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Institut de Formation en Soins Infirmiers de Châteaubriant
PROMOTION 2013/2016
Chuuut… entendez ma douleur
« Impact des représentations soignantes en court séjour dans
les soins généraux sur l’évaluation de la douleur chronique,
lors de la prise en soins de personnes atteintes d’une
pathologie mentale. »
TAUNAY Nathalie, Louise, Monique ©
Mémoire de fin d’étude
U.E 5.6.S6 Analyse de la qualité et traitement
des données scientifiques et professionnelles
DE SAINT ESTEBAN Evelyne, directrice de recherche
Juin 2016
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Institut de Formation en Soins Infirmiers de Châteaubriant
PROMOTION 2013/2016
Chuuut… entendez ma douleur
« Impact des représentations soignantes en court séjour dans
les soins généraux sur l’évaluation de la douleur chronique,
lors de la prise en soins de personnes atteintes d’une
pathologie mentale. »
TAUNAY Nathalie, Louise, Monique ©
Mémoire de fin d’étude
U.E 5.6.S6 Analyse de la qualité et traitement
des données scientifiques et professionnelles
DE SAINT ESTEBAN Evelyne, directrice de recherche
Juin 2016
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Remerciements
J’adresse mes remerciements à toutes les personnes qui m’ont aidé et
accompagner tout au long de la réalisation de ce mémoire, et tout
particulièrement à:
Madame De Saint Esteban Evelyne, formatrice à l’institut de soins infirmiers
de Châteaubriant, pour sa guidance, son aide et son éclairage pour m’aider à
comprendre mes interrogations tout au long de cette dernière année autour de ce
travail.
Madame Rabe Claire, formatrice à l’institut de soins infirmiers de
Châteaubriant, référente pédagogique, pour son accompagnement et soutien tout
au long de ses trois années.
L’ensemble des professionnels qui ont contribué à la réalisation de mon
mémoire par l’intermédiaire des entretiens, mais aussi à travers les diverses
discussions échangées avec eux lors de mes stages.
Madame Vetillard Anne –Laure, documentaliste au cdi de l’IFSI-IFAS de
Châteaubriant, qui m’a permis de trouver et d’élargir mes sources de recherches.
L’ensemble de mes proches : ma famille, mon conjoint et mes amis pour
leurs soutiens inconditionnels tout au long de ses trois années sans qui cette
aventure aurait peut-être été plus dure à vivre.
L’ensemble de la promotion, et plus particulièrement quelques camarades
qui sauront se reconnaître, dans lequel j’ai pu trouver du soutien, l’espoir, mais
aussi l’envie et l’énergie de devenir infirmière.
Et enfin, à l’ensemble de mes anciens collègues de l’hôpital de Ploërmel,
sans qui cette aventure n’aurait jamais existé s’ils ne m’avaient pas poussé à faire
le premier pas…
Sans oublier l’ensemble des personnes qui prendront un temps pour lire ce
mémoire…
Un grand merci à tous….
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Sommaire 1- Introduction : ................................................................................................ - 6 -
2- La problématisation : .................................................................................... - 7 -
2.1 Description d’une situation professionnelle infirmière : .............................. - 7 -
2.2 L’émergence de problèmes, questionnements : ...................................... - 10 -
Recherche de concepts : ....................................................................... - 10 -
Question pour le mémoire : ................................................................... - 11 -
2.3 La phase exploratoire : ............................................................................ - 11 -
2.3.1 L’exploration au regard d’écrits professionnels : ............................... - 11 -
Les représentations : ............................................................................. - 11 -
a) L’infirmier : ................................................................................................. - 12 -
b) Le court séjour : ......................................................................................... - 13 -
c) Représentation sociale : ............................................................................. - 15 -
d) La santé mentale : ..................................................................................... - 16 -
e) La douleur : ................................................................................................ - 19 -
La douleur chronique : .......................................................................... - 20 -
a) Une prise en soins nécessaire : ................................................................. - 20 -
b) Une relation intime : ................................................................................... - 23 -
c) L’évaluation : .............................................................................................. - 24 -
2.3.2 L’exploration du terrain : .................................................................... - 27 -
a) Choix de la méthodologie : ......................................................................... - 27 -
b) Choix de la population : .............................................................................. - 28 -
c) Analyse des entretiens : ............................................................................ - 30 -
3- Conclusion : ............................................................................................... - 36 -
Bibliographie : ................................................................................................... - 39 -
Annexes............................................................................................................ - 42 -
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1- Introduction :
Dans le cadre du mémoire de fin d’études, nous devons investiguer une
situation professionnelle qui nous a interpellés durant nos années de formation en
soins infirmiers. De ce fait, je me suis dirigée vers une situation de soin vécue lors
de ma deuxième année de formation.
Celle-ci, questionne l’impact des représentations des soignants dans les services
de courts séjours, lors de l’évaluation de la douleur chronique auprès des
personnes soignées atteintes d’une pathologie mentale.
Mon choix s’est porté sur cette situation car mon projet professionnel est de
travailler dans le domaine des soins généraux et plus précisément en court séjour.
Dans ce type de secteur, je serai amenée à évaluer et participer à la prise en soin
de la douleur chronique des personnes soignées atteintes, à la fois, des
problèmes somatiques et psychiques.
Selon l’organisation mondiale de la santé, « Les troubles mentaux ou
neurologiques affecteront une personne sur quatre dans le monde à un moment
ou l’autre de leur vie. Environ 450 millions de personnes souffrent, actuellement,
de ces pathologies […] 1.»
En France, d’après une enquête menée par l’IPSOS « 27% de la part de la
population française a été, est ou sera, un jour, touchée par une maladie
mentale2».
En tant que professionnel de la santé, ces chiffres rapportés, montrent
l’intérêt de s’accorder un droit de réflexion, afin d’optimiser la prise en charge de
ces personnes, lors de leur hospitalisation dans les soins généraux.
À travers la prise en soins de la douleur chronique d’une personne atteinte
d’une pathologie mentale, on découvre des préoccupations et donc des enjeux de
santé publique. À ce jour, le ministère des affaires sociales et de la santé et des
droits des femmes est à son troisième plan douleur, et son deuxième plan
psychiatrie et santé mentale. On peut également souligner, la loi du 21 juillet 2009,
1 Organisation mondiale de la santé, « Troubles mentaux et comportement », Rapport sur la santé
dans le monde, Genève, OMS, 2001, p1. 2 IPSOS, « Perceptions et représentations des maladies mentales », Rapport du sondage, 2014.
2014.
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portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé au territoire. Ceux-ci
s’inscrivent comme des droits pour l’homme.
Ce choix de thématique sur la pratique soignante va me permettre
d’analyser et, de ce fait, comprendre les caractéristiques des représentations,
mais aussi la relation établie entre la douleur chronique et le patient. Ces diverses
réflexions ont pour but d’approfondir mes connaissances, d’une part pour adapter
ma posture professionnelle auprès de ces personnes soignées, puis d’autre part,
pour optimiser et légitimer leur prise en soins.
Dans ma première partie, je vais décrire ma situation professionnelle, afin
d’émettre ma problématisation. De là, je vais mettre en évidence mes
questionnements selon différentes thématiques. Pour poursuivre, je vais explorer
ma situation au regard d’écrits professionnels. À la suite de ce travail, dans une
deuxième partie, je vais confronter mon travail de recherche à la réalité du terrain
par l’intermédiaire d’entretiens semi-dirigés auprès d’infirmiers. Pour conclure, je
ferai une rétrospection sur mes travaux, afin d’en évaluer ceux-ci.
2- La problématisation :
2.1 Description d’une situation professionnelle infirmière :
Cette situation s’est passée au cours de ma deuxième année de formation, au
semestre 3, lors de ma dernière semaine de stage en médecine oncologique.
Madame L. 57 ans est entrée en médecine oncologique, via le service de
chirurgie de la même structure, pour équilibration du traitement de la douleur, suite
à la pose de sa pompe intrathécale. Madame L. est atteinte d’un cancer
bronchique avec des métastases situées à la racine musculaire de la cuisse
droite. Du point vue psychologique, elle présente une dépression et une
décompensation hystérique. Madame L. est suivie depuis un certain nombre
d’années par un psychiatre libéral et par celui de la structure, durant son
hospitalisation.
À J-10 de son intervention, sa douleur reste difficile à évaluer pour l’équipe
soignante de chirurgie. Elle n’arrive pas à l’évaluer et à l’interpréter correctement,
au regard des écarts, entre son ressenti et son comportement. De plus, un retour
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à domicile semble trop précoce pour les médecins pour assurer des conditions de
vie sécurisantes et décentes à Madame L. ainsi que pour celles de son entourage.
Un transfert en médecine a donc été décidé pour surveillance et équilibrage
de sa pompe contre la douleur. L’augmentation des morphiniques administrés
dans sa pompe a été faite devant la persistance et les plaintes de douleur de
madame L. Cependant, l’équipe médicale a des difficultés à équilibrer son
traitement car lorsqu’elle diminue les morphiniques, la patiente est très algique, et
s’ils augmentent de trop, elle semble, d’après les dires de l’équipe de chirurgie,
« ne pas la tolérer » car elle devient « trop somnolente ». L’équipe médicale a
mis en place un staff avant son arrivée au sein du service de médecine. L’objectif
de ce staff a permis de donner des directives sur sa prise en soin et a préconisé,
notamment aux soignants, de ne pas demander la cotation de la douleur à la
patiente, pour éviter qu’elle ne se focalise dessus et, pour pouvoir ainsi équilibrer
correctement sa pompe. L’évaluation de la douleur doit s’établir à partir de
« l’échelle des visages », sa posture et l’équipe doit retranscrire sur son dossier
son ressenti, ses plaintes. Madame L. dispose, en parallèle, d’antalgiques de
différents paliers : 1 = paracétamol ; 3 = morphine 11mg en intrathécale et
Oxynormoro® 20mg en interdose).
Il me reste trois jours de stage. Madame L. présente peu de soins relevant
du rôle prescrit infirmier au regard des autres personnes soignées du service.
Nous sommes le matin, avec l’aide soignante et l’infirmière, nous effectuons le
premier tour. Nous nous présentons à Madame L., qui est bien éveillée.
L’infirmière lui explique le déroulement de la journée. Madame L. exprime qu’elle
est très algique, à travers ses dires : « j’ai mal, j’ai mal ! ».
Les traits de son faciès sont tirés. L’infirmière établit une évaluation de la douleur
avec l’échelle des visages et suit la prescription médicale en lui donnant un
antalgique (palier 1) car, un autre morphinique ne peut être donné, au regard de
sa dernière inter dose en fin de nuit. Après la distribution des médicaments et des
petits déjeuners, je demande à l’aide soignante, qui s’occupe de ce coté du
service, si elle a besoin que j’accompagne quelqu’un dans les soins d’hygiène.
Elle me répond aussitôt madame L.
Je frappe à sa porte et demande à la patiente si elle est disponible pour les
soins d’hygiène et, si elle accepte mon aide. Elle acquiesce. Je prépare mon
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matériel et me présente à nouveau dans sa chambre. C’est la première fois que
nous ne sommes que toutes les deux, dans sa chambre et, que je m’occupe
d’elle. Madame L. est allongée dans son lit, la tête relevée.
Je lui propose une douche. Elle accepte mais se plaint de douleurs au niveau de
sa jambe droite en faisant de grands gestes et se met à pleurer. La prise en
charge se révèle très difficile. Face à ses plaintes, je ne peux plus proposer de
traitement antalgique (donnés au premier tour, et lors de la distribution des
médicaments vers 8h30). Alors, je lui propose une serviette chaude pour soulager
la douleur. Elle crie à la pose de celle-ci sur sa jambe droite. Je la retire aussitôt
mais cela ne la soulage pas. Je reste quelques instants face à elle et ses pleurs,
déconcertée et hébétée. Je me sens impuissante face à la prise en soin de sa
douleur. Je me pose de nombreuses questions. « Que dois-je faire ? Comment la
soulager ? Dois-je demander de l’aide ? ». De ce fait, je lui propose de revenir
plus tard, le temps que l’interdose fasse son effet. La patiente veut tout de même
que je reste et que l’on réalise ses soins d’hygiène. Étant donné les circonstances,
je lui propose de faire une toilette génito-anale, son dos et ses aisselles. Madame
L. accepte. Les soins durent plus d’une heure entre : sa toilette, son installation,
l’écoute, ses plaintes, ses pleurs. Je reste perplexe durant le soin car son visage
ne montre aucun signe de douleur apparent, mais elle dit se sentir toujours
algique. Une fois apaisée, je ressors de sa chambre. Je me sens insatisfaite de
ma prise en charge et épuisée psychiquement. Un sentiment de mal être et
d’incompétence s’installe en moi, je pense que la qualité du soin n’a pas été au
rendez-vous. J’ai le sentiment de ne pas avoir répondu à ses attentes et la
sensation, que nous sommes toutes les deux insatisfaites du temps passé
ensemble.
Je recroise dans le couloir l’aide-soignante qui m’a demandé de m’occuper de
madame L. et elle lit mon désarroi sur mon visage.
Elle me demande : « Qu’est ce qui ne va pas ? ».
Je lui réponds : « Je ne suis pas satisfaite de la prise en charge de madame L.
cela a été très compliqué, il est difficile d’évaluer sa douleur et j’ai le sentiment de
n’avoir pas répondu à ses besoins et ses attentes. »
L’aide-soignante me répond : « Moi, je n’aime pas m’occuper des personnes
atteintes de troubles psychiatriques ».
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Je reste silencieuse, car je suis surprise par son commentaire par rapport à mes
valeurs soignantes qui sont, entre autres, l’empathie et le prendre soin.
Après ce soin, j’apprends et vois par la suite que certains soignants sont aussi
mis aussi en difficulté face à la cotation de la douleur de cette patiente. Ils
semblent quelques peu déstabilisés face à la prise en soin de la patiente. Certains
éprouvent peu d’empathie lorsque madame L. exprime ses douleurs :
- « Elle se plaint encore… ».
- « Elle se plaint et après si quelque chose va dans son sens, elle change
son comportement et l’exprime avec un large sourire et dit qu’elle n’a plus
mal …».
2.2 L’émergence de problèmes, questionnements :
Cette situation me questionne au regard des difficultés d’accompagnement d’une
personne ayant une pathologie mentale dans l’évaluation de la douleur chronique,
dans un service de court séjour en soins généraux.
Recherche de concepts :
Les représentations:
En quoi se caractérise une représentation ? En quoi se caractérisent les
représentations de la santé mentale dans notre société ? Quelles perceptions et
représentations de la douleur ont les patients atteints de troubles psychiatriques ?
Avons-nous tous le même ressenti par rapport à la douleur ? En quoi les
représentations influencent-elles la conception du soin de l’infirmier ? En quoi la
stigmatisation de personnes atteintes de troubles psychiatriques peut-être un frein
à une prise en soins globale ? En quoi la stigmatisation des patients, atteints de
pathologies mentales, peut-elle être dangereuse pour eux ? Comment les
représentations sont-elles alimentées ? La pathologie mentale est-elle un frein
dans l’évaluation de la douleur ?
La douleur chronique :
Comment percevoir, comprendre la douleur chronique de personnes, lorsque les
troubles mentaux perturbent le fonctionnement cognitif ? Comment assurer une
prise en soin de qualité ? Sommes-nous tous égaux face à la douleur ? En quoi
les troubles mentaux peuvent-ils être un frein pour la prise en charge de la
- 11 -
douleur chronique ? Comment un soignant peut-il faire la part des choses lors de
l’évaluation de la douleur chronique ? En quoi la douleur chronique peut-elle être
difficile à vivre émotionnellement parlant pour le soignant ? Quel est le cadre
législatif pour la prise en charge de la douleur chronique ? En quoi la relation
soignant-soigné est-elle importante dans ce type de situation ? Comment
l’infirmier doit-il estimer, mesurer s’il est question d’une douleur physique, ou alors
d’une douleur psychologique ou bien les deux à la fois ? La perception de la
douleur est-elle différente entre un service de soins généraux et un service de
psychiatrie ? Comment peut se traduire la douleur chez les personnes atteintes
d’une pathologie mentale ?
Je souhaite travailler sur les concepts des représentations à travers différents
items. Cela va me permettre de comprendre les éventuels impacts pour un
infirmier exerçant en court séjour, lorsqu’il doit côter la douleur chez une personne
atteinte d’une pathologie mentale.
Je désire aborder ensuite le concept de la douleur chronique, afin de l’analyser, et
de ce fait, comprendre les caractéristiques de celle-ci. Mais aussi percevoir les
impacts possibles, lorsque le soignant doit l’évaluer, notamment quand une
pathologie mentale peut perturbée cette action.
Question pour le mémoire :
2.3 La phase exploratoire :
2.3.1 L’exploration au regard d’écrits professionnels :
Les représentations :
Dans l’exercice de notre fonction d’infirmier, nous sommes en permanence
influencés par des représentations pouvant avoir un impact important sur la qualité
de la prise en soin d’une personne soignée, notamment dans l’évaluation de la
douleur chronique. Elles peuvent être positives comme négatives. Mais d’où
viennent-elles et quelles sont-elles ?
En quoi, les représentations des soignants en court séjour dans les soins généraux
peuvent-elles avoir un impact sur l’évaluation de la douleur chronique, lors de la prise en
soins de personnes atteintes d’une pathologie mentale ?
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a) L’infirmier :
Ces soixante dernières années ont fait évoluer et diversifier le métier
d’infirmier. Jusqu’en 1992, on pouvait dissocier deux types d’infirmiers : ceux
spécialisés en psychiatrie et les autres en soins généraux. De nos jours, il n’existe
plus qu’un seul diplôme d’état infirmier. Ces derniers, avides de reconnaissance,
ont favorisé la mise en place de différentes spécialisations. La sociologue Acker
Françoise, souligne à ce sujet dans un article, l’impact de ces spécialisations et le
besoin de reconnaissance d’identité spécifique entre paires : « la dynamique de
différenciation reste vive, portée par des groupes qui cherchent à faire reconnaître
la spécificité de leur ‘‘métier’’, savoirs et compétences : infirmier clinicien,
oncologie […] 3.»
Ces spécialisations sont, certes un atout pour la prise en soin des personnes
soignées car cela leur assure une qualité de plus, mais lorsqu’une pathologie
diffère des habitudes de prise en charge du service, cela peut rendre plus
complexe la prise en soins et, mettre en difficulté notamment l’infirmier.
À l’égard de ma situation, l’infirmière diplômée après 1992 qui avait en charge
le secteur, concevait son métier vers une spécificité : l’oncologie. Cela faisait plus
de cinq ans qu’elle exerçait dans cette structure. On peut penser que cette
spécialisation est un souhait de sa part au regard de son ancienneté.
Dans la situation de soin pour madame L., une autre spécificité s’ajoute à
l’oncologie : la santé mentale. En analysant la prise en soin de la patiente, on
retrouve des manquements au regard de ce domaine, comme l’absence de
recherche par rapport à la pathologie mentale, le manque de questionnement
auprès du psychiatre et du psychologue, ainsi que la limitation du temps de
présence et de communication auprès de la patiente. Durant sa journée de travail,
l’infirmière est venue la voir deux fois : pour se présenter au premier tour le matin
et lors de la distribution des médicaments du midi (car c’est moi qui lui ai apporté
ceux au moment du petit déjeuner). Ce temps non investi de sa part, me laisse
suggérer un possible malaise sur la prise en soin de la patiente. L’infirmière s’est
peut-être retrouvée en difficulté car elle n’a pas pu s’asseoir sur ses
connaissances acquises dans sa spécialité, étant donné que la prise en soins de
madame L. nécessite d’être à l’aise dans chaque domaine : somatique et
3 Acker F., « 1956-2006 cinquante ans de profession infirmière », Soins n° 711, décembre 2006,
p39.
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psychique. Elle s’est peut-être aussi désintéressée car le profil de madame L. ne
correspondait pas à la prise en soins habituel du service. Ou, était-ce alors la
possibilité d’un manque de compétences ?
Or, la douleur est son motif d’hospitalisation. Elle requiert, de ce fait, le rôle
propre de l’infirmier à travers : une investigation, de l’observation.
Malheureusement, je n’avais pas encore acquis ces savoirs lors de ce stage, mais
ce point sera éclairci plus tard.
Nos conceptions et perceptions codifient notre identité d’infirmier. D’où
l’émergence de différents profils soignants selon l’influence du lieu où l’on exerce.
b) Le court séjour :
Ces services dit actifs ont un grand « turn over » car ils sont soumis à une
pression budgétaire, notamment au regard de la tarification à l’acte. « La T2A est
un système de financement des établissements de santé qui associe le paiement
à l’activité réalisée, celle-ci étant définie par des épisodes de soins.4 »
Cette tarification a pour conséquence «l’incitation directe à réduire le coût des
séjours […] et peut compromettre la qualité de soins de différentes manières. 5 »
Cette citation m’amène à penser que les infirmiers travaillant dans ce type de
service sont perpétuellement dans l’action, dans « le faire » à cause d’un afflux
constant de patients et de la réduction du temps de séjour. Cela pousse à se
questionner si, dans le court séjour, la compétence demandée pour un infirmier,
ne se limite pas au savoir faire ; car dans ce genre de situation de prise en soins,
cela lui permet de ne pas s’engager dans le domaine des émotions.
Au regard de ma situation, cela m’amène à penser que, malgré ce service qui
bénéficie d’une plus grande tolérance et capacité de soins, Madame L. a du suivre
les habitudes d’un service avec des changements réguliers, et des prises en soins
techniques. Or, les personnes, souffrant d’une décompensation d’un point de vue
psychique, ont besoin de repères pour se sentir contenues et donc sécurisées.
Son hospitalisation en court séjour a peut-être majoré sa
décompensation mentale, faute de repères, augmentant de ce fait, son anxiété
dans les soins, mais aussi son angoisse de mort face à son cancer.
4 IRDES, « Principes et enjeux de la tarification à l’activité à l’hôpital (T2A) », Paris, DT n°23, mars,
2009, p 3. 5 Ibid., p 6.
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De plus, l’infirmière du jour a priorisé les prises en soins « tarifiées », laissant un
temps restreint auprès de Madame L., qui était à ce jour, en demande d’écoute.
Cela questionne sur la place du relationnel dans les services de court séjour,
lorsqu’ils sont sous l’afflux d’activités techniques ? Car celui-ci ne comporte pas de
traçabilité, de ce fait, il n’est pas côté. Donc, il n’est pas reconnu du point de vue
de l’enveloppe budgétaire du service. Pourtant, celui-ci est un soin à part entière,
essentiel dans une prise en soin de qualité.
Le relationnel rentre dans la conception du prendre soin et constitue pour
l’infirmier une partie de son rôle propre. Eliane Rothier Bautzer, maître de
conférence en sciences de l'éducation à l'Université René Descartes, souligne:
À l’hôpital, le travail du Care en partie invisible, en partie lié à la sphère privée et
aux tâches profanes, est réalisé par les infirmières qui cherchent à en déléguer les
aspects les moins reconnus et les moins ‘’techniques’' (toilettes, soins quotidiens)
aux aides soignantes […] tandis qu’elles se concentrent sur les tâches plus
techniques déléguées par les médecins. 6
Dans la situation, l’infirmière a peu investi son rôle propre. En effet, elle a
privilégié son rôle prescrit au sein du secteur et a laissé à l’aide soignante et à
moi-même, la prise en soin pour madame L., sans savoir quelles étaient nos
ressources. Or, je me suis retrouvée impuissante dans l’évaluation de la douleur.
Lorsque je lui ai transmis mes difficultés, elle a peu cherché à savoir ce qui s’était
passé et semblait gênée. Elle m’a juste confirmé que la prise en soin n’était pas
facile.
Pourtant, ces instants passés entre soignant-soigné, permettent de mieux
comprendre la personne et, ainsi de mieux maîtriser les informations sur le type
de douleur pour les retranscrire de façon objective auprès des médecins.
Les services de court séjour sont peu habitués aux décompensations
mentales. En effet, les personnes présentant une décompensation psychique sont
généralement prises en charge par des structures spécialisées dans ce domaine.
De ce fait, les soignants de courts séjours se retrouvent parfois démunis face aux
prises en soins de personnes atteintes de troubles mentaux car ce sont des
situations inhabituelles à leurs pratiques du quotidien.
6 Rothier Bautzer E., « Entre Cure et Care les enjeux de la professionnalisation infirmière », Paris :
Lamarre, 2012, p136.
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D’après Le Boterf Guy, conseiller en ingénierie des ressources humaines, en
formation et en management « La compétence est la mobilisation ou l'activation
de plusieurs savoirs, dans une situation et un contexte donné7 ». Cette citation
renvoie à la posture professionnelle, et cela m’amène à penser que sa gêne
émane également peut-être d’un sentiment d’incompétence de la part de
l’infirmière dans la prise en charge de la patiente.
Certains soignants peuvent être déstabilisés dans ce type de prise en soin car
ils ne sont pas en mesure de s’asseoir sur leurs savoirs et ressentent de ce fait,
une insécurité. Quand la pathologie physique s’allie à la pathologie psychologique
et/ou psychiatrique, cela nécessite une prise en soins pluridisciplinaire. Mais ce
point sera éclairci ultérieurement. Cependant, un infirmier doit être à même de
prendre en soins tout type de patient dans tout type de contexte de manière
objective, ce qui sous entend de ne pas être influencé par ses propres
représentations.
c) Représentation sociale :
Les représentations se construisent et se déterminent au regard des intérêts,
des revendications, des éducations, des institutions qu’une personne fréquente ou
a fréquentée. Elles se structurent également par le biais des médias, des cultures,
des religions… Elles aident à comprendre l’environnement dans lequel on vit et
rendent possible la relation avec les autres individus. Elles permettent d’émettre
des hypothèses et de construire une identité sociale, ainsi qu’un mode de
communication et d’échange face aux différents groupes sociaux qui nous
entourent.
D’après Pascal Molinier, professeur en psychologie sociale et Christian
Guimelli, professeur à l’université enseignant la psychologie sociale et du travail,
les représentations sociales se qualifient comme étant « [...] ‘‘des connaissances
naïves'’. Non pas parce qu’elles sont moins performantes ou moins utiles que les
connaissances ‘’expertes’’ mais parce qu’elles se construisent, se transmettent et
évoluent selon les règles relativement éloignées de la rationalité spécifique 8 ».
7 HAL., « L’expérience et les compétences peuvent-ils se transmettre ? » mars, 2013, p 3.
8 Molinier P., Guimelli C., « les représentations sociales », Grenoble : PUG, 2015, p 8.
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Par rapport à la situation, quand l’aide-soignante me dit « Moi, je n’aime pas
m’occuper des personnes atteintes de troubles psychiatriques » : ces propos sont
peut-être plus fondés sur des « connaissances naïves » que sur la connaissance
scientifique de l’hystérie ? Ces représentations ont peut-être été perturbées, faute
de connaissances sur les pathologies en santé mentale. Car ni l’infirmière du
secteur, ni moi ne lui avons donné des informations sur l’hystérie. Or, à cette
période de formation, j’avais déjà vu en cours la structure névrotique, dont les
troubles histrioniques. De plus, étant moi-même ancienne aide-soignante, je sais
que les pathologies mentales ne sont pas enseignées dans ce cursus. De ce fait,
l’émergence de fausses représentations est plus favorable.
Cette analyse me permet de voir certains impacts des représentations, car
elles sont propres à chacun et émanent selon nos influences familiales, sociales et
notre expérience professionnelle. Face à ces différentes visions, cela souligne
notamment l’intérêt de la mise en place d’un dispositif commun pour réduire la part
de subjectivité lors la cotation à la douleur. Mais cette thématique sera abordée
ultérieurement.
Ces difficultés ou désinvestissements dans cette prise en soin émanent peut-
être d’une vision altérée de la santé mentale.
d) La santé mentale :
Selon l’OMS, la santé mentale se définit comme étant « un état de complet
bien-être physique, mental et social, et [qui] ne consiste pas seulement en une
absence de maladie ou d’infirmité 9 ».
En France, « Si la politique a pendant longtemps consisté essentiellement à se
protéger contre la dangerosité des malades mentaux (loi de 1838 sur les aliénés),
la période d’après guerre a permis une évolution notable et positive en ce qui
concerne la dignité des personnes et l’approche clinique 10 ».
9 http://www.who.int/features/factfiles/mental_health/fr/ (organisation mondial de la santé -10 faits
sur la santé mental), août 2014, consulté le 20 mars 2016. 10
Basset. B., « Les politique de santé mentale », ADSP, n°84, septembre 2013, p 45.
- 17 -
La perception de la santé mentale est souvent alimentée et influencée
péjorativement par les représentations sociales. Le journaliste Marc Oeynhausen,
souligne dans un article les propos du psychologue social Serge Moscovici :
« les représentations sociales permettent d’établir des catégories de personnes
auxquelles nous attribuons des caractéristiques communes. Nous aurons
tendance à accentuer les ressemblances de toutes les personnes d’une même
catégorie 11».
Au vu de ma situation, certains soignants ont étiqueté madame L. comme étant
« psy » avant de la rencontrer, suite au staff et face au dossier de soins indiquant
une décompensation hystérique et une dépression. Ces propos soulignent
l’existence d’un certain formatage, conditionnement de la part de la société qui
peut amener à discréditer les personnes atteintes d’une pathologie mentale. Cela
me laisse suggérer également, que les diagnostics établis et inscrits du côté de la
santé mentale sur le dossier de soins, ont influencé et préétabli une représentation
de Madame L. chez certains infirmiers et aides soignants. En la qualifiant ainsi, la
patiente est victime d’une stigmatisation et cela constitue un handicap dans sa
prise en soin.
Selon Erwing Goffman le stigmate « représente un désaccord particulier entre
les identités sociales virtuelles et réelles 12 ».
Cette définition souligne par rapport à ma situation, l’existence d’un écart
identitaire pour cette patiente. Celui-ci a été alimenté, entre autres, par les
différentes représentations comme celles citées ci-dessus, mais aussi par les
interactions entre le personnel, lors des transmissions, des discussions de
couloir…
Or, la patiente est atteinte d’un cancer, sa place est légitime au sein du
service. Sa pathologie mentale a primé pour certains soignants sur sa pathologie
physique lors des soins. Ce stigmate a pu être délétère chez elle, notamment
dans l’évaluation de sa douleur, car certains soignants et moi-même, étions
parfois dubitatifs face à ses propos. Certains la considéraient comme une « folle»
lors de ses fluctuations thymiques passant des rires aux larmes, notamment
11
Furtos.J., « Bulletin national santé mental et précarité, l’âge post thérapeutique» Rhisome, septembre 2011, p14. 12
Goffman E., « Stigmate, les usages sociaux des handicaps »,Paris : Aux Editions de Minuit, p12.
- 18 -
quand elle voulait que l’équipe l’accompagne pour qu’elle puisse fumer. (Pratique
non réalisée auprès des autres patients du service durant mon stage)
Selon une enquête sur la santé mentale en population générale, réalisée en
France et dirigée par l’Institut Politique de Sondage d’Opinion Sociale pour la
fondation de recherche et de soins en santé mentale, on retrouve une vision assez
pessimiste des personnes atteintes d’une pathologie mentale. Dans l’analyse de
cette étude, on trouve régulièrement des mots stéréotypés qui caractérisent les
personnes atteintes de troubles mentaux : « attardé, retardé, demeuré (7%),
débile, débile mental (5%), dérangé, déréglé (6%), aliénation, aliéné (6%) 13 ».
D’après Erwing Goffman, ces qualifications freinent la relation avec ces
personnes : « la barrière interposée entre le reclus et le monde extérieur constitue
la première amputation que subit la personnalité 14 ».
À travers ces différentes citations et du recul sur la situation de soin, je
m’aperçois que nous avons peut-être remis en cause une partie de son identité,
notamment lors de la remise en cause de sa douleur.
L’hystérie a pu contribuer à la difficulté de sa prise en soin de notre part. Selon
la pédopsychiatre Lim-Sabbah.I, « La conversion hystérique est la survenue de
symptômes touchant la motricité, les fonctions sensitives ou sensorielles évoquant
une affection médicale. Ces symptômes viennent révéler, comme dans toutes les
névroses, des conflits psychiques inconscients 15».
Au regard de la situation, cette pathologie peut s’avérer être une complication
pour l’infirmière lorsqu’elle doit évaluer la douleur de Madame L. . En effet, celle-ci
doit estimer dans les plaintes, quelle est la part du somatique et la part du
psychisme. De plus, la personnalité hystérique présente « une dépendance à
l’autre […] une hyper expressivité et labilité des affects […] une facilité à la rêverie,
des activités fantasmatiques imaginaires avec une tendance à envahir la
préhension du réel 16 ».
13
IPSOS, « Perception et représentations des maladies mentales », Rapport du sondage, avril 2014. 14
Goffman, E. « Asiles, études sur la condition sociale des malades mentaux » , Editions de Minuit, p 57. 15
Lim-Sabbah.I (2010). « psychiatrie, mémostageinfirmier », Elsevier Masson : 2ème
édition. p37. 16
Cours U.E 2.6.S2 processus psychopathologique : névrose/dépression Dr. Goetz,16 juin 2014.
- 19 -
Lors des soins, ces instabilités du comportement ont pu favoriser sa
stigmatisation, car les soignants du service sont peu habitués à rencontrer ce type
de personnalité dans leur service de court séjour. De plus, la perception de la
douleur est différente d’une personne à une autre.
e) La douleur :
Selon l’association International Association for the Study of Pain, « la douleur
est définie comme une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à
une lésion tissulaire existante ou potentielle, ou décrite en termes évoquant une
telle lésion17 ».
Pour l’anthropologue et sociologue français Le Breton David, la douleur est « le
fruit d’une éducation 18» différente « d’une condition sociale et culturelle à une
autre, et selon leur histoire personnelle, les hommes ne réagissent pas de la
même manière à une blessure ou à une affection identique. Leur seuil de
sensibilité n’est pas le même19 ».
Ces définitions laissent suggérer que nous avons tous une représentation
différente de la douleur. Celle-ci est empreinte des représentations sociales mais
aussi de notre vie et des notions inculquées depuis notre tendre enfance.
Par rapport à ma situation, face aux plaintes de madame L., je me suis sentie
impuissante et démunie face à l’expression de la douleur. Je n’arrivais pas à
évaluer ni à distinguer quelle était sa douleur. Cette situation m’a été difficile à
vivre personnellement, du fait de mes perceptions du soin et de la souffrance que
cela me renvoyait. Je me suis retrouvée envahie par mes émotions, laissant place
à un sentiment d’incompétence, car je n’ai pas su m’adapter à cette nouvelle
situation de prise en soin.
17
HAS, « reconnaître le syndrome douloureux chronique, l’évaluer et orienter le patient » recommandations professionnelles, décembre 2008, consulté le 13 février 2016. 18
Le breton D. « Anthropologie de la douleur », édition revue et complétée. p 1, consulté le 24
juillet 2015. 19
Ibid., p1.
- 20 -
Le docteur Worbel Jacques explique que « la relation entre douleur et culture
soulève des problèmes complexes quant à l’interaction des facteurs biologiques,
psychologiques, culturels et sociaux dans la perception et l’expression de la
douleur 20».
Cette citation souligne la complexité pour un infirmier d’évaluer la douleur
d’une personne. À propos de ma situation, je suis restée consternée face à ses
dires pendant un temps donné avant d’émettre des mots. Ses variations d’affects
empêchaient ma cotation mais aussi la compréhension de sa douleur.
Pour l‘équipe, cette douleur chronique était certes présente, mais du fait de sa
pathologie mentale, celle-ci était souvent remise en cause, d’où parfois une
cotation subjective. Ceci me renvoie à la construction des représentations sociales
illustrée auparavant.
Parfois dans le court séjour, la pathologie physique prime sur la pathologie
mentale faute de temps, d’investissement et parfois de désir... Cependant,
l’infirmier doit être capable d’estimer si la personne soignée souffre d’une douleur
physique ou psychologique ou bien les deux à la fois. Cela amène à s’interroger
sur la perception de la douleur chronique.
La douleur chronique :
Afin d’optimiser la prise en charge de la douleur chronique des personnes
soignées, il est nécessaire de savoir le type et la nature de celle-ci. Mais aussi, de
comprendre comment elles se définissent et se caractérisent et pourquoi il est
nécessaire de la traiter.
a) Une prise en soins nécessaire :
Tout d’abord, on évoque une douleur chronique, lorsque « celle-ci persiste
depuis plus de trois mois chez la personne 21». Cette souffrance est spécifique et
différente d’une douleur aiguë. Elle est perpétuelle et comme le souligne le
docteur Worbel Jacques, elle a « perdu sa fonction de symptôme d’alarme d’un
dysfonctionnement somatique, généralement largement dissociée de sa
20
Worbel J. et al., « Aspect psychologique de la douleur chronique », institut UPSA de la douleur,
p115. 21
Jiquelle E., U.E4.7.S5 : la douleur chronique,10 septembre 2015.
- 21 -
composante lésionnelle, la douleur chronique est devenue un syndrome, une
véritable ‘’ maladie en soi ‘’ 22 ».
À travers cette citation, cela me permet de comprendre que Madame L. souffre
de plusieurs maladies : son cancer, sa pathologie mentale et sa douleur. Cette
dernière s’est initiée en elle, nécessitant, en outre, la pose d’une pompe
intrathécale. Sa douleur est une composante à part entière dans sa vie de tous les
jours et, nécessite de ce fait une prise en soins au quotidien.
La prise en charge de la douleur est un enjeu de santé publique, le ministère
des affaires sociales et de la santé et des droits des femmes est, à ce jour, à son
troisième plan de lutte contre la douleur. Cette lutte s’inscrit aussi au regard de «la
loi relative aux droits des malades du 4 mars 2002 qui reconnaît le soulagement
de la douleur comme un droit fondamental de toute personne 23 ».
D’autres textes législatifs, chartres évoquent cet enjeu :
*La loi hospitalière du 4 février 1995 : ‘’Les établissements hospitaliers mettent en
œuvre les moyens propres à prendre en charge la douleur des patients qu’ils
accueillent.’’
* La charte de la personne hospitalisée – 2 mars 2006 : ‘’ Les établissements de
santé garantissent la qualité de l’accueil, des traitements et des soins. Ils sont
attentifs au soulagement de la douleur et mettent tout en œuvre pour assurer à
chacun une vie digne avec une attention particulière en fin de vie. ‘’
*L’article l 1110-5 du code de santé publique – loi du 4 mars 2002 : ‘’ Toute
personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur, celle-ci
doit être en toute circonstance prévenue, évaluée et traitée. ‘’ 24
Face à ces références, Madame L. a pu bénéficier d’une équipe
pluridisciplinaire. Celle-ci s’est inscrite et impliquée dans son parcours de soins
notamment grâce à la mise en place d’un staff incluant notamment un psychiatre
et une psychologue, afin d’expliquer des consignes pour optimiser la qualité de
prise en charge. La psychiatre est venue voir la patiente lors de son arrivée dans
le service et s’est montrée disponible pour l’équipe soignante.
22
Worbel J. et al - aspect psychologique de la douleur chronique, institut UPSA de la douleur, p 8. 23
http://www.sante.gouv.fr/la-douleur.html (ministère des affaires sociales et de la santé et des droits des femmes), consulté le 12 février 2016. 24
Jiquelle E., U.E 4.7.S5 : la douleur chronique, 10 septembre 2015.
- 22 -
Une enquête réalisée par le centre hospitalier universitaire de Toulouse reflète
la complexité de la prise en soins de la douleur. Cette enquête a pour titre «Ce
que je suis (moi soignant) influence-t-il ma manière de prendre en charge la
douleur ?25 ». Celle-ci a permis d’interroger différents professionnels de la
santé (médecins, infirmiers, aides-soignants…) sur la douleur provoquée par le
soin. L’enquête a révélé chez les professionnels de santé deux types de prises en
soins :
« L’une centrée sur l’agir, la prise de distance émotionnelle, l’opérationnalisation
technique, en intégrant la prise en charge de la douleur dans une visée
techniciste. L’autre centrée sur le désir et la volonté de ‘’prendre soin’’ de la
personne soignée dans une visée humaniste et existentialiste, en intégrant ‘’la
douleur induite par les soins’’ dans une prise en charge relationnelle centrée sur le
confort, l’écoute, l’humanitude 26».
Cette enquête montre la diversité de la prise en soin de la douleur de la part
d’une équipe soignante. Reste à déterminer si cette homogénéité est une force ou
une faiblesse pour la prise en soins des personnes soignées étant atteintes d’une
pathologie mentale.
Face à cette investigation, cela m’a poussé à réaliser une rétrospection sur
ma prise en charge de la douleur chez la patiente. Au départ, je pensais avoir été
seulement dans la recherche d’un moyen technique pour soulager sa peine
(serviette chaude, antalgiques..). Avec du recul, à présent je m’aperçois que j’ai
essayé d’apaiser sa souffrance à travers « le prendre soin ». Je suis restée avec
elle un certain temps et une relation d’aide s’est instaurée. Cette dimension du
soin n’a certes pas été d’une qualité optimale, mais j’ai peut-être soulagé ses
maux qui étaient, à ce jour, une priorité du coté du psychisme. A présent, je me
rends compte que si je me suis retrouvée en difficulté c’est parce que j’ai occulté
la pathologie mentale de la patiente. Je pense avoir voulu m’occuper d’elle comme
les autres personnes soignées du service. Or, la prise en soins de madame L.
nécessite d’être plus cadrante et rassurante afin qu’elle se sente en sécurité.
Afin d’évaluer la douleur chronique, il est important pour l’infirmier d’essayer de
comprendre la cause du symptôme de la douleur, et d’essayer de savoir si elle se
25
Peoc’h N., « Ce que je suis, moi soignant, influence-t-il ma manière de prendre en charge la douleur. douleurs induites par le soin », CLUD, CHU Toulouse. 26
Ibid.,
- 23 -
situe sur le plan somatique et ou psychique. Ou alors, si cette souffrance fait place
à l’intrication d’une « douleur totale avec ces dimensions : physique, psychique,
sociale, spirituelle 27 ». Pour cela, il est nécessaire de savoir quelles sont les
représentations, l’histoire de vie, mais aussi la place de la douleur chez la
personne soignée.
b) Une relation intime :
La douleur chronique sépare la personne du monde, elle provoque une
dissociation entre l’esprit et le corps. Selon l’anthropologue et sociologue Le
Breton David, « La douleur est un moment de l’existence ou se scelle pour
l’individu l’impression que son corps est autre que lui. Une dualité insurmontable
et intolérable l’enferme dans une chaire rebelle qui le contraint à une souffrance
dont il est le propre creuset 28».
Cette citation m’amène à penser que madame L. mène un combat perpétuel
face à cette souffrance. Cette dernière est source de conflit interne mais aussi
d’anxiété puisqu’elle est un signe que ses maladies évoluent. La patiente n’a plus
de répit, cela devient une habitude, un fond continuel lancinant et persistant pour
elle. Cela a pu notamment modifier sa pensée, ses interactions envers les
soignants.
Ce même auteur, explique également que « la douleur induit un renoncement
partiel à soi, à la contenance qui est de mise dans les relations sociales. L’individu
relâche le contrôle qui d’ordinaire organise les rapports aux autres 29 ».
Cette citation, m’amène à penser que les somatisations comme les variations
d’affects, ses différents modes d’expressions, pouvaient-être un moyen pour
Madame L. de s’exprimer et de signaler ses souffrances envahissantes. Mais
aussi une manière d’appeler à l’aide. C’était peut-être aussi une méthode pour
montrer ses frustrations à l’équipe soignante et permettre ainsi d’affirmer son
identité, son existence face à ses douleurs.
27
Coisne F., cours UE 4.7.S5 : soins palliatifs janvier 2016. 28
Le Breton D., « anthropologie de la douleur », édition limitée, p 24. 29
Ibid., p 1.
- 24 -
Face à l’évaluation de la douleur, Le Breton David exprime « qu’aucune
formule définitive ne saurait enfermer la relation intime à l’homme à sa douleur,
sinon le fait que toutes douleurs renvoient à une souffrance, et donc à une
signification et à une intensité propre à l’individu dans sa singularité 30 ».
Cet extrait montre toute la complexité de l’évaluation de la douleur. Cela me
permet de comprendre que madame L. a une douleur propre à elle-même.
Elle seule sait ce qu’elle ressent. C’est pourquoi j’ai pu être en difficulté pour
évaluer celle-ci. En effet, l’expression, les mots face à la souffrance proviennent
de l’interaction entre la culture et de ses propres représentations de la douleur.
D’où, la légitimité de placer la personne soignée au centre de ses soins et que
celle-ci soit actrice. Même si la personne présente une décompensation mentale.
Cette relation, dite intime, influe également sur le psychisme de la personne.
Selon le docteur Worbel Jaques « la dépression est associée à la douleur chez
10 à 100% des douloureux31 ».
Cela m’amène à comprendre et émettre l’hypothèse que le versant dépressif de
madame L. est peut-être induit de sa douleur chronique. Face à cette situation
intolérable pour elle, la patiente a peut-être mis en place des mécanismes de
défense rendant plus complexe l’évaluation de sa douleur pour les soignants.
c) L’évaluation :
Selon le dictionnaire du Larousse, le verbe évaluer, signifie : « déterminer,
fixer, apprécier la valeur de quelque chose 32 ». Cette définition montre toute la
subjectivité de ce terme, tant qu’il reste vague, car cela fait appel aux
représentations, aux savoirs, à la culture, aux émotions propres à chaque individu.
Face à la prise en soins de Madame L., ma cotation de la douleur était peut-
être différente des autres soignants. Ceci accentue la nécessité de l’évaluer à
l’aide d’outils adaptés, tels que des échelles suivant le type de douleur de la
personne soignée. Madame L., présentait différents types de souffrances dont des
30
Ibid., p 20. 31
Worbel J. et al., « Aspect psychologique de la douleur », institut UPSA, p 46. 32
http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais , consulté le 12 février 2016.
- 25 -
douleurs de type neuropathiques. Pour que celle-ci soit affirmée il est
recommandé d’utiliser un questionnaire spécifique : le DN4 33 .
Il s’agit d’un questionnaire concernant les caractères de la douleur. Brûlure, froid
douloureux, décharges électriques … complété par 3 éléments cliniques. Il est côté
sur 10 et si l’on a 4 réponses positives, on considère qu’il s’agit d’une douleur
neuropathique. Reconnaître le mécanisme est très important, car la prise en charge
sera différente selon le type de douleur 34.
Avec du recul, je me rends compte que les médecins n’ont pas préconisé ce
type d’évaluation, du moins je n’ai pas vu cette échelle auprès des infirmières. De
plus, mon évaluation n’était pas fiable par rapport aux autres soignants, car je ne
connaissais pas toutes les dimensions de la douleur chronique. Certains
enseignements sur ce sujet m’ont été inculqués lors de ma troisième année de
formation. De ce fait, mes actions étaient peut-être non pertinentes face à la
situation…
Ces nouvelles connaissances m’ont permis de comprendre à ce jour certaines
réactions et conséquences de la douleur de Madame L. lors du soin. Elle a peut-
être été victime d’une allodynie lors de la pose de la serviette chaude.
(« douleur qui apparaît à la suite d’un stimulus qui ne devrait pas normalement
causer de douleurs »35)
Certes, ces douleurs paroxystiques ne peuvent être prévues, mais cette situation
m’a mise à mal personnellement sur mes représentations du soin et du soignant,
pendant un moment car, je n’avais pas la connaissance de ce savoir.
Les émotions du soignant ont un impact sur la prise en soin des personnes
soignées. L’écrivain et sociologue allemand Norbert Elias, exprime à ce sujet que
« l’individu affecté voit réduire ses chances de mettre le processus critique sous
contrôle 36».
Après être sortie de la chambre de la patiente, je me suis sentie submergée par
mes émotions. J’ai pu ressentir un de désappointement, du remord mais aussi de
la tristesse. Certes, les émotions sont légitimes pour tous soignants, mais cette
33
Annexe A p 43. 34
U.E 4.7.S5, Jiquelle E., douleur chronique, 10 septembre 2015. 35
U.E 4.7.S5, Coisne F., soins palliatifs, janvier 2016. 36
Bourdeaut F. « les émotions dans la relation de soin : des racines de leur répression aux enjeux de leur expression », éthique&santé, Elsevier masson, 2006, p 133-137.
- 26 -
surcharge émotionnelle m’a perturbée et empêchée d’annoter mes difficultés dans
le dossier de soins de Madame L. . Je les ai juste transmises oralement à l’aide-
soignante et à l’infirmière du secteur. Mes transmissions écrites auraient peut-être
jouées un rôle dans la suite de sa prise en soin notamment dans la prise en
charge de la douleur.
Les personnes atteintes de troubles mentaux ressentent comme toutes autres
personnes la douleur. De La Brière Alice et Zephir Marie-Françoise, infirmières
référentes douleur, expriment que l’évaluation peut s’en révéler d’autant plus
difficile chez ces personnes car : « Même si elles sont réellement éprouvées par le
sujet, les douleurs psychogènes, c’est-à-dire liées à un dysfonctionnement du
système nerveux central où le perçu douloureux a une origine psychologique,
associent une absence de lésion décelable à un diagnostic psychiatrique 37».
Cet extrait d’article montre toute la subjectivité de l’évaluation de la douleur de
madame L. . Face à ses différentes pathologies intriquant le somatique au
psychique, existe-t-il une limite ? Malgré le passage du psychiatre durant son
séjour, tous ces enchevêtrements ont pu mettre en difficulté l’infirmière pour
évaluer la douleur. Cela pousse à se questionner sur la façon dont elle est cotée
en santé mentale.
L’évaluation en santé mentale peut aussi se révéler difficile suivant la structure
psychique de la personne soignée. Ces investigations demandent du temps, de
l’observation. Cette évaluation se fait notamment lors des entretiens infirmiers
mais aussi avec l’alliance d’un médecin généraliste, du psychiatre et du
psychologue. Selon le médecin Djéa Saravane, président de l’association
nationale pour la promotion des soins somatiques en santé mentale, on retrouve
également ces difficultés en psychiatrie dans la prise en charge de la douleur. Le
soignant se retrouve aussi à travers différents obstacles : « […] la non-
verbalisation des douleurs associée à des altérations des perceptions et du
schéma corporel […] la sensation exprimée par le patient et non perçue par le
soignant. La non-reconnaissance de la douleur par l’équipe soignante
insuffisamment formée dans ce domaine 38 ».
37
Zephir M.F., De La Brière A., « la prise en charge de la douleur dans le champ de la santé mentale », Soins n°757 juillet /aout 2011 p14-16. 38
Saravane D, « douleurs et psychiatrie », santé mentale, n°19, octobre, 2014, p12.13.
- 27 -
Cet extrait me permet de comprendre toute la complexité de la prise en soin de la
douleur chronique chez les personnes atteintes d’une pathologie mentale. Tous
les services, quelque soit la spécialisation peuvent se retrouver en difficulté dans
cette prise en soin.
Ce travail de recherche m’a permis d’établir l’hypothèse, que les
représentations ont un impact sur la qualité et l’évaluation de la douleur chronique.
En effet, selon la culture, l’éducation, la perception de son métier de soignant
l’évaluation est différente. Celles-ci peuvent mettre en difficulté l’infirmier s’il ne
laisse pas la personne soignée acteur dans son parcours de soins. Le patient a
besoin de ressentir une légitimité lorsqu’il exprime ses sentiments, ses propos
face à sa souffrance. Lui seul est envahi par un tourment qui le ronge de
l’intérieur. La douleur chronique déstabilise la personne soignée et peut modifier
l’interaction notamment dans le champ psycho-social. Quand elle s’associe à la
santé mentale, cela nécessite du temps et une approche pluridisciplinaire s’il on
veut ressentir un bien-être, une satisfaction dans le soin tant chez la personne
soignée que le soignant.
2.3.2 L’exploration du terrain :
a) Choix de la méthodologie :
Afin d’évaluer les différentes théories et questionnements de ma phase
conceptuelle avec la réalité du monde professionnel, j’ai décidé de poursuivre les
investigations par l’intermédiaire d’entretiens semi-dirigés auprès d’infirmiers. Ce
choix m’a permis de questionner le professionnel par l’intermédiaire d’un guide
d’entretien pré-établi. Celui-ci permet au soignant d’exprimer librement ses idées
par l’intermédiaire de questions concernant différentes thématiques. Cette
interview est censée ne pas excéder les trente minutes. Cette technique m’a
permise de recueillir de nouvelles informations pour enrichir ce travail de
recherche. Certaines réponses émises par le soignant m’ont permise également
d’élargir, de voir émerger de nouvelles directions de recherches. De ce fait,
certaines questions n’apparaissent pas dans le guide d’entretien initial.
Cet outil d’entretien est construit principalement autour deux objectifs. Le tout
premier, s’organise autour des représentations. Le but étant de recueillir les
différentes visions des infirmiers, afin d’évaluer leurs propres représentations et de
- 28 -
voir s’il existe des écarts. Le second, s’articule autour de la cotation de la douleur
chronique. Les objectifs de cette partie sont de mesurer comment les infirmiers
conçoivent la prise en charge de la douleur en terme de moyen, ainsi que l’impact
de leurs émotions lors de l’évaluation de cette dernière, selon le profil de la
personne soignée. Enfin, ce guide va également me permettre d’établir les
convergences et/ou divergences par rapport à mes travaux de recherches
effectuées en amont.
Avant d’effectuer ces échanges, j’ai effectué un pré-test39. Celui-ci m’a permis,
dans un premier temps, de voir si mon questionnement était compréhensible et
fiable. Puis, dans un second temps, cela m’a permis de vérifier le bon
fonctionnement de mon matériel mais aussi, voir mes capacités à effectuer un
entretien. En écoutant l’enregistrement, j’ai remarqué des réajustements à faire,
notamment au niveau de ma diction pour que ma voix soit plus audible, et faire
attention aux mots parasites.
b) Choix de la population :
Pour la réalisation des ces entretiens, je me suis confrontée à des difficultés
pour trouver des infirmiers volontaires que je ne connaissais pas. Face au temps
imparti pour rendre ce travail de recherche, je me suis dirigée vers des
professionnels que j’ai côtoyé durant mes stages, mais aussi que je connaissais
personnellement. Il est bien entendu qu’ils n’ont en aucun cas eu la connaissance
de mon sujet de mémoire. Ils ont seulement su ‘‘les grandes lignes de mon sujet’’
pour avoir leur accord ainsi que le guide, juste avant la réalisation de l’entretien.
J’ai fait le choix d’interroger des soignants exerçant dans différents domaines:
une infirmière travaillant en oncologie 40, diplômée depuis vingt ans. Elle a travaillé
quatorze ans dans le service d’oncologie de jour. A présent, elle est de nuit depuis
quatre ans et demi. Diplômée de l’ancienne réforme de l’école d’infirmier en 1996,
elle a principalement exercé au sein de service de court séjour dans les soins
généraux: pneumologie, chirurgie orthopédique, ophtalmique. Je trouvais ce choix
intéressant étant donné sa grande expérience dans le court séjour et l’année de
son obtention du diplôme. De ce fait, le domaine de la santé mentale était abordé
durant ses années d’études. Ce choix me paraissait d’autant plus attrayant pour
39
Annexe B, p 44. 40
Annexe C, p 48.
- 29 -
recueillir son ressenti sur ce type de prise en soin, car ma situation s’est déroulée
au sein d’un même type de service. L’entretien s’est déroulé au sein du service,
dans le salon des familles, durant son temps de travail. Celui-ci devait s’effectuer
en début de nuit. Mais, du fait de l’activité accrue et l’impossibilité de le
reconduire, celui-ci s’est déroulé en fin de nuit. La durée de celui-ci n’excède pas
les dix minutes.
J’ai également interrogé une infirmière diplômée depuis trois ans. Elle a travaillé
également au sein de service de court séjour 41 : maternité, chirurgie, soins
continus et au sein d’un service douleur de jour comme de nuit. Cet entretien me
semblait fondamental face à mon questionnement et situation de soin de départ.
En effet, comme je le citais ci-dessus, elle a travaillé au sein d’un service
spécialisé dans la prise en charge de la douleur. Cet entretien de dix-huit minutes,
s’est réalisé par téléphone étant donné l’impossibilité de coordonner un rendez-
vous.
Ensuite, je me suis entretenue avec un infirmier en santé mentale 42. Celui-ci
exerce son métier depuis deux ans et demi. J’ai fait ce choix, afin d’évaluer le
ressenti d’un professionnel travaillant en santé mentale sur le mode de prise en
soin de la douleur chronique, dans ce type de secteur. Cet entretien dure dix
minutes et s’est déroulé à son domicile. Durant cette interview, je n’ai pas posé
volontairement la quatrième question, évoquant les émotions du soignant lorsqu’il
doit évaluer la douleur d’une personne, car cet infirmier a toujours travaillé dans le
domaine de la santé mentale.
Ces entretiens regroupent un panel de deux femmes et un homme pour garder
la même proportion en fonction du nombre d’infirmiers en exercice. Toutefois,
l’ensemble de ces interviews ne reflète que les propos de trois infirmiers.
L’interprétation et, de ce fait l’analyse qui en découle, ne peuvent pas être
représentatives d’un groupe de professionnels.
41
Annexe D, p 52. 42
Annexe E, p 60.
- 30 -
c) Analyse des entretiens 43 :
Représentation de l’infirmier :
Au regard de la synthèse des interviews, on peut voir, en ce qui concerne la
conception du métier d’infirmier, des similitudes face aux différents profils. En
effet, que ce soit en soins généraux ou dans le secteur de la santé mentale, la part
du rôle propre a une place importante, aux yeux de ces professionnels à travers le
relationnel, l’écoute. Cependant les infirmières travaillant en court séjour identifient
aussi leur profession à travers le rôle prescrit. L’infirmier, (entretien 3) lui, exprime
le relationnel comme une part essentielle de son métier d’où son choix de
travailler dans le secteur de la santé mentale. Deux infirmiers (entretien 2 et 3)
conçoivent aussi l’infirmier comme étant un maillon d’une équipe pluridisciplinaire
permettant d’assurer une prise en soins efficiente de la personne soignée.
L’infirmière (entretien 2) perçoit aussi à travers son métier, un droit de réflexivité,
un rôle de formateur auprès des étudiants infirmiers, mais aussi la notion de
l’expérience dans sa conception de son métier.
Par rapport à ma phase conceptuelle, ces perceptions citées ci-dessus
confortent bien le fait que selon le lieu où l’on exerce, les représentations du
métier d’infirmier peuvent diverger. Le soignant en court séjour est certes axé sur
le relationnel, mais la technicité émanant du rôle prescrit prend une part tout aussi
importante dans la conception de leur métier. Cette dernière peut prendre le
devant car, elle est aussi une valeur d’identification et de reconnaissance, du
travail effectué au sein du service. Selon nos représentations, nos valeurs, le
soignant peut se sentir personnellement plus à l’aise dans un domaine, soit du
coté du rôle propre, soit à travers le rôle prescrit, ou bien les deux à la fois. Ces
valeurs, cultures inculquées tout au long de la carrière d’un soignant, amènent les
infirmiers à choisir leurs lieux d’exercices d’où parfois l’émergence d’un sentiment
d’appartenance à un domaine, à un secteur de santé. J’en conclu, que les
infirmiers en court séjour peuvent se retrouver déstabilisés lorsqu’ils prennent en
soins une personne, présentant en parallèle d’un problème somatique une
décompensation psychique, car pour eux, cette dernière diffère des pratiques du
quotidien du service. De ce fait, certains ne se sentent pas compétents et ou
43
Annexe F,Tableau de l’écuyer p 64.
- 31 -
reconnus professionnellement à travers la prise en charge de la personne
soignée.
Représentation du court séjour :
L’ensemble des infirmiers identifie, lors des entretiens, le court séjour comme
une hospitalisation limitée dans le temps. Les infirmiers (entretien 2 et 3) évoquent
à travers le court séjour, une prise en charge aiguë d’un problème en un temps
donné. En analysant l’entretien de l’infirmier en santé mentale (entretien 3) celui-ci
évoque la tarification à l’acte comme un frein, car celle-ci a pour but de « ressortir
la personne le plus rapidement possible44». Pour lui, la qualité relationnelle
émanant dans ce type de service n’est pas optimale du fait que celui-ci « n’est pas
tracé comme acte de soin, mais aussi par manque de temps, de personnel ou
alors faute de volonté de l’équipe45 ».
Les facteurs émis par ces différents professionnels convergent vers mon
travail de recherches effectué en amont. La tarification à l’acte peut contribuer à
diminuer la qualité de soins. Cela laisse suggérer que la rapidité du temps
d’hospitalisation ne permet pas aux équipes de soins de s’articuler correctement
autour de plusieurs problèmes d’une façon optimale. Mais seulement de façon
efficiente autour du problème prioritaire qui a fait admettre le patient, et qui résulte
en général plutôt de l’ordre du somatique. Par conséquence, ce dernier n’est pas
pris en compte dans sa globalité. Mais lorsqu’une personne soignée dispose en
parallèle, d’une pathologie mentale, la part du relationnel tient une place
primordiale dans sa prise en soin afin qu’elle se sente en sécurité. Mais cette
dimension du soin n’est pas reconnue financièrement dans ce type de secteur
d’activité. Donc, cela me permet de déduire, par rapport à ma situation, que ce
type de service n’offre pas de conditions optimales pour les personnes atteintes
d’une pathologie mentale, face aux objectifs émis par ce type de service.
Représentation de la santé mentale :
Du coté de la conception de la santé mentale, en interviewant les infirmières
du court séjour, celles-ci ont présenté des difficultés à m’évoquer leur
représentation. Leurs visions s’accordent autour des termes « grosses
44
Annexe E, p 61 : ligne 6. 45
Annexe E, p 61 : ligne 25.
- 32 -
pathologies, difficulté avec la réalité, situations inappropriées46 ». Ces propos
renvoient seulement du côté de la personnalité de type psychoses. De son coté,
l’infirmier travaillant en secteur de santé mentale (entretien 3) explique une vision
plus large et plus ouverte incluant différentes conceptions.
Face à l’ensemble des investigations menées auparavant et les propos
recueillis, la santé mentale émane toujours bien des connotations péjoratives voir
stigmatisantes, même auprès de certains professionnels de la santé. Cela
m’amène à voir également que les infirmiers de courts séjours en soins généraux
ont peu ou peut-être perdu, des connaissances sur la santé mentale, étant donné
qu’ils n’exercent pas dans ce secteur. Par conséquence l’émergence de fausses
représentations est plus favorable, d’autant plus qu’elles sont véhiculées entre
autre par notre société et notre propre culture. De ce fait, lors de l’évaluation de la
douleur d’une personne présentant une décompensation psychique, ils peuvent se
retrouver déstabilisés, voir démunis. Étant donné que leur spécialité émane plus
de l’ordre du somatique.
La douleur chronique :
En synthétisant les propos des infirmiers, on retrouve un point de vue
homogène concernant les perceptions de la douleur chronique. L’ensemble des
soignants la qualifie comme quelque chose qui s’installe dans le temps. L’infirmier
(entretien 3) la qualifie plus comme « une expérience 47», alors que l’infirmière
(entretien 2) la désigne comme un « cercle vicieux48 » avec une prise en charge à
la fois physique et psychologique.
Leurs points de vue viennent soutenir mes investigations, lors de ma phase
conceptuelle au niveau de l’installation dans le temps. Celle-ci se révèle être une
expérience propre à chacun. Face à ma situation, cela appui le fait qu’il est difficile
pour un soignant de la comprendre tant qu’elle est singulière et intime à la
personne souffrante. C’est pourquoi, elle se doit d’être prise en charge par une
équipe pluridisciplinaire afin d’aborder toutes les dimensions.
46
Annexe C, p 49 : ligne 18 ; Annexe D, p 53 : ligne 20. 47
Annexe E, p 61 ligne 27. 48
Annexe D, p 57 ligne 18.
- 33 -
Une prise en soins nécessaire:
Les infirmières, travaillant dans les soins généraux, expriment qu’elles sont
d’abord dans l’investigation pour évaluer si la personne a plus besoin d’une
relation d’aide, ou bien si l’apaisement de la douleur doit passer par un geste
technique (médicament). Leurs conceptions de la prise en soins soulignent aussi
l’importance du travail en pluridisciplinarité afin de déceler si elle se révèle plutôt
de l’ordre du somatique et ou du psychique. Cette difficulté émane également pour
l’infirmier en santé mentale. L’infirmière de l’entretien 2 souligne l’importance de
placer le patient au cœur de sa prise en charge.
Ces visions permettent de mettre en corrélation mon travail effectué
auparavant dans la phase conceptuelle. Cela souligne l’importance du travail en
pluridisciplinarité. Étant donné que le prise en charge de la douleur chronique
reste complexe et que celle-ci est intriquée entre le somatique et le psychique.
Cependant, les différentes investigations, observations, activités réflexives, que
demande cette prise en soins peut se révéler difficile dans un service de court
séjour, car les soignants sont soumis au facteur temps. Cela me permet de mieux
comprendre ma situation, car l’infirmière était soumise à cet impératif. De là, elle a
priorisé ses activités, selon ses représentations du soin. Pour ma part, ayant un
statut d’étudiant, j’ai pu prendre un temps avec la patiente. Qu’en aurait-il été si
j’avais été à la place de l’infirmière du secteur ?
L’évaluation de la douleur :
En ce qui concerne son évaluation, l’infirmier en santé mentale conçoit la
cotation à travers une grille d’évaluation adaptée à la personne. Mais celle-ci se
révèle peu tracée en secteur psychiatrie. L’infirmière (entretien 2), elle aussi,
utilise aussi cet outil mais investit, dans un premier temps, la composante
physique puis psychologique. L’infirmière (entretien 1) mesure la douleur à travers
son ressenti mais aussi les différentes composantes et facteurs qui peuvent
induire celle-ci.
Les infirmiers semblent sensibilisés à l’évaluation et la prise en charge de la
douleur. Les modes d’évaluations divergent, mais on retrouve une volonté des
soignants à ajuster leurs évaluations selon l’outil et les différentes données
recueillies auprès de la personne. Cependant, certains soignants se basent aussi
sur leurs propres ressentis. Cette dimension ne se révèle pas toujours juste, car la
- 34 -
douleur chronique s’immisce dans la vie de chaque individu et est propre à lui
même selon sa culture, ses représentations. De ce fait, l’évaluation peut-être
faussée. Par rapport à ma situation, je m’aperçois que la retranscription des
propos et attitudes de la patiente durant le soin, ainsi que la mise en place d’une
grille d’évaluation adaptée aurait pu être bénéficiaire à Madame L., pour la
continuité de sa prise en soin.
L’émotion du soignant dans la prise en charge de la douleur :
En questionnant l’infirmière (entretien 1) de court séjour on relate un
détachement émotionnel. Or, ce propos diverge, car elle exprime au-dessus,
qu’elle évalue aussi à travers son ressenti, donc son évaluation et la prise en
charge comportent une part émotionnelle. Pour l’infirmière (entretien 2), ayant
travaillé au sein du service douleur, celle-ci évoque un devoir de détachement car
on leur demandait de se protéger et de mettre de coté leurs émotions, lors de
l‘évaluation de la douleur, pour éviter de se faire submerger. Mais, elle évoque
avoir déjà eu des difficultés et une part de jugement lorsqu’elle devait coter la
douleur chez différentes personnes soignées. Cependant, toutes les deux
expriment ressentir la même chose, quelque soit le profil du patient (pathologie
mentale ou non). Cela pousse à m’interroger au regard de leur précédente
question où elles admettaient connaître peu de choses sur la santé mentale. Car,
quand on a peu de connaissances sur un domaine, cela engendre une part
potentielle de difficultés supplémentaires, notamment lors de l’évaluation de la
douleur. Du coté de l’infirmier en santé mentale (entretien 3), on retrouve
également une difficulté, car dans la santé mentale, ils éprouvent eux aussi la
problématique, à savoir si la douleur est générée par un problème somatique et
psychique.
Face à ma phase conceptuelle, cela permet d’appuyer mes recherches en
montrant l’implication des émotions dans la prise en charge des personnes
soignées. Celles-ci sont présentes dans la pratique du quotidien de l’infirmier, et
s’articulent autour des représentations du soignant. Elles sont parfois un frein
lorsqu’elles sont de l’ordre de jugement mais aussi quand elles envahissent trop la
pensée du soignant. Mais, ces entretiens ont également mis en évidence des
éléments que je n’avais pas forcement pris en compte dans les émotions.
Notamment au regard de l’expérience. Cette notion permet de voir qu’elle peut
- 35 -
permettre la juste distance. En effet, plus un infirmier a de l’expérience, plus il est
« amené » à mieux gérer ses émotions, car tout au long de sa carrière celui-ci a
vécu de multiples situations de soins, élargit ses connaissances, et a pu se
construire, et donc mieux se connaître. Cela me permet de déduire aussi que les
émotions des soignants peuvent être un atout. Les patients les ressentent comme
une prise en considération. Ces dernières, permettent de faire émerger des
questionnements, des réflexions autour de la prise en soin de la personne
soignée. Toutefois, lorsque l’infirmier doit évaluer la douleur et que celle-ci intrique
somatique et psychique, cela semble générer des difficultés, une déstabilisation,
pour ce dernier, quelque soit son secteur d’activité.
Ce travail autour des différents entretiens m’a permis également de voir
l’émergence de nouveaux concepts coordonnés autour de la douleur chronique.
Tout d’abord, j’ai relevé le concept de résilience de la personne soignée. En effet,
cet élément semble intéressant à investiguer, étant donné qu’il permet à la
personne soignée « d’avancer » dans sa vie, d’apprendre à vivre malgré cette
souffrance permanente.
Ensuite, j’ai pu relever le concept de l’épuisement professionnel. Cette thématique
joue un rôle, notamment autour de l’évaluation et de la prise en soin de la douleur
car un infirmier souffrant de ce syndrome se voit diminuer de ses capacités
psychiques et physiques et, cela induit une moins bonne qualité dans la prise en
charge de la personne soignée.
D’un point de vue critique, par rapport aux entretiens, je pense qu’ils se sont
révélés plutôt de l’ordre de l’entretien directif que semi-directif. De ce fait, ceci a
peut-être eu un impact sur leur durée. Cependant, ils m’ont apporté des réponses
et donné d’autres directives dans mon travail de recherche. De plus, en
construisant le tableau de l’Ecuyer, je me suis aperçue que je n’avais pas assez
investigué certaines parties. Si cela était à refaire, je ferais différemment et
rajouterais encore deux questions au guide :
*Qu’évoquent pour vous les représentations sociales ? Cela m’aurait permis de
voir la perception du soignant sur ce sujet, d’échanger avec lui pour voir comment
elles s’introduisent, s’inculquent.
- 36 -
*Qu’évoque pour vous le mot douleur ? Cela m’aurait permis d’affiner la
représentation de la douleur pour le soignant et d’établir à la suite, une
différenciation avec la douleur chronique.
Je me suis également sentie gênée lors de la réalisation des entretiens, car je
connaissais les professionnels. Dès lors, je ressentais un droit de regard et cela a
majoré mon stress, tout comme le fait que ceux-ci soient enregistrés. De plus,
l’entretien avec l’infirmière en oncologie s’est déroulé en fin de nuit, les conditions
n’étaient pas optimales étant donné l’heure de l’entretien et que je venais juste de
commencer mes nuits. À la suite de chaque entretien, nous avons échangé durant
trente minutes à une heure sur le sujet. J’ai également senti une plus grande
aisance de leurs parts hors enregistrement. Ce temps, non pris en compte dans
l’enregistrement, s’est révélé riche dans le recueil d’informations pour la poursuite
des recherches.
3- Conclusion :
À ce jour, ces travaux de recherches et d’investigations m’ont permis
d’approfondir ma culture professionnelle mais aussi personnelle. Ce temps de
réflexivité, m’a permis de consolider mes bases notamment autour des valeurs du
soignant, pour m’aider à me construire professionnellement.
Au tout début, je me suis sentie en difficulté, lors de la rédaction de ma
situation tant elle était riche et diversifiée en domaines d’investigations. En effet, la
rencontre et la prise en soin de madame L. par l’équipe de soin et moi-même m’a
soulevé de nombreuses interrogations.
Madame L. était hospitalisée au sein d’un service de médecine oncologique, pour
équilibration de la douleur dans le cadre d’une prise en charge pour son cancer
bronchique avec extension de métastases. En parallèle, elle présentait du coté
psychique une décompensation de l’ordre de troubles histrioniques ainsi qu’une
dépression. Durant son séjour, certains professionnels de santé tenaient des
propos péjoratifs ainsi que des jugements à son égard, et remettaient en doute
parfois sa douleur.
De ce fait au départ, je voulais travailler du côté de la stigmatisation. Cela
m’avait orienté vers une problématique évoquant l’impact de la stigmatisation des
- 37 -
personnes atteintes d’une pathologie mentale, dans les services de court séjour.
Mais la prise de recul, le travail de rédaction autour de la situation, les recherches
et les différents échanges avec ma directrice de mémoire m’ont permis de
souligner une autre problématique regroupant notamment en parallèle cet items
cité ci-dessus :
« En quoi, les représentations des soignants en court séjour dans les soins
généraux peuvent-elles avoir un impact sur l’évaluation de la douleur chronique,
lors de la prise en soins de personnes atteintes d’une pathologie mentale ? »
L’élaboration de la phase conceptuelle m’a permis de mieux appréhender ma
situation, à travers l’investigation de différents concepts, notamment dans le
domaine des représentations. Ces dernières n’émanent pas toutes d’un savoir
scientifique, elles sont aussi construites et véhiculées par l’intermédiaire de notre
société, notre environnement, notre éducation, nos expériences professionnelles.
De ce fait, elles influencent l’homme mais aussi l’infirmier dans sa conception, sa
pratique du soin et dans son identité professionnelle. Par conséquent, un infirmier
en court séjour peut se retrouver en difficulté dans l’évaluation de la douleur
chronique d’un patient atteint d’une pathologie mentale. Car ce dernier peut être
déstabilisé, étant donné qu’il est peu habitué à prendre en charge ce type de
patient. Donc, il peut disposer de moins de connaissances sur les
décompensations d’ordre psychique, sachant que ce type de prise en soins relève
habituellement du secteur de la santé mentale. De plus, ce dernier est soumis à
un afflux de soins dans son secteur d’activité, ce qui induit parfois des choix faute
de temps, mais on retrouve aussi parfois un manque de volonté. Ce qui m’a
poussé a mené une nouvelle réflexion :
« Peut-on pratiquer différemment dans ce genre de service tout en étant
intégrée ? »
Mes différentes recherches, menées du coté de la douleur chronique, m’ont
permis d’établir le lien singulier et intime entre cette affection et la personne
souffrante. Celle-ci s’immisce dans la vie de la personne et peut, par conséquent,
modifier l’interaction sociale. D’où l’importance de travailler en équipe
pluridisciplinaire pour évaluer toutes les dimensions de celle-ci, tout en plaçant la
personne au centre de sa prise en soin. Car l’évaluation et la prise en charge de la
- 38 -
douleur chronique demande du temps, de l’investigation et de l’observation. D’où
l’intérêt de l’évaluer en équipe mais aussi à travers des grilles d’évaluation
adaptées à la personne soignée, pour éviter toute part de subjectivité notamment
de la part de l’infirmier. Car celui-ci peut-être influencé par ses représentations et
ses émotions. En effet, la douleur chronique intrique à la fois le psychique et le
somatique ce qui peut mettre en difficulté n’importe quel profil infirmier lors de
l’évaluation, que ce soit dans le domaine des soins généraux ou de la santé
mentale. Cela m’amène à me demander :
« Comment l’infirmier peut-il dissocier la part du somatique et du psychique, lors
de l’évaluation de la douleur chronique, d’une personne en décompensation
psychique ? »
La phase d’investigation menée par l’intermédiaire de mes entretiens a appuyé
mon travail de recherches, sur le concept des représentations. Cependant, en ce
qui concerne la douleur chronique, ces entretiens m’ont permis de me détacher de
ma vision de départ, notamment du côté de la part émotionnelle dans l’évaluation.
Du fait que je me sois laissée submerger dans ma situation de soin, je restais
dans l’optique que l’émotion était un frein dans l’évaluation de la douleur. Or, elle
peut-être aussi un appui mais, pour cela, il faut de l’expérience pour trouver la
juste distance émotionnelle. Cela me conduit à m’interroger :
« En quoi l’expérience professionnelle a-t-elle un impact dans l’évaluation mais
aussi, la prise en charge de la douleur chronique ? »
Pour conclure, cette expérience s’est révélée riche et intense. Certes, ce travail
renferme un certain nombre d’heures de travail. Mais il m’a permis d’approfondir
mes connaissances tant sur l’impact des représentations que sur la douleur
chronique. Ce mémoire m’a permis d’ajuster une posture réflexive, en tant que
future professionnelle, face à la prise en soins des personnes atteintes d’une
pathologie mentale, hospitalisées en court séjour. À l’avenir, j’espère m’inscrire au
sein d’une équipe pluridisciplinaire pour optimiser et légitimer leur prise en soin.
Car de nos jours, il émane encore une stigmatisation dans le domaine des soins
généraux de la part de certains professionnels. Cette dernière, impacte la prise en
soin notamment celle de la douleur chronique. De ce fait, l’infirmière détient un
rôle clé.
- 39 -
Bibliographie :
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- 41 -
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santé dans le monde, genève OMS, 2001, p1.
- 42 -
Annexes
Annexe A : grille évaluation douleurs neuropathiques DN4 p 43
Annexe B : pré test entretien p 44
Annexe C : entretien numéro 1 : infirmière en oncologie p 48
Annexe D : entretien numéro 2 : infirmière en service douleur p 52
Annexe E : entretien numéro 3 : infirmier en santé mentale p 60
Annexe F : tableau de l’écuyer p 64
- 43 -
Annexe A : grille d’évaluation des douleurs neuropathiques
- 44 -
Annexe B :
Entretien pré test
Nathalie : Bon je te remercie de prendre un temps pour réaliser cet entretien,
dans le cadre de mon mémoire de fin d’études. Euh, il est bien évident que du
coup que hmmm que tu es d’accord pour que celui-ci soit enregistré afin que je
puisse en faire une photocopie.
L’interviewé : (silence) Oui, oui.
Nathalie : ok, donc du coup je t’avais parlé euh, vaguement de ma situation qui
évoque la prise en charge de la douleur chronique en court séjour notamment de
la douleur quand une personne est atteinte notamment d’une pathologie mentale.
(Silence) Est-ce que dans un premier temps, tu pourrais me parler, donc depuis
combien de temps tu es diplômée ?
L’interviewé : Depuis 1980, janvier 80
Nathalie : Donc ça fait trente…
L’interviewé : 36 ans
Nathalie : D’accord est ce que tu peux me parler de ton parcours professionnel de
ton obtention du diplôme à aujourd’hui, s’il te plait ?
L’interviewé : Donc diplômée en janvier 80, j’ai commencé à travailler à Bondy
dans une maison de cure médicale en attendant que la maison de cure médicale
de Cachan s’ouvre. Donc j’ai travaillé 2 ans là-bas et je suis arrivée à
Châteaubriant en 2000 euh en 1982 et j’ai commencé par les invalides, service de
long séjour à l’époque et après j’ai fais la maison de retraite et les valides, donc
c’était plutôt de l’hospice et la maison de retraite. Et après je suis restée aux
valides donc l’hospice euh pendant 11 ans, après quoi il y a eu la création du foyer
occupationnel, donc foyer occupationnel, j’y suis restée euh voilà, j’y suis encore.
Nathalie : D’accord (silence), est ce que du coup tu pourrais me définir en
quelques mots ce que signifie pour toi ta représentation d’infirmier, ta conception
du métier d’infirmier ?
- 45 -
L’interviewé : Le métier d’infirmier, c’est prendre soin d’eux, éduquer les autres à
la santé, en gros, (silence), prendre soin des gens et les éduquer.
Nathalie : Hmm d’accord, est ce que tu peux me parler de ta conception du court
séjour, s’il te plaît ?
L’interviewé : Le court séjour l’hospitalisation qui pour moi est rapide, où les gens
restent pas longtemps. (Silence) Et euh, au niveau des personnes ben on trouve
qu’on les connaît moins que quand on reste longtemps dans un service euh,
comme la gériatrie, comme euh (silence) comme les valides où je suis restée ou
comme au foyer ou je suis encore quoi. On connaît plus les gens à fond.
Nathalie : Hmm d’accord, donc euh, est ce que tu pourrais me parler de ta
conception de la douleur, enfin de la représentation euh, de la douleur chronique ?
L’interviewé : La douleur chronique, donc moi j’ai plus vu ça en psy (bug) parce
que j’ai plus travaillé avec des personnes atteintes de maladies psy euh, douleur
chronique c’est, euh une douleur qui reste tout le temps et les gens sont
malheureux donc euh, parce qu’ils souffrent euh, quelques fois ils peuvent être
agressif envers les autres euh, (silence) parce qu’ils souffrent.
Nathalie : (Silence) Hmm d’accord. Est-ce que tu pourrais me parler maintenant
de ta conception de la santé mentale ? S’il te plait.
L’interviewé : Alors c’est des personnes qui ont des problèmes psychiatriques ou
psychologiques voir quelques fois les deux. Euh (silence), la prise en charge, euh,
on est plus dans le relationnel, d’où l’importance d’un travaille en équipe, euh
d’une équipe pluridisciplinaire, pour évaluer un peu plus (silence), la maladie
psychiatrique.
(Fou rire)
Nathalie : Pardon. Je suis désolée, comment conçois-tu ma prise en charge de la
douleur, s’il te plaît, en termes de moyen par importance à vos yeux, à tes yeux ?
L’interviewé : Bon alors la douleur, la douleur d’abord, la prise en charge, je suis
d’abord dans l’écoute, après l’interrogation, pour connaître, euh comment s’est
venu, la localisation, l’intensité de la douleur et puis à partir de ce moment la ben,
on peut aller voir le médecin et lui demander un traitement adapté à sa douleur.
- 46 -
Nathalie : Humm d’accord, donc si je reprends bien ce que tu m’a dis, tu es
d’abord dans le relationnel
L’interviewé : le relationnel ouais.
Nathalie : et ensuite tu es plutôt dans un ordre technique du coup
L’interviewé : ouais
Nathalie : la mise en place d’un traitement. (Silence) d’accord. Alors ensuite je
voudrais savoir s’il te plait euh, qu’est ce que tu ressens quand tu évalue la
douleur d’une personne ?
L’interviewé : De la compassion, de l’empathie, voilà (silence).
Nathalie : D’accord et que ressens-tu quand celle-ci est associée à une
pathologie mentale ? Lorsque tu dois évaluer la douleur d’une personne mais que
tu sais qu’il y a une pathologie mentale qui est sous jacente. Comment, est ce que
tu as des émotions, quelque chose qui en ressort ?
L’interviewé : Bah j’essaye d’abord de comprendre, d’où vient sa douleur, de
savoir un peu ce qui s’est passé précédemment pour savoir pourquoi elle me dit
qu’elle a mal, voir s’il y a pas eu de querelle avec les autres, si elle a pas eu de
mauvaise nouvelle de sa famille, bon ça s’est plus en psy. Euh hmmm voilà.
J’essaye de savoir un peu pourquoi avant et puis après j’évalue la douleur en
écoutant comme je l’ai dit tout à l’heure, l’interrogation…
Nathalie : d’accord, mais d’un point de vue du coup émotionnel, euh, tu es plutôt
dans ce que je comprends, tu me reprends si ce n’est pas ça, ça serait plutôt d’un
point de vue interrogatif du coup. (Silence).
L’interviewé : Oui
Nathalie : Ouais
L’interviewé : Ben rechercher pourquoi.
Nathalie : d’accord. (Silence). D’accord ok. Euh.
L’interviewé : Puis après il y a l’équipe, qui s’interroge beaucoup sur euh, sur
euh, la douleur. Hein, ils veulent savoir un peu plus, donc on essaye de chercher
- 47 -
ensemble, et puis, et puis l’équipe comprend pas toujours, donc euh, on essaye
de trouver le juste milieu et savoir si la personne est vraiment en douleur ou, voilà
si elle veut cacher autre chose qui est plus une douleur mentale.
Nathalie : Hmm d’accord donc l’équipe où tu travailles à quand même par
moment si j’ai bien compris des difficultés, c’est ça ?
L’interviewé : Oui. Et un travail en équipe, on arrive à trouver avec le médecin.
Nathalie : D’accord, donc l’importance du travail en équipe, en collaboration. Est-
ce que tu vois d’autres choses à rajouter ?
L’interviewé : Non.
Nathalie : Non ? Donc je te remercie d’avoir participé du coup pour mon
questionnaire.
- 48 -
Annexe C :
Entretien n°1 : infirmière en oncologie
Nathalie : Alors je te remercie du coup pour participer à cet entretien. Donc bien
sûr cet entretien sera anonymat et je garde une copie juste pour la retranscription
et si besoin. Voilà.
L’interviewé : Mmh mmh (acquiescement).
Nathalie : Donc je t’avais parlé un peu de ma situation… euh vaguement de la
situation qui parlait de l’évaluation de la prise en soin de la douleur chronique des
personnes atteintes notamment de pathologie mentale dans les services de court
séjour.
L’interviewé : Mmh mmh (acquiescement).
Nathalie : Donc voilà, dans un premier temps je voudrais savoir est ce que tu peux
me parler de ton parcours professionnel de ton obtention du diplôme à aujourd’hui
s’il te plaît.
L’interviewé : Oui euh donc, euh j’ai fait je suis allée à l’hôpital non j’ai d’abord
travaillé en maison de retraite euh de long séjour pendant un an après j’ai eu une
période personnelle très compliquée pendant 6 mois, donc après je suis repartie
sur l’hôpital pendant … sur l’hôpital de Saint-Brieuc quelques mois, l’hôpital de
Guingamp quelques mois aussi en pneumologie puis en chirurgie, chir. ortho., j’ai
fait de la chir. orthopnique, un peu de chir. générale ensuite je suis partie en
hôpital local mais en service de soins palliatifs à Bain-de-Bretagne pendant un an
et ensuite je suis revenue en Côtes d’Armor, et je suis venue à la clinique
radiologique et j’ai eu le choix de la clinique radiologique et la chirurgie à Jeanne
d’Arc et comme j’ai fait mon mémoire sur les soins palliatifs, j’ai pris la clinique
radiologique et depuis j’y suis, quoi depuis 99.
Nathalie : D’accord ok, alors maintenant du coup le service d’oncologie.
L’interviewé : Là maintenant je suis à l’hôpital privé des Côtes d’Armor, en
service onco., en service oncologie.
- 49 -
Nathalie : D’accord, je te remercie. Est-ce que tu peux me définir en quelques
mots pour toi, ta représentation du soignant ?
L’interviewé : Oula, Je suis plus dans la, le mot qui me vient à l’esprit c’est être
aidant, humm voilà c’est, … c’est moi je suis plus axée sur le relationnel, sur le,
avec un support technique mais, j’ai besoin de la technique, mais voilà c’est
vraiment être aidant quoi mais plus sur le niveau relationnel euh… je ne sais pas
si c’est ce que tu attends de…
Nathalie : C’est très bien, votre conception, fin ta conception pardon du court
séjour ?
L’interviewé : Court séjour c’est ça c’est des hospitalisations qui se limitent à 7
jours maximum, une semaine j’vois un peu plus, on ne connait pas beaucoup ça
ici à part les chimio à la semaine mais 7 jours ouais.
Nathalie : Ta conception de la douleur chronique ?
L’interviewé : Ben une douleur qui dure depuis plusieurs mois, plus de 3 mois,
donc voilà, les gens qui souffrent depuis plus de 3 mois euh.
Nathalie : D’accord et ta conception de la santé mentale ?
L’interviewé : Ah là, c’est plus compliqué parce que j’ai un peu de mal, ben parce
que je vois plus les grosses pathologies psychiatriques, j’vois pas la santé
mentale, j’vois les grosses pathologies psychiatriques, donc les psychoses, les
anorexies, ben fin voilà quoi, l’alcoolisme…
Nathalie : D’accord, donc ensuite je vais te demander comment tu conçois la prise
en charge de la douleur ?
L’interviewé : Alors c’est une prise en charge globale. Voilà j’établie les douleurs
(rires) qui prend en compte toutes les douleurs c’est-à-dire ben euh, que ce soit
la composante émotionnelle, que ce soit la composante, les douleurs
provoquées, fin les fin les douleurs liées à la maladie, toutes les douleurs quoi,
pas que la douleur, pas que la douleur physique je veux dire, tout ce qui peut être
lié au soin, ce qui est de la douleur liée à la maladie, la douleur provoquée par le
mal être lié à la maladie, fin bref…
Nathalie : Un ensemble
- 50 -
L’interviewé : Voilà.
Nathalie : D’accord. Et en termes de moyens pour la prise en charge par
importance, en termes de moyens par d’ordres d’importance à tes yeux ?
L’interviewé : ben tout dépend de l’origine de la douleur quoi. Si, si on voit que
c’est une douleur psychologique, comme la dame-là qu’on a, je vais plus axer sur
la parole, si je vois que c’est plus une douleur physique, je vais pouvoir proposer
un antalgique, fin tout dépend de, de ce que moi je ressens si c’est plus une
angoisse. Je ne vais pas proposer la même chose, ben là j’ai proposé de
l’hypnose à la dame parce qu’on avait tout fait au niveau physique de ce qui
pouvait être fait donc euh.
Nathalie : D’accord, que ressens-tu quand tu évalue la douleur chronique d’une
personne ?
L’interviewé : (pas de réponse immédiate)
Nathalie : Quand tu évalue la douleur…
L’interviewé : Ouais …
Nathalie : …est-ce que tu as des émotions, des sentiments parfois qui…
L’interviewé : Je ne sais pas ce que tu entends par là, euh…
Nathalie : Est-ce qu’il y a des émotions qui se mettent en place ou euh…
L’interviewé : pour moi ?
Nathalie : oui
L’interviewé : J’arrive à m’en détacher je pense
Nathalie : D’accord
L’interviewé : Puis j’ai l’impression que. … fin… je suis plus dans le on peut faire
quelque chose donc je ne sais pas si ça répond mais, je me dis elle a ça alors
qu’est-ce qu’on fait, je suis plus dans l’action, on peut faire quelque chose fin je …
voilà.
Nathalie : D’accord, et que ressens tu justement quand, quand la personne est
souffrante et qu’il y a une pathologie mentale aussi ?
- 51 -
L’interviewé : Alors sss je ne sais pas trop faire la part des choses j’ai pas …
Nathalie : ya pas de problème.
L’interviewé : ça me pose problème qu’il y ait une pathologie mentale si je la
mets en doute ou quelque chose comme ça ? Non ?
Nathalie : Je te demande juste ce que tu ressens
L’interviewé : Qu’il y ait un problème de santé mentale ou pas je ne vois pas le,
pour moi je ne vais pas prendre en charge différemment. Quelqu’un même s’il est
psychotique, pour moi il a mal je ne vais pas, pour moi la prise en charge ne va
pas être différente, je ne la vois pas différente. Elle est surement peut-être
différente mais la composante émotionnelle est plus importante mais je ne la vois
pas différente de d’un patient lambda quoi.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Chaque patient je le prends comme il se présente à moi. Je ne vais
pas le traiter différemment, fin euh
Nathalie : Je vois ce que tu veux dire. Du coup je veux juste te repréciser que, ça
fait combien de temps que euh pendant combien de temps tu as travaillé de jour
et combien de temps tu travailles de nuit ?
L’interviewé : Ici à la clinique 14 ans de jours et ça fait 3 ans que je suis de nuit,
3ans et demi.
Nathalie : D’accord ben je te remercie du coup d’avoir pris un temps pour
l’entretien. Je te remercie.
- 52 -
Annexe D :
Entretien n°2 : infirmière service de la douleur
Nathalie : Bonjour merci d’avoir pris un temps pour répondre à mes questions. Vu
l’entretien pour mon mémoire de fin d’études. Je réalise l’entretien, l’entretien est
enregistré pour faire ensuite une copie écrite. Vous êtes bien d’accord ?
L’interviewé : Oui
Nathalie : Donc alors je vous ai enfin je t’ai parlé excuse-moi vaguement de mon
sujet sur la prise en charge de la douleur, dont l’évaluation d’une personne atteinte
d’une pathologie mentale dans un secteur de court séjour.
L’interviewé : Hmm hmm (acquiescement)
Nathalie : Donc est ce que tu peux me parler de ton parcours professionnel, de
ton obtention du diplôme à aujourd’hui ? S’il te plaît
L’interviewé : d’accord donc euh depuis mon diplôme j’ai fait un petit peu
d’intérim et après j’ai été à … dans une clinique privée à Nantes euh j’ai d’abord
été dans tous les services, que ce soit chirurgie, euh unité de soins continus, un
peu de maternité et après j’ai été plus en service médecine douleur euh de jour
comme de nuit pendant 3 ans. Voilà.
Nathalie : D’accord, donc je te remercie, donc ensuite est ce que tu peux me
définir en quelques mots ce que signifie pour toi ta représentation du soignant, de
l’infirmier ?
L’interviewé : Euh ouais euh on va dire une personne à l’écoute, qui ouais qui qui
a un role propre ,travaille essentiellement sur rôle prescrit, et puis après, ouais je
vais dire, euh la representation du soignant euh que te dire c’est large (rire)
Nathalie : C’est ta conception voilà après si tu as autre chose d’autre à dire
autrement on passe à une autre question y’a aucun problème.
L’interviewé : Non, non, non, fin conception c’est plutôt le travail en équipe qui
pour moi est très importante, euh du dialogue avec l’équipe pour une meilleure
prise en charge après avec le patient, vraiment, euh ouais le travail en équipe
pour moi c’est très, euh une priorité importante, euh conception du soignant, ouais
- 53 -
quelqu’un qui doit toujours se remettre en question, euh qui doit avoir quand
même beaucoup de réflexion, des acquis appris à l’école, et après par
l’expérience qui sont aussi très importante, euh, et puis ce rôle de formation avec
les étudiants, fin voilà quoi. C’est toujours le patient qui doit être au cœur de la
prise en charge. Ne jamais oublier tout ça malgré tout ce qui y avoir à côté quoi.
Nathalie : D’accord, donc qu’est-ce que tu entends par à côté ?
L’interviewé : Euh alors moi ayant travaillé beaucoup en clinique par rapport aux,
aux … je ne sais pas moi la vision de la santé qui se détériore un peu enfin
souvent avec les manques d’effectifs, être souvent rappelé sur les jours de congés
dès fois qui peut-être pas facile, après le travail de nuit enfin la fatigue euh fin voilà
quoi, dès fois ou le médecin n’est pas toujours présent par rapport à des
prescriptions qui sont pas là. Fin des fois on pourrait vite se disperser. Il ne faut
pas oublier que derrière tout ça y’a le patient voilà quoi en gros.
Nathalie : D’accord je te remercie. Donc on va passer du coup, je vais te
demander pour toi la conception du court séjour ? Ta représentation du service de
court séjour ?
L’interviewé : Court séjour. Alors pour moi, euh quoi qui est inférieur à 3
semaines, on va partir sur un processus on va dire euh aigu, en gros on va régler
un problème euh en un temps donné, et puis euh voilà quoi.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Court séjour pour moi c’est plutôt prise en charge de quelque
chose qui est aigu, qui va, qui ne va pas durer dans le temps en tout cas.
Nathalie : Hmm d’accord très bien je te remercie.
L’interviewé : Voilà
Nathalie : Ensuite je voudrais savoir pour toi donc euh ta représentation de la
douleur chronique ?
L’interviewé : Alors euh douleur chronique, du coup c’est une douleur pour moi
qui euh qui euh qu’elle soit physique ou psychologique
(problème de connexion)
- 54 -
Nathalie : Hmm hmm
L’interviewé : Et qui dure depuis euh depuis un certain temps euh euh fin ouais
en même temps je te dis, je ne différencierais pas les deux que ce soit douleur
chronique ou psychologique, je les mettrais, je les mettrais sur le même point
puisque souvent ça va de pair.
Nathalie : D’accord
L’interviewé : Euh de ce que j’en ai vu, euh et puis avec une prise en charge qui
euh qui doit être aussi euh médicale et psychologique.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Voilà quoi.
Nathalie : Ok. Alors à présent je voulais savoir donc ta conception, donc ta
représentation de la santé mentale s’il te plait ?
L’interviewé : Euh ouais, alors ça euh…
Nathalie : Prend ton temps
L’interviewé : Ouais, ouais, ouais, euh, ça j’en ai très peu vu, euh santé mentale
euh, ouais un, euh problème psychologique au sens large euh ou ouais alors ça…
ça m’inspire pas trop comme question.euh….
Nathalie : On peut revenir plus tard si tu veux. Y’a pas de problème hein.
L’interviewé : Ouais, ouais, ouais ou, ouais quelqu’un qui a du mal à être avec la
réalité ou euh ou qui ne se sent pas, ouais des situations pas appropriées, ça
serait un peu ça la santé mentale.
Nathalie : D’accord
L’interviewé : Quelqu’un qui ressens un mal être, un mal être euh, un temps
donné ou voilà.
Nathalie : D’accord.
Nathalie : Alors maintenant je voudrais savoir en fait, hmmm quand tu euh quand
tu as quelqu’un qui est douloureux qui est en face de toi comment tu conçois la
- 55 -
prise en charge de la douleur en terme de moyens, par importance selon toi. Est-
ce que…
L’interviewé : Euh alors du coup, moi, si quelqu’un moi par exemple une
évaluation de la douleur type EVA de 0 à 10 quelque chose comme ça euh fin
pour moi je la prends entièrement en compte dans une prise en charge et à
chaque fois que, si, si on n’a pas trouvé de problème aigu physique, je me dis qu’il
y a quand même une prise en charge de la douleur qui peut être, enfin on peut
appeler ça une douleur psychologique, et du coup, moi je prends en compte ce
principe-là, et dans le s… fin moi où j’avais travaillé par exemple on me disait euh
quelqu’un qui évalue sa douleur euh, par exemple moi je l’ai jamais utilisé mais,
les faux médicaments, les placébos, euh que euh…
Nathalie : Hmm hmm
L’interviewé : Euh que euh, c’était à prendre en compte que ce soit physique ou
psychologique, euh et du coup, c’est une part, euh une part importante dans une
prise en charge, après euh ouais… pour moi c’est très important en tout cas.
Nathalie : Donc d’accord, la part de l’investigation côté psychique est donc et
donc peut être relationnelle, c’est ça que tu veux dire ?
L’interviewé : Euh ouais, ouais, ouais, ouais, ouais … euhhhh ouais, enfin que en
tout cas si, si il décrit un mal être, euh enfin le patient par la douleur, et que nous
en tant que soignant on voit que c’est pas vraiment un problème de douleur
physique à proprement parlé, il décrit vraiment quelque chose et, et euh ce
quelque chose il faut aller, et il faut aller chercher ce que c’est parce que, en tout
cas il décrit quelque chose qui ne va pas et euh, et c’est à nous soignant d’aller,
d’aller chercher en fait.
Nathalie : Ok d’accord, ok. Très bien.
L’interviewé : Si il y a un mal être, toujours le prendre en compte quoi !
Nathalie : D’accord je comprends. Donc euh, à présent est ce que tu peux me
dire, qu’est-ce que tu ressens quand tu, euh qu’est-ce que tu ressens quand tu
dois évaluer la douleur d’une personne en fait ? Est-ce que y’a des émotions que,
est ce qu’il y a des émotions, et qu’elles sont ce type d’émotions qui émergent
chez toi ?
- 56 -
L’interviewé : Euh, alors euh, … mes émotions euh…
Nathalie : Est-ce que tu en a ou…ou voilà si, si, …si tu veux qu’on passe à une
autre question après.
L’interviewé : Ouais, ouais, alors moi j’ai beaucoup travaillé avec les chronique
alors après, justement on nous demandait enfin, on nous demandait, je pense
que faut que dans ces services-là, faut justement se protéger et mettre ses
émotions de côté, mais en tout cas de les, fin d’en tirer une force et du coup les
émotions ça pouvait être des fois aussi un peu des situations qui nous touchent,
enfin des douleurs chroniques de fin de vies et tout c’est pas facile mais, mais fin
après voilà quoi, le soignant il aura toujours des émotions, euh comment dire, faut
éviter de pas se faire submerger par ses émotions, mais oui ça peut arriver que on
ait des émotions, mais bon après le travail en équipe fait que on peut les
surmonter aussi, voilà ben après il y a beaucoup d’émotions, plutôt par rapport à,
euh fin par rapport à la douleur chronique, ou, ou, moi dans mon cas c’était des
fois un peu de la… , fin c’était difficile dans un même service, c’était difficile de
passer des douloureux chronique type fibromyalgie qui décrivaient une douleur à 9
tout le temps quoi que l’on fasse et puis les douloureux chronique type fin de vie
ou voilà là, on sentait une euh, fin c’est un jugement mais une vrai douleur on va
dire entre guillemet, et c’est difficile en tant que soignant de passer d’une situation
à l’autre.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Des fois c’est un peu du, fin un peu de l’épuisement, ce n’est pas
facile de prendre du recul toujours quoi. Fin je ne sais pas si je réponds bien à ta
question ?
Nathalie : Non, non, mais ne t’inquiète pas, y’a pas de problème pour moi, tu
réponds en partie à la question, ce n’est pas un problème. Et du coup je voudrais
savoir quand tu, donc on venait pour que ressens tu quand tu évalue la douleur
d’une personne, et quand tu dois évaluer la douleur mais que celle-ci tu sais que
la personne a une pathologie mentale, que ressens-tu en fait ?
interviewé : Euh
Nathalie : Je ne sais pas si j’ai été clair dans ma question ?
- 57 -
L’interviewé: Euh si je vous ouais, ouais. Euh qu’est-ce que je ressens, je pense
que je ressens la même chose hein.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Euh, euh, ouais, après, nan franchement je ressens la même
chose.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Ouais après pour moi, voilà la douleur doit pas, chez une personne
atteinte d’une pathologie mentale ou pas, la douleur, fin je vis les choses de la
même manière je pense.
Nathalie : D’accord, très bien.
L’interviewé : Hmm.
Nathalie : D’accord, bon ben je te remercie pour le temps accordé, du coup pour
cet entretien. Juste avant de terminer je reviens juste sur, j’avais oublié excuse-
moi, sur ta conception de la santé mentale, est-ce que tu veux revenir sur ce
sujet ?
L’interviewé : Euh oui, du coup je voulais te dire que dans le service où j’ai
travaillé de douleurs chroniques, euh, les médecins et l’équipe faisait un parti pris
de considérer que la douleur chronique comme un cercle vicieux et du coup ils
disaient que fallait casser un maillon de cette chaîne enfin quand le patient était
pris dedans. Du coup nous en service de médecine, bien souvent les médecins
évaluaient la situation et soit y’avait une souffrance et du coup soit, des fois ils se
posaient la question si cela ne relevait pas de la psychiatrie ou de la médecine
douleur. Et du coup nous ils arrivaient dans le service et bien souvent via une
prise en charge pluridisciplinaire on essayait d’aller casser un maillon de cette
chaîne on va dire et du coup soit ils étaient à médicaments quand même à forte
doses type cure de kétamines pendant une semaine, il est entre guillemet un peu
shooté, euh et puis des fois ils essayaient des prises en charges moins
médicamenteuse et plus prise en charge type pluridisciplinaire où ils mettaient en
place de la kiné, plus la thérapie, fin et du coup y’a parfois des patients, on se
rendait compte que même si on avait coupé la douleur en les shootant, ça ne
marchait toujours pas il y avait toujours un mal être, donc du coup après on
- 58 -
essayait plus d’aller du côté psychologique, de travailler ben a essayé travailler
avec la psy avec les, les autres intervenants, le coach mais euh souvent ce qui en
ressortait quand même c’était que enfin en tant qu’infirmière ce que j’ai ressenti
c’est que c’est comme si ils étaient addict à la douleur. Moi je l’ai ressent comme
si la douleur était présente dans leur vie, fin que ce soit un problème plutôt d’ordre
psychologique et donc sentimental, ou que ce soit plutôt d’ordre physique et plutôt
médecine en tout cas c’était très, très présent dans leur vie et, et que, et que du
coup c’était difficile à prendre en charge, on était sur, sur euh deux tableaux et
euh etttt c’est pour ça que souvent ils reviennent ces patients-là, enfin nous on les
revoit souvent, ils ont besoin d’une, on va dire d’une cure, euh ils le dise eu même
qu’ils sont en cure euh et puis après voilà ils pouvaient repartir travailler et tout
mais en tout cas à chaque fois on essayait d’aller casser un maillon et de voir ce
que ça pouvait donner et puis voilà quoi.
Nathalie : Excuse-moi, tu me parlais de coach euh est-ce que tu peux m’en dire
un peu plus sur le coach ? C’est quoi du coup ?
L’interviewé : Du coup c’est une personne qui venait de l’extérieur, euh et qui
avait été à avoir une formation, euh enfin qui avaient une formation, enfin ils
appelaient ça coach, en gros c’était, euh, il aidait les gens à vivre avec cette
douleur, en gros.
Nathalie : D’accord.
L’interviewé : Et puis il les coachait comme par exemple là ce matin vous vous
levez, vous avez mal euh, comment vous allez pouvoir faire autrement, à donner
des petites solutions, d’aller positiver les choses
Nathalie : Un peu les capacités de résiliences à rechercher ses facteurs de
résiliences pour avancer si j’ai bien compris ?
L’interviewé : Oui voilà, en gros c’était ça, ouais, à donner des petites solutions
qui étaient possibles pour le patient, enfin vraiment dans la mesure du possible
pour eux, donc euh…
Nathalie : D’accord
L’interviewé : Et puis aussi de leur faire aussi comprendre au patient que la
douleur tenait aussi une place importante, et euh, et comme je disais tout à l’heure
- 59 -
pour comme ils étaient addict à leur douleur, comme les personnes qui ont une
addiction à l’alcool, ils perdent tous avec cette addiction, la douleur c’était
exactement pareil. Ils vont perdre leur travail car ils ne peuvent plus travailler, ils
vont perdre le courant de leurs vie sociales et familiales a cause de la douleur.
Voilà…
Nathalie : d’accord, as-tu autres choses à dire ?
L’interviewé : non
Nathalie : merci de m’avoir accordé un temps.
- 60 -
Annexe E :
Entretien n°3 : infirmier en santé mentale
Nathalie : Alors, euh, merci d’avoir pris un temps du coup pour la réalisation des
mes entretiens dans le cadre de mon mémoire de fin d’étude. Donc j’en ai, je t’ai
parlé vaguement de ma situation qui évoque la prise en charge des personnes
euh atteinte de douleurs chronique notamment quand ils ont une pathologie
mentale. Donc euh, dans un premier temps, est ce que tu peux me dire ça fait,
depuis combien de temps tu es diplômé s’il te plait ?
L’interviewé : Euh, je suis diplômé de puis juin 2013, c’est à dire que ça fait un
peu plus de 2 ans et demi.
Nathalie : Hmm, d’accord, est ce que tu peux me parler de ton parcours
professionnel de ton obtention du diplôme à aujourd’hui ? S’il te plait.
L’interviewé : Euh ben pff. Suite à l’obtention du diplôme je suis rentré
directement en service de psychiatrie, (silence) qui était mon (silence) projet
professionnel.
Nathalie : Hmm d’accord, et dans le secteur psychiatrique, tu es plutôt dans quel
type de service ?
L’interviewé : Je suis en service d’admission.
Nathalie : D’accord. (Silence) Alors ensuite peux-tu me définir en quelques mots,
ce que signifie pour toi, ta représentation, ta conception euh d’infirmier ?
L’interviewé : Euh la conception d’infirmier euh, (silence) ça serait d’être dans le
euhh prendre soin, euh (silence), moi j’attache une importance capitale à la qualité
relationnelle, voilà c’est pourquoi je suis arrivé en psychiatrie. C’est prendre en
charge en fait, les patients dans leur globalité. (Silence) Voilà euh (silence), être
capable de (silence) définir les objectifs de prise en charge, en pluri
professionnalité, et pouvoir intervenir de manière efficiente quoi.
Nathalie : Hmm d’accord, est ce que tu peux maintenant me parler maintenant de
ta vision, ben ta conception, représentation du court séjour s’il te plait en soins
généraux ?
- 61 -
L’interviewé : Ma représentation du court séjour euh, pour avoir fais des stages
en court séjour, bon c’est des services de soins actifs, voilà, donc la prise en
charge est un petit peu différente dans le sens que c’est, c’est des prises en
charges qui sont beaucoup plus courtes. Voilà euh, la prise en charge du fait du
tarif à l’activité, fait que on est plus sur traiter juste le problème et de ressortir la
personne le plus rapidement possible, sans pouvoir euh la prendre dans la
globalité, voilà. Te dire que la qualité relationnelle est souvent, souvent absente du
manque de temps, de personnel, et aussi d’une volonté aussi des équipes aussi
quoi.
Nathalie : Hmm d’accord, tu as été, euh tu as été souvent euh durant tes stages
justement de court séjours tu as été souvent confronté euh à ce genre niveau au
niveau relationnel, au niveau prise en charge, je ne sais pas comment, (silence)
euhmm comment te dire, (silence)
L’interviewé : Est-ce que, est ce qu’il y a des situations qui..
Nathalie : Oui qui t’on paru que des personnes qui auraient voulu, qui auraient eu
potentiellement besoin de plus de temps niveau relationnel et que ça a été écourté
euh…
L’interviewé : Ouais dans la majorité des cas, les patients qui qui sont en court
séjour, ou en psychiatrie, on avant tout besoin d’une écoute, fin d’être à l’écoute
de leur problème, fin, c'est-à-dire que souvent, c’est fin, le fait d’arriver dans un
hôpital, à l’hôpital, c’est un milieu hostile, c'est-à-dire ou l’on est dans un état de
vulnérabilité, ou on a besoin, de généralement de (silence) de ben d’écoute pour
gérer l’angoisse euh que peut générer l’hospitalisation, voilà c’est euh, et l’écoute
souvent est défaillent du fait que, fin la qualité relationnelle, l’écoute, les entretiens
ne sont pas tracés en court séjour (silence).
Nathalie : Hmm d’accord (silence). Alors est ce que tu pourrais me dire ta
représentation pour toi de la douleur chronique ?
L’interviewé : (Silence), la douleur chronique c’est une expérience (silence) enfin
si on reprenait la définition c’est une expérience sensorielle, fin voilà, sensorielle ,
sensorielle qui touche les différents sens en fait, voilà quoi.
Nathalie : D’accord
- 62 -
L’interviewé : de la personne et qui d’installe dans le temps, en fait (silence).
Nathalie : Hmm d’accord.
L’interviewé : qui dure sur une période, je sais pas au moins 6 mois.
Nathalie : Oui
L’interviewé : C’est pas exactement la définition
Nathalie : Est-ce que maintenant pour toi, tu peux m’expliquer, ta conception de la
santé mentale ?
L’interviewé : La conception de la santé mentale, la santé mentale c’est prendre
en charge les patients qui ont des troubles psychiques, (silence) voilà, euh c’est
(silence), c’est (silence) c’est euh, c’est oui, prendre en charge les personnes qui
ont des troubles psychiques, qui sont marqués souvent par des expériences de
vies qui sont difficiles, euh (silence), souvent la société génère de plus en plus de
troubles psychiques, le contexte économique, les facteurs sociaux, les facteurs de
dépendances (silence), voilà. La concession, la conception mentale n’est pas la
représentation qu’on peut en avoir, c'est-à-dire, que ce sont que des fous, on n’a
pas que des schizophrènes, la conception mentale maintenant, on a une évolution
en fait de la psychiatrie, on a beaucoup de problèmes sociaux, voilà, c’est des
gens qui sont souvent désinsérés, fin voilà, qui sont en faute de logement du fait
de faute d’hébergement, et on a pas que des grands fous, des grand
schizophrènes, grands paranoïaques, on a beaucoup des problèmes sociaux.
Nathalie : Hmm d’accord, je te remercie, euh, à présent est ce que tu peux me
dire comment tu conçois la prise en charge de la douleur en termes de moyens et
par ordre d’importance à tes yeux ? (silence) euh, hmm au niveau prise en charge
quand tu es face à quelqu’un qui est douloureux, comment conçois tu en fait cette
prise en charge ? Que fais tu dans un premier temps ?
L’interviewé : Ben d’é d’évaluer en fait la douleur…
Nathalie : Hmm
L’interviewé : Euh (silence), voilà avec une, avec une grille d’évaluation adaptée
à la personne, en, en utilisant les différentes échelles en fait, celle qui est la plus
adaptée, après de, de mettre un traitement adapté, c'est-à-dire si il y a un
- 63 -
traitement prescrit, ou d’appeler le médecin. Et de réévaluer la distance, la douleur
pour réajuster le traitement. (Silence).
Nathalie : D’accord. (Silence), et à présent je voudrais savoir euhm, du coup vu
que tu as travaillé la plupart du temps en secteur psy, de la santé mentale, que
ressens tu quand tu dois évaluer la douleur d’une personne justement qui est
atteint d’une pathologie mentale et qui, euh se dit souffrant ? Est ce que…
L’interviewé : La difficulté en fait, fin d’évaluer la douleur, pour pour une personne
qui est en santé mentale, c’est, ben de (réflexion), de comprendre en fait si la
douleur elle est générée en fait par des troubles psychiques ou, ou l’inverse.
(Silence), c’est pourquoi c’est la grande difficulté, on, on retrouve une grande
difficulté à évaluer la douleur en psychiatrie aussi (silence) parce que l’on a du mal
a… on est aussi nous, nous aussi centrés sur la maladie psychique et du coup un
peu moins sur la maladie somatique.
Nathalie : Hmm d’accord.
L’interviewé : Si la douleur est évaluée, on s’aperçoit que la douleur est très peu
tracée en psychiatrie, (silence) donc voilà.
Nathalie : Hmm d’accord, donc alors au niveau d’un point de vue émotions c’est
plutôt des difficultés qui en ressortent ? Si, j’ai bien compris ce que tu dis ?
L’interviewé : Oui,
Nathalie : ouais, d’accord (silence). Ben très bien je te remercie du coup d’avoir
pris un temps.
- 64 -
Annexe F :
Tableau de l’écuyer :
thème des représentations
Représentation du métier d'infirmier
entretien 1 verbatim
« le mot qui me vient à l’esprit c’est être aidant, humm voilà c’est,
… c’est moi je suis plus axée sur le relationnel, sur le, avec un
support technique mais, j’ai besoin de la technique, mais voilà c’est
vraiment être aidant quoi mais plus sur le niveau relationnel
euh… »
entretien 2 verbatim
« Euh ouais euh on va dire une personne à l’écoute, qui ouais qui
qui a un rôle propre ,travaille essentiellement sur rôle prescrit, et
puis après, ouais je vais dire, euh la représentation du soignant euh
que te dire c’est large »
« conception c’est plutôt le travail en équipe qui pour moi est très
importante, euh du dialogue avec l’équipe pour une meilleure prise
en charge après avec le patient, vraiment, euh ouais le travail en
équipe pour moi c’est très, euh une priorité importante, euh
conception du soignant, ouais quelqu’un qui doit toujours se
remettre en question, euh qui doit avoir quand même beaucoup de
réflexion, des acquis appris à l’école, et après par l’expérience qui
sont aussi très importante, euh, et puis ce rôle de formation avec
les étudiants, fin voilà quoi [...] »
entretien 3 verbatim
« Euh la conception d’infirmier euh, (silence) ça serait d’être dans
le euhh prendre soin, euh (silence), moi j’attache une importance
capitale à la qualité relationnelle, voilà c’est pourquoi je suis arrivé
en psychiatrie. C’est prendre en charge en fait, les patients dans
leur globalité. (Silence) Voilà euh (silence), être capable de
(silence) définir les objectifs de prise en charge, en pluri
professionnalité, et pouvoir intervenir de manière efficiente quoi. »
- 65 -
Représentation du court séjour
entretien 1 verbatim
« Court séjour c’est ça c’est des hospitalisations qui se limitent à 7
jours maximum, une semaine j’vois un peu plus, on ne connait pas
beaucoup ça ici à part les chimio à la semaine mais 7 jours ouais »
entretien 2 verbatim
« Alors pour moi, euh quoi qui est inférieur à 3 semaines, on va
partir sur un processus on va dire euh aigu, en gros on va régler un
problème euh en un temps donné »
« Court séjour pour moi c’est plutôt prise en charge de quelque
chose qui est aigu, qui va, qui ne va pas durer dans le temps en
tout cas. »
entretien 3 verbatim
« Ma représentation du court séjour euh, pour avoir fais des
stages en court séjour, bon c’est des services de soins actifs, voilà,
donc la prise en charge est un peu différente dans le sens que
c’est, c’est des prises en charges qui sont beaucoup plus courtes.
Voilà euh, la prise en charge du fait du tarif à l’activité, fait que on
est plus sur traiter juste le problème et de ressortir la personne le
plus rapidement possible, sans pouvoir la prendre dans la globalité,
voilà. Te dire que la qualité relationnelle est souvent, souvent
absente du manque de temps, de personnel, et aussi d’une volonté
aussi des équipes aussi quoi. »
« [...] ou on a besoin, de généralement de (silence) de ben
d’écoute pour gérer l’angoisse euh que peut générer
l’hospitalisation, voilà c’est euh, et l’écoute souvent est défaillent du
fait que, fin la qualité relationnelle, l’écoute, les entretiens ne sont
pas tracés en court séjour (silence). »
« Ouais dans la majorité des cas, les patients qui qui sont en court
séjour, ou en psychiatrie, on avant tout besoin d’une écoute, fin
d’être à l’écoute de leur problème, fin, c'est-à-dire que souvent,
c’est fin, le fait d’arriver dans un hôpital, à l’hôpital, c’est un milieu
hostile, c'est-à-dire ou l’on est dans un état de vulnérabilité, »
- 66 -
Représentation de la santé mentale
entretien 1 verbatim
« Ah là, c’est plus compliqué parce que j’ai un peu de mal, ben
parce que je vois plus les grosses pathologies psychiatriques, j’vois
pas la santé mentale, j’vois les grosses pathologies psychiatriques,
donc les psychoses, les anorexies, ben fin voilà quoi,
l’alcoolisme… »
entretien 2 verbatim
« […] ça j’en ai très peu vu, euh santé mentale euh, ouais un, euh
problème psychologique au sens large euh ou ouais alors ça… ça
m’inspire pas trop comme question.euh…. »
« ouais quelqu’un qui a du mal à être avec la réalité ou euh ou qui
ne se sent pas, ouais des situations pas appropriées, ça serait un
peu ça la santé mentale »
« Quelqu’un qui ressens un mal être, un mal être euh, un temps
donné ou voilà. »
entretien 3 verbatim
« La conception de la santé mentale, la santé mentale c’est
prendre en charge les patients qui ont des troubles psychiques,
(silence) voilà, euh c’est (silence), c’est (silence) c’est euh, c’est
oui, prendre en charge les personnes qui ont des troubles
psychiques, qui sont marqués souvent par des expériences de vies
qui sont difficiles, euh (silence), souvent la société génère de plus
en plus de troubles psychiques, le contexte économique, les
facteurs sociaux, les facteurs de dépendances (silence), voilà. La
concession, la conception mentale n’est pas la représentation
qu’on peut en avoir, c'est-à-dire, que ce sont que des fous, on n’a
pas que des schizophrènes, la conception mentale maintenant, on
a une évolution en fait de la psychiatrie, on a beaucoup de
problèmes sociaux, voilà, c’est des gens qui sont souvent
désinsérés, fin voilà, qui sont en faute de logement du fait de faute
d’hébergement, et on a pas que des grands fous, des grand
schizophrènes, grands paranoïaques, on a beaucoup des
problèmes sociaux. »
- 67 -
thème de la douleur chronique
Représentation de la douleur chronique
entretien
1 verbatim
« Ben une douleur qui dure depuis plusieurs mois, plus de 3 mois,
donc voilà, les gens qui souffrent depuis plus de 3 mois euh »
entretien
2 verbatim
« Alors euh douleur chronique, du coup c’est une douleur pour moi
qui euh qui euh qu’elle soit physique ou psychologique »
« Et qui dure depuis euh depuis un certain temps euh euh fin ouais
en même temps je te dis, je ne différencierais pas les deux que ce
soit douleur chronique ou psychologique, je les mettrais, je les
mettrais sur le même point puisque souvent ça va de pair. »
« Euh de ce que j’en ai vu, euh et puis avec une prise en charge qui
euh qui doit être aussi euh médicale et psychologique. »
« [...] Moi je l’ai ressent comme si la douleur était présente dans leur
vie, fin que ce soit un problème plutôt d’ordre psychologique et donc
sentimental, ou que ce soit plutôt d’ordre physique et plutôt
médecine en tout cas c’était très, très présent dans leur vie [...] »
« [...] Et puis aussi de leur faire aussi comprendre au patient que la
douleur tenait aussi une place importante, et euh, et comme je disais
tout à l’heure pour comme ils étaient addict à leur douleur, comme
les personnes qui ont une addiction à l’alcool, ils perdent tous avec
cette addiction, la douleur c’était exactement pareil. «
entretien
3 verbatim
« la douleur chronique c’est une expérience (silence) enfin si on
reprenait la définition c’est une expérience sensorielle, fin voilà,
sensorielle , sensorielle qui touche les différents sens en fait, voilà
quoi »
« de la personne et qui d’installe dans le temps, en fait »
« qui dure sur une période, je sais pas au moins 6 mois »
- 68 -
une prise en soins nécessaire
entretien1 verbatim
« ben tout dépend de l’origine de la douleur quoi. Si, si on voit que
c’est une douleur psychologique, comme la dame-là qu’on a, je
vais plus axer sur la parole, si je vois que c’est plus une douleur
physique, je vais pouvoir proposer un antalgique, [...] »
« Je ne vais pas proposer la même chose, ben là j’ai proposé de
l’hypnose à la dame parce qu’on avait tout fait au niveau physique
de ce qui pouvait être fait donc euh »
entretien 2 verbatim
« c’était à prendre en compte que ce soit physique ou
psychologique, euh et du coup, c’est une part, euh une part
importante dans une prise en charge, après euh ouais… pour moi
c’est très important en tout cas. »
« euhhhh ouais, enfin que en tout cas si, si il décrit un mal être,
euh enfin le patient par la douleur, et que nous en tant que
soignant on voit que c’est pas vraiment un problème de douleur
physique à proprement parlé, il décrit vraiment quelque chose et, et
euh ce quelque chose il faut aller, et il faut aller chercher ce que
c’est parce que, en tout cas il décrit quelque chose qui ne va pas et
euh, et c’est à nous soignant d’aller, d’aller chercher en fait. »
« Si il y a un mal être, toujours le prendre en compte quoi »
« [...]coup je voulais te dire que dans le service où j’ai travaillé de
douleurs chroniques, euh, les médecins et l’équipe faisait un parti
pris de considérer que la douleur chronique comme un cercle
vicieux et du coup ils disaient que fallait casser un maillon de cette
chaîne enfin quand le patient était pris dedans. »
« Du coup nous en service de médecine, bien souvent les
médecins évaluaient la situation et soit y’avait une souffrance et du
coup soit, des fois ils se posaient la question si cela ne relevait pas
de la psychiatrie ou de la médecine douleur. Et du coup nous ils
arrivaient dans le service et bien souvent via une prise en charge
pluridisciplinaire on essayait d’aller casser un maillon de cette
chaîne on va dire et du coup soit ils étaient à médicaments quand
même à forte doses type cure de kétamines pendant une semaine,
il est entre guillemet un peu shooté, euh et puis des fois ils
essayaient des prises en charges moins médicamenteuse et plus
prise en charge type pluridisciplinaire où ils mettaient en place de
la kiné, plus la thérapie, fin et du coup y’a parfois des patients, on
- 69 -
se rendait compte que même si on avait coupé la douleur en les
shootant, ça ne marchait toujours pas il y avait toujours un mal
être, donc du coup après on essayait plus d’aller du côté
psychologique, de travailler ben a essayé travailler avec la psy
avec les, les autres intervenants, le coach mais euh souvent ce qui
en ressortait quand même [...] »
« [...]c’est une personne qui venait de l’extérieur, euh et qui avait
été à avoir une formation, euh enfin qui avaient une formation,
enfin ils appelaient ça coach, en gros c’était, euh, il aidait les gens
à vivre avec cette douleur, en gros. »
« [...] il les coachait comme par exemple là ce matin vous vous
levez, vous avez mal euh, comment vous allez pouvoir faire
autrement, à donner des petites solutions, d’aller positiver les
choses. »
« C’est toujours le patient qui doit être au cœur de la prise en
charge. Ne jamais oublier tout ça malgré tout ce qui y avoir à côté
quoi. »
« [...] fin moi où j’avais travaillé par exemple on me disait euh
quelqu’un qui évalue sa douleur euh, par exemple moi je l’ai jamais
utilisé mais, les faux médicaments, les placébos, euh que euh… »
entretien 3 verbatim
« La difficulté en fait, fin d’évaluer la douleur, pour pour une
personne qui est en santé mentale, c’est, ben de (réflexion), de
comprendre en fait si la douleur elle est générée en fait par des
troubles psychiques ou, ou l’inverse. »
- 70 -
évaluation de la douleur
entretien 1 verbatim
« Alors c’est une prise en charge globale. Voilà j’établie les
douleurs [...] qui prend en compte toutes les douleurs c’est-à-dire
ben euh, que ce soit la composante émotionnelle, que ce soit la
composante, les douleurs provoquées, fin les fin les douleurs liées
à la maladie, toutes les douleurs quoi, pas que la douleur, pas que
la douleur physique je veux dire, tout ce qui peut être lié au soin, ce
qui est de la douleur liée à la maladie, la douleur provoquée par le
mal être lié à la maladie, fin bref… »
entretien 2 verbatim
« Euh alors du coup, moi, si quelqu’un moi par exemple une
évaluation de la douleur type EVA de 0 à 10 quelque chose comme
ça euh fin pour moi je la prends entièrement en compte dans une
prise en charge et à chaque fois que, si, si on n’a pas trouvé de
problème aigu physique, je me dis qu’il y a quand même une prise
en charge de la douleur qui peut être, enfin on peut appeler ça une
douleur psychologique, et du coup, moi je prends en compte ce
principe-là, et dans le s…[...] »
entretien 3 verbatim
« d’évaluer en fait la douleur… »
« voilà avec une, avec une grille d’évaluation adaptée à la
personne, en, en utilisant les différentes échelles en fait, celle qui
est la plus adaptée, après de, de mettre un traitement adapté,
c'est-à-dire si il y a un traitement prescrit, ou d’appeler le médecin.
Et de réévaluer la distance, la douleur pour réajuster le
traitement. »
« Si la douleur est évaluée, on s’aperçoit que la douleur est très
peu tracée en psychiatrie, (silence) donc voilà. »
- 71 -
émotion du soignant dans la prise en charge de la douleur
entretien 1 verbatim
« J’arrive à m’en détacher je pense ».
« Puis j’ai l’impression que. … fin… je suis plus dans le on peut
faire quelque chose donc je ne sais pas si ça répond mais, je me
dis elle a ça alors qu’est-ce qu’on fait, je suis plus dans l’action, on
peut faire quelque chose fin je … voilà »
« [...] fin tout dépend de, de ce que moi je ressens si c’est plus une
angoisse ».
entretien 2 verbatim
« alors moi j’ai beaucoup travaillé avec les chronique alors après,
justement on nous demandait enfin, on nous demandait, je pense
que faut que dans ces services-là, faut justement se protéger et
mettre ses émotions de côté, mais en tout cas de les, fin d’en tirer
une force et du coup les émotions ça pouvait être des fois aussi un
peu des situations qui nous touchent, enfin des douleurs
chroniques de fin de vies et tout c’est pas facile mais, mais fin
après voilà quoi, le soignant il aura toujours des émotions, euh
comment dire, faut éviter de pas se faire submerger par ses
émotions, mais oui ça peut arriver que on ait des émotions, mais
bon après le travail en équipe fait que on peut les surmonter aussi,
voilà ben après il y a beaucoup d’émotions, plutôt par rapport à,
euh fin par rapport à la douleur chronique, ou, ou, moi dans mon
cas c’était des fois un peu de la… , fin c’était difficile dans un
même service, c’était difficile de passer des douloureux chronique
type fibromyalgie qui décrivaient une douleur à 9 tout le temps quoi
que l’on fasse et puis les douloureux chronique type fin de vie ou
voilà là, on sentait une euh, fin c’est un jugement mais une vrai
douleur on va dire entre guillemet, et c’est difficile en tant que
soignant de passer d’une situation à l’autre. »
« c’était que enfin en tant qu’infirmière ce que j’ai ressenti c’est que
c’est comme si ils étaient addict à la douleur. [...] »
« [...] et, et que, et que du coup c’était difficile à prendre en
charge,"
entretien 3 verbatim question non posé
- 72 -
émotion du soignant dans la prise en charge de la douleur
lorsque le patient est atteint d'une pathologie mentale
entretien
1 verbatim
« Alors sss je ne sais pas trop faire la part des choses j’ai pas … »
« Qu’il y ait un problème de santé mentale ou pas je ne vois pas le,
pour moi je ne vais pas prendre en charge différemment.
Quelqu’un même s’il est psychotique, pour moi il a mal je ne vais
pas, pour moi la prise en charge ne va pas être différente, je ne la
vois pas différente. Elle est surement peut-être différente mais la
composante émotionnelle est plus importante mais je ne la vois
pas différente de d’un patient lambda quoi. »
« Chaque patient je le prends comme il se présente à moi. Je ne
vais pas le traiter différemment, fin euh »
entretien
2 verbatim
« Je pense que je ressens la même chose hein. »
« Nan franchement je ressens la même chose »
« Ouais après pour moi, voilà la douleur doit pas, chez une
personne atteinte d’une pathologie mentale ou pas, la douleur, fin
je vis les choses de la même manière je pense. »
entretien
3 verbatim
« [...] c’est pourquoi c’est la grande difficulté, on, on retrouve une
grande difficulté à évaluer la douleur en psychiatrie aussi (silence)
parce que l’on a du mal a… on est aussi nous, nous aussi centrés
sur la maladie psychique et du coup un peu moins sur la maladie
somatique. »
- 73 -
émergence d’autres concepts
entretien 2
Verbatim
épuisement
professionnelle
« Euh alors moi ayant travaillé beaucoup en clinique par
rapport aux, aux … je ne sais pas moi la vision de la santé
qui se détériore un peu enfin souvent avec les manques
d’effectifs, être souvent rappelé sur les jours de congés dès
fois qui peut-être pas facile, après le travail de nuit enfin la
fatigue euh fin voilà quoi, dès fois ou le médecin n’est pas
toujours présent par rapport à des prescriptions qui sont pas
là. Fin des fois on pourrait vite se disperser. Il ne faut pas
oublier que derrière tout ça y’a le patient voilà quoi en
gros. »
« Des fois c’est un peu du, fin un peu de l’épuisement, ce
n’est pas facile de prendre du recul toujours quoi. »
entretien 2 verbatim
résilience
« […] en gros c’était ça, ouais, à donner des petites
solutions qui étaient possibles pour le patient, enfin
vraiment dans la mesure du possible"
"Ils vont perdre leur travail car ils ne peuvent plus travailler,
ils vont perdre le courant de leurs vie sociales et familiales a
cause de la douleur. »
- 74 -
Résumé :
Dans le cadre de l’évaluation 5.6.S6 : Analyse de la qualité et traitements des
données scientifiques et professionnelles, de notre formation infirmier. Nous
devons réaliser un mémoire autour d’une problématique de soins qui nous a
interrogés. Celle que j’ai souhaité exposer, questionne autour de l’impact des
représentations des soignants dans les services de court séjour, lors de
l’évaluation de la douleur chronique, auprès de personnes soignées présentant
une pathologie mentale. Ce choix de thématique sur la pratique soignante m’a
permis d’analyser et, de ce fait, comprendre les interactions, les caractéristiques
des représentations. Mais aussi la relation établie entre la douleur chronique et le
patient. À la suite, j’ai décidé de m’entretenir avec différents profils infirmiers
travaillant dans les domaines des soins généraux et de la santé mentale. Cela m’a
permis de voir que les infirmiers de court séjour pouvaient être déstabilisés dans
la prise en soin d’une personne présentant une décompensation psychique, car
ceux-ci ont des savoirs plus axés sur les pathologies somatiques. Il ressort
également de la part de l’ensemble des infirmiers, des difficultés à évaluer la
douleur chronique car le somatique et le psychisme sont étroitement liés. D’où
l’importance de placer la personne soignée au centre de cette prise en charge tout
en articulant autour d’elle un travail en équipe pluridisciplinaire.
Mots clés : représentations – infirmier- court séjour- douleur- santé mentale ********************************************************************************************** Abstract :
The situation described in my end of studies paper took place in an oncology ward during my second year as a student nurse. It evokes the problem of the management of mentally ill patients with chronic pain in a short-stay service Indeed,while taking care of a patient suffering from a mental decompensation I felt helpless regarding his pain. Upon exchanging with the other nurses, I realized that they also had difficulties.To develop my analysis of this topic I wish to discuss concepts such as representations. I want to evaluate the influence and possible impacts of them when nurses need to assess pain. I also want to address the concept of chronic pain. Through this research, my wish is to analyze and thereby understand the characteristics, but also the relation between chronic pain and the patient, the difficulties for nurses to assess this sort of pain, especially in people suffering from a mental pathology.To advance my knowledge of the concepts I would like to establish three semi-structured interviews with nurses who all work in a short stay service, one of which has a university degree in addictology.These interviews will enable me to confront my research to the reality of the job and possibly make new connections.Through this exploration, my questions and the testimonials I hope to better understand this situation. And on the other hand to be a part of professional resources for other health professionals if this kind of situation occurs.
Keyswords: representation - nurse - short stay - pain - mental health
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