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#3 Série sur la nouvelle évangélisation Michelle K. Borras Les mystères de la vie de Jésus SERVICE D INFORMATION CATHOLIQUE

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#3 Série sur la nouvelle évangélisation

Michelle K. Borras

Les mystères

de la vie de Jésus

S E R V I C E D ’ I N F O R M A T I O N C A T H O L I Q U E

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RÉDACTRICE EN CHEF

Michelle K. Borras, Ph.D.

Directrice du Service

d’information catholique

ÉDITEURS

Alton Pelowski &

Brian Caulfield

© Copyright 2013-2020, Chevaliers de Colomb.

Tous droits réservés.

Les œuvres citées sont la propriété de leurs

auteurs respectifs.

Les citations des Écritures sont issues de la

nouvelle traduction liturgique de la Bible

de l’Association épiscopale liturgique pour

les pays francophones (AELF).

NIHIL OBSTAT

Susan M. Timoney, S.T.D.

Censor Deputatus

IMPRIMATUR

Cardinal Donald Wuerl

Archevêque de Washington

Archidiocèse de Washington

IMAGE DE LA COUVERTURE

La face du Christ, entre Marie et Jean-Baptiste. Chapelle du Centre Aletti,

Rome. La mosaïque a été réalisée par le père Marko Ivan Rupnik et les

artistes du Centre Aletti. Image reproduite avec l’aimable autorisation du

Centre Aletti.

6 juin 2013

Le nihil obstat et l’imprimatur sont des

déclarations officielles attestant qu’un

livre ou un livret ne contient pas d’erreurs

doctrinales ou morales. Cela n’implique

pas que les personnes qui ont accordé le

nihil obstat et l’imprimatur sont d’accord avec

le contenu, les opinions ou les affirmations

qui y sont exprimés.

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Les mystères de la vie de Jésus

Michelle K. Borras

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Table des matières

« O grand mystère ! »

1 « C’est ta face, Seigneur, que je cherche »

4 « Le mystère qui dépasse toute compréhension »

Un mystère joyeux

11 « Et le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous »

14 « Quel échange admirable ! »

Un mystère lumineux

17 « Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux »

19 « Tu as gardé le meilleur vin pour la fin »

21 « Ceci est mon corps, donné pour vous »

Un mystère douloureux

25 « J’ai soif ! »

28 « Si le grain de blé… »

Un mystère glorieux

33 Le sceau de l’Alliance

36 L’Ascension et la Pentecôte

39 « L’Esprit et l’Épouse disent Viens ! »

43 Sources

48 L’auteur

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« C’est ta face, Seigneur, que je cherche,

ne me cache pas ta face » (Psaume 26, 9)

Le Christ, entre Marie et saint Jean-Baptiste.

Chapelle du Centre Aletti, Rome.

Image reproduite avec l’aimable

autorisation du Centre Aletti.

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« O grand mystère ! »

« C’est bien le propre du mystère de Dieu d’agir de manière

humble. C’est seulement petit à petit qu’il construit dans la

grande histoire de l’humanité son histoire. Il se fait homme mais

d’une telle manière qu’il peut être ignoré de ses contemporains,

des forces autorisées de l’histoire. Il souffre et il meurt et, comme

Ressuscité, il ne veut atteindre l’humanité qu’à travers la foi des

siens auxquels il se manifeste. Continuellement, il frappe

humblement aux portes de nos cœurs et, si nous lui ouvrons,

lentement il nous rend capables de ‘voir’. »

— Pape Benoît XVI, Jésus de Nazareth1

« C’est ta face, Seigneur, que je cherche »

Les êtres humains ont une capacité remarquable à aspirer à

quelque chose de plus grand et de plus pur que tout ce qu’ils

ont pu expérimenter. C’est particulièrement évident chez les

jeunes, mais pas seulement chez eux. Nous « aspirons à ce

qui est grand, à une plénitude »2 même si nous ne savons pas

comment y parvenir, même si nous menons une vie en

contradiction avec ce désir ou si nous ne supportons pas

quand cela nous arrive. Otto Neubauer, un jeune intellectuel

qui enseigne dans un centre catholique pour le dialogue

à Vienne, en Autriche, évoque une rencontre avec une

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étudiante qui résume bien cette aspiration à une beauté et à

un amour qui nous dépassent :

À la fin d’une année de cours sur les médias, une étudiante me

demanda si elle pouvait me poser une question « personnelle »

qui concernait ma foi. Pendant toute l’année, elle avait dit à

plusieurs reprises que, bien qu’incroyante, elle se sentait

étonnamment chez elle à ce cours, comme dans cette maison.

Elle voulait maintenant enfin savoir si j’avais prié pour elle. Au

début, j’ai hésité à répondre parce qu’elle ne semblait pas s’être

convertie. Qui aimerait, après tout, être un « objet de mission » ?

Quand j’ai répondu « oui », elle a demandé si j’avais prié pour elle

depuis le début du cours, c’est-à-dire, toute cette année. Quand

j’ai dit « oui » à nouveau, elle a dit, émue : « Pour être honnête,

c’est ce que j’espérais ! »3.

Nous espérons tous. Peut-être espérons-nous simplement

que quelqu’un va remarquer notre aspiration à quelque chose

que nous ne comprenons pas. Tant de personnes ne

reçoivent pas du monde l’amour dont elles ont besoin. Nous

non plus. Parfois, « en ce temps de l’absence de Dieu quand

la terre des âmes est aride »4, notre espérance menace de se

transformer en désespoir. Nous aimerions pouvoir oublier

que nous avons soif de quelque chose – tant que nous n’avons

pas rencontré quelque chose, ou Quelqu’un, qui a soif de nous.

Il peut s’agir de la moindre expérience d’être pris au

sérieux, ou d’être aimé. Ou de la rencontre fugace de la beauté

dans une autre personne humaine, dans l’art ou la musique,

ou dans la nature. Peut-être même avons-nous eu la secrète

intuition que nous n’aurions pas soif de quelque chose que

nous ne pouvons pas nous donner par nous-mêmes, si

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Quelqu’un n'avait d’abord eu soif de nous. Et soudain,

quelque chose s’éveille en nous, comme l’antique prière que

le pape Benoît XVI cite, demandant à Dieu de se montrer à

tous ceux qui le cherchent : « Mon âme a soif de toi ; après toi

languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau » (Psaume 62, 2).5

Quelqu’un a d’abord eu soif de nous. En un sens, c’est tout

l’Évangile chrétien. Dieu est déjà parfait en lui-même et

pourtant, « son cœur s’émeut pour nous, il se penche sur

nous »6 à tel point qu’il a choisi de se faire homme. Au cœur

de la foi chrétienne, se trouve le Dieu qui ne nous a pas

seulement créés. Il a été si ému par notre souffrance que

« dans le Christ, Dieu est descendu au plus profond de l’être

humain, jusque dans la nuit de la haine et de l’aveuglement,

jusqu’à l’obscurité de l’éloignement de l’homme vis-à-vis de

Dieu, pour y allumer la lumière de son amour »7.

Comme la jeune étudiante à Vienne, tous, nous espérons

sans vraiment savoir ce que nous espérons. Notre âme est

comme la terre aride et altérée. Un grand nombre d’entre

nous sont tentés de recouvrir leur aspiration, de l’étouffer ou

simplement de l’oublier, parce qu’elle ne semble pas pouvoir

être jamais comblée. Comme les païens qui venaient parfois

prier dans la cour du Temple de Jérusalem – ou comme bien

des personnes de nos jours qui n’ont pas encore la foi – nous

attendons, insatisfaits par les « dieux, [les] rites et [les]

mythes » que nous nous sommes fabriqués. Nous continuons

de désirer « le Saint et le Grand, même si Dieu reste pour

[nous] le « Dieu inconnu » (cf. Actes 17, 23) »8.

Ce « Dieu inconnu » s’est abaissé pour nous montrer son

visage. Il est entré dans une relation d’amour avec nous, se

liant à nous pour toujours.

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Lorsque cela s’est produit, la terre entière fut remplie de

« la grande réalité, pleine, que nous attendons tous »9. Elle

fut remplie de la puissance de Dieu qui a pris la forme de la

pauvreté. Elle fut remplie de l’humilité avec laquelle il

mendie notre amour.10

Devant cette révélation, nous devenons soudain capables

d’accepter notre quête de Dieu et la « nostalgie qui se cache

en elle ».11 Nous découvrons alors que notre désir ne disparaît

pas, mais qu’il est au contraire transformé, rempli

d’admiration devant la beauté qui est apparue parmi nous.

Notre tentation de désespérer dans « ce temps d’absence de

Dieu » devient un regard émerveillé sur Celui qui est présent.

Jésus est Dieu et l’homme unis dans une alliance

irrévocable. En sa personne, il lie le ciel et la terre. Face à son

amour – par la naissance du Fils de Dieu, sa mort et sa

résurrection au milieu de nous – nous nous comprenons

soudain nous-même. Nous comprenons que, pendant tout

ce temps, celui qui est notre commencement et notre fin,

notre origine et notre destinée, espérait que nous espérions

en lui.

« Le mystère qui dépasse toute compréhension »

L’expérience d’avoir soif et d’espérer ce que nous ne

comprenons pas complètement n’est pas nouvelle.

Lorsque deux jeunes pêcheurs juifs étaient assis au bord

du Lac de Galilée, il y a bien des siècles, un homme d’une

autorité étonnamment convaincante, passa par là et leur

dit simplement : « Suis-moi ! » Leur réponse immédiate

révèle la reconnaissance qui, comme une étincelle, a dû les

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surprendre à ce moment-là : « Alors, laissant dans la barque

leur père Zébédée avec ses ouvriers, ils partirent à sa suite »

(Marc 1, 20).

Dans ce maître qui les appelait, Jacques et Jean ont entrevu

quelque chose qu’ils avaient attendu toute leur vie, avec le

peuple fidèle d’Israël.

Pendant trois ans, ils ont regardé Jésus prier, enseigner,

guérir, chasser les démons, nourrir les foules et calmer le

vent et les vagues. Un jour, qui fut inoubliable, avec Pierre,

ils le virent transfiguré sur le Mont Thabor, son visage

brillant comme le soleil et ses vêtements blancs comme la

lumière. Ils entendirent la voix de Dieu le Père, qui trouve sa

joie dans son Fils et ils tombèrent face contre terre saisis

d’une grande crainte (cf. Matthieu 17, 1 sq).

Ces frères savaient qu’il y avait quelque chose de grand

dans cet homme qu’ils ne comprenaient pas, et qu’il méritait

leur fidélité et leur amour. Et, en le suivant jour après jour,

ils ont découvert que quand ils priaient les anciens psaumes

d’Israël, les paroles étaient remplis d’une lumière nouvelle et

encore indéfinissable : « Tu es beau, comme aucun des enfants de

l’homme, la grâce est répandue sur tes lèvres […] que les peuples te

rendent grâce » (Psaume 45, 3 et 18).

Le plus jeune des deux frères, Jean, a dû repenser souvent

à ce premier moment au bord du lac, lorsqu’il a laissé ses

filets et son père pour se lancer dans l’aventure à la suite de

Jésus. Pourtant, même pendant ces trois années passées à

côté de Jésus, Jean ne pouvait pas imaginer qu’un jour, il se

tiendrait sur la colline de l’exécution, regardant son maître

mourir dans une longue agonie sur la croix. Il ne pouvait pas

savoir que, lorsqu’il verrait le corps de son ami dans la tombe,

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les paroles qu’il avait apprises enfant auraient soudain revêtu

un sens infiniment plus grand que celui qu’elles avaient

auparavant : « C’est ta face, Seigneur, que je cherche ; ne me cache pas

ta face » (Psaume 27, 8-9).

Toutes les catégories de pensée qui leur étaient familières

allaient éclater pour Jacques et Jean, les fils de Zébédée,

rassemblés avec les autres disciples perdus et effrayés après

la mort de Jésus. Aucun d’eux n’auraient pu avoir le moindre

pressentiment que leur maître, qui était mort, allait se

trouver au milieu d’eux et leur donner sa paix.

À peine une semaine plus tard, une nuit de pêche sans

résultat, avec quelques autres disciples, allait se conclure avec

des filets remplis à craquer, après qu’un inconnu se tenant

sur la plage leur avait dit de lancer leurs filets vides de l’autre

côté du bateau.

Jean, dont la vue et l’ouïe s’étaient peu à peu accordées à

la voix et à la silhouette de l’Amour, s’était exclamé : « C’est

le Seigneur ! » (Jean 21, 7).

Leur maître qui, sur la plage, offrait aux disciples du

poisson grillé et du pain rompu de ses propres mains, était

quelqu’un qu’ils connaissaient intimement et pourtant, ils ne

le connaissaient presque pas. C’était l’ami, mais aussi l’inconnu

devant qui ils n’osaient pas parler. « Aucun des disciples n’osait

lui demander : « Qui es-tu ? » (Jean 21, 12). C’était trop évident,

et en même temps trop incompréhensible. Il était trop plein

du mystère de Dieu.

Au cours des quarante jours que Jésus passa avec eux après

Pâques, leur découvrant les Écritures, les apôtres comprirent

de plus en plus profondément qu’une vie entière ne suffirait

pas pour réfléchir sur ce qu’ils avaient vu de leurs yeux et

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touché de leurs mains (cf. 1 Jean 1,1). Car cet homme, qui était

né comme un enfant désarmé et qui avait vaincu la mort,

était le Fils de Dieu fait homme. Jésus n’était pas simplement

« beau, comme aucun des enfants des hommes » (psaume 45,

3). Il était la beauté même venue habiter parmi les hommes.

Il était « le Seigneur tout-puissant du ciel et de la terre, [qui]

avait choisi de s’incarner, cachant sa gloire sous le voile de

notre chair, pour nous révéler sa bonté (cf. Tite, 3, 4) »12.

Quand les apôtres se sont dispersés pour proclamer

jusqu’aux confins de la terre la Bonne nouvelle de la vie, de

la mort et de la résurrection de Jésus-Christ par lesquelles

nous étions rachetés, ils savaient, avec tous ceux qui crurent

à cause d’eux, que la vie de Jésus contient un mystère. En

fait, sa vie est le « grand mystère » qui unit le ciel et la terre

(cf. Éphésiens 5, 32). Ce mystère n’est pas quelque chose

d’irrationnel ou qui ne peut pas être connu ; au contraire, il

contient des profondeurs insondables. Il révèle le Dieu qui

« a tant aimé le monde » (Jean 3, 16) qu’il s’est lié à sa créature

pour toujours. Et en nous montrant notre destinée et notre

salut, la vie du Fils de Dieu incarné révèle la pleine « vérité

sur l’homme »13.

Depuis que le Fils de Dieu « s’est abaissé » (Philippiens 2,

8), pour naître comme un homme et pour mourir pour

l’humanité sur une croix, l’émerveillement de l’Église devant

le geste de charité incompréhensible de Dieu a grandi. Plus

les apôtres ont laissé l’expérience de Pâques éclairer leur

cœur et leur esprit, plus ils sont devenus conscients que la

vie de leur maître les dépassait infiniment. Comme un

amoureux qui ne peut jamais contempler suffisamment

longtemps le visage de celle qu’il aime, ils sont revenus sur

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ce qu’ils avaient vu, entendu et touché pour le contempler

avec un cœur rempli d’émerveillement.

Le pape Jean-Paul II, successeur des temps modernes des

apôtres, nous rappelait que vingt siècles n’ont pas diminué

cet émerveillement ni nullement rendu la contemplation de

la vie de Jésus-Christ moins nécessaire pour les hommes et

les femmes d’aujourd’hui. Tout ce qu’est l’Église et tout ce

qu’elle fait « sera déterminé par la capacité des chrétiens à

entrer dans la « parfaite connaissance du mystère de Dieu,

du Christ, en qui sont cachés tous les trésors de sagesse et de

connaissance » (Colossiens 2, 2-3) »14.

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« Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous »

(Jean 1, 14)

Chapelle de la Sainte Famille, Conseil suprême

des Chevaliers de Colomb, New Haven, Connecticut.

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11

Un mystère joyeux

« Et le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous »

Nous entrons dans la connaissance du mystère du Christ avec

Marie, sa mère. La jeune femme juive qui a été choisie pour

être la mère du Verbe incarné fut la première à rencontrer le

mystère entier de l’humilité sans bornes de Dieu – le mystère

dans lequel Dieu révèle qu’il est Amour. Dans sa foi

transparente en la bonté du Père, dans sa docilité totale à

l’Esprit de Dieu, elle a entendu la question que Dieu lui posait

et elle a dit simplement : Oui, oui, viens. Bien que je ne puisse

absolument pas comprendre ce que ta parole peut signifier pour moi, je

sais que tu es bon. Oui, « qu’il me soit fait selon ta Parole » (Luc 1, 38).

Le pape Benoît XVI faisait observer que toute l’histoire

conduit au « moment décisif où Dieu a frappé à la porte du

cœur de Marie et où, une fois reçu son "oui", il a commencé

à prendre chair en elle et par elle »15. La grâce de Dieu a

préparé et rendu possible sa réponse, mais il n’y a pas de

contrainte dans l’amour. À ce moment-là, toute la soif de

Dieu de la création, exprimée au long des siècles dans la

prière du peuple d’Israël, a rencontré un Dieu qui attendait

le « oui » de sa créature. Avec le « qu’il me soit fait » de Marie,

la voie s’est ouverte au Dieu qui est Amour. En Jésus-Christ,

le Fils de Dieu fait homme, Dieu a pu se livrer à elle et à nous.

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En son sein, puis dans ses bras, à sa naissance, la Vierge

Marie a reçu le Verbe par qui le monde a été fait (cf. Jean 1, 3).

Le mystère de la vie de son fils allait remplir de plus en plus sa

propre vie avec le temps. Il remplirait aussi la vie des disciples

de Jésus. Et tous les peuples et nations, de toutes langues,

contempleraient un jour le Roi de l’univers ressuscité

(cf. Daniel 7, 14). Mais la contemplation de Jésus-Christ par

tous les croyants demeure enracinée dans le premier regard

émerveillé posé par Marie sur le Verbe incarné.

La deuxième personne de la Sainte Trinité est descendue

du ciel comme la pluie sur la terre desséchée, mais elle était

aussi un fruit de cette terre.16 Petit enfant dans les bras de

Marie, il est venu en tant que Dieu qui « nous a montré son

visage et ouvert son cœur » comme « le pont, qui met vraiment

Dieu et l’homme en contact direct »17. Dans la paisible

salutation de l’ange et dans la pauvreté de l’étable à Bethléem,

la mère de Jésus fut le premier témoin de « l’admirable union

de la nature divine et de la nature humaine dans l’unique

Personne du Verbe »18.

L’événement presque caché de l’Incarnation contenait

quelque chose d’infiniment plus grand et plus pur que tout

le reste dans la création. Comme Marie commença à le

comprendre imperceptiblement à partir du moment où

l’Esprit la couvrit de son ombre (cf. Luc 1, 35), cet enfant, cet

homme qui allait prêcher, souffrir, mourir et ressusciter,

« n’est pas seulement décrit comme le Fils de Dieu, il est le

Fils »19. Par sa simple présence, il nous communique l’Amour

qu’est Dieu lui-même. Comme l’a dit Jésus à ses disciples, il

nous montre le visage du Père.20

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En regardant son enfant nouveau-né, Marie contemplait

le mystère qui deviendrait le cœur de la foi de l’Église.

Comme l’expliquait Jean-Paul II, « vraiment le Verbe « s’est

fait chair » et […] il a assumé toutes les dimensions de

l’humain, sauf le péché (cf. Hébreux 4,15). Dans cette

perspective, l’Incarnation est véritablement, de la part du Fils

de Dieu, une kénose, un « dépouillement » de la gloire qu’il

possède de toute éternité (cf. Philippiens 2,6-8; 1 Pierre 3,18) »21.

Les Pères de l’Église ont souvent affirmé que Dieu s’est

fait pauvre pour que nous puissions devenir riches : « c’est

seulement parce que le Fils de Dieu est devenu vraiment

homme que l’homme peut, en lui et à travers lui, devenir

réellement fils de Dieu »22.

En contemplant cet enfant qui, seul, nous révèle

pleinement Dieu, nous commençons à comprendre quelque

chose du Dieu qui nous a fait un tel don de lui-même. Nous

pressentons ce pour quoi Dieu est venu à nous non par la

force mais dans la pauvreté, et avec tant de douceur que les

rois se sont agenouillés pour l’adorer (cf. Mt 2, 11). Et nous

devinons la vie d’amour qui est en Dieu et qui nous est

ouverte.

L’apôtre Jean a finalement trouvé les mots pour exprimer

cet événement insurpassable qui l’avait rempli d’émer -

veillement, comme Marie. Cet événement merveilleux

remplit encore la contemplation de tous les croyants : « Et le

Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons

vu sa gloire, la gloire qu’il tient de son Père comme Fils

unique, plein de grâce et de vérité » (Jean 1, 14).

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« Quel échange admirable ! »

Devant une telle gloire cachée, nous pourrions nous

demander pourquoi Dieu n’est pas venu d’une façon plus

évidente. Pourquoi le maître de l’univers veut-il frapper

doucement à la porte de notre cœur, se remettre entre les

mains de ses créatures ? Mais quand nous regardons l’enfant

avec Marie, nous commençons à comprendre.

« Cela fait partie du mystère de Dieu d’agir de manière

humble », écrit Benoît XVI. « Et pourtant, n’est-ce pas là

justement le signe du divin ? Ne pas écraser par la puissance

extérieure, mais donner la liberté, donner et susciter

l’amour »23. La révélation de la gloire de Dieu ne réside-t-elle

pas justement dans le fait qu’il « se vide de lui-même » ? Son

amour pour nous qui attend notre réponse libre n’est-il

pas la seule manière de nous attirer dans sa vie et dans

son amour ?

À la lumière de cette délicatesse – à la lumière de l’humble

charité qui nous révèle le vrai pouvoir de Dieu – nous com -

mençons aussi à comprendre quelque chose de nous-mêmes.

« C’est ta face, Seigneur, que je cherche… » Peut-être ce désir

ancien trouve-t-il un écho en nous. Peut-être ne savons-

nous pas ce que nous cherchons. Mais quand nous

rencontrons le visage de Dieu révélé dans cet enfant sans

défense, nous commençons à comprendre ce que Dieu

cherche. Il cherche notre amour. Il veut nous faire partager

sa vie, nous faire sortir du péché qui nous emprisonne. En

Jésus-Christ, Dieu désire non seulement nous montrer son

visage. Il nous révèle notre origine et notre destinée. Il nous

montre « le vrai visage de l’homme »24.

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Dans une homélie de Noël, le pape Benoît explique qu’en

Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme, nous apprenons

finalement ce que signifie être humain :

L’ange avait dit aux bergers : « Voilà le signe qui vous est donné :

vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une

mangeoire » (Luc 2, 12 ; cf. 16). Le signe de Dieu, le signe qui est

donné aux bergers et à nous, n’est pas un miracle bouleversant.

Le signe de Dieu est son humilité […] Comme nous désirerions,

nous les hommes, un signe différent, un signe imposant,

irréfutable du pouvoir de Dieu et de sa grandeur. Mais son signe

nous invite à la foi et à l’amour et, en conséquence, nous donne

l’espérance : ainsi est Dieu […] Il nous invite à devenir semblables

à lui […] Quand nous le voyons, lui, le Dieu qui est devenu enfant,

notre cœur s’ouvre. Dans la liturgie de la Sainte Nuit, Dieu vient

à nous en tant qu’homme, afin que nous devenions vraiment

humains.25

Ce que Marie contemplait en tenant l’enfant dans ses bras,

ce que Jacques et Jean ont pressenti le jour où ils ont laissé

leurs filets et leur père, c’est le mystère du Dieu qui s’est

penché par amour sur sa créature. C’est le mystère de la

créature élevée pour partager la vie de Dieu. C’est pourquoi,

bien que cet enfant fût destiné à souffrir et mourir pour

nous, le mystère de l’Incarnation du Verbe est toujours un

mystère joyeux.

Cette joie, qui a rempli Marie et les disciples de Jésus, trouve

encore écho dans la liturgie des Heures, la prière quotidienne

de l’Église du Christ. Remplie d’une joie qui ne passe pas, elle

s’exclame dans une adoration émerveillée : « Quel échange

admirable ! Le Créateur de l’homme, en prenant chair de la

Vierge Marie, nous donne part à sa divinité ! »26

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« Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux ;

quant à l’ami de l’époux, il se tient là, il entend la voix

de l’époux, et il en est tout joyeux. » (Jean 3, 29)

Détail : le baptême du Seigneur.

Mur de L’Incarnation du Verbe,

Chapelle Redemptoris Mater, Cité du Vatican.

Image reproduite avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

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Un mystère lumineux

« Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux »

Trente ans plus tard, le regard rempli d’étonnement de Marie

se reflétait dans celui, étonné aussi, de Jean-Baptiste,

lorsqu’il vit Jésus venir à lui pour recevoir le « baptême de

repentance pour le pardon des péchés » (Luc 3, 3). À ce

moment-là, Jean a perçu à quel point Dieu s’était abaissé

quand le Père avait envoyé son Fils bien-aimé dans un

monde défiguré par le péché.

Jean-Baptiste a compris que le péché était un em -

prisonnement délibéré dans « la nuit de la haine et de

l’aveuglement »27. C’est notre rejet absurde de la communion

avec Dieu et avec les autres. Tout le peuple fidèle d’Israël

savait que le péché signifiait la mort, car la mort est ce qui

arrive quand nous nous coupons du Dieu qui nous a fait

participer à sa vie.

Il semblait que nous, êtres humains pécheurs, avions

coupé toute voie de communication entre Dieu et nous-

mêmes. Il n’y avait pas de pont entre l’Amour et notre refus

d’aimer, entre la sainteté sans défense de Dieu et notre

protection de nous-mêmes dans le péché. Puis Jean vit un

homme sans péché descendre jusque dans l’ « obscurité de la

distance de l’homme vis-à-vis de Dieu »28. Comme l’explique

le pape Benoît, en décrivant le baptême du Christ, Jean-

Baptiste regardait le Messie tant attendu d’Israël, qui a pris

« sur ses épaules le fardeau de la faute de l’humanité entière »

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et « l’a porté en descendant dans le Jourdain »29. Ainsi, Jésus

« inaugure son activité publique en prenant la place des

pécheurs. Il l’inaugure en anticipant la croix »30.

Ce moment, où le Fils incarné s’est abaissé dans les eaux

qui symbolisaient la mort, fut celui de la confirmation de la

mission de Jésus. Jésus a été envoyé dans ce temps « où la

terre des âmes est aride »31, afin d’y révéler le visage du Dieu

qui est Amour.

Jean-Baptiste vit l’Esprit descendre et demeurer sur celui

qui était envoyé pour ramener le monde à Dieu (cf. Jean 1, 32).

Et pendant un instant, le dernier et le plus grand des

prophètes de l’Ancienne Alliance entendit la voix du Père

(cf. Marc 1, 11). Cet homme qui avait passé sa vie à préparer la

voie du Seigneur, entraperçut l’ineffable communion qui est

Père, Fils et Saint-Esprit unis dans l’amour.

Par ses lèvres et par sa vie, Jean-Baptiste avait exprimé la

prière séculaire de son peuple : « Berger d’Israël […] resplendis

[…] que ton visage s’éclaire et nous serons sauvés ! » (Psaume 79, 2-4).

Dans l’homme de Nazareth qui était venu demander le

baptême, le Berger d’Israël se manifestait comme le Dieu qui

est « amour par nature » et qui se livrait complètement dans

ce monde souffrant.32

L’art religieux a saisi ce moment où Jean-Baptiste

comprend soudain. Au long des siècles, peintures et icônes

le représentent indiquant Jésus, son doigt tendu signifiant

sans paroles ce qu’il proclamait : « Voici l’Agneau de Dieu ! »

(Jean 1, 36). Regardez celui qui est venu ! Regardez celui qui

prend sur lui tous les péchés du monde ! À ce mystérieux cri

de reconnaissance, deux des disciples du Baptiste réagissent :

« Les deux disciples entendirent ce qu’il disait, et ils suivirent

Jésus » (Jean 1, 37).

Jean-Baptiste avait enseigné à ses disciples le désir

18

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19

contenu dans les psaumes. Ils l’avaient entendu prononcer

les paroles des prophètes. Et bien que la promesse ait semblé

loin d’être réalisée, ils savaient que Dieu avait fait le serment

d’aimer son peuple inconstant : « En ce jour-là je conclurai à

leur profit une alliance […] Je ferai de toi mon épouse pour

toujours, je ferai de toi mon épouse dans la justice et le droit

[…] et tu connaîtras le Seigneur » (Osée 2, 20-22).

Les disciples – la tradition identifie l’un d’eux comme

André – ne pouvaient pas pénétrer le mystère contenu dans

leur nouveau maître. Pourtant, quelque chose en eux

pressentait la raison de la plénitude de joie de leur vieux

maître. « Celui à qui l’épouse appartient, c’est l’époux », avait

dit Jean-Baptiste en se référant à Jésus par un titre qu’Israël

réservait à son Berger et Seigneur.33 « Quant à l’ami de

l’époux, il se tient là, il entend la voix de l’époux, et il en est

tout joyeux. Telle est ma joie : elle est parfaite. » (Jean 3, 29).

Le temps de l’absence de Dieu était au moins devenu un

temps de la présence de Dieu. La lumière de l’amour divin

avait commencé à briller des profondeurs de notre nuit.

« Tu as gardé le meilleur vin pour la fin »

La lumière de l’amour de Dieu allait être de plus en plus forte.

Pendant trois ans, les deux anciens disciples de Jean-

Baptiste et leurs compagnons – ceux qui deviendraient les

douze apôtres – ont vécu dans cette lumière. Son éclat

pénétra à travers les fissures de leur obstination et de la

faiblesse de leur foi.

Laborieusement, comme des aveugles qui apprennent à

voir, ils finirent par comprendre ce que Marie avait su dans

le silence au moment où l’enfant avait été conçu dans son

sein : « Des langes de sa nativité jusqu’au vinaigre de sa

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passion et au suaire de sa Résurrection, tout dans la vie de

Jésus est signe de son mystère »34.

Il a fallu du temps pour que la perception des disciples

s’ajuste à la lumière éclatante de cet amour. Au commencement

de leur vie avec Jésus, ils eurent besoin de Marie pour les aider.

Plus tard, l’apôtre Jean rappela que Marie, Jésus et ses

disciples avaient participé à un mariage à Cana en Galilée

(cf. Jean 2, 1). Comme tous les mariages pour le peuple

d’Israël, celui-ci contenait des échos de l’alliance que Dieu

avait établie entre lui-même et le peuple qu’il aimait. Dans

cette alliance, comme dans celle des noces célébrées par leurs

amis, Marie vit ce qui manquait. Incarnant la foi d’Israël,

l’amour avait déjà rendu son regard limpide. Elle dit à Jésus :

« Ils n’ont plus de vin » (Jean 2, 3).

Les nouveaux mariés n’ont pas simplement honte parce

qu’il n’ont plus rien à offrir à leurs invités. Nous avons tous

honte parce qu’il nous manque le vin de l’amour de Dieu.

Nous avons rompu l’alliance que Dieu avait établie avec nous

et nous n’avons plus rien à lui offrir. Il nous manque la seule

chose qui donne la joie. Les rires se sont tus en nous, nous

laissant inféconds et sans vie.

En réponse à la remarque de Marie, Jésus sembla la

repousser, par des paroles mystérieuses qui annoncent déjà

le temps de ses souffrances. « Mon heure n’est pas encore

venue » (Jean 2, 4). Toutefois, les disciples l’ont entendue

donner des instructions aux serviteurs qui représentent tout

le peuple fidèle d’Israël et nous-mêmes : « Tout ce qu’il vous

dira, faites-le ! » (Jean 2, 5). On remplit d’eau six jarres de pierre

jusqu’au bord. On apporta une louche au maître de la fête. Dès

qu’il l’eût goûtée, il se tourna avec étonnement vers le marié

et s’exclama : « Tout le monde sert le bon vin en premier et,

lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais

20

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21

toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant » (Jean 2, 10).

Les yeux et le cœur des disciples s’ouvrirent tout grand.

« Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit.

C’était à Cana de Galilée. Il manifesta sa gloire, et ses

disciples crurent en lui » (Jean 2, 11). Bien sûr, ils ne

comprenaient pas encore tout son mystère. Mais alors que

leurs yeux commençaient à s’abreuver à sa lumière, ils

s’engageaient à tâtons dans le mystère de notre rédemption.

Dieu avait changé l’eau de notre humanité en vin de sa

divinité. Au milieu du peuple de Dieu inconstant et de

l’humanité inconstante, Dieu lui-même était venu pour être

la fidélité qui guérirait l’alliance rompue. Lui, le véritable

époux aux noces du Créateur avec sa création, avait « gardé

le bon vin jusqu’à maintenant ».

Jean-Baptiste avait déclaré : « Celui à qui appartient

l’épouse, c’est l’époux » (Jean 3, 29). Aujourd’hui encore,

l’Église inclut la manifestation du Seigneur aux nations, son

baptême et le miracle de Cana dans la même prière de

louange : « Aujourd’hui, l’Église est unie à son Époux : le

Christ, au Jourdain, la purifie de ses fautes, les mages

apportent leurs présents aux noces royales, l’eau est changée

en vin, pour la joie des convives, alléluia »35.

« Ceci est mon corps, donné pour vous »

L’éclat de ce signe, par lequel Jésus a pour la première fois

« manifesté sa gloire » à ses disciples, a perduré. À travers les

guérisons miraculeuses, les mots des paraboles, et même les

disputes avec les maîtres de la loi, les disciples ont entrevu

un amour qu’ils ne comprenaient pas. Cela les dépassait. Sa

lumière était trop forte pour eux. Parfois, comme lorsque

Jésus calma une tempête sur la mer d’un simple mot d’ordre,

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ils entrevirent la majesté de cet amour. Frappés de stupeur,

ils murmuraient : « Qui est-il donc, celui-ci ? » (Marc 4, 41).

Mais malgré cela, « ils n’avaient rien compris » (Marc 6, 52).

Ils ont certainement connu des moments d’illumination.

Pénétré d’une lumière qui venait du Père, Pierre s’est exclamé

au nom des Douze : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant »

(Matthieu 16, 16). Pendant de rares moments privilégiés,

sur le Mont Thabor, Pierre, Jacques et Jean allaient devenir

une image de l’Église future, qui « contemple le visage

transfiguré » du Christ comme « l’Épouse devant l’Époux, elle

participe à son mystère, elle est entourée de sa lumière»36.

Mais même alors, les apôtres redescendirent de la montagne,

une fois encore perdus dans leur incapacité à comprendre.

L’ « heure » de Jésus, à laquelle il avait fait allusion à Cana,

n’était pas encore venue. Les disciples n’avaient pas encore vu

la pleine révélation de l’Amour. Pourtant, depuis qu’ils avaient

entraperçu la gloire de Jésus dans le miracle de Cana, cette

heure était inéluctable. Leur maître, « le visage déterminé,

prit la route de Jérusalem » (Luc 9, 51), là où les prophètes

étaient morts, et les disciples suivirent en tremblant.

Avec ses disciples rassemblés dans la ville sainte, la nuit où

Judas partit pour le trahir, Jésus leur permit d’être les

témoins de sa prière intime avec son Père : « Père l’heure est

venue. Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie » (Jean 17, 1).

C’était l’heure de l’amour de Dieu – le moment où le Fils de

Dieu allait être livré aux pécheurs pour nous racheter et nous

révéler le visage de Dieu. Cette nuit-là, en transformant en

son corps et en son sang le pain qu’il rompit pour eux et le

vin qu’il leur offrit, Jésus fit de sa mort imminente un acte

d’amour. « Ma vie […] nul ne peut me l’enlever » dit-il

(Jean 10, 17-18). Il l’a donnée librement pour le monde – et

par-dessus tout, pour l’amour de son Père.

22

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23

Quand Jésus institua l’Eucharistie, la nuit qui précédait sa

mort, ses disciples commencèrent à percevoir toute la

largeur et la profondeur contenues dans le signe dont ils

avaient été les témoins à Cana. Ils ne le savaient pas alors,

mais l’eau transformée en vin pour la fête des noces leur

indiquait cette soirée et les trois jours qui suivront. Car

quand Jésus guérit l’alliance rompue, c’est avec son corps

rompu. Quand il donne le vin de « l’alliance nouvelle et

éternelle »37 qui lie Dieu et l’homme, c’est en versant son sang.

Le pape Benoît explique que dans l’Eucharistie, Jésus nous

donne la nourriture dont l’homme a vraiment besoin : « la

communion avec Dieu lui-même38» . Il nous donne le bon vin

véritable, « le calice rempli du vin de son amour […]

L’Eucharistie est plus qu’un repas, c’est une fête pour des

noces. Et ces noces sont enracinées dans le don que Dieu fait

de lui-même, jusqu’à la mort »39. Dans l’Eucharistie, nous

voyons « le lien que [Jésus] voulut établir », par sa mort et sa

résurrection, « entre lui-même et nous, entre sa propre

personne et l’Église »40.

Sous le regard étonné de onze de ses apôtres, le Fils de Dieu

rendit grâce au Père. Puis, bénissant, rompant et leur donnant

le pain, il se donna totalement par amour pour l’humanité

(cf. Marc 14, 22). « Ceci est mon corps, donné pour vous. Faites

cela en mémoire de moi […] Cette coupe est la nouvelle

Alliance en mon sang répandu pour vous » (Luc 22, 19-20).

Ce sont les paroles de la Nouvelle Alliance. Ce sont les mots

d’un amour qui est plus fort que la mort. Et même s’ils

introduisaient dans cette « nuit » chaotique où la haine a

semblé triompher (cf. Jean 13, 30), ces paroles nous montrent

aussi clairement que le mystère de l’Incarnation du Verbe est

le mystère d’un amour insondable. C’est le mystère de la

lumière de Dieu.

23

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« Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas… » (Jean 12, 24)

Détail : la Déposition ; le corps de Jésus, mort,

est soutenu par Marie et Joseph d’Arimathie.

Chapelle des Sœurs hospitalières de la Miséricorde, Rome.

Image reproduite avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

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Un mystère douloureux

« J’ai soif ! »

Au cours de la nuit et de la journée qui suivirent la Dernière

Cène, Jésus fut trahi par l’un des siens. Il fut livré aux

autorités dans une impuissance si humiliante que même

ceux qui croyaient l’aimer s’enfuirent. Lui, qui était venu

nous révéler le Dieu qui est Amour, tomba entre les mains

d’hommes sans amour. Puis, sous les yeux de Jean, le seul

apôtre présent au moment de l’exécution du Seigneur, et de

sa mère Marie, il mourut d’une mort effroyable.

C’est là, au centre du mystère de notre rédemption, que la

pleine mesure de l’ « admirable échange » commence à être

dévoilée. Le Fils de Dieu n’est pas seulement devenu le Fils

de l’Homme, réalisant au-delà de toute attente la grande

espérance contenue dans les psaumes et les prophètes. Jésus

est venu pour être parmi nous la flamme d’amour qui purifie,

désinstallant un monde devenu confortable en se séparant

de Dieu.41 Il est venu répandre sur nous son Esprit et nous

réconcilier avec le Père.

Quand saint Paul nous dit que le Fils de Dieu « s’est

anéanti » (Philippiens 2, 7), il ne fait pas seulement allusion

à la naissance de Jésus. Quand le Fils de Dieu a pris sur

lui notre humanité, cet « échange » qu’il fait avec nous

va jusqu’au bout : « Reconnu homme à son aspect, il s’est

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abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la

croix » (Philippiens 2, 8). Ailleurs, saint Paul indique le même

insondable mystère de solidarité avec les pécheurs que

Jean-Baptiste avait entrevu au Jourdain : « Celui qui n’a pas

connu le péché, Dieu l’a pour nous identifié au péché, afin

qu’en lui nous devenions justes de la justice même de Dieu »

(2 Corinthiens 5, 21).

Quand nous contemplons avec Marie et Jean le Christ qui

« est mort pour nos péchés conformément aux Écritures »

(1 Corinthiens 15, 3), nous nous trouvons face aux con -

séquences de l’Incarnation. En se joignant à sa création, le

Fils de Dieu a pris sur lui toute notre destinée. Il a même pris

sur lui la soif d’un monde qui souffre de son éloignement

vis-à-vis de Dieu, qu’il s’est infligé lui-même. Et même la mort.

Pendant des siècles, le peuple fidèle d’Israël a eu soif de

Dieu comme une terre sèche (cf. Psaume 62, 2). Ils priaient :

« Ma gorge brûle. Mes yeux se sont usés d’attendre mon

Dieu » (Psaume 68, 3).

Toute l’humanité était assoiffée parce par notre péché, nous

avions rejeté la source de notre vie. Nous nous étions protégés

contre un Dieu qui est Amour. Et pourtant, notre souffrance

en « ce temps d’absence de Dieu42» n’était rien par rapport au

terrible cri que Marie et Jean entendirent au pied de la croix.

« Jésus, sachant que tout était accompli, dit (pour accomplir

les Écritures) : « J’ai soif ! » (Jean 19, 28).

L’homme torturé, en train de mourir, avait soif d’eau, mais

aussi d’amour. Il était assoiffé de notre amour, parce qu’il

était venu pour épouser l’humanité. Et bien qu’il fût « vrai

Dieu né du vrai Dieu… de même nature que le Père »43, il était

aussi assoiffé de Dieu. Jean n’aurait pas pu imaginer un tel

26

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27

emploi – ou accomplissement – des paroles des psaumes

lorsque le Fils de Dieu cria sa soif à son Père : « Mon Dieu,

mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Psaume 22, 1 ;

Marc 15, 34).

En entendant cela, Jean a compris, d’une certaine façon.

Ces paroles avaient été écrites pour ce jour-là. Elles avaient

été priées au long des siècles afin que Jésus puisse récapituler

en lui-même toute soif humaine de Dieu, toute souffrance

et tout abandon. Ces paroles avaient été transmises de

génération en génération pour que, lorsque le Fils les reprit

pour exprimer à son Père sa soif, sa souffrance et son

abandon, nos paroles puissent devenir des paroles divines d’un

amour indéfectible et inégalable.

« Père, en tes mains je remets mon esprit », s’est écrié Jésus

(Luc 23, 46). Enfin, « inclinant la tête », il remit l’Esprit qui liait

le Père et le Fils (cf. Jean 19, 30). Il fit même de sa mort une

révélation de l’indéfectible communion d’amour qu’est Dieu.

Quand un centurion romain transperça le côté de Jésus

avec une lance, Jean, Marie et le centurion lui-même virent

du sang et de l’eau (signes de la divinité et de l’humanité du

Christ) jaillir sur la terre altérée. L’alliance était établie. Elle

ne serait jamais rompue. L’époux divin nous avait vraiment

aimés « jusqu’au bout » (Jean 13, 1).

Même le centurion, un incroyant qui ne connaissait ni les

psaumes ni les prophètes, reconnut cette humilité rayonnante

et vit la gloire de cet amour : « Le centurion qui était là en face

de Jésus, voyant comment il avait expiré, déclara : « Vraiment,

cet homme était Fils de Dieu ! » (Marc 15, 39).

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« Si le grain de blé… »

Lorsque Marie vit le sang et l’eau couler « du cadavre

transpercé du Crucifié »44, son regard aimant fut rempli de

chagrin et d’étonnement. Pour elle et pour tous ceux qui

croyaient avec elle, la vie de Jésus était devenue un mystère

d’une douleur infinie. Toutefois, cette peine n’est pas comme

le désespoir qui menace de nous engloutir quand l’amour est

absent. Bien que la mort du Seigneur contienne une

souffrance inimaginable, c’est le mystère d’un amour qui

chasse notre désespoir.

« Ils n’ont plus de vin », avait dit Marie à Cana. Devant la

haine qui parfois fait rage dans le cœur humain, il semblait

que nous n’avions plus rien du tout. Ni joie, ni vie, rien que

l’obscurité de la mort. Cependant, à partir de l’après-midi du

vendredi saint, lorsque Jésus mourut, en passant par le

silence du samedi saint, lorsqu’il reposait dans la tombe, la

création fut entraînée dans une alliance nuptiale. Marie,

Jean et quelques autres avaient déjà perçu cela sur le calvaire.

Car le sang qui coula du côté de Jésus « est son amour, dans

lequel la vie divine et la vie humaine sont devenues une seule

chose »45.

La mère de Jésus ne comprit pas tout cela tandis qu’elle le

regardait « blessé… lui, le Salut » et « tué, lui la Vie »46. Mais

elle accepta le mystère avec la même foi sans mesure, le

même abandon total et le même amour que lorsqu’elle avait

reçu les paroles de l’ange la première fois. Debout au pied de

la croix, elle dit « oui » encore une fois pour chacun de nous.

La femme de laquelle la douceur de Dieu avait obtenu un

28

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acte d’amour pleinement libre, au nom de tous les êtres

humains, consentait douloureusement au sacrifice qui

portait la rédemption du monde. Nous sommes invités à

fixer notre regard avec Marie sur Jésus crucifié, en laissant le

mystère remplir nos yeux, notre cœur et notre esprit.

En 2007, le pape Benoît XVI encouragea ses compatriotes

pèlerins à contempler le crucifix dans un sanctuaire marial

en Autriche. Il expliqua que les bras tendus de Jésus

représentent en premier « le geste de la Passion, avec lequel

il se laisse clouer pour nous, pour nous donner sa vie » .

Pourtant, a poursuivi le pape, c’est « en même temps

l’attitude de l’orant, une position que le prêtre prend » . C’est

le geste de celui qui a offert le monde à son Père dans un acte

d’amour parfait. « C’est enfin pourquoi, a dit le pape, les bras

étendus du Crucifié sont également un geste d’étreinte, par

lequel il nous attire à lui »47.

Le monde a été reçu en vérité et dans la tendresse. Le Fils

de Dieu a révélé le « véritable amour » qui « ne peut donner

moins que lui-même »48. Parce que Dieu est une communion

d’Amour qui « veut se répandre »49, le Fils est descendu dans

la souffrance, et même l’enfer de notre solitude. La douceur

de sa venue a ouvert la voie à l’extrême impuissance de la

croix et de la mort. Lorsque cela s’est produit, la descente de

Dieu dans le monde aride s’est révélée être un mystère de la

fécondité de l’amour.

« Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste

seul », a dit Jésus à ses disciples. « Mais s’il meurt, il porte

beaucoup de fruits » (Jean 12, 24). Nous percevons déjà le

« fruit » de la mort du Christ chez ceux qui sont debout au

pied de la croix. Avec Marie, se tenaient d’autres qui avaient

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commencé à participer à sa foi et à son amour : Jean, Marie-

Madeleine, Marie, femme de Clopas, Salomé, et même le

centurion qui a pressenti la grandeur devant lui. Ils furent

les témoins du don du sang et de l’eau jaillissant sur la terre

altérée et aride.

« L’eau était le symbole du baptême et le sang, de la sainte

Eucharistie », écrivit saint Jean Chrysostome au quatrième

siècle. « C’est de ces deux sacrements que l’Église est née »50.

De nos jours, le cardinal Ratzinger a exprimé le même

mystère de la fécondité de la mort du Christ : « L’Église tire

son origine du côté ouvert du Christ mourant ».51

30

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« Tous, d’un même cœur, étaient assidus

à la prière […] avec Marie la mère de Jésus »

(Actes 1, 14)

Le Saint-Esprit descend sur Marie et les apôtres à la Pentecôte.

Mur de La Divinisation de l’humanité,

Chapelle Redemptoris Mater, Cité du Vatican.

Image reproduite avec l’aimable autorisation du Centre Aletti.

Page 39: #3 Série sur la nouvelle évangélisation #3 Série sur la nouvelle ...#3 Série sur la nouvelle évangélisation #3 Série sur la nouvelle évangélisation Michelle K. Borras «

Un mystère glorieux

Le sceau de l’alliance

Le Fils de Dieu s’est réellement « anéanti » (Philippiens 2, 7).

Le Verbe est tombé dans un silence muet. Marie Madeleine

et d’autres qui l’aimaient virent la pierre roulée sur la tombe

béante, comme un sceau l’enfermant dans l’ombre de la

mort. Comme nous le confessons dans le Credo, le Christ « est

descendu aux enfers », dans la « profondeur de la mort »52, le

royaume de « ceux qui sont privés de la vision de Dieu »53. La

gloire de l’amour a brillé jusqu’au plus profond de notre nuit.

Les premiers chrétiens avaient perçu que c’était précisé -

ment en s’humiliant jusqu’à l’extrême, par solidarité pour les

pécheurs, que le Christ était victorieux. En Jésus-Christ, vrai

Dieu et vrai homme, le « mystère nuptial de l’amour » était

accompli.54 Dieu nous a aimé « jusqu’au bout » (Jean 13, 1) et

ce « bout » ne pouvait pas le retenir. Le Dieu trine, qui est

la Vie même, a brisé les chaînes de la mort. En s’humiliant

lui-même, le Christ a rempli toute la création, du ciel

jusqu’aux enfers, de l’amour fidèle et inébranlable de Dieu.

Dans une ancienne homélie chrétienne pour le Samedi

saint, le Christ s’adresse au premier homme, Adam, par ces

mots : « Lève-toi, œuvre de mes mains ; lève-toi, mon

semblable qui a été créé à mon image. Éveille-toi, sortons

d’ici. Car tu es en moi, et moi en toi, nous sommes une seule

33

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personne indivisible […] Je me suis endormi sur la croix, et la

lance a pénétré dans mon côté, à cause de toi qui t’es

endormi dans le paradis et de ton côté, tu as donné naissance

à Ève. Mon côté a guéri la douleur de ton côté »55.

Les yeux d’Adam, les yeux des hommes, s’étaient affaiblis

dans l’attente du salut de Dieu (cf. Psaume 69, 3). Mais quand

son Sauveur est venu pour faire sortir les âmes des justes du

royaume des morts, ces yeux furent remplis d’étonnement.

C’est précisément au sommet de son impuissance dans la

mort que le Christ a montré à Adam le ciel ouvert : « Le lit

nuptial est dressé, les aliments sont apprêtés, les tentes et

les demeures éternelles le sont aussi. Les trésors du bonheur

sont ouverts. »56. En son Seigneur, devenu sa descendance,

le père de la race humaine a vu la vie même de Dieu ouverte

à l’homme.

Personne, pas même nos premiers parents, ni Marie, ni

aucun des disciples, n’a vu le moment où Jésus a été ressuscité

des morts par le Père. Personne ne l’a vu confirmé comme le

« Fils de Dieu dans la puissance », dans la pleine effusion de

l’Esprit de Dieu (cf. Romains 1, 4). Seule l’ « éblouissante » nuit

« aussi claire que le jour »57, fut témoin de la consommation

de l’alliance entre Dieu et sa créature. L’Église loue encore la

« nuit vraiment bénie » entre le Samedi saint et le Dimanche

de Pâques, « O Nuit bienheureuse, où se rejoignent le ciel et

la terre, où s’unissent l’homme et Dieu ! »58. À la résurrection

de Jésus-Christ, c’est de sa – notre – chair ressuscitée, glorifiée,

que l’Esprit de Dieu fit irruption dans le monde.

Bien des années après, toujours émerveillé, Jean écrivait :

« Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que

les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient

34

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verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au

milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » (Jean 20, 19).

Les disciples terrifiés ne comprirent pas, et ils ne

pouvaient pas comprendre. Mais eux qui avaient perdu toute

raison de se réjouir, « se réjouirent en voyant le Seigneur »

(Jean 20, 20). Puis, dans un don d’une intimité insurpassable,

leur Dieu qui était aussi leur frère leur donna l’amour qui lie

le Père et le Fils. « Recevez l’Esprit-Saint », dit-il (Jean 20, 23).

Soufflant sur eux de son souffle humain, il leur donna le

sceau de l’alliance.

Ce jour-là, au comble de l’étonnement, ils ne pouvaient pas

réfléchir à ce que signifiait un tel don. Ce n’est que quelques

jours plus tard que les apôtres commencèrent à saisir

imparfaitement ce qui s’était produit au milieu d’eux. Leurs

yeux commencèrent à s’ouvrir à l’amour ineffable contenu

dans la résurrection de leur Seigneur.

L’incarnation du Verbe est davantage qu’un mystère de la

charité de Dieu. La vie, la mort et la résurrection du Fils de

Dieu sont un mystère d’amour réciproque. Jésus a prononcé

le « oui » définitif de Dieu à sa créature et le « oui » définitif

de la créature à Dieu. Sa mère a dit « oui » à l’ange,

consentant sans parole pour nous tous à la mort du Christ

sur la croix.

Lorsque sept des disciples rencontrèrent le Seigneur

ressuscité après avoir pêché toute la nuit en vain (Jean 21, 3),

la lumière de la compréhension commença lentement à se

lever sur eux. « L’homme ne vit pas de pain » seulement, ni

même simplement d’être aimé. « Dans l’essence de son

humanité, il vit d’être aimé et de pouvoir aimer »59.

« Simon, m’aimes-tu ? », demanda avec douceur Jésus à

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Pierre sur le rivage (Jean 21, 16). Trois fois, Jésus posa cette

question à l’homme qui avait enfoui dans son cœur la honte

insupportable d’avoir renié trois fois son Seigneur. « Oui,

Seigneur, tu sais que je t’aime », répondit Pierre. Celui qui

avait été choisi, pour être le berger du troupeau du Seigneur,

répondit à la fois pour lui-même et pour les autres. Un triple

« oui » pour son triple reniement : c’est le cadeau que lui fit

le Seigneur en ce lumineux matin de Pâques. Après tout,

le Fils de Dieu est venu afin que nous puissions être libres

pour aimer.

Dans cet émerveillement du chef des apôtres, dont le

péché avait été pardonné, l’Église saurait à jamais qu’elle a

été lavée dans le sang de l’Agneau.

L’Ascension et la Pentecôte

Les pêcheurs assis avec Jésus sur le rivage reçurent la charge

d’apporter le don du pardon de Dieu jusqu’aux extrémités de

la terre. C’est le don inépuisable des sacrements, coulant du

côté transpercé du Seigneur, qui leur était confié. « Comme

le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie », leur avait-il dit

le soir de Pâques, les entraînant dans l’amour du Père et du

Fils (Jean 20, 21). Muets d’étonnement, ces hommes avaient

reçu la tâche de proclamer l’œuvre de rédemption de Dieu

jusqu’aux extrémités de la terre.

Pendant quarante jours, ils virent et touchèrent leur

maître ressuscité, qui les aimait et qu’ils aimaient. En leur

promettant la proximité du Père et le don de l’Esprit de Dieu,

non seulement il leur ouvrait les Écritures mais il les ouvrait

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au Dieu trine. Tous leurs sens étaient remplis de sa présence

(cf. 1 Jean 1, 1). Enfin, sur cette mystérieuse promesse qu’il

serait avec eux jusqu’à la fin du monde (cf. Matthieu 28, 20),

Jésus monta au ciel vers son Père.

Le jour de l’Ascension, les disciples virent l’indissolubilité

de l’alliance que Dieu avait établie avec toute l’humanité.

Dans le Christ ressuscité, un homme avec notre chair et

notre visage est entré dans la vie de la Trinité. Le Fils de Dieu

ne perdrait jamais la nature humaine qu’il avait prise sur lui.

Dieu ne serait jamais infidèle à la réponse d’amour de sa

créature. Dans cette divine fidélité, qui ouvrait le ciel au

monde et le monde au ciel, les disciples virent davantage

qu’un mystère joyeux, lumineux ou douloureux. La vie tout

entière de Jésus, de sa conception à son Ascension au ciel, est

un mystère de la gloire de Dieu.

Cette gloire était si puissante et cet amour si grand qu’ils

ne pouvaient que remplir toute la création. « Allez dans le

monde entier proclamer l’Évangile à toute la création », avait

ordonné Jésus (Marc 16, 15).

Les disciples ne pouvaient pas s’appuyer sur leur propre

pouvoir pour obéir. Pendant dix jours après que leur maître

était monté au ciel, « tous, d’un même cœur, étaient assidus

à la prière […] avec Marie la mère de Jésus » (Actes 1, 14). Avec

la femme dont ils partageaient maintenant la foi et l’amour,

ils priaient, attendaient et écoutaient. « Ce que le Père avait

promis » viendrait (Actes 1, 4). C’est du ciel, cette fois-ci, que

le Seigneur ressuscité leur enverrait l’Esprit qui lie le Père et

le Fils.

Quand arriva enfin le jour de la Pentecôte, l’Esprit vint sur

eux comme des « langues de feu » qui consumèrent leur

37

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crainte (Actes 2, 3). Il éclaira leur intelligence, leur montrant

les profondeurs infinies contenues dans les mystères de la

vie de leur Seigneur. Ce « feu intelligent [...] qui transforme,

rénove et créé du nouveau dans l’homme »60 transforma ces

hommes en « envoyés », ou « apôtres ». Il les rendit capables

de communiquer à toutes les cultures et tous les peuples ce

dont ils avaient été témoins en Jésus.

Surtout, le don de l’Esprit fit de ce petit groupe de disciples

une communion sur la terre qui reflétait la communion

trine de Dieu. Au long des âges, les croyants reviendraient

sans cesse à ce qui s’était passé à la Pentecôte. Ils

contempleraient les apôtres rassemblés en prière avec Marie,

soudain remplis de l’Esprit de Dieu. Car à ce moment précis,

ce petit groupe de croyants, qui était le fruit de la mort du

Christ, est devenu – pour le monde entier – l’Église, le signe

visible et efficace du Dieu qui est Amour. L’unité de Dieu

dans la communion avait pénétré et transformé les premiers

chrétiens. Avec Marie au milieu d’eux, telle le cœur aimant

et priant de l’Église, ils sont devenus le sacrement du salut

du monde.61

Bien avant la venue du Christ, Dieu avait promis, par le

prophète Joël : « Je répandrai mon Esprit sur tout être de

chair » (Joël 3, 1). Dans les disciples et dans la Mère qui leur

enseignait comment recevoir le don de Dieu, les psaumes et

les prophètes étaient accomplis. Ces premiers croyants,

remplis de la joie du Saint-Esprit, étaient les premiers fruits

de l’humanité rachetée. Ils étaient le signe que le Fils était

donné et que l’Esprit était répandu pour que tous les peuples

de tous les temps et de toutes les nations puissent être

attirés dans la vie de la Trinité.

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« L’Esprit et l’Épouse disent : ‘Viens !’ »

Enfin, le monde souffrant peut prier avec les mots du

psalmiste : « Ma coupe déborde » (Psaume 23, 5). La terre n’est

plus altérée et nue ; elle déborde du vin de l’amour de Dieu.

Nous attendons encore la venue finale du Seigneur « dans la

gloire pour juger les vivants et les morts »62. Alors, le Fils

incarné, qui lia Dieu à l’homme et le ciel à la terre, présentera

son œuvre accomplie à son Père (cf. 1 Corinthiens 15, 24).

Comme sa première venue, ce jour-là aussi sera un mystère

d’amour. Pourtant la transformation du monde a déjà

commencé.

Doucement, et parfois dramatiquement, le mystère déjà

accompli dans le Christ rencontre la liberté des cœurs

humains. Il nous rencontre partout, caché dans le visage de

notre prochain. Dans les sacrements de l’Église, nous

sommes mis en contact avec cette vie inépuisable. Il

transfigure même les éléments les plus élémentaires de

notre existence. Dans le baptême, l’eau devient un « bain de

noces »63. À la Confirmation, l’huile nous marque du sceau

de l’alliance. Le pain et le vin deviennent le Corps et le Sang

du Seigneur, la nourriture de « repas de noces »64. Les choses

les plus simples dans le monde revêtent soudain une

signification infinie, nous attirant dans la vie de Dieu.

Il y a sans doute beaucoup de souffrance dans le monde,

tandis que la rédemption la transforme lentement comme

le levain. Il y a sans doute encore des larmes, des pleurs et

des douleurs, car le Seigneur ressuscité a vaincu le monde

par sa mort. En effet, la tradition nous dit que tous les

apôtres sauf Jean furent martyrs. Pourtant, leur – et notre –

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souffrance cache une joie radieuse car nous vivons au temps

de l’alliance.

Comme Marie, qui a été emportée au ciel, et comme les

onze apôtres65 qui sont morts avant lui, Jean savait cela.

Toute sa vie, il ne put s’empêcher de témoigner du mystère

qu’il avait rencontré dans la vie de son Seigneur. Lorsque

Jean, âgé, fut banni sur l’île grecque de Patmos pour avoir

proclamé l’Évangile, les yeux qui s’étaient autrefois

émerveillés devant la gloire du Seigneur à Cana, qui avaient

pleuré au calvaire et regardé, ébahis, la tombe vide,

s’ouvrirent grand d’étonnement une fois encore. L’apôtre qui

avait été aimé et qui aimait a vu la fécondité de l’alliance.

La vision rapportée dans le livre de l’Apocalypse a été

accordée à Jean pour les croyants de son temps, qui souffraient

de terribles persécutions, et pour tous les croyants à venir.

« J’ai vu un agneau debout, comme égorgé », écrit-il, à la fois

beau et terrible. Et devant l’Agneau, « une foule immense,

que nul ne pouvait dénombrer, une foule de toutes nations,

tribus, peuples et langues » laissant s’exprimer leur louange

et leur adoration (Apocalypse 7, 9). Dans une vision de fin des

temps, Jean vit l’humanité rachetée transfigurée, rassemblée

devant le trône de Dieu.

« Heureux les invités au repas des noces de l’Agneau »,

entendit-il à travers une voix angélique (Apocalypse 19, 9). Le

fruit du don que le Seigneur avait fait de lui-même était

l’épouse – tous ceux pour lesquels Marie avait répondu son

« oui » à l’ange. Peut-être Jean a-t-il compris lorsqu’il a vu

l’Église descendre du ciel comme une belle ville, comme « une

épouse parée pour son mari » (cf. Apocalypse 21, 2). Autrefois,

il avait laissé ses filets et son père pour suivre l’époux d’Israël.

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Maintenant il avait le privilège de voir la joie de Dieu pour

son alliance.

Jean a entendu la voix familière s’écrier, remplie de joie :

« C’est fait. Moi, je suis l’alpha et l’oméga, le commencement

et la fin » (Apocalypse 21, 6). Le Seigneur du temps et de

l’histoire, qui avait rempli le regard de Jean, avait le visage de

son maître et ami. Jésus-Christ, l’unique médiateur, est

l’alliance nouvelle et éternelle entre Dieu et l’homme.

Le monde a été aimé. Dieu a gardé toutes ses promesses.

Pourtant le désir ardent d’Israël et du monde entier n’a pas

été éliminé par la venue du Fils de Dieu. Comme Jean l’a

appris dans sa vision, ce désir a été purifié, transformé, élargi

et approfondi pour devenir la prière aimante de l’Église dans

l’attente de son Seigneur. À la fin du livre de l’Apocalypse,

nous entendons : « L’Esprit et l’Épouse disent : « Viens ! » (22,

17). Jean redit encore, à l’avant-dernier verset de toute la

Bible, « Viens, Seigneur Jésus ! » (Apocalypse 22, 20).

Jésus est venu, et il vient. Il a espéré pour nous que nous

pourrions vivre dans l’espérance. D’une certaine manière,

l’Église n’a jamais quitté la pièce où les apôtres étaient

rassemblés avec Marie, à la Pentecôte. Même après que

l’Église est allée dans le monde entier pour répondre à

l’ordre du Seigneur, elle attend dans l’amour et l’espérance.

Jusqu’au jour de sa manifestation finale dans la gloire, « en

union avec la Vierge-Mère, l’Église, comme l’Épouse, se

tourne continuellement vers son divin Époux… « Viens ! »…

L’Esprit, en effet, est donné à l’Église afin que, par sa

puissance, toute la communauté du Peuple de Dieu, dans sa

diversité et ses multiples manifestations, persévère dans

l’Espérance, « car notre salut est objet d’espérance »66.

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***

NOTE À L’ATTENTION DU LECTEUR : Dans la prière du chapelet, les

chrétiens contemplent la vie de Jésus-Christ, le Fils de Dieu

fait homme, à travers les yeux de Marie. Le cycle du rosaire,

à travers les mystères joyeux, lumineux, douloureux et

glorieux, fait parcourir au fidèle la vie du Seigneur,

lentement et dans la prière.

Ceux qui prient le rosaire le cœur ouvert font souvent une

expérience semblable à celle des premiers disciples de Jésus.

La mère de Jésus, qui « retenait » tous ces mystères « et les

méditait dans son cœur » (Luc 2, 19), nous enseigne comment

prier. Elle nous fait participer à son amour émerveillé. Elle,

qui a dit autrefois « oui » pour nous à Dieu, nous introduit

dans le « grand mystère » de la rédemption du monde.

Le Service d’information catholique publie un Guide pour la

prière du Rosaire, #4772 sur le formulaire de commande

imprimé ou en ligne.

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Sources

1 Benoît XVI, Jésus de Nazareth. De l’entrée à Jérusalem à la résurrection,

Éditions du Rocher, Groupe Parole et Silence, 2011, p. 311.

2 Id., Paroles au début de la messe en conclusion de la rencontre avec

le « Ratzinger Schülerkreis », 28 août 2011.

3 Otto Neubauer, « Does the World Still Move the Heart of the

Church ? ». Intervention à l’Université catholique de Varsovie,

Symposium sur le concile Vatican II, novembre 2012.

4 Benoît XVI, Paroles au début de la messe…, 28 août 2011.

5 Cf. ibid.

6 Id., Homélie à l’aéroport de Freiburg im Breisgau, Voyage

apostolique en Allemagne, 25 septembre 2011.

7 Id., Discours aux membres de la Curie romaine pour la présen -

tation des vœux de Noël, 21 décembre 2009.

8 Ibid.

9 Id., Paroles au début de la messe…, 28 août 2011.

10 Cf. id., Homélie de la messe de minuit, 24 décembre 2011 : « Dieu

s’est fait dépendant, ayant besoin de l’amour de personnes

humaines, en condition de demander leur – notre – amour ».

11 Id., Discours aux membres de la Curie romaine, 21 décembre 2009.

12 Id., Homélie pour la solennité de Marie, Mère de Dieu, 1er

janvier 2012.

13 Jean-Paul II, Le rosaire de la Vierge Marie, Bayard/Fleurus-Mame/Cerf,

Paris, 2003, p. 25.

14 Ibid., 24. 15 Benoît XVI, Angelus, Quatrième dimanche de l’Avent, 21 décembre

2008.

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16 Cf. Isaïe 45, 8, qui est la base de l’Introït du quatrième dimanche de

l’Avent : « Cieux, répandez votre rosée ; que des nuées descende le

salut ! Que s’ouvre la terre et qu’elle donne naissance au Sauveur ».

17 Benoît XVI, Homélie de la messe pour le 850ème anniversaire de la

fondation du sanctuaire de Mariazell, 8 septembre 2007.

18 Catéchisme de l’Église catholique (CEC), 483.

19 Joseph, cardinal Ratzinger. Regarder le Christ. Exercices de foi, d’espérance

et d’amour. Fayard, 1992.

20 Cf. Jean 14, 9 : « Celui qui m’a vu a vu le Père ».

21 Jean-Paul II, Novo Millennio Ineunte, 22.

22 Ibid., 23, citant saint Athanase.

23 Benoît XVI, Jésus de Nazareth, IIème partie, p. 311.

24 Jean-Paul II, Novo millenio ineunte, 23. 25 Benoît XVI, Homélie de la messe de minuit, Solennité de la

Nativité du Seigneur, 24 décembre 2009.

26 Liturgie des heures, Solennité de Marie, Mère de Dieu, vêpres de

la veille au soir, 1ère antienne.

27 Benoît XVI, Discours aux membres de la Curie romaine, 21

décembre 2009.

28 Ibid.

29 Joseph Ratzinger-Benoît XVI, Jésus de Nazareth (Du baptême dans le

Jourdain à la Transfiguration), Flammarion, 2007, pp. 37-38.

30 Id., p. 38.

31 Benoît XVI, Paroles au début de la messe…, 28 août 2011.

32 Cf. id., Discours lors de la rencontre avec les catholiques engagés

dans l’Église et dans la société, Freibourg im Breisgau, Allemagne,

25 septembre 2011.

44

Sources (suite)

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33 Cf. Isaïe 54, 5 : « Car ton époux, c’est Celui qui t’a faite, son nom est

« Le Seigneur de l’univers ». Ton rédempteur, c’est le Saint d’Israël ».

34 CEC, 515. Tout voilait et révélait à la fois le Dieu qui s’était abaissé

par amour.

35 Cinquième antienne de l’office des laudes, Fête de l’épiphanie du

Seigneur.

36 Jean-Paul II, Exhortation apostolique post-synodale Vita Consecrata

[La vie consacrée], 15.

37 Canon romain, Prière eucharistique 1. Cf. Jérémie 31, 31 ; Ézéchiel

16, 60 ; Isaïe 55, 3.

38 Benoît XVI, Homélie, Messe de la Cène du Seigneur, 9 avril 2009.

39 Ibid.

40 Id., Sacramentum Caritatis, [Exhortation apostolique sur l’eucharistie,

source et sommet de la vie de l’Église], 14. 41 Cf. id., Rencontre avec les catholiques…, 25 septembre 2011 : « Le

Christ, le Fils de Dieu, est sorti en quelque sorte de la sphère de sa

divinité, il s’est fait chair et il est devenu homme ; et cela non

seulement pour confirmer le monde dans sa réalité terrestre et

partager sa condition, en la laissant telle qu’elle est, mais pour le

transformer ».

42 Id., Paroles au début de la messe…, 28 août 2011.

43 Credo, Symbole de Nicée.

44 Cardinal Joseph Ratzinger, « Meditations on Holy Week », réédité

in The Sabbath of History : William Congdon, with Meditations on Holy Week

by Joseph Ratzinger, (New Haven : Knights of Colombus Museum,

2012), 146. Notre traduction.

45

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45 Benoît XVI, Homélie, Messe de la Cène du Seigneur, 9 avril 2009.

46 Saint Augustin, Sermon 191.1.

47 Benoît XVI, Homélie, Messe au sanctuaire de Mariazell, 8

septembre 2007.

48 Cardinal Joseph Ratzinger, « Meditations on Holy Week », 143.

Notre traduction.

49 Benoît XVI, Rencontre avec les catholiques…, 25 septembre 2011.

50 Saint Jean Chrysostome, Homélie catéchétique pour les

catéchumènes, III.

51 Cardinal Joseph Ratzinger, « Meditations on the Holy Week », 143.

52 CEC, 635.

53 CEC, 633.

54 Benoît XVI, Homélie, Messe de la Cène du Seigneur, 9 avril 2009.

55 Homélie ancienne pour le grand et saint Samedi, parfois attribuée

à Epiphanius de Salamis ; office des lectures du samedi saint.

56 Ibid.

57 Exultet, chanté à la messe de la Vigile de Pâques, dans la nuit du

Samedi saint au Dimanche de Pâques : « O nuit vraiment bénie, à

qui seule a été donné de connaître le temps et l’heure où le Christ

est ressuscité d’entre les morts ! C’est d’elle qu’il est écrit : la nuit

sera aussi claire que le jour, éblouissante est la nuit pour moi, et

pleine de bonheur. »

58 Ibid.

59 Cardinal Joseph Ratzinger, « Meditations on Holy Week », op.

cit. 151.

46

Sources (suite)

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47

60 Benoît XVI, Méditation pendant la première Congrégation

générale de la XIIIème Assemblée générale ordinaire du synode des

évêques, 8 octobre 2012.

61 Cf. Concile Vatican II, Constitution dogmatique sur l’Église Lumen

Gentium (= LG), 1 : « L’Église étant, dans le Christ, en quelque sorte

le sacrement, c’est-à-dire à la fois le signe et le moyen de l’union

intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » ; et aussi

LG, 9 : « Établi[e] par le Christ pour communier à la vie, à la charité

et à la vérité, [l’Église] est entre ses mains l’instrument de la

Rédemption de tous les hommes ».

62 Credo de Nicée.

63 CEC, 1617 ; cf. Éphésiens 5, 25-26, 31-32.

64 Ibid.; cf. Apocalypse 19:9.

65 Après la résurrection, les onze apôtres qui restaient choisirent

Matthias pour remplacer Judas, qui s’était donné la mort après

avoir trahi Jésus. Ainsi, le nombre des apôtres fut ramené à douze.

66 Jean-Paul II, lettre encyclique Dominum et vivificantem [L’Esprit-Saint

dans la vie de l’Église], 66 ; cf. Romains 8, 24.

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48

L’auteur

Michelle K. Borras, Ph.D., est directrice du Service d’information

catholique. Elle a un B.A. en littérature anglaise de l’Université

Harvard, une licence canonique en théologie de l’Institut Jean-Paul

II pour les études sur le mariage et la famille à Rome, et un Ph.D.

en théologie de l’Institut, section de Washington, D.C. Sa thèse

porte sur l’interprétation du mystère pascal par Origène. Michelle

K. Borras a enseigné à l’Institut Jean-Paul II de Washington comme

professeur adjoint pendant l’année académique 2010-2011 et a

donné des séminaires en littérature catholique, en interprétation

patristique de l’Écriture et en théologie de Hans Urs von Balthasar

dans le cadre de la formation interne des Sœurs missionnaires de

Saint Charles Borromée, à Rome. Outre de nombreux travaux de

traduction, elle a publié des articles dans le domaine de la littérature

catholique et de la théologie.

Le Service d’information catholique

Depuis sa fondation, l’Ordre des Chevaliers de Colomb est impliqué

dans l’évangélisation. En 1948, les Chevaliers ont lancé le Service

d’information catholique (Catholic Information Service : CIS) pour fournir

des publications catholiques au grand public ainsi qu’aux paroisses,

écoles, maisons de retraite, établissements militaires, prisons, assem -

blées législatives, au corps médical et aux personnes individuelles qui

en font la demande. Depuis plus de 70 ans, le CIS a publié et distribué

des millions de livrets et des milliers de personnes ont suivi sa

formation catéchétique.

« Catholic Information Service » est une marque déposée des Chevaliers de Colomb.

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Série sur la nouvelle évangélisation

1 Qu’est-ce que la nouvelle évangélisation ?

1È R E PARTIE « CAR DIEU A TANT AIMÉ LE MONDE »

2 « Je crois en toi » : La question de Dieu dans le monde moderne

3 Les mystères de la vie de Jésus

4 Un Dieu qui est trois fois Amour

5 « Nous sommes venus l’adorer » : Introduction à la prière à l’école

de Benoît XVI

2È M E PARTIE « APPELÉS À AIMER… »

6 Appelés à aimer : La théologie de l’amour humain, de Jean-Paul II

7 À l’image de l’Amour : Le mariage et la famille

8 Suivre l’Amour pauvre, chaste et obéissant : La vie consacrée

3È M E PARTIE … DANS L’ÉGLISE, ÉPOUSE DE L’AGNEAU

9 « Qu’il me soit fait selon ta parole » : Marie, à l’origine de l’Église

10 Avec le cœur de l’Époux : Le sacerdoce ministériel

11 La transfiguration du monde : Les sacrements

12 Lumière et silence : Un journal intime eucharistique

4È M E PARTIE « AIMER EN ACTE ET EN VÉRITÉ »

13 Libres en vue de quoi ?

14 La justice : La dignité du travail

15 La justice : L’Évangile de la vie

5È M E PARTIE « IL NOUS A AIMÉS JUSQU’AU BOUT »

16 La dignité de la personne souffrante

17 « Regardez ! J’étais mort et me voilà vivant… » : La mort et la vie

éternelle

ANNEXES : OUTILS POUR LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION

A La beauté de la sainteté : L’art sacré et la nouvelle évangélisation

B La technologie et la nouvelle évangélisation :

Critères de discernement

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#3 Série sur la nouvelle évangélisation

« La vie du Christ… brille de ce mystère qui dépasse toute connaissance. C’est le mystère du Verbe fait chair, en qui, ‘dans son propre corps, habite la plénitude de la divinité’ »

S E R V I C E D ’ I N F O R M A T I O N C A T H O L I Q U E

La vie de Jésus-Christ contient des profondeurs insondables.

Elle révèle le Dieu qui « a tant aimé le monde » (Jean 3, 16) qu’il

s’est lié à sa créature pour toujours. Et parce qu’elle nous

montre notre destinée et notre salut, la vie du Fils de Dieu fait

chair révèle la pleine vérité sur l’homme. Dans l’esprit de

Marie, qui méditait dans son cœur les événements de la vie de

son fils, ce livret voudrait aider le lecteur à entrer toujours plus

profondément dans le « grand mystère » de l’Incarnation.

— Pape Jean-Paul II

Catholic Information Service ®

Conseil suprême des Chevaliers de Colomb

PO Box 1971 203 752 4267

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