afrique competences n°1

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6 compétences africaines des NTIC CHEIKH MODIBO DIARRA, MO IBRAHIM, HAMADOUN TOURÉ, GADOU VINCENT KRAGBÉ, JACQUES AKOSSI AKOSSI, JACQUES BONJAWO Administration publique 1500 F CFA Guide Le blues des fonctionnaires africains Comment faire des études aux Etats-Unis ?

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La victrine internationale des valeurs africaines

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Page 1: AFRIQUE COMPETENCES N°1

6compétences

africainesdes NTIC

CHEIKH MODIBO DIARRA, MO IBRAHIM, HAMADOUN T OURÉ,

GADOU VINCENT KRAGBÉ, JACQUES AKOSSI AKOSSI, JACQUES BONJA WO

Administration publique

1500 F CFA

Guide

Le blues desfonctionnairesafricains

Comment fairedes étudesaux Etats-Unis ?

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Page 3: AFRIQUE COMPETENCES N°1

N° 001 • Mai - Juillet 2008

Société ÉditriceGLOBAL CHALLENGERécépissé N°10/D du

18 avril 2008Dépôt légal en cours

Cocody, route du Lycéetechnique, Immeuble FloridaTél. : (00 225) 22 44 55 09Fax : (00 225) 22 44 55 14

[email protected]

Directeur de publicationHonorat Dé Yedagne

Rédactrice en ChefEdwige H.

Secrétaire de rédactionJean Philippe Kassi

Directeur artistiqueMartial M’Besso

RédactionAurore Amani

François Bambou ( Cameroun)Israel Bebo

Cheick DenisePatrice Kamga ( France)

Elvis KodjoPhilippe-Rogers Konan

Alex de LoukouNicole Mikolo ( Congo Brazza)

Augustin YaoJohn K. Zodzi (Togo)

PhotographeStéphane Goué

RévisionDavid Koffi

Collaborateurs/ChroniqueursZita Odomé Angone ( Espagne)Paulin Djité, Ph D ( Australie)

Dr Issa KaramaBruno Koffi ( Etats-Unis)Médard Koua ( Birmanie)

Théophile KouamouoJonas K.Kouamé

René-François MonckehDr Nathan Musengeshi ( Gabon)

Phil Nomel ( Etats–Unis)Dr Marie-Thérèse Trazo

Matthieu Yagui

PublicitéMaxime Bebo

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 3

aut-il brûler l’Afrique ? Si on regarde ce continent à travers le prisme duprésent, ses seules marques de fabrique sont la guerre, la misère et lesmaladies. Son passé, n’a pu résister aux chocs extérieurs. Ses peupleset ses dirigeants perpétuent la domination étrangère et cultivent le videde la pensée comme si, pour cette partie de la civilisation humaine, c’é-tait la fin de l’Histoire.

L’Afrique est à la périphérie du monde : un continent déclassé, c’est-à-dire qui ne pèse pas lourd sur la balance mondiale, malgré le poids de ses richesses et desa démographie. Un constat, à la fois, amer, accablant et désespérant que tous les médiasdu monde, et leurs multiples relais locaux, ont vocation à entretenir au fil des générations,pour maintenir et reproduire le doute à l’égard de notre propre positivité et favoriser en nousle défaitisme..Que faire ? Notre réponse : illustrer , défendre, promouvoir , valoriser les expertises, lestalents, les savoir faire et les compétences africains, s’att acher audeveloppement du capit al humain et au renforcement des capcités,avec pour ligne d’horizon: la sanctification du travail comme valeurrefuge. Telles sont la légitimité et la raison d’être de ce magazine panafri-cain, dénommé AFRIQUE COMPETENCES, dont vous tenez en main lepremier numéro.

La force de notre conviction intime est telle que nous croyons que notreavenir est encore devant nous. Disons le autrement : ce que notre passéet notre présent nous refusent aujou rd’hui, notre futur nous l’offre demainà bras ouverts. Un futur à réinventer avec de nouveaux modes de régula-tion socio- politiques qui favorisent les meilleurs, c’est-à-dire ceux d’entre-nous à même de tirer la société africaine par le haut, dans toutes les sphè-res de la vie nationale et continentale : économique, sociale, politique, cul-turelle.

A l’orée du cinquantenaire des indépendancesafricaines, nous pensons que le temps est venupour les générations actuelles et à venir deprendre le parti de la grandeur et de l’excellen-ce, en travaillant à faire éclore une nouvelle Afrique qui consacre, célèbre et plébiscitel’Imagination, l’Intelligence, la Raison et …l’Organisation. A notre façon et avec votre sou-tien, nous voulons y contribuer. Hardiment et ardemment.

AFRIQUE COMPÉTENCES s’adresse donc à cette Afrique « inattendûment debout », pourreprendre l’expression d’Aimé Césaire, qui se refuse souverainement à se rendre au festinde l’Universel, accroupie sur son propre destin, dans l’attente naïve d’une invitation d’hon-neur des prétendus « maîtres du monde ». D’autant que les leçons d’un passé encorerécent nous enseignent qu’à ce genre de festin royal, nous serons toujours reçus dans labasse cour de l’Histoire où nous attendent la portion congrue et un avenir en haillons. Nousne devons jamais perdre l’initiative historique, mais toujours garder à l’esprit que nousdevons être le moteur de notre propre accomplissement.

AFRIQUE COMPETENCES veut être le réceptacle de ce souffle conquérant et libérateurqui habite les peuples qui croient en eux, et témoigner, avec engagement et passion, d’uneAfrique sans complexe, définitivement réconciliée avec ses valeurs sûres. Une Afrique quigagne et se présente au Monde avec une nouvelle destinée, telle que l’ont toujours rêvéeses authentiques fils et filles : forte, libre et prospère.

FPar Honorat Dé YedagneDirecteur de Publication

« Inattendûment debout »

nous devons être le moteur denotre propre accomplissement

ÉditorialÉditorial

Page 4: AFRIQUE COMPETENCES N°1

ENTRE PARENTÈSE8

3

• Intellectuels africains face au défide la mondialisation• Management des servicespublics en Afrique

Editorial

SUR LES MARCHES10 L’audacieuse ambition de

Stéphane Eholié

ADMINISTRATION PUBLIQUE14 LE BLUES DES

FONCTIONNAIRES AFRICAINS• TogoLa débrouillardise comme alternative• CamerounEntre misère et corruption• Côte d’IvoireLa guerre dans la guerre• Congo BrazzaDes promesses vite oubliées• ContributionMieux gérer les administrations publiques enAfrique

FORMATION38 LE MALHEUR DES

UNIVERSITESPUBLIQUES ENAFRIQUE• ABIDJANExercice d’exorcismeautour de la violence• OUAGADOUGOUNous avons déjà leLMD• NIAMEYSur la route dela normalisation• UEMOAEn 2012, beaucoup dechoses auront changé• EXCELLENCEUNIVERSITAIRENos états gagneraientà aider le Reesao• Les nouveaux habitsdu BNETD • Où va le CAMPC ?

ENJEUX AFRICAINS54 • La bataille des inventeurs

• Réduction de la fuitedes cerveaux :un enjeu stratégique pourle développement

4 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

sommairesommaire

LES INVITES DU TOIT D’ABIDJAN6 Parcours et crises de compétences

au menu

LE MALHEUR DESUNIVERSITES PUBLIQUESEN AFRIQUE p. 36

MAI - JUILLET 2008 N°001

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L’audacieuse ambition de Stéphane Eholié

En 2012, beaucoup de choses auront changé

PROFIL

CHRONIQUESDES 5 CONTINENTS

58 • AfriquePourquoi je reste• AmériqueSous l’œil de l’oncle SamUn Noir chez les Jaunes• AustralieGood Day Mate, bonjour mon pote• EuropeBuenos Dia de Madrid

EMPLOI ET CARRIERE66 Le Ghana est le premier demandeur de

cadres à haut potentiel

Le Ghana est le premier demandeur decadres à haut potentiel

68 • Rose Banchi -Don Mello • Françoise Remarck - Le Guennou

MANAGEMENT71 Le secret de Marcel Zadi Kessy

QUESTION DE SANTE88 Travailleurs, le Burn-out vous guette

DEVELOPPEMENT PERSONNEL90 Comment souder une équipe autour

d’un projet

LE GUIDE 92 • Le guide pour faire des études

aux Etats-Unis• Le guide pour rechercher un emploi

CARTE BLANCHE À…104 Boubacar Boris Diop

EN COUVERTURE74 NTIC EN AFRIQUE

• Plus de 192,5 millions d’abonnés aucellulaire en 2007• Les principaux opérateurs de télé-phonie mobile en Afrique• Les principaux opérateurs de télé-phonie mobile en chiffre• Secteur des NTIC, nouveau pour-voyeur d’emploi en Côte d’Ivoire• Accès au Large Bande• 6 compétences africaines des NTIC• Quelques profils recherchés

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 5

10

38

66

La guerre dans la guerre14

Page 6: AFRIQUE COMPETENCES N°1

6 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

Les invités du

L’information. La communication.Informer et communiquer, c’est trèsimportant. « 70 % des personnes interro-gées lors d’un sondage dans le cadre deArchibat ignorent l’existence de la loi quifait obligation à tout promoteur immobilierde se référer à un architecte.» C’estIsmaël Boga-N’Guessan qui parle ainsi.Directeur de Axe Marketing, une société

de Marketing Stratégique. Il a organisé ennovembre 2007Archibat, le salon de l’ar-chitecture et du bâtiment et Axe Marketingse spécialise dans les sondages de tousgenre. Tenez, il y a quelques mois, unsondage réalisé par sa structure a relevéque la cherté de la vie est la plus grandepréoccupation des ivoiriens. « Dommagequ’ici, nous n’ayons pas encore la culture

du sondage », ajoutera le Directeur duCEPICI, « raison de plus pour créer cebesoin, car c’est l’offre qui crée la deman-de », renchérit Aïssatou Seck. Le vraiproblème avec la cherté du coût de la vieet les réactions des consommateurs, c’estque les consommateurs ne sont pas édu-qués. « D’où l’importance de la

Par Edwige H.

Toitd’Abidja

n

Parcours et crisesde compétence au menu

Page 7: AFRIQUE COMPETENCES N°1

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 7

communication publique, pourinformer et éduquer. »La communication publique,c’est le « dada » de Anne-Marie Konan-Payne.L’ancienne directrice de l’a-gence de publicité Pluricomdirige aujourd’hui le Centred’information et de communi-cation gouvernementale. Ce «pur produit » du secteur privéest arrivé au secteur public parhasard. Ou presque. Elle avaitcommencé par écrire desnotes de synthèses et elle seretrouve un matin conseiller àla primature. De son expérien-ce dans le secteur public, ellea noté qu’il y a beaucoup decompétences mais qui sonttuées par le système. D’où unereforme de l’administrationpublique en général. Et c’estce qu’elle essaie de faire avecla mise en place d’un systèmede E-gouvernance, en passed’être un modèle de gestion del’information gouvernementaledans la sous région. Si Anne-Marie Konan-Payne s’est

retrouvée presque par hasardà son poste de directrice duCICG, ce n’est pas le cas deIsmaël Boga-Nguessan.Directeur commercial chezFILTISAC, il a fait le pari de «monter son propre cabinet,tout en ayant à l’esprit le tauxde mortalité infantile très élevédes projets professionnels »Pari pris, pari gagné : Axe mar-keting s’est fait une place dechoix sur le marché des cabi-nets conseils en marketing etstratégie, et se spécialiseaujourd’hui dans le sondaged’opinion. L’architecte YolandeDoukouré elle n’a pas eu àtenir ce genre de pari.D’autres, ses anciens patrons,l’ont tenu à sa place et l’ontmise devant le fait accompli. Siles débuts ont été difficiles, 20ans après, elle en parle avecenthousiasme et retient deuxchoses essentielles de sonexpérience de Directrice decabinet (d’architecture !) : il n’ya pas de petits clients et leplus important est de respecter

sa parole et d’être discret. A 57ans, elle est fière de son âgequi ne parait pas, tout commeelle est fière d’avoir été choisiepar une marque de savoncomme « Femme modèle » quisuscite déjà des vocations.Quand on entend AïssatouSeck raconter les chemins quil’ont conduit et retenus enCôte d’Ivoire, on saisi le leit-motiv qui guide ses pas : sensde l’engagement et respect dela parole donnée. « Je suisentière et j’ai un sens de laloyauté incroyable » C’est suf-fisant pour retenir une sénéga-laise de la Banque islamiquede développement dans uneCôte d’Ivoire en guerre et quise bat malgré tout pour trouverfinancements et investisseurs.Une tâche qui n’est pas unesinécure mais à laquelle s’atè-le depuis des années le Centreivoirien de promotion et d’in-vestissement en Côte d’Ivoire.Son directeur, Silué Daouda,n’était pas surpris qu’on luipose la question du rôle duCEPICI. Il en a l’habitude. Pasparce que le CEPICI commu-nique mal sur ses actions maisparce que des structures aut-res que le CEPICI mènent desactions de promotion de l’in-vestissement en Côte d’Ivoireet communique autour de cesactions. Ce n’est pas un pro-blème de communication.C’est une crise de compéten-ce. Tout le problème est là. Etsi chacun se contentait de faireet de bien faire ce qu’il avait àfaire?

Aissatou Seck ,Conseiller spécial à laPrésidence de laRépublique

Anne-Marie Konan-Payne , Directeur duCentre d’information et decommunication gouverne-mentale

Ismael Boga-N’Guessan ,Directeur Associé AxesMarketing

Daouda Silué , Directeurdu CEPICI (Centre pour laPromotion desInvestissement en Côted’Ivoire)

Yolande Doukouré ,Architecte

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Collectif, sous la direction de Jacques Bonjawo

Intellectuels africains face àla mondialisation,pour un développement plus durable

Cosmos publishing, USA, 2007, 228 pages.

8 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

(Entre p arenthèses)

des intellectuels que comptentl’Afrique. Ils n’en ont pas la préten-tion. Et Jacques Bonjawo de conti-nuer, dans sa note de présentation «pas plus que nous n’avons la préten-tion de fournir ici des solutions spéci-fiques à des pays dont les situationssont, par nature, très différentes, etencore moins un ensemble de solu-tions clés en main. D’ailleurs, ce typede solutions, personne ne peut pré-tendre honnêtement les posséder ».Cette précision étant faite, le lecteurpeut aborder avec plus de sérénitéles solutions que proposent nos intel-lectuels réunis. A la question « Quefaire pour un développement plusdurable en Afrique ? », 4 auteurs sur9 répondent : l’éducation. S’appuyantsur une longue bibliographie, leProfesseur Sanou invite à une réfor-me, voire une révolution de tout lesystème éducatif dans les paysd’Afrique. Une invitation du reste par-tagée par Didier Acouetey, fondateurdu Groupe AfricSearch, spécialisédans les ressources humaines. Pourle professeur Ahmadou LamineNdiaye, la réforme de l’éducation oui,mais surtout la réforme de l’ensei-gnement supérieur à travers la créa-tion de centre régionaux de formationde cadres supérieurs. Centres régio-naux de formation de cadres supé-rieurs ? Plutôt une utilisation accruede l’Apprentissage libre et à distance(ALD) propose le Professeur PeterKinyanjui du Kenya pour qui l’ALDfacilite et contribue à la promotion del’accès à l’éducation,

Par Jean Philippe Kassi

Didier Acouetey,Dr Yves Ekoué Amaïzo,

Jacques Bonjawo, Me LucieBourthoumieux, Dr Paul Fokam, Pr.Peter Kinyanjui, Pr. AhmadouLamine Ndiaye, Pr. Fernand Sanou,Dr Chérif Salif Sy. 9 intellectuels afri-cains. 9 réflexions sur le développe-ment durable en Afrique. Un livre :Intellectuels africains face à lamondialisation pour un dévelop -pement plus durable . A priori, onpourrait penser qu’il s’agit d’un deces nombreux livres sur l’Afrique ; liv-res tellement vus qu’ils ne passentplus le cap de notre attention.

Intellectuelsafricains face à la mondia-

lisation, lui, retient notre regard : nonseulement par sa forme ( essai col-lectif) mais aussi par ses auteurs quisont pour la plupart, sinon d’illustresinconnus, tout au moins de nouveauxvenus sur le terrain de la publicationde réflexions sur l’Afrique. Réunispar Jacques Bonjawo, qui avait déjàpublié Internet une chance pourl’Afrique (Karthala, 2002), Afriquedu XXI ème siècle, Afrique de nosvolontés (Karthala, 2007) et Mesannées Microsof t, un africain chezBill Gates (Cosmos publishing,2007), les auteurs de cet ouvragecollectif sont conscients qu’ils nereprésentent pas l’ensemble des intel-lectuels que comptent

Page 9: AFRIQUE COMPETENCES N°1

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 9

Le livre de l’actuel ministre ivoirien del’économie et des finances témoigne deson souci constant d’améliorer le servi-ce public en Afrique. Ceux qui l’ontapproché savent que cet énarque qui afait toute sa carrière au Trésor public,jusqu’à en prendre les rennes en mai2001, voue un culte au travail bien faitet à la performance. Il souligne, enavant-propos de son ouvrage : « Noussommes devenus fonctionnaires paridéalisme et par conviction ». Cettephrase traduit à la perfection l’esprit quisous-tend les actions de Charles Diby.Et le Professeur Mamadou Koulibaly decorroborer « Charles Koffi Diby fait par-tie de cette catégorie de hauts fonction-naires, ayant une très haute idée del’Etat et du service public (…) il peutêtre considéré comme le porte-parolede cette équipe d’hommes et de fem-mes de grandes compétences qui, au

sein de notre administration, brûlentd’envie de faire évoluer, rapidement eten profondeur, la modernisation del’Etat. » L’approche de Diby pourmoderniser l’Etat est simple ; et il ladéveloppe en trois axes : l’état deslieux, la nécessité d’un changement etenfin les implications de ce change-ment sur la gestion de l’administrationpublique. C’est un véritable guide, faci-le à lire donc accessible à tous quenous propose Charles Diby tout enrépondant à trois questions essentiel-les : « Que changer ? Comment chan-ger ? Pourquoi changer ? » Une autrelecture se fait en filigrane de cet ouvra-ge, celle de l’amorce d’un changementdans la gestion de la chose publique enAfrique, le désir de partager cette expé-rience afin de communiquer à tous desraisons d’espérer.

Charles Koffi Diby

Management des services publics,retour d’expérience… des raisonsd’espérer

CEDA /NEI, Abidjan, 2007, 184 pages.

« en éliminant les obstacles à l’ap-prentissage, notamment les coûts,l’emplacement et le niveau de com-modité. » Un véritable plaidoyer pourl’application des NTIC à l’enseigne-ment. En cela, il rejointJacques Bonjawo pour qui les nou-velles technologies, et plus précisé-ment les biotechnologies agricoles etmédicales sont une chance inestima-bles pour l’Afrique à condition qu’el-les soient perçues non comme unesolution d’urgence et ponctuelle auxproblèmes de faim et de pauvretémais comme partie intégrante d’unestratégie globale et durable deréduction de la pauvreté. Car la pau-vreté est l’un des problèmes fonda-mentaux de l’Afrique. C’est pourquoi,le Docteur Paul Fokam du Camerounénonce un précis de la pauvretéavant de recommander, chiffres àl’appui, la micro finance commemoyen de lutte contre cette pauvreté.Pour le Dr Chérif Salif Sy, « le déve-loppement de l’Afrique est plus unproblème de prospective et de struc-ture que de statistiques », aussivante-t-il les avantages du NEPAD etde son Mécanisme africain d’évalua-tion par les pairs. Yves EkouéAmaïzo, économiste à l’Organisationdes nations unies pour le développe-ment industriel (ONUDI), lui, revientsur la question des NTIC mais sousl’angle de la monnaie. Il souligne,dans sa contribution, la nécessité dela mise en place d’une banque cen-trale électronique qui débouchera àla longue vers une monnaie africainecommune. Comme on peut le cons-tater, les approches diffèrent d’unecontribution à une autre et cela parti-cipe de l’intérêt de l’ouvrage quiprend des allures d’un long et multi-ple questionnement sur la ou lessolutions pour un développementdurable en Afrique. L’’éducation oules NTIC ? Le NEPAD ou la Microfinance ? Et si l’Etat était au cœur dudéfi économique et de la renaissan-ce politique en Afrique ? La questionest de Me Lucie Bourthoumieux.C’est une question rhétorique.

Par Jean Philippe Kassi

Page 10: AFRIQUE COMPETENCES N°1

Mêlant rigueur et ambition, SIMATcontinue son formidable essor. LaSociété ivoirienne de manutention etde transport de Stéphane Eholié séduitet a même charmé les porteurs dumarché libre d’Euronext, la boursede Paris. Elle est la première entrepri-se africaine à s’être fait coter et de fortbelle manière- sur la place boursièrede Paris. C’était en décembre2007.

Malgré son plébiscite, le PDG de SIMAT (Société ivoirienne demanutention et de transport) préfère rester humble dans sa démarche

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Sur les marches

L’audaciede Stépha

Par Edwige H.

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DDe la Pme de 20 salariés occupantun local de 600m2 à l’entreprise de150 travailleurs qui loge aujourd’-hui sur 45000m2 dans la zone por-tuaire d’Abidjan, SIMAT a suconquérir des marchés, gagner lecœur de ses clients, puis côtoyerde grandes places boursières engardant à l’esprit les valeurs quiprésidaient à sa création en 2001 :travail, esprit d’équipe, qualité duservice, respect du travailleur etrespect des règles de l’entreprise.

Six ans et déjà dans la cour desgrands. Mieux, quelques mois enbourse et très rapidement, desrecords inédits. L’action de SIMATavait, en effet, atteint plus de200% de son cours deux semai-nes seulement après son entréesur la place boursière de Paris.Une performance qualifiée d’inédi-te par les spécialistes de l’intro-duction en bourse. StéphaneEholié, lui, relativise cette proues-se et préfère rester humble dans ladémarche. Il n’ignore pas la partde curiosité et d’exotisme conte-nue dans ce chiffre. Mais, mêmes’il lui est impossible d’évaluer cepourcentage de curiosité, le PDGde SIMAT n’a aucun doute sur sapart d’objectivité. Le coté objectif,d i t - i l ,« c’est que Simat a respecté lesconditions d’entrée sur le marchéd’Euronext. Par ailleurs, le coursest fonction de l’offre et de lademande, on ne peut donc pasfaire de combine à ce niveau.»En effet, l’accès au marché bour-

sier d’Euronext ainsi que l’autori-sation de la commission d’entréeimposent de nombreuses condi-tions que sont : les audits sur delongs termes, des bilans certifiésconformes, des outils adéquats demaîtrise des risques financiers,une politique saine de performan-ce financière, un business plandrastique, bref, autant d’exigencesauxquelles a satisfait SIMAT.

Qui ne risquerien…Le seul risque dans cette démar-che, rappelle Eholié, c’était celuidu coût d’entrée financier à payer.« C’est vrai qu’au niveau de l’en-treprise nous nous sommes parmoment inquiété. On se posait laquestion de savoir si à 20% on nese ferait pas phagocyter. Mais,continue-t-il, j’ai toujours été unhomme de conviction. Je pensemodestement que j’ai toujours étéun bon travailleur. J’ai toujours cruen la bourse. Le futur des entre-

preneurs c’est la bourse ; et c’estimportant pour lever des capitaux,pour se remettre en question. Enplus, les partenaires financiersvoient d’un meilleur œil une socié-té qui est cotée en bourse. Je

pense que la bourse est une vertudu capitalisme. » Eholié, de touteévidence, croit en la boursecomme certains croient au bonDieu. Seulement, croit-il en laBourse régionale des valeursmobilières (BRVM), la bourse del’Uemoa ? « Nous entrons bientôtà la bourse régionale. Les deuxentrées, à la bourse de Paris et àcelle d’Abidjan, devraient se fairesimultanément, mais la Brvm n’é-

tait pas prête. Paris était uneopportunité à saisir en un laps detemps et je l’ai saisie sans sour-ciller. J’y suis allé avec une convic-

tion certaine sinon je ne seraisjamais parti. »A entendre le PDG de Simat parleravec autant d’assurance de sonentrée sur ce grand marché, on apresque envie

Aux âmesbien nées…

use ambitionne Eholié

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Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 11

«L’Afrique ne va s’en sortirque si elle réussit l’intégration

économique.»

Stéphane Eholié et ses collaborateurs

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12 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

de lui attribuer le « Veni, Vidi Vici » de Jules César.Mais ce serait se méprendre sur l’état d’esprit qui l’ani-me, car, s’il déborde de convictions, il ne fait pas rimerses certitudes avec l’arrogance. Malgré le plébisciteunanime de la presse économique et financière euro-péenne, Stéphane Eholié relativise…encore : « Jepense qu’il faut toujours relativiser. Quoique l’on dise,ce sont de petits capitaux de 2 à 3 millions d’euros quenous levons. C’est vrai que le retentissement estmajeur… Si cela peut permettre d’avoir des idées etd’être vu, c’est le plus important. » Qu’importe auxjournalistes la modestie de Eholié. Ils comparent déjàl’entrepreneur ivoirien à de célèbres entrepreneursfrançais et en parlent même en termes de « PetitBolloré » ou de « Bolloré d’Afrique »

Petit à petit…« Me comparer à Bolloré est bien grand. J’ai beaucoupd’estime et d’admiration pour Vincent Bolloré qui a étémon premier employeur, j’ai vu sa vision des choses…» Pas d’équivoque. L’élève a bien appris la leçon dumaître. Et comme Bolloré, Eholié serait prêt à étendreles activités de SIMAT. A condition d’avoir des parte-naires, africains de préférence, aussi motivés que lui.« L’Afrique ne va s’en sortir que si elle réussit l’intégra-tion économique. », soutient-il. Parlant d’intégrationéconomique, certains pensent que l’entrée de SIMAT

sur le marché d’Euronext est une brèche à risque pourl’économie du pays. Que va devenir le système ban-caire du pays si tous les entrepreneurs vont à l’étran-ger pour lever des fonds ? « Mais c’est justement unsignal que je lance au système bancaire d’ici quiaccorde des crédits à des taux de l’ordre de 14% àrembourser sur une durée de 3 ou 4 ans. L’autre mes-sage fondamental, c’est de montrer que les entrepri-ses locales peuvent concurrencer les entreprises inter-nationales. Pour l’intégration économique, l’idée nova-trice qu’il faut mettre en œuvre, c’est le partenariatSud-Sud qui nécessite des croisements entre opéra-teurs économiques. Moi, en fonction des opportunitésd’affaire à saisir, je suis prêt à étendre les activités deSimat. Pour autant, je ne suis pas prêt à ouvrir Simatà Cotonou ou à Dakar, parce que les mentalités, en

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SIMAT en chiffr esCréée en 2001, SIMAT est une Société Anonyme au capital initialde 400 millions FCFA repartis entre 4 actionnaires : StéphaneEholié (74,5O%), Monique Améthier-Eholié (25%), Jean BaptisteAméthier (0,02%) et Hubertine Traoré (0,02%). De 1 milliardFCFA de chiffre d’affaire en 2001, la société familiale des Eholiéa atteint 6 milliards de FCFA en 2006 et envisage réaliser 7, 25milliards en 2008 et plus de 8 milliards en 2009. Pour entrer sur lemarché d’Euronext, SIMAT a libéré 200.000 actions, soit 20% deson capital. La société embauche 150 agents dont 11 cadres (parmilesquels 5 hommes et 5 femmes, parité oblige !) et 500 à 1000manœuvres occasionnels par jour.

SIMAT en brefLes activités de SIMAT sont principalement des opérations dechargement et de déchargement de navires et celles liées aux acti-vités physiques en magasin cale et sur terre-plein en zone sousdouane : acconage, manutention, commission de transit, transport, entreposage et consignation. C’est elle qui fut chargée en 2006,de transporter d’Abidjan vers Paris, les déchets toxiques quiavaient été déversés à Abidjan.

Esprit d’équipe, qualité du travail, respect du travailleur et respect desrègles de l’entreprise restent les valeurs de SIMAT

Opération de déchargement dans les entrepôts de SIMAT

Stéphane Eholié PDG deSIMAT

Page 13: AFRIQUE COMPETENCES N°1

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 13

Afrique, ne sont pas prêtes à cela. Mais je suis prêt à avoirdes partenaires béninois ou sénégalais. C’est comme celaque le futur devrait se faire. J’espère que je suis dans levrai et que dans 4 ou 5 ans, on se verra et on saura si j’aieu tort ou pas. » En attendant ces opportunités d’affaires,SIMAT est en pleine croissance interne (extension desbâtiments) et cultive d’ambitieux projets malgré la modes-tie qu’affiche son patron : ouverture d’une agence de voya-ge, ouverture d’une usine de café cacao, constructions audu port de San Pedro et création d’un quai à engrais auport d’Abidjan. Les deux derniers projets sont les grandessatisfactions de SIMAT parce que « les responsables desports d’Abidjan et de San Pedro ont compris qu’il faut aider

les PME locales, encourager les entreprises nationales ».Une marque de confiance des ports ivoiriens qui date d’a-vant l’effet Euronext. Deux semaines avant son plébisciteinternational, le directeur de SIMAT était élevé au rangd’Officier de l’ordre national lors de la célébration du30ème anniversaire du Port autonome de San Pedro.

Muet comme…L’autre satisfaction de Stéphane Eholié reste lesmarques de sympathie, les manifestations d’inté-rêts, les félicitations et les appels à l’encourage-ment qu’il a reçus des opérateurs économiquesd’ici et d’ailleurs. Quid des politiques ? Sur cechapitre, Stéphane Eholié préfère rester sansvoix. Il n’a rien à dire ; ou plutôt, il n’a qu’uneseule chose à dire : « Pour le politique, le plusimportant doit être l’économie car c’est l’écono-mie qui tient tout ». Rien de plus à ajouter.Insistez, il restera muet comme une carpe.

Il n’y a p as demauvais vent s…Du Lycée garçon de Bingerville aux places bour-sières, en passant par la Direction générale deGILMAR, puis celle de GITMA, que de cheminsparcourus, de voies empruntées et de routes évi-tées par le diplômé de l’université de ParisDauphine. Et lorsqu’on évoque GITMA, il revientvaguement à l’esprit de ceux que la mémoiren’a pas trahi, le long, ennuyant et ennuyeuxfeuilleton juridico-médiatique qui avait opposé il ya 10 ans, deux actionnaires d’une société demanutention et de transit. L’un des deux s’appe-lait …Stéphane Eholié ; il navigue aujourd’hui enhaute mer et est plutôt bien placé pour dire qu’ «il n’y a pas de mauvais vents, il n’y a que de piè-tres navigateurs.»

SIMAT est en pleine croissance externe

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Administration publique Grandangle

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Le blues des

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Le blues des

fonctionnairesafricains

• TogoLa débrouillardise comme alternative / John K. Zodzi

• Côte d’IvoireLa guerre dans la guerre / Philippe-Rogers Konan

• CamerounEntre misère et corruption / François Bambou

• Congo-Brazza Des promesses vite oubliées / Nicole Mikolo

• ContributionMieux gérer les administrations

publiques en Afrique / Jonas K. Kouamé

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Employés par le plus grand des employeurs, l’Etat, les salaires et les conditionsde travail des fonctionnaires laissent, pourtant, à désirer. Aussi, au Togo, au

Cameroun ou en Côte d’Ivoire, sont-ils en guerre permanente avec l’Etat.Et l’administration publique en pâtit. Comment optimiser la gestion des

administrations publiques en Afrique ? Jonas K. Kouamé partage son analyse.

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«L«Le fonctionnaire togolais a le plusbas salaire de toute la sous région».Ces propos sont de Akouété Béliki,Secrétaire général de laConfédération syndicale des tra-vailleurs du Togo (CSTT), l’une descinq centrales syndicales du paysactuellement en discussion avec legouvernement pour adapter le pou-voir d’achat des agents de l’Etat aucoût de plus en plus élevé de la vie.Un dialogue social tripartite syndicats- patronat - gouvernement conclu le11 mai 2006 à Lomé, en 125 points,devrait permettre d’aplanir les diver-gences ; si l’on ne s’en tient qu’à soncontenu. Mais son application sembleencore timide, et «les mesures déter-minantes pour améliorer la situation

des travailleurs traînent le pas», esti-me Norbert Gbikpi-Benissan,Secrétaire général de l’Union natio-nale des syndicats indépendants duTogo (UNSIT).

Un classementindiciaire faible

L’Intersyndicale des travailleurs duTogo (ISTT) – qui regroupe les cinqcentrales – est unanime à soutenirque la révision de la grille salarialepourra fortement aider à relancer uneadministration togolaise marquée parde longues années de crise sociopo-litique, et souvent délaissée par des

agents à la recherche d’un secondsouffle dans le privé ou l’informel.L’administration publique togolaiseest subdivisée en cinq catégoriesdont la plus élevée est la catégorieA1. Un cadre supérieur (A1), àl’exemple d’un médecin, expliqueAkouété Béliki, entre dans la fonctionpublique avec l’indice 1 450. Cet indi-ce multiplié par la valeur indiciaire917,48 donne le salaire annuel dufonctionnaire du cadre A1. Tout calculfait, on se rend compte que le méde-cin togolais à l’entame de sa carrière,n’est qu’à 110 000 francs Cfa parmois «Si le médecin, après sa forma-tion, ne touche que cela, commentvoulez-vous qu’il ait de la motivationet se donne vraiment à son travail?»,

TOGOLa débrouillardise comme alternative

Au Togo, les différents syndicats de fonctionnaires et le gouvernement sont, depuis deux ans, àcouteaux tirés. Le malentendu porte sur des revendications des syndicalistes, à propos de l’a-

mélioration de leurs conditions de travail. Mais, la plus grosse pomme de discorde entre lesdeux camps reste le salaire que les agents de l’Etat trouvent trop bas.

Par John K. Zodzi

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Dans les rues de Lomé, il n’est pas rare de voir desfonctionnaires se muer en chauffeur de taxi moto

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s’interroge M. Béliki.Pis, pour le fonctionnaire togolais quidémarre à l’indice 1 450, le dernierindice est à 2 800. «Ce qui veut direque s’il passe tous les deux ans d’unecatégorie à une autre, d’un indice à unautre, il peut,en 15 ans seulement êtreau bout de son avancement. Pendantles 15 ans qui lui restent encore dansla fonction publique, il devra gagner lemême salaire. Ce n’est pas normal, cen’est pas motivant», se plaint AkouétéBéliki.

Un barème vétuste

Toutes ces mesures tirent leur sensd’un barème qui date de la vieilleépoque coloniale, indique-t-on. En lamatière, le Togo serait le seul au seinde l’Union économique et monétaireouest africaine (UEMOA) à n’avoirjamais procédé à une révision de lagrille salariale et de la valeur indiciaire,malgré les demandes persistantes deses syndicats de fonctionnaires. La situation n’est guère rose en ce quiconcerne les indemnités de poste. Laplus élevée est celle du Directeur decabinet ou du Secrétaire général : 20000 francs CFA mensuel. Le directeurgénéral est à 10 000 francs CFA, lechef division à 5 000 francs CFA, et lechauffeur ou le gardien de nuit à 3 000francs CFA, pour ne citer que cesexemples. Une récente proposition dugouvernement, le 20 décembre 2007,envisage de porter ce taux à 100 000francs CFA pour le Directeur de cabi-net, à 40 000 francs CFA pour leDirecteur général et à 5 000 francsCFA pour le gardien de nuit. L’avis del’Intersyndicale sera requis à ce sujet.Quant au personnel des hôpitauxpublics, un arrêté ministériel datant de1991 fixe la prime de garde à 1 000francs CFA. Tous grades confondus.Exception faite des médecins affectéshors de la capitale – sans limite degarde – qui touchent 5 000 francs CFApour la garde. «Au bout de 17 ans, onpeut raisonnablement demander quecet arrêté soit réactualisé. Le coût devie a changé, le temps d’apprentissa-ge et les contraintes de travail ont étémodifiés», avait admis le professeurCharles Kondi Agba, Ministre de laSanté, lorsque le personnel des hôpi-taux a fini par battre le pavé le 29 jan-vier 2008. Il réclamait entre 2 500 et40 000 francs CFA pour la garde, et

jusqu’à un minimum de salaire men-suel estimé à 700 000 francs CFA. La plupart des médecins ont comprisqu’à côté du salaire de misère actuel,il serait salutaire pour eux de créerleurs propres cabinets. Ils ne répon-dent plus aux concours de recrute-ment du ministère de la Santé, etréduisent au strict minimum lesconsultations aux centres hospitalierspublics. Ils se consacrent à leurs cabi-nets privés, vers lesquels les patientsdes hôpitaux publics sont parfois diri-gés, en attendant que le gouverne-ment trouve des solutions à leursdoléances.

On se débrouille

Il est évident que face à l’augmenta-tion constante du coût de la vie, lesagents de l’Etat n’arrêtent pas de tirerle diable par la queue. Il est fréquent,ces dernières années, de croiser dansla rue, des fonctionnaires qui se muenten conducteurs de taxis motos au sor-tir du bureau. Ce travail de chauffeurde taxi moto, déjà connu au Bénin, estné au Togo de la grande grève géné-rale de 9 mois en 1993, pour palierl’absence de taxis en ville et se faire,pour les chauffeurs, des revenus quo-tidiens. Aujourd’hui, la pratique permetà quelques fonctionnaires de l’admi-nistration d’avoir de quoi payer du car-burant le lendemain. La réalité est quela pratique de taxis motos s’est impo-sée comme un second métier pourbeaucoup de fonctionnaires qui relè-vent ainsi leurs revenus mensuels.

Les contraintes

Toutes ces situations réunies consti-tuent un cocktail explosif dans lesmains des nouvelles autorités togolai-ses, eu égard aux difficultés écono-miques et financières du pays. «Noussavons que notre pays sort d’unecrise, mais nous sommes aussi cons-cients qu’il dispose de moyens inter-nes pour subvenir à certains besoinsimmédiats afin que notre administra-tion soit compétitive» rappelle unresponsable de l’Intersyndicale. Uneréalité qui s’impose aux nouvellesautorités togolaises qui essaient,depuis 2006, de trouver des solutionsavec les moyens de bord. En 2006, elles ont décidé le débloca-ge des avancements dans la fonction

publique instauré depuis les duresannées 90. En janvier 2007, les salai-res dans la fonction publique ont étérevus à la hausse de 5%. Douze moisplus tard, en janvier 2008, une secon-de augmentation de 3% est interve-nue. Au grand étonnement des syndi-cats. «Le principe de l’augmentation aété défini au niveau du dialogue socialet il était convenu que l’augmentationdes salaires serait relative à l’amélio-ration des recettes fiscales. Cela veutdire que si les recettes fiscales s’amé-liorent, 35% seraient utilisés d’une partà l’augmentation des salaires et d’aut-re part à la création d’emplois. On nesait pas s’il y a eu effectivement amé-lioration des recettes fiscales et dansquelle proportion pour avoir la justifica-tion des 3%» explique Norbert Gbikpi-Benissan de l’UNSIT.«Le budget qui est en exécutionrépond aux entretiens avec le Fondsmonétaire international et la Banquemondiale et aux normes de l’UEMOA ;et par rapport a tous ces éléments, legouvernement n’a pu servir que ceslégères augmentations», répondOctave Nicoué Broohm, le Ministre dutravail. Rappelons que les augmenta-tions successives se font contre l’avisdu Fonds monétaire international(FMI) – qui assiste le pays depuis l’an-née dernière dans le renforcement deses capacités économiques. Les insti-tutions de Bretton Woods estimentqu’il est trop tôt pour le Togo de s’offrirces augmentations. Surtout qu’ellesse battent auprès des pays actionnai-res afin d’effacer près de 130 millionsde dollars US d’ardoise du pays. «Lasituation est en voie de redressementet les ressources vont s’améliorer aufur et à mesure que l’embellie se feravoir», promet le Ministre du travail, touten rappelant que «l’ensemble des pro-blèmes, malheureusement, ne peutêtre résolu tout de suite».«L’augmentation des salaires, lesindemnités de fonction et de déplace-ment, l’âge de la retraite qui va êtrerelevé…, tout cela a un coût», affirmeM. Broohm. Le gouvernement affirmeavoir expliqué à l’ensemble des parte-naires sociaux ce qui peut être fait parrapport aux contraintes budgétairesactuelles.

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Loin des zones assiégées, ensei-gnants, greffiers, agents des eaux etforêt, médecins et bien d’autres tra-vailleurs de la Fonction publique ontengagé leurs propres combats. Leurarme : la grève, pour convaincre oucontraindre l’Etat à revoir leurs statutset les droits qui y sont rattachés.

La colère desenseignant sIls ont été très souvent à la pointedes remous sociaux. Du moins, audevant des mouvements les plusretentissants, pour la revalorisation

des droits et avantages sociaux. Laguerre des militaires et politiques n’anullement altéré ce vieil instinctrevendicatif des enseignants. Qu’ilssoient du primaire, du secondaire oudu supérieur, les enseignants ontréussi à faire plier l’Etat, sortant ainsivictorieux de leur guerre dans laguerre. Aux enseignants du primaire, le chefde l’Etat avait cru bien faire en leurgarantissant fermement l’améliora-tion de leurs conditions de travail.Ces garanties, bien que données parle Président de la république n’ontpas calmé l’ardeur des grévistes ;

bien au contraire. « On a souhaitéque ces garanties se traduisent enactes concrets. Or, nous ne consta-tons rien de concret. En plus de cela,dans le décret qui est pris, il y a desreculades graves que nous ne pou-vons accepter. D’abord le montant de30 000 Francs CFA, c’est à titretransitoire que nous l’avons acceptécompte tenu des difficultés dumoment », expliquait le coordinateurdu Mouvement des instituteurs pourla défense de leurs droits (MIDD),Mesmin Comoé, à un journal ivoirien.« Nous ne pouvons pas accepter quece montant acquis de façon transitoi-re, figure dans le décret. C’est dansun protocole d’accord qu’on a accep-té les 30 000 FCFA à titre transitoire», poursuivait-il, faisant remarquerque ladite prime n’avait pas été effec-tivement payée, à la date du 31 mars2007.Les enseignants du primaire ontpoursuivi leur grève jusqu’à la satis-faction de leurs revendications. Pourne pas perdre la face, la seule exi-gence de l’Etat fut la reprise descours avant la signature du décretprésidentiel.Au supérieur, sous la houlette de laCoordination nationale des ensei-gnants et chercheurs (CNEC), ils ontrégulièrement observé des arrêts detravail. « Nous luttons pour que leschoses soient à l’endroit dans cepays…On cultive la pauvreté commeprétexte de guerre pour se remplir lespoches. Les deniers publics doiventêtre repartis entre tous les conci-toyens, traiter les corporations defaçon équitable », se plaignaitFlavien Traoré, lors d’une de sesnombreuses sorties face à la presse.

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CÔTE D’IVOIRELa guerre dans la guerre

Pendant les cinq années qu’a duré la crise militaro-politique en Côte d’Ivoire, lesautorités d’Abidjan n’ont pas eu qu’à négocier avec les ex-rebelles.

Sans prendre en compte la « trêve social », demandée dès 2000 par l’ancienPremier ministre Pascal Affi N’guessan, ni même la retenue voulue ou imposéepar le contexte de guerre, plusieurs catégories de travailleurs n’ont pas manqué

de revendiquer un mieux être social.Par Philippe-Rogers Konan

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Flavien Traoré, Président de la CNEC soutenait que leur seule motivation était la qualité de leur tra-vail

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Flavien Traoré est le porte-parole de laCNEC. Au plus fort du bras de fer, etface à des interrogations faisant allu-sion à des manipulations politiciennes, ilsoutenait que leur seule motivation étaitla qualité de leur travail: « nous voulonsavoir de bons salaires pour rester àl’Université et servir les étudiants ». Lesdifférentes tentatives d’intimidation,comme les violences perpétrées contrele siège de la Ligue ivoirienne des droitsde l’homme (LIDHO), où la CNEC avaittenu une conférence de presse, n’ontpas altéré leur détermination. En janvier 2008, les enseignants etchercheurs du supérieur ont vu leurssalaires revalorisés. Mais, ce n’estqu’en janvier 2009, que s’appliquerontpleinement les effets de cette revalori-sation des salaires. Ceux-ci, dans cer-tains cas, passent du simple au double.Si dans l’ensemble, on est loin de lagrille proposée par les enseignants etchercheurs eux-mêmes, les ensei-gnants sont quand même satisfaits. Lalutte a payé.

Au Temple deThémis,

on réclame justicePour les greffiers, il n’y avait pasmeilleur moment que l’ouverture desAudiences foraines pour entamer unegrève. L’opération d’identificationappelée audience foraine étant unélément clé du processus de sortie decrise, et les greffiers se sachantmaillon essentiel de ces audiencesforaines, ils ont attendu le lancementde cette opération pour débrayer, afinde faire entendre et satisfaire leursrevendications. Avant les greffiers,les agents non magistrats de la Coursuprême avaient paralysé le fonction-nement de cette haute juridiction pourune question de primes qui n’étaientpas distribuées.

Le cas des agent sdes eaux et forêt s

Eux, sont partis d’un constat auquelaucun Ivoirien ne saurait rester indif-férent : « l’exploitation anarchique »des réserves et parcs nationaux de

Côte d’Ivoire. Dans leur grève, ils pro-mettent le blocage de « toute activitéforestière dans le pays, en érigeantdes barrages sur les routes pourempêcher le transport des bois degrumes et le charbon de cuisine ». Onne tardera pas à comprendre que cemouvement, comme les autres, s’ins-crit aussi dans la mouvance de laquête du bien-être des travailleurs.L’une de leurs revendications consis-te en effet à réclamer à l’Etat la milita-risation de leur corps de métier. « Cestatut militaire nous permettra decontrôler l’activité forestière qui génè-re 200 milliards de FCFA par an, etfavoriser une gestion rationnelle desressources des parcs », soutient lelieutenant Apollinaire Oboumou,porte-parole du Collectif des agentstechniques des eaux et forêts de Côted’Ivoire (CATEF-CI) et du Syndicatdes agents techniques des eaux etforêts (SYNATEF-CI). Pour les syndicats, la militarisationdes agents des eaux et forêts estd’ailleurs une promesse de l’exécutifivoirien. Bien entendu, la militarisationdemandée s’accompagne d’une reva-

Le Palais de justice d’Abidjan a été paralysé par la grève desgerffiers

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lorisation salariale. Mais le gouverne-ment n’entend ou ne comprend pascette crise de la même façon.Jugeant le mouvement de grève «illégal », un Conseil des ministres,tenu dans la dernière semaine dedécembre 2007, annonce la suspen-sion des salaires du mois de décem-bre des 1496 agents ayant participéà cette grève. Depuis, ils ont baisséla garde.

Jusqu’au bout pourles médecins

« Criminel » : c’est ainsi que lePrésident de la République a qualifiéla grève générale, sans service mini-mum des médecins. Visiblement iltentait de faire jouer la carte de l’hu-manitaire, face aux revendicationsdes médecins. Les médecins, eux,entendaient maintenir la grève jus-qu’à la satisfaction de leurs revendi-cations. Comme les autres corps demétier, la recherche d’un mieux êtresocial soutenait la grève. Lors d’unerencontre avec le Président de laRépublique, après l’arrêt de la grève,le porte-parole des 13 syndicats dusecteur de la santé est largementrevenu sur les motivations d’unetelle fermeté. L’allocation d’une indemnité de loge-ment pour les personnels de santé

autres que les cadres supérieurs ; lerecrutement de 400 cadres supé-rieurs de la santé au chômage à laFonction publique ; l’intégration desfilles et garçons de salle dans l’em-ploi des agents des services hospita-liers à la Fonction Publique ; l’inté-gration à la Fonction Publique de 111aides soignantes recrutées par leMinistère de la Santé et affectés auCHU de Yopougon depuis 1989. Ils’agit également de l’octroi d’un bud-get pour la formation des aides-soi-gnants à l’INFAS ; l’octroi d’un bud-get spécial pour la mise en place degants de révision utérine dans toutesles formations sanitaires du payspour leur protection contre le VIH ; lereclassement dans les grades supé-rieurs des 300 cadres supérieurs dela santé ayant plus de 10 ans de ser-vice bloqués pour insuffisance bud-gétaire ; la suppression du concoursde recrutement à la Fonctionpublique pour tous les personnels desanté après leur formation de base.Sans oublier la question de l’opéra-tion immobilière du Syndicat nationaldes cadres supérieurs de la santé deCôte d’Ivoire (SYNACASS-CI). Enréaction à ce chapelet de doléances,le Chef de l’Etat signe un décret quiprévoie des indemnités nouvelles etde nouveaux indices pour le salaireà tout le personnel de santé ainsique le relèvement de l'indemnité

paramédicale, le recrutement excep-tionnel de 1 300 cadres supérieursde la santé, l'accord pour l'ouvertured'un 3ème cycle pour le personneltechnique de la santé. Par ailleurs, leChef de l’Etat a annoncé mi-février2008 le recrutement de 400 méde-cins ; tout en promettant, d’étudierattentivement beaucoup d’autresrevendications ou doléances. Mais, dans les zones Centre-Nord-Ouest, appelée anciennement zonesassiégées, d’autres agents de lasanté demandent la rétribution deleur part de sacrifice consenti cesdernières années. La spécificité deces agents, soutiennent-ils eux-mêmes, réside dans le fait qu’ils onttravaillé de façon volontaire en bra-vant tous les risques au plus fort dela guerre sur un territoire déclaré «zone de guerre ».Le 6 mars 2008, ils officialisent leurorganisation. Le Mouvement desagents de santé volontaire de Côted’Ivoire (MASVO-CI) revendique1350 membres, et réclame leur inté-gration à la Fonction publique, ainsiqu’une une compensation financiè-re allant de la période de 2002 à2007.Et si la guerre en Côte d’Ivoiresemble finie, la guerre des fonc-tionnaires, elle ne montre aucunsigne de répit.

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La recherche d’un mieux être social soutenait la grève du Dr. Magloire Amichia et de ses camarades du SYNACASS-CI

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IIl n’y a pas de petit profit. De fait, lesfonctionnaires camerounais n’ontpas boudé la hausse de salaires de15% consentie par le gouvernementà la mi février et qui ne prendra effetque sur les salaires payés fin avril.Après une semaine agitée decontestations sociales liées à la viechère, Paul Biya a annoncé desmesures de protection du pouvoird’achat des fonctionnaires. La princi-pale étant la revalorisation des salai-res de la Fonction publique à comp-ter du mois d’avril 2008. Il s’agitd’une hausse de 15% sur le salairede base, tandis que l’indemnité delogement est désormais fixée à 20%dudit salaire de base contre 12%actuellement. Cette mesure concer-ne les fonctionnaires, les contrac-tuels d’administration, les agents del’Etat, les décisionnaires et les forcesde défense et de sécurité. Un décretprésidentiel a été aussitôt signé pourformaliser cette hausse que revendi-quaient les fonctionnaires. Comparé

aux 70% de baisse de salaire infligéau même personnel de l’Etat par legouvernement en 1993, la progres-sion est maigre. D’autant plus maig-re que le coût de la vie a considéra-blement augmenté, comme l’ex-plique Jean marc Bikoko, le prési-dent du Syndicat des agents public :« "un tiens vaut mieux que deux tul`auras". C`est un pas. Car noussavons que depuis 25 ans, il n`y apas eu de revalorisation des salairesau Cameroun. Au contraire, on abaissé les salaires de 70%. Cetteaugmentation est à mettre à notreactif. Mais, nous disons qu`elle nereprésente rien par rapport aux 70%de baisse qu`avaient subie les fonc-tionnaires Camerounais et par rap-port aux effets de la dévaluation en1994 et à la hausse des prix des pro-duits de première nécessité ».Il est vrai que la vie est difficile pources agents publics jadis privilégiés."Ce que nous touchons nous permetjuste de survivre. Une fois que nous

avons réalisé les dépenses de basepour la nourriture, le loyer, la scolari-té des enfants, il ne nous reste plusrien. Chacun se débrouille comme ilpeut, en trichant au besoin. Ceux quigèrent des lignes de crédit se ser-vent au passage. Les autres s'arran-gent pour soutirer de l'argent auxusagers contre le traitement de leurdossier", explique Jean-MarcBikoko. Clochardisés, les quelques 160 000fonctionnaires et 20 000 agents tem-poraires de l’administration came-rounaise ne capitulent pas. Selon lamaxime qui voudrait que la chèvrebroute là où elle est attachée, il nereste guère qu’une seule issue auxresponsables de l’administrationpour réaliser leurs ambitions : la cor-ruption. Chacun transforme ainsi,son bureau en péage où tout serviceest monnayé. L’enseignant dispensedes cours inaudibles et inintelligiblesen classe, pour obliger les élèves àprendre part à ses cours de répéti-

CamerounEntre misère et corruption

Clochardisés par les baisses du pouvoir d’achat et des conditions de travailarchaïques, les fonctionnaires camerounais multiplient des parades pour faire

face au manque à gagner. Revue des principales techniquesPar François Bambou

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Après une semaine de contestation contre la vie chère, Paul Biya a annoncédes mesures de protection du pouvoir d’achat des fonctionnaires

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DOSSIERtions chèrement payés. Le médecin,procède aux consultations sommairesd’un air distrait dans les hôpitaux, puisrefile son numéro de téléphone privéau patient. S’il veut être bien soigné,ce dernier n’a qu’à se rendre au domi-cile du médecin, où les consultationssont payées cinq fois plus cher qu’àl’hôpital. Cette tendance n’épargneaucun secteur, car il y en a qui, lors-qu’il n’ont rien à marchander dansleurs bureaux, les désertent carré-ment pour aller mener leurs propresaffaires. Et si l’administration en estparalysée, le fonctionnaire, lui, en tireune bien triste réputation. On semoque du fonctionnaire honnête, peuenclin à la corruption, qu’on indexecomme l’idiot du village, avec ses airsde clochard. Celui qui mène un grandtrain de vie est méprisé et taxé devoleur. Dans la grande misère où bai-gnent les fonctionnaires camerounais,ils s’en trouvent qui ont su « brouter »abondamment là où ils étaient atta-chés. Des quartiers huppés aux nomsévocateurs (Koweït City, SantaBarbara) sont sortis de terre, où l’onne trouve que de richissimes fonction-naires. Il arrive même que des hom-mes d’affaires envient certains fonc-tionnaires. Les campagnes de luttecontre la corruption menées par legouvernement n’ont eu qu’une effica-

cité relative pour juguler le phénomè-ne. Tout au plus, les contraintes impo-sées par cette nouvelle lutte ont-t-ellesamené les fonctionnaires à affinerleurs techniques ; ce qui ne peut quenuire à l’efficacité de l’administration.Le gouvernement, lui, est allé jusqu’àmettre en cause la compétence del’administration. Aujourd’hui, l’on s’ac-corde à reconnaître que ce n’est pasle profil académique de ces cadres del’administration, que les conditions detravail archaïques ont blasé, qui est encause. Pour la plupart, ils viennent d’écoles spécialisées dont le prestigerésiste au temps : Ecole normalesupérieure, Ecole nationale d’adminis-tration et de magistrature, Institutnational de la jeunesse et des sports,Ecole de eaux et forêts, Faculté demédecine et des sciences biomédica-les, Ecole de sciences économiqueset commerciales, etc. Il s’agit de cad-res techniquement bons, mais sociale-ment aculés par la précarité. Lesagents de l’Etat égrènent leurs jour-nées en voyant le pays passer à cotéde grandes opportunités, tandis queles responsables hiérarchiques sontoccupés à remplir leurs bas de laine. Pour faire face à la précarité, certainsfonctionnaires ont trouvé une paradeplus simple. S’adjuger plusieurs salai-res à la fin du mois. La technique est

simple : grâce à des complicités dansles centres des gestion du fichier de lasolde, un fonctionnaire peut s’offrirplusieurs matricules et par consé-quent, autant de salaires. Lors de ladernière opération d’assainissementdu fichier solde des agents de l’Etatcamerounais, 3500 fonctionnaires fic-tifs, ont été supprimés des fichiers. Autotal, 24 000 agents fictifs qui ontindûment perçu des salaires et pen-sions pendant des années ont pu êtreextirpé des fichiers de solde de l’Etat àl’issue des différentes opérations detraque menées contre les fonctionnai-res à plusieurs matricules. Ces opéra-tions ont permis à l’Etat de gagnerenviron 10 milliards par an, unesomme que se partageaient pendantdes années, des agents véreux del’Etat. En attendant la hausse prévue pour lafin du mois d’avril, les fonctionnairescontinuent de faire des queues dansleur banque, 10 jours à peine aprèsleur paie, pour quémander quelquesdécouverts bancaires au montant ridi-cule ; après avoir épuisé les possibili-tés de crédit chez l’épicier du quartier.Les temps où les fonctionnaires béné-ficiaient automatiquement de créditsautomobile, de crédit d’habitat, ou decrédit d’équipement est bel et bienrévolu.

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Le magazinedes ressources humaines,

des talents etdes savoir-faire

d’Afrique

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Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 23

Des richessesmal distribuéesPlus d’un an après l’annonce duChef de l’Etat, force est de consta-ter que sa volonté n'a pas été tra-duite dans les faits. Malgré le tauxde croissance du P.i.b de 6,1% quidépasse la moyenne africaine éta-blie à 5,5% le rythme d’augmenta-tion du secteur hors pétrole main-

tenu à 5,5% et de l’inflation maîtri-sée à 4,7%, les agents de l’Etat,comme par exemple ceux du sec-teur de la santé et des affairessociales, regroupés au sein de laFENASAS n’ont pas pu se voirattribuer une part des richessesen rapport de ces indicateurs deperformance ci-dessus évoqués.La FENASAS, soucieuse de ladéfense des intérêts matériels,moraux et droits fondamentaux

des travailleurs et travailleusesrelevant des secteurs de la santéet des affaires sociales avaitexigé du gouvernement la signatu-re et la publication, au plus tard le15 novembre 2007, les projets destextes accordant les primes etindemnités aux agents de la santéet des affaires sociales, tel qu'il aété décidé à l’assemblée généraletenue le 23 octobre 2007. Les syn-dicalistes attendent toujours.

CONGO-BRAZZADES PROMESSES

VITE

Au Congo-Brazza, on se souvient encore des manifestations de joies qui avaient envahi lesrues de Brazzaville, Pointe-Noire, Dolisé et Nkayi lorsque le Président de la République,

S.E.M. Denis Sassou-Nguesso a annoncé, la hausse de 25% du salaire minimum des fonc-tionnaires ainsi que le relèvement à 60 ans de l’âge de départ à la retraite. C’était le 31

décembre 2006, lors de la présentation de ses vœux à la nation. Ce soir là, il n’avait pas pré-cisé la date d’entrée en vigueur de ces mesures mais, il avait affirmé que « les dispositions

réglementaires nécessaires avaient déjà été prises. » Il y avait donc de l’espoir. L’espoir quetrès rapidement, les fonctionnaires pourraient jouir de leurs salaires revus à la hausse. De

mois en mois, puis d’années en années, l’espoir s’est amenuisé car les engagements pris nesont pas appliqués, les avancements et la hausse de salaire acquise sur papier ne produi-

sent aucun effet sur le plan financier.

Par Nicole Mikolo

GrandangleLe blues des

fonctionnairesafricains

Le panier de la ménagère est toujours vide malgré les promesses du Chef de l’Etat

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Page 24: AFRIQUE COMPETENCES N°1

24 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

Un transit rapide

Le transit du salaire du fonctionnaire,de la banque aux mains des autres,est si rapide qu’on pourrait dire que lefonctionnaire ne fait que palper lesbillets. Pour Joséphine Ngoma, l’ex-pression « toucher sa paie » convientparfaitement aux réalités que viventles fonctionnaires du Congo. Sa collè-gue Pascaline M. partage entièrementce pont de vue. Dès qu’elle « toucheson salaire » cette secrétaire va decréancier en créancier payer ses det-tes, puis, paye son loyer et il ne resteplus rien. Chaussures éculées et che-mise usée, l’image du fonctionnairequ’offre Raphaël M. n’est guèrereluisante. Le seul luxe qu’il s’offre dèsqu’il a son salaire est un bouillon decapitaine pimenté qu’accompagnenttrois bières. Le reste de la solde ne luiappartient aux créanciers. J. Makéla,gendarme, ajoute que le séjour desbillets dans les poches du salarié estencore plus bref lorsqu’il a un maladeà charge ou qu’il reçoit une visite inopi-née de parents qui viennent pour milleet un problèmes.

La corruption, enattendant la hausseeffective dessalaires

La tendance chez les fonctionnairescongolais est de monnayer le moindreservice qu’ils rendent au public : pasfacile d’obtenir une signature au basd’un document sans un petit pourboi-re ; difficile pour un patient d’êtreécouté et soigné dans un hôpitalpublic s’il n’a pas d’argent ; une secré-taire ne peut délivrer une attestationde service sans contrepartie officieu-se. Suivre un dossier dans l’adminis-tration relève du parcours du com-battant lorsqu’on ne connaît pas unfonctionnaire du milieu ou si on neverse pas les pots-de-vin appelés «brouette », qui permet de circuler d’unbureau à l’autre. Tant que cette condi-tion n’est pas satisfaite, une seuleréponse pour l’usager : « Repassezdans un mois, le chef n’a pas encoresigné. »

Les «ristournes»,pour tenir la route

Forme indirecte d’épargne et d’emprunt,les « ristournes » sont devenus une desactivités principales des agents del’Etat. Apollinaire Mbouyou., Chef de serviceau Ministère de l’Economie et desfinances, fait partie de deux « ristour-nes » au Ministère. Il cotise une certainesomme tous les mois et au bout d’uncertain temps bénéficie d’une sommeéquivalente à la totalité de ses cotisa-tions. Ce système d’épargne informel luia déjà permis de s’acheter une parcellede terrain et de financer les études deses enfants. Comme lui, plusieursagents de l’Etat semblent avoir optépour ce système. Pour Hervé Bouiti Mavoungou, militaire,les « ristournes » représentent le boncréneau. Il y a d’abord l’aspect obliga-toire de la chose. Une sorte d’épargneforcée qu’il n’aurait pas la capacité deréaliser de sa seule volonté. En outre, «quand vous touchez, vous pouvezréaliser plus de projets qu’avec votreseul salaire », explique l’officier de l’ar-mée de terre.A l’évidence, les ristournes permettentaux fonctionnaires d’épargner pourréaliser quelques projets. « C’est uneforme de prêt sans intérêt, surtout lors-qu’on en bénéficie dès le premier mois» explique Madeleine Pambou.

Des «à-côtés» pourgérer le quotidien

Carole Mantissa adore les tenues «classes et griffées » comme elle le dit.Chaque mois, il lui faut s’offrir au moinsun tailleur ou une chaussure. « C’estcomme une drogue, je n’y peux rien.J’aime sentir que j’attire les regardsdans mes tenues », déclare la jeunefemme. Le seul problème pour cettesecrétaire dans une administration estque son salaire ne lui permet pas decéder à tous ses caprices. « Je doism’occuper de mes deux enfants et demes nombreux parents. Ce n’est doncpas évident de concilier cela avec mesenvies de luxe », avoue-t-elle. La solu-tion, elle l’a trouvée en ouvrant un salonde coiffure grâce à des économies.

Isabelle E. se contente pour sa partd’entretenir un champ de manioc et deles revendre durant les week-ends pourétoffer la bourse du foyer. « Ce n’est pastrès valorisant et parfois j’ai peur quedes collègues ne l’apprennent. Maisquand on peut faire rentrer des soussupplémentaires, on ne fait pas la finebouche. Ça nous permet d’avoirquelques marges à la fin du mois», esti-me-t-elle. Comme cette institutrice, ilssont nombreux dans l’administration àrecourir à des activités parallèles. Cecidans le but de s’assurer des entréesd’argent supplémentaires pour réaliserencore plus que ne leur permettentleurs salaires. Pour certains, il s’agit desatisfaire des caprices. Pour d’autres, ilest juste de question de faire face auquotidien ou à des dépenses ponctuel-les. « J’ai emprunté de l’argent à ma ris-tourne pour pouvoir acheter un terrain.C’était important pour moi malgré lesdifficultés de remboursement.

Heureusement, maintenant, je sais quece sera plus allégé avec l’augmentationattendue. En plus, ça m’évitera lesdécouverts à la banque qui plombentparfois les projets », déclare VirginieLoemba, Professeur de lycée. Découvert. Le mot magique pour cer-tains agents de l’Etat qui y recourent enattendant que les salaires tombent. «Depuis que j’ai un compte à la banque,je n’hésite pas à puiser dans mondécouvert pour parer aux situationsurgentes. Notamment les problèmesque ne manquent jamais de poser lafamille. Je ne sais pas comment j’auraisfait sans, sinon », estime Paul Ganga,chauffeur dans une société étatique.D’autres ne sont pas aussi chanceuxmais une chose est sûre, les fonction-naires, plus que d’autres, ne sont jamaisà court d’imagination pour gérer le quo-tidien car ils ne comptent pas sur lespromesses de l’Etat.

Dès qu’elle « toucheson salaire » elle va

de créancier encréancier payer

ses dettes

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Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 25

• Comment devrait être géré unsalaire de fonctionnaire dans unfoyer ?

Je pense qu’il faudrait dire un salairetout court et non un salaire de fonc-tionnaire. Parce que les problèmesqui se posent à nous dans ce payssont liés à la gestion du budget fami-lial tout court, pour tout le monde. Lesfonctionnaires ne font qu’un dixièmede la population. Cela dit, la famillecomme une entreprise quelconqueest la plus petite organisation de lasociété. Son budget doit être géré enrecettes et en dépenses comme danstous ces endroits-là.Malheureusement, beaucoup de gensne font pas très attention. Ce qui faitqu’on est incapable de dire s’il estéquilibré en recettes et en dépenses àla fin du mois, sur quoi est-ce qu’on abasé ses dépenses, etc. Ça c’est ungros problème. Gérer le budget doitdépendre de tout un chacun ou detoute famille. Des besoins réels il y ena, en fonction de son standing, sonstatut social, on doit avoir un certainnombre de postes de dépense.Certains doivent avoir l’école, lasanté, l’équipement, la nutrition, lesloisirs. Partant de ces besoins, la stra-tégie, quand on veut affecter sonsalaire ou ses dépenses comme il sedoit, c’est sur un certain temps, mieuxun mois à peu près, de noter lesdépenses quotidiennement, au francprès, du lever au coucher. Souventles gens ont la paresse de le faire,mais c’est la stratégie la meilleure, au

bout d’un mois, pour pouvoir classerce qui peut être les postes de dépen-se pour soi ou sa famille.

• Y a-t-il des priorités ?

Forcément. Personne ne peut vivresans manger. On doit pouvoir avoir untoit. Si on a un loyer à payer, sinon,évaluer ce qui reste dans sa poche.La nourriture, l’habitat, l’école, lasanté, les transports. Ce sont là desdépenses fondamentales.

• Quels sont les avantages à bud -gétiser ?

Comme pour l’Etat, pour toute organi-sation, privée ou publique, il y a tou-jours avantage à avoir un budget, à lecontrôler, à l’équilibrer en recettes eten dépenses. Il n’y a pas lieu de dire :parce qu’on est en famille… Ce quinous fait défaut en Afrique, c’est qu’onne fait pas attention à ses postes dedépenses, et on est surpris que le 20ou le 30 du mois, on ne peut plusmanger normalement parce que lespremiers jours, on a dépensé tous sesrevenus. Il y a avantage à avoir despostes de dépenses connus, desrecettes connues. Parce que parfois,il y a des recettes visibles et des reve-nus cachés. Ce qui fait qu’en général,les gens sont incapables de dire telmois, j’ai eu tel revenu, et j’ai dépen-sé tant. Le budget, en même tempsqu’il est un outil de prévision, est unoutil de répartition en postes dedépenses. Il permet la visibilité desdépenses. Il permet de voir que dans

le poste des imprévus, j’ai donné 10Fde solidarité, parce que nous sommesen Afrique, à un ami, ou à un parent…Il y a avantage à connaître tous cespostes et à décider de comment on vales ventiler d’un mois à l’autre, d’unesemaine à l’autre, en fonction desrevenus. Sinon, on va être obligé devoler.

• Quelle est la proportion que desextras comme une bière ou desplaisirs dispendieux peuvent pren -dre dans le salaire ?

Des proportions inquiétantes. J’ai ététravailleur social à la base. C’est sou-vent des femmes qui se plaignent. Leseul homme qui est venu a dit que safemme dépense trop. Mais générale-ment, ce sont les femmes qui se plai-gnent, parce que le mari ne donnepas assez. Et pourtant, il prend sesbières, il sort très tôt le matin, etc.Vers la fin du mois, les enfants peu-vent ne pas avoir d’argent, ou il lesrenvoie vers leur maman, alors quec’est lui le pourvoyeur de ressourcesdans la famille. L’impact sur la familleest toujours certain, que vous preniezune bière, deux, ou cinquante, le pro-blème c’est de rendre visibles et lisi-bles les revenus de la famille.D’essayer dans la mesure possible dene pas avoir des revenus cachés.Parce que quand tous les revenusdes deux conjoints et même de ceuxqui habitent à la maison sont misensemble, on les ventile ensemble.

• Y a-t-il des règles à respecter ?

Bien sûr. Il y en a. Savoir que si unménage dépense déjà jusqu’à 20%de son revenu dans l’alimentation, lereste sera difficile à gérer, en fonctiondes postes de dépense. Il faut savoiraussi que si vous mettez plus d’untiers de votre salaire dans un loyer,vous aurez des problèmes à gérer lereste. Il y a des chiffres qui permettentde décider en fonction de quel loyeraller chercher, comment approvision-ner la maison. Il y a des calculs enfonction des personnes, de l’âge.Même pour la nourriture, on ne doitpas dépenser par hasard soi-disantqu’il y a toujours des étrangers quidoivent manger. On peut rester afri-cain et solidaire des autres, mais enfaisant très attention à son budget.

«Noter quotidiennement toutes ses dépenses»

Patricia Obambi :Conseillère en économie sociale et familiale.

InterviewLe blues des

fonctionnaires africains

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26 Afrique Compétences / Avril - Juin 2008

Mieux gérer lesadministrationspubliques en Afrique

AnalyseLe blues des

fonctionnairesafricains

Par Jonas K. Kouamé

POUR UNE GESTION OPTIMALE DU CHANGEMENTDANS LES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES AFRICAINES

L’examen de la question de lamodernisation de l’administrationpublique, peut renvoyer à la présen-tation, ex cathedra, de ce que sontles identifiants ou les caractéris-tiques d’une structure publiquechargée de défendre et de servirl’intérêt général. Mais elle peutaussi constituer une opportunitérare de mettre en œuvre une com-posante essentielle des stratégiesde mobilisation des cadres en mon-trant, à travers des indications préci-ses sur son objet et ses objectifs,comment implanter au sein desorganisations de production de ser-vices publics les innovations déter-minantes les plus actuelles, propresà assurer leur bonne marche.C’est le lieu de noter que la vocationnaturelle d’une haute fonctionpublique citoyenne et responsableconsiste essentiellement à veiller àce que l’administration en tant quesystème, fonctionne dans un cadreorganisationnel qui s’inscrit résolu-ment dans le sens de l’efficacité, dela qualité et de la continuité du ser-vice public.Il convient de souligner à cet égard,que l’administration publique africai-ne, engagée dans des reformesmultiples et multiformes, est à lacroisée des chemins. En effet, souscontrainte de ressources et fonc-tionnant souvent avec des moyensréduits, nos unités de production deservice public voient leur marchevers le progrès entravée par des dif-ficultés de toute nature. Parmi lesplus importantes, on peut relever ladémotivation des agents et la dilu-tion des pratiques professionnelles ;celles-ci s’écartant, dans bien descas, des normes et des meilleures

pratiques de gestion en usage denos jours. Ainsi, à l’observation, ilest aisé de constater que l’Etat,entendu comme la collectivité decitoyens pour le compte de laquellel’administration est créée et mise enmouvement, ne saurait se satisfairedes performances présentes desservices publics. Il en est de mêmedes fonctionnaires dont les condi-tions de travail sont constammentdécriées et donnent souvent lieu àdes revendications, à des protesta-tions voire à des grèves. Les usa-gers eux-mêmes ne sont pas enreste quant aux nombreuses plain-tes formulées, ici et là, à l’encontredes administrations publiques afri-caines.Face à cette situation, la justessede toute démarche tendant à éva-luer et appréhender la nature del’administration publique africainepour plus d’efficacité, devra semesurer à l’aune de la pertinencede la définition et de la mise enœuvre de mesures de moralisationde la fonction publique , de la défini-tion et de l’application effective derègles conformes aux meilleures

pratiques professionnelle touchant àl’organisation administrative et de lagestion de la qualité du service public.C’est à la haute fonction publiquequ’incombent la mission et la respon-sabilité de proposer un cadre d’actionpour la promotion d’une administra-tion publique de qualité toute entièrevouée au service des usagers. A cetégard, le rôle essentiel de la hautefonction publique est un rôle de nor-malisation, qui consiste fondamenta-lement à procéder à l’évaluation per-manente des politiques publiques, à

l’identification et à la prise en chargedes situations de blocages et de dys-fonctionnements des administrationsafricaines, dans le but de contribuer àcréer les cadres les plus appropriés,pour une définition optimale des mis-sions publiques de l’administration,une structuration efficace des organi-sations administratives, et une élabo-ration pertinente des procédures etdes normes administratives.Il est à rappeler que l’objectif principalde cette activité de base est de vérifierque les services rendus au public sontdes services de qualité.Dans cette perspective, il importe desouligner tout particulièrement que lafonction première du haut fonctionnai-re est d’appuyer les administrationspubliques africaines par une réflexionsoutenue sur leur organisation, ainsique sur leur fonctionnement, en vued’aider à créer les conditions d’unemeilleure administration publique,pour un service de qualité rendu auxusagers. De fait, dans la mise auxnormes des structures et administra-tions publiques africaines, c’est auhaut fonctionnaire que revient la tâchede repenser les régimes d’organisa-tion et de fonctionnement ainsi queles modes de gestion actuels des uni-tés administratives africaines.Dans le cadre de cette fonctionessentielle, il devra acquérir des com-pétences au plan stratégique et opé-rationnel (lire encadré) Il est question ici, de définir un guideopératoire pour une conduite optima-le des innovations à engager au seindes administrations africaines, et,d’inviter chaque administrationpublique africaine à constituer enson sein des groupes de réflexions etd’initiatives composés de cadres par-Le

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tageant une même approche profes-sionnelle, une même volonté de chan-gement et un même système devaleurs.

Sous cet angle, deux objectifs majeursd’apprentissage peuvent être poursuivis: développer les capacités de planifica-tion stratégiques et développer les apti-tudes à la conduite du changement.

A cet égard, l’étude des problèmes, laconception des solutions appropriées etles modalités de leur application avectoute l’efficacité souhaitable requièrent,pour les participants à ces groupes deréflexion et d’initiatives, un certain nom-bre de pré requis articulés autour de laparfaite connaissance des structures,des techniques et procédures effective-ment en usage dans leurs administra-tions publiques nationales respectives.Participer au processus d’élaborationd’un guide opératoire de la conduite deschangements souhaités, pour uneadministration publique africaine dequalité, exige donc au préalable desmembres du groupe de réflexions et d’i-nitiatives en charge de la politique dechangement certaines aptitudes (lireencadré) Les modalités pratiques d’organisationqui seront évoquées ici, touchent aupublic cible, à la nature de la réponseformation, et au contenu de la forma-tion.

Du public cibleIl faut inciter les cadres ayant unecertaine expérience professionnelle, às’intéresser à fond à l’administrationpublique à travers un programme deperfectionnement en management etchangement organisationnel Ils doi-vent par ailleurs avoir la volonté etl’application qui permettent de tradui-re dans les faits les enseignementsreçus, de les concrétiser. Car c’est àtravers leurs capacités à mettre enpratique ces enseignements, en dépitdes difficultés rencontrées – nées ouà naître, que l’on appréciera la portéedesdits enseignements. En outre, lepersonnel intéressé doit avoir uneclaire conscience de la nécessitéainsi que du bien-fondé de la déléga-tion des pouvoirs, afin de disposerd’un temps de travail conséquentpour assurer le management straté-gique de leurs différentes unitésadministratives.Sous cet angle, l’acquisition de com-pétences particulières en matière demanagement et de changement orga-nisationnel est de nature à offrir unealternative valorisante de gestion desorganisations administratives, pourles cadres et les hauts fonctionnaires.Il est donc essentiel d’investir dans lacompréhension d’un cadre explicatifcrédible et cohérent pour souteniret/ou valoriser l’action de changement

entreprise ou à entreprendre, afind’en assurer la conduite à bonne fin etl’acceptation par les bénéficiaires.Le public cible doit être sensibilisé àla nécessité d’affecter du temps detravail à la gestion au quotidien desunités organisationnelles et au pro-cessus de prise de décisions y affé-rents. C’est à cette condition qu’il serapossible aux cadres dirigeants afri-cains d’ordonner de façon permanen-te et conséquente un système d’infor-mation et de réflexion centré sur lesorientations futures.

De la nature de la réponse-formationLa formation en management et enchangement organisationnel doit cor-respondre à un réel besoin de qualifi-cation et par voie de conséquence àune vraie progression de carrière ausein de l’administration publique afri-caine. Elle doit constituer un puissantvecteur de promotion de cadres com-pétents de haut niveau au rang d’ex-perts, dans le domaine spécifique dupilotage d’une infrastructure finan-cière et/ou administrative complexe.Dans cette optique, les enseigne-ments à faire partager aux partici-pants à ce groupe de réflexion et d’i-nitiatives, ne doivent souffrir d’au-cune faiblesse quant à leur applica-bilité sur le terrain.*

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28 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

QUINZE COMPETENCES REQUISES

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Pour conduire une politique de change-ment dans l’administration, le haut fonc-tionnaire africain doit avoir les qualitéset les compétences suivantes : Au plan stratégique, il devra :

• engager de façon systémique, un exa-men critique permanent des pratiquesprofessionnelles et des métiers publics,en rapport avec leur nature, leur perti-nence, leur efficacité et leurs perspecti-ves d’évolution .Ceci est à la base d’unepolitique judicieuse de valorisation, deredéfinition ou de suppression des pos-tes, vue comme un préalable indispen-sable et nécessaire à toute opération derestructuration ou de redéploiement del’administration (cadres organiques ettableaux de bord) ;

• piloter ou faire exécuter les projets oules missions de conduite du changementmesurées en termes de réformes et/oude restructurations menées au sein desadministrations publiques (élaborationdes termes de référence – déterminationd’un chronogramme détaillé de réalisa-tion fondé sur un calendrier de travailréaliste et réalisable – évaluation de l’en-semble du processus) :

• encadrer une équipe de professionnelsde haut niveau, spécialisée dans lesdomaines de compétences entrant dansles champs d’attributions des différentesadministrations publiques.Au plan opérationnel, il sera appelé à :

• proposer constamment un inventairedes problèmes qui entravent l’améliora-tion des systèmes d’organisation, defonctionnement et de gestion des struc-tures publiques ;

• bâtir un système de veille information-nelle permettant de recueillir toute infor-mation utiles à l’identification desditesentraves,

• établir un plan d’action pour la prise encharge et l’examen des difficultés ainsirecensées ;

• identifier et contribuer à la mobilisationdes ressources financières, matérielles ethumaines nécessaires au bon fonction-nement des unités administratives, ;

• établir un plan de gestion cohérent ;

• dialoguer avec des interlocuteurs variéset versés dans les questions écono-miques, administratives et juridiques,

• établir des liens systémiques entre lesintervenants de la chaîne d’actions déga-gée à partir des procédures et techniquesinstitutionnelles, administratives, juri-diques, budgétaires, financières et comp-tables,

• apprécier et résoudre, en s’appuyantsur les études spécialisées faites en lamatière et l’expérience propre desresponsables, les problèmes spécifiquesse posant à l’administration publiquenationale dans tous ses aspects,

• réagir vite face à un événement impré-vu, sur la base de compétence tech-niques et juridiques incontestables.C’est en puisant dans cet ensemble decompétences déjà acquises que l’enca-drement doit veiller à la gestion optimaledes administrations publiques.D’où la formulation des objectifs pédago-giques spécifiques suivants :

• avoir une vision globale de l’administra-tion publique en tant qu’organisation ;

• développer de façon constante et soute-nue, une analyse systémique approfon-die des pratiques professionnelles enrelation avec les métiers existants au seindes administration publiques nationales,au regard de leur nature, leur pertinence,et leurs champs d’évolution ;

• s’imprégner des techniques du mana-gement en matière de conduite du chan-gement (conception, pilotage, évaluation)ainsi que des méthodes d’approche del’expert.

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Du contenu de la réponse-formationCompte tenu de ce qui précède, les élé-ments de contenu devraient porter surles thèmes suivants.

De l’environnementorganisationnel :Evaluation du contexte (technique) :pénurie des moyens, démotivation etmotivation des agents, délégitimation etlégitimation de la hiérarchie, déroule-ment de carrière et performance au tra-vail. Evaluation des champs de compé-tences (techniques) : des monopolesadministratifs, des services produits parles administrations, de la gestion par latechnicité maîtrisée.Evaluation du secteur d’intervention del’organisation : développement du sec-teur (conditions), équilibre du secteur(conditions), promotion des intervenantsdu secteur (conditions), promotion –pour l’accomplissement des travaux,tâches et opérations – évaluation decoûts raisonnables en comparaison àune moyenne de secteur.Evaluation (et/ou management) descoûts de désorganisation : promotiondes modalités de traitement des dos-siers et de production des servicespublics, dans des conditions optimalesde coûts et de productivité, promotionde possibilités alternatives d’actionoffrant des perspectives de coût de pro-duction plus appropriées (fiabilité desprocessus et sincérité des prix), promo-tion de l’exemplarité des comporte-ments professionnels, comme modèlede base pour la défense de l’intérêtpublic.

RESULTAT ATTENDUDisposer d’une grille de lecture de l’en-vironnement conduisant, sur des basessaines, au renouvellement régulier desobjectifs de travail axés sur la valorisa-tion du personnel, la satisfaction desusagers, la lutte contre les coûts de dés-organisation et l’équilibre du secteurd’intervention de l’organisation.

RESULTATS SEQUENTIELS_ Savoir prendre du recul par rapportau quotidien ("A ne travailler que sur lequotidien, on ne voit plus les chosesdans leur ensemble".) ;_ Apprendre à partager ses opinionsavant de décider (identifier ce qui ne va

pas et résoudre les problèmes en discu-tant avec les collaborateurs) ;_ Savoir établir un diagnostic straté-gique pour une organisation en difficulté(et/ou fonctionnant normalement) et pro-poser des solutions pour sa restructura-tion ;_ Savoir persuader une équipe dechanger son mode d’organisation pourgagner en efficacité ;

_ Déterminer des modalités transpa-rentes pour l’institution d’une hiérarchieprofessionnelle légitime (établir desliens directs entre les projets profession-nels des agents et le développement del’organisation) ;_ Créer des organisations profession-nelles centrées sur le développementd’une expertise interne largementreconnue;

_ Mettre en place un mécanisme dereconnaissance de grand leader d’opi-nion par grand corps de métier (défini-tion d’un protocole de validation de l’ex-pertise acquise) ;_ Team building.

De la veille informationnelle etdu management du systèmed’informationIdentifier les critères de définition de lanature et de la qualité des résultatsattendus des administrations, en vued’établir des standards de performancefiables pour l’évaluation, sur une périodedonnée, tant des agents que de la qua-lité des services rendus au public.Analyse des processus opérationnelsen vue d’établir un système d’alerte pourla mise en route de mécanismes.d’amélioration de l’appareil de produc-tion en gommant les irritants c’est à diretout blocage ou toute source (motif) d’in-satisfaction observée chez les agents et/ou chez les usagers.Définition d’un dispositif de réactivité(non de vitesse)Pour se corriger, se repositionner et serecaler par rapportà une vision stratégique. La vitesse, cen’est pas travailler vite : c’est tirer rapi-dement les conséquences de ce quis’est passé sur une période donnée.D’où, savoir, être informé pour mieuxréagir.RÉSULTATS ATTENDUS

Améliorer le rapport à la citoyenneté desServices publics, en construisant unsystème d’information dirigé vers lesagents et les usagers, pour clarifier lesattentes et faire sans cesse progresserles comportements professionnels pourplus d’efficacité : l’unité administrativedevient un centre de ramification et departage de l’information.

Produire des données expertes et fairedes études à partir d’informations agré-gées et fiabilisées (élaboration d’un bul-letin d’Informations).

Du pilot age de processusde développement etde changement [techniques d’inté-gration des dimensions financières,stratégique (positionnement – rôle –mécanismes – décisionnels) et/ou deressources humaines]Les techniques d’élaboration des ter-mes de référence d’un projet et/ou d’uneaction de réforme.Les techniques de conduite d’une mis-sion d’étude pour la réforme et/ou la res-tructuration d’une unité de productionadministrative (techniques d’évalua-tion).Les techniques de détermination dechronogramme détaillé de réalisation,fondé sur un calendrier de travail réalis-te et réalisable.Les techniques d’implantation du chan-gement dans les organisations.

RÉSULTATS ATTENDUSMaîtriser les techniques de lutte contrel’immobilisme dans les administrationsainsi que les déficits de méthode par lapermanence des réformes.Savoir investir dans la compréhension,base essentielle de la déterminationd’un cadre explicatif crédible, pour sou-tenir et/ou valoriser l’action de change-ment entrepris ou à entreprendre (laréflexion préalable et l’accompagne-ment sur le terrain étant les outilsindispensables de prévention deséchecs en matière de conduite du chan-gements).Savoir être un manager d’engagementà la tête d’une équipe dirigeante suffi-samment dynamique et entraînante,ayant les capacités nécessaires (donpédagogique, charisme, etc…) pourprendre les gens là où ils sont pourles rendre meilleurs.

AnalyseLe blues des

fonctionnairesafricains

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 29

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30 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

De la consult ance etdémarche de l’expert :étude de cas : méthodologiede l’élaboration d’un pro -gramme économique

Des méthodes d’analyse et deréflexion centrées sur la survie etl’expansion équilibrée d’une unité oud’un système administratif (marchésde clientèles, domaines d’activité,gain de productivité, qualités des ser-vices offerts, bien-être du personnel,définition des produits, mode d’orga-

nisation des prestations) ;Des cadres d’analyse des situationsproblématiques, permettant derechercher les réponses non passeulement en termes réglementaires,mais également au regard de métho-des d’approche des problèmes etdes schémas de réflexion propres àen dégager les solutions les plusadaptées (techniques d’identificationd’objectifs critiques assortis d’é-chéances claires, pour la prise encharge de problèmes de fond érigésen équations prioritaires à résoudre ).RÉSULTAT ATTENDU

Déterminer un protocole de valida-tion de l’expertise nationale acquise(définition de mécanismes de vérifi-cation de la parfaite maîtrise par lescadres de la démarche de l’expert, àtravers l’examen de leur contributionau processus de rationalisation per-manente des aspects institutionnelset organisationnels de la prise dedécision économique stratégique oude la fixation des objectifs de poli-tique générale ).

Journaliste de profession, ThéophileKouamouo est le promoteur du premierportail communautaire de blogs en Côted’Ivoire, Ivoire-Blog (http://www.ivoire-blog.com). Il explique ici le phénomènedu blogging, évoque les premiers pasd’Ivoire-Blog et ébauche les perspectivesd’avenir.

C’est un mode d’expression dont onentend de plus en plus parler dans lesmédias, mais que beaucoup d’Ivoiriensne maîtrisent pas encore. Et il y a unequestion que beaucoup se posent maisn’osent pas poser : qu’est-ce qu’unblog ?

Un blog est une sorte de bloc-notes per-sonnel publié sur Internet, grâce à desoutils logiciels rendant aisées la création,l’administration et la diffusion sur le web.Un blog peut, de manière très schéma-tique, être considéré comme une adres-se électronique publique. L’internaute nes’adresse pas à un autre internaute, maisà tous les internautes qui consultent sapage personnelle. Le bloggeur s’exprimenon seulement par le biais du texte, maisaussi à travers l’image fixe, le son et lavidéo.Le bloggeur peut aussi utiliser des lienshypertexte pour renvoyer à d’autres blogs,sites, vidéos en ligne, éléments sonores,etc…Le blogging est aujourd’hui une tendancelourde dans les mondes de l’information,du web et de l’animation des commu-nautés.

De nombreux journalistes, écrivains, acti-vistes, libres penseurs, managers tiennentdésormais leur blog. Les bloggeursdeviennent des prescripteurs et desinfluenceurs dans les domaines de l’art,de la littérature, des loisirs, de la musique,des technologies.

Quand avez-vous créé Ivoire-Blog etpourquoi ?

Nous avons créé Ivoire-Blog en janvier2008. Disons que l’appétit est venu enmangeant. Avec un certain nombre d’a-mis, nous avons commencé à bloggersur des plateformes mondiales ou africai-nes, et nous avons réussi à créer une sortede communauté. Il nous a semblé inté-ressant de créer un espace communau-taire ivoirien sur le net, pour mieux déve-lopper en Côte d’Ivoire et dans la diaspo-ra la culture du blog, qui est aussi une cul-ture de la convivialité et de la démocratieparticipative. Nous avons créé Ivoire-Blogavec l’appui d’un partenaire technique etstratégique à la crédibilité éprouvée :Blogspirit.Blogspirit est le leader européen des blogsen marque blanche. Son logiciel, BCMS(Blogspirit Content Management System),a été adopté par de grandes marquescomme Telecom Italia, TelecomArgentina, Canal Plus, M6, Le NouvelObservateur, la BNP et la Société généra-le.Le siège de Blogspirit est situé en France,dans la région parisienne.

Quel type de blogs trouve-t-on surIvoire-Blog ?

Il y a déjà un peu de tout. Des billetsconsacrés aux questions de citoyenneté,mais aussi au sport, à la culture, à la com-munication, aux technologies et auxquestions internationales. On trouve aussisur Ivoire-Blog des conversations riches etfécondes entre bloggeurs et commenta-teurs.

Quelles sont les perspectives d’Ivoire-Blog ?

Après avoir testé sa solution, recruté denombreux bloggeurs et bâti sa commu-nauté globale, Ivoire-Blog veut désormaispasser à une nouvelle phase.Il s’agit de renforcer les « communautés »spécialisées d’Ivoire-Blog avec l’appui demarques partenaires. La spécialisationdes « communautés » est intéressantepour les internautes, parce qu’elle leurpermet de lire et d’échanger sur leurs pas-sions. Elle est aussi intéressante pour lesmarques et les annonceurs, parce qu’elleleur permet d’atteindre avec une forteefficacité les publics qu’ils ciblent.Demain, la publicité passera forcémentpar le net, et par des communautés inter-actives de passionnés.

Tous sur Ivoire-Blog

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• Universités d’AbidjanExercice d’exorcisme autour de la violence / Par Elvis Kodjo

• Professeur Jean Kouldiaty « Nous avons déjà le système LMD» / Par Jean Philippe Kassi

• Université Abou Moumouni de NiameySur la route de la normalisation / Par Edwige H.

Augustin Niango Directeur de l’enseignementsupérieur de l’UEMOA

« En 2012, on notera des améliorationsdans nos universités » / Par Edwige H.

Etienne Ehilé« Tous les partenaires gagneraient à aider

le REESAO » / Par Elvis Kodjo

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desrpubliquesen Afrique

C’est connu, les universités publiques africaines sont malades. Jadis, établissementsde référence dans la formation de cadres d’excellents niveaux, ces institutions

sont devenues, depuis deux décennies, des lieux de production de chômeurs. D’Abidjan àDakar, en passant par Niamey, le constat est le même : personnel inapproprié, infrastructu-

res vétustes, inadéquation entre les effectifs et les infrastructures, offre de formations endéphasage avec les besoins du marché de l’emploi, absence de volonté politique, explo-sion des universités et grandes écoles privées. Nos universités publiques vont mal. Elles

payent, selon Augustin Niango, Directeur de l’enseignement supérieur à La commission del’Uemoa, le prix du désintérêt pour l’enseignement supérieur au profit de l’éducation de

base, longtemps affiché par les bailleurs de fonds et les institutions internationales. Aussi,La commission de l’Uemoa engage-t-elle d’importantes réformes académiques et structurel-

les dans les universités de son espace. Mais si à Ouagadougou, l’Université a une petitelongueur d’avance sur ces réformes, à Abidjan

et à Niamey par exemple, tout est à faire. Notre dossier

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40 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

Par Elvis Kodjo

Depuis 2000, Wombélé ne fait plusbonne garde à l’entrée de l’Universitéde Cocody, le principal temple dusavoir d’Abidjan. Symbole de cetteUniversité, ce masque issu de la tradi-tion Sénoufo, une ethnie du Nord de laCôte d’Ivoire, a été souvent sujet àpolémique lorsque la violence a faitirruption -voici une vingtaine d’an-nées- dans l’espace universitaire ets’est imposée à tous au grand damdes maîtres du temple. Wombélé,nom du masque Sénoufo, selon cer-tains, incarnerait la violence. Aussi,ont-ils souhaité et obtenu que la copieartisanale du masque Sénoufo, quitrônait à l’entrée de l’Université dispa-raisse de cet espace. Un déboulon-nage qui n’a pas réussi à desserrerles vis de la violence et conjurer cer-tains vices du milieu estudiantin.L’actuel Ministre de l’enseignementsupérieur et de la recherche scienti-fique, M. Cissé Ibrahim Bacongo, lui,s’est engagé dans un exercice d’exor-cisme d’un autre style. C’est celui d’un

exorcisme par le dialogue. Cet exercice jamais réussi par aucun

de ses prédécesseurs laisse entrevoir,six mois après son entame en novem-bre 2007, de réels espoirs d’une vieplus civilisée dans les établissementsd’enseignement supérieur du pays. Tout a commencé par un atelier deréhabilitation des résidences universi-taires tenu dans la cité balnéaire deGrand-Bassam, à une trentaine dekilomètres d’Abidjan, officiellement àl’initiative de la FESCI, la puissanteFédération estudiantine et scolaire deCôte d’Ivoire, mais en réalité sousl’inspiration du Ministre CisséBacongo. Pour la première fois, depuis le retourdu pluralisme politique en 1990, d’au-tres associations d’étudiants, curieu-sement contraintes à la clandestinité,se sont retrouvées aux côtés de laFESCI, une fédération qui a souventfait la pluie et le beau temps sur lecampus, s’arrogeant par la force, etparfois par le recours à la machette, -

qui fut son instrument de dialogue pri-vilégié- l’unique droit de cité. Tirantjudicieusement profit de la terreurqu’elle a su inspirer à tous, elle estdevenue « propriétaire » de la quasi-totalité des 9 766 chambres du patri-moine universitaire, les réservant àses dirigeants, les cédant à qui elleveut et disposant du fruit de cette loca-tion. Inutile de le dire, la gestion desrésidences universitaires échappe auCentre régional des oeuvres universi-taires (CROU), juste bon pour inaugu-rer les chrysanthèmes. Commeconséquence, l’habitat de l’étudiantivoirien a perdu son lustre d’antan, augrand dam des étudiants des annéesd’avant 1990 qui n’hésitent guère àévoquer leur « belle époque, faste,disciplinée, studieuse » où ils avaienttout à l’œil, dans des résidences bienpropres, ordonnées et si attrayantesque le succès était (presque) toujoursgaranti dans les conquêtes féminines.

Exercice d’exorcismeautour de la violence

Le masque Wombébéavant son déboulonnage

Le socle qui soutenait lemasque est vide depuis 2000

Etidiants de la FESCI, une fédération qui a souvent fait la pluie et le beau temps sur le campus

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Universités d’AbidjanDOSSIER

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Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 41

• Sous quel signe avez-vousplacé votre mandat à la tête del’Université de Ouagadougou ?

J’ai placé mon mandat sous lesigne de la promotion des étu-diants, de leur réussite et de l’ou-verture de l’Université vers lemonde socio-économique. Il s’agit,non seulement, de favoriser la réus-site des étudiants qui s’inscriventdans les différentes filières, maisaussi affirmer la professionnalisa-tion de la formation, bien entenduen relation avec le monde profes-sionnel, les entreprises publiquescomme privées du Burkina Faso etde la sous région. Il s’agit égale-ment de développer des outils per-formants de formation tout au longde la vie, c'est-à-dire, permettre auxgens des secteurs privés et publics

de pouvoir venir à l’Universitéquand ils le souhaitent, pour amé-liorer leurs compétences ou acqué-rir de nouveaux diplômes. Nous avons donc créé un cadre deconcertation Université/monde del’emploi qui permet d’assurer uneconnexion permanente entrel’Université et les différentes entre-prises, entre l’Université et laChambre de commerce. Nousessayons, en conséquence, d’intro-duire de nouveaux modules d’entre-prenariat dans certaines filièresprofessionnelles De 2000 à 2007nous avons eu 70% d’augmentationde ce type de filières, et de nom-breuses autres filières se sontcréées, allant par exemple, de laproduction des semences dans l’a-gro alimentaire à la gestion, le trai-tement et la valorisation des

déchets, ainsi qu’à l’aménagementdu territoire, la gestion des organi-sations et des collectivités, etc.

• Pourrait-on avoir une idée dupourcentage d’étudiants inscritsdans ces filières professionnel -les ?

Le pourcentage est très faible. Lesconditions d’entrées sont exigean-tes, du fait de la forte demande liéeà ces filières. Les effectifs sont doncde l’ordre de 20 par promotion.On y entre par concours suivi d’unentretien qui permet de sélectionnerceux des étudiants qui ont un projetprofessionnel pouvant être réalisépar le programme dispensé. Ceci,pour

«Nousavons déjàle systèmeLMD » Si on devrait classer les universités de l’espa -ce UEMOA par ordre de mérite, l’université deOuagadougou ferait incontestablement figuredefavorite. En ef fet, elle a été classée deuxièmemeilleure université francophone d’Afrique autrès sérieux classement de Shanghai** en2007. Volonté politique af fichée, esprit deconcertation partagé, recherche de stabilitésociale etc., Professeur Jean Kouldiaty , lePrésident de l’Université nous parle ici de lagestion de l’Institution qu’il dirige.

Par Jean Philippe Kassi

Professeur Jean Kouldiaty(Président de l’Université

de Ouagadougou)

Université de

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éviter que l’étudiant se trompedans sa démarche. Alors chaqueétudiant est tenu de proposer unelettre de motivation accompagnéed’un début de projet professionnelpour qu’on apprécie l’adéquationde ce projet avec le contenu duprogramme que nous voulons met-tre en place. C’est pour cela qu’onne trouve pas inscrits dans les filiè-res professionnelles, plus de 10%des effectifs de l’université. Il y abeaucoup de demande et très peude dossiers satisfaits. Mais la gran-de majorité des étudiants qui sor-tent a un emploi au cours de l’an-née qui suit.Nous mettons justement en placedes instruments pour mesurer l’in-sertion professionnelle des étu-diants à la sortie de l’université engénéral, en commençant, bien sûr,par ce qui est plus pratique, c'est-à-dire, les étudiants à la sortie desfilières professionnelles.

• Y a-t-il une adéquation entre leflux d’étudiants et les infrastruc -tures de l’Université ?

Nous essayons de construire desinfrastructures en adéquation avecle flux d’étudiants. Pour cetteannée, nous avons construit, surfinancement de l’Etat, un com-plexe de deux amphithéâtres de1500 places avec 4 salles de TDde 200 places en moyenne.L’année dernière, nous avons inau-guré deux amphithéâtres de 1500places construits sur financementlibyen. Il y a beaucoup d’efforts quisont faits mais nous souhaitonsplus. Nous avons en projet un com-plexe d’un amphithéâtre multilin-gue avec visioconférence, pour lesenseignements à distance et dedeux autres amphithéâtres de2500 places chacun, car nousavons des premières années deplus de 2000 inscrits dans des sec-tions comme Sciences juridiquesou Sciences économiques

• Et qu’en est-t-il du montant desfrais de scolarité quand on saitque la tendance générale est à lahausse ?

Les frais d’inscription sont de15.000 francs Cfa pour les étu-diants ýordinairesý et de 35.000francs Cfa pour les étudiants sala-riés. Dans la majorité des Etatsfrancophones on s’attend à ce quetout soit gratuit dès lors que c’est

public. On s’attend à ce que toutsoit pris en compte par l’Etat, ce quin’est pas possible. Puisque noussouhaitons avoir la paix sociale il ya un certain nombre d’aspects quenous sommes obligés de mettre enveilleuse mais il est impératif depenser à ce genre de question.Pour le moment ce n’est pas à l’or-dre du jour.

• Quel est l’état de la bibliothèque?

Toutes les bibliothèques des UFRsont informatisées et dotées delogiciels de gestion. Et grâce ausystème intranet, elles sont enréseau et toutes connectées à lagrande bibliothèque centrale.D’ailleurs, nous venons de faire, àla bibliothèque centrale, une exten-sion d’un bâtiment à deux niveauxqui sera réservé aux doctorants etaux enseignants-chercheurs quipourront bénéficier d’un espaceplus tranquille pour leurs recher-ches.

• Les universités sont très sou -vent en proie à des grèves duesà des revendications syndicales.Qu’en est-il de l’université deOuagadougou ?

Nous avons programmé, en débutd’année, 41 réunions avec les dif-férents syndicats d’enseignants,les associations estudiantines àcaractère syndical, les directeursd’UFR, individuellement, puis col-lectivement ; le conseil scientifique,le conseil de formation de la vieuniversitaire, les Atos, (agentstechniques, administratifs, techni-ciens, ouvriers et soutiens) etc.Leurs revendications sont d’ordreéthique et moral : ils demandent laconsidération du travailleur, ladémocratie universitaire, leur priseen compte dans l’ensemble desstructures qui traitent des intérêtsdes travailleurs, etc. Il faut dire queles syndicats que j’ai reçus icim’ont offert leur collaboration. Ilsm’ont dit que dès lors que je lesconsulterai avant d’agir, dès lorsqu’on discutera, ne serait-ce quediscuter et s’écouter, alors ils sau-ront nous accompagner dans notremission. Puisqu’il semble quequand on décide sans vous ondécide contre vous, alors, chaquefois qu’une décision sera prisesans eux, c'est-à-dire, contre eux,ils nous le ferons savoir de la

*LMDAvec le système LMD, la forma-tion se décompose en semestres,eux même découpés en Unitésd’Enseignement : regroupementdes cours, TD… Une licence s’or-ganise sur 6 semestres (environ 3années académiques actuelle)et un Master 4 semestres après lalicence. Chaque semestre, lesétudiants doivent valider 30 cré-dits. Il faut donc 180 crédits pourobtenir une licence et 120 créditssupplémentaires pour le Master.L’intérêt des crédits est qu’ils sontcapitalisables (acquis à vie) etsurtout transférables d’une UFR àune autre ou d’un pays à unautre car c’est une unité devaleur commune à tous les paysde l’UEMOA.Si dans le système actuel la licen-ce ne vise pas l’insertion sur lemarché du travail mais plutôt versdes études plus longues, la licen-ce LMD innove avec l’ouverturede Licences professionnelles, des-tinées à ceux qui veulent travaillerdirectement.Le Master, lui équivaut en unBac+5 et peut se faire en optionRecherche (qui mène vers unethèse) et option professionnel quimène vers le marché de l’emploi.Le Master professionnel comp-rend un stage de 3 à 6 mois et descours plus orientés vers l’entrepri-se alors que le Master recherchenécessite un mémoire.

Le Doctorat prolonge le Masterrecherche et s’étale sur 6 semest-res.On envisage déjà des mesurespour donner des moyens aux titu-laires de Doctorats en Scienceshumaines de s’intégrer sur le mar-ché de l’emploi ; une insertionréputée plus difficile que pour lestitulaires de Doctorat en Sciencesdites « dures ».

** Classementde Shanghai

Classement établi tous les ans pardes chercheurs de l’Institut del’enseignement supérieur del’Université Jiao Tong de Shanghaisous l’appellation de Academicranking of world universities. Ilclasse des universités du mondepar spécialités et par régionsselon des critères aussi variés quele nombre de publications, lesinfrastructures, les programmesd’enseignement, les performan-ces en recherche ou en éduca-tion etc.

42 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

DOSSIER

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manière la plus forte. Et moi j’aiplacé mon mandat sous le signe dela concertation et de l’applicationeffective de la démocratie universi-taire

• Quelle est la méthode d’évalua -tion des étudiants dans votreUniversité?

Généralement il y a le système d’u-nités de valeurs ou celui de moyen-nes pondérées. Ici, àOuagadougou, nous avons fait lajonction des deux systèmes. Nousavons institué un système modulai-re qui va prendre fin avec l’entrée envigueur du LMD selon le vœu et ladécision de l’UEMOA qui souhaiteque toutes les universités de l’espa-ce entrent dans le système LMD auplus tard le 31 décembre 2009.Dans le système que nous avonsinstauré, si l’étudiant a 10 ou plus de10 de moyenne dans les filièresordinaires, alors il est autorisé àpasser en classe supérieure ou àobtenir son diplôme. Mais s’il n’apas 10 ou plus de 10 de moyenne,on valide l’ensemble de tous lesmodules où il a eu 10 ou plus de 10de moyenne. C’est un système deLMD avant l’heure puisque dans lesystème LMD, tous les crédits d’en-seignements sont acquis, sont capi-talisables et transférables. Doncnous, nous savions que ce systèmeexistait dans les pays anglophonesmais nous ne pouvions pas nousarrimer parce que le système LMDnécessite naturellement un espace

commun pour que ces crédits soienttransférables et capitalisables. Orcet espace commun n’était pas misen place au niveau de l’Afrique,nous avons donc instauré un systè-me LMD plus ou moins hybride auniveau local. On capitalise lesmodules, même s’ils ne sont pastransférables et on fait en mêmetemps ce système de moyennespondérées

• Et qu’en est-il du niveau desétudiants ?

On entend toujours dire que les étu-diants sont de plus en plus mauvaismais on a l’impression que ce sontles anciens qui trouvent toujoursque les nouvelles générations sontmoins bonnes que la leur. Un philo-sophe disait justement à ce proposque « lorsqu’on commence à direque les générations actuelles sontmoins bonnes que la nôtre, c’estqu’on est déjà devenu vieux. » Il fautdire que notre monde change et ilfaut qu’on accepte de changer avecle monde. Les méthodes d’ensei-gnement doivent changer, lesméthodes d’évaluation doiventchanger et actuellement les jeunessont plus ouverts au monde. Lesgens qui ont plus de 50 ans aujour-d’hui n’ont pas les mêmes connais-sances sur la société, sur ce qui sepasse dans le monde que les jeu-nes qui sont ouverts à cause de l’in-formatique et de l’Internet ; qui sontouverts à cause de la télévision.Aujourd’hui nous avons la possibili-

té de faire le point sur tout ce quenous sert la presse dans la mesureoù la presse est diversifiée et lamême information est analysée dif-féremment, ce que les autres n’a-vaient pas. Avant il y avait 20 élè-ves dans une classe du primaireparce qu’il fallait réussir à convainc-re les parents d’envoyer leursenfants à l’école. Aujourd’hui, on n’aplus besoin de convaincre desparents ; nous avons des classes de100 élèves au collège et àl’Université, il y a des filières ou lesamphis débordent parce qu’on a1500 places pour 2000 étudiantsinscrits et naturellement on a l’im-pression que le niveau académiquea baissé. Mais je vous assure quedes deux positions, moi je suisplutôt dans une position médianeet je me dis que les savoirs, lesconnaissances et leurs transmis-sions ont changé, on ne peut plusdemander à un étudiant d’avoir laconnaissance livresque qui étaitcelle du passé et il faut qu’onpasse maintenant à l’acquisitiondes compétences. Qu’est ce quetu sais faire ? Quelle est ton utilitépour la société et je pense quec’est à ce niveau-là qu’on pourrajuger les étudiants, au lieu de lesjuger sur le savoir livresque et surle diplôme qu’ils détiennent. Il fautqu’on les juge sur les compéten-ces qu’ils acquièrent le long deleurs parcours à l’université oudans les écoles.

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Dix mois. C’est le temps que dure uneannée académique dans presque tou-tes les Universités. A l’Université AbouMoumouni de Niamey, il arrive qu’uneannée académique dure 22 mois,comme ce fut le cas en 2003. Unrecord qui a fini par placer l’Universitéde Niamey en fin de peloton dans leclassement (informel) des universitéspubliques en Afrique. Une contre-per-formance que l’on continue encore d’u-tiliser pour illustrer les tares et handi-caps des universités publiques enAfrique. A Niamey pourtant, depuis,l’année universitaire s’est normalisée. Acoups d’années blanches et d’annéesabsorbées, l’Etat a réussi par un tourde force hors du commun à rattraper età maîtriser la notion de temps àl’Université. Effet palpable de cettemaîtrise du temps : la cérémonie derentrée solennelle par le recteur le 29octobre 2007. Cette cérémonie qui,depuis des lustres, avait disparu desusages de l’Université, est apparuecomme la concrétisation de la volontéplusieurs fois brandie par l’Etat de nor-maliser par tous les moyens l’annéeacadémique et d’assainir à tous prix l’u-niversité. Une démonstration de forcequi n’est pas faite pour plaire à l’Uniondes étudiants nigériens de l’universitéde Niamey (UENUN). Le syndicat d’é-tudiants qui s’est engagé, comme à

son habitude, dans un bras de fer avecl’Etat. A l’arrivée, une année normaliséemais une université toujours minée pardes grèves intempestives, doublées deleur corollaire : l’instabilité sociale quiporte les germes de l’instabilité acadé-mique. Déterminé à résoudre le problèmesocial qui, selon l’Etat, n’a pour seule etunique cause que l’existence del’UENUN, le Conseil de l’Université aexclu six étudiants membres du bureaunational de cette union. Une volontédissimulée de dissoudre cette unionsans prendre une mesure qui seraitattentatoire à la liberté d’association.Parmi les étudiants arrêtés, deux ontpassé neuf mois dans les geôles de laMaison d’arrêt de Niamey. Il leur estreproché d’avoir organisé en juin 2007un meeting pour des revendications,allant par exemple, du limogeage duDirecteur du Centre national des œuv-res universitaires à l’ouverture de filiè-res inexistantes (comme celles dePharmacie, de communication ou d’untroisième cycle en psychologie) en pas-sant par la réduction du coût du ticketde bus. Si en apparence, certainesrevendications de l’UENUN sont fon-dées, la méthode des syndicalistes,elle, laisse à désirer. En effet, violenceet terreur accompagnent très souventleurs manifestations. Lors du meeting

de juin 2007, un enseignant a été tortu-ré aux tessons de bouteille, tandis quele Directeur du Centre national desœuvres universitaires voyait sa maisonpartir en fumée. C’est sans doute cequi fait dire au Président du Syndicatnational des enseignants du supérieurque l’UENUN n’est rien d’autre « qu’u-ne organisation fasciste, un Etat dansun Etat que la démission des pouvoirspublics a fait gagner en importance ».Ces pouvoirs publics, qui ont conscien-ce de la trop grande force du syndicatdes étudiants, ont nourri le projet de lanomination d’un officier de l’armée à latête du Centre national des œuvresuniversitaires et la création d’un com-missariat au sein même du campusuniversitaire. Ce projet illustre une foisencore la volonté farouche des pou-voirs publics nigériens d’assainirl’Université. Déjà, les principales reven-dications salariales des syndicats d’en-seignants (révision du statut, prime delogement, prime académique, prime àla publication, voyage de recherche,un ordinateur portable avec connexionInternet par enseignant) ont été satis-faites. Et si l’Université de Niamey, tou-jours inquiète des problèmes sociaux,ne gagne pas encore en crédibilité surle plan académique, on constate unenette évolution de la situation.

Sur la routede la normalisation

Par Edwige H.

Université Abou Moumouni

de Niamey

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Septembre 2002, des étudiants nigériens protestent devant leur ambassade à Abidjan

44 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

DOSSIER

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• La BAD (Banque africaine dedéveloppement) et l’UEMOA (Unionéconomique et monétaire ouestafricaine) engagent environ 18milliards de francs CF A dans unProjet destiné à appuyer les institu -tions d’enseignement supérieur etde recherche des huit Etats memb -res de l’Union (Bénin, BurkinaFaso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau,Mali, Niger , Sénégal, Togo). Quellessont leurs motivations ?

Avant toute chose, il me sembleimportant de souligner que ce projetn’aurait pas pu voir le jour sans l’enga-gement actif de la BAD qui a compris,avant toutes les autres institutions definancement du développement,qu’aucun progrès ne sera possible enAfrique sans des systèmes d’ensei-gnement supérieur et de recherche dequalité.En ce qui concerne l’UEMOA, il fautsituer son intérêt pour le développe-ment de l’enseignement supérieurdans le Traité de l’Union. Celui-ci,

dans son Protocole additionnel n° 2fixe aux Etats membres, l’atteinted’objectifs en matière de développe-ment des ressources humaines à tra-vers la mutualisation des moyens. Au-delà du Traité cependant, il convientde se demander pourquoi l’UEMOA,institution d’intégration économiques’intéresse au développement desressources humaines. Pour y répond-re, il convient de noter la corrélationtrès forte qui existe entre développe-ment des ressources humaines etcroissance économique.

«En 2012, on noterades améliorations dans

nos universités»

La Banque Africaine de Développement et l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaineengagent environ 18 milliards de francs CF A dans un vaste projet d’appui à la réforme des systèmes d’ensei -

gnement supérieur des huit Etats membres de l’Union. Un projet salutaire dont nous parleMonsieur Augustin Niango, Directeur de l’enseignement supérieur et de la formation professionnelle à la

Commission de l’UEMOA, basée à Ouagadougou.

Par Edwige H.

Augustin NiangoDirecteur de l’enseignement supérieur de l’UEMOA

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Reforme universitaire

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 45

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Ce lien n’est pas que théorique.L’histoire récente du monde nous ledémontre avec des exemples debonds économiques prodigieux réali-sés par des pays qui, disposant detrès peu de ressources naturelles,ont misé sur le développement desressources humaines par des inves-tissements massifs dans l’éducation(y compris l’enseignement supé-rieur). La réussite des pays d’Asie duSud, des économies émergentesd’Amérique latine ou même d’Afriquedu Nord sont là pour l’attester. Lesactions de l’UEMOA dans ce domai-ne visent donc à aider les Etats àfaire en sorte que l’enseignementsupérieur occupe la place qui est lasienne dans le système éducatif et ledéveloppement.

• Quel constat avez-vous fait sur lasituation dans l’enseignementsupérieur qui justifie cette inter -vention communautaire ?

Le constat porte sur la crise quisecoue le secteur de l’enseignementsupérieur depuis de nombreusesannées. Cette crise fut accentuéepar les restrictions budgétaires aux-quelles ont été soumises nos Etatsdu fait des programmes d’ajustementengagés depuis les années 1980.Tout l’enseignement de base, ayantorienté les choix en matière d’éduca-tion, a fini par avoir raison de nosinstitutions d’enseignement supé-rieur dont la crise peut se résumer enquelques mots : forte croissance deseffectifs parallèlement à une réduc-tion des crédits, insuffisance des res-sources humaines, faiblesse de lagouvernance, pertinence limitée del’organisation académique et ducontenu des enseignements.Les institutions d’enseignementsupérieur ont pleinement consciencede ces faiblesses. Au cours de l’an-née 2004-2005, la réflexion engagéeavec les acteurs de ce niveau d’en-seignement a fait apparaître une trèsforte volonté de réformes. LaCommission et la BAD ont pu noter àquel point les principaux acteurs del’université semblent préoccupés parla perte de crédibilité de leurs institu-tions. C’est cette nette appréciationdes enjeux qui a donné naissance auRéseau pour l’excellence de l’ensei-gnement supérieur en Afrique del’Ouest (REESAO), animé par lesuniversitaires eux-mêmes et que lesfinancements BAD et UEMOAaccompagneront.

Par ailleurs, prenant acte de cettevolonté de changement, le Conseildes Ministres de l’Union a adoptéune directive qui oblige toutes lesinstitutions d’enseignement supé-rieur de notre espace à basculer ausystème Licence, Master, Doctorat(LMD) au plus tard à la fin de l’année2009.

• L’UEMOA a un Projet d’appui aux

Centres d’excellence qui concerneégalement l’enseignement supé -rieur . Quelle dif férence y a-t-ilentre ce projet et le P AES(Programme d’appui à l’enseigne -ment supérieur) ?

Le Projet d’appui et de développe-ment de Centre d’excellence régio-naux a été lancé en 2005. Il vise àidentifier et à créer pour les pays del’UEMOA un ensemble d’institutionsde référence implantées sur le terri-toire de l’Union.Le projet fonctionne par appel à par-ticipation adressé à l’ensemble desinstitutions d’enseignement supé-rieur et de recherche des Etats mem-bres de l’Union. La sélection s’effec-tue sur la base d’une série de critèresqui mettent en avant l’excellence del’institution, son caractère régional, laqualité de son équipe pédagogique,sa capacité à innover et à s’insérerdans des milieux professionnels.La Commission a ainsi identifié 12institutions, centres d’excellence de

l’UEMOA soutenues à hauteur de 1,5milliard de francs CFA. L’exécutiondu projet est à mi parcours et sesrésultats sont largement satisfai-sants. Une école comme l’InstitutInternational d’Ingénierie de l’Eau etde l’Environnement (2IE), basé àOuagadougou devient une institutionmondiale dans son domaine de com-pétence et plusieurs autres établisse-ments commencent à se positionnersur des appels d’offres internatio-naux grâce à l’appui de l'Union.En résumé, la différence entre cesdeux projets réside dans leurs objec-tifs et leur étendue. Le Projet d’appuiaux centres d’excellence a pour butde consolider un nombre réduit d’ins-titutions à fort potentiel, tandis que leProjet d’appui à l’enseignementsupérieur répond à des préoccupa-tions qui concernent l’ensemble dusystème. Les deux projets se rejoi-gnent cependant en ce sens qu’ilsrépondent à des besoins de dévelop-pement de l’enseignement supérieur.L’UEMOA a également, depuisquelques années, un programme desoutien qui est en fait un programmede bourses d’études …

Oui. Ce programme de bourses d’é-tudes (que nous appelons program-me de soutien à l’excellence), aujour-d’hui à sa sixième édition, est destinéà accompagner les étudiants quisouhaitent entamer des études deniveau troisième cycle dans les éta-blissements de notre espace. Ceprogramme entend contribuer à laconstitution d’un vivier de compéten-ces dans des domaines essentielsau développement de la région. A cejour, l’Union, à travers ce program-me, a financé plus d’une centaine deboursiers dans plusieurs domainesde formation dont l’expertise compta-ble, les sciences de l’ingénieur, lasanté publique, l’aménagement duterritoire, l’éducation, etc.

• Les écoles privées sont-ellesconcernées par le Projet d’appui àl’enseignement supérieur ?

Toutes les institutions d’enseigne-ment supérieur et de recherche sontconcernées par le Projet. Nous nefaisons pas de différences entre uneuniversité publique et une universitéprivée dans la mesure où elles exé-cutent toutes une mission de servicepublic. Notre souci est qu’ellesrépondent toutes aux mêmes nor-mes de qualité et que toutes les per-

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sonnes, qu’elles fréquentent un éta-blissement public ou privé d’ensei-gnement supérieur, aient des chan-ces à peu près égales de réussite.

• Que deviendra le Brevet de tech -nicien supérieur (BTS) dans lecontexte de la réforme LMD ?

Notre réflexion sur le LMD ne s’estpas penchée de façon spécifiquesur la situation des BTS et plusgénéralement sur la formation pro-fessionnelle. Par ailleurs, la directiveLMD ne règle pas tous les problè-mes de la formation. Il règle encoremoins les problèmes que rencont-rent aujourd’hui les formations àvocation technique et professionnel-le. Mais il va sans dire que cettequestion est une préoccupation etqu’elle sera abordée en tempsopportun. Quoiqu’il en soit, l’idéalest qu’il y ait une cohérence d’en-semble du système de formation defaçon à assurer des passerelles ent-res types et niveaux de formation. Ilest souhaitable que l’entrée dansune formation de type professionneln’empêche pas d’accéder à la for-mation générale et vice versa. Il doitpouvoir être possible de tracer desparcours de formation qui emprun-tent aussi bien à l’enseignement ditgénéral qu’à la formation profession-nelle et technique.

• Comment comptez-vous réalisertechniquement et concrètementle Projet d’appui à l’enseignementsupérieur ?

Pour la mise en œuvre du Projet,nous avons demandé à tous lesMinistères chargés de l’enseigne-ment supérieur de désigner despoints focaux. Les points focauxassureront l’interface entre laCommission de l’UEMOA et lesbénéficiaires du projet que sont lesinstitutions d’enseignement supé-rieur et de recherche, les étudiantset les enseignants. Ces points ontun rôle important à jouer dans laréussite du projet. Ils seront chargésde travailler de façon à faciliter lefinancement des actions dont lamise en exécution est prévue dansle cadre de la réforme.Par ailleurs, en ce qui concerne defaçon spécifique l’appui à la recher-che, le projet prévoit un fond compé-titif d’appui à la recherche, destiné à

financer des travaux de recherched’équipes de chercheurs et de labo-ratoires, sur la base d’appels à pro-positions. Un comité scientifiquesera chargé d’examiner les proposi-tions et de retenir les travaux quinécessitent notre soutien.Il me semble important d’ajouter quele projet prévoit également d’ap-

puyer la création de cellules de liai-sons entreprises/universités desti-nées à être des interfaces entre laformation délivrée par les institutionsd’enseignement supérieur et lesentreprises pour faire en sorte queles contenus répondent à desbesoins clairement identifiés par lamise en place de mécanismes departenariat.

• Dans son exécution, ce vasteprojet devra durer 5 ans. Est-ce àdire qu’en 2012, les universitésseront entièrement réformées ?

Une réforme complète des universi-tés ne peut pas s’effectuer en 5 ansparce que toute réforme, pour êtreprofonde, prend du temps. Ce que nous espérons cependant,c’est qu’en 2012, le minimum néces-saire pour que les universités seportent mieux soit réuni : unemeilleure gouvernance, un systèmed’information de gestion efficace-ment fonctionnel, des programmesmieux adaptés, des enseignants

bien formés, des relations avec lesentreprises qui se mettent en place,des bases pour un dialogue socialplus visible, etc.Cela ne voudra cependant pas direque tous les problèmes de l’ensei-gnement supérieur seront résolus.

• Après la formation il y a le pro -

blème de l’emploi. V otre projetprend-il en compte ce volet ?

Les problèmes d’emploi sont desquestions très complexes à traiterau niveau régional. Notre convictioncependant est qu’une formation quis’adosse à des besoins clairementidentifiés et qui associe, dans uncadre partenarial, les milieux profes-sionnels, est une des conditionsnécessaires pour assurer l’employa-bilité des sortants du système. Ellen’est cependant pas suffisante pourrésoudre les problèmes d’emploi quidépendent aussi d’autres facteurs,en particulier, de facteurs liés à l’en-vironnement économique.Pour assurer le plein emploi, il y ades conditions plus générales àremplir, liées aux choix de politiqueéconomique, à l’environnement desaffaires. Celles-ci vont au-delà despolitiques de formation dont traitenotre projet.

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Sur le campus universitaire de Cocody

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• Qu’est ce qui a motivé la créa -tion du réseau que vous dirigez?

Après la réunion de Bologne en1998, les pays européens dont laFrance décident de s’engagerdans la réforme Licence - Master -Doctorat (LMD). .Il s’agissait en fait de construire unespace européen de l’enseigne-ment supérieur capable de répond-re aux enjeux de la compétitioninternationale en relevant les défisscientifiques et économiques (lan-cés par les Etats-Unis, le Japon etquelques pays émergents commela Chine l’Inde etc. L’enseignement supérieur del’Afrique de l’Ouest Francophone,qui vivait jusque-là dans des lienstrès étroits avec le système fran-

çais, se trouve alors brutalementconfronté au défi de l’adoption dece schéma d’enseignement supé-rieur, considéré aujourd’huicomme l’aspect pédagogique dela mondialisation, déjà en vigueurdans les pays anglo-saxons etanglophones, tout comme dans laplupart des pays émergents.

• C’est ainsi que vous décidezde vous aligner sur le mouve -ment mondial, et que vous créezle REESAO ?

Oui, en octobre 2005, les respon-sables de sept universités nationa-les d’Afrique de l’ouest francopho-ne, s’étant rendu compte qu’il étaitabsolument nécessaire de mutuali-ser leurs compétences et leursmoyens s’ils voulaient que leursinstitutions entrent de façon opti-

male dans la révolution que repré-sente la mise en place du LMD,mettaient leurs universités enréseau. C’est ainsi qu’est né le Réseaupour l’excellence de l’enseigne-ment supérieur en Afrique del’Ouest (REESAO), pour répondrepleinement aux nouvelles exigen-ces de mutation et d’efficacitéqu’imposent les défis de la mon-dialisation.

Le Réseau pour l’excellence del’enseignement supérieur enAfrique de l’Ouest (REESEAO) aainsi été créé pour promouvoir unenouvelle politique de coopérationuniversitaire axée prioritairementsur la modernisation de l’offre deformation en vue de faciliter lamobilité et l’insertion profession-nelle. Sa mission est de définir,

Professeur Etienne Ehilé,Président du REESAO

« Tous lespartenaires del’EnseignementSupérieurgagneraientà aiderle REESAO »

Excellence universitaire

Par Elvis Kodjo

Le Professeur Etienne Ehilé, est le président en exercice du Réseau pour l’excellence del’enseignement supérieur en Afrique de l’Ouest (REESEAO). Un réseau créé en octobre2005 et regroupant 18 universités des pays de l’UEMOA.

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dans un esprit de solidarité et desynergie, les voies et moyensindispensables à la mise en place dusystème Licence-Master-Doctorat(LMD) en Afrique de l’Ouest (espaceUEMOA), en partenariat avec lesinstitutions nationales et internationa-les. En effet, suite à l’adoption du sys-tème LMD en avril 2006 à Libreville(Gabon) par le Conseil des Ministresdu CAMES, deux alternatives s’of-fraient aux participants: soit que lesEtats l’imposent directement auxstructures d’Enseignement Supérieur,ce qui a été l’option dans l’espaceCEMAC (Communauté Economiqueet Monétaire d’Afrique Centrale) ; soitque le processus commence à labase, pour s’achever par la décisionde l’autorité compétente, c'est-à-direl’onction de nos Etats. Cette deuxiè-me possibilité a été l’option du REE-SAO pour la zone l’UEMOA.Le REESAO est Aujourd’hui, uneréalité de 15 universités publiques(3autres universités s’ajouteront trèsbientôt à cette liste) de 7 pays sur 8de l’UEMOA. C’est un potentiel deplus de 4000 Enseignants-cher-

cheurs et 200000 Etudiants.

• Est-ce à dire que le REE -SAO disparaîtra après lamise en œuvre ef fectivedu LMD ?

La mission du REESAO esten fait plus vaste. Elleconsiste, certes dans l’immé-diat, en la mise en œuvre dusystème LMD, mais de pluselle se propose de mener demanière spécifique desréflexions sur les défis et lesgrandes orientations de notresystème d’EnseignementSupérieur au niveau sousrégional (espace UEMOA),en collaboration avec laConférence des Recteursdes UniversitésFrancophones d’Afrique etde l’Océan Indien (CRUFAO-CI) et le Conseil Africain etMalgache pourl’Enseignement Supérieur(CAMES).Ces deux derniè-res structures ayant plutôtdes objectifs d’envergurecontinentale.

• 3 ans après la créationdu REESAO, quel bilanpouvez-faire ?

Nous avons réalisé depuis 2005 lamise en place de textes fondateurs ;la mise en place de structures defonctionnement (Conférence des pré-sidents, Recteurs et DirecteursGénéraux, Comités Techniques LMD,TIC, Scolarité, Bibliothèque) ; l’har-monisation des standards LMD duREESAO ; la constitution graduelled’un répertoire des enseignants-cher-cheurs des universités membres duréseau ; la réalisation d’une dizainede séminaires interuniversitaires deformation de noyaux de formateurs.Chacune des 15 Institutions universi-taires du réseau a le devoir de resti-tuer ces formations à ses ensei-gnants, personnels administratifs ettechniques et étudiants. C’est la mis-sion que les membres se sont assi-gnée au cours de cette année univer-sitaire 2007-2008. En ce moment,nous préparons activement le pro-chain séminaire qui aura lieu àCotonou du 2 au 5 juin 2008 et quisera consacré essentiellement à « lagestion de la scolarité dans le cadre

du système LMD »Le REESAO a aussi élaboré des pro-jets d’accompagnement de la réformeet évalué le coût de mise en œuvredu système LMD et un plan d’actionsavec les activités prioritaires. Le chro-nogramme de mise en place du LMDdans le réseau a été défini. La datebutoir pour tous les établissementsmembres du réseau reste fixée à sep-tembre 2011. Enfin, avec le finance-ment du Groupe de Travail surl’Enseignement Supérieur del’Association pour le Développementde l’Education en Afrique (GTES-ADEA), dont je suis membre, lesecrétariat du REESAO est entrainde finaliser un « Kit de formation » surle LMD pour les universités d’AfriqueFrancophones. Il est important desouligner que l’UEMOA a pris unedirective pour ses Etats membres auxfins de prendre des décrets de miseen œuvre du LMD, pour au plus tarddécembre 2009.

L’on doit comprendre enfin que cetteréforme n’est pas une réforme deplus, mais plutôt un outil devenu unenécessité incontournable pour entreravec succès dans la mondialisation. Pour ma part, je reste fortement opti-miste en me disant que chacun à sonniveau, cherchera à répondre à ces 3questions fondamentales : Quelleéducation au 3ème millénaire pourma propre progéniture ? Quelle for-mation dans quel système d’ensei-gnement supérieur pour la jeunessede mon pays au 3ème millénaire, afinqu’elle soit au rendez-vous de lamondialisation ? De quel type de col-laborateurs mon entreprise a-t-ellebesoin pour être performante et com-pétitive à l’heure de la mondialisation? Les questions contenant en elles-mêmes leurs réponses, cela devraitnous amener, à quelque niveau oùnous nous situons, à nous remettresérieusement en cause pour prendreles décisions idoines courageusesqui permettront de rechercher et detrouver, effectivement, les moyenspour soutenir cette dernière mue qua-litative de nos Institutionsd’Enseignement Supérieur, afin qu’el-les ne ratent pas le train qui avance.

Je voudrais conclure sur ce premierpoint en disant que les progrèsaccomplis en si peu de temps sontimportants et ont permis au REESAO

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de se faire connaître et reconnaîtrepar les institutions internationalescomme un partenaire privilégié dansla mise en place de la réforme de l’en-seignement supérieur dans l’espacefrancophone de l’Afrique de l’Ouest

• Par rapport aux objectifs qui ontété à la base de sa création, le REE -SAO justifie-t-il son existence ?

Il était question que nous ne partionspas en rangs dispersés dans cetteaventure. Il fallait nous mettre ensem-ble afin de minimiser un certain nomb-re de difficultés dont les coûts de for-mation, d’acquisition des équipements(Commandes groupées pour le maté-riel informatique et le logiciel de ges-tion) ; utilisation rationnelle des res-

sources humaines (voir répertoire desenseignants-chercheurs avec leurspécialités et grades). Comme indi-qué plus haut, il s’agit d’un réseau estun réseau de plus de 4 000 ensei-gnants chercheurs et 200 000 étu-diants. C’est donc un marché impor-tant Vous comprenez que si nousavons des investissements à fairepour l’acquisition du matériel informa-tique qui doit sous-tendre le systèmeLMD et que nous partons avec unmarché de cette envergure, les coûtsseront forcément minimisés ou à toutle moins plus intéressants. Ce systè-me permettra aussi de minimiser lesdifficultés de ressources humainespar la mise en ligne des cours et par laFormation à Distance. Par exempleun cours qui se déroule à Cotonou,

est reçu au même moment par desétudiants des universités de Cocody,ou d’Abobo-Adjamé à Abidjan, deGaston Berger au Sénégal ou deNiamey au Niger. Ainsi, le cours d’unprofesseur est diffusé en temps réeldans tout le réseau...N’est ce pas unlà un gain substantiel de temps, d’é-nergie et d’argent ? Je crois que cesont des éléments importants à pren-dre en compte. Ce réseau devraitdonc être encouragé pour pouvoirréellement atteindre les objectifsmajeurs que nous nous sommes fixésà savoir moderniser les offres de for-mations pour être compétitifs au planinternational, parce que le systèmeLMD n’est rien d’autre que la déclinai-son pédagogique de l’impitoyable

mondialisation.Les problèmes de l’EnseignementSupérieur étant pratiquement lesmêmes dans tous nos pays, et tou-chant toutes les couches de la sociétéoù qu’on se trouve, nous avons intérêtà nous serrer les coudes, et à tra-vailler avec un esprit de solidarité.C’est pourquoi, tout le monde a inté-rêt à encourager et à aider concrète-ment le REESAO pour le succès decette initiative.Il est donc clair que l’existence duREESAO est fortement justifiée, etque si ce réseau n’existait pas, ilaurait fallu le créer .Comme il a étéindiqué ci-dessus, le REESAO s’estimposé aujourd’hui comme l’organis-me privilégié et même incontournablepour la mise en œuvre du LMD dans

l’espace UEMOA

• A qui faites-vous allusion quandvous dites que ce Réseau devraitêtre encouragé ? Aux Etats ?

L’on doit comprendre que cette réfor-me n’est pas une réforme de plus,mais plutôt un outil devenu unenécessité incontournable pour entreravec succès dans la mondialisation.Pour ce faire, chacun à son niveau,doit chercher à répondre à ces ques-tions fondamentales : Quelle éduca-tion au 3ème millénaire pour ma prop-re progéniture ? Quelle formationdans quel système d’enseignementsupérieur pour la jeunesse de monpays, afin qu’elle soit au rendez-vousde la mondialisation ? De quelle typede collaborateurs dois-je faire appelpour avoir une entreprise performanteet compétitive ? Comme vous pouvezl’appréhender, tout le monde doit sesentir concerné : l’Etat, les entreprises, lescitoyens, la société entière, bref, tous les acteurs du système édu-catif. Les questions contenant en elles-mêmes leurs réponses, cela devraitnous amener, à quelque niveau oùnous nous situons, à nous remettresérieusement en cause pour prendreles décisions idoines courageuses quipermettront de rechercher et de trou-ver, effectivement, les moyens poursoutenir cette dernière mue qualitativede nos Institutions d’EnseignementSupérieur, afin qu’elles ne ratent pasle train qui avance.Tous ceux qui peuvent contribuer àfaire avancer le système d’enseigne-ment supérieur sont donc concernéset devraient pouvoir encourager leréseau. Malheureusement, en Afrique,nous n’avons pas la culture de l’aideaux universités. Un exemple récent :l’université d’Abobo-Adjamé que jedirige vient de perdre un de ses labo-ratoires dans un incendie. Ce malheurn’a point ému la Côte d’Ivoire. Eneffet, hormis notre ministre de tutelleet le président du Conseil Générald’Aboisso, aucune structure ne nous aadresse ne serait- ce qu’une cartepostale pour exprimer une quel-conque compassion. Est-ce à dire quel’enseignement supérieur est le cadetde nos soucis ? Tout le problème estlà…..

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LAfrique Compétences / Mai - Juillet 2008 51

Formation

Par Alex de Loukou

Le Bureau national d’études techniques et de dévelop-pement (Bnetd) a mis en place depuis janvier 2007 unInstitut de Formation à la Haute Expertise et deRecherche (Ifher), en accord avec le Ministère ivoiriende l’enseignement supérieur. Cet institut né sur les cen-dres du Centre de formation et de recherche du Bnetd,se veut un véritable laboratoire de compétences enmatière de recherche et de technologie. L’Institut qui adémarré ses formations par deux filières, Ressourcesnaturelles et environnement et Informatique option :réseaux et télécommunication, s’est étendu, cetteannée, aux formations en Economie de l’aménagementdu territoire et du développement local et en Evaluationde projet. Ces formations sont sanctionnées par desMasters ou Dess en partenariat avec les universités

d’Abobo Adjamé et de Cocody. Pour le DocteurArmand Zagbaï, Directeur de l’Institut, il est plus quenécessaire de former de hauts cadres, ayant une par-faite maîtrise des nouvelles technologies afin de per-mettre aux africains d’être en phase avec l’évolutiondu monde. Ces formations pratiques et de haut niveaupermettront aux cadres ivoiriens et africains de seperfectionner. En créant cet Institut, le BNETD entendcontribuer au développement des compétences enmatière de maîtrise d’œuvre des ouvrages et de maî-trise d’œuvre des projets de développement. Déjàl’expertise du BNETD a dépassé les frontières de laCôte d’Ivoire pour s’installer dans d’autres payscomme la Guinée Equatoriale, le Bénin, le Libéria, leGabon, la République Centrafricaine.

Lesnouveaux

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Le BNETD entend contribuer au développement des compétences

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Missionsde l’IFHER• le renforcement des capacités africaines par la for-mation professionnelle continue qualifiante et la for-mation diplômante spécialisée.• la production des logiciels répondant aux objectifsde développement• la valorisation des résultats de la recherche et del'innovation technologique• le transfert de l’expertise du Bnetd dans le monde.

Domaines d’intervention

• génie civil (infrastructure et bâtiment)• transport• agriculture• énergie• environnement• informatique et nouvelles technologies de l'in-formation et de la communication• cartographie et télédétection• urbanisme, aménagement et développementlocal• finance, fiscalité et gestion des projets• formation, recherche et innovation technolo-gique

52 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

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Une des particularités de cet Institut duBNETD, c’est de faire accompagner la forma-tion par un comité d’entreprises réellement par-tie prenante dans le processus de formation. «Les étudiants qui sortent d’ici, vont directementen entreprise » rassure le Directeur. L’Institutconduit, en effet, des études techniques, élabo-re des outils de gestion et contribue à la valori-sation des produits de la recherche et de l’inno-vation technologique en liaison avec ses entre-prises partenaires que sont l’Apex-CI, leNepad Business Group, le cabinet Setym inter-national du Canada , le Fonds de développe-ment de la formation professionnel (FDFP) leCentre d’édition et de diffusion africaine(CEDA), le centre d’indicamétrie multipolaire etle Centre d’éducation à distance de Côted’Ivoire (CED-CI). Au-delà de sa vocation d’é-cole-entreprise, l’IFHER veut se positionner enAfrique comme un institut international de réfé-rence, une plate-forme de compétences et unpôle d’excellence en matière de formation qua-lifiante. Il développe des activités connexes quisont, entre autres, la création des bases dedonnées de gestion, des logiciels avancés(système expert) couplés à l’électronique et àl’automatisme, et des logiciels biométriquesaux fins sécuritaires. Toute une technologie depointe qu’on peut apprendre sur place, nousdit le Docteur Zagbaï qui invite les jeunes afri-cains à se former pour relever les défis dudéveloppement.

Où va leCAMPC ?

Ouvert depuis décembre 1975, le Centre afri-cain de management et de perfectionnementdes cadres (CAMPC), logé dans l’enceinte del’Université de Cocody, a une vocation panafri-caine. Les pays membres de l’ex-Organisationcommune africaine et malgache (OCAM) quiont signé son acte constitutif le 16 décembre1975 à Kigali, au Rwanda, lui ont assigné pourmission principale d’assurer le développementdes compétences et le renforcement des capa-cités des cadres africains. De l’avis deOumarou Amadou Saley, son actuel directeurgénéral, le bilan des trois décennies qui sesont écoulées depuis cette date, est satisfai-sant au regard de la tache qui lui a été confiéesa création.

Par Aurore Amany

Façade CAMPC / Le CAMPC en tant qu’institution inter-etats a encore sa raison d’être

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En 32 ans d’existence, le centre aformé plus de 12 000 cadres africainsissus d’une vingtaine de pays del’Afrique francophone. Il a reçu desstagiaires de plus de 1500 entrepriseset organismes. Depuis trois ans, leCAMPC organise annuellement 50séminaires spécialisés qui enregist-rent en moyenne 400 à 500 partici-pants. L’institution organise égale-ment 6 rencontres Top managementau cours desquelles elle forme unecinquantaine de dirigeants et de déci-deurs. Chaque année, elle met sur lemarché de l’emploi, au moins 20diplômés dans les Programmes longsen alternance (PLA).

Un centreautonomeLe CAMPC ne regroupe maintenantque six pays qui, chaque année, luiapportent «un léger appui financiersymbolique », selon son directeurgénéral. Ce sont le Bénin, le Burkina-Faso, la Côte d’Ivoire, le Gabon, leNiger et le Togo. Mais, il couvre etaccueille des stagiaires d’une vingtai-

ne de pays francophones d’Afrique. Le centre qui jouit d’une autonomiejuridique, administrative et financière,doit aujourd’hui faire face à de nomb-reux défis. Au nombre de ceux-ci, ledéveloppement des cabinets et descentres de formation en managementen Afrique francophone, qui est sazone de prédilection. En plus de cetteconcurrence des cabinets privés, l’ins-titution doit faire face à la concurrenceque lui impose des Etats-membres.En effet, il existe dans certains pays,des institutions nationales chargéesd’assurer l’initiation et la formation auxtechniques de gestion. Oumarou Amadou Saley, le directeurgénéral du CAMPC, affirme qu’il n’ypas lieu de s’inquiéter de ce phéno-mène «d’invasion». Il explique quecette nouvelle donne vient à pointnommé dans la mesure où elle lesoblige à rechercher et à promouvoir laqualité de leurs prestations. C’est que,pour lui, «ces nouveaux acteurs nesont pas forcément des concurrents.Ils peuvent être des partenaires auregard des nouveaux enjeux du mar-ché international de la formation». Enoutre, la concurrence impose l’amélio-ration des supports, moyens et

méthodes pédagogiques, lacréation de nouveaux pro-grammes et l’acquisition deslogiciels d’application infor-matiques adaptés aux atten-tes des organisations. Pourtant, au-delà de tous cesavantages, une inquiétudedemeure. Et elle est d’autantplus importante qu’elleconcerne l’éthique de la pro-fession. Il s’agit des acteursqui «dévalorisent la formation

en faisant fi des valeurs et normesrequises et qui pratiquent des prix aurabais».

Le CAMPC se distingue de tous cescabinets par la mobilité de ses sémi-naires qui se déroulent tout au long del’année dans plusieurs capitales afri-caines (Abidjan, Lomé, Accra,Cotonou, Kigali, Douala, Niamey,Ouagadougou, Bamako). L’autreargument du centre, c’est la recon-naissance de trois de ces diplômesprofessionnels par le CAMES. Il s’agitdu Diplôme de formation et de perfec-tionnement en gestion (DFPG), duDiplôme supérieur de perfectionne-ment en management des organisa-tions (DSPM) et du Diplôme supérieurde perfectionnement en managementsanitaire (DSPMS). Le centre formeégalement aux procédures du travailparlementaire, la bonne gouvernan-ce, la communication, l’informatiqueet les NTIC.

Un instrumentd’intégrationMalgré la création dans certainsEtats-membres d’institutions nationa-les de formation aux pratiques mana-gériales, le CAMPC en tant qu’institu-tion inter-Etats a sa raison d’être. Là-dessus, de Oumarou Amadou Saley,qui l’affirme, s’est expliqué : «leCAMPC apparaît comme un excel-lent instrument d’intégration régiona-le. C’est le lieu idéal d’échangesd’expériences entre les cadres desentreprises et organisations africai-nes. Il est souhaitable de maintenirau plan africain ou régional, un cent-re susceptible de donner une solideformation de managers aux futursdirigeants d’entreprises de nationali-tés diverses, en les confrontant auxexpériences vécues ça et là ». Il faut rappeler qu’en 1968 déjà, lespays de l’ex-Organisation communeafricaine et malgache s’étant pen-chés sur les problèmes d’encadre-ment dans les entreprises, avaientinsisté sur la nécessité d’organiser«dans les meilleurs délais, dans undes Etats-membres, une formationpratique basée sur l’éducation moder-ne en matière de gestion des entrepri-ses».

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LLe chemin qui mène de l’acquisitiond’une idée inventive à sa réalisationeffective constitue un véritable par-cours de combattant. On assistechaque année à l’abandon et audécouragement de plusieurs inven-teurs malgré la passion qu’ils ontpour la chose inventive. Les plustenaces vont s’improviser indus-triels s’ils ne veulent pas voir mou-rir les fruits de tant d’années d’ef-forts, alors qu’ailleurs, lorsque lepotentiel économique d’une inven-tion est avéré, des mécanismes etun ensemble de dispositifs permet-tent son exploitation.Dans nos pays, quand l’inventeurn’est pas vu comme un bricoleur «illuminé » c’est à peine si on ne luireproche pas d’avoir abouti à un telrésultat : « Mais il va devenir milliar-daire ! Et s’opposer à notre régime! De toutes les façons c’est uneaffaire privée et l’Etat n’a rien à yvoir… » Pourtant des structures ont étécréées en Afrique pour œuvrer à lapromotion de l’invention sur lecontinent, à l’exemple de l’OAPI(Organisation Africaine de laPropriété Intellectuelle), une struc-ture qui a vu le jour le 02 Mars 1977à Bangui (République deCentrafrique). L’une des missionsessentielles de cette organisationest de participer au développementtechnologique des Etats en appor-tant sa contribution dans la créativi-té et les transferts de technologies,en créant les conditions favorablesà la valorisation des résultats de larecherche et à l’exploitation desinnovations techniques par lesentreprises nationales.

Si l’OAPI, qui ne vit que par lesinventeurs africains, peut se préva-loir d’être un modèle réussi decoopération, ces inventeurs, eux,saignent à payer leurs annuités.C’est le cas de beaucoup d’inven-teurs ivoiriens qui malgré leursappels aux autorités compétentespour la prise de mesures exception-nelles, ont vu leurs brevets pure-ment et simplement déchus par l’or-ganisation africaine. C’est donc lelieu d’attirer l’attention des déci-deurs sur la fiabilité de l’accord deBangui en ses articles 40 et 41 rela-tifs aux déchéances et restaura-tions de brevets en cas de nonpaiement des taxes de protection.

Pour soutenir les inventeurs,l’OAPI promet la Création d’unFonds d’aide à l’invention et à l’in-novation, un fonds doté à sa créa-tion d’une enveloppe de 500millions de Francs CFA pour les 16Etats que compte l’organisation.Une preuve, s’il en est, que les gou-vernements des pays n’ont aucunevision pour le progrès technique etl’industrialisation du continent. Il faudra par ailleurs encourager lecapital risque par la création defond propre pour la valorisation desinventions, accorder des avantagesfiscaux aux entreprises disposantd’un capital risque, apporter unminimum de soutien financier auxAssociations d’inventeurs et soute-nir directement parmi les inventionscelles qui ont les meilleurs chancesde réussite, donner un caractèrepatrimonial aux brevets nationauxet instituer comme droit humain enAfrique : « le droit à la valorisationdes résultats de la recherche, del’invention et de l’innovation techno-

logique. »Ces mesures sont certes insuffisan-tes puisqu’elles ne touchent pas lescas de contrefaçons, les conces-sions de licences et vente de bre-vets. Et justement le constat estclair, aucune usine n’a été crééepour commercialiser des produitsd’une invention industrielle. L’ouverture sur l’extérieur impliquecertaines garanties que l’inventeurafricain ne peut malheureusementsatisfaire, au regard de son envi-ronnement économique où l’activitéde création d’entreprise ne bénéfi-cie d’aucun dispositif d’appui.Comment trouver des partenairesqui puissent investir dans une inno-vation africaine ? Celle-ci ne por-tant pas la marque d’un laboratoireconnu ou n’intéressant pas grandmonde parce qu’étant axée sur lavalorisation industrielle de produitsalimentaires typiquement africains.Certaines opportunités peuvent parcontre s’offrir aux africains si lesrésultats des travaux intéressentles circuits classiques de finance-ment (Banques, organismes definancement du développement..)ou s’ils peuvent servir partout dansle monde comme solutions tech-niques aux besoins humains. Icinos Etats assisterons impuissants,non seulement à la fuite des cer-veaux, mais aussi à l’expropriationde technologies révolutionnaires auprofit d’autres économies quideviendront plus conquérantes surle marché international des techno-logies.

* Economiste, inventeur Secrétaire général de l’Association

Ivoirienne des Action Inventives

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La batailledes inventeurs

Par Matthieu Yagui*

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Enjeux africains Contribution

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REDUIRE LA FUITE DES CERVEAUXAFRICAINS :

UN ENJEU DEVELOPPEMENTSTRATEGIQUE

En ce début du 21ème siècle, lemonde a fait un bond prodigieux dansle développement de la science ettechnologie. Ce bouleversement n’estpas prêt de s’arrêter. Cependant,l’Afrique continue d’afficher un impor-tant retard dans tous les domainesnotamment dans les secteurs clés dudéveloppement tels que l’éducation,la santé, l’environnement, letransport, le logement… L’Afrique esten crise et ne dispose pas des hom-mes clés en quantité suffisante pourpenser son développement et tra-vailler aux chantiers prioritaires :construction de routes et de ponts,exploitation des richesses du soussol, préservation des paysages, for-mation, sécurité, éducation, autosuffi-sance alimentaire…

Convoquée par Tony Blair en 2005,en marge des travaux du G8, pourfaire une évaluation de la situation del’Afrique, la « Commission for Africa »a rendu un. Rapport impitoyable etsans appel sur l’état de l’Afrique.. Envoici quelques extraits : « 4 millionsd’enfants de moins de 5 ans meurentchaque année de maladies que l’onpourrait, pour les deux tiers, guérir àpeu de frais, tandis que 40 millionsd’enfants (50% de la population amoins de 17 ans) ne peuvent aller àl’école. Le revenu moyen sur le conti-nent africain est au dessous de 1 dol-lar US, c’est-à-dire largement inférieurà ce qu’une vache européenne reçoitsous forme de subvention chaquejour. L’espérance de vie d’un habitantde l’Inde ou du Bangladesh (pourtantclassé dans le même groupe quel’Afrique) demeure de 17 ans supé-rieure à celle d’un africain. Dans cecontinent de 600 millions d’âmes où20 millions de séropositifs n’ont pas

accès aux thérapeutiques rétroviraleset. 166 millions d’africains surviventdans des bidonvilles au milieu dedétritus, sans eau, sans égout, sansélectricité… »

On pourrait se poser la question sui-vante : Comment un continent si richeen est-il arrivé là ? Il nous parait inté-ressant d’axer notre réflexion sur l’im-portance que peut avoir les ressour-ces humaines dans le processus dedéveloppement et singulièrement enAfrique. En Afrique la famille comptesur chacun de ses enfants, l’Etatcontribue à cette prise en charge quiest de plus en plus onéreuse pour despays en crise depuis plus de 30 ans.

En Afrique, ces investissements ontencore malheureusement un rende-ment trop faible en raison des contin-gences négatives comme la grandemortalité infantile, les guerres et tou-tes sortes d’instabilité sociopolitique,la famine et le Sida. Pour ceux desenfants africains qui arrivent à échap-per à toutes ces difficultés et à parve-nir à obtenir un diplôme, c’est unegrande victoire et surtout une granderesponsabilité. Car ceux qui peuventse prendre en charge doivent égale-ment, prendre en charge tous les aut-res membres de leur famille et/ou deleur communauté. Et, c’est là que setrouve l’un des nœuds gordiens duproblème de la fuite des cerveauxafricains. Car, chacun de nous est unmaillon essentiel de la chaîne desgénérations qui fait de ce continent cequ’il est.

Les institutions étatiques africaines,notamment les administrationspubliques n’arrivent pas toujours àorganiser la mise à disposition des

ressources humaines africaines pourservir au progrès et au développe-ment. Les témoignages en ce senssont légions. Entre cet immobilismedes institutions étatiques et le désir dechaque africain d’obtenir une amélio-ration conséquente et progressive (desa situation personnelle, familiale etprofessionnelle), il y a un fossé qui necesse de se creuser. Cette situationcrée un malaise, sinon un mal être ouun mal vivre, qui ouvre la voie au pro-jet de départ vers des horizons esti-més plus cléments.

Il peut s’agir d’un mouvement à l’inté-rieur du même état ou au niveau de lasous région, parfois combiné à unereconversion professionnelle. Ainsi, iln’est pas rare de voir des enseignantsreconvertis aux métiers du monderural, dans des pays africains où lesécoles nationales manquent cruelle-ment d’enseignants. Mais, le plussouvent, et l’information récente entémoigne, on voit naître et se concré-tiser des projets de partir de l’Afrique.Souvent, au péril de sa vie. Lorsqu’untel projet se réalise, dans l’ombre sedessinent deux intervenants antago-nistes. Le pays de départ et le paysd’arrivée. Tandis que l’attitude du pre-mier n’a guère évolué depuis le débutde ce phénomène, le second a pro-fondément modifié son attitude.

En effet, pendant très longtemps,entre les années 1950 et 1970, lespays d’accueil affichaient une attitudepassive parce que le phénomène enquestion leur était totalement profita-ble. Avec la détérioration de l’environ-nement économique mondial, lespays hôtes ont changé leur attitude àpartir des années 1980. Et ce, malgrél’aggravation de la crise socioécono-

Par Nathan Musengeshi*

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mique en Afrique. De la passivité com-plice, ils sont passés à une attitudeactive, voire offensive. Ils ont alors pro-cédé à des études pour mieux com-prendre l’importance de ce flux migra-toire afin de mieux en tirer parti. C’estainsi qu’ils ont mis en place diversesprocédures qu’il s’agisse de tombolaou de vraie politique gouvernementalede type immigration choisie dans le butde piéger les ressortissants des payssous développés qui veulent franchirleurs frontières.

En témoigne également les étudeséconomiques de cette acquisition desressources humaines de l’Afrique auprofit des pays développés. Dans lesannées 1971-72, le service de recher-che du congrès américain estimait à 20000$ US le gain économique réalisépar les USA pour chaque immigré qua-lifié originaire des pays en voie dedéveloppement qui s’y établissait.L’extrapolation faite de ce phénomèneentre 1985 et 90 donne un chiffre de1,2 milliards $ US d’investissementengrangés comme bénéfice net par lesEtats-Unis sur les 60 000 spécialistesde notre continent établis dans cegrand pays au détriment du continentafricain. Par ailleurs, la CNUCED aréalisé en 1979, une autre estimationqui tenait compte du marché et pour lespersonnes de 25 à 35 ans. Pour cetteinstitution des Nations Unies, chaqueprofessionnel africain émigré faisaitperdre à son pays d’origine une sommeestimée à 184 000$ US. Sur la base dece chiffre, l’extrapolation précédenteatteint la somme de 11,04 milliards$US ! Ce montant est négligeable si l’onprend en compte les africains émigrésdans le monde entier. Ce phénomèneexplique en partie l’état de misère danslequel l’Afrique se trouve aujourd’hui.

Dans son rapport de 1992 sur le déve-loppement humain, le PNUD faisait ceconstat éloquent : le Ghana avait perdu60% de ses médecins formés dans ladécennie 80, le Soudan 17% de sesmédecins et chirurgiens dentistes, 20%de ses professeurs d’université, 30%de ses ingénieurs et 45% de ses géo-mètres experts. Au Malawi seuls 28%des postes d'infirmiers étaient pourvus

en 2003, contre 47% en 1998. LaZambie avait perdu 1200 des 1600médecins formés depuis l'indépendan-ce en 1964. alors que pas moins de 21000 médecins nigérians travaillent auxUSA !... Pour compenser cette perte depersonnel qualifié, l’Afrique est obligéede recruter chaque année plus de 100000 expatriés non africains pour uncoût de plus de 4 milliards de dollars.Ce montant est directement prélevésur l’aide au développement accordé àl’Afrique et vient s’ajouter aux 50% decette même aide déjà prévus pour leremboursement des créances antérieu-res, aggravant ainsi l’endettement del’Afrique et ouvrant la porte à une nou-velle vague de départs.

Vittorio De Philippis et Christan Lossonnous édifient sur l’aide publique audéveloppement (voir Libération du 6juillet 2005). L'Aide publique au déve-loppement (APD) des pays riches estpassée, globalement, de 58 à 78milliards de dollars entre 2002 et 2004.Pas même le tiers pour l'Afrique. Et cemontant inclut les annulations de dette(40 % pour l'APD française). L'Afrique,qui, au passage, a déjà remboursé l'é-quivalent de deux fois le montant de sadette extérieure de 1980, se trouve aufinal trois fois plus endettée. Bush setargue d'avoir fait tripler l'aide àl'Afrique depuis 2000 ? Elle inclut lessurplus alimentaires déversés sur lecontinent. L'Europe se veut un modèle? Elle vient tout juste de prendre l'enga-gement de respecter en 2015 ce qu'el-le avait déjà promis en 1970 : consac-rer 0,7 % du PIB à l'APD. La France, unexemple ? Elle inclut dans son aidecertains... TOM (territoires d’outre-mer). Ainsi, en 2003, Mayotte fait partiedu top 10 des «aidés» (140 millions dedollars). Par ailleurs, l'aide est trop«liée» à des contrats avec les firmesdes pays riches. C'est le cas, selonOxfam, pour «70 % de l'aide italienneou américaine». L'aide est dispersée,pas assez ciblée, dévorée par les«consultants» étrangers. Résultat : «Iln'y a jamais eu aussi peu de cash pourdes projets de terrain», dit un diploma-te.

Devant ce phénomène qui prend

chaque jour des proportions inquiétan-tes et compromet l’avenir de tout uncontinent, chaque pays africain doitprendre la mesure du retard accumulédans son développement, et mettre enplace des structures socioécono-miques modernes pour la formation dupersonnel nécessaire au fonctionne-ment de l’Etat et des collectivités, pourla gestion et la planification des res-source et la définition des prioritésdans tous les secteurs de la vie natio-nale. La première richesse du conti-nent africain n’est ni l’or, ni le coton, nile maïs, ni le diamant, ni le coltran, ni lepétrole… c’est l’homme africain! C’estpour lui, avec lui et par lui que viendrale développement. Tout autre schémaest illusoire.

Seule satisfaction sur ce tableau, lesafricains d’Afrique et de la diasporacommencent à se concerter. A la finfévrier 2008 s’est tenue au Mali la hui-tième édition du Forum de Bamako surle thème : « L’Afrique un nouveau pôlegéostratégique : les enjeux ». Avec leprocessus de démocratisation en courspartout en Afrique, les Etats vont seheurter au désir croissant des peuplesà une amélioration rapide de leursconditions de vie et de travail. On peutalors espérer qu’ils prendront rapide-ment la mesure de leurs responsabili-tés au plan national, régional et interna-tional pour devenir des acteurs effica-ces de cette lutte contre la fuite descerveaux.

Il est nécessaire également d’avoirl’appui des institutions régionales etsous régionales spécialisées dans lesquestions de développement telle quela Banque Africaine de Développement(BAD) ou la Banque Ouest Africaine deDéveloppement (BOAD) pour ne citerque ces deux là. L’Union Africaine doitaussi opter résolument pour des sché-mas dans lesquels les résolutions ausommet sont confiées à des organesde contrôle et de mise en applicationdes décisions.

*Médecin/[email protected]

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inents5• En Afrique, malgré tout

Pourquoi je reste / Par Théophile Kouamouo

• Sous l’œil de l’Oncle SamNos «cousins» d’Amérique / Par Phil Nomel

• Un Noir chez les JaunesMême à Rangoon / Par Médard Koua

• En Australie, à l’autre bout du monde “Good day Mate!” Bonjour

/ Par Paulin Djité, Ph.D

• En EspagneBuenos dia de Madrid

/ Par Zit a Odomé Angone

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Par Théophile Kouamouo

Faut-il être fou pour choisir devivre en Afrique, dans une Côted’Ivoire en pleine crise, alorsqu’on est Franco-africain, qu’on aétudié dans de bonnes écoles enFrance, et qu’il suffit juste de trou-ver l’argent d’un billet d’avion pours’en aller dans l’Hexagone jouirdes acquis de l’Etat-providence ettrouver un travail stable ?Si la réponse à cette question est« oui », c’est que l’auteur de ceslignes est fou. Français d’origineCamerounaise, formé à l’Ecolesupérieure de journalisme deLille, j’ai eu l’opportunité de tra-vailler pour la « grande presse » fran-çaise, en France et en Afrique, et j’aidélibérément choisi de me transformeren journaliste de Côte d’Ivoire, un sta-tut que l’on pourrait considérer commedévalué par rapport à ma conditionpremière.Pourquoi avoir fait un tel choix ? Pourdes raisons liées à de très fortesconvictions sur la crise ivoirienne, audépart. Je me suis souvent expliquésur ce qu’on pourrait appeler le déclicde départ.Pourquoi persévérer ? Pourquoi conti-nuer de vivre en Côte d’Ivoire, enAfrique, à un moment où toute l’effer-vescence que l’on a connue ces der-nières années est retombée ?Pourquoi ne pas rentrer en France ?Il y a sans doute plusieurs éléments deréponse : la routine, l’attachement sen-timental à mon pays d’adoption, l’ap-préhension à l’idée de rebâtir une vie àzéro. Il y a également une foi dans lespotentialités économiques de l’Afriquede ce début de siècle.Je pense fondamentalement quel’Afrique est capable du meilleurcomme du pire aujourd’hui. La situa-tion mondiale lui est favorable : lacroissance asiatique booste les prixdes matières premières, les technolo-gies de l’information et de la communi-cation (TIC) ouvrent des perspectivesimmenses et encore peu explorées enmatière de télétravail, de télé-ensei-

gnement, de circulation des valeurs.Peu à peu, les peuples expriment leursexigences démocratiques et les armu-res des Etats totalitaires se fendillent.Notre forte démographie, nos disponi-bilités en eaux et en terres, nous met-tent au centre de la géopolitique mon-diale. Bien entendu, les obstacles sontlà, et on ne peut pas feindre de ne pasles voir : les égoïsmes, qui puisent leurdynamique dans la haine de soi, ainsique l’afropessimisme viscéral de plu-sieurs d’entre nous. On ne peut pas nepas voir une culture du pouvoir oppres-sive, caricaturale, brutale parce quepeu assurée, qui conduit aux dérivesantipatriotiques que l’on constate tousles jours. Mais des brèches sontouvertes, et le miracle est à notre por-tée.Je veux vivre en Afrique ces instantsdéterminants, participer à des aventu-res visant à tirer partie de cette donnenouvelle. Je veux être du côté de ceuxqui agissent pour créer une sociétéouverte, remplie d’opportunités, libéréeparce que libérale, tolérante et débar-rassée de ses complexes d’infériorité.Après six siècles de silence et d’op-pression, le temps de la renaissancearrive peut-être à grands pas. Ne leretardons pas par nos sarcasmes et

l’addition de nos cynismes.Il y a du travail en Afrique. Et je sensque demain certains secteurs serontporteurs : la valorisation des terresavec une agriculture vivrière moderni-sée, devenue potentiellement « renta-ble » grâce à la hausse des prix desdenrées alimentaires, qui est un phé-nomène de long terme dû à la crois-sance asiatique ; la valorisation de laforce de travail de notre jeunesse à tra-vers la formation et la création d’entre-prises axées sur les TIC ; la transfor-mation de notre croissance « surpapier » en réalisations concrètes àtravers le BTP et l’ingénierie…Et puis, de toute façon, il y a une réali-té que ceux d’entre nous qui ont vécuen Europe connaissent. Ils la répètentmais personne ne veut les croire : per-sonne n’attend les Africains enOccident, et l’immigration massiven’est ni possible, ni souhaitable.Nous n’avons pas le choix. Nousdevons travailler à ce que nos rêvess’incarnent sur la terre africaine. Dansce contexte, ceux qui peuvent déciderde s’en aller mais restent par la foi sontdes « évangélistes » de la renaissancede notre continent. Quel beau ministè-re !

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Pourquoi je reste

Premier satélite panafricain RASCOM-QAF1

« Les technologies de l’information et de la communicationouvrent des perspectives immenses et encore peu explorées »

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Par Phil Nomel

Ici, on appelle affectueusement «cousins » les africains-américains ;c'est-à-dire les noirs-américains.Nous avons transposé cette habitu-de très africaine de se trouver desliens de parentés avec tout lemonde. Les relations que nousentretenons avec nos « cousins »sont marquées par les préjugés quenous avons les uns par rapport auxautres.L’un des préjugés que nous avonssur nos « cousins » noirsd’Amérique, c’est la paresse et lafainéantise qui semble être leurmarque déposée. Pour relativiser,disons qu’il y a beaucoup d’entreeux qui refusent de travailler. Il suffitde faire un tour dans les rues deChicago, d’Atlanta, de New York etou de Washington DC pour consta-ter que nos cousins et cousines pas-sent le plus clair de leur temps àdéambuler dans les rues sans rienfaire d’utile. Et quand on débarquecomme moi de son Afrique natalepour venir chercher du boulot, on sedemande si on a bien fait de venirs’il y a autant de chômage qu’àYaoundé ou à Dakar. Mais très vite,on se rend compte qu’il y a du tra-vail, mais nos « cousins » préfèrentl’argent en vitesse que procurent lesactivités sombres, punies par la loi.Quand ils s’engagent à travailler, ilsle font juste pour quelques temps,avant de disparaître sans crier gare.Il faut dire que pendant tout le tempsqu’ils travaillent, ils sont très irrégu-liers, sauf le vendredi, Friday enanglais, mais que nos « cousins »appellent maintenant payday.C’est Davis, un « cousin »avec quij’ai travaillé qui m’a filé le mot pay-day. Davis ne jurait que par le pay-day et il revenait au travail lundisans un sou dans la poche ; necomptant que sur le prêt que luiferait « le Nigérian ». Le Nigérian ?C’est moi. Davis m’appelait toujoursle Nigérian. J’ai beau lui expliquerque je n’étais pas Nigérian maisIvoirien, Davis ne voulait rien com-

prendre et disait n’avoir que fairedes origines multiples des africains.Pour lui, puisque tout Nigérian estAfricain, tout Africain est forcémentNigérian. Quelle démonstration d’i-gnorance! Davis n’est pas le seul «cousin » à penser que l’Afrique estun seul et même pays. Et ce qui estétonnant chez nos cousins, c’estqu’ils savent faire la différence entreun négro-africain et un caraïbéen(Antilles, Trinidad, Jamaïque etc.)mais ne remarquent pas la différen-ce entre un Béninois et un Sud-afri-cain. Davis m’a expliqué que l’ac-cent des Nigérians, entendez biensûr de tous les Africains, est beau-coup plus lourd que celui funny descarïbéens. Seulement voilà, ils nesavent pas faire la différence entrele francophone africain qui se forceà s’exprimer en anglais et l’anglo-phone africain avec son anglaisyorubaïsé ou ashantisé. Ils nousmettent tous dans le même sac. Aufait, le Nigeria est la plus grandecolonie d’Africains aux Etats Unis.

On retrouve les Nigérians dans tou-tes les couches socio-économiquesde ce pays. Ils sont les plus en vueet les plus riches. Ce sont les mieuxintégrés. Seulement, depuisquelques années, les yankees crai-gnent les Nigérians. La raison ? Lesarnaques par Internet ! Professeursd’universités ou simples ménagères,hauts cadres ou ouvriers, toutes lescouches de la société ont été victi-mes des arnaqueurs nigérians. AuTexas, une banque a même été vic-time de cette mafia nigériane. Cettemafia est d’ailleurs fichée comme AlQuaida économique. Mais mainte-nant, les Nigérians n’ont plus lemonopole de l’arnaque par internet.D’autres nationalités se sont misesà leur école. Et parmi eux, certainsde nos « cousins » N’avais-je pas ditqu’ils préféraient l’argent en vitesseque procurent les activités répri-mées par la loi ? Tout compte fait,ce n’est pas par hasard que nousles appelons « cousins ».

Sous l’œil de l’Oncle Sam

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La ville de New-York

« Il y a du travail, mais nos « cousins » préfèrent l’argent envitesseque procurent les activités sombres »

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JPar Médard Koua*

Je n’avais jamais imaginé commen-cer ma carrière professionnelle enAsie jusqu’à ce jour de mai 2005 oùje reçu une offre professionnellepour le Myanmar (Birmanie). A la vérité, je ne connaissais ce paysque par la passion que j’ai pour laculture générale : le nom, la capitale,la situation géographique et surtoutAung San Suu Kyi, la célèbre oppo-sante birmane et prix Nobel de lapaix en 1991 ; le strict minimum pourêtre cultivé. Postuler pour le visavous édifie déjà sur d’autres réalités

de ce pays asiatique. Un post-scrip-tum, bien visible au bas du formulai-re de demande de visa vous précisequ’il vous est interdit de vous « inté-resser aux affaires intérieures dupays ». C’est en août 2005, sous une pluiebattante que je débarque à l’aéroportde Rangoon : un aéroport sommairequi me permet de me faire une peti-te idée sur le niveau de développe-ment du pays. A l’aéroport deRangoon, on est loin de l’aéroportultra moderne de Bangkok où j’avaisfait une petite escale.Le lendemain, j’étais au travail.Je suis Ingénieur en mine et géolo-gie et mon travail consiste à creuserdes forages pour la recherche d’Or.Je suis responsable d’opérations etje dirige une équipe de 13 person-nes : 3 opérateurs et 10 tacherons.J’ai passé la phase d’apprentissagede Responsable d’opération, avecmes collègues ingénieurs birmans. Ilfaut dire qu’ils sont hautains et peuenclins à partager leurs savoirs. Etreinstruits et diplômés dans ce payspauvre fait naître un sentiment desupériorité et de condescendanceque je n’ai jamais rencontré enFrance. La propension de mes collè-gues ingénieurs birmans, à parlerleur langue nationale m’avait égale-ment indisposé. Le contact direct avec les opérateurset autres tacherons m’a permis deme faire une autre idée des birmanset a été l’un des meilleurs momentsde mon expérience birmane. Ils sontplus enclins à partager leurs expé-riences et leurs connaissances, avectout le respect ; le respect humainqui est différent du respect hiérar-chique. J’ai plus appris auprès desopérateurs qu’auprès des ingé-nieurs.Je suis amené sur le forage à dirigermon équipe et à gérer les relationsavec les clients. Les chantiers,comme beaucoup de chantiers sontdangereux et exigent délicatesse,attention et de nombreuses mesures

sécuritaires. Une opération normaledure en moyenne 10 heures detemps mais il arrive, en cas de pro-blèmes, qu’on dépasse largement cedélai.Evidemment, je ne passe pas tout letemps à travailler. J’ai aussi une viesociale ! J’ai pu apprendre le birmanélémentaire : bonjour, merci, je t’ai-me. Avec ces mots, vous pouvezfaire le tour du monde. Et pourmieux connaître les birmans, je mesuis rendu un jour dans un templebouddhiste. Je ne trouverai jamais lemot exact pour décrire ce moment-là: tout le monde a cessé de prier et abraqué les yeux sur moi. Je croisqu’ils n’avaient jamais vu de Noirsdans ce temple. D’ailleurs, très sou-vent dans la rue, on s’arrête pour meregarder ou pour me montrer dudoigt. C’était amusant au début,mais maintenant, c’est, à la limite,énervant. J’ai réussi à voir la rési-dence dans laquelle vivait Aung SunKi, l’opposante et prix Nobel de lapaix, régulièrement emprisonnéedepuis 1988. C’était la seule infor-mation que je savais de la Birmanieet j’ai tenu à voir au moins la maisonde l’illustre prisonnière. Pour moi,Aung San Suu Kyi en Birmanie, c’é-tait un peu comme la Tour Eiffel àParis ou la Statue de la liberté àNew York .Malheureusement, je n’aipas pu faire de photos…Pour terminer ce petit tour d’horizon,il faut ajouter que les femmes sontbelles et désirables…et je suis trèssouvent amené à parler de l’Afrique,de la Côte d’Ivoire, ou à préciser àdes interlocuteurs administratifs queje ne suis pas un « US citizen »(citoyen américain). En général, ilsne connaissent pas et ne savent riende la Côte d’Ivoire. Je suis toujoursobligé d’ajouter « Drogba, Chelseaplayer country ». Alors, ils medemandent « Do you know him ? »et je réponds « Yes, of course » Quiva se négliger ici à Rangoon ?

* Pseudonyme

Un Noir chez les Jaunes

Même à Rangoon,on ne se néglige pas

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Aung Sun Ki, opposante Birmane« Pour moi Aung Sun Ki est à la Birmaniece que est la T our Eiffel à la France »

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Par Paulin Djité, Ph.D

« Mais c’est le bout du monde,l’Australie ! Qu’est-ce qui leur faitpenser que je quitterais mon postedans la capitale du monde modernepour me rendre à Sydney ? »,M’exclamai-je quand je reçu l’invita-tion à soumettre un dossier de candi-dature à l’Université de Sydney, unsoir de mars 1988. Calmement, leProfesseur Battestini me répondit : «Tu sais, si j’avais ton âge, je saisiraiscette occasion à deux mains… Lemonde moderne ? Mais c’est juste-ment dans des pays commel’Australie que se trouve l’avenir dumonde, et non dans de vieux conti-nents comme l’Europe et l’Amérique»

Un soir d’hiver particulièrementrigoureux, nous regardions encoreles festivités du bicentenaire de cepays lointain à la télévision, quand letéléphone sonna : « Vous êtes notretête de liste, et je vous contacte poursavoir si le poste vous intéresse tou-jours ». Mon épouse qui avait eu laprémonition de l’origine du coup defil s’empressa de me donner desinstructions : « Tu réponds oui. Y’ena marre de toute cette neige et de cefroid ! ».

« Good day, Mate ! », nous salue ledouanier australien à l’aéroport avecun sourire qui nous surprend. Onnous avait tant dit de nous méfier deces Australiens « racistes », et pour-tant… Nous n’allions pas tarder àdécouvrir un peuple accueillant, pla-cide, confiant, et surtout souriant. «Good day, Mate ! », ce n’est passeulement le bonjour rituel, c’est l’ex-pression sociolinguistique de l’égali-tarisme que l’on retrouve partoutdans cette société affable.

Notre aventure australienne nedevait durer que trois ans au maxi-

mum, et si nous nenous plaisions pasdans cette extrémité dumonde, nous pouvionsretourner à Washington, DC à toutmoment, tous frais payés. A deuxmois de la fin de la première annéedu contrat, le professeur Barko memanda à son bureau : « Je vous airecommandé auprès du doyen pourla titularisation. Vous recevrez unelettre à cet effet dans quelques jours». Accepter la titularisation voulaitdire démissionner de mon poste àHoward University. En valait-il lapeine ? Comment dire non à tousces sourires, à tous ces « Good day,Mate ! » ? Les Australiens sont siaccueillants !

« Maintenant que vous êtes là, jepeux vous l’avouer, j’étais curieux derencontrer ce garçon qui naquit lemême jour que j’ai débarqué dansce pays, il y a trente ans ». IvanBarko était un immigré juif deHongrie. Chef de département, ilétait bien plus pour moi et ma famille; il m’avait adopté comme son fils, etles garçons l’appelaient « grand-père». Ivan n’était pas la seule âmenoble à Sydney. Il y avait aussi cetancien premier ministre, GoughWhitlam, homme d’Etat de plus de90 ans, qui avait connu deux ivoi-riens : le ministre Paul Akoto Yao et

l’ambassadeur Guirandou Ndiaye.« Je ne comprends pas comment laCôte d’Ivoire, peut laisser fuir uncerveau comme le vôtre ; mais lemalheur des uns, fait le bonheur desautres ». Dix-neuf ans que dure cette aventureaustralienne. Nous n’avons pas eu,un seul jour, le temps de regretter lapetite place au soleil, quelque part,au bout du monde, que nous ontoffert des hommes bons. Ainsi va lavie ! C’est avec fierté que je sersmon pays d’adoption, non seulementà l’Université, mais dans les différen-tes missions qui m’ont été confiéesdepuis, de l’Unesco aux JeuxOlympiques. Et cette fierté granditchaque jour avec l’intégration totalede mes enfants qui eux aussi, cha-cun à sa manière, ont commencé àreprésenter l’Australie au niveauinternational (mon fils, Bruce Djitéest devenu l’avant-centre attitré deséquipes nationales junior et seniorde l’Australie). Citoyens du monde,voilà ce que nous sommes devenuspeut-être, mais nous resterons tou-jours Ivoiriens dans l’âme : dodomanan dodo ; la terre, c’est la terre.

En Australie,

à l’autre bout du monde

«Good day Mate!»Bonjour mon pôte!

Bruce Djité« Mon fils Bruce Djité d’origine ivoirienne estavant-centre védette de l’équipe de footballd’Australie »

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GPar Zit a Odomé Angone

Gabonaise de 28 ans, je vis enEspagne depuis 3 ans où je poursuismes études en philologie espagnole.Il faut dire que mes débuts enEspagne n’ont pas été faciles ; sur-tout sur le plan des formalités admi-nistratives. Je suis venue pour desétudes et venant d’un système fran-cophone, il me fallait faire uneauthentification de mes diplômes parvoie diplomatique de la manière sui-vante : rectorat de l’UniversitéCheikh Anta Diop de Dakar ou j’aifait ma Maîtrise en espagnol,Ministère des Affaires Etrangères duSénégal–Ambassade d’Espagne auSénégal, puis Ministère des AffairesEtrangères d’Espagne. Après cettephase, il me revenait de chercher untraducteur officiel pour que les diplô-mes soient accompagnés d’une tra-duction certifiée pour les amener àmon université : « l’UniversidadComplutense » de Madrid où jedevrais faire mes études. Ce qui, enpeu de mots, est ici expliqué m’a prisun temps que beaucoup de person-nes n’auraient pas pu supporter. J’airéussi à le supporter avec le soutiende mon mari, (un espagnol que j’a-vais croisé à Dakar, lorsque étudian-te en espagnol, je servais de guide àdes touristes espagnols), de safamille et de ses amis. « Que çacoûte cher de vouloir faire des cho-ses dans la légalité ! » me disais–jepar moment.Aujourd’hui tout est rentré dans l’ord-re. Je poursuis normalement mesétudes, et pour arrondir mes fins demois -car je ne veux pas dépendrede mon mari-, je donne des cours defrançais dans de grandes entreprisesainsi qu’à des particuliers, élèves descollèges et lycées. Il y a une erreur àne jamais commettre quand on cher-che du travail en Occident : c’est depenser que l’Africain doit se condi-tionner à chercher le travail dont per-sonne n’en veut. Si l’Africain a lescompétences pour travailler dans

une société donnée pour occuper unposte « décent », il doit oser. C’estce que j’ai fait en postulant dans lesentreprises dans lesquelles je mesuis proposée de donner des coursde français. Croire, et pire, accepterqu’on ne pourra jamais travaillerdans telle ou telle entreprise pourdes raisons de racisme et autre motifrétrograde, c’est donner raison auxracistes et aux ignorants qui pensentque l’Africain doit être conditionnéaux travaux où seule la force phy-sique a droit de citer.Je pense que nous avons la possibi-lité de dire, de démontrer, et chaquejour que l’on peut, que nous avonsles mêmes compétences que lesautres et que nous contribuons aussibien qu’eux, à leur développementet au rayonnement de leur pays.Leurs économies fleurissent au prixde nos richesses, leurs laboratoiresfont des découvertes supra séculai-res grâce à la fuite de nos cerveaux,leurs universités se dynamisent parle flux du multiculturalisme des étu-diants qui y étudient, etc. La plus grande déception pour moiest de voir des africains titulaires dediplômes de toutes sortes mendierdans les rues de Madrid ou faire untravail largement en dessous deleurs compétences. Je ne com-prends pas comment on peut êtrepar exemple infirmier ou instituteuren Afrique et venir être balayeur ouéboueur en Europe. On devrait ten-dre à monter et non à reculer. C’està ce prix-là qu’on donnera une autreimage à notre continent. Il faudraitque chacun fasse le choix d’êtreintégré à sa juste valeur. Cela peutsembler un discours difficile maisnous devons, chaque fois que nousle pouvons, démontrer que ces paysdoivent compter sur nous, noncomme des personnes entièrementà part, mais plutôt comme des per-sonnes à part entière, non commedes cas sociaux, mais comme n’im-

porte quel citoyen. Nous devons revi-siter ce discours « de la victime », de« l’éternel assisté », du « hors-la-loi», « du conflictuel ». Nous devonsêtre nous, citoyens du Monde, sansplus. De la même façon nous crionsà la non-discrimination, nous devonsaussi faire l’effort de nous intégrerdans une société multiculturelle où ilne s’agit pas seulement de recevoir,mais aussi et surtout de savoirdémontrer qu’on peut et qu’on saitaussi apporter. Tous les jours, ici, àMadrid, je m’y atèle.

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« Le Prince Felipe visit ant l’uni -versité Complutense, l’une desplus grandes d’Esp agne.»

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66 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

A

Emploi et Carrière

Par Patrice Kamga

• A combien évaluez-vous le poten-

tiel d’Africains basés en France en

attente d’un recrutement pour aller

travailler en Afrique ?Ce potentiel est très difficile à éva-luer. Nous ne réfléchissons pas enfonction du potentiel des cadres àrecruter, mais en termes de besoindu marché de l’emploi en Afrique.Même si ce marché reste peu struc-turé, nous supposons que chaque

marché national peut être rapportéà un département français qui dispo-se d’un niveau appréciable d’activi-tés industrielles et d’activités de servi-ces. Un département français, c’estdans le meilleur des cas sept à huitmille recrutements de cadres par an,y compris les jeunes diplômés. Celuid’un pays africain est au mieux decette taille-là, à l’exception bien sûrde l’Afrique du Sud et du Nigeria quisont plus importants.

• Et ce marché absorbe-t-il une

bonne partie de la diaspora ?

Non, il absorbe d’abord une bonnepartie des cadres formés sur place.Pour ce qui concerne la diaspora, onobserve qu’un nombre croissantd’entreprises en Afrique mettent enplace des politiques pour attirer lescadres formés à l’étranger

Paul Mercier dirige depuis sa création en 2005, Michael Page Africa,l’entité de Michael Page international spécialisée dans le recrutement de cadreset de dirigeants sur l’Afrique, exceptée l’Afrique du Sud. Profils et diplômes recherchés,secteurs et pays demandeurs, Paul Mercier présente dans cette interview,un tableau du marché du recrutement en Afrique.

« Le Ghanaest le premier demandeur decadres à haut potentiel »

Paul Mercier,Directeur exécutif deMichael Page Africa

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vers leurs régions d’origine. Mais jedois souligner qu’il y a beaucoup plusde velléités que de réalisationsconcrètes, les entreprises privilégientles compétences confirmées, mais nese donnent pas toujours les moyensde valoriser celles-ci comme ilconviendrait. Conséquence : quandces compétences confirmées exis-tent, elles n’éprouvent pas forcémentle besoin de rentrer en Afrique.

• Mais vous à Michael Page, avec

quels types de profils travaillez-vous

sur l’Afrique? La diaspora ou les cad-

res formés sur place, en Afrique ?

Nous ne faisons pas cette distinction.Nous travaillons avec des cadres for-més dans tous les pays du monde quiveulent travailler en Afrique. Il va desoi que les Africains, où qu’ils aient étéformés, seront toujours plus nombreuxà vouloir travailler en Afrique que desnon africains. De même, les gouver-nements exigent de plus en plus desentreprises, le recrutement des cadresnationaux. Mais s’il y a cette volontéde part et d’autre de recruter descadres africains, force est de recon-naître qu’il reste des pans entiers demétiers où les cadres africains restentrares à niveau de compétences éle-vées, à l’exemple de certains métierstrès complexes du secteur des hydro-carbures.

• Quels sont les diplômes les plus

demandés ?

Chacun voit au travers de l’activité quiest la sienne. Si je suis dans le secteurpétrolier, je n’ai pas la même visionque celui qui est dans la téléphoniemobile ou autre. Mais de manièregénérale, si on veut parler des forma-tions occidentales, c’est souvent desétudiants d’un très bon niveau qui sontbénéficiaires des bourses d’études quileur permettent d’étudier en Europeou en Amérique du Nord. Il y a parconséquent de la part des entreprisesun réflexe qui est comme partoutailleurs. Ils vous disent : « Si vous pou-vez identifier un Polytechnicien, noussommes preneurs ! » Après, si vous n’i-dentifiez pas de polytechnicien, ilsprendront ceux qui ont fait les écolesou les universités supposées êtreparmi les meilleures. De ce côté-là, iln’y a pas de spécificité africaine,cette tendance étant toutefois plusmarquée en Afrique du Nord qu’en

Afrique subsaharienne. La seule diffé-rence que je peux noter se situe entreles différentes aires linguistiques : chezles anglophones par exemple, unexpert-comptable diplômé a plus dechances de gravir les plus hautesmarches de l’entreprise, contraire-ment à ce qui se passe chez les fran-cophones où il faut plutôt avoir faitune grande école d’ingénieurs ou demanagement pour gravir ces mar-ches. C’est exactement comme enEurope où, en Grande Bretagne parexemple, une part très importante desgrandes entreprises est dirigée pardes experts-comptables, ce qui estaujourd’hui quasiment impensable enFrance.

• Et quels sont les secteurs qui recou-

rent le plus à vos services pour recru-

ter ?

Sur l’Afrique subsaharienne, je citeraid’abord le secteur de la consomma-tion. Il va des brasseries aux télécom-munications en passant par l’agroali-mentaire de marque ou les nouvellestechnologies. Ces secteurs sont le plussouvent assez neufs, comme les télé-communications qui ont fait un boomces douze dernières années.Je citerai ensuite le secteur bancaire,qui a connu un fort développement etune grande concentration ces der-nières années, sous l’impulsion de laBanque Mondiale. Des fonctionscomme celles de « risk manager », oude « compliance manager » connais-sent par voie de conséquence undéveloppement, elles demandentdes compétences nouvelles. Demême, le développement de fondsd’investissement panafricain et lastructuration du financement du sec-teur privé dans de nombreux pays ontaccru le recrutement de cadres bienformés dans ce secteur. Le dévelop-

pement des produits de banque isla-mique fait aussi appel à de nouvellescompétences.Je dois aussi citer le secteur minier, quibénéficie de nouveaux investisse-ments soutenus par le prix élevé desmatières premières. Tous les grandsprojets miniers entraînent d’importantsefforts dans le secteur des infrastructu-res routières, portuaires voire ferroviai-res... les compétences dans tous cessecteurs sont recherchées.Je n’oublie pas, pour terminer, l’agro-industrie traditionnelle, qui voit émer-ger de nouveaux métiers, comme lagestion environnementale et le déve-loppement durable. Les états africainsexigent aussi que les matières premiè-res et les produits agricoles soienttransformés sur place avant d’êtreexportés, ce qui oblige les entreprisesà développer des usines et lescontraint à recruter des ingénieurs.

• Quels sont les pays les plus deman-

deurs aujourd’hui de ces cadres à

haut potentiel ?

En Afrique subsaharienne, je parleraien premier du Ghana, qui est le prin-cipal bénéficiaire de la crise ivoirien-ne. Le gouvernement a égalementmené les réformes structurelles quis’imposaient pour permettre la relan-ce de la machine économique. LeSénégal, avec les grands travaux deces dernières années a égalementbeaucoup recruté dans l’immobilieret le génie civil. Le Nigeria reste unpays incontournable, pour la taille deson marché, de ses banques et deses entreprises, et ses importantes res-sources pétrolières. Le Gabon offrestabilité et sécurité. On note égale-ment de très bons signes de la Côted’Ivoire, avec l’amorce du retour à lapaix. Le Cameroun est un pays à fortpotentiel, avec une diaspora trèsimportante et l’un des meilleurs systè-mes de formation. L’Angola a amorcéune politique d’ angolisation descadres, qui profite aux diasporas luso-phones, mais crée une véritable ten-sion sur le marché des compétences.Un pays qui crée la surprise : Djibouti,tout petit, mais qui devient progressi-vement une plate-forme arrière desEmirats Arabes Unis. A l’échelle dupays, cela représente un nombreimportant d’emplois qualifiés.

Michael Pageen bref

Michael Page International estun cabinet de recrutementcréé en 1976 en Angleterre etreconnu comme le leader duconseil en recrutement spécia-lisé. Il compte 149 bureauxdans 25 pays repartis surl’Europe continentale, l’Asie-Pacifique, l’Amérique du Nordet du Sud, l’Australie, le Moyen-Orient.

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68 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

Profil

Président Directeur Général de Canal + Horizons Côte d’Ivoire, Françoise LeGuennou-Remarck apporte à cette filiale de Canal Overseas Africa toutl’éclat de son savoir-faire. Ce n’est pas un hasard puisque sa carriè-re professionnelle commence, après son bac D et son diplôme del’Ecole supérieure de commerce, chez Ernst& Young, en quali-té de Directeur de mission. En 1992, elle choisit de retournerdans son pays, la Côte d’Ivoire. Retour payant, en effet,qui coïncide avec une belle opportunité : CanalHorizons. Une aventure commence, inscrite sous lesceau de la performance et de l’efficacité. De 1992à 1994, cette femme va gravir tous les échelons ausein de cette société créée. D’abord membre del’équipe projet qui négocie le contrat de conces-sion société avec l’Etat ivoirien, la société d’étu-de et de développement de l’audiovisuel enCôte d’Ivoire (SEDACI) Elle sera de 1994 à 1996 Directeur financier,puis Directeur général adjoint de 1996 à juin1999, ensuite Directeur général de juin 1999 àfévrier 2003. Depuis février 2003 Président direc-teur général. Malgré ses différentes occupations FrançoiseLe Guennou-Remarck, a pu trouver le tempsde parachever sa formation en 2004 en obte-nant l’Exécutive MBA de la prestigieuse écoleHEC Paris. Femme de son temps, seule femme ivoirienneà prendre part au Forum des femmes leadersau niveau mondial, Chevalier de l’ordre natio-nal de Côte d’Ivoire, vice-présidente de laConfédération générale des entreprises deCôte d’Ivoire, membre de l’Association desopérateurs privés de télévision d’Afrique,membre de HEC Executive club de Côted’Ivoire, Prix d’excellence de l’édition 2007des « Bâtisseurs de l’économie ivoirienne » cettepassionnée d’art africain est fière de sa réussi-te et n’en oublie pas moins les autres.Humaniste, engagée elle prend une partactive à l’accompagnement de différen-tes projets tournés vers la jeunesse, lesocial, l’insertion de jeunes filles désco-larisées, la promotion d’actions d’entre-prenariat, culturelles et sportives, toutestournées vers l’excellence. Epouse com-blée et mère de 3 enfants, elle sait meu-bler son emploi du temps, en n’oubliantpas cette certitude qui l'habite et la suitun peu comme son double: les femmesont leur mot à dire dans la société actuel-le. Elle en est le symbole achevé.

FrançoiseRemarck-Le Guennou

Par Cheick Denise

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A 22 ans, sortie major de promotion de l’Ecole Supérieure de Commerce d’Abidjan (ESCA), Rose Banchi Don-Mello, entame sa carrière professionnelle au Cabinet ECR, correspondant de PEAT MARWICK comme assistan-te Audit. Le temps de connaître les rudiments de la vie active. Moins de 2 ans plus tard, elle se retrouve dansla communication en tant que chef de publicité à Lintas, première agence de publicité d’Abidjan. Quatre ansaprès, elle quitte le milieu de la pub pour celui des assurances : elle est cadre technico-commerciale à laSIDAM. Elle y passera plus de 2 ans avant de partir monnayer son talent à la Direction Marketing Régionale de

The Coca-Cola Company où elle occupera pendant plus de 3 ans le poste deMarketing Manager pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre. Cap ensuite

sur une autre multinationale, Nestlé où elle exercera toujours dansle Marketing comme Chef de Groupe Boissons et

Confiserie pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre ;pendant 4 ans.Mais, comme toujours, il lui faut des terrains

neufs, pour tester ses capacités, ses atouts.Voir ailleurs…Comme si chaque fonctionétait un tremplin. En 2000, elle rejoint la StandardChartered Bank qui n’est encore qu’à l’é-

tape embryonnaire. Rose Banchi Don-Mello y est recrutée en tant que Directricedu Marketing. Puis, elle est rapidement pro-

mue au poste de Directrice de laClientèle Privée grâce à ses performan-ces et à sa rigueur. Pendant 4 années, elle

dirige le réseau d’agences et le porte-feuille de la clientèle des particuliers etdes PME. Puis, soucieuse de se doter decompétences nouvelles, elle choisitd’occuper le poste de Directrice des

Ressources Humaines. Au bout de 20 ans d’un parcours profession-

nel sans faute, à brandir comme un modèle à imi-ter, parce que jonché de lauriers honnêtement gla-

nés, de titres justes obtenus, sans passe-droit, elledécide de prendre une année sabbatique. Mais très

vite gagnée par le virus des nouveaux challenges, ellereprend une activité professionnelle et se reconvertit

dans un tout autre domaine…La pêche. En qualité d’ar-matrice. Un secteur où très peu de femmes exercent. Cooptée par ses pairs,

elle y préside également l’Union des Armateurs à la Pêche Fraîche. L’expérience acquise dans la défense des intérêts d’une corporation la

conduira tout naturellement à accepter, en septembre 2007, le postede Secrétaire Exécutif de l’Union des Grandes Entreprises

Industrielles de Côte d’Ivoire (UGECI). Rose Banchi Don-Mello,tête bien faite et bien pleine, reste une femme admirable

de refus. Refus de la passivité. Discrète mais détermi-née, elle déclare avec malice : « On n’est pas obli-

gé d’être à la tête pour exercer le pouvoir ». A 43 ans, riche de ses quatre maternités, ellese réalise pleinement à l’UGECI. Rose BanchiDon-Mello a toujours travaillé dans l’ombre; Efficacement.Mais, avec toute cette énergie, il ne serapas surprenant de la retrouver, un jour,aux avant-postes.

Rose Banchi-Don MelloPar Cheick Denise

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Page 70: AFRIQUE COMPETENCES N°1

2ème Salon International de FormationProfessionnelle et Universitaire d’Abidjanles 15,16 et 17 mai 2008 à l’Hotel Ivoire.

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Page 71: AFRIQUE COMPETENCES N°1

Management

Marcel Zadi KessyLe secret de

TEMOIGNAGE

Par Par René-François MONCKEH

Ailleurs, en France notamment, on lesappelle les « pantouflards ». Ce sont cesfonctionnaires qui, par la force des cho-ses, se retrouvent dans le secteur para-public ou même purement privé. Encôte d’Ivoire, Marcel Zadi Kessy, à latête de la Société de Distribution d’Eaude Côte d’Ivoire (SODECI) puis de laCompagnie Ivoirienne d’Electricité(CIE), Jean-Baptiste Améthier à laSociété Africaine des Plantationsd’Hévéas (SAPH), René Amichia auxcommandes de la défunte Crédit Côted’Ivoire, Auguste Daubrey à la BIAO etbien d’autres anciens bureaucrates, fontpartie de cette catégorie de hauts fonc-tionnaires convertis aux affaires parl’entremise des sociétés d’Etat crééespar l’Etat pour mener sa mission capita-liste. Le président Marcel Zadi Kessy,lui, se distingue de tous les autres diri-geants de sa génération par sa longévitéau pouvoir due à ses bons résultats etaussi par la qualité de ses relations avecles hauts dignitaires de l’empireBouygues dont il reste le fidèle servi-teur en Afrique. Mais ce qui m’a le plusfrappé, c’est son désir de transmettreaux générations présentes et futures sonexpérience et sa philosophie de mana-gement. Ses trois livres publiés dans unenvironnement ou la tradition orale estomniprésente en est la preuve.

Un serviteur

de l’EtatFondateur de l’Union Africaine desDistributeurs d’eau (UADE) et ancienpatron des patrons ivoiriens au débutdes années 90, il a une grande vision del’entreprise et du développement en

Afrique. Autant il est convaincu de laplace centrale et du rôle primordial dela puissance publique dans les jeunesEtats africains, autant il est persuadé durôle clé des entreprises dans la créationdes richesses et leur redistribution. Jedirais qu’il est au service du capitalis-me international en lui inculquant lesvaleurs africaines de partage et de soli-darité qui lui tiennent beaucoup à c?ur.Marcel Zadi Kessy croit qu’un Etatn’est pas fort par hasard. Comme enOccident depuis toujours et comme enAsie actuellement, l’Etat est fort sim-plement parce que les institutions pro-ductrices de valeurs sont puissantes etbien organisées. Il soutient, à juste titre,que la pauvreté ne se partage pas etqu’il est plus que urgent de créer desrichesses. Et, une fois celles-ci sontcréées, il est impérieux de ne pas lais-ser sur le quai de l’indigence les tra-vailleurs, c'est-à-dire ceux-là mêmesqui ont contribué à créer ces richesses.C’est de là que prend sa source, toute lapolitique sociale qu’il impulse dans sesentreprises et qui font de lui, selon dessources syndicales, « le premier syndi-caliste » des sociétés qu’il dirige. C'est-à-dire celui qui anticipe sur les revendi-cations. A preuve, la Mutuelle d’épar-gne et de crédit des agents des secteursde l’eau et de l’électricité fondée en2006 pour améliorer leurs conditions devie, symbole des avancées sociales ausein du groupe, c’est son initiative.

C’est compte tenu de cette hauteurmanagériale que certains de ses prochescollaborateurs en sont à se demander lesraisons pour lesquelles le président ZadiKessy est resté attaché à la cause d’ungrand groupe international, alors qu’il ales capacités, les hommes et les relationsnécessaires pour bâtir une grande entre-

prise à sa propre mesure. Avec le temps,j’ai compris le motif de son attachementaux secteurs vitaux de l’eau et de l’élec-tricité et au groupe BOUYGUES: lepatron de SODECI-CIE est, après tout,un serviteur de l’Etat et donc foncière-ment attaché au service public. Je penseque ce sont les dysfonctionnements denos institutions étatiques et ses exigen-ces de rigueur et de professionnalismequi l’ont amené à faire le choix du privé.D’ailleurs, face aux préjugés et autresjugements subjectifs de certains compa-triotes de l’administration publique, il atoujours répondu avec un certain agace-ment qui témoigne que son c?ur bat pourl’Etat : « parce qu’ils sont dans l’admi-nistration, ils se croient plus nationalis-tes que les autres. Ce n’est pas parcequ’on est fonctionnaire qu’on est pluspatriote et qu’on a le monopole de l’a-mour pour son pays ».

Militant et dirigeant en vue de l’ancienparti unique mais très discret, il a plus leprofil d’un technocrate que celui d’unleader politique. Dans sa région natalede Soubré et même au plan national, desoffres de promotion politique ne lui ontpas manqué depuis le long règne du pré-sident Houphouët. Chaque fois, il les adéclinées pour continuer à se consacrerentièrement à la gestion des servicespublics d’eau et de l’électricité qu’ilconsidère comme une mission d’intérêtpublic autant vital que la santé ou l’édu-cation. Si ces dernières années, il s’estlancé dans la lutte contre la pauvreté ensensibilisant ses compatriotes avec lesoutien de l’Association OUYINE(entraide-solidarité) qu’il a créée, c’estbien parce que sa vocation est plusorientée vers les ?uvres d’intérêt plusgénéral que vers les seuls intérêts privésréputés égoïstes.

Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008 71

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72 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

Passeport pourun quatrième

cyclej’ai rencontré le président Marcel ZadiKessy au début des années 90 à l’occa-sion des recherches que j’ai effectuéessur la privatisation en Côte d’Ivoire,dans le cadre de mes travaux de recher-che pour le doctorat de 3è cycle en éco-nomie, sous la direction du professeurMamadou Koulibaly. La CompagnieIvoirienne d’Electricité (CIE) fraiche-ment créée par BOUYGUES après l’o-pération tumultueuse de privatisationdans le secteur électrique ivoirien faisaitpartie des 15 entreprises privatisées ouen train de l’être sur lesquelles j’ai déci-dé d’enquêter. J’ai donc échangé avecson patron qui est aussi celui de la

Société de Distribution d’Eau de Côted’Ivoire où il a capitalisé une riche expé-rience de gestion et de management fon-dée sur la prise en compte de la cultureafricaine. Les bons résultats qu’il a obte-nus dans ses entreprises, sa vision del’entreprise et du développement engénéral, la place capitale qu’il accorde àla culture africaine dans le management,sont autant de raisons qui m’ont amenéà l’intégrer à mon jury de soutenance àlaquelle il n’a pu prendre part, malheu-reusement, pour des contraintes d’agen-da. Mon recrutement à la CIE, plus tard,a été la rencontre avec un maître, d’unjeune cadre parti à l’école du savoir. A

vrai dire, je suis parti d’une entreprisepara publique (la Caisse Autonomed’Amortissement) où les règles debonne gouvernance n’étaient pas unepréoccupation, pour le privé, dans le butde me former davantage.Aujourd’hui, après douze ans de colla-boration aux côtés du président Zadi,j’ai demandé à partir pour me mettre àmon propre compte. Je suis parti dans lecadre négocié pour mettre à profit ce quej’ai appris et pour ne pas aller à la retrai-te à 55 ans ! En quittant la CompagnieIvoirienne d’Electricité et son président,j’ai le sentiment d’avoir effectué un 4ècycle. Celui-là m’a fait atterrir des nua-ges sur lesquels je planais avec mes cer-titudes et mes vérités d’universitaire.

“Laissez vosdiplômes à la

porte “Dans mon ancien univers pro-fessionnel, la formation descollaborateurs était presqueinconnue. En dix ans, j’ai euune seule formation sur lefonctionnement des institu-tions de Bretton woods au seinmême de l’entreprisepublique. Quant aux objectifsà atteindre, je les ignorais. Avrai dire, la société d’Etat nem’a presque rien apporté. Carlà-bas, le Directeur Général etses Directeurs centraux étaientau début et à la fin. Ilssignaient tous les papiers. Onfaisait l’avancement et la pro-motion des gens sans consulterle responsable du personnel.

Un exemple édifiant : alors que j’étais lechef du personnel, donc chargé de La paie, le Directeur administratif etfinancier, une dame, mon supérieur hié-rarchique direct, me convoque un jour àson bureau et me pose une question inat-tendue : « Que faites-vous avec les bul-letins de salaires des collaborateurs ? ».Pour cette patronne de société d’Etatcomme pour bien d’autres dans lesstructures publiques, le chef du person-nel doit être un figurant. Il ne doit riensavoir de la paie des travailleurs. Unpoint, c’est tout ! C’est après un échan-ge qu’elle a fait semblant de comprend-re que cela releve de ma responsabilité.

Avait-elle vraiment compris ? Toutcompte fait, j’ai été choqué et cela a crééen partie les conditions psychologiquesde ma démission, quelques temps après.Les choses y ont-elles changé de nosjours ?

Quand je suis arrivé au cabinet duPrésident ZADI avec mes habits dedemi-fonctionnaire, j’ai été accueilliavec un autre discours et une autreméthode : « En entrant ici, laissez à laporte tous vos diplômes et autres préju-gés. Et prouvez ce que vous savez faire.Apprenez, écoutez et travaillez en équi-pe ». Cette feuille de route que m’a don-née le patron de CIE-SODECI est lamême pour tous les collaborateurs. Lacharte de SODECI et de CIE en est laplus nette illustration. Ignorant tout de saméthode, je m’étais hasardé à ma prisede service à le harceler avec des dossiersde tous ordres, pour lesquels je deman-dais son avis avant de faire quoi que cesoit. Un beau matin, quand il m’a vu àson bureau chargé de parapheurs, il m’astoppé net : « Alors, MonsieurMonckeh, si je dois vous donner pourchaque dossier une décision, pourquoialors je vous ai embauché ? Hein ?Soyez responsable et Apprenez à déci-der ! », m’a conseillé le président. Oui,les mots sont là : responsabilité et déci-sion. Depuis ce « cours magistral » d’unjour où j’ai été cueilli à froid et renvoyéà mes vieilles copies, j’ai assimilé laleçon, comme tout bon élève. A tel pointqu’un jour, j’ai franchi maladroitement,sans faire attention, la ligne rouge.C’était un fait pourtant très banal et sansgrave incidence, mais qui m’a fait com-prendre qu’avoir le pouvoir de décider,c’est « savoir jusqu’où ne pas aller. Lepouvoir, dit monsieur Zadi, est commeun grand couloir où toutes les portess’ouvrent à vous. Il faut avoir l’humilitéde ne pas entrer partout où elles sontouvertes ».

Un grand soucide pérenniserson œuvreComme tout chef à la tête d’une organi-sation ou d’un pays, Marcel Zadi Kessyest préoccupé, au plus haut point, par sasuccession. Si la tradition africaine dans

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René-François Monckeh

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laquelle il se trempe occulte la question,la modernité dans laquelle il baigne etqui l’inspire l’oblige à s’y préparer. Iln’en fait pas un sujet tabou. La questionde succession me tient aussi à cœur bienque je sois désormais loin de lui. Carayant cotoyé le président Zadi et parta-gé les valeurs qu’il défend, je souhaitevivement autant que de nombreux pro-ches voir l’œuvre de construction mana-gériale qu’il a entreprise en trois décen-nies se pérenniser et se développer,grâce à des disciples fidèles et ambi-tieux. Le grand maître n’est-il pas celuiqui est heureux de voir son élève allerau-delà de ses propres limites ? A laCIE, la succession que tout le mondecroyait bien assurée et célébrée avecfaste sur fond de « mythologie », il y aseulement deux ans selmement, sembleêtre remise en cause. Une affaire de tra-hison ! Tribalisme, lutte de clans,

mépris pour les travailleurs et mythe duchef et défiance au sommet de l’entre-prise. Tout est fait pour pourrir le climatsocial et dresser les syndicats.

La vie est faite de paradoxes. L’histoirenous montre aussi que ceux qui ontlongtemps marqué leurs organisationsou leurs peuples par leur génie créateuront rarement les dauphins et les succes-seurs qui leur ressemblent. J’ai appris àconnaître un peu le patron de CIE-SODECI. Il n’a pas le complexemachiavélique du chef orgueilleux pro-mettant le déluge après lui. Pour avoirfait de la formation de ses collabora-teurs et du renforcement des capacitésde ses entreprises un pilier central,Marcel Zadi Kessy a autour de lui unvivier d’hommes et de femmes de qua-lité pour faire l’économie de soucis desuccession qui troublent très souvent le

sommeil de nombreux dirigeants. Lemanagement des entreprises est totale-ment ivoirisé depuis longtemps, aprèsque ceux que le Président Zadi a coutu-me d’appeler «les expatriés» ont contri-bué à former les nationaux. Le reste estune question de choix. En la matière, lepassage de témoin n’est ni un concours,ni un examen ou le primé est forcementle major. Le choix se fonde sur les cri-tères dont le chef seul a le secret. Ce quele peuple de plombiers et d’électriciensattendent à la SODECI et à la CIE, c’estqu’ils se reconnaissent à travers aussibien le choix des hommes appelés à larelève de leur patron charismatique queles valeurs qui ont fait la réputation et leprogrès de leurs entreprises, au-delà desfrontières ivoiriennes, dans toutel’Afrique.

*Ancien Assistant du PrésidentMarcel Zadi Kessy

Directeur-Gérant de SECOM MEDIAS

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Marcel Zadi Kessy, PDG de la

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Plus de 192,5 millionsd’abonnés au cellulaire en 2007

/ Augustin Yao

Nouveau pourvoyeurd’emploi en Côte d’Ivoire

/ Augustin Yao

Accès au Large Bande/ Théodore Kouadio

6 compétences africaines des NTIC/ Jean Philippe Kassi

Quelques profils recherchés/ Théodore Kouadio

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Si le secteur des NTIC en générale connaît une croissance en Afrique,c’est bien grâce à la croissance de la téléphonie mobile qui connaît aujour-

d’hui, la plus grande expansion au monde. Les opérateurs detéléphonie

rivalisent d’ingéniosité pour adapter leurs produits aux besoins et auxmoyens de leurs clients. Courses aux technologies de pointe, recherche

d’un meilleur rapport qualité/prix, recrutement de resources humaines de

qualité, tout contribue à l’expansion de ce secteur.

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Selon l’UIT, le marché africain aconnu au cours des cinq dernièresannées une progression à une vites-se double de celle du marché mon-dial. Cette embellie a permis d’a-méliorer les possibilités d'accès pourla grande majorité de la population. En 2001 par exemple, le nombre detéléphones mobiles était supérieur àcelui des téléphones fixes.Aujourd’hui, le rapport téléphonefixe/téléphone mobile est de 1 pour7. En 2006, on dénombrait 192,5millions d'abonnés au mobile cellu-laire. Ce chiffre a connu une netteprogression en 2007.Ce rapport est encore plus élevé enAfrique subsaharienne, où neuf habi-tants sur dix ayant accès à un télé-phone utilisent le téléphone cellulai-re mobile. Le taux de pénétration dumobile a triplé, passant de 6,3%habitants en 2003 à 21% en 2006.Le moteur de cette croissance phé-noménale est l’ouverture du marchéà la concurrence. Les abonnementsà prépaiement au mobile cellulaireont également joué un rôle détermi-nant dans l'essor du mobile, puisque92% des abonnés africains ont eu

recours à une formule de prépaie-ment en 2005.Les opérateurs africains vont aujour-d'hui de l'avant en déployant destechnologies de nouvelle généra-tion sur le continent, notamment latéléphonie de la troisième généra-tion (systèmes 3G) l'Internet à largebande et le protocole de transmis-sion de la voix par Internet (VoIP).Le portail ghanéen TradeNet est unservice de vente qui est proposé surles téléphones mobiles pour les pro-duits agricoles dans une dizaine depays d'Afrique occidentale. Le por-tail permet à des vendeurs et à desacheteurs d'indiquer ce qu'ils recher-chent en fournissant leurs coordon-nées. Ces informations sontenvoyées par SMS en plusieurs lan-gues à tous les abonnés intéressés.Ceux-ci peuvent alors entrer directe-ment en contact les uns avec lesautres pour passer une transaction. Des projets analogues sont en coursd'exécution, au Burkina Faso, au Maliet au Sénégal, en vue de fournir desinformations quotidiennes sur les prixdes exportations de fruits et légumes.Il est également possible de conce-

voir des services auxiliaires tels que lecommerce électronique, les servicesbancaires, les services financiers etl'accès à l'Internet. En 2007, on dénombrait au total2,68 milliards d'abonnés au télépho-ne mobile cellulaire dans le mondeet ce nombre devrait dépasser les 3milliards cette année, pour atteindre4 milliards en 2010 ; 95% de la nou-velle croissance prévue devraientêtre imputables aux marchés émer-gents à faible revenu. Les dix pre-miers marchés africains représententprès des quatre cinquièmes de l'en-semble des abonnés au téléphonemobile cellulaire sur le continent. Un cinquième de tous les abonnésau mobile cellulaire se trouve enRépublique sud-africaine, tandisque près du sixième se trouve sur levaste marché du Nigeria et que lesquatre pays du Maghreb (Algérie,Egypte, Maroc et Tunisie) représen-tent un tiers de tous les abonnés afri-cains au mobile. Les autres pays afri-cains représentent pour leur part àpeine plus d'un tiers de tous lesabonnés au mobile cellulaire.

(Source : UIT)

Par Augustin Yao

Selon «Les Tic en Afrique: obtenir un avantage concurrentiel » un document del’Union internationale des télécommunications (UIT), le marché africain du télé-

phone cellulaire bénéficie aujourd’hui de la plus forte expansion au monde.

Plus de 192,5 millions d’abonnésau cellulaire en 2007

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Le marché africain de la téléphonie bénéficiede la plus forte expansion

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Les principaux opérateurs detéléphonie mobile en chiffr es

MTN45 millions d’abonnés (dont 15 millionsau Nigéria)

FRANCE TÉLÉCOM/ORANGE22,5 millions d’abonnés (dont 9,8millions en Egypte)

VODAFONE/VODACOM20,8 millions d’abonnés (dont 13,8millions en Afrique du Sud)

ZAIN/CEL TEL16,9 millions d’abonnés (dont 8 millionsau Nigeria)

Sources : Construire l’Afrique n°203et Informa Télécoms de Mars 2007

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Les principaux opérateursde téléphonie en AfriqueZAIN / CEL TELBurkina Faso ; Congo Brazzaville ;République dém. Du Congo; Gabon ;Kenya ; Madagascar ; Malawi; Niger;Nigeria ; Ouganda ; Sierra Leone ;Soudan ; Tanzanie ; Tchad ; Zambie

MTNAfrique du Sud ; Bénin ; Botswana ;Cote d’Ivoire ; Nigeria ; Cameroun ;Ghana ; Guinée Bissau ; CongoBrazzaville ; Liberia ; Ouganda ;Rwanda ;Swaziland ; Zambie.

ORANGECote d’Ivoire ; Mali ; Niger ; Sénégal ;Cameroun ; Egypte ; Guinée Equatoriale; Guinée Bissau ; Guinée Conakry ;République centrafricaine ; Kenya ;Botswana ; Madagascar ; Ile Maurice.

VODACOMAfrique du Sud ; RD Congo ; Lesotho ;Mozambique ; Tanzanie.

ATLANTIQUE TELECOM / MOOV -TELECELCote d’Ivoire; Burkina Faso; Gabon;Niger ; Togo; Benin.

MILICOMRDC ; Ghana ; Maurice ; Sierra Leone ;Sénégal ; Tchad ; Tanzanie

ORASCOMAlgérie ; Tunisie ; Egypte.

COMIUMCote d’Ivoire, Liberia, Sierra LeoneMAROC TELECOMBurkina Faso; Gabon; Maroc.

WATANIYA TELECOMAlgérie; Tunisie.

TELECOM EGYPTEgypte

SAFARICOMKenya

SUDANESE TELECOMSoudan

TELKOMAfrique du Sud

Le Caire,capitale des NTIC

en Afrique_ L’Afrique aujourd'hui — où en sommes-nous? _ Le dynamisme de l’Afrique : les moteurs de la demande etl'innovation _ Le dynamisme de l’Afrique : des partenariats pour l'avenir _ L' Afrique à l'avant-garde

Ce sont les thèmes des 4 journées thématiques de l’expositionTELECOM AFRICA 2008. Cette exposition organisé par l’Unioninternationale de télécommunication se tiendra au Caire du 12au 15 mai et présentera les dernières innovations en matièrede TIC, tandis que les participants au Forum de haut niveauexamineront des questions déterminantes pour le développe-ment de l'industrie africaine des télécommunications. ITU TELE-COM AFRICA sera le grand événement du secteur des TIC enAfrique en 2008. La manifestation rassemblera de hauts diri-geants africains ainsi que de hauts responsables des secteurspublic et privé, qui analyseront les possibilités de croissance etd'investissement offertes sur le continent par le secteur des TIC.AFRICA 2008, dont le thème en dit assez long, devrait attirerd'éminents orateurs qui décriront la situation de l’Afrique, sousl'angle régional et mondial, les moteurs de la croissance de sesmarchés et les nombreux facteurs essentiels à la mise en placedurable d'un environnement favorable. Des sessions sontconsacrées à différents thèmes: partenariats public-privé,exemples de réussite d'entrepreneurs, renforcement des capa-cités et cybersécurité.

Source IUT

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France Telecom / Orange est l’un des principauxopérateurs de téléphonie mobile en Afrique

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SSur le marché de l’emploi en Côted’Ivoire, les offres d'emploi réser-vées sont de plus en plus nombreu-ses dans le secteur des NTIC et destélécommunications. MTN (Mobile Téléphone Networks),un des fournisseurs les plus impor-tants dans le domaine des télé-communications en Afrique, comp-te parmi les plus grands pour-voyeurs d’emplois en Côte-d’Ivoire.Présent dans plusieurs pays afri-cains, cet opérateur compte 45millions d'abonnés en Afrique et anaturellement besoin de ressourceshumaines importantes et de qualitépour répondre aux besoins et exi-gence de ces abonnés. « Nousdéveloppons une politique derecrutement ambitieuse soutenuepar d'importants efforts d'améliora-tion de la fiabilité du réseau, maté-rialisée par la dynamisation denotre politique commerciale, mar-keting et de distribution, basée surla satisfaction des besoins de notreclientèle » explique le Chief execu-tive operator de MTN Côte d'Ivoire,Aimable Mpore. Tous les ans, cetteentreprise de télécoms organisedes journées carrières afin derecruter des travailleurs de qualité.Les dernières journées carrière, en2007, ont enregistré 45 000demandes, 5 000 entretiens et 45embauchés. A Moov, une compa-gnie de téléphonie présentedepuis 2006 dans 6 pays d’Afriquede l’ouest, le Directeur général enCote d’Ivoire Ahmed MamadouCissé, sur le plan des offres d’em-ploi, annonce 450 emplois directset 2000 emplois indirects dans lesdeux années à venir, avec ledéploiement du réseau sur l’en-semble du territoire.Du côté de Orange Côte d’Ivoirece sont plus de 700 employésrépartis dans 11 directions, indiquele site web du groupe.La compagnie Comium, dernièrenée des opérateurs de téléphoniecellulaire, elle, a une équipe deplus de 200 personnes.D’autres entreprises telles que Côted'Ivoire Telecom/Aviso, Afnet, Moov,

MTN, Arobase telecom, Cfao tech-nologies qui vendent des accès àInternet etc. offrent également del’emploi à de jeunes diplômés. Et,de l’avis général des intermédiairesde recrutement, la moitié des offresdans ce secteur leur est réservée.

Rémunération

Le salaire dans le secteur des NTICvarie selon que l’on soit expatrié ounational. Les expatriés juniors ontsensiblement le même salaire queleurs collègues de même grade eten fonction en Europe. La différen-ce apparaît au niveau des primesdiverses. Les employés locaux débutants,

ont une rémunération mensuellecomprise entre 250 000 FCFA et500 000 FCFA. Les seniors eux, peu-vent toucher des émolumentsoscillant entre 1 000 000 FCFA et 2

500 000 FCFA.Selon Martin Ehounou, un cadre

d’une compagnie de téléphoniemobile basée au Sénégal, lessalaires sont très souvent fixés enfonction du niveau de vie dans lepays. « Un cadre ivoirien en fonc-tion à Abidjan n’aura pas le mêmesalaire que son collègue en fonc-tion en Guinée » révèle-t-il.

Profil

Il suffit de jeter un coup d’œil sur lessites d’offre d’emplois ou les petitesannonces des différents cabinetsprofessionnels de recrutement pourconstater que les entreprises dusecteur des NTIC recherchent, engénéral, des diplômés des grandesécoles de commerce et de télé-communications. Le CESAG de Dakar au Sénégal,l’INP-HB de Yamoussoukro, l’ESTLoko, le groupe Agitel formation, lescours Pigier à Abidjan etc., ontformé beaucoup de jeunes diplô-més très compétitifs, ayant engénéral un Bac+ 4/5, ingénieurs etDESS de marketing appliqué àInternet. « Pour mieux se vendre il faut maî-triser l’anglais. Cela est un atoutindispensable » révèle MathieuSéry un ingénieur télécoms, qui en

5 années d’expérience est à sa3ème entreprise de téléphoniemobile. C’est que, performant, ilest régulièrement débauché parles nouvelles sociétés de télépho-nie mobile qui s’implantent enCote d’Ivoire.

Nouveau pourvoyeurd’emplois en Côte d’Ivoire

Par Augustin Yao

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Les société de téléphonie mobile emploientde nombreux jeunes

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LAccès au Large Bande

Les réseaux IP constituent le fonde-ment de l'accès à Internet, celui de lanavigation sur le web, ainsi que labase des communications vocales(notamment du trafic téléphoniquemobile grande distance) et des com-munications vidéo. En optant pour lehaut débit ou l'accès au Large bandeparts de marchés et rendre le serviceplus abordable pour les abonnés.Ainsi, Celtel Nigeria a lancé une grilletarifaire innovante appelée Flat UnityTariffs. Cette grille permet de suppri-mer les différences de prix d'unréseau à l'autre en fixant les mêmestarifs sur tous les réseaux du pays,qu'ils soient fixes ou mobiles. En règlegénérale, les utilisateurs ayant de fai-bles revenus ont tendance à préférerla facturation à la minute avec pré-paiement : ils peuvent ainsi mieuxgérer leurs dépenses* et utilisent lesSMS pour dépenser le moins possible.Toutefois, afin d'encourager l'utilisa-

tion de l'Internet, les opérateurs de

pays en développement devront pro-poser des barèmes tarifaires aborda-bles et intéressants, pouvant, parexemple, inclure des services à prixforfaitaires ou des services groupés.Le groupage est considéré par la plu-part des opérateurs historiquescomme inévitable, du fait de la bais-se des recettes de la téléphonievocale et de la forte concurrenceentre opérateurs à intégration verti-cale et nouveaux acteurs sur le mar-ché. En République sud-africaine, lefournisseur de services cellulairesmobiles Nashua Mobile, nouvel arrivésur le marché de l'Internet largebande, a commencé à proposer desoffres groupées de services fixes ethertziens en mars 2007. Cette com-pagnie, ancien prestataire de servi-ces mobiles, est devenue un acteurde premier plan en matière de télé-communications. Pour ce faire, elleutilise une stratégie marketing cibléeafin d'attirer de nouveaux abonnés

grâce à des offres groupées très inté-ressantes.Les marchés des télécommunicationset la nature même de la concurrenceévoluent sous l'influence du progrèstechnologique. Le passage desréseaux à commutation de circuitsaux réseaux utilisant le protocoleInternet (IP) ouvre des débouchés auxnouveaux concurrents, capables,dès lors, d’offrir de nouveaux serviceset de rivaliser avec les opérateurs enplace.L'investissement dans les infrastructu-res TIC en Afrique se situait à hauteurde 8 milliards USD en 2005. Les mar-chés des lignes fixes sur ce continentsont désormais ouverts à la concur-rence, avec un secteur privé, présentdans leur capital, pour près de lamoitié d'entre eux. Vingt cinq opéra-teurs historiques africains ont été, entotalité ou en partie, privatisés.

(Source : UIT)

Par Théodore Kouadio

Le marché de la télécommunication évoluesous l’influence du progrès technologique

Le siège de l’organisation africaine de communication par satellite ( RASCOM)

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compétences

africainesdes NTIC

Cheikh Modibo Diarra, Jacques AkossiAkossi, Jacques Bonjawo, Hamadoun Touré,Gadou Vincent Kragbé et Mo Ibrahimsont quelques compétences sur lesquelles l’Afriquepeut compter en matières de NTIC.

En couverture

Par Jean Philippe Kassi

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L’actuel secrétaire général de l’Union africaine de télé-communications est diplômé de l’Ecole supérieure detélécommunication de Paris. Il commence sa carrière àla Direction des Télécommunications en Côte d’Ivoire sonpays et deviendra par la suite Consultant Senior duBusiness Network avant d’être désigné Directeur Généralde l’Agence de Régulation des Télécommunications. Sonexpérience professionnelle riche de 23 années derecherches et de nombreuses participations à des ren-contres autour des télécommunications et de leur régu-lation font de lui, un des experts africains en législation,management, régulation des technologies de l’informa-tion et de la communication.

Il a dit… « Nous avons de bonnes raisons d’être fiers del’Afrique. Parce que pour une fois dans le concert desnations, notre continent est champion du monde,champion du monde des taux de croissance en matièrede technologie de téléphonie mobile. En ce qui concer-ne la rentabilité des affaires, le secteur des télécommu-nications est actuellement l’un des plus porteurs. » Fraternité Matin du 4 décembre 2007

C’est en 1997 que le nom de Cheikh Modibo Diarra se révè-le au monde. Cette année-là, il est navigateur en chef d’unesonde de la NASA qui a déposé un robot sur la planète Marslors de la mission Mars Pathfinder. La Nasa le charge alors depopulariser le projet auprès des élèves, des enseignants, descontribuables américains et sur Internet. Avant cela, il avaittravaillé sur plusieurs missions de l’agence spatiale américai-ne où il a été recruté en 1988 par le Jet propulsionLaboratory (un laboratoire de la NASA) en tant queNavigateur interplanétaire. Depuis 1999, il consacre de sontemps au développement de l’Afrique à travers un laboratoi-re de recherche sur l’énergie solaire et une fondation,Foundation pathfinder pour l’éducation et le développe-ment qui oeuvre en faveur de la recherche et de l’enseigne-ment scientifique en Afrique subsaharienne. Cette fondationqui a organisé avec l’UNESCO le premier sommet africain dela science et des nouvelles technologies. Cheikh ModiboDiarra est également co-fondateur de l’Université numériquefrancophone qui a comme mission de promouvoir les rela-tions avec les gouvernements et les acteurs clés sur l’ensem-ble du continent en vue de comprendre le potentiel et ledéveloppement des nouvelles technologies de l’informa-tion. Avant l’Université numérique francophone, il a dirigél’Université virtuelle africaine. Depuis 2006, il vit àJohannesburg, en Afrique du Sud où il est Directeur Afriquede Microsoft. Né en 1952, Cheick Modibo Diarra est diplô-mé en mathématiques, physique et mécanique analy-tique de l’Université Pierre et Marie Curie de Paris et en ingé-nierie aérospatiale de l’Howard University (Washington D.C.)Il est l’auteur de Navigateur interplanétaire, Albin Michel,2000

Il a dit « (…) pour faire ces choses difficiles mais pas impossibles, choses qui sont aussi enthousiasmantes, il fautdévelopper des technologies. Et au fur et à mesure que l’onles développe, elles trouvent leur chemin dans la créationde nouvelles entreprises qui vont contribuer à la solution desproblèmes que nous rencontrons, tels que l’autosuffisancealimentaire. Si on avait des satellites aujourd’hui qui pou-vaient prévoir la pluviométrie et prédire les phénomènesnaturels, cela nous permettrait de planifier l’agriculture. Sanscompter les industries. Toutes les technologies (micro-ordina-teurs, téléphonie mobile…) dont nous bénéficions aujourd’-hui, sont nées du programme spatial. » Cameroon Tribune du 3 octobre 2007

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Jacques Akossi Akossi

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Ingénieur en informatique, Jacques Bonjawo commence sa car-rière au Pays-Bas et la continue aux Etats-Unis. Il intègre d’abordPricewaterhouseCoopers puis Microsoft où il sera le premier afri-cain à occuper un poste de Manager. En 2002, Jacques Bonjawoest élu Président du conseil d'administration de l’Université virtuelleafricaine. En 2006, il démissionne de Microsoft tout en restantconsultant sur des projets de Business intelligence puis, prend lesrennes, en qualité de Président directeur général de Genesis FT. Ils’intéresse au développement de l’Afrique et est l’auteur de nom-breuses publications allant dans ce sens : Internet une chancepour l’Afrique (Karthala, 2002), L’Afrique du XXI ème siècle(Karthala, 2005) et Mes années Microsoft et Intellectuels africainsface à la mondialisation (Comos Publishing, 2008) ; et est égale-ment chroniqueur dans plusieurs magazine dont L’essentiel desRelations Internationales. Conférencier sollicité à la fois par desinstitutions comme la Banque mondiale, l’Université de Harvard,nombre d'universités africaines et forums internationaux, il saisi cesopportunités au fil des années pour réaffirmer sa croyance en lacapacité de l’Afrique à se développer grâce à la technologie,comme le fait l’Inde.

Il a dit… « Je ne me suis jamais soucié de mon avenir personnel,je vous le dis tout net. Pour l’heure, je pense que c’est de l’avenirde l’Afrique que nous devons nous préoccuper. Comme vous lesavez, j’ai publié un livre principalement à l’intention des jeunesafricains afin qu’ils considèrent les NTIC et l’Internet comme unechance pour le développement de notre » continent, qu’ils com-prennent que la mondialisation - qui est injuste et inéquitable - estirreversible et qu’il nous appartenait de définir notre place dansce mouvement inéluctable, au lieu de se contenter de s’y oppo-ser. Cela commence par une prise de conscience des enjeux etune bonne éducation »afrik.com, interview avec Falila Gbadamassi

Jacques Bonjawo

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Titulaire d'un doctorat de l'Université d'électronique,de télécommunication et d'informatique de Moscou,Hamadoun Touré a débuté sa carrière à l’Office despostes et télécommunications du Mali avant d’intég-rer des institutions intergouvernementales telles queIntelsat ou des organismes privés comme Ico GlobalCommunications. A ce titre, il a participé très active-ment à l'étude de toutes les questions de politiquegénérale relatives à la mise en oeuvre des GMPCSavec les autorités de réglementation de tous les paysd'Afrique. Il était Directeur du Bureau du développe-ment des télécommunications lorsqu’il a été élu, en2006, à la tête de l’Union internationale de télécom-munication. Il est le premier africain à prendre la têtede cette institution forte de 191 pays.

Il a dit… « Ma mission tourne autour d'un but princi-pal, celle de donner accès aux bénéfices des tech-nologies de la communication et de l'information àtous les habitants de la planète. C'est pourquoi mapremière priorité est de réduire la fracture numé-rique. Cette mission est maintenant associée auxrésultats des deux phases du Sommet mondial sur lasociété de l'information (SMSI), tenues en 2003 et en2005. » Lors d’une rencontre avec l’Union postale universelle,avril 2007

HamadounTouré

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De 1977 à 2001, Gadou Vincent Kragbé a travaillé comme Ingénieur dessystèmes d’information dans plusieurs multinationales (Arthur AndersenConsulting, PriceWaterhouseCoopers, KPMG, Oracle Corporation) Il a pucontribuer ainsi à l’amélioration des performances de plusieurs entreprisesd’Afrique. Depuis 2001, il travaille sur le projet de création d’une ZoneFranche de la Biotechnologie, des Technologies de l'Information et de laCommunication en Côte d'Ivoire. Un projet ambitieux qui vise à faire dela Côte d’Ivoire, à travers sa zone franche, un pole d’excellence, donc deréférence en matière de technologies de l’information et de biotechnolo-gie. Aussi, voyage-t-il à travers le monde pour défendre et vendre son pro-jet afin d’attirer les investissements dans cette zone franche. En juin 2007,le magazine britannique Financial Times lui a décerné le prix FDI PERSO-NALITY OF YEAR for Africa, un prix qui récompense 5 personnalités sur les 5continents qui oeuvrent favoriser les investissements étrangers directsdans leurs pays ; d’où la dénomination du prix : Foreign DirectInvestissement. A 62 ans, le « chef du village » ivoirien des technologiesde l’information et de la biotechnologie (VITIB) reste un passionné de l’in-formatique et est Conseiller spécial du Président de la République char-gé des NTIC.

Il a dit… « Nous avons jugé nécessaire de coupler le développement desNTIC à la Biotechnologie car ce sont deux domaines importants pour lanouvelle économie. Voilà comment cette zone franche est devenue unetechnopole dédiée à la fois à la Biotechnologie et aux Technologies del’Information et de la Communication (ZBTIC). Nous voulons que cette zonesoit perçue comme un véritable Hub africain de la biotechnologie et destechnologies de l’information. »Fraternité Matin du 5 mai 2005

Après sa thèse, en 1974 déjà, sur les communications mobiles il rentre àCelnet, une filiale de British Télécom où il gravit les échelons et en devientle Directeur technique. De ce poste, il a l’occasion et le privilège de mani-puler l’un des premiers appareils téléphoniques mobiles en 1985 et d’êtreau coeur de la création du premier réseau de téléphonie mobile et de lamise en place du GSM. En 1986, il quitte British Télécom et crée Mobile sys-tem international (MSI) une société de conseil en télécommunication. En1998, MSI devient Celtel et se lance sur le marché des opérateurs de télé-phonie mobile en Afrique. Avec une présence dans 16 pays d’Afrique,Celtel s’est imposé comme l’un des principaux opérateurs économiquesdu continent. En 2005 MTC achète 85 % de Celtel pour 3,4 milliards dedollars ; ce qui permet à Mo Ibrahim de lancer sa fondation, FondationMo Ibrahim pour la bonne gouvernance en Afrique ; doté d’un fonds de100 milliards de dollars. La fortune personnelle de ce soudanais né en1946 s’évalue en millions de dollars.

Il a dit… « Celtel, ce n'est pas la réussite d'un homme, mais un succès par-tagé par de nombreuses personnes ou institutions qui, à un moment ou unautre, ont contribué à nous faire avancer. Avec eux, avec les employés,nous avons édifié une véritable entreprise, au sens moderne du terme :une entité qui crée des emplois, verse des impôts et des dividendes, dansla plus grande transparence. C'est un véritable business, comme disent lesAméricains, mais un business qui s'est créé en Afrique subsaharienne, unerégion à laquelle personne ne s'était jamais intéressé. Et si nous n'avionspas réussi, ou si nous avions triché, personne n'investirait plus jamais enAfrique »Jeune Afrique du 29 octobre 2007

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• Quel est le profil de l’ingénieurinformaticien de demain ?

Aujourd’hui les compétences sontorientées vers les métiers liés aumonde de l’Internet. Il faut tout d’a-bord avoir un pré-réquis d’ingénieur.Ensuite il faut ajouter l’applicationWeb. Se tourner vers la sécurisation dumode de paiement sur le Net.Actuellement, avec le développe-ment du commerce électronique, lediplômé qui sort d’une écoled’Ingénieur doit pouvoir mettre enplace une sécurisation optimale despaiements en ligne. En clair, l’ingé-nieur Informaticien doit s’orienter versles télécommunications, ainsi quevers les Nouvelles technologies de l’in-formation et de la communication.

•Comment se fait la formation desIngénieurs du secteur des Ntic enAfrique ?

Il faut dire que nous donnons lesmêmes types de formation d’ingé-nieur en Ntic que dans les universitéset autres grandes écoles occidenta-les. En ce qui concerne notre groupeécole en Côte d’Ivoire, nous allions lescours théoriques aux stages pra-tiques. Nous intégrons aussi dans lecursus des séminaires sur des forma-tions types avec des thèmes précisanimés par des experts en la matière.Il peut s’agir du GSM, du GPRS, de lasécurité sur le Net etc. Ainsi, chaqueannée scolaire nous organisons entre20 et 30 heures de séminaires à l’in-tention des élèves ingénieurs. Pourque ces derniers soient sur le mêmepied que leurs collègues occiden-

taux, nous donnons des connaissan-ces très approfondies en Anglais.Vous savez bien que les meilleursdocuments du monde de l’Internetsont en Anglais.

• Comment les élèves ingénieurssont-ils recrutés dans les écoles de for-mations ?

Généralement il y a trois niveaux derecrutement. Il y a des élèves quiaprès le Bac font deux années declasse préparatoire. Ils suivent par lasuite 3 années d’étude d’ingénieur. Ily a une deuxième option qui concer-ne les étudiants de l’enseignementgénéral, mais ayant ont une ouvertu-re sur les matières scientifiques. Ils pas-sent le test d’entrée et s’inscriventdirectement en 3 ème année. Enfin, ily a les détenteurs du BTS enInformatique et autres matières scien-tifiques. Ils passent le test d’entrée ets’inscrivent eux aussi en 3ème année.

• Pensez vous que les ingénieurs etautres techniciens supérieurs formésdans les grandes écoles africainesarrivent à s’insérer facilement dans lemilieu professionnel ?

Globalement, les ingénieurs formésen Côte d’Ivoire et en Afrique ont lesmêmes compétences théoriques queleurs collègues d’ailleurs. La différen-ce se situe au niveau de la capacitéd’adaptation sur le terrain, l’espritd’ouverture et de critique. Ainsi que lavolonté quasi permanente d’appren-dre et de se remettre à jour. Le mondedes nouvelles technologies est unmonde qui évolue très rapidement.En ce qui concerne la Côte d’Ivoire etmon groupe que je connais particu-lièrement bien, ces trois dernièresannées 75% de nos ingénieurs onttrouvé des emplois de cadre dansplusieurs sociétés de télécommunica-tions et de NTIC en Côte d’Ivoire et àl’étranger.

84 Afrique Compétences / Mai - Juillet 2008

M. Ballo Vamara,

Directeur adjoint de l’Institut supérieur d’informatique et desNtic au groupe Ecole Agitel-Formation.

« 75 % de nos ingénieurs ont trouvé desemplois de cadres dans des sociétés detélécommunications »

Par Augustin Yao

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En seréférant aux critères élaborés par plu-sieurs cabinets spécialisés dans lerecrutement des agents de maîtriseet cadres du secteur des télécom-munications, Mais surtout, tels qu’exi-gés par les entreprises, voici un aper-çu de postes en vue dans le domai-ne des nouvelles technologies de l’in-formation et de la communication.

TÉLÉCOMMUNICATIONS

• Technicien Bss

Qualification :Titulaire d’un Bac +2/3 en Télécomsou équivalent.Dans sa tâche, le technicien doit êtrerigoureux, disponible, méthodiqueavec une réelle capacité d’adapta-tion à l’évolution technologique.Ce métier se pratique en règle géné-rale sous pression. L’age exigé pourl’exercer se situe entre 25 et 30 ans.

• Responsableprojet junior

Qualifications :titulaire d’un Bac +2/3 ou +4 enTélécoms, Electronique ouElectrotechnique. Tâches :Il spécifie, organise le projet de saconception à son lancement, ens’appuyant sur la maîtrise d’?uvre. Ilgère tout le contenu fonctionnel duprojet et dispose d’une réelleconnaissance de la société, exprimeclairement les demandes des utilisa-teurs, pour les traduire ensuite en exi-gences précises et exploitables. Lepostulant doit justifier d’une expérien-ce de 2 à 5 ans à un poste similairedans une entreprise de Télécoms.Des connaissances en anglais pro-fessionnel sont très souvent exigées.Age : 25/35 ans

• Directeur globaltechnologiesservices

Qualifications :Diplôme universitaire ou grandesécoles, Bac + 5 et plus en systèmed’information ou en ingénierie télé-coms. Tâches :Architectures LAN et WAN. Gestiondes infrastructures IT et dans lesconcepts du management de lasécurité (COBIT et ITIL).De bonnes capacités de communi-cation, en anglais et en français sontexigées pour cette fonction. Agecompris entre 35 et 45 ans,

Métiers des NTIC :

quelques profilsrecherchés

AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - JUillet 2008 85

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Par Téodore Kouadio

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86 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

• Ingénieur

Qualifications :Bac+5 Ingénieur Télécoms aumoinsTâches :Il crée, met en application etcoordonne l’ensemble des systè-mes, gère les moyens informa-tiques, assure la surveillance duréseau, identifie et résout les pro-blèmes des utilisateurs. Le poste exige aussi une mobilité,des connaissances en anglais,ainsi qu’un sens de l’organisation,de réaction et de contact.Age moyen : 35 ans.

• Infographiste

Qualifications :Bac + 3 ou Bac + 4 en multimé-dia. L’âge exigé se situe entre 25et 35 ans.Tâches :Il crée des éléments graphiques(Graphisme et Edition). Habille despages Web, met en images lesdécors d’un jeu, met en page desCD-Rom, étudie les conditions defaisabilité d’un projet et proposedes solutions alternatives en casd’impasse technologique.

• Manager qualitéet optimisation

réseau télécoms

Qualifications :Ingénieur Télécoms, avec 7 ansd'expérience en tant que mana-ger de terrain sur des processustechniques. Tâches :le titulaire du poste doit régler lesproblèmes d'optimisation de fré-quences et de qualité de servicedes réseaux GSM, GPRS. Il doitaussi être un manager avisé,organisé et réactif aux besoinsdes clients.

INFORMATIQUE

• Directeurde projet

Qualifications :Bac+4/5 (MBA, gestion, Ingénieurgénéraliste, Informatique) avec 5ans d’expérience minimum dansla gestion des projets. Maîtrise desnotions de comptabilité et d’an-glais. Qualités de rigueur, d’orga-nisation et de communication exi-gées.Tâches :il anime une équipe techniquepluridisciplinaire au quotidien, suitl’avancement, s’assure de la sta-tistique des clients selon les spéci-fications établies par ou pour lemaître d’ouvrage, sur les plans dela qualité, des performances, descoûts et des délais. Il doit être âgéen moyenne de 40 ans,

• Technicienhot lineQualifications :BTS/DUT en Informatique. Age : 25à 30 ans.Tâches :Maintenance informatique. Suiviet la relève des incidents signaléssur le système d'information. Lapratique de l'anglais est un atout.

• Ingénieur sup-port techniqueIN/VASQualifications :Bac +4 ou 5, Ingénieur informati-cien, électronicien ou généraliste. Tâches :Gestion des systèmes complexes,en administration système UNIX,en DB Oracle, SQL Serveur et enRI. Contrôle des technologies VoIPet des plateformes SUN et HP

• Ingénieur networkmanagement

Qualifications :25-30 ans, BAC+5, Ingénieurinformaticien, électronicien ougénéraliste.Taches : Gestion et contrôle desréseaux LAN/WAN, TCP/IP, X25, rou-tage IP, SE Unix/Linux, WindowsNT/2000/XP.

• Ingénieurdéveloppement

Qualifications :30-40 ans, Bac + 4 ou 5,Ingénieur informaticien.Tâches :réaliser des développements,définir l’architecture matérielle etlogicielle. Vous devez être capa-ble de choisir les normes de pro-grammation, d’optimiser les per-formances en termes de qualité,de sécurité de coût, de délais deréalisation, de mettre en œuvre etde maintenir l’application.

• Analysted’exploitation Qualifications :Bac + 4 ou 5. Age moyen : 35ans.Tâches :Il installe et met en production unsystème d’exploitation, optimiseet automatise l’exploitation desapplications nouvelles et partici-pe à la conception et à l’élabora-tion des procédures.

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88 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

Question SANTÉ

Travailleurs, leBurn-outvous guette !Maladie professionnelle répandue enOccident et peu connue en Afrique,Le Burn-out ou La maladie du Burn-out sévit dans tous les milieux profes-

sionnels,guettant beaucoup de travailleurs,

cadres ou simples employés

«B«Burn-out» est un terme anglo-saxon, qui pourrait se traduire enfrançais par «brûlure qui vientde l’extérieur ». Mais, c’est lemot japonais « Karoshi », équi-valent en japonais de ce termequi résumerait mieux cette mal-adie ; Karoshi signifie « mort parle surmenage ».En langage médical propre, onparlerait plutôt « d’épuisementprofessionnel » car le burn-outn’est pas un terme médical offi-ciel ou un diagnostic dans ledomaine de la santé mentalepuisqu’il n’est pas encore recon-nu comme tel. Le terme Burn-out a été inventé pour décrireun état de fatigue ou une inca-pacité à fonctionner normale-ment dans le milieu de travailquand les demandes dépas-sent la capacité d’un individu àles recevoir. Un diagnostiquemédicalement correct identifie-ra « un trouble d’adaptation »,phase ultime et catastrophique

du stress.Pour résumer, le terme Burn-outramène à une incapacité àgérer la pression liée au travail.

Comment enarrive-t-on àl’épuisementprofessionnel ?Le syndrome (ensemble dessignes décrivant une maladie)de l’épuisement professionnels’installe graduellement. Il sedéveloppe en quatre étapesqui sont franchies plus ou moinsrapidement selon la tolérancede la personne au stress.

• La première étape estcelle de l’idéalisme : le tra-vailleur a un très haut niveaud’énergie, il est rempli d’ambi-tion, d’idéaux et d’objectifs très

élevés. Il se consacre entière-ment à l’organisation ou l’entre-prise qui l’emploie. Il y investiratout son temps et toute sonénergie quand bien même sonttravail est extrêmement exi-geant et les conditions pasnécessairement favorables.

• La seconde étape estcelle du plafonnement : c’est lemoment où le travailleur réaliseque malgré ses efforts cons-tants, les résultats atteints nesont pas à la hauteur de sesattentes. L’entreprise exige tou-jours plus de lui ; ses efforts nesont pas reconnus. En réponse àce constat, la personne redou-blera d’ardeur, elle se mettra àtravailler le soir et les fins desemaines pour répondre auxexigences de son travail. Ellerentrera par exemple 2 heuresvoire 3 heures plus tard que

Par Dr Karama Issa

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AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - JUillet 2008 89

d’habitude. Cela n’est pas évidem-ment sans conséquence, mettant enjeu l’équilibre du couple, autre sourcede stress que l’individu devra subir.

• La troisième étape est cellede la désillusion : le travailleur est fati-gué, déçu. Les attentes de l’entrepri-se sont démesurées et la reconnais-sance se fait encore attendre. Alors apparaissent les premiers signesd’un épuisement professionnel immi-nent : impatience, cynisme, irritabilitéet humeur changeante seront inévita-blement les causes de difficulté dansles relations interprofessionnelles et dumanque de communication avec lescoéquipiers et les amis.Les autres symptômes incluent l’évite-ment des activités sociales, l’étatchronique de tension, les problèmesde santé fréquents, l’insomnie et l’é-puisement total. C’est une périodede frustration où certains vont com-mencer à consommer des stimulants

pour fonctionner et des somnifèrespour dormir.

• Dans la quatrième et derniè-re étape survient la démoralisation. «Au bout du rouleau », la personneperd tout intérêt pour son travail etpour son entourage. C’est le senti-ment d’inutilité et de la dévalorisationde soi.Elle ressent un fort sentiment dedécouragement, elle n’est plus capa-ble de travailler ; le travail n’a plus devaleur. C’est le burn-out.Au regard des différentes étapes,combien d’entre nous, n’avons pasfrôlé le Burn-out sans forcément enarriver au stade terminal ? Et combieny sont arrivés, abandonnant leur servi-ce et traités de malade mentaux ?

Eviter le Burn-out C’est savoir reconnaître les signesavant-coureurs, c’est-à-dire les pre-

miers signes révélateurs du stress. Ils secaractérisent par des palpitations,des mains moites, des suées, unedigestion difficile, des troubles dusommeil, une consommation accruede tabac et d’alcool ou encore uneémotivité exacerbée.Dès l’apparition de ces signes, il nefaut pas les mettre sur le compte dela « fatigue généralisée » comme l’onentend d’habitude dire et s’adonnerà la consommation excessive devitamines qualifiées de « remontant ».Il faut directement consulter unmédecin qui sera à même d’établirle diagnostic de Burn-out et prendreles mesures adéquates.

Prévenir leBurn-out, c’est :• Etre vigilant : ne pas attendre l’é-crasement pour en parler• Apprendre à déléguer les problè-mes matériels et filtrer les réponsestéléphoniques• Savoir s’évader et élargir ses cent-res d’intérêts• Rompre l’isolement : rencontreconviviale entre confrère

Qui peut êtretouché parle Burn-out ?Tout personnel du monde du travailest susceptible de faire la maladie.Mais il faut savoir que l’épuisementprofessionnel va particulièrementaffecter les gens qui sont perfection-nistes, consciencieux, qui ne saventpas déléguer ou qui ont placé detrop fortes attentes dans leur travail.Certaines professions sont à hautrisque, comme par exemple le per-sonnel soignant, les enseignants, lespoliciers et surtout le corps des chefsd’entreprise.A l’analyse, l’on se rend compte quele Burn-out sévit en silence dans lemilieu professionnel africain. Il faut enprendre conscience et orienter le tra-vailleur dès les premiers signes d’aler-te vers une structure spécialisée pourune prise en charge adéquate.

Dès l’apparution des premiers signes, évitez la consomation excessive de vitamines

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90 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

Etape 1 :Personnifiezvotre projet

La première chose à faire c’est debien mûrir votre projet dans sa phasepréparatoire, voire, pré-prépararoire :il s’agit en réalité de laisser se déve-lopper en vous une idée, celle quivous tient à c?ur, pour y avoir déjàpensé à plusieurs reprises… Faites devotre idée une pensée constante,pas une obsession maispresque…Vous y pensez simplementtout le temps et en particulier pen-dant des temps bien précis selonvotre emploi du temps. Vous choisis-sez un lieu calme chez vous ouailleurs où vous êtes sûr(e) de ne pasêtre dérangé(e). Choisissez un tempsque vous réservez spécialement àl’exercice en question, deux ou troisfois par jour de préférence

Il s’agit d’un rêve éveillé : c'est-à-direun rêve que vous vous fabriquezvous-même, dont vous dessinez lescontours et que vous vous racontezcomme une histoire. C’est l’histoire

de votre projet ! Vous imaginez leprojet déjà réalisé, vous en exploreztous les coins et recoins en le rendantle plus vivant possible, en utilisant voscinq (5) sens pour le rendre très réel,très présent. Par exemple, vous «voyez » votre projet, vous l’ « enten-dez », vous le « touchez », vous le «sentez »en terme d’odorat, vous le «goûtez ».En fait, vous faites ce queles psychanalystes appellent «Association libre », c'est-à-dire quevous vous relaxez et laisser venir vosidées sans les trier et sans en sélec-tionner. Et vous faites également ceque les créatifs de toute agence depublicité savent faire : rêvasser et lais-ser des images et des idées défilerdans votre tête, des sensations vousenvahir, des saveurs, des sons agréa-bles et des parfums suaves vousimprégner; tous ces sons, parfums,saveurs et sensations étant en rap-port direct ou indirect avec votre pro-jet ; en somme, plongez-vous dansvotre projet plusieurs fois par jourdans un lieu calme et protégé dubruit et de tout autre dérangement.Le brain mapping, où vous dessinezvos idées afin d’utiliser votre senscœnesthésique (les sensations cor-

porelles en mouvement) ; et qui estun équivalent écrit et solitaire dubrainstorming, vous préparera pourcette phase initiale de gestation etde maturation de vos idées.

Selon le genre de projet, vous pou-vez aussi « vous promener » dans lesdifférentes pièces ou alors sentir lesable sous vos pieds à la plage, s’ils’agit par exemple d’un projet com-portant des installations en bord demer…Ceci est également l’utilisationdu « Sens cenesthésique », le grandoublié de nos habitudes.

Une fois que vous vous êtes bienimprégné de votre projet, vous vousrendrez compte qu’à tout momentce rêve se représentera spontané-ment à vous et que de plus il peutdevenir aussi un rêve tout court ;c'est-à-dire un rêve qui a lieu la nuit,spontanément, sans que vous ne leprovoquiez !

Etape 2 :la mobilisationd’une équipe

autour de votreprojet

Plus celui-ci vous tiendra à c?ur etplus vous vous en serez imprégnécomplètement, plus vous serezcapable d’entraîner votre entourage,de le mobiliser autour de votre projet.Il ne s’agit pas de manipulation pouramener les gens à faire ce que vousvoulez. Il ne s’agit pas d’utiliser destechniques de persuasion afin deconvaincre des gens de vous aider àfaire votre projet. à suivre

Développement personnel

Vous avez un projet. Vous savez que vous ne pouvez pasle réaliser tout(e) seul(e). Que faire pour vous adjoindre

une équipe mobilisée autour de votre projet ?

Teamwork : comment

mobiliser une équipeautour d’un projet ?

Par Dr Marie Thérèse Trazo

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AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - JUillet 2008 91

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92 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

LES DIPLÔMES

Les deux diplômes de 2 ème et de 3 ème cycles proposésaux Etats-Unis sont la maîtrise et le doctorat : tous deuximpliquent un mélange de recherche et de cours.Les conditions d’obtention d’un diplôme s’expriment enunités de valeurs (credits), aussi parfois appelées units ouhours ;chaque cours équivaut généralement à trois ou qua-tre unités de valeur, ce qui correspond au nombre d’heu-res de cours et au volume des autres travaux effectués.Unétudiant accumule normalement 24 unités de valeur parannée universitaire si l’établissement opère sur la base dusystème traditionnel de deux semestres.

La Maîtrise (Master’s degree)Il existe deux principaux types de cursus : universitaires etprofessionnels.

La Maîtrise universitaire : La Maîtrise de lett-res et de sciences humaines (Master of arts, MA) et laMaîtrise de sciences (Master of science,MS) sont générale-ment décernées dans les disciplines des lettres, des scien-ces humaines et des sciences. La MS est égalementoctroyée dans certains domaines techniques, comme l’in-génierie et l’agronomie. La recherche personnelle, laméthodologie et l’étude de terrain tiennent une place par-ticulièrement importante. Ces cursus exigent normale-ment l’acquisition de 30 à 60 unités de valeur, soit raison-nablement une ou deux années d’études à plein temps. Ilspeuvent conduire directement au Doctorat.

La Maîtrise professionnelle : ces cursusvisent à mener l’étudiant titulaire d’un premier diplôme àl’exercice d’une profession. Les maîtrises professionnellessont le plus souvent des programmes de fin d’études(Terminal master’s programs), ce qui signifie que ces diplô-mes ne conduisent pas à des études de doctorat.Elles sontsouvent désignées par des titres précis, tels que Master ofbusiness administration (MBA), Maîtrise de travail social(Master of social work – MSW), Maîtrise de pédagogie(Master of education – M Ed) ou Maîtrise en Beaux arts(Master of fine arts – MFA).Les autres disciplines comptentle journalisme, les relations internationales, l’architecture etl’urbanisme. Ces diplômes sont plus axés sur les connais-sances appliquées que sur la recherche originale. Les cur-sus professionnels exigent en général l’obtention de 36 à48 unités de valeur (une ou deux années d’études à pleintemps) et ne comportent pas d’ordinaire,en option, la pré-sentation d’un mémoire. Il n’est pas toujours indispensableque l’étudiant ait obtenu un Bachelor’s degree dans unematière précise, mais il lui faudra peut-être justifier d’uncertain niveau d’études ou de travaux personnels dans ladiscipline choisie.

LE CALENDRIERUNIVERSITAIREL’année universitaire aux Etats-Unis dure en général neufmois, de fin août ou début septembre à mi-mai ou fin mai,et elle peut être divisée en deux, trois ou quatre périodesselon l’établissement. Si l’année est divisée en deux pério-des, celles-ci sont appelées « semesters » d’automne et de

Le GUIDE pour

Les études de 2 èmeet de 3 ème cycles (Graduate)

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Par Bruno Koffi

La qualité : Les Universités américaines sont répu-tées dans le monde entier pour la qualité de leurs pro-grammes, de leurs enseignants, de leurs équipementset de leurs ressources.Le choix : Le système d’enseignement américain offreun choix unique au monde, qu’il s’agisse des établisse-ments, de l’environnement intellectuel et social, desconditions d’admission,des cursus universitaires et despossibilités de spécialisation.

La valeur : Un diplôme américain constitue un excel-lent investissement et est reconnu dans plusieurs paysLa grande diversité : Il y a des centaines d’établisse-ments supérieurs.

Sites Internet utileshttp://educationusa.state.gov/http://www.opendoorsweb.org

Faire des étudesaux Etats-Unis

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AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - JUillet 2008 93

printemps. De courts congés ont lieu pendant les semest-res d’automne et de printemps, entre les semestres, et aumoment des fêtes légales. Un trimestre d’été facultatif estsouvent proposé pour permettre aux étudiants qui souhai-tent accélérer leurs études de poursuivre leurs cours. Il estpréférable de démarrer un cursus à la rentrée d’automne(qui débute en août/septembre). Beaucoup de cours doi-vent être suivis dans un certain ordre, et vous risquez deralentir vos études de 2e cycle si vous commencez au débutd’une autre période. En outre, il vous sera plus facile endébut d’année universitaire de vous acclimater et de faire laconnaissance des autres étudiants. Enfin, vous aurez sansdoute plus de chances d’obtenir une bourse en commen-çant à l’automne plutôt qu’en cours d’année.

CHARGE DE COURS ETSYSTÈMES DE NOTATIONL’expression « charge de cours » (course load) désigne lenombre de cours suivis pendant chaque période. La chargenormale de cours pour un étudiant de 2 ème ou de 3 èmecycle est de trois ou quatre cours, soit un total de 9 à 12unités de valeurs

Sites Internet utilesPanoramas du système d’enseignement aux Etats-Unishttp://www.ed.gov/NLE/USNEI/http://www.edupass.org

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Harvard est la plus anciennes des universités américaines

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Le GUIDE pourFa

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94 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

Il est délicat de choisir une Université quand on se trou-ve à plusieurs milliers de kilomètres. Mais si vous vousorganisez à l’avance et effectuez vos recherches avecsoin, vous pourrez sélectionner un nombre raisonnabled’établissements correspondant à vos besoins. Trouverce qui vous convient le mieux d’un point de vue univer-sitaire et sur le plan personnel nécessite de votre partbeaucoup d’organisation, d’enquêtes et de travail surl’Internet. Il n’existe aucune formule spéciale ou réponseuniverselle. Il est souhaitable de commencer ce travail deréflexion et de recherche 12 à 18 mois avant la date àlaquelle vous souhaitez entamer vos études aux Etats-Unis.

Définissez vos objectifspédagogiques et professionnels

Définir les buts pédagogiques et professionnels de vosétudes vous aidera à sélectionner les programmes gra-duate les plus appropriés et contribuera à vous motiverpendant le processus de candidature.Quelle carrière ai-je l’intention de faire ? Ce secteurd’activité offre-t-il des emplois dans mon pays ? Queldiplôme d’études avancées est nécessaire pour exer-cer cette profession ?

Parlez-en à des personnes qui travaillent déjà danscette branche et à des représentants des associationsprofessionnelles. Les conseillers pédagogiques ou lesconseillers d’orientation de votre pays peuvent égale-ment vous informer sur les aptitudes et diplômes exi-gés par diverses professions, ainsi que sur les débou-chés dans différents secteurs de votre pays._ Comment des études effectuées aux Etats-Unis amé-lioreront- elles mes perspectives de carrière ? Un diplô-me de 2e ou 3e cycle me permettra-t-il d’obtenir unerémunération supérieure ? Consultez des éducateurs,des fonctionnaires et des professionnels de votre payssur les possibilités d’obtenir ainsi une meilleure rému-nération. Dans votre projet, tenez compte des condi-tions de validation ou de certification de vos diplômesaméricains pour trouver un emploi dans votre secteurd’activité à votre retour chez vous.

Quel est le système de validation en vigueur dans monpays en ce qui concerne les diplômes obtenus auxEtats-Unis ? Dans beaucoup de pays, un diplôme améri-cain est très apprécié et la validation des certificats estautomatique.Néanmoins, dans certains pays, les diplômes de 2 èmeet de 3 ème cycles délivrés aux Etats-Unis peuvent nepas être officiellement reconnus ou le sont à un niveaudifférent. Si tel est le cas, vous pouvez,malgré tout, envi-sager de faire des études aux Etats- Unis pour y acqué-

rir savoir et expérience.Vérifiez la situation dans votrepays auprès du centre culturel américain sur :_ Les conditions exigées pour étudier dans votre sec-teur d’activité._ La documentation à utiliser pour trouver les établis-sements qui vous conviennent._ Les sources d’aide financière disponibles dans votrepays et aux Etats-Unis._ Les tests et autres conditions exigées pour unedemande d’admission._ La préparation du dossier de candidature._ La planification de vos études._ L’adaptation à la vie universitaire et culturelle auxEtats-Unis._ L’utilité de vos études après votre retour dans votrepays d’origine.

http://educationusa.state.gov/

Lorsque vous contacterez le centre, il vous faudra êtreen mesure de lui fournir les renseignements suivants :_ Le ou les diplômes dont vous êtes déjà titulaire ;_ La discipline choisie ;_ La date à laquelle vous souhaitez entamer vos étudesaux Etats-Unis ;_ Votre niveau de connaissance de la langue anglaise ;_ Vos besoins éventuels d’une aide financière.

Le classement :Il n’existe pas de classement officiel des 10, 20, 50 oumême 100 meilleures universités américaines. Le gou-vernement des Etats-Unis n’établit pas de hiérarchieentre les établissements. Les classements que voustrouverez seront généralement l’œuvre des journalis-tes et peuvent être subjectifs

Sites Internet utilesAnnuaire des centres américains d’information et deconseil pédagogiquehttp://educationusa.state.gov/

Liens avec les pages d’accueildes universités

http://www.siu.no/heir ,Sites de recherche des universitéshttp://www.collegenet.comhttp://www.collegeview.comhttp://www.educationconnect.comhttp://www.embark.comhttp://www.gradschools.comhttp://www.petersons.comhttp://www.studyusa.com

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Le financement de vos études 2 èmeet de 3 ème cycles

Les études aux Etats-Unis peuvent sembler coûteuses,mais vous avez probablement déjà compris qu’ellesreprésentent un excellent investissement.

Comment calculer vos dépensesLes deux principaux types de frais encourus pendant vosétudes aux Etats-Unis sont les frais de scolarité et lesdroits d’inscription, ainsi que vos dépenses courantes.Toutes les universités américaines publient des informa-tions sur le coût de la vie dans l’établissement et dans larégion.Tenez compte de tous les points énumérés ci-des-sous dans le calcul de vos frais.

Frais de scolarité et droits d’inscriptionLes frais de scolarité (tuition) représentent le coût desétudes, alors que les droits d’inscription (fees) couvrentdes services tels que la bibliothèque, le dispensaire ou lesactivités estudiantines. Les étudiants étrangers doivents’acquitter des droits d’inscription et des frais de scolari-té. Certaines universités peuvent aussi exiger que cesétudiants souscrivent à une assurance-maladie

L’évaluation de vos ressourcespersonnellesEvaluez tous les fonds dont vous pouvez disposer et lesmontants que vous pourrez obtenir de chaque source.Par exemple:• Le revenu annuel familial : gains annuels de chaquemembre de votre famille immédiate acceptant de consa-crer de l’argent à vos études ;• Les avoirs familiaux : sommes actuellement détenuessur des comptes bancaires, investissements en actions etobligations, entreprises commerciales, créances de lafamille et tout autre bien permettant d’obtenir de l’ar-gent en le vendant ou en l’hypothéquant en cas d’urgen-ce ;• Vos gains personnels jusqu’au départ : économies,dons, investissements ou biens propres ;• Autres sources : parents vivant aux Etats-Unis oucommanditaire (individu, pouvoirs publics ou organisa-tion privée) dans votre pays s’étant engagé à réglertout ou une partie des dépenses occasionnées par vosétudes. Si vous n’êtes pas en mesure de faire face auxcoûts de vos études avec les fonds personnels dont vousdisposez, il vous faudra chercher une aide financière.La recherche d’aides financièresVous pouvez solliciter une aide financière auprès dediverses sources ; toutefois, il importe de ne demanderque les fonds auxquels vous pourriez avoir droit.La concurrence est rude ; un dossier incomplet, déposé

en retard, mal rédigé ou désordonné peut faire pencherla balance en faveur d’un autre candidat. Pensez donc àconstituer votre dossier à l’avance, à bien le préparer, à leprésenter avec soin et à suivre les instructions. Prévoyezbeaucoup de temps pour établir une demande d’aidefinancière convaincante et la soumettre bien avant toutesles échéances fixées.

Sources américaines privées et organi-sations internationales

Certains organismes privés américains, fondations,entre-prises et associations professionnelles allouent souventdes aides financières en vue de renforcer les échangesinternationaux. Des organisations internationales,comme les Nations unies et l’Organisation des Etatsaméricains (OAS), sont également d’autres sources pos-sibles de financement.Dans le cas d’organismes aussi vas-tes et complexes, il est inutile d’écrire directement poursolliciter une aide financière en termes généraux.Utilisezla documentation des centres d’information et de conseilpour identifier les subventions ou bourses spécifiquesauxquelles vous pourriez avoir droit, et adressez-vous aubureau indiqué. Nombre de subventions et de boursessont destinées à des groupes particuliers, tels que lesfemmes, les ingénieurs ou les journalistes ; lisez soigneu-sement la documentation pour voir si vous entrez dansl’une des catégories visées. Ne sollicitez que les aidesdont les critères d’attribution correspondent à votre cas.

UNIVERSITÉS AMÉRICAINESEnviron un tiers des étudiants étrangers de 2ème et3ème cycles financent leurs études grâce à l’aide desuniversités américaines. Mais, les possibilités varient enfonction de la discipline étudiée,du niveau des études etdu type de l’établissement (les centres de rechercheuniversitaire ont plus de chances de disposer de fonds).D’autre part, certaines universités attribuent une aideaux étudiants qui ont réussi leur premier semestre ouleur première année d’études.Pour connaître les universités qui accordent une aidefinancière, consultez les ouvrages de référence des éta-blissements ou les logiciels de recherche dans les centresd’information et de conseil.

Les principaux types d’aides financières allouées par lesuniversités sont :• Les bourses (fellowship) : Les établissementsattribuent des bourses en fonction du mérite d’un étu-diant, normalement après la première année d’études.Les bourses de 2ème et 3ème cycles peuvent être

• L’assistanat (assistantship) : L’assistanat est laforme la plus courante d’aide financière au niveau des2ème et 3ème cycles. La somme allouée correspond à

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Le GUIDE pourFa

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des prestations fournies dans le cadre de la disciplineétudiée, généralement une vingtaine d’heures par semai-ne. Parfois, la fonction d’assistant entraîne une dispense(totale ou partielle) des frais de scolarité et des droitsd’inscription. Le montant peut aller de 500 dollars auminimum à 30 000 dollars (voire davantage, en cas dedispense de frais de scolarité élevés) pour une année uni-versitaire, aussi est-il important de savoir quelle sera laproportion de vos dépenses couvertes par votre rému-nération d’assistant. Il existe plusieurs types d’assistanat :• L’assistanat pédagogique (teaching assis-tantship) peut être accessible pendant la premièreannée des études de 2 ème cycle dans les UFR dont leseffectifs d’étudiants de 1er cycle sont importants dans lescours préparatoires.L’assistant pédagogique (Teaching assistant – TA) supervi-

se des travaux de laboratoire de 1er cycle ou assure destravaux dirigés. De plus en plus, les universités exigentque les candidats aient obtenu une note élevée à l’exa-men d’anglais parlé (Test of spoken english – TSE) avantde leur attribuer un poste d’assistant.Souvent les univer-sités demandent que ces assistants aient suivi en intégra-lité les programmes de formation qui les préparent àenseigner en milieu pédagogique américain. Si un posted’assistant pédagogique vous intéresse, n’oubliez pas dementionner dans votre demande toute expérience anté-rieure de l’enseignement. La concurrence est intense,quelle que soit la catégorie, car chaque établissement nedispose que d’un nombre limité de postes. Les candidatsétrangers doivent rivaliser avec les étudiants américains.En général, les étudiants en doctorat ont plus de chancede recevoir un soutien que les candidats à la maîtrise.

Sites Internet utilesInformation générale sur l’aide financière destinée auxétudiants étrangershttp://www.edupass.org/finaidhttp://www.nafsa.org/ (voir « Subventions et bourses »)http://www.bibl.u-szeged.hu/oseas/aid.htmlSite de recherche d’une bourse d’études accessibles auxétudiants étrangershttp://www.fastweb.comOrganismes attribuant des bourses pour les études de2ème et 3ème cycles :National Academy of Sciences, National Academy ofEngineering, Institute of Medicine and the NationalResearch Councilhttp://www.nas.edu

National Endowment for the Humanitieshttp://www.neh.fed.us/National Science Foundationhttp://www.nsf.govWoodrow Wilson International Center for Scholarshttp://wwics.si.eduInformation sur les organismes de subvention :The Foundation Centerhttp://www.fdncenter.org/grantmaker/Information sur les possibilités d’emprunts offertes auxétudiants étrangershttp://www.edupass.org/finaid/loans.phtmlInformations fiscales destinées aux étudiants étrangershttp://www.edupass.org/finaid/taxes.phtmlhttp://www.irs.ustreas.gov/

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L’université de Californie Los Angeles

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Par Augustin Yao

La téléphonie

Niveau

Anglais niveauélémentaire 0,6 % 30,5 % 7,6 % 23,4 % 11,5 % 44,0 %

Etudes secon-daire ou moins 17,1 % 39,1 % 12,1 % 21,2 % 23,5 % 57,4 %

Diplômes universitaires 23,1 % 23,3 % 43,8 % 42,5 % 28,9 % 9,1 %

Diplômes supérieurs 2,6 % 4,2 % 8,2 % 6,8 % 5,8 % 1,9 %

Pop. totaleUSA

Pop. totaleimmigrants

Immigrants africains

ImmigrantsAsiatiques

Europe, Russie & Canada

Am. latine, Am.du sud et araïbes

Villes et agglomérations avec les plus fortes populations africaines (2000 Census)

Villes Nbre d’africains

% total de lapop. noire

% total de la Pop.de la pop totale

Washington, DC, Maryland (MD)Virginie (VA) - Virginie O. (WV)

80,281 6.1 1.6

0.8

0.8

0.9

0.3

0.5

0.2

0.5

0.3

0.7

New York, NY

Atlanta, GA

Minneapolis - St. Paul, MN - WI

Région de Los Angeles

Boston, MA - New Hampshire NH

Houston, TX

Dallas, TX

Philadelphie, Pennsylvanie PA- New Jersey NJ

Chicago, IL

73, 851

34,302

27,592

25,829

22,683

19,438

19,134

16,344

24,231

3.4

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15.4

2.7

3.1

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3.6

1.6

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Maîtrise de l’anglaisPour mener à bien des études de 2 ème et de 3 èmecycles aux Etats- Unis, vous devez être capable de lire,écrire et communiquer oralement en anglais avec unegrande aisance.Afin de déterminer votre niveau de com-pétence en anglais, prenez vos dispositions pour passerl’épreuve d’anglais langue étrangère (Test of english as aforeign language TOEFL) le plus tôt possible – au moinsun an avant la date à laquelle vous envisagez de vousinscrire dans une université américaine. Comme pourbien des aspects de l’enseignement aux Etats-Unis,chaque établissement fixe ses propres critères d’admis-sion. Certains établissements acceptent des examensd’anglais autres que le TOEFL; vérifiez les informationsdonnées par les établissements sur les examens qui ysont acceptés.

TOEFL http://www.toefl.org ou le bulletin d’inscription)ou dans les centres culturels américains.

Sites Internet utilesTests d’admission standardisés

http://www.ets.orghttp://www.toefl.orghttp://www.gre.orghttp://www.gmat.org

Sites Internet utilesDe nombreux sites de recherche donnentaussi des conseils en vue de constituer un bondossier de candidature.

http://www.collegenet.comhttp://www.educationconnect.comhttp://www.embark.comhttp://www.petersons.comhttp://www.studyusa.com

Source: US Census 2000

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Le GUIDE pour

Rechercher unemploi

Par Israel Bebo

• 1) Bâtir votreprojet professionnelEtape importante dans la recherche d’emploi, larédaction d’un projet professionnel vous permet deprendre conscience de vos compétences en vue devous orienter dans un métier qui vous conviendra.

La rédaction de ce projet a pour butde permettre au candidat à l’emploide :

• Faire une réflexion sur ses expériences etcompétences professionnelles

•Définir ses aptitudes •Évaluer ses forces et ses intérêts •Déterminer ses compétences clés •Connaître l’environnement socio-économique•Choisir un secteur d’activité

Votre projet professionnel doit com-porter les parties suivantes :

•Le titre (une phrase qui résume vos ambitions)•Le secteur d’activités•La fonction•Les entreprises cibles•Le type de contrat et la rémunération

Quelques conseils pour la conceptionde votre projet

• Modifiez le et corriger le si besoin ; un projet pro-fessionnel doit être évolutif, car vous êtes appelés àévoluer en terme de formation et d’expérience.L’environnement aussi évolue.

• Allez partout ou vous pouvez avoir des informa-tions sur le marché de l’emploi et des entreprises quevous visez

• Internet est un outil incontournable dans la recher-che d’information vous pouvez en abuser. Aujourd’huibon nombre d’entreprises possèdent un site Internet

• Votre choix professionnel doit tenir compte del’environnement socio-économique.

• Et surtout fixez-vous un délai dans la réalisation devotre projet.

• 2) Rédiger votre CV Le Curriculum vitæ (CV) est un document qui présentele parcours professionnel et/ou didactique d'une per-sonne .Outil d'information essentiel pour le recruteur, ilconstituera aussi le support principal du futur entretien.Clair, complet et synthétique, il doit être ciselé pour allerà l'essentiel et être adapté au poste sollicité.

Aujourd’hui, trouver un emploi n’est plus aussi évident quelques soient lesqualités ou les compétences acquises. Rechercher un emploi est un tra-

vail qui demande temps, organisation, méthode et détermination.Trouver un emploi conforme à ses désirs demande un investissement entemps et en énergie. C'est pourquoi, la recherche d'emploi est aussi un

emploi à plein temps il n’y pas de place pour l’amateurisme, il faut atta-quer le marché avec rigueur, efficacité et méthode. Bref, il faut s’organi-

ser, pour ne pas perdre temps et énergie. Prévoir un budget chercher unemploi à un coût (déplacements, téléphone, Internet, poste…)Il y a des astuces pour se mobiliser, pour bâtir un plan d’action.

Voici les principales étapes à suivre et des clés pour réussir.

98 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

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Les éléments que l’on retrouve defaçon classique dans un CV sontles suivants

- Etat civil- Objectif ou Titre - Compétences- Expériences professionnelles- FormationAutres rubriques

- Langues- Informatiques- Permis de conduire- Activités extraprofessionnelles- Centre d’intérêt

Contrairement au projet professionnel qui représen-te une vue globale de vos compétences et de vosaspirations, le CV met en relief vos expériences pro-fessionnelles et vos compétences en rapport avecle poste donné Il doit correspondre à un poste àpourvoir. Si le projet professionnel est un documentpersonnel, le CV est quant à lui un document quevous devez présenter. C’est le lien entre vous et lerecruteur, il doit lui donner envie de vous rencontrer,d’où son importance et la nécessité de bien leconcevoir aussi bien dans le fond que dans laforme.

• 3) La lettre demotivation La lettre de motivation à pour but de convaincre lerecruteur que vous êtes le candidat idéal pour leposte. Loin d’être un CV détaillé, elle met en valeurles compétences et les expériences qui vous ren-dent compétent pour le poste visé. Elle fait ressortirvotre manière de communiquer. De ce fait elle doit« accrocher » le recruteur et susciter sa curiositépour qu’il veuille vous rencontrez.Voici la présentation conseillée :

A - L’entêteElle comprend :

• les coordonnées et l’état civil du candidatEn haut à gauche,Nom et prénoms ; Adresse ; Téléphone fixe et mobi-le ; Courriel (Email)

• La date En haut à droite

• Les coordonnées de l’entreprise En haut à droite légèrement en dessous de la date

B- Le corps de la lettre

C- La conclusion Demande un rendez-vous et concluez par une for-mule de politesse.

D- La signatureSignez en bas droite de la feuille.

• 4) L’entretiend’embaucheEtape clé du recrutement, l’entretien d’embauche,est un moment précieux, difficile à obtenir, qu'ilconvient de positiver et de valoriser comme il sedoit. Vous avez été sélectionné parmi de nombreuxcandidats. S’il est vrai que vous touchez au butvous, vous n’y êtes pas encore. Pour passer le cap,il est primordial de bien se connaître au préalablemais aussi de cerner parfaitement le secteur d'acti-vité, la concurrence, le marché de l'entreprise quel'on souhaite intégrer pour poser les bonnes ques-tions au bon moment. Il importe aussi de savoirquand et qui relancer. Quel que soit le niveau decarrière ou le choix professionnel adopté, l'entretiendoit donc être préparé très sérieusement en amont.

La préparation

• Rassemblez aux préalables toutes les informa-tions dont vous aurez besoin.

• Ayez avec vous votre CV, les photocopies devos diplômes, de vos certificats de travail.

• Préparez chaque entretien de façon à avoiren tête les éléments démontrant votre connaissan-ce du secteur, de l'entreprise et des compétencesdemandées.

• Mettez-vous à la place du recruteur afin d'an-ticiper les questions qui vous seront probablementposées.

• Rafraîchissez votre anglais oral si besoin est. Vous avez maintenant les arguments nécessairespour attaquer le marché de l’emploi.

Soyez actifs, postulez aux offres d’emploi et envoyezdes candidatures spontanées aux entreprises quevous convoitez. Vous essuierez parfois des reversmais cela ne doit pas vous décourager. Servez-vousde ces expériences parfois douloureuses pour vosprochaines candidatures. Au bout de l’effort se trou-ve la récompense !

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Le Groupe de laBanque africaine de développement

Le 4 août 1963, 23 gouvernements africains ont signé l’Accord de la création de la Banque africai-ne de développement (BAD) à Khartoum (Soudan). Huit autres pays l’ont ratifié en décembre de lamême année. Le 10 septembre 1964, l’Accord est entré en vigueur lorsque 20 pays membres ontsouscrit à 65 % du capital actions qui s’élevait alors à 250 millions de dollars US. L’assemblée inau-gurale des Conseils des gouverneurs s’est tenue du 4 au 7 novembre 1964 à Lagos (Nigeria). Lesopérations de la Banque ont démarré le 1er juillet 1966 à Abidjan (Côte d’Ivoire).

Le Groupe de la Banque africaine de développement est constitué de la Banque africaine de déve-loppement (BAD) et deux guichets de prêts concessionnels à savoir : le Fonds africain de dévelop-pement (FAD), créé en 1972 et le Fonds spécial du Nigeria (FSN), établi en 1976.

La BAD est une institution régionale multilatérale de financement du développement, qui a étécréée pour mobiliser des ressources en vue de financer des opérations en faveur du développementéconomique et du progrès social de ses pays membres régionaux (PMR). Son siège se trouve àAbidjan (Côte d’Ivoire), mais actuellement, elle mène ses opérations depuis son Agence temporairede relocalisation (ATR) située à Tunis,en raison de la situation politique qui prévaut en Côte d’Ivoire.

Les actions tangibles réalisées au fil du temps par le Groupe de la Banque ont conforté son imageet suscité un regain de confiance dans l’institution, comme l’atteste la confirmation de la note AAAqui lui est attribuée par les principales agences internationales de notation.

En décembre 2007, la onzième reconstitution du Fonds africain de développement, à hauteur de 8,9milliards de dollars US, a substantiellement accru le volume des ressources disponibles en faveur despays membres à faible revenu. Par ailleurs, le Groupe de la Banque ne ménage aucun effort pourréduire la dette de certains de ses pays membres régionaux dans le cadre renforcé de l’Initiative enfaveur des pays pauvres très endettés (PPTE).

De 1967 jusqu’à fin 2007, le groupe de la BAD a engagé plus de 3200 prêts et dons pour plus de60 milliards de dollars US.Au 31 décembre 2006, le capital autorisé du Groupe de la Banque s’éle-vait à l’équivalent de 33,25 milliards de dollars US ; quant au capital souscrit, il s’élevait à l’équivalentde 32,84 milliards de dollars US.

Les ressources de la BAD proviennent des souscriptions des pays membres au capital, des empruntseffectués sur les marchés des capitaux internationaux ainsi que du revenu généré par les prêts.

La Banque compte 53 États africains (pays membres régionaux) et 24 États non africains (pays mem-bres non régionaux). L’adhésion de ces derniers à la BAD remonte à mai 1982, suite à la décisiondu Conseil des gouverneurs d’ouvrir le capital de l’institution à la participation d’États non africains.Pour devenir membre de la BAD, un État non régional doit adhérer au FAD. Un seul État membredu FAD, les Émirats arabes unis, n’est pas encore devenu membre de la BAD.

Au 31 décembre 2007, l’effectif total du personnel régulier de la Banque dépasse le millier de fonc-tionnaires dont 2 femmes aux postes de vice-présidentes.

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102 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

Vous participez,comme on pouvait s’y attendre,à l’œuvre col-lective L’Afrique répond à Sarkozy. Pourrait-on s’attendre àce que vous ne réagissiez pas à un sujet qui concerne laFrançafrique ?

La Françafrique a été pendant longtemps une nébuleuse. Si sonmécanisme politique est de plus en plus lisible, c’est parce que desgroupes et des individualités n’ont cessé de réagir, depuis lesannées soixante, à ses méfaits. Je vous fais d’ailleurs remarquer quele mot « Françafrique » est désormais entré dans le langage cou-rant et que chaque fois qu’on l’emploie c’est pour stigmatiser uncertain type de relations entre Paris et ses ex-colonies. C’est bienla preuve que cela sert, à la longue, de ne s’accommoder d’aucuneforme d’injustice. Ce n’est pas le moment de lâcher prise.

Vous résumez le Discours de Nicolas Sarkozy à Dakar àcette phrase mémorable : « La science politique s’intéresse-ra peut-être un jour à ce cas de figure unique : un présidentétranger faisant, du haut de son mètre 64, le procès de tousles habitants d’un continent, sommés d’oser enfin s’éloignerde la nature, pour entrer dans l’histoire humaine et s’inven-ter un destin.» Nous supposons que vous avez reçu beau-coup de réactions à ce texte.Quelles sont celles qui vous ontle plus marqué ?

Ce n’est jamais facile de parler de son propre travail. Mais voussavez, cela fera bientôt trois décennies que je publie de la fiction etdes textes d’opinion. Eh bien, je peux vous dire que celui-ci a étéde loin le plus lu de tous. Des groupes, dont certains m’étaientinconnus, l’ont traduit d’autorité en différentes langues et deux ver-sions anglaises en circulent dans la presse et sur le Net, l’une auKenya et la seconde dans la communauté militante africaine-ame-

ricaine. Cela m’a beaucoup touché.Vous donnez une dimension historique à ce Discours.Pensez-vous que, depuis ce 16 mai 2007, des choses ontchangé ? Peut-on parler d’un « Avant le discours de Dakar »et d’un « Après le discours de Dakar » ?

Je pense qu’il faut toujours répondre, rendre coup pour coup. Lesparoles s’envolent, les écrits restent : il est bon pour l’Histoire qu’ily ait une preuve matérielle de notre réfutation de Sarkozy. Ensomme cela doit être texte contre texte, trace contre trace. Et lefait de parler, huit mois après, du discours de Dakar ne signifie pasqu’on l’élève à la hauteur d’un évènement planétaire.Non,en dépitde l’enflure un peu comique du ton, ces propos-là étaient et res-tent mesquins et méprisables. On doit malgré tout les prendre ausérieux, car ils sont sortis de la bouche du chef de l’Etat français.Dans le monde tel qu’il va,cela veut malheureusement dire quelquechose pour nous. Mais au-delà de la fonction même de Sarkozy,nous avons tous eu le sentiment que, de Stephen Smith à PascalSevran, en passant par Marc-Olivier Fogiel et Pierre Péan, toutesces insultes racistes, ça commençait quand même à bien faire. Cediscours de Dakar,c’était la bave de trop, la plus spectaculaire aussi.Il a fait éclater une rage longtemps contenue. Et la meilleure preu-ve qu’il fallait réagir,a été le discours du Cap.Sarkozy a été très pru-dent en Afrique du Sud, même si on sait bien que son constat dedécès de la Françafrique, c’était une bonne blague.A mon avis, onne reviendra jamais assez sur cette affaire.Du reste,d’autres ouvra-ges sont annoncés, coordonnés l’un par le sociologue sénégalaisMalick Ndiaye, un autre par l’historienne Adam Ba Konaré du Maliet un troisième par Mamadou Koulibaly, Président de l’AssembléeNationale de Côte d’Ivoire. Ce sont de très bonnes nouvelles.Nous sommes dans un monde impitoyable, ou personne ne laissejamais rien passer, surtout quand il s’agit d’histoire et d’identité.

Boubacar Boris Diop se dit parfois qu’il “serait stupide de ne pas profiterde son statut d’écrivain pour faire entendre sa voix”.Alors, quand on lui

tend un micro ou un dictaphone, il ne “rechigne pas à prendre laparole”… Son sujet de prédilection ? L’Afrique.

Sur ce chapitre-là, l’écrivain sénégalais a beaucoup à dire. Et à redire.

Boubacar Boris Diop,écrivain sénégalais

Carte

blanche à…

« L’idée d’une solutionglobale à un problème

africain perçu comme globalest absurde. »

Par Edwige H.

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AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - JUillet 2008 103

Avec toutes ces réactionspeut-on encore parler,comme vous venez de ledire, de « propos mépri-sables.» ? Ne dit-on pasque l’ignorance est lemeilleur des mépris ?Et, trivialement, que «le chien aboie, lacaravane passe » ?

Ce qu’on pense de lapersonne importe ici beaucoup

moins que sa fonction. C’est un chef d’Etat en exercice qui vientdire à propos des centaines de millions de morts de la Traitenégrière et de la colonisation :« d’accord,ce n’était pas bien maisn’exagérons rien… » On a ignoré des affirmations similairesd’auteurs occidentaux et il en a résulté l’idée que les Africainssont une sous-variante de l’espèce humaine. Moyennant quoi,quand des innocents meurent au Rwanda, la France qui y estimpliquée a beau jeu de dire à son opinion : « Nous n’y sommespour rien, ce sont des chefs africains qui s’entretuent, commed’habitude». Et la communauté internationale ne croit pas devoirbouger, non plus, pour la même raison. Le discours de Sarkozyvalide solennellement cette logique potentiellement meurtrière.On ne peut pas l’accepter.

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104 AFRIQUE COMPÉTENCES / Mai - Juillet 2008

Ne vous est-il jamais venu à l’espritque Sarkozy se serait trompé debonne de foi ? Il a parlé de « discoursamical », d’ « adresse fraternel à lajeunesse africaine » etc. Vous auriezpu lui accorder le bénéfice de la naï-veté…

Ecoutez, ce monsieur a des antécédents.Souvenez-vous : « la France,on l’aime ouon la quitte », « les moutons dans la bai-gnoire », « la racaille », « le nettoyage aukarcher » et ses propos juste indignes dela situation, après la mort de deux ado-lescents, Bouna et Zyed, qui a été a l’o-rigine des émeutes des banlieues. Je neparle même pas de « l’immigration choi-sie » ou des « tests ADN ».Quand un telhomme prononce le discours de Dakar,

personne n’a le droit de s’écrier enouvrant de gros yeux stupéfaits: « maisqu’est-ce qui lui prend donc ? On ne lereconnaît pas ! ». Non, si Sarkozy a unmérite, c’est bien de n’avoir jamais avan-cé masqué. Il a fait de la haine de l’autreun outil privilégié de son ascension poli-tique et ça a marché. Il n’est pas naïf dutout, il est très calculateur. Il se trouvesimplement qu’à Dakar il a mal évaluénotre seuil de tolérance à nous. Et jedirai, au risque de vous décevoir, que ce« ton amical », ce tutoiement systéma-tique, ça fait très « petit Blanc ». Celarenvoie à une figure classique de la colo-nie : le maître qui aboie ses ordres ettraite tout le monde de macaque sansmême y penser mais qui exige que sesemployés l’aiment, car s’il est aussi duravec eux, c’est pour leur bien !

Bien plus qu’une réponse à NicolasSarkozy, l’œuvre L’Afrique répond àSarkozy interpelle l’Afrique sur lesdéfis qui l’attendent. D’ailleurs, lelivre s’est longtemps intitulé L’Afriqueau défi. Quels sont, selon vous, lesdéfis que l’Afrique doit relever?

Nous parlons tous tout le temps del’Afrique mais est-ce bien raisonnable ?Nous continuons certes à avoir beau-coup de choses en commun, du fait denotre histoire. Mais à partir du mêmecreuset, les lignes d’évolution n’ont cesséde diverger pendant et après l’occupa-tion étrangère. Aujourd’hui, dans cetteAfrique que l’on s’obstine à voir commeune sorte de village continental, chaquepays a des problèmes spécifiques. Il lui

appartient de les identifier et de lesrésoudre en fonction de son histoire etde ses particularités sociologiques.Vousconnaissez la formule de Fanon : «Chaque génération doit découvrir, dansune relative opacité, sa mission : la rem-plir ou la trahir… » C’est vrai pour nospays pris isolement. L’idée même d’unesolution globale à un problème africainperçu comme global est absurde.Que lebesoin de changement continue à sefaire sentir partout sur le continent, celane fait pas l’ombre d’un doute.Mais d’oùviendra-t-il ? Les intellectuels et les artis-tes peuvent être,comme ailleurs,des fac-teurs essentiels de rupture. C’est peut-être à ce niveau-là qu’il y a un trouble,largement répandu en Afrique. Mon sen-timent est que nos différentes sociétéssont surtout malades de leurs élites. Il

arrive à certains de comparer l’Afrique,en forçant le trait, à un asile d’aliénés. Ehbien, dans cet asile-là, les malades cesont… les psychiatres. Ils ont l’air graveet le regard pénétrant, ils auscultent etmesurent sous prétexte d’en finir avec ledésastre mais leur appétit de pouvoir etd’argent leur a complètement fait perdrela raison. Et après, faisant fi de tous cesmécanismes politiques, un chef d’Etatpourtant bien informé vient nous jeter àla figure : « l’homme africain est commeça… » C’est inexact et profondémentinjuste.

Vous réclamez l’héritage de CheikhAnta Diop. De quoi se compose cethéritage ?La génération de Cheikh Anta Diop est

riche en figures historiques remarqua-bles – Nyerere, Nkrumah etc. – mais jecrois qu’il est le seul à s’être totalementémancipé des schèmes de pensée occi-dentaux. Il a été le seul à dire, du moinsavec cette exemplaire opiniâtreté : l’im-portant,c’est ce que l’on a essayé de fairede nous, l’important c’est de forger unenouvelle conscience historique. Et biensouvent on réduit la pensée de CheikhAnta Diop à ses thèses sur l’antérioritéde la civilisation négro-africaine. Maisselon moi, même s’il n’avait jamais écritune seule ligne sur l’Egypte ancienne,Cheikh Anta Diop n’aurait pas été moinscentral.Sa réflexion sur le panafricanismeet sa défense des langues africainesauraient suffi à en faire une sourced’inspiration. J’ajouterai qu’il a été d’uneintégrité morale exemplaire dans

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son activité intellectuelle et politiquecomme dans sa vie personnelle. Çacompte dans un pays pauvre et cela enfait un modèle pour une jeunesse sou-vent tentée par le cynisme. Je dois ajou-ter qu’il m’a rendu conscient de la néces-sité, pour nous, de rester présents aumonde moderne, tout en développantune réflexion si éloignée de l’Occidentqu’il n’y aurait aucun sens à la dire anti-occidentale. C’est un enseignement per-sonnel que j’ai tiré de son travail et deson itinéraire. Je suppose que cette lec-ture ne fera pas l’unanimité parmi sesdisciples mais c’est bien cela mon opi-nion.Vous soutenez qu’il n’y a pas uneAfrique mais plusieurs pays avec desparticularités sociologiques propres.Mais dans le même temps vous affi-chez votre attachement aux valeursde panafricanisme prônées parCheikh Anta Diop…

Si l’unité africaine reste un combat, c’estbien parce qu’elle n’est pas encore uneréalité. L’Afrique est immense, lesréseaux de communications y sont simal connectés que ses habitants ne sevoient et ne se parlent presque jamais.On comprend donc d’autant moins leregard massif porté par les négropho-bes, mais aussi par beaucoup d’entrenous, sur le continent. Cela finit parbrouiller les analyses et donner lieu, surtoutes les crises, à un véritable délired’interprétation. L’Ivoirien est ainsisommé de s’expliquer sur la situation auKenya,dont il ignore tout.Si un opposantest torturé au Congo je suis censé por-ter, moi Sénégalais, le poids de ce crimecontre la liberté d’expression. Autrechose : savez-vous quel est de nos joursl’homme politique qui a tué le plus grandnombre de journalistes pendant sa car-rière ? Eh bien, c’est Vladimir Poutine…CNN a donné en novembre 2007 lechiffre de deux cent vingt assassinats dejournalistes en Russie sous son règne.Est-ce qu’on va demander à un Italien des’expliquer là-dessus ? De la mêmemanière, le sentiment d’unité nationaleest bien plus fort au Sénégal qu’enBelgique ou en ex-Yougoslavie. Cela neme donne pourtant pas le droit d’endéduire qu’il y a une belle pagaille eth-nique dans toute l’Europe ou d’allerfaire la leçon aux Belges. En posant lamême grille de lecture sur un continentsi vaste et divers,on se condamne à uneinaction mortelle, car on reste prison-nier de la logique étrange selon laquel-le tous les problèmes doivent y êtrerésolus en même temps ou pas résolusdu tout ! J’en ai fait l’expérience récem-ment dans une discussion avec des jeu-nes de quelques pays africains, à proposde la littérature dans nos langues natio-

nales. Certains m’ont dit que cela pou-vait être explosif chez eux, qu’ils redou-taient des tensions entre les locuteursdes différentes langues. On peut tout àfait comprendre ces craintes.Seulementils ont ensuite voulu tirer de leur casparticulier une conclusion valable pourl’ensemble du continent ! Comment ensommes-nous arrivés à raisonner ainsisur la tête ? Supposons que les perspec-tives linguistiques soient excellentes auMali par exemple… Est-ce que lesMaliens vont se croiser les bras et dire :« Nous ne pouvons rien faire parcequ’en Ouganda ou au Sénégal, ils ne sontpas prêts,nous devons les attendre » ? Jen’aime pas du tout cette idée que noussommes des oiseaux blottis sur la bran-che d’un arbre, attendant que cesse l’o-rage. Toutes ces aberrations reposentsur l’idée qu’il y a une essence du Noir,insensible aux atteintes de l’Histoire. Çan’a l’air de rien mais cela invalide à l’avan-ce toute réflexion sur nos situations

réelles.

Croyez-vous que le rêve de CheikhAnta Diop, celui de voir une Afriqueune et unifiée, est réalisable ?

Cela prendra sans doute du temps maisc’est une possibilité. Je crois surtout quecela passera, encore une fois, par la jeu-nesse. Une amie, libraire à St Denis, enbanlieue parisienne, m’a dit l’autre jour: « c’est curieux, il y a quelques années,seuls des gens d’un certain âge venaientme demander des textes de CheikhAnta Diop. Aujourd’hui ils sont beau-coup plus jeunes et d’ailleurs ils sonttoujours surpris de découvrir que j’aises livres en rayon ! » Et cette adhé-sion,encore plus large et profonde dansdiverses parties du continent africain, çacorrespond chez tous ces jeunes à unbesoin de sentir un sol ferme sous leurspas. Cheikh Anta Diop leur fournit lesrepères qui leur font cruellement

Bibliographie de B. B. Diop

Romans• Le Temps de Tamango,Paris, L’Harmattan,1981,coll.Encres noires.Réédition :Paris,• Le Serpent à Plumes, 2002, coll. Motifs (Prix du Bureau sénégalais du droit d’au-teur) • Les Tambours de la mémoire, Paris, L’Harmattan, 1991, coll. Encres noires

(Grand prix de la République du Sénégal pour les lettres)• Les Traces de la meute, Paris, L’Harmattan, 1993, coll. Encres noires • Le Cavalier et son ombre, Paris, Stock, 1997 (Prix Tropiques) • Murambi, le livre des ossements, Paris, Stock, 2000 • Doomi Golo, Dakar, Papyrus, 2003 (en wolof) • Kaveena, L’impossible innocence, Paris, Éditions P. Rey, 2004 • Les Chiens du crépuscule, Paris, Editions Philippe Rey, 2006

Théâtre• Thiaroye, terre rouge, Paris, Éditions L’Harmattan, 1990 Essais politiques• Négrophobie, réponse aux "Négrologues", journalistes françafricains et autres

falsificateurs de l'information, avec Odile Tobner et François-Xavier VerschaveLes arènes, 2005

• L'Afrique au-delà du miroir, Éditions Philipe Rey, Paris, 2007 • L'Afrique répond à Sarkozy : Contre le discours de Dakar

(Collectif) Editions Phillipe Rey 2008

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défaut. C’est, au fond, eux qu’il invitait à « faire basculerl’Afrique sur la pente de son destin fédéral ». Il ajoutait d’ailleursque leur survie en dépendait, qu’un « égoïsme lucide » leurimposait de choisir le panafricanisme.

Vous avez, dans Négrophobie, apporté une réponse cinglanteà Négrologie de Stephen Smith.Auriez-vous tenu le même dis-cours si l’auteur de Négrologie avait été un africain ?

Je vous réponds par une question : « l’africanisme » et « l’orien-talisme » sont des traditions intellectuelles en Europe mais avez-vous déjà entendu les mots « européanisme » ou « occidenta-lisme » ? Ils n’existent pas.Autrement dit, seuls les Occidentauxrefusent de se laisser étudier par les autres peuples. C’estd’ailleurs dommage pour eux, car le regard de l’Autre, cela peutvous enrichir énormément. Je ne m’en suis donc pas pris à Smithen raison de la couleur de sa peau. Beaucoup d’autres ouvragesd’africanistes ont précédé le sien. Ils n’ont gêné personne, car endépit de leur extrême sévérité, ils étaient d’une certaine rigueurintellectuelle. Mais Négrologie, c’est un livre insultant etapproximatif. Il fallait y apporter une réponse appropriée. Celadit, je n’ai accepté qu’une seule fois de discuter avec cet auteur.C’était à Genève, je m’étais inscrit d’office à un débat sur sonouvrage. On m’a plusieurs fois proposé par la suite d’échangeravec lui en public. J’ai toujours refusé en disant aux organisateurs: « Cessez donc de faire comme si Stephen Smith est un auteurnormal avec qui on peut avoir une discussion normale ! ».

Quel jugement portez-vous sur les africains qui développentles mêmes thèses que Stephen Smith.

Si vous faites allusion à l’afropessimisme, je vous dirai que, pourmoi, la démarche de ces auteurs était fondamentalement saine.Ils ont essayé d’exercer leur fonction critique, ce qui est le rôlede tout intellectuel digne de ce nom. Je n’ai toutefois jamais par-tagé leur vision par trop culturaliste, qui ne prenait peut-être passuffisamment en compte les véritables rapports de force écono-miques et politiques. Le vrai problème, vingt ans après nosIndépendances, c’était qu’il n’y avait même pas d’indépendance !Et ce fait essentiel, qui est très lisible dans les essais de MongoBeti, on n’en trouve nulle trace chez eux. Cela dit, on aimeraitbien entendre à l’heure actuelle ces auteurs qui, dès la fin de laGuerre froide ont fustigé, avec du reste un réel talent pamphlé-taire, le « refus du développement » ou l’absence d’« ajustementculturel ».Après tout ils sont, même à leur corps défendant, aucœur de l’actuel débat sur la résurgence du racisme anti-Noir. Ilssont constamment cités dans des textes douteux auxquels ilsdonnent une certaine apparence d’objectivité. On se réfère àeux,comme pour dire :« Vous voyez bien, je n’écris pas cela parceque je suis un Blanc, même leurs intellectuels, Daniel EtoungaManguellé,Ka Mana et Axelle Kabou pensent ainsi. » Ils devraientse prononcer sur ce qui s’apparente à un détournement de leurpensée.

Pour illustrer votre combat contre le révisionnisme, vouscitez souvent un autre Diop, Birago qui disait en substanceque ce sont les racines qui permettent à un arbre de s’éle-ver. On pourrait par exemple vous rétorquer qu’on juge unarbre à ces fruits et non à ces racines.Les racines d’un arbreont beau être profonde, s’il n’y a ni pluie ni soleil, il ne pro-duira jamais de bons fruits. Et on le jugera aux fruits qu’ilproduira.

Birago Diop disait exactement: « L’arbre ne s’élève vers le cielqu’en plongeant ses racines dans la terre nourricière ».En effet,je cite souvent cette phrase mais dans ma réflexion sur la mon-dialisation et non pas dans celle sur le révisionnisme. J’aime cetteformule, elle montre à quel point il est vain d’opposer l’universel

et le particulier, tentation rendue encore plus forte aujourd’huipar la globalisation. Défendre sa culture ne signifie pas se fermeraux autres, bien au contraire. La meilleure façon de respectertoute l’humanité c’est de se respecter soi-même. Je ne pense pasque cet arbre-la puisse produire des fruits vénéneux.

Que pensez-vous du révisionnisme fréquent quant à l’histoi-re de l’Afrique ?

Le phénomène n’est pas récent mais il s’était fait de plus en plusdiscret au fil du temps. Il est revenu en force du jour au lende-main sans que personne ne le voie arriver.Ce changement de capinterpelle les descendants des victimes : pourquoi maintenant ?

J’ai l’impression que les révisionnistes européens mettent plusd’énergie et de hargne à nier les crimes de leurs ancêtres quenous à nous en souvenir. Ce paradoxe parle de lui-même : ilsmentent et ils le savent, pour reprendre le Césaire du Discourssur le colonialisme. La Traite négrière et la colonisation, çareste moralement lourd,même tant de siècles après. Il faut pour-tant accepter de porter le poids de cette faute au lieu d’insulterla mémoire des victimes. Parfois, je me dis que ces gens nous enveulent de n’avoir pas réussi à nous tuer jusqu’au dernier.On n’apas été assez coopératifs, quoi ! Est-ce que nous allons aussidevoir nous excuser d’être encore vivants ?

Face à votre combat contre le révisionnisme, on pourraitciter Fanon qui disait que «toutes les preuves qui pourraientêtre données de l’existence d’une prodigieuse civilisationsonghaï, ne changent rien au fait que les Songhaï d’aujour-d’hui sont sous-alimentés et analphabètes.» Et pour para-phraser Fanon,on pourrait,encore,dire que toutes les preu-ves qui peuvent être données que l’Occident n’est pas inno-cent dans l’histoire de l’Afrique ne changent rien au fait quel’Afrique est pauvre et sous développée.

Le rapport à soi,à ses ancêtres les plus lointains,cela joue un rôledécisif dans l’évolution d’une société. Il ne s’agit pas d’unecontemplation béate de son passé. L’important est de savoird’où l’on vient pour pouvoir se diriger d’un pas assuré vers l’ave-nir. Du reste, tout ce qu’a écrit Fanon sur le rôle de la culturenationale dans les processus révolutionnaires, en particulier en

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Algérie, contredit nettement cette affirmation. Ce grand penseuravait aussi un faible pour les formules bien frappées. Or le proprede celles-ci est de se suffire à elles-mêmes et d’être sans nuances,péremptoires. Il est donc d’autant plus facile de les isoler de leurcontexte en vue de manipulations théoriques assez malsaines. Ilarrive que des auteurs aux vues complètement opposées convo-quent une phrase solitaire de Fanon pour les besoins de leurdémonstration. Je dois honnêtement avouer que cela m’a toujourslaissé un peu perplexe.

Dans votre combat pour la valorisation des langues africai-nes, vous avez publié en 2002,Doomi Golo, un roman en wolof.Et depuis, plus rien. Finalement, cette histoire d’écrire enwolof n’était-elle pas que du bluff ? La satisfaction d’un capri-ce de panafricaniste convaincu ?

Mais je n’ai surtout pas arrêté d’écrire en wolof ! Ma pièce, IbuNdaw,boroom jamono, est en train d’être montée par la trou-pe Pettaaw d’Awa Sène Sarr. Non, je n’ai pas écrit Doomi Golopour me faire en quelque sorte plaisir avant de revenir à cettechose bien plus sérieuse que serait la langue française ! En fait, jen’ai jamais été aussi actif autour de ma langue maternelle.DoomiGolo par exemple est en train de devenir un audio-book et jedonne depuis février des cours de wolof à des jeunes Sénégalaisnés en France et désireux de renouer avec leurs racines.

Vous parlez souvent du choix de l’écriture en wolof commed’un choix « douloureux, difficile, ambigu, compliqué ». Si «écrire en langues africaines » est autant contraignant, pour-quoi continuer ? Qu’est ce qui vous oblige ?

Tant qu’on parle abstraitement d’une littérature en langues africai-nes,on ne gêne personne,c’est de la pure parole.Ça ne mange pasde pain, comme on dit familièrement. Mais dès que vous passez àl’acte,vous êtes perçu comme violent, radicalement transgressif etvous devez constamment vous excuser de votre choix.Et de façonfinalement pas si étrange que cela, l’hostilité vient presque toujoursdu dedans. Ce sont surtout des intellectuels africains qui vousreprochent d’avoir trahi l’irremplaçable langue de Molière ! C’estsur cette ambiguïté que j’ai essayé de mettre le doigt. Le refus estviscéral, je ne sens jamais autant qu’en ces instants-la, chez moninterlocuteur, sa haine de lui-même. Ce n’est pas facile à suppor-ter.Vous savez, j’ai parfois l’impression que l’homme asservi en vient àson insu à aimer son maître d’un amour fou,que la musique de seschaînes finit par lui être très douce et que, au fond de sa cale, il sedit que la vie est belle ou qu’elle aurait pu être pire ou je ne saistrop quoi… J’ai tout entendu à propos de cette affaire pourtantbien simple, qui est d’écrire dans sa langue maternelle. Les gens nesavent plus quoi inventer pour prouver que cela n’est pas possible,que ça n’a aucun sens. On me dit que sans l’anglais ou le français,le continent va être à feu et à sang ! Est-ce bien sérieux,ça ? En faitc’est à se rouler par terre. On m’a servi les arguments les plusinsolites. J’espère trouver le temps d’y répondre un jour ou l’aut-re sous la forme d’un petit ouvrage.

Etes-vous de ceux qui estiment qu’on ne pourra pas parler delittérature africaine tant que la littérature sera écrite dansdes langues occidentales ?

Je ne suis pas d’accord avec Ngugi sur ce point. La littérature afri-caine dans les langues occidentales existe pour le meilleur ou pourle pire et il ne sert a rien de chercher à re-écrire l’histoire. Maisjustement, l’histoire n’a pas dit son dernier mot ! J’ai la convictionque, sur la durée, tous les textes en anglais ou en français, dont onfait aujourd’hui si grand cas, seront refoulés à la périphérie. Je croisà ce renversement de perspective, à ce recentrage de notre pra-tique littéraire sur nous-mêmes.

Avant de finir, Aimé Césaire vient de mourir, que retenezvous de celui qui était considéré comme le dernier pilier de laNégritude ?

En tant qu’écrivain, je suis impressionné par la force exceptionnel-le de sa langue poétique.Mais il faut savoir que derrière cette appa-rente fluidité de l’expression, il y a un travail de tous les instantssur chaque mot,une âpre bataille avec les mots pour leur faire ren-dre gorge. Senghor,qui a été le témoin privilégié de la gestation duCahier d’un retour au pays natal… écrit que ce fut une “par-turition dans la souffrance”.Césaire biffait sans arrêt, revenait sanscesse sur le texte, se fiant plus souvent à la fulgurance des imagesqu’à leur suggestion de sens immédiate. Et lorsque plus tard avecMoi,laminaire, sa voix s’apaise,ce travail d’épure ne sonne jamaisfaux,on ne sent à aucun moment le procédé.Le chant césairien n’ajamais rien de vain et si on n’est jamais sûr de la trajectoire dupoème c’est parce que celui-ci irradie à l’infini et qu’en elle-mêmela musique des mots est signifiante. Il est ainsi arrivé à Césaire deforger du sens avec le grondement d’un volcan ou la rumeurdes vagues. Ce n’est donc pas seulement beau, c’est aussi trèsprofond. J’aime en particulier ce passage du Cahier d’unretour au pays natal :

Ecoutez le monde blanc horriblement las de son effort immenseses articulations rebelles craquer sous les étoiles duresses raideurs d’acier transpercer la chair mystiqueécoute ses victoires proditoires trompeter ses défaitesécoute aux alibis grandioses son piètre trébuchementPitié pour nos vainqueurs omniscients et naïfs !

Ces mots si pleins de maturité,si décisifs pour comprendre la rela-tion Maitre-Esclave, le poète avait à peine vingt cinq ans quand il lesa écrits ! Ce tout jeune homme comprend déjà qu’haïr le maître,c’est encore une façon de l’aimer – amour pervers sans doutemais amour quand même – et de se résigner à son pouvoir. Et cequ’il nous dit de fondamental, c’est qu’à la fin des fins le véritableesclave n’est pas celui que l’on pense. En somme le mépris de lavictime pour la force brute qui l’asservit, c’est le commencementde sa liberté. Je peux vous dire, à un niveau purement personnel,que je discute beaucoup, par e-mail ou de vive voix, avec des jeu-nes d’Afrique ou d’ailleurs. Ils me demandent des conseils et je leurdonne toujours en viatique ces vers-là. Ils leur annonçaient il y alongtemps un monde où leur fierté retrouvée serait la sœur del’action.

Pensez-vous avoir fait bouger les choses ?

Je n’en sais rien et cela ne m’empêche évidemment pas de dormir.Mon projet intellectuel n’est pas bien compliqué, en vérité : ilconsiste à faire connaître mon avis chaque fois qu’il se produit unévènement qui me semble important. J’entends certains auteursdire : « Moi je ne fais pas de la politique, je fais de l’art » Certes, ilsne font pas de la politique mais souvent quand vous lisez leurs tex-tes, eh bien, ils ne font pas de l’art non plus ! Je me dis parfois quemon statut d’écrivain procède d’un malentendu mais que je seraisstupide de ne pas en profiter pour faire entendre ma voix ! C’estune telle chance, ça… Vous publiez des romans et on vous tenddes micros, on vous invite à des conférences. Pourquoi rechignerà prendre la parole ? Il ne s’agit pas d’être un auteur engagé ou pas.Il s’agit plus simplement de dire ce que l’on pense en acceptant lerisque, bien humain, de se tromper. J’ai plus de respect pour quel-qu’un qui exprime des opinions contraires aux miennes que pourcelui qui prétend n’en avoir aucune sur aucun sujet, en invoquantje ne sais quelle mystérieuse démarche esthétique… C’est dugâchis.Et de toute façon, si on a un tel désir de silence, il suffit d’at-tendre un peu : chacun de nous aura assez de temps dans la mortpour se taire !

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108 AFRIQUE COMPÉTENCES /Mai - Juillet 2008

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