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URBANISME TOUT L’IMMOBILIER • N O 486 • 16 FÉVRIER 2009 • Après un Congrès de Cobaty International à Lille et Dunkerque Ville durable: l’autre succès des «Ch’tis» Voilà quelques semaines que le Cobaty International a tenu son 23 e Congrès annuel dans la Région Nord-Pas de Calais. L’occasion d’explorer l’approche française de la ville durable, et aussi – pour les quelques «cobatystes» genevois présents - de prendre une leçon en matière d’aménagement urbain, puisque l’exemple d’Eurallile, ce quartier ultra-moderne créé par de grands architectes (Rem Koolhaas, Jean Nouvel, Christian de Portzamparc, etc.) tout près du centre, avec une gare TGV en cœur urbain, a de quoi faire rêver dans une République où certains affirment que le CEVA ferait vibrer leur colline et où d’autres – parfois les mêmes – remettent en cause le développement de La Praille-Acacias-Vernets. O n sait que Cobaty International, asso- ciation de professionnels liés à la construction et au cadre de vie, est représenté dans la plupart des grandes villes françaises, ainsi qu’en Suisse (Genève, Lausanne et Neuchâtel) et dans de nom- breux pays européens. Les associations Cobaty de Flandre-Artois et de Côte d’Opale (pour sim- plifier, Lille et Dunkerque) ont organisé fin 2008 un Congrès qui a notam- ment permis au député- maire de Dunkerque, l’ancien ministre socia- liste Michel Delebarre, d’expliquer que le suc- cès du film de Dany Boon avait attiré des milliers de touristes… dans des régions où, comme à Dunkerque, personne ne parle le ch'ti. On sait que Bergues, lieu du tournage, est en Flandre et non en pays ch'ti (qui se trouve au sud de Lille, dans le bassin minier). «Mais, expliquait le brillant orateur, si des millions de touristes débarquent à Dunkerque et se croient à Venise, moi je me mettrai immédiatement à parler italien». Et l’ex-ministre socialiste, qui se décrit comme un «Flamand rose», de rap- peler que Dunkerquois et Vénitiens ont au moins en commun le culte du Carnaval. Le train dans la ville Autre bon orateur, Daniel Percheron, séna- teur et président du Conseil régional Nord- Pas de Calais, expliqua comment, lors du percement du Tunnel sous la Manche avec la perspective d’une ligne TGV Londres-Paris, le célèbre Pierre Mauroy, maire de Lille, avait obtenu qu’une gare TGV soit créée à Lille, alors capitale d’une vraie zone sinistrée où les disparitions successives des mines, de la sidérurgie et du textile avaient laissé des cen- taines de milliers de chômeurs et de vastes friches industrielles. Ni les technocrates pari- siens, ni les pontes de la SNCF ne voulaient en entendre parler: stopper un train à grande vitesse au cœur de nulle part, ou presque? Mais Pierre Mauroy avait l’oreille de Mitterrand, et l’opi- nâtreté des gens du Nord. Aujourd’hui, Euralille est un quartier modèle, avec une mixité d’activités (7000 emplois), des espaces verts, du logement de toute catégorie et une gare TGV qui se trouve à 10 minu- tes à pied de la Grand-Place. C’est ce que Daniel Percheron appelle «réenchanter la trame urbaine». Personne ne sem- ble souffrir de la moindre vibration, ni de glissements de terrain, ni d’in- vasion de voyous… En revanche, l’éco- nomie lilloise a pris un nouvel élan et la capitale flamande se prépare, entre autres, à servir de «base arrière» lors des Jeux olympiques de Londres. Le TGV est devenu un RER géant, qui met Paris et la City londonienne à portée des gens du Nord… et vice versa. Roland Castro pourfend la norme trop étroite Les débats du Congrès ont aussi permis d’entendre des architectes, des élus et des urbanistes exposer les grands projets de ville durable, comme cet écoquartier de Douai, qui accueillera une dizaine de milliers d’habitants d’ici 12 ans, et met en valeur les savoir-faire locaux. Le foncier (plus de 166 hectares) a été acquis par les pouvoirs publics, tout comme à Dunkerque, où un projet du même type a fait l’objet d’une mise au concours pour un partenariat public-privé (PPP). «Il y a une éducation des Roland Castro. Dunkerque: la mairie réquisitionne les terrains à l'abandon. Euralille: un nouveau volet est en développement. TIM TIM

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urbanisme

t o u t l ’ i m m o b i l i e r • n o 4 8 6 • 1 6 f é v r i e r 2 0 0 9

• Après un Congrès de Cobaty International à Lille et Dunkerque

Ville durable: l’autre succès des «Ch’tis»Voilà quelques semaines que le Cobaty International a tenu son 23e Congrès annuel dans la Région Nord-Pas de Calais. L’occasion d’explorer l’approche française de la ville durable, et aussi – pour les quelques «cobatystes» genevois présents - de prendre une leçon en matière d’aménagement urbain, puisque l’exemple d’Eurallile, ce quartier ultra-moderne créé par de grands architectes (Rem Koolhaas, Jean Nouvel, Christian de Portzamparc, etc.) tout près du centre, avec une gare TGV en cœur urbain, a de quoi faire rêver dans une République où certains affirment que le CEVA ferait vibrer leur colline et où d’autres – parfois les mêmes – remettent en cause le développement de La Praille-Acacias-Vernets.

O n sait que Cobaty International, asso-ciation de professionnels liés à la construction et au cadre de vie,

est représenté dans la plupart des grandes villes françaises, ainsi qu’en Suisse (Genève, Lausanne et Neuchâtel) et dans de nom-

breux pays européens. Les associations Cobaty de Flandre-Artois et de Côte d’Opale (pour sim-plifier, Lille et Dunkerque) ont organisé fin 2008 un Congrès qui a notam-ment permis au député-maire de Dunkerque, l’ancien ministre socia-liste Michel Delebarre, d’expliquer que le suc-cès du film de Dany

Boon avait attiré des milliers de touristes… dans des régions où, comme à Dunkerque, personne ne parle le ch'ti. On sait que Bergues, lieu du tournage, est en Flandre et non en pays ch'ti (qui se trouve au sud de Lille, dans le bassin minier). «Mais, expliquait le brillant orateur, si des millions de touristes débarquent à Dunkerque et se croient à Venise, moi je me mettrai immédiatement à parler italien». Et l’ex-ministre socialiste, qui se décrit comme un «Flamand rose», de rap-peler que Dunkerquois et Vénitiens ont au moins en commun le culte du Carnaval.

Le train dans la ville

Autre bon orateur, Daniel Percheron, séna-teur et président du Conseil régional Nord-Pas de Calais, expliqua comment, lors du percement du Tunnel sous la Manche avec la perspective d’une ligne TGV Londres-Paris, le célèbre Pierre Mauroy, maire de Lille, avait obtenu qu’une gare TGV soit créée à Lille, alors capitale d’une vraie zone sinistrée où les disparitions successives des mines, de la sidérurgie et du textile avaient laissé des cen-taines de milliers de chômeurs et de vastes friches industrielles. Ni les technocrates pari-siens, ni les pontes de la SNCF ne voulaient

en entendre parler: stopper un train à grande vitesse au cœur de nulle part, ou presque? Mais Pierre Mauroy avait l’oreille de Mitterrand, et l’opi-nâtreté des gens du Nord. Aujourd’hui, Euralille est un quartier modèle, avec une mixité d’activités (7000 emplois), des espaces verts, du logement de toute catégorie et une gare TGV qui se trouve à 10 minu-tes à pied de la Grand-Place. C’est ce que Daniel Percheron appelle «réenchanter la trame urbaine».Personne ne sem-ble souffrir de la moindre vibration, ni de glissements de terrain, ni d’in-vasion de voyous… En revanche, l’éco-nomie lilloise a pris un nouvel élan et la capitale flamande se prépare, entre autres, à servir de «base arrière» lors des Jeux olympiques de Londres. Le TGV est devenu un RER géant, qui met Paris et la City londonienne à portée des gens du Nord… et vice versa.

Roland Castro pourfend la norme trop étroite

Les débats du Congrès ont aussi permis d’entendre des architectes, des élus et

des urbanistes exposer les grands projets de ville durable, comme cet écoquartier de Douai, qui accueillera une dizaine de milliers d’habitants d’ici 12 ans, et met en valeur les savoir-faire locaux. Le foncier (plus de 166 hectares) a été acquis par les pouvoirs publics, tout comme à Dunkerque, où un projet du même type a fait l’objet d’une mise au concours pour un partenariat public-privé (PPP). «Il y a une éducation des

Roland Castro. Dunkerque: la mairie réquisitionne les terrains à l'abandon.

Euralille: un nouveau volet est en développement.

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Page 2: • Après un Congrès de Cobaty International à Lille et ......urbanisme t o u t l’ i m m o b i l i e r • n o 4 8 6 • 16 f é v r i e r 2 0 0 9 • Après un Congrès de Cobaty

élus qui reste à faire, en matière de den-sité», notait un architecte-urbaniste; voilà qui rejoint aussi une réalité genevoise. L’un des intervenants forts du débat fut évidemment Roland Castro, le célèbre architecte, ancien candidat communiste à la présidentielle, devenu urbaniste de François Mitterrand et… de Nicolas Sarkozy pour les nouveaux développements de la Défense. «Il faut rem-placer la logique de norme par une logique de projet», plaide celui qui considère que Le Corbusier était un «urbaniste médiocre, totalitaire, qui plaisait tant aux nazis qu’aux staliniens». Faisant face avec aplomb aux protestations, dans l’assistance, de quelques-uns de ses confrères étranglés d’indignation, Castro a poursuivi en mettant au pilori les nouvelles réglementations françaises qui imposent l’adaptation de tout logement social aux handicapés et aux personnes âgées. «Donc pour ces fonctionnaires qui ont besoin d’exister, un jeune couple, ce sont des pré-handicapés et de futurs vieillards. Et on construit en commençant par d’immen-ses WC au milieu du séjour, avec de grandes portes pour un accès facile. Le reste des pièces, on les met où on peut!».

Roland Castro se méfie aussi des normes d’économie d’énergie si elles empiètent sur la beauté architecturale: «Je préfère un bel immeuble à une bouteille thermos. L’urbanisme, c’est l’urbanité. C’est la tendres-se, la beauté. C’est cela qui doit être durable! Il ne faut pas de diktat des pouvoirs publics, ni trop d’egos d’architectes. Oui à l’économie d’énergie et oui à la densité, si elles respec-tent l’esprit des lieux, si elles aboutissent à créer du beau. Une ville durable, c’est avant tout une ville. Elle doit avoir la gueule d’une ville!». Le message était clair.Les débats portèrent – évidemment – sur les transports publics, à prévoir avant le développement urbain plutôt qu’après, sur la mixité sociale et générationnelle: en somme, l’écoquartier préfigure tout simplement ce que sera, ou ce que devrait être, la ville de demain.

Logement solidaire et savoir-faire local

Un entrepreneur nordiste, François Marty, présenta d’intéressantes réflexions de ter-rain, qui allaient à l’appui de la colère de

Roland Castro contre l’illusion normative. «Nous avons réalisé que nos logements sociaux ne correspondaient absolument pas aux demandes des occupants. Ainsi, pour un jeune couple, il est important de dis-poser d’un point d’eau et de toilettes à proximité de l’entrée, ainsi que d’un cellier. En arrivant avec les courses et les enfants, on évite de traverser l’appartement. Pour un couple âgé, deux chambres sont néces-saires: «Mamy ronfle», explique Papy. «Pas tant que lui», répond Mamy. Et ils souhai-tent disposer chacun d’une fenêtre sur les espaces publics, pour regarder «ce qui se passe dehors». Inutile de dire que le règle-ment prévoyait une seule chambre, avec une fenêtre donnant sur une cour pour éviter le bruit. «On s’en fiche du bruit, on entend mal!», fut la réponse des aînés. Le tout, raconté avec un authentique accent ch'ti, a séduit l’assemblée. Les députés présents furent bien obligés d’admettre que les normes étatiques ne correspondaient pas toujours à la réalité. Mais François Marty gardait encore deux «scuds»: «Dans le Boulonnais, il y a une tradition de l’argile. Or les matériaux locaux comme la terre crue ou le torchis déplaisent aux grands producteurs de béton, de ciment, de métal. Et donc, les normes de haute qualité environnementale n’agréent pas ces matériaux. Pour la terre crue, la norme date de la dernière Guerre, et provient d’une adaptation d’un règlement allemand!», tonna-t-il. Les élus présents souhaitèrent prudemment «davantage de lois-cadres et moins de lois émotionnelles figeant les détails». Quant à François Marty, qui ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin, il conclut par une salve contre les banques qui renâclaient à financer du logement «solidaire» économe en énergie. «Que les financiers se demandent ce que vaudront l’eau et l’électricité dans 30 ans, et ils verront que leur calcul d’aujourd’hui est faux». n

Th.O.

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