acteurs de dialogue

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La France est un pays divisé, on pourrait même dire morcelé. Certains diront que c’est une spécifi- cité française. Mais faut-il s’y résigner pour autant ? De- puis sa créaon, le programme Iniave Dialogue s’est aelé à contribuer à résou- dre l’une de ces fractures, et pas des moin- dres : réunir des Français venant d’origines diverses – avec des cultures, des tradions, des croyances différentes. Un défi ! Après plusieurs années pendant lesquelles le pro- gramme a mulplié les espaces de dialogue, avec les relaons et même les amiés qui s’y nouent, ainsi que les conférences-dé- bats qui placent ses efforts à un niveau plus élevé, comme celle du 19 décembre sur les relaons franco-algériennes. Conscient de la poudrière que représente aujourd’hui l’espace méditerranéen, Iniaves Dialogue abordera dans une autre conférence-débat le 7 juin les méfiances partagées à l’encon- tre de la France par plusieurs pays engagés dans le printemps arabe. Quel bilan rer de cee acon, alors que nous approchons du dernier trimestre de l’année (scolaire)? Comme le relate la présente lere, des personnes que tout sépare apprennent en France à se connaître, à s’apprécier, à vou- loir joindre leurs efforts ; un groupe fran- co-tunisien est allé à l’automne en Tunisie témoignant ainsi de leur volonté d’unité ; plus tard, ce sont deux Françaises d’origine tunisienne qui parcipaient à une rencontre pan-arabe au Liban organisée par Iniaves et Changement. Ces iniaves apparem- ment modestes sont comme les goues de pluie qui tombent sur une terre assoiffée, y pénètrent silencieusement, et font, hors de tous regards, leur chemin jusque dans les profondeurs du sol. A de longues distan- ces de leur contact avec la terre, elles s’in- filtrent paemment et voilà qu’une source jaillit. Bien sûr nous aimerions que nos ini- aves soient plus connues et reconnues, et que le monde fasse le lien entre elles et la source tant recherchée ! Mais sans nos goues d’eau discrètes, pas de source, pas de paix. L’enjeu nous dépasse, mais con- nuons inlassablement à arroser nos sols verdoyants ou déserques avec persévé- rance et confiance. Ce sont nos enfants qui boiront l’eau de la paix. Anne-Marie TATE ACTEURS DE DIALOGUE La lettre d’information trimestrielle d’Initiative Dialogue EDITO PRINTEMPS 2013 - N°13 Du haut d’une colline au Liban, Beyrouth me semblait une ville en- soleillée, avec une vue surprenante et calme qui donne sur la mer. Une première impression qui n’empêchait pas le simple visiteur de ce pays de reparr avec une inquiétude sur la cohabitaon qui y prévaut. A Notre Dame du Puits, endroit paisible et symbolique, nous nous sommes retrouvés le 8 mars dernier, cinq équipes, membres du réseau internaonal d’Iniaves et Changement, pour une consul- taon arabe. Une iniave d‘Omnia Marzouk, présidente interna- onale d’IC, encourageant les différentes équipes arabes à se ren- contrer et à étudier les nouveaux enjeux et défis, afin de définir les priorités de leur travail face aux évoluons en cours dans leur région, notamment avec les événements liés à ce qui a été bapsé « le printemps arabe ». C’était ainsi une belle occasion de faire connaissance avec les dif- férentes équipes (libanaise, palesnienne, égypenne, syrienne et irakienne). L’une des choses qui m’a parculièrement marquée au cours de cee rencontre a été la place que prenait le moment de silence dans le quodien de chacune des personnes que j’ai pu ren- contrer. A chaque réunion, à chaque partage ou en fin de chaque journée, nos amis s’emparaient de ces moments de silence. En discutant plus longuement avec eux, j’ai compris que le moment de silence, ce temps que l’on prend pour soi, pour se dévoiler à soi-même ce qui nous anime, ce qui fait notre force ou notre faiblesse, était dé- sormais bien présent dans le cœur et l’esprit de mes amis arabes. Et que nous autres franco-tunisiennes l’avions peut être oublié. La réalité sociale et polique dans les pays arabes est si différen- te d’un pays à l’autre que le travail de chaque équipe varie selon le contexte local. Pour illustrer mes propos, j’évoquerai ici les cas égypen et syrien. En Egypte, l’équipe d’Iniaves et Changement (toujours nommé « Réarmement moral ») travaille pour favoriser la paix sociale, mais son acon sur le terrain répond plutôt à la détresse quodienne des gens et à leur ignorance (elle-même liée à un taux d’analphabé- sme proche de 30 %). C’est notamment le cas du projet d’alpha- bésaon des adultes qui se met en place. Parmi les autres défis, combare la pauvreté, avec des acons de solidarité dans les quar- ers. L’équipe anime également des ateliers d’accompagnement et d’orientaon de jeunes dans les écoles, ainsi que des soirées avec des minorités religieuses pour favoriser la rencontre et apprendre à se respecter ; ce travail est mené notamment avec des dirigeants de la communauté chréenne. L’équipe intervient souvent avec des associaons naonales, telles que « les Bâsseurs de la Vie », pour avoir plus d’impact et de légimité sur le terrain vis-à-vis des autorités. En Syrie, la réalité est toute autre, la guerre n’épargne ni les femmes ni les enfants. Deux amis syriens ont dû affronter le danger et fran- chir la fronère pour venir parciper à la consultaon. L’un d’eux est professeur de leres à l’université de Damas, la deuxième, une jeune femme courageuse, est membre d’Iniaves et Changement au Canada mais vit actuellement en Syrie. De leurs propos, je reens cee phrase : «Aujourd’hui, notre souci est de préserver l’homme syrien, de soulager sa détresse et de l’aider à surmonter ses souffrances face à une guerre qui a détruit toute humanité dans sa société». Nos amis syriens ont choisi de travailler avec d’autres gens dans la discréon, pour aider les familles dans leur lue quodienne, en soutenant par la parole et l’entraide des hommes et des femmes qui ont tout perdu, et vivent des situaons psychologiques difficiles et de terribles drames humains. Dossier : Le Liban, une expérience pas comme les autres! La paix ou le parcours d’une goue d’eau

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La lettre d'information trimestrielle d'Initiative Dialogue - Printemps 2013 - n°13

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Page 1: Acteurs de dialogue

La France est un pays divisé, on pourrait même dire morcelé. Certains diront que c’est une spécifi-cité française. Mais faut-il s’y résigner pour autant ? De-puis sa création, le programme Initiative Dialogue s’est attelé à contribuer à résou-

dre l’une de ces fractures, et pas des moin-dres : réunir des Français venant d’origines diverses – avec des cultures, des traditions, des croyances différentes. Un défi ! Après plusieurs années pendant lesquelles le pro-gramme a multiplié les espaces de dialogue, avec les relations et même les amitiés qui s’y nouent, ainsi que les conférences-dé-bats qui placent ses efforts à un niveau plus

élevé, comme celle du 19 décembre sur les relations franco-algériennes. Conscient de la poudrière que représente aujourd’hui l’espace méditerranéen, Initiatives Dialogue abordera dans une autre conférence-débat le 7 juin les méfiances partagées à l’encon-tre de la France par plusieurs pays engagés dans le printemps arabe. Quel bilan tirer de cette action, alors que nous approchons du dernier trimestre de l’année (scolaire)? Comme le relate la présente lettre, des personnes que tout sépare apprennent en France à se connaître, à s’apprécier, à vou-loir joindre leurs efforts ; un groupe fran-co-tunisien est allé à l’automne en Tunisie témoignant ainsi de leur volonté d’unité ; plus tard, ce sont deux Françaises d’origine tunisienne qui participaient à une rencontre pan-arabe au Liban organisée par Initiatives et Changement. Ces initiatives apparem-ment modestes sont comme les gouttes de

pluie qui tombent sur une terre assoiffée, y pénètrent silencieusement, et font, hors de tous regards, leur chemin jusque dans les profondeurs du sol. A de longues distan-ces de leur contact avec la terre, elles s’in-filtrent patiemment et voilà qu’une source jaillit. Bien sûr nous aimerions que nos ini-tiatives soient plus connues et reconnues, et que le monde fasse le lien entre elles et la source tant recherchée ! Mais sans nos gouttes d’eau discrètes, pas de source, pas de paix. L’enjeu nous dépasse, mais conti-nuons inlassablement à arroser nos sols verdoyants ou désertiques avec persévé-rance et confiance. Ce sont nos enfants qui boiront l’eau de la paix.

Anne-Marie TATE

Acteurs de diAlogueLa lettre d’information trimestrielle d’Initiative Dialogue

edito

PRINTEMPS 2013 - N°13

Du haut d’une colline au Liban, Beyrouth me semblait une ville en-soleillée, avec une vue surprenante et calme qui donne sur la mer. Une première impression qui n’empêchait pas le simple visiteur de ce pays de repartir avec une inquiétude sur la cohabitation qui y prévaut.

A Notre Dame du Puits, endroit paisible et symbolique, nous nous sommes retrouvés le 8 mars dernier, cinq équipes, membres du réseau international d’Initiatives et Changement, pour une consul-tation arabe. Une initiative d‘Omnia Marzouk, présidente interna-tionale d’IC, encourageant les différentes équipes arabes à se ren-contrer et à étudier les nouveaux enjeux et défis, afin de définir les priorités de leur travail face aux évolutions en cours dans leur région, notamment avec les événements liés à ce qui a été baptisé « le printemps arabe ».

C’était ainsi une belle occasion de faire connaissance avec les dif-férentes équipes (libanaise, palestinienne, égyptienne, syrienne et irakienne). L’une des choses qui m’a particulièrement marquée au cours de cette rencontre a été la place que prenait le moment de silence dans le quotidien de chacune des personnes que j’ai pu ren-contrer.

A chaque réunion, à chaque partage ou en fin de chaque journée, nos amis s’emparaient de ces moments de silence. En discutant plus longuement avec eux, j’ai compris que le moment de silence, ce temps que l’on prend pour soi, pour se dévoiler à soi-même ce qui nous anime, ce qui fait notre force ou notre faiblesse, était dé-sormais bien présent dans le cœur et l’esprit de mes amis arabes. Et que nous autres franco-tunisiennes l’avions peut être oublié.

La réalité sociale et politique dans les pays arabes est si différen-te d’un pays à l’autre que le travail de chaque équipe varie selon le contexte local. Pour illustrer mes propos, j’évoquerai ici les cas

égyptien et syrien.

En Egypte, l’équipe d’Initiatives et Changement (toujours nommé « Réarmement moral ») travaille pour favoriser la paix sociale, mais son action sur le terrain répond plutôt à la détresse quotidienne des gens et à leur ignorance (elle-même liée à un taux d’analphabé-tisme proche de 30 %). C’est notamment le cas du projet d’alpha-bétisation des adultes qui se met en place. Parmi les autres défis, combattre la pauvreté, avec des actions de solidarité dans les quar-tiers. L’équipe anime également des ateliers d’accompagnement et d’orientation de jeunes dans les écoles, ainsi que des soirées avec des minorités religieuses pour favoriser la rencontre et apprendre à se respecter ; ce travail est mené notamment avec des dirigeants de la communauté chrétienne. L’équipe intervient souvent avec des associations nationales, telles que « les Bâtisseurs de la Vie », pour avoir plus d’impact et de légitimité sur le terrain vis-à-vis des autorités.

En Syrie, la réalité est toute autre, la guerre n’épargne ni les femmes ni les enfants. Deux amis syriens ont dû affronter le danger et fran-chir la frontière pour venir participer à la consultation. L’un d’eux est professeur de lettres à l’université de Damas, la deuxième, une jeune femme courageuse, est membre d’Initiatives et Changement au Canada mais vit actuellement en Syrie.De leurs propos, je retiens cette phrase : «Aujourd’hui, notre souci est de préserver l’homme syrien, de soulager sa détresse et de l’aider à surmonter ses souffrances face à une guerre qui a détruit toute humanité dans sa société».

Nos amis syriens ont choisi de travailler avec d’autres gens dans la discrétion, pour aider les familles dans leur lutte quotidienne, en soutenant par la parole et l’entraide des hommes et des femmes qui ont tout perdu, et vivent des situations psychologiques difficiles et de terribles drames humains.

Dossier : Le Liban, une expérience pas comme les autres!

La paix ou le parcours d’une goutte d’eau

Page 2: Acteurs de dialogue

Un jour, avant la fin de notre séminaire, nos amis ont repris le che-min de Damas avec beaucoup de courage et de détermination, tan-dis que deux autres jeunes syriens ont pu rester jusqu’au bout.

Au cours de ce séminaire, nous avons essayé de poser les bonnes questions sur notre rôle en tant qu’équipes arabes de l’association internationale, nos faiblesses, nos atouts, mais surtout nos priorités quant à l’action à mener face à tous les changements en cours.

Redonner confiance à l’homme arabe, à la jeunesse arabe, aux mi-norités et travailler à la paix et la solidarité sociale, est inéluctable-ment notre premier champ d’action.

Nous avons nommé une équipe de coordination, AWCG - Arabic World Coordination Group, qui aura pour charge de coordonner l’action des équipes arabes et de les représenter auprès de l’as-sociation internationale et du conseil international d’Initiatives et Changement.

C’est avec beaucoup d’espoir, et sur une note de poésie, de devi-nettes et de rires, que nous nous sommes quittés. Au cours de cette rencontre, nos équipes arabes auraient donc forgé pour Initiatives et Changement les outils de travail appropriés pour renforcer ou ré-tablir la paix sociale dans une région bousculée par le changement.

Jamila BARBOUCH

Tel était le titre affiché de l’évènement public qu’organisait I & C le 19 mars à l’espace Jean Monnet à Paris. Qu’est-ce que ma réussite, en quoi est-elle liée à une réussite collective, qu’est-elle du point de vue des autres ?

Le plateau, animé par Luc Roullet, réunissait Saïd Hammouche, di-rigeant fondateur de Mozaïk RH, Michel de Truchis, entrepreneur social et Rokhaya Diallo, chroniqueuse radio et fondatrice des Indi-visibles.

Chacun nous a d’abord fait part de sa vision de la réussite. Capa-cité à franchir les étapes qu’on s’est fixées, elle est pour Saïd à la fois concrète et éphémère, mais aussi, en tant que quête jamais achevée, un idéal insaisissable. Rokhaya quant à elle se demande si elle peut considérer son impact médiatique comme une réussite personnelle. Enfin, pour Michel, il l’assimile à son engagement re-nouvelé dans des causes humanitaires, en Afrique d’abord sur des projets matériels, en France ensuite pour contrecarrer la pauvreté des relations humaines.

L’ensemble des intervenants s’est accordé sur le fait que le regard de l’autre a une incidence indéniable sur la réussite individuelle. Il ne s’agit toutefois pas de s’y conformer, d’être ce que l’autre s’at-tend à ce que vous soyez. Au contraire, dans leur référence à leur vécu personnel, nos intervenants ont mis en évidence qu’il fallait être conscient de ce que l’autre, individuellement ou collective-ment, attendait de vous, mais savoir s’en distancier.Issu d’une famille nombreuse, mère au foyer, père ouvrier, Saïd a été affecté par la commisération que suscitait sa pauvreté. Il y a puisé la détermination pour se construire, avec le sentiment d’être parti de zéro. Il a ensuite trouvé une richesse dans sa différence, dans son positionnement au seuil de deux cultures, qu’il a amplifiée par l’apprentissage de plusieurs langues : arabe, berbère, français, espagnol puis anglais.Pour Rokhaya, il importe de savoir aller au delà de ce qu’on semble être et de choisir comment on veut être Français.Pour Michel enfin, il s’est référé à la longue relation qu’il a établi

avec un ancien criminel qu’il a aidé, en le considérant comme une personne et en l’appelant par son prénom, à se sentir autre chose qu’un criminel.Mais pour tous, ils ne sauraient dissocier leur réussite individuelle de la réussite, ou d’une forme de réussite, collective. Créer une dy-namique de réussite, que ce soit en contribuant à la lutte contre les discriminations, en valorisant des compétences ou des talents ignorés ou en aidant des jeunes à retrouver des motivations, tel est le dénominateur commun aux démarches de ces entrepreneurs so-ciaux. Leur réussite personnelle, c’est en fait pour l’essentiel cette contribution à la réussite collective. Elle serait même impossible sans, a dit Rokhaya.

Cette volonté d’agir en France dont témoignait cette soirée d’I&C, de faire des choses utiles et efficaces, et surtout de prendre le temps de comprendre et s’interroger sur le sens du travail prépare-rait-elle un changement de civilisation ?Une soirée en tous cas où le concept de «l’engagement social» a pris force et profondeur.

Jamila Labidi

Qu’est-ce que réussir aujourd’hui en France ?Activités

Page 3: Acteurs de dialogue

La Conférence des OING du Conseil de l’Europe a élaboré un guide pratique pour mener des dialogues là où ils sont le plus nécessai-res. Durant le Forum mondial pour la démocratie 2012 à Strasbourg, l’équipe d’Initiative Dialogue a pu prendre connaissance de cet outil et avait demandé au soussigné de préparer une formation pour ses animateurs.

En résumé, l’accumulation des migrations et de problèmes non résolus en matière de diversité au cours des dernières années ont conduit à un niveau élevé de violations des droits de l’homme dans les pays européens. L’Outil de dialogue OING vise à y remédier et ouvrir des pistes de solutions. Il a été élaboré pour une meilleure co-hésion sociale grâce à une gestion des questions de diversité basée sur les droits de l’homme. Partant des acquis du travail du Conseil de l’Europe, il s’appuie sur une participation multipartite responsable et d’une facilitation de qualité.

L’atelier d’introduction à l’Outil de dialogue a eu lieu à Issy-les-Mou-lineaux les 23 et 24 mars dernier et a couvert cinq aspects : Contexte du Conseil de l’Europe et de sa Conférence des OING ; Evolution et logique des Dialogues OING ; Exercices de quelques étapes dans la conception d’un dialogue ; Eléments particuliers de la facilitation (conduite) d’un dialogue OING ; Échange sur d’éventuelles pistes d’action à suivre. Le président de la Conférence des OING du Conseil de l’Europe est venu faire une des présentations.

L’ambiance de ces deux jours a été marquée par des échanges vifs car, animés par un sens de leurs responsabilités, toutes les person-nes présentes ont voulu tirer le maximum de cette occasion en ap-prenant les uns des autres, en vue d’élargir le périmètre des actions à venir.

Christoph SPRENG, Coordinateur

Carrefour dialogue OING du Conseil de l’Europe

espAce de diAlogue

Atelier sur l’Outil de dialogue OING à Issy

Je suis allée à Belleville afin de découvrir un autre espace du pro-gramme Initiative Dialogue et ainsi pouvoir compléter ma percep-tion pratique du pôle d’ « Initiatives et Changement », avec le pre-mier espace de dialogue de Paris XVème.

J’ai tout d’abord trouvé la galerie d’art de Belleville chaleureuse et accueillante, réellement propice à un espace de dialogue et de débat. Entourés d’œuvres d’art, cela nous a permit de nous plon-ger tout de suite dans un contexte favorable à l’échange. Je me suis positionnée, lors de cette soirée, en tant qu’observatrice, afin «d’analyser» les échanges sur la thématique de l’espace : « Lors-que le débat public s’enflamme, comment le vivons-nous ? ». Et j’ai alors pu constater que les inquiétudes ou allégations étaient

quasi-identiques, voire similaires, entre l’espace de Paris XVème et de Belleville. J’ai vraiment noté et apprécié la diversité du public de Belleville, et la présence notoire d’étudiants (un peu plus d’un tiers des participants). Cette mixité a permis une diversité des points de vue, et une richesse de rencontre.

J’ai aimé l’échange en grands groupes, et notamment l’intervention d’Olga sur le sujet, nous parlant de sa réaction sur un forum face à la guerre au Mali. Mais j’ai cependant préféré le dialogue et les liens qui se sont instaurés lors du partage autour de questions, en petits groupes.

Je me suis alors retrouvée avec Asma, Marine et Julien, et nous avons pu largement discuter sur les questions posées, et parler chacun d’expériences passées. Ce fut un temps très convivial et constructif, où chacun a pu s’exprimer très librement, et appren-dre de l’expérience de l’autre. Pour ma part, c’est ce moment de la soirée qui fut le plus appréciable, où l’échange s’est simplement construit, de manière relativement « informelle ».En conclusion, cette soirée fut, de mon point de vue très apprécia-ble tant sur le plan contextuel qu’humain. Je l’ai trouvée riche en sens, et diversifiée, que ce soit sur les approches du thème, que sur les participants. Cette ambiance chaleureuse, participative et constructive m’a touchée et j’ai été ravie de rencontrer des hom-mes et des femmes qui se battent pour leurs convictions et leurs valeurs.Je souhaite que l’espace de Belleville continue sur cette voie, et que toujours plus de personnes participent à ce dialogue constructif.

Claire MENON

Témoignage

Jean-Marie Heydt, Président de la Conférence des OING du Conseil de l’Europe

Page 4: Acteurs de dialogue

AgeNdA

ContactInitiatives et Changement - 7bis rue des Acacias - 92130 Issy-les-Moulineaux01 41 46 03 63 - [email protected] - [email protected]://www.fr.iofc.org/projets/dialogue

Comité de rédactionFréderic Chavanne, Nathalie Chavanne, Rafael Tyszblat, André Brémard et Jamila Labidi.

ANNoNces- Initiative Dialogue recherche des bénévoles pour l’animation de groupes inter-culturels- Soyez nombreux à venir courir avec l’équipe ID lors de la Course des Héros le 16 juin au Parc de Saint-Cloud (inscription en ligne sur www.coursedesheros.com)

lu, vu, eNteNduPraticiens du dialogue

Pour cette troisième édition, nous interrogeons Fadi Rabieh, consul-tant en développement organisationnel et codirigeant du Conseil des Institutions Religieuses de la Terre Sainte. Ayant vécu sous l’occu-pation, il s’intéresse depuis 10 ans à la non violence et organise des échanges entre Palestiniens et Israéliens, orientés vers des actions conjointes.

Quelle est votre approche de la facilitation de dialogue?

Le dialogue est un moyen et une valeur. On dialogue pour s’éduquer mutuellement et mettre en œuvre quelque chose. L’objectif est de changer les perceptions.

Un dialogue efficace consiste en une série d’événements et d’expé-riences qui doivent conduire les individus et les groupes d’une atti-tude de haine à une attitude de confiance. Cela commence par la création d’un espace sécurisé dans lequel les participants peuvent échanger sans jugement ou accusations. Le dialogue est un long processus. C’est comme si on redessinait notre carte mentale pour interpréter la réalité de manière différente. Remettre en question les postulats et les valeurs bien enracinées peut être terrifiant. Cela prend du temps et une structure bien réfléchie. Le dialogue doit coïn-cider avec des expériences partagées (comme des projets sociaux, ou même cuisiner un repas ensemble), sinon l’impact du dialogue sera limité. C’est le faire-ensemble qui valide le changement d’attitude – pas seulement les échanges verbaux.

Quels sont les défis spécifiques au contexte israélo-palestinien ?

Le plus grand défi est de maintenir des voies de communication lors-que la violence explose. Lorsque de tels incidents surviennent (com-me les derniers affrontements à Gaza ou au Liban), le processus de dialogue s’arrête et on a l’impression de tout devoir recommencer.

Pour être efficaces, les projets “people to people” doivent s’inscrire dans un processus politique. Néanmoins, nous ne devons pas atten-dre que les négociations reprennent. Il faut accroitre les contacts en-tre Palestiniens et Israéliens étant donné leur séparation physique et le manque d’objectivité des medias.

Depuis un an, les voix de ce que l’on appelle l’ « anti-normalisation » se multiplient qui tentent d’empêcher les rencontres israélo-pa-lestiniennes. Malgré ma compréhension du raisonnement derrière cette posture (ne pas faire semblant que tout est normal alors qu’il y a une occupation), je la trouve contreproductive. Les Palestiniens ont le devoir de communiquer avec les Israéliens pour faire passer leur message et contrer les tentatives de déshumanisation.

Quel conseil donnez-vous aux praticiens du dialogue ?

Le processus de dialogue commence avec l’effort de recrutement des participants. Rien qu’à ce stade, il faut dialoguer et désapprendre ! Pour convaincre, la connexion personnelle est la meilleure stratégie. Nous devons entretenir nos relations dans chaque groupe pour que les participants potentiels aient suffisamment confiance en nous pour nous rejoindre lorsqu’ils sont prêts. Il faut avoir une crédibilité constante et montrer l’exemple sur nos valeurs.

Propos recueillis et traduits de l’anglais par Rafaël Tyszblat

Prochains événements

• Prochaine conférence Initiative Dialogue le vendredi 7 juin au FIAP, Paris 14 de 20h à 22h15

« France - Monde arabe : méfiance ou confiance ? » De nouvelles pistes pour surmonter la crise de confiance que traversent la France et le monde arabe

• Formation pédagogique pour les bénévoles : mardi 11 juin 2013 à 19h30 Issy-les-Moulineaux