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Atlas historique de laRussieD’Ivan III à Vladimir Poutine
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Illustration de couverture : Miniature de Palekh, ITAR-TASS Photo Agency / Alamy Stock PhotoImprimé et broché en France
24 € – ISSN : 1272-0151 ISBN : 978-2-7467-4598-8
–Retrouvez toute notre actualité sur www.autrement.comet rejoignez-nous sur Facebook
« Embrasser toute l’histoire russe permet de dégager des lignes de force et des permanences structurelles,en dévoilant les réalités complexes et contrastées d’un État-continent unique au monde. »
François-Xavier Nérard, maître de conférences à l’Université Paris 1-Panthéon Sorbonne, est spécialiste d’histoire sociale de l’Union soviétique.
Marie-Pierre Rey, professeur d’histoire de la Russie et de l’Union soviétique à l’université Paris 1-Panthéon Sorbonne, est directrice du Centre de recherches en histoire des Slaves et directrice de l’UMR SIRICE.
Cyrille Suss, cartographe indépendant, a réalisé les cartes de cet atlas.
Plus de 90 cartes et infographies inédites présentent l’histoire de la Russie,
mettant l’accent sur les différentes régions d’un territoire immense et sur les
modalités de son contrôle par l’État.
• La Russie impériale, puissance en expansion depuis le XVe siècle, est fragilisée par une modernisation tardive, la guerre, et mise à terre
par la Révolution de février 1917.
• La Russie soviétique se forge dans une immense violence politique et sociale tout en donnant naissance à un monde nouveau, urbain et
industriel.
• La période postsoviétique voit la Russie, après un temps de repli et de fragilité, tenter de renouer avec sa grandeur passée.
D’Ivan III, « grand-prince de Moscou et de toute la Russie » au XVe siècle,
à Vladimir Poutine, président d’un pouvoir central de retour sur la scène
internationale, le territoire de la Russie a ainsi connu de nombreuses évolutions.
Atlas historique de la
RussieD’Ivan III à Vladimir Poutine
François-Xavier Nérard Marie-Pierre Rey
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Atlas historique de la Russie
D’Ivan III à Vladimir Poutine
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Maquette : Agence Twapimoa
ISBN : 978-2746-7-45971© 2017, Éditions Autrement17, rue de Tournon – 75006 Pariswww.autrement.com
Dépôt légal : décembre 2017
Imprimé et relié en novembre 2017 par l’imprimerie Pollina, France
Tous droits réservés. Aucun élément de cet ouvrage ne peut être reproduit, sous quelque forme que ce soit, sans l’autorisation expresse de l’éditeur et du propriétaire, les Éditions Autrement.
François-Xavier Nérard est maître de conférences en histoire contem-poraine à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Normalien, agrégé d’histoire, il est spécialiste d’histoire de l’URSS et consacre ses travaux à l’histoire sociale soviétique : son livre Cinq pour cent de vérité : la dénonciation en URSS (Tallandier 2004) a été traduit en russe et en polonais. Ses recherches portent également sur la mémoire des violences staliniennes (Commémorer les victimes en Europe, Champ Vallon 2011, avec D.El Kenz) et sur celle des guerres (il a codirigé Vaincus : une histoire des défaites en Europe, Nouveau Monde 2016). Il vient de publier Rêve plus vite, camarade avec Iegor Gran (Les échappés 2017).
Normalienne, agrégée d’histoire, licenciée de russe, Marie-Pierre Rey est professeur d’histoire russe et soviétique, directrice du centre de Recherches en Histoire des Slaves (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne) et directrice de l’UMR SIRICE. Elle a écrit de nombreux articles et ouvrages consacrés à l’histoire russe et soviétique. Parmi ces derniers : La Russie face à l’Europe d’Ivan le Terrible à Vladimir Poutine (Flammarion, Champs Histoire, 2016) ; 1814, Un tsar à Paris (Flammarion, 2014, Champs Histoire 2015), traduit en russe ; L’effroyable tragédie, une nouvelle histoire de la campagne de Russie, Flammarion 2012 et 2014, prix 2012 de la Fondation Napoléon, édité en tchèque et en russe; et Alexandre Ier, le tsar qui vainquit Napoléon (Flammarion, 2009, 2013) primé par l’Académie des Sciences Morales et Politiques, publié en anglais et en russe.
Cyrille Suss est cartographe indépendant. Il a réalisé les cartes de nombreux Atlas Autrement, notamment l’Atlas géopolitique de la Russie (2007, mis à jour en 2012 et en 2015), l’Atlas des religions (2015) et l’Atlas des États-Unis (2016).www.cscarto.com
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http://www.cscarto.comhttp://www.autrement.com
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Atlas historique de la Russie
D’Ivan III à Vladimir Poutine
François-Xavier Nérard
Marie-Pierre Rey
Cartographie : Cyrille Suss
Éditions AutrementCollection Atlas/Mémoires
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Atlas historique de la Russie
Introduction6 Quand l’histoire de la Russie
commence-t-elle ?
9 D’Ivan III à V. Poutine, permanences et contrastes
10 Le territoire russe en expansion12 La vulnérabilité russe14 La difficile maîtrise du territoire16 Une diversité nationale et religieuse18 Le pouvoir et l’Église orthodoxe20 Une terre d’accueil et d’exil22 La conquête du Caucase24 La Russie de l’Amour au Pacifique26 Moscou, au cœur de l’histoire russe
29 L’Empire russe30 Saint-Pétersbourg, capitale impériale32 Le servage au cœur du monde rural34 Industrialisation et capitalisme 36 Les routes commerciales
dans l’Empire russe38 Les cosaques et l’intégration
de l’Ukraine dans l’Empire russe40 Les Russes en Sibérie :
de la conquête à la mise en valeur 42 Les Russes en Asie centrale44 Révoltes et contestations
de l’ordre impérial46 L’Empire russe sur la scène
internationale48 Guerre et révolution50 La prise du pouvoir
par les bolcheviks
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SOMMAIRE • 5
53 La parenthèse soviétique ?54 La guerre civile et ses conséquences56 Les villes soviétiques
à l’heure de l’industrialisation58 D’Ekaterinbourg à Sverdlovsk :
une nouvelle capitale régionale60 Répressions staliniennes62 Famines soviétiques64 La Seconde Guerre mondiale66 Les hauts lieux de la Grande Guerre
patriotique68 Les confins occidentaux
de l’URSS de 1938 à 194870 Logement et consommation
en URSS à l’époque du dégel72 Le bloc socialiste et l’URSS74 La puissance soviétique
de Khrouchtchev à Brejnev76 Croissance et stagnation sous Brejnev78 La perestroïka et l’effondrement de l’URSS
81 Une nouvelle Russie ?82 La Russie en crises84 Les traces du passé soviétique86 Les difficiles mutations
du monde rural88 La Russie actuelle
Annexes90 Glossaire91 Chronologie93 Bibliographie
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Quand l’histoire de la Russie commence-t-elle ?
INTRODUCTION GÉNÉRALE
Cet atlas historique débute avec le règne d’Ivan III, grand-prince de Vladimir et de Moscou entre 1462 et 1505. Est-ce à dire que la Russie n’a pas d’his-toire avant ? Ou faut-il faire, à l’instar des grands historiens russes du xixe siècle et du début du xxe siècle (Karamzine, puis Soloviev ou Klioutchevski par exemple), de la Rous’ de Kiev, le berceau de l’histoire de la Russie ? Car de fait, du ixe au xve siècle, l’émergence progressive de la Russie a été ponctuée de discontinuités, de translations géographiques du pouvoir, d’instabilité qui autorisent des interprétations très diverses.
La Rous’ voit le jour au milieu du ixe siècle dans un territoire compris entre le Dniepr moyen et la région du lac Ilmen ; elle s’organise autour d’une famille princière, les Riouriki, installée à Kiev et convertie au christianisme venu de Byzance, en 988 sous l’influence du grand-prince Vladimir. La Rous’ est largement tournée vers le commerce et les échanges avec les villes hanséatiques de Scandinavie. Cette principauté kiévienne entre pourtant dès la seconde moitié du xiie siècle, et plus encore au xiiie siècle, dans une phase de turbulence puis de déclin. Elle sombre sous les coups des invasions mongoles : les troupes de Batu Khan prennent Kiev en 1240. Les princes russes sont contraints de se soumettre à la Horde d’or et lui verser un tribut.
Le nord de la région, lui aussi peuplé de Slaves, égale-ment chrétien et orthodoxe s’est initialement trouvé sous la tutelle de Kiev dont il tente de s’émanciper dès le xiie siècle. À partir de 1136, la république de Novgorod acquiert son indépendance et devient une puissance politique et commerciale. Plus au sud, la principauté de Vladimir-Souzdal, sous l’influence de princes énergiques comme Iouri Dolgorouki (1099-1157), s’affirme comme un nouveau pôle de rayonnement et d’influence. En 1169, le prince de Vladimir-Souzdal Andrei Bogolioubski a mis à sac la ville de Kiev en signe d’indépendance. En 1299, le siège du métropolite est symboliquement transféré de Kiev à Vladimir. Mais cette domination n’a qu’un temps. La prin-cipauté, toujours vassale des Mongols, se désagrège en petits États théoriquement placés sous sa tutelle, parmi lesquels la toute jeune et encore modeste Moscovie.
En 1380, c’est bien le prince de Moscou, Dimitri Donskoï, qui lors de la victorieuse bataille de Koulikovo polie (au champ des bécasses), incarne pour la première fois la résistance aux Mongols. Toutefois, si cette victoire marque le début du reflux de l’occupation mongole des terres russes, c’est véritablement à partir du règne d’Ivan III que le joug mongol disparaît. C’est ce prince qui unifie à son profit les terres russes en quadruplant la superficie de sa
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INTRODUCTION • 7
principauté et en annexant la république de Novgorod en 1478. Désormais, c’est autour de Moscou que l’histoire de la Russie s’écrira sans interruption. C’est pourquoi nous avons choisi de faire débuter cet atlas avec le règne d’Ivan III.
L’année 1917 et ses deux révolutions successives, celle de Février qui met à bas l’empire tsariste puis celle d’Octobre qui conduit à l’avènement de la nouvelle Russie soviétique et à la mise en place d’un régime politico-social inédit dans l’histoire du monde ont, indéniablement, constitué une rupture majeure dans l’histoire russe. Aussi cet atlas, loin de négliger « la parenthèse » soviétique, fait la part belle à l’histoire de l’URSS, en tenant compte des apports histo-riographiques les plus récents. Tout en affirmant leur irré-ductible spécificité, il replace les événements de 1917 dans un contexte plus large, notamment celui de la guerre qui embrase l’espace russe de 1914 à 1922.
Il est enfin crucial aujourd’hui de penser l’histoire russe après 1991, c’est-à-dire après la fin de l’histoire soviétique et avec la naissance d’un nouvel État, la Fédération de Russie qui, en quête d’identité, a vite multiplié les emprunts tant à son passé soviétique immédiat qu’à son passé tsariste, plus lointain. Or, en amont comme en aval des
ruptures de 1917 et de 1991, la longue durée permet de repérer les grandes lignes de continuité et les temps forts de l’histoire russe. C’est pour dégager toute la richesse de cette histoire que nous avons non seulement choisi d’inscrire cet atlas dans une durée qui couvre près de sept siècles, mais plus encore, associé trois parties chrono-logiques (l’empire tsariste, le siècle soviétique, la Russie actuelle) et une partie thématique qui, embrassant toute l’histoire russe d’Ivan III à Vladimir Poutine, s’attache à dégager un certain nombre de lignes de force et de per-manences structurelles. De la sorte, et c’est en tout cas le pari de cet ouvrage, nous espérons donner au lecteur la vision la plus juste des réalités complexes et contrastées d’un État-continent unique au monde.
Par définition, un atlas ne prend vie que grâce à son car-tographe. Nous avons eu la chance de pouvoir compter ici avec le talent de Cyrille Suss qui s’est montré aussi compétent qu’enthousiaste. Aussi souhaitons-nous ici le remercier très chaleureusement d’avoir mis en notes car-tographiques notre partition historique.
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Le territoire russe en expansion
Autour du noyau des terres russes, rassemblées par les princes de Moscou, se construit à partir du xvie siècle un État en constante expansion. Cette dernière débute par la conquête des khanats musulmans de la Volga, puis de l’Est sibérien. La Russie s’élargit ensuite vers le sud, en Ukraine, dans le Caucase et vers l’ouest. À la veille de la Première Guerre mondiale, c’est le plus grand État du monde, à cheval sur deux continents.
Vers la SibérieL’avancée vers l’est fut la plus facile du fait de l’absence d’obstacles naturels et de toute résistance organisée de la part des peuples sibériens. Dès 1579, le cosaque Ermak explore la Sibérie et, au début du xviie siècle, le pouvoir russe y installe ses premières villes fortifiées. Irkoutsk est fondée en 1652, le Kamtchatka est atteint en 1695. En
De la principauté de Moscou à la RussieAu début du xvie siècle, débarrassée des Mongols comme de ses rivales, les principautés de Novgorod et de Tver qu’elle a absorbées, la princi-pauté de Moscou a nettement élargi ses frontières. En 1300, elle s’éten-dait sur 20 000 km2, en 1462, à l’avè-nement d’Ivan III, elle représente
déjà 430 000 km2 et, entre 1462 et la mort de Vassili III en 1533, sa super-ficie est multipliée par six. Sous le règne d’Ivan IV, Moscou s’empare des khanats musulmans de Kazan (1552) et d’Astrakhan (1556). La Russie devient alors une entité plurinationale et pluriconfessionnelle dont l’expan-sion, facilitée par la continuité géogra-phique, se poursuit au fil des siècles.
1 000 km
Empire russe en 1897FrontièresToundra
Paysages
TaïgaForêt mixteForêt de feuillus
Steppe boiséeSteppeSteppe sèche et semi-désertDésert
Domaine d’extension de la merzlota(sol gelé en permanence)Mer prise par les glaces en hiverIsotherme de janvierIsotherme de juillet
Climat
URSS en 1990Fédération de Russie
Sources : N. Riasanovsky, Histoire de la Russie. Des origines à nos jours, Robert Laffont, 2014 ; P. Marchand, C. Suss, Atlas géopolitique de la Russie, Autrement, 2012 et 2015 ;A. F. Chew, An Atlas of Russian History, Yale University Press, 1967 ; Agricultural Ecological Atlas of Russia and Neighboring Countries (www.agroatlas.ru).
Cercle polaire arctique
Volga
Moscou
Minsk
Kiev
Odessa
Rostov
Astrakhan
Ekaterinbourg
Nijni Novgorod
Samara
Omsk
Bakou
AchkhabadTachkent
Douchanbe
Bichkek
Krasnoïarsk
Iakoutsk
Magadan
Merd’Okhotsk
Merdu Japon
(mer de l’Est)
Sakhaline
Kamtchatka
Irkoutsk Tchita
Khabarovsk
Vladivostok
Lac Baïkal
Massifde l’Altaï
S I B É R I E
Karagandy
Astana
Almaty
Erevan
Tbilissi
Arkhangelsk
Saint-Pétersbourg
Mourmansk
Nouvelle-Zemble
Merde Barents
30° E
60° E
90° E
120° E
150° EMerBaltique
Merd’Aral
MerCaspienne
MerNoire
Merdes Laptev
Merde Sibérieorientale
Détroit de Béring
Océan glacial Arctique
80° N
70° N
60° N
50° N
40° N
Helsinki
RigaVarsovie
Koly
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Lena
Ob
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OU
RA
L
Ienisseï
-40°-40°
-40°
-20°
-20°
40°
40°
-40°
1011 - 1c. Contraintes physiques
CONTRAINTES PHYSIQUES
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D’IVAN III À V. POUTINE, PERMANENCES ET CONTRASTES • 11
Extrême-Orient, l’avancée russe se fait à l’encontre de la Chine. En 1858, cette dernière doit céder la rive droite de l’Amour, prélude à la fondation de Vladivostok (1860). Cet expansion-nisme qui contrarie de plus en plus les intérêts du Japon, en particulier en Mandchourie, débouche sur un conflit ouvert avec ce dernier en 1904-1905.
Vers le Caucase et l’Asie centraleL’expansion vers le sud se fait aux dépens de peuples nomades – Kalmouks, Bachkirs, Tatars de Crimée – puis de l’Empire ottoman et de la Perse. En 1654, l’Ukraine orien-tale passe sous tutelle russe ; en 1774, l’Empire s’étend jusqu’aux rives sep-tentrionales de la mer Noire avant d’intégrer la Géorgie orientale et la
Bessarabie (1812), puis, en 1828, l’Azerbaïdjan et plusieurs provinces arméniennes. Mais cette expansion ne va pas sans revers, attestés par les lon-gues guerres du Caucase (1835-1859). L’Asie centrale constitue la dernière grande étape de l’expansion méridio-nale. Débutée en 1864 par des opé-rations militaires de grande ampleur, la conquête aboutit en juin 1865 à la prise de Tachkent, capitale du kha-nat de Kokand. Trois ans plus tard, la Russie impose un protectorat à celui de Boukhara, puis en 1873 à celui de Khiva. En 1875, les protectorats dispa-raissent, incorporés dans le gouverne-ment général du Turkestan.
En EuropeVers l’ouest, c’est pour prendre pied en mer Baltique que Pierre Ier a mené
la longue guerre du Nord qui abou-tit en 1703 à la fondation de Saint-Pétersbourg. Quant à Catherine II, elle prend avantageusement part aux quatre partages de la Pologne, obte-nant en 1772 les régions de Polotsk, Vitebsk et Moguilev ainsi qu’une partie de la Lituanie, jusqu’à la Dvina et au Dniepr ; en 1793, la région de Minsk et une partie de l’Ukraine occidentale, ainsi que, un an plus tard, le reste de la Lituanie et le duché de Courlande. En 1815, un nouveau partage mis en œuvre par le congrès de Vienne fait du royaume de Pologne une entité russe.À la veille de la Première Guerre mon-diale, l’Empire russe constitue un État-continent de 21,8 millions de km2, à cheval sur l’Europe et l’Asie.
1 000 km
1551-15521613
Expansionjusqu’en
Russie en
(début de la dynastie des Romanov, Michel Ier – 1613-1645)16891725
179618551905
1762
1914
*ce territoireest rétrocédé à la
Perse en 1735
(armistice d’Androussovo, 1667 et traité de Nertchinsk, 1689)
(début du règne de Catherine II)(à la mort de Catherine II)(à la fin du règne de Nicolas Ier)(guerre avec le Japon)
(à la mort de Pierre le Grand, peu de changements jusqu’au début du règne de Catherine II)
(au début du règne d’Ivan le Terrible – 1547-1584)
Pour le détail sur le Caucase voir la carte page 23,pour le détail sur l’Asie centrale voir la carte page 42.
Sources : G. Hosking, Russia, People and Empire, 1552-1917, Harvard UniversityPress, 1997 ; A. F. Chew, An Atlas of Russian History, Yale University Press, 1967.
Moscou
Voronej
SmolenskNovgorod
Saint-Pétersbourg
(1809)
(1815)
Région du lac Zaïssanannexée en 1864
Mandchourie,présence russe de 1900 à 1905
Région de Kouldjaoccupée de 1871 à 1881
Région de Pamirannexée en 1895
(1812)
Kazan
TaraTomskOmskPetropavlovsk
Semipalatinsk
Samarcande
BoukharaTachkent
Irkoutsk
Iakoutsk
Vladivostok
Port Arthur
Péninsule de Liaodong,présence russe de 1895 à 1905
OkhotskPetropavlosk-Kamtchatskii
Nertchinsk
TobolskOufa
Orsk
OrenbourgAstrakhan
Derbent
BakouRecht*
Khiva
Azov
Kiev
Minsk
Odessa
RigaVarsovie
Merd’Okhotsk
Lac Baïkal
Merd’Aral
MerCaspienne
Merdu Japon
(mer de l’Est)
Sakhaline
Kamtchatka
S I B É R I E
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CA
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Merde Barents
MerNoire
Cercle polaire arctique
Volga
1011 - 2c. Expansion du XVIe au XXe s.
EXPANSION DU XVIe AU XXe SIÈCLE
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Le pouvoir et l’Église orthodoxe
La religion orthodoxe est celle des souverains russes, aussi l’Église occupe une place particulière dans le système autocratique. Mais elle est depuis Ivan IV soumise à un contrôle étroit. En 1917, la disparition de l’empire des Romanov ouvre une période de troubles pour l’orthodoxie durement persécutée durant les premières années du régime bolchevique. À partir de 1943, pouvoir et Église s’engagent sur la voie d’un compromis qui perdure jusqu’à la chute de l’URSS.
joue un rôle clef dans l’identité russe. Elle soude la population contre l’en-nemi extérieur. Elle contribue aussi à définir la nature du pouvoir politique. Le règne d’Ivan III qui libère le pays des Tatars est un tournant. En 1493, Ivan se proclame « souverain de toute la Russie », puis quelques années plus tard, « tsar », contraction du mot
Une prise d’autonomieEn 988, inspirée par Byzance, la conversion de Vladimir, grand-prince de Kiev, fait entrer la Rous dans la chrétienté. Le métropolite, primat de la nouvelle Église, est subordonné au patriarche de Constantinople et les archevêques et prêtres sont des Grecs ; mais au fil des décennies,
l’Église de Kiev « s’individualise » en se dotant d’un clergé local. À la fin du xiiie siècle, le déclin de la Rous, en butte à des luttes intestines puis aux assauts mongols, conduit à un trans-fert du siège du métropolite d’abord à Vladimir en 1299, puis à Moscou où le chef de l’Église se fixe en 1329.Dès le Moyen Âge, la foi orthodoxe
1448
1440 1450 1590 1710 1720 1730 19501700 1900 1910 1920 1930 194017001580 1650 1660 1670 1680 1690
Nomination de Jonas,métropolite de Moscou
et de toute la Russie sansl’accord de Constantinople
1589 16521667
Création à l’initiative du régentBoris Godounov du patriarcatde Moscou, l’Église orthodoxe
russe devient autocéphale
Le patriarche Nikonengage une réformede la liturgie refuséepar les vieux-croyants
L’Église lance un anathèmecontre les vieux-croyants qui
sont déclarés schismatiques.Début de la répression. Exilde l’archiprêtre Avvakoum
en Sibérie
1682Avvakoum est brûlé vif maissa disparition ne met pasun terme au schisme
1721
Pierre le Grand supprimele patriarcat (jugé trop puissant)et le remplace par un collège appelésaint-synode à la tête duquel il placeun laïc, le procureur du saint-synode
1918
Après la révolution d’Octobre 1917,rétablissement du patriarcat.
Tikhon, métropolite de Moscou,est placé à sa tête. Séparation
de l’Église et de l’État
1919Conflitdesreliques
1925(mars)MortdeTikhon
1929-1932Offensiveantireligieuse
1943(sept.)Électiond’un nouveaupatriarche, Sergi
1819 (ex 2627) - 2g. Grandes dates de l’histoire religieuse russe
FRISE CHRONOLOGIQUE DES GRANDS ÉVÉNEMENTS POLITICO-RELIGIEUX
500 km
Principaux monastèresà la fin du XVIIe s.
Bâtimentconstruit au…
XVIIe siècleXVIe siècle
Source : E. V. Volkova, V. A. Klokov, M. V. Ponomarev,Atlas Istoria Rossii, Novy Outchebnik, 2007. Source : Bogoroditse-Smolenskii Novodievitchii Monastyr (novodev.ru)
N O V O D I E V I T C H I
Palais Lopoukhine (1689)
Église-porche de laTransfiguration
(1689)
Église-porchede l’Intercession
(1688)
Cathédralede la Viergede Smolensk
(1525)
PalaisGodounov
Église del’Assomption(1688)
Clocher (1690)
Tour Naproudnaïa
Tour Lopoukhinskaïa
TourTsaritsinskaïa
Tour Chvalnaïa
TourIosafovskaïa
Tour Tchebotarnaïa
TourNikolskaïa
Tour Pokrovskaïa
Tour Savinskaïa
Tour Zatrapezskaïa
Tour Predtetchenskaïa
TourSetounskaïa
MoscouSmolensk
KievVoronej
NijniNovgorod
Novgorod
Solovki
VageozerskiKirillo-Belozerski
Iouriev Spasski FerapontovGlouchitski Prokovski
Spasso EfimievKorniliev Vvedenski
TroitseSerguiev
Makariev
Petcherski
Vo
lga
Cimetièrede Novodievitchi
1819 (ex 2627) - 3c. Grands monastères et lieux de piété populaire
MONASTÈRES EN RUSSIE, PLAN DU MONASTÈRE DE NOVODIEVITCHI
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D’IVAN III À V. POUTINE, PERMANENCES ET CONTRASTES • 19
« caesar ». À l’image de l’empereur de Byzance dont il se veut l’héritier, le tsar ne tire désormais son pouvoir que de Dieu dont il est le lieutenant sur terre.
Le contrôle de l’ÉtatEn 1547, Ivan IV choisit d’être sacré par le métropolite de Moscou, initiant une pratique qui renforce la dimension religieuse du pouvoir autocratique et perdurera jusqu’à Nicolas II. Mais en parallèle, l’État impose sa mainmise sur l’Église. Certes, cette dernière bénéficie d’un statut privilégié — elle est proté-gée par le souverain — mais elle doit se soumettre : en 1569, le métropolite Philippe II qui reprochait au tsar son usage sacrilège de la terreur est arrêté puis assassiné. Les débuts de la dynastie des Romanov redonnent de l’influence à l’Église qui depuis 1589 s’est proclamée auto-céphale et s’est dotée d’un patriarche. Mais l’Église traverse bientôt une crise d’une immense ampleur. Dans la seconde moitié du xviie siècle, la réforme de la liturgie russe engagée par le patriarche Nikon suscite l’opposition puis le schisme d’une partie des prêtres et des laïcs, conduits par l’archiprêtre Avvakoum. Déporté en Sibérie en 1667, Avvakoum y est brûlé vif en 1682. Pour fuir les persécutions et les exécutions par milliers, nombre de schismatiques s’enfuient à l’étranger ou vers l’est, en Oural et Sibérie. Déjà affaiblie par cette crise, l’Église subit la tutelle croissante de l’État. En 1721, Pierre Ier supprime le patriarcat de Moscou et le remplace par une institution collégiale, le saint-synode. Installé à Saint-Pétersbourg et dirigé par un laïc nommé par le tsar, il constitue dès lors l’autorité suprême de l’Église.
Le combat des bolcheviksLes révolutions de 1917 corres-pondent, brièvement, à une reprise
d’autonomie de l’Église orthodoxe qui élit un nouveau patriarche à Moscou quelques jours après la révolution d’Octobre. Seule institution de l’an-cien régime à subsister désormais, elle devient bientôt la cible privilégiée des attaques bolcheviques. Le nou-veau régime proclame la séparation de l’Église et de l’État et de l’Église et de l’école en janvier 1918. La propagande de l’athéisme et la répression sont très violentes. Les victimes se comptent par milliers. Les lieux de cultes sont fermés ou détruits, la liberté de culte, pourtant proclamée par la Constitution de 1936, bafouée.Le virage stalinien de 1943 est d’autant plus impressionnant. Essentiellement pour satisfaire ses alliés anglo-saxons, Staline autorise l’élection, en sep-tembre, d’un nouveau patriarche à la tête d’une Église dont le fonctionne-ment est désormais contrôlé par un fonctionnaire. Dès lors, existe en Union soviétique, une Église officielle.Les tensions entre Église et pouvoir renaissent après la mort de Staline du fait de la politique antireligieuse de Nikita Khrouchtchev. Au cours des années 1970, ce sont plutôt les dissi-dents, comme Gleb Yakounine, qui cri-tiquent l’Église officielle, en l’accusant d’être contrôlée par les autorités ou même infiltrée par le KGB.Avec la chute de l’URSS, le paysage religieux se reconstruit. L’Église ortho-doxe met en avant les persécutions subies à l’époque soviétique. En août 2000, Nicolas II et sa famille, comme plusieurs victimes du régime sovié-tique, sont canonisés après de vifs débats. L’Église orthodoxe, dotée d’un nouveau patriarche, Kirill, depuis 2009, entend désormais jouer un rôle central dans la société russe. Un rôle que le pouvoir politique, notamment depuis l’élection de Vladimir Poutine, ne lui dénie pas. Bien au contraire.
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Nomination de Jonas,métropolite de Moscou
et de toute la Russie sansl’accord de Constantinople
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Création à l’initiative du régentBoris Godounov du patriarcatde Moscou, l’Église orthodoxe
russe devient autocéphale
Le patriarche Nikonengage une réformede la liturgie refuséepar les vieux-croyants
L’Église lance un anathèmecontre les vieux-croyants qui
sont déclarés schismatiques.Début de la répression. Exilde l’archiprêtre Avvakoum
en Sibérie
1682Avvakoum est brûlé vif maissa disparition ne met pasun terme au schisme
1721
Pierre le Grand supprimele patriarcat (jugé trop puissant)et le remplace par un collège appelésaint-synode à la tête duquel il placeun laïc, le procureur du saint-synode
1918
Après la révolution d’Octobre 1917,rétablissement du patriarcat.
Tikhon, métropolite de Moscou,est placé à sa tête. Séparation
de l’Église et de l’État
1919Conflitdesreliques
1925(mars)MortdeTikhon
1929-1932Offensiveantireligieuse
1943(sept.)Électiond’un nouveaupatriarche, Sergi
1819 (ex 2627) - 2g. Grandes dates de l’histoire religieuse russe
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Temps des troubles
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Fiodor I
Michel I(a)
Alexis
(a) Petit-fils de Nikita, frère d’Anastasia(b) de Mecklembourg ; (c) de Brunswick ;(d) de Holstein
Maria Miloslavskaïa
Eudoxie L.
AlexisPierre II
ÉlisabethPierre III
Nicolas I
Alexandre II
Alexandre III
Nicolas II
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Ivan VI
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Vassili I
Vassili II
Ivan IIIle Grand
Vassili III
1819 (ex 2627) - 1g. Des premiers tsarsaux Romanov
ARBRE GÉNÉALOGIQUE, ROMANOV ET PREMIERS TSARS
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L’Empire russeAu début du xviie siècle, la Russie a acquis les traits essentiels qui feront son histoire séculaire : un régime autocratique, une structure impériale, la prédominance de la foi orthodoxe, un ordre socio-économique reposant sur l’asservissement des campagnes. Mais sur cet héritage, les Romanov, au pouvoir durant un peu plus de trois cents ans, imposent leur propre marque. Par leur politique expansionniste et leurs conquêtes militaires, ils font de la Russie le plus grand État du monde, à cheval sur deux continents ; à cette entité jusque-là tenue en lisière par les puissances européennes, ils apportent une légitimité et un rayonnement inédits au plan international. Ces succès ont un coût — celui des guerres incessantes dans lesquelles l’Empire s’engage — et ils ont un revers : l’incapacité du pouvoir à conduire le pays vers la modernité tant économique et sociale que politique. Si le servage est finalement aboli en 1861, la question agraire n’est pas résolue pour autant. Le dernier tiers du xixe siècle est marqué par un développement industriel sans précédent, qui pose le problème d’un monde ouvrier paupérisé et en plein essor. Enfin l’état de droit n’est qu’embryonnaire. À l’orée du xxe siècle, cramponné à des prérogatives de plus en plus anachroniques, l’empire des tsars, incapable de réaliser sa mue politique, vit ses dernières heures.
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Les villes soviétiques à l’heure de l’industrialisation
L’entre-deux-guerres est une période d’urbanisation de l’URSS. Déjà en croissance, les villes de la Nouvelle politique économique offrent de forts contrastes économiques et sociaux. L’industrialisation à marche forcée décidée à la fin des années 1920 par la direction stalinienne provoque une explosion urbaine. Les paysans, attirés par les gigantesques chantiers, trouvent aussi en ville un refuge contre la violence des campagnes bouleversées par la collectivisation.
communiste en 1921 permet au pays de souffler après le maelstrom qu’il vient de connaître. Les réquisitions dont la perception a été à l’origine de tant de brutalité sont remplacées par un impôt en nature. Les campagnes retrouvent ainsi progressivement une certaine autonomie. Elles peuvent enfin panser, pour un temps, les plaies de la guerre civile, des violences subies. Toutefois, si le discours officiel
De fortes disparitésAu sortir de huit ans de guerre, la Russie est un pays encore plus rural qu’en 1914. Le conflit et les diffi-cultés d’alimentation des villes qui l’accompagnent ont eu pour consé-quence une réelle désurbanisation : les villes russes ont perdu le quart de leurs habitants. Les deux principales métropoles, Moscou et Petrograd, ont vu leur population passer de quatre
millions, en 1914, à un million et demi d’habitants en 1920. Toutefois, peu à peu, une fois le conflit terminé, les villes redeviennent des centres attrac-tifs. Elles accueillent de nombreux soldats démobilisés, des paysans à la recherche de travail. En 1926, 26,3 mil-lions de Soviétiques (18 % de la popu-lation) vivent en ville.La Nouvelle politique économique (NEP), initiée par le Xe congrès du parti
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Population des villes, de plus de 100 000 habitants(en millions d’habitants)
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Principales voies ferrées
Principaux centres industriels
en 1926en 1939
Sources :N. Riasanovsky, Histoire de la Russie. Des origines à nos jours, Robert Laffont, 2014 ;Narodnoie khozïaïstvo SSSR v 1960 godou, statistitcheskiï ejegodnik, Gosstatizdat, 1961.
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TomskKrasnoïarsk
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5657 - 1c. Urbanisation et industrialisation entre 1917 et 1941
URBANISATION ET INDUSTRIALISATION ENTRE 1917 ET 1941
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LA PARENTHÈSE SOVIÉTIQUE ? • 57
parle de l’union (smytchka) entre la ville et la campagne pendant toutes les années 1920, les deux mondes s’ignorent et les bolcheviks sont très peu présents dans les campagnes où leurs militants sont quasiment inexistants.La nouvelle société soviétique naît d’abord dans les villes. La faim devient rapidement un mauvais sou-venir. Le taux de mortalité diminue pour atteindre 24 ‰ en 1925 quand le taux de natalité, sans retrouver son niveau d’avant-guerre, remonte par un effet de rattrapage à 45 ‰. Les années 1920 sont celles d’un court retour à une vie normale, trop « bourgeoise » pour nombre de par-tisans, déçus, des bolcheviks. Malgré quelques expériences, comme des maisons-communes (dans lesquelles on essaie de donner naissance à un nouveau mode de vie), les villes de la NEP n’ont en effet rien à voir avec les espérances qui ont fondé leur engage-ment dans la guerre civile. Certains ne résistent pas à ce rêve brisé : le taux de suicide explose chez les membres du parti. Il est de 37 ‰ à Leningrad en 1928.De fait, dans les rues des villes sovié-tiques apparaissent de nouvelles sil-houettes, celles de NEPmen, ces riches marchands qui ont su tirer un parti avantageux des règles assou-plies du fonctionnement de l’écono-mie. Avec eux, se développe tout un nouveau mode de vie adapté à leurs attentes et à leurs moyens. Des ciné-mas, où l’on regarde beaucoup de
films hollywoodiens, sortent de terre ; des restaurants refleurissent avec leur musique, souvent de jazz, et leurs salles de billard. Ce petit monde de la NEP fera d’ailleurs les délices des satiristes soviétiques comme Ilya Ilf et Evgueni Petrov ou Mikhail Zochtchenko.Les contrastes sont très forts : à côté de cette opulente richesse, la pauvreté persiste. Le chômage explose : près de 2 millions de chômeurs en 1928. Mais ce sont surtout les 7 millions d’enfants des rues, les bezprizorniki, ces orphe-lins des guerres et de la famine, qui errent dans les rues des villes. Les autorités tentent tout à la fois de les pourchasser, de les enfermer et de les rééduquer. Les orphelinats pourtant sont insuffisants, les moyens dégagés également.
L’explosion urbaineLe changement de politique, éco-nomique et sociale, de la fin des années 1920, la « grande fracture » pour reprendre les termes de Staline, constitue une évolution majeure. Le premier plan quinquennal de déve-loppement de l’économie soviétique, lancé en 1929, prévoit une industriali-sation volontariste, financée en partie par la collectivisation des campagnes. Les immenses chantiers qui appa-raissent changent la face du pays. La population urbaine explose. Elle atteint 49 millions en 1939, soit 29,2 % de la population. L’apparition de nou-velles villes, comme Magnitogorsk ou Belovo, constitue l’un des
phénomènes les plus frappants. 111 des 572 villes (comptant donc plus de 12 000 habitants) recensées en Russie (RSFSR) n’existaient pas en 1926. La plupart d’entre elles sont situées à l’est du pays, notamment dans l’Oural ou en Sibérie, aussi bien occidentale qu’orientale. Leur déve-loppement accompagne l’industriali-sation : on les trouve à proximité des zones d’extraction du minerai ou d’ex-ploitation des matières premières.Pendant le premier plan quinquennal, toutes les régions de Russie voient leur population urbaine augmenter, parfois sensiblement. En un an, entre 1931 et 1932, les villes croissent de 18,5 %. Pour la seule ville de Leningrad, on recense l’arrivée de 269 000 per-sonnes (21 % de la population de ville). Dans les agglomérations de l’Oural, ce chiffre se monte à 24 %, soit 635 000 personnes ! Ces nouveaux venus, en majorité des hommes (60 %), viennent des campagnes soviétiques. Ce sont des kolkhoziens, des paysans qui ont refusé de rentrer dans les kolkhozes (edinolichniki) ou des koulaks en fuite… L’anonymat des villes est, pour eux, le meilleur moyen d’échapper à la répression. La croissance urbaine s’accompagne de certains progrès, par exemple en matière d’alphabétisation. Mais la situation sanitaire, liée aux problèmes de logement (la surface habitable par personne ne dépasse pas 4 m²), d’hy-giène et d’alimentation reste difficile et provoque, par exemple, une mortalité infantile élevée.Les autorités cherchent à contrôler autant que faire se peut ce flux vers les villes. En décembre 1932, le gou-vernement soviétique met en place un système de passeports intérieurs, obligatoire pour avoir le droit de rési-der en ville ou dans les bourgs urbains. Certaines personnes, comme les anciens koulaks, sont même interdites de résidence dans certaines villes « à régime spécial » comme Moscou, Leningrad ou Kharkov. Si ces mesures suscitent des violences récurrentes (les indésirables sont déportés), elles ont peu d’effets tant l’attraction des villes et les besoins de main-d’œuvre restent forts.
Population urbaine(en millions d’habitants)
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La Russie en crises
La disparition de l’URSS inaugure, pour la nouvelle Russie indépendante, un cycle ambivalent : le pays connaît une crise d’une ampleur rare, aussi bien économique, sociale que politique ; dans le même temps, c’est une période d’opportunités sans pareilles, de mobilité sociale, mais également de forte criminalité. Les années Eltsine, ces « fougueuses années 1990 » comme les surnomment les Russes aujourd’hui, sont celles d’un pays qui tente, difficilement, de se redéfinir.
des acteurs majeurs de la vie écono-mique et politique du pays. Le coût des réformes est en revanche immense pour la masse de la population : le PIB russe recule d’année en année (-14,5 % en 1992, -8,7 % en 1993…), la production industrielle et agricole s’effondre, les salaires stagnent, les retraites, de toute façon insuffisantes, ne sont même pas versées. Dans les années qui suivent, la crise devient également budgétaire, avec d’im-portants déficits, fiscale puisque le consentement à l’impôt se délite, et
Une crise économiqueLe gouvernement russe, sous l’impul-sion d’Egor Gaïdar, lance le 2 janvier 1992, soit une semaine après la dis-parition de l’URSS, une vaste réforme de l’économie fondée sur les principes libéraux de la « thérapie de choc ». L’essentiel des prix sont libérés, pro-voquant une hyperinflation immédiate : 250 % le premier mois, 2 500 % pour l’année 1992, ce qui cause la ruine, en quelques jours, de millions d’épar-gnants. Cette hyperinflation ne sera maîtrisée qu’à partir de 1996 (21,8 %
contre 131 % en 1995). Les changes, le commerce extérieur sont également libérés et le dollar devient une mon-naie d’échange en Russie. À compter de l’été 1992, une vaste politique de privatisation est enclenchée par Anatoli Tchoubaïs. Fondée sur la distribution, a priori démocratique, de parts de pro-priété à la population (vouchers), elle débouche en réalité sur des trafics et des appropriations plus ou moins cri-minelles. Des fortunes colossales sont ainsi accumulées en quelques mois ; les nouveaux oligarques deviennent
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entre novembre 1988 et décembre 1989leur souveraineté…
Les Républiques socialistes soviétiquesdéclarent…
entre mai et août 1990entre octobre et décembre 1990
entre mars 1990 et avril 1991leur indépendance…
en août et septembre 1991entre octobre et décembre 1991
Frontière de l’URSS avant les indépendancesFrontière de la Fédération de Russie aprèsles indépendances
*Arménie, pas de déclaration de souveraineté,seulement d'indépendance (23 août 1990).
Moscou
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ESTONIE30 mars 1990
LITUANIE11 mars 1990
BIÉLORUSSIE25 août 1991
UKRAINE24 août 1991
MOLDAVIE27 août 1991
GÉORGIE9 avril 1991
ARMÉNIE*23 août 1990
AZERBAÏDJAN18 octobre 1991
TURKMÉNISTAN27 octobre 1991
KAZAKHSTAN16 décembre 1991
RUSSIE(RSFSR)
KIRGHIZSTAN31 août 1991
TADJIKISTAN9 septembre 1991
OUZBÉKISTAN31 août 1991
8283 - 1c. Démembrement territorial
LE DÉMEMBREMENT TERRITORIAL
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UNE NOUVELLE RUSSIE ? • 83
monétaire. Elle culmine avec le krach financier d’août 1998 et le défaut de la Russie sur sa dette souveraine.
Une crise politiqueUne nouvelle fois, la Russie se retrouve avec un pouvoir double, avec deux instances revendiquant chacune sa légitimité. D’un côté, le gouvernement dirigé par Boris Eltsine, de l’autre le congrès des députés du peuple, élu en 1990 et son organe permanent, le Conseil suprême présidé par Rouslan Khasboulatov. Alliées lors du putsch de 1991, les deux structures vont s’op-poser de plus en plus frontalement, notamment au sujet des réformes économiques. Le congrès qui se réunit à intervalles réguliers refuse d’entéri-ner la nomination de Gaïdar au poste de Premier ministre. L’affrontement culmine en septembre-octobre 1993 quand Boris Eltsine dissout le parle-ment et qu’une partie des députés refusent de se soumettre. Les chars tirent sur la « maison blanche », le par-lement russe. On comptera, pour s’en tenir au chiffre officiel, 123 morts. La transition démocratique s’achève dans un bain de sang.La crise est provisoirement refermée par une série de votes. Une nou-velle constitution, de type présiden-tialiste, est adoptée par référendum en décembre par 58 % de la popu-lation, même si certaines provinces la rejettent. En parallèle, un nouveau parlement, la Douma, est élu : le parti populiste de droite, LDPR, de Vladimir Jirinovski, arrive en tête suivi du parti présidentiel, le choix de la Russie et du PC. Le nouvel État fédéral connaît une crise d’ampleur avec la première guerre de Tchétchénie (1994-96). La violence dans la république sécessionniste est immense, notamment contre les civils : bombardements de villes et villages, torture. Elle est encore pourtant large-ment couverte par la presse.L’hypothèque d’un retour au pouvoir des communistes est définitivement levée lors des élections présidentielles de juillet 1996. Après une campagne très tendue, Boris Eltsine remporte l’élection avec 53,82 % des voix contre le chef des communistes Guenadi Zyuganov. C’est le dernier mandat d’un Eltsine de plus en plus affaibli par la
maladie et l’alcool. L’entourage du pré-sident, la « Famille », apparaît comme corrompu, accusé de détournement de fonds par le FMI, et devient très impopulaire. Eltsine cède le pouvoir à Vladimir Poutine en décembre 1999 après avoir négocié une immunité à vie.
Une société mouvanteLes années Eltsine sont une période de grande pauvreté. Le nombre de Russes vivant en dessous du mini-mum de subsistance fluctue au cours des années 1990 entre 20 et 30 %, les plus âgés sont directement touchés. Les différents indicateurs de bien-être social sombrent dans le rouge : espé-rance de vie, alcoolisme, taux de nata-lité. Seules, l’entreprise (qui fournit des aides en nature, par exemple) et l’en-traide familiale permettent à la société de tenir. La privatisation des logements à titre gratuit depuis fin 1992 permet à une partie des habitants de se consti-tuer un patrimoine, tout en renforçant certaines inégalités. La criminalité devient de plus en plus visible, vio-lente et connaît une hausse specta-culaire. Toutefois, les années Eltsine apportent aussi de nouvelles opportu-nités pour des classes moyennes qui émergent peu à peu. Les modes de consommation des urbains changent progressivement dans une Russie qui s’ouvre au monde : voyages, restau-rants deviennent des pratiques de plus en plus accessibles même si cela ne concerne qu’une minorité de Russes.
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Espérance de vie à la naissanceen 1994, par région (années)
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8283 - 3c. Espérance de vie à la naissance en 1994
ESPÉRANCE DE VIE À LA NAISSANCE EN 1994
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8283 - 2g. Évolution du PIBet de l’activité économique(1991-1999)
ÉVOLUTION DU PIB ET DE L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE (1992-1999)
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http://www.gks.ru
CouvertureLes Auteurs - CopyrightPage de TitreSommaire Atlas historique de la RussieIntroduction Générale : Quand l’histoire de la Russie commence-t-elle ?Le territoire russe en expansionLe pouvoir et l’Église orthodoxe
L’Empire russeLes villes soviétiques à l’heure de l’industrialisationLa Russie en crises
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