faut-il brûler la logique classique? les logiques modales

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Faut-il brûler la logique classique?

Les logiques modales

C. I. Lewis, 1918 : les « paradoxes » de l’implication matérielle

(1) (2)

ad impossibile sequitur quodlibet Ex: si « l’eau bout à 100° » est vraie, alors il

est vrai que « si Charlemagne fut empereur, alors l’eau bout à 100° »

Distinguer une « implication stricte » d’une implication matérielle?

)( pqp )( qpp

Implication stricte

P implique strictement Q si et seulement s’il est impossible que P soit vrai sans que Q le soit

Fait intervenir la notion de modalité

… une idée pas neuve

Aristote, Premiers Analytiques cf. discussion sur l’aporie de Diodore Kronos

(J. Vuillemin, 1984)

Aporie de Diodore - 1

A – le passé est irrévocable, B – si q suit nécessairement de p, alors s’il n’est pas

possible que q, il n’est pas possible que p C – il y a des possibles qui ne se réaliseront jamais, D – de ce qui se réalise il n’a jamais été vrai qu’il ne

se réalisera pas, E – de ce qui ne se réalise pas et ne se réalisera

jamais, il a été vrai (à quelque moment) qu’il ne se réalisera jamais

Aporie de Diodore - 1

A – le passé est irrévocable, B – si q suit nécessairement de

p, alors s’il n’est pas possible que q, il n’est pas possible que p

C – il y a des possibles qui ne se réaliseront jamais,

D – de ce qui se réalise il n’a jamais été vrai qu’il ne se réalisera pas,

E – de ce qui ne se réalise pas et ne se réalisera jamais, il a été vrai (à quelque moment) qu’il ne se réalisera jamais

Pp MPp

L(p q)(Mq Mp)

(Mp p Fp)

p PFp

p Fp PFp

Intérêt des logiques modales

Introduire : le temps dans la logique (logique temporelle) sous

l’aspect d’opérateurs tels que P et F (passé et futur), les considérations de contingence et de nécessité

(logique aléthique), celles de permission et d’obligation (logique

déontique) les notions de savoir et de croyance (logiques

épistémiques et doxastiques).

opérateurs

logique aléthique : le nécessaire est le dual du possible

logique déontique : l’obligatoire est le dual du permis

logique de la prouvabilité : le prouvable est le dual du « consistant avec »

◊p □p

Premières approches : Lewis et Langford, 1932

Présentation à la Hilbert

Interprétation « naturelle »:□p = « il est nécessaire que p »

La logique modale (propositionnelle) est une extension du calcul propositionnel :

– Toute logique modale doit contenir comme théorèmes au minimum toutes les tautologies du CP,

– Comme il existe une procédure pour les déterminer (décidabilité), on peut admettre que chaque tautologie du CP est prise comme axiome

L’approche syntaxique (2)

+ axiomes « propres », permettant de manipuler « □ »Axiomes CP : toute formule ayant la forme d’une

tautologieAxiome K : □() (□ □) Règles : modus ponens :

|— |— |—

nécessitation : |— |— □

L’approche syntaxique (3)

Sémantique de la logique modale

Sémantique dite « de Kripke » Deux notions-clés :

– Monde possible– Relation d’accessibilité

La théorie des mondes possibles

Semantic frame

Un « frame » F est un couple (W, ) où:– W : un ensemble non vide (de « mondes possibles ») une relation binaire sur W

Un modèle (de Kripke) sur F est un couple (F, V) où:

– F est un « frame »– V est une application de {p1, p2, …, pn} W dans {0,1} (à

chaque lettre propositionnelle et chaque monde possible: une valeur de vérité)

Sémantique (3)

Si dans le modèle M, V(p, w) = 1 (p: une lettre propositionnelle, w: un monde), on écrit:

VM,w(p) = 1 ou:

|=M,w p ou encore w |=M p On étend V à toute formule au moyen de:

– VM,w() = 1 ssi VM,w() = VM,w() = 1– VM,w() = 0 ssi VM,w() = VM,w() = 0– VM,w() = 1 ssi VM,w() = 0– VM,w( �) = 1 ssi pour tout w’ tel que ww’, VM,w’() = 1

Liens entre propriétés de et formules vraies dans une logique modale

Supposons que nous prenions comme axiome supplémentaire, la formule :

□ Quelle est sa signification en termes de

« frame » ou de « relation d’accessibilité »?

Si est vraie dans tout monde accessible au monde actuel w0, alors est vraie dans ce monde actuel

Autrement dit: w0 fait partie de ces mondes accessibles à partir de lui-même

w0 w0 Autrement dit: est réflexive

Propriétés de et formules vraies

Idem pour:

□ □□ Si est vraie dans tout monde accessible au monde actuel w0,

alors c’est le cas également de □ Pour que □ soit vraie dans tout monde w accessible à w0, il

faut que soit vraie dans tout monde accessible à tout monde w accessible à w0.

Donc la formule exprime le fait que si est vraie dans tout monde accessible à w0, alors elle est encore vraie dans tout monde accessible à tout monde accessible à w0.

ceci est assuré si:

est transitive

Qu’en est-il de:

◊□ ?

S’il existe un monde possible accessible au monde actuel où

□ est vraie, alors est vraie dans le monde actuel Soit w1 ce monde, dire que □ est vraie dans w1, c’est dire

que est vraie dans tout monde possible accessible à w1 Si on veut que toujours en ce cas, soit vraie dans w0, il suffit

que w0 soit toujours accessible à w1 Et ce, quel que soit le monde w1 accessible à w0

Donc que soit symétrique

Caractérisation (2)

□ (axiome T) caractérise les frames réflexifs

□ □□ (axiome 4) caractérise les frames transitifs

◊□ (axiome B) caractérise les frames symétriques

◊ □◊ (axiome 5) caractérise les frames euclidiens

Différentes logiques

On a vu K (pas de propriété particulière de ) (logique modale minimale)

K + □ : logique T T + □ □□ : logique S4 S4 + ◊ □◊ : logique S5 si on ajoute □ : collapsus (retour à CP)

Logique épistémique (1)

|—

|— Ktoute vérité (logique) est connue…!

(omniscience) Axiome K : si x sait que A B alors s’il sait A, il sait

B (« distribution ») Connaissance : x sait que Modus ponens

Logique épistémique (2)

4 : Ki Ki Ki Axiome de l’introspection positive 5 : Ki Ki Ki Axiome de l’introspection négative B : KiKi ???

8- La logique et les processus

Logique linéaire

Le calcul des séquents (Gentzen, 1934)comme méthode de décision pour la logique classique et la logique intuitionniste

Prouver:

(A B) ((B C) (A C))

démonstration

A B, B C, A, B | B, C A B, B C, A, B, C | C

A B, B C, A | A, C A B, B C, A, B | C

A B, B C, A | C

A B, B C | A C

A B | (B C) (A C)

| (A B) ((B C) (A C))

axiome :

[ D] : A, |- , B [ G] : |- , A B, |- |- , AB A B, |-

[ D] : A, |- [ G] : |- , A

|- , A A, |-

Règles logiques

A, |- , A

coupure : |- , A A, |- ’

, |- , ’

Règles structurelles

Affaiblissement :à gauche : |- à droite : |-

, A |- |- A, Contraction :à gauche : , A, A |- à droite : |- A, A,

, A |- |- A, Permutationà gauche : , A, B, |- à droite : |- ’, A, B,

, B, A, |- |- ’, B, A,

Gentzen - suite

Hauptsatz : Le système sans coupure permet de prouver

les mêmes séquents que le système avec coupure !

Alors… La règle de coupure ne sert à rien? Si!

Calcul intuitionniste

dissymétriser le calcul: les séquents ont au plus une formule en partie droite

empêche tiers exclu et double négation

Isomorphisme de Curry-Howard – types = formules -termes = preuves– réduction = élimination de la coupure

Pourquoi casser les symétries?

En logique classique, |- A, ’|- B, ’

, ’ |- A B, , ’

et

|- A, |- B, |- A B,

sont équivalentes (à cause des règles de contraction et d’affaiblissement)

Pourquoi casser les symétries?

Mais si on supprime ces règles?

Pourquoi casser les symétries?

La logique linéaire (1985) : 1- partie conjonctive

[ G] , A, B |- [ D] |- A, ’|- B, ’, A B |- , ’ |- A B, , ’

[& G]1 , A |- [& D] |- A, |- B,

, A & B |- |- A & B,

[& G]2 , B |- , A & B |-

Logique linéaire – 2partie disjonctive

[ G] |- A, B, [ D] , A |- ’, B |- ’ |- A B, , ’, A B |- , ’

[ D]1 |- A, [ G] , A |- , B|-

|- A B, , A B |-

[ D]2 |- B, |- A B,

[ D] : A, |- [ G] : |- , A |- , A A, |-

NB : A –o B A B

Logique linéaire - 3

Retrouver la logique classique?

A B !A –o B Le rôle des exponentielles : réintroduire localement

les règles structurelles

, A |- [intro !] , !A, !A |- [contraction]

, !A |- , !A |-

|- [affaiblissement]

, !A |-

Le menu….

Prix : 16 € Entrée : au choix jambon ou salade Plat de résistance : entrecôte Accompagnement : frites à volonté Déssert : au choix

fromage ou fruit de saison selon arrivage (pêche ou

pomme)

Le menu….

Prix : 16 € Entrée : au choix jambon ou salade Plat de résistance : entrecôte Accompagnement : frites à volonté Déssert : au choix

fromage ou fruit de saison selon arrivage (pêche ou

pomme)

La formule…

16 €

--o

(jambon & salade)

(entrecôte !frites)

(fromage & (pomme pêche))

Autre exemple

Il y a un siège disponible sur Londres – Bruxelles Marie est à Londres John est à Londres

En principe:

Marie peut prendre l’avion pour Bruxelles

John peut prendre l’avion pour Bruxelles

Donc : Marie et John peuvent prendre l’avion pour Bruxelles

En réalité…

Soit les prémisses :x (Londres(x) –o Brux(x))

pour tout individu x, s’il est à Londres, il peut aller à Bruxellesmais cette formule est utilisable une seule fois

Londres(Marie)Londres(John)Elles ne permettent pas de déduire Brux(Marie) et

Brux(John)

déduction

x (Londres(x) –o Brux(x))Londres(Marie) –o Brux(Marie)Londres(Marie) Brux(Marie)

Donc : x (Londres(x) –o Brux(x)), Londres(Marie) Brux(Marie)Londres(John) Londres(John)

Donc : x (Londres(x) –o Brux(x)), Londres(Marie), Londres(John) Brux(Marie) Londres(John)

Ou bien : x (Londres(x) –o Brux(x)), Londres(Marie), Londres(John) Brux(John) Londres(Marie)

Plus sérieux…

!(e (electron(e) –o z position(e, z)))

!(e (electron(e) –o z’ vitesse(e, z’)))

Impossible de prouver :

!(e (electron(e) –o z position(e, z) z’ vitesse(e, z’)))

déduction

!(e (electron(e) –o z position(e, z)))

electron(i)

electron(i) –o z position(i, z)

z position(i, z)

Mais electron(i) a été consommé, on ne peut pas le réutiliser pour prouver z’ vitesse(e, z’)

Prouver c’est aussi planifier

cf. une action produit un changement dans le monde

utilise des ressources se réalise par combinaison d’actions plus

élémentaires

a

c

poser c sur la table

a

c

poser c sur la table

a

c

poser c sur la table

a

c

poser c sur la table

a c

poser c sur la table

ca

poser c sur la table

Passer de l’état du monde: main vide (V) c en haut de pile (donc accessible) (H(c)) c sur a (S(c, a))à main vide c en haut de pile c en bas de pile (B(c)) a en haut de pile

décrit par le séquent :V, H(c), S(c, a) VH(c)B(c)H(a)

Actions élémentaires

prendre(x) : V, H(x), B(x) T(x) poser(x) : T(x) VH(x)B(x) oter(x, y) : V, H(x), S(x, y) T(x)H(y) mettre(x, y) : T(x), H(y) VH(x)S(x,

y)

preuve

T(c) V H(c) B(c) H(a) H(a)------------------------------------------------- -

droiteT(c), H(a) V H(c) B(c) H(a)----------------------------------------------- -

gaucheV, H(c), S(c, a) T(c) H(a) T(c) H(a) V H(c) B(c) H(a)-----------------------------------------------------------------------------------coupureV, H(c), S(c, a) V H(c) B(c) H(a)

preuve

poser(c) H(a) H(a)-------------------------------------- -

droiteT(c), H(a) V H(c) B(c)

H(a)------------------------------------

gaucheoter(c, a) T(c) H(a) V H(c) B(c) H(a)-----------------------------------------------------------------------------------coupureV, H(c), S(c, a) V H(c) B(c) H(a)

preuve action?

On peut extraire une composition d’actions d’une preuve

comme on peut extraire un programme d’une preuve (informatique théorique)

interaction

& : choix « actif » (vous avez le choix entre … et …)

: choix « passif » (l’un ou l’autre, vous ne décidez pas)

: les deux, dans un ordre séquentiel non déterminé

: les deux, en parallèle, par exemple l’échange (l’un contre l’autre)

: le changement de point de vue

interprétation

Interaction la logique n’est plus seulement interprétable comme

« décrivant un extérieur », elle s’interprète « par rapport à elle-même »,

autrement dit elle réfère à ses propres procédures : l’interprétation des règles se fait dans un dialogue interne et le système se voit ainsi doté d’une dynamique des preuves

La logique et les processus

une science formelle des processus informationnels convergents

Applications:– Linguistique– Biologie – Sciences cognitives (Krivine)

biologie

Antoine Danchin: « la cellule est un ordinateur vivant »– Physique : matière, énergie, temps…– Biologie : Physique + information, codage, contrôle…– Arithmétique : chaînes d’entiers, récursivité, codage…– Informatique : arithmétique + programme + machine… »– « comme dans le cas de la construction d’une machine, dans celui

de la construction d’une cellule, on a besoin d’un livre de recettes… cela demande ensuite qu’on soit capable de changer le texte de la recette en quelque chose de concret : ceci consiste dans le « transfert d’information ». Dans une cellule, ce transfert d’information est assuré par le programme génétique »

conclusion

au cœur d’un processus contemporain de mathématisation à propos d’objets qui n’ont pas pu jusqu’à présent être l’objet d’un tel processus, faute d’outils mathématiques adéquats

il était assez imprévisible et il reste curieux que ce soit la logique, dans son propre développement interne, qui donne aujourd’hui de tels outils, via l’intégration qu’elle opère des lois de fonctionnement de machines abstraites.

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