51364440 blyton enid histoires du sapin de noel

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  • 1

  • HISTOIREDU SAPIN DE NOL

    par Enid BLYTON

    TOUT prs de la chemine se dresse le sapin de Nol. On allume ses bougies et les enfants se rassemblent au pied de l'arbre. Sylvie, la plus grande, prend un beau livre de contes et commence lire haute voix...

    Des animaux qui parlent, des jouets qui partent l'aventure, des enfants dbrouillards et drles, tout un monde prend forme et vie sous les branches o tincellent boules et cheveux d'ange.

    Ah! Comme elles sont belles, les histoires du sapin de Nol!

    Ce livre porte le label MINIROSE, c'est--dire qu'il intresse les enfants ds qu'ils savent lire, et qu'il peut aussi bien leur tre lu haute voix.

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  • DU MME AUTEUR

    dans la mme srie

    dans la Bibliothque Rose

    1. Bonjour les Amis ! 2. Histoire de la lune bleue 3. Histoires de la boite de couleurs 4. Histoires de la cabane outils 5. Histoires de la maison de poupes6. Histoires de la pipe en terre 7. Histoires de la ruche miel 8. Histoires de la veille Horloge 9. Histoires des ciseaux d'argent 10. Histoires des quatre Saisons11. Histoires des trois loups de mer12. Histoires du bout du banc 13. Histoires du cheval bascule14. Histoires du coffre jouets15. Histoires du coin du feu 16. Histoires du fauteuil bascule 17. Histoires du grenier de grand-mre18. Histoires du marchand de sable 19. Histoires du sac malices20. Histoires du sapin de nol

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  • ENID BLYTON

    HISTOIRE DU

    SAPIN DE NOELILLUSTRATIONS DE PATRICE HARISPE

    HACHETTE

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  • TABLE

    PROLOGUE 5

    1. Le vieil ne gris 7

    2. Ne le dites personne 19

    3. Le gouter de pre Patapouf 34

    4. Le beau collier de grand-mre 48

    5. Mistigri, vaillant capitaine 61

    6. La cl du cacatos 76

    7. Les lunettes de Sophie 86

    8. Le mouchoir de Nicolas 94

    9. Une excursion au bord de la mer 110

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  • HISTOIRE DU

    SAPIN DE NOEL

    PROLOGUE

    Dpouill de ses jouets et de ses bonbons 9 le sapin de Nol se dresse toujours dans un coin de la salle de sjour. Il est encore vert et sent bon la fort. Son toile reste son sommet, trop haute pour que des petites mains avides aient pu s'en emparer, et quelques ampoules lectriques permettent encore de l'illuminer. Ce sont les enfants gui ont demand qu'il reste l, bien que Nol soit pass depuis plusieurs jours.

    Il y a l une joyeuse bande, tous les enfants de la Camille runis pour les vacances : Alain, Stphanie, Nathalie, Bruno, Armelle, Nicolas, Sylvie, Gilles. Et c'est leur grand plaisir, quand la nuit tombe, de s'asseoir au pied de l9arbre pour lire un beau livre d'histoires, un des cadeaux de Nol les plus apprcis.

    C'est Sylvie, lane, qui fait la lecture, si savante que les mots les plus difficiles ne rembarrassent pas* Et les enfants coutent avec- ravissement les aventures d'autres enfants qui parfois portent leurs noms. Ils apprennent que leurs jouets Raniment quand leurs petits matres dorment ou sont absents et que les animaux parlent entre eux. Tout un monde secret leur est ainsi rvl.

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  • CHAPITRE PREMIERLe vieil ne gris

    Grison, le vieil ne gris, appartenait au fermier Barnab et toujours, depuis qu'il tait un petit non vif et turbulent, il avait vcu dans sa ferme. Cela faisait de longues, longues annes.

    De bonne heure, tons les matins, le fermier lui mettait sur le dos des courroies auxquelles il attachait deux bidons de lait. Puis Barnab et Prison allaient de porte en

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  • porte dans le village. Le fermier tirait la sonnette, une mnagre accourait et tendait une cruche o Barnab versait un ou deux litres de lait, selon ce qu'on lui demandait.

    Mais voil que maintenant Grison se faisait vieux. C'tait avec peine qu'il tirait la charrette remplie de choux, de pommes, de corbeilles d'ufs, de mottes de beurre que le fermier conduisait la ville les jours de march. Ce qu'il dlestait le plus c'tait de transporter sur son dos Onsime, le voisin de Barnab, qui rempruntait de temps en temps quand il avait faire une course un peu longue.

    La charrette tait lourde, Onsime aussi... Les bidons pesaient beaucoup moins, aussi Grison aimait-il bien mieux faire sa tourne de lait avec son matre. Mais son dos tait vieux et fatigu et il ne pouvait s'empcher de protester dans son langage, c'est--dire par de timides hi-han, lorsque le fermier sortait la charrette du hangar. Sa tristesse redoublait quand Margot, la femme de Barnab, apparaissait drape dans son beau

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  • chle noir. Elle tait si grosse, Margot, la femme du fermier ! Le march se trouvait trs loin. L't, la chaleur brlait l'chin de Grison et l'hiver la neige le glaait. Quelquefois Grison arc-bout sur ses quatre pattes, refusait d'avancer. Alors le fermier se mettait en colre.

    Allons, Grison, obis, criait-il. Si tu n'es plus bon rien, je serai oblig de te vendre.

    Il est vieux, fit remarquer un jour Toinette, la jeune servante. Il est plus g que moi qui ai dj dix-sept ans.

    S'il ne peut plus travailler, il faudra que je le vende pour en acheter un autre, dclara le fermier. Onsime m'a offert de m'en dbarrasser. Il n'a pas de charrette tirer, lui !

    En entendant ces paroles, Grison eut un frisson. Il aimait la ferme o il avait vcu toute sa vie, il aimait son matre bien que Barnab ft souvent impatient et colreux. Il ne voulait pas appartenir Onsime. Son ami Fido, le chien d'Onsime, lui avait

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  • confi que son matre tait avare et dur. Si tu voyais la pte qu'il me donne ! Un

    peu de pain tremp dans l'eau. Pas un brin de viande sur les os qu'il me jette ! Et jamais une caresse.

    Non, Grison n'avait aucune envie d'appartenir Onsime !

    Un matin, le fermier eut si mal au dos qu'il ne put se lever.

    Ae ! Ae ! Ae ! Que j'ai mal ! Il faut que je reste au lit, annona-t-il sa femme. Je me suis trop fatigu hier en bchant le

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  • carr de pommes de terre. J'ai besoin de quelques jours de repos.

    Et la tourne du lait ? se lamenta la grosse Margot. Que feront les gens s'ils n'ont pas de lait mettre dans leur caf ? J'ai trop de travail pour y aller moi-mme, et Toinette doit distribuer le grain aux poules et conduire les vaches au pturage.

    Le lait sera perdu, gmit le fermier. Nous n'avons personne envoyer. Onsime lui-mme ne connat pas nos clients.

    A la grande surprise de Grisou, on ne vint

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  • pas le chercher ce matin-l pour la tourne du lait. Toinette, qui ignorait que Barnab tait malade, avait fix les bidons au dos de Grison et celui-ci attendait devant la barrire l'arrive de son matre.

    Comme il ne venait pas, Grison comprit que quelque chose d'anormal se passait. Aprs quelque hsitation, il dcida de partir seul. Pourquoi ne ferait-il pas la tourne ? Ne connaissait-il pas tous les clients ? Et tous connaissaient Grison. Ils seraient contents de prendre le lait, mme en l'absence du fermier. Et aucun n'oublierait de payer, pensa le vieil ne gris.

    Il trotta donc jusqu'au village et, pour commencer, il s'arrta devant la maison de Mme Blanche. Il frappa trs fort le sol avec son sabot. La petite Suzon l'aperut par la fentre et avertit sa mre.

    C'est Grison avec les bidons de lait. Tout seul! Qu'il est intelligent ! Viens vite, maman!

    La mre ouvrit la porte, son pot lait la main.

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  • Hi-han ! dit Grison, ce qui signifiait : Servez-vous !

    Mme Blanche remplit son pot et mit quelques pices de monnaie dans le petit sac que Grison portait au cou. L'ne repartit et s'arrta devant une autre porte. Cette fois, il eut beau taper du pied, personne ne vint. Grison avait vu son matre sonner pour appeler ses clients. Il prit le cordon de sonnette entre ses dents et tira. Drelin ! Drelin ! M. Philibert ouvrit la porte et lui aussi fut surpris de voir Grison tout seul.

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  • Hi-han ! dit poliment l'ne en guise de bonjour.

    M. Philibert se servit, paya, et le vieil ne reprit sa route. Plusieurs enfants s'taient rassembls autour de lui, tous connaissaient Grison et l'admiraient de faire tout seul la tourne du lait.

    Qu'il est malin ! s'criaient-ils en caressant le vieux dos un peu pel. Chez qui vas-tu maintenant, Grison ?

    Grison suivait son chemin sans la moindre hsitation. Il allait chez Mme Lucie. Il frappa

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  • trs fort du pied. La vieille femme arriva avec son pot lait.

    Grison est seul, expliqurent les enfants. Il connat les clients de son matre.

    - J'ai toujours dit que c'tait le plus intelligent des nes ! dclara la vieille femme.

    Elle prit le lait dont elle avait besoin, mit l'argent dans le sac. Puis elle donna Grison une grosse carotte d'un beau jaune.

    Hi-han ! dit-il pour la remercier, et il s'loigna en croquant la succulente carotte.

    Grison servit tous les clients de son matre et, quand il eut fini sa tourne, les bidons taient vides et le sac plein de pices de monnaie. Il avait reu une autre carotte et deux morceaux de sucre. Il trotta allgrement jusqu' la ferme et s'approcha de la porte de la cuisine afin que la grosse Margot pt le dbarrasser des bidons.

    Mais Margot et Toinette s'taient aperues de la disparition de Grison. Elles l'avaient cherch partout sans le trouver, et

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  • en l'apprenant, le fermier s'tait mis en colre.

    II s'est promen dans les champs et srement il a renvers le lait ! gmissait Barnab.

    Mais un hi-han sonore retentit. Margot l'entendit et courut ouvrir la porte. Elle s'aperut que les bidons taient vides et le sac plein. Elle avait peine en croire ses yeux. Elle dtacha les bidons, caressa Grison, lui donna un croton de pain et monta la chambre de son mari avec le sac rebondi.

    Ton vieil ne gris que tu croyais bon rien ! s'cria-t-elle. Il a fait la tourne, il a vendu le lait et il rapporte l'argent. On n'a jamais vu un ne si intelligent. Il vaut son pesant d'or !

    Le fermier resta bahi. Il vida le sac sur son lit et compta les pices de monnaie. Il y en avait plus que d'habitude.

    Margot, dit-il, Grison est un brave animal. Il est vieux, il ne peut plus tirer la charrette, mais c'est un fidle serviteur. Pour

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  • rien au monde, je ne le vendrais Onsime!

    Margot descendit et mit les bras autour du cou de Grison.

    Tu resteras chez noua, lui promit-elle. Tu es le meilleur des nes, ton matre en est persuad.

    Hi-han ! approuva Grison au comble du bonheur.

    A partir de ce jour, tous les matins, il fit seul la distribution du lait, et on l'aimait tant que le nombre de ses clients augmenta.

    Pour tirer la lourde charrette, le fermier

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  • acheta un jeune cheval nomm Popaul avec qui Grison s'entend trs bien; ils ont de longues conversations le soir, dans l'curie. Les jours de march, Popaul raconte tout ce qu'il a vu en ville.

    Grison est trs vieux maintenant, il ne peut mme plus porter les bidons de lait, mais le fermier a tenu sa promesse, il le garde chez lui. Grison passe ses journes dans le pr o les herbes ont si bon got. Il est si heureux que parfois il gambade et se roule par terre, comme au temps lointain o il tait un tout petit non.

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  • CHAPITRE II

    Ne le dites personne

    GILLES avait un costume neuf et des souliers neufs. Des souliers noirs et un costume bleu marine que sa mre, Mme Dubois, venait d'acheter. Gilles tait trs fier du pantalon long qui lui donnait l'air d'un jeune homme, bien qu'il n'et que neuf ans. Quand pourrai-je le mettre pour la premire fois ? demanda le petit garon sa mre en sortant du magasin, le carton sous le bras.

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  • Demain, rpondit-elle. C'est ta fte, ta marraine vient goter et il faut que tu sois beau.

    En effet, le lendemain aprs le djeuner, Gilles se lava les mains avec soin et brossa ses cheveux. Puis il revtit le costume neuf, il noua sa cravate, se chaussa de ses souliers neufs et se contempla la glace, ravi de son lgance !

    Maman, me permets-tu de mettre ma montre aujourd'hui puisque c'est ma fte ? demanda-t-il.

    Son oncle Jean lui avait donn pour Nol une montre en argent avec un bracelet de cuir. Elle tait si belle que Gilles n'avait pas encore os s'en servir. Mais c'tait exactement ce qu'il fallait pour complter le costume neuf.

    II me semble que le bracelet ne ferme pas bien, fit remarquer sa mre. Je le porterai demain chez le bijoutier. Il vaudrait peut-tre mieux que tu ne le mettes pas. Si tu allais perdre ta montre !

    Je ferai trs attention, maman, pro-

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  • mit Gilles. A quelle heure ma marraine viendra-t-elle ?

    A trois heures et demie. J'irai la chercher la gare, ce n'est pas la peine que tu viennes, car j'ai des courses faire avant l'arrive du train. En attendant, tu peux aller jusqu' la plage, mais rentre avant quatre heures et ne te salis pas.

    N'aie pas peur, maman, rpondit Gilles. Je suis bien trop content d'avoir un si beau costume !

    Gilles habitait prs de la mer et il aimait voir les vagues se briser sur le sable. Il se promena gravement le long de la plage, en admirant de temps en temps sa belle montre d'argent. En temps ordinaire, il aimait patauger dans l'eau ou construire des chteaux forts qui ne tarderaient pas s'crouler. Il n'avait pas peur d'habitude de se mouiller et de se salir, mais ce jour-l n'tait pas un jour comme les autres.

    Malgr le beau temps, les promeneurs taient rares. Seuls quelques enfants trs jeunes jouaient au ballon. La mare qui tait

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  • haute commenait se retirer. Au moment o Gilles passait, une petite fille de trois ans qui s'tait aventure un peu trop loin tomba et fut emporte par une vague.

    Au secours ! crirent les autres enfants affols. Josette va se noyer ! Au secours !

    Gilles s'lana vers la petite fille qui cherchait se relever sans y parvenir. Ballotte par les vagues, elle s'loignait dj du rivage. Les quelques personnes qui se promenaient sur la digue entendraient-elles temps les appels ? Non, sans doute.

    Gilles savait nager, il avait mme eu un

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  • prix de natation. Il oublia son costume neuf, ses souliers neufs, sa belle montre. Sans rflchir, il se jeta dans l'eau, atteignit la petite Josette, la saisit et la ramena vers le rivage. Ce n'tait pas facile tant elle se dbattait. Enfin ils furent tous deux sur la plage au milieu des autres enfants qui poussaient des cris. L'un d'eux remarqua que Gilles ruisselait. Il le connaissait car ils allaient tous deux la mme cole.

    Comment feras-tu pour te scher, Gilles? demanda-t-il.

    - Ne le dis personne , supplia Gilles qui se secouait la manire d'un chien et enlevait sa veste pour la tordre. C'est mon costume neuf. Que va dire maman ? Il faut que je me sche avant son retour,

    Attirs par les cris, les promeneurs de la digue avaient accouru ; ils s'empressaient autour de la petite fille. Gilles en profita pour s'esquiver. Un homme essaya de le retenir, Gilles se dgagea.

    Ne le dites personne, supplia-t-il, et il s'enfuit.

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  • II entra dans le jardin par la petite porte de ct, car il n'tait pas fier de lui. Le silence rgnait. Sa mre tait alle attendre marraine la gare. Tant mieux!

    Une petite voisine, perche sur une brouette, le vit par-dessus la haie de trones.

    Tu es tout mouill! s'cria-t-elle. Ta maman te grondera.

    - Ne le dis personne ! rpta Gilles.Je vais essayer de me scher avant le retour

    de maman. II entra dans la maison et monta en courant

    sa chambre. Il enleva ses vtements tremps, les tordit au-dessus du lavabo pour en faire tomber l'eau. Et soudain il sursauta. Le bracelet de cuir avait gliss de son poignet et il avait perdu sa belle montre en argent !

    Elle est tombe dans la mer pendant que je nageais, se dit-il. Quel malheur! J'tais si content d'avoir une montre !

    Mais Gilles n'avait pas le temps de s'apitoyer sur son triste sort. Il devait faire

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  • scher ses vtements avant le retour de sa mre.

    Il enfila son peignoir de bain et descendit la cuisine. Il tala son costume devant la cuisinire qui tait allume. Combien de temps faudrait-il pour le scher ? Pourvu que ce ne soit pas trop long !

    Sa mre alla attendre la marraine la gare et, pour jouir du beau temps, toutes les deux firent un tour sur la digue. Des groupes y parlaient avec animation. Il n'tait question que d'un courageux garon qui s'tait jet l'eau pour sauver une petite fille. Mais personne ne connaissait

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  • son nom. Les camarades de Josette le savaient, bien sr, mais ils gardaient le silence puisque Gilles les avait supplis de ne rien dire.La mre et la marraine de Gilles se promenrent sur la digue puis revinrent la maison l'heure du goter.Que faisait Gilles? Son costume tait presque sec et il l'avait remis, mais la veste

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  • et le pantalon taient chiffonns. Ne pouvant enfiler ses souliers encore tremps, Gilles avait d reprendre ses vieilles chaussures. Il ne ressemblait plus au petit garon tir quatre pingles qui avait quitt la maison deux heures plus tt, mais c'tait le mieux qu'il pouvait faire. Il esprait, sans trop y croire, que sa mre ne s'apercevrait de rien.

    Marraine fut contente de le revoir et le trouva grandi. Mais Mme Dubois, ds le premier regard, fut consterne. Comment

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  • Gilles avait-il pu salir ainsi et chiffonner son beau costume neuf ? Qu'il tait peu soigneux ! Gilles lut son mcontentement sur son visage et eut envie de pleurer. Pourtant elle attendait pour le gronder qu'ils fussent seuls.

    Fais voir ta marraine la belle montre que ton oncle Jean ta donne, proposa-t-elle. Pendant ce temps, je vais prparer le chocolat,

    Pauvre Gilles ! Il devint tout rouge et ne sut que dire.

    Je l'ai perdue, avoua-t-il sa marraine,28

  • Ce n'est pas je l'ai perdue cet aprs midi. Ce n'est pas ma faute !

    Marraine s'tonna de l'attitude de II tait si rouge, il avait l'air si malheureux et son costume tait si froiss ! Pour le mettre son aise, elle lui raconta la promenade sur la digue. Figure-toi, Gilles, dit-elle, que tout le monde parlait d'un garon courageux qui s'est jet la BOBT pour sauver une petite fille en danger de se noyer.

    Oh ! murmura Gilles en rougissant de plus belle.

    Un vrai petit hros reprit marraine, Les parents de la petite fille voudraient bien le remercier, mais personne ne sait son nom. Il s'est enfui tout de suite. Je me demande pourquoi.

    Oh ! rpta Gilles, maintenant rouge comme une crevisse.

    Il aurait voulu pouvoir se cacher dans un trou de souris. Sa mre qui le regardait Rapprocha soudain de lui, tta va veste et la trouva humide.

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  • Gilles! s'cria-t-elle. C'est toi qui t'es jet l'eau pour sauver la petite fille, n'est-ce pas ?

    - Oui, maman, avoua Gilles au supplice. J'ai oubli que je portais mon costume neuf. Je n'ai pens qu' la petite fille. Et j'ai perdu ma belle montre. J'ai tant de chagrin. Mais les autres enfants taient trop petits pour savoir nager. J'tais bien oblig d'aller au secours de Josette. J'ai mis mon costume devant le feu, il n'est pas encore tout fait sec.

    - Oh ! Gilles ! murmura sa mre.Et elle le serra dans ses bras l'touffer. Ton costume, ta montre, quelle

    importance ont-ils ? Tu as sauv une petite fille ! Je suis fire de toi, et ton papa sera heureux d'avoir un garon si courageux !

    Gilles fut surpris et content. Il enleva son costume humide et remit son pull-over et sa culotte de tous les jours. Aprs le bon goter que sa mre avait prpar en l'honneur de marraine, il se sentit heureux et consol.

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  • Au milieu se dressait une pice monte quatre tages.

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  • Chose extraordinaire, personne ne Pavait grond pour avoir sali son costume neuf et perdu sa montre ! De plus, le lendemain l'cole, il fit figure de hros. Le matre le flicita, ses camarades l'applaudirent.

    Et les parents de la petite Josette ? Ils lui apportrent une montre en or avec un bracelet de cuir qui fermait bien et ne glisserait pas de son poignet. Gilles tait fou de joie. Des garons de son ge qu'il connaissait, aucun ne possdait de montre en or !

    Tu l'as bien mrite, affirmrent son pre et sa mre.

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  • Je ne voulais rien dire, expliqua Gilles, cause de mon costume neuf. A prsent tout le monde connat mon secret et, au lieu de me gronder, on me flicite.

    Gilles m'a montr son bracelet-montre, Jamais je n'en ai vu d'aussi beau !

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  • CHAPITRE III

    Le Gouter du Pre patapouf

    DE SON VRAI NOM, le pre Patapouf s'appelait Boniface, mais on l'avait surnomm Patapouf parce qu'il tait gros, lourd, maladroit. Il ne s'en vexait pas. C'tait le meilleur homme du monde et il avait pour plus grand plaisir d'inviter ses amis de magnifiques goters.

    Et jamais personne ne refusait l'invitation. Il couvrait sa table d'une quantit de

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  • bonnes choses manger et il inventait les jeux les plus amusants qu'on puisse imaginer.

    Mais Patapouf se montrait difficile sur le choix de ses invits. Il ne voulait chez lui que des gens bien levs, des gens qui disaient toujours la vrit, des gens qui ne se jetaient pas sur les gteaux comme des gloutons. Si quelqu'un n'assistait pas un de ses goters, tout le monde savait qu'il avait de gros dfauts.

    Un jour, Casimir, un garnement du village

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  • qui ne pensait qu' jouer de mauvais tours, descendait la rue comme un fou. En coup de vent, il tourna le coin. Boum ! Il se heurta si violemment Patapouf que tous les deux tombrent la renverse. Patapouf s'assit dans une flaque d'eau. Casimir se tapa la tte contre un mur.

    Pourquoi m'as-tu bouscul? demanda Patapouf en colre.

    a alors ! C'est un peu fort ! dit Casimir

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  • mchamment. C'est vous qui m'avez heurt.

    Tu ne peux donc pas regarder o tu marches ? hurla Patapouf.

    Je regardais, mais vous vous tes jet sur moi sans crier gare, rpliqua le mauvais garnement.

    Ne dis pas de btises, riposta Patapouf en s'pongeant avec son mouchoir.

    - Je ne dis que la vrit ! Non Si ! Non. Je ne t'inviterai pas au goterque je vais donner.- J'irai quand mme et je mangerai vos

    meilleurs gteaux ! dclara Casimir. Je te dis que non ! Je vous dis que si ! Allons, circulez ! ordonna Flip, le

    gendarme du village. Plus de querelle ! Ne voyez-vous pas que vous bloquez le pas-

    Patapouf et Casimir furent donc obligs de poursuivre leur route. Patapouf tait

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  • bien dcid ne pas inviter Casimir. Casimir tait bien dcid assister au goter et se rgaler aux dpens de Patapouf,

    Patapouf envoya ses invitations. Figurez-vous que cette fois il invitait tous les habitants du village, l'exception de Casimir, bien entendu. Celui-ci dclarait qui voulait l'entendre que cela lui tait bien gal, mais, rus comme un renard, il avait dj dress son plan.

    Ce serait un beau goter ! Patapouf avait achet des disques nouveaux. On chanterait et on danserait. Il avait dispos sur la table

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  • quatre grands plats, le premier contenant des gteaux au chocolat, le second des choux la crme, le troisime des clairs au caf, le quatrime d'normes meringues blanches. Au milieu, se dressait une pice monte quatre tages avec tout en haut un lapin en sucre ros.

    Les gens avaient sorti des armoires les vtements des dimanches. Seul Casimir garda son vieux pull-over et son pantalon rapic. Mais il n'en paraissait pas chagrin. Il allait et venait comme d'habitude en fredonnant ou en sifflant. On et dit le voir que les bons goters n'avaient aucun attrait pour lui.

    A quatre heures, vieillards, hommes, femmes et enfants se dirigrent vers l'habitation de Patapouf. Deux personnes seulement ne se joignirent pas aux autres : Casimir, bien entendu, et Flip le gendarme qui avait garder les maisons dsertes ; le bruit du goter de Patapouf s'tait rpandu au loin et des voleurs pourraient profiter de l'occasion.

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  • Patapouf fit jouer un de ses nouveaux disques. Ses invits e mirent chanter et danser. Quel vacarme! Tous taient contents et s'en donnaient cur joie. Au fond de la pice, ils avaient admir la table mise, les grands plats de gteaux au chocolat, de choux la crme? d'clairs au caf, et surtout le lapin qui dcorait la pice monte. Jamais fte n'avait t aussi russie.

    Au moment o les danseurs commenaient avoir faim et pensaient qu'il tait temps de mettre fin aux danses pour se rgaler des bonnes choses prpares par le matre de maison, on frappa la porte.

    Pan ! Pan ! Qui donc peut venir ? demanda

    Patapouf tonn.Il ouvrit et vit un gendarme en uniforme

    bleu, le casque sur la tte, l'air svre.Bonsoir, Flip, s'cria Patapouf de plus en

    plus surpris. Que dsirez - vous ? Vous rendez-vous compte du tapage

    que vous faites ? interrogea Flip d'une voix bourrue.

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  • Noua dansons et nous chantons, c'est tout, rpondit Patapouf. Nous ne faisons pas beaucoup de bruit- Flip.

    Moi je dis que si, insista Flip. Je vous entendais de l'autre bout du village. Dans la maison, vous ne vous en rendez pas compte, mais d'ici c'est assourdissant. Si vous continuez, personne ne pourra dormir.

    - Mais personne n'a envie de dormir, protesta Patapouf. Tout le monde est chez moi.

    Ne discutez pas, trancha le gendarme d'une voix si irrite que Patapouf sursauta.

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  • Je vous dis que du dehors le bruit est assourdissant.

    Je vais sortir pour me rendre compte , proposa Patapouf, et il se retourna pour appeler ses invits. Le gendarme prtend que nous faisons trop de tapage et qu'on nous entend jusqu'au bout du village. Je vais sortir pour voir s'il dt vrai.

    Venez tous, ordonna le gendarme. Venez couter! Allons, dpchez-vous de sortir !

    Flip entra dans la maison et poussa tout le monde dehors. Il ferma la porte et enleva son casque. Et ce n'tait pas Flip. C'tait ce garnement d Casimir dguis en gendarme pour jouer un mauvais tour Patapouf.

    Il vida les plats de gteaux dans son casque et dans un sac qu'il avait apport, et prit le lapin en sucre ros qui ornait la pice monte. Puis il s'esquiva par la porte de la cuisine, traversa le potager et retourna chez lui en courant. Aprs tout, il avait pris part au goter!

    Dehors les invits se rassemblrent et

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  • tendirent l'oreille pour entendre le vacarme dont se plaignait le gendarme. Ils coutrent pendant cinq bonnes minutes.

    Je n'entends absolument rien, dclara Mathieu le ptissier qui avait vendu les gteaux et la pice monte.

    Pas le moindre bruit, renchrit Biaise, l'picier.

    Nous nous amusons bien sagement, fit remarquer Patapouf. Le gendarme ne sait pas ce qu'il dit. On pourrait croire qu'il n'y a personne dans la maison.

    Mais il n'y a personne ! s'cria Gustave, le matre d'cole, en clatant de rire.

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  • Plus personne, except Flip. Noua sommes tous sortis pour entendre le bruit que nous faisions l'intrieur. Ah ! Ah ! Ah !

    Tous s'esclaffrent. C'tait si drle ! Ils taient sortis pour entendre le vacarme qu'ils faisaient l'intrieur. Quelle sottise !

    Rentrons, proposa Patapouf. Nous dirons ce niais de gendarme que nous n'avons rien entendu.

    Ils rentrrent donc... mais o tait Flip ? Nulle part. Et o taient les dlicieux gteaux qui remplissaient tout l'heure les plats ? I1& avaient disparu. Et le beau lapin en gure ros ? Il ne dcorait plus la pice monte. La porte de la cuisine tait grande ouverte !

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  • Ce n'tait pas Flip, c'tait Casimir! s'cria soudain Patapouf. Oui, c'tait lui ! Je pensais bien que je ne reconnaissais pas la voix de Flip. Il est venu mon goter comme il l'avait affirm. Il a pris les gteaux et mon beau lapin en sucre ros !

    Et parce que nous avons t assez stupides pour obir ses ordres et quitter la maison afin d'couter le bruit que nous faisions l'intrieur ! gmit Biaise. Je vais courir chez lui, je lui dirai que nous avons dcouvert ce mauvais tour qu'il nous a jou c'tait vraiment trs drle, vous savez , je lui dirai qu'il peut goter avec nous s'il rapporte les gteaux et le lapin en sucre ros.

    - C'est cela, approuva Patapouf. Il est trop malin pour moi. J'aime mieux l'avoir pour ami que pour ennemi. Qui sait ce qu'il inventerait encore !

    Biaise courut vers la maisonnette de Casimir. Casimir avait sur ses genoux le casque plein de gteaux et se rgalait d'un clair au caf.

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  • Arrte! cria Biaise. Je viens t'inviter notre goter. Tu nous as fait une farce trs drle. Mais le pauvre Patapouf se dsespre de n'avoir plus de gteaux nous offrir! Et il tait si fier de son lapin en sucre ros !

    Bon, rpondit Casimir en se levant. J'irai et je rapporterai tout ce que j'ai pris.

    Casimir retourna donc chez Patapouf avec Biaise. Les autres l'accueillirent en riant, le traitrent de mauvais garnement. Patapouf dclara qu'il lui pardonnait si Casimir promettait de ne plus faire de farces personne.

    On remit un disque sur le tourne-disques, on plaa le lapin ros tout en haut de la pice monte et on attaqua les gteaux.

    C'tait un magnifique goter, dit Casimir en prenant cong de Patapouf. Dommage que les meringues aient t un peu crases.

    A qui la faute, chenapan ? rpliqua Patapouf en riant.

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  • Et depuis, Casimir ne joue plus de mauvais tour et Patapouf l'invite tous ses goters.

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  • CHAPITRE IV

    Le beau collier de grand-mre

    GRAND-MRE, papa, maman, Florence et Stphane passaient leurs vacances au bord de la mer. Le soleil brillait sur l'eau bleue. Quel dlice de marcher sur le sable fin !

    Grand-mre tait trs heureuse. Elle se plaisait vivre avec ceux qu'elle aimait. Florence et Stphane l'entouraient de prvenances, car c'tait la vieille dame la plus

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  • charmante que l'on puisse imaginer. Elle avait un grand sac d'o elle sortait sans cesse des bonbons, des gteaux secs, des petits jouets ; elle tait toujours prte couter les bavardages de ses petits-enfants, et, chaque fois qu'ils le lui demandaient, elle leur racontait des histoires amusantes ou voquait ses souvenirs d'enfance.

    Grand-mre avait un beau collier qu'elle portait presque toujours son cou. Des boules de cristal transparent alternaient avec des turquoises de la couleur des vagues. Sa mre le lui avait donn pour son vingtime anniversaire et elle y tenait beaucoup. Un jour, elle l'avait prt Florence qui avait le rle de la princesse dans une pice joue son cole, et Florence s'tait pavane avec fiert.

    Et voil que, pendant ces vacances, grand-mre perdit son collier. Elle ne pouvait imaginer quand et comment. Elle leva la main pour le tapoter, ainsi qu'elle le faisait souvent, et il n'tait plus l.

    Quel malheur ! s'cria-t-elle. J'ai perdu

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  • mon collier ! Florence ! Stphane ! Aidez-moi chercher mon joli collier!

    Florence et Stphane cherchrent partout dans la maison mais le collier restait introuvable.

    Grand-mre, le fermoir d s'ouvrir et le collier s'est dtach pendant que nous nous promenions en barque ce matin, dclara Stphane. Te rappelles-tu, j'ai entendu un petit plouf, j'ai cru que mon canif tombait dans l'eau, ce devait tre ton collier puisque plus tard j'ai retrouv mon canif au fond de ma poche.

    S'il est au fond de la mer, je ne le reverrai plus, c'est fini, gmit la pauvre grand-mre. C'est un grand chagrin pour moi !

    Grand-mre avait en effet l'air d'tre trs malheureuse. Florence et Stphane partagrent sa peine. Ils" savaient que c'est trs pnible de perdre un objet auquel on tient. Un jour, Stphane avait perdu un stylo bille bleu dont il tait trs fier et, une fois, Florence avait oubli dans un jardin public une

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  • jolie poupe blonde. Tous les deux avaient t trs affligs.

    Papa et maman apprirent avec tristesse la perte du collier.

    Tu l'avais quand nous sommes monts dans la barque ce matin avec les enfants, fit remarquer maman. Je l'ai vu tinceler au soleil. Il a d tomber quand tu t'es penche pour regarder le banc de sardines.

    C'est probable, approuva grand-mre. Je ne le retrouverai pas. Il faut que je m'habitue cette ide.

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  • L'aprs-midi, les deux enfants avaient projet d'aller goter avec leur mre sur une plage voisine, dans une ptisserie rpute pour ses glaces, tandis que leur pre jouerait au golf et que grand-mre resterait la maison pour faire sa correspondance. Mais ils n'eurent plus envie de se rgaler de bonnes choses alors que leur grand-mre tait si triste.

    Remettons le goter demain, proposa Stphane Florence. Je sais ce que nous allons faire ; nous prendrons le grand filet et nous irons pcher des crevettes pour grand-mre. Tu sais qu'elle les aime beaucoup. Nous les ferons cuire pour le dner et, pendant un moment, elle oubliera la perte de son collier.

    C'est une bonne ide, dclara Florence. Je vais chercher le filet. Je sais o il est.

    Stphane fit part de son projet sa mre. Elle flicita ses enfants de leur gentillesse.

    Si vous partez seuls, je pourrai tenir compagnie votre grand-mre et les crevettes

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  • lui feront srement grand plaisir. Florence et Stphane s'en allrent en emportant le filet. La mare montait.

    Elle ramnera les crevettes, fit remarquer Stphane. J'espre que nous en attraperons beaucoup.

    Ils enlevrent leurs sandales et descendirent au bord de l'eau. Les pcheurs taient nombreux. Ils choisirent un endroit plus

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  • solitaire. Stphane qui portait le filet le tendit sa sur.

    Commence, Florence, dit-il. Je tiendrai le panier.

    Florence promena le filet dans l'eau. Des petites vagues dansaient autour de ses mollets, elles taient chaudes et la chatouillaient gentiment comme si elles taient contentes de jouer avec une petite fille. Florence promena le filet sur le sable. Qu'y trouverait-elle tout l'heure ?

    Regardons ! s'cria Stphane au bout d'un moment.

    Florence souleva le filet. Oh ! Il est plein ! constata Stphane

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  • enchant. Tu as attrap beaucoup de crevettes, Florence. Elles voudraient bien retourner dans l'eau. Mettons-les dans le panier.

    C'est ce qu'ils firent. Ils en comptrent sept, si grosses qu'on aurait pu les prendre pour des langoustines.

    A ton tour, Stphane, dit Florence.Elle lui donna le filet et prit le panier.

    Stphane poussa le filet sous l'eau. C'est trs amusant la pche aux crevettes. Il esprait en attraper autant que Florence.

    Voyons ce que j'ai pris, annona-t-il enfin.

    Il souleva le filet mais, chose presque incroyable, il n'y avait l'intrieur qu'un tout petit crabe vert. Pas une seule crevette ! Quelle dception !

    Essaie encore, Stphane, proposa Florence.

    Stphane secoua la tte.Non, dit-il, c'est ton tour, Florence, Tout

    l'heure, je reprendrai le filet, Florence fit un nouvel essai et, quand elle

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  • souleva le filet, elle y trouva quatorze crevettes. Toutes trs grosses. Elle pouvait peine en croire ses yeux.

    J'ai vraiment de la chance, fit-elle remarquer en mettant les crevettes dans le panier. A toi, Stphane.

    Pauvre Stphane! Malgr ses efforts, il n'attrapa pas une seule crevette, pas mme un crabe cette fois, seulement une touffe d'algues. Il en avait les larmes aux yeux. Quelle tait la cause de son chec ?

    Tu enfonces peut-tre trop brusquement

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  • le filet dans le sable et tu fais peur aux crevettes qui se sauvent sans entrer dans le filet, expliqua Florence. C'est moi, maintenant. Cette fois, je ne prendrai rien sans doute.

    Mais la chance favorisait Florence cet aprs-midi-l. Elle attrapa en tout quarante-trois crevettes, alors que le pauvre Stphane ne pouvait en prendre une seule. Mais ce fut tout de mme lui qui eut la plus belle capture.

    Avant de retourner la maison, il fit une dernire tentative. Quand il souleva le filet dans l'espoir de trouver une crevette l'intrieur, il vit quelque chose qui tincelait. Que croyez-vous qu'il avait attrap ? Devinez.

    n'avait attrap le beau collier de grand-mre. Qu'en pensez-vous ? La mare l'avait rapport et il tait moiti enterr dans le sable au bord des vagues. Stphane avait enfonc son filet et le collier avait gliss dedans.

    Florence! Florence! Regarde, j'ai

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  • retrouv le collier de grand-mre ! cria Stphane au comble de la joie. Regarde !

    Stphane ! Quel bonheur ! Et quelle surprise pour grand-mre, cria Florence son tour. Vite ! Allons le montrer maman,

    Ils retournrent en courant la maison. Leur mre fut ravie.

    Je sais ce que nous allons faire, dclara-t-elle. Je vais faire cuire les crevettes pour le dner et je mettrai sur la table deux plats recouverts d'une serviette. L'un contiendra

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  • les crevettes, l'autre le collier lav et essuy. Nous dirons grand-mre que vous avez pch cet aprs-midi son intention. Elle sera bien contente !

    A l'heure du dner, deux plats couverts d'une serviette taient sur la table.

    J'ai attrap ce qui est dans ce plat, expliqua Florence, et Stphane a attrap ce qu'il y a dans l'autre.

    Grand-mre dcouvrit d'abord le premier plat. Il tait plein de dlicieuses crevettes roses.

    Qu'elles sont grosses! s'cria-t-elle. Qu'y a-t-il dans l'autre plat ?

    Elle enleva la serviette et, quand elle vit son beau collier de cristal et de turquoises, elle resta muette d'tonnement.

    Mon collier! s'cria-t-elle enfin. Mon beau collier ! Enfants, o tait-il ?

    Ils racontrent qu'ils avaient renonc au goter projet pour pcher des crevettes son intention, Florence avait captur un grand nombre de crevettes, Stphane pas une seule, mais il avait retrouv le collier.

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  • Vous tes de gentils enfants, dclara grand-mre en les embrassant. Vous m'avez fait de belles surprises et maintenant je veux vous rcompenser. Je vous achterai les montres en argent que vous avez admires hier dans la vitrine du bijoutier.

    Oh ! grand-mre, grand-mre ! Quel bonheur que tu aies perdu ton collier ! s'crirent les enfants. Tu as un bon plat de crevettes et nous nous aurons des montres.

    Et moi j'ai deux enfants trs gentils, ajouta maman en souriant. Nous sommes donc tous trs heureux.

    Grand-mre fit mettre un fermoir neuf son collier et elle l'a encore. C'est elle qui m'a charg de vous raconter cette histoire. J'espre qu'elle vous a plu.

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  • CHAPITRE V

    Mistigri, vaillant capitaine

    MARC et Brigitte passaient toujours leurs vacances avec leurs parents dans une villa au bord de la mer. Le matin, le bruit des vagues qui se brisaient sur le sable et les cris des mouettes les rveillaient. Cet t l, toute la famille tait runie. Il y avait mme Jocko, lpagneul mordor, et Mistigri le petit chat tigr. Personne ne restait en ville. Jocko aimait beaucoup la mer et Mistigri se plaisait jouer sur le sable.

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  • Prs de la grande villa des parents de Marc et Brigitte, une maison plus petite avait t construite. Deux chats et un chien y habitaient avec leur matresse. Le chien, un lvrier gris, s'appelait Ricky, et les chats Noireau et Blanchette ; vous devinez donc quelle tait leur couleur.

    Jocko, Mistigri, Ricky, Blanchette et Noireau taient trs bons amis. Mistigri, le bb chat, s'amusait beaucoup avec eux. Comme il tait trs petit et trs mignon, les quatre autres s'occupaient de lui et faisaient toutes ses volonts.

    Trop gt, Mistigri devint capricieux et vaniteux/Marc et Brigitte le caressaient, l'admiraient et vantaient son intelligence.

    Regarde comme il court aprs mon ballon ! s'cria Marc en voyant Mistigri jouer avec le ballon sur le sable.

    Et tout l'heure il s'amusait avec une touffe d'algues, ajouta Brigitte. Il tait all la chercher sur un rocher. On ne peut pas voir de petit chat plus malin !

    Mistigri se prit bientt pour un prodige.

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  • Il allait et venait le nez en l'air, sr que Jocko et les autres n'taient que ses humbles serviteurs.

    Il y avait pourtant une chose dont il tait incapable. Il ne pouvait patauger et se baigner avec les enfants, comme le faisaient Jocko et Ricky ; il craignait l'eau. Pour rien au inonde, il n'aurait voulu mouiller le bout de ses jolies petites pattes.

    Un jour, Marc et Brigitte reurent un cadeau, un beau voilier qu'ils descendirent sur la plage. Un jouet, oui, mais assez grand pour qu'un des deux chiens pt y entrer. Marc et Brigitte jourent toute la matine, ils le firent naviguer tout en se baignant, et le voilier flottait gaiement sur les vagues. Quand ce fut l'heure de remonter la villa pour djeuner, ils le laissrent au bord de l'eau. Les cinq animaux se runirent autour du beau bateau.

    Je ferais bien une croisire ! dclara Jocko. Quel habile capitaine je serais !

    Moi aussi ! s'cria Ricky en agitant la queue.

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  • Les cinq animaux se runirent autour du bateau.

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  • C'est moi le meilleur capitaine, affirma Mistigri. Marc et Brigitte disent que je suis le plus intelligent des petits chats. Je suis sr que je pourrais conduire ce bateau beaucoup mieux que vous.- Allons donc, Mistigri, petit vaniteux ! protesta Blanchette. Toi qui ne peux mme pas te mouiller le bout des pattes. Tu ferais une drle de tte en pleine mer !

    Je serais un excellent capitaine, rpta Mistigri vex. Je sais ce qu'il faut faire. On tourne ce machin qu'on appelle

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  • gouvernail et le bateau flotte sur l'eau* Marc l'a dit tout l'heure.

    Tu ne sais rien du tout, interrompit Ricky d'un ton mprisant. Tu te vantes, comme d'habitude.

    Non ! hurla Mistigri, les poils hrisss par la colre.

    Il sauta dans le bateau et posa sa patte sur le gouvernail.

    Voil, dit-il. On n'a qu' tourner cela pour que le bateau vogue !

    Les autres se moqurent de lui, srs que Mistigri ferait un pitre matelot. Ils s'loignrent. Mistigri, encore trs fch, s'allongea au fond du bateau pour jouir de la chaleur du soleil. Il ne jouerait pas avec ses camarades puisqu'ils n'taient pas convaincus de sa supriorit. Tant pis pour eux, il jouerait seul !

    Mistigri baissa les paupires pour protger ses yeux du soleil. Il posa son nez sur ses pattes et s'endormit. La mare montait mais il n'entendit pas le bruit des vagues. L'eau glissa sous le voilier et le secoua un peu.

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  • Mais Mistigri dormait profondment, il rvait que Brigitte lui offrait une jatte pleine de crme.

    Jocko, Ricky, Noir eau et Blanchette se demandaient o tait Mistigri. Ils ne pouvaient pas le voir, couch au fond du bateau. Ils crurent qu'il tait retourn la maison.

    Mistigri devient un petit chat insupportable, dclara Jocko. Nous l'avons trop gt.

    Qu'il est stupide de se prendre pour un bon capitaine, affirma Ricky, Tout le monde sait que les chats dtestent l'eau.

    Ne nous occupons plus de lui, conseilla Blanchette. C'est un petit vaniteux. Couchons-nous l'ombre de ce rocher pour faire la sieste. J'ai sommeil.

    Tous les quatre s'allongrent et s'endormirent. Ils taient loin de l'eau et la mer ne les atteignait pas.

    Mais Mistigri n'tait pas en sret. Maintenant la mer entourait le voilier. Dans une minute, il flotterait. Une grosse vague

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  • s'abattit sur la plage et, en se retirant, emporta le bateau. Il voguait magnifiquement.

    La plage ne fut plus qu'une troite bande de sable. Le bateau s'loigna, ballott par les vagues.

    Rveill en sursaut, Mistigri se demanda ce qui le berait. Il se redressa et s'aperut qu'il s'tait endormi dans le bateau. Quand il regarda par-dessus bord, quelle surprise et quelle frayeur ! Il voguait en pleine mer ! De grosses vagues soulevaient le voilier. La plage tait trs loin.

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  • Miaou ! gmit Mistigri, Miaou ! Je suis en pleine mer ! J'ai peur ! Je vais me noyer!

    Personne ne l'entendit dans le vacarme de la mer. Mistigri oublia qu'il s'tait vant d'tre un excellent capitaine. Il oublia qu'il s'tait vant de pouvoir diriger le bateau. Il se cramponnait au mt et regardait avec des yeux effrays les vagues vertes qui se succdaient.

    Marc et Brigitte se rappelrent brusquement qu'ils avaient laiss leur bateau sur la plage.

    La mare monte ! s'cria Marc constern. Vite, Brigitte, allons voir si notre bateau ne risque rien !

    Ils coururent vers la plage et constatrent que la mare tait haute. Et trs loin, sur les grandes vagues, flottait leur beau voilier.

    Regarde ! s'cria Brigitte. Il est l-bas ! Il y a quelque chose dedans. Qu'est-ce que c'est, Marc ?

    Marc plissa les yeux pour mieux voir. Puis il poussa un cri de surprise.

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  • C'est Mistigri, le petit chat ! Oui, c'est lui ! Regarde-le, Brigitte !

    Qu'il est intelligent ! dclara Brigitte qui croyait que Mistigri dirigeait le bateau. Je n'ai jamais vu un petit chat diriger un bateau ! Jocko, Ricky, venez voir Mistigri qui conduit notre voilier !

    Brusquement rveills, Jocko, Ricky, Noireau et Blanchette accoururent pour voir ce qui se passait. Quand ils aperurent Mistigri dans le bateau qui flottait sur l'eau, ils purent peine en croire leurs yeux.

    Le capitaine Mistigri conduit le bateau, expliqua Brigitte. Le capitaine Mistigri ! Qu'il est habile !

    Mais Ricky avait des doutes sur l'habilet de Mistigri. Il avait l'oreille fine, il entendait un Miaou et ce a Miaou exprimait une grande frayeur. Ce n'tait pas la voix triomphante d'un hardi capitaine, mais celle d'un chaton terrifi.

    Je crois qu'il s'est endormi dans le bateau et que les vagues l'ont emport, confia Ricky Jocko

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  • Cela lui apprendra tant se vanter ! rpliqua Jocko.

    Quelle imprudence de s'endormir juste au moment o la mare montait, ajouta Ricky.

    Pauvre petit ! Il a peur, soupira Blanchette qui, la place de Mistigri, n'aurait pas t son aise.

    Ramne le bateau au rivage, Mistigri! cria Marc. Tu es all assez loin. Reviens !

    Ramener le bateau ! Mistigri en aurait t bien incapable. Cramponn au mt, il avait mal au cur et miaulait fendre l'me.

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  • Ricky commenait s'inquiter. Certes, Mistigri mritait une bonne leon, mais il tait peut-tre en danger.

    Je vais aller le chercher , dclara Ricky, et il s'lana dans la mer.

    Il nagea vigoureusement malgr les vagues qui devenaient de plus en plus grosses, car maintenant le vent soufflait avec force. Il se dpchait. Le ciel s'assombrissait, un orage allait clater. Si le voilier sombrait, que deviendrait Mistigri ?

    Le bateau tait de plus en plus loin. Le vent le poussait en avant. Les vagues le ballottaient comme un bouchon. Mistigri mourait de peur,

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  • chaque instant il s'attendait chavirer.Au moment o Ricky l'atteignait, une

    rafale de vent fouetta les vagues, le bateau s'inclina. Les voiles heurtrent la mer et le voilier ne put se redresser. Le pauvre Mistigri fut projet dans l'eau, il ne savait pas nager. Par bonheur, Ricky arrivait temps. Il saisit le petit chat par la peau du cou, lui tint la tte hors de l'eau et nagea vers le rivage. Le bateau resta en mer sur le ct.

    Ricky posa Mistigri tremp jusqu'aux os sur le sable et se secoua, Mistigri miaulait lamentablement. Les autres lentourrent.

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  • Dcidment, tu n'es pas un bon capitaine, fit remarquer Noireau.

    Ne le gronde pas, protesta Blanchette, Mistigri a t suffisamment puni. Viens la maison, Mistigri, tu te scheras prs du feu de la cuisine.

    Marc et Brigitte regardrent les cinq animaux qui remontaient en courant vers la villa. Puis Marc, en maillot de bain, entra dans l'eau pour essayer de reprendre son voilier.

    Ce petit chat est stupide, constata-t-il. Mistigri a emmen mon bateau en pleine mer et n'a pas pu revenir au rivage. Tout a fini par un naufrage, II est beaucoup moins intelligent que nous l'imaginions !

    H se mit la nage, saisit le bateau et alla faire scher les voiles dans la cuisine. Mistigri tait l, aussi prs du feu qu'il le pouvait.

    Bonjour, capitaine Mistigri, s'cria Marc. Tu n'es mme pas un bon matelot.

    Non, c'est simplement un petit chat trs mignon et stupide, dit Brigitte.

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  • Mistigri tait tout penaud. Il regrettait de s'tre vant et redoutait les moqueries de ses camarades.

    Jocko, Ricky, Noireau et Blanchette eurent piti de lui et ne se moqurent pas trop. Mais si Mistigri donne le moindre signe de vanit, ils s'crient: Allons, capitaine Mistigri! Veux-tu faire une autre promenade en mer ?

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  • CHAPITRE VI

    La cl du cacatos

    Le CACATOS mcanique, Jacquot, avait t donn pour Nol aux enfants. Il habitait la chambre de Luc, de Serge et de Nadine avec les autres jouets. C'tait un cacatos magnifique, il avait des ailes rouges, une queue jaune, un corps vert. Quand on le remontait avec une cl, il volait, pas trs haut mais il volait, puis il se promenait d'un air majestueux en disant : Cra cra era cra.

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  • Par malheur, le beau cacatos tait taquin. Il avait pour plus grand plaisir de jouer de' mauvais tours ses camarades, en particulier de voler les objets qui leur appartenaient.

    C'est ainsi qu'il s'empara du ruban ros de la poupe Bleuette et elle le chercha sans pouvoir le retrouver. Devinez o il l'avait cach ? H l'avait enfonc dans le robinet du lavabo. Quand la maman des enfants tourna le robinet, l'eau ne coula pas. Elle fit surprise et contrarie.

    Il prit les souliers du polichinelle. Le polichinelle les avait enlevs parce qu'ils taient un peu troits et qu'il aimait mieux courir nu-pieds sur le tapis. Mais quand il voulut remettre les souliers, ils avaient disparu.

    C'est Jacquot qui les a vols, dt la souris mcanique. Je l'ai vu. Il les a jets par la fentre !

    Le polichinelle fut donc oblig de descendre le long de la vigne-vierge et de chercher ses souliers ttons dans la platebande.

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  • bande. Je vous laisse penser qu'il n'tait pas content. ,

    Tous rprimandaient le cacatos mais il se contentait de secouer la tte.

    Cra cra ! s'criait-il. Attendez que j'aie trouv une bonne cachette. Alors vous ne retrouverez pas vos affaires si facilement. Et un jour le cacatos trouva une magnifique cachette. Vous ne devineriez jamais ce que c'tait. C'tait la tirelire place sur la chemine, un gros chat en faence jaune avec une grande fente dans le dos pour y glisser les pices de monnaie.

    Il ramassa un bouton tomb de la tunique du soldat, le jeta dans la fente du chat o il tomba avec un petit cliquetis. Puis Jacquot se mit en qute d'autre chose et dcouvrit une des oreilles du petit mouton Belin. Cette oreille qui tenait mal s'tait dtache et avait roul sous une chaise.

    Le cacatos la fourra dans la tirelire, Belin fut bien malheureux sans son oreille et la chercha partout mais en vain.

    La poupe Rosette avait pos sa jolie

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  • broche bleue sur la table de la maison de poupe. Plouf! La broche alla rejoindre le bouton du soldat et l'oreille du mouton. Le soir de la fte que les jouets organisrent pendant que les enfants taient aux sports d'hiver, Rosette ne put pingler sa broche sur sa robe de dentelle* Elle en pleura de chagrin.

    Mais Jacquot ne s'en tint pas l. Quelle joie pour lui de mettre la patte sur l'il d verre de Martin l'ours en peluche, Martin avait deux beaux yeux en verre, ronds et

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  • brillants. L'un d'eux se dcollait souvent. Martin prenait alors le tube de colle de Serge et le malheur tait vite rpar.

    Une nuit, Martin eut envie de faire des cabrioles. De peur de perdre son il, il l'enleva et lenferma avec soin dans le sucrier du service caf de Nadine. Toujours sur le qui-vive, Jacquot le vit. Clac ! L'il tomba dans la tirelire.

    Quel vacarme quand l'ours s'aperut de la disparition de son il !

    C'est cet horrible cacatos qui l'a pris, j'en suis sr, cria Martin. Il n'y a que lui pour jouer de si mauvais tours !

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  • Ses camarades se rassemblrent autour du cacatos.

    O est l'il de Martin? demandrent-ils. O est la broche de Rosette ? O est l'oreille de Belin ? O est le bouton du soldat ? A un endroit o vous ne les trouverez

    jamais ! rpondit Jacquot trs content de lui. Ils sont dans la tirelire. Vous ne pourrez pas les reprendre.

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  • Les jouets furent consterns. Dans la tirelire ? Il fallait la casser pour retrouver les objets vols. Et que diraient alors Luc, Serge et Nadine ? Impossible de recourir un tel moyen !

    Mchant cacatos ! s'crirent-ils.Jacquot rejeta la tte en arrire et il clata

    de rire. La colre des jouets F amusait. Pendant qu'il riait, sa cl qui tait attache son cou tomba brusquement terre.

    Prompt comme l'clair, le polichinelle la ramassa. Il courut vers la chaise la plus proche, y grimpa et escalada le dossier. De l il sauta sur la chemine, se prcipita vers la tirelire et jeta la cl du cacatos dans la fente au milieu du dos du chat. Pan !

    Tous les autres le regardaient. Le cacatos poussa un cri de frayeur.

    Cra-cra ! Qu'as-tu fait de ma cl ? Je ne pourrai plus bouger, on ne pourra plus me remonter. Je ne pourrai plus ni marcher, ni voler, ni becqueter le grain. Horrible polichinelle !

    Tu le mritais, crirent tous les jouets.

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  • Puisque tu mets tout ce qui nous appartient dans la tirelire, pourquoi ta cl ne rejoindrait-elle pas le bouton du soldat, la broche de Rosette, l'oreille de Belin, l'il de Martin ? Tu ne pourras plus bouger ? C'est bien fait pour toi !

    En effet, il n'y avait plus de cl pour remonter le cacatos et il tait oblig de rester immobile dans son coin regarder les autres. Quel malheur pour lui d? avoir trouv une si bonne cachette !

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  • Quand la fte de leur mre approcha, Luc, Serge et Nadine voulurent casser leur tirelire afin de prendre l'argent qu'elle contenait . Aprs une longue discussion, ils avaient dcid d'acheter une belle charpe en soie verte qu'ils avaient vue dans une vitrine. Ils jetrent par terre le chat de faence. Quelle surprise de dcouvrir dans les dbris, parmi les pices de monnaie, tant d'objets extraordinaires !

    Qui donc les a mis l ? se demandrent-ils,

    Mais personne ne connaissait la rponse. Le cacatos rentra en possession de sa cl, l'ours de son il, Rosette de sa broche, le mouton de son oreille, le soldat de son bouton.

    N'oublie pas, cacatos ! dit l'ours en peluche, et, comme Serge avait recoll son il de verre, il foudroya du regard Jacquot tout penaud. Nous remettrons ta cl dans la tirelire neuve si tu continues voler ce qui nous appartient. Profite de la leon.

    Et maintenant le cacatos est le plus gentil

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  • des oiseaux. Il tait si malheureux, sans sa cl, d'tre condamn l'immobilit ! Il ne volera plus rien. Rosette peut oublier sa broche bleue sur une chaise, Bleuette son ruban ros, Belin son oreille et Martin son il. Il n'y touchera plus.

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  • CHAPITRE VII

    Les lunettes de Sophie

    SOPHIE avait de belles lunettes qui tenaient ^trs bien sur son petit nez retrouss et lui donnaient un air de vieille dame respectable. Leurs verres taient carrs au lieu d'tre ronds et la monture d'un vert clatant. Sophie avait l'impression d'tre un personnage important lorsqu'elle portait ses lunettes. En ralit, elle n'en avait pas besoin, car elle jouissait d'une excellente

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  • vue, mais, quand elle avait aperu dans un magasin ces lunettes vertes aux verres carrs, elle avait eu le coup de foudre et les avait achetes.

    Un jour Sophie alla passer l'aprs-midi avec ses amies. Elle mit son manteau neuf et n'eut garde d'oublier ses lunettes. Il pleuvait torrents, Sophie ouvrit donc son parapluie et partit eu pataugeant dans les flaques d'eau.

    Ses amies s'taient runies pour prparer la layette d'un bb qui allait natre dans la famille de l'une d'elles. Il y avait l Laurence, Armelle, Fanny qui tait trs blonde, Jeannette qui tait trs brune, Florence et Pamela. Sophie se rjouit de les revoir.

    Elles vont admirer mes belles lunettes , pensa-t-elle.

    Elle s'assit devant la grande table charge de pelotes de laine, de rouleaux de percale et de fine batiste, de dentelles, de ciseaux, de bobines de fil. Elle posa prs d'elle son parapluie bleu imprim de fleurs rouges.

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  • Sophie sortit de son sac son tui lunettes et l'ouvrit. Elle mit ses belles lunettes vertes sur son nez retrouss et jeta un coup d'il autour d'elle pour voir si on les remarquait.

    Tiens, Sophie! s'cria Laurence avec un sourire qui creusait deux fossettes sur ses joues ross, Depuis quand portes-tu des lunettes ? Tes yeux sont aussi bons que les miens.

    Et quelle drle de forme elles ont ! renchrit Jeannette.

    Elles m'ont cot trs cher, dclara Sophie vexe. Et elles sont la dernire mode. Ton collier, Laurence, est beaucoup plus bizarre que mes lunettes. Il doit avoir au moins cinquante ans.

    Allons, allons ! s'interposa Armelle, ne nous querellons pas. Je suis sre, Sophie, que grce tes lunettes tu vas coudre merveilleusement bien.

    Sophie assujettit ses lunettes sur son nez. Elle prit une petite chemise pour y coudre de la dentelle.

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  • Elles sont jalouses parce que j'ai de si belles lunettes ! pensa-t-elle. Tant pis pour elles !

    Mais Sophie s'aperut vite qu'elle voyait beaucoup mieux sans ses lunettes neuves. Elles n'taient pas faites pour ses yeux et la gnaient beaucoup. Quel ennui ! Sophie clignait des paupires, et ses yeux pleuraient. Pour rien au monde, elle n'aurait enlev les lunettes ! A quoi bon les avoir achetes si elle ne s'en servait pas ? Elle avait beaucoup

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  • de peine coudre, elle faisait de grands points, et la jolie dentelle tait toute de travers autour de la petite chemise.

    Quand les amies eurent cousu et bavard pendant deux heures, elles eurent faim. La mre de Fanny, chez qui toutes s'taient runies, servit le goter. Sophie saisit ce prtexte pour poser ses lunettes prs d'elle. Elle aimait voir ce qu'elle mangeait. Les brioches taient dlicieuses, trempes dans le chocolat. Elle se rgala ensuite d'une tarte aux framboises, d'un clair au caf et d'une meringue. Elle but une seconde tasse de chocolat. Elle tait trs heureuse, riait et plaisantait avec les autres.

    Aprs le goter, Sophie eut envie de remettre ses lunettes et elle les chercha, mais les lunettes avaient disparu !

    Je les ai poses l ! s'cria Sophie, et elle chercha partout sur la table, mais ses lunettes n'y taient pas. Elle regarda dans la bote de fils. Elle regarda parmi les ciseaux. Elle droula un rouleau de percale, mais ses chres lunettes n'taient nulle part.

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  • Qui me les a prises ? cria Sophie. Elles ont disparu. Il me les faut, je ne peux pas coudre sans lunettes.

    Je ne les ai pas vues, affirma Florence. Moi non plus, renchrit Pamela. Je suppose que c'est Sophie qui les a, fit

    remarquer Jeannette. As-tu regard dans te poche, Sophie ?

    Bien sr, rpondit Sophie. J'ai regard partout.

    Elles sont peut-tre tombes terre , dit Armelle.

    Toutes posrent les ciseaux, les ds, les

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  • aiguilles et se mirent quatre pattes pour chercher les lunettes sous la table. Mais les lunettes restaient introuvables. Quel mystre ! Sophie reprit l'tui vid dans sa poche, mais les lunettes avaient disparu comme par enchantement.

    Je ne peux penser qu' une seule chose, dclara Sophie les lvres serres.

    Laquelle ? demanda Armelle. Je crois que Tune de vous a pris mes

    lunettes neuves, rpondit Sophie. Je sais que vous en aviez envie. Qui me les a prises ?

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  • Il faut me les rendre tout de suite parce qu'elles m'ont cot trs cher.

    Sophie ! Personne ne t'a vol tes lunettes! s'cria Jeannette. Elles t'enlaidissent et sont ridicules.

    Elles ne sont pas ridicules, protesta Sophie.

    Si ! affirma Laurence, Non ! rpliqua Sophie. Allons, allons, intervint Florence. On

    finira bien par les retrouver. Ouvrons nos

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  • sacs ouvrage pour voir si les lunettes ne seraient pas, par erreur, dans l'un d'eux

    Chacune ouvrit son sac ouvrage et en renversa le contenu sur la table. Des bobines de fil et de coton, des aiguilles, oui, mais pas de lunettes !

    Tu le vois, Sophie, nous ne les avons pas, dclara Jeannette. Continuons notre travail. Nous avons perdu assez de temps.

    Je ne resterai pas une minute de plus ! cria Sophie saisie d'un accs de rage. L'une de vous a pris mes lunettes, mes belles lunettes vertes, je rentre chez moi et je ne reviendrai plus coudre avec vous.

    Ne dis pas de btises, Sophie, implora Fanny.

    Mais Sophie ne voulut rien entendre. Elle ne resterait pas et ne coudrait pas sans ses lunettes. Elle dcrocha son manteau dans le vestibule, l'enfila, le boutonna jusqu'au cou, mit ses gants, prit son parapluie et se dirigea vers la porte.

    Voyons, Sophie, ne pars pas, supplia Jeannette. C'est stupide de ta part. Tu

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  • retrouveras tes lunettes et tu regretteras de nous avoir accuses.

    Je ne regretterai rien ! riposta Sophie qui tremblait de colre.

    Elle ouvrit la porte. Il pleuvait toujours , verse. Quel temps !

    Et j'espre que celle qui a pris mes lunettes sera punie! cria Sophie.

    Avant de refermer la porte de la maison, elle ouvrit son parapluie et le croirez- vous? quelque chose roula par terre, quelque chose qui brillait et qui se cassa en mille petits morceaux, les belles lunettes vertes !

    Elles avaient gliss de la table et elles

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  • taient tombes dans le parapluie que Sophie avait pos prs d'elle. C'tait le seul endroit o personne n'avait pens regarder. Quelle surprise pour tout le monde !

    Eh bien, Sophie, dit enfin Pamela., ton souhait s'est ralis. Tu esprais que celle qui avait pris tes lunettes serait punie, c'est toi qui les avais et tu es punie puisqu'elles sont casses.

    Pauvre Sophie ! Elle avait honte d'elle, et, de ses belles lunettes, il ne restait plus que des morceaux de verre. Des larmes roulrent sur ses joues. Jeannette ls vit, courut vers Sophie et la prit dans ses bras.

    N'aie pas de chagrin, conseilla-t-elle, tu es plus jolie ans lunettes, Sophie. Je suis sre qu'elles te faisaient mal aux yeux, ils taient tout rouges quand tu les as enleves pour goter. Ote vite ton manteau, reviens t'asseoir avec nous et reprends ton travail.

    Sophie tait si confuse qu'elle aurait prfr retourner chez elle, mais elle ne pouvait rsister aux prires de ses amies.

    Je vous demande pardon toutes,

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  • Quelque chose roula par terre,,, les belles lunettes vertes !

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  • murmura-t-elle. J'ai t stupide et je n'aurais pas d me mettre en colre.

    Depuis, quand elle passe devant un magasin de lunettes, Sophie dtourne la tte. Et elle ne se met plus en colre.

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  • CHAPITRE VIII

    Le mouchoir de Nicolas

    MAMAN, dit Nicolas un matin, la matresse m'a ordonn d'avoir toujours un mouchoir propre quand j'arrive l'cole.

    Bien sr, approuva sa mre, Mme Simon. Tu sais o sont les mouchoirs dans le tiroir de la commode, n'est-ce pas, Nicolas ? Prends-en un tous les matins.

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  • Le lendemain matin, Nicolas se mit en route avec un mouchoir blanc comme la neige. Il en tait si fier que, au lieu de le cacher dans sa poche, il le tint la main. Il avait l'intention de le montrer son institutrice ds qu'il arriverait l'cole.

    Mais il prit un raccourci travers champs et dut escalader une barrire. Il posa son mouchoir avec soin tout en haut et il le laissa l.

    As-tu pens ton mouchoir aujourd'hui, Nicolas ? demanda Mlle Brun, l'institutrice. - Oui, mademoiselle, rpondit Nicolas, mais le mouchoir n'tait plus dans sa main et il n'tait pas dans sa poche. Je l'ai laiss sur la barrire , avoua-t-il tout penaud.

    Quand il quitta l'cole, il chercha son mouchoir et le trouva par terre en lambeaux. Rosette, la vache, 1 'avait aperu sur la barrire. Elle l'avait saisi entre ses dents et, constatant qu'il n'tait pas bon manger, l'avait crach. Maintenant ce n'tait plus qu'un chiffon inutilisable.

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  • L'aprs-midi, Nicolas sortit un autre mouchoir de son tiroir.

    J'y ferai un nud pour me rappeler qu'il faut que je le tienne jusqu' l'cole , dcida-t-il.

    El fit donc un gros nud dans le coin. Puis il partit. Il escalada la barrire sans encombre, son mouchoir la main. Il continua son chemin en chantonnant. Soudain il vit un papillon et courut aprs lui. Le papillon se posa sur une belle marguerite blanche. Nicolas

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  • jeta son mouchoir terre et, sur la pointe des pieds, s'approcha de la marguerite. Il fit un bond, mais le papillon s'tait dj envol dans les airs !

    Tant pis ! dit Nicolas.Il continua son chemin vers l'cole en

    abandonnant son mouchoir propre sur l'herbe.Et ton mouchoir, Nicolas ? demanda la

    matresse. Oh ! rpondit firement Nicolas, j'ai fait

    un nud mon mouchoir pour ne pas oublier, mademoiselle. C'est trs malin, n'est-ce pas ?

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  • Alors, montre-le-moi , demanda Mlle Brun.

    Bien entendu, Nicolas ne put le retrouver, D l'avait laiss Sur l'herbe, Mlle Brun fut trs fche.

    Tu es un tourdi, dclara-t-elle Demain, n'oublie pas ton mouchoir.

    Le lendemain matin, Nicolas prit un autre mouchoir dans le tiroir. Il n'avait pu retrouver celui qu'il avait laiss sur l'herbe, le vent l'avait emport.

    Cette fois-ci, il ne faut pas que je le perde, se promit Nicolas. Je le tiendrai dans ma main jusqu' l'cole.

    Au moment o il partait, sa mre le rappela.

    Nicolas, mets cette lettre dans la bote, tu passes devant. Tu veux bien ?

    Oh oui, maman! rpondit Nicolas qui tait trs complaisant.

    Mme Simon lui donna la lettre et il partit en courant. H se demandait s'il se rappellerait la fable qu'il avait apprise la veille. Srement Mlle Brun demanderait de la

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  • rciter. Il marchait donc en murmurant :

    La cigale ayant chantTout ftSe trouva fort dpourvueQuand la bise fut venue.,.

    II rcitait le quatrime vers quand il arriva la bote aux lettres qui tait rouge et se voyait de loin. Il s'en approcha en se rjouissant de savoir si. bien sa leon. Mais savez-vous ce qu'il fit ? Il mit dans la bote son mouchoir et non la lettre de sa mre ! Oh ! Nicolas, tu es vraiment incorrigible !

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  • Eh bien, Nicolas, dit l'institutrice quand il entra dans la classe. J'espre que tu as ton mouchoir aujourd'hui !

    - Oui, mademoiselle, rpondit firement Nicolas. Je ne l'ai pas lch aujourd'hui. Regardez !

    II lui tendit la lettre de sa mre. Mlle Brun le regarda avec surprise.

    Mais c'est une lettre, ce n'est pas un mouchoir, Nicolas ! s'cria-t-elle.

    - C'est vrai ! gmit Nicolas. J'ai d mettre mon mouchoir dans la bote lettres. Oui, c'est ce que j'ai fait.

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  • Nicolas, je me mettrai bientt en colre, avertit Mlle Brun. Cet aprs-midi, apporte un mouchoir propre. C'est la dernire fois que je te le dis.

    Aprs le djeuner, Nicolas prit un mouchoir propre dans son tiroir et le mit dans sa poche, sr que l le mouchoir ne risquerait rien. Puis il partit pour l'cole. Mais en chemin il tomba. Son genou, rafl par un caillou, saigna et ses mains taient pleines de houe. Il se servit de son mouchoir pour les essuyer. Aprs il tancha le sang de son genou. Puis il repartit. Mais ce n'tait pas un jour de chance pour Nicolas. Il effleura un mur qui venait d'tre peint, et son joli pull-over rouge fut tach de peinture bleue. De nouveau, le mouchoir fit son office et essuya la peinture bleue. Puis Nicolas arriva l'cole avec son mouchoir et le montra Mlle Brun.

    Nicolas ! Qu'est-ce que c'est que cet horrible chiffon tout sale ? demanda-t-elle. Ce n'est pas un mouchoir. Ne t'ai-je pas dit d'apporter un mouchoir propre ? Si tu

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  • n'obis pas demain matin, tu seras puni ! Quand il rentra chez lui, Nicolas pleura

    tout le long du chemin. Il raconta sa mre ce qui s'tait pass, elle le gronda. Et elle fut encore plus mcontente lorsqu'elle sut qu'il n'avait pas mis la lettre la bote !

    Nicolas, tu es l'enfant le plus tourdi que je connaisse ! s'cria-t-elle. Maintenant il faut que je te donne les mouchoirs de ton pre. Tu as sali ou perdu tous ceux qui t'appartiennent. Et tu me rapportes ma lettre qui tait si presse. Je vais faire un nud chaque coin de ton mouchoir, cela le transformera en chapeau, tu le porteras jusqu' l'cole et tu ne pourras pas le perdre puis quil sera sur ta tte.

    Nicolas fut trs satisfait de cet arrangement. Le mouchoir de son pre tait grand, carreaux rouges et gris. Il se sentait trs fier d'aller l'cole avec une si belle coiffure.

    Mais quand il arriva l'cole, il avait oubli qu'il avait le mouchoir sur sa tte ! Mlle Brun lui demanda de montrer son

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  • mouchoir propre, Nicolas fouilla dans ses poches. Bien sr elles taient vides.

    Nicolas ! cria Mlle Brun d'une voix irrite. Vas-tu me dire que tu l'as de nouveau oubli ?

    - Non, mademoiselle, protesta Nicolas. J'ai apport un mouchoir cette fois, j'en suis certain. Mais o est-il ?

    Enlve ce que tu as sur la tte, entre dans la classe, va t'asseoir ta place, ordonna Mlle Brun de plus en plus en colre. Ce soir, chez toi, tu copieras cent fois : Je ne dois pas oublier mon mouchoir.

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  • Nicolas se dcoiffa et quelle surprise quand il vit qu'il avait dans les mains le beau mouchoir carreaux de son pre.

    Mademoiselle Brun, mademoiselle Brun, le voil ! cria-t-il. Je le portais sur ma tte. Il est tout fait propre. Regardez ! Tu es le petit garon le plus sot de la terre ! dclara Mlle Brun. Pour cette fois, tu ne seras pas puni. A l'avenir, Nicolas, demande ta maman d'pingler un mouchoir propre ton pull-over tous les matins. Peut-tre l'apporteras-tu l'cole sans le salir et sans le perdre !

    C'est ce que fait maintenant Nicolas. Mais aujourd'hui sa mre est absente, Nicolas a bien trouv l'pingle de sret, mais il s'est tromp. Au lieu d'pingler son pull-over un mouchoir, il a pingle la petit chemise blanche du bb. Que dira Mlle Brun ?

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  • CHAPITRE IX

    Une excursion au bord de la merUn jour, le lutin Prosper passa la tte la

    fentre de la chambre des enfants.Qui veut aller au bord de la mer cet aprs-

    midi ? demanda-t-il.Les jouets sursautrent. Ils taient seuls

    dans la chambre. Michel et Criquette, qui ils appartenaient, passaient la journe chez leur grand-mre. Les jouets s'ennuyaient.

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  • Un aprs-midi au bord de la mer ! Quel plaisir ce serait !

    Comment irons-nous ? interrogea le lapin ros qui s'appelait Jeannot.

    En autobus, rpondit le lutin. Mon autobus. Je l'ai achet hier. Je ne vous ferai rien payer puisque, l'autre jour, vous m'avez donn des bonbons.

    - Quel bonheur ! s'cria Mathurin, le matelot en bois. J'aimerais tant voir la mer. Je ne l'ai jamais vue. C'est vexant pour un matelot de ne pas savoir comment est la mer.

    Tu le sauras dans un moment, fit remarquer Prosper. Sautez par la fentre, j'ai la place pour tout le monde dans mon autobus.

    Jeannot le lapin ros, Mathurin le matelot, Coin-Coin le canard jaune, Rosette la poupe qui marchait, Fripon le chien noir. Martin l'ours en peluche sautrent par la fentre et montrent dans l'autobus qui les attendait dans l'alle du jardin. Le lutin se mit au volant. L'autobus dmarra avec un

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  • cahot qui envoya les jouets les uns sur les autres. Il faisait un temps magnifique pour aller au bord de la mer. Le lutin connaissait bien le chemin. Au bout de quelques minutes, Mathurin poussa un grand cri. La mer ! La mer !

    Allons donc, rpliqua Prosper. Ce n'est qu'une mare.

    Mais je vois des mouettes qui nagent, dit Rosette la poupe.

    - Ce sont des canards ! corrigea Prosper.- Coin-Coin ! caqueta le canard jaune.

    Mais ils taient dj loin de la mare.Mathurin n'osa plus rien dire jusqu' la fin

    du trajet. Mme lorsqu'ils arrivrent au bord de la mer et qu'il la vit briller au soleil. Ce n'tait peut-tre qu'une mare ou une grande flaque d'eau.

    Tous descendirent de l'autobus et coururent vers la plage.

    Je vais prendre un bain ! cria Coin-Coin. J'aimerais faire une promenade en

    mer ! murmura Mathurin. Oh ! Il y a l-bas

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  • bas un joli bateau qui a l'air d'tre fait pour moi!

    Le bateau appartenait un petit garon qui l'avait oubli sur le sable. Mathurin poussa le bateau dans l'eau, monta bord et fut bientt loin de la plage. Il se prenait pour un amiral.

    Jeannot le lapin ros pensa qu'il aimerait creuser un terrier. Il en avait envie depuis si longtemps. C'est impossible d'en creuser un dans le parquet d'une chambre d'enfants ! Maintenant il pourrait s'en donner cur joie. Il se mit donc creuser avec

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  • ses pattes et envoya une averse de sable sur l'ours en peluche.

    Fais attention, Jeannot ! cria Martin. Mais le lapin avait dj disparu dans un trou et il n'entendit pas.

    Je vais m'offrir une petite sieste, dcida Martin. Que personne ne me rveille !

    II s'allongea et ferma les yeux. Bientt il se mit ronfler. Fripon eut une ide dont il fit part Rosette.

    Si nous le recouvrions de sable ! proposa-t-il. Il serait si surpris son rveil de se voir transform en ours de sable.

    La poupe approuva et ils se mirent jeter du sable sur Martin endormi. Ils recouvrirent

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  • ses pattes, ils recouvrirent son ventre, ils recouvrirent ses bras, mais ils ne touchrent pas sa tte et bientt on ne vit plus que le museau de Fours, ce qui faisait un trs drle d'effet !

    Je vais me promener, annona Rosette. Je veux profiter de cette grande plage pour me drouiller les jambes. Je ne peux pas aller trs loin dans la chambre des enfants, il faut que je me contente de tourner en rond.

    Elle s'loigna et Fripon resta seul,Mathurin est en mer, Coin-Coin nage,

    Jeannot creuse un terrier, Martin dort, Rosette se promne. Et moi, que vais-je faire ? Je vais chercher si je ne trouve pas un os quelque part, se dit le chien noir, et il partit.

    Deux ou trois heures plus tard, Prosper le lutin revint pour dire aux jouets qu'il tait temps de retourner la maison. Mais il ne vit personne. La plage semblait compltement dserte. Prosper fut contrari.

    Quels sots de disparatre au moment de

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  • rentrer ! scria-t-il. Eh bien, il faut que je les attende. Je ne peux pas partir sans eux.

    II chercha un endroit pour s'asseoir. H vit sur la plage une petite bosse qui pourrait lui servir de sige. En ralit,, c'tait le ventre de l'ours recouvert de sable, niais Prosper ne le savait pas. Il s'assit au milieu:. L'ours s'veilla en sursaut.

    Grrr! grogna-t-il, et il se redressa brusquement.

    Le lutin effray tomba la renverse. L'ours se remit grogner puis il reconnut Prosper,

    Qu'est-ce qui t'a pris de t'asseoir sur mon ventre ? demanda-t-il avec mauvaise humeur.

    Comment aurais-je su que c'tait ton ventre puisque tu tais tout recouvert de sable? interrogea Prosper.

    Je n'tais pas recouvert de sable, protesta Martin, car il ignorait ce qu'avaient fait la poupe et le chien.

    Si. Non.

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  • Noua n'allons pas notis quereller pendant deux heures, dclara Prosper. Dis-moi plutt o sont passs les autres. Il est temps de rentrer.

    Dj ? s'cria l'ours tonn. J'ai l'impression que nous venons d'arriver.

    -' Ce n'tait pas la peine de venir au bord de la mer pour dormir, fit remarquer Prosper. Enfin, chacun ses gots ! coute, Martin, si nous ne partons pas bientt, nous serons en retard. Les enfants seront rentrs dans leur chambre. J'ai bien envie de m'en aller tout seul. Vous vous dbrouillerez comme vous pourrez.

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  • Oh ! non, ne nous abandonne pas, supplia Tours. Je vais rappeler les autres. J'ai dans ma poitrine un sifflet qui fait beaucoup de bruit.

    Il se mit siffler. Le son- tait trs aigu. Les jouets l'entendirent et comprirent que c'tait le signal du dpart. Le matelot ramena son bateau au rivage, sauta terre, tira le bateau hors d'atteinte des vagues. Il se disait que la navigation n'avait plus de secrets pour lui.

    Le canard jaune revint en coincouinant, ballott par les flots. II secoua ses plumes et aspergea Prosper qui ne fut pas content.

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  • La poupe traversa la plage. Le chien revint, portant entre ses dents un os norme qui tait trs dur et ne sentait pas bon. Les jouets le regardrent avec dgot.

    O est le lapin ros ? demanda Prosper. Il ne manque plus que lui.

    Les jouets gardrent le silence. Sans le savoir, Prosper tait debout l'entre du terrier creuse par Jeannot. Qu'allait-il se passer? Le lapin ros avait entendu le signal. Il revint prcipitamment. En sortant du trou, il bouscula Prosper qui tomba tout de son long. Les jouets rirent de bon cur, mais Prosper tait en colre.

    D'abord je m'assieds sur un tas de sable qui est un ours, dit-il. Ensuite, je suis renvers par un lapin qui jaillit du fond de la terre. Montez dans l'autobus ! Dpchez-vous ou je pars sans vous !

    Les jouets se htrent d'obir. La plupart d'entre eux taient fatigus, ils avaient sommeil, except l'ours qui avait dormi presque tout le temps.

    Ils entrrent dans la chambre par la

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  • fentre, remercirent Prosper avec effusion, et le lutin s'en alla dans son autobus qu'il cacha sous un buisson de lilas. Les jouets se glissrent dans le placard et ne bougrent plus.

    Quand Michel et Criquette revinrent leur tour, ils furent tonns de constater que la poupe et le matelot avaient bruni et que Martin et Jeannot avaient du sable dans leurs poils.

    Comme s'ils taient alls au bord de la mer! fit remarquer Michel.

    Ne dis pas de btises ! protesta Criquette.

    Michel ne disait pas de btises. Les jouets avaient bien pass leur aprs-midi au bord de la mer.

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  • Enid Blyton

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