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Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse
Mémoire de Master 2 Stratégie du développement culturel :
Public de la culture et communication 71ème section
« Le spectateur 2.0, nouvel enjeux de la
communication culturelle »
Etude des publics de
Sous la direction du Madame Virginie Spies Annexes disponibles par mail : amandinevb@gmail.com
Amandine Vicente-Biosca
2009 - 2010
1
2
REMERCIEMENTS
Je remercie tout d’abord l’équipe de la Scène nationale de Cavaillon (Magali, Anne,
Anne-Marie, Marcel, Jean-Claude, Nathalie, Bruno, Jean-Luc, Julien) sans qui ce mémoire
n’aurait pas été possible. Je tiens à saluer l’accueil généreux et sympathique qui m’a été réservé et
qui m’a permis de mener une enquête sociologique dans d’excellentes conditions, notamment
grâce à Jean-Michel Gremillet, qui s’est fait le relais de mon travail à maintes reprises auprès du
public de la Scène nationale, je le remercie également de m’avoir permis d’intégrer l’équipe de la
Scène nationale. Je remercie également les spectateurs de la Scène nationale qui ont accueilli avec
enthousiasme mes démarches, et qui se sont prêtés au jeu de l’entretien, et merci à Martine
Grégoire, Claire Duret, Laurence Lauretta, et Bénédicte Battistella.
Je tiens tout particulièrement à remercier l’équipe des relations publiques, Esther Gonon,
Vincent Jean, David Chauvet et Maia Heintz avec qui j’ai pu partager le quotidien durant quatre
mois, et pour la confiance dont ils ont fait preuve à mon égard ainsi que des nombreuses
réflexions qui m’ont permis de construire ce mémoire.
Je remercie Virginie Spies d’avoir suivi mon travail cette année, pour ses conseils avisés
et de la confiance qui m’a été accordée.
Je remercie Camille Jutant et Mickael Bourgatte pour leurs conseils, leurs corrections,
leurs encouragements et le temps qu’ils m’ont accordés malgré leur obligation professionnelle
respective. Un grand merci à Maurice, Liliane et Coralie Immelé, pour leur patience et le temps
qu’ils ont consacré à la correction et la relecture de mon travail.
Enfin un remerciement tout particulier à ma mère et mon père pour leur confiance, à ma
fratrie, à mon tendre Thomas, à Anne-Sophie Maurel pour nos séances de travail et de réflexion
souvent riche, à mes amis et camarades de promotion master SDC PCC 2009/2010 qui m’ont
toujours encouragée, et m’ont enrichie de leurs réflexions, et qui également ont fait preuve tout au
long de cette dernière année de disponibilité, de conseils et d’une aide bien souvent précieuse, et
sans qui rien m’aurait été possible. Je leur dédie ce travail.
3
Sommaire Introduction 4
1- Problématique et hypothèses 4
2 - Méthodologie 5
2- 1 – Définition des mots clés 5 2- 2 – Le choix de l’enquête sociologique 7
2- 2- 1 – Définition de la population 7
2- 2- 2 - Le questionnaire auto-administré sur les lieux 8
2- 2- 3 - Le questionnaire via le site internet 9
2- 2- 4 - Les entretiens individuels 9
3 - Présentation des documents de communication de la Scène nationale de Cavaillon 10
3- 1 - Le Chut 10
3 - 2 - Le programme de salle 11
3- 3 - Feuille de salle 11
3- 4 - L’Affichage publique 12
3- 5 - Le site internet 12
Première partie : La mise en scène de l’information 13
I- Communiquer dans le milieu culturel, l’exemple de la Scène nationale de Cavaillon. 13
1- Quelle communication et pourquoi ? 13
1-1 Comment communiquer ? 13
1-2 La médiation culturelle 13
2- Quel média utiliser ? 14
2-1 Le rôle des relations publiques 14
2-2 – Une communication « hors média » 14
2-3- Les points de diffusion 15 2-4- Les outils de la communication de la Scène nationale 15
2-4-1- Le livret de saison 15
2-4-2- Le document Nomade(s) 16
2-4-3- Les toiles 16
2-4-4- Les Kakémonos 16
2-4-56 Le site Internet 16
3- Quel public viser ? 20 3-1 Le public du spectacle vivant 20
3-2- un public marketé 20
4- La Culture est-elle un marché à part entière ? 21
4-1- Le modèle économique de la création artistique : « La loi Baumol » 21
4-2 - Le marché de l’art 22
4-2-1 Les cinq principes du marché de l’art 22
4-2-2- Les biens culturels et leurs spécificité 23
4
5- Le 21ème siècle : l’aire de la communication transversale 24
5- 1 - L’émergence d’internet 25
5-2- Les années 1990 25
5-3- L’ère 2000 26
5-4- Les six principes du développement du Web, Selon Francis Pisani et Dominique
Piotet 27
5-5- L’éclatement de la bulle 27
6- Le Web 2.0 : l’utilisateur au cœur du système 28 6-1- Le mythe du Web 2.0 par Tim O’Reilly 28
6-2- Le web 2.0 : Une plateforme de données mondiale 29
6-3- L’intelligence collective 29
6-4- Les base de données 29
6-5 : L’internaute au cœur du système 30
7 – Les médias sociaux, un nouveau média à la portée de tous ? 31
7-1 - Les Médias sociaux : qu’est ce que c’est ? 31
7-2- Les médias sociaux : une multitude d’outils 31 7 -3- L’exemple Twitter 33
7-4 – Les médias sociaux, des médias à 100 à l’heure. 33
7-5- La success story Facebook 34
8-Les médias sociaux, la communication du futur ? 35
8-1- Un média à moindre cout 35 8-2- Un média offrant des possibilités de communication diverses 36
8-3- Les médias sociaux en chiffres 38
II - Le spectateur, un nouveau statut 40 1-Qu’est qu’un spectateur ? 40
1-1 – Historique 42
1-2- Le spectateur moderne 45
1- 3 – Pourquoi ce changement ? 47 1-4- Le spectateur vis-à-vis des nouvelles technologies 48
1-5- Le modèle du Blog 50
2- L’évolution du statut du spectateur : Qui est à l’origine du changement ? 53
2- 1 – Le spectateur au pouvoir de l’expression de ses ressentis 53
2- 2 – Les institutions à l’impulsion de ces changements 54
2-3- Le Web 2.0, ou le spectateur libre. 55
3- Du spectateur au « spect-acteur » 57
3- 1- « webacteurs », spectateurs 2.0 même combat ? 58
3- 2 – L’art numérique, le spectateur 2.0 au centre de la création. 59
3-2-1- L’Exemple de l’Hybrides Festival 60 4-L’émergence d’un nouveau public est-il réellement possible ? 63
4-1- La Fracture numérique 63
5
Deuxième partie : Le spectateur est-il l’enjeu au cœur de la communication 2010 ? I - L’évolution de la communication de la Scène nationale 64
1 - Présentation de la Scène nationale de Cavaillon 64 1-1- Historique du Théâtre 64 1-2- Les missions de la Scène nationale 65
1-3- Le projet du directeur 65
1- 4- La programmation 66
2 - Analyse comparative 67
2- 3 Le lien entre institution et spectateur 67
2- 1 Figure de l’institution 67
2- 2 Figure du spectateur 68
2- 3 Le lien entre institution et spectateur 69
3- Quel fut les évolutions majeures de la communication depuis cinq ans ? 70
II – Les publics de la Scène nationale : « Les pratiques numériques des spectateurs de la Scène
nationale de Cavaillon » 72
1- La population du Théâtre 72
1- 1 - Le public 72
1- 1- 2 – Le questionnaire auto-administré 72
1-1- 3 – Le questionnaire web 74
1-1 -4 – Les entretiens individuels 75
2 – Quelles connaissances les spectateurs de la Scène nationale
possèdent-ils des nouvelles technologies du numérique 76
2- 1 – quelles sont les attentes des spectateurs de la scène nationale ? 76
2-1-1 – Ce que recherche les spectateurs dans la communication
d’une structure culturelle 77
2-1-2 La communication numérique : www.theatredecavaillon.com 78
3– Est-il nécessaire de repenser la relation entre public et structure culturelle ? 79
3-1 – Comment impliquer le spectateur dans le fonctionnement d’une
Structure culturelle 82
3-1-1- Comment constituer un groupe de spectateurs ? 82
3-1-2- L’association 82
3-1-3- Le mécénat 83
3-1-4- Quel modèle pour la Scène nationale ? 83
Conclusion 84
Résumé 85
Summary 86
Bibliographie 87
Table des figures 95
Annexe 96
Sommaire des annexes
6
7
Introduction
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication font, de nos jours,
parties de notre quotidien, que ce soit dans un but personnel ou professionnel. Le web en tête de
file, nous notons que plus de deux internautes sur trois (67%) se connectent tous les jours, ou
presque, à Internet en dehors de toutes obligations liées aux études ou à l’activité
professionnelle1.Ce nouveau média en l’espace d’une dizaine d’années est devenu le média le plus
influent du monde.
Nous avons donc à faire ici à une réelle révolution sociétale, plus que de simples gadgets,
le web a modifié le comportement des individus que ce soit dans leurs façons de s’exprimer, de se
montrer ou alors de consommer. Le monde entier se tient à quelques clics de chaque individu, qui
possède au bout des doigts un savoir infini, qui peut le positionner dans une posture de
connaisseurs-amateurs, grâce aux savoirs que lui procure désormais Internet.
1 - Problématique et hypothèses
Sans doute, ici nous nous pencherons sur le web, mais dans un milieu qui semble a priori
inaccessible et qui doit pourtant prendre en compte la dimension de la tornade Internet qui offre
un spectacle vivant à la portée du public. En prenant appui sur des spectateurs définis nous avons
choisi ceux de la Scène nationale de Cavaillon.
En quoi les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont-elles
transformé la communication des institutions culturelles ? : prenons donc l’exemple de la Scène
nationale de Cavaillon.
Les hypothèses qui animent ce sujet sont qu’avant tout ces nouvelles technologies ont fait
évoluer la communication des structures culturelles, que tous ont dû, à l’usage, se mettre au web
pour communiquer car il est important de suivre les évolutions de la société pour ne pas donner
une image arriérée de sa structure.
Cependant il est important de savoir si les spectateurs, eux, sont prêts à suivre ces
mutations, ou s’ils restent fidèles à ses pratiques antérieures. C’est alors un nouveau public qui
1 P 56, pratiques culturelles des français, DEPS, Ministère de la Culture et de la Communication, 2009
8
vient se greffer à l’ancien et créer un nouveau type de spectateurs ou plutôt de webacteurs2. La
mutation de ce public qui peut légitimement être jugée, notée, permet de commenter des
prestations, des travaux de réflexions de grands noms de la création, des amateurs qui se mettent
alors au niveau des individus reconnus dans la profession.
Ce spectateur a t’-il une réelle légitimité ? Quel est aujourd’hui réellement son statut,
comment le prendre en compte dans une structure culturelle, la création en subit-elle les
conséquences ?
Voila donc les fils conducteurs de ce travail qui nous aideront à mettre en évidence les
mutations engendrées par ces nouvelles technologies qui nous fascinent autant qu’elles nous
inquiètent.
Il est nécessaire de mettre en avant un élément pratique lié à notre sujet, étant donné le
thème que nous avons choisi de traiter : le web 2.0 est au cœur de toutes les réflexions. Nos
nombreuses sources sont issues d’Internet (blogs, articles, forums, présentations, colloques,…).
Et certaines des théories que nous avancerons sont des théories, officieusement, acceptées par
tous, et reconnues comme légitimes mais qui n’ont pas de version officielle telles que l’on peut les
retrouver dans des ouvrages de référencement. Cependant il s’agit de sources sur des réflexions
poussées et de concepts très clairement définis. Il est important de préciser ce point, dés le début
de notre travail afin d’être le plus compréhensible possible dans la rédaction de ce mémoire.
2 – Méthodologie
2- 1 – Définition des mots clés
Avant d’entrer au cœur de la réflexion menée dans ce mémoire qui passe notamment par
l’argumentation du choix de l’enquête comme outil d’analyse des pratiques des spectateurs, nous
allons définir les mots clés qui ont guidé nos recherches et qui seront présents tout au long de
celui-ci à utiliser
2 « Le webacteur ou spectateur 2.0, est un individu qui choisit de prendre le contrôle de ses opinions, de ses
savoirs et les diffusent sur Internet. Ce sont eux qui créent une grande partie des contenus du web » .Comment le
web change le monde, l’alchimie des multitudes, Pearson (éducation) France, Paris, 2008,
9
Tout d’abord définissons les technologies de l’information et de la communication (TIC),
définition tirée de La « société de l’information » : glossaire critique, page 134, Françoise Massit-
Folléa. « L’expression TIC ou Techniques de l’Information et de la Communication » est ainsi
conçue et comprise comme un jugement de valeur positif sur ces techniques, sur leur capacité, à
changer la vie des hommes3. D’une part en étant porteuse de sens, une société serait caractérisée
par les techniques qu’elle emploie, d’autre part, en étant génératrice de sens l’écrit d’écran,
l’interactivité, la dématérialisation de l’information feraient appel à des capacités cognitives
inédites dans l’utilisation des nouveaux supports ; celles-ci transformeraient de facto les modes
d’actions et de représentations. Dans le prolongement définissons ainsi la communication sous
quatre angles d’attaques car par communication, il faut entendre essentiellement quatre
phénomènes complémentaires qui vont bien au-delà de ce que l’on entend souvent par
communication identifiée généralement aux médias.
La communication est d’abord l’idéal d’expressions et d’échanges qui est à l’origine de la
culture occidentale, et par la suite de la démocratie. Elle présuppose l’existence d’individus libres
et égaux. On devine les terribles batailles, menées dès le XVIIe siècle, pour asseoir ces concepts
inséparables du concept de modernisation. C’est aussi l’ensemble des médias de masse (ou « mass
media ») qui, de la presse à la radio et à la télévision, ont considérablement bouleversé en un
siècle les rapports entre la communication et la société.
C’est également l’ensemble des nouvelles techniques de communication qui, à partir du
mariage de l’informatique et des télécommunications (ou Télématique, depuis le rapport « Nora-
Minc » sur « l’Informatisation de la société »), de l’audiovisuel et de leur interconnexion,
viennent en moins d’un demi siécle de modifier les conditions d’échanges, mais aussi de pouvoirs
au niveau local, régional, national et mondial. Ce sont enfin les valeurs, symboles et
représentations qui organisent le fonctionnement de l’espace public au niveau des masses dans les
démocraties, et plus généralement de la communauté internationale à travers l’information, les
médias, les sondages, l’argumentation et la rhétorique, c’est –à – dire tout ce qui permet aux
collectivités de se représenter, d’entrer en relation les unes avec les autres, et d’agir sur le monde
d’après la définition de Dominique Wolton, in La « société de l’information » : glossaire
critique). Nous avons choisi cette définition détaillée car comme la communication, elle est le
socle fondamental de notre réflexion, et nous avons plébiscité précisément cette définition qui
aborde, à l’image d’un prisme, toutes les facettes de cette derniére.
3 Voir l’ouvrage d’Yves Jeanneret, Y-a-t-il (vraiment) des technologies de l’information ? , Septentrion, 2007
10
Enfin, le dernier mot clé qu’il est important de définir, est celui de « réseau », dans la
définition que nous allons donner pour étayer notre argumentation. Nous avons, ici, conjointement
la définition d’un réseau ainsi que celle du web, qui est également un point d’appui important
dans ce travail. Prenons pour premiére définition qu’un réseau est un ensemble de points ou
d’objets reliés entre eux par des liens […] Il existe de multiples sortes de réseaux. Les
technologies de l’information et de la communication ont produit un réseau extrêmement
complexe, le World Wide Web (W.W.W), sur l’internet. C’est un réseau qui relie essentiellement
des informations, des « pages web » qui sont généralement « multimédia » ; elles sont reliées
entre elles par des « liens » qui correspondent pour l’utilisateur à des clics de la souris. L’Internet
est donc d’abord un réseau de documents multimédia, et par conséquent un réseau d’informations.
C’est aussi un réseau complexe, qui ne cesse de s’enrichir et d’évoluer, et dans lequel il n’est pas
aisé de circuler. […] on parle de « réseau technologique » pour désigner les mécanismes, les
outils informatiques, de « réseau sémantique » (relations, liens, stratégies,…), de « réseau
humain » (interactions entre personnes). L’organisation des informations en réseau et le
développement de réseaux humains influent sur les démarches intellectuelles et sur les relations
sociales. Notre monde moderne hyper industrialisé et siège de la « technétronique » a tendance à
s’organiser de plus en plus autour de ces réseaux ; la place croissante qu’occupe l’Internet en est
une des manifestations frappante4.
Comme suite à ces définitions, nous pouvons donc mesurer aujourd’hui l’ampleur des
interconnexions entre chaque fait social, désormais l’Internet est le facteur, le lien, qui relie tous
les éléments qui les transforment en un réseau. L’Internet est en fait devenu aujourd’hui le
« Réseau des réseaux » dans un « village global » ou « global village » selon la terminologie de
Mac Luhan5. La communication devient alors un lien de plus qui contribue à agrandir, à accroître
la « toile » de ce « Réseau », donc, qui ne connaît pas, a priori, de limites [maintenant du moins].
2- 2 – Le choix de l’enquête sociologique
2- 2- 1 – Définition de la population
L’enquête a eu lieu entre le 20 avril 2010 et le 7 mai 2010, la réalisation de l’enquête s’est
faite par questionnaire auto-administré et par questionnaire via le web. L’échantillon est composé
de 364 réponses (244 papiers et 120 web), deux cent soixante deux femmes et quatre vingt cinq
4 Bernard Cornu, La « société de l’information » : glossaire critique, La documentation française, Paris, 2005, p121 5 Mac Luhan, War and Peace in the global Village, Bantam Books, New York, 1967.
11
hommes, la population de l’échantillon contient des individus de toutes catégories socio
professionnelles ou (CSP) avec notamment une dominante de personnes retraitées et d’étudiants.
L’échantillon ne sépare pas les abonnés du théâtre et les non abonnés. Nous avons choisi de
constituer un échantillon représentatif de 350 personnes en vue du nombre d’abonnés et des
jauges, de la capacité du théâtre et des tournées Nomades6.
Elle s’est déroulée en plusieurs temps, premièrement du 20 avril 2010 au 7 mai 2010 par
la remise d’un questionnaire papier au sein du Théâtre lors de diverses prestations (Cabaret, Le
magaSin, 10 millions de km², Sinfonia Eroica) ainsi qu’en territoire Nomades lors de la tournée de
« La bête à deux dos » (Gadagne, Oppéde, Joucas, Mérindol). Simultanément une enquête web,
contenant le même questionnaire, mais en version numérique, a été diffusé sur le site Internet de
la structure ainsi que par l’envoi des lettres d’informations mensuelles voire hebdomadaires
(semaine du 26 avril notamment).
2- 2- 2 - Le questionnaire auto-administré sur les lieux :
Nous avons opté pour la réalisation d’une enquête sociologique afin de connaître les
pratiques numériques des spectateurs de la Scène nationale ainsi que leurs attentes vis-à-vis du
site Internet de la structure et en vue de la mise en ligne d’un espace personnel.
Le questionnaire a été divisé en quatre parties, elles mêmes organisées en sous parties.
Dans un premier temps il sera question de se pencher sur le lien entre la structure et son
public. C’est-à-dire que nous traiterons d’abord de la connaissance du lien qu’a le spectateur, et de
sa fréquentation, et quel type de représentations il plébiscite en interagissant avec la Scène
nationale (question 1 à 7). Ce premier temps nous permettra de placer le spectateur au sein de la
structure, en comprenant « l’affect » qui le lie à elle.
Dans un second temps, cette partie est consacrée aux connaissances qu’ont les spectateurs
des nouvelles technologies de l’information et de la communication (question 8 à 26). Quelles
sont leurs pratiques culturelles, la façon dont ils se comportent vis-à-vis de ces nouvelles
technologies, leur implication sur la « toile » et ce qu’ils attendent d’une structure culturelle d’un
site Internet. En même temps, nous questionnerons la perception de la critique, dans le but
d’analyser l’implication du public, la manière dont il s’exprime et comment il communique sur
6 Représentations décentralisées sur différentes communes de la région.
12
ses ressentis autour du spectacle. Cette interrogation intervient dans l’optique du développement
d’un espace collaboratif, en tentant d’évaluer les attentes des spectateurs.
La troisième partie, est le fruit d’une demande de la structure qui souhaite développer le
covoiturage. Les questions, (entre la question 27 et la question 30), interrogeront donc le
spectateur sur sa vision du covoiturage et de ce qu’il en attend.
Enfin, dans un dernier temps, le questionnaire se termine avec des items sur les critères
sociaux (31 à 33) qui serviront à classer les publics selon des critères d’âge, de sexe, et de
situation professionnelle. Ainsi nous pourrons avoir une typologie sociale des publics de la
structure. Le questionnaire et l’intégralité des réponses seront disponibles en annexe 1 de ce
mémoire.
2- 2- 3 - Le questionnaire via le site internet
Le questionnaire via le site Internet Limesurvey7 répond aux mêmes critères que le
questionnaire papier, les questions sont les mêmes, seul le mode de passation diverge. Cent trente
personnes environ ont répondu au questionnaire en ligne. Nous avons réussi à obtenir dans un laps
de temps réduit (deux semaines) un grand nombre de réponses grâce à l’implication de la Scène
nationale dans le projet. Ainsi un encart a été inséré dans les lettres d’informations du mois de
mai, et dans celle de la dernière semaine d’avril. De plus une rubrique intitulée « Amandine mène
l’enquête » est restée sur la page d’accueil du site Internet de la Scène nationale de Cavaillon
durant trois semaines8. Cela nous a permis de toucher un public d’habitués du site Internet mais
aussi les abonnés de la lettre d’information du théâtre qui ne se rendent pas souvent sur le site
Internet.
2- 2- 4 - Les entretiens individuels
Ces différents modes de passation, ont permis la réalisation d’entretiens individuels des
personnes qui, ayant répondu au questionnaire, se sont spontanément portés volontaires pour cet
exercice. Malheureusement la difficulté des entretiens individuels réside dans le fait qu’il est
difficile de réellement aboutir à l’interview (emploi du temps, contretemps, désistement,…).
7L’adresse web du questionnaire : http://www.theatredecavaillon.com/limesurvey/index.php?sid=11335&lang=fr*
8 Encarts présents sur le site Internet du théâtre :
http://www.theatredecavaillon.com/limesurvey/index.php?sid=11335&lang=fr*
13
Nous avons pu, cependant, réaliser quatre entretiens, même si l’échantillon est faible, ils nous ont
permis de faire émerger des points communs dans les pratiques et les usages de chacun. Le temps
qui nous a été imparti ne nous a pas permis d’avoir un panel plus étendu.
Ce que nous voulions, lors de ces entretiens, c’était d’avoir plus d’explications, des détails sur la
perception des spectateurs-internautes de la Scène nationale. Nous souhaitions alors plus
précisément voir comment ils vivaient avec Internet et quelle était leur utilisation concrète, afin
d’étayer et d’enrichir notre analyse des questionnaires9.
9 Le guide des entretiens est disponible en annexe 2.
14
3 - Présentation des documents de communication de la Scène nationale
3- 1 - Le Chut10
Accueillir des spectateurs au Théâtre relève des missions d’une Scène nationale. Cela
répond en premier lieu à ce que l’on nomme « l’élargissement des publics », c’est-à-dire la
volonté politique de faire découvrir la création contemporaine dans le domaine du Spectacle
Vivant à des individus pour lesquels la fréquentation des théâtres n’est pas une démarche
spontanée. Au-delà de ce principe, il s’agit de développement de l’individu, d’intégration sociale,
de citoyenneté, elle recentre la proposition artistique autour d’un enjeu social et humain.
Ce magazine est publié par l’Association du Théâtre de Cavaillon / Scène nationale. Le
responsable de la publication est Monsieur Jean-Michel Gremillet, directeur de la Scène nationale.
Le rédacteur en chef, Jean-Claude Herbette. Ce périodique est rédigé par l’équipe du théâtre et
quelques journalistes locaux. Le tirage de ce magazine est en moyenne fixé à 11.000 exemplaires,
et, est diffusé gratuitement au public, à la presse et aux professionnels, tous les deux mois environ,
en complément d’informations, détaillant de façon plus précise, les spectacles et l’action culturelle
proposés par la Scène nationale de Cavaillon. La distribution sur le territoire est large, et tente de
toucher différents publics, ruraux ou citadins.11
3- 2 - Le programme de saison
Après le Chut, nous avons voulu également analyser la communication de la Scène
nationale de Cavaillon à travers, selon nous, l’aspect le plus sollicité par le public : le programme
de saison. Le choix s’est porté sur le programme de la saison 2009/2010, il comporte soixante six
pages, et fut réalisé par l’agence Anonymes, avec les visuels des compagnies présentes pendant la
saison, et par la Compagnie associée les Skappa ! Les vingt premières pages sont consacrées à la
présentation de la structure, de ses actions, des abonnés, du site Internet, Les spectacles sont
présentés sur une page simple ou double car elles sont toutes sur le même modèle ; une image, le
titre du spectacle, un texte de présentation, la compagnie (réalisateur, metteur en scène,
interprètes) et les dates des représentations. Une grande attention est portée à la qualité des
visuels. De plus lorsqu’il s’agit d’un spectacle décentralisé (Nomades) on retrouve en évidence
sur la page de garde le logo Nomades, il en est de même pour les spectacles à l’attention du jeune
10
Un exemplaire du Chut, disponible en annexe 3. 11
Points de distribution du Chut en annexe 4
15
public. Le programme prend fin à la page soixante deux, pour laisser les indications de la
tarification et des informations pratiques dans les deux dernières pages.
3- 3 - Feuille de salle
Il nous a semblé pertinent d’analyser également le modèle d’une feuille de salle, car c’est
ce média qui est venu remplacer le Chut, il s’agit d’une feuille A4 format paysage pliée en deux,
un feuillet de quatre pages. La feuille de salle est distribuée par les membres de l’équipe de la
Scène nationale avant chaque spectacle que ce soit jeune public, tout public, ou Nomades. Le
théâtre tient beaucoup à ce moyen de communication. Nous retrouvons dans la feuille de salle, de
courts textes sur le spectacle, ou la compagnie concernée, ainsi que des photos, et les informations
générales sur la Scène nationale en quatrième page de couverture. Ce document est réalisé par
Jean-Claude Herbette, chargé de la communication avec le logiciel Indesign. Il s’agit d’un
document interne à la structure et de portée originale pour chaque représentation (annexe 5). Il
présente le spectacle aux spectateurs ce qui leur permet d’établir, tout en s’installant dans la salle,
un contact avec l’univers très particulier du théâtre et du spectacle nouveau qu’ils se préparent à
voir. De nombreux spectateurs (cf. : voir entretiens individuels) gardent ces feuilles de salles,
comme des objets de collections.
3- 4 - L’Affichage publique
L’affichage public est le moyen de communication le plus visible et le plus traditionnel de
la Scène nationale. Pour cela nous avons choisi de comparer deux affiches, celle de Kerne12l,
spectacle présenté durant la saison 2009/2010 et l’affiche Des Sublimes13, spectacle présent au
Théâtre lors de la saison 2004/2005. Nous pourrons ainsi visualiser en quoi le théâtre de Cavaillon
a fait évoluer son affichage public, et en quoi cela peut-il également montrer une évolution du
public visé. Nous nous focaliserons donc principalement sur les points de diffusion afin de mettre
en avant le public ciblé par cette communication.
3- 5 - Le site Internet
Enfin le dernier document est fourni pour essayer de comprendre et d’analyser l’évolution
de la communication de la Scène nationale, et de la relation induite avec son public, et par le fait
même avec le site Internet de la structure fondée en 1999. Ainsi, celui-ci a beaucoup évolué au fil
12
Voir Annexe 6 13
Voir Annexe 7
16
des années jusqu’à être, en 2010, sélectionné par le ministère de la Culture et de la
Communication comme projets culturels innovants. Totalement en phase avec le but de notre
mémoire, nous tenterons, donc, de présenter brièvement et concrètement l’arborescence du site
Internet en 2010, les objectifs et les buts que le théâtre s’est fixés, et en quoi ces nouvelles
dispositions modifient la place et le comportement du spectateur au sein de la Scène nationale.
17
Première partie : La mise en scène de l’information
I - Communiquer dans le milieu culturel,
l’exemple de la Scène nationale de Cavaillon
1- Quelle communication et pourquoi ?
1-1 Comment communiquer ?
Il s’agit d’abord d’un idéal, d’expressions et d’échanges, qui est à l’origine de la culture
occidentale14, ici nous définissons la communication comme l’ensemble des techniques de
communication, qui à partir de l’informatique, des télécommunications, de l’audiovisuel et de leur
interconnexion, viennent en moins d’un demi siècle de modifier les moyens d’échanges15. Dans le
cas de la Scène nationale de Cavaillon nous pouvons dire qu’il s’agit d’une communication
institutionnelle, il n’est pas question à titre nominatif de vendre un bien mais plutôt d’offrir à sa
« cible », son public un bien et un savoir immatériel. Ici le concept d’ethos repose sur l’idée qu’à
travers l’énonciation se montre la personnalité de l’énonciateur : la lecture fait émerger une
instance subjective qui joue le rôle de garant de ce qui est dit. Comme le dit Roland Barthes, «
L’orateur énonce une information et en même temps il dit : je suis ceci, je ne suis pas cela. »16
A travers les discours tenus dans ses différents supports de communication, le Théâtre de
Cavaillon se construit et dévoile une certaine personnalité, une image, et des valeurs. De façon
subjective nous appuierons donc nos réflexions et nos analyses sur la communication d’un lieu
unique, celui qui est l’objet de l’ensemble des réflexions menées dans ce mémoire, la Scène
nationale de Cavaillon, même s’il s’agit d’une structure culturelle publique et institutionnelle17,
chaque communication émanant d’un lieu reste convergeant vers de mêmes idéaux en fonction de
chaque lieu, comme il est stipulé plus haut dans le texte.
14 Dominique, Wolton, La « société de l’information » : glossaire critique, la documentation française, 2005, p46 15
idem 16
Roland, Barthes, L’ancienne rhétorique. In : Communications, no 16. 1966. 17Cf. Page 63.
18
1-2 La médiation culturelle.
La terminologie communication peut se confondre avec celle de médiation, dans le milieu
culturel que ce soit un spectacle vivant, muséologie, ou art plastique ce terme étant généralement
plébiscité. Comme le résume Yves Jeanneret18 « …le terme « médiation » connaît un succès sans
précédent. Il est omniprésent dans l’analyse scientifique (sociologie des médiations, sciences
politiques, sciences de l’information et de la communication) mais aussi dans la vie politique
(médiateur de la République) médiatique (médiateur du Monde, hebdo du médiateur), culturelle
(médiateurs scientifiques, médiation culturelle), sociale voire policière (médiateurs urbains). »
Au vu de la popularisation de ce terme et de la confusion qu’il existe entre communication et
médiation dans l’art, il nous a semblé plus approprié d’éclaircir et de mettre en avant ce terme qui
reste dans l’inconscient collectif plus humain.
Nous allons désormais aborder les différents modes de communication plébiscités par
Jean-Michel Gremillet et son équipe.
18 p 105, La « société de l’information » : glossaire critique, la documentation française, 2005
19
2- Quel média utiliser ? Comme le dis Jean Caune, dans son ouvrage Culture et communication, convergences
théoriques et lieux de médiation : « Les archipels dans lesquels se répartissent les objets de
discours, leur conditions dénonciation, les concepts et les thématiques relatifs aux pratiques
culturelles et aux processus de communication sont bien souvent cartographies et étudiés à partir
de « règles de formation » voisines et imbriqués. Celles-ci constituent des conditions d’existence,
mais aussi de coexistence, des discours sur la société de communication ». Il est important de
préciser que depuis les années 1990 grâce à la convergence entre informatique, audiovisuel et
télécommunication, des phénomènes d’industrialisation, de mondialisation des industries des
contenus, d’utilisation des manifestations culturelles dans des stratégies de communication
institutionnelle ont créés une amplification des recoupements entre processus de communication
et phénomènes culturels.
2-1 Le rôle des relations publiques.
Se pose alors la question quel média utiliser pour développer son image, son
ethos. Comme il l’a été dit auparavant la communication de la Scène nationale de Cavaillon
repose sur quatre membres actifs, pour ce qui est de la communication papier elle est à la charge
de Jean-Claude Herbette, responsable de l’information ; son travail consiste à gérer et à créer en
accord avec l’agence de communication visuel Anonymes19 et le contact avec la presse
quotidienne régionale20 (PQR) et la presse nationale21.
Les trois autres membres sont, eux, en charge d’une toute autre communication aussi
importante. Ainsi ces relations publiques ont pour mission de développer la visibilité du Théâtre
dans les médias et dans des secteurs définis. David Chauvet chargé des relations avec le monde
scolaire est en charge et en lien étroit avec celui-ci. Maia Heintz chargée des Nomades22 a, quant à
elle, pour mission d’être le relais auprès des élus et des publics locaux. Enfin Vincent Jean, chargé
des relations et de la communication en ligne, sa mission consistant, ici ,à faire croître la présence
du théâtre sur le net, en utilisant tous les moyens qui sont à sa disposition grâce aux Nouvelles
Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC). En vue du développement et la
19 Agence Anonymes : 56 r Joseph Vernet 84000 AVIGNON, mail : lb@agence-anonymes.com 20 La Provence, Midi Libre, Zibeline, fanz'yo, Yoyo, César, Karwan 21 Télérama, La Lettre du Spectacle Libération, Le monde, Les Inrocks, Danser, La terrasse, Mouvement 22 Noms donnés à l’action de décentralisation culturelle de la Scène nationale de Cavaillon.
20
place croissante apportée aux médias sociaux23 ce poste est enclin à prendre une place dominante
dans la communication d’une structure qu’elle quelle soit.
2-2 – Une communication « hors média »24
Ces trois dernières personnes sont en charge de ce qu’on peut nommer la communication
hors média, l’action communicationnelle ne consiste pas en une action de création de biens
matériels. Les relations publiques définies comme un ensemble de techniques de communication
destinées à donner une image favorable à une personne ou une organisation publique ou privée,
développer une relation de confiance, d’estime et d’adhésion entre une entreprise, une marque et
de multiples publics25. Au sein du Théâtre de Cavaillon, la place est largement donnée aux
relations publiques et à leurs actions, même si cette place reste subjective et enclin aux volontés
de sa structure, il en est un acteur de poids qui peut être considéré comme un gage d’implication
auprès des publics.
L'entretien de contacts réguliers avec les médias et l'information régulière du public ou de
personnalités ciblées sous forme notamment de bulletins d'informations (exemple Newsletter) font
partie quotidienne des enjeux des relations publiques. Maintenant que nous avons présenté le
mode de fonctionnement de la Scène nationale de Cavaillon en terme de communication, nous
allons détailler les différents moyens de communication qui sont utilisés par le Théâtre, car il
important, pour comprendre une structure, d’appréhender sous tous les angles la force et la
diversité de l’offre que l’institution propose à son public.
2-3- Les points de diffusion
Avant de détailler les outils de communication mis à disposition du théâtre nous nous
intéresserons aux points de diffusion des documents conçus par la structure, les lieux étant
identiques pour tous les documents, exceptés pour ceux des documents Nomades : le premier lieu
est la ville de Cavaillon, territoire privilégié, notamment grâce à sa mise à disposition des
23 Les médias sociaux désignent un ensemble de services permettant de développer des conversations et des interactions
sociales sur Internet ou en situation de mobilité. http://www.mediassociaux.com/2009/06/29/une-definition-des-medias-
sociaux/ 24
La communication hors médias désigne l’ensemble des actions de communication qui ne passent pas par les médias
"traditionnels". Le hors medias comprend donc les actions de marketing direct mais également toutes les actions de
communications publicitaires alternatives (street marketing, PLV, évènementiel,...) . La distinction média / hors média est
traditionnellement utilisée pour ventiler les investissements de communication marketing, mais elle devient de plus en plus
floue. Jeanne Dancette, Léon F. Wegnez, Christophe Réthoré, Dictionnaire analytique de la distribution, PUM, 2000, p 127 25 Définition SynTec RP, Syndicat des entreprises françaises spécialisées en conseil en relations publiques.
21
panneaux sucettes municipaux, les communes environnantes (villes Nomades ainsi que Avignon
et sa région) en utilisant pour cela les affichages Decaux.
2-4- Les outils de la communication de la Scène nationale
a- Le livret de saison
Les outils de communication utilisés sont tributaires du déroulement de la saison à venir,
donc de la vie du théâtre, le premier document émis est l’invitation pour la présentation
saisonnière, qui clôture la saison précédente (3500 exemplaires26) il s’agit d’un document recto-
verso semi A4.
C’est à cette occasion que le théâtre communique le livret de saison (analyse détaillée
partie II), ce document est quant à lui produit au nombre de 35 000 exemplaires, il comprend de
soixante à cent pages selon le programme de la saison, par exemple, pour 2010 /2011 il contient
plus de cent pages27.
b- Le document Nomades
Ensuite, la parution des documents Nomades, sera déposée dans chaque commune
concernée par l’action publicitaire. Il est possible de retrouver par ailleurs l'intégralité des
documents Nomades dans le hall du théâtre. Un exemplaire du document Nomades est disponible
en annexe 8.
c- Les toiles
Le dernier document permanent est la toile
tendue sur la façade du théâtre à Cavaillon, cette toile
de 4 X 6 mètres reste affichée toute l’année, elle
reprend la page de couverture du livret de saison, cette
image représentera le théâtre et sa programmation.
Présente au premier plan sur le site, l’importance de sa
qualité est primordiale car il en va de la vision de la
Scène nationale par son public. Cet outil de
communication majeur est en place depuis trois années. Le visuel choisi est toujours celui de la
couverture du livret de saison.
Les documents suivants sont déployés, sur l’ensemble des lieux précités, deux semaines
avant une nouvelle représentation, chaque visuel est unique et en lien avec le spectacle, il s’agit
26 Le nombre d’exemplaires émis est indexé sur le plan de communication de la saison 2009/2010, disponible en Annexe 9 27 Description du livret de saison à retrouver en deuxième partie du travail.
22
souvent de l’image présente dans le livret de saison, les photos sont, soit des images transmises
par la compagnie, soit des images des artistes associés au théâtre, dans notre cas les SKAPPA ! 28.
Chaque image est transformée par l’Agence Anonymes en Avignon. Ces affiches sont diffusées
sur le territoire dans les panneaux sucettes, soit mis à disposition gratuitement par la mairie de
Cavaillon, soit par le biais des panneaux Decaux.
d- Les kakémonos
Plus récemment pour accompagner les représentations Nomades et dans la continuité de la
toile tendue sur le devant de la structure, le théâtre a choisi de créer
des Kakémonos29 , mis en place devant l’entrée des lieux
municipaux des représentations Nomades. Cela permet de recréer
un espace dédié aux spectateurs. Le spectateur comprend dès le
début du spectacle, qui le présente, et de quoi il s’agit. Cette
médiation a un impact énorme pour ce qui est de la visibilité du
théâtre sur de nouveaux territoires. Le visuel choisi est toujours
celui présent dans le livret de saison pour le spectacle
correspondant.
e- Le site Internet Comme nous l’avons dit précédemment le théâtre se positionne aussi sur les nouvelles
technologies. Ainsi une grande attention est portée au site Internet, il a été sélectionné par le
Ministère de la Culture et de la Communication comme service culturel innovant, dans le but de
concevoir des nouveaux espaces et de nouvelles médiations entre la structure et son public. De
grands noms comme Arte sont également issus de ce projet dans le courant de l’année 2010. Très
élégant et simple le site Internet est en accord total avec l’image que tente de transmettre le théâtre
toute l’année. Noir et rouge le site répond à la « règle des trois clics »30, et toutes les informations
se trouvent à moins de trois clics de souris de la page d’accueil.
L’arborescence est simple pour correspondre au plus grand nombre d’internautes avertis,
ou non, des nouvelles technologies. Dans la droite ligne du site Internet, une lettre d’informations
28 Skappa ! , la Friche de la Belle de Mai, 41 rue Jobin 13003 MARSEILLE 29 Terme signifiant « ce que l'on suspend » en japonais. Support de l'affichage. Bande plus ou moins large (mais étroite en
règle générale) en papier, en toile ou en plastique, que l'on déroule et suspend par son extrémité supérieure. 30
« La règle des trois clics (en anglais three-click rule) est, en conception web, un principe informel d'ergonomie selon
lequel l'internaute doit pouvoir accéder à n'importe quelle information présente sur un site web en suivant au plus trois
hyperliens (trois clics de souris) depuis la page principale. Elle est basée sur l'idée que le visiteur devient frustré s'il n'obtient
pas rapidement l'information qu'il recherche, et risque de quitter le site pour aller la trouver sur un autre ; ou qu'il risque
d'être distrait par autre chose ou d'oublier l'information qu'il cherchait sur le chemin qui le mène à elle, du fait du peu de
mémoire à court terme. » http://www.hobo-web.co.uk/seo-blog/index.php/3-click-rule/ « Tip 31: The 3 Click Rule of website
design », sur le site d'Hobo, le 1er février 2007.
23
hebdomadaire et mensuelle leur est envoyée. Elle comprend des images, du texte et des
informations complémentaires sur l’actualité du théâtre. Trois cents quarante personnes environ
sont abonnées à la Scène nationale : des habitués, des professionnels ou seulement des amateurs
de théâtre sont abonnés à cette lettre d’informations, qu’ils se rendent ou non directement au
théâtre. Ce nouvel outil de communication récent n’est pas à laisser de côté, car il touche
beaucoup de personnes, des publics variés, quel que soit le sexe, l’âge, la profession, les habitudes
culturelles tout en gardant un côté personnel et humain, ce à quoi est très attaché le public du
théâtre. Une volonté forte est émise par la structure stipulant qu’il est important de garder aussi la
lettre d’information papier, plutôt que la Newsletter, beaucoup plus utilisée pour ce type de média
par Internet.
Il est bon de signaler que la Scène nationale possède également une page Facebook31 ,
gérée par l’équipe des relations publiques, le problème que nous avons observé dans ce cas là, et
ce qu’il ressort de nos entretiens avec les spectateurs : c’est qu’il est impossible de savoir
exactement qui est à la base de l’information transmise sur Facebook, la direction, les habitués,
les relations publiques, ou autres. Le besoin d’identification des publics à une personne est
primordial ; le public a la nécessité de s’identifier et d’identifier l’émetteur de l’information
concrètement, pour ne pas perdre le coté humain et personnel du théâtre. Connaître l’émetteur du
message est aussi important pour considérer la fiabilité de l’information, les spectateurs et
« amis » de la page Facebook ont plus confiance quand l’information vient de la direction ou de la
structure plutôt que s’il s’agit d’un simple spectateur.
Pour résumer, quelque soit la structure concernée la communication et la visibilité, qui
s’en suit, est un élément majeur dans la vie d'un lieu, en dépendent son succès, sa popularité et sa
survie. Dans le cas de la Scène nationale le parti est pris de miser sur un esthétisme et une qualité
graphique plus importants que la quantité diffusée. Le théâtre transmet une image de lieu
distingué, de qualité, de convivialité et qui s’adresse autant aux jeunes (graphismes, couleurs, site
Internet,…) qu’au public plus ancien tout en attendant une certaine qualité de prestations.
31
Voir Annexe 10
24
3- Quel public viser ?
3-1 Le public du spectacle vivant
Pour les sociologues les publics ont toujours été difficilement identifiable, pour cela on privilégie
souvent l’objet au public. Il semblerait alors que se soit l’objet, l’œuvre, le produit culturel qui ai
le pouvoir de décider de son propre contexte interprétatif 32.Ainsi un public de cinéma ne pourrait
être comparé à un public de théâtre car l’œuvre, objet du public ne possède pas la même
temporalité et le même système de réflexions et de rapport entre l’œuvre et le public
De plus comme le dis Emmanuel Ethis sur son SocioBlog, un making-off du spectateur,
dans son article du 30 juin 2010 Déceptions publiques, bonheurs privés, Vivre le Festival
d'Avignon... la pratique théâtrale reste un univers particulier qui sous-entend un comportement
digne incomparable à un autre art : « Dieu, les hommes et le théâtre, mais plutôt une pratique
culturelle avec une autre pratique culturelle, de nouveau, on est en mesure d’inventorier des
différences : si le cinéma parvient souvent à nous tirer des larmes qui nous laissent ahuris à la fin
d’une séance lorsque la lumière nous tire collectivement du générique de fin, le théâtre, lui, nous
entraîne rarement vers ces registres de l’intime et moins contrôlés pour favoriser des expressions
plus codifiées par le fait même d’être public en public et d’être constamment rappelé à un ordre
public spécifique de la pratique théâtrale
Le public du spectacle vivant et des institutions culturelles, ont en général un public
spécifique, certaines théories sociologiques montrent que la fréquentation du spectacle vivant est
encore plus élitiste que les autres institutions culturelles. Selon un rapport du Ministère de la
Culture et de la Communication (1997), 57% des Français de 15 ans et plus ont vu au moins une
pièce de théâtre dans leur vie, et seulement 16% au cours des douze derniers mois. Les chiffres
sont encore plus faibles pour la danse : 32% des Français de 15 ans et plus ont assisté à un
spectacle de danse professionnelle dans leur vie, et 8% au cours des douze derniers mois.
Ce domaine très varié se distingue par une faible élasticité de la demande par rapport au prix, une
forte différenciation des produits, des coûts fixes lourds et des coûts marginaux peu élevés. On
peut dire qu’il s’agit d’un produit sous forme immatérielle (non quantifiable), dont la valeur
d’usage est non reproductible (ou à reproductibilité limitée), ce qui le rend par ailleurs unique, et
augmente sa valeur. Les économistes notent que les subventions publiques sont largement plus
élevées en France qu’aux Etats-Unis, où l’autofinancement et le rôle du secteur privé jouent un
rôle considérable.
32
ESQUENAZI, Jean Pierre. Sociologie des publics, Armand Colin, 2003,p9
25
3-2- Un public élitiste
Même si le public du spectacle vivant est un public élitiste, il en va de la relation
qu’entretient ce dernier avec le « produit » culturel. Comme tout produit immatériel il ne repose
en rien sur des codes de la consommation courante, il ne s’agit pas d’un produit vital. La relation
marchande est souvent écartée de l’esprit collectif du public. En cela il a une posture d’amateur,
au sens pur du terme, il admire le produit. Comme l’explique Jean-Marc Leveratto, « ce n’est
qu’au titre de son incapacité à juger de l’art ou de sa résistance que le spectateur apparaît dans
la littérature sociologique contemporaine »33. Cette observation négative du spectateur montre en
quoi il est important de guider le jugement du consommateur afin de l’aider à contrôler sa relation
et son attirance envers le produit.
Le public se constitue de manière caricaturale par des profils identitaires que nous
pouvons tenter d’identifier : plutôt de sexe féminin, faisant partie d’une CSP (catégorie socio
professionnelle) élevée, érudite, ayant une forte pratique culturelle en général, citadine, entre
quarante et soixante ans.
3-3- un public marketé
Toutes ses caractéristiques économiques et sociologiques sont essentielles quant à la
communication établie par la structure, le statut particulier de la culture comme élément
commercial, engendrant un profit et un prix. La valeur inestimable de l’art, en tant que bien
unique et patrimonial, s’extirpe bien souvent de toutes règles mercantiles. Ce statut particulier est
entretenu par les professionnels ainsi que par les amateurs d’art, dans le but de préserver et de
garder l’art comme un élément précieux et qui se doit de rester du domaine du rêve. Par exemple
souvenons-nous du scandale, qui avait fait éclater l’art, de la vente entre sept cents millions et un
milliard d’euros, du nom Le Louvre à Abu Dabi34.
La question se pose donc de tenter de comprendre avec les modifications constantes,
notamment des relations mercantiles que chacun entretien avec l’argent, qui est de plus en plus de
nature libérale dans notre pays. Dans un monde ou tout s’achète et ou tout se vend, quelle est la
place de l’art dans notre société ? Entre la réalité économique et l’envie culturelle d’offrir au plus
grand nombre des œuvres de qualité à moindre frais, que faire ? Quel moyen faut-il utiliser, et à
33 Jean-Marc Leveratto, Introduction à l’anthropologie du spectacle, Ed. La dispute, 2006, p19 34 Arte.TV, in JOURNAL DE LA CULTURE, Polémique autour du Louvre, 19/01/2007, http://www.arte.tv/fr/Autres-
themes/1193088,CmC=1459804.html
26
quel coût pour permettre à un lieu artistique de vivre et de se faire voir au plus grand nombre ? La
question est posée : la Culture acceptera t’elle un jour d’être un simple produit commercial dérivé
d’un produit marketing.
27
4- La Culture est elle un marché à part entière ?
4-1- Le modèle économique de la création artistique : « La loi Baumol »
Comme nous avons pu l’aborder précédemment l’art et l’économie, ne font pas toujours
bon ménage dans l’imaginaire collectif. L’économie de la culture est donc basée sur l’économie
de la création, de la distribution et de la consommation d'œuvres d'art. Longtemps l’économie de
la culture a dû se cantonner au domaine des Beaux-Arts et aux spectacles vivants, cette vision est
héritée de la tradition anglo-saxonne, et il a fallu attendre les années 1980 pour voir cette
économie s’élargir à d’autres champs, à d’autres industries culturelles comme le cinéma, l’édition
des livres et la musique. En plus de s’intéresser aux industries culturelles, à proprement parler,
l’Économie de la Culture prend également en considération l’économie des institutions culturelles
rattachées à chaque industrie.
En 1977 l’Économie de la Culture se dote d’un journal « Journal of Cultural
Economics », qui regroupe les règles officieuses du marché de l’art, c’est en 1994 que ce journal
fut fondé et reconnu par la communauté des économistes, cette reconnaissance est passée par la
parution d’une revue de littérature « Journal of Economic Litterature»35. Un des pionniers de cette
volonté d’organiser et de légaliser l’Économie de la Culture, et plus spécifiquement le spectacle
vivant (objet primaire de notre étude) n’est autre que William Baumol. Cet économiste américain
est né au début du vingtième siècle aux Etats-Unis. W. J. Baumol est donc un économiste
d’inspiration keynésienne, il a rédigé de nombreux ouvrages et articles. Il est connu pour ses
recherches sur l’économie de la prospérité.
En 1966, la Fondation Ford le charge d’une mission pour tenter de comprendre les raisons
pour lesquelles les salles de spectacles de Broadway enregistrent une augmentation croissante de
leurs coûts d'exploitation, de leur non-profitabilité chronique et d'une raréfaction de leur
public36 .Le fruit du travail mènera à cette occasion, avec l’économiste William Bowen, à
l’adoption d’une règle du spectacle vivant, qui prendra par la suite l’intitulé de « Loi de Baumol »
ou « loi de la fatalité des coûts ».
Deux principaux secteurs d’activités sont mis en avant dans ces recherches : le secteur
« archaïque » et le secteur « progressif », il semble alors que le spectacle vivant appartient au
35 David Throsby, « "The Production and Consumption of the Arts: A View of Cultural Economics" », dans Journal of
Economic Litterature, vol. 32, no 1, 1994, p. 1-29 36 William Baumol, William Bowen, Performing Arts-The Economic Dilemma: A Study of Problems Common to Theater,
Opera, Music and Dance, Ashgate Publishing, 1966
28
secteur « archaïque », il s’agit donc d’un secteur à faible productivité où il est impossible de
générer des gains de productivité importants. La qualité de travail ne peut être sans altérer la
qualité du produit, les deux sont intimement liés. Le travail de l’artiste n’est pas rémunéré à sa
juste valeur, il est impossible de quantifier la valeur de la voix, du jeu d’un artiste. En cas de
baisse de revenu, les organisateurs haussent les tarifs, cependant une hausse de prix se traduit
toujours par une baisse de la fréquentation. Le travailleur n’est pas toujours intermédiaire, mais
une source de valeur (industrie de « prototypes »), et il est lui-même le produit, « à la différence
des travailleurs des industries, les artistes ne sont pas les intermédiaires entre les matières
premières et le produit achevé. Leurs activités sont elles-mêmes le bien de celui qui
consomme »37.
En conclusion de la « Loi Baumol », c’est ce qui est donc imposé comme une règle
principale du spectacle vivant et que premièrement le spectacle vivant est voué au déficit.
Deuxièmement les industries de programmes sont concernées mais elles ont la possibilité de
baisser la qualité du produit fini. Troisièmement le succès peut être une forme de menace car les
spectateurs sont de plus en plus avertis et exigeants. Ce succès procède de « l’expérience du
spectateur », ce qui entraîne une augmentation des coûts marginaux (nécessité de faire toujours
plus dans l’esthétique, le service,…), et ainsi c’est avec le succès que se bâtit une réputation, ce
qui crée par le fait même une surenchère des cachets et des coûts ce qui entraîne de nouveaux
types de déficits (exemple : accueil, hébergement, …). Désormais c’est aux Etats de
subventionner le spectacle vivant, car il existe une légitimation de l’action publique.
Deux limites se posent en ce qui concerne la véracité de la « loi Baumol ». En premier
lieu le mode de calcul des salaires, est indexé sur celui des stars et non sur celui des techniciens,
des petits rôles, des figurants,…qui représentent, quant à eux, une dépense plus importante que
celle des stars.
Enfin les progrès techniques viennent perturber la viabilité de cette loi, par exemple, la musique
contemporaine a recours à l’instrument électronique ; synthétiseurs, logiciels de modélisation du
son. Ces nouveaux modes de création musicaux sont générés progressivement avec l’air du temps
sans altérer la qualité du produit fini.
37
P 416, William Baumol, William Bowen, Performing Arts-The Economic Dilemma: A Study of Problems
Common to Theater, Opera, Music and Dance, Ashgate Publishing, 1966
29
4-2 - Le marché de l’art
L’art comme tout autre bien, répond aux règles du marché comme il est défini dans
« Dictionnaire d’économie et de sciences sociales » comme un réseau de relations entre offreurs
et demandeurs. Le marché n'est pas forcément un lieu déterminé. Il peut être local ou bien
international. Le prix formé sur le marché résulte de la confrontation entre l'offre et la demande.
Les biens culturels sont caractérisés pas des principes définis, chaque marché possède ses propres
référentiels.
4-2-1 Les cinq principes du marché de l’art
Dans le cas de l’art ils sont au nombre de cinq, pour définir ces principes nous allons nous
appuyer sur le travail de Richard E. Caves, et des propos qu’il a développé dans son ouvrage
Creative Industries, (2002) :
- nobody knows : le succès (qui s’apparente ici à la demande) pour un bien culturel donné
est très difficilement prédictible, même par les agents spécialisés du secteur, donc il est aléatoire.
Cette caractéristique probabiliste des biens est due notamment à la culture expérimentée des
personnes.
- Son infinie variété : à la différence des biens usuels (voiture, ordinateur…) sont
différenciés sur un nombre fini, avec des caractéristiques relativement faibles, nous trouvons à
l’opposé les biens culturels qui sont, par contre différenciés sur un nombre très important de
caractéristiques, ce qui ne permet pas de comparer effectivement ces deux types de biens. Il faut
également prendre en compte que la plupart de ces caractéristiques sont par nature subjectives, et
donc elles ne peuvent pas faire l'objet de processus de comparaison objectifs dans une analyse
comparative sérieuse.
- Le fait que le marché repose sur une forte concentration des ventes rend le marché
inhabituel. Ainsi la majeure partie des ventes est concentrée sur un petit nombre de variétés à
succès (les best-sellers ou blockbusters) qui représentent, à eux seuls, la majorité des bénéfices
du marché de l’art.
- La temporalité du marché de l’art (est due au cycle de vie court de l’art.) L'essentiel des
ventes pour un bien donné se réalise dans les semaines suivant sa mise en vente. Si les ventes ont
été mauvaises durant cette période, il faut alors un événement exceptionnel pour relancer les
ventes et prolonger ainsi sa durée de vie dans le cycle du produit.
30
- Les coûts fixes sont très importants, l'essentiel des coûts est encouru avant la mise en
vente de la première unité, en amont même des déficits qui pourraient être générés. L’avance et le
dégage de financement est donc nécessaire, le facteur risque est omniprésent tout peut se gagner,
comme se perdre. Prenons l’exemple du cinéma, les frais de tournage d'un film sont plus
importants que le coût pour en tirer une nouvelle copie.
4-2-2- Les biens culturels et leurs spécificités
L’organisation industrielle de l’industrie des biens culturels doit tenir compte de ces
principes, la mise en place de l’offre prend en compte ces mécanismes de contraintes. La qualité
des biens est primordiale, et la difficulté reste dans la non-possibilité de quantifier ces biens. Cette
absence de norme consensuelle sur ce qui est de bonne ou de mauvaise qualité, créé un mode
d'organisation des relations trés intéressant38 , en cela qu'il permet à une grande variété de biens
d'être produits. Des biens de très haute qualité à des prix très élevés peuvent être de ce fait être
produits, ainsi qu'un assortiment de biens en quantités et avec des qualités très diverses.
Les divers éléments développés ci-dessus sur le marché de l’art répondent bien souvent à
des normes commerciales strictes qui dépassent les limites d’un marché traditionnel, ce qui se
commercialise avec rareté en dehors des circuits mercantiles habituels de masse. En définitive, la
dimension noble de l’art, qui vise le vrai, le beau, l’émotion esthétique et l’universalité, restera
toujours une valeur sûre des sociétés démocratiques tolérantes qui font une place aux artistes, à la
culture et à la communication culturelle dans les expositions nationales et internationales, les
galeries d’art et les musées.
Le soutien des pouvoirs publics, comme nous avons pu déjà l’aborder à propos de la « loi
Baumol » reste souvent un acteur principal, hormis la nécessité de ses financements, son
implication est souvent une référence collective, dont l’art à « besoin ». L’aide publique, amène
une sorte de légitimité au bien culturel comme si le fait d’être subventionné par le ministère ou
toutes autres instances publiques permet de certifier la qualité du bien en question, « les
intellectuels qu'un art de qualité ne peut exister qu'à la faveur d'un soutien public à la production
artistique, le marché étant réputé conduire à une production de masse et de faible qualité »39.
Malgré la crise que connaissent les marchés financiers en 2009/2010 le marché de l’art se
porte bien, notamment grâce à la spécialisation grandissante des commerces de l’art, environ 95%
du marché. En 2009, 13 505 entreprises sont spécialisées dans le commerce de l’art, elles réalisent
38 Françoise Benhamou, L'Économie de la Culture, La Découverte, coll. Repères, n° 192, 5e éd., Paris, 2004, p42 39 Bruno S. Frey, Arts & Economics, Springer, 200, p13
31
un chiffre d’affaires annuel de 1 914 millions d’euros. Ces entreprises représentent un pôle
d’emplois de 9000 personnes40. De nos, jours, nous pouvons dire que l’industrie de l’art s’est
épanouie avec les attentes et les besoins de repères solides des acheteurs face à notre société de
consommation où rien n’est fait pour durer, l’art reste encore un bien durable qui se vend, et qui
se vend même bien aujourd’hui. Ce marché devient ainsi de plus en plus assuré et en croissance,
car considéré avant tout comme une valeur refuge, dans un monde qui a perdu de nombreux
repères culturels.
40 DEPS, étude de François Rouet, « Les entreprises du commerce du marché de l’art, Culture Chiffre », secteur Production,
diffusion, marché, 2009
32
5- Le 21ème siècle : l’aire de la communication transversale.
5- 1 - L’émergence d’Internet
Dans notre société moderne Internet est un outil qui se veut de plus en plus indispensable,
et ouvert à tous. Se définissant comme un Réseau mondial associant des ressources de
télécommunication et des ordinateurs serveurs et clients, destiné à l'échange de messages
électroniques, d'informations multimédia et de fichiers41. Né dans les laboratoires du CERN de
Genève, après avoir été un outil pour les scientifiques américains et l’Armée (DOD) dés le début
des années soixante dix, il est sorti de la sphère professionnelle et expérimentale dans les années
quatre-vingt dix. C’est à cette époque qu’en janvier 1992 précisément que l’Internet Society
(ISOC) voit le jour avec pour objectif de promouvoir et de coordonner les développements sur
Internet. En 1993 on voit l’apparition du premier navigateur Web ou butineur (browser),
supportant le texte et les images. C’est cette même année que la National Science Foundation
(NSF) mandate une compagnie pour enregistrer les noms de domaine. C’est à partir de ces années
qu’Internet s’est ouvert sur le monde. De puis cette période ou l’internet a envahi notre quotidien
il n’a cessé de progresser, de changer, d’évoluer et de s'immiscer dans tous les domaines de notre
société jusqu’à devenir aujourd’hui indispensable. Le web quant à lui, ou World Wide Web, est une
application majeure permise par Internet. C’est un système qui permet de consulter, avec un
navigateur, des pages mises en ligne sur des sites.
5-2- Les années 1990.
Dans les années 1990 les premiers internautes s’émerveillent devant ce nouvel outil qui
permet de communiquer instantanément par courriel (e-mail), qui permet également de trouver
une quantité d’informations considérable (même si minime à l’origine, comparé à nos jours) grâce
au premier moteur de recherche. C’est à partir de ce moment là que les internautes commencent à
acheter sur Internet (ventes en ligne), à faire des rencontres amoureuses ou non, à suivre des
conversations de groupes (forums de discussions) …
Deux grandes périodes se distinguent dans l’histoire moderne d’Internet, même si son
existence est plutôt jeune on différencie des périodes dans l’histoire de ce média. Jeune de
quelques dizaines d’années, son existence et son évolution sont tellement rapides, son rythme
d’évolution est tellement élevé que l’on peut en retracer l’histoire comme un vieux média
traditionnel. La richesse est la masse d’informations, images, vidéos, sons, …que génère et que
41 http://franceterme.culture.fr/FranceTerme/recherche.html#INFO679_ouverture, site de référencement et de définition du
gouvernement français.
33
crée ce média en fait un objet de recherches en perpétuel mouvement, dont il est parfois difficile
de suivre l’évolution.
5-3- L’ère 2000
Avant 2000, l’internet commençait à se vouloir participatif et collaboratif, en 1997
l’apparition des logiciels permettant à tout un chacun de créer son blog, journal intime numérique
prend petit à petit sa place dans nos vies. Nous pourrions dire très simplement que le blog est une
page personnelle dans un format de journal intime. Mais comme le souligne Rich Skrenta42,
l’organisation chronologique d’un blog « semble être une différence anodine, alors que cela
conduit à un processus de création, à un système de signalement et à une chaine de valeur
radicalement transformés ». C’est un extraterrestre qui a donné à chacun la possibilité de prendre
la parole et d’exposer sa vie aux yeux de tous. Il emmène avec lui une nouvelle perception du
média web. Même si à cette époque Internet, et plus largement l’ordinateur est utilisé plus à but
professionnel, seulement 11% de la population française utilise un ordinateur en dehors de son
travail au moins une fois par mois, (4% quotidiennement). Depuis le début ce média se tourne
plus vers les populations jeunes (15-24 ans), en 1997 en comparaison à aujourd’hui plus de 56%
de la population française ont un usage quotidien de leur ordinateur.
De 1990 à 2000 l’industrie du web est très florissante, cette économie ne cesse de croitre,
le nombre d’utilisateurs augmente de façon fulgurante, selon Médiamétrie, la France comptait
35,3 millions d'internautes en février 2010, soit une hausse de 8 % par rapport à février 2009.
Cela représente encore 66,2 % des Français. Le taux de pénétration du haut-débit à domicile
atteint 96,7 % de la population internaute, en hausse de 20 % sur un an. L’utilisation du média
rentre dans la sphère privée et s’installe petit à petit au cœur de nos foyers, enfants, parents, amis
tout le monde trouve son compte dans la toile du virtuel, que se soit pour les loisirs, les
recherches, le divertissement, ou pour le travail. Jusqu'à développer une sorte d’addiction à ce
média révolutionnaire, il relie les hommes, et rend la connaissance universelle à une portée de
clics.
5-4- Les six principes du développement du Web, Selon Francis Pisani et
Dominique Piotet
42 Auteur du blog, Topix Weblog, http://blog.topix.com/archives/000066.html, février 2005
34
Selon les auteurs Francis Pisani et Dominique Piotet43, le développement du web peut
s’articuler autour de six éléments fondamentaux :
- Le web devient une plateforme par laquelle nous pouvons « presque » tout faire.
- Le changement de posture de l’internaute, qui est désormais animé par les actions suivantes,
recevoir/publier/modifier
- L’accroissement de l’accès au haut débit, qui a favorisé le développement du phénomène always
on (être toujours connecté). Les connexions via les téléphones portables sont en voie d’amener
une nouvelle dimension au phénomène.
- La contribution, mots clés du web, tel que nous le connaissons à présent.
- l’importance des réseaux et l’effet réseaux sont considérables grâce au développement du web.
La nature de la transmission du savoir change.
- Le web, permet la croissance exceptionnelle de l’économie de marché ainsi, le phénomène de
« Longue traine »44, a donné au monde la possibilité d’avoir accès à une économie de la diversité
et de l’abondance.
5-5- L’éclatement de la bulle
En mars 2000 les actions boursières et la valeur des nouvelles technologies de
l’information et de la communication atteignent leur apogée, Internet est alors une industrie
florissante, les personnes ayant soudainement fait fortune en créant leur start-up 45 sont monnaies
courantes, Internet est l’investissement à faire, le futur, comme le dit Christophe Ginisty (
bloggeurs-traders) sur son blog en mars 2010 à l’occasion d’un article intitulé « les dix de
l’éclatement de la bulle » « Nous étions dans une spirale ascendante totalement démente. De
nouveaux prospects appelaient plusieurs fois par jour, à la recherche urgente d'une agence pour
gérer leurs relations publiques. La plupart du temps, il s'agissait de lancer leur entreprise, leur
marque et les aider à se faire connaître des investisseurs potentiels. » Cependant le 13 mars 2000
à New York, éclate la « bulle Internet ». L'indice Nasdaq, calculé à partir des principales valeurs
technologiques de l'époque, AOL, eBay, Yahoo! ou Amazon, chute brutalement, mettant
soudainement un terme final à cinq années de hausse. A Paris, le CAC 40 continue sur sa lancée
jusqu'en septembre, avant de sombrer à son tour comme les autres bourses du monde.
43 Francis, Pisani ; Dominique, Piotet, Comment le web change le monde: L'alchimie des multitudes Pearson Education
France, 2008, p11 44 L’expression longue traîne (de l'anglais Long Tail, expression parfois traduite par « longue queue ») a été employée pour la
première fois en 2004 par Chris Anderson dans un article de Wired pour décrire une partie du marché des entreprises telles
qu'Amazon ou Netflix, qui vendent de nombreux produits chacun en petite quantité.
45 Start up est traduit en français par le terme jeune pousse. Une Start up est une jeune entreprise innovante à fort potentiel de
développement, nécessitant un investissement important pour pouvoir financer sa croissance rapide.
35
L’éclatement de la « bulle Internet », fait alors de nombreux ravages, c’est alors qu’un homme,
Tim O’Reilly pense avoir trouvé une solution à cette chute, qui pourrait causer la mort d’Internet.
Tim O’Reilly est le président d’O'Reilly Media, une maison d’édition américaine spécialisée
dans les livres informatiques qui est très active dans le domaine des standards ouverts. Cette
société est à l’origine d’un véritable réseau de conférences sur l’Open source (qui consiste à
mettre en libre service et libre accès des informations Internet) les technologies émergentes et le
web 2.0. Le terme est lâché, le Web 2.0 va naître, il sera l’initiateur de ce terme. Nous allons
tenter d’expliquer et de comprendre ce qu’est le « point zéro » et en quoi il fut révolutionnaire.
36
6- Le Web 2.0 : l’utilisateur au cœur du système.
L’explosion de cette fameuse « bulle internet » en 2001 a définitivement marqué un
tournant dans l’histoire du web. Beaucoup de gens ont, à ce moment là, considéraient que le web
était une technologie surévaluée alors qu’au contraire, le fait qu’une bulle se forme puis éclate
est un trait commun à toutes les révolutions industrielles. Ces soubresauts sont mêmes
caractéristiques du moment où une technologie ascendante est prête à entrer dans une nouvelle
phase. C’est en effet le moment où les simples prétendants arrivent à bout de souffle tandis que
les premiers gagnants triomphent : et c’est seulement à cet instant que l’on commence à
comprendre ce qui distingue les premiers des seconds.46
6-1- Le mythe Tim O’Reilly
La naissance du concept web 2.0 par Tim O’Reilly, lancé en 2004 fut donc une mutation
du web connu jusqu’alors. Le concept de web 2.0 est né d’une conférence « brainstorming »
organisée par O’Reilly et Medialive International. C’est Dale Dougherty (pionner du web et
membre d’O'Reilly) qui mit en avant le concept que hormis l’éclatement de la « bulle » financière
jamais autant de sites et d’applications n’apparaissaient aussi rapidement et régulièrement. Les
entreprises qui avaient survécu à l’hécatombe de mars 2000, avaient toutes un point commun et
semblaient être révélatrices d’une nouvelle ère. Ses réflexions donneront naissance à la
« conférence 2.0 47».
En six ans et demi le terme « web 2.0 » s’est franchement popularisé avec plus de 9,5
millions de citations dans Google en 2005. Mais il reste encore de multiples points de désaccord
sur sa signification exacte, un certain nombre de personnes décriant ce qui ne leur semble être
qu’un buzzword bien marketé, d’autres y voyant un nouveau modèle de pensée. La première
volonté de Tim O’Reilly était simplement de créer un espace de réflexions, une conférence où
l’on pourrait échanger des informations sur le web. Le long article qu’il écrivit après l’éclatement
de la « bulle » en 2004, fit, alors rapidement figure de références, même si son but fut de proposer
des pistes plutôt que d’établir un dogme48 du web 2.0.
46 O’Reilly, Tim “Qu’est-ce que le web 2.0 ?”, 30/09/2005, traduction Jean Baptiste Boisseau, (21/04/06) sur
www.internetactu.net 47 Ces conférences ont désormais lieu tous les ans, il regroupe les leaders de l’économie d’Internet afin de déterminer les
stratégies financières à développer. Cette année la conférence se tiendra le (16-17 Novembre) à San Francisco. 48 Jean-François, Gervais,Web 2.0 Les internautes au pouvoir: Blogs, Réseaux sociaux, Partage de vidéos, Mashups...,
Dunod, 2007, p13
37
Lors de la première conférence 2.0, la frontière entre ce qui est du 2.0, et de ce qui
appartient au web 1.0 est très floue car de nombreuses entreprises se veulent 2.0 pour profiter de
l’engouement autour du nouveau concept sans l’être réellement. L’article de O’Reilly, a alors
établi une liste de critiques du web 2.0 pour tenter de clarifier le concept et d’en faire une idée qui
pourrait parler à tous concrètement.
Avant d’abord ces sept différents points voyons comment ils schématisaient à l’époque la
différence entre web 1.0 et web 2.0, il s’agit souvent de mutations ou d’évolutions des logiciels
proposés par Internet. Même si la liste est exhaustive et loin d’être restrictive, il nous a paru
intéressant de donner des exemples concrets, de mutations du 1.0 au 2.0 selon Tim O’Reilly,
même si parfois le language langage « web » peut ressembler à une langue surnaturelle
difficilement compréhensible pour les novices, ce schéma montrant les subtilités de cette
évolution.
6-2- Le web 2.0 : Une plateforme de données mondiale
La première des règles du Web 2.0, qui mène à cette évolution de la vision et de
l’utilisation du web, est de penser le web comme une plateforme, ce concept étant déjà la devise
d’un enfant chéri du web 1.0, Netscape, qui a, malgré cela, succombé à sa bataille contre
Microsoft.
Lors de la conférence d’octobre 2004, un brouillon, une carte mentale de toutes les idées
raccrocher au Web 2.0 est alors dévoilée, même si ce tableau peut paraître abstrait, il tente de
concentrer toutes les fonctions que l’on rattache au 2.0. Appartenant à la mouvance « open
Source »49, c'est-à-dire au monde du logiciel
libre et gratuit, qui est possible grâce à
l’évolution du navigateur (FireFox, Internet
Explorer,…), cela fait de lui un « client plus
riche » en matière d’informations.
Le Web 2.0 est un centre de gravité autour
duquel des idées, des logiciels, des
applications, naissent et meurent à un
rythme effréné.
49 Jean-François, Gervais.Web 2.0 Les internautes au pouvoir: Blogs, Réseaux sociaux, Partage de vidéos, Mashups...,
Dunod, 2007, p4
38
Ainsi des éléments comme le « tagging », principe ou l’on peut identifier des individus
sur des photos, images ou vidéos, des blogs participatifs, wikipedia, la « Longue traine », le jeu,
émergence de comportement prédéterminé, une expérience de plus en plus riche des utilisateurs
du web, ou encore le téléchargement et l’échange de fichiers peer-to-peers (P2P), sont les valeurs
et concepts qui gravitent autour de ce web 2.0. En dehors de ces termes pouvant paraître barbares
le développement de l’Internet sous cette forme, nous intéresse dans le sens qu’il se veut par « son
caractère interactif, conversationnel et collaboratif révolutionnaire pour les mécanismes de
circulation de l’art »50 . Vous trouverez en annexe 11 une analyse d’une comparaison entre
Netscape et Google, ou Tim O’Reilly explique clairement les différences entre les deux géants
l’un 1.0 et l’autre 2.0, leurs différences et leurs points communs.
6-3- L’intelligence collective
La deuxième caractéristique est de tirer parti, de l’intelligence collective, le potentiel du
web est qu’il sait tirer profit de cette force de l’intelligence collective, qui est le grand potentiel du
web. Prenons l’exemple des liens hypertextes (ou http). Au fur et à mesure que les utilisateurs
ajoutent des contenus, ils sont intégrés à la structure du web par d’autres utilisateurs qui les
découvrent et se connectent vers eux par des nouveaux liens. Telles des synapses formant un
cerveau où les associations se renforcent par la répétition et l’intensité, les connections au sein
du web se multiplient organiquement à la mesure de l’activité collective de l’ensemble des
utilisateurs51. L’exemple type de la force de cette intelligence collective est Wikipedia, cette
encyclopédie en ligne est basée sur le principe selon lequel chaque utilisateur du web peut ajouter
une entrée, qui peut à son tour être modifiée par un autre utilisateur. Ce fut une invention radicale
dans le domaine de la création de contenu, comme le dit Eric Raymond, en parlant des Open-
Source « avec suffisamment d’yeux, tous les bugs disparaissent ». Pour Tim O’Reilly, dans
“Qu’est-ce que le web 2.0 ?”, la leçon à retenir de cette caractéristique est que dans l’univers web
2.0, l’implication des utilisateurs dans le réseau est le facteur-clé pour obtenir et garder la
suprématie sur le marché.
6-4- Les base de données
L’importance des bases de données est une autre notion clé du web 2.0, toutes les
applications web sont liées à une base de données : la base des pages explorées par Google,
50 Marc, Le Glatin, Marc. Internet : un séisme dans la culture, Éditions l'Attribut, 2007, p35 51 O’Reilly, Tim “Qu’est-ce que le web 2.0 ?”, 30/09/2005, traduction Jean Baptiste Boisseau, (21/04/06) sur
www.internetactu.net
39
l’index de Yahoo!, la base de produits Amazon, la base d’utilisateurs d’eBay, la base de cartes de
MapQuest. L’importance de ces données peut se voir dans la course à la possession des données,
nous avons récemment entendu parler de cette bataille par rapport aux données diffusées sur
Facebook, et à la propriété intellectuelle de cette masse d’informations, data52. Ces données
représentent un support pour des services à valeur ajoutée avec une source unique de données,
c’est-à-dire que cela sert à cibler des profils et à leur transmettre des informations (publicités) en
fonction de leurs données. Par exemple quelle coïncidence constatons nous lorsque nous sommes
à la recherche d’un voyage et que soudainement des offres de location s’affichent à droite de nos
profils Facebook, la visibilité des marques résulte de ce nouvel espace publicitaire et personnalisé
inestimable. Ce commerce des données entraîne un autre point important : la confidentialité de
l’usage des droits de données qu’ont les internautes du fait de leurs publications. Dans la plupart
des premières applications web, le copyright n’était appliqué que de manière très approximative,
il devient aujourd’hui un point juridique essentiel.
Mes cinquième et sixième point du Web 2.0 reposent sur des principes très techniques de
modèles de programmation dits « légers », et sur l’évolution des logiciels qui se libère du PC
(ordinateur) , la cinquième partie étant très technique, focalisons nous sur le sixième point. Un
élément dont on attend le plus d’évolution dans le 2.0 c’est la possibilité de faire sortir le web de
nos petits écrans. Ainsi, l’apparition de la première application permettant des PodCaster, des
émissions radio, télévision, Internet, … et de pouvoir l’écouter sur son lecteur MP3, a fait muter
pour la première fois les data du web sur un autre support. Aujourd’hui le développement des
Smartphones53, telles que Iphone, BlackBerry pour les plus connus, nous permettent d’avoir accès,
n’ importe où, à des applications en fonction de nos besoins immédiats. Cette mouvance qui ne
cesse d’aller de l’avant et de nous surprendre, fait qu’en en janvier 2009 plus de 500 millions
d’applications Iphone avaient été téléchargées. Le Web 2.0 n’est plus devant notre écran, il est à
côté de nous, au-dessus, il nous entoure et on s’en imprègne.
Enfin la dernière caractéristique développée lors de la conférence Web 2.0 de 2004 , fut
celle où il était nécessaire d’enrichir les interfaces utilisateurs, c’est-à-dire de rendre le web plus
humain et de permettre un usage plus performant pour tout un chacun, carnet d’adresse exportable
par exemple. Le but est de combiner les fonctionnalités du web (accessibles de n’importe où avec
52 Par data, l’on entend : données informatiques et par extension ensemble des services non vocaux comme les
Texto et les services WAP. 53 Un smartphone, est un ordiphone ou téléphone intelligent et un téléphone mobile disposant aussi des fonctions d'un PDA.
Il peut aussi fournir les fonctionnalités d'agenda/calendrier, de navigation web, de consultation de courrier électronique, de
messagerie instantanée, de GPS, etc.
40
des capacités de recherches avancées), et avec une approche ergonomique proche des interfaces
PC habituelles.
6-5 : L’internaute au cœur du système
De la définition que nous avons tenté d’élaborer à propos du Web 2.0, nous avons pu nous
rendre compte de la place centrale qui était donnée à l’utilisateur, à l’internaute. Le Web 2.0 est
un principe qui propose de nouveaux services en mettant l’internaute au cœur du dispositif (User
Centric). Le modèle web 2.0 propose des services qui sont généralement gratuits. La volonté de
rendre le web, collaboratif et surtout de proposer des interfaces novatrices permettant aux
utilisateurs de générer des données (Flickr, facebook, Twitter), du savoir (wikipedia), ou de l’art
(nouveaux arts numériques) montre en quoi le web 2.0 a fait évoluer la posture basique des
individus face à ce média, pour l’emmener jusqu’à une posture nouvelle, le « culte de
l’amateur »54, où les utilisateurs acquièrent une certaine légitimité. Ces webacteurs55 deviennent
alors créateurs de valeurs.
Les médias sociaux sont un outil qui augmente et accélère ce comportement de
l’implication du citoyen sur la toile. Nous allons préciser dans un premier temps ce qu’est un
média social, puis, dans un second temps nous démontrerons en quoi il peut servir le spectateur du
spectacle vivant, en faisant évoluer sa posture spectatorielle.
54 Pisani, Francis ; Piotet, Dominique. Comment le web change le monde: L'alchimie des multitudes Pearson Education
France, 2008, p124 55 Terme utilisé page 87 par Pisani, Francis ; Piotet, Dominique. Comment le web change le monde: L'alchimie des multitudes
Pearson Education France, 2008.
41
7 – Les médias sociaux, un nouveau média à la portée de tous .
7-1 - Les Médias sociaux : qu’est ce que c’est ?
Dans son livre « Web 2.0 Les internautes au pouvoir », Jean-François Gervais (2007)
commence par retracer l’histoire des réseaux sociaux. Le premier fut « sixdegree.com » et fut
lancé en 1997. Andrew Weinreich, créateur du premier réseau avait pour ambition de reproduire
ce que nous avions dans la vie réelle, il déclare que ce qui marche sur Internet c’est ce qui
reproduit une chose déjà existante. L’efficacité des réseaux était déjà prouvée mais elle reposait
sur la confiance accordée au site par les internautes. Toutefois, le site fut , selon l’auteur de
revendre les adresses e-mail à des spammers. Une des premières limites des réseaux sociaux fut
donc assez vite montrée du doigt par les spécialistes du web.
Tout le monde possède un réseau, un réseau social représente, en sociologie une structure
dynamique prenant forme par l’existence des liens et des rapports sociaux56, au travail, notre
famille, nos amis tous forment nos réseaux sociaux. Friendster fut le premier réseau social à
apparaître sur la toile après l’éclatement de la bulle Internet en 2001, Jonathan Abrahams le
fondateur a recréé le modèle du « Small World », qui consiste à se construire un réseau à partir
d’un cercle d’amis. Les mots clés, que l’on peut retrouver sur la page d’accueil du site, prônent en
trois mots la raison d’exister du réseau social : trouver, se connecter, restez en contact. On peut
dire que ces piliers resteront les mêmes dans tous les réseaux sociaux même si certains ont des
vocations spécialisées : trouver un emploi, faire des rencontres amoureuses, créer un réseau
professionnel.
7-2- Les médias sociaux : une multitude d’outils
Les réseaux sociaux font partie d’une nouvelle forme de médias qui ont suivi l’évolution
d’Internet. Ils utilisent beaucoup de techniques, que l’évolution des nouvelles technologies de
l’information et de la communication a permis57 :
- Les outils de publications, avec les plateformes de blogs (Typepad, Blogger, Skyblog…), les
plateformes de wiki (Wikipedia, Wikia, Wetpaint…), et les portails de journalisme citoyen (Digg,
Newsvine, Wikio, Agoravox…) ;
56 R.Hill, R.Dunbar, « Social network Size in Humans », Human Nature, Vol.14, No 1, 2002 , p53 57
Le Panorama des medias sociaux, http://www.fredcavazza.net/2008/05/19/panorama-des-medias-sociaux/, 19 mai 2008
42
- Les outils de partage de vidéos (YouTube, Dailymotion…), de photos (FlickR…), de liens
(del.icio.us, Ma.gnolia…), de musiques (Last.fm,Deezer…), de diaporamas (Slideshare), de
revues de produits (Crowdstorm, Stylehive…) ou encore de suggestions d’évolution (Feedback
2.0) ;
- Les outils de discussion comme les forums (PHPbb, vBulletin, Phorum…), les forums vidéos
(Seesmic), les systèmes de messageries instantanées (Yahoo! Messenger, Windows Live
Messenger, Meebo…) et les systèmes de la Voix sur IP ou VoIP (Skype, Google Talk…) ;
- Les réseaux sociaux généralistes (Facebook, MySpace, Bebo, Hi5, Orkut…), de niches
(LinkedIn, Boompa…) ou encore les plateformes de création de réseaux sociaux comme Ning.
- Les outils de micropublication (Twitter, Pownce, Jaiku, Plazes…) et leurs dérivés (twitxr,
tweetpeek), ainsi que les services de lifestream (FriendFeed, Socializr…).
- Les plateformes de livecast (Justin.tv, BlogTV, Yahoo! Live, UStream…) et leurs équivalents
mobiles (Qik, Flixwagon, Kyte, LiveCastr…) ;
- Les univers virtuels (Second Life, Entropia Universe, There…), chats en 3D (Habbo,
IMVU…), et univers pour les plus petits (Stardoll, Club Penguin…) ;
- Les plateformes de jeux massivement multijoueurs (Neopets, Gaia Online, Kart Rider, Drift
City, Maple Story), les MMORPG (World of Warcraft, Everquest…) ainsi que les portails de
casual game (Cafe, Pogo, Kongregate, iWin…).
- Les flux RSS permettant d’être avertir par un simple signet en haut de l’écran des notifications
et actualités postées sur un site selectionné auparavant58.
En annexe 12, vous trouverez un schéma résumant le fonctionnement des réseaux sociaux
Depuis 2001, les médias sociaux n’ont cessé de prendre une part de plus en plus
importante dans nos vies, mettant toujours au centre l’internaute qui peut agir à sa guise, sans
58 RSS signifie aussi que les navigateurs web ne servent plus seulement à voir des pages. Certains agrégateurs de contenus,
tels que Bloglines, sont basés sur le web, mais d’autres sont des applications résidentes et d’autres encore permettent à leurs
utilisateurs de s’abonner à des flux RSS sur des dispositifs portables.
O’Reilly, Tim “Qu’est-ce que le web 2.0 ?”, 30/09/2005, traduction Jean Baptiste Boisseau, (21/04/06) sur
www.internetactu.net
43
parfois mesurer les risques encourus par une telle dilapidation de données sur sa vie privée.
Prenons l’exemple de Facebook et Twitter deux médias sociaux différents.
7 -3- L’exemple Twitter
Commençons par Twitter dernier média arrivé sur la toile. Ce service
de micro blog créé en 2006 fait fureur, il donne la possibilité de s’exprimer à
chaque internaute en cent quatre caractères maximum, c’est « tweets » (nom
donné au message) qui permet une grande réactivité. Il est possible d’envoyer
des liens, des photos, et bien qu’on ne puisse pas commenter les messages, il
est tout à fait envisageable de les « retweeter » pour que le « tweet »
apparaisse à son tour sur notre page. Chaque « tweet » est précédé d’une arobase. Jack Dorsey,
Biz Stone et Evan Williams les créateurs du site www.twitter.com, ont donné comme slogan à
leur entreprises « Discover what’s happening right now, anywhere in the world »59 . Ce slogan a
été prouvé lors du tremblement de terre d’Haïti de 201060, alors que tous les moyens de
communication étaient coupés, et que les journalistes du monde entier n’arrivaient pas à obtenir
des contacts sur place les premières images et témoignages que le monde a pu recevoir sont venus
de Twitter et de Facebook. Le monde entier a alors pris conscience de l’outil exceptionnel qui
était entre nos mains. Tout un chacun pouvait tour à tour se faire témoin, journaliste, porte parole.
7-4 – Les médias sociaux, des médias à cent à l’heure.
La réelle force des médiaux sociaux, et sa faiblesse est de pouvoir être accessible à tous.
Une personne lambda peut ainsi obtenir un succès fulgurant en quelques semaines ou même
quelques jours. Par exemple lors de la conférence sur les média sociaux « Marseille 2.0 » nous
avons pu découvrir l’auteur du blog « L’inconnu du métro » 61qui a connu en l’espace de quelques
semaines une ascension unique, son blog est passé de quelques dizaines de visiteurs à soixante
quinze mille en une semaine. A titre d’exemple, cette jeune fille, ayant la seule volonté de
rencontrer des personnes et de recueillir leurs témoignages est la première surprise de ce succès
planétaire.
7-5- La success story Facebook
59
« Découvrez ce qui se passe maintenant, n’importe où dans le monde » 60 « Twitter au cœur du séisme d'Haïti », France24, http://www.france24.com/fr/20100113-micro-blogging-twitter-seisme-
haiti-port-au-prince-tremblement-terre, 15 janvier 2010 61 http://linconnudumetro.wordpress.com
Logo du réseau social
44
Mais si nous abordons le succès occasionné par le phénomène
Facebook, Jean-François Gervais explique qu’au démarrage et jusqu’en
septembre 2006, il fallait une adresse e-mail à l’entête de son lycée ou de son
université pour être membre et cela empêchait les faux profils. Mais le réseau
s’est ensuite développé et d’autres limites sont apparues. Certains élèves furent
en effet sanctionnés pour avoir mis des photos de fêtes « arrosées » à l’appui de leurs profils
personnels. Le problème de la confidentialité et de la protection des données sur ces réseaux est
donc devenu primordial. L’auteur explique que les universités américaines ont réagi en mettant en
ligne un guide intitulé: « Cinq choses auxquelles vous devez penser quand vous utilisez
Facebook ».
Cependant ce média est devenu un phénomène mondialisé en juin 2010. Facebook comme vous
pourrez le visualiser sur le tableau ci-dessous est le site le plus visité du monde, avec cinq cent
quarante millions de visiteurs internautes par jour, soit presque dix fois la population de la France.
Rank Site Catégorie Unique Visitors
(users) Reach Page Views Advertising
1 facebook.com Social Networks 540, 000,000 34.9% 570, 000, 000,000 Yes
2 youtube.com Online Video 490. 000,000 31.6% 69,000, 000,000 Yes
3 yahoo.com Web Portals 450, 000,000 29% 70, 000 000,000 Yes
4 live.com Search Engines 370 000,000 23.9% 36. 000 000,000 Yes
5 wikipedia.org Dictionaries & Encyclopedias 310 000,000 19.8% 7 ,000 ,000. 000 No
Classement des 100 sites les plus visités sur le web. http://www.google.com/adplanner/static/top1000/
Cette présentation nous a montré l’ampleur et la diversité des médias sociaux qu’ont
engendrés le web 2.0 et les nouvelles technologies de l’information et de la communication. Pour
résumer aujourd’hui un couple marié sur huit, aux USA est le fruit d’une rencontre via les médias
sociaux. Facebook est plus fort que Google en termes de trafic quotidien. En moins d’un an,
Facebook a dépassé les 200 millions d’utilisateurs (à titre de comparaison la télévision a atteint 50
millions d’utilisateurs...en 13 ans!). Si Facebook était un pays, il serait classé numéro 3 en
nombre d’habitants. Par ailleurs, 80% des entreprises utilisent les médias sociaux au moment de
recruter (95% de ces dernières utilisent LinkedIn).Youtube, Wikipedia, blogs, tout y passe... Mais
ce qu’il faut retenir surtout c’est que tous ces sites ont des retombées importantes en termes de
réputation et de profitabilité :
Logo Facebook
45
- 34% des bloggeurs partagent leur avis sur des marques ou des entreprises sur leurs blogs.
- 78% des gens se fient aux recommandations d’un tiers, 14% ont confiance en la publicité.62
Il n’empêche que le phénomène Facebook, fait peur, et c’est à travers un autre média : la
télévision, qui tente de nous faire prendre conscience du « risque » que représente ce réseau
social, comme le dis Virginie Spies dans son Sémioblog, lors de son article Facebook ou la peur
des réseaux sociaux, du 4 décembre 2008, le réseau est bien souvent présenté comme un lieu ou
tout peux se passer sans vergogne, Ce nouveau moyen de communication peut effectivement :
« permettre d’afficher son intimité aux yeux de tous, de trouver de la drogue, et qui peut vous «
rendre fou », et même tuer ».Ce changement de statut du média qui ne s’adresse plus à une foule
mais à un individu perturbe fondamentalement la conception actuelle que nous avons des médias.
Ces chiffres pour le moins parlants et étonnants, nous interpellent sur la question des
médias traditionnels. Le public qui est susceptible d’être touché par les médias sociaux est
énorme, le développement du cyber journalisme, ainsi que l’appropriation des médias sociaux
pour développer leur structure et leur entreprise peut-il remettre en cause les médias traditionnels
que nous connaissons déjà depuis des années?
8-médias sociaux, la communication du futur.
8-1- Un média à moindre coût.
De tout temps le développement des nouvelles technologies de l’information et de la
communication (NTIC) a été l’instigateur à l’origine des différentes crises qu’ont pu subir les
autres industries traditionnelles des médias. En effet, la télévision a été accusée de « tueur du
cinéma », et Internet celui de la « mort » de la presse écrite. Nous opposons face à cette
communication 2.0, la communication traditionnelle, écrite, télévisuelle, radiophonique.
Une structure doit toujours transmettre de l’information à son public, à sa cible, ses
clients, ou spectateurs. Cependant l’importance et l’impact croissant des nouvelles technologies
attirent le regard de toutes les industries qui voient en ce nouveau média une fabuleuse vitrine
technologique à moindre coût.
Le développement de l’achat d’espace publicitaire et le marché des data (comme nous
l’avons évoqué plus haut) fait rage, en vue de l’audience immense que représente les médias
62
Blog, Culture Buzz, SOCIAL MEDIA REVOLUTION - "Le 21ème siècle sera social" http://www.culture-
buzz.fr/blog/Social-Media-Revolution-3589.html, mai 2010
46
sociaux et l’opportunité qu’elle offre de cibler au moyen des socio- styles un type d’individu
précis avec des besoins clairement identifiés, ce qui est un atout maître qu’il vaut mieux avoir
dans son jeu.
Le premier témoin de cette mutation fut le développement des sites Internet. Aujourd’hui
nous pouvons dire que le premier réflexe d’une entreprise, association ou autre structure
publicitaire, lorsqu’elle veut se faire connaitre est de créer un site Internet. Ce site à un coût en
investissement, environ 10 000 euros, mais en comparaison du coût réel engendré par des
publications traditionnelles, tels les encarts publicitaires dans la PQR, ces dépenses restent
minimes voire marginales. Pour étayer nos propos nous comparerons le prix de la création d’un
site Internet à celui d’une communication d’une structure culturelle. Nous prendrons ici l’exemple
de la Scène Nationale63.
: Tableau bilan année 2009, Scène nationale de Cavaillon
La diffusion de l’information de la Scène nationale coûte 81 884 euros, même si cela ne
représente que 5, 30% du budget global, ce coût final n’est donc pas prohibitif. Si nous voulons
comparer cette solution aux dépenses occasionnées par celles du site Internet de la structure il est
tout autrement en matière budgétaire.
611600 SS TRAIT. DEVLP SITE INTERNET 4 000 10 000 -6 000 Tableau bilan, sous traitement site Internet, Scène nationale de Cavaillon, 2009
8-2- Un média offrant des possibilités de communication diverses.
On peut alors se rendre compte que le site Internet et son développement n’est qu’une part
infinitésimale du budget de la Scène nationale, qui pourtant offre de multiples opportunités,
comme par exemple les lettres d’informations (newsletters), les mails, l’ajout de commentaires et
surtout l’apport d’informations complémentaires (vidéos, articles, liens) que les spectateurs
63 Résultats 2009 de la structure.
Prévisionnel 2009
Réalisé 2009 Ecart
611450 SS TRAIT. ROUTAGE + AFFICHAGE 12 000 13 153 -1 153
623100 INFORM. GENERALE 31 000 29 251 1 749
623200 INFORM. SPECTACLES+IMPRIMES 28 000 39 520
-11 520
71 000 81 884 10 924
TOTAL PRODUITS 1 508 429 1 526 391 -17 963
47
réclament. Ce qui peut expliquer un tel engouement des structures traditionnelles vers ces
nouvelles technologies. Nous évoluons donc dans une ère d’hypermédiatisation et de
surinformation où les phénomènes de surcharge cognitive se généralisent, alors qu’auparavant ils
étaient associés à des contextes précis de situations professionnelles exigeantes.
L’impact grandissant des technologies pour le numérique dans la vie privée et publique
des citoyens, peut expliquer cette mutation de la communication. Le web social leur permet
désormais de faire du journalisme citoyen, d’accéder à la création de contenu de divertissement,
ou de contribuer à l’écriture collective d’un article (exemple Wikipédia). Cette société de
« l’usage contributif » des médias nous montre que les individus interagissent entre eux, et que ce
comportement « en réseaux » influence par la suite de façon subjective leurs pratiques64. Le
simple fait de recevoir des informations directement comme il pourrait l’être avec la presse, la
télévision ou la radio, perd de sa légitimité car elle passe par un canal médian qui appartient à la
sphère professionnelle et qui s’éloigne de plus en plus de l’aspect collaboratif demandé par les
individus. Par exemple 51% des utilisateurs français de Twitter s’en servent avant tout pour
rechercher, échanger ou lire de l’information65. De plus la rapidité de consultation en temps réel
qu’offre ces médias leur génère un attrait supplémentaire. Par exemple, le 16 janvier 2009 le vol
US Airways Flight 1549 s’écrase dans la Baie d’Hudson, le décollage a eu lieu à 15h26, de
LaGuardia New York, 15h36 la première photo de l’avion sombrant dans la baie apparaît sur
Twitter via TwitPic, à 15h48 : c’est le premier média traditionnel qui retransmet l’information.
Même s’il ne s’agit que de quelques minutes d’informations les médias sociaux ont été cette fois
encore les premiers à relater le scoop.
Mais quel est l’intérêt pour les entreprises, les médias, les institutions de se mettre à leur
tour à l’heure des médias sociaux ? Etre présents sur les médias sociaux permet notamment d’être
rapidement identifiables par les prospects que pourraient rechercher leur entreprise. C’est aussi
une façon de fidéliser leurs clients, car ils peuvent convaincre les indécis en donnant une image
dynamique et jeune de ces entreprises. Les médias sociaux permettent ainsi de détecter les attentes
du marché, et enfin, ce qui est sûrement le point le plus important, ils permettent à toute structure
de créer un réseau d’influence considérable.
8-3- Les médias sociaux en chiffres.
64 Lefebvre, Alain ; Les réseaux sociaux: pivot de l'Internet 2.0, M21 Editions, 2005, p24 65 FaberNovel et L’Atelier, 14/04/2009
48
Voici quelques chiffres, pour illustrer concrètement en quoi les médias sociaux peuvent
être un atout majeur pour les entreprises ; le montant des ventes directes réalisées par Dell grâce à
son profil Twitter s’élève à plus de 6,5 millions $ en 200966. Un quart des contenus partagés entre
internautes dans le monde (articles de blogs, liens vers des sites, photos, vidéos, etc.) le sont grâce
à Facebook67. En moyenne le résultat financier obtenu par les marques les plus engagées sur le
web 2.0.ont augmenté de 18% en 2009, alors que les marques les moins engagées doivent, quant à
elles, faire face à des pertes d’en moyenne 6 %.
Il est très important de garder en mémoire qu’Internet est un média rapide qui peut coûter cher, et
qu’il est primordial de garder sous contrôle son image car l’e-réputation est la façade de
l’entreprise sur Internet, à travers le monde.
Nous avons pu démontrer ci-dessus que les médias sociaux représentent une force
considérable que ce soit au niveau économique, sociétal, et humain. Ces différents traits des
médias sociaux ont réussi en l’espace de quelques années à implanter un nouveau mode de
communication qui repose essentiellement sur les internautes. Donnant une légitimité prégnante
aux individus, ils installent désormais les citoyens au cœur de l’information. Voilà la raison pour
laquelle les médias sociaux pourraient être les médias du futur. Intéressons nous maintenant de
plus prés au statut de ces internautes et à leurs particularités.
66 Source : NetEco, 02/2009 67 Source : Kranf, 03/04/2009
49
II – Le spectateur, un nouveau statut
1- Qu’est ce qu’un spectateur ?
1- 1 – Historique
Plusieurs grands philosophes ont théorisé la question du spectateur de théâtre au fil des
siècles. L’origine du théâtre occidental remonte à la tragédie grecque, née au 5ème siècle avant
J.C. Aristote, dans la lignée de Platon et Démocrite, et développe le concept de la catharsis : la
tragédie est « l’imitation qui est faite par des personnages en action […] et qui, suscitant pitié et
crainte, opère la purgation propre à de pareilles émotions »68. Cette conception classique du
théâtre influencera son évolution durant les siècles suivants. Comme Agnès Chemama (directrice
des publics au Théâtre Nationale de Chaillot) « Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui n’aiment
pas le théâtre […] parce qu’ils n’ont pas rencontré un acteur, une œuvre, une mise en scène qui
[…] les a amenés pas seulement vers la catharsis classique, mais au moins vers la volonté de se
secouer »). On peut comprendre par ces propos une limite à la posture du spectateur, que nous
étudierons ultérieurement lorsque nous aborderons le changement de comportement du spectateur.
En 1872, Friedrich Nietzsche propose une nouvelle approche de la tragédie, qu’il
interprète comme un art dionysiaque (La naissance de la tragédie). Le principe dionysiaque
repose sur la perte de l’individualité et la passion d’être un autre. Par ailleurs, Sigmund Freud met
en évidence le rapport entre l’illusion théâtrale et le jeu du « fort-da » qui permet à l’enfant de
maîtriser l’angoisse de la séparation entre lui et sa mère en faisant apparaître et disparaître un
objet. La principale source de plaisir au théâtre résiderait en fait dans la fonction scopique, c’est-
à-dire dans le seul fait de regarder. Le spectateur assiste, fasciné, à l’apparition et la disparition
des acteurs tout au long de la pièce69.
1-2- Le spectateur moderne
Aujourd’hui comme le dit Christian Ruby70, le consensus autour de l’idée que le
spectateur est un public formaté et façonné par les médias et la société du spectacle, a développé
la « bêtise », voire la « crétinerie » par le biais de la téléréalité. Ce fait nouveau de la contre-
culture est peut-être dû tout simplement à un phénomène d’inculture où intervient le brouillage
68 Marie-Claude, Hubert, Le théâtre, Armand Colin, 2003, p106 69 Idem, p 29 70 Docteur en philosophie, enseignant, chargé de cours sur le serveur audiosup.net de l’Université de Nanterre (Paris 10),
Chargé de cours à l’antenne parisienne de l’Université de Chicago, Membre de l’Association pour le Développement de
l’Histoire culturelle, membre du Comité de Rédaction des revues Raison Présente, Espaces Temps et Les Cahiers de
l’Éducation permanente (accs. Belgique).
50
perpétuel dans un mouvement brownien des repères culturels. Deux mythes cependant perdurent
autour de l’idée du spectateur : en premier lieu il serait, et ceci est un point de vue, dit
« nostalgique », le spectateur d’autrefois qui aurait été d’abord un individu cultivé ; en second
lieu, l’autre mythe, résidant autour du même individu, est qu’il conviendrait ensuite de réserver
aux experts en art le soin de décider de la norme culturelle de ce qui est bien ou mal pour les uns
ou pour les autres. A ce stade de la réflexion, le philosophe choisit donc de laisser de côté ces
présupposés archaïques. Il rappelle alors qu’il n’existe a priori ni spectateur, ni public en soi. Ce
spectateur ne naîtrait donc pas tel quel, il le deviendrait a posteriori au fil du temps. Le spectateur
a besoin d’un art certain de l’élaboration de soi et d’être en corrélation avec une proposition
artistique définie. La construction de l’identité du spectateur est en formation continuelle, sa
relation à l’œuvre est toujours empreinte d’une réactivité critique71.
La vision qu’une structure a de son spectateur n’a donc cessé d’évoluer au fil des siècles.
Focalisons-nous à présent sur la perception actuelle de la construction du parcours initiatique de
l’archétype du spectateur. Puis nous verrons ultérieurement en quoi les nouvelles technologies ont
contribué à cette évolution, au moyen d’exemples concrets de spectateurs prenant notamment une
place prégnante au sein de leur structure spectatorielle.
1- 3 – Pourquoi ce changement ?
Au théâtre du XXe siècle il appartient d’avoir voulu renouer avec le théâtre des origines,
« désembourgeoiser » le théâtre, revenir à l’essentiel : à partir de la révolution opérée par les
symbolistes et les surréalistes, à la recherche de la découverte.
Des formes dramatiques étrangères vont permettre ensuite de faire avancer la recherche théâtrale
vers de nouvelles formes d’une grande diversité esthétique. Désormais, la mise en scène du corps
se fait quasi chorégraphique, grâce aux jeux de lumières qui mettent en valeur les gestes de
l’acteur, ses déplacements, ses expressions de visage. Le travail du metteur en scène devient
prépondérant, aussi bien pour diriger l’acteur, dans la recherche de l’ «interprétation authentique»
(Stanislavski), que pour organiser l’espace, l’éclairage, la sonorisation.
Nous allons donc, à présent, nous intéresser plus particulièrement à celle de la posture du
spectateur au sein d’une mise en scène en mutation. Ce regard critique va passer par l’analyse de
la place du public dans un théâtre lui même, et par la relation entre l’espace scénique et les
spectateurs. Nous négligerons le théâtre de nos ancêtres qui imposait par la mise en scène une
71 Chrstian Ruby, interview Le Jt du off, http://jtduoff.net/spip.php?article770, 29 mars 2010
51
relation spécifique entre le spectacle et son spectateur. Ce qui nous intéresse tout particulièrement
aujourd’hui c’est bien la posture moderne de ce dernier.
La séparation entre l’espace scénique et la scène se fait par ce qui est communément
appelé le « quatrième mur », dans le théâtre naturaliste : mur imaginaire séparant la scène de la
salle72, « la salle n’est pas le miroir de la scène et le public répond, silencieusement ou non, agit
sur les fictions qu’on lui propose, s’inquiète moins des conventions scolaires ou idéologiques que
du plaisir qu’il prend, de la gêne qu’il ressent73 ».
Le développement du théâtre contemporain, l’émergence des arts numériques combinés à
l’essor des nouveaux moyens de communication et donc d’expression sont peut-être en train de
faire trembler ce quatrième mur. L’apparition d’œuvres collaboratives hors les murs du théâtre
(les arts de la rue), les œuvres mettant en scène les nouvelles technologies (de « Comme je
l’entends », selon Benjamin Dupé), les expérimentations faites par les centres nationaux d’écriture
du spectacle (Sondes 03#10, le spectateur 2.0). La Chartreuse de Villeneuve-Lès-Avignon montre
et prouve que les référentiels du théâtre d’aujourd’hui sont en train de changer, et que le
spectateur y prend une place grandissante, le plaçant par moment au centre, autour, dans l’espace
scénique lui-même. Le spectateur est comme investi d’un nouveau rôle, un rôle qui n’est plus
celui de porter un regard sur une œuvre, pour certes la commenter auprès de ses amis, et suivre
les critiques émises par des professionnels dont la légitimité est reconnue de tous.
1-4- Le spectateur vis-à-vis des nouvelles technologies.
Les nouvelles technologies et nous entendons par là essentiellement Internet et la
téléphonie mobile, puis les médias sociaux, ont permis au public de se conforter et de développer
ce nouveau rôle qui leur été attribué. A travers l’espace d’expression que leur procure Internet ils
ont pu alors saisir l’opportunité de s’exprimer publiquement sur la toile. Le spectateur a alors
trouvé un moyen de prolonger sa propre expérience du spectacle vu désormais par le plus grand
nombre, de se l’approprier et de la retranscrire en ces mots, et avec ce ressentis. L’expérience du
« voir ensemble74 » s’exprimant seule face à tous, est le moyen qui a remporté un grand succès
auprès de ces spectateurs en quête de légitimité via le blog. Nous reviendrons à cet effet sur
l’exemple du blog plus en détail par la suite dans notre mémoire. L’expansion des médias sociaux
et leur vulgarisation dans notre société n’ont pas échappé à nos spectateurs en quête d’expression
72 Pavis, Patrice, Dictionnaire du théâtre, 2e éd., Paris, Messidor/Éd. sociales, 1987, p 477 73 Delbime, Roger, Le quatrième mur: regards sociologiques sur la relation théâtrale, Editions Lansman, 1990 74 Ethis, Emmanuel, Sociologie du cinéma et de ses publics, Armand Colin- Sociologie 128 ,2009
52
publique, que ce soit les réseaux sociaux, les microblogs, les publications, les vidéos, les forums
de discussions tout a été pris d’assaut et fut transformé au profit de l’expression des ressentis
artistiques. Il est clair que la vocation de ces médias n’est pas seulement de s’exprimer, mais aussi
de créer comme une réaction en chaîne afin qu’une communauté d’avis se crée autour de ces
individus qui restent les leaders d’opinion parmi la foule des spectateurs.
1-5- Le modèle du Blog
Le blog, à l’origine fut un modèle pour tous les internautes. Apparu en 1997, il n’a cessé
depuis de prendre de l’ampleur, et aujourd’hui un blog se crée toutes les secondes75, il s’agit d’un
outil qui permet de façon simple de s’exprimer de façon anonyme ou non, grâce à du texte, des
images, des sons, des vidéos. Le spectateur devient critique de l’œuvre qu’il a payé pour voir, il
peut juger, il s’exprime, il émet son opinion. Ce nouveau statut a quelque peu perturbé les
structures culturelles, qui ont eu soudainement à gérer une nouvelle source de perturbations
venant directement des spectateurs et s’exprimant de façon transversale pour les autres
spectateurs. Prenons l’exemple de Pascal Bély, auteur du blog Le tadorne 76 qui a au fil du temps
acquis, dans la région Paca, une réelle notoriété dans la critique de spectacle. Il fut même invité à
animer la conférence des « Réseaux RP Languedoc-Roussillon » en mai dernier77.
Nous pouvons voir à travers l’exemple de Pascal Bély et les préoccupations du réseau des
relations publiques des structures culturelles de la région Languedoc – Roussillon (plus quelques
structures en PACA) que le nouveau spectateur et sa gestion est désormais au centre de toutes les
préoccupations. Le spectateur devient-il un médiateur culturel ? Qui veut ce changement ? Que
font les structures en réaction à ce nouveau phénomène ?
75 Le Glatin, Marc. Internet : un séisme dans la culture. Éditions l'Attribut, 2007, p25 76 http://www.festivals.over-blog.com/, visuel en annexe 13 77 Jeudi 22 avril à Nîmes, le thème : « Le spectateur 2.0 : quel lien créer entre les structures et les spectateurs ».
53
2- Evolution du statut du spectateur : Qui est à l’origine du changement ?
2- 1 – Le spectateur au pouvoir de l’expression de ses ressentis
Avec l’exemple de Pascal Bély nous avons pu percevoir un des nombreux moyens mis à
disposition des spectateurs pour exprimer leurs ressentis. Dans l’ouvrage « Comment le web
change le monde : l’alchimie des multitudes » un terme est mis en avant pour qualifier ce type
d’internautes qui prend possession des outils mis à leurs dispositions, celui de « webacteur ».
Après avoir pensé l’expression « webonautes » qui donnait une idée du rôle actif des internautes
sur la toile, le choix c’est finalement porté sur « webacteur » pour amplifier le fait qu’il a la
capacité de produire, agir, modifier, façonner le web. En plus d’être un simple moyen
d’expression le web possède la qualité exceptionnelle de pouvoir tout archiver et conserver. Ainsi
un article posté, ou un tweet, ou un commentaire, reste gravé dans la toile et peut être retrouvé
même des années plus tard. L’intemporalité de ce média en fait également une de ses forces.
Ce « webacteur » culturel dans le cas du spectacle vivant peut être un fabuleux médiateur
pour les structures, s’il a aimé ce qu’on lui a proposé il dilapidera l’idée au gré du web. Lors de
nos entretiens individuels il est systématiquement ressorti que lorsqu’une personne souhaitait
avoir des avis sur un spectacle, un produit, … il se tournait instinctivement vers le net. Pas
uniquement vers des blogs, vers l’utilisation des forums ou des sites tels que cityvox, Agoravox,
ou Oùsortir ? Ces derniers rencontrent un succès certain (3 200 000 visiteurs au mois d’août pour
cityvox)
Intéressons nous alors au point de vue d’Emmanuel Ethis78 concernant le sujet de
l’expression des ressentis des spectateurs, selon lui le fait de confronter des idées entre spectaeurs
donne à tout un chacun l’opportunité de pouvoir raffiner, rediscuter et donc avoir un nouvel avis
sur le sujet. Ces « microréajustement » , « microjustifications » de l’avis personnel que nous
portons, sont alors polis jusqu’à notre avis ou notre perception change radicalement. On voit alors
l’importance , premièrement de l’échange entre spectateur, et deuxièmement que l’influence que
peut avoir un individu spectateurs sur autre spectateur du même type, peut aller jusqu’à l’abandon
de son jugement.
Ce phénomène fait apparaitre un double phénomène qui partage en deux catégories les
spectateurs, tous les deux utilisant le web pour leurs pratiques culturelles. D’un côté les
webacteurs qui agissent sur le web, qui produisent du contenu (exemple : Pascal Bély, Laurent
Bourbousson), et de l’autre, ceux qui les consultent pour avis, qui commentent parfois mais qui
78
ETHIS, Emmanuel, Pour une po(ï)étique du questionnaire en sociologie de la culture: le spectateur imaginé, L'Harmattan,
Paris, 2004 p29
54
n’estiment pas avoir la légitimité nécessaire à une production de critique publique. La honte est
d’être un sujet actif sur des pensées, ou sur la sous-estimation de ses connaissances artistiques
freinent d’ores et déjà certains spectateurs dans leur appropriation du web. Les « webacteurs »
actifs s’expriment souvent par envie personnelle profonde, lors de notre rencontre avec Pascal
Bély, il nous expliquait ainsi avoir ouvert son blog, car il ne se reconnaissait pas dans les critiques
de professionnels qu’il pouvait lire ou entendre. Il était en désaccord avec ce qui émanait du
milieu de la culture à un niveau professionnel, la sensation de frustration, d’injustice et de
désaccord l’a alors poussé à s’exprimer lui-même directement.
Un point commun prédomine dans ces différents types d’utilisateurs du web, ils ont tous
les deux recours à l’intelligence collective79, la foule est plus perspicace que l’individu. Cette
intelligence collective s’appuie sur quatre fondements essentiels :
- la diversité d’opinions
- l’indépendance
- la décentralisation ou l’utilisation de chaque spécialisation
- l’Agrégation
Chaque outil collaboratif qu’utilisent les spectateurs doit répondre à ces règles pour fonctionner et
être utile à tous. La transversalité dans la création du savoir est totale.
Enfin une idée qu’il ne faut pas sous-estimer et que toutes ces petites mains, toute cette
intelligence collective, toute cette publicité, toute cette promotion qui peut se dégager du net, pour
jouer sur la fréquentation d’un lieu n’a pas de coût virtuel. Les « webacteurs » sont des
travailleurs bénévoles80 leur opinion pèse lourd, mais coûte peu d’argent. Voilà l’intérêt des
structures de connaître ces leaders d’opinion virtuels et de faire en sorte, que ces amateurs
d’expression libre puissent être en leur faveur. Voyons maintenant que font les institutions pour
suivre cette mouvance, afin de ne pas subir les affres de la réalité virtuelle qui peut vite leur
tourner le dos.
2- 2 – Les institutions à l’impulsion de ces changements.
Longtemps protégés par un statut de lieux culturel respectable, les critiques n’émanent pas
du public. Sans doute, la pression des professionnels de la critique et l’importance de l’image
79
Gervais, Jean-François .Web 2.0 Les internautes au pouvoir: Blogs, Réseaux sociaux, Partage de vidéos, Mashups...,
Dunod, 2007, p121 80 Pisani, Francis ; Piotet, Dominique. Comment le web change le monde: L'alchimie des multitudes, Pearson Education
France, 2008, p98
55
transmise dans les médias étaient à l’origine primordiales, mais aujourd’hui avec Internet et la
masse de données qui peuvent être émises par tout un chacun amplifie la nécessité pour les
structures culturelles de tenter gérer leur identité numérique. Des outils sont mis à leurs
dispositions pour tenter d’opérer un contrôle de cette image qui prend une place de plus en plus
importante, comme par exemple : l’audit d’image web, la veille de réputation, la création et le
placement de contenus, le référencement, la création de sites relais, les relations publiques
blogueurs, la connaissance approfondie des médias du web.
L’influence des « webacteurs » comme nous avons pu le souligner précédemment pousse
les structures à se mettre elles aussi à l’heure du 2.0, afin de pouvoir garder sous contrôle leur
image, et surtout gérer leur e-réputation. Ainsi en ignorant ces nouveaux médias le risque est réel
de paraître en retard avec le virtuel, et de rester en décalage avec son public internaute , qui, lui,
se sert du web. Rares sont donc les structures culturelles qui ne possèdent pas de site Internet. Par
exemple, en juin 2010 la dernière Scène Nationale n’ayant pas de site Internet a dû ouvrir
finalement le sien. Les blogs sont donc aussi un outil largement utilisé par les institutions, et il est
toujours possible de le mettre directement en lien sur le site de la structure, cela donne un coté
humain à cette vitalisation des personnes.
L’évolution récente de nos sociétés intègre et reconfigure les valeurs et les modes opératoires
de l’art, en particulier tel qu’il s’est lui-même développé depuis la fin de la Seconde guerre
mondiale. L’art reste marqué par une constante approche critique du déjà-donné et par la
proposition de dispositifs cherchant à renouveler notre expérience émotionnelle et perceptive
du monde. Mais les mondes de l’art évoluent dans le contexte d’une culture qui impose
désormais de nouveaux formats et horizons, existentiels autant qu’institutionnels,
symboliques autant qu’organisationnels.81
Aujourd’hui plus de deux mille quatre cent théâtres sont répertoriés sur Facebook, y
compris le Théâtre de Cavaillon. Cependant il est encore difficile de savoir comment se servir des
réseaux sociaux à titre professionnel. Que mettre sur cet espace de communication? Des
informations pratiques, des annonces, des vidéos, comme le souligne Pascal Bély82 « les
structures ont souvent du mal à utiliser à bon escient les réseaux sociaux, il n’est pas tout d’avoir
sa page Facebook, il faut réussir à y créer une dynamique, à susciter des échanges, à engranger
des réactions». La mise en valeur de règles et d’usages définis de ces nouveaux médias, ont donné
81 Henry, Philippe Spectacle vivant et culture d’aujourd’hui, Une filière artistique à reconfigure, PUG, Paris, 2009, p 19 82 Jeudi 22 avril à Nîmes, le thème : Le spectateur 2.0 : quel lien créer entre les structures et les spectateurs.
56
naissance à de nouveaux emplois ceux de community-manager83. S’installer sur les médias
sociaux et pouvoir s’y développer est un travail de longue haleine, et la richesse des réseaux
requis y est considérable.
2-3- Le Web 2.0, ou le spectateur libre.
L’émancipation du public grâce au 2.0, crée un autre phénomène qui demande aux
institutions d’être à l’écoute de son public. La distanciation et la nouvelle posture que demande le
spectateur, engendrent le besoin de développer une nouvelle forme de communication. Ainsi la
légitimité et le statut nouveau que leur procure les nouvelles technologies sont peut-être le
symbole d’un besoin d’égalité au sein des théâtres (et autres lieux culturels). Il est nécessaire de
penser une communication transversale, complétant la communication descendante verticale
traditionnelle. Le public ne se contente plus d’une communication venant de la structure, de la
direction, de façon pyramidale. Il a besoin, par une inversion de structure pyramidale, d’une
communication venant de la base où il sent qu’il a désormais sa place, qu’il peut intervenir et où il
est valorisé à sa juste valeur. Ce comportement a été très bien intégré par la Scène nationale de
Martigues, Les Salins, où des tables rondes ont été organisées en fin de saison 2009/2010, suite à
une baisse de fréquentation des spectateurs du théâtre. Le but était précisément de regrouper une
« communauté de spectateurs » pour repenser la relation des Salins avec leurs propres spectateurs.
Dans cet exemple la communication transversale est totale, sachant que l’atelier, ne fut animé par
aucun membre de la structure, Pascal Bély, en tant que consultant, s’étant chargé de cette mission
pour la circonstance.
Les nouvelles technologies et l’emploi qui peut en être fait suscitent une agitation dans
tous les domaines, nous avons pu (durant Marseille 2.0) prendre connaissance de ce qui était
réalisé par les structures régionales ou nationales pour dynamiser leur visibilité sur la toile. Nous
avons pensé qu’il était intéressant de donner quelques exemples concrets (pour illustrer notre
propos) : le site Internet de La Provence, qui était jusqu’au début de l’année une simple page avec
la une de l’édition du jour, s’est transformée en une plateforme d’archives, avec une rubrique en
direct qui s’apparente à une page Twitter, et qui donne des informations en permanence cela a
créé une dynamique à l’information. Les modifications ont servi utilement, et la fréquentation du
site de la Provence a augmenté de plus de 60% en l’espace de six mois. Le deuxième exemple que
nous pouvons donner est l’événement mené par Diane Dubray, consultante et auteure du blog
83 Poste qui consiste à faire évoluer et à rendre visible une entreprise, un événement, une action markéting sur les réseaux
sociaux.
57
Buzzeum.com, qui a fait de La nuit des musées84 un événement muséal 2.0. C'est-à-dire cette
jeune fille a réussi à créer un réseau englobant des musées de la région parisienne, et du reste de la
France. Le soir de la nuit des musées toutes ces structures qui étaient reliées en réseaux entre
elles grâce à une page Twitter, ont été projetées sur écran géant dans les halls des musées ou en
installant des postes de consultations supplémentaires pour que les visiteurs puissent réagir et
interagir toute la soirée. Cet événement 2 .0 a rassemblé des individus lambda et une structure
culturelle sur une même plateforme de communication, pour échanger des informations sur leur
expérience vécue, leur coup de cœur et leur déception. La page Twitter de cet événement a été une
sorte de guide des musées actualisé en temps direct sur la toile. « Les nouvelles technologies
doivent être conçues comme une chance d'accompagner les formes de la création
numérique ».85
84
Annexe 14, visuel de la page Twitter, de la nuit des musées. 85
http://www.mediapart.fr/club/blog/emmanuel-ethis/190710/avignon-2010-la-culture-la-jeunesse-les-elites-etc
Avignon 2010 : la Culture, la jeunesse, les élites, etc.
19 Juillet 2010
58
3- Du spectateur au « spect-acteur » 86.
3- 1- « webacteurs », spectateurs 2.0 même combat ?
Selon Jean-Marc Leveratto, le spectacle est l’occasion d’une interaction physique non
seulement avec des œuvres d’art, mais, à travers elles, avec des personnes étrangères dont on
reconnaît la dignité sociale et artistique. Le spectacle authentifie la sensibilité au même objet que
la situation permet aux participants de se confirmer mutuellement : « il sert à l’individu à
éprouver la réalité sociale des émotions qui, dans la vie réelle, l’attachent à un réseau de choses
et de personnes que le spectacle lui permet de ressentir comme proches »87. Ainsi, « si on le
réinscrit dans l’échange social, le spectacle est […] moins une chose qu’une situation de
communication d’une émotion »88.
Cette situation de communication mettant au centre de l’échange le spectateur, peut
expliquer l’évolution de son statut, on constate alors que l’expérience vécue est primordiale, le
contexte socioculturel qui l’entoure venant alors interférer dans la relation entre le spectateur et
les œuvres. Ce modèle du spectateur en mutation, notamment grâce aux nouvelles technologies et
au web, amplifie le phénomène que nous avons décrit plus haut comme une prise en main de ses
ressentis.
Le premier vecteur de cette mutation peut être le besoin de communication transversale, la
volonté dans le théâtre contemporain de percuter le spectateur au plus profond de ses ressentis,
crée alors autour du public une conjoncture qui favorise le développement des idées personnelles
et engendre une dynamique conversationnelle autour des œuvres. Nous avons pu constater lors du
traitement des données du questionnaire réalisé à la Scène nationale, que le spectateur accordait
une grande place à la discussion sur place avec ses amis après une représentation.
Nous pouvons donc nous demander si justement la société au versant individualiste
grandissant, où tout se transforme en virtuel (relations amoureuses, amitiés, informations) n’est
pas la cause de cette évolution du changement de statut qui s’est opérée chez le spectateur. De
plus le fait qu’Internet puisse « professionnaliser » l’internaute en lui donnant la possibilité de
s’exprimer publiquement et générant une audience, conforte le spectateur dans sa légitimité de
commentateur des œuvres qu’il choisit de « vivre ». Ce statut était totalement impensable
auparavant, comme le souligne Jean-Marc Leveratto en mettant au premier plan les propos de
Pierre Bourdieu, selon qui « les intellectuels cultivent un véritable fétichisme envers l’œuvre
86 Gervais, Jean-François .Web 2.0 Les internautes au pouvoir: Blogs, Réseaux sociaux, Partage de vidéos, Mashups...,
Dunod, 2007, p5 87 Jean-Marc Leveratto, Introduction à l’anthropologie du spectacle, Ed. La dispute, 2006, p 80 88 Idem, p 319
59
d’art89 ». A leurs yeux, le spectacle impose une certaine attention, destinée au respect d’une
relique où la considération d’un travail impose au spectateur un sacrifice de sa personne durant un
temps donné. Certains vont jusqu’à sacraliser le travail de l’artiste dans le sens étymologique de
« torture », si bien qu’il serait indigne d’évaluer le spectacle en termes de plaisir, et donc du
couple plaisir-douleur. Le manque de plaisir devient presque synonyme de satisfaction. Le
processus de plaisir inversé prend alors ici une dimension sociale.
Si nous nous penchons plus attentivement sur les propos de Pierre Bourdieu nous pouvons
nous demander si toutes les sortes de spectacle vivant se prêtent à une telle évolution du
spectateur. Nous avons pu dire que le théâtre contemporain voulait faire réagir cependant le
spectateur. Selon Pascal Bély, consultant en médias sociaux et bloggeur, « le spectateur 2.0
n'existe pas! Internet n'est que l'outil qui révèle un positionnement. Je reste convaincu que le
spectateur "autonome" existe en dehors de la sphère de l'Internet! Il se trouve que ni l'espace
physique, ni encore moins la toile, ne lui permettent de s'exprimer. […] Mais je persiste à penser
qu’Internet n'est pas l'espace pour le spectateur "émancipé"... Ce spectateur 2.0 émergera quand
un nouveau contrat culturel verra le jour entre artistes, public, métiers du lien social, et
institutions. Dit autrement, le modèle actuel de production et de diffusion ne permet pas
l'émergence de ce spectateur 2.0. Il faut penser un autre modèle»90. Même si les procédés
scéniques sont de plus en plus variés en tentant d’inclure le spectateur dans l’espace scénique
(gradins bi-frontaux, en cercle autour de l’espace scénique, en carré,…). Il semblerait que le réel
spectateur 2.0 ne puisse exister que dans des productions conçues à cet effet. Le spectateur
prenant la parole s’apparenterait alors plus à un spectateur « autonome » ou webacteurs, qu’à un
spectateur 2.0.
A travers son point de vue de spécialiste le bloggeur pose la question du cadre favorisant
le développement de ce spectateur. Lors du festival Hybrides91 où le spectateur 2.0 fut au centre
de toutes les interrogations nous avons eu l’exemple de réels cas de spectateurs 2.0 et de ce que
cela pouvait générer comme type de production. C’est pour toutes ces raisons que nous allons
nous interroger à présent sur le numérique et sur la place que ce dernier accorde au spectateur.
89 Jean-Marc Leveratto, Introduction à l’anthropologie du spectacle, Ed. La dispute, 2006, p 22 90 Publication Facebook, juillet 2010 91 Ayant eu lieu du 27 mars au 2 avril 2010.
60
3- 2 – L’art numérique, le spectateur 2.0 au centre de la création.
Depuis les années 1990 sont apparues de nouvelles formes artistiques, toutes fondées sur
l'usage des technologies numériques images de synthèse, dispositifs interactifs, multi et
hypermédia, art en réseau... Ce phénomène gagne les arts contemporains en général, la photo, le
cinéma, la vidéo, les spectacles vivants qui recourent de plus en plus à ces technologies, se
revivifient et se transforment à leur contact. L’art numérique a toujours été tenu à l’écart du
champ artistique « officiel », car il choisit de rompre avec les supports antérieurs de l’art, leur
continuité, leur objet et leur territoire92.
Tout d’abord, la dimension interactive des œuvres numériques modifie totalement le statut
de l’art en se développant grâce aux nouvelles technologies. En accentuant le nouveau rapport
établi entre le spectateur et l’œuvre. Celui-ci, en agissant directement sur le travail de l’artiste,
devient actif dans la démarche créative. Beaucoup ont opposé l’activité du spectateur à la
passivité du spectateur dans une exposition de peintures, par exemple. Mais plutôt que de
comparer ces deux figures du spectateur intéressons nous à ce que représentent ses différences et
en quoi la création numérique peut –elle être le facteur du développement du « vrai » spectateur
2.0. Dans l’interactivité, le spectateur agit physiquement sur des images qui n’ont pas de réalité
matérielle, alors que le spectateur de la peinture se livre à une réflexion sensible, active, mais
abstraite, sur le tableau, qui, lui, est bien réel.
3-2-1- L’Exemple de l’Hybrides Festival.
Lors de l’Hybrides festival (programme annexe 15), qui s’est tenu du 27 mars au 2 avril
2010 à Montpellier, au centre de création numérique Kawenga, le choix du nom venant de la
volonté de mettre en avant l’aspect d’hybridation de l’art numérique, ce dernier étant considéré
par Bruno Tackels93 comme un aspect du théâtre contemporain.
Ce festival en plus de proposer des réflexions complètes sur le spectateur 2.0 est mis en
relation avec les Sondes de la Chartreuse de Villeneuve-Lès-Avignon, qui présente un grand choix
de spectacles éclectiques répertorié comme art numérique utilisant différents procédés pour
inclure le spectateur dans la création, et donc de transformer ledit spectateur en lui faisant vivre
une expérience sensorielle, émotionnelle ou virtuelle. Nous allons décoder à travers ces articles,
92 Edmond Couchot, Norbert Hillaire, L'art numérique, Flammarion, 2005, p 11 93
Rédacteur en chef de la revue Empreintes d’Hybrides. diffusé lors du festival.
61
que comme le précise Pascal Bély, le spectateur 2.0 existe lorsque les productions se prêtent au
jeu. Les bouleversements profonds des technologies numériques ont introduit dans les modes de
production, de diffusion et de conservation des œuvres, un rapport souterrain mais crucial entre
l'art et la science94.
A cet effet, AJR, est une installation interactive, créée durant l’année 2009/2010, le
procédé utilisé ici pour plonger le spectateur au cœur de la création est la mise en scène. Chaque
spectateur va être emmené à tour de rôle dans un espace scénique défini (un appartement), les
spectateurs peuvent toucher, agir, sur la pièce et sur ces objets sachant que tout acte à une
répercussion (sons, images, flashs,…). Les nouvelles technologies oeuvrent en faveur de la mise
en scène. L’immersion physique du spectateur dans un univers sur lequel il a un pouvoir, rend
l’expérience en accord avec ce qu’en attend un spectateur 2.0. Cette installation veut plonger le
spectateur dans les méandres de son environnement en y montrant les limites et l’importance de
chacun de nos actes.
Notre deuxième exemple, Psychotic room, créé en mars 2009, fait vivre par ailleurs au
spectateur une expérience qui cette fois est du ressort du sensoriel. Les nouvelles technologies
allient la musique, et la 3D. Le spectateur est immergé dans une chambre d’isolement
psychiatrique par le biais d’un casque 3D, grâce à des capteurs infrarouges et des capteurs de
pulsations cardiaques et de ce fait, l’environnement 3D et le son, en sont modifiés en temps réel.
L’installation s’adapte au comportement du spectateur. On se trouve donc ici au cœur d’un
exemple parfait concret de ce que peut être un spectateur 2.0, la « représentation » est évolutive et
elle est créée à partir même de l’individu (pulsations cardiaques).
Le dernier exemple choisi prend appui sur la forme de spectateur que nous avons décrit
supra, dénommé le « webacteur ».Sans doute, comme le montrent ces derniers exemples, ces
« webacteurs » peuvent représenter le spectateur moderne. .Mais il ne faut alors en aucun cas
confondre la posture de ce dernier face à la nouvelle structure, et à son spectateur 2.0. Revenons à
notre exemple précédent, Breaking, faisant référence au terme « breaking news » qui symbolise
des informations courtes, données instantanément, en quelques mots (modèle type du bandeau
défilant en bas de l’écran sur BBC). Cette création imaginée en 2009 n’a pas réellement de date de
création, il s’agit d’un spectacle évolutif. Breaking, se base sur les flux d’informations déclenchés
par les usagers de Twitter. Il inscrit donc la représentation dans la temporalité d’un événement.
94
Edmond Couchot, Norbert Hillaire, L'art numérique, Flammarion, 2005, p67
62
Lors de l’Hybrides Festival, le thème de Breaking était le tremblement de terme en Haïti,
le spectateur revivait l’événement uniquement à travers les tweets postés à travers le monde au
moment du tremblement de terre. Les réseaux sociaux ont été au centre de la création, le
« webcateur » étant alors transformé en acteur de la représentation. Ici nous avons à étudier un
autre type de profil, car le spectateur ne peut pas réellement intervenir sur la création de
l’évènement. Cependant, le fait que ce soit un individu qui, à ce moment là, ait écrit ses propres
ressentis, nous montre un nouvel aspect de « l’art numérique ». Cet art est précisément celui
d’utiliser les actions des hommes pour en faire une œuvre d’art transmissible à un autre
groupement d’individus. Dans la perpendicularité des activités, la création est transversale et nous
permet d’aborder un nouvel aspect du spectateur 2.0, inconsciemment auteur d’une œuvre95.
La situation actuelle de l’art montre qu’il s’éloigne de plus en plus de la linéarité. Dans ce
contexte, les nouvelles technologies ne peuvent plus être que de simples perfectionnements
instrumentaux. Au seuil critique qu’elles ont atteint, elles restructurent non seulement le champ
des techniques et de l’art, mais aussi l’ensemble de nos faits et gestes individuels et collectifs. Nos
relations tant à l’esprit qu’au corps sont remises en question. R. Berger affirme que “ la
technologie n’est pas, contrairement à l’idée qu’on s’en fait, purement instrumentale, mais elle a
vertu épistémologique. Au sens propre, la technologie, non seulement produit des objets autres,
mais nous fait voir les choses autrement »96.
Nous pouvons conclure ici que nouvelles technologies et spectateurs 2.0 sont
indissociables, car effectivement le spectateur 2.0 a besoin d’une production qu’il lui est propre, et
l’art numérique semble parfaitement fait pour ce type d’expérience. On réalise alors que le
spectateur défendu auparavant ne peut être identifié comme 2.0, car la confusion est totale dans ce
domaine en mutation constante. Il est difficile de définir ce qui est effectivement 2.0, et l’emploi
du terme est bien souvent anarchique. C’est pour cela que nous avons défini ici clairement deux
spectateurs qui sont intéressants pour la suite de notre étude, à savoir.
- le spectateur autonome, « webacteur », qui contrôle ses émotions et se fait médiateur
culturel, mais qui assiste à des représentations sans pouvoir agir directement sur ce qu’il voit. Son
activité est alors du domaine de la post-représentation.
-le spectateur 2.0, est quant à lui dans une autre temporalité, il agit durant la
représentation sur l’objet création, il en est à la fois l’acteur et le spectateur.
95
Rencontre professionnel, Kawenga, Montpellier, 2 avril 2010, Panorama des projets. 96
R. Berger, Art et technologie au seuil du XXIe siècle ; de l'apoptose à la métamorphose, in Les cinq sens de la
création ; art technologie, sensorialité, 1996.
63
Dans les deux cas les nouvelles technologies sont au centre des préoccupations même si l’usage
(usus), n’en est pas le même. L’un utilise le média sociaux et les nouvelles technologies pour
transmettre, l’autre l’utilise pour créer.
Se pose alors la question de l’égalité sociale face aux nouvelles technologies, l’émergence
d’un nouveau public est-il possible ? Le public plus traditionnel peut-il être touché par ce type
d’art et accéder finalement au profil du spectateur 2.0 ?
64
4-L’émergence d’un nouveau public est-il réellement possible ?
Nous avons donc pu constater que le spectateur 2.0 répond à des règles de
productions spécifiques. La question est donc de savoir si tous les spectateurs peuvent avoir accès
à cette posture et si nous sommes tous égaux face à ces nouvelles technologies génératrices de
création du théâtre contemporain. Sommes nous tous égaux face aux nouvelles technologies ?
4-1- La Fracture numérique.
Cependant un fossé se creuse entre les générations, et l’égalité n’est pas acquise partout
face aux nouvelles technologies car la « fracture numérique » ou « digital divide » fait rage dans
le monde entre le Nord suréquipé et le Sud sous-développé. Il s’agit d’un phénomène de
polarisation autour de la dimension universelle de la mise en œuvre de la « société
d’information » moderne. Ce terme désigne le « gap technologique » qui se creuse entre ceux qui
utilisent les technologies de l’information et de la communication (TIC) pour leur
accomplissement personnel ou professionnel et ceux qui ne sont pas en état de les exploiter faute
de pouvoir avoir accès à l’équipement ou aux connaissances nécessaires97.
L’ouvrage d’Olivier Donnat sur les pratiques culturelles des Français à l’ère du numérique
peut nous permettre d’identifier ce public exclu dans notre propre pays. Le premier critère qui
apparaît est l’exclusion générationnelle, car ainsi seulement 13 % des 65 ans et plus ont utilisé
leur ordinateur à des fins personnelles au cours du dernier mois en 2008 (certes contre 1% en
1997) ; cependant pour ceux qui est de la tranche d’âge des 15-24 ans et 25-34 ans ils ont utilisé
respectivement à 89% et 81% leur ordinateur à des fins personnelles au cours du dernier mois
(21% et 16% en 1997). Pour ces derniers, on peut remarquer que leur adaptabilité est plus
importante98.
L’autre critère qui peut être également un facteur de cette fracture numérique est
l’appartenance à la classe sociale alors que 76% des actifs ont un emploi de cadres ou de
professions intellectuelles supérieurs qui utilisent Internet à des fins personnelles au cours du
dernier mois et à 93% quotidiennement. De plus, seulement 30% des actifs en emploi de la CSP
ouvrier ont utilisé Internet pour le même usage, alors que 50% l’ont utilisé quotidiennement.
97
Bernard Cornu, La « société de l’information » : glossaire critique, La documentation française, Paris, 2005,
p 75
98Olivier, Donnat ; Les pratiques culturelles des Français à l’ère du numérique, p 46
65
Ces deux critères nous montrent bien les caractéristiques de cette fracture , le coût de
l’équipement et la nécessité de détenir des connaissances spécifiques pour l’emploi d’Internet et
des nouvelles technologies en général, ce qui laisse une partie de la société sur le bord du chemin
informatique et des NTIC. Le point positif en vue de ces chiffres est. que d’ici une vingtaine
d’années la génération 15-24 ans sera dans la tranche des adultes qui n'auront pas, eux, comme
leurs parents cette non connaissance des TIC. C’est à ce moment là qu’il sera intéressant de voir
si la posture du spectateur 2.0 a pris toute son ampleur. Dans la deuxième partie de notre mémoire
nous aborderons ce point de façon détaillée, au moyen d’un exemple lorsque nous traiterons plus
précisément des spectateurs de la Scène nationale de Cavaillon face aux nouvelles technologies du
numérique. Eric Bultel99, fait le même constat que ce que nous avons pu faire précédemment.
C’est-à-dire que « Pour combattre l'illectronisme, c'est-à-dire les obstacles culturels rencontrés
dans la maîtrise des technologies de l'information, Il faut un projet culturel. »
Pour conclure cette partie, nous pouvons en déduire qu’en vue du développement
d’Internet et des médias sociaux, du succès grandissant du Web 2.0 et de la prise de conscience
collective de l’importance des nouvelles technologies de l’information dans la communication
d’une structure, il est maintenant nécessaire pour le spectacle vivant de développer des projets
mettant au cœur les nouvelles technologies.
Cette nouvelle façon d’appréhender le spectacle sous l’angle technologique devrait
permettre de toucher le plus grand nombre de personnes afin de développer de façon équitable
l’accès des publics à l’ère de la création artistique mêlant nouvelles technologies et théâtre. La
volonté de structure comme la Scène nationale de créer des expériences pour ses spectateurs est
primordiale100. L’art numérique est en train de s’infiltrer dans le théâtre contemporain de manière
significative, il est en voie d’être reconnu comme une part de la création contemporaine totale.
Ce n’est que cette « vulgarisation » des arts numériques comme le fit autrefois Méliès
pour le cinéma « en enchantant la matière vulgaire » qui pourra désormais engendrer la
généralisation du spectateur 2.0. Tant que ces efforts ne seront pas faits les nouvelles technologies
modifieront certes les modes d’expression et d’influence qu’ont les spectateurs sur une structure
culturelle ou l’e-réputation d’un spectacle, mais cependant ils n’arriveront toujours pas à agir et à
intervenir au cœur de la création.
99 Directeur de la médiathèque Jean Boudou, La Salvetat-Peyralès 100
Présentation du spectacle Hiroshima, mon amour, Julien Bouffier, DATE !
66
Même si le début de liberté qu’ont pu trouver les spectateurs à travers les nouveaux
médias sociaux qui poussent les plus curieux à s’intéresser et à s’impliquer dans les processus de
création, il est maintenant primordial que les structures prennent en compte les nouvelles envies et
habitus exprimées par leur public afin de développer un accompagnement de ces publics quel que
soit leur âge, leur sexe ou leur milieu social vers un nouveau rôle de spectateur au centre de la
création, celui du spectateur 2.0.
67
Deuxième partie : Le spectateur au cœur de la
communication 2010.
I - L’évolution de la communication de la Scène nationale
1 - Présentation de la Scène nationale de Cavaillon
1-1- Historique du Théâtre :
En 1980 la municipalité de Cavaillon et le Ministère de la Culture décident la création du
premier Centre Culturel de Cavaillon : « un complexe administratif et culturel sur des terrains en
proche périphérie du centre-ville, route des Courses ».La première directrice du lieu sera Yolande
Padilla. Elle fut nommée à la direction du nouveau « centre Culturel de Cavaillon et du Vaucluse
», qui fut inauguré le 26 octobre 1984. Le « CCC » ou « le 3C » communément appelé alors,
obtiendra en 1991 le label Scène national, là aussi, sous l’impulsion de la ville, du Ministère de la
Culture et de toute l’équipe du Théâtre.
Depuis plus de vingt ans, trois directions se sont succédées, chacune marquant des temps
forts dans la vie du théâtre. En 1992, Bernard Montagne est nommé directeur. Son projet
artistique continue l’action de Yolande Padilla en axant son action sur la création contemporaine
et, en 1993, la Scène nationale prend le nom de Théâtre de Cavaillon. En 2001, Jean-Michel
Gremillet prend la direction de la Scène Nationale. Lors de la saison 2001-2002, en prolongement
des premiers « hors les murs » mis en place par Bernard Montagne, la Scène nationale développe
les Nomades. Désormais, le Théâtre de Cavaillon n’est plus le seul lieu de représentations, et la
Scène nationale propose plusieurs spectacles par an dans différentes villes et villages du territoire.
Enfin, en 2007 après d’importants travaux de rénovation (hall, gradins, scène), il est organisée
une ré-inauguration du Théâtre de Cavaillon - scène nationale. Un Théâtre qu’on inaugure, une
mission que l’on affirme. Ces travaux implanteront et conforteront la place du théâtre sur le
territoire, le théâtre est maintenant clairement identifié et appelé « la Scène nationale ».
Le théâtre est une association de loi 1901, le président de l’association est Monsieur Jean-
Pierre Ducret, la structure compte onze membres actifs, tous avec un rôle prédéfini dans le
fonctionnement du théâtre.
68
1-2- Les missions de la Scène Nationale.
Le label de Scène nationale contient lui-même des valeurs et des scissions que Cavaillon
se doit de respecter, au nom du service public :
- s’affirmer comme un lieu de production artistique de référence nationale, dans
les domaines de la culture contemporaine.
- organiser la diffusion et la confrontation des formes artistiques en privilégiant la
création contemporaine.
- participer dans son aire d’implantation (voire dans le département et la région) à
une action de développement culturel favorisant de nouveaux comportements à l’égard de la
création artistique et une meilleure insertion sociale de celle-ci.
Le label "scène nationale" a été créé en 1991 par le Ministère de la Culture, après une étude
réalisée à l’époque par son Directeur du Théâtre et des Spectacles, Bernard Faivre d’Arcier. Dans
un premier temps, une quarantaine de maisons de la Culture et de centres d’action culturelle furent
conventionnés, rejoints deux ans plus tard par une vingtaine d’autres. Jamais une scène nationale
ne s’est vue retirer son agrément.
1-3- Le projet du directeur
Le projet du directeur est de s’inscrire dans l’esprit de la Charte des missions de service
public pour le spectacle vivant, lequel rappelle en introduction que l’engagement de l’Etat en
faveur de l’art et de la culture relève d’abord d’une conception et d’une exigence de la
démocratie:
- Favoriser l’accès de tous aux œuvres comme aux pratiques culturelles.
- Nourrir le débat collectif et la vie sociale d’une présence forte de la création artistique, en
reconnaissant aux artistes la liberté totale dans leur travail de création et de diffusion.
- Garantir la plus grande liberté de chaque citoyen dans le choix de ses pratiques culturelles.
Ainsi, la programmation proposée fait une large part aux questions traitant de citoyenneté.
Ainsi, le projet défend une politique tarifaire volontariste, et offre avec les Nomades un outil
incomparable de démocratie culturelle.
A cet effet sont offertes aux créateurs des résidences, des coproductions, des rencontres avec le
public du territoire. Et enfin des actions culturelles sont proposées, pas obligatoirement en
accompagnement d’un spectacle.
Chaque saison, entre septembre et juin, une trentaine de spectacles sont proposés, soit une
bonne centaine de représentations, leur nombre variant suivant que celles-ci se déroulent au
69
Théâtre de Cavaillon ou en Nomades, ou encore lorsque le spectacle peut s’adresser à un public
scolaire.
La programmation accueille des artistes de dimension nationale au moins, en veillant aux
parcours de fidélité qui permettent au public de parcourir assidûment l’œuvre d’un créateur. Elle
veille aussi à la présence d’artistes de la région, en privilégiant notamment ceux faisant appel à de
nouvelles esthétiques.
La programmation (spectacles, actions culturelles, ateliers) est pluridisciplinaire, faite de
théâtre, de danse, de musique, et d’arts indisciplinaires (cirques, arts de la rue, marionnettes, etc.)
favorisant la venue de nouveaux publics.
Les choix artistiques doivent toujours être influencés par leur capacité à interroger le
monde dans lequel on vit, à permettre au citoyen de se construire le meilleur regard, le meilleur
sens critique.
Les Nomades mis en place en 2001 sont l’exemple marquant des actions menées à la
Scène nationale, cette action répond au besoin de participation, dans son aire d’implantation, à
une action culturelle de développement. Les Nomades qui sont aujourd’hui présents sur quinze
communes de la périphérie de Cavaillon (84, 13, 30), servent la création contemporaine et
l’amènent directement aux spectateurs.
1-4- La programmation
La programmation du Théâtre est essentiellement tournée vers la création contemporaine
tous domaines confondus. Les saisons débutent en septembre et se terminent en juin, le théâtre
programme en général trente à trente cinq spectacles, et entre cent et cent vingt représentations.
La danse, le théâtre, les résidences, les arts indisciplinaires, le jeune public, et la musique
composent la programmation du théâtre (cf. voir la programmation de cette saison). Les arts
numériques et les nouvelles technologies de l’information ont une place importante cette année
2010/2011 dans la programmation avec l’adaptation d’Hiroshima, mon amour, par Julien Bouffier
(17 et 18 mars 2011). Ces représentations seront suivies d’une rencontre pour débattre autour de la
création numérique. Ensuite, il en va de même avec Reset, de Cyril Teste, le 1er avril, qui mêlera
création et vidéos, enfin Benjamin Duppé avec son spectacle Comme je l’entends, du 5 au 13
février fera vivre une expérience musicale innovante mettant les actions du public et son
comportement en interjections avec son œuvre. Cela montre que la Scène Nationale a une réelle
volonté de développer les créations numériques et expérimentales en son sein.
70
Il est important de préciser ici que la relation entre le personnel de la structure et le public
est primordial pour le Théâtre de Cavaillon, car chaque soir de spectacle un bar tapas est ouvert
pour le public une heure et demi avant le début du spectacle. Le foyer est aussi un lieu convivial
où le public aime se retrouver (voir résultats de l’enquête) et échanger des points de vue autour
d’un verre. Une des caractéristiques de ce fonctionnement qui paraît pourtant banal, est qu’aucun
personnel extérieur ne vient intervenir directement ou servir les soirs de spectacle. Toutes les
prestations de service (ouverture des portes, billetterie, bar, distribution des feuilles de salle) sont
assurées par le personnel permanent du théâtre. Ainsi une réelle relation de complicité s’installe
entre le public et « sa » structure culturelle, sur laquelle il peut mettre des visages et donc
s’identifier.
Nous allons maintenant aborder de façon plus détaillée, à travers l’analyse de différents
documents de communication, l’image que la Scène nationale transmet d’elle, de son public et du
lien qu’ils entretiennent réciproquement101.
101 Organigramme de la Scène nationale de Cavaillon en annexe 16
71
II – Les publics de la Scène nationale : « Les pratiques numériques des
spectateurs de la Scène nationale de Cavaillon »
2.1- La population du Théâtre
2.1.1 - Le public
Dans le domaine du spectacle vivant, il est difficile de cibler un public car le plus souvent,
l’offre précède la demande. Néanmoins, il est essentiel pour une salle de spectacle comme la
Scène nationale de Cavaillon de connaître ses publics d’autant plus en cette période de transition.
Certes, Olivier Donnat admet que « la nécessité de « connaître ses publics » est depuis longtemps
déjà une figure rhétorique obligée pour la plupart des responsables culturels, mais dans bon
nombre de domaines, notamment celui du spectacle vivant, les intentions sont loin de se traduire
toujours en actes »102. Il s’agit pourtant d’une priorité : « Réintroduire avec force la
problématique du public dans le jeu de la subvention, sans tomber dans les facilités du discours
sur la démocratisation, commence par une meilleure connaissance des usagers des équipements,
de leur profil, de leurs comportements et de leurs attentes, mais aussi de ceux qui ont cessé de
venir (les abandonnistes) et ceux qui ne sont jamais venus (le « non public») »103.
Ces raisons se sont posées au cœur du théâtre de Cavaillon car la volonté de connaître et
d’identifier les profils de ses spectateurs est une envie prégnante au sein de la structure et c’est
pour ces raisons que l’enquête sociologique fut menée. Plus qu’une simple curiosité, il s’agit là
d’un besoin pour ne pas laisser le fossé se creuser entre l’institution et son public.
La Scène nationale de Cavaillon vise différents publics du territoire, hormis le public
occasionnel qui se rend au théâtre pour une représentation particulière quelques fois dans la
saison, dans le but de voir une création, un metteur en scène ou un spectacle.
D’autres publics sont plus clairement ciblés par l’institution : les abonnés du Théâtre ont pour
nom les Pécous, ils sont plus souvent des fidèles traditionnels de la communication papier que des
nouvelles technologies.
102 Olivier, Donnat, Démocratisation de la culture :fin … et suite ?, article issu d’une rencontre à Nantes, le 21 novembre
2006 au Conseil général de Loire Atlantique dans le cadre d’un cycle de séminaires organisé en partenariat avec
l’Observatoire, p 12 103
Olivier, Donnat, Démocratisation de la culture :fin … et suite
72
2.1.2 – Le questionnaire auto-administré
Le questionnaire diffusé directement dans le théâtre lors de huit représentations a récolté
au final un total de cent quarante deux réponses dont 73% étaient des femmes, contre 24%
d’hommes. Le public, quant à lui était à plus de 43 % âgé de 55 ans et plus, les jeunes (15 à 34
ans) ne représentent par ailleurs 20% du public présent lors de ces représentations. Cela met en
évidence un certain fossé entre les générations dans le public de la Scène nationale de Cavaillon.
On peut voir dans le graphique ci-contre quel que soit l’ancienneté de la fréquentation du
public, il se rend au spectacle dans la
majorité des cas selon une fréquence d’une à
cinq fois par saison. Fait encourageant pour
la structure nous voyons aussi que le plus
grand nombre d’individus se rendant à la
Scène nationale une fois par mois font partie
d’un public qui a une jeune « relation » avec
le lieu (moins de cinq ans).
D’un point de vue sociologique nous pouvons constater que les spectateurs se rendent au
théâtre soit en couple, soit avec des amis (63 sur 177), ou en solitaire. La part d’individus allant
seuls au spectacle n’est pas non plus négligeable (43 sur 177), ce dernier critère à l’appui des
observations que nous avons pu mener de manière informelle sur les lieux mêmes, montrent que
ces individus trouvent dans le théâtre un lieu de sociabilisation.
Habitudes de fréquentation du théatre
Non réponse 3
Seul 43
En couple 66
En famille 35
En groupe 33
Avec des amis 63
Le public de la Scène nationale fréquentant le lieu, pense qu’il apporte à la fois une action
culturelle, de « beaux » spectacles, de la culture, des échanges et de la convivialité (105 sur 177).
Cependant ce qui prédomine dans notre étude reste dans l’esprit collectif des publics en montrant
ancienneté du lieu x fréquence des visites au théâtre
Non réponse
2 1
Depuis + de 20ans
3
117
41
Entre 20 et 10ans
5
27
10
4 3
Entre 10 et 5ans
7
36
12
3 1
Moins de 5 ans
2
12
80
11
Non réponse 1 fois par mois
entre 1 à 5 fois par saison entre 5 à 10 fois par saison
plus de 10 fois par saison Plus d'1 fois par mois
0
80
73
que la Scène nationale est un lieu d’action culturelle. Cela nous conforte également dans
l’hypothèse que le public est touché par la mission qui a été confiée initialement au théâtre.
Nous pouvons aussi mettre en parallèle de ces données collectées avec celles obtenues lors
du questionnaire administré au moyen du web. Dans ce corpus 60% des spectateurs se rendent au
Théâtre seuls, 39% avec des amis et 36% en couple, 15% en famille et 10% en groupe. La venue
au théâtre est un acte plus individualiste, la majorité des sondés interrogés répond s’y rendre seuls.
La nécessité de faire circuler le public et de lui permettre d’échanger est un critère culturel
important. Le covoiturage peut donc être aussi un moyen de mobilité pour créer de l’interaction
entre ce public majoritaire et qui se déplace seul.
Le questionnaire auto-administré montre la fidélisation du public envers la
communication écrite émanant de la structure, 142 sur 177 sondés déclarent se renseigner par ce
moyen de communication, 87 sur 177 plébiscitent également le site Internet de la structure.
Contrairement aux résultats obtenus via le questionnaire web, la communication écrite a une
importance plus considérable pour le public directement présent sur le lieu du spectacle Cela est
révélateur d’une habitude ou plutôt d’un habitus selon Bourdieu ainsi qu’une relation particulière
à la structure. Le fétichisme des objets est plus important chez les spectateurs fidèles au lieu du
théâtre, alors que ceux utilisant considérablement le site Internet ont perdu cette matérialisation de
l’information au gré de sa numérisation. Le type d’information le plus sollicité est celui
concernant l’accès à des informations sur le spectacle en lui-même (metteur en scène, acteurs,…)
2.1.3 – Le questionnaire web Ce bilan concerne uniquement les résultats obtenus au sondage web, les résultats peuvent
être différents des résultats enquêtés au théâtre. Il a eu 138 réponses au questionnaire, dont 72%
de femmes, il s’agit dans la majorité des cas enregistrés de questions ouvertes, c'est-à-dire que les
internautes peuvent fournir plusieurs réponses.
Les résultats des deux questionnaires ne sont pas fusionnés mais analysés volontairement
séparément. Nous avons pu nous rendre compte
que la même question posée lors des interviews,
en face à face, ou par web faisait émerger des
résultats et donc bien des habitus différents. Une
sorte d’écrémage ou une mise en action de la
fracture numérique s’est donc effectuée alors
directement devant nos yeux.
74
Le public sondé est soit abonné directement à la lettre d’information du théâtre soit il
appartient à la catégorie des visiteurs du site Internet de la structure. Le dépouillement des
résultats montre que 68% des individus sondés viennent au théâtre depuis dix ans et aussi depuis
moins de cinq ans, alors que seulement 7% fréquentent tout de même le lieu depuis plus de 20
ans. Ce point constaté dans notre étude diverge cependant des informations enregistrées lors du
transfert de la version papier vers la version informatique. A cet effet 15% sont des spectateurs
assidus depuis dix à vingt ans. Contrairement au questionnaire auto-administré, les usagers ayant
répondu par le web, sont des spectateurs récents. Ce constat fait déjà ressortir une différence dans
la population qui utilise le média du web, ainsi que nous pouvons le vérifier dans le graphique ci-
dessous, le public ayant alors un habitus jeune avec la Scène nationale (moins de cinq ans).
Pour 62% d’entre eux ce jeune public se rend à des représentations théâtrales une à cinq
fois par saison, et 20% cinq à dix fois par saison. À l’extrémité du quartile une minorité de 4%
vient au spectacle une fois par mois, et 3 % plus de 10 fois par saison. Cela prouve que les
personnes qui ont répondu à l’enquête web sont des personnes qui fréquentent le théâtre depuis
peu de temps de dix à un an mais aussi qu’il s’agit d’un public occasionnel, qui s’y déplace
ponctuellement. En proportion de l’offre que propose la Scène nationale, leur fréquentation est
moindre même si elle n’est pas négligeable. Ainsi, ce public est attiré pour 69% par des
propositions théâtrales et à 56% par la danse.
Quant à la perception qu’a le public de la Scène nationale, les enquêtés se sont focalisées
sur le choix entre quatre différentes modalités de réponses: un premier lieu d’éducation culturelle,
qui est un lieu où l’on peut voir de beaux spectacles, un second lieu où l’on se cultive, ou bien un
troisième lieu d’échanges et de convivialité ou alors, en dernier lieu c’est tout cela à la fois.
Ainsi, 30% pensent que la Scène
nationale c'est tout cela à la fois, mais la
définition qui prédomine à 20% c’est un
lien d’éducation culturelle. Les activités
de la Scène nationale sont donc bien
définies et les missions du théâtre sont
identifiées à bon escient par le public. La
Scène nationale remplit donc à tous
égards son rôle de référent culturel, tant dans la qualité des œuvres proposées que dans la qualité
de l’accueil qui y est dispensé.
75
Pour se renseigner et connaitre l’activité de la structure les deux modes principaux de
d’information sont la communication écrite (programme de saison, mi-saison,…) pour 68% et le
site Internet à concurrence de 71%. Sachant que le questionnaire utilise le média web il est
intéressant de voir et de comparer cette réponse avec celle obtenue par le questionnaire papier.
Nous observons donc que le site Internet et la communication papier sont en parallèle et que les
individus ne recherchent pas les mêmes informations sur l’un ou sur l’autre média. Viennent
ensuite la transmission orale par le « bouche à oreilles » avec 20% des réponses. Nous percevons
ici que même si le spectateur a utilisé le web comme moyen de réponse au questionnaire, il est
évident que le rôle de la communication traditionnelle est tout aussi important pour les
spectateurs. L’un ne remplace pas l’autre, ils sont alors pressentis comme complémentaires. Pour
ce qui est de la communication les spectateurs privilégient le site Internet à 70% et la
communication papier (programme de saison, de mi-saison, documents nomades) à 68%
seulement. S’agissant des entretiens qualitatifs que nous avons mené, ils ont montré que les
spectateurs ne recherchaient pas le même type d’informations sur les deux médias.
Les documents papier comprennent des informations plus profondes, des textes, des présentations,
et lorsque les spectateurs souhaitent avoir des avis sur le spectacle ils se tournent pour plus de
54% vers la presse écrite et à seulement 38% vers la critique sur Internet
Le document web du site Internet comprend des informations pratiques : lieu, heures, metteur en
scène, commentaires,…
Pour ce qui est de leurs pratiques d’Internet, quatre vingt neuf individus ont répondu
utiliser Internet plusieurs fois par jour.
Ils montrent également tous une grande
pratique du média web pour leurs
pratiques culturelles. De même, 88%
fréquentent régulièrement un autre site
Internet d’institutions culturelles dans la
liste proposée et il apparaît que le site
Internet du festival d’Avignon est le
plus fréquenté.
Les spectateurs pensent à plus de 60% que la critique est une remarque intéressante, par
contre, seul 1,45% de la population concernée trouve cela scandaleux et 14% pensent que cela est
très intéressant. Il convient de noter que pour 54%, ils consultent la critique théâtrale dans la
76
presse écrite (d’où l’importance d’une bonne couverture médiatique sur ce média là). Nous
pouvons suivre de près à 38% la critique sur l’Internet (blog, …) puis pour 34 % à la radio. Une
fois de plus on se rend compte que tout d’abord le public utilise le web dans ses pratiques de
spectateurs et que cet usage est souvent couplé avec celui d’un média plus traditionnel, celui de la
communication papier. Le public évolue donc dans ses pratiques tout en restant fidèle au média de
base.
Pour ce qui est de la façon dont échange le public pour exprimer son ressenti ou son point
de vue, pour une grande majorité de 70% d’entre eux ils échangent avec leurs amis présents à la
représentation, puis pour 38% sur place, mais avec d’autres spectateurs, d’où la vision de la SN
comme lieu de convivialité par le public. In fine seulement 8% des enquêtés s’expriment sur
Internet (via blog, Facebook ou Twitter)
Quant à l’évolution du site Internet, les spectateurs pensent à plus de 65% qu’il est plus simple
d’utilisation et plus interactif
En lien avec l’évolution du site Internet, la plus grande partie des sondés souhaiterait que
l’espace personnel serve à acheter leurs
billets en ligne (48%). Pour 42% des
spectateurs qui achètent leurs billets pour des
représentations sur Internet, seulement 17%
sont destinés pour les billets estampillés au
nom de la Scène nationale. Enfin, dans les
commentaires et lors des entretiens qualitatifs, il est ressorti que le pourcentage d’achat de billets
sur Internet est faible notamment car les Pécous ne peuvent pas se servir de cet outil.
Nous avons obtenu plusieurs fois la réponse à l’item « non », car Pécous ». Et vu le pourcentage
d’individus qui souhaitent acheter leurs billets pour la SN sur le futur espace personnel, cela
montre que la SN a ainsi tout intérêt à développer cet outil parce qu’il est souhaité par le public.
2.1.4 – Les entretiens individuels.
Les différents entretiens menés nous ont servis à faire émerger des tendances chez les
spectateurs, ils nous ont également permis d’expliciter ou de mieux comprendre certaines
réponses reçues au questionnaire. Ce qui ressort de l’étude peut être classé en différents thèmes :
Figure 1 : Utilisez vous une billetterie en ligne?
77
tout d’abord ce sont les besoins que les spectateurs attendent d’Internet, l’usage qu’ils ont de ce
média, leur relation avec la structure. Cette partie entretien s’est volontairement focalisée sur les
nouvelles technologies du numérique et leur utilisation.
Nous avons pu nous rendre compte que les spectateurs interrogés avaient une utilisation
« primaire » d’Internet, ils l’utilisent de façon « basic » pour la recherche première de
renseignements comme on pourrait passer un simple « coup de téléphone ». Il nous a alors été
montré qu’ils n’exploitaient pas non plus la masse d’informations mise à leur disposition dans les
différentes bases de données. Nous avons donc réalisé que ces spectateurs ne souhaitaient pas
s’impliquer ou se créer une vie « virtuelle ». Donner son avis et faire partager ses impressions
font, in fine, que cela n’a que peu d’importance pour les sondés. Émergent alors les problèmes de
légitimité de l’expression à deux reprises avec Martine Grégoire et Isabelle Lauretta, car même si
elles appréciaient et consultaient les blogs et commentaires, présents par exemple sur le site
Internet de la Scène nationale, elles ne se permettraient donc jamais d’intervenir à leur tour, afin
de ne pas être crédible du fait de leurs « simples statuts » de spectatrices.
Pour tous les différents individus le site Internet reste par exemple un usage
complémentaire du livret de saison. Nous avons pu comprendre alors la complémentarité que
montraient les spectateurs dans leurs réponses au questionnaire entre la communication papier et
le web. Il est apparu que les contenus des informations recherchées n’étaient pas les mêmes, ainsi
Martine Grégoire, par exemple, attend du site Internet « des informations pratiques, des
documents (ressources) sur des auteurs, des biographies, des vidéos et des informations
annexes », alors que les informations attendues dans la communication papier de la structure sont
plus basées sur l’esthétisme, des textes courts sur les représentations et sur les actions menées par
la structure. Il est apparu à plusieurs reprises que le Chut était le média phare du théâtre, car
curieusement tous connaissaient cette revue sans avoir remarqué au préalable qu’elle ne paraissait
plus. Martine Grégoire a quant à elle, par exemple, conservé tous les Chut… de la saison 2008,
comme des reliques de ses pratiques culturelles.
L’évolution du site Internet a été saluée pour sa simplicité et pour l’accès aux
informations qu’il proposait aux spectateurs. Isabelle Lauretta nous a confié qu’elle pointe
également du doigt le fait qu’un site Internet doit avoir deux objectifs principaux pour les
internautes : d’une part, être efficace, et d’autre part contenir des ressources intrinsèques en
« plus », par rapport à ses concurrents. Le côté esthétique d’un site Internet est également évoqué,
78
car pour eux il est en adéquation totale avec l’image que transmet le théâtre en ses murs et dans la
communication qu’il émet. L’esthétisme volontaire soigné dans tout ce qui sort de la Scène
nationale est souvent repéré par le spectateur comme tel.
Ne connaissant pas les réponses au questionnaire de chacun des individus que nous avons
pu enquêter grâce aux moyens des entretiens individuels, nous ne sommes donc pas en mesure de
donner aujourd’hui de façon exhaustive et complète les résultats des idées prédominantes que
nous aurions pu tirer de ces derniers. Tous les sujets ne sont donc pas abordables ou faisables dans
leur intégralité. Il en restera toujours des zones ombres et des angles morts. Voilà donc pourquoi
dans cette partie nous aurons focalisé notre attention sur le cœur de cible du site Internet et sur
l’utilisation du web par des exemples types des pratiques usuelles de spectateurs avertis.
79
2-2 - Quelles connaissances les spectateurs de la Scène nationale possèdent-ils des
nouvelles technologies du numérique ?
Lors de notre enquête nous avons remarqué que même si Internet était un média
fréquenté par les spectateurs leurs usages en sont limités. En général les spectateurs de la Scène
nationale ont à 70% un usage quotidien d’Internet. Ils utilisent par ailleurs à 90% le site Internet
comme moyen d’information pour se renseigner sur les activités de la Scène nationale (soit 87%
de la communication écrite). De plus 90% des enquêtes disent également ne pas posséder de
Smartphones, et 83% ne sont pas des « amis » sur les réseaux sociaux Facebook avec la Scène
nationale.
Ces derniers index montrent que les spectateurs ont un usage basic du média web. Leurs
utilisations se limitent à utiliser les bases de données qu’offre le web comme moyen
d’information ; ils ne prennent donc que très peu possession du média pour s’exprimer.
On peut se demander quelles sont alors les attentes des spectateurs face aux nouvelles
technologies et plus spécifiquement dans le cas de la Scène nationale.
2- 1 – quelles sont les attentes des spectateurs de la Scène nationale ?
2-1-1 – Ce que recherche les spectateurs dans la communication d’une
structure culturelle
La question 23 « Pour vous un site internet sert avant tout à » nous a montré les attentes
des spectateurs. Il était demandé à ces derniers de classer de 1 à 5 leurs attentes (1 étant la réponse
la plus recherchée).
La réponse ayant été la plus sollicitée est « acheter son billet en ligne », l’essor des
billetteries en ligne104 n’est en effet pas négligeable. Dans sa première version de billetterie on-
line la Scène nationale a opté pour une version légère mais qui a pu se révéler contraignante, car
elle nécessitait l’identification totale de l’acheteur à chaque achat. Dans l’espace réservé aux
commentaires dans cette question, il est souvent apparu la réponse « non, car Pécous » car
effectivement la première version ne permettait pas aux abonnés de théâtre d’acheter leurs billets
par internet du fait qu’ils ne pouvaient pas accéder à leurs comptes. Cette limite identifiée à la
suite du questionnaire a donné naissance à une nouvelle version de la billetterie en ligne avec une
104
Le journal du Net, Théâtre Online voit le bout du tunnel, Emili Leveque, 01/09/2008
http://www.journaldunet.com/0409/040910theatreonline.shtml
80
identification unique, si l’internaute le désire, à un espace personnel. Dans ce cas là, la structure a
parfaitement identifié et devancé les attentes du spectateur.
Ensuite le spectateur émet le souhait d’échanger avec d’autres spectateurs, et comme nous
avons pu le voir précédemment le public a le besoin de s’exprimer après le spectacle. Cet échange
a souvent lieu dans le hall du théâtre, au bar, directement après les représentations. Même si le
public est peu impliqué dans les nouvelles technologies, il semble pourtant vouloir se saisir, si
l’opportunité lui est donnée, de pouvoir s’exprimer et d’échanger sur Internet avec d’autres
spectateurs.
Sur les mêmes bases, avec quasiment moins de voix, les attentes sont de pouvoir donner
son avis critique, et de créer une base de données collective (documents, vidéos, nuage de tags,..).
Il semble qu’émerge ici un point essentiel pour la structure, nous assistons donc à un cas de
webacteurs naissant, n’ayant pas les connaissances nécessaires à une prise de « pouvoir »
personnelle instinctive sur le net. Ce sont des forums d’amis qui n’attendent pourtant que les clés
pour pouvoir s’ouvrir à ce nouveau monde. Cette fois ci encore le théâtre répondra aux attentes de
son public dès la rentrée 2010 avec la mise en place d’espaces personnels collaboratifs.
Les deux dernières options ne concernent pas directement les nouvelles technologies,
elles sont internes à la structure et figurent dans le questionnaire, car elles font l’objet de
réflexions menées au sein de la structure. Il s’agit notamment de l’option : faire du covoiturage
et commander ses repas.
Les réponses que nous avons obtenues, ici, nous permettent de comprendre plus
clairement ce que veulent les spectateurs, et surtout ses attentes permettent de montrer au théâtre
de Cavaillon ce qu’il est nécessaire de développer si l’ont veut correspondre à son public.
En l’accompagnant dans ses démarches d’appropriation du web comme espace de réflexion en lui
créant des fonctionnalités correspondantes à ses envies, la Scène nationale se pose dans une
posture de formateur. La SN peut donc attendre, si le public est correctement accompagné, un
franc succès dans ces nouvelles configurations.
2-1-2 La communication numérique : www.theatredecavaillon.com
Depuis le début de l’année 2009 le site Internet de la Scène nationale a vu sa refonte
totale. Le but fut de créer un espace plus esthétique, plus clair, et plus simple d’utilisation.
81
L’apparition du bandeau flash105 a créé un réel dynamisme dès la page d’accueil. Nous ne ferons
pas d’analyse technique du site Internet, et nous nous focaliserons sur ce qu’il veut transmettre,
sur sa vocation et sur les outils qu’il utilise et qu’il souhaite mettre en actions dans le futur.
L’arborescence du site Internet est disponible en annexe.
Le pari tenté par Vincent Jean de rendre le site Internet plus clair a semblé fonctionner,
ainsi 37% des spectateurs disent trouver le site Internet dans sa nouvelle version plus beau, et
déclarent aimer cette version. Le site répond à la règle des « trois clics » selon laquelle toutes les
informations doivent se trouver à trois clics de souris de la page d’accueil, cette spécificité montre
le côté pratique du site en accord avec le public de la structure.
Ce qui est intéressant dans le cas du site Internet de la Scène nationale, c’est qu’il a été en
décembre 2009, selectionné (avec soixante et un autres projets) dans le projet « Services
numériques culturels innovants 2010 106» par le Ministère de la Culture et de la Communication et
a donc obtenu un financement de 10 000 euros pour mettre en place des services, comme le nom
l’indique « culturels innovants ». La position du spectateur que nous avons définie auparavant
semble alors totalement correspondre au projet. Le public peut être un atout de poids dans la
réussite de ce projet.
La communication numérique du théâtre est en voie, grâce à ce projet, de prendre une toute
nouvelle dimension et permettre à la Scène nationale de créer sa propre communauté de
webacteurs personnelle.
Ce que la Scène nationale souhaite développer au cours de l’année 2010 grâce à ce projet
repose sur deux principaux points :
Le développement des contenus et les ressources disponibles en ligne, avec la création
d'espaces personnels pour les usagers du Théâtre : permettant de lier, après identification, l'accès
aux informations de billetterie et aux ressources documentaires disponibles correspondent aux
choix effectués. La création des ressources pratiques : visite virtuelle du Théâtre, enrichie (en
accès restreint) d'informations techniques est précisée pour les compagnies et les artistes.
L’enrichissement des ressources documentaires : des contenus produits par la Scène nationale
autour des spectacles en ajoutant aux textes habituellement proposés des vidéos réalisées dans le
105
Bandeau permanent en haut de l’écran, défilant de droite à gauche et présentant l’ensemble de la saison en
cours. 106
Retrouver en annexe 17, la liste complète des projets « services culturels innovants » sélectionnés par le
Ministère de la Culture.
82
cadre d'une WebTV dédiée fait apparaître les différents aspects du spectacle vivant : coulisses,
répétitions, corps de métiers, processus de création, enjeux), de bouquets de liens Internet signalés
par des marques pages (nuages de tags), et l'indication de références bibliographiques (disponibles
à la consultation au Théâtre).
Le deuxième point de ce projet est de favoriser de nouvelles formes de partage grâce à
l’intégration collaborative des ressources documentaires ; rendue possible (après modération et
attribution de signes graphiques distinctifs) grâce à l'ajout par les internautes de liens web, de
commentaires écrits ou enregistrés (audio ou vidéo), de ressources extérieures en rapport avec les
spectacles programmés et les projets en cours. Le développement d'un réseau social à l'usage des
spectateurs de la Scène nationale, sur la base du partage de ces enrichissements des contenus et du
développement d'un système dédié de covoiturage entre adhérents « Pécous » (l'équivalent des
habituels « abonnés »). La création d’une rubrique « Spectacles enrichis », se fait à partir de la
captation vidéo de certains spectacles (emblématiques des différentes dimensions et enjeux de la
création contemporaine dans le spectacle vivant). Ainsi, au moyen de codes d’accès , pendant une
période déterminée, les personnes qui auront vu un spectacle pourront prolonger ou enrichir, à
partir d'une interface dédiée, les commentaires et annotations proposés par une personne (critique,
professeur, artiste...) invitée à produire un regard singulier sur cette œuvre.
La clé de voûte de ce projet intitulé Nué est l’accompagnement du public pour les usages
du web 2.0 et des innovations. Le public en tant qu’individu est au cœur de ce projet et il ne peut
survivre que s’il est porté par son public. C’est pour cela que nous allons maintenant voir
comment il est possible de repenser le public pour faire de ce projet un succès.
2- 3– Est-il nécessaire de repenser la relation entre public et structure culturelle ?
2- 3 -1 – Comment impliquer le spectateur dans le fonctionnement
d’une structure culturelle ?
Comme nous l’avons vu précédemment le public émet clairement la volonté de s’exprimer
sur ses ressentis après une représentation. Que même si 97% disent échanger des idées avec leurs
amis, sur place, après le spectacle, contre seulement 11%107 qui déclarent s’exprimer sur des
blogs, forums ou réseaux sociaux. Cependant ce pourcentage minime peut prendre toute sa
dimension s’il n’est pas laissé pour compte, sachant que pour une certaine tranche d’âge du public
de la Scène nationale ce chiffre est très significatif. Ce phénomène naissant de la foule, ce
107
La question étant à choix multiples nous n’obtenons pas des pourcentages additionnels égaux à 100%
83
frémissement d’individus souhaitant être épaulés pour prendre leur envol sur la toile virtuelle sont
peut être le symbole d’une frustration et d’un sentiment d’exclusion ressenti par le public, auquel
il répond par un besoin de s’exprimer à son tour, pour s’inclure dans une nouvelle communauté,
celle des webacteurs du spectacle vivant.
La nécessité de repenser le type de communication dominant peut être une solution.
Dans la communication il existe deux liens108: le lien vertical et le lien transversal. La
communication transversale s’établit sans hiérarchie, d’égal à égal. La mise en place d’un réseau,
quel qu’il soit, crée du lien transversal qui doit accompagner le lien vertical. C’est un lien
ascendant basé sur du collectif. En revanche, les institutions fonctionnent bien souvent
uniquement avec du lien vertical, ce qui est le cas à la Scène nationale par exemple. Ce lien
vertical est hiérarchique et s’inscrit dans un système pyramidal.
Le lien transversal quant à lui est sans hiérarchie, informel, égalitaire, il ne peut pas être
contrôlé. Le travail en est collectif et fait remonter des valeurs et du sens. C’est donc vers ce lien
qu’il faut se tourner pour répondre correctement aux exigences émises par le public. Dans ce
contexte, les nouvelles technologies viennent aider la communication. L’enjeu est donc de passer
au transversal avec le public. Il est nécessaire de se poser auparavant les bonnes questions : Quels
liens avons-nous avec le public? Quelle est la relation qu’on entretient avec son public ?
La communication et le lien transversal développent le « sensible ». La vraie question est
celle du collectif qui partage une volonté commune et qui dans le cas du théâtre de Cavaillon
l’exprime clairement. La mise en place de ce lien transversal, indispensable pour combler ce
public en manque d’interaction n’est possible que s’il est le fruit d’un vrai projet d’équipe. Il faut
que la personne relais ait une bonne formation théorique sur la communication, cela nécessite a
priori une « collégialité » entre la direction, les artistes et les publics d’une institution.
Le résultat obtenu à la question « souhaiteriez vous être impliqué dans la vie de la Scène
nationale ? » (75% disent clairement que oui). Nous pointons ici du doigt une nouvelle fois la
nécessité de faire bouger les choses, car le risque à long terme est de perdre son public par
manque d’interaction. En vue des actions qui ont été menées aux Salins (Martigues) et en vue des
volontés émises directement par le Ministère de la Culture et de la Communication souhaitant
mettre de nouveaux outils au service du spectateur nous pouvons nous demander qu’elle est la
meilleure manière d’investir ce public dans la vie d’une structure.
108
« Réseau RP Languedoc », Jeudi 22 avril à Nîmes Le spectateur 2.0 : quel lien créer entre les structures et
les spectateurs
84
2-3-2 – Comment constituer un groupe de spectateurs ?
Avant d’aller vers les publics, il est nécessaire de travailler ce concept en interne, et il est
primordial d’imaginer une forme qui correspondra totalement à la structure, à son public, et à son
type de création présentée. Il est donc essentiel, afin de constituer un groupe de spectateurs, de
donner du sens et des valeurs. La méfiance des institutions culturelles lorsque la parole est donnée
aux spectateurs est la peur du feedback. Nous allons voir différents modèles de mutualisation de
spectateurs possibles.
2- 3 -3- Quelle communauté de spectateurs ?
Ce qui peut être intéressant dans le format de communauté, comme collectivité
volontariste réunie par des droits indéniables109, c’est qu’elle peut être réelle ou virtuelle. Elle peut
donner lieu en comité réduit à des rencontres physiques mais elle peut aussi, être d’une ampleur
plus importante et être « virtualisée » afin de toucher un public différent que celui qui va (et qui
prend du temps) pour se rendre à la Scène nationale.
Le point positif de cette communauté c’est qu’elle est hybride et peut permettre à un
nouveau spectateur de prendre part aux échanges. Cependant un spectateur qui n’est pas déjà
impliqué dans la vie du théâtre peut–il réellement être constructif si les réflexions tournent autour
de la vie du lieu et de son fonctionnement. ?
Une autre question se pose également dans ce cas, de la légitimité d’inclure dans une
communauté virtuelle ou réelle le grand nombre d’individus ou de se restreindre aux abonnés du
théâtre (les Pécous) par exemple.
Pour notre part nous pensons qu’il est primordial que la communauté, même si elle est impulsée
par la structure, soit faite de personnes réellement volontaires et prêtes à s’engager sur le long
terme.
2- 3- 4- L’association.
Une association à but non lucratif est un regroupement d'au moins deux personnes qui
décident de mettre en commun des moyens afin d'exercer une activité, sans enrichissement
personnel. Ce qui est intéressant dans l’association, ce sont que les individus qui se regroupent
peuvent obtenir un statut légal, et donc être mis en relation avec la structure de façon officielle et
avoir un réel poids sur le fonctionnement des lieux. Elle peut aussi permettre d’obtenir des fonds
pour le développement des projets sur lesquels ils œuvrent, ce qui représente un atout de poids.
109
Bernard Cornu, La « société de l’information » : glossaire critique, La documentation française, Paris, 2005,
p 43
85
Cependant le risque est grand d’adopter une association de spectateurs avec un statut
légal, il se passera un nouveau phénomène de lien ascendant car ce statut officiel mettrait les
spectateurs joints à cette expérience entre la direction et le public.
2- 3- 5- Le mécénat
Le mécénat qui consiste à promouvoir des arts et des lettres par des commandes
ou des aides financières données par un mécène qui peut être une personne ou une organisation
comme une entreprise. En d’autres termes, il s’agit de demander aux spectateurs, dans notre cas,
de s’investir financièrement au sein d’un théâtre (pour accompagner la création d’un spectacle par
exemple) et donc de lui permettre d’avoir un rôle, et de pouvoir participer à la vie du théâtre.
Même si ce modèle de regroupement de spectateurs semble financièrement très
intéressant, il nous amène très loin de la volonté première de créer du lien avec les spectateurs, de
comprendre leurs besoins, et de les accompagner dans leurs pratiques.
2- 3- 6- Quel modèle pour la Scène nationale ?
Voyons d’abord comment Jean-Michel Gremillet, directeur définit le regroupement de
spectateurs qu’il souhaite créer, et si sa vision de ce groupe correspond à ses attentes.
« Une invitation à installer un espace nouveau d’échanges, de coopérations, d’assemblées,
d’inventions autour des œuvres et des artistes jalonnant la vie de ce Théâtre, c’est changer de
mondanité. Ici, on interroge le monde, en avançant dans son parcours de citoyen, ce qui n’est pas
contraire à l’idée de se divertir et comme le service public de la Culture, parmi tant d’autres, est
menacé (mais pourquoi donc ? c’est une question qu’il faudrait aussi analyser), car l’idée de créer
un autre espace pour les spectateurs s’impose. Partager la communauté de spectateurs de la Scène
nationale sera cet espace de partage entre poésie et démos (le peuple). Mode d’emploi : nous
réunir et trouver au sein de ce groupe celles et ceux qui souhaiteraient « porter le projet » d’une
communauté de spectateurs associés. « Définir quelques règles de jeux simples, énoncer ensemble
les rôles possibles pour chacun. Mettre sur la table quelques sujets, et entendre les envies. Elles
devraient logiquement concerner une autre relation aux artistes proches de la Scène, et pourraient
conduire à installer là une autre complicité, une autre proximité. Co-organiser une série de
rencontres pour nourrir réflexions, contenus, et projets… »110.
110 Livret de saison 2009/2010, Scène nationale de Cavaillon, page 8
86
Que le modèle invoqué de la communauté corresponde le mieux aux volontés émises par
le directeur du théâtre. Il semblerait que, Vincent Jean soit en accord avec ce dernier et soit prêt à
répondre aux attentes. Nous savons de source sûre que, d’ores et déjà, les œuvres sur lesquelles
pourraient travailler dès la rentrée prochaine les spectateurs de la Scène nationale, soient
Hiroshima, mon amour, (Julien Bouffier) et Reset (Cyril Teste) deux œuvres d’art que nous
pouvons qualifier de numériques.
En accord avec les financements obtenus par le Ministère de la Culture, le projet Nué et
les volontés qu’ont pu exprimer les spectateurs lors du questionnaire, il semblerait que la Scène
nationale soit en voie de créer désormais un nouveau concept de spectateur. Le but conjoint serait
donc alors de travailler en parallèle avec les artistes et de développer l’implication de ces
spectateurs dans les nouvelles technologies du numérique. Si tout fonctionne, comme prévu, il se
pourrait que le théâtre de Cavaillon arrive à créer sa communauté de « spectateurs-webacteurs »
87
Conclusion
Nous voici donc parvenue au terme de notre travail d’études et de recherches. Partant de
la question de l’émergence grandissante des nouvelles technologies de l’information et de la
communication dans notre société, nous nous sommes interrogée sur le changement subit par la
communication des structures culturelles et en quoi ce changement pouvait modifier la posture du
spectateur.
Nous avons émis les hypothèses selon lesquelles les nouvelles technologies avaient effectivement
fait évoluer la communication des structures culturelles en prenant une dimension collaborative et
participative croissante, que l’usage d’Internet devenait incontestable et incontournable, et que
grâce à ces outils les spectateurs pouvaient désormais prendre une nouvelle place au sein de la
communication et de ses structures culturelles.
La première hypothèse s’est trouvée validée. Ainsi, en nous appuyant sur l’exemple de la
Scène nationale de Cavaillon, nous avons observé que les moyens de communication traditionnels
(affiches, livret de saison,…) gardaient une place importante dans la communication. Mais que la
nécessité d’utiliser les nouvelles technologies et surtout Internet devenait un élément fondamental.
Nous avons alors pu mettre en évidence que les publics ne trouvaient pas ces deux modes de
communication disparates des mêmes éléments informatifs. Et que, enfin, pour ses publics, il était
nécessaire de développer les deux moyens de communication en parallèle111.
Même si nous avons constaté que tous les spectateurs ne sont pas égaux face aux nouvelles
technologies, notamment du fait de la fracture numérique, une réelle volonté est apparue venant
des spectateurs eux-mêmes pour pouvoir être accompagnés ou du moins que l’on puisse leur
fournir des outils leur permettant de saisir ces nouvelles technologies.
C’est grâce à ce travail que nous avons pu également répondre et valider en partie la
deuxième hypothèse selon laquelle cette mutation de l’information a modifié la posture du
spectateur du spectacle vivant. Nous avons pu mettre en exergue que le spectateur avait pu saisir
l’outil technologique pour exprimer ses ressentis et les partager. Nous avons vu que le Web 2.0
était une base importante de cette autonomisation du spectateur, qui devenait alors un
« webacteur» générateur de données et leader d’opinions. Cependant la fracture numérique cause
un déséquilibre générationnel important dans la mutation du spectateur. De même il est apparu
que la légitimité nécessaire pour s’exprimer sur un sujet culturel par le biais des médias sociaux
peut freiner un certain nombre de public.
111
Voir résultat enquête « Les pratiques numériques des spectateurs de la Scène nationale », mi-juin 2010
88
Nous avons buté également sur une seconde limite à cette « virtualisation » des spectateurs. Ainsi
lorsque nous nous sommes penchée sur la question du spectateur 2.0, nous nous sommes rendue
compte que la mise en place de ces spectateurs ne dépendait pas uniquement du développement
des nouvelles technologies de l’information et de la communication. Ainsi pour développer le
spectateur 2.0 en tant que spectateur au cœur de la création contemporaine interagissant sur la
représentation du fait de ses actions, il nous est apparu que cela n’est possible qu’avec le
développement de la création et de la reconnaissance des arts numériques. L’exemple de
l’Hybrides festival et des Sondes de la Chartreuse de Villeneuve-Lès-Avignon nous ont prouvé
que ce spectateur 2.0, faisait parti des interrogations prégnantes des artistes du théâtre
contemporain.
Cependant pour ce qui est de la communication spectatorielle numérique en elle-même nous
préférons in fine au terme spectateurs 2.0 celui de « webacteurs du spectacle vivant ».
Les questions futures qui peuvent découler de ce travail de recherches sont d’imaginer
quelle pourrait être la future place du spectateur dans l’art contemporain. Serait-il alors possible
un jour de voir le spectateur transformé pouvoir agir sur une représentation? L’évolution et les
mutations que subissent les nouvelles technologies à une vitesse incroyable112, celle de la
nanoseconde, nous pousse à nous demander ce que sera le web 3.0, un outil ultra sensitif où tout
se fera de façon instinctive, avec des procédés de plus en plus simples et des technologies de plus
en plus pointues. Après les réalités croissantes, la géolocalisation ou GPS, le développement des
Smartphones, que sera le monde de demain, une sorte de sphère virtuelle où les relations
humaines ne se feront plus qu’a travers des échanges d’application, de notification sur des
plateformes collaboratives de partage sur la toile « monde ».
Les limites de ce futur peuvent résider dans les failles qui peuvent jaillir dans le système
et mettre des années de référencement à terre, de même le fossé générationnel et économique
numérique peut-il réellement être réduit à une échelle temporelle humaine, ou faudra t’il attendre
cinquante ans pour que les nouvelles générations, qui sont nées avec un clavier et une souris sur
les genoux puissent créer une communauté de spectateurs imprégnés depuis toujours des
nouvelles technologies.
112 François Krug « Le Web est mort » ? Bizarre, son cadavre bouge encore, 19/08/2010, Rue89.com
89
Pour ce qui est du futur entre l’art et la culture du technologique, nous avons vu et nous
pensons qu’il est nécessaire que les structures culturelles accompagnent leurs spectateurs de
manière pédagogique (communauté des spectateurs par exemple) pour permettre à cet art qui peut
sembler non-noble à des amateurs de théâtre « conventionnel », d’être réellement perçu comme
une création contemporaine répondant à de nouvelles règles artistiques et d’utilisation de
nouveaux procédés de mise en scène. C’est là toute la magie du spectacle vivant, qui en fait un
défi permanent pour les institutions comme pour la Scène nationale de Cavaillon, mais aussi pour
sa beauté. Cette beauté doit donc être partagée, et avec Olivier Donnat, nous refusons aussi
d’abandonner l’ambition d’élargissement des publics.
90
Résumé La naissance du Web 2.0 en 2000, a apporté à notre société une nouvelle vision de ce que
pouvaient être les technologies de l’information et de la communication. La création d’une
intelligence collective faite de collaboration et de création de données a mis l’internaute au cœur
de ce nouveau système. Cette nouvelle façon de concevoir la communication et l’expression
affecte désormais tous les domaines de la société.
Le spectacle vivant et la création contemporaine ne sont pas en reste, pour ne pas se faire
dépasser par leur public et pour toujours aller de l’avant, les structures culturelles ont dû adapter
leurs modes de communication et la relation qu’ils entretiennent avec leur public. Les médias
sociaux se sont alors révélés être des atouts de poids, bien souvent incontournables.
Ces médias sociaux ont également fait apparaître une nouvelle figure du spectateur, les
nouvelles technologies ont permis au public de s’exprimer librement et publiquement sur ses
ressentis et ses points de vue. Cette transformation du public passif vers un public autonome
s’appropriant les outils collaboratifs que le web lui offre pousse les structures à repenser, en plus
du relationnel, la création en elle-même. Ce spectateur autonome ou webacteurs du spectacle
vivant peut se révéler un élément primordial de la communication transversale.
Cependant la fracture numérique et son inégale accessibilité aux nouvelles technologies
poussent les structures à imaginer des interactions et des accompagnements pédagogiques
possibles pour son public non-initié. Ce point est primordial en vue du développement d’un
nouvel art numérique mettant le spectateur au cœur de la création. Ce spectateur 2.0 accédant à un
nouveau statut pourrait bien être le monde futur du spectateur du théâtre contemporain.
91
Summary
The birth of the Web 2.0 in 2000 has brought to our society a new view of what
information and communication technologies could be. The elaboration of a collective
understanding, thanks to collaboration and data creation, has put the internet user at the center of
this new system. This new way of conceiving communication and expression has affected every
part of our society of today.
The cultural structures had to adapt their mode of communication and their relationship
they have with the public, so that the performing and contemporary arts don’t get overtaken by
this latter and always forge ahead. In the end, the social media have turned out to be weighty
assets, not to say indispensable.
A new kind of audience emerged from these social media while new technologies have
allowed the public to freely and publicly express itself about its feelings and points of view. This
change from a passive audience to a self-sufficient one, who make good use of the collaborative
tools offered by the Web, drives the structures to rethink not only the relational side but also the
creation itself. This self-sufficient member of the audience may turn out to be an essential element
of sideways communication.
However, the unequal access to new technologies urges the structures to devise new sorts
of interactions and pedagogical means for the uninitiated audience. This point is vital in order to
develop a new digital art which puts the audience at the center of the creation. With a new status,
this audience version 2.0 may well be the future of contemporary theatre.
92
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consacrée au spectateur à l'ère de l'Internet, La Chartreuse, Villeneuve-Lès-Avignon, Centre
national des écritures du spectacle
98
Table des figures
Figure 1 : Devanture Scène nationale de Cavaillon –exemple toile-
Figure 2 : Kakémono saison 2010-2011
Figure 3 : Modèle du Web2.0 selon Tim O’Reilly « Web 2.0 memo map »
Figure 4: Logo Twitter
Figure 5: Logo Facebook
Figure 6 : Tableua croisé question 3 et 4 questionnaire “Les pratiques
numériques des spectateurs de la Scène nationale de Cavaillon” (version
papier)
Figure 7 : Tableau question 6 “Les pratiques numériques des spectateurs de la
Scène nationale de Cavaillon” (version papier)
Figure 8 : Tableau question 2 “Les pratiques numériques des spectateurs de la
Scène nationale de Cavaillon” (version Limesurvey)
Figure 9 : Tableau question 5 “Les pratiques numériques des spectateurs de la
Scène nationale de Cavaillon” (version Limesurvey)
Figure 10: Tableau question 13 “Les pratiques numériques des spectateurs de
la Scène nationale de Cavaillon” (version Limesurvey)
Figure 11 : Tableau question 15 “Les pratiques numériques des spectateurs de
la Scène nationale de Cavaillon” (version Limesurvey)
99
ANNEXES
100
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