséesestHtn'caussi(tanst'hommc,et cetui(luinet'a pas encoream-anchic,n'est certai-nementausceptibtcd'aucuneautreespècede liberté.
S~H! HHVOLUTtON t''R.(J.\tSt:. 209
entraves juridiques et par la necessitt'' de fournir la preuve
duras de légitime défense, lequel l)rilte aux yeux de
chacun connue h' danger a lu'dl' a nus propres yeux an
moment crititpte.Quam.au second, on l'aentien'utent
supprinu''dans la plupart des i~tats, et l'on a cherche
par toits les moyens, sin~ulieretuent par des motifs
tires d<: ia rfd~iun chrétienne, a nuns persuader de sup-
purh:r<n sncncu tuntes les injnst!<;cs t~m nus défenseurs
n~vcLdcin pas punir, on qn'itsnc peuvent pas punn',
parce qn'ds en sont. enx-tneïncs tes aut.eurs, et de ttous
livrer Vtduntairetnent aux ciseaux (pti doivent, nous tundi'c
ou an couteau qui doit nons <er. Mais, puurctre
t''tont~, ce droit en est-it rnuins subdement fonde? Tu
nous défends centre !a Yiutence (t'autrui ecta est juste cL
bien tnais si tu pratiques toi-même itumediatementh viu-
ience contre nous, uu si, ''n nenh~ant !a défense <n'e tu
nous as promise et dont nous n'avons pins ie droit de nous
charger nous-mêmes, tu te rends cumpnce de ta \iotcnc':
des autres, qui dune nous défendra contre toi-même? Tu
ne peux pas être ton propre ~0. S'ii ne nuus est pas
permis de nous faire justice a nous-mêmes contre toi,
nous avons absolument abdique le droit de légitime dé-
fense, dans nos rapports avec toi. Or c'est ce que nous
ne pouvons faire; car il n'y a que les manières d'exercer
ce droit qui soient ahen.ddes: itdependdenous, par
exemple, de t'exercer parnous-mones ou au moyen d'un
représentant; mais le droit tui-meme est inauenabte. Ce
n'est pas encore ici le tien de rechercher et c~~c~
cette défense contre la suprême puissance est possible dan;.
un État, sans désordre et sans bouleversement; j'ai seu-
lement a montrer qu'c y a sa place et doit nécessaire-
ment l'avoir. Au reste, comme ceUc défense de nos droits
(:ONS!DÉnAT!ONS210
contre autrui est parctte.meme un devoir pénible et nul-
k'ment un avantu~ on ne conçoit pas comment cetui quenous dt''ehar~eons (te ce soin pourrait se trouver h''se par!a et exiger de nous une compensation, a muins qu'il ne
portât a notre compte l'injuste et iHe~itime tmpunitc de
ses propres violences envers nous, ou ce surcroit nonmoins injuste et non moins iHe~itime qu'il tire de nos
ou'nseurs sur ia réparation nu dommage et qu'i! garue
pour lui. ~!aiscesernit tnanit'cstemcnt nous prier de lui
permettre (!e continuer a être injuste impunément; il
faudrait donc repousser un tel procède sans autre consi-
dération. Ou craint-it par hasard fpïe nous ne lui reti-rions le salaire qu'il reo-it de nous pour nous détendre,et qui est peut-être hicn au-dessus de la peine que celalui (tonne. Knsupprimant sa charge, nous ne lui retran-
cherons pas immédiatement son traitement. C'est fa d'ail-
leurs un point dont n'ius nurons a parier en son lieu; nousverrons alors ce qu'it est juste de décider Acet égard.
Maisil ya une espècede rémunération que nous devonsmentionner ici immédiatement, parce que, suivant notre
ptan, nous ne !a rencontrerons plus dans la suite,Nous disions plus haut qu'it ne peut y avoir de promessequi ohti~c a vou!oir aimer ou honorer quelqu'un, parceque l'autre partie ne pourrait jamais savoir si t'en remplitou non son uhti~ation. Mais il peut y avoir des occupa-tions qui par leur nature attirent i'amour ou le respectdes hommes, et rien, pour ainsi dire, ne rend plus rcs-
pcctabte que ia hante mission de défendre les ~aibtcs et de
protéger les opp.rimes.Celui qui nous a jusqu'ici défendus
pourrait dire qu'en supprimant sa charge nous l'avons
privéau moins du respect qui y était nécessairement atta-
ché, dont Fhabitude mi avait fait un besoin et sur la
SUH LA nÉVOLUTION mANÇAtSE.2ii
durée dnqne! il avait !e droit de compter, aux termes de
notre contrat. N~us lui repoudrons que rien aussi n'est
plus honteux quêtes injustices commisL'sf'uun te! poste,
ou que t'o~pression de t'mnocence par un pouvoir 6mhh
nom'!a (h~'t'ndrc;et que, si nouslui avons cn!cvc mo~cn
d'aHirpr a soi te aspect <!csnations, nous l'avons sous"
trait ~n m~mc temps a ta tentation cluse déshonorer pu-
bhqucmpn! A!urs y~nx, et de devenir pour eues un objet
de matcdictton et d'horreur. Il y a donc compensation.
Maisil est sûr, lui tout sent, de i~onincorruptihiute,
de son impartiante, de son courage et.de ~a force; il ne
se déshonorerait eertainetnent jamais. Eh bien! unand
ce ne serait pas ~a fonction qui l'aurait honore, mais la
ndchtc avec h~uenc il aurait remplie, quand il aurait
fait tout son p~itde, d n'aurait encore t'ait que ce que
nous étions en droit d'attendre de lui, ce qu'it était oh!i~
de faire (.n vertu (te sa fonction. y a quelque chose
qui honorf encore davantage, c'est d'accornptir librement
de noh)es actes que n'exige aucun ordre. I.c voita tibre à
présent il y aura toujours des forts qui opprimeront
!cs faibles, l'humanité souffrira toujours en mamts en-
droits; qu'itusc maintenant de sa force pour résister
en (ace a l'homme puissant et injuste, pour aider l'huma-
nite a sortir de Fahnue t!c la misère, et nutrc vénération
ne lui fera certainement pas <!e(auL Les occasions de
s'acquCrir la vénération ne manquent jamais; ce sont les
hommes capahh's de t'o!)tcnirAforce de peines et d'efforts
qui manquent trop souvent.
Les droits sur des personnes !e sont par contrat.
Nous avons !c droit de conclure des contrats, et nous
pouvons aliéner ce droit ou c~ Je dis: en
tout; mais comme cette aliénation eMe-méme n'est pos*
2t2 CUMSiUKt~'t'iUMS
sibluquf par contrat, il est clair que la pratique de ce
droit en doit avoir au moins une fuis précède l'aliénation;–autrement celle-ci serait absurde,puisque, comme nous
l'avuns montre plus Itaut, il n'y a pas de droit naturel de
l'homme qui puisse être aliène en soi, maisseulement des
modihcations particulières ce droit. –t't~ partie but
a l'autre cette promesse Tant que je resterai avec toi dan~
le présent contrat, je n'en cunchu'ai aucunautre, niavc'
tui-memc, ni avec (pteiqm'autre. Un contrat <1ece ~enre
est, dans sa forme, tout a tait ie~itunc; dans sa matière,il est. enrayant pat' sun étendue, et si un le suppose en
outre irmnuaMe, comme il l'est chez le paysan attache a
la ~iebe, il rabaisse l'homme au ran~ de l'animal, indé-
pendamment même de cette immutabilité qui est dcja
illégitime en soi, le citoyenh'ustre, tant qu'il ne lui est pas
possible (le se rendre absolument indépendant de son op-
presseur, renonce formellementà toute réclamation ayant
pour but d'obtenir clu privilégiéde meilleures conditions,et à toute assistance des autres qui le traiteraient peut-être plus doucement. Le monde est désert pour lui; il n'ya plus d'êtres de son espèce.Dans un pareil contrat, l'op-
presseur se bâte de profiter d'un moment d'angoisse, qui
peut-être ne reviendra jamais, et il fait tout son possible
pour l'etcrniser.
Le droit de conclure des contrats est aliène c~c,
quand un des contractants promet de ne point conclure
de contrats, soit seulement avec certaines personnes, soitsur certains objets seulement. Il n'est pas douteux quedes promesses de ce genre ne soient légitimes en soi,
puisque la légitimité même de la promesse de ne pointconclure de contrat en général n'a pu être contestée.
'Nous n'avons rien a dire de plus sur cette exclusion de
SUft LA HËVOU'TION FRÀ~CAtSE 3!3
~laines personnes qui nous ote le droit de conclure un
contrat avec elles. Helativemf'nt aux objets, les contrats
sont,conclus (sauf le contrat dp mariage, (pu est partoutlimite, comme on sait, de diverses manières, et que te
sert'ne peut conclure, en générât, sans une permission de~
son seigneur), soit sur des /cc~, c'est alors le contrat
de travail, soit sur des c/ c'est le contrat d'échangeet de commerce. Dans ta première espèce de contrats, on
bien une partie aliène en générât, au pr~nt d'un seul pri-
vilégié, son droit de conclure avec tout autre un contrat
relatif a l'emploi de ses forces, ou de travailler pour tout
autre;–ou Lien elle ne l'aliène qu'autant que son con-
tractant pourra utiliser lui-même son travail, et elle s'en-
gage a ne jamais travailler pour d'autres, quand elle aura
du temps de reste, avant de lui avoir demande s'il a en-
core besoin d'elle. On peut aussi convenir d'avance, une
t'oispour toutes, du salaire du travail, de telle sorte quele travailleur soit tenu de travailler pour un certain prix,
quand même il pourrait recevoir d'un autre davantage.Nous supposons toujours ici qu'une partie n'a pas déjà
cède, parle premier contrat de privilège, le droit de dis-
poser de l'emploi de ses forces car dans ce cas, dont nous
parlerons plus bas, il n'y aurait place pour aucun autre
contrat de travail. Quant au c~ f/c cMM~cc, le
droit de céder ses produits ou ses fabrications a quelqu'un,comme a un unique privilégie, peut ~tre aliène d'une
manière générale ou seulementpourlecasoule privilégievoudraitles acheter, de telle sorte qu'il ait ou bien le ~'M'/
<cc/c/t~ comme plusieurs chets-lieuxde cantons
suisses l'ont sur leurs paysans, ou bien le
.1~M/
CONSÏDËMTIOM2~
îMï~'~7?<~y 1,commeptusicurs seigneurs ancmands l'ont
sur !curs sujets. Dans ce dernier cas particuncrement, on
peut étahtirce! tahu's conditi<ns sur h' prix de la man han-
dise, de telle sorte que le marchand soitohti~éde la tais'
scr au privitc~ié pour une certaine somme, quand morne
i! ne pourrait pius s'en M'ocurcr anicurs au nn'tmc ~'ix.
Réctproqucmcnt on peut stipuler, soit qu'une par~io
ache~ra pxctustvcmcntau p!ivih''pif, ou /< ses mar-
chandises, ~u c~Ucs(~u'a te pri\HL'nic, ou seutemuntrc~
marchandises, soit qu'it k's lui achètera un certain
prix, quand même il pourrait les avoir aiiteurs meilleur
marché, de tcuc sorte <}ucle privitegie ait te ~~<e~
ou le <7~~(le /<c t~c~. Le mode te p!us dur et te
plus odieux de cette espèce de contrat est celui qui obtige
ia partie !eseea prendre ahsommcnt une quantité déter-
minée d'une certaine marchandise, et Ala un prix
déterminé, comme le gouvernement le t'ait, dans certains
pays, pour le sel, ou comme !e fit,pendant quoique temps,
Frédéric U a t'é~ard des juifs, qu'it obti~eait a prendre,
en se mariant, une quantité déterminée de porcelaine.
La seconde espèce de droits, qui peuvent être auénés
par nos contrats avec des privilégiés, sont les droits sur
c~c/~< le droit de propriété dans le sens le plus
étendu (lece mot. On ne désigne, en enet, ordinairement
sous ie nom de propriété d'une chose que la possession~y~de cette chose; mais, comme la possession ex-
c/t'cestseutc le caractère distinctifde la propriété, ta
jouissance immédiate d'une chose dont onne jouit qu'une
fois, et qui se consume par la jouissance, est aussi une
~ofAat~/<'t~<n(~.VofhonM.
SUR LA RÉVOLUTION FRA~ÇA!SE.
véritable propriété; car pendant que quelqu'un en jouit,
tous les autres en sont exclus.
Or ce droit de propriété, comme celui des contrats
peut s'aliéner ou c~ /< 11peut s'aliéner tout.
a t'ait. La propriété la plus immédiate de l'homme, <elte
qui fonde toutes les autres propriétés, ce sont ses forces.
Celui qui en a ic libre usa~'ea dcja immédiatement en
elles une propriété, et il ne peut manquer de recevoir
bientôt, par l'usage qu'il en tait, une propriété sur les
choses extérieures a lui. On ne saurait doue concevoir
uncalicnation absolue du droit de proprietp qu'en sup-
posant que nousa!ienions !e !ibre usa~e de uus {'orc<'s,que
nous cédions a un autr~ !e (iroitde disposer uhreu~nt <!c
leur apptication etqu'e!tes soient devenues par ta sa pro-
priété. Têt était, chez les peuples anciens, d'après h tettre
de la loi, le cas de tous les esclaves, et tel est chez nous
le casde tous les paysans attaches la propriété du so!. Si
le maître a voulu ou veut se relâcher de son droit strict,
c'est pure bonté de sa part, maisit n'y est pas oblige, aux
termes dela constitution.–Pourtant cette aliénation n'n
lieu qu'à un condition, c'est que le maître assure t'entre-
tien a l'esclave qui lui abandonne la disposition de ses
forces; ce n'est plus ici une bonté de sa part l'esclave a
parfaitement le droit de l'exiger de lui. Tout homme a le
droit de vivre, c'est la son droit mali'natde. Il ne t'aut pas
dire ici Sije ne nourris pasmon esclave, il mourra; je le
perdraiet le dommage serapuur moi; la prudoucc tile
poussera hit'n a le nourrir. 11n'est pas ici question dett'n
dommage, mais de son droit; il ne s'it pas de ta pru-
dence, maisde ton devoir ton esclaveest homme.
Le possesseur d'un animal a bien le droit de le laisser
mourir ou de le tuer, s'il ne couvre pas les frais de son
CO~SIDÉHATtONS2t6
entretien; mais il n'en est pas de même de cehu qui pos-sède h*sforces d'un homme. L'entretien auquct c<'iui-cia
droit est sa propriété; il t'a(tansce!te(teson mnitrc, et toutes
les lois qu'il ruante, ce (pt'il man~'eest sa propriété im-
médiate. Une entière atiénation do la propriété n'est donc
pas possible, et eue ne saurait l'être, puisqu'on ne peutah<'ner aucun des dt'ohs <h'1'honnnc en soi, mais sunte-
ment les modincations particuti('!rcsde ces (h'oits. En de-
hors de cette pruprict~ ccini qui se d''pouitk' du ta libn'
disposition de s~'sforces renonce a tonte pmpri6t'' cela
est (le soi.
Le (h'oit de propriété peut aussi n'être aiien~ <n~ren
partie. La propriété des /<~ peut être anenee en par-lie, 'le telle sorte qu'une certaine portion de ces t'orces
appartienne au privilégia, que nons puissions ou non
retnpbycr nous-m~nes, connuedans le service /(!),ou de telle sorte que le surplus de ces forces, dont nous
n'avons pas besoin nous-mêmes, hu appartienne condi-
tionneilement ou absotnmcnt, comme dans cette r'~tric-
tion du th'oitde conclure des contrats de travail, dont nous
avons parle plus haut.–La propriété de certaines choses
peut être aliénée, de tene sorte que nous ne puissionsnous les approprier d'aucune manière. Têt est le droit ex-
dusif de chasse, de pèche, decotomhier,etc.; teHe est fa
(1)Pourlesrarespersonnesquinesaventpascescho.ses. Leserf
(~<p a~crt'~M~)a unservice<~</J*; il est tenu(~ trav.uHcr.)))-tantque le sei{;net)rl'exige.Hegoncretncntcctui.cic\!g<'de )nisixjoursde corvéesur sa terre,et leseptièmeil !'emptoicpoufsesmes-sagesou ses transportsa)a ville.Lepaysan,phs Hhre,sur la terrf;
duquetk seigneurn'aqu'unfpartie(tudroitde propri<!tt',a unservice~t~c*; ilremplitun nombredt'tcrmim!decorvées.
~Mt~c~ ~'r~M<TMn.t~,parop)'<~iticna~n'M~tf~/Hf<<
St'n RKYOLUTÏON FR;SCA!SR. '~7
disposition qui, 'tans certaines contrées, veut que le chêne
(pu croît sur la terre du paysan appartienne au seigneur et
non au paysan tel est h' droit de piUm'a~ et de pacage, etc.
Apres ce qui a été dit plus haut, il ne reste fdus de
doute sur ta (~u'stiun<h' savoir si tous ces )h'«its pcuvnn!
ausst ch'c ahoMs partesent t'ait (te ta parti'' t'mstrcc. Il
n'est ici question que (ht deftonnua~inent (fui ix'ut être
ftn <!ans ce cas.–Quant aceUe première espècede limi-
tation de noire droit de conclure des contrats, qui sup-
prime tout a tait, on ne conçoit pas en gênerai (nons
paierons tout a ~hcure des cas particuiiers) quete privi-
légie puisse se plaindred'autre chose, sinon d'avoir de son
cote, dans resp~rance qu'iltonduit sur ia durée de notre
contrat, laisse échapper l'occasion de conclure d'autres
contrats qui lui eussent été utiles et avantageux. Mais il
est aise de repondrea cela que, de notre cote, lies que
nous étions par notre contrat avec lui, nous avons aussi
manque l'occasion de conclure d'autres contrats qui
auraient été utiles et avantageux jusqu'ici nous n'en
avons conclu aucun, ~ous lui donnons con~ maintenant:
il sait des a présent qu'iln'a plus a compter sur nous. Qu'il
emploie désormais son tempsaussi bien qu'il le pourra;
nous cLercherons àen i'aire autant de notre cote. Nous ne
l'avons pas l'rustre, nous nous sommes places avec lui sur
le pied de l'égalité.–Mais sa plainte devient plus précise.
Par rapport au contrat exclusif de travail, aussi bien qu'a
l'aliénation totale ou partielledu droit de disposer
de nos
forces, il se plaindrade ce qu'il ne recevra plus r~uli'
rcmentson travail, si nous lui remettons son contrat. 11 a
donc plus a travailler que ne. peutle faire un seul homme,
ou bien il peut, mais il ne veut pas travailler lui-même.
La première supposition,tetle qu'elle est, exactement tra-
CONSIDÉRATIONS2~8
duite, sidérait il a plus de besoins que les forces d'unseul homme n'en peuvent satisfaire, et, pour les satisfaire,il veut employer les forces d'autres hommes, qui sontobtins d<' rctrancitcr sur leurs propres besoins tout ce
qu'ils emploient de forces pour satislaire les siens. Il n'est
pas nécessaire de chercher plus loin pour décider si une
pareille ptaintedoit être fejetec. Mais il invoque une rai-son plus valable pour justilier !e plus ~rand nombre desesbesoins. S'il n'a pas immédiatement plus de forces qued'autres, il a du moins /'<? </<? /c< quipeut-être lui a été transmis pat-une ion~uc série d'aïeux:il a plus de propriété, et, pour en user, il a besoin des forcesde plusieurs.Soi!, cette propriété lui appartient et doitlui rester; s'il a besoin pour s'en servir de forces etran<
gères, c'est a lui de voira queues conditions il peut se les
procurer. Il s'établira ainsi un libre échange entre cer-taines parties de sa propru''te et les forces de ceux qu'i!en~-era pour travailler le tout, et en ceta chacun de soncôte cherchera a ~a~ner le plus qu'i! pourra. Qu'it em-
ptoie celui qui toi fera les conditions tes plus douées. S'iise prévaut de sa supériorité sur te malheureux au pointde l'opprimer, qu'il s'attende a l'inconvénient de voircelui-ci rompre le marche, des que la misère sera passée.S'il lui t'aitdes conditions équitables, il aura l'avantag-cdevoir durer ses contrats M.tissi chacun estime son Ira.vailaussi haut que pnssibte, le propriétaire ne pourra plustirer de sa propriété autant de profit qu'auparavant; lavaleur eu diminuera f'onsidcrabtement. Cela pourrabien arriver, mais que nous importe? i~ousn'avons pasro~ne ses terres de 1 épaisseurd'un cheveu nous n'avons
pas pris un sou de son argent nous n'en avions pas ledroit. Maisnous avions celui de résilier le contrat que
Sun LA nÉVOUJTTONMANÇAÏSE. 219
nous avions conclu avec lui et qui nous paraissait préjudi-
ciable, et c'est ce que nous avonsfait. Si son patrimoine
en est diminue, c'est qu'it avait été augmente auparavant
par nos forces, et nos forces ne sont pas son patrimoine.
Kt pourquoi donc est-it n'essnireque celui oui a cent
arpents tim autant de profit (te chacun d'eux que celui
qui n'en a qu'un?-On se plaint, (tans presque tous les
Etats monarchiques, dit partage ine~d des richesses, des
possessions démesurées don!jouissent qne!ques-unsa côte
de cf's nudtitudes d'houmes qui n'ont rien et vousvous
donnez en voyant ce phénomène dans !a constitution
actucne de ces r.tats?– t~t vous ne pouvez parvenir A
résoudre ce dimcite probteme, (t'opérer un partage {dus
ega! (tes biens sans porter attf'tnto au droit de propriété?
Si les signes de !a valeur (!cschoses se nudtiphent,
et ils sf nmttiptient par ta manie qui pousse ta ptupart des
États a s'enrichir, au moyen du négoce et de ia fabrica-
tion, aux dépens (te tous tes antres, par te commerce
extravagant de notre époque (pu court de p!us en ptns a
sa ruine, et menace tous ceux qui y sont le moins du
monde intéresses de t'enticrc destruction de leur fortune,
par !c crédit inimité qui t'ait phts que décupler t'arment
monnaye de rKurope;– si, dis-je, tes signes de la valeur
des choses se muttiptient d'une manière démesurée, ils
perdent toujours plus de leur valeur contre tes choses
mêmes. Le propriétaire des produits, te propriétaire fon-
cier renchérit sans cesse les choses dont nous avons be-
soin, et ses terres mêmes augmentent aussi par ta mccs-
samment de valeur en argent. Mais ses dépenses
augmcntcnt-cttcs aussi? Peut-être te marchand qui lui
fournitscs objets de luxe, sait il s'en tirer sans dommage;
l'ouvrier qui fait pour tui le travail indispensable, et qui
CONSIDÉRATIONS220
est traque par tous les deux, s'en tire moins l)ien.–Maisle paysan? Il est toujours une partie de la propriété fon-
cière, ou bien il travaille gratuitement ou pour un salaireextrêmement médiocre; ses liis et ses lilles servent tou-
jours le seigneur, en qualité (te corveabtes, pùnr tnm
pi~e de monnaie, qui, il y a plusieurs sicc~s, ctait sans
aucun rapport avec icurs services, il n'a rien, et il n'aura
jamais uucicmiscraNu entretien de chaque jour. Si!<;
proprictairc foncier savait inoderorson iuxe, il serait de-
puis ion~temps l'unique propriétaire de toutes ies ri-chesses de ia nature; ou, si iesystctneactuet duconmnerccsubit une révolution, cotnmc cda ne peut manquer,il ie deviendra certainement, et, excepte lui, personnen'aum pius rien. Si vous voulez empêcher ce!a, faites ce
que vous ete.sd'ailleurs ohn~s de faire rendez Hhrc
t'echan~' de nosfacut~s, cethéritage nature! de rhomme.Vousverrexalors cerernarquahie spectacte~que le ~w/r/~ ~<r6' et ~c /o~/c ~r~?' est e/<~o?ï/6~ < ~f/c~ Le sol, sans lois agraires violen-
tes, lois toujours injustes, se partagera de iui-meine in-sensihtcment entre un plus ërand nombre, et votre pro-hiéme sera résolu. Que cetui-i~voie qui a (tes yeux pourvoir; je poursuis mon chemin.
Si ie privilégie ne peut plus taire valoir ici ce subtcr-
m~e d'une propriété héréditaire, il faudra bien qu'il tra-
vaille,qu'il leveuille ou non. Nous ne sommes pas obligesde le nourrir. Mais, a l'entendre, il ne ~c~ pas tra-vailler. Croyant que nous continuerions de le nourrir parnotre travail, il Bilans cette confiance, néglige d'exerceret de cultiver ses forces il n'a rien appris de œ qui luiserait nécessaire pour se nourrir, et il est trop tard a
présent ses facultés sont mnintenant beaucoup trop anai-
SUh LA !ŒVOLU't'ION i'HA~ÇAISE. 221
bues et en quel(mc sorte trop ruuillecs par une longue
oisiveté pourqu'il suit encore en son pouvoir d'apprendre
(tuelque citose d'utile.– i\ous en sommes certainement
ta cause par notre imprudent contrat. Si nous lie lui
avicns pas laisse croire ()epuis sa jeunesse (me nous le
nourririotts sans qu'il eut a -s'enmêler, il aurait certaine-
ment appris (melque chose. i~oussommes donc tenus, et.
cetajustement, de !ededumma~er, c'est-à-dire <tete nuur-
rir jusqu'à ce uu'ii ai~ appris a se nourrir lui-même. Mais
curmnentdev'ms-ncus le nourrir? Faut-ii que nous conti-
nuions de nous priver du nécessaire,ann qu'il puissena~'r
dansicsupcrnu;ouhicnsmm.-Hque nous lui iom'nissions
l'indispensable?–Et c'est ainsi que m'us traiteriuns une
uuestiondont l'exacte solution est.un des besoins de notre
siccte.
Onil vuéclater parmi nousdeësentiments de compassion
et l'on a entendu proférer des plaintes amercs au sujet de
la prétendue misère de tant d'hommes, (mi tombaient tout.
a coupde la plus riche abondance dans un état beaucoup
plus modère; et quels sont ceux qui les plaignaient?
Ceux qui, dans leurs jours les plus heureux, ne se sont
jamais vusaussia l'aise que ces ~cns-tadans leur pm~rand
désastre, et qui auraient r~arde le moindre reste de leur
bonheur comme un bonheur di~nc d'envie. Laprodigalité
inouïe qui avait rc~ne jusqu'alors it la table d'un roi était-
elle restreinte en quelque chose, il était plaint par des
pCnsqui n'avaient jamais eu et qui n'auront jamais de
table comparable a cette table restreinte. Une reine avait-
elle manque pendant peu dejours dcquelques vêtements,
ceux qui auraient été trop heureux de n'en manquer que
comme elle, déploraient sa misère. Si notre siècle est
prive de certaines qualités louables, il ne semble pas du
COKSïDËnATMM222
moins que ta bonté soit nu nombre de ccitcsqni lui man-
quent Est-ce que par hasard ces ptaintcs seraient latraduction (h)systèmequi vaudrait qu'une certaine dassede mortetscutje ne sais que! droit de satisfaire tous lesbesoins que peut rêver i'ima~nation la plus extrava-
gante. que ia das~c suivante ne put pas avoir autant debesoins que la première, et h) troisième autant que la se~.
condp jusqu'à ce qu'on arrivât ennn a une fiasse qui fut
obii~éc de se passer de ce qu'il y a de p!us indispensnbio,aun de pouvoir fournir ce qu'H y a de plus supernu cesmortels priviié~ics?Ou bien fait.un dépendre ici le droitde l'habitude, et raisounc'-t-on ainsi puisqu'une tamittea jusqu'ici dévore ce qui est iudispcnsabte a des minionsde famine, cite doit nécessairement continuer de le dé'vorer? Toujours est-ii que, dans nutre <ac(tnde penser,c'est une choquante inconséquence de nous apitoyer sifortsur la misère d'une reine qui n'a pas de tinpc fraisât deregarder commeuncchosf toute nanne!!e ladctresM d'uneautre mère, qui, enveinppec eHe-mëmcde haiHons,voit setramer nus autour d'die les enfants qu'eue a donnes bienportants Ala patrie, tandis que, faute d'auments conve-nables, son sein dcssecbt' ne contient plus ia nourritureque demande le nouveau-né avec de faibics vagissements.
Ces gcns-th y sont accoutumés, ils ne connaissent riende mieux, dit d'une voixétounée !e voluptueux rassasie,en savourant son vin h' ptus précieux; mais ce!a n'est pasvrai ia faim, ics aiimcufs que repousse ia nature,i'an'aibtissement de toutes les forces de l'esprit et ducorp~, la nudité dans la saison la ptus r~ourcuse del'année, ce sont ià des choses auxquelles on ne s'accou-tume jamais. M. R. trouve naïfs ceux qui disent quequiconque ne travaille pas ne doit pas manger; qu'il nous
SUR LA RÉVOLUTÏON FRANÇAISE. 223
permette de trouver non moins naïfs ceuxqui pensent queseul celui qui travaille ne doit pas manger ou ne doit
mander que ce qui n'est pas mangeable.Il est aisé de trouver la raison de cette inconséquence.
Notre siècle est en somme beaucoup plus sensible a l'en-
droit des besoins d'opinion qu'a l'endroit de ceux de na-
ture. Ceux qui jugent ainsi ont assez généralement le
nécessaire, et ils l'ont eu depuis leur jeunesse; tout ce
qu'ils ont pu en retrancher, ils l'ont appti(}ucau supcruu,aux besoins du luxe. Maison ne saurait satisfaire tousces
besoins autant qu'on le voudrait,c'est !e sort commun, Tu
as un mobilier a lamode, mais il te manque une gâterie de
tableaux; tu finis par en avoir une, maisalors il te manqueencore un cabinet de curiosités. Cette reine a encore
besoin d'un riche collier; sois tranquitle: elle n'en est pas
plus malheureuse que ton c!eg'aute épouse, quand il lui
manque un vêtement au ~oùt du jour. Mais non-seute-
mcnt nous ne pouvons pas toujours satisfaire les désirs
qui naissent en nous, a mesure qu'ils ynaissent; souvent
aussi noussommes forces de rétrograder, de retrancher
des besoins que nous étions accoutumés de voir satisfaits
et que nous rangions parmi les nécessites. C'est la une
souffrance que nous connaissons par expérience qui-
conque la sent est notre frère d'infortune nous sympa-thisons intimement avec lui. Notre imngmation, grâce asonart magique, nous met aussitôt a sa place, Ceroi infor-
tuné voit-it diminuer le nombre de ses plats, le riche cha-
noinese figure privé /6' de sonvin nn oude son pâté
favori; la petite bourgeoise ou la paysanne aisée, de son
café au lait; chaque individu, selon lu monde plus ou moins
distingué auquel il appartient, de la satisfactiondu besoin
qu'il est enfin parvenu à satisfaire; et comment n'éprou-
32A (:()~SH)KHATtO!SS
verait-on pas pour lui toute espèce (te compassion?-- ~ous
n'estimons et fte distinguons h' ut le ~M'c
que par /<' ~uw~ f/ les puis-
que nous avons nous-mêmes appris pm' cxpencncc <}U(;rhabitudc nuus a t~ndu hn!ispcnsabtcs bicH '< choses
<tni ne Futaie!~ pas .mpm'avanL Nous ne puuvuns nom
n'pn''scn~r h vuri~btc (tin'ut'encc qui existe cnh'~ (~x
quant a /c~M/c; <;t quand nK'niC nons auus en sc-
i'iuns i'att. une idée par la t'etïexton, nuns n'en auriuns
p<mt'tant aucune rcpt'~cntatiun qui int viviticc' par notn'
unaninaUun et (nn n)H ~n jeu noLt'c ~nsiLiH~, puis-
quu nous ne nons summes jatuais U'ouv~'s nous-metncs a
cette t'xh'cinc innitc et que n«ns n<~nssumn~'s toujours
~i~nuusmncnt ~at'd(''ade von' ceux qui y c~iouL tutnbes.
«C<'hui'cstpasnaturct,ou ncsouth'c pas ainsi de ia iann,))»
disons-nous, avec ce icnnier~'ncnd dcDittcruL; c'cs~quun'ayuns jamais eu faim. Nuus ct'uyuns qu'un duit
s'habituct' a un manque continuel de nom'i'itun~ ou au
it'uid, uua la nudité, ou il un tt'avaii accablant, conuue nuus
nuus sunnnes aecoutuntes, sans beaucoup de puine, a nous
passer de la table richement servie des grands, ou de
leurs habits ma~ruhques ou de leur duux /w~'6'c; nous
ne savons pas ou nous ne scntuns pas que ces choses nu
-sunt pas seulement dinerentes par le mais par leur
/<Nous oublions que, s'il y a une quantité de
choses que nous nous refusons, nous nous les refusons en
quelque sorte de notre plein ~re, et que nous pourrionsbien en jouir un certain temps, si nous voulions nous ex-
poser a manquer ensuite du nécessaire, tandis que dans
les privations de ceux dont nous parlons, il n'y a plus la
moindre trace de libre volonté, et qu'ils sont forces de se
passer de tout ce dont ils se passent. Si nous tenons si
SL'n LA tŒVOUJTtON FHAKCAISE. 225
t5
Itien compte de la dinerence entre te sacrihec votontaire
et le s.te-rince force, quand il s'agit des privite~i<s, pour-
quoi donc ne t'oubiions-nous que (tans te eus on il s'agit
desOppritUeS?(~'tt't'st pas l'l!abitude, mais la nature <iui fait la ditY)'
rence de ce (pu est nécessaire < et de ce <~n <'st<<
sHpcrf1«. VoK'i !c pnnctpc: qmcu[Ktu<~h'avaiHc (toiLav'~r
une n'nn'ntu~ satuht'û et qui su<nsc a !a t~'paratton de
ses i'tn'cc~ un habmcmcntsam suiva!~ la naturu (tn di-
mat, une habitation saine aussi et so!i(!u.
Au <!d~ de ces Innitcs, dans te champ des chos<'s que!a
natu~ ne deciare pas iudispensahics, t'hahitude )':d<sans
doute des dincrences; et ici !a south-ance ct'otta peu près
dans ta mesure on les besoins accoutumes ne sont pas
satisf.uts. Je dis simplement: ~c~ et ceta pour deux
raisons: Une foule de nos besoins sont purement et
sirnp~ment des besoins de notre imagination. H y a, en
enet, manites choses dont nous n'avons besoin que parce
que nous croyons en avoir besoin eues ne nous procurent
aucune jouissance quand nous les avons, et te besoin que
nous en avons se revête uniquement par ta sensation
désagréable que nous éprouvons quand nous en sommes
prives. Les choses de cette espèce se reconnaissent a ce
si~nc, que nous ne les avons que pour tes autres. Tels
sont tous les objets de luxe qui ne sont que des objets de
luxe, et tentes les choses de mode qui ne se distinguent
des choses de !a mêmeespèce, ni par leur béante, ni par
leur commodité, ni par<mohme ce soit, sinott parce
qu'enes sont la mode. En tes recherchant, nous n'avons
d'antre but que de faire remarquer aux autres, -–je ne
dis pusnntre ~out, car ces choses ne se distinguent pas
p:u'ta beauté, mais noh'edorihte a l'endroit de:, to)'-
CUNStUKttATtUNS
mes ~)'nt''raleset l'aisance dont nous jouissons. Commeceschoses sont portées au cotupte (tes autres, ils peuvent in-
contestablement nous atu'anclur de l'obligation de les
avoir. Hsnous en ont jusqu'ici paye tes frais (tes qu'ilsnous retirent ce qu'ils nous donnaient pourra, il est tropclair qu'ils ne peuvent plus exiger que no~s continuions
cette espècede dépenses.L'état de notre fortune est main-
tenant connu; Hest notoire que nos recettes ne suiïisent
plus pouHa continuer avec honneur. Nousdesirons pour-tant ia continuer, c'est-à-dire que nous désirons briuer
au prix de notre honneur. Un tel désir est si insensé, ilest si absurde de souiïrir de ne pouvoir le satisfaire, quecela ne mérite pas de pardon, et que des hommes raison-nahtes ne peuvent laisser porter une pareille prétention a
lcurcompt<3.Leretranchementdecertainsbesoins n'apporteaucune soun'rancc à celui qui ne pouvait notoirement lessatisfaire qu'aux frais d'autrui, et il faut les retrancher de
la somme dans le rapport a établir. En second heu,comme la satisfaction des besoins excite réellement dansles sensune jouissance grossière ou déncatc, un chatouil-lement des neris ou un mouvement plus léger de l'ima-
gination, on ne peut nier qu'a cet égard il n'y ait une
grande ditïcrcnce dans le de~rcdc la jouissance, et parcon-séquent dans celui du besoin qui resuite de l'habitude.Il y a en quelque sorte une limite extrême de sensibilité
pour la nature Immaine; au delà de cette limite, cettesensibilité devient très faible et imperceptible. Il n'y a pasde (toute que te luxe de notre siècle n'ait atteint cette li-
mite, et qu'il ne t'ait ça et )Adépassée. La privation de ce
qui se trouve tout près de cette limite, aptus forte raisonde ce qui la dépasse, ne saurait certainement causer ia
sensation désagréable excitée par les désirs non satisfaits
SUR LA RÉVOLUTtON ~ANÇAiSE 227
qui sont encore dans les limites de la sensibilité ordi-
naire. il faut aussi avoir égard a cela, si l'on veut établir
un exact rapport entre tes privations et les souurances.
Une foisretranché ce qui doit t'être, il reste sans doute,
chez les privilégiés, une somme de souffrances une doit
leur causer la résiliation de notre contrat, eh les forçant &
restreindre leur luxe accoutumé, et dont nous méritons
certainement d'être accuses, puisque nous leur avionsgé-
néreusement promis de leur fournir toujours de quoi sa-
tisfaire aux besoins d'un luxe sans limites. Nous sommes
obligés (le faire disparaître ces souffrances, autant que la
justice le d'un côté et Fc-r~c de l'autre.
Autant qu'elle le permet d'un côte.–Chacun doit avoir
le nécessaire, comme nous l'avons établi plus haut; c'est
un droit inaliénablede l'homme. Désic moment donc que
leur contrat avec nous dépouillait quelqu'un de la possi-
bilité de l'avoir, il était illégitime en soi et pouvait être
résilié san~ aucune réparation de dommage. N'y eût-il
qu'une seule personnequi ne pût, à cause d'eux, l'acqué-
rir par son travail, leur luxe doit être réprimé sans aucune
pitié. Je dis l'acquérir par son travail; car ce n'est
qu'a condition de faire de ses forces un usage convena-
ble qu'il a droit a ce qui lui est nécessaire, et l'on ne sau-
rait obliger le privilégié a nourrir tous les oisifs. Celui
qui ne travaille pas ne doit pas manger; nous n'appli-
quons pas cette règle avec moins de sévérité au citoyen
ordinaire que nous ne l'appliquerions au privilégie, s'il
pouvait travailler.
Autant que la justice l'exige d'un autre côté. -Le pri-
vilégié invoque la force de l'habitude pour ne pas tra-
vailler et beaucoup consommer. Quele principe qu'il fait
valoir soit aussi le nôtre. Pour guérir ~un mal, nous Ue-
CUN~IUËhATiOKS~8
vous teneur ia source de sessoutîranccs, (}uenous avionsouverte. Commeil s'est insensiblement accoutume a nerien faire et a dissiper beaucoup, il faut aussi qu'il s'endeshabitue insensiblement,il doit, des la rupture de notre
contrat, appliquer ses facultés a ce dont il est encore ca-
pable, et les employer aussi bienqu'il le peut. La.peinequelui pourrait causer cetteapplication de ses forces, n'est pasmise en ligne de compte: car cette peine, la nature nousl'a imposéepour des hns bienfaisantes, etnous n'avons pasle droit de l'en soulager. i\ul homme sur la terre n'a ledroit de laisser ses forces s~msemploi, et de vivre aux dé-
pens des forces d'autrui. On calculera a peu près l'espacede temps qu'il lui faut pour arriver a se procurer le neccs-saircau moyende ses propres forces Jusque-ianousdcvonsprendre soin de son entretien mais en revanche nousavons aussi le droit de surveiller s'il travaille réellementà se montrer capable de se le procurer lui-même le jourou nous cesserons de le nourrir.– Il fautqu'aussitôt aprèsla rupture de notre contrat, il apprenne a se refuser peuà peu la satisfaction d'un plus grand nombre de besoins.Nous lui donnerons d'abord, après avoir retranche ce quia été calculé plus haut, ce qui lui reste encore de sespré-cédents revenus; puis moins, puis toujours de moins en
moins, jusqu'à ce que ses besoins se soient mis presqueen équilibre avec les nôtres, et de cette façon il n'aura ase plaindre ni de notre injustice, ni de notre extrême du-reté. Si un jour, ~race a ces clforts, il redevienten outrel'on et sa~'e,il nous remerciera d'avoir lait de lui d'unoisif prodigue, un travailleur frugal, et d'un inutile far-deau de la terre, un membre utile de la société Immaine.
sun L.\ nHVOLU'noN pn.\Nc.SH. ')
CHAPmU: V.
!)HLANOttLKSSHPARtUt'PORT.\Ut~Ot't !)!:«KVOt.UTtON.
« Tous les peuplesanciens ont en une noblesse, disent
des hommes d'État, qui passent aussi pour de grands
histor'cns, et, ils nous laissent le soin d'en conclure inté-
rieurement que la nobtcssc est aussi vieille que h société
civileet qu'eue doit faire partie de tout~at bien ordonne.
Chose singulière, ces mêmes hommes, pour qui !a néces-
site (le la nohtcsse dans un Ëtat est une chose évidente
d'c!!e-meme, quan(! par hasard ils s'avisent de vouloir
cxpHqucr l'origine de la noUesse actucUe,–se perdent en
des hypothèses qui ne sauraient s'appuyer que sur d'au-
tres hypothèses..!e ne parle pas de la nohtcsse /M~c/ –de !a re-
nommée ou des avantages qu'un ~rand hommes'acquiert
par sc~M actes; je parle, comme on s'y attet~t bien,
de ta ?~/c.Mc (le la renommée ou des avan-
tages que ce ~rand homme </ ~c avec
le souvenir de ses actes.
Je distingue dans cette noblesse héréditaire entre !a
noblesse d'ï et !a noblesse 'le Cette dis-
tinction me semble le fil conducteur qui doit nous pré-
server des égarements de l'hypothèse et. nousdiriger dans
le droit chemin; l'oubti de cette distinction est sans con-
RrbatM.
/<(/e~der ~etn«n~.
,4~~ ~('~ /!M/t~s.
CONSmËRATTONS~30
trcdit. principe de toutes les erreurs <juirégnent parminot!s:'t ce sujet.
1 hnsf'ette assertion que les peuples anriens ont eu une
noblesse, il va quelque chose de vrai, mais aussi (ph'Iquechose det'au\. Usent eu presque tous une nohh~sc d'opi-nion !uais, !'c'xc~ption(te quelques cas, fort.passa-gers, (~u ne furent, pas !'c(ïct de la constHuuon de FËtat,mais d'une viotcntc oppression,– ils n'om pas eu de no-blesse de droit.
La nohtcssc d'opinion existe nécessairement partout oùdes générations d'hommes vivent dans un état de sociétédurable. Il n'y a presque ~M/ d'objet ou eue ne puisses'attacher. !i y a une noblesse de science Il est vrai queles grands savants laissent rarement des entants il n'y a
point de Lcibnitz~point de Newton, il n'y aura point deKant en qui nous puissions retrouver !a postérité de ces
grands hommes; mais qui peut voir un Luther qu'il neconnaît pas, sans penser qu'ii a peut-être devant lui undescendant de ce grand homme et sans t'examiner avec
plus d'attention. Il y a une noblesse de commerceet en entendant certains noms, immortels dans t'histoircdu commerce, nous croirions plussouvent être en présencede !a postérité des hommes qui les ont immortauses, si letitro de co~/c ou de 6~'o/i, ou la particule </c qui les
précède ne nous interdisait cette pensée (1), ou si le nomcélèbre ne se montrait pas sous un afïubicmcnt tout nou-
C~f~-Jd~.
/t'au/MMn~tc~.(!) Htdh-cque mat~t!cch te commcr~ntc~brc aspireencore
àt'honncurde devenu'nn obscurgenmhonnne!Puissent dumoinstesaidantsithtstresdct'Attonagneépargnercettedégradationau nomqn'iisontrenducëicbre1
SUn n~V~FT!ON FRA~'CAtSK 281
veau,–si t'homme ne s'était pns chan~ <~nmoua~ue,
cn\dl(''eou en quartier (!et'')'r< –Hyaunenobtesse
de vertu ou de bcHesactions Quicomptea (bmne a son
nom une certaine célébrité, transmet a ses descendants
~f'c ce nom la célébrité qu'itya attacitéc.
Partout on les hommes vivent en société civuc, pour
peu que i'Ëtat ait dure, H doit y avoir une nobtcssc civi-
que analogue. t!n nom tmi se présente souvent dans
l'histoire de notre État, qui, d:ms ies rf'cits do cette his-
toirc, a souvent attire notre attention, et qui a été porté
par des hommes avec lesquels nous avons sympathisa,
éprouvant avec eux tantôt de !a pitié, tantôt de l'inquic'
tude ou (te ta crainte, tantôt i'orgucit des grandes actions,
un tel nom est pour nous une vieiuc connaissance.
Apercevons-nousquelqu'un qui le porte, les anciens sou-
venirs se lient a ce nom dans notre imagination. Nous
repassons aussitôt la généalogie de l'inconnu, avant même
qu'il nous la raconte nous savons qui était son père,
qui son ~rand-pére, qui ses coHateraux; tout ce qu'ils fi-
rent se déroule devant notre esprit. Notre attention est
ainsi attirée sur celui qui porte ce nom célèbre, et nous
sentons notre sympathie s'éveilter des lors nous l'exami-
nons de plus pres.afin de poursuivrenotre comparaisonen-
tre luiet ses illustres aïeux.–C'estla cequ'exprime cxacte-
mentlc!uot~par!equellesnomainsd~si~naientce!ui
qui'taituohlcd'apres leur taponde penser; ils appelaient de
ce nom un homme très rcconnaissahie, dont on sait beau-
coup <!echoses, que l'on examinera ptus attentivement
et que l'on connaîtra bientôt de plus près encore. Ku
/<~ <t<~fn~ ~<.<</t~
/~r<~f-~fM.
Cœ<St!)KnÀT!C?<S232
outre et itn'y a non (te pins nature cette attention se
cttan~e bientôt en respect et en confiance envers t'ttumm)'
qui porte un nom célèbre; et, quand il ne nous a pas ex-
pressément convaincus d'erreur, nuus lui supposons !cstatents de sesancêtres on <<eses parents. Se prescnie-t.i!une entreprise qui conviendrait tout particulièrement a
quoique ~rund ttomme de nuire histoire, ut que nous ne
manquerions pas de lui confier si nous l'avions encore
parmi nous, sur qui te souvenir de cet hounne se
rcportcra-t-it ptutot que sur i'un de ses descendants;et, puisque nous ne pouvons !ccharger Ïui-ntutnc de cette
entreprise, a qui !a connerons-nous ptus volontiers
qu'a son nom? C'était un Scipion qui avait cunuueneeta ruine de Cartha~c Hn'y avait personne de qui l'on at-tendît plus sûrement l'entière destruction decet Ktatqued'un Scipion.
Cette noblesse d'opinion existait chez les peuples an-ciens.–E!tc existait chez les ~'cc~, mais d'une manièremoins ï'cmat'quabte,–parce que i'usa~c qui vomait quecitez eux le filsne ~)ortat point le nom de son père, maisun nom a lui, et qu'il n'y eut pas de noms de t'amiiie,n'entretenait pas cette illusion de t'imagination qui s'at-tache à un mot.Unjeune Ct'ccsc prescntait-H, il <a!!aitquel'on s'informât d'abord de sa tamiHe ou qu'H t'indiquâtlui-même, et !c retan! occasionne par cette espèce d'en-
quête ou paries indications qu'it était force de donner,détruisait en grande partie t'impression (m'il comptaitproduire en paraissant dans le monde, t~t pourtant l'ar-rivée d'un MiitiadcreveHhut certainement !e souvenir (tula bataiiie de Marathon. Quant a la nohtcss~dec'cst-A-dire:\ccs p!'ivi!)''g'csattribues exclusivement a cer-taines famines, je ne les trouve nulle part, du moins sur
St'H L.\ tŒVOUJTtON F!<XC:SH. 233
le libre sol de ta (.rece, si ce n'est peut-etrea Sparte dans
tafamilte royale, cttex tes Ueraclides. Mais, outre <~te
leur pouvoir, fort restreint depuis tat~istation de Lycur-
~'ne et soumis a la sévère surveittancc des inexoratdcs
Ëpitorcs,était plutôt une obligation Itereditairc qu'un pn-
viic~cttereditaire,a distinction de cette i'an!iHereposait
sur de tout,autres principes que sur celui de la transmis-
sion de certains privde~espersonnets par voie d'hereditt'
Elle se fondait,sur ta propriété héréditaire de la Laconie,
et la noblesse de cette famine ressend)!:utplutôt a notre
noblesse féodale,–dont nous partcrons pi usbas, qu'a
notre nob!esscde race. D'aprèsie systèmequi régnait en
Crccea cette époque et qui voulait que !es royaumes se
transmissent héréditairement aux enfants et aux entants
des enfants, et fussent partages entre eux,–Hercute avait
desdroitssur quelques contrées du Pe~ponese. Sesderniers
descendants, après bien des tentatives, purent cnnn
taire valoir ces droits héréditaires par ta force de leurs
armes.Deuxfrères s'etahlirent-a Sparte et considérèrent, ta
Laconiecomme leur héritage. De ta tes privih'~esdc tcur
famitte.
Citezles Hotnains, la notdcsse d'opinion, cette notoriété,
par cette raison, entre autres, qu'ils portaient leur nom
de famitte, avait une sphère ptus étendue, et formait
une sorte de système. La division (tes citoyens en patri-
ciens, chevaliers et pteheiens, semhtc, il est vrai, indiquer
quelque chose de plus qu'une simptc nohiesse d'opinion,
mais nous en parlerons plus bas. Cettenoblesse se fondait
sur l'exercice des trois premières magistratures de l'État,
le consulat, la preture et l'une des deux editites, magis-
tratures queFon désignait sousle nom de dignités curulcs.
Plus une familte comptait, parmi ses ancêtres, d'hommes
CONStD~RATfONS23A
ayant exerce ces dignités, ptus eue était nohte; !es images<<eces hommes ornaient l'intérieur de ia maison, et, dans!cs funeraUtes, elles étaient portées devant !e corps du dé-funt. H<ait tout nature! que te peuple, dans ses cttoixtavoris;u surtout !es anciennes <atni!!esa cause (!c cette
opinion qui s'y attachait; mais c!!es avaient si peu undroit ~.767~ aux dignités dont nous venons de pat !er,<tue(h; tenips en temps !e peupie se donnait !e piaisir d'yclever une nouvelle famille jusqu'idors inconnue. Ceux
(tui servaient ainsi de souche a de nouvcHcs fami!!es, ne
rougissaient pas le moins du monde de t'obscurito de leur
origine; ils mettaient au contraire ion'or~ueit ï'appcierpuhHtp~mcnt qu'ils s'étaient eteves eux-mêmes par leur
propre mérite, sans avoir pour appui ia gloire rie leursancêtres. C'est montrer une ignorance ridicule que deconfondre c< nobtessc avec la ~d/y'~et C6'.<fondateursdf nouveHes maisons (~ /ïM) avec ~~9 nouveauxanohtis. Si, chez nous, l'exercice de certaines fonctions
pubtiques etevait A!a noh~se; si, par exempte, !cs des-cendants d'un ministre d'Kta!, d'un gênera!, d'un prêtâtétaient nécessairement nobles par te tait même de !cur
naissance, et sans aucune autre formalité, il y aurait une
comparaison possibtc.A la vérité on pourrait conclure de la division des
citoyens romains en patriciens, chevaliers et plébéiens,qu'Hyavait parmi eux une autre noblesse que celle d'opi-nion mais en raisonnant ainsi, on mcierait l'essentiel et
t'accidcntet, te droit et l'usurpation, et t'en confondraitles temps et les lieux, Ce fut homutus qui posa te fonde-ment de cette division, voulant designer par là certaines
dignités personnelles et certaines situations passagèresdans rËtat, et non point des privilèges héréditaires dans
SUR LA t~VOLUTîONFUÀNÇA~E. 235
certaines t'amittcs, chose dont il ne pouvait avoir :u~
cunc id'~c. Les et ceux qn'it leur adjoignit p!us
tard, tescw~c~ il les-choisit a cause de teur :~e quiles rendait inutiles la guerre, mais d'autant plus propre
au conseil et au gouvernement intérieur (te !'t!tat. iïs
étaient destinas Arester la vi!!e Pt ù pr~idf; r:uhui-
nistrntion (!el'État pendant lus ~terres ((n'i! ne cessait de
fnirc. Comment croire qu'i! soit venu A reprit de ce
guerrier infatigable, de ceroi abso!n, fpm les fils de ces
hommes héritassent, pendant nu'ds étaient encore jeunes
et forts, (lu privilège qu'avaient leurs pères de ne pas le
suivre laguerre, ou que, dans le choix des futurs séna-
teurs, destines a remplacer ceux que !a mort faisait dis-
paraître, il aitvouht être horn~ aux fi!s de ces derniers t,
ne se soit pas réservé ia liberté de ct)c'isn', a l'avenir,
comme parle passe, tes plus a~es et tes plus sa~es cl'entre
tous tes citoyens, n'eusscnt-itset~ précédemment que che-
valiers ou pteh6icns? Très vraisemblablement les fils de
ses premiers sénateurs étaient: –ceux-d chevaliers, et
ccux-Ia plébéiens, suivant que cela paraissait plus avan-
tageux au roi. Les ~ptv/ destines a servir a che-
val, il les choisit d'après leurs richesses il fallait qu'ils
fussent assez riches pour entretenir un cheval.–Cetuiqui
n'avait que ses forces physiques, ce qui n'était certai-
nement pas un déshonneur chez ce peuple nouvcHcmcnt
né, était destiné à servir a pied et s'appelait ;~M~
Je voudrais que l'on pût remonter a l'origine de ce mot.
Sije ne me trompe, il signifiaitoriginairement un soldat~
pied,et l'on n'y attachait pasla moindre idée de mépris.–
On ne saurait montrer d'après quels principes furent ré-
glés, sous les gouvernements suivants, ces rapports des
citoyens. !1 est vraisemblable que le fils d'un chevalier
~C m'!SS)f)HnAT!(~S
ctait ordinairement chevalier a son tour, parce qu'il étaita supposer qu'il avait hérite de son père la fortune néces-
saire pour cela; mais-bien que les sénateurs se fussent
déjà.assure par te meurtre de Romulusune certaine pr<
ponderancc, si toutetbis ce meurtre n'est pas une fable
invente plus tard par ta jalousie pichcicnnc, il ~'c~
vraisemblable que tout his de sénateur fut senateura
son tour, et qu'aucun fils de chevalier ou de plébéien ne
put le devenir. Onavait besoin (teM~ô' consciucrs et la
sagesse ne se transmet pas toujours avec te san~. C'est ta
une remarque qui a du s'onrir a l'esprit d'unNuma.~ette simpte constitution fut sin~uncrcmcnt compHqu'c
sousServius-Tuitius, par l'introduction du cens. Il enre-
suha une noblesse de richesse, qui fut assez importante
pendant la durée de la république, et qui, en tait de dis-
tinetion extérieure, produisit enfin la loi Uoscia mais la
ne se fondait pas immédiatement sur la naissance; eïïesefondait sur la richesse acquise au moyende !a naissance.
Les enfants d'un citoyen de la première classe retom-
baient parmi les ~w/ quand ils avaient perdu ou dis-
sipe leur patrimoine, et ils perdaient, avec leur fortune,leur ancienne place au théâtre.
Sousic gouvernement despotique de Tarquin !e jeune,et plus encore pendant les troubtcs produits par la révo-
lution, et entretenus par tes perfides menéesdes Tarquinschasses, !es /c/~ issus des anciens sénateurs, s'ar-
rogèrent de grands privitcgcs et ie peuple,– épuise par
l'oppression de ses tyrans, par de continuelles dépenses de
guerre, par sa propre prodigalité et par la dureté de ses
créanciers, dut laisser faire. Dépendants~non comme
citoyens, mais comme débiteurs, les plébéiens élevèrentexclusivement ces famiHcsa toutes les dignités publiques
SL'ht.AiŒVULU'nuKn<AN(,:AtSi' '237
qu'elles desiraient et dont elles (''latentseules en état (tu
supputer les cinu'~es. Sons point (le\ue, il yon a Home
une véritable noblesse Injreditaire de droit, mais tes pri-
vilèges de cette noblesse se IbndL'rcntsur le hasard et tu
violence, et non surlaconstitutiunde l'Ktat;c'étaient
des droits injustes. Le désespoir rendit aux choses pu-
pntah'es hunutiees ia turce (qu'une nnscrc tulcrabk leur
avait cnicvcc. Us recoihjnh'cnt, dans unu tun~u<'~n<;rœ
avec les patriciens, tous leurs droits csvds, <nndcvhn'cnt
cutmnuns entre eux, et des tors ht distinction entre les
patriciens, tes chevaliers et ies ph'bcicns n'exista plus
que de nom. Chacun pouvait être absolument tout dans
i'Ëtat la noblesse exctusive du patriciat disparut et ht
ptace a !a noblesse d'opinion. Quant aux ebevahers, a
partir de l'époque où le commerce et la richesse péné-
trèrent dans la republique, ils semblent avoir surtout
son~e a augmenter leurs trésors, s'être contentes de ta
noblesse d'argent, et avoir abandonne a d'autres t'adnn-
nistration des fonctions onéreuses. On ne trouve qu'un
petit nombre d'hommes de cette espèce parmi les grandes
lanniles de la république. Maisles plébéiens ne taisscrent
point l'avantage aux patriciens on trouve autant de no-
bles maisons et d'aussi nobles parmi les premiers que
parmiles derniers.
Les nations barbares, qui lurent connues des Romains,
n'avaient pas d'autre noblesse que ceHcd'opinion, eteHes
ne pouvaient pas en avoir d'autre; torsque des écrivains
romains constatent citezelles une noblesse, ils n'emploient
certainement pas cemot dans un autre sens que dans ce-
lui de /CM?'langue.–Mais cela resuttera bientôt de l'exa-
men même de cette (mestion: quelle espèce de noblesse
est donc notre noblesse européenne, et, –pour pouvoir
CUNS!DKMT!ONS238
résoudre ce punit,–d'en est-elle donc sortie? Car il n'est
pas sans utilité d'entrer un peu dans l'histoire avec notre
noblesse et ses défenseurs, ann de leur montrer que 1A
même on ne saurait trouver ce qu'Us cherchent.
La plupart des peuples et lesplus puissants de l'Europemoderne sortent des peuplades ~M/~MM, qui erraient
dans leurs forets, libres et sans lois, comme les sauvagesde l'Amérique du Nord. Ce fut d'abord dans Fcmpire
/ir~c qu'elles se constituèrent en i~tats fixes. C'est de cet
empire que sortirent les États les plus considérables de
l'Europe, l'Allemagne, la France, les Etats italiens. C'est
par cet empire ou par les rameauxauxquels il donna nais-
sance, surtout par le plus important de tous, par l'empire
allemand, que les autres empires, qui ne sont pas immé-
diatement d'origine germaine, turent successivement gou-
vernes, instruits, civilises, presque formés. C'est dans les
forêts de laGermanie qu'i! fautchercher l'esprit des insti-
tutions franques; c'est danscetempireque se trouve le fon-
dement des institutions modernes de l'Europe.On dis-
tinguait deux classeschez lesGermains les hommes libres
et les esclaves.Il y avait., parmi les premiers, une noblesse
d'opinion il n'y en avait point de droit, et il ne pouvait
point y en avoir. A quoi auraient pu s'appliquer, chezces
peuples, les privilèges d<;la noblesse?A co~c~yc~Maisils vivaient dans une extrême indépendance, ne con-
naissaient presque pas de sociétésfixes et durables en de-
hors de celle de la famille, et ne consentaient guère a re-
cevoir des ordres que pendant la durée d'une expédition)<:«)~<'~t nassa~re. A /</ ~.s\sv.s\9! </?<M/?Mais ils
rraimaient pas la culture, et changeaient de place chaqueannée. Si quelqu'un se distinguait par des entrepriseshardies, par sa force et sa bravoure, par ses rapines et ses
SUH L\ HKVOLUTtUN FttA~Ç.USH 230
trophées, tous les yeux se dirigeaient sur lui; il devenait
un objet d'entretien, il 6tait illustre, noble, suivant
l'expression des Romains. En voyant ses nls ou ses des-
cendants, sa peuplade se souvenait de ses hauts faits, ho-
norait en eux sa mémoire et, ainsi prévenue en leur la-
vcui', tes croyait semblables à leur père ou a leur aïeul.
Us bu ressemblaient, en enet, d'ordinaire, excites qu'Us
étaient parce jugement favorable, ou par !e souvenir de
ces hauts faits. a Us choisissent leurs rois d'âpres la
noblesse, et leurs chefs d'après la bravoure personnelle,))
dit Tacite (1). Quels étaient ces rois, quels étaient ces
chefs, et en quoi se distinguaient-ils les uns des autres ?
–Sans doute les premiers conduisaient les hordes erran-
tes tout entières, les guidaient, choisissaient les lieux où
elles devaient s'arrêter, les champs et les pâturages qui
leur convenaient. Celuiqui voulait obéir obéissait celui
qui ne le voulait pas se séparait de la horde avec sa famille,
errait seul ou cherchait a se joindre a une autre horde.
L'hommequi conduisait ainsi une horde devait avoir quel-
que considération et, chez un peuple (mi n'estimait que
la valeur guerrière, sur quoi le choix de cet homme au-
rait-il pu se fonder, sinon sur te souvenir des hauts faits
de sesancêtres, qu'il lui rappelait par ses propres actions,
–lesquelles étaient connues de tout le peuple qui prenait
par! au choix?--Toute la horde partait-elle pour la
guerre, c'est encore ce même roi qui la conduisait. Mais
cen'était pas le cas ordinaire. Des partis isoles faisaient des
expéditionsparticulières, suivant que leur hardiesse ou des
accidents fortuits le leur conseillaient (2). Le but de ces
(1) ~c ~on~s Gcrw~nortt~), c.'p. 7.
('2) /6td.,cap. i~t.
t:ONSt!)HHATH~S2/t0
expéditionsétait te butin. Cetui-~iméditait que!<iueentre-
prise hardie, eehu-ta on méditait une autre chacun com-
muniquait son projet,et se procurait (tescompagnonsaussinondn'cux et aussi i)ons que possible.Chaque parti choi-
sisnait pour chef un des hommes tes plus braves qu'ilconnut, et s'en auait uc scncutc. Le nu aurai!-it pu con-
uuire tous ces partis isoles, dotU souvent plusieurs a !afois partaient dans des directions dinerentes pour piHeret faire du butin? Us revenaient; repartaient avecd'autres
compagnons pour d'autres expéditions, et choisissaient
peut-être un autre: chei, tuais toujours un honnue brave
et hardi. Ce sont ta tes chefs dont parte Tacite. Lors-
'tuc quoiqu'un avait été souvent chef'd~ cette manière,
qu'ti a\'ait conduit les entreprises avecautant de bonheur
que de courage, et que son nom était devenu célèbre danstoute ta peuplade dont il avait séparément conduit tousles membres tes uns après tes autres, on ne songeait plusa mu;expédition sans souhaiter de l'avoir pour chef; destors il devenait nobie fui-même comme le roi Pétait de-
venu autrefois; et si cemi-ci venait a mourir, il était tout
simpte qu'on te choisit pour roi, mi, ou son ms formesous ses yeux et accoutume a marcher sur ses pas. jt n'ya dune pas ici encore ta moindre trace d'une noblessehéréditaire de droit.
ti en était ainsi au temps de Tacite, alors que tes di-
verses peuplades de ia Germanie se resserrèrent plus etroi-tement encore, que chacune forma un corps de peupleptus uni, et que chaque membre particulier eut ptus sou-
vent l'occasion de s'ittustrerpar ses hauts faits et par ceux(te ses ancêtres. Plus tard, torsquc les peuptades quiavaient existe jusque la se décomposèrent comme parl'effet d'une fermentation ~enerate, que sous la pression
sm I. !ŒUH!TION FHANC~tSH. 2a
i6
de l'Orient, elles quittèrent tours demeures pour se diri-
ger vers le Sud et l'Ouest, et qu'en se mêlant les unes aux
autres, eties formèrent de nouvelles peuplades, qui, a leur
tour, se mêlèrent sans cesse pour en Uriner encore de
nouvelles, dont on ne trouve les noms dans aucun des
anciens historiens, cette noblesse d'opinion dut. elle-
même s'évanouir. Tel qui, un jour, taisait encore partie
d'un peuple qui connaissait ses actions et celles de ses
pères, et dont il connaissait également les hommes illus-
tres se trouvait peut-être le lendemain perdu dans une
nation dont il ne connaissait pas plus les héros qu'elle ne
connaissait son héroïsme. Hen lut <)cmême chez les peu-
ples qui, moins vivement {tresses, restèrent en Germanie,
comme par exemple les Saxons, les Frisons, etc. Mais il
en fut très certainement ainsi chez les peuples qui se
précipitèrent sur l'empire romain, comme les Burgondes,
les Vandales, les Francs, les allemands. Les noms mêmes
de ces deux derniers peuples indiquent que le premier
était forme de toutes sortes d'hommes libres, et le second
de toutes les peuplades germaniques possibles.
Il resta encore une sorte de lien entre certains mem-
bres de ces peuplades qui se décomposèrent et se mélan-
gèrent ainsi, et ce lien fut le principe de tous ceux qui
devaient plus tard se reformer entre eux. Aussiest-il ex-
trêmement important de le rechercher.
« Lesjeunes Germains, raconte Tacite(i), autour des-
quels la gloire de leurs ancêtres nerassemble pas d'autres
jeunes gens, s'attachent a un guerrier âge, déjà désigné
depuis longtemps par ses hauts faits, et personne ne rou-
git de cette fraternité d'armes. Vient-on à se battre,
(i) De A/or. C~n., cap. <3et i~.
COKS!b~nAT!ONS2A2
c'est une honte pour ic chef de se laisser surpasser encourage par ses frères d'armes, une honte pour les frèresd'armes de ne point épater te courage de leur chef, et unenetrissure inenacahte de lui survivre en ruinant !e com-bat. Le couvrir, le défendre, lui rapporter la ~irc desexpions par icsqueis un s'est sonate sui-meme, t~!est lepremier serment et !e plus saint.. Ce guerrier étaitcomme !e pm'ntde raihemcnt de ses frères d'armes, i!slui rapportai.'nt tout; a!iait-d en avant, ils i'accompa-gna.ent s'arrêtait. H, Uss'arrêtaient avec.lui. C'étaient la!cs seuls points uxes qui demeurassent encore parmi cespeuplades toujours en mouvement; et ils durent attirer Aeux les autres déments en dissolution. Quand des peuplesincertains, disperses et sans ~uide, rencontraient uneun.on de ce ~nre, ils s'y adjoignaient; et ptus la troupeetatt nombreuse, plus étaient braves les Itomrncs qui s'ytrouvaient, p!usaussi on y accourait en foute. iJs empor-taient tout dans ieur tourhinon, et c'est ainsi<meces trou-pes d'hommes, grossissant a chaque pas comme des boulesde nei~e, tombèrent sur tes provinces de l'empire d'Oc-cident et les conquirent.
Le conquérant partageait te butin, comme il y étaitobuge, entre ses ndctes frères d'armes. « Ce n'est quepar ia ~uerre.ditTacite (!), qu'on peut entretenir de nom-breux compagnons d'armes. Usattendent de ta ~.nerositede leur chef Jour chevai de bataHic et leur tramée san-gtanieet victorieuse. Sa table, grossièrement, mais abon-damment servie, teur tient heu de solde. La guerre et lepinage soutiennent la dépense. Un climat pius~rea-bie, des terres mieux cultivées, toutes ces jouissances
(i) foc. cil.
SUn LA RÉYOUJTtON FRANÇAISE. 2~
varies que leur avait {)n'parees tu luxe des vaincue, tes
entèrent a jouir en paix de ce qu'ils avaient sous h
main, et At'énoncer la vie errante qu'ils avaient menée
dans leurs Foretssauvais, Us prirent goût a la culture des
cliampset a ta nxite (iu'elle suppose. Les citanq~sdevin-
rent aussi un butin pour eux, et te vainqueur les satisfit
en leur distribuant des terres. Maisil y transporta !a po-
litique des forets: il ne les leur (tonna pas commeune
propriété durable, de penr qu'ils ne s'attachassent a la vie
sédentaire par l'habitude de ia possession, 'nais il leur en
abandonna la jouissance pour un temps arbitraire.
Telleest l'origine deta /~M~. On a bien entrevu que
cesystème était !iea Foraine de notre noblesse actuelle;
mais on a oublie de se demander ~c'~ /« /M~/< a
~w/~ ou si c'est /<( <<
Et pourtantla solution de cette question pour-
rait seule nous placer au véritable point de vue.
Le frère d'armes du conquérant recevait de lui des
terres à titre de récompense. La jouissance de ces terres
l'obligeait-cllc a accompagner son cbd a la guerre? Nul-
lement il y était déjà depuis longtemps oblige p~ son
serment, il dépendait de lui par sa y~c et non par
sa /e~'c. Quand même le chef ne lui en aurait jamais
donne ou n'aurait jamais pu lui en donner, il n'en serait
pas moins reste oblige, en vertu de son premier serment,
de l'accompagner dans toutes ses expéditions.–II pouvait
bien arriver (meles douceurs d'une vie tranquille et les
ag'remcnts de la possession accordée, rendissent ce don
nuisible a son auteur, et que le fcudataire, une fois en
possession de ce qu'il avait reçu de son seigneur, sercin-
sdt a l'accompagner a la guerre, tandis que, quand il ne
possédait rien, il n'aurait pas hésite a le suivre. La pre-
CONSt!)HRATIONS244miére chose que pouvait taire !c suzerain en pareil cas,c'était sans doute de retirer au récalcitrant son fief, niaisce n'était pas une punition: quand même le fcudataircn'eût pas ainsi manquea son devoir, il avait pleinementle droit de lui reprendre ses terres.
Ces vassaux du conquérant possédaient sans doute lanoblesse d'opinion; il était naturel que les autres hommeslibres tournassent leurs regards vers des gens qui avaientcombattu immédiatement aux côtes du conquérant cou-ronné par la victoire, qui s'étaient distingues sous leurs
yeux par tette ou telleaction d'éciat, qui étaient tous les
jours dans la société de !eur prince et qui mangeaient asa table; il était ég.uemcntnature! que le peuple reportâtsur leurs n!s une partie de l'estime due aux pères, quandces fils ne s'en rendaient pas indignes par leur propre lâ-cheté. Maisje ne vois pas encore ia une noblesse </c~'M'–ou bien cette noblesseconsistait-elle, par hasard, dansleur droit exclusif auxbiens féodaux de leur seigneur?
Les compagnons et les frères d'armes du conquérantétaient natureHement les seuts qui pussent revendiquerune part du butin, et particulièrement des terres faisant
partie du butin les aut res n'avaient rien demande qu'unedemeure dans tes paysconquis. Mais qu'est-ce qui leur
procurait propremcntccprivitegePËtait-ce leur naissance,ou quehjue autre chose que leurquaHté de frères d'armesdu roi? Tout autre homme Hbrc était en enet exclu de lapossession des fiefs, mais parce qu'it n'était pas /~<?r/'f~c.9 et non parce qu'it n'était ~~o~ïc/c. Cette fraternité d'armes fut lasource du droit. Pourétablir qu'il existaitil cette époque un privilège exclusifdecertaines familles, il faudrait montrer que, parmi leshommes libres, que!ques-uns seulement, et non tous,
SUR LA nÉVOLUTtOM FHAN~AME. 2A6
avaient le droit <<<'r 6~~c <~ c/<c/.Oùdonc
ce droit exdusit'aurait-il pris naissance? /cï~?'
où, les 11 (li,-'l' ¡ sefli-où, suivant tes paroles expresses de Tacite, ccux-ia se tai-
saient les compagnons d'un guerrier plus fort, quin'avaient pas assez d'illustration du côte de tours aïeux
pour rassembler, a ce seul titre, autour d'eux, un cercle
de jeunes ~cns? Ou après /<<7~cc f/c /« /«/y'c/<'?
Et dans ce dernier cas, qui donc avait ce privilège exclu-
sit'?Ccux qui taisaient déjà partie de la suite du monarque?ou leurs enfants?
Montesquieu, qui admet l'existence d'une noblesse ex-
clusivement héréditaire, mêmeavant la conquête, sans
entrer pourtant dans notre distinction de la noblesse d'opi-nion et de la noblesse de droit, en donne deux preuves;il est donc tenu d'admettre, suivant la conséquence dé-
duite plus haut, ~~c M~/c y~/c~c ~~Mcc «u~ /<*
~'oï< cle/<~w<'r /o<<yc ~<~ c/ ~<ïr~ /)OM'
co~:«~c, puisque snr l'origine du système ieodal, il est
de la metne opinion que nous; c'est proprement ce
que ses preuves doivent établir.
Louis le Débonnaire avait anrancin un certain Hëbon,
qui était ne esclave, et il l'avait élevé a l'archevêché de
Reims. L'historien de ce roi, Tcganreproche a cet Hebon
son ingratitude, et l'apostrophe ainsi « quelle recom-
pense l'empereur a-t-il reçuede tant de bienfaits? Il t'a
fait libre, et non pas noble il ne pouvait pas te taire
noble, après t'avoir donné la liberté (1). ? Montesquieu
veut prouver par là qu'à cette époque il y avait déjà une
distinction civile entre un homme simplement libre et un
(i) De~s~ deslois,1.30, chap.25. f<c<<<<Me~nt, non
tto6t~t, quodt~oM~e e~ p<~<<6<r<o~w,
COISSIumATtQNS
geunlhomu~. Maisque dit ce passade?–Nous ne l'ex-
pliquerons pas comme l'abbe Ihtbos, dont Montesquieucensure avec raison l'explication. H r'st itupossibic dedonner la noblessea un an'rancbi, dit l'historien. Dequellemunies cela est-il impossible? j)lt\'siquement ou morale-
ment, ou piditiquementP–Par des raisons naturelles, ouen vertu de la constitution de l'empire? On hjcn T~andit quelque chose d'absurde, ou ce n'est pas la dernièrechose qu'il a voutu dire. Si !a possession du nef était !eseul si~ne de !a noblesse, et si la qualité de frère d'annesdu roi était le sent moyen d'arriver a un fief, comme
Montesquieu l'accorde quand il est conséquent; tout
Mquc se trouvait déjà par ta exclu de cette noblesse denef. Quoique cette époque les évoques, ceuxdu moins
d'origine germaine, :d!assentpcrsonneuemcntA la guerre,un homme consacre a H~tisc ne pouvait pas se dévouera un roi aussi absolument que tes frères d'armes quis'étaient donnes a lui a lu vie et a la mort; l'une du ceschoses exemt évidemment l'autre. Si c'est là ce que vou-lait dire T~an, il aurait du dire: il est impossible dedonner la noblesse</!<y~; et non il est impossiblede donner la noblesse ~/w!c/ Ii m)parie donc
pas d'une impossibititcpolitique, mais d'une ~possibilitéphysique et moraic, et il songe a ia noblesse fj'opinion.H était connu qu'Hebon était né csdave; l'acte même de
spn affranchissement,et la haute dignité a laqueUe le roi
raya~ élevé ayaien~ encore rendu ceja plus poton'ç;après une parcitte notoriété, le roi ne pouvait pas exiger(Jel'opinion publique que l'on crût qu'ticbon était sortid'une ancienncsouchc d'ttommcs libres.–Peut-être Hebonétait-il méprise pour sa basse naissance, et cela avait-ilaigri son immeur et exqt~ sa haine contre le roi, qni,J
SL'n 1-A nHYOt~TtOK m.\KÇA!SE. ~7
dans son opini'm, ''n l'ch'vant a un si haut poste, n'avait
t'ait que l'exposer a (.'< mrpris.T'an cherche a justifier
en quehpte sorte le roi auprès d'!t(''bt)n. Tout ce(}uece
passade pourrait prouver, ce serait donc qu'acett<~epo(pm
un homme ne dans l'esclavage n'était pas autant estime
qu'un Itonnnene iihrc; ruais cette remarque pourrait
convenir à tous tes siècles indistinctement. Q~'on ne
reprocite pas a cette exptic'ation de supposer ehex Te~an
une distinction philosophique qu'on ne saurait attendre
de lui. S'il n'y avait, de son temps, d'autre nohtcssc que
!a noMesse d'opinion, connue nous le tenons pour dcmon-
tr< n rien a distinguer, et ses paroles ne pou-
vaient avoir/MM'~ ~~w/ d'antre sens~~uecetut
que nous icnr avons assi~n~ Au contraire, pour pouvoir
donner aux paroles df i écrivain le sens qu'ii y attache,
iii'aut que Montesquieu suppose (pK'Te~m avait déjà
Fidee d'une nohtesse héréditaire de droit, et (}ue par con-
séquent de son temps ii y avait déjà une nobiesse de ce
~enre; en un mot, pour prouver son explication, il faut
qu'il commence par supposer démontre ce qu'il veut clé-
montrer par la.
Char!ema~ne établit, dans sou acte de partage, cette
disposition, qu'aucun vassal de l'un de ses uls ne pour-
rait posséder de net' ailleurs que dans le royaume de
son sci~cur (1), tandis qu'il conserverait ses biens allo-
(1) Moptc~quictt.d.m.srouage cité, 31, chap. ~5, DeccUc
o~nnancc il r<'suhc,cnn'c :mn-cschoses,qu'an tcnips<tc HhuNc-
m:tgncla eonstimtionModa'esub~stidtoncot-csous son ancienne
forme.Sesfils,avant (rnn'ivpt'au u'o' :~n'cm(!<~ ~s vussaux1
snn.snvo!r Otc.orcdf!ncf.'<tet)t'disnibuct'.t.ctus v.ts~ux n'unu'ntt
donc pas liésà tcm-personnepar la possc.ssion(t'un ticf,mais seule-
mentpar te sermentq~stui:'vi'icmpt'
CONSIOÉHATiONS2~3diaux (1)dans quetque royaume que ce fût. Maisil ajouteque tout homme tibrc dont ie seigneur serait mortou qui n'en aurait jamais eu, pourrait se recommander
pour un nef dans les trois royaumes A (mi il voudrait.Dansun autre traite de partie, qui fut fondu en 587A Andeiy, entre Contran, Chi!dcbert et Hrunchitd et
qui est semblable dans presque toutes ses parties au par-tage fait par Char!ema~ne a ses entants, un retrouve !amême disposition relativement aux vassaux, mais on n'en
trouveaucuncausujet des hommes libres; et Montesquieuen conclut que c'est entre les reines de Gontran et de
Chartcma~nc que les hommes libres ont acquis le droitde posséder un nef, ou ce qui, dans mon opinion,signine !a même chose,–de s'offrir comme compagnonsa un roi oua un autre ~rand.Maisjc ne vois pas commentcela s'ensuit, a moins que l'on ne commence par l'ad-mettre d'abord. Je veux un instant supposer !c contraireet nous verrons si cette différence des deux actes de par-tage ne s'explique pas tout aussi naturellement. Si desle commencement de la monarchie, par conséquent avantContranet de son temps,Phomme libre avait le droit de sedonner au seigneur qui luiconvenait, il était partaitcmcntsupernu d'introduire une disposition a cet é~ard dans !ctraite de partage d'Andc!y. Il n'y avait pas lieu d'insérer,Atitre de droit nouveau, que, si un homme libre se don-nait à Gontran ou a Chihicbert, il devenait son vassatet était soumis a ses ordres; comme le vassal ne recevait!e nef qu'a la condition d'accompagner son seigneur a la
guerre, et que cette condition liait le premier à la pcr-
(i) Lesterresque possédaitun hommelibre, nonà titrede <!cftmaisdepropriété~appei~cnt~/cM.r.Touteslesterrcaétaientdoncoudesaitcuxoudes(tcfs.
St!R LA HËVOUJTiUK FRANÇAISE. 2~9
ou
sonne du second, il ne pouvait pas être le passât d'un au-
tre, ni recevoir un Hef d'un autre. C'est ce qui résultait
de la nature de la chose, sans qu'il y eut besoin pour cela
d'aucune disposition nouvc!K\–Mnis ces mêmes hommes
hbrcs, (lui devenaient vassaux, possédaient des atteux.
Commeces alleux étaient octruyessans aucune condition,
on ne pouvait non plusles assujettira aucune ;i!s demeu-
raient intacts aux propriétaires. Lorsqu'un homme libre,
qui possédait un alleu sur te territoire de Contran, de-
mandait un nef a Childcbert, il ne pouvait plus, d'après la
nature même de la chose, posséder de nef sur h: territoire
de Contran; mais son ullcn devait mi rester. Chitde-
bert et. Gontran en venaicnt-its a se taire la guerre en
vertu de son alleu, il etnit ob!~e de servir sous un comte
de Contran; en vertu de son serment de vassal, il devait
immédiatement son service a Chitdebert. il ne pouvait se
partager; te nef avait l'avantage, parce qu'il attachait im-
médiatement sa personne a la personne de son seigneur;
mais comment Contran pouvait-it y trouver son compte?
Porter atteinte au droit de propriété de l'alleu, et Ictrans-
fcreraquelqucautrc qui lui aurait fourni le service miti-
tairc qui y était attache,– cela ne lui était pas permis.
Il devait resuhci' de 1Atoutes sortes de qucreUcs entre les
rois.Trcs vraisemblablement, les pr'decesseursdcCl!a!'tc-
magne avaient cherche a supprimer l'occasion de ces
querelles, soit en portant inégalement atteinte au droit
de propriété de FaUcu, soit en attaquant, non moins illé-
galement, le droit qu'avaient les hommes libres de
prendre pour seigneur qui bon leur semblait on bien
ils avaient confisque, a Fc~al des nefs, les alleux qui se
trouvaient dans leur territoire, quand le propriétaire de
ces alleux avait pris un autre prince pour seigneur ou
CL~SIDEHATtONS250
Ltcn ils avaient dc~.ndn A tous ies possesseurs d'alleri~cessurtcurhTritoir~de dh.ish- unuutrcscignc~-qu'cnx-n.cmcs. Avurti par i'~p<L-n~ du pass6, ChapesJ«~a nc.-css<(h-(rintcnHrc etc/ ce tjHic<anduj~ interdite.et ce que sc~ prud~u~cm-s, prives du ecHe cxpurtcnce~u pavaient su~cr tnh'niirc. -On prit en~ae~u~pu.ptu )Hh.autre !Hesurcpuur éviter ces cuHisio~ euh-c!c devoir atiacht'' au H.'i'ct 1~devoir aHachc a i\d!cu; il~t pennis par des dispositions cxpr~ses, q~ l'un H-uuvccttCL-sdans Montesquieu,du fah-crcinpiir par ~) auH-eteservice attachu a t'aitcu.
Ainsicette circonstat.ccnuprouve pas/Montcsquieu~mats tes termes de t'ordonnance prouvent co/~re lui, e~
renversent absolument son système. Celui qui a perdnson seigneur est appete /c aussi t)h)n (jnccelui qui n'en~jamais ~n. Qnctaitdonc te t'cu.tatair<:ayam ta mo~ deson seigneur; ctait-it dcja /~? I,a toi te noin~c, sousce rapport, vassat. Ll.ommc libre n'est donc pas seute-ment appeic par opposition aux < maisauss~par opposition et en réalité, dans la consti-tution primitive, personne n'était ~oins libre que le feu.clataire, comme nous l'avons vu plus haut dans Tacite.Comment donc ye~-on chercher une noblesse iterédi-taire, Ja où par ta mort de son sonneur, le fcudat~reperdait, même pour sa propre personne, sa qua~évassal, et rentrait dans classe ordinaire des hommes ti-tres? Com~en~ pourrait-on croire qu'il y a eu quc~uechose de ptus élevé qn'~ homme libre, Ici ou piusno-ble devait toujours s'attendre a tedcvenir?ï';st-ce quep~'hasard il aurait été depouitte de sa noblesse par la mortde son seigneur? Apres une preuveaussi décisive, on ne
SUIt L\ HKVOLUTtON FBANÇA!SE. 2M
devrait plus, a mon avis, ajouter un seul motpour déten-
dre ce système.Jonc manque pas (te respect ~Montesquieu, lorsque,
montant sur tcsepmucs de ce ~rand hotnme, je crois cm-
hrasscr, ~r:lcc a lui, un horixun plus ~t<'nuuqu~ !c sien.
C'est un spectac!c (dus instructif qu'a~aMe de voir un
des plus grands hommesde la r~pub!iqu<;d<'stettrcs en-
trains, précisément par ses immenses connaissances et sa
prodigieuse pénétration,~ (h''t'endrcdes opinions précon-
çues dont ces quantes !e (tevraicnt préserver.
Nous ne trouvons pas encore ici de noblesse heredt-
taire de droit nous ne trouvons même pas de ~'<~</«-
/< attachées au titre de frère d'armes
immédiat d'un roi, sinon celle qui résultai nécessairement
delà fraternité d'armes, la part an hulin. –Les conqué-
rants firent des lois, et il était présumer que leurs com-
pagnons d'armes et de table neraicnt particulièrement fa-
vorises. Celuiqui avait meun homme tibre ou un affranchi
payait 200 scheuin~s a la famille du défunt, celui qui
avait tué un fidèle du roi, en payait600(1). C'ctaitia sans
doute un privilège mais pour en conclure l'existence
d'une noblesse héréditaire de droit, il faudrait prouver
que certaines famiUcstibrcs étaient exclues de la qualité
(t) ~o~~t~.t'ût'sffpnene songeraid uoUeschcHing.C'~i' une
monpa!cdonti! t~cstpasn~c~ahe de (h~crminer!nva!otn'. uaHS
rcspr:tde t'imctcnncconstimtton(voy.TMCtte,chap.21).un meurtre
notait pas consid~r~commeune )<;s!onfititca r~tat. maisscutcment
&la famille,on, en !'absRnccfh;la famille, au seigneur,ou
quandla v:ctimccta!tun csctavc. au propr!<!tah'e.Lafamille,te
seigneuroule propmUah'cavaitle droitde rPprcsaiHPs.Cedroitfut
rachetéau moyendecessommes(tëtermincespar t.)loi.t'iustard,le
meurtriercomptaitencorete tiersde cettemncndc.souste nomde
/fedM~(Fn'e~en),autribunalqui arrangeaitt'atïaire.
CONSIDÉRATIONS252
a laquelle it était attache, celte (te M~ urc'cst toutjustc le contraire qui est prouve. C'était doncunprivilège purementpersonne!, (pu disparaissait de la fa-nntic après ta mort du fcudatairc; le perdait lui-mêmepour sa personne, quand son seigneur mourait avant lui,et il ne trouvait aucun moyen de se faire admettre dansla suite de son successeur. Un tel était un tcudaiairede Chartcmagne celui qui t'aurait tué aurait paye600 schellings. Chartes meurt, et notre homme nepas ou ne pas devenir feudataire de Louis le Débon-naire, et il s'appellemaintenant, suivant la précédente or-donnance de Chartes, un homme Il est tué. Combien,d'après la loi précédente, son meurtner a-t-il a payera
Ils avaient en dehors de cela si peu de prérogativesdevant la justice, que tout noble qui avait intenté une ac-cusation a un esciavc et qui l'avait appelé A un combatjudiciaire, était ob~e de se battre au bâton, Apiedet avecune chemise sur ses armes (<). est a présumer que tenisd'un compagnon du roi, élevé peut-être sous les yeuxdu roi dans les exercices des armes, se chargeait volon-tiers de l'onice de son père, et que le roi ne le confiaitpas aisément a un autre qu'a lui. 11entrait ainsi dans lesdroits que son père avait possèdes, parce qu'il était lefils de celui-ci, mais par suite de son ~'o~'c dévouementau roi. Le souvenir des services rendus par les pères
(i) Voyezt\!ontes<m:eu,liv.28,ch. où il cite sonamot-he.li ya u~M dansletextede Beaumanoir,et celanepetitsignifier
qu'esclave.Touthommetihre~aittenudefaireleservicede!aguerre,tors!~me qu'il n'ctahpasfeudittaite.etparconséquenti)étaitcxcfcédanslemaniementdésarmes;ii n'yavaitquel'esclavequi fûtexcludu premiercommedu dernierCen'est pas id le lieude dcmontrerpar lalanguecettesigniiiMtiondumot.
SUR LA nÉVOLUTION FRANÇAISE. 25:
devait sansdoute engager les rois, te libre choix leur étant
donne, a choisir tes descendants d'hommes connus et
célèbres, de préférence a des familles inconnues et étran-
gères; mais aucune loi ne les y obligeait. Les plaintes sur
l'abaissement des anciennes famines et sur l'élévation de
familles inconnues et étrangères, ces plaintes qui avaient
déjà retenti sons quelques ~'o~ et qui étaient
devenues plus viveset plus ameres sous Louis le Débon-
naire et sous Charles leChauve, n'avaient donc point pour
objet une violation de la constitution de l'empire, vio-
lation que d'ailleurs les vassaux; déjà devenus puissants
et indépendants, n'auraient certainement pas soufferte
elles n'accusaient qu'un défaut do mémoire et de re-
connaissance, quand elles ne se fondaient pas simplement
sur la jalousie et l'orgueil des nobles.
Cependantle peuple, perdant de plus en plus son esprit
de rapine et de guerre, s'était accoutume peu a peu &
jouir pacifiquement de ce qu'il avait les fiefs étaient
~'c, ils devinrent enfin /c~ et tout le système
fut bouleverse. Auparavant la qualité de frère d'armes du
roi était la cause du néréides prérogatives personnelles;
chez le premier qui Ac~ un fief de sonpère, la pos-
session du nef fut la cause de la qualité de frère d'armes
du roi et des prérogatives personnelles qui y étaient atta-
chées. Auparavant, le service de la guerre donnait <zM
<~en' le droit d'exiger un /?e/; maintenant c'était le
nef qui donnait le droit d'exiger le ~r~'cc de
la ~<w.–L'héritierdu fief' héritait en même temps
des obligations qui y étaient liées, et, seulement c~c~M
ces des prérogatives personnelles qu'elles
entruinaient. Alorsseulement il y eut une noblesseet qui
/~a des ~w~ ce qui forme le double caractère de
CONS!DÉnAT!ONS2~
notre moderne nobtcsse. Ce n'est d'aiiteurs que de r~mamere et sous ces conditions qu'un pcupte, si barbarequ d fut, pouvait admettre que l'on héritât de quoiquechose qui, de sa nature, ne peut être que
et ne saurait être transmis, je veux dire desobligations et des droits. On les attacha, ii est vrai aquelque chose qui se transmet par héritage, maiscelui qui n'en voulait pas se trouvait an'ranchi de tout~obh~Hon, et H r..non<;ait a toute prérogative. Celaétait permis a chacun, ïe droit de contrat restait intact.
au contraire, qui t'acceptait, acceptait aussi lesobh~ons qui y étaient attaches, et cela non par uneconvention tacite, mais par un pacte tbrmel.-par te~
~AM~1, lequei avait pris ta place du serment de
dévouement 1 usité dans les t-orets. A ces ob~-ationsetatent attachées des prérogatives personnci!es, dont itn'avatt pas en que~tuc sorte hérite avec le soi du nefmais qu'il avait repues en se chargeant des obligionsauxqueUes cites étaient liées, et par conséquent nonpoint en mais par c<
Telle est Ja première de notre no-blesse héréditaire de droit; mais nous sommes encore bien
élo~nesdecettenobtesscetic-menie.La~ncdot~naît pas encore la noblesse elle donnait le et ie nefdonnait d'abord ia noblesse. Lorsqu'unvassat immédiat dei empn-eavait plusieurs n!s et qu'un scu! d'entre eux he-ntait (!u Hcf, seul aussi cetui-ci héritait de ia noblesse.Ordmairement ce dernier donnait Asesfrères des partiesde sonhef, à titre d'arrierc-uefs, et dés lors ils devenaientt
f~Am<«J.
~AMU~Ct'j.
SUR LA HÉVûLt~ÏON t'~ANÇAISE. 2&5
ses vassaux, comme hn-rncme était celui du roi. Mais
nous aurons bientôt occasion de revenir sur ce point.Pour remontât' jusqu'à la naissance (!e notre noblesse
actuelle, qui croit hériter des privilèges, non pas indirec-
tement, au moyen de quelque chose qui se laisse trans-
mettre par héritage, au moyen de terres, mais im-
médiatement en vertu de la naissance, non pas parl'effet de certaines obligations particulières que l'on a ac-
ceptées, mais indépendamment de toute obugation,il faut remonter a une époque aussi obscure que corrom-
pnc, ou dominait l'ancienne barbarie, moinsses anciennes
conséquences, et ou l'on construisait avec les restes d'un
système que l'on avait depuis longtemps renverse jusquedans ses fondements.
Ces fiefsprimitifs, dans toutes les contrées de l'ancienne
monarchie franquc, se subdivisèrent a l'infini en d'autres
fiefs qui leur étaient subordonnes. Chacun d'eux devint
un arbre qui poussa des branches ces branches a leur
tour poussèrent des rameaux, et ces rameaux, des feuilles.
Tout vassal se procurait des arrierc-vas~aux, et tout ar-
nêrc-vassa!, d'autres arrière-vassaux, anh de pou-
voir, ~racc a leur puissance, résister a son seigneur im-médiat et s'en rendre indépendant; aucun ne pressentit,ce que l'expérience ne tarda pas a lui apprendre, que ses
Vassaux tourneraient bientôt contre /c~' seigneur cette
puissance qu'i! tcur avait appris a tourner contre /~«.
Le plus grand seigneur, l'empire, perdit d'abord ses
forces; tes nefs immédiats le suivirent tes uns après les
autres, selon leur plus ou moins grande étendue, et l'af-
faiblissement gagna ainsi !es fiefs médiats, puis d'autres
plus médiats encore. L'empire se divisa en autant.
d'États qu'il avait de grands nefs; puis ceux-ci en autant
CONS!DKRAT!ONS250
d'autres États qu'ils avaientde ue<ssubordonnas, et ainsi
de suite. Le libre possesseur d'alleux, qui n'était ni le
seigneur ni le serf de personne, et qui avait vécu jusque
!< sous la protection de l'empire, perdit son appui des
que celui-ci perdit sa force, Il n'était pas assez puissant
pour se protéger lui-même; son alleu n'était pas assez
étendu pour qu'il put se procurer des vassaux en.le par-
tageant; il <taitdom; force de s'attachera un parti puis-
sant, de transformer son alleu en arrierc-fiefdc quelque
grand uefroya!, et de l'y incorporer. Ainsi tous lesatleux
devinrent peu a peu des nefs, et l'empire qui depuis long-
temps déjà avait perdu sa première possession, ie uef,
en te rendant héréditaire, perdit aussi sa dernière.–Une
fou!e d'hommes libres avaient perdu leur liberté dansles
troubles et les guerres dessiècles précédents celui qui
l'avait conservée jusque-là, et qui n'avait pas assez de
biens pour racheter la demi-liberté qui lui était encore
permise, la perdit alors infailliblement; il n'y eut plusdé-
sormais que des ~c~'c~ ou des ~'<s il n'y eut
plus d'~o~~M /<
Depuisque des lois et des tribunaux avaient été établis,
les seigneurs avaient le droit de rendre la justice dans le
ressort de leur fief. Ils donnèrent a leurs vassaux des
prérogatives analogues a celles qu'ils avaient eux-mêmes
devant les tribunaux de l'empire, on nomma cela leur
<?o~'(1) et ces vassaux, a leur tour, en urent autant
pour les leurs, quand ils en avaient. Le royaume eut ses
(i) LaCour,pa~t~ de !c nomde con~)o~«~, purtcqnc)on désignaitun aMesseurd'un tribunalimmédiatdel'empireoùic<<vassauxdela couronneétaientju~es,par oppositionau comte,
quijugeaitau nomde lacouronneteshommeahhrcssur leurtaiieux.
SUR LA RÉVOLUTION FHAK(:A!SK. 257
nobles, et toute petite seigneurie eut. tes siens ("!). Les
comtes, ju~cs des hommes fibres sur les alleux, avaient
depuis longtemps perdu le'droit de rendre la justice,qu'ils
avaient exerce en cette qualité; il n'y avait plus
d'alleux. Ils s'étaient eux-mêmes approprie les comtes par
voie d'héritage, et ils en possédaient peut-être la plus
grande partie a titre de hef. Tous les tribunaux étaient
des tribunaux féodaux,et devant ces tribunauxtous les pos-
sesseurs de tiefs (mi en dépendaient étaient nobles. Il n'y
avait donc que des nobles et des esclaves; il n'y avait
point alors une troisième condition.
Cette noblesse qui était uinsi tt'(''smédiate continuait
toujours de reposer sur la possession d'un nef. Les pos-
sesseurs de nefs étaient désignes d'après leur nef; il n'y
avait point de noms de famille (2). Ceux des descendants
de vassaux qui ne pouvaient recevoir de nef retombaient
dans leur obscurité; il n'y avait rien (mi put les faire re-
connaître; il est impossiblede dire ce qu'ils devinrent,
(t) Detacetteexpressionlespairs, p~'M,pourdésignerlesvas-
sauximmédiatsde t'cmpireet tesnoblesde l'empire.Ceux-ciétaient
égauxentreeux; ils occupaientte mêmerang.t.enobtemédiatet
cetuiqui étaitencoreplusmédiatne !curOaitpaspgaidanstcurssci-
~ncuneset leursarricre-ticfs.
(~) Personne,je rcspt're,ne ni<a cela,pourpeuqu'ii connaisse
t'itistoiredes nationsgermaniques.Les nomsde Mérovingien!de
Cartovingiens,de Capétiensontctc invcntt'splus tardpar les histo-
riens pour tacommoditéde ieursrécits.Merovec(il estptesumabte
queChiodwigne connaissaitpassesancêtresau dcta),Kari,Capot,
étaientde v<'ritah)csnomspcrsonncts,etLouisXVtavait!e droitde
ne pas voutoirqu'on t'appctatCapet.)!~ qu'it n\'t.ut ptusroi de
France,it n'avaitplusd'autrenomquesonnomde baptême.Nulroi
ou nul princesouverainn'ena d'autre roi.duc, prince,ce nesont
pas desnoms,maisdestitresquidésignentdesdignités.17
CONS!f)ÉRAT!ONS258
wo~s-. La noblesse do naissancen'existai pointencore, lorsqu'une chose insigninantc, uneplanche peinte, la produisit.
Les grands vassauxélevaient dans !curs cours les en-tants de leurs feudataires nu milieu des exercices mili-taires. Ces cours devinrent peu A peu plus brillantes etplus p-alantes l'esprit de ia chevateric s'éleva, et avec luiles tournois. Joardedefer de ia tête aux })icds,Je chevaliercombattant voulait se iaire reconna!tre par ({uetquesi~ne,et, après divers essais, i! eut recours a une ima~c peintesur son houdier. Quand une fois il s'était illustre par desactes de bravoure et de force, cette ima~c prenait quoi-que chose dcsotennet pour sa postérité. Le point de l'fd-liement des i:uni!!cs était trouve, et celui qui n'héritaitrien de son père, en héritait du moins t'ima~e peinte surson bouclier, et souventaussi cite servait a le désigner.–Les noms de nos anciennes famines aHemandes viennentou bien de !eu:'s anciens ~efs, et dans ce cas on peutordinairement citer des viiia~esou des châteaux du mêmenom ou biende leurs armoiries, et alors l'analogie estvisible; aussi la science importante qui traite des armoi-ries tes appeitc-t-cHe alors des armoiries parlantes. –Lenom était a cette époque tire du blason. Dans les tamiUcsrécemment anoblies,c'est le contraire qui arrive le blasony est souvent tire du nom.
Cependant un changement important s'était aussi opcr~dans la guerre. Autrefois il n'y avait que les hommes li-bres qui aHasscnt en campagne. Maintenant le nombrede ceux-ci, qui étaient devenus nobles, -avait consi-dérablement diminue, tous ceux qui n'avaient pu devenirnobles étant tombes dans l'esclavage; en revanche, lenombre des guerres avait beaucoup augmente, car tout
SUH L\ nÉVOLFTtON FRANCAtSR. ~59
vassal, si petit qu'il fut, taisait la ~ucrn\ Levassal h'plus
lissant n'aurait pas pu résister a ses ennemis,s'il n'avait
conduita laguerre que ses nobles feudataircs; a plus forte
raison le possesseurd'un petit village, qui pourtant avait
aussi ses guerres. I.es paysans serfs furent alors assujettis
au service militaire. Les vassaux les p!us puissants songè-
rent a employer, dans leurs guerres, comme chefs de ces
serfs, ceux (!cs enfants de tours feudataires auxquels il
n'avait point de nefs à distribuer, et qui étaient exerces
au métier des armes; et, vraisemblablement, en échange
de ce service, ils tour accordèrent, a leur cour et devant
leur tribunal, les privilègesde leurs véritables feudataires.
Cela tourna en habitude et bientôt ceux mûmesauxquels
personne n'avait expressément accorda ces privilèges, se
les attribuèrent comme quelque chose qui allait de soi
nul ne pouvait ou ne voulait remonter a l'origine et
ainsi naquit cette opinion superstitieuse que l'on pouvait
acquérir immédiatement, par le fait même de la naissance,
des privilèges et les autres hommes.
.Favais montre dans le chapitre précèdent que cela est
impossible en soi, puisque cela est en contradiction avec
les droits naturels et immuables de l'homme; j'ai établi
dans le présent chapitre que cela n'a existé dans aucun
des anciens Etats et même, pendant un certain temps,
dans aucun des nouveaux, et que ce préjuge n'a pas été
fonde par la constitution politique, mais que l'ignorance,
l'abus, l'usurpation l'ont insensiblement introduit.–Mais
passons maintenant en revue, l'une après l'autre, toutes
les prétentions de la noblesse 1
Ils élèvent d'abord une prétention sur notre opinion
ils veulent être tenus pour des ~ens de qualité. La no.
blesse des anciens peuples imposait <~atcment al'nt'inion;
CONSÏDKHATIONS260
.'cet e~ard, h nouveue s'accorde en gênera! avec e!ie'nais, (tans I'esj<ece, cUc s'en distingue d'un manière trèsrcmar~uabte. Je suis nob!e, nous dit le moderne~mdhomme. QueUe dinercnec, un Romain senommait un Drutus, un Scipion, un At~pius, ou quandCnnon s'appelait ie n!s de MiMiade! Des actions c~~d'hommes ~M~- se représentaient a!ors a l'esprit dupeuple, devant iequci it se nommait, et se rattachaient a'homme qut en renouvelait Je souvenir par son nom oupar celui de son père. Mais quc!ic idée eveiUc
mot et courus d~ ~? !t n'exprime du moinsnen de
clair.-Lorsqu'un moderne ~emiihommc nou~d.t son nom :je suis monseigneur de X"\ ou monsei~neur'!e ~u monseigneur de ii n'en est pas et nousn en sommes pas ordinairement beaucoup plus avancesNous sommes en
ancrât beaucoup moins verses dansnotre histoire na!iona!e, que les anciens peuples ne~tatent dans ta ieur, parce qu'on nous empêche, autantquepossib!~ de prendre pari auxanaires pubHques;''t en tous cas ce que nous savons excite notre sympathie
nn bien moindre degrc, parce que ordinairement i! iam<-nte tort peu. Quand donc nous connaîtrions trèsexactement ies actions des aïeux de Ja famiitc de X'" oude !a iamittc de Y' –que saurions-nous? Peut-être quecelui-ci a n~ure dans un tournoi de l'empereur Frede-
~ne cet autre a pris part a une des croisades; quedans les temps modernes un troisième a été un ministre.~mmc y en a tant qu'un quatrième a été gênera! commetnut d'autres qu'un cinquième a conclu, comme ambas-sadeur, un traite d'échange au sujet de quelques viHa~s,ou qu'it a dt~a~ une province donnée en ga~c; qu'unsixième s'est bravement comporte dans te!Je ou tpHe at-
si'K L\ nnvom'rtONFnA~çAtsH. 2<M1
faire.–Très bien. MaisCM~?/ s'cst-il donc si bravement
comporte? Ne peut-on connaitre quelques-uns de ses traits
de bravoure, et en savoir !es circonstances? Que de
questions! HnHn il s'est bravementconduit, cota est rap-
port'' dans telle ou telle chronique. –Je ne connais pré-
sentement aucun pays, sinon peut-être tes Etats prussiens,où la désignation de certains noms eveitte de grandes
idées. J'entends nommer unKeith, un Schwcrin, un \Vin-
tcrfetd. Alors les actions des tteros de Frédéric (pu ont
porte lemême non! se représentent a monesprit; etjesuis
désireux de savoir si par hasard l'inconnu descend de ces
grands hommes, et s'il marche sur leurs traces. Mais
aussi, dans Famé du pbitanthropf, ce souvenir eveitte
bientôt un sentiment pénible, quandil son~e/jow~M–
ces grandes actions ont été faites. D'aineurs les héros
de notre histoire n'ont presque pas de physionomie; elle
n'a pour les braves, pour les fidèles et pour les habiles,
qu'un moule ou cite lescoule tous. Desque nous en avons
\u un, nous les avons tous vus. La faute en est-elle a nos
héros ou a nos historiens ?
Elle en a toujours été un peu aux héros, et dans tes
derniers temps tout a fait. Tout a chez nous sa règle
déterminée, et nos États sont des horto~es ou tout va
comme il a été une foisrègle. La libre volonté, te carac-
tère individuel n'a presque pas d'espace où se développer,et il ne saurait en avoir; il est superflu, il est nuisible.
Aussi un bon père ou un bon précepteur cbcrchc-t-il
soigneusement a prémunir contre ce funeste conseiller te
fils ou l'élève qu'il destine aux affaires. Chaque tête est
laborieusement façonnée sur le patron conventionnel de
son siècle.–« « Pourquoi donc, demande l'élevé, cela
est-il ainsi? cela pourrait être autrement pourquoi n'est-
<:o~sH)KH.i'h)fss26~
eu pas autrement? <- Tais-toi, lui repond un maître
prudeut; cela est. ainsi, et doit être ainsi, parce que c'est
ainsi; et pour peu qu'il renouvellecette leçon, il per-suadera son ('-levé,et a l'avenir celui-ci s'abstiendra desoi] et à 1'ivuiiit~ct~ltii-ci (le
ses incommodesquestions. –Chex les anciens, cen'étaient
pas seulement certaines personnes qui avaient leur carac-
tère; il y avait même des caractères de famine très forte-ment accusés. Onsavait d'ordinaire assez exactement ce
qu'on devait attendre d'un homme portant un certainnom. Les patriciens voulaient-ils un rempart inébranlablecontre les troubles populaires, iis avaient recours a un
Appius les Appius étaient tes ennemis nés de la puis-sance populaire. Les Romainssouhaitaient-ils !a chute de
l'oppresseur de la liberté, ils écrivaient a leur héros« Tu dors, Brutus, ~)et ce nom si~nincatif de Brutus endisait plus que les plus lon~sdiscours. C'était l'omce hé-
réditaire des Drutus d'anéantir les usurpateurs. Sous le
gouvernement d'Auguste, il n'y en avait plus; autrement,il n'aurait pas longtemps ëo"verne.–Pourriez-vous me
dire quel est le caractère de famille de MM.de X' de
V", ou de Z' et ce que je puis en attendre au juste,quand on m'en nomme un?
Ennn, différence capitale entre la noblesse d'opiniondes anciens et la notre, et qui ruine tout a fait la causede cette dernière, l'ancienne était donnée, la nôtre est
reçue; la l'opinion se déterminait librement, ici elie estcommandée. L'ancienne noblesse ne se distinguait paraucun si~ne visible le noble romain portait ses troisnoms comme les portait le moindre citoyen; les imagesdes aïeux étaient une chose privée; elles demeuraientrenfermées dans l'intérieur de la maison, et ne la quit-taient qu'une fois, a la nmrt de leur possesseur, non pas
SL'RL.\ RMVOLtJ't'tONFR-tSf: 263
pour promettre <mp'pb' vêtions semhttddes a cetk's
de !a carrière qui venait de (un' mais pour t engager a
comparerte défunt a ses ancêtres. LesHumainsm; reven-
diquaient point (te phis grandes marques d'honneur on
des titres particuners dans la s~cietc, et ils se mon~'a~n~
d'autant phts popnhurcs qu'Usc~ucnt.plus nobtcs c~qu'~s
dcsh'atent davantage rctever ia nuhtcsse de tcnr race par
de nouvcttcs d~ni~s. Cututnctt est <hth';rcn~la condmtc
de nos ~ntUshounucs lls se (iistmgucnt de nuus autres
jusque par leur aorn; et, envet'm de ce seul nom, ils
exigent, preierabtemcnt, a de yer~abh's di~n~es, la
préséance et des marques d'honneur toutes parUeutieres.
Ils ont moins droit que les premiers a l'opinion ~uhuque~
et ils s'imaginent supptecr, par refh'ontene de lum's pré-
tentions, aux motifs de respect qui ieur manquent. Mais
Fopinion ne se laisse pas commamter, et eue se vcn~e cle
quiconque la traite contrairement a sa nature. Dans te
temps ou les patriciens ressembiaient a notre noblesse,
ils étaient en butte a la bainc des autres classes et aux
railleries les ptus amercs; mais, des (m'i!s lurent rentres
dans tcurs iinntes et qu'une autre nobk'ss~ la nobtesse
d'opinion, eut pris la ptacc de la prcnnerc, eUe ne fut
plus, que nous sachions, raiiiee eu baïe des Romains. Mais
quoi est le sort de la notre? Depuis qu'oHeexiste ctqu'd
existe des monuments de la façon de penser des siècles,J
elle a toujours été un objet de crainte, de haine et de
n~oxipns amercs de la part des autres fasses. Les mo-
narques mêmes ont cherche a dégrader et a anaibhr ce
qui était pourtant leur uniqueappui, et cequi om'ait a nos
yeuxune gradation naturcHe vers une hauteur qui ne l'est
pius. t)ans notre siècle, enfin, on en est venu a ce puiut
que le ~entithomme, qui n'est que cela, ne peu.t parvenu'
CONStD!~T!OKS26A
qu'a forced'humilité a se-faire accepter dans les cercles des
citoyensnotantes, des savants, des négociants, desartistes.M. Rehbcr~, le dig:ne défenseur d'un pareil état de
choses, est d'avis, il est vrai, que lus descendants deshommes remarquables doivent être honores ~'M'((C'est une citosc collée~ la qualité de noble, dit-il (1),
la noblesse de son objet ne parait pas avoir beau-
coup ennobli son tan~'c, que les ancêtres dei'hommc noble aient fait partie autrefois des citoyens con-sidérâmes du pays. H peut arriver qu'i! souille cette
dignité par ses vices, comme il l'honore par sa vertumais il ne saurait la détruire, a moins qu'il ne pousse !eschoses si loin, que l'exécuteur des !oishrisc~<<son hiason et abohssc son titre. )) Mais(titcs-moi, je vous
prie, cette ~'<y~, si c'en était une, est donc maintenantdétruite? Lorsque t'cxecuteurdes ioisa brise ic biasonde ce personnage (2), i'homrnc cluiétait sonpère ne t'estdonc plus, et le père (te cet homme n'est plus le même-
ses ancêtres ont donc cesse d'appartenir aux hommesconsidcrabtes du pays, et les choses arrivées ne sont donc
plus arrivées? Cette dame de la cour raisonnait plus jus-tement que M. H. !orsqu'e!!e disait « Dieu le Père ne
peut pasm'ôtcr ma naissance.? Oupeut-être notre hommeveut-il dire autre chose que ce qu'il dit ree!temcnt, etn'a-t-il péché que par défaut de précision? Cela est bien
possible, si l'on en juge par les autres endroits ou il acommis cette faute. Il dit plus haut « Un ancien noble,
Voti/?ecA~M~en.Es klcbt.
(1) Page6/t.
(2) Singulierex<!ct)tcurdes lois,queceluiqui briMdesblasond<'sapropremain.
SUH LA imVOLU't'JON FR.f:AtSi- 265
dont les ancêtres ont appartenu, depuis des centaines
d'années, aux premiers du pays, est revêtu d'une dignité
fort respectable, même quand sa personne ne l'est pas. i>
« Aucunmonarque du monde (de la terre, sans doute?),
dit-il plus l'as, ne peut épater il un ancien nobtc celui
qu'il anoblit; il ne saurait commander aux hommes
d'honorer celui qui s'est eteve lui-même a l'état de cet
autre, en qui ils honorent toute une ancienne race. )) H
semble donc parler de ta dignité que donne l'opinion pu-
blique. H n'y a pas, d'après son propre aveu, d'ordre (pu
puisse communiquer cette dignité, mais une sentence
peut l'entcvcr; on ne saurait nous commander d'honorer
quelqu'un, mais on peut nous défendre de cesser de l'ho-
norer. Voita, certes, une profonde philosophie!–Tra-
duisons-le cependant aussi bien que nous le pourrons.
Cette dignité ne doit mmement, ce semble, dériver de la
libre opinion, elle doit être légale la loi seule, et non
une décision arbitraire du monarque, peut lui donner ce
caractère; elle doit en général se fonder sur la constitu-
tion nécessaire de la société civite. « Celle-ci ne se
compose pas d'individus qui seraient nés e~aux entre eux,
co~c dans ï~ /M~c~ dit-il avec sa convenance
ordinaire, les yc~p.s ~~M~ ~</ /)~M/
~c//ï~ ~.c ~c~ ~aw/ ils ~c~/ ~o~,
deviennent par c~.y-c~ c~c c/ï ~M~<; elle
se compose de souches. » S'il en est ainsi, cet ancien
noble dont l'exécuteur des lois de M. Uehber~ a brisé le
blason, ne doit pas moins être honore après qu'avant; car
il continue d'être de la même souche. Mais tout cela
n'est que fiction et que vaine sophistique. Nous n'hono-
rons jamais personne /M?'~c /< Le respect ne
se laisse imposer ni par la constitution politique en ~e-
co~stomvnons26U
neral, ni par une décision particulière du tnonarquc ilse donne lihn'mcnt; et il est vrai qu'il se porte aisémentsur la postérité d'un homme de mérite, ({uand elle nes'en rond pas indignp par sa propre conduite. Autrement,cite est méprisée, même sans que sa noblesse ait e~ ju-ridiquement altolic. Une décision formetle de ce ~cnrepum'raitavuirtoutan plus pour cfte~dc ~'aircconnaitrc
puhii({uc!ncnt le crime du coupabtc, en h; prouvantbéatement mais la simple expression des taits accompa-gnes de h;urs preuves produirait ic même etTctsur 1 opi-nion puhtiquc. Quand n~mc un ancien nobie aurait ctc
dcpuuiitc (le sa noblesse par un despote pour avoir har-diment résista a un ordre injuste, nous ne i'en esti-merionspas ~M'~ pour c~a nous rcn estimerions ~t~.
~e. Tant la nobiesse, dans t'opinion pubtique, dépendpeu des sentences et des choses tendes
I! n'y a ni plaisir ni honneur se mesurer avec unécrivain amptci la nature a refuse ie tahmt d'être ce qu'itvoudrait bien être, un ebiouissant sophiste, et. qui, par iapensée et l'expression, appartient aia dernière classe desauteurs, a cette classequi ne laisse derrière elle que celledes folliculaires; et certainement je me serais dispensede cette triste besogne, si par son ton tranchant cet au-teur ne semblait être parvenu a se taire ranger, par quel-ques lecteurs bencvojcs, dans la première classe des écri-vains de l'Allemagne. Nous promettons, en revancho, ànos lecteurs d'éviter soigneusement, daos la suite do cetécrit, de le rencontrer ~ur nutre chemin. Mais, pourrait-on encore objecter, si ~ous ne saurions être légalementobligésd'honorer dans notre cceur la postérité des grandshommes, parce qu'il s'agit la d'un sentiment intérieurqui ne dépend pas de nous; peut-être n'est-H pas impos-
SUHI. nÉV()!T!ON~ANÇÀtSH. 267
sible d'admettre l'oldigation de leur rendre corHunes
marques ('xterieures (te respect, qui sont certainement en
notre pouvoir; les autres peuvent. L'trc juges de l'ac-
complissement de cette obngation.–Sinousdeinandions
a quoi servent des marques extérieures de respect, dont
il est.impossible de savoir si elles ont ou non leur source
dans un sentiment de respect in~ricm', il n'est guère
présuma!~ que nos noht''s tettondraicnt t KHesnous
eruretiennent au moins dans ccHcdcucc iHusion(me vous
nous honorex, bien que pcu~H'c vous nous mc~t'isiczau
tond du cœur.~ –On ne saurait assigner (t'antrc nn !'tces
marques extérieures de respect, sinon que, connue Hpeut.
y en avoir d'autres disposes à honorer les nobles pour
leur seule noblesse, nous nu les troublions pas dans cette
bonnedisposition. Si /io~ ne voulons pas les honorer, nous
ne devons pas non plus vouloir détourner, par nos façons
d'agir, ceux qui seraient peut-être tentes de le )airc;
nous devons au contraire inspirer aux autres, par notre
conduite respectueuse envers les nobles, co respect que
nous ne pouvons pas leur accorder nous-mêmes. Ou
bien c'est ici une question de prudence et il s'agit de
savoir s'il est utile (lue certains rangs dans l'État soient
spécialement honores, et en particulier que la naissance
ces rangs; mais la solution de cette question
n'appartient pas au présent ouvrage, qui traite simple-
ment dn droit, et non de l'utilité; uu bien il s'agit ici
d'une question d'équité, et l'on demande si, les mérites
dc~grands hommes ne donnant a)eurs descendants aucun
droit notre estime, il n'est pas au moins conforme a
l'équité que nous leur facilitions~autant qu'il est en nous,
les moyens d'être honores. Or cette question rentre cer-
tainement dans notre plan, et nous conduit en gênerai a
CONStDÉnATiONS263
rechercher ce qui résume (!e ht noblesse d'opinion parrapport a notre conduite envers les nobtes.
« .!c suis noide, a cela veut,dire souvent mes ancê-tres ont vécu, pendant un grand nombre de générations,dans une certaine aisance; moi-même j'y ai été accou-tume des mon enfance, et j'ai acquis par !a une sorte dedroit a vivre plus commodément que vous autres, quin'y êtespoint accoutumes. –J'ai dit: souvent, et non pastoujours; car i! y a des provinces,que je ne puis nommer
ici, où iesnobh's ont commencé bien din'éremment, et.ouleur jeunesse s'est passée au milieu des p!us vi!cs occu-
pations, dans i'ordure et ia misère. Ou Lien–ces
paroles je suis noble, veulent dire = mes ancêtres ontvécu dans une certaine considération parmi mes conci-
toyens j'ai étc honore a cause d'eux dans mon enfanceet dans ma jeunesse; je suis accoutume il être honoré, et
.je veuxmaintenant me rendre honorable par moi-même;mais ce n'est pas non plus ce qu'elles signifient dans les
provincesouics pères cu!tivent dansl'obscurité une petiteterre de leurs propres mains.–Si elles ont quelque partces deux sens, qu'en conclure? Que nous devrions hono-rer un homme pour la considération et l'aisance dont a
joui sonpère, et t'entretenir a nos frais danscette aisance?Non sans doute. Tout ce que t'en peut dire, c'est qu'il est
plus vivementexcite que nous autres a conquérir Faisanceet l'illustration dont il est accoutumé de jouir, et qu'itdoit employer toutes'ses forces pours'é!evcr au-dessus deses concitoyens. Sa naissance pourrait donc être tout au
plus une lettre de franchise pour son ambition soutenue
par ses talents et ses forces propres. Mais,je le demande,a qui ces talents et ces forces supérieures qui tiennent ala personne, ne donneraient-ils pas cette lettre de fran-
Sm LA !VOH!TtON FRAN~A!St': 269
chise, même sans la naissant? Qu'il se serve, aussi bien
qu'il le pourra, de l'opinion publique, afin d'entretenir
par ce moyen une supériorité que ne lui donne pas sa
force pt'rsonncttc, nous chercherons a bon droit a rabais-
ser cette supériorité: nous sommes en guerre ouverte, et
chacun se sert de ses armes; le vaincu doit savoir sup-
porter son échec. Quand deux hommes doues de ta-
lents e~aux et d'une égale force, maisdont l'un appartient
a une famille illustre, tandis que l'autre est d'une nais-
sance obscure, quand ces deux hommes se disputent la
même dignité dans l'état, !c premier peut-il exiger que le
second lui cède la place? A-t-il le droit de lui dire tu as
moins besoin d'une place élevée que moi qui ai a lutter
contre la gloire de mes aïeux pour toi une place inté-
rieure est bien sunisante? Si c("dernier lui répond re-
pose-toi sur les lauriers de tes ancêtres; le respect du
peuple no te manquera pas; moi, on ne m'honore que
pour moi-mcme j'ai a racheter l'obscurité de toute ma
race, il faut que je travaille pour tous mes aïeux qui n'ont
rien fait; lui donnerons-nous moins raison qu'au pre-
mier? Pour moi, je pense qu'aucun des deux n'a raison.
Que chacun fasse ce qu'il pourra; le hasard ou la supé-
riorité décidera (le la victoire.
« Je suis noble, » cela peut encore signiiicr mes
parents ontt. vécu au milieu d'une publicité qui les
obligeait a se montrer fermes sur les principes de la
loyauté et de l'honneur. en un lieu plus élevé que
les autres, ils ne pouvaient commettre aucune mauvaise
action sans attirer sur eux les yeux du monde, sans être
découverts et punis. Commeils ne l'ont pas été, il est
a présumer qu'ils n'ont rien fait de deshonorant. Cesprin-
cipes transmis de père en fils, travers unelongue série,
C()NS!t)ÉHAT!ONS270
et devenus en quelque sorto pour la famiHcun bien héré-ditaire, sont enfin parvenus jusque moi. n est p!us su!'d'attendre de mo! une cumtuite honorable et sans tache
que (les gens dont on ne sait pas dans quc!s principes ilsont été élevés. C'est ainsi que nous arriverions cequ'on nomme le ~o~ < de !a noblesse.
Cette espèce de sentimentdc l'honncur.que !a noblesseregarde comme son patrimoine exclusif, est un reste de
temps et de m~urs qui ne sont ptus les nôtres elle a puproduire autrefois de grandes choses; mais quelque utilitéqu'elle ait pu avoir dans!e passe, elle n'en a plus aucuneaujourd'hui; elle est dans notre monde une ctran~rc, quilie sait pas se tenir a sa place et la garder. Tous lespeuples nouveaux qui ont port6 dans leurs premiers es-sais de constitution politique Ïcur vocation pour Fêtât denature, ont placé toute la vertu dans le courage et laforce. Il en fut ainsi chez les anciens Grecs,il en fut ainsichez les peuplades germaines; et il en sera encore ainsilorsqu'un jour les sauvages du nord de l'Amérique for-meront des Etats. Les sentiments opères par cette vocationétaient d'aiUcurs rcenemcnt suuïsants dans ces simplesorganisations politiques. Mépris du mensonge, de la ruseet de la bassesse modération a l'égard de ceux qui sontsansdéfense, générosité envers les faibles, tels étaient cessentiments. Ëieve, devenu homme et vieilliau milieu desdangers dont il avait toujours triomphé, le cœur duguerrier barbare était inébranlable, et il dédaignait toutesles voies tortueuses, parce qu'i! ctait sur cle parvenir ason but, malgré tous les périls, en suivant la ligne droite.
1 Bl&rliebhaberei.–Fichte lui-mêmetraduitcemot,entreparen-thèses,parrépressionfrançaise;)o~ fr/tonncur. (j, n.)
SUR ï. RÉVOLUTION FHANCAtSR 8~i
–Des qu'un peuple s'élève a h jouissance de la paix et
des arts, ses besoins se muttiplient, et avec eux les tenta-
tions. Plusieurs chemins se présentent pour dépasser les
autres. Le sent courage ne sumt plus; il faut encore de
la prudence, de la souplesse, cle la condescendance, une
patience calme et persévérante. Le guerrier barbare aura
sans doute d'abord de !a peine a se taire a ce neuve! ordre
de choses la prudence lui paraîtra ruse !a souptessc,
platitude la condescendance, bassesse mais peu a peu il
en viendra Ade meilleures idées. Qui tui garantit même
que son ms ou son petit-ms, moins bien prépare, ne sera
pas entrame au delà de l'étroite limite, et ne tombera pasdans les vicesque son aïeul plus barbare redoutait et fuyait
déjà dans les vertus voisines de ces vices?Les fondements
sur lesquels reposait ce sentiment de l'honneur sont au-
jourd'hui arraches il n'y a plus qu'un château cle
plaisance, la où s'élevait un édifice sotide et vénérable.
Celui qui dit: je n'ai pas tait cela, donne une pleine satis-faction a celui qui se croit on'cnse tel était le -sublime
principe de vos pères. En parlant ainsi, même quandil l'avait fait, il lui donnait encore, d'après les idées du
temps, une satisfaction bien terrible il se rabaissait si pro-
fondément au-dessous fie lui, que la crainte le poussait a
mentir devant lui. Il était déshonore devant son propre
sentiment qu'avait ai~uis~ la pratique cletoute une vie si
son mensongevenait a se découvrir, il était marque devant
le mondeet lapostérité d'une nctrissure plus profonde quetoutes celles d~vos stigmates. Kt un tel principe pourrait
encore trouver son application, aujourd'hui que l'on se
pardonne si aisément tes uns aux autres d'avoir embelli
la vérité et adouci sa rigueur, ou non-seulement un su le
pardonne, mais on l'on va jusqu'à s'en vanter Telle est
CONSIDÉRATIONS
Pourquoi7 (J.n.)
la vraie dinerence entre le sentiment de l'honneur dansrançonne noblesse et celui de la plus grande partie cle lanôtre: !a première lie voulait rien /c qui fût ignoble,la seconde ne veut pas laisser qu'eue fait quelquechose de paroi!; celle-là était nere, celle-ci a trup de va-nité pour pouvoir l'être. Depuis qu'il y a des cours etdes courtisans, et des intrigues de cour une noblessede cour, combien reste-t-ilde famillesqui pourraient dire
qu'aucun de tours aïeux n'a eu recours a de vils moyens,{~la uatierie, a !a bassesse, au mensonge, et n'a jamaisdepouiHedes ~ens sans défense pour donner a sa maisonune partie de cet eciat qu'eHcsanichent si volontiers?Noussavons Lienque vous êtes toujours prêts a transpercerquiconque prononce un mot mal sonnant pour vous; mais
prencx-vous-cna votre siècle, si, de cette délicatesse de vos
oreIHes, nous ne concmuns pas cette de votre sentimentmorat aussi sûrement que nous t'aurions peut-être tait au
temp~de vos aïeux.–Jt se peut sans doute, ô rejeton d'unenoble souche, que les très honorables principes de l'an-
tique et loyale chevalerie se soient transmis jusqu'à toi,mais ii se peut aussi que tu aies hérite de toutes les prati-ques de la courtisanerie nous ne pouvons pas plus savoirl'une de ces choses que l'autre. Eh bien, nous ne suppo-serons pas ta dernière mais n'exige pas au moins quenous admettions Ja première. Vaet apis, et alors nous te
jugerons d'après toi-même.
Pourtant il n'y a pas bien longtemps encore, il y avaitdans quelques provincesdes lamifiésdont il était, très vrai-semblable de supposer la première chose, et peut-être y
Ce mot n'est pas dans le Dt'c~'o~curc <~~~c~t/e~t'c /'r~e
SU~ LA RÉVOLUTION FRANÇAISE.
on a-t-il encore; je veux parler de cette noblesse de
/'uerre que Frédéric Il (qui n'eut, point de cour, et dans
tes l~tats duquel, avant lui, il tt'y avait pas encore en de
cour a proprement parler. e est-a-dire de corruption (te
cour), tira de ses provinces tes plus éloignées et avec
laquelle il livra ses plus célèbres batailles. Emportantt
avec lui tout l'héritage de son père, l'ep6c et un nom
sans tacbc, le jeune homme se mettait en campagne, et
bientôt il respirait l'orgueil national qui animait les ar-
mées. !1se formait dans le tumulte des combats accou-
tume a partager avec ses compagnons d'armes ce que
chaque jour fournissait, sa passion ne pouvait se porter
sur la possessiondes richesses. Tous les jours en lutte avec
le danger, il apprenait qu'il n'y en a point au travers du-
quel l'epce ne puissese frayer un passage. Son courage lui
procurait tout; il se passait aisément des autres arts.
Ainsi la ncur des anciens temps reparut dans notre siècle,
comme par miracle.–Une telle noblesse est certainement
utile laoù le courage et le sentiment de l'honneur, qu'eltc
suuit a produire, ont plus de prix que tout,– c'est-à-dire
&la guerre. Ici, et tant que les guerres seront encore né-
cessaires, quiconque appartient a cette noblesse peut ré-
clamer hardiment la préséance mais qu'il ne sorte pas de
ses limites pour entrer dans un domaine étranger.
Pour conclure enfin cet examen de la noblesse d'opi-
nion,je dirai que le préjuge en faveur des descendants
d'illustres ancêtres est un bien de hasard. Quechacun use,
le mieux qu'il pourra, désavantages que lui offre ce bien
de hasard, de même qu'il tire le meilleur parti possible
de tous les autres, l'esprit, par exemple, ou une figure
agréable, ou la force du corps. C'est un libre don des peu-
ples, comme les derniers sont de libres dons de la nature.
~8
27A CONStDÉnATIONS
Cela ne lui donne aucun droit; il n'en a pastneme ah
dm'cedt'c<'{)reju~e, qu'il ne saurait ol)t('nir de forcf.
Couune cette m'idesse n'est pas une propriett' et que,
d'après sa nature même, elle no saurait l'être, tout l~tata
qui d'autres principes de prudence font souhaiter qu'elle
disparaisse, a part'ait<'mentle droit d'abolir, je H).'dis pascette espèce <!<:ttobicsse ('ihj-ut~HR, ce '(ui t'st. physi-
quement impossihtc l'opinion ne se commande pas,mais !csdistin<Hcnscxtcricunjs anxtptenos l'opinion s'est
attachée jusque-là. La on l'opinion publique est encore
prononcée en faveur de la noblesse, cette abolition n'agira
que lentemcn!; si elle a~it vite, c'est que l'opinion a déjàcommence a disparaître. Dosdécret de ce ~enre agissenttrès efficacement, quand ils ne sont pas nécessaires, et
fort peu, quand ils le sont.beaucoup, Il y a, pour agir sur
l'opinion, des moyens plus convenables que des décrets;
et, dans le cas présent, on peut laisser ce soin presque
uniquement a ta noblesse. Je ne comprends pas com-
ment.l'État peutdel'endre a un citoyen de portera l'avenir
un certain non), ou connnf'nt il peutdcicndrc a ses con-
citoyens de l'appeler désormais df ce nom, quand ils
sont accoutumes a le nommer ainsi et qu'ils le l'ontde leur
plein gré; je ne vois pas comment cela peut s'accorder
avec la liberté naturelle. Maisje Voisbien, co me semble,comment il peut on bien /c aux classesjusque-làInfcrieures de ne plus se sf'rvir de certaines désignationsa i'e~ard des classesjnsfpte-la supérieures, ou bien m~m''
permettre à tous ceux a qui cela fait plaisir de prchdrfdésormais les mêmes désignations. Que le seigneur dr'X' dit le chevalier, ou le baron, ou le comte de Y'"
continue d'écrire son nom, comme il l'a faitjusquo~In, on
même qu'il y ajoute encore une foute d'autres noms, cela
SUR LA RÉVOLUTIONFRANÇAISE. 275
me paraît fort peu important; mais qui pourrait faire un
reproche à l'État de permettre et de recommander à tous
les citoyensde nommer le seigneur de X'" ou le comtr
de Y'" tuut simplement M.X'" ou M.Y"\ et de leur pro-
mettre son appui contre le soi-disant gentilhomme, lors-
qu'ils useront de la permission? Ou même qui pourrait
!ui défendre d'élever au rang de nobles tous les citoyens,
depuis le plus élevé jusqu'au plus bas, et par exemple de
permettre a un pauvre pàtre de se nommer baron ou
comte, d'autant do baronies ou de comtes qu'il voudra?
Ladistinction disparaîtra d'elle-même, quand elle ne sera
plus une distinction, et chacun ae nommera d'un nom
aussi court qu'il pourra, quand la longueur de son titre
ne lui servira plus de rien. Une république aristocra-
tique connue, dont les maisons, susceptiblesde gouverner,
en partie étaient nobles et en partie ne l'étaient pas, éleva
tout d'un coup toutes ces maisons au rang de la noblesse.
Ce n'était là qu'une autre manière de supprimer la no-
blesse une distinction qui no distinguait plus était comme
abolie.
Une illustre origine excite dans le peuple un préjuge
favorable a ceux qui en sont descendus; c'est ce que nous
avons appelé la noblesse d'opinion. Cette noblesse ne peut
pasêtre exigéee//e~<~ juridiquement-,puisqu'il est dans
la nature de l'opinion de ne pas selaisser commander et i'
n'en résulte pas non plus de prétentions légitimes a de;,
priviléges réels, puisqu'il ne peut y avoir dans l'euet que
ce qui est dans la cause môme. Un noble, qui élève des
prétentions de ce genre, en doit donc être débouté.-Afin
do voir cela plus clairement pour tous les cas particuliers,
parcourons maintenant une a une les prérogatives que
revendique notre noblesse A la vérité, elle a dù, dans
CONSIDÉHATIOKS276
cesderniers temps, en plusieurs Etats, pour des raisons qu'iln'est pasnécessaire dedévelopper ici, partager aveclabour-
geoisie quelques-uns des privilèges qu'elle avait jusqu'a-lors exclusivement pussédés; mais, même dans ces États,loin de voir dans ce cas la règle même, elle continue dele regarder comme une simple exception et comme unesorte d'empiétement insoient des bourgeois sur ses pré-rogatives. Nousne calomnions donc nullement la noblesse,en rangeant même ces droits parmi ceux dont elle reven-
dique la possession exclusive. Si ses prétentions ne sontl
pas toujours satisfaites, ce n'est vraiment pas à elle qu'enest la faute. Au premier rang de ces prétentions il faut
compter celle de posséder des biens nobles'. Il est tacitede montrer l'origine d'un pareil privilége. Les biensnobles sont originairement des nefs; comme la possessionde ces fiefs obligeait à servir de compagnon d'armes au
seigneur du nef et (me la noblesse était attachée a cette
qualité, naturellement quiconque possédait un nef– etn'était pas dcjAnoble était élevé au rang de la noblesse
par cette possession même; c'estce qui résulte des considé-rations exposées plus haut. Maisaujourd'hui que les biensnobles se transmettent par vote d'héritage et sont mêmevendus a des étrangers, et qu'il n'y a plus de servicemilitaire qui y soit immédiatement attaché, il est absurde,si jamais quelque chose l'a été, que ce privilège subsiste
encore, surtout dans les États ou les biens nobles sontla seule propriété territoriale.–La noblesse assure que la
possession de ces biens est un privilège dont la conserva-tion est nécessaire au maintien de sa condition et dont la
perte entraînerait sa ruine et sa mort il faut donc que
/<<~<'r<
SUh LA HKVOUJ't'iO~ !t:A~<SK 277
ce privilège lui rapporte quelque avantageconsidéral)l<comme il est d'ailleurs aisé de le montrer clairement.
Nous laissons cle côte, comme de juste, le cas oit un fils
ne veut pas aliéner le bien qu'il a hérita de ses pères;
peut-être veut-il le conserver comme fils, comme pro-
priétaire habituel, et non comme gentilhomme chacun
a le droit de conserver sa propriété comme il l'entend.
Maisun bien noble est mis en vente; la jouissance de ce
bien est sans doute mise en ligne de compte celui qui
pourra le payer le possédera. Pourquoi le gentilhomme,
qui peut le payer, aura-t-il seul le droit de l'acheter, et
pourquoi le bourgeois, qui est aussi en état de le payer,n'aura-t-il pas également le même droit? « Le bien
noble est la manière la plus sûre et la plus avantageuse de
placer son argent, et cet avantage doit être exclusivement
réserve à la noblesse, afin qu'elle puisse soutenir son
éclat. –-Vraiment? Ainsi le même thaler rapportera plusentre les mains d'un gentilhomme qu'entre celles d'un
bourgeois? Il aura plus de valeur dans les mains du pre-mier que dans celles du second? Millethalers, possèdes
par un gentilhomme, sont l'équivalent d'un certain quar-tier de terre; mais cesmêmes mille thalers n'en sont plus
l'équivalent, quand c'est un bourgeois qui les possède?Je ne veux pas rechercher ici ce que devient le besoin
d'acquérir la ou il est interdit précisément aux classes
du peuple qui offrent le plus d'acquéreurs de placer leur
argent avec sûreté, et c'est là évidemment le cas dans
les États où tous les biens francs sont des biens nobles
que la noblesse seule peut posséder. Je ne rechercherai
pas non plus ce que deviennent le partage des richesses
~f<~U<<'r.
CONSIDÉRATIONS278
et la sûreté de la propriété dans les familles oit le citoyenest obligé cle hasarder son capital dans un commerce tou-
jours incertain, ou de le prêter d'une manière tout aussiincertaine et à des intérêts exorbitants; mais je ne puism'empêcher d'admirer la profonde politiquede nos tempsmodernes, auxquels était réservé le secret d'ajouter au
si~ne universel de la valeur des choses une valeur parti-culière tirée de la personne du possesseur, et de faire
qu'une somme augmente ou diminue suivantqu'eile passed'une main dans une autre. Cette critique ne sounre
d'exceptionque dans les pays qui ont des caisses provin-ciales où ta noblesse trouve seule il emprunter, souvent aun très faible intérêt, sur les terres nobles qu'elle achète.L'achat des terres lui est ainsi rendu singulièrement fa-
cile, et elle ne peut manquer de devenir bientôt l'uniquepropriétaire du pays. Mais c'est ta noblesse qui a instituéces caisses de crédit. L'argent estàetto; il doit lui êtreloisible, comme à tout propriétaire, de prêter sa propriétéà qui elle veut et aux conditions qu'elle veut, et personnen'a rien a lui dire Ace sujet. L'esprit de caste et un gros-sier égoïamodominent sans doute dans ces mesures; maison ne peut pas dire qu'elles soient précisément injustes.Au moins dans ces Ëtats les bourgeois restent libresd'acheter des biens nobles, iarsqu~vec leur argent comp-tant ils peuvent contre-balancer le crédit de noblesse.Il est toujours injuste d'interdire absolument cette espèced'achat.
Maisla possession des biens nobles entraîne d'autrespriviléges, dont la noblesse est très jalouse et qu'elle nelaisserait pas volontiers tomber entre les mains des bour-geois.– Recherchons donc sans détour quels sont cesprivilègesmêmes, afin de voir de quel droit le possesseur
SURL.\ HÈVOLU'nONFKAK(.:A)SH a7p
(leces biens, qu'il suit noble on uott, y peut préleudn'
Noustrouvonsd'al)orddcsdroitssur/ducultivateur:
tes corvées déternunées ou indéterminée les droâs de
passade et de pâturage, etd'autn'ssetnbtables.~ous n'en
rccl~rciteronspas l'origine /< q~aud même nous dé-
couvririons (pl'eMeestillé~time,on n'en pourrait encore
rien conclure, puisqu'il seraiLsans doute nupo~ib~ cle
retrouver les \'ra~ descenttantsdcs p!'<!tnici'su~prc~urs
et ceuxdes premiers opprim~c~ d'indiqticr cc~dertuers
t'itummc au<;nci ils devrait s'en prttndrc. Il t:~ ~i~
d)j monH'(M'ro~cyM/deccsdrot~. Lc~ch:nnp~
ou ne sont qu'en par~Gou ne sont pas du tutu ta pro-
pne~ du cuttivateur; et cetui-ci t~ye k's iut~'o~, ~~d~
caphai du seigneur, capital qui rcp~e sur champ
.onunc MM~c (1), soit du bien tout entier, uuu pus
('n ~<yf/~ cow/)~ mais eu ~c-~ et en ~t'
qu'it abandonne au seigneur sur te t~'rain qu'il pusscd~
ou qu'it loue. Quand ces prérogatives n'auraient pas
existé ainsià rori~ine, paria ven~ des biens nohies «u de
ceux de paysan, tout revient bientôt au même. est na-
turel que le paysan paye d'autant 'no'ns pour sa portion
de bien de paysan, que les char~s qui y sunt attachées
donneraientt davantage en caph:d, si on les cotuptan
comme intérêts en argent, et que possesseur de biens
nobles payed'autant plus pour saportion de biens nobles,
que les services auxquels elle jobii~ele paysan rapportent
davantage, comptés comme capital; d'ou il suit que ce
/!cc/t~t<~prt<n~.
(i) Cononctoutle uio~dcnesaitpascela,il estUoudedirequ'on
appetic~uc~ <~~r (~r .S'u~) capitalqui repose~uru«e
terreet dontnn certaiuM~t doitêtrepuyëaupropri~hc, t~s suus
<~telecapitalpuissejamaisêtreremboursa
<SH)t~:ATiuNS280
propt'iL'tairea payé pour <-<;paysan un cajtital (jui reposesur son bien, et qu'il a le droit (t'exiger !e payement desintérêts. Il n'y a donc rien a dire <~soi contre la légiti-mité de cette prétention, et œ l'ut certainement un graveattentat contre te droit (te propriété que la conduite deces paysans d'un certain Ëtat, qui, il y a quelques années,voulurent se soustraire a ces services par la violence etsans le moindre dédommagement. Cet attentat ne ve-nait d'ailleurs que de leur ignorance et de celle d'une
partie de la noblesse à l'endroit de la légitimité de ses
propres prétentions;~ on y aurait remédié d'unemaniére
beaucoup plus convenable et plus philanthropique, au
moyend'une solidectclaire instruction, que par deridicules
dragonades (1) et par la peine infamante des travaux l'or-cés.–Mais il y a beaucoup a dire contre la ~c dontse payent ces intérêts. Je ne veux pas parler des inconvé-nients généraux des ~'M'~ après toutes les
représentations qui ont été prodiguées en pure perte de-
puis si longtemps, ou n'est guère tenté d'en dépenser denouvelles.Je ne parlerai pas non plus de la perte de tempset de l'orccs, ni de l'avilissement moral qui résulte pourl'Etat tout entier du ~p/Mc co/'u~. Cesmêmes mains
qui travaillent aussi peu que possible, à la corvée, sur laterre du seigneur, parce qu'elles travaillent a regret, tra-vailleraient autant que possible sur leur propre terre. Untiers de ces travailleurs a la corvée, si on leur payait unsalaire raisonnable, travailleraient plus que tous réuniset travaillant a contrc-cceur. L'Etat aurait gagné ainsi
(I) MLespaysans,at'tn<!sde fauxet de fourches,auraientpresquercpouss<!lacourageuseattaque;maisle lieutenantN. M~e~ ~o~.nettrdesan~ f~ M ainsiparleunpompeuxhistoriendecettegtorieusecampagne.
sm t.A hËVOUJTtU~t''h.\NÇAtSK. 2S1
deux tiers de travailleurs; les citamps seraient nneux
cultives et de plus clerapport le sentiment de la servitude,
qui dorade profondément le paysan, les plaintes (;ue son
seigneur et lui se jettent réciproquement a la tête, le
mécontentement de son tout cela disparaîtrait, et
bientôt il deviendrait un homme meilleur et son seigneur
avec lui. Je vais directement au principe, et je de-
mande d'ou vient donc le droit de vos souches de fer? Je
vois bien qu'elles sont faites pour le plus ~rand avantage
de ceux qui possèdent quelque chose, et particulièrement
clela noblesse (mi les a inventées; mais il ne s'agit pas ici
de votre ~M~c, il s'agit de votre droit. Votre capital
ne doit pas vous être enlevé cela va de soi-même. Nous
n'avons pas même le droit de vous contraindre a en ac-
cepter le remboursement en argent comptant. Vous êtes
en quelque sorte les copropriétaires de notre bien, et
nous ne saurions vous forcer a nous en vendre votre part,
si vous ne voulez pas la mettre en vcntc~Soit! Mais pour-
quoi ce bien unique est-il donc nécessairement indiv~
sible, et pourquoi faut-il qu'il reste un bien unique?
Si votre copropriété et la singulière façon dont vous la
gérez ne nous conviennent plus, pourquoi n'aurions-
nous pas le droit de vous rendre votre part? Si je possède
deux quartiers de terre, et que je n'aie payé que la moitié
de leur valeur, parce que la seconde moitié doit rester
comme votre capital de fer,–la moitié de deux quartiers
ne fait-elle pas un quartier? J'en ai donc payé un, et le
second est à vous; je garde le mien, reprenez le votre.
Qui pourrait blâmer cette conduite? -Il vousest très in-
commode de le reprendre? Soit! S'il meconvient de le
garder, faisons, pour le règlement des intérêts, un nou-
veau contrat qui ne soit plus seulement avantageux pour
CONStD~RATtONS282
vous, mais qui le soit aussi pour moi. Si nous sommesd'accord, cela est possible. Têts sont les principes (tedroit d'en l'on peut tirer divers moyensde supprimer, sans
injuste et sans attenterau droitde propriété, le système
oppressif des corvées, si seulement l'état en a !a ferm~
inteniton, si ses objections r~esont pas de simplesfaux-foyants,– et s'il neprofère pas secrètement l'intérêtde quciques priviiégiés au droit et~) l'intérêt de tous.
Pour appliquer ce même principe au cultivateur, quin'a pas la propriété de son bien, mais qui en a bue au
seigneur {'usufruit, it est bien évident qu'it a parfaite-ment. le droit de rendre !e bien, quand les corvées qui ysont attachées lui semblent injustes ou oppressives. Le
propriétaire veut-il répondant que son bien reste entreles mains du cultivateur, qu'il traite avec lui jusque ce
qu'ils se -soientmis d'accord.
Maisnon, dit!e droit traditionnel,– tecultivateur, quin'a pas la propriété du soi, appartient mi-même au soiil est tui'.meme une propriété du seigneur; il ne lui est
pas ioisihie de quitter ce bien comme il !c veut; ie droitdu propriétaire du bien s'étend jusque sur sa ~<?~o/Me.
C'est la négation du droit de l'humanité en soi c'est
l'esclavage dans toute la force du terme. Tout homme
peut avoir des droits sur tes choses, mais nul ne sauraitavoir de droit irrévocable sur la personne d'un autre
homme chacun a la propriété inaliénable de sa proprepersonne, comme nous l'avons suuisamment montré danscet écrit. Tant que le serf veut rester, il le peut; s'il veuts'en aller, leseigneur doit le laisser partir, et cela en vertude son droit. Ce seigneur ne pourrait pas dire J'ai payé,en achetant le bien, un droit de propriété sur la per-sonne de mes serfs. Nul n'a pu lui vendre un pareil
SUR LA HÉ~OLUTÏON FRANÇA!SR. 28~
droit, car nul ne l'avait. S'il a paye quelque '-hose
pour cela, il a 6t'~trompe, et c'est Al'acheteur qu'il doit
s'en prendre.–Qu'aucunÉtat ne vienne donc se vante!'
de sa civilisation, tant qu'il laissesubsister un droit aussi
indigne de l'homme, et que quelqu'un a conserve 1<;
droit de dire a un autre: ~M~'<~ (~).
Parmi les prorogatives que la noblesse voudrait possé-
der exclusivement, et qu'oue voit a contt-c-cccurentre les
mains de lu bourgeoisie, il faut ranger toutes !nshautes
positions dans le ~rvernement et dans rurm6o. U n'y a
pas de fonction dans t'Ëtat qui soit une pure laveur,
pourvu qu'eue soi! une fonction reetteet non une vainc pa-
rade, pourvu qu'cHe ait été établie pour le besoin de
t'Ëtat, et. non dans l'intérêt cle celui qui en est revêtu;
c'est une lourde charge que l'État placesur les epautes de
l'un de ses citoyens. Plus cette fonction est importante,
plus est évident le droit qu'a l'État de veiner la nomi-
nation de celui qui doit la remplir; plus est mre la reu-
nion des talents qu'elle exige, plus doit être large le cer-
cle où il devra choisir; ou, s'il n'exerce pas directement
(<)Deux Ëtats voisins avaientconclu un traité par icquei iiss'cn~"
geaientasc rendre réciproquementies soldai qui auraient (léserté. Dans
les provinces qui servaient de !in)itea a cc.sdeux ~ats existait ie ser-
vage,ie droit de propriété Surla personne (lu pi'y~n. !t arrivait paUbia
qu'un malheureux, pour échapper à t'inhumanité de son seigneur,
franchissait la frontière il était libre, d!"<qu'i! t'avait tonchôe. Cela
était ainsi depuis tongtemps.l.es seigneurs des deux Étatss'emprcMe-
rent d'étendre le traité aux paysans. Un serf, entre autrca, qui avait
quitté le pays pour avoir dérobé une couplede grappes de raisin, fut
livré par FEtat voisin, et mourut des suitesdes coups de bâton qui
huèrent arbitrairement adtninian'és etcela se passait, ii y a qud-
(juei)années, dans un ~t qui se donne pour le pius ëelairé de l'Alle-
magne1
<:<~SH)HHATJOKS28/t
le droit de choisir, mais par l'intermédiaire d'un reprc-sen!ant, Ha {dcincment le droit d'exiger que ce choixnusoit borné que par le nombre des citoyens. –Mais,dira-t-on, ne pourrait-on établir un cercteplus étroit d'hommeschoisis parmi iesquets on prendrait les p!us importantsfonctionnairesde ri!tat? Je reponds: sans cloute ce!apeut être, et cela aurait <'noutre des conséquences très
avantageuses en rendant!c choix plus facile et Ja nomina-tton plus prompte, quand il s'agirait (le pourvoir auxfonc-tions vacantes; mais, dans ce cercle même, qu'est-cedonc qui devra déterminer le choix? Ce ne sera pas lanaissance, si l'on consulte le véritable intérêt de i'Ëtat;car sur quel principe se fonderait-on pour établir qu'avecune égate culture d'esprit, et tel est évidemment au-jourd'hui, dans laplupart des Ëtats, le cas de la meilleurepartie de la bourgeoisie comparée a la noblesse, teshommes de talent et d'honneur ne peuvent.sortir que decertaines maisons, et que les descendants de toutes lesautres familles sont, auprès des premiers, de faiblesesprits et des cœurs vulgaires? Parmi les défenseursde la nohlesse, personne jusqu'ici, du moins ai con-naissance, n'a poussé l'impertinence jusqu'à soutenir pa-reille chose. Le choix dans ce cercte restreint de citoyenschoisis et destines aux plus importantes fonctions det'Htat, ne pourrait donc se fonder sur rien autre chosequesur !'habi!ete et la fidélitééprouvées par des services an-térieurement rendus à PËtat dans des fonctions moinsimportantes, et nous en reviendrions a notre premièremaxime touchant la nomination des fonctionnaires. Toutefonction plus étevce devrait avoir été méritée par uneloyale et habite gestion des fonctions inférieures. Ce droitqui appartient.à PËtat de choisir les plus capables pour
SUH LA RÉVOLUTION FHANÇAÏSË. 285
l'exercice de ses fonctionspubliques, et de les tirer, sui-
vant sa conviction, du lit fouh' entière de ses citoyens,
aucun Statue l'a abdique, et aucun n'a pu l'abdiquer sans
aller contre son but et sans se détruire lui-même.–Mais
que tait donc une caste d'hommes qui s'attribuent exclu-
sivement la capacité d'être choisis pour ces fonctions?
Admettonsque cette caste choisisse en toute conscience le
plus digne de ceux qu'eue renferme, il ne suit de la ni
que cet homme soit en général le plus digne entre tous
les citoyens de l'Etat, ni que, même dans sa caste, il
paraisse le plus digne aux autres citoyens. Si cette caste
constituait seule la somme de tous les citoyens n'unis, sa
conduite alors serait légitime; mais elle se conduit comme
si elle formait a elle seule toute la somme des citoyens,
et par conséquent l'État. Que sont donc les autres ci-
toyens? Évidemmentun État distinct subjugue et arbitrai-
rement gouverne par le premier. Un tel privilége ne fait
pas seulement de la noblesse un État dans l'État, un État
ayant un intérêt distinct de celui des autres citoyens il
anéantit mêmeabsolument, dans la série des citoyens, les
autres classesdu peuple il leur enlevé leur droit de ci-
toyens, et les transforme, dans leurs rapports avec ces
fonctionspubliquesoù nul d'entre eux ne peutétre nomme,
en esclaves arbitrairement gouvernes. Qu'est-cedonc
qui est injuste, si cela ne l'est pas?
~ous ne calomnions point la noblessc.~vouloir qu'on
choisisse uniquement dans son sein, vouloir fournir les
citoyens e/ c'est là sa prétention immédiate;
vouloir choisir elle-même, vouloir fournir aussi les
citoyens électeurs, c'est une conséquence qui résulte
directement de cette prétention, dès qu'elle est satisfaite.
Qui donc nomme aux plus hauts emplois de l'État? Qui
COKStD~RATIONS28~
donc pourvoit aux postes vacants? Les princes qui con-naissent leurs ~ens par eux-mêmes sont rares. Il leur
serait impossible, mcsseant et même préjudiciable de
pénétrer dans le détail des diverses branches de l'admi-
nistration de l'Etat, de connaître exactement et d'observerles membres intérieurs des corps publics. 11l'aut qu'ils en
abandonnent le choix.aux membres supérieurs, lesquelssont capables déjuger de l'aptitude de leurs subordon-nes. ~i ces membres supérieurs sont nobles, et s'ils
sont animes de l'esprit de caste propre a leur ran~ il~
écarteront de toutes les positions, ils </<~< en écar-
ter, d'après leurs principes, quiconque n'est que bour-
geois, tant qu'il y a nn noble qui les désire. La noblesse
est, a cet e~ard, son propreju~c; et, a mesure qu'au~-tn''nte le nombre des nobles qui ont besoin des revenus
des l'onctions publiques, le cercle des nobles positions
s'élargit au ~rc de la noblesse. C'est ainsi, par exemple,
que dans quelques Etats la noblesse s'est depuis peu em-
parée des places de maîtres de poste et des plus hautes
positions de i'E~lise protestante, lesquelles jusqu'alorsavaient été laissées à la bourgeoisie. Quelle est dune icila limite de la noblesse? Elle n'en a pas d'autre que celle
de ses besoins. Et quelle est sa loi? Uniquement son bon
plaisir. ~'il y a encore des places données a de simplesbom'~jois, ils ne le doivent qu'~ ce bun plaisir. Plus lu-cratives et plus honorables~ elles n'arriveraient pasjus-qu'&eux. –Je n'avance ici rien de nouveau, rien qui nesoit prouve par l'expérience de chaque jour. Y a-t-il une
place de conseiller vacante dans le département du gou-vernement,de la justiceou des finances ncul'fois sur dixau moins c'est un noble qui l'obtient. Et comment seferait-il donc que dans le nombre trois ou quatre l'oisplus
SURLÀRÉVOLUTIONFHANÇAtSE. 287
considérable des bour~ois ~p~iont travaille ta moitit''de
leur vie dans ces fonctions en qualité du secrétaires, il
lut si rare d'en trouvât' un capable de les occuper, tandis
qu'un en trouverait si aisément dans le nombre l)caucoup
plus peut.des nobles secrétaires qui n'y <mttravaille tnm
peu lie temps? l~st-ceque tes places ne seraient pas don-
nées d'après ta mesure de la capacité? Aussi bien des
nobles conséquents ne mettent-ils pascette re~le en avant
ils soutiennent qu'eues ~uc/~ ctt'e données d'uprus ia
naissance, et c'est justement ce qui nous sépare je sou-
tiens que toute ibnction dans l'Etat doit être donnée
d'après la supériorité du mérite < Ne me dites pas quele bout'ois, arrive aux phts hauts eruptois pubncs, se
laissera dominer il son tour par l'esprit de caste, et uu'itcherchera il élever des bourgeois l'exclusion des nobles
plus dignes, par cela seul que ce sont d'~s bourgeois. Je
ne sais pas s'il ne le icrapas; je n'en voudrais pas ré-
pondre. Mais d'où vient donc cette séparation entre les
deux classes et cette partialité des deux côtes, sinon de
vos prétentions antérieures, que je poursuis précisément
ici? S'il n'y avait jamais eu ni nobles ni bourgeois, si les
uns et les autres n'avaient jamais été que des citoyens, ni
le noble ni le bourgeois ne pourrait pretercr son égal,
puisque ~s seraient ses égaux.
Il y a là une injustice directe envers l'Ëtat. Je veux
montrer, sans y insister, une autre injustice indirecte,
qui resuite de cet état de choses.– Celuiqtti s'applique
à une branche des anaircs publiques, recevant un salaire
souvent miserabtc et qui est le même pour lo fonction-
naire actii et pour celui qui ne l'est pas, est trop peu sti-
mule a consacrer toutes ses forces a son emploi. Il faut
mettre en avant un mobile plus puissant; il faut que
CONS!DÉRAT!ONS288
chacun voie briller devant lui, au-dessus de la place qu'ila ohtenue, une position plus élevée, qui sera le prix des
services qu'il aura rendus dans celle qu'il occupe mainte-
nant. Mais, quand te bourgeois s'est élevé aussi haut. quela constitution lui permet de monter, truelleposition plusélevée voit-il devant lui? S'il n'est pas stimulé par de p!us
puissants mobiles. par la vertu désintéressée et l'amour de
la patrie, mobiles auxquels un bourgeois n'est pas plussensible qu'un noble, l'Etat perdra, outre le surplus des
forces de la noblesse, laquelle est en tous cas assurée de
son avancement par sa naissance même, cette somme
de forces que notre bourgeois pourra bien se dispenser
d'appliquer a ses fonctions actuelles.
Cela n'est nulle part aussi évident que dans le servicemilitaire. S'il y a quelque part une noblesse capablede montrer dans sa famille, comme un bien héréditaire,les sentiments rudes peut-être, mais puissants, de l'an-cienne chevalerie–qu'elle ait exclusivement droit, dansles Etats militaires, aux places d'oniciers Que si la vie de
cour, une connaissance superficielle des sciences et. peut-être mêmele commerce ont enlevé a l'esprit clelanoblesseson ancienne puissance et lui ont donné une souplesse
qui laplace sur le même rang que la bourgeoisie,–qu'elleconserve cette fonction sublime, mais qui exige peu de
rénexion.de manœuvrer, à droite ou à gauche, de se faire
présenter les armes, ou, quand il s'agit de choses plus sé-
rieuses, de tuer ou de se faire tuer. Peut-être le bourgeoislui cédera-t-il volontiers et sans envie ce privilège en
échange de fonctions plus importantes auxquelles il s'est
préparé par une plus forte culture. Maisadmettre le bour-
geois a la profession des armes et lui interdire toute es-
pérance de s'élever aux grades supérieurs, comme ceta
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE 289
a lieu dans plusieurs États, c'est, dans la constitution
toute particulière de cette profession, quelque chose de
souverainement absurde.Était-il possible a l'esprit te plus
inventif d'imaginer un t~lusprofond abaissement de la
bourgeoisie, que de lui persuader qu'on l'égalait a la
noblesse dans ce que celle-ci croit avoir de plus saint,
tandis qu'on ne la plaçait acôt<~d'elle que pour lui donner
le perpétuel spectacle de sa propre bassesse? que d'obli-
ger, dans une profession où la subordination s'étend a
tout, le capitaine bourgeois commander a un enseigne
ou a un ncutenant noble et a répondre de sa conduite,-
alors que tous deux savent trcs bien que, quelques années
plus tard, le noble sera le supérieur ou le général du
capitaine bourgeois?Dans un état qui exige des sacrifices
que l'honneur seul peut payer, conuncnt lebourgeois qui
est arrive au but le plus élevé se sentira-t-il encore encou-
rage il renouveler ces sacrifices?
Maisil faut aider lanoblesse, repctc-t-on; et c'est pour-
quoi nous la trouvons dans les places qu'elle occupe ex-
clusivement et dont la possession suppose une preuve de
noblesse. Deuxmots encore, avant de finir.sur la question
de savoir pourquoi et jusqu'à quel point il faut lui
venir en aide 1 -Après avoir montr6quc, si l'on doit lui
venir en aide, ce n'est pas en lui attribuant la possession
exclusive des places qui exigent des talents supérieurs,
cherchons maintenant ce qui reste encore pour l'aider.
Nous rencontrons d'abord Ics~ce~e c/M/~6', dont un
nombre détermine' ne peut être occupé que par la no-
blesse. Je ne parle ici que des fondations protestantes.
Quant aux fondationscatholiques, dont les membres sont
de véritables ecclésiastiques, j'en dirai ce qui est neces.
saire dans le chapitre suivant.- On np saurait dire pre-19
CC~S!DÉR~t)p(S290
cisément qu'il y ait besoin de talents particuliers po
occuper eu ~enre de jdaces; ce n'est, dune pas par cette
raison que l'un peut conteste!' Alanoblesse tu droit de les
posséder exclusivement, comme op peut. le taire pour l~s
hautes foncions de l'Etat. Maispent-ctreyen a-t-il d'autres.
Quand on remon~ a l'origine de fondation de pt't~
que tous les ~raud~ ~tapitr~, '4 'nêu)p c)c ~us, dat~
rAHeînagnc pru<.es~tt.e,–on tronv~ quu (eur unique hu~
jetait ~entretien des hounnes charnus dp rinstructjou et
de la cuiture du peup~–etcn c~iaun avait jcvidemmunt
en vue le bien de f~taL ~ous n'ayons point ici cher-
cher de qui.venaient tes bien~ qui ~ryircnt a ces funda-
tions. La plupart étaient )e i~t du conquérant qui avait
tait vioiencc au droit de propriété; ou hien~ dans~'un
temps ou il n'y avait pas enopre d'Etat nxe et de droit
d'hérédité déterminé, ils n'avaient pas eude propnetairc.Il sutïit qu'Hs ne tassent point partie des biens de la no-
biesse, qui at.ors ne formait pas encore une classe parti-cuhére dansFi~tat, a moins que toute spoliation ne lui
appartienne de droit –et qu'il (l'y ait pas a craindre de
les voir réclamer par les anciens et légitimespropriétaire~Dupar leurs descendants, qui ne pouvaient pas hériter
avant l'étabhssement du droit d'hérédité: –ils ont été
donnés pour le bien de l'état à l'Etat lui-même, et par
jconséquent ils sont devenus légitime propriété, c'est-
A-dire celle des citoyens réunis.–De profondes ténèbres
se répandirent sur les nations, et l'i~Iise, qui est tout
autre chose que l'État, et qui, parce qu'eHerépandajf par-tout les ténèbres, se croyait l'institutrice d" peuple s'cm''
para de cette propriét.é. ~a déformation, qut dé~ru~it
l'Mc, dans le vrai sens de ce mot, dont nous e~p)j-
querons plustard la si~nincatton,– la rendit l'état, ~Qn
SUR LA RÉVOLUTtON FRANÇAISE 201
premier et légitime propriétaire. Sans doute l'État avait
le droit de disposer de sa propriété. Soit qu'il pût
désormais s'en passer pour atteindre son but originaire,
ou qu'il eut des fins plus prochaines auxquelles il voulut
rappliquer, il était sans doute lu maître d'en. disposer à
son gré. Maiscomment donc une seule caste en est-elle
venue & posséder exclusivement ce qui était la légitime
propriété des citoyens réunis? Les citoyens exclus ont-ils
été consultés sur les dispositions Aprendre à cet égard?
Ont-ilsvolontairement cédé leur part a cette caste? N'ont-
ils eu de plus grand souci que d'enrichir cette caste?
Nullement. Maisla noblesse s'est conduite comme si elle
était seule tout l'État, comme si en dehors d'elle il n'y
av'nt plus.personne. 0~ conduite soit injuste et
inadmissible, et que les citoyens exclus aient le droit in-
contestable d'exiger que l'on remette le tout a la délibé-
ration commune, c'est un point sur lequel il ne peut plus
v avoir le moindre doute après tout ce qui a été dit jus-
qu'ici dans cet écrit.
i~ –je vousprie, ces biens sont-ils donc tellement inu-
tiles a l'État tout entier, se trouve-t-il donc dans un si
grand embarras sur l'usage en taire, que, pour s'en déli-
vrer, il soit obligéde les laisser Acettecaste comme un vain
ornement? L'État n'a-t-il donc pas de besoin plus pressant
que de faire dire de lui qu'il a une riche noblesse? Est-il
vrai même qu'il n'en ait plus besoin pour atteindre son
but originaire? Tant qu'il ya des instituteurs qui, pour prix
de l'enseignement direct qu'ils donnent au peuple, lan~
guissent dans la plus accablante misère; tant qu'il va
dessavantsqui sont misérablement récompensés, ou même
ne le sont pas du tout, pour les services qu'ils ont rendus
aux sciences et par ce moyen à l'instruction du peuple
CONSIDÉHATÏONS202
tant que des entreprises importantes pour le développe-ment des connaissances humaines demeurent suspendues,faute d'appui; comment la noblessepeut-elle être assexéhontée peur vouloir appliquer ces Liens au maintien d<'son rang? Telle est la vraie destination des revenus des
grands chapitres d'abord le paiement convenable desinstituteurs du peuple; puis, s'il reste quoique chose, les
récompenses accordées aux savants et les secours donnésaux sciences. Il ya encore lieu, ce semble, de les employerde cette façon.
La seconde classe des prérogatives que la noblesse pos-sède exclusivement, ce sont les c/ co~ Oubiences charges sont fondées uniquement pour donner satislac-tion à l'opinion, et il est tout. simple que l'on en investissedes créatures de l'opinion ou bien elles répondent à unbesoin réel, et non pas seulement imaginaire, du prince:elles lui donnent un entourage et des amis; ou ctuinceux-ci croient, précisément parce qu'ils sont ses amis,avoir indirectement beaucoup d'influence sur le gouver-nement de l'Etat. Dans le premier cas, il n'y a pas de
citoyen, noble ou non, pour peu qu'il sente sa valeur,qui puisse envier le sort d'un homme qui se rabaisse au
point de concourir à l'éclat d'une cour en qualité de simpleornement, et de jouer un rôle qu'une machine à paroles,bien réglée, remplirait peut-être encore mieux. Maissiles citoyens réunis s'élevaient assez haut pour pouvoirse passer de cette comédie et pour vaincre toute faussehonte en présence des autres États qui la leur donnentils ont sans doute le droit de demander pourquoi ils entre-tiendraient plus longtemps toute cette pompe, au prixde sacrifices considérables. Ils ont sans doute le droit,non-seulement d'abolir le privilège qu'a la noblesse d'oc-
SUh L\ RÈVULUTÏON FhANÇAtS! 293
cuper exclusivementces places, mais encore du tes suppri-
me!' elles-mêmes.
Quant au second but de leur établissement, le prince a
très certainement, aussi bien que tout autre, le droit de
choisira son gré ses amis et son entourage dans la société
humaine tout entière. Si son choix tombe sur des hommes
qui se trouvent être nobles, ou mêmes'il a le goût assez
bizarre pour vouloir que ceux qui font partie de sa société
comptent une longue série d'aïeux, personne ne peut le
lui reprocher, de même qu'il ne peut reprocher à per-
sonne de choisir des amis à son gré. Qu'il se fasse des
amis comme on se fait des amis, ou bien qu'avec sa for-
tune privée ou avec l'argent que lui donne l'État pour ses
besoins personnels, il s'achète des compagnons ou des
natteurs, en telle quantité ou de telle qualité qu'il le
voudra ou le pourra, cela ne regarde ni l'État ni aucun
citoyen. Mais si le bourgeois n'a pas le droit de se
plaindre, quand il plait au prince de ne choisir sa société
(lue parmi les nobles, le noble n'est pas davantage auto-
rise a l'empêcher d'admettre de simples bourgeois dans
sa société, et a lui en faire un crime d'Etat. La volonté
du prince est libre à cet égard, et il n'est pas plus permis
a l'une des parties qu'à l'autre de la limiter. 11 e~t
étonnant que la noblesse ne se soit pas aussi réservé ex-
clusivement la place de bouffon du prince, qui a une
certaine époque était assez importante dans la plupart
des cours; peut-être trouva-t-clle celles de maréchal de
cour ou de chambellan plus facilesà remplir, et fallut-il,
pour rencontrer les talents qu'exige la première, cher-
cher dans un cercle plus large que celui de la noblesse.
En tous cas, il n'est pas à son honneur de n'avoir pu rem-
plir assez bien les heures de récréation du souverain fa-
CONStDÉRATtOKS29A
ti~ué des soins du gouvernement, pour le dispejnserde
recourir un pareil moyen.Enfin ta noblesse revendique le droit de tonner exclu-
sivement la société (lit prince, parce qu'il est important
pour !e pays qu'il soit entouré de gens bien pensants. Si
cc!a était exact, il faudrait en conclure tout juste con-
traire de ce que la noblesseveuten déduire. Alors,enenet,la qualité d'ami (tu prince figurerait parmi les services
publics les plus importants, lesquels, d'après les principesétablis plus haut, doivent revenir aux hommes les plusconsidérables et les meilleurs, non-seulement de la no-
biesse~mais de la masse entière des citoyens. Mais,je le
confessed'avance et l'on ne tardera pas d'ailleurs a le voir
chèrement, j'ai peude ~oùt pour un prince dont les bons
principes et le bort vouloir ont tarit d'importance, et qu'ilfaut préserver, comme un enfant; cle toute mauvaise in-
fluence. C'est /<r qui doit gouverner par !e prince, et
il faut qu'il y soit hu-meme assujetti, Il ne doit rien pou-voir taire de ce qu'etic ne veut pas, et il doit pouvoir l;tire
tout ce qu'elle veut, soit que, comme Dieu t'exige, il la
porte dans son cœur, soit qu'i! morde !e frein qui le re-
tient et le dirige. Le prince; comme prince, est une ma-
chine animée par la loi et qui sans elle manque de vie. En
tant qu'homme privé, <7peut ou la société peut s'occuperde son caractère moral; l'État ne s'occupe que du carac-
tère de la !oi<Le prince n'a pas de société; l'homme privésèul eh a une.
Hne nous reste donc en général aucun moyen légitimede venir en aide à la noblesse. Mais pourquoi donc faut-il
lui venir en aide? Il ne sert &rieh de dire qu'elle a de
légitimes prétentions 1 cofnme noblesse, c'est-à-dire
comme partie actuelle du peuple déterminée par la nais-
SL'Ht.A RÉVULUT10NFRANÇÀISK M8
sauce car son existence même dépend de la libre volonté
de l'État. Quelle oldi~atiou a donc l'État de céder toujours
ses exigences? Si cite lui devant a citar~e, il la sup-
prima elle-même, et se trouve ainsi débarrasse de toutes
ses prétentions; car ce qui n'est pas ne saurait avoir de
prétentions. La noblesse supprimée, aucun autre corps
privilégie nR ponn'fut taire valoir a sa place de /~Y~~
nnpres de l'État; car, avant d'élever des pré-
tentions, il faut être, et il ne pourrait être sans l'agrément
de l'État. La question n'est donc pas en général une ques-
tion de c'est une question de ~e~ et l'on peut
la formuler ainsi Ë~ ~'<7 </ ~e
OM~<?~ classes /C ~M~ 7'<ï~0~de
considération èt de /~<~ ~'C/ soient~O~~ /<?.«
~0! ~)' << ~ps ~N~ ~M
<?~M; et, ~!7 P~est ~~ï~ <~ ~~p~' ~p
y~p/&~/)</ey!.s /c et c~
~9 le ~? La réponse à cette question
n'appartient pas nu présent livre.
Cu~stUKKATtOKS296
CHAPITREVi.
DE L'ÉCUSK, PAR RAPPORT AU DROIT DE RÉVOLUTION.
La diversité et le changement sont les caractères du
monde corporel; l'uniformité et l'immutabilité, ceux du
monde spirituel. Lcihnitx amrmait et prouvait, par letemoi~na~c des yeux, qu'il n'y avait pas deux feuilles
d'arbre exactement pareilles il aurait pu ajouter hardi-
ment que la même feuille ne demeurait pas deux secondes
de suite semblable a elle-même; et, d'un autre côte, ce
même Leibnitx prétendait a juste titre que cotte affirma-
tion et toutes ses assertions métaphysiques devaient avoir
la même valeur pour tous les esprits pensant juste.Parmi toutes les opinions possibles sur un même objet,il n'y en a qu'une seule, au jugement de tous, qui puisseêtre la vraie; et celui qui croit l'avoir trouvée amrme que,de tout temps, depuis le premier esprit jusqu'au dernier,
quiconque le comprend et saisit les raisons de son asser-
tion doit nécessairement s'accorder avec lui. On peut se
tromper de diverses manières; mais la vcrite est néces-sairement une elle a été la même de toute éternité, etde toute éternité elle demeurera la même. La justice oula t;~c~/i:c' est une aussi; et cette vérité, qui est
de toutes la plus importante pour tout esprit libre, est si
peu profondément cachée, que les hommes s'accordentbien plus aisément sur l'universalité et la nécessité de ses
principes en général et sur les propositions particulières
Rechtoder~r~~c/t ~o/<r.
SUh LA RËVUUJ't'tO~ t-'RAM~AtSK. ~97
qu'ils un tirent que sur les vérités t!téuï'éti(tues. La re-
connaissance de cette vérité, a laquelle il leurest dimcite
de fermer les yeux, détermine eu eux certaines espf-
rances, certaines vues, certaines prétentions, dont on ne
trouve pas la moindre trace dans le monde des phéno-
mènes, et dont ils ne peuvent démontrer la valeur ni a
eux-mêmes, ni aux autres, comme ils le feraient pour nu
théorème mathématique. Pourtant ils tiennent pour cer-
tain que tous les esprits raisonnables doivent s'accorder
avec eux à ce. sujet; et c'est là ce qui produit l'idée,
peut-être universelle, bien qu'elle ne soit pas toujours
clairement conçue, d'une Eglise invisible, c'est-à-dire
d'une réunion de tous les êtres raisonnables au sein d'une
même croyance. Mais cette Église invisible n'est elle-
même qu'un objet de croyance, et le fondement de tous
les autres articles de foi n'est à son tour qu'un article
de foi.
Commequiconque a cette foi est infinimen intéresse a
ce qu'elle soit vraie, et qu'ii n'en peut démontrer la vérité
d'une manière parfaitement certaine ni par l'expérience,
ni par le raisonnement, il saisit tout pour s'y anermir.
Dépourvu de preuves intérieures, il en cherche d'exté-
rieures. « Si ma croyance est vraie, tous les esprits rai-
sonnables doivent avoir la même crovimcc, ? tel est le
principe d'où il part; et comme il ne peut raisonnable-
ment espérer trouver, à l'appui de sa supposition, rien <!e
plus que ce qu'il a déjà, il cherche à s'instruire au moins
du côté de la conséquence. Il retourne ainsi son raison-
nement « Si tous les esprits raisonnables ont la même
croyance que moi, cette croyance doit êtrevraie; et par-
tout où s'étend son cercle d'action, il cherche a s'assurer
s'ils l'ont en effet. Commeil ne s'agit pasproprement pour
~98 CONS!DÉnAT!ONS
lui d'acquérir de nouvelles idMs, mais des preuvescomme il est depuis longtemps fixe sur la vérité <!esa
croyance ch eHc-meme, et qu'il ne vent que s'y anermii';
il ne saurait ehtendrc que ce qu'il désire <tOui,je crois
cela et, quand il n'entend pas ces pandas, it travaitic a
{.'t'rsuadertes autres, dans le seul des~'ih d'oh~rnr ~hf!n.
par ip moyen de cette persuasion, ta cohnt'mation qn'nsouhaite pour sa croyance. C'est en gênera! un pen-chant innt''dans i'homme de ten<!rcsur toute espèced'ob-
jets a t'accord des êtres pensants, et ce penchant se fende
sur cette Uniformité nécessaire du monde spirituel dont
t'idee est profondément gravée en ho~s; mais daïts
t'ordre theorëtique on se décide beaucoup plus aisé-
ment, soit .'t rester divises et a laisser la chose où cite
en est, soit même?~ substituer !'oj)ihion d'autrUia cette
qu'ona suivie jusquc-ta tandis que, dans l'ordre pratique,Hn'est pas si aise de renoncer ses idées ou de revenir
sur ses pas ici t'nn consent rarement a être instruit
par tes autres, et presque toujours on veut !cs instruire.
C'est donc un penchant nature! a l'homme de trans-
former, autant qu'il dépend de lui, en Enlise visiblecette
t~Iise universelle invisible qui n'existe que dans sa pen-
sée de chercher dans le monde sensible une représenta-tion rceUe de cette idée; de ne pas se borner croire
que les autres pensent comme lui, mais de s'en assurer
autant que cela est possible, et de rattacher au moins
sur un point son système de croyances à quelque chose
qu'il connaisse. Tel est le principe de l'union ecclé-
siastique.
L'Enlisé visible est une véritable société qui se Fonde
sur un contrat. Dans l'Église ~M' nul ne sait rien
par autrui; chacun tire sa croyance de son amc, ihdépen-
SUH LA RÉVOLUTION FRANCHISE. 2i)9
damment de tout ce qui est hors de lui. L'accord, s'il
existe, s'est établi de lui-même, sans que personne se soit
proposa pont' but de le produire. Cet ësprit-1~Seul pour-
rait savoir s'il existe, dont la science embrasserait les
modes de représentation de tous les esprits. L'Eglise
~A/p se propose pour but l'accord, et ce qui est ia
conséquence de cet accord; ia confirmationde !a croyance.
Quiconquedit a un autre ce qu'il croit, veut lui entendre
dire qu'il croit la même chose. Le premier principe du
contrat ecclésiastiqueest celui-ci /m~ ~cr~,
yc ~~e c~)~. Maiscomme, a!nsi que je l'a!
déjà remarqueJe but que nous nousproposonsdans~unioa
n'est pas du tout de rccuenHr di~ërse~opinions, ann de
nous instruire en les rapprochant et de former ht nôtre en
conséquence, mais de chercher dans Faccord de l'opinion
(tes autres avec lanôtre ta cohnrmation et rancrrnisscmënt
de ccue-ci; principe précèdent ne sunit pas pour fonder
une t~iise. Il ne faut pas seulement arrêtera les autres
diront ce qu'ils croient mais ce y~its devront dire qu'ils
croient. Le contrat ecclésiastiquesuppose donc l'établis-
sement d'une professionde foi totale, et son principe peut
se formuler ainsi A~M cr~'Ms ~M tM~c/~ /<ï
~~ïe c~c, et ~oM~ fï«~
~yc c~a~.
On trouvera peut-être une contradiction dans cette for-
mule du contrat. Nous ne devons pas taire, mais con-
hautement notre foi. Notre silence donnerait a
penser aux autres membres de i'Ëgnse, ou bien que nous
ne croyons rien du tout, ou bieMque nous croyons autre
chose qu'pM~, et il les troublerait dans leur foi. Nous
devons dire ~c~e~e~ ce que nous croyons, et ne pas
feindre une foi que nous n'avons pas. Si rËgtisc admettait
CO~DÉKA'HOMS300
que la confession de sesmembres put n'être qu'une hypo-crisie ou qu'un mouvementdes lèvres,et non l'expressiond'une conviction intérieure, son but serait par là même
anéanti une profession de foi que nous tiendrions pourfausse et hypocrite ne saurait nous fortincr dans notre
foi. Pourtant la profession de foi que nous devons faire
avec cette entière conviction est une profession de foi </c'-
~ï~~ e~y~c~c. Or, si nous ne sonnncspas convaincusde la vérité de cette profession de foi et si nous ne pou-vons pas l'être, quedevons-nous faire? Aucune Église ne
tient compte de ce cas toute Église conséquente, c'est-
à-dire toute Église réelle, doit absolument en nier la pos-
sibilité et toutes les Églises qui ont agi d'une manière
conséquente l'ont réellement niée. La première sup-
position, celle sans laquelle il n'y a pas en gênerai de
contrat ecclésiastique possible, c'est que la profession de
foi qui sert de fondement à ce contrat contient sans aucun
doute l'unique et pure vérité, que quiconque cherche la
vérité doit nécessairement arriver la, quec'est là la seule
véritable foi la seconde, qui résulte immédiatement
de la première, c'est qu'il est au pouvoir de tout homme
de produire en lui cette conviction, pour peu qu'il le
veuille; que l'incrédulité vient d'un défaut d'attention
dans l'examen des preuves, ou d'un endurcissement vo-
lontaire, et que la foi dépend de notre libre volonté. Aussi
y a-t-il, dans tous les systèmes ecclésiastiques, un </<~<w
de foi. Or le devoir n'est rien, s'il n'est pas en notre pou-
voir c'est ce qu'aucune Église n'a nié jusqu'ici. Ouvrez
le premier catéchisme catholique venu, vous y trouverez
les deux propositions dont nous venons de parler. Quant
a l'inconséquence ou tombent les communions protes-tantes en voulant être des Eglises et avoir des droits
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 301
ecclésiastiques, nous aurons plus loin l'occasion de dire
quelques mots sur ce point et sur d'antres encore.
Quelques lecteurs, s'appuyant sur certains faits,
dirai-je rce!s ou imaginaires~ repousseront peut-êtrecette assertion, que l'Église se fonde sur un contrat, en
objectant qu'elle est réellement d'origine monarchique,et que, par conséquent, elle n'a pas pour principe un
contrat conclu entre ses membres, mais la suprématied'un chef. Mais, s'il était vrai qu'originairement les con-
sciences, au lieu de se soumettre, eussent été asservies, il
en résulterait bien une troupe d'esclaves isoles, obéissant
tous au même maitrc, sans rien savoir entre eux de leur
commune servitude; il n'en résulterait pas une société. La
même croyance régnerait dans tous les cœurs, mais non
pas une profession de foi uniforme et réciproque. Il taut
au moins que deux personnes commencent a se confesser
réciproquement leur soumission et qu'elles obtiennent le
même aveu de celles qu'elles soupçonnent d'être soumises
à la même foi autrement des millions d'hommes ne for-
meraient jamais une Église. Il est sans doute physique-
ment possible qu'une Église terrestre ait pour principe
l'asservissement mais cela ne l'est pas moralement. Un
conquérant auquel rien ne résiste peut se soumettre des
esclaves, et les placer par son commandement dans un
état d'union et d'action réciproques. Les corps des sujets
et leur soumission aux ordres de leur souverain se mani-
festeront sans doute dans le monde sensible; mais qu'un
État spirituel se forme de cette manière, c'est ce qui n'est
pas moins impossible physiquement que moralement. Cet
État n'assujettit que les consciences et non les corps, et la
soumission des esprits ne se montre pas, quand elle ne se
découvre pas volontairement. L'Église !utte contre une
CDNS!DÉRAT!ON8802
diniculté bien supérieure à celle que nous avons indiquée
plus haut en disant que sa profession de foiétait prescrite,a cette diuiculté d'ou elle est sortie si aisément. Elle
ne peut atteindre son but qu'en supposant la ~c~ de
ses membres. Or, si eue ne peut s'assurer de cette sincé-
rité, si elle ne peut ajouter aucune foi a la confession de
ses membres, l'anermissement réciproque de la croyancen'a plus lieu, et tes esprits n'en sont que plus mécontents
et p!us déconcertés, Mvaudrait mieux pour eux avoir cru
tranquillement que tou~les autres pourraient bien penser
comme eux, que de se vuir chaque jour précipités plusavant dans le doute par des confessions qui n'obtiennent
pas leur confiance.
H n'y a point de tribunal extérieur pour le mensonge;
ce tribunat est tntét'ieuï'ementdans la consciencede chacun.
Celui qui ment doit rougir de ïui-méme; il doit se mé-
priser. Lorsque, dans la vie civile, nous ne pouvons
nous convaincre par i'expérience cle ia vérité ou de la
fausseté d'un fait allégué, nous sommes obligés de laisser
à la conscience de celui qui parle le choixde 1~vérité ou
d~; mensonge dans ce dernier cas, nous ip livrons à la
peine qu'il s'inflige lui-même, ou qu'il ne s'innige pas.
~eite peine intérieure, qui reste tpujoursdouteuse et qui,en tous cas, ne parait pas au grand jour, ne saurait satis-
faire unn société qui se fonde sur la sincérité et qui s'élève
ou tombe avec elhs.
JLafoi unanime, pour ainsi dire, de tous les hommes
aliène cette magistrature intérieure A un être existant
hors de nous, anju~e moral universel, Dieu. Qu'il y ait
un Dj~ et qu'il punissele mensonge, c'e~tbien lacroyance
unanime de toutes les Églises. Chacune peut donc attendre
de Dieu 19 punition de l'hypocrisie de ses membres.
SU!t LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 308
Mais cette punition divine est éloignée etie n'atteint le
pécheur que dans l'autre yie, tandis que la nn de l'élisese rapporte au présent. Puis, quand tes peines cle cette
autre vie seront distribuées, tes membres (teF~Ii~e ver-
ront bien qui leur a dit la vérité on qui a teint, une
croyance qu'il n'avait pas; mais alors ils n'auront plus
besoin de cette connrmation de leur loi qu'Us ont cher-
chée d~s une union ecctesiast-ique. Si t'incrédule est
p~ncnicnt et résolument incrcduie, il ne croit pas en
gênerai :'i Dieu, la vie iut-ure, a ia punition (te sa
fausseté; n ne craint donc point ic cha~tnent. diy~n dont
on ie pienace, et c'e~ pourquoi ii n'h~siter~ pas à l'airenne
i'au~u professionde toi, lorsqu'il ~nra d'aiMeursdes raisons
pour !a (aire. Que s'il n'est pas tout tait incrédule peut-
~tre esp~re-t-il t-rouverun accoMnnodQrne!)tay~c Pieu et
échapper par quelque moyen a la révélation et. a la puni-
tion de sa l'aussetu. De là, pour i'Ëgtise, la nécessité de
luter le châtiment, e(. comme ~M<ene peut décider Dieu
à punir plus tôt pour l'amour d'elle, de s'attribuer à eMe-
mcme ses l'onctions de ju~e. La magistrature intérieure
de la conscience se trouve ainsi de nouycau aliunée, et
cette Ibisa un ju~e qui peut rendre des sentences sur-le-
champ, à l'église visible.
Cette nouvelle aliénation de la magistrature intérieure,
cette justipe qui prend la place de Dieu, est la loi fonda-
mentale de toute Ë~lis~ conséquente; aucune ne saurait
absolument se maintenir sans cela. Ce qu'elle délie dpit
être tjelié dans le ctpl; ce qu'elle lie y doit être lïp. Sans
eelte m~istrature, elle désire en vain exercer sur les
âmes des hommes une domination qu'elle ne peut sou-
tenir par rien elle menaceen vain de châtiments qu'elle
ayoue ne pouvoir inniger; elle caisse les Immmes, après
CONSIDÉRATIONS30A
comme avant, indépendants d'eue dans leur croyance,
qu'elle voulait cependant leur prescrire; elle va contre
sa propre idée, et se met. en contradiction avec elle-
même.
Commeeue veut juger la pureté de cœur des hommes
et leur distribuer des peines ou des- récompenses en
raison de cette pureté, mais qu'elle ne peut pénétrer
dans l'intérieur des cœurs, il en résulte pour elle un nou-
veau problème, qui est celui-ci Régler sa profession de
foi de manière a voir par des effets extérieurs si l'on est
convaincu ou non de la vérité cle cette profession; en
d'autres termes, se donner a elle-même une telle consti-
tution qu'elle puisse juger de Fobéissance et de la sou-
mission de ses membres par des signes s~rs et non sus-
pects. Afind'être certaine de ne pas se tromper, elle fera
en sorte que ces signes sautent autant que possible aux
yeux. Klle y parviendra de deux manières en soumet-
tant leur intelligence à une dure oppression, et en impo-
sant des ordres sévères à leur volonté. Plus les doc-
trines d'une Église sont extravagantes, absurdes, en
contradiction avec la saine raison, plus elle peut se con-
vaincre de la soumission des membres qui écoutent toutt.
cela sérieusement, sans faire la moindre grimace, qui le
lui répètent avidement, qui s'évertuent pour le graver
dans leur esprit et qui se gardent bien d'en perdre une
syllabe. Plus sont dures les privations et l'abnégation
qu'elle exige, plus sont terribles les expiations qu'elle im-
pose, plus aussi elle a sujet de croire a. la fidélité de
membres qui se soumettent a tout cela uniquement pour
lui rester attachés, et qui' renoncent à toutes les jouis-
sances terrestres afin de participer aux biens célestes
qu'elle promet. Plus on a sacrifié, plus on se sent attaché
SUR LA HÉVOLUTION FRANÇAISE. 305
à l'objet pour l'amour duquel on a tant sacrifie. En
faisant ainsi consister les fruits de la foi dans des prati-
ques extérieures dont l'observation ou l'omission ne sau-
raient échapper a un bon oûil,elle s'est procure un moyen
facile de lire dans le cœur même. Il pourrait être dimcile
de découvrir si quelqu'un croit ou non a la primatie
de saint Pierre; mais il est plus facile de savoir s'il a
observé ou non les jeûnes prescrits par l'un de ses succes-
seurs ou de ses représentants. S'il ne les a pas observés,
sa foi a l'endroit de la primatie de saint Pierre, de l'in-
faillibilité de tous ses successeurs et de l'indispensable
nécessité d'obéir à tous leurs commandements pour faire
son salut, n'est pas sunisamment assurée, et l'Église neuf
en toute sûreté le poursuivre comme un incrédule.
De cette disposition, déjà nécessaire par elle-même,
l'Église recueille encore deux autres avantages essentiels.
D'abord, au moyen de ces mêmes articles de foi qu'elle
impose à chacun pour éprouver sa croyance, elle se pro-
cure, en les composanthabilement, une riche provision de
peines ctde récompensesdiversespour une autre vie, chose
dont elle a besoin pour attribuer à chacun, parmi tant
de membres si différents, le lot qui lui revient, suivant
le degré de sa foi ou de son incrédulité. Au lieu d'un ciel
qui serait le même pour tous, elle a ainsi d'innombrables
degrés de béatitude et un inépuisable trésor de mérites à
distribuer entre ses fidèles et ses saints; a côté de l'enfer,
elle a un purgatoire, qui comprend des peines dont la
nature et la durée varient Al'infini, afin d'effrayer les in-
crédules et les impénitents,-chacun suivant qu'il en est
besoin. En second lieu, elle fortifie la foi de ses mem-
bres, en ne la laissant pas oisive,maisen lui donnant assez
de travail. Voici un phénomène qui, au premier aspect,20
CONStDËHATIONS306
semble contradictoire, mais qui est confirmé par les plusnombreuses expériences, etdont onverra bientôt la raison
c'est que plus sont incroyables les choses dont on fait des
articles de foi plus on obtient aisément créance. Nous
nous ha tons denier une chosequi est encore assez croyable,
parco qu'eue se présente nous trop naturellement; mais
appuyezla chose niée sur une autre qui soitextraordinaire,celle-ci à son tour sur une autre plus extraordinaire en-
core et poussez toujours plus loin le merveilleux, l'homme
sera en quelque sorte saisi de vertige, il perdra tout son
sang-froid, il se lassera, et sa conversion sera faite. On a
souvent vu des hommes,qui ne croyaient pas en Dieu, se
laisserconvertir par la croyance au diable, à l'enfer, au pur-
gatoire; et ce mot de Tertullien cCelaest absurde, donc
cela vient de Dieu, est une preuve excellente pour cer-
taines gens. En voici la cause. Un esprit ordinaire
embrasse une, deux, trois propositions, dans leurs prin-
cipes et leurs conséquences naturels; il est engagé par là
Ay réfléchir, et il croit pouvoir en apprécier lavérité ou
la fausseté par des principes de la raison. Pour Fern*
pêcher d'entreprendre cet examen, vous n'avez qu'à éta-
blir ces propositions sur d'autres principes artificiels quieux-mêmes sont des articles de foi, ceux-ci a leur tour
sur d'autres, et ainsi de suite à l'innni. Déslors, il ne
peut plus rien saisir; il erre dans ce labyrinthe sans fil
conducteur; il s'enraye du prodigieux travail auquel il se
voit condamné; il se lasse d'une vaine recherche; et,
poussé par une sorte de lâche désespoir, il se livre aveu*
élément à son directeur, trop heureux d'en avoir un;
Que l'on me comprenne bien je ne dis pas que tous
les fondateurs ou propagateurs du système ecclésiastiqueaient clairement conçu ledessein d'assujettir la conscience
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 307
dos hommes par des moyens aussi méchants, quoique
d'ailleurs parfaitement conformes a leur but. Non, des
esprits timorés et déjà remplis d'enroi sont entres d'eux-
mêmes, pousses par l'instinct, dans le chemin ou ils ont
ensuite attire les autres. Ils se sont trompes eux-mêmes,
avant de tromper autrui. 6~c ~/f absurdité, a laquelle
on ajoute foi par frayeur, sans pouvoir la rejeter, en
amène une innombrable quantité d'autres et plu~ un
esprit scrupuleux dans sa subtilité se montre pénétrant,
plus il rapporte du pays des chimères une riche moisson
de rêves.–Bien que nos apôtres d'aujourd'hui n<-luttent
pas ordinairement avec ta même loyauté pour le maintien
de leur foi, de cette pure foi horsde laquelle il n'y a point
de salut, je veux leur donner un avis capable de les dé-
dommager amplement du déplaisir que leur pourrait
causer la lecture de ce chapitre. Lorsqu'ils cherchent à
défendre leur foi en abandonnant les propositions les plus
extraordinaires et en s'efforçant dela rapprocher ainsi de la
raison, ils prennent un moyen qui va directement contre
leur but. En faisant cette concession, ils donnent a penser
que dans ce qu'ils conservent il pourrait bien y avoir des
choses qu'ils abandonneront aussi avec le temps. Pour-
tant, c'est encore là le moindre dommage; mais, en muti-
lant leur systèmeet en le dépouillant d'une partie de son
merveilleux, ils en facilitent l'examen. Il était déjà en péril
alorsque l'examen en était si dimcile; commentespère-t-on
le maintenir en rendant cet examen plus aise? Suivez la
route inverse prouvez hardiment chacune des absurdités
que vous voulez faire admettre par une autre plus grande
encore; il faudra quelque temps pour que l'esprit humain
effraye revienne a lui-même et se familiarise assez avec le
nouveau fantôme, qui l'a d'abord aveugle, pour pouvoir
CONSIDÉRATIONS308
i'<;xamincrde plus près. Ce fantôme court-il quelque dan-
per, prodiguez de nouvelles absurdités, votre trésor est
inépuisable; l'ancienne Instoire recommence, et cela va
ainsi jusqu'à la fin du jour. Seulement ne laissez pas al'es-
prit humain Je loisirde reprendre sonsang-froid, ne laissez
jamais sa foi inoccupée, et alors vous pourrez défier les
portes de l'enfer deprévaloircontrevotreautorité.–Oamisdes ténèbres et de la nuit, ne regardez pas ce conseil comme
suspect, parce qu'il vous vient d'un ennemi La perfidien'est. pas permise, même envers vous, bien que vous en
usiez A notre égard. Examinez-le attentivement, et vousle trouverez parfaitement, juste.
D'après ces principes, l'Eglise juge ici-bas à la placede Dieu; elle distribue parmi ses membres les récom-
penses et les punitions d'un autre monde. On a use
aussi, dans une Église célèbre, de peines temporellescontre l'incrédulité et l'impcnitence; mais c'est là une
mesure malheureuse, née d'un faux jugement et d'une
passion surexcitée. Les conséquences temporelles desccn-
sures ecclésiastiques ne peuvent être autre chose que des
expiations auxquelles le croyant se soumet de bonne
volonté et suivant le bon plaisir de l'Église, afin d'échapperaux conséquences que ces censures auraient pour lui dans
l'autre monde. Celui qui se flagelle, jeûne et fait des pè-
lerinages pour expier son manque de foi, veut satisfaire
l'Église, afin de s'affranchir de ses malédictions pourl'autre vie; celui même qui se laisse brûler par le saint
office ne peut le faire que pour rester membre de l'Église,sinon dans cette vie, du moins dans l'autre. Il abandonneà Satan sa chair coupable, afin qu'au dernier jour son
./<&~MU~~
SUR LA HËVOUJTÏON FRANÇAISE. 309
esprit jouisse cle la béatitude éternelle. Tel est aussi le
sens originaire (les corrections corporelles comme on
le voit clairement par les formalités avec lesquelles on les
pratique. Ce fut par un besoin (te vengeance poussa :'<
l'excèsqu'on se servit de ces corrections commede /~c~,
qu'on changea l'esprit de cesdispositions et qu'on travailla
contre sonpropre but.Transformez ces expiationsen peines,
c'est-à-dire imposez-les, coy~'c M ~o/o/ a celui qui ne
veut pas rester dans l'Église a cette condition, qui ne veut
pas lui obéir, qui méprise et tourne en ses malé-
dictions ou scsbenedictions~qui est décidément un incré-
dule elles produiront alors tout justement ce qu'elles
devaient empêcher, l'oc~c. Si je n'ai rien autre
chose a craindre que les peines de l'Église dans l'autre
monde, je ne me soumettrai certainement pas a ses ex-
piations, dès le moment que je ne croirai pas a ses me-
naces mon incrédulité se montrera donc a découvert,
l'Église sera débarrassée d'une brebis galeuse, et elle
pourra m'accabler de toutes les malédictions qu'il lui
plaira d'inventer. Mais si, que je croie ou non, j'ai des
peines a craindre ici-bas, je cacherai mon incré-
dulité aussi longtemps que je le pourrai, et je me sou-
mettrai volontiers a un moindre mal, afin d'échapper à
un plus grand. Je laisse ici de côté l'évidente injustice
dont l'Église se rend coupable en punissant des hommes
qui lui ont retiré ou ne lui ont jamais accorde leur obéis-
sance et sur qui elle n'a par conséquent aucun droit; je
ne parle pas non plus de l'horreur et cle l'implacable
haine qu'elle excite par une pareille conduite chex tous
ceux qui en sont les victimes. –L'Église romaine, ce
ZUC~Mt~M.
~S~a/e.
CONSmÉRÀTÏONS310
modèle de conséquence, s'est, montrée sur ce seul pointfort inconséquent. Toutes les persécutions que l'inquisi-tion a fait subir aux juifs et aux sultismatiques avoués,l'exécution de tout impL'nitcntqui persistait, dans son im-
pénitence, le bannissement temporel des princes joint a
leur excommunication spirituelle, la mesure qui déliait
leurs sujets du serment de fidélité et !'ordre qui leur en-
joignait de les abandonner, c'étaient là autant d'inconsé-
quences de sa part, et qui unirent par lui coûter cher.
Une Église a dos lois qui règlent sa foi, et par consé-
quent elle possède un pouvoir /< Mais ce pouvoir
peut être très divisé. Les articles de foi, qui forment la
matière de ses lois, ne sauraient provenir du suffrageunanime de ses membres. Un membre ou plusieurs peu.vent être exclusivement autorises à cet enct; l'Église sous
ce rapport peut être une monarchie ou môme une oligar-
chie, cela est détermine par une loi fondamentale re-
lative à ce point mais sous le rapport de leur forme,comme lois de la foi, elles ne sont obligatoires pour un
individu qu'autant qu'il les accepte volontairement. A
la vérité l'Eglise, comme nous l'avons déjà montre, pré-tend a une universalité originelle, qui est indépendantede toute liberté de lavolontéet embrasse tous les hommes;
et, conformément à ce principe, elle a sans doute le droit
de maudire et de damncrceuxquin'admettentpas ses lois;mais elle no saurait exiger que ses malédictions aient le
moindre effet dans le monde des phénomènes où règneledroit naturel, lequelne connaît aucunerègle de foi et au-
torise chacun à ne point se laisser imposer despotiquementune loi étrangère. Celuiqui tient la loi pour arbitraire ne
croira pas aux ordonnances de l'église celui qui la tient
DasMateriale.
SUR LA RÉVOLUTION FHANÇAtSE. 311
pour originairement obligatoire s'y soumettra sans peine.
Ceslois doivent être toutes également obligatoires. On
peut bien, pour ta commodité de l'analyse, les diviser en
lois essentielleset lois accidentelles; maispour la foi elles
doivent être tontes également essentielles. Celui qui re-
jette la moindre décision ecclésiastique, quel qu'en soit
l'objet, dogme, chose do fait ou discipline, celui-là est
regardé de la même façon que s'il no croyait a aucune.
La loi fondamentale, celle qui contient toutes les autres,
est, ainsi que nous l'avons montré plus haut, la foi en
l'Église comme en un pouvoir infaillible exclusivement
chargé do dicter des lois et clejuger au nom deDieu. Nul
article do foine doit être cru parce qu'il est digne de foi,
mais parce que l'Église ordonne d'y croire. Elle ordonne
de croire a <o~; cchïi qui contredit le moindre d'entre
eux contredit donc l'Église et sa foi aux autres arti-
cles clu'il no peut plus admettre par obéissance pour
l'Église~ mais par d'autres faisons, no lui sert de rien ce
n'est plusia foi ecclésiastiqueexigoe.–J'invite charitable-
ment certains de mes lecteurs qui seraient tentes de se
récrier sur la dureté de cotte sentence, et d'autres plus ri-
gides encore qui suivront, à ne pas oublier surquel terrain
nous sommes, et &ne point commettre l'absurdité de me
dire « Tout cela peut bien avoir été autrefois une loi
fondamentale; mais aujourd'hui les temps sont beaucoup
plus doux.-Je ne veux passavoir cequi a été autrefois,
ce qui est aujourd'hui, ce qui a jamais pu être; je ne me
suis point placé dans le champ de l'histoire, mais dans le
domaine du droit naturel, c'est-à-dire d'une science philo-
sophique. J'analyse l'idée d'une /s'e;je déduis
de cette idée toutes les propositions qui en dérivent. Si
jamais une sociétés'est aviséefie former une église visible,
CONSIDÉRATIONS3~
ct~ ccHesociété a été conséquente, elle a du nécessaire-
ment a(!mcttrc ceci et cela; voilà ce quejcdis. Une telle
société a-t-elle existe, ets'est-clle montrée conséquente?C'est ce que je ne sais pas. Je n'ai tort que si mes déduc-
tions ne sont pas rigoureuses.
L'Église a une /b7ïc~a! et les lois ecclésias-
tiques qui, sur ce point aussibien que sur tous les autres,sont des articles de foi, doivent déterminer a qui il appar-tient d'exercer cette fonction. La fonction de l'ensei-
~'yM~ n'est pas une des fonctions essentielles de
l'Église; elle est accidentelle. Le maître ne peut rien
ajouter ni retrancher il doit se borner laexposer simple-ment les doctrines de l'Église, telles qu'elles sont établies.
11explique les lois et les inculque, et il est sansdoute con-
venable que cette fonctionsoit exercée par celui qui exerce
déjà celle de juge, puisque ces deux fonctions supposent
également une entière connaissance des lois. Toutefois la
fonction qui appartient exclusivement aux prêtres dans les
sociétés ecclésiastiques, ne consiste évidemment pas dans
l'enseignement chacun peut enseigner; elle consiste à
juger, à confesser, à absoudre ou à condamner. Le sacrifice
même de la messe est un acte judiciaire, et le fondement
de tous les autres il est, si l'on veut, l'investiture de
l'Église, en qualité de représentant du divinjuge, solennel-
lement renouvelée sous les yeux de tous et pour l'instruc-
tion ~Icchacun. Pour qu'elle puisse juger, et juger en der-
nière instance, il faut que Dieu n'ait plus rien a juger, et
pour qu'il n'ait plus rien a juger, il faut que l'Eglise l'ait
satisfait,qu'elle soit entièrement pure, sainte et sans péché,
qu'elle soit l'épouse parée, qui n'a ni une tache, ni une
ride, ni le moindre défaut, mais qui est absolument irré-
prochable. C'est ce qui arrive par les mérites des membres
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 313
de l'Église, qui ont satisfait pour toute l'Église;– par ces
mérites que l'Égliseoffre à Dieu dans la messe, et par où
elle se racheté entièrement. Ce n'est que grâce il cerachat
que l'Église a le droit déjuger elle-même ses membres.
-Quiconque dit la messe doit pouvoir confesser qui-
conque confessedoit pouvoir dire la messe, et ces deux
choses sont la conséquence du mandat en vertu duquel
l'Église exerce la fonction de juge. Les sentences judi-
ciaires de l'Église sont infaillibles, parce que, grâce au
sacrifice de la messe, elle est l'unique juge pourle monde
invisible; si elles n'étaient pas infaillibles, il n'y aurait
pas d'Église possible. Comment une société peut-elles'as-
surer de l'obéissance, si elle ne peut pas punir la déso-
béissance et comment l'Ëglisc, dont lespunitions tombent
dans un monde invisible, pourrait-elle punir la désobéis-
sance, si elle n'était pas assurée que ses sentences s'ap-
pliquent dans ce monde invisible et que les punitions
qu'elle inflige y ont certainement leur effet. L'Église
luthérienne est inconséquente, et cherche a masquer son
inconséquence; l'Église reformée est franchement et libre-
ment inconséquente. Toutes deux ont des lois qui règlent
leur foi, elles ont leurs livres symboliques; et quand
même elles n'auraient pas d'autre livre symboliqueque la
Bible, toujours partent-elles de ce principe la Hible est
la parole de Dieu, et ce qu'elle contient est vrai par cela
seul qu'elle le contient; c'est sur ce principe que se
fonde nécessairement tout le système ecclésiastique, tel
que nous venons de le dérouler. Celui qui croit a ces
Églises est sauvé; celui qui n'y croit pas ne .compromet
pas pour celason salut. Dèsque je dois non pas me con-
vaincre par des raisons, maiscroire à l'autorité, je ne vois
pas pourquoi je doiscroire plutôt a l'autorité d'une Église
CONSOLATIONSSi&
qu'Acer de Vautre, puisque dans toutes deux je puisêtre
sauvé et, si j'en connais une troisième qui se vante de
posséder exclusivement !e droit (tesauver et qui réprouve,sans exception, tout ce qui no croit pas en eiïe, c'est ~CM-
A ceHc-~ que je dois me soumettre.–Je veux
être sauvé, voi!amon but mmt; toutes les Élises assurent
que cela n'est pas possibie par ma propre raison et mes
propres forces, mais seulement par ma foi en ettes iU'aut
donc, d'après cette assurance, que je croie en elles, si je
veux être sauve. Les trois Irises s'accordent a enseigner
que l'on peut être sauvé dnns t'Égnso romaine; si, pour
être sauvé, j'entre dans rieuse romaine, je crois donc à
toutes trois je serai donc sauvé, d'après l'assurance de
toutes trois. L'Égusc romaine enseigne que l'on ne peut
pas être sauve dans les deux autres; si donc je fais partiede Fune de ces deux taises et que je croie pourtant être
sauve, iL y a une Ëgtisc hquetie je ne crois pas; je ne
serai donc pas sauve, d'après !'assurancc de cette Église.
Suivant la doctrine unanime de toutes les Églises, !a
foi ne se fonde pas sur des raisonnements, mais sur l'au-
torite. Desquels diverses autorités ne peuvent ctre~-ce qui ne serait possible qu'au moyen d'arguments
dont t'usa~e est interdit, il ne reste plus qu'a co~~r
/<9.s'. Si je faispartie de PË~iise romaine, je serai
sauve par tous les suura~es; si je fais partie d'une antre,
je ne serai sauvé que par deux suffrages, et damne par un.
D'après la doctrine (le toutes les Églises, je dois choisir la
plus grande autorittt je dois donc, d'après la doctrine de
toutes les Églises, entrer dans l'Église romaine, si je veux
être sauve.–J'ai de la peine-àcroire qu'une conséquenceaussi simple ait pu échapper aux docteurs protestants,
qui ont des principes ecctésiastiqucs. Je crois plutôt que
SUR LA RÉYOLUTtOK FRANÇAISE. 3i5
tous damnent, an fond de leur cœur, quiconque ne pense
pas commeeux, maisqu'ilsn'«seut pas le déehn'ertout haut.
Us sont alors conséquents, et méritent d'être loués a cet
é~ard.–L'Église reformée n'a pas do fonctionjudiciaire;
l'élise luthérienne n'en a que l'apparence. Le prêtre lu.
thérien me pardonne mes pèches, à la condition que Dieu
mo les pardonnera aussi; il distribue la vieet. le salut, a
la condition que Dieu les distribuera aussi. Que fait.il
donc la d'étonnant, je vous prie? Que dit'il donc là quechacun ne puisse dire et que je ne puisse me dire a moi-
même aussibien que lui?Je voulais savoir d'une manière
certaine Dien m'a pardonné mes péchés; il me dit qu'il
veut bien me les pardonner, Dieu me les pardonne
aussi. Qu'ai-jc. besoin de son pardon; c'est celui deD~/
que je voulais. Si j'étais assure de co dernier, je n'aurais
pas besoin du sien; je commencerais par me pardonner
moi-même. Il faut qu'il pardonne M~co~ ou qu'il
ne se mêle pas de pardonner. Le prêtre luthérien ne
ne se donne donc que l'apparence du pouvoir de distri-
buer des grâces il ne l'a pas en realite il ne peut.pas
même infliger des peines en apparence. Il ne saurait rien
laire de plus à l'égard des péchés que de les pardonner.
Quant à en réserver la rémission, il ne le peut que devant
l'assemblée entière des fidèles et tout à fait en l'air. Il ne
peut que promettre le ciel; il ne saurait menacer personne
de l'enfer. Il doit toujours avoir sur les lèvres un sourire
de bénédiction a ~'M~~'r ~z~ le ~pe/~M' il c~'c~c.
L'Église a nn ~wo~' M~c~ mais non dans cette
vie; ses sentences ne recevront leur exécution qu~ dans
la vie future. Que l'exécution doive s'accorder exactement
avec le jugement, qu'il ne doive arriver rien de plus ni
de moins que ce que l'Élise a établi et ordonné, cela ré-
CONSIDÉRATION3i0
suite déjà de ce qui précède ce que l'Église aura lié sur
la terre dans cette vie sera lié de la même manière
dans le ciel dans l'autre monde, et ce que l'Église
a délie ici doit aussi être délie la-haut (~).Que les exécu-
teurs de ces jugements ne puissent être que des membres
de la seule Église capable de sauver les âmes, et que ceux-
ci en soient les exécuteurs à titre de membres de cette
Église, c'est ce qui résulte également de ce qui précède;
et cela est d'ailleurs notoire Jésus, lechef de l'Église,
ses premiers disciples, les douze apôtres, siégeant sur
douze siéges, tous les saints qui avec le superflu de leurs
mérites ont fourni leur contingent au trésor des grâces
que l'Église administre, feront, suivant la doctrine de
l'Église, exécuter là-haut ses jugements. Une Église
conséquente ne peut avoir dans ce monde de pouvoir exé-
cutif, parce que, comme nous l'avons montré plus haut,
c'est aller contre son but final que d'attacher a ses cen-
sures <les conséquences physiques. Si elle permet des
expiations qui doivent être appliquées aux pénitents par
certains serviteurs qu'elle institue elle-même, ceux-ci,
dans ces exécutions, n'agissent pas au nom de l'Église,
mais au nom de l'incrédule pénitent, qui a dû se résoudre
volontairement à l'expiation et charger les serviteurs insti-
tués de la lui appliquer.
(1)L'usagedes motset leurenchaînementprouvent,pourwotdu
moins,quel'explicationcatholiquede cesparoleset des précédentes
(saufl'applicationau pape,commesuccesseurde Pierre)estlaseule
exacte,et qu'onn'enpeutdonnerd'autresansfaireviolenceà i'unet
l'autre.Cepassagemériteraitbiend'être revude notre tempspar un
commentateursavant,maisimpartial. S'itfallaitencoret'entendre
ainsi,si l'on devaittoujoursy voir réellementcette primatietant
redoutéeet l'infaillibilitédePierre,- quen'ent'ëautterait-i!pastootrelesvrais pTO<M(<M~
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE. 317
Tel est le système nécessaire de l'Ëglisc visible, la-
quelle, comme il résulte de tout ce qui a été dit, doit être
de sa nature unique et universelle. Si l'on parie de plu-
sieurs Églises, il est sur ou que toutes ensemble, ou que
toutes, a l'exception d'une seule, agissent d'une manière
inconséquente. Nous avons maintenant à rechercher le
rapport de cette Église avec l'homme au point de vue de
la loi naturelle et de la loi civile; son rapport avec les
hommes comme tels, et avec les hommescomme citoyens.
Si ceux-ci vivent eux-mêmes séparés ou s'ils se sont unis
pour former un État, l'Ëgtisc, considérée comme so-
ciété à part, est, à l'égard des autres hommes, et ceux-ci
sont à son égard soumis au tribunal du droit naturel; a
l'égard de ses propres membres, elle est soumise a la loi
du contrat, laquelle est elle-même une loi de droit naturel.
Tout homme est libre par nature, et personne n'a le
droit de lui imposer de loi que lui-même. L'Eglise n'a
donc pas le droit d'imposer Aquelqu'un par la contrainte
physique sa règle de foi, ou de le soumettre a son joug
par la force. Je dis par la contrainte physique, car le droit
naturel ne gouverne que le monde des phénomènes.
Contre l'oppression morale, l'onensé ne saurait lutter
qu'avec des armes de même nature,–si cette oppression
pouvait être exercée autrement que dans le monde des
phénomènes. autrement qu'avec le consentement de
l'autre partie. Tu crains mes moyens de persua-
sion, mes instances, mes subtilités; tu redoutes la pein-
ture des affreux tourments de l'autre monde, dont je
te menace est-ce que je puis te faire entrer tout cela
dans l'esprit autrement qu'en exprimant ma pensée par
des signes? Eh bien! ne m'écoute pas, ferme-moi tes
oreilles, chasse-moi de ton seuil, et défends-moi d'y ja-
CONS!DËRAT!ON6318
mais revenir. Que si je m'adresse a toi par des écrits, ne
les lis pas. Tu es ici tout A t'ait dans ton droit. Maisdes
qu'une fois tu t'es engagé volontairement avec moi sur le
terrain moral, tu m'as abandonné ton droit d'opposition;
il faut t'en remettre maintenant à la fortune (le la guerre.
Si tu avais pu me persuader, je me serais soumis a toi
puisque c'est moi qui t'ai persuadé, c'est toi qui m'es
soumis. Telles étaient nos conventions; tu ne saurais t'en
prendre a moi. Lorsque l'Église croit pouvoir en as-
sumer la responsabilité devant sa propre conscience, elle
est libre de damner et de charger des plus dures rnaté-
d!ctions quiconquene veut pas se soumettre a ses lois; tant
que ces sentences de damnation restent dans la sphère du
monde invisible, à laquelle eMesappartiennent, qui pour-
rait s'y opposer? Elle maudit de cœur, comme un joueur
malheureux, et c'est une satisfactionque l'on peut accorder
à chacun. Mais, des que ses malédictions ont pour effet
dans le monde visihle quelque atteinte portée aux droits
d'un autre, alors celui-ci a le droit de traiter l'Église en
ennemie et de la contraindre a reparer le dommage.Tout homme redevient libre, dés qu'il veut être libre,
et il a toujours le droit de s'a~ïranchir des obligations qu'i!
s'était imposées a Iui-m6me. Chacun peut donc refuser
obéissance a l'Église des qu'il le veut, et l'Église n'a pas
plus le droit de le contraindre par des moyens physiques
à rester dans son sein qu'elle n'avait celui de le forcer pardes moyens de ce genre Ay chercher un refuge. Le pacte
est rompu je rends intact a l'Église son céleste trésor,
auquel je n'ai pas encore touché, et je lui laisse la liberté
de (aire tomber sur moi dans l'autre monde toutes les
foudres de sa colère; a son tour, elle me rend ma liberté
de croyance. Toutes les peines physiques qoc i'ËgHse m-
MSURLAH~VOLUTtONFRANÇAISE.
flige a un homme contre sa volonté ne sont donc pas seu-
lement contraires aux principes mêmes de i'Ë~lisc ils
le sont aussi aux droits de l'homme. S'il n'accepte pas
volontairement l'expiation qu'on lui propose pour échap-
per a la damnation éternelle, c'est qu'il ne croit pas à
l'Église, car il est impossibled'admettre qu'il ait pris
de propos délibéré pour but tinal la damnation éternelle
il n'est donc plus membre de l'Église, et elle ne peut
plus mettre la main sur lui. Que si elle le fait, elle se
conduit en ennemie a son égard. l'ous les incrédules que
ia sainte inquisition a condamnés pour leur incrédulité
persévérante ont été assassinés, et la sainte Église apos-
tolique s'est baignée dans des torrents de sang humain
injustement verses. Quiconque a été, pour son incrédulité,
poursuivi, chassé, dépouillé de sa propriété et. de ses
droits civils par les communions protestantes, l'a été
injustement. Les larmes des veuves et des «rphclins, les
Soupirs de la vertu opprimée, les malédictions de l'huma-
nité pèsent sur leurs livres symboliques.
Si un hommepeut sortir de l'Église, plusieursle peuvent.
Si les membres de la première Église ont pus'unir par un
contrat et constituer une Église, ceux-ci peuvent aussi
s'unira leur tour et ibrmer une Église particulière. Lapre-
mière Églisen'a pasle droit de l'empêcher par des moyens
physiques. !1se forme ainsi plusieurs États spirituels à
côté les uns des autres~ qui ne doivent point se faire la
guerre avec des.armes matérielles, maisavec celles de la
chevalerie, laquelle est toute spirituelle. Ils peuvent s'ex-
communier, se damner, se maudire réciproquement, au-
tant qu'ils le veulent; c'est leur droit deguerrc.–c Mais,
sH y a plusieurs Églises, toutes, a l'exception d'une, se-
ront inconséquentes. ~u'eMcslesoient. Mais si même la
CONSIDÉRATtONS320
plus conséquente avait tort dans son principe fonda-
mental!? II est permis à chacun de raisonner avec autant
d'inconséquence qu'il le veut le droit naturel ne porte
que sur les actes et non sur la pensée.Tout membre possède, en vertu du pacte qu'il a fait
avec l'Église, le droit de veiller sur la pureté de la pro-lession de foi. Chacun s'est lié aielle pour une certaine
profession de foi déterminée, et non pour une autre.
L'Élise a le droit de veiller sur cette pureté au nom de
tous, et de punir des peines légales quiconque yporte at-
teinte, ou de le chasser de la communauté, s'il ne se
soumet pas Hses lois. C'est qu'il rompt alors le contrat de
société.–Puisque l'Église a le droit d'exclure tout membre
pour cause de faussecroyance, il n'y a pas lieu dedemander
si elle n'a pas aussi le droit de remplacer un maître pourun faux enseignement ou même de l'exclure tout à fait.
Quiconque obéit à l'Église a, en vertu de son contrat,le droit de réclamer ses indulgences et les bénédictions
déterminées par les lois. L'Églisedoit tenir ses promesses,sous peine de s'anéantir elle-même.
L'Église et l'État, envisagés comme deux sociétés dis-
tinctes et séparées, sont soumis dans leurs rapports ré-
ciproques à la loi du droit naturel, de même que des
individus vivant séparés les uns à côtés des autres. Il est
vrai qu'ordinairement les mêmes hommes sont a la fois
membres de l'État et de l'Église, mais cela n'y fait rienil sumt que nous puissions, comme nous le devons, sépa-rer par larénexion les deux personnes que forme chacun.
L'Église et l'État sont-ils en lutte, le droit naturel est leur
commun tribunal. Si chacun d'eux connait ses limites et
respecte celles de l'autre, il n'y a pas de lutte possible.
L'Église a son domaine dans le monde invisible, et elle est
~L!~ L.\ HKYULUTtON m.(;.USË. 3~
21
exclue du inonde visite. !/Etat commande, suivant la
mesure du contrat civil, dansle monde visible, et il est
exclu du monde invisible.
i/Ëtat ne peuL empiéter sur !c domaine de l'Eglise;
cela est physiquement, impossible il n'a pas les instru-
ments nécessaires pour cela. 11peutpunir ou recompenser
dans ce monde il a a cet enet entre tes mainsle pouvoir
executif, et les corps et les biens de ses citoyens sont en
sa puissance, h ne saurait distribuer dansl'autre monde
les malédictions ou les bénédictions; cela n'est possible
qu'à l'égard de ceux qui croient, et l'Etat, dans le contrat
civil, n'a point exige de croyance, personne ne lui a pro-
mis la sienne, et il n'a rien fait pour se la procurer. En
vertu du contrat civil, il peut bien juger nos actes,
mais non pas nos pensées. S'il semble que l'Etat entre-
prenne quelque chose de parei!, ce n'est plus l'Etat c'est
l'Eglise qui endosse l'armure de l'Etat, et nous en repar-
lerons bientôt plus longuement.– Des sociétés, petites ou
grandes, dans l'Etat, ou l'Etat lui-même, si l'on veut,
peuvcnM'ondercertaines institutions en vue d'instruire les
hommes ou les citoyens sur la morale, ou même sur ce
qui est simplement <e de foi (par opposition a ce qui
est objet de 5~'e~ce~),ou en général en vue d'éclairer les
esprits. Maiscela ne fait pas encore une Eglise. L'Egtise
est i'ondec sur la ces institutions ont pour principe
la ?'cc/c/ l'Ëglisc~~e la vérité, elles la/M~<-
ue~; l'Église exige la c~ elles cherchent a con-
'~<ïu6<t'<
SH'(~w~t<ff/
3 DttS ~f(f<~<'N.
~/)<orAr/tf~.
6'«6/~ /~))tc/tUtrn.
322 co~stuÉhA'no~s
~<<~ quand eues ie peuvent et y renoncent quamt ettes
ne te peuvent pas: elles ne s'adressent a la conscience de
personne pour savoir s'il est ou non convaincu, mais elles
laissent chacun librea cet e~ard. L'Eglise sauve ou danme,ces institutions abandonnent a chacun le soin de décider
ce qu'il veut ou peut être l'Église montre te chemin quicoudni t'ntaillibiemeutauciel, etiess'appliquent a conduire
chacun jusqu'au point ou il peut le trouver lui-même. H
n'y a d'Église que ta oit il y a une profession de toi et un
devoir de foi, et ou le salut est infailliblement assure a
ceux (pu l'admettent. La ou il y a une profession (te toi et
ou eue consiste dans cette simpleproposition ce qui se
trouve dans la Hih!eest vrai /j~' /« ?' qu'il se trouve
dans ta Bible, il y a un devoir de ibi et une h~iise, et il
n'y a de saiut que dans cette K~iisc, et tout ce que nous
avons déduit plus haut de i'idue (te t'K~tise s'ensuit sans
exception; si toutefois tes membres de cette j~iisesont capables de tirer trois ou quatre conséquences.
Comme les institutions dont nous parions ne sup-
posent pas que ia vérité soit ~'<~u< mais qu'eiie esta c/c/ il s'ensuit, ce qui se comprend d'aiHeurs parce (pu précède, que l'Etat ne saurait se vanter de ia pos-
séder, et que par conséquent it n'a aucune direction il im-
primer aux tecons (tes maîtres de ces institutions. Ces
maitres ne doivent suivre d'autre direction que ccHcdu
c~(je parie du sens commun originaire, et non
des opinions systématiques des peuples): cemi-ci est leur
unique ju~c, et it -n'apas besoin pour h'sj'~er de l'in-
tervention (tu pouvoir executif. S'its sont d'accord avec
lui, on tes (''couh'ra; s'ils le coutrediseut, on Jcs iai~era
bientôt prêcher devant les banquettes.Mais t'tise peut (.'mpieter sur !e domaine de l'Etat,
SUR LA HÉVOLU'HON ï-~ANÇAtSE. 323
parce que ses n)cml)i'es sont doues de forces physiques.
Ktie empiète sur tut, lorsttu'elle perte atteinte aux droits
de l'itomme ou du citoyen; et l'État est oblige, aux ter-
mes du contrat civil, de défendre ces droits et d'exiger
de t'irise satisfaction et réparation, en usant de contrainte
physique envers !es instruments de son oppression physi-
que. ~lais si l'Eglise viole, dans tes citoyens, tes droits
qu'ils possèdent, noncomme Itonnues ou comme citoyens,
tuais connue membres de rjt~tisc; si eUeteur refuse
tes recompenses convenues, ou si elle tes accabte de pu-
nitions non méritées, F~tat n'a point a s'en meter: ces
preiudices ontiicu daus un autre monde ou l'Etat ne sau-
rait protéger personne et ou itn'a pronns a personne sa
protection.iHa doit au'contraire dans Je inonde vii-.i-
!)ie. tj'Égusc use-t-et!c de contrainte pour forcer un
membre de rËtat a reconna!tresn souveraineté; ihili~c-
t-cUe des peines physiques aqudqn'un (nu ne se soumet
pas volontairement a l'expiation, ou (fui en' ~encrai lui
refuse l'obéissance, cciui~'i est parfaitement fonde a re-
ehmct'1'assistanccder~tat. L'élise tait-elle suivre de
conséquences civiles la'désobéissance a ses lois, elle em-
piète immediatcment'sur les droits de l'Etat et lui drelarc
la guerre. Dans tous ces cas, l'État n'a pas seulement le
droit'de traiter l'h~lise en enhc'nnc, mais il y est même
oblige, aux termes du contrat civil.
Oh'a imagine entre l'I~lisc et l'Etat un certain lien ré-
ciproque, en vertu duquel l'Etat prête amicalement sa
puissance a relise dans ce monde, etT~chse prête la
sienne a l'État dans Les devoirs de foi deviennent
ninsi des devoirs civils, et les devoirs civils des pratiques
<!e foi. On crut avoir accompti un prodige de politique
en trouvant cette heureuse Je crois au contraire
CU.\StDÉh~'itU~S221,
que l'un a.ss"cia ainsi dcscttoses inconq~aubles, ut qu'un
les auaibtit toutes deux.J'ai déjà remarque plus bau!
<;u'('n inth~eant aux incrédules dus punitions terrestres,
l'E~tise se contredit elle-même et va contre sonpropre
but, qui est de s'assurer de la sincérité de ses membres.
.<e n'ai donc pas un mot a ajouter pour démontrer qnc
l'r~lise est anaibtie par cette sin~utierc altiance. L'état
n'y perd pas moins. Sa domination n'est pas incertaine,
comme cette que i'i~tisc exerce sur tes consciences il
commande des actes (pu se manitcstCtU dans le monde
\isib!e, etsc~ fois doivent être disposées de tetie sorte (prit
puisse être assure de l'oth'-issatice aucune ne doit pou-
voir être violée impurn'ment. Il faut qu'ii puisse compter
surement ~ur !c résultat de chacun des actes (prit a or-
donnes, de metne que dans une machine bien agencée on
peut compter sûrement surt'engrenagc d'une roue dans
une autre. On dira <pte l'Htat ne saurai veiHcr a tout
ni tout observer', ce sont ta des déclamations superncicitcs
et vaincs. L'Etat ne doit commander aucun acte a l'exécu-
tion du<ptct il ne puisse veitter; aucun de ses ordres ne
duit resterons enet, ou tous y passeront l'un après l'autre.,
Un Ëtat qui marotte avec tes béquilles de la religion n~
lait que prouver sa faiblesse; celui qui nous conjure,, au
nom de Dieu et de notre ~alut, d'obéir a ses ordres, c~lui-la
avoue qu'it n'a pas lui-mume la l'orée de nous contraindre
à l'obéissance; autrement il le ferait sans appeler Dieu a
son aide. A quoi peut servir en définitive une telle in-
tervention de la rctipion? Et si nous ne croyons pas a
Dieu, a une autre vie, auxrécompenses uu aux peines de
cette \'ienuure?()u l'État a d'autres moyens de nous con-
traindre a t'obcissanee, ou il n'en a pas. ~'it en~, ii n'a
pas besoin du mobile de !u religion; il perd sa peine en
srn L.\ nnYOL!'Tto~rnAiscA~E. :~ù
t'employant,etse fait, sans fn'otitj'instrumeu) de l'i'~ti~c.
Vouions-nous ~s' n"us scrvirdece mobile puur
lutter contre nos pendantset pour nous faciliter l'ac-
complissementde nos devoirs, il
dépendde nous de le
faire; mais cela ne regarde point. /'A' Admet-
tons quecelui-ci n'ait pas d'antres moyens
il sa <!isp~si-
tion il ne peuts'assurer noire obéissance, u)ume avec te
secours de ia rétinien, si nous sommes des im'rcdules
détermines; –comme il prête lui-même sou In'as a
ri~tise, nous nous garderons bien de !rah!rnutre inerc-
dutite ;–it commande donc dans !e vide. Si nous hommes
croyants, nous obéirons; si nous ne le sommes pas, nous
!e hisserons la; mais it n'a voulu qu'essayer; fp<e hn
importeun indocile de piusou de moins? Qtu't Ktat!
Il convient sans doute a certains États de nous promettre
une recompense dans l'autre vie, lorsqu'ils nous prennent
tout dans ceHe-ci, ou de nous menacer de l'enter, quand
nous ne voulons pas nous soumettre a leurs injustices et
:'< leurs violences. Que croient-Hs dune eux-rnem~s, eux
(iui se montrent si franchement et si librement injustes?
On ils ne croient ni an ciel ni a l'enfer, on Us espèrent
s'arranger avec Dieu et tirer leur personne d'afÏaire.Mais
si nous étions aussi habiles qu'eux
Nulle part cette vérité ne se montre plus clairement que
dans les Ktats protestants. Une seule et même personne
physique peut sans doute être prince ou rvrque mais
les fonctions du prince sont autres que celh's de l'cvrque,
et l'un ne doit pas corrompre l'autre. Onne peut 'tre a
la f"is l'un et l'autre dans un seul et même acte.– Or les
princes protestants se sont laisse dire qu'ils étaient en
même temps évoques et, xeles comme ils le sont, ils veu-
lent aussi remplir leurs devoirs d'évoqués. Ils ont.a cœur
32~ i co~stoÉnATio~s
ia{n.!t'<t'(!ctat"i,ctpHccs!c()rro!upt)c,<Jum<)insp~ur
J~ur(')urt<u<\ J)ansL~trjttst<'<'u~rcitstatu~j~'t]({m-
t')))r't'<.tX)~t~i~t'ttt~'<ptih').trt.oj~b''s~t)s~nntai~,et
Jrap~n'u.) at't < aha\'TS.</(''taitIcs~ptr<Mais lu
sccp(r'st-it iuh pour cda? Ji tatia'tprt.'thirc le bah~n
pasturaL En qnaHh'' <i'<v<'qnes, Us p~uvc~t t tUMmJirc Jcs
mcn''<!uics, i's tJatUi~r, i'ur refuser ie cic~ et ie~ ct~pri-
suniu'r<!ans i'cnft'r; ils pcnvci~ ~nut~cctab~r de~ huches
ou tous ceux qui le vaudront scf'\rontbruk'r puur sauver
icur amc tnais ils ne Juiv~it pas (~nployor contre c~x
!a na~saucc < t'Ktat..mtrcmcnt ceux-c.i r(''ciui!~rt)tH le
sccuut'xi <!c l'i'~a!. J/Ktat? i trias, dans qu~s n~m):)
sommes-t~ous h)tnh''s <7est. l'Etat hii-nK'rne qui nf~is
frappe an itunt th: Dt<(t). ~ais tes (''vcqncs protestants
n'ont pnsic droit (tu <hunncr?–K!< vérité? ~u'cst-('<: (J<mc
qn' ~~c, je vous prn;? Je croyais ({uc c'était Uttjt~c
(t) t\i:)!s si tes princes avaient ~t'h'u~'ntcnt ic (t~sc~n de s'oc-
cuper !cur mnm<'rc du ftthn' satnt <tc km's sttjcb, uc f.mdtaiL-jt p:~(tu moins toucr )eur hotutc imcntif)))? M rct)!)rc, nt.)is not) pascertainement feut' intctti~ncc et h'ur sentiment (te ta justice. Chucun a
k droite c!)''rchcr,<Pcst-ayct',d<: <)oi~h )ui mcmn !cs tHoycns dt;
fan'c sot) s'unt, f;t ft a patf.titpmcnt tu d~it d<:oc ~)inr~' rtntc~ctmoxd'.mcnHC mai)) (?tr.)nnc)C snr ce tcrratn (jt)i hti est propre. H)
~</«<~ dune ics princes \'(:t)!c)H-i)s que h'nrs sujets fassent si i)id)
-icttr satnt? Ust-cf en ~n(!ra! pat' pur amoor potr <:u\, ou bien n'cst-
c'' pas parfois par cgotsnx:? Contncnt se fait it donc qu'o)'dittaircn)cnt
ce sont !<'s Louis X~ <'t tous parcits qui h'int~rcsscnt si vhcn)H))t
pour h' sit~tt des ««~'< ne tt'ts prince savfnt se servir de tôt)) il
)'~ar(t d<:tcm's sujets, Ils ont d<!jd tant cxptui)~ leurs corps mortets,
<{u'd ne reste plus grand gaiu a faire sur <L'ux.«!\tais,te«rditJcur
directeur spiritnct, vos sujets n'ont-i!s pas aussi une <'<)ncinunortctte?
Kt, sur cet avis opportun, ils formpnt vite un nouveau p)an, ce)ni de
!escxp)oitcr encore dans la viccterneiie, (t mOuc de vendre tcurs
<Hncsan bon Dieu aussi cher (juepossiide.
SURLA.t~VOU'TtOMFRANÇAISE. S27
intaillihte parlant an nom de l'élise. Kt qu'est-ce donc
l, J. l, J "11" l,qm.l'i~tise~Je pensais qu'eUe (''tait l'unique et suprême
ju~e dans le munde invisible. S'it est. \'raiqnc les évoques
protestants n'ont pan le droit de damner, ce ne sont pas
des évoques, ut teurs I~Uses ne sont. pas des K~tses.–
En gênera!, on. hten les communions protestâmes sont
souverainement inconséquentes, on bien eHesne se don-
nent,pas dn tout pour des i~nses. Ce sont des institutions
d'enseignement, comme ceUes (;ue nous avons décrites
plus haut. Hn'y a point un troisième parti: ou d faut se
jeter dans le ~iron de rKg!ise romaine, hors de laquelle
il n'y a point de salut; on il faut être tout Al'ait /<? /)C~-
M~'(t). Que veulent donc ceux qui, dans notre siècle,
(t) Quelques mots sur le sens et en t'honncut' de cette expression si
honorante.–Le tonne libre a-t-it t)icn designs de tout temps la /or~
et non ta t!~«~? i'our appeler quoiqu'un libre pensum', il ne s'it
pas de savoir ce qu'it croit, mais ~'Jtu' ~t«~s )-<n~t~ it te croit. S'il
croit « ~~or< qnctqnc courte que soit sa profession de foi, c'est un
crot/«n< s'i: ne croit qu~ sa ~t'c ~~ox, c'est un ~r~ ~<'u6pMr.
Si quelqu'un croit a t'anc de Mahumct.ou a !'immacu!ce conception de
ta vict{;cMarie, on à la divinité du ij<ruf Apis, parée qu'il pf'nse s'être
convaincu par ses propres renexionsde la vOUe de ces traditions,
c'est un Hhre penseur; et, si un aune ne croit rien de plus qu'~
l'existence de Dieu, parce qu'il no. trouve rien de pins dans la nihk,
qu'H lient, sur la foi de i'~tisc, pour la parole de t)ieu, c't'st utt
croyant. Les réformateurs étaient les Hhrcs penseurs les plus pro.
nonces, et pour beaucoup d'homme:! cxccticnts le protestantisme n'est
pas autre,chose que taHbcrtc dépensa c'est-à-dire que tes protc.s.
tants doivent rejeter tout ce dum ils m' peuvent se œnvnincre par eux-
metnc' Comme je souttaite qu'ils soient conséquents, j<!voudrais t)ien
qu'it en fut ainsi. Mais alors i) n'y :'urait plus de luthéranisme, (le
t-eHë'on reformée, de déisme, dt; natut-.dismt', etc.. h' c:)thfHcis)ne et
le protestantisme représentent des idc'cs tout a fait opposées le ptc-
mier, une idée positive, c! te second, une idée négative.
CONStDHRAT!OKS328
nous t'nchaim'xt encore a des livres symbunqucs, quandil est si rare de trouver des hommcsqui arrivent parleurs
propres recherches auxrésultats contenus dans ces hvres?
–que veulent-ils donc véritablement? Desque nous nous
lassons imposer une proposition, comme étant etabtic
antérieurement a toute recherche, ou bien il nous faut
renoncer a tonte saine logique, ou bien nous devons ad-
mettre le catholicisme !e plus grossier et. te ptus dur. Je
sais bien que parmi les protestants xeicspourtours livres
symbotiques, quelques-uns voient ccJa mais je sais bien
aussi quets sont.ceux qui voient cela et nous le montrent
assez clairement dans tours écrits; je sais bien que! partia d'abord attire avectant de xeiel'attention sur ces choses,et tout !c publicle sait. Ces protestants zeiosne scraient-
ils point par hasard les instruments de ces hommes qui
l'emportent de beaucoup sur nous par leur esprit consé-
quent et leur habUete? Je ne sais rien desjésuites et des
machinationsjésuitiques, mais quiconque a des yeux pour
voir et une tête pour joindre ensemble deux propositions,
peut savoir que! vaste système d'obscurantisme a été
sourdement prépare, et quel est l'unique moyen de !c
mènera bonne fm.
L'Ëtat et rËgnsc sont donc distincts l'un de l'autre,
i! y a entre eux une limite naturclie que ni l'un ni l'autre
n'ont le droit de franchir. Lorsque l'I~Iise s'arroge une
certaine puissancedans !c monde visible~e!ic est infidèle
a son propre esprit et elle a~it d'une manière évidemment
injuste. De son côte, t'i~tat n'est nunemcnt ohh~e, et en
gt''neral il n'a pas rnemc!e droit de s'informer de nos opi-
nions sur le monde invisi!dc. Maisreste encore /</ ques-
tion de savoir si dans certains cas la /c~cp ne peut pas
!e consciHer, et jusqu'à quel point il est fonde a suivre
srn t.A HHVOt.i'TtONFn\Kn,usE. 320
ici ses couseils. Nous traiterons aussi cette question. :uin
de.mettre notre pensée l'aln'i de toute fausse interpré-
tation.
Une Eglise peut imposera ses membres des obligations
contraires a ccUesqu'i!s ont comme citoyens. 0"~ <!utt
f:m'~ un Mtat, lorsque cotahti f'st rcY.')!~par <tosmanit~s-
tations positives?– Si t'~tat tt'cst appelé a ju~'r qnc sm'
des ac~'s, et non sur des opinions, son ohH~ttion <mce
cas ne comn~nœ que (p'an<tune opinion ccch''siastiqne
est passer en acte chr'xquc~p!~ citoyen; il a atorsapnnir
Ïc faiL Maisun Ktat sa~c aime mieux pr'vcnir nnacto
quf <~ le punit' âpres coup; il aime mieux !'cmp(''c!!L't'
qncdes'cn venger. i!icn; mais comment peut-il savoir
que telle ou tc!!o opinion (teses citoyens passera r'el!e-
ment (tans les actes? L'i~nse a impose a un citoyen une
certaine obti~ation et it t'a acceptée, t'~tat ne sait si
c'est (le bonne foi ou hypocritement. L'état uoit-it ad-
mettre que ce citoyen est loyal envers t'élise, et qu'i!
a~ira conformément a ses principes? H scmbte. Mais cc
même homme a accepte une obn~ation toute contraire
envers l'Etat. En vertu du même principe, F Etat devrait
admettre qu'il a aussi accepte toya!ementcette obii~ation,
et qu'il agira aussi conformément a cette obligation; et
alors l'obligation ecclésiastique et l'obligation civile se
supprimeraient réciproquement dans sonâme. t/I~lise ne
peut arracher, par des moyens extérieurs, l'acte exi~e;
l'Etat !c peut au contraire, et par conséquent il a lieu de
compter sur sa superionte.–Mais on connaîtla puissance
des opinions religieuses sur les âmes des hommes; plus
sont grands les sacrHiccsqu'exige l'irise, et plus on lui
obéit aisément; on lui obéit.souvent par cela mémoqu'en
la servant on aHronteun danger ou la mort laplus terrible.
(:U.\SU~:t!ATH~'S330
–Je pourrais rt''pu)tdrequel'tatuu la S(n;irt(''peut com-
battre ce t'anatistuc aver l'anne qui mmsaetc pruprement
donut'centre lui: la t'rui<!<'<'tsai))eraisun;(pK'c'est pourelle un motif de plu~ de multiplier les n~estu'es propres a
éclairer et.'t('uttiverl''s<'spriis,<(pte de cette manière
cite 60 mettra (te mieux ett mieux a l'altri (te la uueur re-
ligieuse. Mais si elle m' cotnpr~nt! pas ccia? Qn'uiin ns<'
ah'i's de ses di'oib.
L'Ktat ne peut. contraindra pcrsunnf; à entrer avcchu
dans ie contrat ctvi)~ nui hcnnnc ne saurait davantage
contraindre i'i'tat a rvadntcttrc, (Htand ïncnx' cchn-ci
n'aurait pas déraisons ibndccs punr in rciuscr, uu quandil ne vondrait-iui en dunnernucnnc. Le:!deux parties sont
c~aicment libres, <'t te pact<' est volontaircntettt cottctu.
L'Ktat craint-il qn<! certaines opinions aient ()cs consc-
qnotn'cs tacttcuscs, il peut rctnscra tuns ceu\ (pu y sont
notoirt~ncnt attaett~si'' titre <!ccitoyens; Hpeut, en con-
ctnant !e contrat''ivit~~xi~cr que cttacun lui donne sa
parade qu'il n'a<hnct poittt <'cs <q)ini<ms. Ct)acun a ic
droit do sortir (tu l'Etat, d)''s q't'ii te veut, r~tat ne peutic retenir; t'Ktat a donc e~deinent le droit d'exclure quiil veut et des qu'il te vent, même sans en donner aucune
raiso)), mais a condition de ne point porter atteinte aux
dr'uts que celui qu'il exclut conserve cotume homme, a sa
propriété et a la liberté qu'it a <lese fixer dans le tien quilui convient, counne nous l'avons montre dans le troisième
chapitre. Quel'état use de ce droit qui lui appartient con-
tre ceux de se~ citoyens qui, ap:'es être entres dans le
contrat civit, se sont notoirement attaches il des opinions
qu'il croitdanQcreuses.–Je ncsuis pas ici en contradic-
tion avec ce que j'ai dit plus haut. J'accorde a l'Etat une
surveillance sur les opinions; mais je dis que
SUHL~ PÉVOI.U'riONFHAK'AtSK SS'J
tonte direction est un si~ne de lailtlesse et de
folie. L'Etat peut det~'miner <-<' qu'ou ~c doit /s croire
pourêtre apte aux droits de citoyen, mais il est<-ontrair<'
a sa tinetabsurdp de déterminer ~y~'<<croire pour
avoir cette c~})a<-it~. Jevui> hicn puut'quoi
un Ktat ~~<'
n<: saunitsonth'!t'dcj'suitcs <'<n)S)''<tHC!tts, !naisjcnc\<)t6
p~s p~m'i"ii! ~c (tcvi'ait pa~
suuM'ru' i's atttccs. I<ps
p~emici~St'i'unt (tcrit)jnsticc undt'Vt.ur: if~uK'th'nt i'~tat
c~ pcni; h~ dct'ni's, d'apn's i'upmiun q't'uu s'un f:ut
<'(''n<ralcn~'nt,ne refunna~nt pas <)c <!<uit': cch ne
iaH l'~n a i'Kta~ qui a la foj'cc phys~u<' pour contnun<h'c
les citoyens a ï'cmp!h'~s uht~ati'uis cnvf'~ hu, qu'its
le iasscnt on non avec ptai~r.
Pc ta découlent i~ droits d'un J~ai ~n n'ohtti~n sur
!c SYStcrneccctcsia~ti({uc.h pt'ut
ta\t'rrt'r)ain'~ dochmos
Je relise, qui n'cxchfa~'Ht pas p)squ<"ia du droit de
citoyen, parce (pi'dicssont contraire a ~cs nt'nv'.ntx
principes poiitiques; H pcnt ''xi~r de t'~ts (eux qui rc-
dament le titre df citoyens, ienr par<deqn'i~ont renonce
a ces opinions,et rendement ~otennc! de renndir les
nouvettes oLii~tions que ce titre h'ur in'posc', quelque
contraires qn'encssoient a tenrs anciettncs (toc)rines; il
peutexch're (te ta L'onnmmau!e et de ta jouissance
(!e tous
les droits civils ceux qui ne veulent pas prendre(-et en-
~emcnt.Maishors de ta il n'a plus aucun droit sur eux;
teur propriétéet leur liberté persounelte
doivent rester
intactes Une s'ils l~nt putdiquemeutou secrètement ta
~norre l'I~at, alors seuleutent celui-ci acquiert un droit
sur leur liberté personncite,et ce droit, il l'a sur eux, non
pascomme sur des citoyens,
mais comme sur des hommes,
non pas en vertu du contrat civit, tuais du droit naturel,
non pasconnue droit de les punir, mais de les combattre.
CO~StHRRATtONS332
Il se trouve a leur e~ard dans le cas (te légitime défense.
Mais ta principale source des dinerends entre l'1'~lise
et l'état, ce sont tes biens (ju'elte possède dans tu monde
visible; un examen approfondi de l'origine et des droits
de ces biens peut seul résoudre toutes les ditncultes (j'u
restent encore.
L'H~Hse, constderee comme tcHc, n'a de iorces et de
droits que dans le monde invisibte; eHetren a point (tans
ïe monde visible. La un champ immense, sans homes, est
ouvert aux conquêtes de sa foi; iciette ne peut, au moyen
de cette toi,–son unique instrument,–acquérir aucune
possession; cardans ce monde,–j'en demande pardon a
certains professeurs de droit nature!il faut, pours'ap-
propricr un bien, quelque chose de p!us que !a volonté
de le taire notre et la croyancequ'il l'est devenu. Un mem-
bre de l'H~lise peut posséder, mais non pas 6W~ïc mem-
bre de l'Enlisé, en vertu de sa foi; il ne le peut que
comme membre du monde sensihle, au moyen de ses in-
struments physiques. L'élise ne peut pas posséder, comme
Ë~isc ce qu'elle possède, elle ne le possède donc qu'en
vertu d'un contrat, non pas sans doute d'un contrat de
travail, –cite ne peut pas travailler, mais d'un contrat
d'échange. Elle échange des biens célestes qu'elle possède
en abondance, contre des biens terrestres qu'elle est loin
de dédaigner. L'I~lise a des fonctionnaires qui ne vi-
vent passeulernent de foi, mais qui ont besoin aussi, pour
se conserver, de nourriture terrestre et de boisson terres-
tre. Il est dans la nature de toute société que ses membres
entretiennent ceux qui consacrent leur temps et leurs
forces au service de la société; les membres de la société
ecclésiastique sont donc sans aucun doute obligés de nour-
rir leurs fonctionnaires. Cela peul se faire au moyen de
SL'B L\ HKV'HJTtON t'R.(;tSH. 333
contributions/c6cy'~ par la loi, laquelle, sur ce pointaussi Incn que sur tous tes autres possibles, s'impose A
ttous connue un principe de toi nécessaire an salut, de
telle sorte qu'il soit impossible a celui qui ne s'y soumet
pas d'échapper a la peine (te la damnation éternelle. Celui
qui acquitte sa contribution l'acquitte donc pour être
sauve; ce qu'il donne, il rechange contre le ciel. Ou
Lien les contributions sont t~e~. Or, lorsque !'on
donne réellement a l'I~lisc, en tant qu'elle est l'i~lise,
Ct non pas seulement il une personne qui peut être acci-
dentellement membre ou fonctionnaire de l'Eglise, c'est
que l'on croit a i'h~ise, et que par conséquent, on a l'es-
poir d'être sauve par la ~racc de i'K~nse. Si einm t'en
cède des biens terrestres a r~nse tout exprès en vue
d'expier certains pèches ecclésiastique~ ou d'acheter une
plus haute béatitude c''teste, rechange est alors manifeste.
De cette origine des biens del'E~Hse découle une con-
séquence importante.–Un contrat n'est exécute (comme
nous l'avons montre plushaut, lu. ~1-1~2), que quand il
tombe dans le monde des phénomènes et que les f/c~r par-
ties ont tait ce qu'elles avaient promis de faire. Un contrat
d'échange de biens terrestres contre les biens célestes ne
tombe jamais, du moins en cette vie, dans le monde des
phénomènes. Le possesseur des biens terrestres exécute
sans doute le contrat de son côte mais le possesseur (les
biens célestes ne l'exécute pas du sien. Ce n'est que par
la toi que le premier s'attribue unepossession en échange
(le laquelle il ne cède pas seulement a l'K~lisel'espérance
de ses biens temporels, mais la possession réelle de ces
biens. Qui sait s'il a réellement foi en l'I~lise? A suppo-
ser (m'ii ait cette loi, qui sait s'il la conservera toujours,
ou s'il ne la perdra pas avant de mourir? Qui sait si
CONSIDÉRÀ'HONS33~
l'I~lis); a l'mtention de lui tenir parote? Si, quand même
cHe aurait cette intention, etien'en dtan~ernjatnais?
Qui sait site contrat entre tes deux parties est réel ou non?
Personne, si ce n'est celui qui sait tout. Une des deux
parties ou toutes deux ensemble peuvent a chaque instant
reprendre leur volonté; la volonté des deux parties ne
tou.be donc pas dans mnnd~ d~s phcnon~ncs.
Lo possesseur dt'sbicns torrcstrcsa, il est vrai, cx~utc
lu contrat, pour sa part, it a t'ccn <'n o<'han~c le droit
d' <{n<'l'I~Iisu t'cx~cut'u'a aussi do son cote il
pcn~uuesapropri'tc'\st.ccll<!<!cri~lisc;mais Voici
qu'il cesse de ct-oire, soi~a ta bonne volonté de r!isc,
soit au pouvoir de le sauver qu'elle s'attri!)ne; il n'a plus
aucun dedonnna~etnent a osperer; sa volotde est change,
et son bien suit sa volonté. 11était toujours dcïncnr~ sa
propriété; a présent il le revendique réellement. S'il y
a un contrat ou l'on ait le droit de se repentir, c'est as-
surément le contrat d'échange avec l'I~Iisc. Point de
dommages et intérêts! Nous n'avons point détériore les
hicus célestes de l'I~'Iisc; l'Irise peut les reprendre, en
nous inni~eant, si hou lui semttte, ses châtiments, son ex-
communication, sa damnation. EUe esHibreacet e~ard.
Si une t'ois nous n, créons plus a l'I~lise, tout cela ne
t'era pas sur nous une grande uupressi"n. -Je n'envisage
eut'orf ici l'I~lise, en ta!)t<m'ellc est I~lise, <mecommc
possesseur de nos l)iens. Nous verrons tout il l'itcure ce
qui resuite relativement aux dommages et intérêts, </cc<?
/< qu'un fonctionnaire de l'I~tise possède ces biens,
comme personne dans le monde sensible.
Mou père a cède a l'i~ltsctous ses biens potn' le salut
de soname.H meurt; et, en vertu du contrat civiIJ'cntre
en possession de ses biens, a la condition sans duutc de
SL'B1.~ nKV~f.UTtON!HA~(SR. 335
rcnndirtoutes tes uhti~ahcmsuu'it a attachées par d<'ve-
ritah!es contrats a ta jmssession de ces biens. Il il conclu
aveet'tisc un contrat a tcur sujet, mais ce contrat n'eut.
jamais tombe dans to monde des pttenometu's: itne se
tonde quesur ta toi. Si je ne crois pasat'~tise.un tel
contrat, est. mn pour moi; pour moi, t't'~tise n'est rien,
et itnund j<! rcvcnttiqucteshtr'nsttc tnon {H~jc ne porte
ttumuinsitttcintt' :tn\dt'otts (te personne.–f/~tat ne doit.
)tom; pasnt'<'n''ntp~chet'. f/~tat., M~~y~ Ktat, ''st. tout
aussi incr'dnh'qncn~'i;otnnw'~tat,nn<'('on!tatt pas
ptns t'Ë~i~ qn'' m' ~'Hf 'cst pas pLts (pu'tquc chose
pom' ini <nu' p"nt' moi< ainsi (pm nous l'avons !no!ttr< p!!us
!taut; ihK' peut (h'icndreics prétentions (h~ tpu'h~nc cho~c
qui n'cxistcpasa ses ycnx. Mais mni, jf suisqnct~nc chose
pour tui, d d est tcnn <!<; n~ prot<r <'ont~ <c néant.
Ihn'a attribue ia possession()'' m'js hicns pat<t'n(~s, a la
condition que .je ne m'approprierais ies hicns d'aucun
autre citoyen mopt. J'ai remph cette condition; it est donc
tenu, aux termes du eoutt'at,de tnc protenord!'ns!a pos-
session de ces biens. C'ct:ueut toujours tes biens de
mon perc~ itssont restes ses biens jusqu'à sa n~rt; car
ce centrât'mi est md et non avenu <tevant te tribunat(!u
droit, naturel et devant c<'tm (ht ()roit civit',n'a pûtes
ntiener. n lui était sans doute'hicn permis d'en taire li-
bretnentt'abandf'n,otj':tur:uspupartuonsitenceconnr-
mf;t' sit 1 l c~ f~;IS "1" t~rlmcr sa Yotcute (!aus ce f'as t'~tat u'aurnit p.'ts ett'' uusen
renuisitiou. Mais~ présent je ne connrme j~seettr' votonte,
je nTets t'Htaten réquisition..<e puisttien renoncer a mon
droite maist'~tat uf.'te peut pas pour juoi. -Mais mon
pèrea cru; (~e contrat était omi~at<'ire pour tui: -–lia
paru croire; je ne sais s'it n cru reeUement, et je uc sais
pas davantage si, a supposer qu'it existe encore, il croit
COKSiDHtL\TiU?<S330
encore a présent. tjuoi qn'n en soit sur ce point, je n'ai
point anaire a monpère comntc a un membre (tu monde
invisible, mais comme a un membre du monde visible.Il
est mort, et je prends sa place dans l'Etat. S'il vivait en-
core et qu'il se repentit de sa donation, il aurait bien
le droit de reprendre ses biens. S'~Vavait ce droit, l'ai
aussi, car je suis lui-même dans l'Ktat.je représente la
même personne physique; pour l'État il n'est pas mort,
il ne l'est que pour moi aux yeux de l'Ktatil u change de
volonté dans mapersonne. Que si mon père n'y consent
pas, qu'il revienne dans le monde visible; qu'il yreprenne
possessionde ses droits, et.qu'il use de ses biens, qnire-
devicndrunt :dors les siens, comme il t'entend. Jusqnc-1~.
j'agis en son nom. Mais,puisqu'il est mort dans la toi,
il serait plus sur d'agir conformémenta il m'est.
bien permis d'exposer âme, mais non celle d'un au-
tre.–Oit! si je pense ainsi, c'est que je ne suis pas encore
décidément incrédule envers l'i~lise; j'agirais alors d'une
l'a'on inconséquente et insensée, même en n'exposant que
mon âme. On l'église a dans une autre vie un pouvoir
executif, ou elle n'en a aucun. il faut que je sois bien dé-
cide sur ce point. Tant que je ne le suis pas, j'agis plus
sûrement en ne touchant pas au bien de l'Eglise; car
l'Kglise mamtit, jusqu'à son dernier jour, celui qui lui
ravit s<'sbiens, et elle en a parfaitement le droit. Le
druit tte revendication que possède le premier héritier, le
second l'a aussi, et le troisième et le quatrième, et ainsi
toutes les générations succcssivemement car l'héritier
n'hérite pas seulement des choses, mais de certains droits
sur les choses.
11y a encore d'autres conséquences qui résultent du
principe précèdent, et nuus n'avons aucune raison d'en
srKt.AHK\"H;'t'tU~ t'HA.\(JALSK:~7
supprimer une seule. Quand même cites seraient tort res-
treintes par des considérations utterieures, et quand elles
n'auraient fx'iMtd'application dans ta vie, cites auraient.
encore t'avantu~e de faciliter t'intclti~ence do l'ensemble
et d'exercer la retlexion. Non-seulement le légitime
hen~ier on ':dm (jm est ap~'h'; a sa ptacc a l'ccuedhr
i'tK'nta~c, mais tout. homme, sans exception, a ic
di'otLde s'appt'~pner des !nens qui ne sont qnn des biens
d'anse. L'Elise, connue <.enc, n'a ni ibt'ce ni droits dans
ie monde visible; pour cehn rnii n'a point i"i en eUe.eite
n'est rien; ce qui n'appartient, a personne est la propriété
du prenner venu qui se t'approprie en vertu d'un droit
valable dans te monde des phénomènes. –J'arrive en un
!icu (je ne m'occupe pas ici de savoir si ce lieu porte ou
non ta trace du travait), et je me mets a te travaiitc!
ann de me t'approprier. Tu viens et tu me dis «Retire-toi
d'ici; ce iieu appartient a i'~tise. » Je ne sais ce que
c'est qu'une Ëgtise,je ne connais point d'h~tise; que ton
!~lise me prouve son existence dans te monde des phé-
nomènes je ne sais rien d'un monde invisible, et la puis-
sancc de ton Eglise dans ce monde invisible n'a aucune
influence sur moi, puisque je n'y crois pas. Tu aurais
beaucoup mieux fait de me dire « Ce lieu appartient a un
homme de la lune; » car, si je ne connais pas l'homme, je
connais la lune, tandis que je ne connais pas ton H~Hse
et que je ne connais pas davantage le monde invisible ou
elle doit exercer sa puissance. Mais laisse ton homme
vivre dans ta lune, ou, si tu le iais venir sur la terre,
dis-lui de me prouver son droit antérieur de propriété sur
ce lieu je suis un homme de la terre, et en attendant je
veux m'emparer de sa propri')e a mes risques et périls.
Mais les membres de l'relise sont en même temps des
~2
CO~StDHRATtONS33S
pel'SIJJlIWS.lam; le lHoUllecOl'pol'l~I;ils uut, e011lllWtels,personnes dans le mondecorporel; ils ont, comme tels,
des forces et des droits dans ce monde. L'Eglise, comme
société spirituelle, ne peut en ~én~ral posséder de biens
terrestres; il faut qu'elle les an'ermcades personnes phy-
siques, qu'elle considère comme ses tenanciers; devant
son tribunal ces personnes ne sont pas propriétaires, mais
simplement possesseurs. Maisque sont-elles devant le tri-
bunal du droit naturel ou du droit civil, et quelles res-
trictions en résulte-t-il par rapport Aces droits sur les
biens de l'Kglise que nous venons de déduire?
Un tenancier de l'Eglise possède un bien (mi est ma
propriété; il te possède soit par l'en'et d'une cession anté-
que j'ai laite moi-mêmeà l'Elise, soit par suite df
lu succession de mesparents qui l'ont cède eux-mêmes.
,le reprends mon Lienou je le trouve; je ue m'occupe quedu ~/ï, non deIa/M/!M<?. Le possesseuractuel qui de
bonne foicroit a l'Ëgtisc, qui re~'ardf le bien comme une
propriété de l'Église et lui reconnaît te droit de le lui livrer,
se trouve ainsi lésé il a compté sur une possession du-
rable il ne peut vivre si je la lui enlève. Suis-je tenu de le
dédommager? -Je n'ai point du toutau'airc lui ce n'est
pas a lui, mais a l'Église, que ce biena été cedu, soit parmes parents, soit par moi; l'Église le lui a loue c'est parc//c qu'il est lésé, c'est Aelle, et non a moi, qu'il doit
demander une indemnité. Si mes parents ou moi lui
avions loué personnellement ce bien, il aurait alors dc~<
droits sur moi, non comme membre de l'Église, mais
comme membre du monde visible; a présent il doit s'en
prendre à l'Église. Maisne serais-je point obligé par
hasard a une indemnité envers l'Eglise? Si je n'y suis
obligé envers aucun de ses membres, en tant qu'ils sont
membres du monde visible, et si je ne l'y suis pas,
SL'H L.\ UÈVOLUTtON t~n.~CAtSt:~9
,.arce qu'aucun d'eux n'a, connue têt, conctu du cuntrat
avec mot, ne l'y suis certainement f~asenvers
t'Élise, consider.-e comme société spiritneiïe. Ktte n'a,
sous ce rappurt, aucun droit dans te monde sensible, et
ctte n'v saurai imposer aucune ob~ation. Sije ~ns tcm.
(k' ta .icdommat~ c'st en biens spirhu~, car c'c~ t~-
d~us qu. pcr~ n~m ma~hc; .'t a e~ud tdtc p.ut
n~rcut- pkmcm.-td moi sut..h-ui! d~ r<t''sadh'
KHcpf'ut nous tn-iYcr,n'es parcnb moi, dps cc~sU'.
faveurs ~a'ct~ distribu.' ~t. peuti<-s rcp~r sur cctut
.~ui s'~st trunv~ b'sc dans mut.d<:scnsibh' par ma re-
vendication, ~chu-t-iv~bi~ s'en ~nh'r; ceta rcsk-
a sa disposition. Si tenancier de t'~nsc a, connue
p~sess.'nr. ann'diore nw.n bien et a an~ente sa vatcnr
dncra pasiait L-utnmcnu'tnbrc d.' Il~hsc,
dans la pcns~ de rincrcdntc la toi n'a:ncnorc aucun h~cn
tun-estrc, mais co.n.n~ membre dn mond.- scnstbte, a
l'aide de ses tacites corporeii~, ou de leur signe, c'est-
à-dire de sun argent, je suis tenu de le dedomma~er
dc ces amehorations car comme membre du monde sen-
sihic, il peut certainement avnir des droits sur m<u. (~
am~iorationssunt-ehesdues a t'aient dératise; d'après
,na propre contession.jc ne s~ rien de !Hse. La Yateur
pn réside dans le monde sensible; c'est ie t.-nancier qu.i
est propriétaire a mes yeux, c'est lui que je do~dedom-
,na~er S'il se croit personnetiement ub~e de remettre a
r~Use ce qu'il a reçu de moi, cela le regarde d peut
taire a cet e~ard ce qui lui convient. Maissi les ame-
tiorations de ma propriété consistaient en bem'.d.cUon.
spiritueues.cb.s qui n'existent que pour ceim qmy
croit; si celui qui l'a possédée jusqu'ici pn'.tendatt avon'
fait descendre sur mes terres, par la force de sa im, une
(.O~StUËRA'nu~S3AO
fertdhe particulière, ou en avoir citasse, par ce moyen,les mauvaises Iterbes, les mulots on tes sauterelles, je ne
lui devrais aucun dédommagement; cnr, d'âpres mes
principes, je ne crois pas que ses prieras aient pu avoir
t'ettc enicacite, et il ne peut me leprouvr. Si mes terres
ont réellement 1. une t'emarqual)le fertilité, si elles sont
r't'Uct)tcnta i'abride tous ces n<aux<!<'schamps,– sais-jr-~iccta ne ticn~ pas a i<~n' nature, uu, dans h~ cas (~t il
iaudrait. voir ta i'cncL d'une t~'ncdiction surnatnrcUc, si
''eHc h''uu''diutiutn)c m'a pasctc pcrsonncucm~ntdcstincc?
(Ju'H muretire la main (pti faisait, descendre les henedie-
tiuns sur mes terres, qu'il les frappe de sprinte on appeUesur mes semaines tes insectes malfaisants, s'il pentie faire
par ia seute force de sa foi, il en est maitre.
Si je n'ai point le droit de revendiquer expres.semen!un bien que possède un tenancier de Pr~Hse, c'est quecelui-ci est propriétaire ~c~ H a i)eau croire
qu'i!. ne l'est pas et qu'il dépend d'une i~lise cela ne me
donne aucun droit, puisque je ne crois pas a t'K~lise et
que l't'~use n'est rien pour moi. Je ne reconnais dans le
monde visible d'autre tribunal que celui du droit naturel;
devant ce tribunal ie propriétaire de la dernière forme
est propriétaire de la chose, et je dois le tenir pour tel,
quelque croyance qu'il ait lui-même a ce sujet. Je respecteen lui, non les droits de l'I~lisc, mais ses propres droits,
(m'iUes connaisse onnun;y<~dois me montrer ndelea
Mt~ principes. Ce droit de s'approprier le bien de l'K~'Iisecomme n'étant la propriété de personne n'a donc Heu que
quand ce bien n'a point de possesseur; et comme ce cas
lie se présente que rarement ou jamais, lus conséquencessont peu importantes pour nous. Mais elles le sont beau-
coup pour le tenancier oe l'Eglise, il est propriétaire
srR L\ n)~'o!.r'r!f)~Fn.f:tSF. 3~
selon te droit naturet, tors<fu'it n'vata pet's'mne qui
puisse prouver l'antériorité de ses (troits. Que s'it at~jm'e
safoient'~tise.itest atorstmveritabte propriétaire:')
tous tes points de vue. t~rsonne, excepte j't'~tise, t~'
j«mrr:n~ lui r~;n''H'hfr)h's<" <'omtni!'<'<'n [~'op!<ait'c
n'ct.H rf't)()uss);:utjot)t'(t'hui<'u)!c cr«\:m<'<wnt'tist~
)'!h-tt'('\is:<'ptust)<)tn'!)ti,tt'<)H''pcutp'u't<'r:tU('int''
:nt\ <h'<yits~c <-f <pti n't'sL p: –t~st c'mun'' si un
nmrchanttct'uyaih~rnass'wi. av~c un habita! <t~Ia !nm'.
TaHtqu''i'i'c dt~'fH'' association comnx'~ia~' dm'p
dans son ima~tnatiu!t,it)H'nL put't''rcxa(-t<HK't~sut'~s
!ivt~s, aucompt'' <tcsonass«ci< nnf par) <~s h~'n'
ticps;mais,si parfoisiN'rnsh'o un j[~ttsonassoci<q))i,
f'xœptco'iwi-ci,am'ait !R droit (k hti rn <i''man<)<'t'
conu~c? (ht, si c<'Mc i(h' vient, a <Mspfu':Htrc (~ son ima-
~inaHon, qm voudrait. t'ctnp~ch<'r (h' s'approprierie si'
et. tes benetices de son ussocic inia~inaire et <tc rnodiher
ta raison de commet ce qu'it avait afîicttee jusqnc-ta?
On ot)jectera peut-être <pte ces princij'es iavoriseraient
puissamment rincredntiteil t'e~ard tt<; t')~tis<cn la pré-
sentant cotTtmcquetqncchose de si avantageux; mais je
ne puis m'occuper de toutes tesconse(mencesde nies
principesdes (m'eties
sont. exact-eme!~ déduites dp prin-
cipes exacts, je n'ai t)oi)tt:'t etw'rctter ce (fui en doit re-
suttcr. Si t'M~tisc il raison, i'incredntu n'aura pas joui
impunément(te son ~aiu ternporeh il sera eternettemcnt
damne pour ce t'ait. H faut iaisser aux ~eus h'ur tihertc.
Cetui (tui aim~ mieux être riche en ce monde et dfmme
dans t'autre que pauvreici-bas et bienheureux ta-baut, il
bien !c droit <te suivre scsnoùts a ses risques et perits.
!at)pticati~nde ces principes
a t'État est facite. L'I'~at 1
es) :'t t'e~ard de t'i~tise. considérée comme memttre du
3/)~ CO~StHKn.\T!OP!S
monde sensible a cause (h ses possesseurs sur !e sut du
ce monde, comme un particulier a l'égard d'un particu-
tier; its sont soumis, dans leurs rapports réciproques, au
tribunal du droit uaturel. L'Etat n'est l'état qu'on vertu
(h: l'unanimité. Si h's membres (t~!tat Hva sans
(Ht'cque h's fonct!n!tan'cs de t'is~ outes c<;ch''sia~tn{ucsf'n t'ont,par~c comme tes antres rctus~U <'n mthuc
temps(!'un cummmtaccord obéissance a H~tise, celle-ci
n'existe ptns pour cet État; il a tonsies drons qu'numit
dans t'urdrc nature! t<mtimHvidnqni ne croirait a aucune
t~tisc.
L'État, sons tes conditions indiquées pina haut et en
vertu des principes précédemment deveioppes, reprend
avant toutes choses tout ce qui lui appartenait antérieu-
rement comme /<c /<p, comme bien commun
de tous les citoyens,je ne dis pas tout ce qui se trouve
1 l, cllr'uccul)t'ntscs cit~:vcrls; i'l:trltIl'(;st.liasurtc-~dans ~space qu'occupentses citoyens; i'~tat n'est pas une
pièce de terre, maisune société d'hommes; il ne se com-
pose pas de champs, mais de personnes. Si l'Etat n
kn-memc, au nom et comme intermédiaire de FË~ise,
loué les biens ecclésiastiques aux possesseurs actuels, il
n'est pas sans doute oblige d'observer un contrat passravec (pielquc chose qui n'existe plus pour lui et dont par
conséquent il ne peut plus être l'intermédiaire; mais il
est ohli~<de dédommager !<' possesseur, qui se trouve
lèse par la faute de l'état. Cehu-ci doit. être consi(h'r(''
comme un privite~ et ce dédommagement auquel, il est
tenusc tonde sur tes principes développesplus haut dansle
quatrième chapitre. Si l'état n'a pris aucune part a la
concession de cette possession, et si l'I~lise a immédia-
tement traite, celui qui se trouve lèse n'a nutlemeat le
droitde rcctamerde l'état une indemnité, tout de mente
srn n~von'ïtONpn~~çAtS! ~3
que devant te tritmnat du droit naturet il n'en am-au
aucuns exiger des individus. Cela peut paraMreen bien
circon3!anc~dur,o.ppressit\ peu équitable; ma~scela
,~st pas précisément injuste. L:~douceur et nnunan~
<-onscUh-ntp.s clames <~oscs.p.. np commande pas
~uncut kdr.~natu. ..t n bien pcrm~ dans
les .crits phUosophiqn.-s,.te sopar.-r n~t~mcnt c~ deux
ttomaines.
Tout citoyen en pai'ncuhcr reprend ceùquot il prouve
(.u';i a dnnt do pr6~ndre. T.'us les parHcuHers peuvent
abandunncr a rËtat tenrs î~Himes pretenHons les
b;en8 de n~ b's btpns d~ parHc'di<~ deviennent
:do!'s.~ prnpri't6.Si le h~Himeh~nHerde certains hiens ecciesiastifptc~est
inconnu et sic'est une toipnbti(ptc déjà existanteqne rKtat
hcritn (te la propriété des t'amines éteintes, tôt (pu ne
ya pas (rcUc-m~ne, mais qui doit avoir été expressément
~tabtie par ta volonté generaie, t'Ëtat est alors ic pro-
pnétairc de tous les biens ccdcsiastiqucs (pli ont été no-
toirement ccd.'s a l'Élise par d'anciens citoyens auxquets
on ne trouve pas d'héritiers. Je dis ~o! car, si
vraisemhtabte que puisse être !a chose, une simple vrai-
~embtanccne .unit pas a l'onder de 1~-itimes prétendons.
S'il n'y a pas en ancrai de loi de ce ~-enre, ou si l'on ne
peut prouver que la loi trouve dans ce cas son application
particulière, comme tous les biens ecclésiastiques, au sujet
(lesquelsni l'État, ni un particulier ne peut prouver son
droit, cetui dont.ils'agit ici n'est la propriété de personne,
~t il appartient au premier qui en prend possession, c'cst-
a.dire sans doute a celui qui en a été .jusqu'ici le posses-
seur réel. Ondoit te regarder comme propr~'tan'e, et
personne n.: sanrait s'emparer de sa possessioncontre sa
(:(~StDHn\T!0\Sw<
votonte. Si ce possesseur, qui es) maintenant tn'oprietaire,
est citoyen,il il, parmi
s''s droits de citoyen, cetui de
transinettre héréditairement sa propriété, et il peut, par l'
conséquent, té~uer a ses entants ses biens ecctésiastiques,
a moins qu'iin'ait conctu:'t cet'ard avec t'~tat quelque
contrat particuti<
Mais, comme on ne peut ~uére attendre que tons tes
membres (h; i'i~at rP)CUc!tt en !nmn<; tontps a t'unanlinih''
!a c!'o\'anL'c il i'i~lisc, et qn~ par consr<p!<~M l'ancionKta)
snhsist''tont<'nticra\<'<-tc r<'st''<!c scsth'oitsf'Uh's~s
obti~ations: conmn' du contrai~' u:))' tc!h.' dissohthun (.!<'
!tisc n~ peut arriver qu~ par un~ r<ohttio!t, ou
Hn'cMRn' tnan<~ucrait pas
<ht !noins d'en pro<hn)'c tttt)\
cp qui pr(!c~<k;est moins un principe nppncahh'
dans tp
mundc rcct qu'une rc~h' de jugement. Mais œtte r<c
mente nous met en mesure de prononcersur te second
cas, heaucoup plus vraisetnhtabte, ouiesvoix des citoy<'ns
touchant n~hse seraient, partagées. S'i!s ne peuvent pas
se mettre d'accord et qu'aucune partie ne vcui!t<' céder a
t'autre, ~Ëtat est :dors en revotution.
Quiconque sort de t'Ë~ise a !c droit de revendiquer sa
propriété, qu'eue possède. !in'y a donc pas de doute qu'it
ne soi!, pcrnus aux membres qui se séparent ~ert'~at
votant pour t't~hse, de reprendre, soit mdividuencrnent,
soit en commun, en unissant leurs prétentionset tours
forces, tout ce sur (moi i!s ont des droits personneis.
Quiconque sort de t'tat conserve, comme nous t'avons
montre dans te troisième chapitre, sa propriétéet par
conséquent aussi ta part qu'it a fournie pour te bien
commun de t't~tat. Un citoyenisoic ne tcraitpassi
tacite-
ment usa~c du droit d'' ta revendiquer, parce qu'it n'est
pas assez tort pour se protéger mi-même il ne peutde-
SUR LA nHVOLU'no~ l.'H.\r«JAtSK. :w
mander cette restitution a l'état sans sn séparer de lui e!
sans su priver par1Hde sa protection, (pu lui est si néces-
saire. Mais, puisque ces membres plus nombreux et plus
torts se sont détaches de l'État et qu'ils se croient assez
puissants pour se protéger, qui pourrait les cmpecber
dc l'air'; valoir leur droit dans toute sa rigueur, et en par-
ticulier de reclamer de l'Kglise ce (pu leur revient pour
ieur part de la fortune publique consacrée a H~lise ?
L'ancien Ktat, qui demeure tidetc il l'Ë~isc, conserve sa
part, et peut la laisser a t'Kglise; il nesaurait disposer de
cette des membres qui se séparent (le lui. it résulte
ctairetnentde ce qui a etc dit plus haut que les membres
qui ont amené cette séparation sont oblig-es d'indemniser
pour leur part les tenanciers de l'Mëlisc, lèses par leur
réclamation, quand c'est l'ancien Ktat (pu a investi ceux-
ci de leurs biens; ils y sont obliges cow~' si
/< ~c ~< de ils sont au moins res-
ponsables du dommage comme partie du tout, et par
conséquent ils sont ubti~cs de le reparer selon leur part
a chacun.
Plus il y a de membres quittant l'ancien Etat qui croit
a t'Ë"-tise pour entrer dans un nouveau qui n'y croit pas,
plus la part de ce dernier aux biens de l'I~lise est accrus
par la réunion des prctentions communes et personncues.
Si tous ennn, y compris !es fonctionnaires immédiats dr
t'Mise ou au moins une partie de ceux-ci, se rangentL
du même côte, il ne leur reste rien qu'ils puissent laisser
a l'I~-tise, que leur petite part de la fortune publique et
ce sur quoi ils ont personnellementde légitimes préten-
tions. -Ce sur quoi personne ne peut prouver son droit de
propriété reste au possesseur, soit qu'illc tienne pour une
proprietc qui lui est acquise par droit d'appropriation,
w t.~SH~hATiONS SUR LA HËVOLUTt~ FhA!S<;A!St:
soit <pt'Hie ~ar(te comme un iiet' de i't~iise. L'état n'a
point le droit tic le lui prendre; s'it t'ait appct:'t i'oï'cu,
il a~it injustement utdudat'e ia ~uciTc a l'humanité.
Si cciui qui po~S(';dcainsi un ancien bien ccdesiasti~n',
qu'il se rogardc cunnnc un vrai propriétaire ou qu'ii se
croit' dépendant de t'i'~iisc, n'eut pas entre avec lu nouvct
~tatdans entrât civH, il n'a aucun droit de transmis-
sion héréditaire; et, après samort, i'Ktat peu~'appro-
pricr son bien suivant ic droit du prcnuer occupanteet
prendre d'avance avec ses citoyens un an'anpement<'tdes
mesures pour ce cas. Df cette iacon tous ies biens eccie-
siastiques dispanutraient peu u peu et reviendraient r~u-
ucrernent a t'Htat.
~VEKTiSS~MKFST Fi~ÀL.
1/autcur avait. lance tout. hasard dans te puhtic ie
premier volume de cet ouvrage, et il lui parut que ce
volume 6tait allé s'engloutir dans le torrent des nouveaux
écrits auxquels a domu''lieu le m~mc sujet.. Au nnHcu de
h~anconp d.~distï'acttons et d'etnpuch~monts it t'f'cuciUtt
tes matériaux (testin~s aux chapttrus du s~œnd, ptutut
pour tenir parole quelqu'un que dans l'cspci'ance de
voir le pubitc honorer encore cet. ccrit de son attention.
Bien que nul autre journal n'eût, <'tma connaissance,
daigne en dire un seul mot, dans la /~MC ~c/
dont je ne connais aucun collaborateur (~t"u je n'ai point
de correspondant, un noble écrivain, que je ne connais
pas, qui, je l'atteste, ne meconnaît pasdavantage et ne sau-
rait deviner qui je suis, et qui, le pourrait-il, n'aurait pas
le moindre intérêt &vanter un ouvrage de moi au-dessus
de son véritable prix, a bien voulu recommander cet
écrit presque oubue avec une chaleur (mit'ait le plusgrand
honneur a son cœur. En tait-cHe autant a son jug<mcnt?
c'est ce qu'il n'appartient pas il l'auteur de décider.
Cela m'a encourage merendre encore plus digne du sul-
i'ragc de cet honorable écrivain, surtout rclativcutt'nt a ce
qu'il dit.de mon style, et a réserver pour un troisième
volume les deux importants chapitres qui restent encore,
ahn de les travainer plus soigneusement. Pourtant l'au-
teur espère que rien ne l'empêchera de hvrcr ce volume
a l'impression d'ici a trois ou quatre mois.
:~8 CONStDËHA'nO~SSU!~LAHÉVULUTtU~i''HAN<tSt'
H lui est venu aux orcitles bien des plaintes sur l'obscu-rité du premier volume. Le puldic est trop accoutume il
entendre les écrivains soutenu' qu'Us ont toujours raison
et répondre aux plaintes (;u'on leur adresse au sujet de
l'obscurité de ie'n's écrits, en se plaignant a leur tour de
ta frivolité et de l'inattention de tours tcctcurs, pouruue
fauteur de cet ouvrage puisse trouver du plaisir il répéter
encore une lois une chose si souvent répétée. H consent
a être te seul coupahtc, pour peu qu'i! y ait aussi (te sa
faute. H ne demandera pas au lecteur de comparer son
ouvrage avec les autres écrits composes sur tes mêmes
sujets d'après tes mêmes principes; it ne lui rappellera
pas que les recherches philosophiques, où l'on s'attache
du moins a la solidité, ne se peuvent lire aussi aisément
qu'un roman il la mode, des récits de voyages ou même
des ouvrages philosophiques composes d'après le système
des opinions régnantes; il ne veut même pas, en lui épar-
gnant la peine de lire un ~'ros volume, lui donner celle
d'en lire de minces en plusieurs tbis; il n'ajoutera plus
rien sinon qu'il s'appliquera toujours a écrire avec plus
de clarté à condition que de son coté le lecteur s'appli-
quera toujours a lire avec plus d'attention.
NOTES'
Page 4, tigne2~. cequi nau~ cowMrne,t/ est p~~d«d~
?'«~'o~poxr M«<?)n~net{<e bo):<<'~'«, o!c. Tout ce passage est
troniquo Fichto y fait allusion au fameux edit do rétinien donne
on t788 par te ministre Wotncr, éditdont le but était du derfmtre
t'or<,hodoxiorei!gicuse et les h\rcs sacres cont-rcles at-tuqupsou tes
interprétations du raHonntisme, et. qui attira sur les iibros ponseurs
toutes sortes de pprsccuUons. Lo n)'~)siourCrunz, cite quotq'jes
lignes plus loin, ust qnotquo VeuiHot protestant do cette époque,
aujourd'hui parfaitement inconnu.
Page n. La doctrine dont il est question dans la note est !o
luthéranisme. L'orthodoxie tuthcrienne n'a mathcureusotnont paa
cessé de fairocause commune avec le despotisme.
Page 32, note. Les initiées A. L. X. désignent lit G«M~
gc~'ft/c do NNf~<hu'c(/t<~<'<!<('<«e/JN~'«<«r-t<t<~), qut paraissaitalors à !ena et qui avait une très grando autoritô on Attema~ne.
Le critique dont il est ici question n'est autre que !'ecrivain tant
attaque par Fichtc dans ses 6'uns<d<(<o~ a«r /uf~Mf<o~~'«n-
cat~ M. Rohberg.
Page 5!), ligne 2H. Je m<~«'<~r<pH.<<'Ht<t<<f~ff«y«<<« ~nt (~
.sop/mfMdc~tNfntf~nc. Fichte nutnmo fui.mémo plus loin fp. 102)
le sophiste dont il veut parler ici c'est le secrétaire intime do
chancctteric Hehherg L'tit nousindique (p 103) le titre de t ouvrage
qu'it attaque /!<'c/<erc/tc..sur /~u<~t<(«)n~'on~<s< Cet écrivain
avait pubtiu; do !790 a ) 793,dans ta <7!<s<<'~~x'~t~dt' /<«r~
un très grand nomhrod'articks critiques sur les ouvrages auxquelsla Hevotution française avait donne ticu. Neen 17!)7, H est mort
en t836, et il a, aujourd'hui encore, une certaino réputation parmi
!esAHomands, comme écrivain politique et comme homme d'Ëtat.
(Voyez /ocMMus Co~w)'M(«)~s/.c.r<c~. Leipxick,'t8~t, vol. XÏI,
p. 643.)Ibid. Commeon le voit ici, tes C~~<dcr«<~<t.<f/c~nx't'.sMt'<'c-
<<cr ~jugf~'fWs(~Mp'~<<cat<r~t ~'tW«<to~~'ru<c<"Mfurcttt pubtiees
(t) Je <!uixta t'htpnrt<)f<'cs)t"tcsù t'ohu~f~nccd'- M..).< t-'irhtc.
23
NOTHS.350
sous te \'oi)e do t'anonyn'e. Mais Fichte fut bientôt désigne et uni-
versettement roconnu pour l'auteur de eut ouvrage, ainsi que de la
/<fUt'n<hc«hutt<~la ~r~' df pctt~r, qui avait paru en m~))c t~mps.
Pu'~e6< note t. Kniggo est un des ccrkains attptoands tM
ptus estimes du siec!epreccden!
!bid., note 2. j)< r~t~on, «~ <<'</<o~?tc<{(!<(cur<tt<
p«a M /tur<?,<<f<~~~«s <n!por«tn< d<'sjour~m<~sf«.-<ut« r~u-
r~c', juge, u~c. C'os~encore :t M. Hohbcr~ t~tc Fichte songe
i<;i.et !ojournal dont il parh)est la ~«scNo «)nu<r.<(-~de /~<<~Mrc,
où écrivait ce publiciste rétrograde.
Page 8~. jL'~pfrfcncc en ct~.ntd~)c est une boHe rdmplie (~
Mruc~rM jetés ~t'/e.f; c'<'<i~spt'tt /t«nt«M~t seul donne un MM
<icec/~os,~tu~c~(t(<c<~({<n(~'<<M'<o~t~<<~
Sc/t~t/L CoSchienkcrt est fauteur d'une douxained~ romans,
oubliés depuis ton~mps. ut cntt-o autres, (i'un roman diatogaé en
({uatrevotumes, intitutc: /drtc/* t7t<<<<<r~ebmencn H'gf (/d<t'c
« ;bM mordue), et pubHcà Leipsick de ~78!~ n 788.
Pu~c 87, ligno 2C. ~'<'3pWt/:t<~«'n, rt'uf<~f~«r ~oosM«K,a
<tccon~'«~«'<B)K'rc~ttc, etc. L'œuvredont Fichte\'eut parler !ci
est la révolutionopérée par la philosophio de Kant, et c'est sa propre
Œuvrequ'il annonce en quoique sorte dans les lignes suivantes. On
voit par ces lignes curieuses qu'a ccHo époque (<793) il me<!itait
déjà l'entreprise philosophique à laquelle il a attache son nom.
Page 97. Ils Montrât «t<~cxp~ (~ les~'oHd<'a/<'<<*a<y«c
du cd~ dont ~o~c t')<«t (Ft't't'n~c. Pour comprendre ce passage,
il faut se rappeler ce verset do la Bible (/~o(~, chap. XXXHÏ,
v. 23) Wdc~ pos~<'tor<tn~(t; faciem «M~MtnK'f<~u)(~re non
poter/s.
Page <08. Nous pouvons dire (~ ~'nst&t~f ce ~«e, dans
~(u'~on~ ce an«ut<~ dit (h<dfu)~cr f~ts aon c~t~nt /'t<n~re.
Ce n'est pas du danger, mais de !a douleur que parle le sauvage dos
Incas, et les parotos que Fichtorapporte ici, évidemment de m6moiro,
ne sont pas la traduction littérale, mais le développement de celles
que Marmontet met dans la bouche do ce sauvage. C'est pourquoi
j'ai cru devoir traduire exactement la paraphrase de Fichto, au lieu
de me borner a reproduire !c texte de Marmontet, que voici « Je
devins homme, et la Douleurme dit « Lullons ensemble. Si tu es le
plus fort, je céderai mais si tu te laissesabattre, je te déchirerai,
f je planerai sur toi et je battrai des ;)i)cscomme le vautour sur sa
o proie, o
NOTES. 351
Page ~9, ligne )7. /~c<Wdt«n ~'ot~cMj Mc~~xr, celui qui
acheva vo<r<Q!«u~, celui <y«t6rtsa (/et'n<cs c~ ~s plus /ur<<'<cAa~tM~e<u<Htftn)~. <~mq« f~e le stX, e<;)c«<-f<roafu<s~t<'t< <t)t
<m'-fn~~c,etc. Ce troisième tihératcur que Ficttto associe a Jésus
et à Luther est Kant, qn', ne en 1734, avait alors soixnnto-rfeuf
ans, et qui mourut, commùon sait, en 1804.
Page t38, note. Schma!x (t&idûro),professeur a ~'Un:versite
do Hatto, fut, avec GoUfricd Hufotand, professeur a !cna, un des
premiers jm'~consultos allemands qui appliquèrent toa principes de
la phitosophiodo Kant a la science du droit.
Page <46, tignc t7. –A/. /<t'A~ a«r~<< <~c pt<<roMt' moins
n(tt/ ce qui <*«dit d~Ma/M~uue ~f)~<«y«c<~ ~c/t~s<?r (Sc/t~scra
S<aa<Mtt3c<c),etc.– Cette Hevuc était a!or~une des publications tes
plus importantesde t'AUemagne. SchtŒX~r.profcsseura Gœttingue, y
dëvoihut los actes arbitraires et tes iniquités des gouvernements de
cette époque, surtout dos gouvernements attonands. Aussi on était-i)
redouté, et leurs satoUitest'attaquaient-its viotemmont.
Pago ~89, Hgne 1. ~t sortant dM~n'<<o)~d't«)o vt~c t'mpJ-
Wo~f,etc. C'est sans doute n la vi)toitnperiato de Francfort-sur-
to-Meinque Fichtc fait iciallusion. Le torritoiro do cotte ville touche
à la liesse électorale, dont to landgrave avait naguère vendu ses sujets
aux Angtais comme troupes auxiliaires contre les États libres de
t'Amériquo du Nord, et dont !os habitants combattaient alors contre
tes Français on qua!it6do troupes impériales.
Page 280, note. Le fait dont il s'agit ici se rattache aux ré-
voltes des paysans contre leurs soigneurs, qui avaient éclaté quel.
qucs années auparavant dans la Saxe électorale. Les at'~M do.
(~ ~«~'t) sont les armes do la Saxe (clic~c/tStScAe~H'a~t).
Quant au « pompeux historien Mdont parle Fichto, ce doit être
quelque pamphlétaire ou quelque gaxetior obscur.
Page 282, note. D~M?~«<a MMu~, etc. Ces deux ~tats
sont taPrusse et la Potogno. Au moment mémooù il entreprit son ou-
vrago sur la Hevotution, Ficttte vivait dans le pays do Dantxick, et il
connaissait sans doute par sa propre expérience lo fait qu'il raconteici.
Page 347, dernières lignes. L'ouïr cap~'e ~t<cW~ ne l'em-
nt'c/tcMde ~vrer ce votxnte f* l'impression d'<c< ft'ots ou <yt<(t<fc
mot«.Je renvoie ici a ce que j'ai dit dans mon Introduction (p. nv)
sur les motifsqui ont pu déterminer Fichte a ne pas compléter son
ouvrage. J'ajouterai seulement que, des l'hiver de ~793 à ~794, il
fut appoto à ïena comme professeur de philosophie.
~UTMS.352
La tettro suivante, que je trouve dans luL'urn'ft~n~tncc de Fichte,
pubtico par son fils (/<cAfc'o ~e~n«~ <t«e~r<ac/«'r ~no/tuc<
tumo Il, p. 406), mo parait assez curieuse pour mériter d'être
ajoutée ici. Écrite, oh t7!)K, par un jeune Fran<;aisqui avait suivi,
de t794 a t79~, !c&leçons du Petite a léna. et qui était devenu )u
secrétaire diptonatiqucde Bonaparte, etk monne (mettes iliusions on
pouvait se fu')~a co~c époque sxr tocaractère du futur CMar, et duel
nobto phtu concovatt utor:;un csprtt ~~n~roux pour umr plus étrct-
tomout !'A)tema~no la France. L'autour docetto tottro, M. Camille
Perret, avait aussi tbrmoto projet do tradnirocn français les écrits de
t''ichte, et d'abord i:unouvrage sur ta H6vutuHonfranQatse. J'~nore
les tuottts qui font crnpôcbôd'uxocuter ce projet. Voicisa lettre
Hastadt, !c 2Cventru an <t798).
<. Locitoyen ttarbauer, qui vous remettra cette tettro, mon cher
Fichte, s'est engagé à solliciter près de vous le pardon do mon tnex-
cusable négtigonce. L'amUtoqu'it m'a dttquo vousc.onsorviezoncoro
pour moi mo fait espérer que, (.'onstdérant te tourbillon dans teque!
je me trouve depuis dix-huit mots, vous serez indûment envers un
jeune homme qui. rassuré sur vos sentiments pour lui, s'enorcera de
vous prouver qu'it en est toujours digne.Los gazettes vous ont appris a peu près tout ce qui m'est
arrive depuis mondépart pour l'Italie jusqu'à monarrivée a Rastadt.
Mais vous ignorez sans doute ce qui a précède. Cependant j'ai
été sur le théâtre do nos ptus éclatantes victoires, et j'y ai pu con-
nattre un grftn(i c~o/~t. Têt est Bonaparte. J'ai appris do vous à ne
pas juger té~eremont, et je t'ai vu sous tant de rapports, que je n'ai
pu me refuser d'unir ma voixa~ ceHode toute t Europe. Depuis le
rappel du généra! auquel le gouvernement m'avait d'abord attaché,
je suis devenu le secrétaire diplomatique de Bonaparte, et c'est en
cette qualité que je reste ici, en attendant son retour. Trois mois se
sont déjà écoulés depuis son départ tes anaires prennent ici depuis
huitjours une aHuroptusefncaco et plus sérieuse. Cependant j'ea-
pero toujours qu'il reviendra, et je no cesserai d'y croire que lorsqu'il
morappellera à Paris.
Partons présent de vous, de la philosophie, de l'humanité ger-
maine. Je sais que vous avez eu la douleur de perdre votre brave
beau-père, mais qu'un petit garçon bien vif et bien libre est venu
vous offrir lu plus douce dos consolations. Je sais que votre éner-
NOTES 35~
~iqae amour du bien vous a suscita dos désagréments, mats que vous
étosdo nouveau aiméotostiméde vos disciples, autantque vous avex
te droit do t'étro. La philosophie a-t-ette ,;a~né depuis trois ans
do nouveauxamis, dû nouveaux cultivateurs? E.st-itrésulté do toutes
les recherches t'admissiun de quetquos principes fondatncntaux et
univorsots?A.t-on fait des appUcaLionsuMks ut t)ouvu[!es? Yo~-o
sys~emoa~-n vaincu !cs opposiHuns?J'cspcro(p)c vous ne !aiss~rcz
pad <:csqucsUons sans ruponso; vous tn'cstimcx assex pour ne pas
(touter combien jo m'in~resso a uno science dont. propres et.
t'u!)i\crsaU~ forment, le vrai caractère dp rhunmnH~. J'ai appris
avec ptaisir que tes tumicrcn se sont répandues davantage encore
depuis mon départ d'iena; que ptusiem-s esprits distingues, que
j'avais connus '/actHants ot prosquo apostats, ont puise dans !o main-
Man dos chogos une stabiht6 qu'Us n'avaient pas. rour favoriser et
acccteror t'imputsion g6ncra)o.j ai conçu un projet qui pourrait rece-
voir des circonstances présentes uno facile exécution. La réunion u
hi franco de ta rive gauche du Khin, on cr6ant un nouveau lien
entre tes deux nations, doit otîrir aux amis do ta liberté persécutés
en Ahcmagnoun asitoet préparer !'anranchisse:nent de la Germanie.
Nous aussi avons besoin que la sotidité attomande s'a!tic avec notre
impétuosité, et que, changeant nos sentiments en principes, etto
nous retienne sans nous faire rétrogrades. Le moyen le plus effi-
cace et !o ptus sur pour atteindre ce double but serait, je pense,
d'instituer sur les bords du Uhin plusieurs écotes dont tes profes-
seurs seraient pris des Allemands, qui réuniraient to ptus de con-
naissances et de latents à l'amour de ta liberté. Co projet est-i) oxc-
cutabte? Vouittex, mon cher Fichto, me confier votre opinion à cet
é~ardLSi votre réponse est affirmative, nous aviserons réciproque-
ment, après uno convention préuminairo, aux moyens do réussir.
e Votro rcconnaissanLami,
pC.PKRRET."1)
ERRATA.
Page 10, ligne 23, au !ieu de il nous dot;M sur sa parole quo, liscz
il nous<<OMMCsa parole que.
Page 64, !ignc 19, au lieu de quelque cent ans, tisez ~Me~M<cents ans.
Page i 87, Hgno i7, au lieu de: si, dis-je, il n'opprime pas, lisez ~.(it~d,
notre c~fj~ n'opprirne pas.
Page 205, !)gne i3 il ne peut y <n~0tfde dedOfntM~w~~M<vo~<
pM!~<< effacezce dernier mot.
TABLEDESMATIÈRES.
AVANT-PROPOS. i
tKTRODUCTÏON M mADUCTEUM WCHTB ET LA REVOm
TtOMFRAMCAtSK.t.1
REVENDICATIONM MBERTÉ DE PEHSER AUPRES DES
PROCES DE L EUROPE<~M L'ONT OPPRtMEE JUSQ~Ct -1 <
!'RÈFACH. 3
DiSCO~RS. ~t1
CO~atDÉRATtONS Dt!8T!MÉM A HBCTtPÏER LES JUCEMZNTS
DU PUBUC St'R LA EÉVOUJTtOM FNAMÇAtSE. 4!;
PRÉt'ACE. 47
tK'rK~DUCT:o'<. n'aprcit (;ueb prmctppa faut-il juger te:; r~oht.
tions?. 1
LIVRE PR~HËK. DK L'At'PH~AT'0?( DHt.AL~CtTtMtTÈD'UNE
RÈVCHJTtON. 99
CHA!TBEt". ~'t peuple a t-i!, en général, le droit (le
changer aa constitution politiquo ?. 99
CIIAP. Plan de tout le reste de cette recherche. i30
CHAP.Ht Le droit de changer la constitution politiquo
peut-il être aUenc par un contrat de tous avec tous?. 134
CHAp.tV. Des classes privilégiées en général, par rapport
au droit do révolution. ~90
CHAP.V. De!a noblesse par rapport au droit de révolution. 229
CHAP.Y!. De l'église par rapport audro!t de r~votution. 296
AVERTISSEMENTFINAL. 3t7
NOTESDUTRA&UCTËUK. 3~9
P)K DE LA TABLE t)ES MATURE!).
EXTRAIT DU CATALOCï~K DE I. CHAMJEROT,
!U)KnUJARDtNRT,<3.
HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION FRANÇAISE, par M. Mhhdt't.
7voLin-8. ~f'
HISTOIRE Du FRANCE AUX XVI- ET XVM' SIÈCLES,
par te ntëme auteur.
Totnc VH. Renat~ance. t vol. in-8. 5 fr. M
Tome Vm. Réforme. 1 vol. itt-8. 5 fr. M
T'ont! !X. Guerres de tctt~'ou. 1 vol. in-8. fr.M
Tome X. L'guc et Heon IV. l vot. in-H. 5 fr. M
Tome XI. He"" IV et R'chfheu. i vot. m-8. 5 fr.
Tome Xt!. R'cheHcu et la Fronde, t vu!, in-8. 5 fr. 50
ESSAI SUR Ï.A RÉVOLUTION yRANÇAISE, par P. Lanfrcy. t vot.
in.H..BM8TOIRE DES PAYSANS, depuis la f! du moyen &geju<qu&o«ou)r$
(t'!U')-t8&0), prêche d'une Uttr')duct:on.nn 50 avant J. t200~naapr~ J~-C.,par Kn~cm) Uonut'mcrc. auteur d~s ~«y~tM «« </<f«t'~we .<~c/e. et dct'
<u~f; ~<{'<~ ~t/'«:n~ tn~tnoir~ (-ouro)H)~s par t'Acad~micdc \at)t''s eu
l~cttH~vo).i)<-8 tOt'r.
DE :LA NATIONALITÉ POLONAISE DANS L ÉQUILIBRE EURO
rÉEN, par tc~n~t'at Louis ~K'rostawi.ki. t vol. in-8 d<'MO pi~C! 7 fr.
VOLTAIRE (h~endc frau<:a!!i<'),par Eu~nc ~o~. t vot. ~rand tn.<8. fr.
MÉMOIRES SUR L'ITALIZ, par Joseph Montas)):, f\-prt'«tf!cnt 'hî Cnusctt
dc~ntintshci.. cx-trimnv!rdu (.otn'crnctm'nt provi~ire toscan; traduction (ic
F. Arnaud (de t'Aru~c), pr~dcc d'tmc~ticcbio~raphittucsur t'atitcnr~par
J('attHt'ynand.~vo).nra)tt)in-t8.7fr.
ŒUVRES POLITIQUES ET LITTÉRAIRES D'ARMAND CARREL.
mtiifscn ordre. artMot~'sct pr~c(Wcs d'une \«ticc h!ographi<)UCSUT!'antc'jr, par
J~ Ltttr~, d<' 1'lli,,tittit, et i'autin, tihrairc. 5 vol. !)t-M. fr.
MAISTRE PIERRE PATELIN, texte D'vu sur tes manust') Hs et h~ p!
anck'nnc!i<dttiu''s,avccunc!ntrodthtiot)t'tdt'otcs,part'.<~n!n.Ë(!!tiottdehtxcttr~ch30opxpt))pt.tyo'r.ht'M.(-attonn~ntt'Hc.dor6mtt<He.
ïofr.
~!o'rA. 6'Anqtft: cjc<'tnp<"t''e f« ~«tH~)'«(<
RÉCRÉATIONS PHILOLOGIQUES, ou Reçue*! de note* pour servir à
rbittmfcde* mots de lu tuanue française, pat'r.(~ntU. a"édiHcn. X VO).
!n-te.T'
LA MÉTAPHYSIQUE ET LA SCIENCE ou Pfmctpps de métaphysique
pon<tve,par ÈUcxm'Vachprot. ancien directeur des ~mdcsat'Ecoknormate.
2f')rtsvo(. grand tn-H,HMp.tt;<'s. 17 fr.
GUIDE POUR LE CHOIX l~'UN ETAT. ou Dictionnaire det prof~t)on<,
;n<t;(tnant les <ondit!o))s d<' totops et 't'at~t'ttt potn- parvenir a chaque profession,
tes~t'Kk'sa~ttvre, les progrftttmx'sdc.ott's fp~tfttcs, les examens i suhir, t("t
aotitudcspt )t'sf!tcn!t~sn''c<'ssi)irfsp"nrtTUs~r, !os tnoyt'nsd'~tahn.~cmt'ot, h's
(-hanccs'd'avauepment ou deformne, )<'s dcvo;r.s; r<d){{'' .(ms tadh-cction df
M. Edouard Char:o!t. ri')a'(cu!' en t'hcf du .~«~'H /:t«o<-<<f. oh'ton.
tvo)i!t-8dc~S«panps.<;t).j0
DICTIONNAIRE ~E~LA LANGUE PRANCAISE, Ûto~fe cxp).qu6
de tu !aMsue écrite cipint~c, par M. t'uHcv!!),a))(:'t'<t profcs~'oran coH~c
H<)Hin au~pur du 6~ï t/n< <'<;«~< f~; /<u<<E /'r««(~«t;, adopta par K*
tonscUdc r'LInivfrs)tt'. t vol. ~rand in'S (le tt). pa~«:) !')- cart.cn
tnHc t<)fr.5U;rct.<'t)t'fm..ttfr.DICTÏONNAIRE.MANUEL DE LA LANGUE JTRANÇAISE, smn d'tm
Sontmutfc- detpf'nctpah'«!intcutté< grammattcate~. par ~î. Poitevin, ancien
t)rof<-ssenr an coH~cKf'mn. t vo). in-32 j~au.sdeTOU pa~s.–t~ t fr. f)t); denti-
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"teusc'titt~-ait-cet scip)tHti()U(\ par V.Uurnv. At)a~ i vot.iH.4dM i5cart<'s
coloriées; texte, i vot. in-8 de ~5 pa~cs.fr.
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