130621544 book roches mineraux[1]

241
Initiation à la Géologie Volume 1 Préambule à l’étude des roches et des minéraux FIGURE 1. Prismes volcaniques (Île de Milos, Grèce). Tanguy JEAN 2007 Club CPN des Sittelles Connaître et Protéger la Nature La Tullaye 42 boulevard des Pas enchantés 44230 Saint-Sébastien-sur-Loire http://cpn.sittelles.free.fr

Upload: bakali887876289

Post on 29-Oct-2015

92 views

Category:

Documents


9 download

TRANSCRIPT

Page 1: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie Volume 1

Préambule à l’étude des roches et des

minéraux

FIGURE 1. Prismes volcaniques (Île de Milos, Grèce).

Tanguy JEAN 2007

Club CPN des Sittelles Connaître et Protéger la Nature

La Tullaye

42 boulevard des Pas enchantés 44230 Saint-Sébastien-sur-Loire http://cpn.sittelles.free.fr

Page 2: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 2 –

Document au format A5 : pensez à sélectionner dans vos paramètres d’impression l’option « 2 pages par feuille » pour le papier A4 !

Page 3: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 3 –

Initiation à la Géologie

a collection Initiation à la Géologie est un ensemble d’ouvrages édités par le club CPN des Sittelles (Saint-Sébastien-sur-Loire) qui visent à rendre accessibles au plus grand nombre les principales notions des Sciences de la Terre. Le texte est généralement original et soumis aux droits d’auteur,

malgré l’absence de dépôt légal. Le Club CPN des Sittelles et les auteurs collaborant à cette collection autorisent l’utilisation et la diffusion de son contenu à la seule condition d’en citer la source.

Préambule à l’étude des roches et des minéraux « Initiation à la Géologie », volume 1 Club CPN des Sittelles, Saint-Sébastien-sur-Loire (44, France) Texte et mise en page de Tanguy JEAN Illustrations : crédits cités en fin d’ouvrage

Contacter l’auteur :

Tanguy Jean 10 impasse des Trois Métairies

F – 44120 Vertou +33 (0)2 40 33 15 82 +33 (0)6 30 00 83 58 [email protected]

http://tanguy.jean.free.fr

Les remarques éventuelles seront les bienvenues et seront prises en compte par l’auteur.

L

Page 4: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 4 –

Sommaire Sommaire page 4 Introduction page 5 I. Présentation des roches, minéraux et notions corrélées et de leurs disciplines d’étude page 6 A. Définition des roches et minéraux page 6 1. Définition d’un minéral page 6 2. Définition d’une roche page 6 3. Remarques sur une terminologie courante page 7 B. Sol, sous-sol, terrain, affleurement page 7 C. Notions de magmas, laves et projections page 7 D. L’étude des roches et minéraux : terminologie page 8 II. Un premier aperçu de la diversité des roches : les grandes groupes et leur identification page 9 A. Grands groupes de roches page 9 1. Roches sédimentaires (exogènes) page 9 2. Roches endogènes (magmatiques, métamorphiques) page 10 a. Les roches magmatiques page 10 α. Les roches volcaniques page 10 β. Les roches plutoniques page 11 γ. Les roches de type intermédiaire page 11 b. Les roches métamorphiques page 12 c. Cas particulier des roches hydrothermales page 12 B. Identification des grands groupes de roches page 13 1. Tableau comparatif des critères distinctifs page 13 2. Identification par la structure et proposition d’un tableau de détermination page 13 a. La structure pétrographique et son intérêt dans l’identification page 13 b. Proposition d’un tableau d’identification page 14 Références page 15

Page 5: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 5 –

Introduction

L’année 2007 marque un tournant pour le club CPN des Sittelles la géologie apparaît dans les activités de l’association. Il s’agit là d’une discipline très intéressante mais, hélas, relativement complexe et dont l’appréhension requiert souvent un minimum de connaissances. Pour faciliter la compréhension, lors des sorties, des phénomènes observés sur le terrain, la collection « Initiation à la Géologie », éditée par le club CPN des Sittelles, se propose de fournir une première approche des Sciences de la Terre accessible au plus grand nombre, de manière à vulgariser les bases de ce vaste domaine scientifique et naturaliste. Et il faut commencer par le début : définir les roches et les minéraux, et notions corrélées, qui sont le premier support d’étude du géologue. La Terre est une planète du système solaire de forme globalement ellipsoïdale, presque sphérique, dont le rayon moyen mesure environ 6370 km. Diverses techniques comme les études sismologiques mettent en évidence une « zonation » concentrique dans la structure de notre planète (la Terre se présente sous la forme de couches concentriques se superposant les unes aux autres). La partie solide la plus superficielle de la Terre a reçu le nom de lithosphère (du gr. lithos, pierre) et se compose de matériaux nommés roches qui sont constitués d’assemblages d’espèces chimiques naturelles se présentant le plus souvent sous la forme de solides cristallins, les minéraux. Dans tous les domaines des sciences de la Terre, c’est avant tout à des roches qu’on est confronté et tout géologue doit pouvoir disposer de bases lui permettant de connaître et reconnaître ces corps pour ensuite, par leur intermédiaire, appréhender notre planète et son fonctionnement. Qu’est-ce qu’une roche ? Qu’est-ce qu’un minéral ? Quels sont les concepts de base de la pétrologie et de la minéralogie ? Ce petit travail a pour but de répondre succinctement à ces questions. Notez que la diversité des roches et des minéraux feront l’objet d’autres petits ouvrages de la collection.

Page 6: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 6 –

I. Présentation des roches, minéraux et notions corrélées et de leurs disciplines d’étude

Qu’est-ce qu’une roche ? Qu’est-ce qu’un minéral ? Commençons par définir et resituer dans leur contexte ces deux notions géologiques fondamentales sans, pour l’instant, entrer dans trop de détails.

A. Définition des roches et minéraux

1. Définition d’un minéral Pour FOUCAULT & RAOULT (2005), un minéral1 est une « espèce chimique naturelle se présentant le plus souvent sous la forme d’un solide cristallin » (on aurait pu dire « presque toujours »), les minéraux étant les unités élémentaires constitutives des roches (que nous définissons au point suivant) même si on retrouve aussi des minéraux non organisés en roches proprement dites dans l’asthénosphère par exemple. On rappelle qu’une espèce chimique est un corps pur, composé d’une seule et même entité chimique (aux impuretés près), qu’un solide consiste en un état condensé de la matière où les molécules sont globalement fixes les unes par rapport aux autres (et qui résiste au cisaillement) et qu’un cristal est un état de la matière solide caractérisé par une structure spatiale périodique, le motif élémentaire qui se répète par translation dans les trois dimensions de l’espace portant le nom de maille (un ou plusieurs atomes, ions ou molécules) ; on parle de réseau cristallin pour désigner cette répétition de motifs élémentaires (voir par exemple ROBERT, 2004).

FIGURE 2. Cristaux de calcite et de pyrite. Marquise (62, France)

2. Définition d’une roche Une roche2 est un matériau constitutif de la lithosphère, formé d’un assemblage massif de minéraux (rarement un seul) et présentant une certaine homogénéité statistique (entendez : ces minéraux se trouvent représentés et assemblés de manière globalement homogène au sein de la roche). Attention, le fait de dire que les roches constituent la lithosphère ne signifie pas nécessairement que la lithosphère est leur lieu de formation.

1 De minerai qui vient lui-même de mine (dérivant du gallo-roman mina). 2 Du latin populaire rocca, roche.

Page 7: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 7 –

FIGURE 3. Gneiss chloritoïdique. Petrolina (Brésil)

3. Remarques sur une terminologie courante On attribue souvent à un échantillon rocheux le terme de « pierre » ou « caillou ». Ces termes sont acceptés et reconnus par l’ouvrage de FOUCAULT &

RAOULT (2005) et couramment employés par les géologues, au moins oralement. Il est à noter néanmoins qu’en pétrologie sédimentaire, ces mots peuvent prendre une signification plus précise basée sur la granulométrie. Les termes de roche ou d’échantillon rocheux sont donc d’un usage préférable pour éviter toute confusion avec une terminologie plus précise. Les termes de gemme3 ou pierre précieuse désignent quant à eux des minéraux, assemblages de minéraux ou concrétions (comme la perle) dont la beauté (éclat, limpidité, couleurs, etc.) et la rareté en font des objets de bijouterie. Remarque : le terme de gemme peut aussi désigner la résine de pin ou encore la halite (sel gemme, ou sel NaCl).

B. Sol, sous-sol, terrain, affleurement Le sol est la formation superficielle qui résulte de l’altération sur place des roches sous-jacentes par l’eau, l’air et les êtres vivants – ce qui en fait une interface hydrosphère-atmosphère-lithosphère-biosphère – et du mélange des produits de cette altération avec une proportion variable de matière organique ; il est organisé verticalement en différents niveaux nommés horizons (voir les chapitres de pédologie). Le mot sous-sol désigne les roches situées sous le sol et, de manière plus générale, oppose les roches vraies au sol. Un terrain est un ensemble de roches que l’on regroupe pour des raisons tectoniques ou stratigraphiques et qui ont une cohérence d’ensemble de ces points de vue. Un affleurement est une partie de terrain visible à la surface de la Terre et qui n’est donc pas masquée par le sol ou des alluvions (on dit de la roche qu’elle « affleure »).

C. Notions de magmas, laves et projections Un magma4 est un liquide à haute température (au moins 600 °C) qui est constitué de matériaux mantelliques formés plus ou moins en profondeur (magma primaire) ou provient de la fusion de roches préexistantes (magma d’anatexie). Les magmas prennent le nom de laves5 quand ils sont émis à la surface de la Terre sous forme

3 Du latin gemma, bourgeon. 4 Mot grec désignant un résidu pâteux. 5 De l’italien lava, même signification.

Page 8: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 8 –

visqueuse où ils s’écoulent (coulées) et cristallisant plus ou moins rapidement (notez que la cristallisation commence généralement avant l’arrivée à la surface). Ils forment des projections volcaniques ou éjectas6 quand ils sont projetés sous forme solide par les volcans. Notez qu’on réserve le terme d’émission aux matériaux gazeux et aux laves.

FIGURE 4. Éruption du Piton de la Fournaise. La Réunion (France)

D. L’étude des roches et minéraux : terminologie L’étude des roches porte le nom de pétrologie7 ou pétrographie8 au sens large (le terme de lithologie9 semble aujourd’hui désuet). La pétrologie comprend la description des roches (pétrographie au sens strict), leur classification et l’interprétation de leur genèse. L’étude des minéraux est la minéralogie (et celle plus particulière des pierres précieuses est appelée gemmologie) ; celle-ci s’appuie largement sur la cristallographie (étude des propriétés de l’état cristallin de la matière) et la géochimie (étude des éléments chimiques et de leur comportement dans les roches10). La magmatologie désigne, dans un sens restreint, l’étude des magmas et particulièrement leur chimie et, dans un sens global, l’étude de l’ensemble du phénomène magmatique. La volcanologie quant à elle est tout simplement l’étude des volcans et du volcanisme.

6 Participe passé latin pluriel (signifie « éléments éjectés »), s’écrit ejecta (singulier ejectum) ou francisé éjectas (singulier éjecta) ; surtout employé au pluriel. 7 Du grec petra, pierre, et logos, discours (et, par extension, étude, science). 8 Du grec petra, pierre, et graphein, écrire. 9 Du grec lithos, pierre, et logos, discours (et, par extension, étude, science). On réserve aujourd’hui le terme de lithologie pour désigner la nature des roches d’une formation donnée. 10 La géochimie comprend également l’étude des éléments chimiques dans les eaux et l’atmosphère.

Page 9: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 9 –

II. Un premier aperçu de la diversité des roches : les grands groupes et leur identification

La diversité des roches et minéraux tout comme leur classification constitue l’objet d’autres livrets de la collection « Initiation à la Géologie ». Néanmoins, donnons tout de suite quelques éléments pour avancer dans notre étude relativement aux grands types de roches. Nous listons ci-après les principaux groupes de roches généralement reconnus en donnant, dans le tableau I, les critères utiles à leur reconnaissance ; notez que la frontière entre ces différents groupes est parfois floue et que les auteurs ne s’entendent pas tous sur une même nomenclature (nous avons de notre côté essayé de présenter les choses de la manière la plus consensuelle possible, en retenant les options majoritairement admises). Attention, tous les termes techniques de pétrologie ou de minéralogie utilisés sont définis dans d’autres livrets.

A. Grands groupes de roches

1. Roches sédimentaires (exogènes) Les roches sédimentaires sont les roches résultant de l’accumulation et la compaction de fragments minéraux ou débris biologiques, de la précipitation à partir de solutions, ou se formant à partir de roches préexistantes auxquelles les eaux ont enlevé des éléments ; dans ce dernier cas, on les nomme roches résiduelles. Les roches sédimentaires sont aussi appelées roches exogènes car elles se forment à la surface de la Terre, sous l’effet d’agents externes (eau, vent, etc.) et non d’agents des profondeurs de la Terre. Le terme de sédiment11, d’où est issue l’expression « roches sédimentaires », désigne un ensemble de matériaux sous forme de particules d’origine plus ou moins grosses ou de matières précipitées ayant séparément subi un certain transport . Un sédiment devient une roche sédimentaire après une étape nommée diagenèse12 que nous traiterons en pétrologie sédimentaire. Notez que, pour FOUCAULT & RAOULT (2005), les roches exogènes sont divisées en deux groupes, celui des roches sédimentaires et celui des roches résiduelles qu’ils excluent des roches sédimentaires. Nous n’avons pas retenu cette option car elle ne domine pas la littérature française, même si on peut considérer qu’il n’y a pas vraiment de passage par un état « sédiment » dans une roche résiduelle puisque les matériaux résiduels ne subissent généralement pas de transport.

FIGURE 5. Un conglomérat de type « poudingue ». Provenance inconnue

11 Du latin sedimentum, dépôt, de sedere, séjourner, demeurer 12 Du grec dia, à travers, et genêsis, formation

Page 10: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 10 –

2. Roches endogènes (magmatiques, métamorphiques) Les roches endogènes sont formées au moins en partie à l’intérieur du globe ou sous l’effet d’agents internes, à des températures et pressions généralement supérieures à celles qui règnent habituellement en surface. Notez que certains auteurs considèrent certaines roches métamorphiques (métamorphisme de contact ou hydrothermal par exemple) comme exogènes car parfois formées en surface. Il s’agit là de savoir si l’opposition endogène-exogène repose sur le lieu où s’est formé la roche ou sur l’origine des agents responsables de cette formation. Nous préférons quant à nous nous en tenir à la solution la plus simple qui est aussi la plus couramment retenue et qui considère comme endogènes toutes les roches métamorphiques. Notez que POMEROL et al. (2003) semblent restreindre les roches endogènes aux seules roches magmatiques, ce qui ne nous semble pas justifié.

a. Les roches magmatiques On désigne sous le terme de roches magmatiques les roches qui résultent de la solidification d’un magma. On y distingue deux grands « types », les roches volcaniques et les roches plutoniques, auxquels s’ajoutent des cas intermédiaires. Le mot magmatisme (ou phénomène magmatique) regroupe l’ensemble des phénomènes liés à la formation, au déplacement et à la cristallisation des magmas. αααα. Les roches volcaniques Les roches volcaniques (synonyme vulcanites, terme vieilli) sont les roches magmatiques qui se sont solidifiées, au moins en partie, à la surface de la lithosphère. Ces roches ont une structure microlitique ou vitreuse. L’adjectif volcanique vient de volcan : un volcan est un relief, généralement de forme conique et pouvant atteindre plusieurs km de haut, qui est constitué par l’empilement de laves ou d’éjecta. On désigne par volcanisme l’ensemble des manifestations des volcans et des phénomènes qui s’y rapportent.

FIGURE 6. Lame mince de basalte demi-deuil. (LPNA) Massif central (France)

FIGURE 7. Andésite à phénocristaux de hornblende et de pl agioclase. Provenance inconnue

Page 11: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 11 –

ββββ. Les roches plutoniques Les roches plutoniques (synonyme plutonites, terme vieilli) sont les roches magmatiques qui ont cristallisé au sein de la lithosphère. Elles présentent une structure grenue. L’adjectif plutonique vient de pluton : un pluton est un massif de roches plutoniques (évidemment !) constituant une grosse masse ovoïde ou une grande lentille. Le plutonisme désigne l’ensemble des phénomènes associés à la mise en place et à la cristallisation des plutons et des roches plutoniques. Notez que les roches dites plutoniques ne sont pas toutes sous forme de plutons à proprement parler ; une roche plutonique est une roche magmatique qui se définit par sa structure grenue.

FIGURE 8. Granite rose poli. La Clarté, Perros-Guirec (22, France) γγγγ. Les roches de type intermédiaire Ce sont des roches de composition magmatique à structure microgrenue (parfois appelées microplutonites, terme vieilli, ou roches microplutoniques) ; elles souvent constituées en filons (roches filoniennes). On appelle filon13 une lame de roche, d’épaisseur quelques cm à quelques m, recoupant les structures de l’encaissant (roche environnante, antérieure) ou une lame de roche magmatique, épaisse d’un à plusieurs m, parallèle aux structures de l’encaissant (on parle alors de filon-couche ou sill).

FIGURE 9. Lame mince de microgranite à deux micas. (LPNA) Carrière du Tacot, Arleuf (58, France)

13 De l’italien filone, augmentatif de filo, fil

Page 12: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 12 –

b. Les roches métamorphiques On appelle roche métamorphique une roche qui s’est formée à partir de roches préexistantes (magmatiques, sédimentaires ou déjà métamorphiques – termes respectifs : orthométamorphisme, paramétamorphisme, polymétamorphisme) essentiellement par des recristallisations minérales sous l’effet de modifications des conditions de température et de pression, à des températures ne permettant cependant pas ou peu la fusion (à la différence des roches magmatiques). On appelle métamorphisme14 (ou phénomène métamorphique) l’ensemble des processus de transformation de roches à l’état solide sous l’effet d’une modification des conditions de température et/ou de pression avec cristallisation de nouveaux minéraux – minéraux néoformés – et acquisition de textures ou structures particulières.

FIGURE 10. Schistes bleus à niveaux d’épidote (vert clair ) et de glaucophane (bleue).

Le Lavoir, Groix (56, France). Loupe : ∅ ≈ 2 cm

c. Cas particulier des roches hydrothermales FOUCAULT & RAOULT (2005) disent des roches hydrothermales qu’elles constituent « une catégorie un peu particulière de roches formées à partir de gaz ou de solutions à haute température, ayant des relations variées avec les magmas ». Ils placent cette catégorie dans les roches magmatiques mais elles sont en fait en position intermédiaire entre roches métamorphiques (on parle de métamorphisme hydrothermal ) et magmatiques, et présentent en outre souvent des minéraux présents dans les roches sédimentaires ! Épineux problème de classification pétrologique…

FIGURE 11. Brèche hydrothermale à lamprophyre. Provenance inconnue

14 De méta- et du grec morphê, forme

Page 13: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 13 –

B. Identification des grands groupes de roches

1. Tableau comparatif des critères distinctifs

Roches magmatiques Roches sédimentaires Roches métamorphiques

1. Fossiles absents (ou rarissimes) 2. Pas d’orientation spatiale des gros minéraux (phénocristaux) 3. Pas de schistosité ni de foliation

1. Stratification le plus

souvent très nette 2. Souvent fossilifères 3. Grandes formes

d’altération le plus souvent abruptes et tourmentées

4. NB. Moraines : jamais litées, éléments non triés ; calcaires récifaux : presque jamais lités

1. Holocristallines : masse

totalement cristallisée (sauf métamorphisme léger et inachevé)

2. Souvent cristaux de grande taille reconnaissables à l’œil nu

3. Structure parallèle, schistosités(s)

4. Très compactes, sans cavité

5. Fossiles généralement absents (mais pas toujours)

6. Pas de surfaces de clivage lisses

7. Grandes formes d’altération molles et ondulées

8. Éclat soyeux fréquent

Roches plutoniques Roches volcaniques Roches intermédiaires

1. Structure microgrenue 2. Souvent en filons 3. Cf. pétrologie

magmatique

1. Structure microlitique ou

vitreuse 2. Matrice vitreuse 3. Nombreuses petites

vacuoles 4. Structure fluidale

fréquente 5. Débit en prismes fréquent

1. Holocristallines 2. Grands cristaux

reconnaissables à l’œil nu

3. Structure fluidale rare 4. Très compactes : cavités

absentes (ou très rares) 6. Altération et fissures

particulières : a) Les fissures se recoupent

plus ou moins perpendiculairement

b) Altération en boules c) Formes d’altération le

plus souvent molles et ondulées

Le tableau I est un tableau comparatif qui regroupe quelques critères (qui nécessitent parfois le recours au microscope ; c’est le cas par exemple de la différence entre structures microlitique et microgrenue notamment) utiles à la reconnaissance des grands groupes de roches que nous avons présenté (attention toutefois aux cas limites !). Nous rappelons que les termes techniques de pétrologie ou de minéralogie utilisés sont définis dans d’autres ouvrages de la collection.

2. Identification par la structure et proposition d’un tableau de détermination

a. La structure pétrographique et son intérêt dans l’identification Lorsque l’on souhaite déterminer une roche, il convient d'abord d’essayer de la rattacher à un des groupes principaux. Pour cela, il faut examiner sa structure pétrographique, c'est-à-dire l'agencement et la disposition relative de ses constituants, et déterminer une éventuelle orientation (et, dans ce cas, laquelle). Cette méthode est utile face à tout échantillon de roche pour orienter rapidementt l’identification, particulièrement sur le terrain. Face à un affleurement, on s’efforcera d’observer plusieurs échantillons pour ne pas être trompé par un échantillon non caractéristique. Bien entendu, des échantillons de grande taille révèlent plus de détails que de petits fragments. On utilisera une loupe lorsque la stratification est très fine et on vérifiera toujours qu’un échantillon est représentatif de l'ensemble.

TABLEAU I. Caractéristiques des principaux grands groupes de roches. Inspiré de SCHUMANN (1989 : page 370).

.

Page 14: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 14 –

Figure 12. Schistosité dans un schiste. Nohèdes (66, France)

b. Proposition d’un tableau d’identification Vous trouverez ce tableau dans le Mémento de Géologie distribué à tous les membres ainsi que sur le site Internet du club CPN des Sittelles (disponible en téléchargement : http://cpn.sittelles.free.fr/Detroches.pdf). Il est inspiré de SCHUMANN (1989) dont sont par ailleurs extraits les croquis. Il est à noter que cet ouvrage contient, dans sa traduction française, diverses inexactitudes que nous avons corrigées en ce qui concerne notre tableau. Notez que le tableau en question ne vise qu’à fournir un outil pratique d’orientation rapide de la détermination mais ne prétend à aucune exhaustivité ni à une efficacité totale. D’autre part, rappelons que rien ne vaut une étude approfondie, une diagnose en bonne et due forme et… une lame mince !

Page 15: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Initiation à la Géologie 1 ● Préambule à l’étude des roches et de minéraux ● Tanguy JEAN (2007)

– Page 15 –

Références

BREUIL, M., 2003. Dictionnaire des Sciences de la Vie et de la Terre. Nathan, Paris, 2e édition (1e édition 1997), 544 pages. CARON, J.-M., A. GAUTHIER, J.-M. LARDEAUX, A. SCHAAF, J. ULYSSE & J. WOZNIAK , 2003. Comprendre et enseigner la planète Terre. Ophrys,

Gap – Paris, 2e édition (1e édition 1989) 303 pages. FOUCAULT, A. & J.-F. RAOULT, 2005. Dictionnaire de Géologie. « UniverSciences », Dunod, Paris, 6e édition (1e édition 1980), 382 pages. KORNPROBST, J., 2001. Métamorphisme et roches métamorphiques. Signification géodynamique. « Sciences Sup », Dunod, Paris, 3e édition (1e

édition 1994), 235 pages. MACKENZIE. W. S. & A. E. ADAMS, 2005. Initiation à la pétrographie. « Sciences Sup » (série « Atlas »), Dunod, Paris, 192 pages. MEHIER, B., 1995. Magmatisme et tectonique des plaques. « Sciences de la Vie et de la Terre », Ellipses, Paris, 256 pages. POMEROL, C., Y. LAGABRIELLE & M. RENARD, 2003. Éléments de géologie. « Masson Sciences », Dunod, Paris, 12e édition (1e édition 1965),

746 pages. ROBERT, J. (dir.), 2004. Dictionnaire de Physique et de Chimie. Nathan, Paris, 521 pages. SCHUMANN, W., 1989. Guide des Pierres et minéraux. « Les Guides du Naturaliste », Delachaux et Niestlé, Neuchâtel (Confédération

helvétique) – Paris, 381 pages.

Crédits iconographiques Page 1, figure 1 : http://www.milos-travel.com/milos_travel_f/uebersicht.htm Page 6, figure 2 : http://euromin.w3sites.net/mineraux/CALCITE.html Page 7, figure 3 : http://www.geol.umd.edu/pages/meetings/Post-071606.htm Page 8, figure 4 : http://www.fournaise.info/ Page 9, figure 5 : http://encyclopedia.erpi.com/rochesEtMineraux/conglomerat_image_9262_6205_2552 © Dorling Kindersley Page 10, figure 6 : http://www.flickr.com/photos/fredlab/429700798/ Page 10, figure 7 : http://www.pitt.edu/~cejones/GeoImages/2IgneousRocks/IgneousCompositions/5Andesite.html Page 11, figure 8 : http://www.bretagne-environnement.org/galerie?id_photo=1159798315&id_album=1147677998&popup=&album=article&format=original Page 11, figure 9 : http://perso.orange.fr/jacques.delfour/mg2m.htm Page 12, figure 10 : http://christian.nicollet.free.fr/page/enseignement/SBGroix.html © Christian Nicollet Page 12, figure 11 : http://www2.brgm.fr/divers/br%C3%A8ches.htm © BRGM Page 14, figure 12 : http://www.catalanes.reserves-naturelles.org/siteweb_fran%C3%A7ais/patrimoine/patgeol.htm

Page 16: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

Kit Pédagogique Sciences de la Terre 19

3. Les roches

À l'exception de quelques récifs coralliens actuels (Saint-Gilles, Saint-Leu et Saint- Pierre) ou fossiles, La Réunion est une île entièrement formée de roches volcaniques ou apparentées et des produits qui en dérivent. C'est ainsi que la partie aérienne de l'île de La Réunion est pour l'essentiel formée par un empilement de coulées de laves, de projections volcaniques et de brèches* de démantèlement.

3.1. LA CLASSIFICATION DES ROCHES VOLCANIQUES

Les produits volcaniques de La Réunion recouvrent une assez grande diversité pétrologique allant des basaltes* à des comendites* en passant par des hawaiites*, des mugéarites*, des benmoréites* et des trachytes*.

Les classifications des roches volcaniques reposent sur plusieurs critères. Ainsi, les classifications peuvent être minéralogiques (d'après les minéraux contenus dans les produits volcaniques), chimiques (d'après le chimisme des roches) ou encore génétiques (d'après le mode de mise en place).

3.2. UNE GRANDE DIVERSITÉ DE COMPOSITIONS MINÉRALOG IQUES

La classification minéralogique des laves repose sur la nature et la quantité de minéraux présents dans les produits volcaniques (figure 6). À La Réunion, les produits volcaniques sont des basaltes, des hawaiites, des mugéarites, des benmoréites des trachytes, des comendites.

Roches Phénocristaux possibles Mésostase

Basalte ol cpx plag mt ol cpx mt ilm plag ap Hawaiite plag cpx mt ol cpx plag mt il mol ap fsp amph

Mugéarite plag cpx cpx plag mt ilm ap fsp amph Benmoréite plag fsp cpx cpx plag mt ilm ap fsp (qtz)

Trachyte fsp bio cpx fsp bio cpx plag mt ilm ap (qtz) Comendite fsp (bio) fsp plag cpx ap amph qtz zircon

© BRGM - 2005

(fsp = feldspaths* alcalins ; amph = amphibole* ; ap = apatite* ; bio = biotite* ; cpx = clinopyroxène* ilm = ilménite ; mt = magnétite* ; ol = olivine* ; opx= orthopyroxène* ;plag = plagioclase* ; qtz = quartz*)

Figure 6 - Assemblages minéralogiques observés dans les différentes roches volcaniques de La Réunion.

Page 17: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

20 Kit Pédagogique Sciences de la Terre

3.3. LES BASALTES

L'essentiel de l'édifice volcanique de La Réunion est constitué de basaltes à olivine* (figure 7), d'océanites (figure 8) et de basaltes aphyriques*. Les océanites sont une variété de basalte qui contient beaucoup de mégacristaux d'olivine (basalte à olivine contenant plus de 20%), visibles à l'œil nu, englobés dans une pâte finement cristallisée contenant des microlites* de plagioclase*, du clinopyroxène*, de l'olivine et des minéraux opaques*.

© BRGM - 2005 © BRGM - 2005

Figure 7 - Échantillon de basalte à olivine Figure 8 - Échantillon d’océanite prélevé sur la coulée 2002 prélevé sur la coulée 1977 dans le Grand Brûlé. à Piton Sainte-Rose.

Les basaltes à olivine contiennent surtout des phénocristaux d'olivine auxquels s'ajoutent du clinopyroxène et du plagioclase.

Les basaltes de La Réunion se situent à tous les niveaux stratigraphiques, en dykes*, en sills*, en coulées et sous forme de projections, de la base de l’édifice à son sommet (figure 9).

© BRGM- 2005

Figure 9 – Schéma d’un dyke et d’un sill

Page 18: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

Kit Pédagogique Sciences de la Terre 21

© LSTUR - 2005

La matrice, finement cristallisée, renferme des microlites de clinopyroxène, de plagioclase calcique, d’oxydes et d’olivine (figure 10). Les vésicules* peuvent être nombreuses. La présence de mégacristaux d’olivine confère à la roche une structure microlitique porphyrique*. Ces cristaux sont parfois automorphes*, mais plus souvent xénomorphes* et corrodés. Dans ce cas, ils renferment souvent des inclusions de spinelle chromifère. Le clinopyroxène est parfois présent, ainsi que des oxydes, toujours en quantité moindre que l’olivine.

Figure 10 - Photographie au microscope en lumière polarisée d’une lame mince de basalte à olivine.

3.4. LES LAVES DIFFÉRENCIÉES : DES HAWAIITES AUX TR ACHYTES

Leur volume par rapport aux basaltes est faible (inférieur à 10 %) mais comme il s'agit des derniers produits émis par le Piton des Neiges, ils tendent à recouvrir les basaltes antérieurs et donc à être surreprésentés en surface.

Les hawaiites (figure 11) sont abondantes sur les pentes externes du Piton des Neiges.

Elles se rencontrent sous deux faciès :

- un faciès porphyrique* à très grands cristaux automorphes de plagioclases représentant jusqu'à 50 % du volume de la lave. Elles ont été appelées « Roches Pintades » et utilisées anciennement comme repère stratigraphique ;

- un faciès aphyrique compact avec une texture* fluidale soulignée par des baguettes de plagioclase.

© LSTUR - 2005

Cette lave possède une structure microlitique porphyrique avec des mégacristaux de plagioclase calcique (labrador), de clinopyroxène, d’oxydes et d’olivine. Ils sont le plus souvent sub-automorphes ou xénomorphes ; les olivines sont ici assez largement altérées, envahies d’oxydes sur leur pourtour ou le long des craquelures. Ces cristaux sont inclus dans une matrice riche en oxydes, où ont également cristallisé des plagioclases calciques, des pyroxènes, de l’olivine et des oxydes.

Figure 11 - Photographie au microscope en lumière polarisée d’une lame mince d’hawaiïte.

Page 19: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

22 Kit Pédagogique Sciences de la Terre

Les mugéarites sont abondantes sur les parois hautes des cirques et sur les pentes externes du Piton des Neiges (figure 12). Le magma* juvénile présent dans les ignimbrites du cirque de Salazie a lui aussi une composition de mugéarite.

© BRGM- 2005

Figure 12 - Affleurement de mugéarite au lieu-dit Pente Carozin dans le cirque de Salazie.

© LSTUR - 2005

Cette roche possède une structure microlitique avec une matrice assez largement cristallisée, envahie par les microlites de plagioclase (andésine*, labrador), de clinopyroxène, d’olivine et d’oxydes (figure 13). Le plus souvent, ces laves sont aphyriques. Toutefois, de rares mégacristaux de plagioclase (andésine, labrador) peuvent être présents. Ils sont le plus souvent sub-automorphes ou xénomorphes.

Figure 13 - Lame mince de mugéarite photographiée au microscope en lumière polarisée.

Les benmoréites sont peu abondantes. Elles apparaissent en coulées au sommet des remparts et sur les planèzes* du Piton des Neiges.

Les trachytes sont plus riches en silice que les précédentes, plus visqueux et se rencontrent donc plutôt sous la forme de dômes-coulées (plateau de Bélouve) (figure 14). Ils se trouvent aussi sous forme de dykes et de sills dans le cœur des

Page 20: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

Kit Pédagogique Sciences de la Terre 23

trois cirques du Piton des Neiges. Des pyroclastites trachytiques peuvent être observées à l'exutoire des cirques : nuées de ponces* et de blocs* de Saint-Pierre et Saint-Louis. Les trachytes prennent souvent une couleur rosée en s’altérant.

© BRGM - 2005

Figure 14 - Échantillon de trachyte prélevé dans le lit de la rivière des Fleurs Jaunes,

cirque de Salazie.

© LSTUR - 2005

Figure 15 - Photographie au microscope en lumière polarisée d’une lame mince

de trachyte.

Cette roche peut présenter une matrice assez largement cristallisée, envahie de microlites de feldspath alcalins et de plagioclases montrant une orientation marquée (figure 15). Ils sont accompagnés de clinopyroxènes, d’oxydes, d’amphiboles, d’olivine, d’apatite* et de quartz*. Les mégacristaux sont constitués de feldspaths alcalins (anorthose* principalement) et de feldspath plagioclase (andésine et oligoclase), parfois accompagnés de pyroxènes et d’amphibole.

3.5. UN GRAND ÉVENTAIL DE COMPOSITIONS CHIMIQUES

La petite taille des minéraux des laves et l'abondance de verre* font qu'il est souvent plus facile mais pas forcément plus rigoureux (car il faut alors faire abstraction de l'altération des roches) de nommer les roches volcaniques en fonction de leurs compositions chimiques. Ce mode de classification repose principalement sur les teneurs en silice et en éléments alcalins, principalement le sodium et le potassium.

Reportées dans un diagramme SiO2 (Na2O + K2O) (figure16), les laves de La Réunion montrent une localisation préférentielle dans le domaine des séries faiblement alcalines.

Page 21: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

24 Kit Pédagogique Sciences de la Terre

0

2

4

6

8

10

12

14

16

40 45 50 55 60 65 70 75 80

SiO2 (%)

Na 2

O+K

2O (

%)

Piton des Neiges

Piton de la FournaisePhonolite

Basanite - Tephrite

Sub-alkaline Basalt

Basaltic andesite

Dacite

Rhyolite

Phonolitic tephrite

Picrobasalt

Alkaline basalt Hawaiite

Mugearite

Andesite

Trachyte

FoiditeTephritic phonolite

Benmoreite

© BRGM - 2005

Figure 16 – Diagramme SiO2 (Na2O + K2O)

3.6. LE RÉCIF

L'île est bordée sur sa côte occidentale et sud par un modeste récif frangeant (figure 17). Il est plat ; sa largeur n'excède jamais 200 mètres et la profondeur du lagon ne dépasse pas deux mètres. De la haute mer vers la côte, on relève tout d'abord un front récifal qui résulte de l'écroulement du platier* vivant battu par les vagues. Lui succède un platier compact. Celui-ci est colonisé par des mélobésiées* concrétionnaires, des hydrocoralliaires* et des madréporaires* (figure 18). La partie arrière du récif comprend des platiers nécrosés. Les datations du récif montrent qu’il s'est édifié au cours du Pléistocène et plus précisément depuis 8 500 ans, à une vitesse moyenne de croissance verticale de 0,4 cm/an.

Page 22: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

Kit Pédagogique Sciences de la Terre 25

© IGN - 1997, modifié par le BRGM - 2005

Figure 17 - Répartition des récifs coralliens sur la côte ouest de La Réunion.

Le corail : une pierre vivante

© BRGM - 2005

Figure 18 - Schémas des étapes de la construction du récif corallien.

Sur 16 kilomètres, entre la Pointe de Trois-Bassins à la Pointe Barre à Mine (Saint- Paul) s’étend la zone principale des plages coralliennes de La Réunion avec un continuum sableux partant de Trois-Bassins jusqu’à Boucan Canot. Le massif du Cap

Page 23: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

26 Kit Pédagogique Sciences de la Terre

La Houssaye fixe la limite Nord de ces plages. Deux types principaux de plages coralliennes se rencontrent dans cette zone : il s’agit des plages relativement évoluées de La Saline / l’Hermitage (figures 19 et 20) et présentant une extension sous-marine appelée à tort « lagon» localement (un lagon est l’espace marin situé entre la terre et un récif barrière, or le récif de La Saline / l’Hermitage est un récif frangeant). De part et d’autre les plages de Trois-Bassins et de Saint-Gilles (figure 21) (de Roches Noires à Boucan Canot) sont moins évoluées et ne possèdent qu’une extension sous-marine limitée aux passes dans le récif au débouché des ravines (figure 22).

Figure 20 - Le débouché d’une rivière dans le lagon et la rencontre de l’eau douce et de l’eau salée créent une interruption dans la barrière de corail : la passe de l’Hermitage.

© BRGM - 2005

© BRGM - 2005

Figure 19 - La barrière de corail, plage de La Saline.

© BRGM - 2005

Figure 21 - La plage de Boucan Canot

© BRGM - 2005

Figure 22 - La passe de Saint-Gilles

Page 24: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

Kit Pédagogique Sciences de la Terre 27

3.7. PLAGES DE SABLES

Les plages de sable noir

Du point de vue minéralogique, il n'existe pas de sable purement siliceux à La Réunion. Tous les sables existants sont d'origine basaltique et sont constitués par des débris de basalte, des cristaux d'olivine, d'augite* et des oxydes métalliques, d’où leur couleur noire (figure 23) ou verte (figures 24 et 25) quand les olivines sont abondantes. De tels sables marins sont situés sur la côte ouest de l'île où ils forment quelques plages et une bande de dunes côtières dans la région de l'Etang-Salé (cf. p 28).

© BRGM - 2005

Figure 23 - Plage de sable noir volcanique à la Ravine des Sables.

© BRGM - 2004

Figure 24 - Dunes de sable vert riche en olivines à la Ravine des Sables.

Page 25: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Connaissance géologique de La Réunion - Livret de l'enseignant

28 Kit Pédagogique Sciences de la Terre

© BRGM - 2004

Figure 25 - Sable vert vu à la loupe binoculaire contenant une forte proportion de minéraux d’olivine roulés,

émoussés par la houle et le vent.

Les plages de sable blanc

Certains de ces sables sont mélangés à des débris coralliens ou coquilliers. Dans la région de Saint-Gilles et de Saint-Leu, ces débris calcaires sont nettement prépondérants et le sable présente alors une couleur blanche (figure 26).

© BRGM – 2004

Figure 26 - Sable blanc corallien vu à la loupe binoculaire.

Page 26: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Le cycle des roches

ROCHES IGNÉES

À certains endroits dans les profondeurs de l'écorce terrestre,les roches ont fondu et se sonttransformées en magma, qui estun mélange de cristaux et deroches liquides. Quand le magmafait surface en jaillissant d'un volcan, on l'appelle « lave ».Lorsque la lave refroidit et durcitsur la surface terrestre, elledevient une « roche ignée volcanique ». Toutefois, lorsque lemagma refroidit et durcit sous laterre, il devient une « roche ignéeplutonique ».

ROCHES SÉDIMENTAIRES

Le vent et l'eau causent l'érosionen détachant de petits morceauxde roches et en les transportantd'un endroit à un autre. Petit àpetit, ces morceaux s'ajoutent ausable, aux cailloux, aux coquilleset aux matières végétales pourformer des couches qu'on appelle« sédiments ». Au cours d'unelongue période de temps, lessédiments durcissent et devien-nent de la roche. C'est ainsi quese forme la roche sédimentaire.La plupart des roches sur la surface terrestre sont des rochessédimentaires.

ROCHES MÉTAMORPHIQUES

Les roches changent au fur et àmesure qu'elles sont chauffées etpressées, un peu comme la pâteà biscuits change lorsqu'elle cuit.Les roches qui se trouvent dansles profondeurs de la terre sontsoumises à une chaleur et à unepression intenses. Avec le temps,ces forces transforment lesroches sédimentaires ou ignéesen un autre type de roche qu'onappelle « roche métamorphique ».

Page 27: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les roches sédimentaires

Si les roches ignées forment le gros du volume de la croûte terrestre, les roches sédimentaires forment le gros de la surface de la croûte. Quatre processus conduisent à la formation des roches sédimentaires: l'altération superficielle des matériaux qui produit des particules, le transport de ces particules par les cours d'eau, le vent ou la glace qui amène ces particules dans le milieu de dépôt, la sédimentation qui fait que ces particules se déposent dans un milieu donné pour former un sédiment et, finalement, la diagenèse qui transforme le sédiment en roche sédimentaire.

Le matériel sédimentaire peut provenir de trois sources : une source terrigène, lorsque les particules proviennent de l'érosion du continent; une source allo chimique, lorsque les particules proviennent du bassin de sédimentation, principalement des coquilles ou fragments de coquilles des organismes; une source ortho chimique qui correspond aux précipités chimiques dans le bassin de sédimentation ou à l'intérieur du sédiment durant la diagenèse.

L'altération superficielle. Les processus de l'altération superficielle sont de trois types: mécaniques, chimiques et biologiques. Les processus mécaniques (ou physiques) sont ceux qui désagrègent mécaniquement la roche, comme l'action du gel et du dégel qui à cause de l'expansion de l'eau qui gèle dans les fractures ouvre progressivement ces dernières. L'action mécanique des racines des arbres ouvre aussi les fractures. L'altération chimique est très importante : plusieurs silicates, comme les feldspaths, souvent abondants dans les roches ignées, sont facilement attaqués par les eaux de pluies et transformés en minéraux des argiles (phyllosilicates) pour former des boues. Certains organismes ont la possibilité d'attaquer biochimiquement les minéraux. Certains lichens vont chercher dans les minéraux les éléments chimiques dont ils ont besoin. L'action combinée de ces trois mécanismes produit des particules de toutes tailles. C'est là le point de départ du processus général de la sédimentation.

Le transport. Outre le vent et la glace, c'est surtout l'eau qui assure le transport des particules. Selon le mode et l'énergie du transport, le sédiment résultant comportera des structures sédimentaires variées: stratification en lamelles planaires, obliques ou entrecroisées, granoclassement, marques diverses au sommet des couches, etc. Les roches sédimentaires hériteront de ces structures. Le transport des particules peut être très long. En fait, ultimement toutes les particules devront se retrouver dans le bassin océanique.

Page 28: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

La sédimentation. Tout le matériel transporté s'accumule dans un bassin de sédimentation, ultimement le bassin marin, pour former un dépôt. Les sédiments se déposent en couches successives dont la composition, la taille des particules, la couleur, etc., varient dans le temps selon la nature des sédiments apportés. C'est ce qui fait que les dépôts sédimentaires sont stratifiés et que les roches sédimentaires issues de ces dépôts composent les paysages stratifiés comme ceux du Grand Canyon du Colorado par exemple.

La diagenèse. L'obtention d'une roche sédimentaire se fait par la transformation d'un sédiment en roche sous l'effet des processus de la diagenèse. La diagenèse englobe tous les processus chimiques et mécaniques qui affectent un dépôt sédimentaire après sa formation. La diagenèse commence sur le fond marin, dans le cas d'un sédiment marin, et se poursuit tout au long de son enfouissement, c'est-à-dire, à mesure que d'autres sédiments viennent recouvrir le dépôt et l'amener progressivement sous plusieurs dizaines, centaines ou même milliers de mètres de matériel. Les processus de diagenèse sont variés et complexes : ils vont de la compaction du sédiment à sa cimentation, en passant par des phases de dissolution, de recristallisation ou de remplacement de certains minéraux. Le processus dia génétique qui est principalement responsable du passage de sédiment à roche est la cimentation. Il s'agit d'un processus relativement simple : si l'eau qui circule dans un sédiment, par exemple un sable, est sursaturée par rapport à certains minéraux, elle précipite ces minéraux dans les pores du sable et ceux-ci viennent souder ensemble les particules du sable; on obtient alors une roche sédimentaire qu'on appelle un grès. Le degré de cimentation peut être faible, et on a alors une roche friable, ou il peut être très poussé, et on a une roche très solide. La cimentation peut très bien se faire sur le fond marin (diagenèse précoce), mais il est aussi possible qu'il faille attendre que le sédiment soit enfoui sous plusieurs centaines ou même quelques milliers de mètres de matériel (diagenèse tardive).

L'induration (cimentation) d'un sédiment peut se faire tôt dans son histoire dia génétique, avant l'empilement de plusieurs mètres de sédiments (pré compaction), ou plus tardivement, lorsque la pression sur les particules est grande due à l'empilement des sédiments.

Page 29: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Dans le cas de la cimentation pré compaction (schéma du haut), les fluides qui circulent dans le sédiment précipitent des produits chimiques qui viennent souder ensemble les particules. Exemple : la calcite qui précipite sur les particules d'un sable et qui finit par souder ces dernières ensemble. La compaction d'un sédiment (schéma du bas) peut conduire à sa cimentation. Ainsi, la pression élevée exercée aux points de contact entre les particules de quartz d'un sable amène une dissolution locale du quartz, un sursaturation des fluides par rapport à la silice et une précipitation de silice sur les parois des particules cimentant ces dernières ensemble.

Le nom des sédiments et roches sédimentaires. La dénomination des sédiments et roches sédimentaires se fait en deux temps.

D'abord selon la taille des particules (la granulométrie) chez les terrigènes et les alchimiques. Deux tailles sont importantes à retenir : 0,062 et 2 mm. La granulométrie n'intervient pas dans le cas des ortho chimiques puisqu'il s'agit de précipités chimiques et non de particules transportées.

Ensuite, on complète la classification par la composition minéralogique. La composition des particules des terrigènes se résume au quartz, feldspath, fragments de roches (morceaux d'anciennes roches qui ont été dégagés par l'érosion) et minéraux des argiles (par exemple, les sables des plages de la Nouvelle-Angleterre sont surtout des sables à particules de quartz avec un peu de feldspaths). Quant aux allo chimiques, ce sont principalement des calcaires, ce qui est reflété par le suffixe CAL dans le nom. Les particules des allo chimiques sont formées en grande partie par les coquilles ou morceaux de coquilles des organismes (calcite ou aragonite). Les sédiments des zones tropicales sont surtout formés de ces coquilles, comme par exemple les sables blancs des plages du Sud! Chez les ortho chimiques, le nom est essentiellement déterminé selon la composition chimique.

Avec l'aimable autorisation de : Pierre-André Bourgue (Université Laval Québec, Canada)

D’après : http://www.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/s2/r.sedim.html

Page 30: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les roches sédimentaires

Page 31: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• 75% de la surface terrestre• 5% du volume de la croûte• roches exogènes : formées en surface

Page 32: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Qu’est-ce qu’une roche sédimentaire ?

Roche résultant de l’accumulation d’éléments(fragments minéraux, débris coquilliers..) et/ou de précipitations à partir de solutions

(Dictionnaire de géologie)

Page 33: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Caractères d’une roche sédimentaire

• Fossiles (souvent)

• Roche litée mais cristaux pas orientés dans le plan du litage

• Faible densité

• Cristaux non jointifs (en général)

Page 34: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Problématiques

• Sur quels critères peut-on se baser pour classer les roches sédimentaires ?

• Quelles sont les conditions de formationdes roches sédimentaires ?

Page 35: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentaires

Page 36: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentairesA. Classification génétique

Page 37: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Cycle d’évolution d’une roche

(Dercourt et Paquet)

Page 38: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Diagenèse : 4 étapes principales

(Caron et coll.)

Page 39: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Formation en 2 étapes

1. Dépôt de particules ou de coquilles / précipitation d’ions dissous => sédiment meuble

2. Transformation du sédiment meuble en roche sédimentaire consolidée= diagenèse (ou lithification)

Page 40: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Subdivisions de base : 3 classes génétiques

(Brahic et coll.)

Page 41: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentairesA. Classification génétiqueB. Classification minéralogique ou chimique

Page 42: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Critères d’identification• Macroscopiques :

- Observations : Couleur d’ensemble, aspect de la cassure, texture, structures…

- Tests : HCl, dureté, cohérence, comportement vis-à-vis de l’eau, goût…

• Microscopiques :Eléments figurés, liant, porosité, fractures...

Page 43: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Quelques tests

• Test au HCleffervescence => carbonate CO3

2-

CaCO3 + 2 HCl → CO2 + H2O + CaCl2

• Lécher la roche- happe la langue => argile- goût salé => sel gemme

Page 44: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Duretérésistance d’un minéral à la destruction mécanique de sa structure=> un minéral est plus dur qu’un autre s’il le raye

Verre AcierOngle

très tendre tendre dur très dur

Classement selon l’échelle de Mohs

Page 45: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Cohérence

frotter la roche :- bonne cohésion, ne s’effrite pas => cohérente- s’effrite, éléments peu soudés => friable- aucune cohésion => meuble

Page 46: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement vis-à-vis de l’eau• Porosité

ensemble des volumes de petite taille pouvant être occupés par des fluides dans une roche

• Perméabilitéaptitude d’un milieu à se laisser traverser par un fluide

• Solubilitéaptitude d’un composé à être dissout dans un solvant

Page 47: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Clé de détermination des roches sédimentaires

Page 48: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Grandes catégories

Page 49: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentaires

II. Classifications particulières àchaque catégorie de roche

Page 50: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentaires

II. Classifications particulières àchaque catégorie de rocheA. Roches détritiques

Page 51: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Roches détritiques :Roches sédimentaires composées d’au moins 50% de débris

• Plusieurs catégories :- roches détritiques terrigènes (80 à 90 % des roches sédimentaires), dont les roches siliciclastiques- roches biodétritiques => roches carbonatées- roches volcanoclastiques (pyroclastiques)

Page 52: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

1. Roches terrigènes

(Dercourt et Paquet)

Page 53: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

a. Caractérisation• Taille des éléments (granulométrie) et leur

classement (granularité)

• Nature de ces éléments

• Nature et importance du ciment reliant les grains (roche consolidée)

• Nature et importance de la diagenèse

• Structures sédimentaires

Page 54: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Etat d’agrégation

• Roches meubles :grains indépendants

• Roches plastiques :nombreux minéraux argileux => déformation possible

• Roches cohérentes :constituants intimement soudés

Page 55: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Dimension des éléments

- 3 grandes classes- 2/3 argiles et silts,

1/3 sables et graviers(Brahic et coll.)

Page 56: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

b. Roches meubles

• Sédiment bien classé=> dimension des grains

• Sédiment mal classé=> diagrammes ternaires

(Brahic et coll.)Diagrammes (A) de Flint et al. (1960) et (B) de Folk (1954)(Univ. Liège)

Page 57: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Analyses granulométriques

Distribution granulométrique d’un gravier :

A: histogrammeB: courbe cumulativeC: courbe cumulative àordonnée de probabilité

(Univ. Liège)

Page 58: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Analyses morphoscopiques

A: sable quartzeux éolien dont les grains ont un aspect "rond-mat" (Cervantès, Australie).B: sable marin, également quartzeux, dont les grains ont un aspect "émoussé-luisant" (Kalbarri, Australie).

(Univ. Liège)

Page 59: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Analyses exoscopiques

• Etude au MEB

• Traces de frottements, de chocs => actions mécaniques

• Traces de dissolution => actions chimiques

Page 60: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

c. Roches cohérentes

(Brahic et coll.)

Page 61: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Conglomérats

• Éléments de dimension > 2mm

• 2 grands types de conglomérat :- à éléments arrondis => poudingue- à éléments anguleux => brèche

Page 62: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Classification de Prothero et Schwab (1996) : dimension, diversité, provenance des éléments ; nature du liant

Classification des brèches et conglomérats(Univ. Liège)

Page 63: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Grès

• Eléments de dimensions de 62 µm à 2 mm(= sable consolidé)

• Composition : grains + phase de liaison• Grains : quartz, feldspath, débris lithiques• Phase de liaison (liant) :

- matrice : boue terrigène ou carbonatée, déposée en même temps que les grains- ciment : siliceux, carbonaté ou ferrugineux, qui précipite au cours de la diagenèse

Page 64: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Classification selon Dott (1964)- composition des grains- % de matrice

(Univ. Liège)

Page 65: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Sédiments argileux et silteux

• Éléments de dimensions < 62 µm

• Composition moyenne d’un shale :- 50 % de minéraux argileux- 30 % de quartz- 10 % de feldspaths- 10 % de carbonates et oxydes de fer

Page 66: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Classification de Lundegard et Samuels (1980) :

- proportion de silt- lamination

Page 67: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

d. Notion de maturité• Maturité minéralogique

Basée sur la résistance des minéraux àl’altération :quartz > muscovite > feldspaths alcalins > plagioclases > biotite > pyroxène > olivine

- roche immature : présence de minéraux vulnérables- roche mature : seulement des minéraux résistants

=> lié à la longueur du transport subi

Page 68: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Maturité texturaleBasée sur :- la proportion en matériel fin- le classement des grains- la sphéricité des grains

Abondance en grains / argile (Univ. Liège)

Page 69: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Maturité texturaleBasée sur :- la proportion en matériel fin- le classement des grains- la sphéricité des grains

- roche immature : plus de 5 % d’argile, grains anguleux et mal classés- roche mature : peu ou pas d’argile, grains anguleux et bien triés- roche supermature : pas d’argile, grains arrondis et bien classés

=> lié à l’importance du transport subi

Exercices

Page 70: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

2. Roches pyroclastiques• Téphra (= éjectas) : matériaux éjectés par

une éruption volcanique• Roche pyroclastique : roche issue de la

lithification des téphra

tufcendre< 2 mm

tuf à lapillilapilli2 à 64 mm

agglomératbombesarrondis

brèche volcaniqueblocsanguleux> 64 mm

Roche pyroclastique

TephraTaille des constituants

Page 71: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

I. Classification générale des roches sédimentaires

II. Classifications particulières àchaque catégorie de rocheA. Roches détritiquesB. Roches chimiques et biochimiques

Page 72: 130621544 Book Roches Mineraux[1]
Page 73: 130621544 Book Roches Mineraux[1]
Page 74: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

1. Roches carbonatées

• Au moins 50 % de carbonate- CaCO3 : calcite ou aragonite- CaMg(CO3)2 : dolomite

• Formation proche voire sur le site d’accumulation du sédiment

• Processus principalement biologiques

Page 75: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Précipitation des carbonates• Formule chimique :

Ca2+ + 2 HCO3- ⇌ CaCO3 + CO2 + H2O

• Facteurs influençant la réaction :- teneur en CO2 atmosphérique=> + de dissolution si la teneur en CO2 augmente- organismes photosynthétiques=> + de précipitation en cas de photosynthèse- température=> + de précipitation si la température augmente

Page 76: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

a. Classification de Folk (1959)

• Constituants majeurs des calcaires : - allochèmes : grains carbonatés- orthochèmes : phase de liaison

• 2 types de phase de liaison :- matrice : formée de calcite en cristaux de taille < 4 µm (= micrite) => aspect mat- ciment : formé de calcite en cristaux de taille > 10 µm (= sparite) => aspect brillant

Page 77: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• 4 catégories d’allochèmes :- bioclastes : microfossiles et fragments de fossiles- ooïdes : particules ovoïdes àstructure concentrique de taille < 2µm, dont les oolithes- peloïdes : particules microcristallines sans structure interne, dont les pellets- intraclastes : fragments de sédiments carbonatés consolidés puis fragmentés

(Univ. Liège)

Page 78: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

3 familles de roches :

• Allochimiques (> 10% d’allochèmes)=> nom en fonction des allochèmes et du liant

• Orthochimiques=> micrites

• Récifales autochtones=> biolithites(= calcaires construits)

(Univ. Liège)

Page 79: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

b. Classification de Dunham (1962) et Embry & Klovan (1972)

• Basée sur :- la texture de la roche- le type de liaison entre les grains

(Univ. Liège)

Page 80: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

• Intérêt : informations sur l’hydrodynamisme dans le milieu de dépôt

mudstone → wackestone → packstone → grainstone

Milieu de haute énergie(action des vagues)

Milieu de basse énergie(profond ou protégé)Milieu de basse énergie(profond ou protégé)

Page 81: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

c. Lien avec le milieu de dépôt

Répartition des faciès carbonatés le long de profils de dépôts côtiers

A: Rampe carbonatéeB: Plate-forme carbonatée barrée par un récif

LVBT : Limite d’action des vagues de beau temps (5 à 25 m)LVT : Limite d’action des vagues de tempête (50 à 100 m)

(Pomerol et coll.)

Page 82: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

2. Roches siliceuses

• Silicites (chert s.l.)- noduleuses : silex, meulière => origine secondaire (diagenèse)- litées : radiolarite, diatomite => origine primaire

Radiolaires nacellaire (à gauche) et spumellaire (à droite)(Cojan et Renard)

Page 83: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

3. Evaporites

• Roches chimiquesprécipitation d’ions d’une eau très concentrée

• Domaine de précipitation :– % d’évaporation– température

(Pomerol et coll.)

Page 84: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

4. Roches carbonées

• Matière organique ayant subi une carbonification :

- enrichissement en carbone (> 70 %)- appauvrissement en matière volatile

(Brahic et coll.)

Page 85: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Bilan• Diversité importante des roches

sédimentaires

• 3 catégories génétiques, non exclusives

• Critères de classifications variés

• Lien avec les conditions de formation : reconstitution de paléoenvironnements

Page 86: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Bibliographie• Géologie générale

- A. BRAHIC et coll., Sciences de la Terre et de l'Univers, Ed. Vuibert- J.M. CARON et coll., Comprendre et enseigner la planète Terre, Ed. Ophrys- J. DERCOURT et J. PAQUET, Géologie : Objets et méthodes, Ed. Dunod- A. FOUCAULT et J.-F. RAOULT, Dictionnaire de géologie, Ed. Dunod- C. POMEROL, Y. LAGABRIELLE, M. RENARD, Éléments de géologie, Ed. Dunod

• Sédimentologie

- H. CHAMLEY et J.-F. DECONINCK, Bases de sédimentologie, Ed. Dunod- I. COJAN et M. RENARD, Sédimentologie, Ed. Dunod- http://www2.ulg.ac.be/geolsed/sedim/sedimentologie.htm (Université de Liège)

Page 87: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les roches sédimentaires

Si les roches ignées forment le gros du volume de la croûte terrestre, les roches sédimentaires forment le gros de la surface de la croûte. Quatre processus conduisent à la formation des roches sédimentaires: l'altération superficielle des matériaux qui produit des particules, le transport de ces particules par les cours d'eau, le vent ou la glace qui amène ces particules dans le milieu de dépôt, la sédimentation qui fait que ces particules se déposent dans un milieu donné pour former un sédiment et, finalement, la diagenèse qui transforme le sédiment en roche sédimentaire.

Le matériel sédimentaire peut provenir de trois sources : une source terrigène, lorsque les particules proviennent de l'érosion du continent; une source allo chimique, lorsque les particules proviennent du bassin de sédimentation, principalement des coquilles ou fragments de coquilles des organismes; une source ortho chimique qui correspond aux précipités chimiques dans le bassin de sédimentation ou à l'intérieur du sédiment durant la diagenèse.

L'altération superficielle. Les processus de l'altération superficielle sont de trois types: mécaniques, chimiques et biologiques. Les processus mécaniques (ou physiques) sont ceux qui désagrègent mécaniquement la roche, comme l'action du gel et du dégel qui à cause de l'expansion de l'eau qui gèle dans les fractures ouvre progressivement ces dernières. L'action mécanique des racines des arbres ouvre aussi les fractures. L'altération chimique est très importante : plusieurs silicates, comme les feldspaths, souvent abondants dans les roches ignées, sont facilement attaqués par les eaux de pluies et transformés en minéraux des argiles (phyllosilicates) pour former des boues. Certains organismes ont la possibilité d'attaquer biochimiquement les minéraux. Certains lichens vont chercher dans les minéraux les éléments chimiques dont ils ont besoin. L'action combinée de ces trois mécanismes produit des particules de toutes tailles. C'est là le point de départ du processus général de la sédimentation.

Le transport. Outre le vent et la glace, c'est surtout l'eau qui assure le transport des particules. Selon le mode et l'énergie du transport, le sédiment résultant comportera des structures sédimentaires variées: stratification en lamelles planaires, obliques ou entrecroisées, granoclassement, marques diverses au sommet des couches, etc. Les roches sédimentaires hériteront de ces structures. Le transport des particules peut être très long. En fait, ultimement toutes les particules devront se retrouver dans le bassin océanique.

Page 88: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

La sédimentation. Tout le matériel transporté s'accumule dans un bassin de sédimentation, ultimement le bassin marin, pour former un dépôt. Les sédiments se déposent en couches successives dont la composition, la taille des particules, la couleur, etc., varient dans le temps selon la nature des sédiments apportés. C'est ce qui fait que les dépôts sédimentaires sont stratifiés et que les roches sédimentaires issues de ces dépôts composent les paysages stratifiés comme ceux du Grand Canyon du Colorado par exemple.

La diagenèse. L'obtention d'une roche sédimentaire se fait par la transformation d'un sédiment en roche sous l'effet des processus de la diagenèse. La diagenèse englobe tous les processus chimiques et mécaniques qui affectent un dépôt sédimentaire après sa formation. La diagenèse commence sur le fond marin, dans le cas d'un sédiment marin, et se poursuit tout au long de son enfouissement, c'est-à-dire, à mesure que d'autres sédiments viennent recouvrir le dépôt et l'amener progressivement sous plusieurs dizaines, centaines ou même milliers de mètres de matériel. Les processus de diagenèse sont variés et complexes : ils vont de la compaction du sédiment à sa cimentation, en passant par des phases de dissolution, de recristallisation ou de remplacement de certains minéraux. Le processus dia génétique qui est principalement responsable du passage de sédiment à roche est la cimentation. Il s'agit d'un processus relativement simple : si l'eau qui circule dans un sédiment, par exemple un sable, est sursaturée par rapport à certains minéraux, elle précipite ces minéraux dans les pores du sable et ceux-ci viennent souder ensemble les particules du sable; on obtient alors une roche sédimentaire qu'on appelle un grès. Le degré de cimentation peut être faible, et on a alors une roche friable, ou il peut être très poussé, et on a une roche très solide. La cimentation peut très bien se faire sur le fond marin (diagenèse précoce), mais il est aussi possible qu'il faille attendre que le sédiment soit enfoui sous plusieurs centaines ou même quelques milliers de mètres de matériel (diagenèse tardive).

L'induration (cimentation) d'un sédiment peut se faire tôt dans son histoire dia génétique, avant l'empilement de plusieurs mètres de sédiments (pré compaction), ou plus tardivement, lorsque la pression sur les particules est grande due à l'empilement des sédiments.

Page 89: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Dans le cas de la cimentation pré compaction (schéma du haut), les fluides qui circulent dans le sédiment précipitent des produits chimiques qui viennent souder ensemble les particules. Exemple : la calcite qui précipite sur les particules d'un sable et qui finit par souder ces dernières ensemble. La compaction d'un sédiment (schéma du bas) peut conduire à sa cimentation. Ainsi, la pression élevée exercée aux points de contact entre les particules de quartz d'un sable amène une dissolution locale du quartz, un sursaturation des fluides par rapport à la silice et une précipitation de silice sur les parois des particules cimentant ces dernières ensemble.

Le nom des sédiments et roches sédimentaires. La dénomination des sédiments et roches sédimentaires se fait en deux temps.

D'abord selon la taille des particules (la granulométrie) chez les terrigènes et les alchimiques. Deux tailles sont importantes à retenir : 0,062 et 2 mm. La granulométrie n'intervient pas dans le cas des ortho chimiques puisqu'il s'agit de précipités chimiques et non de particules transportées.

Ensuite, on complète la classification par la composition minéralogique. La composition des particules des terrigènes se résume au quartz, feldspath, fragments de roches (morceaux d'anciennes roches qui ont été dégagés par l'érosion) et minéraux des argiles (par exemple, les sables des plages de la Nouvelle-Angleterre sont surtout des sables à particules de quartz avec un peu de feldspaths). Quant aux allo chimiques, ce sont principalement des calcaires, ce qui est reflété par le suffixe CAL dans le nom. Les particules des allo chimiques sont formées en grande partie par les coquilles ou morceaux de coquilles des organismes (calcite ou aragonite). Les sédiments des zones tropicales sont surtout formés de ces coquilles, comme par exemple les sables blancs des plages du Sud! Chez les ortho chimiques, le nom est essentiellement déterminé selon la composition chimique.

Avec l'aimable autorisation de : Pierre-André Bourgue (Université Laval Québec, Canada)

D’après : http://www.ggl.ulaval.ca/personnel/bourque/s2/r.sedim.html

Page 90: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Manuelde

Mécanique des Roches

Tome 1 : Fondements

par le Comité français de mécanique des roches

Coordonné par Françoise Homand et Pierre Duffaut

!"#$%" '() *+,$-" #. /.0-1).

Pierre BÉREST Pierre BÉRESTDaniel BILLAUX Pierre HABIBMarc BOULON Jean-Paul SARDAFrançois CORNET Gérard VOUILLEChristian DAVIDPierre DUFFAUTJean-Louis DURVILLESylvie GENTIERAlbert GIRAUDMehdi GHOREYCHIJean-Pierre HENRYFrançoise HOMANDDjimedo KONDOPierre LONDEFrédéric PELLETJack-Pierre PIGUETJean-Paul SARDA 2)"3(0.Jian-Fu SHAOMountaka SOULEY Pierre BÉREST

Les Presses de l’École des Mines

Paris, 2000

Page 91: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

© École des Mines de Paris, 199960, Boulevard Saint-Michel, 75272 Paris CEDEX 06 FRANCEemail : [email protected]://www.ensmp.fr/Presses

ISBN : 2-911762-23-1Dépôt légal : mai 2000Achevé d’imprimer en mai 2000 (Grou-Radenez, Paris)

Tous droits de reproduction, d’adaptation et d’exécution réservés pour tous les pays

Photo de couverture : versant rive gauche de la vallée du Verdon, immédiatement àl’aval du grand barrage voûte de Castillon (Alpes Maritimes). Les bancs calcairesinclinés sont affectés de failles et leur stabilité, compte tenu de la poussée de lavoûte, est assurée par des tirants précontraints depuis sa mise en service par EDF en1948. Il s’agit d’un problème typique de mécanique des roches, heureusement résoluavant la naissance de cette discipline (photo P. Duffaut, 1998).

Page 92: 130621544 Book Roches Mineraux[1]
Page 93: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

CHAPITRE 2 PHYSIQUE DES ROCHES

2.1 INTRODUCTIONLa physique des roches couvre, selon les auteurs, un domaine plus ou moins vaste. Ils’agit, dans ce manuel, de la description du milieu poreux (grains, pores et fissures)et de la quantification de ses principales propriétés physiques, à l’exclusion despropriétés mécaniques, traitées au chapitre 3. Une roche peut être définie comme unassemblage de minéraux ayant hérité de liaisons plus ou moins fortes au cours deson histoire géologique. La description d'une roche se fait sur un échantillon observéà la loupe et éventuellement au microscope optique polarisant ou électronique àbalayage. On décrit la texture, les minéraux présents, la taille des grains, les fissureset les altérations.

On présente ensuite les définitions et les méthodes d’étude de la porosité et de laperméabilité, dont l’incidence est grande sur les propriétés mécaniques, à sec ou enprésence de fluides. Les propriétés acoustiques sont considérées comme participantà la caractérisation des roches (l’ensemble est appelé en anglais index properties).On évoque les propriétés thermiques mais on laisse de côté les propriétésmagnétiques et électriques en dépit de certaines applications.

Les propriétés mesurées au laboratoire ne tiennent pas compte des discontinuitésapparaissant à l’échelle du massif, joints de stratification, diaclases, failles, qui sonttraitées aux chapitres 4 et 5. Lorsque ces discontinuités sont rares ou espacéesl’échantillon est représentatif du massif jusqu’à une large échelle, comme dans lescraies et les roches argileuses.

2.2 LES PRINCIPALES CATÉGORIES DE ROCHESLe nom d'une roche est donné en fonction de sa composition minéralogique, de satexture et de son mode de formation. Ce dernier conduit à distinguer trois grandesfamilles de roches : sédimentaires, métamorphiques et magmatiques.

TABLEAU 2-1 : PRINCIPALES ROCHES MAGMATIQUES

Avec quartz & feldspath Sans quartzFeldspath alcalin dominant Granite Syénite

Rhyolite TrachyteFeldspaths alcalins Monzogranite Monzonite+ plagioclases Rhyolite Trachyandésite

GranodioriteRhyodacite

Plagioclase seul Diorite quartzique Diorite(<50% Anorthite) Dacite AndésitePlagioclase seul Gabbro(>50% Anorthite) Basalteles noms en italique sont les équivalents volcaniques, ceux en gras sont les roches les plusrépandues

Page 94: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

32 Manuel de Mécanique des Roches

Les roches magmatiques, résultent de la solidification de magmas. Ceux quiparviennent directement à la surface forment les roches volcaniques ou effusives, leslaves, dans lesquelles on n'observe à l'œil nu que très peu de cristaux (en raison d’unrefroidissement rapide). Au contraire la solidification en profondeur donne lesroches plutoniques dont la lenteur du refroidissement permet la croissance descristaux, bien visibles donc à l’œil nu. Les minéraux sont essentiellement dessilicates : quartz, feldspaths alcalins et plagioclases, amphiboles, micas etc.. Lesclassifications font intervenir la texture de la roche (arrangement et taille descristaux) et la composition minéralogique (tableau 2-1). Associées aux rochesmétamorphiques, les roches magmatiques, dont les plus répandues sont les granites,forment l’essentiel de la croûte terrestre continentale, bien qu’elles soient souventcachées sous les roches sédimentaires.

Les roches sédimentaires sont formées à la surface de la terre sur le sol ou au fondde l'eau. Elles résultent de la désagrégation des roches préexistantes. Leur dépôt encouches initialement proches de l'horizontale résulte :! de l'action des agents d'érosion et de transport (eaux, crues, glaciers, vent) qui

déposent finalement des roches détritiques ;! de l'activité des êtres vivants (roches organogènes) ;! de phénomènes physico-chimiques (roches hydrochimiques et salines formées

essentiellement par précipitation).

Ces actions se combinent souvent et beaucoup de roches sédimentaires sont en faitd'origine mixte). Ces sédiments se consolident et se cimentent lorsqu'ils sont enfouisen profondeur (l’augmentation de la température et de la pression favorisant desréactions entre les minéraux et les fluides interstitiels). Les roches sédimentairescouvrent 75 % de la surface des continents et la quasi totalité des fonds océaniques,mais leur épaisseur est limitée.

Il y a de nombreuses classifications des roches sédimentaires fondées sur lacomposition chimique, la granularité des constituants ou le mode de formation quisont présentées dans les ouvrages de géologie. On se limite à citer les quatre groupesprincipaux : grès, calcaires, roches argileuses, évaporites, en laissant de côté lesroches carbonées (pétroles, charbons et lignites).

Les grès sont essentiellement constitués de grains de quartz (99,5 % pour le grès trèspur de Fontainebleau), ils contiennent souvent des feldspaths et des micas. Les grèsfeldspathiques sont appelés arkoses, les grès recristallisés quartzites, les grèscontenant des galets, poudingues ou conglomérats.

Les calcaires sont constitués essentiellement de carbonates de calcium (calcite ouaragonite) et de carbonate de magnésium (dolomie). Leur origine est organique, paraccumulation de débris d’organismes marins (craies), ou de précipitation chimique.

Les roches argileuses dont nous étudierons le comportement dans le chapitre 11,sont composées de minéraux argileux (illite, kaolinite, montmorillonite,interstratifiés), avec éventuellement des grains de petite dimension de quartz etcarbonates. Le terme argilite désigne les roches argileuses au sens large. Les shalessont des argilites litées.

Les évaporites sont des sels précipités lors de l'évaporation d'un liquide. A partir del'eau de mer les principaux minéraux précipités sont le gypse, l'anhydrite, le selgemme sous ses diverses formes dont la halite et la potasse (sylvinite).

Page 95: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 33

Il faut faire attention aux dénominations issues des cartes géologiques, dérivées del'appellation chronologique (étage) pour les roches sédimentaires. Il peut y avoir desvariations latérales de faciès qui font que le nom de la formation ne représente pas lalithologie de tout l'ensemble.

Les roches métamorphiques résultent de la transformation profonde à l'état solidede roches sédimentaires ou magmatiques préexistantes sous l'effet d'uneaugmentation de la température et/ou de la pression. Il y a recristallisation complètedes roches primitives. Les roches formées portent en général la trace de l'anisotropiedu tenseur des contraintes sous lequel elles ont cristallisé, ce qui peut se traduire parune schistosité ou une foliation accompagnée de linéation. Les roches les pluscommunes sont les schistes, les micaschistes et les gneiss, beaucoup plus massifs,mais dans lesquels les minéraux apparaissent nettement orientés. Les marbres et lesquartzites sont des roches massives entièrement recristallisées dans lesquellesl'orientation des minéraux (calcite ou quartz) n'est que rarement visible à l'œil nu.

La description d'une roche comprend les observations suivantes, effectuées à l'œil nuou de préférence à la loupe ou au microscope :! identification des minéraux présents,! taille, arrangement des minéraux et des vides associés (texture),! proportion des différents constituants,! vides et défauts : pores et fissures,! état d'altération des minéraux.

L'analyse minéralogique des constituants contribue à une meilleure description de laroche et permet d'approcher son altérabilité, son potentiel de gonflement, sonaptitude au « collage », éventuellement son abrasivité. L'analyse minéralogiques'effectue couramment par diffraction X, et dans le cas où des minéraux argileuxgonflants sont susceptibles d'être présents il est nécessaire de réaliser un traitementspécial. Cette analyse conduit à une identification des minéraux présents et aprèsinterprétation une composition quantitative peut être obtenue.

Pour les roches carbonatées argileuses, le dosage de la teneur en CaCO3 précisel'identification de la roche.

L’état d'altération de la roche se décrit précisément en s'attachant à identifier s'ils'agit d'une altération essentiellement météorique ou d'une altération d'origineprofonde, hydrothermale (souvent liée au volcanisme actuel ou plus ancien).

2.3 LE MILIEU POREUX

2.3.1 DÉFINITION ET MESURE

Dans les roches la matière minérale forme un squelette solide qui ne remplit pas toutl’espace, et dont le complément est appelé vide. La proportion de vide est appeléeporosité (du grec !"#"$, passage, ou détroit, entre les îles). La forme des vides, leurtaille, leur répartition, leurs liaisons ou au contraire l’isolement de certains, influentsur le comportement mécanique (chapitre 3) et sur les propriétés de couplage(chapitre 10).

La porosité n est, par définition, le rapport du volume des vides Vv au volume totalVt :

Page 96: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

34 Manuel de Mécanique des Roches

n VV

v

t" (2-1)

ou par rapport au volume du squelette Vs,

n V VV

VV

t s

t

s

t"

%" %1 (2-2)

Ces deux expressions peuvent différer car les techniques de mesures de Vv et Vs nesont pas équivalentes (tableau 2-2). Les méthodes 3 et 6 sont équivalentes, etpermettent de déterminer la porosité connectée. Les méthodes 4 et 6 (sur poudre)déterminent le volume des solides sans les vides non connectés et donnent donc laporosité totale, au sens strict.

TABLEAU 2-2 : PRINCIPALES MÉTHODES DE MESURE DE LA POROSITÉ

Volume total1. Mesure directe des dimensions de l'éprouvette2. Poussée d'Archimède dans le mercure, qui ne mouille pas la roche et ne pénètrepas dans les pores sans une forte pression

Volume des vides3. Absorption d'un fluide mouillant par saturation sous vide

Volume du solide4. Mesure au pycnomètre de la masse volumique du solide, après broyage5. Poussée d'Archimède dans un fluide mouillant saturant la roche, par différenceentre masse sèche et immergée6. Compressibilité des gaz parfaits, en réalisant une détente isotherme en reliant uneenceinte V1 (contenant l'échantillon) de volume V1 à la pression P1 à une enceintevide de volume V2 (pycnomètre à hélium). Après détente, la pression d'équilibre P2permet de calculer le volume d’une masse connue de poudre ou de roche.

La porosité est de l’ordre du centième pour certains marbres et quartzites, dudixième pour beaucoup de roches sédimentaires, elle peut atteindre 0,5 pourcertaines craies et tufs. La forme des vides est représentée en premièreapproximation par un coefficient de forme, rapport de la plus petite dimension à laplus grande. Ceci permet de distinguer les vides de type pore dont le coefficient deforme est entre 10-1 et 1) et les vides de type fissure, dont le coefficient de forme esttrès faible, entre 10-2 et 10-4, et dont l’épaisseur est négligeable. La part des poresdans le volume des vides est prépondérante, mais par contre les fissures contribuentpour l’essentiel à la surface spécifique (§ 2.5.3).

L'espace poreux peut être étudié de manière directe par observation au microscopeoptique ou électronique, éventuellement après remplissage par un produit colorant.Les techniques d’analyse d'images permettent ensuite une estimation quantitative dela porosité.

2.3.2 MASSES VOLUMIQUES ET TENEUR EN EAU

On appelle masse volumique d’un matériau la masse de l’unité de volume(dimension L-3M).

Page 97: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 35

On définit, suivant l’état du matériau, #s la masse volumique absolue ou massevolumique du solide, #h la masse volumique naturelle à réception du matériau, #dla masse volumique sèche, et #sat la masse volumique saturée (après saturation dela roche) :

#s = MV

s

s #d = M

Vs

t #h = M

Vh

t #sat = M

Vsat

t(2-3)

avec Ms la masse du matériau sec, Vs le volume des grains après broyage, Vt levolume de l'échantillon, Mh la masse naturelle, Msat la masse de l'échantillon saturé.#d varie en fonction de la porosité de la roche, par contre #s ne dépend que de laminéralogie (tableau 2-3). La teneur en eau w est le rapport de la masse d’eau, à lamasse du solide sec

w = MM

w

s(2-4)

Et on appelle degré de saturation Sr VV

w wn

w

v w

d

w

s

d

s" "

+"#

###

#

# (2-5)

2.3.3 ÉTUDE DES DIMENSIONS DES PORES AU POROSIMÈTRE A MERCURE

Le porosimètre à mercure permet d’étudier la répartition des vides de rayon d’entréecompris entre 200 $m et 0,0036 $m (voire 0,0018 $m). La mesure est fondée sur leséquilibres capillaires entre plusieurs fluides non miscibles dans un même espaceporeux. Un fluide mouillant s'étendra préférentiellement au contact du solide parrapport à un fluide non mouillant. Les équilibres fluide mouillant / fluide nonmouillant sont régis par les pressions capillaires à leurs interfaces :

P tR Rca s" %

&

'(

)

*+

1 11 2

(2-6)

avec R1 e t, R 2 : rayons de courbures principaux, tS : tension superficielle àl'interface entre les deux fluides et le signe ± suivant que les centres de courburesont ou non du même coté de l'interface.

On appelle drainage le déplacement d’un fluide mouillant, par un fluide nonmouillant sous l'effet d'une pression qui contrebalance les forces capillaires. Onappelle imbibition l’augmentation de la saturation en fluide mouillant, à la suited’une chute de pression. Les courbes de pression capillaire sont obtenues par unesuite de drainages et d'imbibitions en augmentant ou diminuant les pressions quis'opposent aux pressions capillaires. La figure 2-1 correspond au cas d’unéchantillon saturé initialement par de l’eau dans lequel on réalise un drainage parapplication d’une pression d’air dans une enceinte étanche. Il apparaît un état desaturation irréductible en fluide mouillant qui correspond à une configuration de laphase mouillante telle que les déplacements y sont devenus impossibles, car l’eauest sous forme d’amas reliés entre eux par des couches d’eau très minces dont laviscosité est très élevée.

Si on relâche la pression d’air, l’eau pénètre dans l’échantillon par imbibition, maisle phénomène n’est pas réversible, il y a un fort hystérésis. A pression capillairenulle, la saturation en eau est inférieure à 100 %. Une partie de l’air a été piégéependant le processus d’imbibition. Cette fraction d’air est appelée saturation

Page 98: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

36 Manuel de Mécanique des Roches

résiduelle en fluide non mouillant et sa valeur rapportée au volume total del’échantillon est la porosité piégée.

L'augmentation de pression capillaire en drainage conduit à des rayons de courburede l'interface de plus en plus petits. Par contre l’imbibition correspond à uneaugmentation progressive du rayon de courbure moyen de l’interface fluide

mouillant–fluide non mouillant, il seproduit alors des piégeages.

Figure 2-1 : Courbes de pressioncapillaire

Il n’y a pas de saturation irréductiblelorsque le fluide mouillant est un gazraréfié (vide) qui disparaît au fur et àmesure de la pénétration du fluidenon mouillant Le mercure est unfluide non mouillant alors que lavapeur de mercure est un fluidemouillant. On réalise ainsi undrainage par pénétration de mercuredans un échantillon dans lequel on afait préalablement le vide. Pourinterpréter la porosimétrie aumercure on assimile le milieu poreuxà un réseau de capillaires dont oncalcule le rayon moyen R par la

formule de Jurin :

P tRca

s"2 cos, (2-7)

avec Pca : pression capillaire ou pression de mercure tS: tension superficielle, , :angle de mouillabilité et R : rayon d’accès au pore. Il est clair d’après la figure 2-2que le rayon calculé par la formule de Jurin est un rayon d’accès et non le rayon desélargissements.

Les paramètres recueillis par le porosimètre à mercure permettent de représenter surun diagramme le volume de mercure injecté en fonction du rayon d'accès des poreset fissures envahis. Le modèle du réseau poreux est constitué de pores (sphériques)reliés entre eux par des étranglements capillaires. Ce sont les rayons d'accès qui sontdéterminés.

R1r

R2

2$cos,R1

2$cos,r

2$cos,r

- P < P .MERCUREVIDE

Figure 2-2 : Passage du mercure dans un réseau capillaire

0 20 40 60 80 100

Drainageinitial

Drainagefinal

Imbibition

p accpression d'accès

Satu

ratio

n ré

sidue

lle

Satu

ratio

n irr

éduc

tible

Pca

Saturation en fluide mouillant (%)

Page 99: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 37

Le volume de mercure injecté fournit la porosité totale. La différence entrel'injection et le retrait (figure 2-3) donne une valeur du piégeage du mercure dans leréseau poreux. Cette valeur est une estimation par excès de la porosité piégée (np)car le retrait s'effectue jusqu'à la pression atmosphérique et ne permet pas deconnaître le volume poreux abandonné par le mercure entre la pressionatmosphérique et la pression effective de début d'injection (3.10-3 MPa).

00,001 0,01 0,1 1 10 100

Porosité (%)

R(µm)

1ère injection

2ème injection

nt

nl

np

1° et 2° retraits

Figure 2-3 : Courbes d’injection et de retraits

0,001

2

4

6

8

10

12

0,01 0,1 1 10 100

r (mm)

n(%) nt

np

nl

GUDMONTCalcaire oolithique

2

6

10

14

0,001 0,01 0,1 1 10 100

np

nl

n(%) EUVILLECalcaire à entroques

nt

r (mm)

4

8

12

Figure 2-4 : Exemples de spectres de porosité de calcaires

Si l'échantillon subit un second cycle d'injection, la porosité libre (n1) est mesuréeainsi que la valeur réelle de la porosité piégée (np), par différence entre la porositétotale (nt du 1er cycle d'injection) et la porosité libre (n1 du 2ème cycle d'injection).Cette différence entre la courbe de retrait et celle de la 2ème injection est dueessentiellement à une variation de la valeur de , en injection et en retrait, provoquéepar des phénomènes irréversibles.

La figure 2-4 présente des exemples de courbes porosimétriques obtenues sur deuxcalcaires. Le calcaire d’Euville est un calcaire à entroques (débris de Crinoïdes, del’ordre de 2 à 4 mm) cimentées de calcite. Le calcaire de Gudmont est un facièsoolithique (grains de 1 mm). La courbe de porosité totale du calcaire d’Euvilleindique deux familles de pores : une macroporosité dans les vides du ciment et unemicroporosité dans les entroques. La macroporosité dans le calcaire de Gudmont estabsente. Une microporosité se développe soit au sein des oolithes, soit dans lamatrice carbonatée.

Page 100: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

38 Manuel de Mécanique des Roches

2.4 CIRCULATION DES FLUIDES : LA PERMÉABILITÉLa perméabilité caractérise l’aptitude d’une roche (ou de tout autre milieu poreux) àlaisser circuler des fluides au sein dans son espace poreux.

2.4.1 DÉFINITION DE LA PERMÉABILITÉ

A l’échelle macroscopique, la loi qui décrit l’écoulement d’un fluide en milieuporeux est la loi de Darcy, mise en évidence par une expérience très simple danslaquelle Darcy a montré que le débit volumique Q à travers une colonne de sable delongueur L est proportionnel à la section S de la colonne et au gradient de chargehydraulique /h/L. La charge hydraulique h (ou hauteur piézomètrique) est fonctionde l’altitude z, de la pression du fluide P, de la densité du fluide # et de la gravité g.

QS

k hL

"/ avec h z P

g" +

#. (2-8)

Le facteur de proportionnalité k est appelé coefficient de perméabilité ouconductivité hydraulique. La dimension de k est celle d’une vitesse. La loi deDarcy exprime la proportionnalité entre un flux hydraulique et la force motriceresponsable de ce flux (gradient de hauteur piézométrique ).Un inconvénient majeurde la loi de Darcy sous la forme précédente est que le coefficient de perméabilité kdépend non seulement des propriétés du matériau, mais aussi des propriétés dufluide (notamment sa viscosité $). Une formulation plus générale de la loi de Darcyest préférable :

QS

k PL

"$/ (2-9)

Le paramètre k est la perméabilité intrinsèque du milieu poreux traversé. Laperméabilité est homogène à une surface : son unité SI est donc le m2. En pratique,on utilise souvent comme unité le Darcy , avec l’équivalence 1 Darcy =0,987 10 12 m2. Par comparaison on voit que k = (#g/$)k et donc pour de l'eau à20°C, on a la correspondance suivante 1 Darcy = 0,96 10-5 m/s.

Dans le cadre général de la mécanique, à partir de la combinaison de l'équationd'état, de celle de continuité et de celle de mouvement, on établit la relationfondamentale de l'hydrodynamique en milieu homogène et isotrope :

V = - k grad 0, et pour un milieu anisotrope V = - k . grad 0 (2- 10)

Expressions dans lesquelles V désigne le champ de vitesse du fluide, 0 le potentiel(chapitre 6), la conductivité hydraulique prenant une forme tensorielle dans le milieuanisotrope. Un exemple important de milieux poreux anisotropes est celui des rochesréservoirs où la compaction se fait préférentiellement selon la direction verticale enraison des forces de gravité : la perméabilité verticale kv est alors souvent plus faibleque la perméabilité horizontale kh, avec une anisotropie marquée (le rapport kh/kvpeut aller jusqu’à 100).

La loi de Darcy ne s’applique, en toute rigueur, que pour un régime d’écoulementlaminaire, par opposition au régime d’écoulement turbulent. Lorsque la vitesse dufluide devient grande, les forces d’inertie ne sont plus négligeables devant les forcesde viscosité. Le domaine de validité de la loi de Darcy correspond aux nombres deReynolds faibles. Cette condition est généralement remplie pour les circulations defluides dans le massif rocheux, mais pas forcément dans les mesures en laboratoire.

Page 101: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 39

2.4.2 MÉTHODES DE MESURE DE LA PERMÉABILITÉ

Selon l’ordre de grandeur des perméabilités à mesurer, différentes techniquespeuvent être utilisées en laboratoire. Pour les fortes perméabilités, les techniquesbasées sur l’établissement d’un écoulement à travers un volume représentatif deroche sont préférables : méthodes à charge constante, à charge variable. Dans ce casla perméabilité est déduite par application directe de la loi de Darcy. Pour lesperméabilités plus faibles, une méthode transitoire est couramment utilisée : elleconsiste à estimer la perméabilité à partir de l’analyse de la diffusion d’un incrément(pulse) de pression dans un échantillon de roche, en système fermé.

Figure 2-5 : Exemple de dispositifexpérimental de mesure de laperméabilité

Le perméamètre de type I.F.P.présenté sur la figure 2-5 permet deréaliser des essais de perméabilité enconditions de charge constante. Dansle cas de l’injection de liquide, lecalcul de perméabilité se fait avec lesnotations suivantes, S : surfaced'injection (m2), Pg : pressiond'injection (Pa), Pf : pression en sortie(Pa), L : longueur de l'éprouvette, Q :

débit mesuré (m3/s), µ : viscosité du fluide (Pa.s), (1 Pa.s = 1 Poiseuille = 10poises), par la formule :

k Q LP P Sg f

"%$

( )(2-11)

La perméabilité au gaz est avec les paramètres définis dans l’équation 2-11 et Patm,la pression atmosphérique (Pa) :

k Q LPP P S

atm

g f"

%

22 2$

( )(2-12)

2.4.3 VARIABILITÉ DE LA PERMÉABILITÉ DES ROCHES

La perméabilité des roches présente une très large gamme de valeurs : plus de 14ordres de grandeur séparent les roches les plus perméables des roches les moinsperméables. Pour fixer les idées, une perméabilité de 1 Darcy est une forteperméabilité, celle par exemple d’un bon aquifère ; dans le domaine pétrolier, laperméabilité des roches réservoirs intéressantes est supérieure à la centaine demillidarcy. A l’opposé, pour le stockage en profondeur de déchets radioactifs, onrecherche des perméabilités bien inférieures au microdarcy. Les roches étantsoumises in situ à des conditions (contraintes, température ...) qui ne sont pas cellesde la surface, il est intéressant de connaître quelle est l’évolution de la perméabilitéen profondeur. Celle-ci est en grande partie tributaire de la manière dont lespropriétés géométriques des réseaux de pores ou de fissures (volume accessible aufluide, connectivité) sont modifiées en réponse à l’application de contraintes ou detempératures élevées. Pour ce qui est de l’effet des contraintes, il faut séparer l’effetde la contrainte moyenne de celui du déviateur.

Débimètre

Pfsortie

Pginjection Eprouvette

Enveloppe encaoutchoucConfinement

Page 102: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

40 Manuel de Mécanique des Roches

Dans un premier temps, examinons comment varie la perméabilité d’une rochesoumise à une pression moyenne croissante. Pour des roches saturées, la contraintemoyenne à prendre en considération est la contrainte effective $' = $ – bp. Danscette relation, $ est la contrainte moyenne totale égale à la trace du tenseur descontraintes, p est la pression du fluide présent dans l’espace poreux ou pression depore, et b est le coefficient de Biot, compris entre 0 et 1 (chapitre 10). Cette loiconstitue une manière synthétique de prendre en compte les rôles antagonistes jouéspar l'état de contrainte et la pression de pore sur la déformation du milieu poreux.Une augmentation de contrainte effective a toujours pour effet de rendre le milieuplus compact, et par conséquent de réduire le volume accessible au fluide : il enrésulte une diminution de perméabilité. La chute de perméabilité observée dépendfortement de la géométrie des pores : elle prend souvent la forme d’une loiexponentielle du type :

k = k0 exp[-1$’] (2-13)

L’amplitude de la décroissance est fixée par le paramètre 1 qui dépend de la naturedes roches : d’une manière générale, plus le facteur de forme des pores est faible,plus le milieu poreux est déformable, et plus la perméabilité sera sensible à desvariations de pression.

L’application d’un déviateur de contrainte provoque dans la roche des déformationsimportantes : lorsque la contrainte est suffisamment basse, la déformation resteélastique, mais lorsque la contrainte déviatorique devient grande, la déformationdevient inélastique, avec développement de fissures qui vont affecter profondémentle comportement du matériau. En laboratoire la configuration classiquement utiliséepour mettre en évidence le rôle des contraintes déviatoriques est celle de l’essaitriaxial. L'évolution de la perméabilité suit celle des microstructures : décroissancelorsque la déformation de la roche est contractante, augmentation lorsque ladéformation devient dilatante. Cette hypothèse, somme toute logique, a été vérifiéedans des roches à faible porosité mais peut être mise en défaut.

2.4.4 LIEN ENTRE PERMÉABILITÉ ET MICROSTRUCTURE

La perméabilité d’une roche est entièrement déterminée par la géométrie de sonréseau de porosité. La relation entre les deux est cependant loin d’être évidente, etnombre de modèles ont été développés pour estimer la perméabilité à partir despropriétés microstructurales des roches. Dans tous ces modèles, le problème cléconsiste à déterminer une longueur caractéristique pour les processus de transport defluide : en effet une telle échelle de longueur doit exister, puisque la perméabilité,d’un point de vue dimensionnel, est homogène à [L2]. Comment à partir de laconnaissance (même approximative) des propriétés géométriques du milieu poreuxpeut-on prédire la valeur de la perméabilité de ce milieu ? Quels sont les paramètresmicrostructuraux qui contrôlent les propriétés de transport dans les roches ? Laphysique des roches essaie de répondre à ces questions depuis très longtemps déjà.Le problème posé consiste à établir une passerelle entre l’échelle microscopique(celle des pores et des grains) et l’échelle macroscopique (celle à laquelle est définiela perméabilité).

Dans le modèle de milieu équivalent, la longueur caractéristique est définie à partirde grandeurs macroscopiques très simples, à savoir le volume de porosité Vv etl’aire Ap de l’interface pore-solide. La relation classique de Kozeny-Carman donnel’expression de la perméabilité dans l’approche du milieu équivalent :

Page 103: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 41

k R nth"2

22(2-14)

où le paramètre Rh = Vv /Ap, appelé rayon hydraulique, constitue la longueurcaractéristique recherchée. Les autres paramètres sont la porosité n et la tortuosité t,alors que 2 est un facteur qui dépend de la géométrie des pores, et qui présente unevariabilité très faible (approximativement entre 2 et 3). Le point faible du modèleréside dans le paramètre «tortuosité», qui quantifie l’accroissement de la distanceparcourue par le fluide, difficile à estimer en raison de la complexité topologique dumilieu poreux.

Une approche différente est possible. Au lieu d’utiliser des grandeursmacroscopiques, on peut s’attacher à décrire les processus d’écoulement à l’échelledes composants élémentaires (les pores, les fissures), puis par différentes techniquesremonter à la propriété macroscopique, la perméabilité. A l’échelle locale,l’écoulement dans les pores et les fissures considérés comme des entités propres estrégi par la loi de Poiseuille. Ces pores et ces fissures interagissent entre eux du faitde l’existence de connexions multiples dans les milieux poreux. L’informationessentielle à fournir concerne la distribution statistique des propriétésdimensionnelles des pores ou des fissures, représentés par des canaux d’écoulementindividuels. On peut considérer une distribution aléatoire de tubes ou s’attacher àdécrire de manière plus détaillée la topologie complexe des milieux poreux par uneapproche de type réseau.

2.5 PROPRIÉTÉS ACOUSTIQUESLa caractérisation des matériaux rocheux par des méthodes ultrasoniques estcouramment utilisée. L'étude de la propagation des ondes de compression et decisaillement dans un matériau à l'état sec et saturé permet d'évaluer les propriétésphysiques du matériau telles que sa porosité, son état de fissuration et ses propriétésélastiques (module de Young, coefficient de Poisson). L'analyse des signauxultrasoniques en terme d'atténuation a été surtout exploitée en physique des rochespétrolière. Ce paramètre est particulièrement intéressant pour l'analyse del'anisotropie d'un matériau, soit structurale, soit liée à une microfissuration.

2.5.1 PROPAGATION DES ONDES DANS UN MILIEU ÉLASTIQUE

La physique des roches classique s'intéresse à la propagation des ondes de volume Pet S, caractérisées par leurs vitesses (premières et secondes, d’après l’ordre de leurréception) et leur atténuation. Les équations de propagation des ondes dans unmilieu élastique et viscoélastique sont indiquées en annexe du présent chapitre. Pourune onde P, le mouvement vibratoire a lieu suivant la direction de propagation etaffecte le volume de la roche. Vp est donc la vitesse d'une onde de compression (ouonde longitudinale).Vs est la vitesse d'une onde de cisai l lement (ou ondetransversale), dont le mouvement vibratoire a lieu dans un plan normal à la directionde propagation. Elles sont plus lentes que les ondes P et ne se propagent pas dansl'eau.

Vp et Vs étant exprimées en fonction des coefficients de Lamé, la mesure du tempsde propagation d'une onde ultrasonique dans une roche permet de remonter auxmodules élastiques. Dans le cas d'un matériau isotrope, le calcul du coefficient dePoisson 3 et du module de Young E est le suivant :

Page 104: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

42 Manuel de Mécanique des Roches

3 = 1/2 - (Vs / Vp)2

1 - (Vs / Vp)2 (2-15)

E = # Vp2 (1+3) (1-23)

(1-3) (2-16)

Il est donc indispensable de mesurer Vp et Vs pour calculer E et 3 ; trop souvent Vpest seul mesuré, E est déduit en supposant 3 = 0,25.

L’état de saturation du matériau influe sur l'évolution de ses propriétés ultrasoniqueset a fait l'objet de nombreux travaux dont une grande partie concerne des calculsprédictifs de vitesses ultrasoniques sur un matériau multiphasique et traitegénéralement d'un état totalement saturé par rapport à un état sec. La propagationd'une onde purement élastique dans un milieu biphasique solide/liquide (rochetotalement saturée) a été décrite par Biot qui a introduit les notions de couplageinertiel fluide-solide et de déplacements relatifs de ces deux phases. Les relationsentre saturation partielle et propriétés ultrasoniques sont plus complexes ; leuranalyse nécessite des suivis expérimentaux très rigoureux et fait intervenir, d'unpoint de vue théorique, des mécanismes à l'échelle du pore (écoulements locaux) etdes notions de distribution des fluides dans les réseaux poreux.

Figure 2-6 : Mesure des vitesses desondes ultrasonores

Les vitesses des ondes sontmesurées à l’aide d’un dispositifdont un exemple est représenté surla figure 2-6. L’éprouvette a deuxfaces planes et parallèles, un produitcouplant est placé entre l’éprouvetteet les céramiques piézoélectriques Pet S. Les céramiques ondes Sdoivent conduire à un mouvementperpendiculaire à la direction depropagation, émetteur et récepteursont donc polarisés. Le signal estvisualisé sur l’oscilloscope et stocké

pour un traitement en terme d’atténuation. Les vitesses des ondes P et S sont ensuitecalculées de la façon suivante :

Vp ou Vs (m/s) = Lt

(2-17)

avec : L (en mètres), longueur de l'échantillon ; t (en secondes), temps de parcours lusur l'oscilloscope.

2.5.2 ATTÉNUATION

Le signal ultrasonique qui se propage dans une roche s'atténue au cours de son trajet.Cette atténuation est due à des interactions entre l'onde et le milieu de propagation.Il faut distinguer l'atténuation intrinsèque, liée à l'anélasticité de l'ensemble matricesolide-fluide saturant, de l'atténuation extrinsèque due à la diffraction de l'onde parréflexion (interfaces, géométrie de l’éprouvette). L'atténuation se caractérise par une

micro - ordinateur

oscilloscopegénérateur

émetteur

récepteur

Page 105: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 43

diminution de l'amplitude de l'onde et une perte préférentielle de ses hautesfréquences. L'atténuation est quantifiée par un coefficient d'atténuation 4 (voirl'annexe) ou par Q, appelé facteur de qualité qui est inversement proportionnel aucoefficient d'atténuation. Le calcul de l’atténuation est généralement réalisé à l’aided’une méthode dite du rapport des spectres. L’atténuation peut être extrinsèque parperte d’énergie due à la diffraction de l’onde sur les discontinuités ou obstacles dansle matériau (grains, pores, microfissures) et peut être importante lorsque la longueurd'onde devient comparable à l'échelle de l'hétérogénéité. Les mécanismes avancéspour expliquer le phénomène d'atténuation intrinsèque sont très divers et complexes.De plus, ces mécanismes seraient différents selon l'état de saturation de la rocheconsidérée. On consultera la littérature spécialisée indiquée en fin de chapitre pourtout ce qui concerne l'atténuation.

2.5.3 VITESSES ET PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES ROCHES

La lithologie est un facteur déterminant en ce qui concerne les vitesses Vp et Vsdans la mesure où les caractéristiques élastiques des minéraux constitutifs sontdifférentes (Tableau 2-3 ). Les valeurs indiquées dans ce tableau sont des moyennescalculées à partir des vitesses des ondes suivant différentes directions mesurées surdes cristaux non altérés.

Le rapport Vp/Vs est intéressant à utiliser et permet de différencier nettement grès etcalcaires, car le coefficient de Poisson de la calcite est très différent de celui duquartz.

TABLEAU 2-3 : PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET MÉCANIQUES DES PRINCIPAUX MINÉRAUX

Minéraux #s (g/cm3) E (GPa) 3 Vp (m/s)

Quartz 2,65 96,4 0,08 6 050Olivine 3,2-3,6 216 0,24 8 770Augite 3,2-3,6 14 3 0,24 7 330Amphibole 2,9-3,2 110 0,29 6 800Muscovite 2,7-3 80 0,25 5 880Biotite 2,8-3,1 67 0,30 5 360Orthose 2,5-2,6 63 0,29 5 680Plagioclase 2,6-2,8 77 0,29 6 220Magnétite 4,4-5,2 218 0,19 7 410Calcite 2,7 84 0,28 6 320Dolomie 2,8-3,1 7 900Halite 2,1-2,6 36 4 320Gypse 2,3-2,4 5 200

D’après Belikov (1967)

La vitesse des ondes P varie à lithologie constante avec la porosité de pores, maisdiminue plus fortement encore avec la porosité de fissures. Pour estimer la partrelative de porosité de pore ou de fissure dans des roches de lithologie différente onutilise l’indice de continuité IC défini comme le rapport de la vitesse des ondes Pmesurée dans l’échantillon à la vitesse des ondes calculée Vp* à partir de lacomposition minéralogique. Vp* est la moyenne arithmétique pondérée des vitesses

Page 106: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

44 Manuel de Mécanique des Roches

des ondes Vi, de chaque minéral constitutif de la roche, les coefficients depondération étant les teneurs ci, de la roche en chaque minéral :

IC (%) = 100 VpVp* avec Vp* = 5 ci x V i (2-18)

Ce rapport des vitesses varie comme le rapport K/K* des compressibilités K globale(bulk modulus) de la roche et K* de la matrice (les minéraux constitutifs de laroche) en fonction de la porosité de pores np et de la porosité de fissures nf , mais lasensibilité à la présence de fissures est beaucoup plus marquée. On peut écrire :

IC = 100(1 –A np - B nf) (2-19)

avec nf + np = ntotale et nf << np

Dans le cas des roches exclusivement poreuses (ntotale = np ), il y a une relationexpérimentale entre l’indice de continuité IC = ICp et la porosité n :

ICp = 100 (1 – 1,4 np) (2-20)

Dans le cas le plus courant d’une roche poreuse et fissurée, la porosité totale n totaleest égale approximativement à np, ce qui permet d’évaluer ce que serait la valeur del’indice de continuité ICp du milieu poreux correspondant à la roche si elle n’étaitaffectée que de pores :

ICp = 100 (1– 1,4 n) (2-21)

La différence entre la valeur de l’indice de continuité mesuré IC et cette valeur ICpcorrespond à l’existence des fissures; elle est exprimée de manière relative par leDegré de Fissuration DF :

DF ICICp

" %1 (2-22)

0102030405060708090

100

0 10 20 30 40 50

Indice de continuité IC (%)

Porosité (%)

0%

25%

50%

75%

Figure 2-7 : Détermination du degré de fissuration avec l'indice de continuité

Donc toute roche, quelle que soit sa porosité n, peut être affectée d’un degré defissuration variant entre 0 et 100 %, avec DF exprimé en pour cent. Dans le plan(IC-Porosité), les droites d’égale valeur du degré de fissuration forment un faisceau

Page 107: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 45

(figure 2-7) situées sous la droite des milieux non fissurés. On peut donc, à partir dela mesure de la porosité, de la vitesse des ondes Vp, et du calcul de l’indice decontinuité IC, estimer la densité de fissuration d’une roche.

La vitesse des ondes P est sensible à l'état de saturation des roches. Le modèleclassique explicatif est celui de Wyllie donnant la vitesse de propagation des ondes àtravers un milieu biphasique (phase 1 et 2) :

1 11 2V

nV

nV

" +% (2-23)

où V1, V2 sont les vitesses de propagation dans les milieux 1 et 2, n et (1-n) sont lesproportions volumiques des milieux 1 et 2.

Cette approche donne des résultats satisfaisants pour des milieux consolidés saturés(calcaires et grès) ; dans ce cas, le milieu 1 est le fluide, le milieu 2 la matrice, et n laporosité.

Une autre formulation de la propagation d'une onde dans un milieu biphasique a étéproposée par Wyllie en tenant compte du module de compressibilité K et ducoefficient de Poisson 3 . La relation reliant la vitesse V à K, 3 et à la massevolumique # est de la forme :

K Vq

"+# 2

1(2-24)

où q est un paramètre déduit des relations d’équivalence entre modules élastiques,fonction du coefficient de Poisson 3'

De nombreux auteurs ont proposé des formules de Wyllie modifiées selon le volumede porosité présent. En réalité le milieu n’est pas toujours saturé en liquide et il peutdonc contenir de l’air et de l’eau ou plusieurs liquides. Les vitesses varient alorsselon la nature du liquide et son degré de saturation. Si on s’intéresse au cas d’uneroche partiellement saturée en eau les variations de Vp et Vs avec le degré desaturation Sr sont relativement complexes car plusieurs effets se superposent. Si oncompare les vitesses Vp et Vs en milieu sec et saturé, on observe Vp sec < Vp saturéet une petite tendance inverse pour Vs. Le module de compressibilité est plus élevéen milieu saturé alors que le module de cisaillement reste constant et la densitéaugmente avec la saturation.

Figure 2-8 : Influence de la porositéde fissure sur l'évolution des vitessesdes ondes P à l'état sec et saturé pourdifférents calcaires

L’effet de module l’emporte dans lecas des ondes P et Vp augmente. Pourles ondes S l’effet de densité est leseul et Vs diminue. L’augmentation dela vitesse des ondes P dépend de lastructure du réseau poreux et de lavaleur de la porosité de fissure (figure2-8, pour différents calcaires). Desexemples d’évolution des vitesses enfonction du degré de saturation sont

1

1,05

1,1

1,15

0 0,05 0,1 0,15 0,2

Vpsat/Vpsec

nf (%)Gu1

D1Gu3J5J2

J1

Gu2D2

Le

Eu

Page 108: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

46 Manuel de Mécanique des Roches

présentés sur la figure 2-9. Les vitesses décroissent globalement entre l'état sec et undegré de saturation intermédiaire (Vp minimale) puis augmentent jusqu'à une valeurmaximale correspondant à la saturation totale. La saturation partielle de l'échantillonprovoque d'abord une augmentation de la densité donc une diminution de la vitesse.Par contre, quand les pores sont presque totalement saturés, ils sont plus difficiles àcomprimer d'où une augmentation de la rigidité et de la vitesse. La compétition entreeffet de module et de densité est fortement dépendante du type de réseau poreux,puisque les variations sont différentes pour différents calcaires.

Les roches bien que contenant des minéraux fortement anisotropes sont souventisotropes ou faiblement anisotropes. Si une anisotropie apparaît c’est qu’il existepeut-être une orientation préférentielle des minéraux, mais surtout une orientation dela microfissuration affectant l’échantillon. Les mesures de vitesses des ondespermettent de mettre en évidence l’anisotropie de structure ou de fissuration et dedécider en fonction de son importance d’en tenir compte ou non dans un programmed’essais mécaniques (chapitre 3). Considérons une symétrie hexagonale comme surla figure 2-10. La vitesse Vp sera la même suivant les directions principales 2 et 3 duplan de base, mais elle sera plus faible dans la direction 1 affectée par les plansd’anisotropie. Les ondes S sont émises et reçues par des céramiques polarisées demanière à ce que le déplacement des particules se fasse perpendiculairement à ladirection de propagation. La vitesse de l’onde S suivant la direction 1 sera la mêmedans toutes les directions, la vibration se faisant dans un plan homogène. Par contresuivant les directions 2 ou 3 le plan d’anisotropie est parallèle à la direction depropagation de l’onde.

Figure 2-9 : Évolution de la vitessedes ondes P avec le degré desaturation dans différents calcaires(Sw=Sr)

Lorsque plan d’anisotropie et plande polarisation de l’onde sontconfondus l’amplitude du signal etsa vitesse sont maximales (Vsmax) etlorsqu’ils sont perpendiculairesl’amplitude du signal et sa vitessesont minimales (Vsmin). On définitun indice de biréfringence IB qui estune caractéristique du degréd’anisotropie :

IB V VV

s s

s"

%max min

max(2-25)

Pour une direction intermédiaire le signal se décompose en une composantepolarisée selon le plan d’anisotropie, l’autre étant perpendiculaire et à la réceptionon aura deux signaux, dont l’un sera d’amplitude et de vitesse supérieure à l’autre.Selon la symétrie du matériau étudié on détermine les directions de propagation etde polarisation nécessaires à la détermination de tous les paramètres élastiques. Lesfigures 2-10 et 2-11 montrent les directions de mesure nécessaires pour calculer tousles paramètres de la matrice de raideur. Lorsque le système d’anisotropie estcomplètement inconnu on peut le déterminer en multipliant les directions de mesure,puis calculer les modules élastiques correspondants.

Jaumont

Euville

Dugny 2

Gudmont 1

2,5

3,5

4,5

5,5

0 20 40 60 80 100

Vp x 1000 (m/s)

Sw (%)

Page 109: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 47

Vp1

Vp3

Vp45

Vs21Vs23

3

1

2

Vp12

Vs23

Vp23Vp3

Vp13

Vs21

Vp2

3

1

2

Vp1Vs13

Figure 2-10 : Directions depropagation et correspondances avecles éléments Cij de la matrice deraideur (symétrie hexagonale ouisotrope transverse)

Figure 2-11 : Directions depropagation et correspondances avecles éléments Cij de la matrice deraideur (symétrie orthotrope)

2.6 PROPRIÉTÉS THERMIQUES

2.6.1 CARACTÉRISTIQUES THERMIQUES

La loi de Fourier et l'équation de la chaleur (Annexe de ce chapitre) font intervenirdes propriétés thermiques des roches : la conductivité thermique 6 et la chaleurspécifique C. La diffusivité thermique est définie comme le rapport :

aC

"6#

(2-26)

La mesure de la diffusivité a, de la masse volumique # et de la chaleur spécifique Cpermet la détermination de la conductivité thermique (qui peut aussi être mesuréedirectement).

La conductivité est un scalaire pour un corps thermiquement isotrope. Pour un corpsanisotrope la conductivité thermique est représentée par un tenseur d'ordre 2symétrique, soit une matrice 3x3. Un milieu isotrope transverse comme celui de lafigure 2–10 est caractérisé par deux valeurs de conductivité thermique (ou dediffusivité thermique) 611, et 622 = 633.

Les roches dans la nature sont au moins partiellement saturées en fluides et laconduction de la chaleur peut être couplée à d'autres types de transferts tels que parexemple le transfert de masse.

Les mécanismes de transfert dans les milieux poreux sont fortement influencés parla configuration des pores et des minéraux. Le transfert de masse se produituniquement à travers la structure continue des pores connectés, tandis que letransfert de chaleur peut impliquer la phase solide et les pores. Si l'on assimile lessolides poreux à des matériaux composites à phase matricielle (contenantéventuellement des pores isolés) et à phase poreuse en réseau, on constate que lestransferts de chaleur et de masse sont complémentaires. Le transfert de masses'effectue uniquement par le réseau de pores, le transfert de chaleur se produitessentiellement dans la phase minérale. Par conséquent, les variations en porositéauront tendance à influencer les deux processus en sens inverse. L'étude du couplagechaleur - masse fait l'objet de nombreux travaux à consulter dans la littérature

Page 110: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

48 Manuel de Mécanique des Roches

spécialisée. Les techniques de mesure de la conductivité thermique s'effectuent enrégime permanent (plaque chaude gardée, fil chaud) ou en régime transitoire (flash).La mesure en transitoire donne la diffusivité et il est nécessaire de déterminer parmicrocalorimétrie la chaleur spécifique pour calculer la conductivité thermique.

2.6.2 PARAMÈTRES INTERVENANT SUR LES PROPRIÉTÉS THERMIQUES

Les principaux facteurs qui influencent les propriétés thermiques des roches sont :! la variation de composition minérale et chimique ;! la structure ;! la température et les contraintes ;! la porosité et la teneur en fluide.

Les roches sont formées de minéraux ayant des propriétés thermiques qui varientaussi bien avec la température qu'avec la direction du flux de chaleur. Le quartz a laconductivité moyenne la plus élevée (6moy = 7,7 W/m/K). La conductivitéthermique d'une roche dépend largement du minéral principal. Elle augmente avec lamasse volumique. Le tableau 2-4 donne les conductivités thermiques de quelquesroches à l'état sec.

TABLEAU 2-4 : VALEURS DE CONDUCTIVITÉ THERMIQUE DES ROCHES

Roches Origine Masse Chaleur ConductivitéVolumique spécifique thermiquekg/m3 J/kg.K W/m.K

Grès Vosges 2 650 2,7Granite Limousin 2 600 700 2,8Ardoise Angers 2 800 740 1,2 & 4,5Argilite Tournemire 2 340 815 0,7 & 2Marne Alsace 2 300 826 1,04 & 1,4Argilite Aisne 2 220 845 0,75 & 1,4Calcaire Euville 2 310 846 3,5Sel 2160 870 6

Les deux valeurs de conductivité sont suivant les directions principales d'anisotropie

La plage de 1 à 6 W/m/K de la conductivité est relativement limitée alors que laperméabilité varie de 7 à 8 ordres de grandeurs. L'anisotropie des minéraux et desstructures des roches influence la conductivité thermique. La conductivité thermiqueest forte suivant les plans d'anisotropie (directions 2 et 3 figure 2-10) ; elle est plusfaible selon la direction perpendiculaire (direction 1 figure 2-10).

La conductivité thermique d'une roche, à l'état sec, diminue lorsque la températureaugmente. L'anisotropie joue un rôle car la diminution est plus importante dans ladirection perpendiculaire à la schistosité que dans la direction parallèle (figure 2-12).Pour les formations sédimentaires, à l'échelle du massif, la conductivité thermiquedécroît lorsque la température augmente : la conductivité thermique de la matrice estune fonction décroissante de la température, mais celle du fluide augmentelégèrement avec la température et la combinaison de ces deux effets conduit à unedécroissance significative de la conductivité thermique.

Page 111: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 49

Les contraintes isotropes tendent à refermer les défauts de type fissure et laconductivité thermique augmente légèrement. En général, la présence d'eau dansun matériau poreux augmente la conductivité thermique au sein de ce dernier (figure2-13). La conductivité thermique, à minéralogie identique décroît avecl'augmentation de la porosité.

0

1

2

3

4

5

6

0 50 100 150 200 250 300

Direction 2 ou 3

Direction 1

T°C

6 (W/m/K)

0,7

0,9

1,1

1,3

1,5

1,7

1,9

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1

Sr

6 (W/m/K)Direction 2 ou 3

Direction 1

Figure 2-12 : Conductivité thermiquede schistes ardoisiers en fonction de latempérature et de l'anisotropie

Figure 2-13 : Conductivité thermiqued'une argilite en fonction du degré desaturation et de l'anisotropie

2.6.3 DILATATION THERMIQUE

Un solide homogène et isotrope, libre de toute liaison, soumis à une variationuniforme de température T subit une déformation isotrope proportionnelle à T.L’effet de la température se traduit par une dilatation ou une contraction. Si l est ladistance séparant deux points du solide, après échauffement (ou refroidissement),cette distance subit une variation relative de longueur égale à

/ll

T" 4 (2-27)

avec 4, coefficient de dilatation linéaire du solide. En d’autres termes la variationuniforme de température détermine sur une roche homogène isotrope et libre detoute liaison, un tenseur de déformation uniforme :

7 4 8ij ijT" (2-28)

La variation de volume associée est /V/V = 7ij = 34T. La quantité 4v=34 estappelée coefficient de dilatation thermique volumique. Si la roche est anisotrope, ilest nécessaire de déterminer le coefficient de dilatation thermique suivant lesdirections principales d’anisotropie.

Le coefficient de dilatation linéaire des roches varie en fonction de la minéralogie, latexture, la porosité et la microfissuration. Il varie entre 5 10-6K-1 et 25 10-6K-1 pourla plupart des roches. Il est de 40 10-6K-1 pour le sel gemme. Pour l’ardoiseperpendiculairement à la schistosité il est de 24 10-6K-1 alors que suivant les deuxautres directions principales il n’est que de 17 10-6K-1.

Dès lors que la roche n’est plus libre de toute liaison et/ou que la variation detempérature n’est plus uniforme des contraintes d’origine thermique peuventapparaître dans la roche (chapitre 10).

Page 112: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

50 Manuel de Mécanique des Roches

SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUEBelikov B.P. - Plastic constants of rock-forming minerals and their effect on the elasticity of

rocks. IPST, pp. 118-124, 1967.

Berest P. & Weber Ph. (éd.) - La thermomécanique des roches. BRGM, 327 p., 1988.

Bernabe Y. - A wide range permeameter for use in rock physics. Int. J. Rock Mech. Min. Sci.,24, pp. 309-315, 1987.

Bourbie T., Coussy O. & Zinsner B. - Acoustique des milieux poreux, Technip, 339 p., 1986.

Cuxac P. - Propagation et atténuation des ondes ultrasoniques dans des roches fissurées etanisotropes. Thèse de Doctorat de l’INPL, Nancy, 175 p., 1991.

Cuxac P. & Homand F. - Propagation d’ondes ultrasonores dans les roches anisotropes.Revue Française de Géotechnique, 59, pp. 49-55, 1992.

David C. - Geometry of flow paths for fluid transport in rocks. J. Geophys. Res., 98, pp.12267-12278, 1993.

David C., Darot M. & Jeannette D. - Pore structures and transport properties of sandstone.Transport in Porous Media, 11, pp. 161-177, 1993.

David C., Wong T.-F., Zhu W. & Zhang J. - Laboratory measurement on compaction-inducedpermeability change in porous rocks: implications for the generation andmaintenance of pore pressure excess in the crust. Pageoph., 143, pp. 425-456, 1994.

Dullien F.A.L. - Porous media : fluid transport and pore structure, Academic Press, 1979.

Foucault A. & Raoult J.F. - Dictionnaire de géologie. Masson, 1988.

Goodman R.E. - Engineering geology, John Wiley, 1993.

Gueguen Y. & Palciauskas V.V. - Introduction à la Physique des Roches, Hermann, 1992.

Jacquin C. - Structure des réseaux poreux et propriétés pétrophysiques des roches. RevueFrançaise de Géotechnique, 49, pp. 25-42, 1989.

Monicard R. - Caractéristiques des roches réservoirs, analyse des carottes. Technip, 1975.

Remy J.M. - Influence de la structure du milieu poreux carbonaté sur les transferts d’eau etles changements de phase eau-glace. Thèse de Doctorat de l’INPL, Nancy,353 p., 1993.

ANNEXE : ÉQUATIONS DE PROPAGATION DES ONDES ET DE LATHERMIQUE

PROPAGATION DES ONDES

Dans le cadre de l'élasticité linéaire régie par la loi de Hooke, expression simple dela relation unissant la contrainte à la déformation, l'équation du mouvement d'uneonde dans un matériau isotrope s'écrit de la façon suivante :

(6 + 2$) grad div U - $ rot rot U = # 92U9t2 (2-29)

Page 113: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 51

avec #, masse volumique du matériau, 6 et $, coefficients de Lamé.

Soient 0 un potentiel scalaire et : un potentiel vecteur tel que U = grad 0 + rot :.Considérons d'abord un mouvement irrotationnel (rot U = 0 ; U = grad 0),l'équation du mouvement d'une onde devient :

(6 + 2$) ;2 0 = # 9209t2 (2-30)

;2 0 = 1

Vp2 9209t2 avec Vp "

+&

'(

)

*+

6 $#2

1 2/(2-31)

Si nous considérons maintenant un mouvement sans changement de volume tel que

U = rot: avec div rot: = 0, l'équation du mouvement de l'onde devient :

;2 : = 1

Vs2 92:9t2 avec Vs "

&

'(

)

*+

$#

1 2/(2-32)

Un modèle viscoélastique linéaire est communément utilisé pour rendre compte dela dissipation d'énergie durant le passage de l'onde, et donc de son atténuation.Dans ce cas, l'équation du mouvement est donnée par :

# 92U9t2 = M(<)

92U9x2 (2-33)

où M(<) est un module complexe qui découle de la loi de comportement (<pulsation).

Pour une onde plane, on démontre qu'une solution de l'équation du mouvement peuts'écrire sous la forme :

U = Uo e[i(<t - k*x)] (2-34)

Avec x, distance parcourue par l'onde et k* nombre d'onde complexe. La solutionprécédente peut également s'écrire :

U = Uo e- 4x e[i<(t - x/c)], avec k* = <c - i 4 (2-35)

où c et 4 sont des réels.

Le facteur e-4x exprime l'atténuation de l'onde et 4 est appelé coefficientd'atténuation. L'autre paramètre le plus souvent rencontré pour décrire l'atténuationest le facteur de qualité qui s'exprime par le rapport des parties réelle et imaginairedu module complexe M(<) issu du modèle viscoélastique linéaire :

Q MM

r

i" (2-36)

Ce paramètre peut être défini comme le rapport de l'énergie maximale emmagasinéependant un cycle Wmax sur l'énergie /W dissipée durant ce cycle :

Page 114: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

52 Manuel de Mécanique des Roches

Q WW

"!/

2 max (2-37)

Ces deux paramètres sont liés entre eux par la relation suivante :

Q fQV

"!

"!4

(2-38)

où f est la fréquence et V la vitesse de l'onde. Cette relation est simplifiée maisdonne une bonne estimation de la relation entre Q et 4.

LOI DE FOURIER ET ÉQUATION DE LA CHALEUR

Considérons un milieu continu, homogène, isotrope, thermiquement isolé et detempérature non uniforme. Dans ce milieu, on considère les isothermes du champ detempérature. Soit (S) la surface isotherme de température T, soit A un point de (S) etn le vecteur normal à (S) au point A et orienté dans le sens des températuresdécroissantes.

La loi de Fourier stipule que pour une petite surface 8s de dimension finie et tracéesur (S) autour de A, traversée dans la direction n durant le temps 8t par la quantitéde chaleur 8Q, on pose a priori :

8Q = - 6 8s 9T9n8t (2-39)

où 9T9n8t (2-40)

désigne le gradient de température dans la direction normale. Expriméevectoriellement, la relation devient :

8 68 8Q s t" % gradT n. (2-41)

Cette loi de type phénoménologique est essentiellement locale. Le coefficient deproportionnalité 6 est un paramètre physique appelé conductivité thermique. Iltraduit la conductibilité du matériau, laquelle peut dépendre de la température, de lapression, de l'état mécanique, de la direction, etc.

La loi de Fourier s'exprime classiquement sous la forme :

q T" %6grad (2-42)

où q désigne le vecteur courant de chaleur (W m-2) et 6 le tenseur de conductivitéthermique (W/m/K) dont les coefficients 6ij sont les coefficients de conductivité

Considérons un milieu orthotrope c'est-à-dire un milieu pour lequel les coefficients6ij se réduisent à trois. Dans ce cas :

q Txi ii

i" %6

99

(2-43)

Dans le cas d'un milieu isotrope, 6 est un scalaire :

611 = 622 = 633 = 6 (2-44)

Page 115: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 53

L'équation de la chaleur qui traduit le bilan de chaleur échangée s'exprime sous laforme (en négligeant la production interne de chaleur et le couplagethermomécanique) :

#99

C Tt

div" ;2T (2-45)

#C est la chaleur volumique du matériau.

En prenant en compte la loi de Fourier on obtient, dans le cas du milieu isotrope :

#99

69

9

9

9

9

9C T

tT

xT

xT

x" + +

&

'(

)

*+

2

12

2

22

2

32 (2-46)

Page 116: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

CHAPITRE 3 COMPORTEMENT MÉCANIQUE DES ROCHES

3.1 INTRODUCTIONLes propriétés mécaniques des roches se divisent en deux catégories :! les résistances à des sollicitations mécaniques : traction, compression uniaxiale

ou triaxiale, définissant des seuils ou critères de rupture ;! les déformabilités sous l'effet des sollicitations mécaniques : modules

instantanés ou différés.

Au delà de ces propriétés, qui s’expriment par des données chiffrées, on préféreraparler de comportement, un terme plus général. Le terme de « loi decomportement » désigne d'une manière générale l'expression mathématique de larelation entre les contraintes et l'histoire des déformations subies par l'échantillon.Dans ce chapitre, il ne sera fait référence qu’à des lois de comportementélémentaires, élasticité et plasticité, les lois « avancées » étant présentées dans lechapitre 8.

Le comportement et les propriétés mécaniques des roches sont étudiés aulaboratoire, à partir d'échantillons continus de dimensions centimétriques àdécimétriques. La représentativité d'échantillons de laboratoire, c'est-à-dire leuraptitude à représenter les propriétés du site dont ils sont extraits, se heurte àplusieurs types de difficultés :! présence de fractures : certains types de fractures, présentes sur le site, peuvent

ne pas être présentes dans l'échantillon prélevé, trop petit pour les contenir, etdonc échappent à l'analyse (c'est notamment le cas pour les discontinuitésmajeures - fractures régionales, failles... - qui ne sont évidemment passusceptibles de prélèvement). D'une manière générale, tout bloc extrait du site a,en quelque sorte, déjà subi une « sélection naturelle » interdisant la présence dediscontinuités importantes (qui conduiraient à une division du bloc en blocs pluspetits) ;

! hétérogénéité du massif : certains massifs sont hétérogènes, c'est-à-dire formésd'éléments de propriétés mécaniques différentes, par exemple alternance deschistes et de grès ;

! variabilité des propriétés mécaniques au sein du massif rocheux, même ausein d'une formation identifiée ; il convient alors d’utiliser la géostatistique pourdécrire et modéliser la nature de cette variabilité et, éventuellement, le typed'échantillonnage à effectuer en vue d'une « représentativité correcte » ;

! enfin l'effet d'échelle : les roches présentent généralement un « effet d'échelle »plus ou moins marqué, lié à la présence au sein de la matrice rocheuse, de diverstypes d'hétérogénéités et de discontinuités ; cet effet d'échelle se manifeste parle fait que les propriétés mécaniques mesurées sont fonction des dimensions del'éprouvette.

L'étude des discontinuités présentes dans le massif rocheux, et susceptibles d'enaffecter les propriétés mécaniques, fait l'objet des chapitres 4 et 5. Les

Page 117: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

56 Manuel de Mécanique des Roches

hétérogénéités du massif rocheux sont également évoquées dans le chapitre 4. Dansce chapitre on aborde l’effet d’échelle, dans la mesure où il influence directement lesrésultats des essais mécaniques.

3.2 LES ESSAIS DE BASELes essais de base mettent en jeu trois types de sollicitations :! traction : traction indirecte (ou essai brésilien) ;! compression uniaxiale (ou monoaxiale ou simple) ;! compression triaxiale (isotrope et déviatorique).

Il existe un certain nombre de recommandations, en particulier éditées par la SIMR(Société Internationale de Mécanique des Roches) dont certaines préconisent lechoix de dimensions des éprouvettes à essayer. L’AFNOR a édité très récemmentdes normes fixant les caractéristiques des éprouvettes et les conditionsexpérimentales pour les essais de base. Dans ce paragraphe on se limitera auxpropriétés de résistance, l’aspect comportement étant présenté aux §3.3 et 3.4.

3.2.1 LES ÉPROUVETTES

Il est recommandé d’essayer des éprouvettes « les plus grandes possible » comptetenu des moyens techniques du laboratoire, de façon à intégrer au mieux leshétérogénéités minérales et les discontinuités du volume poreux. En tout état decause seule la dimension minimale, liée à la taille des grains, est fixée: le diamètredoit être au moins égal à dix fois la taille des plus gros éléments. L’AFNORrecommande une dimension minimale de 40 mm de diamètre. Il est préférable degarder constant le diamètre pour la série d’essais : traction indirecte, compressionuniaxiale et triaxiale.

Les éprouvettes, de forme cylindrique, sont prélevées par découpage (carottage,sciage et rectification) à partir de blocs ou de carottes de plus grandes dimensionsprélevées sur le site. L'orientation des éprouvettes s'effectue, par référence auxdirections S1, S2, S 3 identifiées sur le site (chapitre 4). Ainsi, s'agissant d'uneformation sédimentaire, l'axe S3 est perpendiculaire aux plans de stratification, danslequel les directions S1 et S2 sont souvent indifférenciées.

Un soin particulier doit être apporté à la qualité de la découpe et de la rectification :parallélisme des faces, perpendicularité avec les génératrices, obéissent à desspécifications rigoureuses. La rectifieuse doit permettre de garder l’éprouvette fixe,le retournement étant assuré par le marbre sur lequel l’éprouvette est disposée parl’intermédiaire de vés.

3.2.2 ESSAI DE TRACTION INDIRECTE

La réalisation d'essais de traction directe se heurte au problème classique du collagedes têtes d'éprouvette sur le dispositif intermédiaire de la machine d'essai. Larésistance maximale à la traction peut être limitée par celle de l’interface colle-éprouvette, ce qui est le cas pour les roches de résistance à la traction supérieure à15 MPa.

C’est pourquoi un essai de traction indirecte, l’essai brésilien, a été emprunté audomaine du béton. L’éprouvette d’élancement (hauteur/diamètre) minimal égal à un,subit une compression suivant deux génératrices opposées. Cette compressions’exerce par l’intermédiaire de pièces métalliques (figure 3-1) ou en interposant un

Page 118: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 57

carton d’épaisseur millimétrique, pour « gommer » les irrégularités éventuelles desgénératrices du cylindre. La vitesse de mise en charge recommandée par la SIMR estde 200 N/s. La résistance à la traction est calculée par :

!"t

PDL

"2 (3-1)

avec : !t résistance à la traction, P effort à la rupture, D diamètre de l'éprouvette, Llongueur de l'éprouvette. L’état de contrainte au centre de l’éprouvette, au momentde la rupture, est représenté par une contrainte de compression verticale !y égale à :

!"y

PDL

"6 (3-2)

avec les mêmes notations que celles de l’équation (3-1), tandis que la contraintehorizontale !x a pour valeur celle de l’équation (3-1). L’essai brésilien n’est un essaide traction que pour les matériaux fragiles : les roches, le béton, le verre. La rupturedoit impérativement se produire à partir du centre, sous forme d’une fracture uniqueverticale. Il peut y avoir des difficultés expérimentales dans le cas de rochesfortement anisotropes et pour les roches ductiles (sel, argiles..).

Plateau supérieur

Plateau inférieur

Eprouvette

Figure 3-1 : Dispositif pour essaibrésilien

Figure 3-2 : Frettage d'une éprouvetteen compression

3.2.3 ESSAI DE COMPRESSION UNIAXIALE

C'est l'essai le plus communément réalisé. Il est effectué sur éprouvettescylindriques, d'élancement L/D (L, hauteur, D diamètre) compris entre 2 et 2,5.L’élancement est un point important qui se comprend lorsqu’on examine lesconditions de contact machine-éprouvette. Il existe un état de contrainte nonhomogène dans des zones en forme de cône (figure 3-2) correspondant à un frettagede l’éprouvette. Le frettage est dû au frottement empêchant le déplacement libre desextrémités de l’éprouvette, engendré par le contraste de déformabilité entre la rocheet les plateaux de la presse. Les roches sont toujours plus déformables que les aciersavec lesquels elles sont en contact durant l'essai. Ce frettage augmenteartificiellement la résistance à la compression de l'éprouvette. Il convient donc dediminuer les zones d'influence du frettage en jouant sur l’élancement :! élancement faible (L/D = 1) : les deux cônes s'interpénètrent, la résistance à la

compression est alors surévaluée ;

Page 119: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

58 Manuel de Mécanique des Roches

! L/D = 2 : les cônes sont séparés, la distribution des contraintes au centre del'éprouvette n’est plus perturbée :

! élancement fort (L/D = 3) : les cônes sont bien éloignés mais il y a risque decompression excentrée de l'éprouvette, si les faces ne sont pas rigoureusementparallèles.

Il faut noter que la Société Internationale de Mécanique des Roches interditl’interposition de matériau ou de produit entre l’éprouvette et les plateaux de lapresse, excepté des plaques d’acier d’épaisseur comprise entre 15 mm et D/3 et dediamètre égal à celui de l’éprouvette. La machine d’essai doit être assez rigide(colonnes de diamètre approprié et faible course des vérins), hydraulique et sipossible asservie. L’usage de machines mécaniques est prohibé. Le plateau supérieurpeut être équipé d’une rotule. Le centrage de l’éprouvette doit alors être rigoureux.L'essai est conduit à partir d'un chargement monotone croissant (soit à vitesse dedéformation, soit à vitesse de contrainte uniaxiale fixée). La normalisation n’imposepas de vitesse, mais conseille une durée d'essai comprise entre cinq minutes etquelques dizaines de minutes, de manière à ne pas induire d’effets différés.

On appelle résistance à la compression (notée !c) la contrainte maximalesupportée par l'échantillon lors d'un essai à chargement monotone croissant. Cettevaleur constitue une première information très utile et parfois suffisante sur lesperformances mécaniques escomptées de la roche. L'étendue des valeurs desrésistances est grossièrement comprise entre 1 et 200 MPa. Les valeurs inférieures à5 MPa correspondent à des roches qualifiées de « très tendres » ; des valeurssupérieures à 100 MPa caractérisent des roches dites « très résistantes ».

Dans le cas d'échantillons dont l'anisotropie est avérée, il convient d'orienter ladirection de sollicitation suivant les axes principaux de l’anisotropie et de définir desvaleurs des résistances suivant ces axes, sans oublier que le minimum de résistancepeut être obtenu dans une direction biaise.

Le rapport entre la résistance à la compression uniaxiale et la résistance à la tractiondonne un indice de fragilité, qui est une caractéristique importante de comportement.Ce rapport varie usuellement entre 5 (roche peu fragile) et 30 (roche très fragile).

3.2.4 ESSAI TRIAXIAL

Figure 3-3 : Cellule pour essai triaxial

Cet essai est réalisé sur des éprouvettes identiquesà celles de l’essai de compression uniaxiale, maisle dispositif expérimental limite souventl’élancement aux environs de 2. Il s’agit d’un essaitriaxial de révolution où !2 = !3 = Pc (pression deconfinement). L’éprouvette est placée dans unejaquette étanche et souple, pour les roches tendres,plus rigide pour les roches raides. La figure 3-3donne un exemple de schéma de cellule triaxiale,dimensionnée pour supporter des confinementscourants de 1 à 40 MPa, ce qui impose des paroisépaisses en acier. De plus la charge axiale doit être

transmise par un piston rigide de même diamètre que l’éprouvette. L’essai estconduit en imposant d’abord un chargement hydrostatique !1 = !2 = !3 = Pc. Puis lacontrainte axiale est augmentée en respectant une consigne de vitesse de mise en

Page 120: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 59

charge constante ou de vitesse de déformation constante, jusqu’au maximum quicorrespond à la résistance à la compression triaxiale.

A partir des valeurs de résistance à la traction, à la compression uniaxiale et à lacompression triaxiale, sous plusieurs confinements, il est possible de déterminer uncritère de rupture (§3.6.2 et chapitre 9).

3.3 GÉNÉRALITÉS SUR LES CONDITIONS EXPÉRIMENTALESLa réalisation de tout essai mécanique s'effectue selon un chemin de sollicitationqui résulte de l'exécution d'un programme (ou « consigne ») prédéfini ; leprogramme fixe les paramètres d'exécution de l'essai - contraintes ou déformations -et leur évolution dans le temps, la machine d'essai devant suivre le déroulement duprogramme, à partir du contrôle des paramètres d'asservissement. Le trajet de chargerésulte de l'exécution :! soit d'une consigne en déformation (par exemple essai effectué à vitesse de

déformation imposée #̇ constante) ;! soit d'une consigne en contrainte (par exemple !̇ constante).

Le dispositif d'asservissement de la presse a pour objet l'exécution de l'essaiconformément au programme prédéfini ; de la qualité de l'asservissement dépendcelle de l'essai ; or l'essai peut ne pas se dérouler correctement, en particulier si desphénomènes de perte de résistance de l'échantillon au moment de la ruptureimposent une variation trop rapide du dispositif de correction (par exemple, uneconsigne de type d!/dt = constante peut s'avérer impossible à exécuter si lacontrainte vient à excéder la résistance de l'échantillon). Divers types de trajets decharge peuvent être exécutés ; leur définition est fonction de l'objet et de ladestination de l'essai envisagé. Parmi les plus usuels, citons :! chargement monotone croissant (de type #̇ = constante ou !̇ = constante) ;! chargement croissant jusqu’à un certain niveau, suivi d’un déchargement et

d’un rechargement jusqu’à un niveau plus élevé. On peut ainsi réaliser 3 à 5cycles jusqu’à la rupture ;

! chargement cyclique autour d'une position moyenne (essai de fatigue).

Les grandeurs physiques mesurées sont principalement :! des forces : par exemple force exercée par la presse de compression sur

l'échantillon ;! des pressions : pression du fluide dans une cellule triaxiale ;! des déplacements : déplacement relatif des plateaux de la presse mesurés par

des capteurs de déplacement, déplacements axiaux et radiaux de l’éprouvettepar l’intermédiaire d’un collier de mesure équipé de capteurs, déplacementsparticulaires d'éléments de matière sur un échantillon (mesurés par traitementnumérique d'images prises en cours d'essai) ;

! des déformations par jauges d’extensométrie ;! des volumes et débits liquides : variation du volume d'huile ou volume de fluide

expulsé de l’éprouvette saturée au cours d’un essai triaxial ;! le temps ;! la température.

Page 121: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

60 Manuel de Mécanique des Roches

Mentionnons plus particulièrement les mesures d'extensométrie par jauges dedéformation (strain gages), dont la mise en place nécessite une attentionparticulière : longueur de jauge par rapport aux hétérogénéités de la matricerocheuse, sensibilité à la pression de confinement et à l’eau (dans ce cas il fautsoigner le dispositif d’étanchéité), risque de dérive lors d'essais de longue durée.Moyennant les précautions et la technicité nécessaires, ces mesures d'extensométriesont toutefois parfaitement fiables et fournissent des mesures locales, en zone nonfrettée, de grande qualité.

Les essais mécaniques peuvent être réalisés à température ambiante pour la plupartdes problèmes courants. Il peut être nécessaire de contrôler rigoureusement latempérature durant les essais mécaniques et particulièrement pour les essais delongue durée et les essais de fluage (§3.8). Il est nécessaire de réaliser des essaismécaniques sous température pour divers problèmes, par exemple, stockage dedéchets exothermiques, exploitation du pétrole dans les gisements hautetempérature. Dans ce chapitre, il ne sera question que du comportement àtempérature dite ambiante.

3.4 COMPORTEMENT MÉCANIQUE SOUS SOLLICITATION ISOTROPELes procédures d’essai présentées au §3.2 permettent d’obtenir la résistance de laroche, ce qui n’est pas toujours suffisant. Il est nécessaire de caractériser lecomportement, ce qui signifie d’obtenir des réponses à des questions, dont lapremière est particulièrement importante :! la roche est-elle isotrope ?! la roche est-elle microfissurée naturellement ?

L'essai de compressibilité ou de compression isotrope permet de répondre à cesquestions et ceci de façon très simple. En effet, si la roche est sans microfissures ethomogène, élastique et isotrope, sa réponse # à une sollicitation de typehydrostatique (sphérique) est :! identique dans toutes les directions de l'espace ;! linéaire en fonction de la contrainte (!1 = !2 = !3 = pression de confinement Pc)

#$

"%PE

c( )1 2 (3-3)

avec E module de Young et $ coefficient de Poisson.

En conséquence tout écart aux deux réponses attendues précédentes donnera desindications sur le caractère isotrope et /ou microfissuré de la roche.

3.4.1 PRINCIPE DE L’ESSAI

L'essai se pratique sur des cubes dont les dimensions sont suffisamment grandes parrapport à la taille du plus grand constituant élémentaire. Ce cube est découpé enfonction de la structure de la roche, ce qui n'est pas toujours, a priori, évident...Notons S1 la normale au plan repéré (stratification, schistosité). Supposons connuesles deux autres directions principales orthogonales de structures, qui sont alorsnotées S2 et S3.Rappelons que si! S1, S2 et S3 sont orthogonales, la roche est dite orthotrope ;

Page 122: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 61

! S2 et S3 ne jouent aucun rôle particulier la roche est dite isotrope transverse.

Le cube est, après séchage, équipé de jauges d'extensométrie selon la figure 3-4. Lecube est ensuite gainé, par exemple d'un enduit silicone, pour éviter toutepénétration de fluide durant l’essai (figure 3-5).

S3

#1

S2

S1

#2

#3

Figure 3-4 : Orientation du cube parrapport aux axes de structure etpositionnement des jauges

Figure 3-5 : Exemple de cubeinstrumenté et gainé de silicone (unefenêtre a été découpée ; les jauges sontgroupées en rosette

Le cube est placé dans une enceinte de pression. Il est sollicité par l'intermédiaired'un fluide dont on contrôle la pression. Notons #i la déformation dans la directionSi. La figure 3-6 présente schématiquement les réponses des trois jauges en fonctionde la pression de confinement Pc.

Pc

#

1, 2, 3

a

Pc

#

2, 3

1

b

Pc

#

1

3 2

c

Figure 3-6 : Résultats schématiques d'essais de compressibilité

Si les trois jauges donnent les mêmes réponses #1 = #2 = # 3 : la roche estprobablement isotrope. Dans le cas où nous supposons l'isotropie, la variation devolume est égale à :

&VV E

P PKcc" ' ' "

%"# # #

$1 2 3

3 1 2( ) (3-4)

avec K module de compressibilité.

Page 123: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

62 Manuel de Mécanique des Roches

Si #2 = #3 ' #1: la roche est probablement isotrope transverse et le plan (S2, S3) estun plan isotrope.

Si #2 ' #3 ' #1: la roche est peut être orthotrope.

3.4.2 CARACTÉRISATION DE LA MICROFISSURATION NATURELLE

Schématisons une microfissure sous forme d’un ellipsoïde aplati, caractérisé par ungrand axe de longueur 2c et une ouverture 2a (figure 3-7). Cette fissure est définiepar un coefficient de forme a/c de l’ordre de 10-3. Sous l'effet d'une charge normale,l'ouverture va diminuer jusqu'à ce que les lèvres de la fissure se touchent.

Supposons qu'une roche isotrope possède une population de fissures de ce type,réparties de manière aléatoire et effectuons un essai de compressibilité. Du fait del'isotropie et de la répartition aléatoire des microfissures, la réponse des jauges seratelle que #1 = #2 = #3. La figure 3-8 représente l'évolution de la variation de volume&V/V en fonction de la pression Pc.

p

2c

2a

Pc

&V/V

A

B

0

Pf

nf

Figure 3 -7 : Représen ta t ionschématique d'une fissure naturelle enforme de pièce de monnaie

Figure 3-8 : Exemple d'essai decompressibilité sur une roche isotropemicrofissurée

On décompose les courbes en deux parties :! OA, à concavité vers le bas, où les microfissures se ferment progressivement en

commençant par les fissures ayant le rapport a/c le plus petit ;! AB, linéaire représentant le comportement élastique de la roche.

Le point A correspond donc à la fermeture de toutes les microfissures : la pressioncorrespondante sera appelée pression de fermeture Pf. L’écart sur l'axe &V/V parrapport à l'élasticité, correspond au volume de toutes les microfissures : il s'agit doncde la porosité de fissures nf = Vf/Vt.

3.4.3 ÉTUDE DE QUELQUES EXEMPLES

La figure 3-9 indique le repère structural d’un essai de compressibilité (figure 3-10)avec des cycles de chargement-déchargement sur un marbre présentant un plan defoliation dont la normale est S1. On remarquera que les parties linéaires (AB) ontsensiblement la même pente, ce qui signifie que ce marbre est isotrope. Par contre,on constate que la fermeture est nettement plus importante dans la direction de S1,ce qui permet d'affirmer que les microfissures sont orientées préférentiellement dansle plan de foliation.

Page 124: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 63

L'étude des cycles chargement-déchargement permet de constater que les fissuresfermées au premier cycle de chargement ne se rouvrent qu'en partie au cours dudéchargement. Par contre cet effet disparaît après le premier cycle.

S1

S3

S2

1 2 3 4 50

10

20

30

40

! (MPa)

# .10-4

#3 #2 #1

Figure 3-9 : Repère structural Figure 3-10 : Essai de compressibilitésur un marbre présentant un plan defoliation

La figure 3-11 montre un essai de compressibilité sur une ardoise, qui présente uneanisotropie forte due à la présence d'un plan de discontinuité (plan de fissilité). Ladirection S1 est prise perpendiculaire à ce plan. On remarque que, les déformationsselon S2 et S3 sont sensiblement identiques tant du point de vue « fermeture desfissures » que du point de vue de l'élasticité. Par contre la réponse selon S1 est trèsdifférente:! la fermeture des fissures est beaucoup plus importante, ce qui indique que les

microfissures sont dans le plan de schistosité et c'est ce qui permet le délitagedes ardoises ;

! la pente des déformations élastiques est différente, ce qui semble indiquer quecette roche est isotrope transverse.

La figure 3-12 présente un essai de compressibilité sur un échantillon d'argilite : ladirection S1 est prise perpendiculaire au plan de stratification.

0

20

40

60

0 500 1000 1500

Pc (MPa)

#.10-6

#3 #2 #1

0

20

40

60

0 5 10 15

Pc (MPa)

#.10-3

#2 #3 #1

Figure 3-11 : Essai de compressibilitésur une ardoise

Figure 3-12 : Essai de compressibilitésur une argilite

Page 125: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

64 Manuel de Mécanique des Roches

L'allure des courbes présentées est très semblable à celle de l’ardoise et lesconclusions voisines. Les remarques portent sur l'interprétation de la « fermeture desfissures »: dans le cas d'une argilite, il est plus correct de parler de « serrage desfeuillets argileux » que de fermeture de fissures. Notons que le mécanicien des solsinterprète cette partie convexe comme étant indicatrice d'un état de surconsolidationdu matériau et que la pression Pc serait la pression de consolidation.

3.4.4 CAS DES ROCHES TRÈS POREUSES : PRESSION D'EFFONDREMENT

DES PORES

Figure 3-13 : Essai decompressibilité sur une craie

Les matériaux très poreux, parexemple les craies, présententlors de l’essai de compressibilité,un comportement particulier. Unexemple est donné par la figure3-13, qui présente l'évolution dela variation de volume enfonction de la pression deconfinement. A partir del'examen des résultats de cetessai, on peut faire les remarquessuivantes :

! la craie ne présente pas de microfissures décelables, le comportement estlinéaire élastique dès l'origine ;

! à partir d'une certaine pression pcol, la variation de volume (compaction) estplus grande que dans la zone élastique, ce qui signifie que la microstructurecommence à évoluer (destruction des joints de grains) pour réduire sa porosité.La pression Pcol correspond donc à une pression de début d'effondrement destructure. Elle est appelée « pression d'effondrement des pores » (porecollapse) ;

! au delà d'une certaine pression Pt, le gradient de variation de volume s'inverse ànouveau: la roche semble « se raidir ». En fait, à partir de la pression Ptl'effondrement de la microstructure poreuse tend à se stabiliser.

La pression Pcol joue un grand rôle dans la compaction des réservoirs pétroliers. Lavaleur de cette pression dépend de la nature de la roche, c'est à dire de la nature desjoints de grains, et de la porosité : plus la porosité de la roche est importante, plus lavaleur de Pcol diminue.

3.4.5 REMARQUES SUR L'ISOTROPIE

La disposition des jauges de la figure 3-4 ne permet pas de conclure avec certitudeque les résultats de la figure 3-6a conduisent à une roche isotrope, et que les résultatsde la figure 3-6b conduisent à une roche isotrope transverse. L'hypothèse d'isotropieimpose de vérifier la même propriété quelle que soit l'orientation. Or les jaugesd'extensomètrie ont été placées selon trois directions particulières. Pour s'assurer dela validité de l'hypothèse d'isotropie, soit spatiale soit planaire, il est nécessaired’ajouter des jauges suivant trois autres orientations.

0

20

40

60

0 4 8 12 16

Pc

Pcol.

Pt

#v 10-2

Page 126: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 65

3.4.6 VALIDATION DES MODULES ÉLASTIQUES

L'essai de compressibilité est un essai dont les conditions aux limites sontparfaitement maîtrisées et qui permet facilement de caractériser le comportementélastique. Il peut être utilisé pour valider la détermination des paramètres desroches.

Roche isotrope

Dans le cas d'une roche isotrope, l'essai de compressibilité permet de déterminer lemodule de compressibilité K. Ce module de compressibilité est lié au module deYoung et au coefficient de Poisson (équation 3-4). Supposons les modules E et $déterminés à partir d'autres essais : compression uniaxiale, compression triaxiale, parexemple. On peut ainsi vérifier la qualité des paramètres obtenus ainsi que la qualitéde l'hypothèse d'élasticité postulée dans ces autres essais pour obtenir cesparamètres.

Roche isotrope transverse

Les déformations théoriques selon les directions S1 et S 2 sont respectivement(Annexe de ce chapitre) :,

#$

#$

11

21

21

12

1

1 2 1 2" %(

)*

+

,- "

%(

)*

+

,-E E

PcE

Pc; (3-5)

#$ $

#$ $

212

1

23

22

21 23

2

1 1"

%%

%(

)*

+

,- "

% %(

)*

+

,-E E

PcE

Pc; (3-6)

Avec E1, E2 modules de Young principaux et $12, $23, $21 coefficients de Poissonprincipaux (définitions dans l'annexe) déterminés par d'autres essais. Ces deuxrelations permettent ainsi de valider la détermination de ces modules.

3.5 COMPORTEMENT EN COMPRESSION UNIAXIALE

3.5.1 COURBES CONTRAINTE-DÉFORMATIONS

L'essai de compression est effectué avec enregistrement simultané des déformationsaxiales #a et des déformations transversales #t (dans le cas d’une roche isotrope). Unexemple de disposition de ces jauges en position axiale et transversale est présentésur la figure 3-14. Le nombre idéal de jauges est de trois selon chaque direction.

On ne considère ici que la moyenne des mesures suivant une direction, aprèsélimination éventuelle des valeurs considérées comme aberrantes (mauvaisfonctionnement d’une jauge, rupture prématurée d’une jauge). La déformationvolumique de l'échantillon durant l'essai a pour expression :

&V/V = . = #a + 2#t (3-7)

Classiquement, on représente sur un même graphique les deux courbes !1 - #a et !1- #t auxquelles on associe la courbe !1 - . ( figure 3-15). La référence élastiqueisotrope conduit à la définition du module de Young ou module d'élasticité et ducoefficient de Poisson par les relations classiques :

! # $##1 " " %E a

t

a; (3-8)

Page 127: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

66 Manuel de Mécanique des Roches

!1

!d

!l

!f

!r

!s

#3 #1

!c

Figure 3-14 :Pos i t ion desjauges

Figure 3-15 : Courbes contrainte-déformations axiale,transversale et volumique

Le coefficient de Poisson, théoriquement compris entre -1 et 0,5 est pratiquementcompris entre 0,15 et 0,45 pour la plupart des roches. Des valeurs élevées sont àmettre en relation avec le développement de microfissures ou de déformationsplastiques au sein de la roche. L'étendue des valeurs de module de Young estcomprise entre 1 GPa (roche qualifiée de « très déformable ») et 100 GPa (rochequalifiée de « très raide »). L'une des questions fondamentales qui se pose àl'ingénieur est de savoir dans quelle mesure, ou dans quel domaine de sollicitation,la roche présente un comportement élastique. Si tel est le cas, la détermination de Eet $ définit sa loi de comportement élastique et l'identification d'un « domained'élasticité » constitue une donnée essentielle pour la validité d'une loi decomportement.

L’identification de la zone élastique est souvent assimilée à la zone linéaire de lacourbe !1 - #a alors qu’en toute rigueur, il faut vérifier la réversibilité ducomportement par un cycle déchargement-rechargement. La pente de la courbe !1 -#a en chargement continu, correspond à un module enveloppe (ou module tangent).Elle est différente des pentes des cycles déchargement-rechargement : Eenveloppe 'Edéchargement = Erechargement. Ces deux derniers modules sont égaux s’il n’y a pasd’effets différés dans le comportement, ni d’effet de presse. Une autre difficultédans l’évaluation des modules est liée au frettage : si on emploie des capteurs dedéplacement entre plateaux de la presse, les déformations sont plus importantes dufait des interfaces et de l’inhomogénéité des déformations le long de l’éprouvette. Lemodule correspondant est inférieur au module calculé à partir des mesures dedéformation des jauges collées en partie centrale de l’éprouvette. Une analyse descourbes contrainte-déformations axiale, transversale et volumique permet d'identifierles différents seuils correspondant aux mécanismes conduisant aux déformations et àla ruine de l’éprouvette. Le comportement est dominé par :! la microstructure de la roche : composition minéralogique, forme et agencement

des minéraux, nature des contacts interminéraux, nature de la porosité et del'agencement des vides (porosité de pores et/ou de fissures), présence éventuellede fluides interstitiels ;

! le niveau de la contrainte appliquée.

Page 128: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 67

Décrivons le comportement d’un granite dans lequel on distingue usuellement cinqétapes successives :! pour de faibles niveaux de contrainte cette roche initialement microfissurée

présente généralement une phase dite de serrage, l'application de la chargeprovoque une fermeture progressive des microfissures, et donc uneaugmentation de la raideur : la courbe !1 - #a présente une concavité commeindiqué sur la figure 3-15. La contrainte ! s correspond au début ducomportement linéaire consécutif à la phase de serrage. Cette phases'accompagne souvent d'émissions acoustiques liées à la fermeture progressivedu réseau microfissural ;

! pour des niveaux de contraintes supérieures à ! s, le comportement estgénéralement élastique, linéaire et réversible, jusqu'à un niveau de contrainte !fà partir duquel apparaît, sur la courbe !1 - #t un écart par rapport à la linéarité :#t augmente alors plus vite que dans la phase élastique ;

! cette déformation est liée à l'ouverture et à la propagation des fissurespréexistantes ou à l’amorçage de nouvelles fissures. Des événementsacoustiques se manifestent à nouveau. L'ouverture des fissures se traduit par uneévolution de la variation de volume . qui diminue moins vite que dans la phaseélastique. A mesure que la contrainte !1 augmente, le phénomène de dilatancetransversale prend de l'ampleur jusqu'à un niveau de contrainte !d (seuil dedilatance) à partir duquel la variation de volume . change de sens : à cemoment, l'augmentation de volume compense la diminution de volume due à lacontraction élastique. Cette phase s’accompagne d'une très nette recrudescencedes émissions acoustiques, traduisant une évolution instable du réseau fissuralpar coalescence des fissures ;

! à partir du niveau de contrainte défini par !d, toute augmentation de !1 induitun développement instable et non contrôlé du réseau fissural, qui induit à sontour un endommagement croissant de la roche. Les déformations axiales cessentd’être linéaires (ce seuil !l est appelé abusivement limite élastique), jusqu’à larésistance à la compression !c, pic de la courbe ;

! le comportement post-pic, essentiellement régi par les frottements mutuels desfragments de roche, n’est que rarement marqué par l’établissement d’unerésistance résiduelle !r sous sollicitation uniaxiale (granite altéré ou trèsmicrofissuré).

3.5.2 EXEMPLES DE COMPORTEMENT

Des figures présentent des courbes contrainte-déformations axiale, transversale etvolumique pour un grès très tendre (figure 3-16), un calcaire à organismes (figure 3-17) et une marne (figure 3-18). Le grès tendre présente des déformations axiales nonlinéaires en début de chargement, un comportement fortement non linéaire pour lesdéformations transversales. La courbe volumique est entièrement non linéaire, leseuil de dilatance est très bas. Les pentes des cycles déchargement-rechargementsont quasi-identiques. Les déformations permanentes sont importantes.

Le calcaire présente une petite phase de serrage, ensuite une partie linéaire et unephase non-linéaire avant le maximum (courbe !-#a). La courbe !-#t montre un seuilde fissuration très net. La courbe !-#a de la marne est rapidement non-linéaire, lesdéformations irréversibles sont croissantes. Les déformations transversales cessentd’être linéaires à peu près au même seuil que les déformations axiales. La dilatancese produit très tardivement.

Page 129: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

68 Manuel de Mécanique des Roches

#.10-3

0

2

4

6

8

10

12

-6 -4 0 5 10-2

!1 (MPa)

!t !a.

Figure 3-16 : Courbes !1 - #a , #t et . ; grès

#.10-3

!1 (MPa)

#t #a.

10

20

30

40

0-0,5 0,5 1,5

Figure 3-17 : Courbes !1 - #a , #t et . ; calcaire

0

5

10

15

20

25

-2 -1 0 2 4

#.10-3

#t #a.

!1 (MPa)

Figure 3-18 : Courbes !1 - #a , #t et . ; marne

Page 130: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 69

3.5.3 CAS DES ROCHES ORTHOTROPES

Les roches orthotropes sont caractérisées par 5 modules élastiques (Annexe) : 2modules de Young principaux E1, E2, 2 coefficients de Poisson principaux $12 (ou$21), $23 et un module de cisaillement G12. Les quatre premiers modules peuventêtre déterminés à partir d'essais de compression uniaxiale comme dans le cas desroches isotropes, en revenant à la signification physique de ces paramètres. Lemodule G12 est déterminé par des essais « clinotropes ».

Essais en axes principaux

Les essais de compression simple sont effectués suivant les axes de structure S1 etS2 par exemple. Les éprouvettes sont équipées de jauges comme sur la figure 3-19.

S1

S2

S3

S1

S2

S3

.

S1

S2

S3

X1

S1

plan d’anisotropie

X3

Figure 3-19 : Instrumentation pour lesmodules principaux

Figure 3-20 : Essai clinotrope surroche isotrope transverse

Pour l'essai de compression selon S1 la jauge axiale permet de calculer le module deYoung E1 et la jauge transversale, le coefficient de Poisson $12. Pour l'essai decompression selon S2, la jauge axiale permet de déterminer E2, la jauge transversalecollée dans le plan [S2, S3], le coefficient de Poisson $23, la jauge transversale colléeperpendiculairement à la schistosité, c’est-à-dire au plan [S2, S3], le coefficient dePoisson $21.

Essais clinotropes - Mesure de G12

Effectuons une rotation . du repère principal des contraintes autour de S2 etcaractérisée par "+2 % . " (S1,X1). Pour un essai de compression réalisé dans uneorientation . différente de 0° et 90°, une jauge axiale (figure 3-20) donne une valeurdu module E(.) qui doit être égale à (Annexe de ce chapitre) :

1 14

1 12

12

1

21

2

2 24

2E E G E E E( )

sin sin cos cos.

. $ $. .

." ' % %

(

)*

+

,- ' (3-9)

Les paramètres E1, E2, $12, $21 étant connus, le calcul de G12 s'en déduit. Il est doncpossible, de déterminer le module de cisaillement G12 par jauges d'extensométrie. Ilfaut néanmoins faire très attention à bien mesurer un paramètre élastique E(.), car laprésence de microfissures dans le plan d’anisotropie peut masquer le comportementélastique.

Page 131: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

70 Manuel de Mécanique des Roches

3.6 COMPRESSION TRIAXIALE DE RÉVOLUTION

Figure 3-21 : Principe de l'essaitriaxial

L'essai triaxial est un essai suréprouvette cylindrique gainée (figure3-21). Il consiste à étudier lecomportement de la roche sous unepression de confinement.

L'éprouvette est en outre sollicitée parune contrainte axiale !1. Supposons,tout d’abord, que l'essai est effectuésur échantillon « sec », c'est-à-diresans fluide interstitiel, ou encore quela pression du fluide interstitiel restenulle durant tout l’essai. On présenteraen §3.6.3 le principe des essais danslesquels cette pression n'est pas nulleet les différentes situations qui endécoulent.

3.6.1 LES TRAJETS DE CHARGEMENT

L'essai triaxial est donc caractérisé par deux paramètres de chargement: !1, et !2 =!3 = Pc. Il est donc possible de décrire l'ensemble des chemins triaxiaux par uneexpression des trajets de chargement dans le plan !1-Pc ou !1-!3 (figure 3-22).! trajet 1 : chargement hydrostatique (!1 = !2 = !3 = Pc) jusqu'à une valeur Pc =

P0. Ensuite chargement croissant en !1 avec P0. Il s'agit ici de l'essai triaxialmonotone classique ;

! trajet 2 : chargement tel que !1 = k !3, avec k constante. Cet essai est appeléessai proportionnel. Il peut être généralisé par un trajet de la forme :chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargement tel que !1= k !3 (trajet 2*) ;

! trajet 3 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementdécroissant en !1. Il s'agit ici de l'essai d'extension classique (extensionlongitudinale) ;

! trajet 4 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementdécroissant en !3 avec !1 = P0. Il s'agit ici de l'essai d'extension latérale. Ilpeut être généralisé par un trajet de la forme chargement hydrostatique jusqu'àune valeur Pc = P0 puis chargement croissant en !1 jusqu'à une valeur (!1)0 etenfin chargement décroissant en !3 avec !1 = (!1)0. (trajet 4*). Ce trajetreprésente schématiquement le chemin de contrainte autour d'un ouvragesouterrain lors du percement ;

! trajet 5 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementà contrainte moyenne constante (!1+ 2 P0 = K constante). Cette deuxièmephase de chargement est purement déviatorique et permet d'étudier la surface decharge indépendamment de la contrainte moyenne.

Gaine

Embasesupérieure

Embase inférieure

!1

!3 " Pc

Page 132: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 71

Pc

0

!1

P0

(!1)0

P0

!1

P0

P0

Pc

0 0

P0

P0

Pc

!1

!1

P0

P0

P0

P0

!1

Pc Pc

0 0

1 2*

2

4

3

4*

5

Figure 3-22 : Définition des principaux types de trajets de chargement en essaitriaxial

3.6.2 INFLUENCE DE LA PRESSION DE CONFINEMENT

REPRÉSENTATION DES RÉSULTATS

Influence de la pression de confinement sur le comportement

Plaçons nous dans le cas des essais triaxiaux classiques (trajet 1) et examinonsl'influence de la pression de confinement sur le comportement.

La figure 3-23 présente l'évolution des courbes contrainte-déformation axiale pourune marne. Comme l'indique cette figure, l'augmentation de la pression deconfinement a en général plusieurs effets :! elle augmente la limite élastique et la résistance maximale ;! elle fait passer le comportement du type fragile au type ductile (§3.7) ;! sur les courbes contrainte déformation volumique on remarquerait une

diminution de la dilatance.

Physiquement l'augmentation de pression de confinement diminue les possibilitésd’amorçage et de propagation des microfissures par augmentation du frottement surles lèvres des microfissures. Dans le cas des matériaux poreux, craie par exemple, ona montré (§ 3.4.4) que la pression de confinement pouvait conduire à une pressionlimite de comportement élastique. Il en découle donc une diminution de la limiteélastique avec la pression de confinement. Sur la figure 3-24, le comportementductile à partir du confinement de 6 MPa est observable. Les déformations ductilesaugmentent rapidement : sur la figure les courbes à 13 et 17 MPa de confinementont été tronquées.

Page 133: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

72 Manuel de Mécanique des Roches

40200

20

40

60

80

100 !3=50 MPa

!3=30 MPa

!3=10 MPa

!3=5 MPa#.10-3

!1-!3 (MPa)

20

15

10

5

00 2,50,5 1 1,5 2,0

6 MPa

# %

!1-!3 (MPa)

3 MPa17 MPa

13 MPa

1 MPa

Figure 3-23 : Influence de la pressionde confinement sur le comportementd'une marne en fonction de la pressionde confinement

Figure 3-24 : Influence de la pressionde confinement sur le comportementd'une craie en fonction de la pressionde confinement

Représentation dans le plan de Mohr

A partir des essais triaxiaux, il est possible d'étudier l'influence de la pression deconfinement sur la limite élastique ou la rupture (chapitre 9). La premièrereprésentation et la plus communément pratiquée est la représentation de Mohr. Ilsuffit de tracer les cercles, centrés sur l’axe des contraintes principales, et coupantcet axe en ! 1 et Pc, correspondant aux conditions limites recherchées (limiteélastique ou rupture) et de prendre l'enveloppe de ces cercles. La figure 3-25 donnel'exemple d’une marne. On remarque que plus la pression de confinement augmente,plus l'enveloppe « s'aplatit » pour tendre vers une asymptote / = constante,caractéristique d'un comportement ductile (§3.7).

/ (MPa)

! (MPa)20 40 60 80 100

20

10

30

Figure 3-25 : Représentation de Mohr des conditions de rupture pour une marne

Représentation en plan principal

C'est la représentation la plus directe à partir des résultats de l'essai triaxial. Deuxtypes de représentation sont possibles:! dans le plan des contraintes principales, c'est-à-dire dans le plan (!1, !3) ;! dans le plan (P,Q) avec P contrainte moyenne (P = (!1 + 2!3)/3) et Q contrainte

déviatorique (Q = (!1 - !3)). La notation habituelle est souvent en minuscules ;les majuscules sont employées ici, pour qu’il n’y ait pas de confusion avec lapression interstitielle notée p.

Page 134: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 73

Les figures 3-26 et 3-27 donnent ces représentations pour la même marne enconditions de rupture.

!1 (MPa)

5040302010020

40

60

80

100

120

!3 (MPa)

Q (MPa)

7050301000

20

40

60

80

P (MPa)

Figure 3-26 : Représentation dans leplan expérimental des conditions derupture pour une marne

Figure 3-27 : Représentation dans leplan (P,Q) des conditions de rupturepour une marne

Représentation en Invariants

Cette représentation peut être intéressante pour certains types de critères tels queCam Clay ou Drucker-Prager (chapitre 9). Elle représente par exemple la variationde 03J2 (J2 deuxième invariant du tenseur déviatorique des contraintes ; voirAnnexe générale) en fonction de I1, I1 premier invariant du tenseur des contraintes.Notons que dans le cas de l'essai triaxial, cette représentation est équivalente à lareprésentation (P,Q) puisque P=I1/3, et Q=03J2.

3.6.3 ESSAIS DRAINÉS ET ESSAIS NON DRAINÉS

Dans ce qui précède, nous avons supposé que la roche était sèche ou que la pressiondu fluide interstitiel restait nulle durant l'essai triaxial. Nous allons maintenantenvisager le cas où la roche est parfaitement saturée en fluide avant d'effectuerl’essai. Le dispositif expérimental (figure 3-28) comprend des embases drainantes entête et pied d'échantillon reliées à des capteurs de pression (A) et (B) et à des vannes(A) et (B). Notons p la pression du fluide interstitiel.

Essai non drainé

L'essai non drainé signifie que, durant l’essai, la masse de fluide dans l'échantillonreste constante. Donc pour réaliser cet essai, il faut :! fermer la vanne B ;! mettre le fluide interstitiel à une pression initiale p0. On vérifiera que le capteur

B indique cette pression p0 ;! fermer la vanne A.

On note au cours de l'essai triaxial l'évolution de la pression p avec le chargement.Les deux capteurs de pression doivent donner la même valeur. L’essai triaxialclassique (trajet 1) comprend une partie hydrostatique et une partie déviatorique. Lafigure 3-29 donne l'évolution de la pression p interstitielle en fonction de la pressionde confinement pour une craie (première partie de l'essai). On remarque une relationlinéaire entre p et Pc donnant BS, le coefficient de Skempton (chapitre 10) :

BS = &p/&Pc (3-10)

Page 135: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

74 Manuel de Mécanique des Roches

Gaine

Embasesupérieuredrainante

Embase inférieuredrainante

A

B

Mesurede

volume

B

A

p

!1

!3 = Pc

30

20

10

00 5 10 15 20

Pc (MPa)

p (MPa)

Figure 3-28 : Dispositif expérimentalpour essai drainé et non drainé

Figure 3-29 : Pression interstitielle enfonction de la pression de confinementpour une craie (essai non drainé )

La figure 3-30 donne l'évolution de la pression durant un chargement déviatoriquesur un grès. On remarque que la pression augmente lorsque la variation de volumede l'échantillon diminue, et que la pression chute dès qu'apparaît la dilatance.

300

200

100

0-5 0 5 10-10

!3 = 10 MPa

#.10-3

#3 #1.

!1 - !3

(MPa)

300

200

100

00 1 2 3-1

!3 = 10 MPa

p (MPa)

!1 - !3

(MPa)

Figure 3-30 : Évolution de la pression interstitielle en fonction du chargement pourun essai triaxial non drainé sur un grès

Essai drainé

Durant un essai, la pression interstitielle est gardée constante en laissant le fluideentrer ou sortir de l’éprouvette. Dans l'essai triaxial drainé, on note l'évolution de lavariation du volume des vides en mesurant le volume de fluide expulsé pendantl’essai. Ainsi l'essai triaxial est mené de la façon suivante pour une pression p égaleà 0 :! vérification de la saturation de l'échantillon et des différents circuits du

dispositif expérimental ;! fermeture de la vanne A, ouverture de la vanne B ;! réalisation de l'essai en mesurant le fluide expulsé ; on veille à ce que le capteur

A indique toujours une pression nulle.

Page 136: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 75

Cet essai peut être réalisé aussi avec une pression p = p0, en utilisant des contrôleursde pression qui gardent la pression constante et qui font simultanément la mesure devariation de volume.

Critère de rupture en contrainte effective

La roche, au cours des essais drainés et non drainés, est soumise à une pressioninterstitielle non nulle. Le concept de contrainte effective est alors utilisé dans toutesles lois de comportement et pour l’expression du critère de rupture. On pose : !’= !- bp, avec b, le coefficient de Biot (chapitre 10), compris entre 0 et 1. A la rupture, best pris généralement égal à 1. Dans le chapitre 10, on verra que ce sont lescontraintes effectives et non les contraintes totales qui gouvernent les déformationsdu milieu poreux. Le concept de contrainte effective est donc lié à la loi decomportement de la roche et il est important de dissocier les contraintes effectivesélastiques, des contraintes effectives gouvernant la rupture.

3.7 CLASSIFICATION DES COMPORTEMENTS

3.7.1 LES DIFFERENTS COMPORTEMENTS

Certaines roches comme les craies se rompent progressivement par écoulement, etprésentent donc de grandes déformations avant la rupture qui est dite ductile. Pourles grès peu poreux, les granites, la rupture se manifeste de manière brutale, sousforme de macrofissures se propageant sur des distances plus ou moins longues. Cetype de rupture est qualifié de fragile. Le mode de rupture dépend de l’état descontraintes, de la température et de l’histoire des contraintes. On peut avoir desrésultats différents pour un chargement croissant monotone uniaxial, un chargementsous confinement, un chargement cyclique.

Le comportement mécanique se classe en deux types suivant que les relationscontrainte-déformations sont réversibles ou non. Il est donc nécessaire de réaliser uncycle déchargement-rechargement pour faire ce premier classement. La figure 3-31illustre le comportement réversible, qui correspond à l’élasticité linéaire et non-linéaire. Si le comportement varie en fonction du temps on le qualifie deviscoélastique. Lorsque le déchargement est effectué à un niveau de contrainte plusélevé (figure 3-32), par exemple la fin de linéarité des déformations axiales !l, desdéformations irréversibles apparaissent. Celles-ci sont qualifiées de plastiques et laroche a un comportement élastoplastique.

!

#

a

b!

#

!p

Figure 3-31 : Comportement réversiblelinéaire (a) et non-linéaire (b)

Figure 3-32: Comportement nonréversible

Page 137: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

76 Manuel de Mécanique des Roches

Le terme « élastoplastique » est cependant un abus de langage (voir chapitre 8) car ilrecouvre :! de l’élastoplasticité au sens propre (glissement dans un cristal de sel, par

exemple) ;! un endommagement (créateur de discontinuités) dont on rend compte par des

lois issues de la théorie de l’élastoplasticité.

Figure 3-33 : Comportement élasto-plastique parfait (a), écrouissage positif(b), écrouissage négatif (c)

Le comportement est élastoplastiqueparfait si la limite élastique ne dépendpas de l’histoire des contraintes et desdéformations. En d’autres termes, lacourbe contrainte-déformation axialeprésente un plateau (figure 3-33, courbea). Si la pente de la courbe contrainte-déformation axiale est positive, onqualifie ce comportement de durcissant

ou d’écrouissage positif (courbe b). Si la pente de la courbe contrainte-déformationaxiale est négative, il s’agit d’un comportement radoucissant ou écrouissage négatif(courbe c). Quand le comportement dépend du temps, le comportement estélastoviscoplastique.

Dans le chapitre 8 on présentera les mécanismes physiques qui interviennent dans leprocessus de déformation ainsi que les principes des grandes catégories de lois decomportement. Il n’est question dans ce chapitre que de donner quelques élémentssur l’élasticité non-linéaire ou comportement hypoélastique et sur la plasticité.

3.7.2 COMPORTEMENT HYPOÉLASTIQUE

Il se réfère à une forme incrémentale de lois élastique non linéaire usuellementadoptée quand l'incrément de contrainte est une fonction à la fois de l'état decontraintes et de l'incrément de déformation. La différence fondamentale avec uneloi élastoplastique est le caractère réversible. La forme incrémentale d’une loiélastique non-linéaire est :

d! = f(!,d#), soit d! = Dt(!)d# (3-11)

Dt étant une matrice tangente. Une loi hypoélastique ne nécessite pas que lesdirections principales de contraintes et de déformation coïncident. Dans la classe deces modèles, on a, par exemple, la loi de Duncan dite hyperbolique. Le termehyperbolique est relié à l'équation adoptée pour l'interpolation des résultats d'essaistriaxiaux et non à la nature des équations gouvernant le problème en terme d'analysede contraintes. L’évolution du module de Young a la forme suivante :

E RC

KPP

fatm

atm

n" % '

% %

%

(

)*

+

,-

1

23

4

561 1

21 3

3

23( sin )( )

( cos sin )7 ! !

7 ! 7

! (3-12)

avec Rf, K, n : paramètre du matériau, Patm : pression atmosphérique, C : cohésionet 7 : angle de frottement.

!

#

a

b

c

Page 138: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 77

3.7.3 ÉLASTOPLASTICITÉ

Rappelons, tout d’abord, quelques définitions relatives à la plasticité. La surfaced’écoulement est la surface dans l’espace des contraintes définissant des états decontrainte pour lesquels se développent des déformations plastiques. La loi dedurcissement règle les changements possibles en forme, taille et position de lasurface d’écoulement. La règle d’écoulement gouverne l’incrément desdéformations plastiques. Dans le domaine non linéaire, l'incrément de déformationtotale consiste en la somme des incréments de déformation élastique et dedéformation plastique :

d# = d#el + d#pl (3-13)

et l'incrément de contrainte correspondant est directement évalué sur la base de larelation élastique :

d! = D d#el " D(d# - d#pl) (3-14)

La condition d'écoulement peut s'exprimer par :

F = F [!, h(#pl )] (3-15)

h est alors le vecteur de durcissement gouvernant le changement de surfaced’écoulement avec l'augmentation des déformations plastiques. Si F est négatif, l'étatde contraintes est représenté par un point dans l'espace des contraintes à l'intérieurde la surface d’écoulement. Dans ce cas, le matériau a un comportement purementélastique incrémental. Si F = 0 l'état de contraintes est sur le critère d’écoulement. SiF positif, ce sont des points à l'extérieur de la surface, donc l'état de contraintes n'estpas admissible. Des déformations plastiques se développent pendant un incrémentdepuis F = 0, seulement si le point de contraintes reste sur cette surface pendantl'incrément, c'est-à-dire si la condition de consistance suivante est respectée :

dF F d Fh

h dT T

plpl" 1

23

456 ' 1

23

456123

456 "

88!

!88

8

8## 0 (3-16)

L'incrément de déformation plastique gouvernée par la règle d'écoulement plastiqueest proportionnel au gradient du potentiel plastique Q = Q[!, h(#pl)] par l'incrémentd9 de multiplicateur plastique.

d d Qpl# 988!

" (3-17)

Figure 3-34: Règle d’écoulementnon associée

Cette équation exprime la con-dition que dans l'espace superposédes contraintes et des déforma-tions, le vecteur représentant l'in-crément de déformation plastiqueest directement le vecteur extérieurnormal à la surface représentant lepotentiel plastique au point qui

!

!,#

Q

F=0

d!

nQ

d#pl

Page 139: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

78 Manuel de Mécanique des Roches

correspond à l'état courant de contraintes. A noter que d9 est une inconnue qu’on nepeut déterminer qu’en résolvant un problème de structure. La règle d'écoulement estassociée si le potentiel plastique et la surface d'écoulement coïncident. Si ce n’estpas le cas la règle d’écoulement est non associée (figure 3-34 où nQ = 8Q/8!).

3.8 COMPORTEMENT DIFFÉRÉPar le terme comportement différé, nous entendons des lois de comportementfaisant intervenir, en plus de la déformation # et de la contrainte !, leur dérivée parrapport au temps. On parle également de comportement visqueux lorsqu'il y adépendance du comportement avec le temps, le terme visqueux est à associer à laviscosité qui est un paramètre pouvant décrire cette dépendance (§ 3.8.2).

3.8.1 MISE EN ÉVIDENCE DE L'EFFET DU TEMPS SUR LE COMPORTEMENT:

FLUAGE ET RELAXATION

La méthode la plus simple pour mettre en évidence l'importance du temps pour lecomportement des roches est d'effectuer un essai de fluage. L’essai de fluage le plussimple à réaliser est en compression monoaxiale, mais des essais triaxiaux peuventêtre également réalisés. Sur l'éprouvette de compression appliquons à l'instant t = t0,une contrainte ! = !0 (figure 3-35a). Si le matériau est purement élastique alors ilsubit à l'instant t = t0 une déformation # = #0 qui ne variera pas avec le temps. Maisl'expérience montre qu'il n'en est pas souvent ainsi : le matériau subit à l'instant t = t0une déformation instantanée # = #0, puis la déformation évolue ensuite de façon plusou moins croissante (contraction >0) avec le temps (figure 3-35b). Cette croissanceavec le temps dépend de la valeur de !0 et sera étudiée plus en détail dans leparagraphe 3-8-2.

#0

#

!

t

tt0

!0

a

b

!0

!

!:

#

#0

t

tt0

b

a

Figure 3-35 : Chemin et réponse d’unessai de fluage

Figure 3-36 : Chemin et réponse d'unessai de relaxation

Page 140: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 79

L'essai de relaxation est un autre essai qui permet de rendre compte des effets dutemps sur le comportement : c'est l’essai dual de l'essai de fluage. Il est décrit par lafigure 3-36. Dans cet essai on applique une déformation # = #0 au temps t = t0 ; cettedéformation est maintenue constante. La réponse est donc en contrainte ; si le tempsa un effet sur le comportement, la contrainte décroît (compression >0) avec le tempsdepuis ! = !0 au temps t = t0, pour tendre généralement vers une asymptote ! =!: < !0.

3.8.2 INFLUENCE DE L'INTENSITÉ DU DEVIATEUR

SUR LE COMPORTEMENT DIFFÉRÉ.

Prenons un essai de fluage en compression simple et faisons varier la contrainteappliquée à l'éprouvette (figure 3-37). Si la charge est faible par rapport à lacontrainte de rupture, la vitesse de fluage s'annule rapidement après une phasetransitoire (courbe a). La déformation reste toujours faible. Ce fluage estrelativement bien traduit par une expression sous forme logarithme du temps, parexemple :

# - #0= A ln ( ;t + 1) (3- 18)

Ce fluage est aussi appelé fluage < ou fluage logarithmique. A noter que cetteexpression n’est vraie que pour une fenêtre t = [0,T].

La courbe de fluage (b) correspond à des niveaux de contraintes plus élevés et peutêtre décomposée en deux stades :! stade I : ou fluage primaire ou fluage transitoire ou fluage >. C'est un stade de

transition ou la vitesse de fluage diminue rapidement avec le temps. Ce fluagepeut prendre la forme :

# - #0 = A tm (3-19)

avec m compris entre 0,3 et 0,6 selon les conditions expérimentales ;! stade II : ou fluage secondaire ou fluage stationnaire. Dans ce stade, la

vitesse de fluage est constante, et cette constante est analogue à la viscosité desfluides.

Après ce stade, les déformations peuvent s'amortir ou se poursuivre à une vitesseconstante (fluage permanent). La vitesse de fluage croît avec la contrainte appliquéeavec une loi de la forme :

d#/dt = K !n (3- 20)

avec n compris entre 1 et 5 (voir chapitre 8, sel gemme). La température joue un rôletrès important sur cette vitesse de fluage.

Cependant si la charge appliquée est encore augmentée, il apparaît alors untroisième stade III (courbe c) ou fluage accéléré. Ce fluage est essentiellement lié àun développement important de la micro fissuration. Cette accélération de la vitessede fluage d#/dt conduit à plus ou moins long terme à la rupture de l'éprouvette. Lesuivi de la vitesse de fluage et de sa variation dans le temps est la base de la méthodede suivi de la stabilité des ouvrages : l'ouvrage est stable si la vitesse de fluagediminue ou reste constante dans le temps, l'ouvrage devient instable à plus ou moinslong terme si la vitesse de fluage augmente avec le temps.

Page 141: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

80 Manuel de Mécanique des Roches

Enfin, si on effectue un essai de fluage sous des contraintes proches de la contraintede rupture, les stades I, et II peuvent disparaître pour ne laisser place qu'au stade III.

!

#

?

???

??

???

c

b

a

t

Fluage

Relaxation

Courbe limite

!

#

Figure3-37 : Influence du déviateur surla réponse en fluage

Figure 3-38 : Définition et obtentiond'une courbe « ultime »

3.8.3 NOTION DE COURBE LIMITE

La réponse de la roche dépend du temps avec une plus ou moins grande intensitéselon la nature minéralogique et les fluides interstitiels. Ainsi la résistance et lesmodules obtenus lors des essais en laboratoire vont dépendre de la vitesse desollicitation utilisée. Pour caractériser le comportement à long terme et obtenir ainsila courbe limite ou ultime, il serait nécessaire d'effectuer des essais à vitesse dechargement très faible. Cette courbe limite peut être déterminée de la façon suivanteà partir d'un essai standard :! à un état de chargement donné on stoppe l'essai et on effectue, soit un essai de

fluage, soit un essai de relaxation (figure 3-38);! à la stabilisation on obtient un point de la courbe ultime ; la procédure est

répétée à différents niveaux de chargement.

3.9 EFFET D’ÉCHELLE

3.9.1 POSITION DU PROBLÈME

Un des problèmes essentiels en mécanique des roches est l'extrapolation des mesuresde laboratoire aux propriétés à plus grande échelle. Afin d'étudier ce problème, denombreux auteurs ont réalisé des essais sur des échantillons de différentesdimensions qui ont montré que la résistance à la compression variait avec la taille del'éprouvette. La première explication consiste en une approche probabiliste : lorsquele volume de roche soumis à un essai augmente, la probabilité de contenir desdéfauts, susceptibles d’amorcer une fissure, ou même des fissures préexistantes,augmente. Cependant, la figure 3-39 résumant divers résultats publiés montre quetous les matériaux ne présentent pas un même comportement lorsque leur dimensionaugmente. Les travaux de différents auteurs permettent de classer cescomportements en trois catégories :! la résistance décroît avec les dimensions de l'éprouvette : effet de volume ;! la résistance augmente avec le volume de l'éprouvette : effet de surface ;

Page 142: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 81

! la résistance croît puis décroît : les deux effets se compensent. L'effet de surfacea tendance à dominer pour de petites dimensions d'échantillons.

Quelques exemples des différents comportements sont présentés ci-après.

0

50

100

150

200

250

0 2 4 6 8 10 12

!c (MPa)

Grès 2

Calcaire 1

Granite

Charbon

Calcaire 2

Grès 1

Marbre

Ø (cm)

Figure 3-39 : Résistance à la compression en fonction de la dimension del'échantillon pour diverses roches

3.9.2 EFFET DE VOLUME

La rupture est généralement amorcée par une augmentation de contrainte sur unehétérogénéité de la roche. Si on considère une répartition homogène de cesimperfections, en augmentant la taille de l'éprouvette on augmente le nombre desdéfauts susceptibles d'amorcer une fissure. Ainsi il parait logique que la résistance àla compression diminue quand la dimension de l'échantillon augmente.

Ce raisonnement peut également expliquer la dispersion importante lors des essais,le défaut générant la rupture pouvant être différent d'un échantillon à l'autre. Enconséquence, l'augmentation de la taille de l'éprouvette devrait diminuer ladispersion des résultats, l'amorçage de la première fissure ayant plus de chance de sedérouler dans les mêmes conditions.

Tout ceci est basé sur le concept de « maillon le plus fragile » : si on discrétisel'échantillon en une infinité d'échantillons élémentaires, la résistance globale estdéterminée par la résistance du maillon le plus faible. On peut alors établir unerelation entre la résistance de l'éprouvette et son volume, connaissant la probabilitéde rupture. La fonction de densité de probabilité la plus utilisée est celle utilisée parla théorie de Weibull. La probabilité de rupture d'un volume V d'un échantillonsoumis à une contrainte ! est :

S f dVV

" % %(

)

**

+

,

--@1 exp ( )! (3-21)

f(!) est une fonction du matériau f u

o

m( )! ! !

!"

%1

23

4

56 (3-22)

Page 143: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

82 Manuel de Mécanique des Roches

avec !u, la plus petite contrainte que tout élément de volume élémentaire peutsupporter, !o, la contrainte de référence, m, un paramètre d'échelle. Dans le cas oùla distribution des contrainte est uniforme :

! !!%1

23

4

56

u

o

m

représente donc le risque de rupture pour le volume élémentaire.

Prenons deux éprouvettes :

! !!

! !!

11

22

%1

23

4

56 "

%1

23

4

56

u

o

mu

o

mV V (3-23)

si !u = 0 on obtient !!

1

2

2

1

1"1

23

4

56

VV

m/(3-24)

Ainsi l'effet d'échelle ne dépendrait que de m. En fait !u ' 0 et les constantes dumatériau ne sont pas déterminées de façon simple. La théorie de Weibull estcritiquable sur plusieurs points :! en tant que modèle statistique, il demande de très nombreux essais afin de

déterminer les deux constantes propres au matériau et nécessaires aux calculs ;! elle fait appel à la théorie des valeurs extrêmes impliquant que la résistance soit

déterminée par la fissure la plus critique. La rupture est donc synonymed’amorçage de la fissure. Or, si cela peut être le cas dans un essai de tractiondirecte, ce n'est plus vrai lors d'un essai en compression simple ;

! il est de plus nécessaire que l’état de contrainte soit uniforme, ce qui n'est pastoujours le cas.

Houpert a étudié la dispersion des résistances à la compression pour le granite deSenones. Il apparaît clairement sur la figure 3-40 que la dispersion diminue lorsquele volume des éprouvettes augmente. Ce qui est en accord avec les théories de larupture comme nous l'avons vu plus haut.

3.9.3 EFFET DE SURFACE

Certains essais contredisent les résultats présentés. En effet, pour certaines roches larésistance à la compression peut augmenter lorsque les dimensions de l'échantillonaugmentent comme sur le granite de Senones ( figure 3-41).

0

2

4

6

8

0 400 800 1200

Coefficient de variation (%)

Volume (cm3) 150

160

170

180!c (MPa)

Ø éprouvette (cm)

Figure 3-40 : Dispersion de larésistance et volume essayé

Figure 3-41 : Effet d'échelle inverse surle granite de Senones

Page 144: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 83

Cet effet d'échelle inverse serait lié à des détériorations de la couche externe del'éprouvette modifiant les propriétés mécaniques de la roche sur une certaineépaisseur. Or, la surface externe par unité de volume décroît lorsque les dimensionsde l'éprouvette diminuent. Ainsi, l'effet de surface est prépondérant (lorsqu'il existe)pour les éprouvettes de petit diamètre.

3.9.4 EFFET D’ÉCHELLE MIXTE

Pour illustrer l’effet d’échelle mixte, composé d’un effet de surface pour leséprouvettes de petit diamètre et d’un effet de volume pour les diamètre plusimportants, les figures 3-42 et 3-43 présentent des résultats d’essai de compressionuniaxiale réalisés sur une ardoise suivant les deux directions principalesd’anisotropie.

2 4 6 8 10 12

!c (MPa)

100

200

Ø (cm)2 4 6 10 128

50

150

Ø (cm)

!c (MPa)

Figure 3-42 : Évolution de la résistanceà la compression orthogonalement à laschistosité

Figure 3-43 : Évolution de la résistanceà la compression parallèlement à laschistosité

Pour de petits diamètres (Ø < 40mm) on aurait un effet d'échelle inverseprobablement dû à un « effet de peau », la surface endommagée durant lapréparation des échantillons étant relativement importante. Lorsque le diamètreaugmente on retrouve un effet d'échelle normal faisant diminuer la résistance avec levolume.

Si nous excluons la première phase faisant intervenir un mécanisme différent, ladécroissance de résistance peut se traduire par l'équation suivante :

!c = 304 exp[- 0,02 Ø ] (3-25)

avec !c = résistance à la compression en MPa, Ø = diamètre d'éprouvette en cm.

Pour les essais réalisés sur des éprouvettes selon le plan d’anisotropie, la résistance àla compression présente une évolution un peu différente (figure 3-43). On constateune augmentation de la résistance jusqu'à un diamètre de 70mm puis une légèrediminution. Peut-on voir là l'influence très marquée d'un effet de surface ? Il s'agitbien d'un phénomène lié à la préparation des éprouvettes, mais le terme effet desurface ne paraît pas suffisant car cette direction de carottage a posé de très grosproblèmes, les éprouvettes cassant très souvent soit durant le carottage soit durant larectification. Les contraintes engendrées durant cette phase préparatoire ont doncsouvent suffit à amorcer des ruptures par « décollement » de plans de schistosité.

Page 145: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

84 Manuel de Mécanique des Roches

3.9.5 TRANSITION FRAGILE-DUCTILE ET EFFET D'ÉCHELLE

Pour une même roche, le comportement est modifié par l'augmentation de lacontrainte moyenne. Par exemple un calcaire dur (!c> 50 MPa) est élastique-fragileen compression simple, il devient élasto-plastique en essai triaxial sous pression deconfinement de 30 MPa, puis ductile sous pression de confinement proche de 500MPa. Une élévation de température produit des effets similaires.

Le changement d'échelle fait passer aussi le comportement de la fragilité à laductilité : un massif rocheux formé de roche fragile a un comportement élasto-fragile à l'échelle du décamètre, et relativement ductile à l'échelle kilométrique. Onsait que la dispersion des résultats d'essais est elle aussi sensible à l'échelle (Bernaix,1967), elle diminue pour des échantillons plus grands, et peut même disparaîtrelorsqu'on passe de la fragilité vers la ductilité.

L'effet d'échelle joue de la même manière autour d'une cavité creusée dans un terrainsous forte contrainte : un forage de petit diamètre est parfaitement stable ; quelquesdéformations non réversibles peuvent apparaître dans un petit tunnel, avec desdéformations différées modestes pendant un jour ou deux ; mais une caverne de 15m au même endroit donne lieu à des déplacements différés plus importants, que ceseffets différés apparaissent comme du fluage, de la convergence « inextinguible »,ou comme une croissance à long terme de la charge des soutènements.

SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUEAFNOR : Normes NFP 94-420, 94-422, 94-423, 94-425, 94-426.

Bieniawski Z.T. - The effect of specimen size on compressive strength of coal. Int. J. RockMech. Min. Sci., vol. 5, pp. 325-335, 1968.

Bernaix J. - Etude géotechnique de la roche de Malpasset, Dunod, 1967.

Einstein H., Baecher G. & Hirschfeld R. - The effect of size on strength of a brittle rock. 2èmeCongrès ISRM, Belgrade, vol. 2, thème 3, 1970.

Homand F. - Comportement mécanique des roches en fonction de la température. MémoireSci. de la Terre 46, 261 p., 1986.

Houpert R. & Tisot J.P. - Effet d'échelle et dispersion des contraintes de rupture encompression simple dans le cas d'un granite. Revue de l'Industrie Minérale,n° spécial, pp. 29-34, 1969.

Mandel J. – Propriétés mécaniques des matériaux. Eyrolles, 284 p., 1978.

Morlier P., Amokrane K. & Duchamps J.M. - L'effet d'échelle en mécanique des roches,recherche de dimensions caractéristiques. Revue Française de Géotechnique,49, pp. 5-13, 1989.

Niandou H., Shao J.F., Henry J.P. & Fourmaintraux D. – Laboratory investigation of themechanical behaviour of Tournemire shale. Int. J. Rock Mech. Min. Sci., 34(1), pp. 3-16, 1997.

Shao J.F. & Henry J.P. – Modélisation du comportement d’une craie blanche très poreuse etvalidation. Revue Française de Géotechnique, 43, pp. 35-46, 1988.

Page 146: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 85

ANNEXE : RELATIONS CONTRAINTE-DÉFORMATIONEN MILIEU ÉLASTIQUE

MILIEU ISOTROPE

Les deux paramètres E module de Young, (ou module d'élasticité longitudinale) et $,coefficient de Poisson, suffisent à caractériser le comportement élastique linéaired’un milieu homogène. Sous forme matricielle, la relation entre le tenseur descontraintes et celui des déformations dans le cas d'un essai de compression sur unmatériau dont le comportement est élastique et linéaire s'écrit :

#

#

#

$

$

!x

y

z

x

EEE

(

)

***

+

,

---

" %

%

(

)

***

+

,

---- .

1(3-26)

A trois dimensions, la relation entre le tenseur des contraintes et celui desdéformations s'écrit :

#

#

#

;

;

;

$ $

$

$

$

$

!

!

!

x

y

x

yz

xz

xy

x

y

x

E E E

E E

E

E

E

E

(

)

********

+

,

--------

"

% %

%

'

'

'

(

)

*************

+

,

-------------

1 0 0 01 0 0 0

1 0 0 02 1 0 0

2 1 02 1

( )

( )

( )

//

/

/

yz

xz

xy

(

)

********

+

,

--------

(3-27)

De cette relation, il ressort qu'il existe également un coefficient de proportionnalitéentre les contraintes de cisaillement / et les déformations angulaires ; appeléesdistorsions ou glissements (;ij=2#ij). Ce coefficient est désigné par G et appelécoefficient d'élasticité transversale ou module de cisaillement :

G E"

'2 1( )$(3-28)

A partir d'un essai de compression hydrostatique, il est possible de déterminer lecoefficient de proportionnalité entre la contrainte isotrope ! appliquée et ladéformation élastique volumique de l'échantillon. Ce coefficient désigné par K estappelé module de compressibilité K tel que :

K E K VV

"%

"3 1 2( )

;$

!& (3-29)

Les coefficients d'élasticité définis précédemment peuvent s'exprimer en fonctiondes coefficients de Lamé 9 et / :

E = / 3 9 + 2 /9 + / $ =

92 (9 + /) G = / K =

E3 (1 - 2$) (3-30)

et inversement :

Page 147: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

86 Manuel de Mécanique des Roches

9 = E $

(1 + $) (1 - 2 $) / = G = E

2 (1 + $) (3-31)

ÉLASTICITÉ EN MILIEU ANISOTROPE

D'une manière générale, dans un repère quelconque orthonormé R, les relationsentre les taux de déformations et les contraintes peuvent s'écrire vectoriellementsous la forme:

# = A.! ( 3- 32)

avec : # vecteur des taux de déformation, ! vecteur des contraintes et A matriced’élasticité à 36 coefficients

La relation (3-32) constitue la loi de Hooke généralisée. On démontre par desconsidérations énergétiques que cette matrice est symétrique. Le nombre decoefficients indépendants est donc réduit à 21.

#

#

#

;

;

;

$ $ A A A

$ A A A

A A A

/

x

y

x

yz

xz

xy

x

yx

x

zx

x

x yz

yz

x xz

xz

x xy

xy

y

zy

y

y yz

yz

y xz

xz

y xy

xy

z

z yz

yz

z xz

xz

z xy

xy

yz

yz

E E E G G G

E E G G G

E G G G

G

(

)

********

+

,

--------

"

% %

%

1

1

1

1

, , ,

, , ,

, , ,

,, ,

,

xz

xz

yz xy

xy

xz

xz xy

xy

xy

x

y

x

yz

xz

xy

G G

G G

G

/

/

!

!

!

/

/

/1

1

(

)

****************

+

,

----------------

(

)

********

+

,

--------

(3-33)

où! Ex, Ey, Ez sont les modules de Young dans les directions x, y et z ;! Gyx, Gxz, Gxy sont les modules de cisaillement pour les plans respectivement

parallèles aux plans yOx, xOz et xOy ;! $yz, $zx, $zy, $xy, $xz, $yz sont les coefficients de Poisson.! Les coefficients de Poisson $ij correspondent au rapport de la déformation dans

la direction j (effet) et de la déformation dans la direction i dues à la contrainteagissant dans la direction i (cause). Les coefficients de Poisson $ij et $ji sont telsque $ij/Ei = $ji/Ej

! /xz,yz : ........ : /xz,xy sont appelés coefficients de Chentsov et sont tels que /ij,klcaractérise le cisaillement dans le plan parallèle à kl induit par la contraintetangentielle dans le plan parallèle à ij. Autrement dit,

/ik,jkGjk =

/jk,ikGik (3-34)

! Ayz,x ........ Axy,z sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de premierordre ; Ax,yz,........ Az,xy sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de

Page 148: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 87

second ordre. Le coefficient A ij,k caractérise l'étirement dans la directionparallèle à k induit par la contrainte de cisaillement agissant dans un planparallèle à celui défini par les indices ij. Le coefficient Ak,ij caractérise uncisaillement dans le plan défini par les indices ij sous l'influence d'unecontrainte normale agissant dans la direction k. Autrement dit :

Aij,kEk =

Ak,ijGij (3-35)

Rappelons que dans le cas général de l'anisotropie, il n’y a jamais concordance desdirections principales de contrainte et de déformation, contrairement au cas del'isotropie.

LE MILIEU ORTHOTROPE

Les milieux naturels présentent souvent une structure orientée planaire (présence deplans et orientation préférentielle des grains dans ces plans par exemple). Repéronsla matrice rocheuse suivant le repère orthonormé de structure noté S de la figure3-9, avec :

• S1 direction orthogonale aux plans ;

• S2 direction d'allongement des grains par exemple ;

• S3 de telle façon que le repère S = S1,S2,S3 soit direct.

Une approche très physique consiste à écrire la matrice d'élasticité [A] enintroduisant des coefficients (complaisances) entre cause (contrainte normale outangentielle) et effet (allongement et variation angulaire), au lieu de déduire lesrelations de la matrice de l’équation générale (3-33). Prenons le repère R identiqueau repère S pour définir les tenseurs de contrainte et déformation et par conséquentla matrice [A]. Dans ce repère particulier, les contraintes normales n'induisent quedes allongements (un cube se transforme en un parallélépipède rectangle), et lescisaillements ne provoquent aucun allongement. Le tableau 3-1 synthétise alors larelation entre cause et effet.

Tableau 3 - 1 : MATRICE D’ÉLASTICITE DANS LE REPÈRE S

Cause

Contrainte normale Contrainte tangentielle

S1 S2 S3 S2,S3 S3,S1 S1,S2

!11 !22 !33 /23 /31 /12

S1 #11 1/E1 -$21/E2 -$31/E3 0 0 0

S2 #22 -$12/E1 1/E2 -$32/E3 0 0 0

Allo

nge-

men

t

S3 #33 -$13/E1 -$23/E2 1/E3 0 0 0

S3,S2 ;32 0 0 0 1/G23 0 0

S3,S1 ;31 0 0 0 0 1/G31 0

S1,S2 ;12 0 0 0 0 0 1/ G12

Effe

t

Varia

tion

d’an

gle

Page 149: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

88 Manuel de Mécanique des Roches

La notation $ij postule que i est l'indice lié à la cause et j l'indice lié à l'effet. Du faitde la symétrie de la matrice, on doit avoir :

$ijEi

= $jiEj

(3-36)

Il y a donc 9 coefficients indépendants pour caractériser un matériau orthotrope.

On ne peut avoir concordance des directions principales en contrainte et endéformation que si elles sont confondues avec le repère structural S.

LE MILIEU ISOTROPE TRANSVERSE

Dans le cas particulier où les directions S2 et S3 sont interchangeables, il y aisotropie dans le plan (S2, S3).Dans ce cas, nous avons :

E2 = E3, $12 = $13, $23 =$32 et G13 = G12

La matrice d'élasticité s'écrit alors dans le repère structural :

[A] =

)****(

,----+

1/E1 -$21/E2 -$21/E2 0 0 0

-$12/E1 1/E2 -$23/E2 0 0 0

-$12/E1 -$23/E2 1/E2 0 0 0

0 0 0 1/G23 0 0

0 0 0 0 1/G12 0

0 0 0 0 0 1/G12

(3-37)

De plus nous avons :

$12E1

= $21E2

et G23 = E2

2(1 + $23) (3-38)

Il y a donc 5 coefficients indépendants E1, E2, $12 (ou $21), $23 et G12 appelésmodules principaux pour caractériser un matériau isotrope transverse.

Page 150: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Manuelde

Mécanique des Roches

Tome 1 : Fondements

par le Comité français de mécanique des roches

Coordonné par Françoise Homand et Pierre Duffaut

!"#$%" '() *+,$-" #. /.0-1).

Pierre BÉREST Pierre BÉRESTDaniel BILLAUX Pierre HABIBMarc BOULON Jean-Paul SARDAFrançois CORNET Gérard VOUILLEChristian DAVIDPierre DUFFAUTJean-Louis DURVILLESylvie GENTIERAlbert GIRAUDMehdi GHOREYCHIJean-Pierre HENRYFrançoise HOMANDDjimedo KONDOPierre LONDEFrédéric PELLETJack-Pierre PIGUETJean-Paul SARDA 2)"3(0.Jian-Fu SHAOMountaka SOULEY Pierre BÉREST

Les Presses de l’École des Mines

Paris, 2000

Page 151: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

© École des Mines de Paris, 199960, Boulevard Saint-Michel, 75272 Paris CEDEX 06 FRANCEemail : [email protected]://www.ensmp.fr/Presses

ISBN : 2-911762-23-1Dépôt légal : mai 2000Achevé d’imprimer en mai 2000 (Grou-Radenez, Paris)

Tous droits de reproduction, d’adaptation et d’exécution réservés pour tous les pays

Photo de couverture : versant rive gauche de la vallée du Verdon, immédiatement àl’aval du grand barrage voûte de Castillon (Alpes Maritimes). Les bancs calcairesinclinés sont affectés de failles et leur stabilité, compte tenu de la poussée de lavoûte, est assurée par des tirants précontraints depuis sa mise en service par EDF en1948. Il s’agit d’un problème typique de mécanique des roches, heureusement résoluavant la naissance de cette discipline (photo P. Duffaut, 1998).

Page 152: 130621544 Book Roches Mineraux[1]
Page 153: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

CHAPITRE 2 PHYSIQUE DES ROCHES

2.1 INTRODUCTIONLa physique des roches couvre, selon les auteurs, un domaine plus ou moins vaste. Ils’agit, dans ce manuel, de la description du milieu poreux (grains, pores et fissures)et de la quantification de ses principales propriétés physiques, à l’exclusion despropriétés mécaniques, traitées au chapitre 3. Une roche peut être définie comme unassemblage de minéraux ayant hérité de liaisons plus ou moins fortes au cours deson histoire géologique. La description d'une roche se fait sur un échantillon observéà la loupe et éventuellement au microscope optique polarisant ou électronique àbalayage. On décrit la texture, les minéraux présents, la taille des grains, les fissureset les altérations.

On présente ensuite les définitions et les méthodes d’étude de la porosité et de laperméabilité, dont l’incidence est grande sur les propriétés mécaniques, à sec ou enprésence de fluides. Les propriétés acoustiques sont considérées comme participantà la caractérisation des roches (l’ensemble est appelé en anglais index properties).On évoque les propriétés thermiques mais on laisse de côté les propriétésmagnétiques et électriques en dépit de certaines applications.

Les propriétés mesurées au laboratoire ne tiennent pas compte des discontinuitésapparaissant à l’échelle du massif, joints de stratification, diaclases, failles, qui sonttraitées aux chapitres 4 et 5. Lorsque ces discontinuités sont rares ou espacéesl’échantillon est représentatif du massif jusqu’à une large échelle, comme dans lescraies et les roches argileuses.

2.2 LES PRINCIPALES CATÉGORIES DE ROCHESLe nom d'une roche est donné en fonction de sa composition minéralogique, de satexture et de son mode de formation. Ce dernier conduit à distinguer trois grandesfamilles de roches : sédimentaires, métamorphiques et magmatiques.

TABLEAU 2-1 : PRINCIPALES ROCHES MAGMATIQUES

Avec quartz & feldspath Sans quartzFeldspath alcalin dominant Granite Syénite

Rhyolite TrachyteFeldspaths alcalins Monzogranite Monzonite+ plagioclases Rhyolite Trachyandésite

GranodioriteRhyodacite

Plagioclase seul Diorite quartzique Diorite(<50% Anorthite) Dacite AndésitePlagioclase seul Gabbro(>50% Anorthite) Basalteles noms en italique sont les équivalents volcaniques, ceux en gras sont les roches les plusrépandues

Page 154: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

32 Manuel de Mécanique des Roches

Les roches magmatiques, résultent de la solidification de magmas. Ceux quiparviennent directement à la surface forment les roches volcaniques ou effusives, leslaves, dans lesquelles on n'observe à l'œil nu que très peu de cristaux (en raison d’unrefroidissement rapide). Au contraire la solidification en profondeur donne lesroches plutoniques dont la lenteur du refroidissement permet la croissance descristaux, bien visibles donc à l’œil nu. Les minéraux sont essentiellement dessilicates : quartz, feldspaths alcalins et plagioclases, amphiboles, micas etc.. Lesclassifications font intervenir la texture de la roche (arrangement et taille descristaux) et la composition minéralogique (tableau 2-1). Associées aux rochesmétamorphiques, les roches magmatiques, dont les plus répandues sont les granites,forment l’essentiel de la croûte terrestre continentale, bien qu’elles soient souventcachées sous les roches sédimentaires.

Les roches sédimentaires sont formées à la surface de la terre sur le sol ou au fondde l'eau. Elles résultent de la désagrégation des roches préexistantes. Leur dépôt encouches initialement proches de l'horizontale résulte :! de l'action des agents d'érosion et de transport (eaux, crues, glaciers, vent) qui

déposent finalement des roches détritiques ;! de l'activité des êtres vivants (roches organogènes) ;! de phénomènes physico-chimiques (roches hydrochimiques et salines formées

essentiellement par précipitation).

Ces actions se combinent souvent et beaucoup de roches sédimentaires sont en faitd'origine mixte). Ces sédiments se consolident et se cimentent lorsqu'ils sont enfouisen profondeur (l’augmentation de la température et de la pression favorisant desréactions entre les minéraux et les fluides interstitiels). Les roches sédimentairescouvrent 75 % de la surface des continents et la quasi totalité des fonds océaniques,mais leur épaisseur est limitée.

Il y a de nombreuses classifications des roches sédimentaires fondées sur lacomposition chimique, la granularité des constituants ou le mode de formation quisont présentées dans les ouvrages de géologie. On se limite à citer les quatre groupesprincipaux : grès, calcaires, roches argileuses, évaporites, en laissant de côté lesroches carbonées (pétroles, charbons et lignites).

Les grès sont essentiellement constitués de grains de quartz (99,5 % pour le grès trèspur de Fontainebleau), ils contiennent souvent des feldspaths et des micas. Les grèsfeldspathiques sont appelés arkoses, les grès recristallisés quartzites, les grèscontenant des galets, poudingues ou conglomérats.

Les calcaires sont constitués essentiellement de carbonates de calcium (calcite ouaragonite) et de carbonate de magnésium (dolomie). Leur origine est organique, paraccumulation de débris d’organismes marins (craies), ou de précipitation chimique.

Les roches argileuses dont nous étudierons le comportement dans le chapitre 11,sont composées de minéraux argileux (illite, kaolinite, montmorillonite,interstratifiés), avec éventuellement des grains de petite dimension de quartz etcarbonates. Le terme argilite désigne les roches argileuses au sens large. Les shalessont des argilites litées.

Les évaporites sont des sels précipités lors de l'évaporation d'un liquide. A partir del'eau de mer les principaux minéraux précipités sont le gypse, l'anhydrite, le selgemme sous ses diverses formes dont la halite et la potasse (sylvinite).

Page 155: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 33

Il faut faire attention aux dénominations issues des cartes géologiques, dérivées del'appellation chronologique (étage) pour les roches sédimentaires. Il peut y avoir desvariations latérales de faciès qui font que le nom de la formation ne représente pas lalithologie de tout l'ensemble.

Les roches métamorphiques résultent de la transformation profonde à l'état solidede roches sédimentaires ou magmatiques préexistantes sous l'effet d'uneaugmentation de la température et/ou de la pression. Il y a recristallisation complètedes roches primitives. Les roches formées portent en général la trace de l'anisotropiedu tenseur des contraintes sous lequel elles ont cristallisé, ce qui peut se traduire parune schistosité ou une foliation accompagnée de linéation. Les roches les pluscommunes sont les schistes, les micaschistes et les gneiss, beaucoup plus massifs,mais dans lesquels les minéraux apparaissent nettement orientés. Les marbres et lesquartzites sont des roches massives entièrement recristallisées dans lesquellesl'orientation des minéraux (calcite ou quartz) n'est que rarement visible à l'œil nu.

La description d'une roche comprend les observations suivantes, effectuées à l'œil nuou de préférence à la loupe ou au microscope :! identification des minéraux présents,! taille, arrangement des minéraux et des vides associés (texture),! proportion des différents constituants,! vides et défauts : pores et fissures,! état d'altération des minéraux.

L'analyse minéralogique des constituants contribue à une meilleure description de laroche et permet d'approcher son altérabilité, son potentiel de gonflement, sonaptitude au « collage », éventuellement son abrasivité. L'analyse minéralogiques'effectue couramment par diffraction X, et dans le cas où des minéraux argileuxgonflants sont susceptibles d'être présents il est nécessaire de réaliser un traitementspécial. Cette analyse conduit à une identification des minéraux présents et aprèsinterprétation une composition quantitative peut être obtenue.

Pour les roches carbonatées argileuses, le dosage de la teneur en CaCO3 précisel'identification de la roche.

L’état d'altération de la roche se décrit précisément en s'attachant à identifier s'ils'agit d'une altération essentiellement météorique ou d'une altération d'origineprofonde, hydrothermale (souvent liée au volcanisme actuel ou plus ancien).

2.3 LE MILIEU POREUX

2.3.1 DÉFINITION ET MESURE

Dans les roches la matière minérale forme un squelette solide qui ne remplit pas toutl’espace, et dont le complément est appelé vide. La proportion de vide est appeléeporosité (du grec !"#"$, passage, ou détroit, entre les îles). La forme des vides, leurtaille, leur répartition, leurs liaisons ou au contraire l’isolement de certains, influentsur le comportement mécanique (chapitre 3) et sur les propriétés de couplage(chapitre 10).

La porosité n est, par définition, le rapport du volume des vides Vv au volume totalVt :

Page 156: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

34 Manuel de Mécanique des Roches

n VV

v

t" (2-1)

ou par rapport au volume du squelette Vs,

n V VV

VV

t s

t

s

t"

%" %1 (2-2)

Ces deux expressions peuvent différer car les techniques de mesures de Vv et Vs nesont pas équivalentes (tableau 2-2). Les méthodes 3 et 6 sont équivalentes, etpermettent de déterminer la porosité connectée. Les méthodes 4 et 6 (sur poudre)déterminent le volume des solides sans les vides non connectés et donnent donc laporosité totale, au sens strict.

TABLEAU 2-2 : PRINCIPALES MÉTHODES DE MESURE DE LA POROSITÉ

Volume total1. Mesure directe des dimensions de l'éprouvette2. Poussée d'Archimède dans le mercure, qui ne mouille pas la roche et ne pénètrepas dans les pores sans une forte pression

Volume des vides3. Absorption d'un fluide mouillant par saturation sous vide

Volume du solide4. Mesure au pycnomètre de la masse volumique du solide, après broyage5. Poussée d'Archimède dans un fluide mouillant saturant la roche, par différenceentre masse sèche et immergée6. Compressibilité des gaz parfaits, en réalisant une détente isotherme en reliant uneenceinte V1 (contenant l'échantillon) de volume V1 à la pression P1 à une enceintevide de volume V2 (pycnomètre à hélium). Après détente, la pression d'équilibre P2permet de calculer le volume d’une masse connue de poudre ou de roche.

La porosité est de l’ordre du centième pour certains marbres et quartzites, dudixième pour beaucoup de roches sédimentaires, elle peut atteindre 0,5 pourcertaines craies et tufs. La forme des vides est représentée en premièreapproximation par un coefficient de forme, rapport de la plus petite dimension à laplus grande. Ceci permet de distinguer les vides de type pore dont le coefficient deforme est entre 10-1 et 1) et les vides de type fissure, dont le coefficient de forme esttrès faible, entre 10-2 et 10-4, et dont l’épaisseur est négligeable. La part des poresdans le volume des vides est prépondérante, mais par contre les fissures contribuentpour l’essentiel à la surface spécifique (§ 2.5.3).

L'espace poreux peut être étudié de manière directe par observation au microscopeoptique ou électronique, éventuellement après remplissage par un produit colorant.Les techniques d’analyse d'images permettent ensuite une estimation quantitative dela porosité.

2.3.2 MASSES VOLUMIQUES ET TENEUR EN EAU

On appelle masse volumique d’un matériau la masse de l’unité de volume(dimension L-3M).

Page 157: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 35

On définit, suivant l’état du matériau, #s la masse volumique absolue ou massevolumique du solide, #h la masse volumique naturelle à réception du matériau, #dla masse volumique sèche, et #sat la masse volumique saturée (après saturation dela roche) :

#s = MV

s

s #d = M

Vs

t #h = M

Vh

t #sat = M

Vsat

t(2-3)

avec Ms la masse du matériau sec, Vs le volume des grains après broyage, Vt levolume de l'échantillon, Mh la masse naturelle, Msat la masse de l'échantillon saturé.#d varie en fonction de la porosité de la roche, par contre #s ne dépend que de laminéralogie (tableau 2-3). La teneur en eau w est le rapport de la masse d’eau, à lamasse du solide sec

w = MM

w

s(2-4)

Et on appelle degré de saturation Sr VV

w wn

w

v w

d

w

s

d

s" "

+"#

###

#

# (2-5)

2.3.3 ÉTUDE DES DIMENSIONS DES PORES AU POROSIMÈTRE A MERCURE

Le porosimètre à mercure permet d’étudier la répartition des vides de rayon d’entréecompris entre 200 $m et 0,0036 $m (voire 0,0018 $m). La mesure est fondée sur leséquilibres capillaires entre plusieurs fluides non miscibles dans un même espaceporeux. Un fluide mouillant s'étendra préférentiellement au contact du solide parrapport à un fluide non mouillant. Les équilibres fluide mouillant / fluide nonmouillant sont régis par les pressions capillaires à leurs interfaces :

P tR Rca s" %

&

'(

)

*+

1 11 2

(2-6)

avec R1 e t, R 2 : rayons de courbures principaux, tS : tension superficielle àl'interface entre les deux fluides et le signe ± suivant que les centres de courburesont ou non du même coté de l'interface.

On appelle drainage le déplacement d’un fluide mouillant, par un fluide nonmouillant sous l'effet d'une pression qui contrebalance les forces capillaires. Onappelle imbibition l’augmentation de la saturation en fluide mouillant, à la suited’une chute de pression. Les courbes de pression capillaire sont obtenues par unesuite de drainages et d'imbibitions en augmentant ou diminuant les pressions quis'opposent aux pressions capillaires. La figure 2-1 correspond au cas d’unéchantillon saturé initialement par de l’eau dans lequel on réalise un drainage parapplication d’une pression d’air dans une enceinte étanche. Il apparaît un état desaturation irréductible en fluide mouillant qui correspond à une configuration de laphase mouillante telle que les déplacements y sont devenus impossibles, car l’eauest sous forme d’amas reliés entre eux par des couches d’eau très minces dont laviscosité est très élevée.

Si on relâche la pression d’air, l’eau pénètre dans l’échantillon par imbibition, maisle phénomène n’est pas réversible, il y a un fort hystérésis. A pression capillairenulle, la saturation en eau est inférieure à 100 %. Une partie de l’air a été piégéependant le processus d’imbibition. Cette fraction d’air est appelée saturation

Page 158: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

36 Manuel de Mécanique des Roches

résiduelle en fluide non mouillant et sa valeur rapportée au volume total del’échantillon est la porosité piégée.

L'augmentation de pression capillaire en drainage conduit à des rayons de courburede l'interface de plus en plus petits. Par contre l’imbibition correspond à uneaugmentation progressive du rayon de courbure moyen de l’interface fluide

mouillant–fluide non mouillant, il seproduit alors des piégeages.

Figure 2-1 : Courbes de pressioncapillaire

Il n’y a pas de saturation irréductiblelorsque le fluide mouillant est un gazraréfié (vide) qui disparaît au fur et àmesure de la pénétration du fluidenon mouillant Le mercure est unfluide non mouillant alors que lavapeur de mercure est un fluidemouillant. On réalise ainsi undrainage par pénétration de mercuredans un échantillon dans lequel on afait préalablement le vide. Pourinterpréter la porosimétrie aumercure on assimile le milieu poreuxà un réseau de capillaires dont oncalcule le rayon moyen R par la

formule de Jurin :

P tRca

s"2 cos, (2-7)

avec Pca : pression capillaire ou pression de mercure tS: tension superficielle, , :angle de mouillabilité et R : rayon d’accès au pore. Il est clair d’après la figure 2-2que le rayon calculé par la formule de Jurin est un rayon d’accès et non le rayon desélargissements.

Les paramètres recueillis par le porosimètre à mercure permettent de représenter surun diagramme le volume de mercure injecté en fonction du rayon d'accès des poreset fissures envahis. Le modèle du réseau poreux est constitué de pores (sphériques)reliés entre eux par des étranglements capillaires. Ce sont les rayons d'accès qui sontdéterminés.

R1r

R2

2$cos,R1

2$cos,r

2$cos,r

- P < P .MERCUREVIDE

Figure 2-2 : Passage du mercure dans un réseau capillaire

0 20 40 60 80 100

Drainageinitial

Drainagefinal

Imbibition

p accpression d'accès

Satu

ratio

n ré

sidue

lle

Satu

ratio

n irr

éduc

tible

Pca

Saturation en fluide mouillant (%)

Page 159: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 37

Le volume de mercure injecté fournit la porosité totale. La différence entrel'injection et le retrait (figure 2-3) donne une valeur du piégeage du mercure dans leréseau poreux. Cette valeur est une estimation par excès de la porosité piégée (np)car le retrait s'effectue jusqu'à la pression atmosphérique et ne permet pas deconnaître le volume poreux abandonné par le mercure entre la pressionatmosphérique et la pression effective de début d'injection (3.10-3 MPa).

00,001 0,01 0,1 1 10 100

Porosité (%)

R(µm)

1ère injection

2ème injection

nt

nl

np

1° et 2° retraits

Figure 2-3 : Courbes d’injection et de retraits

0,001

2

4

6

8

10

12

0,01 0,1 1 10 100

r (mm)

n(%) nt

np

nl

GUDMONTCalcaire oolithique

2

6

10

14

0,001 0,01 0,1 1 10 100

np

nl

n(%) EUVILLECalcaire à entroques

nt

r (mm)

4

8

12

Figure 2-4 : Exemples de spectres de porosité de calcaires

Si l'échantillon subit un second cycle d'injection, la porosité libre (n1) est mesuréeainsi que la valeur réelle de la porosité piégée (np), par différence entre la porositétotale (nt du 1er cycle d'injection) et la porosité libre (n1 du 2ème cycle d'injection).Cette différence entre la courbe de retrait et celle de la 2ème injection est dueessentiellement à une variation de la valeur de , en injection et en retrait, provoquéepar des phénomènes irréversibles.

La figure 2-4 présente des exemples de courbes porosimétriques obtenues sur deuxcalcaires. Le calcaire d’Euville est un calcaire à entroques (débris de Crinoïdes, del’ordre de 2 à 4 mm) cimentées de calcite. Le calcaire de Gudmont est un facièsoolithique (grains de 1 mm). La courbe de porosité totale du calcaire d’Euvilleindique deux familles de pores : une macroporosité dans les vides du ciment et unemicroporosité dans les entroques. La macroporosité dans le calcaire de Gudmont estabsente. Une microporosité se développe soit au sein des oolithes, soit dans lamatrice carbonatée.

Page 160: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

38 Manuel de Mécanique des Roches

2.4 CIRCULATION DES FLUIDES : LA PERMÉABILITÉLa perméabilité caractérise l’aptitude d’une roche (ou de tout autre milieu poreux) àlaisser circuler des fluides au sein dans son espace poreux.

2.4.1 DÉFINITION DE LA PERMÉABILITÉ

A l’échelle macroscopique, la loi qui décrit l’écoulement d’un fluide en milieuporeux est la loi de Darcy, mise en évidence par une expérience très simple danslaquelle Darcy a montré que le débit volumique Q à travers une colonne de sable delongueur L est proportionnel à la section S de la colonne et au gradient de chargehydraulique /h/L. La charge hydraulique h (ou hauteur piézomètrique) est fonctionde l’altitude z, de la pression du fluide P, de la densité du fluide # et de la gravité g.

QS

k hL

"/ avec h z P

g" +

#. (2-8)

Le facteur de proportionnalité k est appelé coefficient de perméabilité ouconductivité hydraulique. La dimension de k est celle d’une vitesse. La loi deDarcy exprime la proportionnalité entre un flux hydraulique et la force motriceresponsable de ce flux (gradient de hauteur piézométrique ).Un inconvénient majeurde la loi de Darcy sous la forme précédente est que le coefficient de perméabilité kdépend non seulement des propriétés du matériau, mais aussi des propriétés dufluide (notamment sa viscosité $). Une formulation plus générale de la loi de Darcyest préférable :

QS

k PL

"$/ (2-9)

Le paramètre k est la perméabilité intrinsèque du milieu poreux traversé. Laperméabilité est homogène à une surface : son unité SI est donc le m2. En pratique,on utilise souvent comme unité le Darcy , avec l’équivalence 1 Darcy =0,987 10 12 m2. Par comparaison on voit que k = (#g/$)k et donc pour de l'eau à20°C, on a la correspondance suivante 1 Darcy = 0,96 10-5 m/s.

Dans le cadre général de la mécanique, à partir de la combinaison de l'équationd'état, de celle de continuité et de celle de mouvement, on établit la relationfondamentale de l'hydrodynamique en milieu homogène et isotrope :

V = - k grad 0, et pour un milieu anisotrope V = - k . grad 0 (2- 10)

Expressions dans lesquelles V désigne le champ de vitesse du fluide, 0 le potentiel(chapitre 6), la conductivité hydraulique prenant une forme tensorielle dans le milieuanisotrope. Un exemple important de milieux poreux anisotropes est celui des rochesréservoirs où la compaction se fait préférentiellement selon la direction verticale enraison des forces de gravité : la perméabilité verticale kv est alors souvent plus faibleque la perméabilité horizontale kh, avec une anisotropie marquée (le rapport kh/kvpeut aller jusqu’à 100).

La loi de Darcy ne s’applique, en toute rigueur, que pour un régime d’écoulementlaminaire, par opposition au régime d’écoulement turbulent. Lorsque la vitesse dufluide devient grande, les forces d’inertie ne sont plus négligeables devant les forcesde viscosité. Le domaine de validité de la loi de Darcy correspond aux nombres deReynolds faibles. Cette condition est généralement remplie pour les circulations defluides dans le massif rocheux, mais pas forcément dans les mesures en laboratoire.

Page 161: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 39

2.4.2 MÉTHODES DE MESURE DE LA PERMÉABILITÉ

Selon l’ordre de grandeur des perméabilités à mesurer, différentes techniquespeuvent être utilisées en laboratoire. Pour les fortes perméabilités, les techniquesbasées sur l’établissement d’un écoulement à travers un volume représentatif deroche sont préférables : méthodes à charge constante, à charge variable. Dans ce casla perméabilité est déduite par application directe de la loi de Darcy. Pour lesperméabilités plus faibles, une méthode transitoire est couramment utilisée : elleconsiste à estimer la perméabilité à partir de l’analyse de la diffusion d’un incrément(pulse) de pression dans un échantillon de roche, en système fermé.

Figure 2-5 : Exemple de dispositifexpérimental de mesure de laperméabilité

Le perméamètre de type I.F.P.présenté sur la figure 2-5 permet deréaliser des essais de perméabilité enconditions de charge constante. Dansle cas de l’injection de liquide, lecalcul de perméabilité se fait avec lesnotations suivantes, S : surfaced'injection (m2), Pg : pressiond'injection (Pa), Pf : pression en sortie(Pa), L : longueur de l'éprouvette, Q :

débit mesuré (m3/s), µ : viscosité du fluide (Pa.s), (1 Pa.s = 1 Poiseuille = 10poises), par la formule :

k Q LP P Sg f

"%$

( )(2-11)

La perméabilité au gaz est avec les paramètres définis dans l’équation 2-11 et Patm,la pression atmosphérique (Pa) :

k Q LPP P S

atm

g f"

%

22 2$

( )(2-12)

2.4.3 VARIABILITÉ DE LA PERMÉABILITÉ DES ROCHES

La perméabilité des roches présente une très large gamme de valeurs : plus de 14ordres de grandeur séparent les roches les plus perméables des roches les moinsperméables. Pour fixer les idées, une perméabilité de 1 Darcy est une forteperméabilité, celle par exemple d’un bon aquifère ; dans le domaine pétrolier, laperméabilité des roches réservoirs intéressantes est supérieure à la centaine demillidarcy. A l’opposé, pour le stockage en profondeur de déchets radioactifs, onrecherche des perméabilités bien inférieures au microdarcy. Les roches étantsoumises in situ à des conditions (contraintes, température ...) qui ne sont pas cellesde la surface, il est intéressant de connaître quelle est l’évolution de la perméabilitéen profondeur. Celle-ci est en grande partie tributaire de la manière dont lespropriétés géométriques des réseaux de pores ou de fissures (volume accessible aufluide, connectivité) sont modifiées en réponse à l’application de contraintes ou detempératures élevées. Pour ce qui est de l’effet des contraintes, il faut séparer l’effetde la contrainte moyenne de celui du déviateur.

Débimètre

Pfsortie

Pginjection Eprouvette

Enveloppe encaoutchoucConfinement

Page 162: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

40 Manuel de Mécanique des Roches

Dans un premier temps, examinons comment varie la perméabilité d’une rochesoumise à une pression moyenne croissante. Pour des roches saturées, la contraintemoyenne à prendre en considération est la contrainte effective $' = $ – bp. Danscette relation, $ est la contrainte moyenne totale égale à la trace du tenseur descontraintes, p est la pression du fluide présent dans l’espace poreux ou pression depore, et b est le coefficient de Biot, compris entre 0 et 1 (chapitre 10). Cette loiconstitue une manière synthétique de prendre en compte les rôles antagonistes jouéspar l'état de contrainte et la pression de pore sur la déformation du milieu poreux.Une augmentation de contrainte effective a toujours pour effet de rendre le milieuplus compact, et par conséquent de réduire le volume accessible au fluide : il enrésulte une diminution de perméabilité. La chute de perméabilité observée dépendfortement de la géométrie des pores : elle prend souvent la forme d’une loiexponentielle du type :

k = k0 exp[-1$’] (2-13)

L’amplitude de la décroissance est fixée par le paramètre 1 qui dépend de la naturedes roches : d’une manière générale, plus le facteur de forme des pores est faible,plus le milieu poreux est déformable, et plus la perméabilité sera sensible à desvariations de pression.

L’application d’un déviateur de contrainte provoque dans la roche des déformationsimportantes : lorsque la contrainte est suffisamment basse, la déformation resteélastique, mais lorsque la contrainte déviatorique devient grande, la déformationdevient inélastique, avec développement de fissures qui vont affecter profondémentle comportement du matériau. En laboratoire la configuration classiquement utiliséepour mettre en évidence le rôle des contraintes déviatoriques est celle de l’essaitriaxial. L'évolution de la perméabilité suit celle des microstructures : décroissancelorsque la déformation de la roche est contractante, augmentation lorsque ladéformation devient dilatante. Cette hypothèse, somme toute logique, a été vérifiéedans des roches à faible porosité mais peut être mise en défaut.

2.4.4 LIEN ENTRE PERMÉABILITÉ ET MICROSTRUCTURE

La perméabilité d’une roche est entièrement déterminée par la géométrie de sonréseau de porosité. La relation entre les deux est cependant loin d’être évidente, etnombre de modèles ont été développés pour estimer la perméabilité à partir despropriétés microstructurales des roches. Dans tous ces modèles, le problème cléconsiste à déterminer une longueur caractéristique pour les processus de transport defluide : en effet une telle échelle de longueur doit exister, puisque la perméabilité,d’un point de vue dimensionnel, est homogène à [L2]. Comment à partir de laconnaissance (même approximative) des propriétés géométriques du milieu poreuxpeut-on prédire la valeur de la perméabilité de ce milieu ? Quels sont les paramètresmicrostructuraux qui contrôlent les propriétés de transport dans les roches ? Laphysique des roches essaie de répondre à ces questions depuis très longtemps déjà.Le problème posé consiste à établir une passerelle entre l’échelle microscopique(celle des pores et des grains) et l’échelle macroscopique (celle à laquelle est définiela perméabilité).

Dans le modèle de milieu équivalent, la longueur caractéristique est définie à partirde grandeurs macroscopiques très simples, à savoir le volume de porosité Vv etl’aire Ap de l’interface pore-solide. La relation classique de Kozeny-Carman donnel’expression de la perméabilité dans l’approche du milieu équivalent :

Page 163: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 41

k R nth"2

22(2-14)

où le paramètre Rh = Vv /Ap, appelé rayon hydraulique, constitue la longueurcaractéristique recherchée. Les autres paramètres sont la porosité n et la tortuosité t,alors que 2 est un facteur qui dépend de la géométrie des pores, et qui présente unevariabilité très faible (approximativement entre 2 et 3). Le point faible du modèleréside dans le paramètre «tortuosité», qui quantifie l’accroissement de la distanceparcourue par le fluide, difficile à estimer en raison de la complexité topologique dumilieu poreux.

Une approche différente est possible. Au lieu d’utiliser des grandeursmacroscopiques, on peut s’attacher à décrire les processus d’écoulement à l’échelledes composants élémentaires (les pores, les fissures), puis par différentes techniquesremonter à la propriété macroscopique, la perméabilité. A l’échelle locale,l’écoulement dans les pores et les fissures considérés comme des entités propres estrégi par la loi de Poiseuille. Ces pores et ces fissures interagissent entre eux du faitde l’existence de connexions multiples dans les milieux poreux. L’informationessentielle à fournir concerne la distribution statistique des propriétésdimensionnelles des pores ou des fissures, représentés par des canaux d’écoulementindividuels. On peut considérer une distribution aléatoire de tubes ou s’attacher àdécrire de manière plus détaillée la topologie complexe des milieux poreux par uneapproche de type réseau.

2.5 PROPRIÉTÉS ACOUSTIQUESLa caractérisation des matériaux rocheux par des méthodes ultrasoniques estcouramment utilisée. L'étude de la propagation des ondes de compression et decisaillement dans un matériau à l'état sec et saturé permet d'évaluer les propriétésphysiques du matériau telles que sa porosité, son état de fissuration et ses propriétésélastiques (module de Young, coefficient de Poisson). L'analyse des signauxultrasoniques en terme d'atténuation a été surtout exploitée en physique des rochespétrolière. Ce paramètre est particulièrement intéressant pour l'analyse del'anisotropie d'un matériau, soit structurale, soit liée à une microfissuration.

2.5.1 PROPAGATION DES ONDES DANS UN MILIEU ÉLASTIQUE

La physique des roches classique s'intéresse à la propagation des ondes de volume Pet S, caractérisées par leurs vitesses (premières et secondes, d’après l’ordre de leurréception) et leur atténuation. Les équations de propagation des ondes dans unmilieu élastique et viscoélastique sont indiquées en annexe du présent chapitre. Pourune onde P, le mouvement vibratoire a lieu suivant la direction de propagation etaffecte le volume de la roche. Vp est donc la vitesse d'une onde de compression (ouonde longitudinale).Vs est la vitesse d'une onde de cisai l lement (ou ondetransversale), dont le mouvement vibratoire a lieu dans un plan normal à la directionde propagation. Elles sont plus lentes que les ondes P et ne se propagent pas dansl'eau.

Vp et Vs étant exprimées en fonction des coefficients de Lamé, la mesure du tempsde propagation d'une onde ultrasonique dans une roche permet de remonter auxmodules élastiques. Dans le cas d'un matériau isotrope, le calcul du coefficient dePoisson 3 et du module de Young E est le suivant :

Page 164: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

42 Manuel de Mécanique des Roches

3 = 1/2 - (Vs / Vp)2

1 - (Vs / Vp)2 (2-15)

E = # Vp2 (1+3) (1-23)

(1-3) (2-16)

Il est donc indispensable de mesurer Vp et Vs pour calculer E et 3 ; trop souvent Vpest seul mesuré, E est déduit en supposant 3 = 0,25.

L’état de saturation du matériau influe sur l'évolution de ses propriétés ultrasoniqueset a fait l'objet de nombreux travaux dont une grande partie concerne des calculsprédictifs de vitesses ultrasoniques sur un matériau multiphasique et traitegénéralement d'un état totalement saturé par rapport à un état sec. La propagationd'une onde purement élastique dans un milieu biphasique solide/liquide (rochetotalement saturée) a été décrite par Biot qui a introduit les notions de couplageinertiel fluide-solide et de déplacements relatifs de ces deux phases. Les relationsentre saturation partielle et propriétés ultrasoniques sont plus complexes ; leuranalyse nécessite des suivis expérimentaux très rigoureux et fait intervenir, d'unpoint de vue théorique, des mécanismes à l'échelle du pore (écoulements locaux) etdes notions de distribution des fluides dans les réseaux poreux.

Figure 2-6 : Mesure des vitesses desondes ultrasonores

Les vitesses des ondes sontmesurées à l’aide d’un dispositifdont un exemple est représenté surla figure 2-6. L’éprouvette a deuxfaces planes et parallèles, un produitcouplant est placé entre l’éprouvetteet les céramiques piézoélectriques Pet S. Les céramiques ondes Sdoivent conduire à un mouvementperpendiculaire à la direction depropagation, émetteur et récepteursont donc polarisés. Le signal estvisualisé sur l’oscilloscope et stocké

pour un traitement en terme d’atténuation. Les vitesses des ondes P et S sont ensuitecalculées de la façon suivante :

Vp ou Vs (m/s) = Lt

(2-17)

avec : L (en mètres), longueur de l'échantillon ; t (en secondes), temps de parcours lusur l'oscilloscope.

2.5.2 ATTÉNUATION

Le signal ultrasonique qui se propage dans une roche s'atténue au cours de son trajet.Cette atténuation est due à des interactions entre l'onde et le milieu de propagation.Il faut distinguer l'atténuation intrinsèque, liée à l'anélasticité de l'ensemble matricesolide-fluide saturant, de l'atténuation extrinsèque due à la diffraction de l'onde parréflexion (interfaces, géométrie de l’éprouvette). L'atténuation se caractérise par une

micro - ordinateur

oscilloscopegénérateur

émetteur

récepteur

Page 165: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 43

diminution de l'amplitude de l'onde et une perte préférentielle de ses hautesfréquences. L'atténuation est quantifiée par un coefficient d'atténuation 4 (voirl'annexe) ou par Q, appelé facteur de qualité qui est inversement proportionnel aucoefficient d'atténuation. Le calcul de l’atténuation est généralement réalisé à l’aided’une méthode dite du rapport des spectres. L’atténuation peut être extrinsèque parperte d’énergie due à la diffraction de l’onde sur les discontinuités ou obstacles dansle matériau (grains, pores, microfissures) et peut être importante lorsque la longueurd'onde devient comparable à l'échelle de l'hétérogénéité. Les mécanismes avancéspour expliquer le phénomène d'atténuation intrinsèque sont très divers et complexes.De plus, ces mécanismes seraient différents selon l'état de saturation de la rocheconsidérée. On consultera la littérature spécialisée indiquée en fin de chapitre pourtout ce qui concerne l'atténuation.

2.5.3 VITESSES ET PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DES ROCHES

La lithologie est un facteur déterminant en ce qui concerne les vitesses Vp et Vsdans la mesure où les caractéristiques élastiques des minéraux constitutifs sontdifférentes (Tableau 2-3 ). Les valeurs indiquées dans ce tableau sont des moyennescalculées à partir des vitesses des ondes suivant différentes directions mesurées surdes cristaux non altérés.

Le rapport Vp/Vs est intéressant à utiliser et permet de différencier nettement grès etcalcaires, car le coefficient de Poisson de la calcite est très différent de celui duquartz.

TABLEAU 2-3 : PROPRIÉTÉS PHYSIQUES ET MÉCANIQUES DES PRINCIPAUX MINÉRAUX

Minéraux #s (g/cm3) E (GPa) 3 Vp (m/s)

Quartz 2,65 96,4 0,08 6 050Olivine 3,2-3,6 216 0,24 8 770Augite 3,2-3,6 14 3 0,24 7 330Amphibole 2,9-3,2 110 0,29 6 800Muscovite 2,7-3 80 0,25 5 880Biotite 2,8-3,1 67 0,30 5 360Orthose 2,5-2,6 63 0,29 5 680Plagioclase 2,6-2,8 77 0,29 6 220Magnétite 4,4-5,2 218 0,19 7 410Calcite 2,7 84 0,28 6 320Dolomie 2,8-3,1 7 900Halite 2,1-2,6 36 4 320Gypse 2,3-2,4 5 200

D’après Belikov (1967)

La vitesse des ondes P varie à lithologie constante avec la porosité de pores, maisdiminue plus fortement encore avec la porosité de fissures. Pour estimer la partrelative de porosité de pore ou de fissure dans des roches de lithologie différente onutilise l’indice de continuité IC défini comme le rapport de la vitesse des ondes Pmesurée dans l’échantillon à la vitesse des ondes calculée Vp* à partir de lacomposition minéralogique. Vp* est la moyenne arithmétique pondérée des vitesses

Page 166: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

44 Manuel de Mécanique des Roches

des ondes Vi, de chaque minéral constitutif de la roche, les coefficients depondération étant les teneurs ci, de la roche en chaque minéral :

IC (%) = 100 VpVp* avec Vp* = 5 ci x V i (2-18)

Ce rapport des vitesses varie comme le rapport K/K* des compressibilités K globale(bulk modulus) de la roche et K* de la matrice (les minéraux constitutifs de laroche) en fonction de la porosité de pores np et de la porosité de fissures nf , mais lasensibilité à la présence de fissures est beaucoup plus marquée. On peut écrire :

IC = 100(1 –A np - B nf) (2-19)

avec nf + np = ntotale et nf << np

Dans le cas des roches exclusivement poreuses (ntotale = np ), il y a une relationexpérimentale entre l’indice de continuité IC = ICp et la porosité n :

ICp = 100 (1 – 1,4 np) (2-20)

Dans le cas le plus courant d’une roche poreuse et fissurée, la porosité totale n totaleest égale approximativement à np, ce qui permet d’évaluer ce que serait la valeur del’indice de continuité ICp du milieu poreux correspondant à la roche si elle n’étaitaffectée que de pores :

ICp = 100 (1– 1,4 n) (2-21)

La différence entre la valeur de l’indice de continuité mesuré IC et cette valeur ICpcorrespond à l’existence des fissures; elle est exprimée de manière relative par leDegré de Fissuration DF :

DF ICICp

" %1 (2-22)

0102030405060708090

100

0 10 20 30 40 50

Indice de continuité IC (%)

Porosité (%)

0%

25%

50%

75%

Figure 2-7 : Détermination du degré de fissuration avec l'indice de continuité

Donc toute roche, quelle que soit sa porosité n, peut être affectée d’un degré defissuration variant entre 0 et 100 %, avec DF exprimé en pour cent. Dans le plan(IC-Porosité), les droites d’égale valeur du degré de fissuration forment un faisceau

Page 167: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 45

(figure 2-7) situées sous la droite des milieux non fissurés. On peut donc, à partir dela mesure de la porosité, de la vitesse des ondes Vp, et du calcul de l’indice decontinuité IC, estimer la densité de fissuration d’une roche.

La vitesse des ondes P est sensible à l'état de saturation des roches. Le modèleclassique explicatif est celui de Wyllie donnant la vitesse de propagation des ondes àtravers un milieu biphasique (phase 1 et 2) :

1 11 2V

nV

nV

" +% (2-23)

où V1, V2 sont les vitesses de propagation dans les milieux 1 et 2, n et (1-n) sont lesproportions volumiques des milieux 1 et 2.

Cette approche donne des résultats satisfaisants pour des milieux consolidés saturés(calcaires et grès) ; dans ce cas, le milieu 1 est le fluide, le milieu 2 la matrice, et n laporosité.

Une autre formulation de la propagation d'une onde dans un milieu biphasique a étéproposée par Wyllie en tenant compte du module de compressibilité K et ducoefficient de Poisson 3 . La relation reliant la vitesse V à K, 3 et à la massevolumique # est de la forme :

K Vq

"+# 2

1(2-24)

où q est un paramètre déduit des relations d’équivalence entre modules élastiques,fonction du coefficient de Poisson 3'

De nombreux auteurs ont proposé des formules de Wyllie modifiées selon le volumede porosité présent. En réalité le milieu n’est pas toujours saturé en liquide et il peutdonc contenir de l’air et de l’eau ou plusieurs liquides. Les vitesses varient alorsselon la nature du liquide et son degré de saturation. Si on s’intéresse au cas d’uneroche partiellement saturée en eau les variations de Vp et Vs avec le degré desaturation Sr sont relativement complexes car plusieurs effets se superposent. Si oncompare les vitesses Vp et Vs en milieu sec et saturé, on observe Vp sec < Vp saturéet une petite tendance inverse pour Vs. Le module de compressibilité est plus élevéen milieu saturé alors que le module de cisaillement reste constant et la densitéaugmente avec la saturation.

Figure 2-8 : Influence de la porositéde fissure sur l'évolution des vitessesdes ondes P à l'état sec et saturé pourdifférents calcaires

L’effet de module l’emporte dans lecas des ondes P et Vp augmente. Pourles ondes S l’effet de densité est leseul et Vs diminue. L’augmentation dela vitesse des ondes P dépend de lastructure du réseau poreux et de lavaleur de la porosité de fissure (figure2-8, pour différents calcaires). Desexemples d’évolution des vitesses enfonction du degré de saturation sont

1

1,05

1,1

1,15

0 0,05 0,1 0,15 0,2

Vpsat/Vpsec

nf (%)Gu1

D1Gu3J5J2

J1

Gu2D2

Le

Eu

Page 168: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

46 Manuel de Mécanique des Roches

présentés sur la figure 2-9. Les vitesses décroissent globalement entre l'état sec et undegré de saturation intermédiaire (Vp minimale) puis augmentent jusqu'à une valeurmaximale correspondant à la saturation totale. La saturation partielle de l'échantillonprovoque d'abord une augmentation de la densité donc une diminution de la vitesse.Par contre, quand les pores sont presque totalement saturés, ils sont plus difficiles àcomprimer d'où une augmentation de la rigidité et de la vitesse. La compétition entreeffet de module et de densité est fortement dépendante du type de réseau poreux,puisque les variations sont différentes pour différents calcaires.

Les roches bien que contenant des minéraux fortement anisotropes sont souventisotropes ou faiblement anisotropes. Si une anisotropie apparaît c’est qu’il existepeut-être une orientation préférentielle des minéraux, mais surtout une orientation dela microfissuration affectant l’échantillon. Les mesures de vitesses des ondespermettent de mettre en évidence l’anisotropie de structure ou de fissuration et dedécider en fonction de son importance d’en tenir compte ou non dans un programmed’essais mécaniques (chapitre 3). Considérons une symétrie hexagonale comme surla figure 2-10. La vitesse Vp sera la même suivant les directions principales 2 et 3 duplan de base, mais elle sera plus faible dans la direction 1 affectée par les plansd’anisotropie. Les ondes S sont émises et reçues par des céramiques polarisées demanière à ce que le déplacement des particules se fasse perpendiculairement à ladirection de propagation. La vitesse de l’onde S suivant la direction 1 sera la mêmedans toutes les directions, la vibration se faisant dans un plan homogène. Par contresuivant les directions 2 ou 3 le plan d’anisotropie est parallèle à la direction depropagation de l’onde.

Figure 2-9 : Évolution de la vitessedes ondes P avec le degré desaturation dans différents calcaires(Sw=Sr)

Lorsque plan d’anisotropie et plande polarisation de l’onde sontconfondus l’amplitude du signal etsa vitesse sont maximales (Vsmax) etlorsqu’ils sont perpendiculairesl’amplitude du signal et sa vitessesont minimales (Vsmin). On définitun indice de biréfringence IB qui estune caractéristique du degréd’anisotropie :

IB V VV

s s

s"

%max min

max(2-25)

Pour une direction intermédiaire le signal se décompose en une composantepolarisée selon le plan d’anisotropie, l’autre étant perpendiculaire et à la réceptionon aura deux signaux, dont l’un sera d’amplitude et de vitesse supérieure à l’autre.Selon la symétrie du matériau étudié on détermine les directions de propagation etde polarisation nécessaires à la détermination de tous les paramètres élastiques. Lesfigures 2-10 et 2-11 montrent les directions de mesure nécessaires pour calculer tousles paramètres de la matrice de raideur. Lorsque le système d’anisotropie estcomplètement inconnu on peut le déterminer en multipliant les directions de mesure,puis calculer les modules élastiques correspondants.

Jaumont

Euville

Dugny 2

Gudmont 1

2,5

3,5

4,5

5,5

0 20 40 60 80 100

Vp x 1000 (m/s)

Sw (%)

Page 169: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 47

Vp1

Vp3

Vp45

Vs21Vs23

3

1

2

Vp12

Vs23

Vp23Vp3

Vp13

Vs21

Vp2

3

1

2

Vp1Vs13

Figure 2-10 : Directions depropagation et correspondances avecles éléments Cij de la matrice deraideur (symétrie hexagonale ouisotrope transverse)

Figure 2-11 : Directions depropagation et correspondances avecles éléments Cij de la matrice deraideur (symétrie orthotrope)

2.6 PROPRIÉTÉS THERMIQUES

2.6.1 CARACTÉRISTIQUES THERMIQUES

La loi de Fourier et l'équation de la chaleur (Annexe de ce chapitre) font intervenirdes propriétés thermiques des roches : la conductivité thermique 6 et la chaleurspécifique C. La diffusivité thermique est définie comme le rapport :

aC

"6#

(2-26)

La mesure de la diffusivité a, de la masse volumique # et de la chaleur spécifique Cpermet la détermination de la conductivité thermique (qui peut aussi être mesuréedirectement).

La conductivité est un scalaire pour un corps thermiquement isotrope. Pour un corpsanisotrope la conductivité thermique est représentée par un tenseur d'ordre 2symétrique, soit une matrice 3x3. Un milieu isotrope transverse comme celui de lafigure 2–10 est caractérisé par deux valeurs de conductivité thermique (ou dediffusivité thermique) 611, et 622 = 633.

Les roches dans la nature sont au moins partiellement saturées en fluides et laconduction de la chaleur peut être couplée à d'autres types de transferts tels que parexemple le transfert de masse.

Les mécanismes de transfert dans les milieux poreux sont fortement influencés parla configuration des pores et des minéraux. Le transfert de masse se produituniquement à travers la structure continue des pores connectés, tandis que letransfert de chaleur peut impliquer la phase solide et les pores. Si l'on assimile lessolides poreux à des matériaux composites à phase matricielle (contenantéventuellement des pores isolés) et à phase poreuse en réseau, on constate que lestransferts de chaleur et de masse sont complémentaires. Le transfert de masses'effectue uniquement par le réseau de pores, le transfert de chaleur se produitessentiellement dans la phase minérale. Par conséquent, les variations en porositéauront tendance à influencer les deux processus en sens inverse. L'étude du couplagechaleur - masse fait l'objet de nombreux travaux à consulter dans la littérature

Page 170: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

48 Manuel de Mécanique des Roches

spécialisée. Les techniques de mesure de la conductivité thermique s'effectuent enrégime permanent (plaque chaude gardée, fil chaud) ou en régime transitoire (flash).La mesure en transitoire donne la diffusivité et il est nécessaire de déterminer parmicrocalorimétrie la chaleur spécifique pour calculer la conductivité thermique.

2.6.2 PARAMÈTRES INTERVENANT SUR LES PROPRIÉTÉS THERMIQUES

Les principaux facteurs qui influencent les propriétés thermiques des roches sont :! la variation de composition minérale et chimique ;! la structure ;! la température et les contraintes ;! la porosité et la teneur en fluide.

Les roches sont formées de minéraux ayant des propriétés thermiques qui varientaussi bien avec la température qu'avec la direction du flux de chaleur. Le quartz a laconductivité moyenne la plus élevée (6moy = 7,7 W/m/K). La conductivitéthermique d'une roche dépend largement du minéral principal. Elle augmente avec lamasse volumique. Le tableau 2-4 donne les conductivités thermiques de quelquesroches à l'état sec.

TABLEAU 2-4 : VALEURS DE CONDUCTIVITÉ THERMIQUE DES ROCHES

Roches Origine Masse Chaleur ConductivitéVolumique spécifique thermiquekg/m3 J/kg.K W/m.K

Grès Vosges 2 650 2,7Granite Limousin 2 600 700 2,8Ardoise Angers 2 800 740 1,2 & 4,5Argilite Tournemire 2 340 815 0,7 & 2Marne Alsace 2 300 826 1,04 & 1,4Argilite Aisne 2 220 845 0,75 & 1,4Calcaire Euville 2 310 846 3,5Sel 2160 870 6

Les deux valeurs de conductivité sont suivant les directions principales d'anisotropie

La plage de 1 à 6 W/m/K de la conductivité est relativement limitée alors que laperméabilité varie de 7 à 8 ordres de grandeurs. L'anisotropie des minéraux et desstructures des roches influence la conductivité thermique. La conductivité thermiqueest forte suivant les plans d'anisotropie (directions 2 et 3 figure 2-10) ; elle est plusfaible selon la direction perpendiculaire (direction 1 figure 2-10).

La conductivité thermique d'une roche, à l'état sec, diminue lorsque la températureaugmente. L'anisotropie joue un rôle car la diminution est plus importante dans ladirection perpendiculaire à la schistosité que dans la direction parallèle (figure 2-12).Pour les formations sédimentaires, à l'échelle du massif, la conductivité thermiquedécroît lorsque la température augmente : la conductivité thermique de la matrice estune fonction décroissante de la température, mais celle du fluide augmentelégèrement avec la température et la combinaison de ces deux effets conduit à unedécroissance significative de la conductivité thermique.

Page 171: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 49

Les contraintes isotropes tendent à refermer les défauts de type fissure et laconductivité thermique augmente légèrement. En général, la présence d'eau dansun matériau poreux augmente la conductivité thermique au sein de ce dernier (figure2-13). La conductivité thermique, à minéralogie identique décroît avecl'augmentation de la porosité.

0

1

2

3

4

5

6

0 50 100 150 200 250 300

Direction 2 ou 3

Direction 1

T°C

6 (W/m/K)

0,7

0,9

1,1

1,3

1,5

1,7

1,9

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1

Sr

6 (W/m/K)Direction 2 ou 3

Direction 1

Figure 2-12 : Conductivité thermiquede schistes ardoisiers en fonction de latempérature et de l'anisotropie

Figure 2-13 : Conductivité thermiqued'une argilite en fonction du degré desaturation et de l'anisotropie

2.6.3 DILATATION THERMIQUE

Un solide homogène et isotrope, libre de toute liaison, soumis à une variationuniforme de température T subit une déformation isotrope proportionnelle à T.L’effet de la température se traduit par une dilatation ou une contraction. Si l est ladistance séparant deux points du solide, après échauffement (ou refroidissement),cette distance subit une variation relative de longueur égale à

/ll

T" 4 (2-27)

avec 4, coefficient de dilatation linéaire du solide. En d’autres termes la variationuniforme de température détermine sur une roche homogène isotrope et libre detoute liaison, un tenseur de déformation uniforme :

7 4 8ij ijT" (2-28)

La variation de volume associée est /V/V = 7ij = 34T. La quantité 4v=34 estappelée coefficient de dilatation thermique volumique. Si la roche est anisotrope, ilest nécessaire de déterminer le coefficient de dilatation thermique suivant lesdirections principales d’anisotropie.

Le coefficient de dilatation linéaire des roches varie en fonction de la minéralogie, latexture, la porosité et la microfissuration. Il varie entre 5 10-6K-1 et 25 10-6K-1 pourla plupart des roches. Il est de 40 10-6K-1 pour le sel gemme. Pour l’ardoiseperpendiculairement à la schistosité il est de 24 10-6K-1 alors que suivant les deuxautres directions principales il n’est que de 17 10-6K-1.

Dès lors que la roche n’est plus libre de toute liaison et/ou que la variation detempérature n’est plus uniforme des contraintes d’origine thermique peuventapparaître dans la roche (chapitre 10).

Page 172: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

50 Manuel de Mécanique des Roches

SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUEBelikov B.P. - Plastic constants of rock-forming minerals and their effect on the elasticity of

rocks. IPST, pp. 118-124, 1967.

Berest P. & Weber Ph. (éd.) - La thermomécanique des roches. BRGM, 327 p., 1988.

Bernabe Y. - A wide range permeameter for use in rock physics. Int. J. Rock Mech. Min. Sci.,24, pp. 309-315, 1987.

Bourbie T., Coussy O. & Zinsner B. - Acoustique des milieux poreux, Technip, 339 p., 1986.

Cuxac P. - Propagation et atténuation des ondes ultrasoniques dans des roches fissurées etanisotropes. Thèse de Doctorat de l’INPL, Nancy, 175 p., 1991.

Cuxac P. & Homand F. - Propagation d’ondes ultrasonores dans les roches anisotropes.Revue Française de Géotechnique, 59, pp. 49-55, 1992.

David C. - Geometry of flow paths for fluid transport in rocks. J. Geophys. Res., 98, pp.12267-12278, 1993.

David C., Darot M. & Jeannette D. - Pore structures and transport properties of sandstone.Transport in Porous Media, 11, pp. 161-177, 1993.

David C., Wong T.-F., Zhu W. & Zhang J. - Laboratory measurement on compaction-inducedpermeability change in porous rocks: implications for the generation andmaintenance of pore pressure excess in the crust. Pageoph., 143, pp. 425-456, 1994.

Dullien F.A.L. - Porous media : fluid transport and pore structure, Academic Press, 1979.

Foucault A. & Raoult J.F. - Dictionnaire de géologie. Masson, 1988.

Goodman R.E. - Engineering geology, John Wiley, 1993.

Gueguen Y. & Palciauskas V.V. - Introduction à la Physique des Roches, Hermann, 1992.

Jacquin C. - Structure des réseaux poreux et propriétés pétrophysiques des roches. RevueFrançaise de Géotechnique, 49, pp. 25-42, 1989.

Monicard R. - Caractéristiques des roches réservoirs, analyse des carottes. Technip, 1975.

Remy J.M. - Influence de la structure du milieu poreux carbonaté sur les transferts d’eau etles changements de phase eau-glace. Thèse de Doctorat de l’INPL, Nancy,353 p., 1993.

ANNEXE : ÉQUATIONS DE PROPAGATION DES ONDES ET DE LATHERMIQUE

PROPAGATION DES ONDES

Dans le cadre de l'élasticité linéaire régie par la loi de Hooke, expression simple dela relation unissant la contrainte à la déformation, l'équation du mouvement d'uneonde dans un matériau isotrope s'écrit de la façon suivante :

(6 + 2$) grad div U - $ rot rot U = # 92U9t2 (2-29)

Page 173: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 51

avec #, masse volumique du matériau, 6 et $, coefficients de Lamé.

Soient 0 un potentiel scalaire et : un potentiel vecteur tel que U = grad 0 + rot :.Considérons d'abord un mouvement irrotationnel (rot U = 0 ; U = grad 0),l'équation du mouvement d'une onde devient :

(6 + 2$) ;2 0 = # 9209t2 (2-30)

;2 0 = 1

Vp2 9209t2 avec Vp "

+&

'(

)

*+

6 $#2

1 2/(2-31)

Si nous considérons maintenant un mouvement sans changement de volume tel que

U = rot: avec div rot: = 0, l'équation du mouvement de l'onde devient :

;2 : = 1

Vs2 92:9t2 avec Vs "

&

'(

)

*+

$#

1 2/(2-32)

Un modèle viscoélastique linéaire est communément utilisé pour rendre compte dela dissipation d'énergie durant le passage de l'onde, et donc de son atténuation.Dans ce cas, l'équation du mouvement est donnée par :

# 92U9t2 = M(<)

92U9x2 (2-33)

où M(<) est un module complexe qui découle de la loi de comportement (<pulsation).

Pour une onde plane, on démontre qu'une solution de l'équation du mouvement peuts'écrire sous la forme :

U = Uo e[i(<t - k*x)] (2-34)

Avec x, distance parcourue par l'onde et k* nombre d'onde complexe. La solutionprécédente peut également s'écrire :

U = Uo e- 4x e[i<(t - x/c)], avec k* = <c - i 4 (2-35)

où c et 4 sont des réels.

Le facteur e-4x exprime l'atténuation de l'onde et 4 est appelé coefficientd'atténuation. L'autre paramètre le plus souvent rencontré pour décrire l'atténuationest le facteur de qualité qui s'exprime par le rapport des parties réelle et imaginairedu module complexe M(<) issu du modèle viscoélastique linéaire :

Q MM

r

i" (2-36)

Ce paramètre peut être défini comme le rapport de l'énergie maximale emmagasinéependant un cycle Wmax sur l'énergie /W dissipée durant ce cycle :

Page 174: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

52 Manuel de Mécanique des Roches

Q WW

"!/

2 max (2-37)

Ces deux paramètres sont liés entre eux par la relation suivante :

Q fQV

"!

"!4

(2-38)

où f est la fréquence et V la vitesse de l'onde. Cette relation est simplifiée maisdonne une bonne estimation de la relation entre Q et 4.

LOI DE FOURIER ET ÉQUATION DE LA CHALEUR

Considérons un milieu continu, homogène, isotrope, thermiquement isolé et detempérature non uniforme. Dans ce milieu, on considère les isothermes du champ detempérature. Soit (S) la surface isotherme de température T, soit A un point de (S) etn le vecteur normal à (S) au point A et orienté dans le sens des températuresdécroissantes.

La loi de Fourier stipule que pour une petite surface 8s de dimension finie et tracéesur (S) autour de A, traversée dans la direction n durant le temps 8t par la quantitéde chaleur 8Q, on pose a priori :

8Q = - 6 8s 9T9n8t (2-39)

où 9T9n8t (2-40)

désigne le gradient de température dans la direction normale. Expriméevectoriellement, la relation devient :

8 68 8Q s t" % gradT n. (2-41)

Cette loi de type phénoménologique est essentiellement locale. Le coefficient deproportionnalité 6 est un paramètre physique appelé conductivité thermique. Iltraduit la conductibilité du matériau, laquelle peut dépendre de la température, de lapression, de l'état mécanique, de la direction, etc.

La loi de Fourier s'exprime classiquement sous la forme :

q T" %6grad (2-42)

où q désigne le vecteur courant de chaleur (W m-2) et 6 le tenseur de conductivitéthermique (W/m/K) dont les coefficients 6ij sont les coefficients de conductivité

Considérons un milieu orthotrope c'est-à-dire un milieu pour lequel les coefficients6ij se réduisent à trois. Dans ce cas :

q Txi ii

i" %6

99

(2-43)

Dans le cas d'un milieu isotrope, 6 est un scalaire :

611 = 622 = 633 = 6 (2-44)

Page 175: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Physique des Roches 53

L'équation de la chaleur qui traduit le bilan de chaleur échangée s'exprime sous laforme (en négligeant la production interne de chaleur et le couplagethermomécanique) :

#99

C Tt

div" ;2T (2-45)

#C est la chaleur volumique du matériau.

En prenant en compte la loi de Fourier on obtient, dans le cas du milieu isotrope :

#99

69

9

9

9

9

9C T

tT

xT

xT

x" + +

&

'(

)

*+

2

12

2

22

2

32 (2-46)

Page 176: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

CHAPITRE 3 COMPORTEMENT MÉCANIQUE DES ROCHES

3.1 INTRODUCTIONLes propriétés mécaniques des roches se divisent en deux catégories :! les résistances à des sollicitations mécaniques : traction, compression uniaxiale

ou triaxiale, définissant des seuils ou critères de rupture ;! les déformabilités sous l'effet des sollicitations mécaniques : modules

instantanés ou différés.

Au delà de ces propriétés, qui s’expriment par des données chiffrées, on préféreraparler de comportement, un terme plus général. Le terme de « loi decomportement » désigne d'une manière générale l'expression mathématique de larelation entre les contraintes et l'histoire des déformations subies par l'échantillon.Dans ce chapitre, il ne sera fait référence qu’à des lois de comportementélémentaires, élasticité et plasticité, les lois « avancées » étant présentées dans lechapitre 8.

Le comportement et les propriétés mécaniques des roches sont étudiés aulaboratoire, à partir d'échantillons continus de dimensions centimétriques àdécimétriques. La représentativité d'échantillons de laboratoire, c'est-à-dire leuraptitude à représenter les propriétés du site dont ils sont extraits, se heurte àplusieurs types de difficultés :! présence de fractures : certains types de fractures, présentes sur le site, peuvent

ne pas être présentes dans l'échantillon prélevé, trop petit pour les contenir, etdonc échappent à l'analyse (c'est notamment le cas pour les discontinuitésmajeures - fractures régionales, failles... - qui ne sont évidemment passusceptibles de prélèvement). D'une manière générale, tout bloc extrait du site a,en quelque sorte, déjà subi une « sélection naturelle » interdisant la présence dediscontinuités importantes (qui conduiraient à une division du bloc en blocs pluspetits) ;

! hétérogénéité du massif : certains massifs sont hétérogènes, c'est-à-dire formésd'éléments de propriétés mécaniques différentes, par exemple alternance deschistes et de grès ;

! variabilité des propriétés mécaniques au sein du massif rocheux, même ausein d'une formation identifiée ; il convient alors d’utiliser la géostatistique pourdécrire et modéliser la nature de cette variabilité et, éventuellement, le typed'échantillonnage à effectuer en vue d'une « représentativité correcte » ;

! enfin l'effet d'échelle : les roches présentent généralement un « effet d'échelle »plus ou moins marqué, lié à la présence au sein de la matrice rocheuse, de diverstypes d'hétérogénéités et de discontinuités ; cet effet d'échelle se manifeste parle fait que les propriétés mécaniques mesurées sont fonction des dimensions del'éprouvette.

L'étude des discontinuités présentes dans le massif rocheux, et susceptibles d'enaffecter les propriétés mécaniques, fait l'objet des chapitres 4 et 5. Les

Page 177: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

56 Manuel de Mécanique des Roches

hétérogénéités du massif rocheux sont également évoquées dans le chapitre 4. Dansce chapitre on aborde l’effet d’échelle, dans la mesure où il influence directement lesrésultats des essais mécaniques.

3.2 LES ESSAIS DE BASELes essais de base mettent en jeu trois types de sollicitations :! traction : traction indirecte (ou essai brésilien) ;! compression uniaxiale (ou monoaxiale ou simple) ;! compression triaxiale (isotrope et déviatorique).

Il existe un certain nombre de recommandations, en particulier éditées par la SIMR(Société Internationale de Mécanique des Roches) dont certaines préconisent lechoix de dimensions des éprouvettes à essayer. L’AFNOR a édité très récemmentdes normes fixant les caractéristiques des éprouvettes et les conditionsexpérimentales pour les essais de base. Dans ce paragraphe on se limitera auxpropriétés de résistance, l’aspect comportement étant présenté aux §3.3 et 3.4.

3.2.1 LES ÉPROUVETTES

Il est recommandé d’essayer des éprouvettes « les plus grandes possible » comptetenu des moyens techniques du laboratoire, de façon à intégrer au mieux leshétérogénéités minérales et les discontinuités du volume poreux. En tout état decause seule la dimension minimale, liée à la taille des grains, est fixée: le diamètredoit être au moins égal à dix fois la taille des plus gros éléments. L’AFNORrecommande une dimension minimale de 40 mm de diamètre. Il est préférable degarder constant le diamètre pour la série d’essais : traction indirecte, compressionuniaxiale et triaxiale.

Les éprouvettes, de forme cylindrique, sont prélevées par découpage (carottage,sciage et rectification) à partir de blocs ou de carottes de plus grandes dimensionsprélevées sur le site. L'orientation des éprouvettes s'effectue, par référence auxdirections S1, S2, S 3 identifiées sur le site (chapitre 4). Ainsi, s'agissant d'uneformation sédimentaire, l'axe S3 est perpendiculaire aux plans de stratification, danslequel les directions S1 et S2 sont souvent indifférenciées.

Un soin particulier doit être apporté à la qualité de la découpe et de la rectification :parallélisme des faces, perpendicularité avec les génératrices, obéissent à desspécifications rigoureuses. La rectifieuse doit permettre de garder l’éprouvette fixe,le retournement étant assuré par le marbre sur lequel l’éprouvette est disposée parl’intermédiaire de vés.

3.2.2 ESSAI DE TRACTION INDIRECTE

La réalisation d'essais de traction directe se heurte au problème classique du collagedes têtes d'éprouvette sur le dispositif intermédiaire de la machine d'essai. Larésistance maximale à la traction peut être limitée par celle de l’interface colle-éprouvette, ce qui est le cas pour les roches de résistance à la traction supérieure à15 MPa.

C’est pourquoi un essai de traction indirecte, l’essai brésilien, a été emprunté audomaine du béton. L’éprouvette d’élancement (hauteur/diamètre) minimal égal à un,subit une compression suivant deux génératrices opposées. Cette compressions’exerce par l’intermédiaire de pièces métalliques (figure 3-1) ou en interposant un

Page 178: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 57

carton d’épaisseur millimétrique, pour « gommer » les irrégularités éventuelles desgénératrices du cylindre. La vitesse de mise en charge recommandée par la SIMR estde 200 N/s. La résistance à la traction est calculée par :

!"t

PDL

"2 (3-1)

avec : !t résistance à la traction, P effort à la rupture, D diamètre de l'éprouvette, Llongueur de l'éprouvette. L’état de contrainte au centre de l’éprouvette, au momentde la rupture, est représenté par une contrainte de compression verticale !y égale à :

!"y

PDL

"6 (3-2)

avec les mêmes notations que celles de l’équation (3-1), tandis que la contraintehorizontale !x a pour valeur celle de l’équation (3-1). L’essai brésilien n’est un essaide traction que pour les matériaux fragiles : les roches, le béton, le verre. La rupturedoit impérativement se produire à partir du centre, sous forme d’une fracture uniqueverticale. Il peut y avoir des difficultés expérimentales dans le cas de rochesfortement anisotropes et pour les roches ductiles (sel, argiles..).

Plateau supérieur

Plateau inférieur

Eprouvette

Figure 3-1 : Dispositif pour essaibrésilien

Figure 3-2 : Frettage d'une éprouvetteen compression

3.2.3 ESSAI DE COMPRESSION UNIAXIALE

C'est l'essai le plus communément réalisé. Il est effectué sur éprouvettescylindriques, d'élancement L/D (L, hauteur, D diamètre) compris entre 2 et 2,5.L’élancement est un point important qui se comprend lorsqu’on examine lesconditions de contact machine-éprouvette. Il existe un état de contrainte nonhomogène dans des zones en forme de cône (figure 3-2) correspondant à un frettagede l’éprouvette. Le frettage est dû au frottement empêchant le déplacement libre desextrémités de l’éprouvette, engendré par le contraste de déformabilité entre la rocheet les plateaux de la presse. Les roches sont toujours plus déformables que les aciersavec lesquels elles sont en contact durant l'essai. Ce frettage augmenteartificiellement la résistance à la compression de l'éprouvette. Il convient donc dediminuer les zones d'influence du frettage en jouant sur l’élancement :! élancement faible (L/D = 1) : les deux cônes s'interpénètrent, la résistance à la

compression est alors surévaluée ;

Page 179: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

58 Manuel de Mécanique des Roches

! L/D = 2 : les cônes sont séparés, la distribution des contraintes au centre del'éprouvette n’est plus perturbée :

! élancement fort (L/D = 3) : les cônes sont bien éloignés mais il y a risque decompression excentrée de l'éprouvette, si les faces ne sont pas rigoureusementparallèles.

Il faut noter que la Société Internationale de Mécanique des Roches interditl’interposition de matériau ou de produit entre l’éprouvette et les plateaux de lapresse, excepté des plaques d’acier d’épaisseur comprise entre 15 mm et D/3 et dediamètre égal à celui de l’éprouvette. La machine d’essai doit être assez rigide(colonnes de diamètre approprié et faible course des vérins), hydraulique et sipossible asservie. L’usage de machines mécaniques est prohibé. Le plateau supérieurpeut être équipé d’une rotule. Le centrage de l’éprouvette doit alors être rigoureux.L'essai est conduit à partir d'un chargement monotone croissant (soit à vitesse dedéformation, soit à vitesse de contrainte uniaxiale fixée). La normalisation n’imposepas de vitesse, mais conseille une durée d'essai comprise entre cinq minutes etquelques dizaines de minutes, de manière à ne pas induire d’effets différés.

On appelle résistance à la compression (notée !c) la contrainte maximalesupportée par l'échantillon lors d'un essai à chargement monotone croissant. Cettevaleur constitue une première information très utile et parfois suffisante sur lesperformances mécaniques escomptées de la roche. L'étendue des valeurs desrésistances est grossièrement comprise entre 1 et 200 MPa. Les valeurs inférieures à5 MPa correspondent à des roches qualifiées de « très tendres » ; des valeurssupérieures à 100 MPa caractérisent des roches dites « très résistantes ».

Dans le cas d'échantillons dont l'anisotropie est avérée, il convient d'orienter ladirection de sollicitation suivant les axes principaux de l’anisotropie et de définir desvaleurs des résistances suivant ces axes, sans oublier que le minimum de résistancepeut être obtenu dans une direction biaise.

Le rapport entre la résistance à la compression uniaxiale et la résistance à la tractiondonne un indice de fragilité, qui est une caractéristique importante de comportement.Ce rapport varie usuellement entre 5 (roche peu fragile) et 30 (roche très fragile).

3.2.4 ESSAI TRIAXIAL

Figure 3-3 : Cellule pour essai triaxial

Cet essai est réalisé sur des éprouvettes identiquesà celles de l’essai de compression uniaxiale, maisle dispositif expérimental limite souventl’élancement aux environs de 2. Il s’agit d’un essaitriaxial de révolution où !2 = !3 = Pc (pression deconfinement). L’éprouvette est placée dans unejaquette étanche et souple, pour les roches tendres,plus rigide pour les roches raides. La figure 3-3donne un exemple de schéma de cellule triaxiale,dimensionnée pour supporter des confinementscourants de 1 à 40 MPa, ce qui impose des paroisépaisses en acier. De plus la charge axiale doit être

transmise par un piston rigide de même diamètre que l’éprouvette. L’essai estconduit en imposant d’abord un chargement hydrostatique !1 = !2 = !3 = Pc. Puis lacontrainte axiale est augmentée en respectant une consigne de vitesse de mise en

Page 180: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 59

charge constante ou de vitesse de déformation constante, jusqu’au maximum quicorrespond à la résistance à la compression triaxiale.

A partir des valeurs de résistance à la traction, à la compression uniaxiale et à lacompression triaxiale, sous plusieurs confinements, il est possible de déterminer uncritère de rupture (§3.6.2 et chapitre 9).

3.3 GÉNÉRALITÉS SUR LES CONDITIONS EXPÉRIMENTALESLa réalisation de tout essai mécanique s'effectue selon un chemin de sollicitationqui résulte de l'exécution d'un programme (ou « consigne ») prédéfini ; leprogramme fixe les paramètres d'exécution de l'essai - contraintes ou déformations -et leur évolution dans le temps, la machine d'essai devant suivre le déroulement duprogramme, à partir du contrôle des paramètres d'asservissement. Le trajet de chargerésulte de l'exécution :! soit d'une consigne en déformation (par exemple essai effectué à vitesse de

déformation imposée #̇ constante) ;! soit d'une consigne en contrainte (par exemple !̇ constante).

Le dispositif d'asservissement de la presse a pour objet l'exécution de l'essaiconformément au programme prédéfini ; de la qualité de l'asservissement dépendcelle de l'essai ; or l'essai peut ne pas se dérouler correctement, en particulier si desphénomènes de perte de résistance de l'échantillon au moment de la ruptureimposent une variation trop rapide du dispositif de correction (par exemple, uneconsigne de type d!/dt = constante peut s'avérer impossible à exécuter si lacontrainte vient à excéder la résistance de l'échantillon). Divers types de trajets decharge peuvent être exécutés ; leur définition est fonction de l'objet et de ladestination de l'essai envisagé. Parmi les plus usuels, citons :! chargement monotone croissant (de type #̇ = constante ou !̇ = constante) ;! chargement croissant jusqu’à un certain niveau, suivi d’un déchargement et

d’un rechargement jusqu’à un niveau plus élevé. On peut ainsi réaliser 3 à 5cycles jusqu’à la rupture ;

! chargement cyclique autour d'une position moyenne (essai de fatigue).

Les grandeurs physiques mesurées sont principalement :! des forces : par exemple force exercée par la presse de compression sur

l'échantillon ;! des pressions : pression du fluide dans une cellule triaxiale ;! des déplacements : déplacement relatif des plateaux de la presse mesurés par

des capteurs de déplacement, déplacements axiaux et radiaux de l’éprouvettepar l’intermédiaire d’un collier de mesure équipé de capteurs, déplacementsparticulaires d'éléments de matière sur un échantillon (mesurés par traitementnumérique d'images prises en cours d'essai) ;

! des déformations par jauges d’extensométrie ;! des volumes et débits liquides : variation du volume d'huile ou volume de fluide

expulsé de l’éprouvette saturée au cours d’un essai triaxial ;! le temps ;! la température.

Page 181: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

60 Manuel de Mécanique des Roches

Mentionnons plus particulièrement les mesures d'extensométrie par jauges dedéformation (strain gages), dont la mise en place nécessite une attentionparticulière : longueur de jauge par rapport aux hétérogénéités de la matricerocheuse, sensibilité à la pression de confinement et à l’eau (dans ce cas il fautsoigner le dispositif d’étanchéité), risque de dérive lors d'essais de longue durée.Moyennant les précautions et la technicité nécessaires, ces mesures d'extensométriesont toutefois parfaitement fiables et fournissent des mesures locales, en zone nonfrettée, de grande qualité.

Les essais mécaniques peuvent être réalisés à température ambiante pour la plupartdes problèmes courants. Il peut être nécessaire de contrôler rigoureusement latempérature durant les essais mécaniques et particulièrement pour les essais delongue durée et les essais de fluage (§3.8). Il est nécessaire de réaliser des essaismécaniques sous température pour divers problèmes, par exemple, stockage dedéchets exothermiques, exploitation du pétrole dans les gisements hautetempérature. Dans ce chapitre, il ne sera question que du comportement àtempérature dite ambiante.

3.4 COMPORTEMENT MÉCANIQUE SOUS SOLLICITATION ISOTROPELes procédures d’essai présentées au §3.2 permettent d’obtenir la résistance de laroche, ce qui n’est pas toujours suffisant. Il est nécessaire de caractériser lecomportement, ce qui signifie d’obtenir des réponses à des questions, dont lapremière est particulièrement importante :! la roche est-elle isotrope ?! la roche est-elle microfissurée naturellement ?

L'essai de compressibilité ou de compression isotrope permet de répondre à cesquestions et ceci de façon très simple. En effet, si la roche est sans microfissures ethomogène, élastique et isotrope, sa réponse # à une sollicitation de typehydrostatique (sphérique) est :! identique dans toutes les directions de l'espace ;! linéaire en fonction de la contrainte (!1 = !2 = !3 = pression de confinement Pc)

#$

"%PE

c( )1 2 (3-3)

avec E module de Young et $ coefficient de Poisson.

En conséquence tout écart aux deux réponses attendues précédentes donnera desindications sur le caractère isotrope et /ou microfissuré de la roche.

3.4.1 PRINCIPE DE L’ESSAI

L'essai se pratique sur des cubes dont les dimensions sont suffisamment grandes parrapport à la taille du plus grand constituant élémentaire. Ce cube est découpé enfonction de la structure de la roche, ce qui n'est pas toujours, a priori, évident...Notons S1 la normale au plan repéré (stratification, schistosité). Supposons connuesles deux autres directions principales orthogonales de structures, qui sont alorsnotées S2 et S3.Rappelons que si! S1, S2 et S3 sont orthogonales, la roche est dite orthotrope ;

Page 182: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 61

! S2 et S3 ne jouent aucun rôle particulier la roche est dite isotrope transverse.

Le cube est, après séchage, équipé de jauges d'extensométrie selon la figure 3-4. Lecube est ensuite gainé, par exemple d'un enduit silicone, pour éviter toutepénétration de fluide durant l’essai (figure 3-5).

S3

#1

S2

S1

#2

#3

Figure 3-4 : Orientation du cube parrapport aux axes de structure etpositionnement des jauges

Figure 3-5 : Exemple de cubeinstrumenté et gainé de silicone (unefenêtre a été découpée ; les jauges sontgroupées en rosette

Le cube est placé dans une enceinte de pression. Il est sollicité par l'intermédiaired'un fluide dont on contrôle la pression. Notons #i la déformation dans la directionSi. La figure 3-6 présente schématiquement les réponses des trois jauges en fonctionde la pression de confinement Pc.

Pc

#

1, 2, 3

a

Pc

#

2, 3

1

b

Pc

#

1

3 2

c

Figure 3-6 : Résultats schématiques d'essais de compressibilité

Si les trois jauges donnent les mêmes réponses #1 = #2 = # 3 : la roche estprobablement isotrope. Dans le cas où nous supposons l'isotropie, la variation devolume est égale à :

&VV E

P PKcc" ' ' "

%"# # #

$1 2 3

3 1 2( ) (3-4)

avec K module de compressibilité.

Page 183: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

62 Manuel de Mécanique des Roches

Si #2 = #3 ' #1: la roche est probablement isotrope transverse et le plan (S2, S3) estun plan isotrope.

Si #2 ' #3 ' #1: la roche est peut être orthotrope.

3.4.2 CARACTÉRISATION DE LA MICROFISSURATION NATURELLE

Schématisons une microfissure sous forme d’un ellipsoïde aplati, caractérisé par ungrand axe de longueur 2c et une ouverture 2a (figure 3-7). Cette fissure est définiepar un coefficient de forme a/c de l’ordre de 10-3. Sous l'effet d'une charge normale,l'ouverture va diminuer jusqu'à ce que les lèvres de la fissure se touchent.

Supposons qu'une roche isotrope possède une population de fissures de ce type,réparties de manière aléatoire et effectuons un essai de compressibilité. Du fait del'isotropie et de la répartition aléatoire des microfissures, la réponse des jauges seratelle que #1 = #2 = #3. La figure 3-8 représente l'évolution de la variation de volume&V/V en fonction de la pression Pc.

p

2c

2a

Pc

&V/V

A

B

0

Pf

nf

Figure 3 -7 : Représen ta t ionschématique d'une fissure naturelle enforme de pièce de monnaie

Figure 3-8 : Exemple d'essai decompressibilité sur une roche isotropemicrofissurée

On décompose les courbes en deux parties :! OA, à concavité vers le bas, où les microfissures se ferment progressivement en

commençant par les fissures ayant le rapport a/c le plus petit ;! AB, linéaire représentant le comportement élastique de la roche.

Le point A correspond donc à la fermeture de toutes les microfissures : la pressioncorrespondante sera appelée pression de fermeture Pf. L’écart sur l'axe &V/V parrapport à l'élasticité, correspond au volume de toutes les microfissures : il s'agit doncde la porosité de fissures nf = Vf/Vt.

3.4.3 ÉTUDE DE QUELQUES EXEMPLES

La figure 3-9 indique le repère structural d’un essai de compressibilité (figure 3-10)avec des cycles de chargement-déchargement sur un marbre présentant un plan defoliation dont la normale est S1. On remarquera que les parties linéaires (AB) ontsensiblement la même pente, ce qui signifie que ce marbre est isotrope. Par contre,on constate que la fermeture est nettement plus importante dans la direction de S1,ce qui permet d'affirmer que les microfissures sont orientées préférentiellement dansle plan de foliation.

Page 184: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 63

L'étude des cycles chargement-déchargement permet de constater que les fissuresfermées au premier cycle de chargement ne se rouvrent qu'en partie au cours dudéchargement. Par contre cet effet disparaît après le premier cycle.

S1

S3

S2

1 2 3 4 50

10

20

30

40

! (MPa)

# .10-4

#3 #2 #1

Figure 3-9 : Repère structural Figure 3-10 : Essai de compressibilitésur un marbre présentant un plan defoliation

La figure 3-11 montre un essai de compressibilité sur une ardoise, qui présente uneanisotropie forte due à la présence d'un plan de discontinuité (plan de fissilité). Ladirection S1 est prise perpendiculaire à ce plan. On remarque que, les déformationsselon S2 et S3 sont sensiblement identiques tant du point de vue « fermeture desfissures » que du point de vue de l'élasticité. Par contre la réponse selon S1 est trèsdifférente:! la fermeture des fissures est beaucoup plus importante, ce qui indique que les

microfissures sont dans le plan de schistosité et c'est ce qui permet le délitagedes ardoises ;

! la pente des déformations élastiques est différente, ce qui semble indiquer quecette roche est isotrope transverse.

La figure 3-12 présente un essai de compressibilité sur un échantillon d'argilite : ladirection S1 est prise perpendiculaire au plan de stratification.

0

20

40

60

0 500 1000 1500

Pc (MPa)

#.10-6

#3 #2 #1

0

20

40

60

0 5 10 15

Pc (MPa)

#.10-3

#2 #3 #1

Figure 3-11 : Essai de compressibilitésur une ardoise

Figure 3-12 : Essai de compressibilitésur une argilite

Page 185: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

64 Manuel de Mécanique des Roches

L'allure des courbes présentées est très semblable à celle de l’ardoise et lesconclusions voisines. Les remarques portent sur l'interprétation de la « fermeture desfissures »: dans le cas d'une argilite, il est plus correct de parler de « serrage desfeuillets argileux » que de fermeture de fissures. Notons que le mécanicien des solsinterprète cette partie convexe comme étant indicatrice d'un état de surconsolidationdu matériau et que la pression Pc serait la pression de consolidation.

3.4.4 CAS DES ROCHES TRÈS POREUSES : PRESSION D'EFFONDREMENT

DES PORES

Figure 3-13 : Essai decompressibilité sur une craie

Les matériaux très poreux, parexemple les craies, présententlors de l’essai de compressibilité,un comportement particulier. Unexemple est donné par la figure3-13, qui présente l'évolution dela variation de volume enfonction de la pression deconfinement. A partir del'examen des résultats de cetessai, on peut faire les remarquessuivantes :

! la craie ne présente pas de microfissures décelables, le comportement estlinéaire élastique dès l'origine ;

! à partir d'une certaine pression pcol, la variation de volume (compaction) estplus grande que dans la zone élastique, ce qui signifie que la microstructurecommence à évoluer (destruction des joints de grains) pour réduire sa porosité.La pression Pcol correspond donc à une pression de début d'effondrement destructure. Elle est appelée « pression d'effondrement des pores » (porecollapse) ;

! au delà d'une certaine pression Pt, le gradient de variation de volume s'inverse ànouveau: la roche semble « se raidir ». En fait, à partir de la pression Ptl'effondrement de la microstructure poreuse tend à se stabiliser.

La pression Pcol joue un grand rôle dans la compaction des réservoirs pétroliers. Lavaleur de cette pression dépend de la nature de la roche, c'est à dire de la nature desjoints de grains, et de la porosité : plus la porosité de la roche est importante, plus lavaleur de Pcol diminue.

3.4.5 REMARQUES SUR L'ISOTROPIE

La disposition des jauges de la figure 3-4 ne permet pas de conclure avec certitudeque les résultats de la figure 3-6a conduisent à une roche isotrope, et que les résultatsde la figure 3-6b conduisent à une roche isotrope transverse. L'hypothèse d'isotropieimpose de vérifier la même propriété quelle que soit l'orientation. Or les jaugesd'extensomètrie ont été placées selon trois directions particulières. Pour s'assurer dela validité de l'hypothèse d'isotropie, soit spatiale soit planaire, il est nécessaired’ajouter des jauges suivant trois autres orientations.

0

20

40

60

0 4 8 12 16

Pc

Pcol.

Pt

#v 10-2

Page 186: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 65

3.4.6 VALIDATION DES MODULES ÉLASTIQUES

L'essai de compressibilité est un essai dont les conditions aux limites sontparfaitement maîtrisées et qui permet facilement de caractériser le comportementélastique. Il peut être utilisé pour valider la détermination des paramètres desroches.

Roche isotrope

Dans le cas d'une roche isotrope, l'essai de compressibilité permet de déterminer lemodule de compressibilité K. Ce module de compressibilité est lié au module deYoung et au coefficient de Poisson (équation 3-4). Supposons les modules E et $déterminés à partir d'autres essais : compression uniaxiale, compression triaxiale, parexemple. On peut ainsi vérifier la qualité des paramètres obtenus ainsi que la qualitéde l'hypothèse d'élasticité postulée dans ces autres essais pour obtenir cesparamètres.

Roche isotrope transverse

Les déformations théoriques selon les directions S1 et S 2 sont respectivement(Annexe de ce chapitre) :,

#$

#$

11

21

21

12

1

1 2 1 2" %(

)*

+

,- "

%(

)*

+

,-E E

PcE

Pc; (3-5)

#$ $

#$ $

212

1

23

22

21 23

2

1 1"

%%

%(

)*

+

,- "

% %(

)*

+

,-E E

PcE

Pc; (3-6)

Avec E1, E2 modules de Young principaux et $12, $23, $21 coefficients de Poissonprincipaux (définitions dans l'annexe) déterminés par d'autres essais. Ces deuxrelations permettent ainsi de valider la détermination de ces modules.

3.5 COMPORTEMENT EN COMPRESSION UNIAXIALE

3.5.1 COURBES CONTRAINTE-DÉFORMATIONS

L'essai de compression est effectué avec enregistrement simultané des déformationsaxiales #a et des déformations transversales #t (dans le cas d’une roche isotrope). Unexemple de disposition de ces jauges en position axiale et transversale est présentésur la figure 3-14. Le nombre idéal de jauges est de trois selon chaque direction.

On ne considère ici que la moyenne des mesures suivant une direction, aprèsélimination éventuelle des valeurs considérées comme aberrantes (mauvaisfonctionnement d’une jauge, rupture prématurée d’une jauge). La déformationvolumique de l'échantillon durant l'essai a pour expression :

&V/V = . = #a + 2#t (3-7)

Classiquement, on représente sur un même graphique les deux courbes !1 - #a et !1- #t auxquelles on associe la courbe !1 - . ( figure 3-15). La référence élastiqueisotrope conduit à la définition du module de Young ou module d'élasticité et ducoefficient de Poisson par les relations classiques :

! # $##1 " " %E a

t

a; (3-8)

Page 187: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

66 Manuel de Mécanique des Roches

!1

!d

!l

!f

!r

!s

#3 #1

!c

Figure 3-14 :Pos i t ion desjauges

Figure 3-15 : Courbes contrainte-déformations axiale,transversale et volumique

Le coefficient de Poisson, théoriquement compris entre -1 et 0,5 est pratiquementcompris entre 0,15 et 0,45 pour la plupart des roches. Des valeurs élevées sont àmettre en relation avec le développement de microfissures ou de déformationsplastiques au sein de la roche. L'étendue des valeurs de module de Young estcomprise entre 1 GPa (roche qualifiée de « très déformable ») et 100 GPa (rochequalifiée de « très raide »). L'une des questions fondamentales qui se pose àl'ingénieur est de savoir dans quelle mesure, ou dans quel domaine de sollicitation,la roche présente un comportement élastique. Si tel est le cas, la détermination de Eet $ définit sa loi de comportement élastique et l'identification d'un « domained'élasticité » constitue une donnée essentielle pour la validité d'une loi decomportement.

L’identification de la zone élastique est souvent assimilée à la zone linéaire de lacourbe !1 - #a alors qu’en toute rigueur, il faut vérifier la réversibilité ducomportement par un cycle déchargement-rechargement. La pente de la courbe !1 -#a en chargement continu, correspond à un module enveloppe (ou module tangent).Elle est différente des pentes des cycles déchargement-rechargement : Eenveloppe 'Edéchargement = Erechargement. Ces deux derniers modules sont égaux s’il n’y a pasd’effets différés dans le comportement, ni d’effet de presse. Une autre difficultédans l’évaluation des modules est liée au frettage : si on emploie des capteurs dedéplacement entre plateaux de la presse, les déformations sont plus importantes dufait des interfaces et de l’inhomogénéité des déformations le long de l’éprouvette. Lemodule correspondant est inférieur au module calculé à partir des mesures dedéformation des jauges collées en partie centrale de l’éprouvette. Une analyse descourbes contrainte-déformations axiale, transversale et volumique permet d'identifierles différents seuils correspondant aux mécanismes conduisant aux déformations et àla ruine de l’éprouvette. Le comportement est dominé par :! la microstructure de la roche : composition minéralogique, forme et agencement

des minéraux, nature des contacts interminéraux, nature de la porosité et del'agencement des vides (porosité de pores et/ou de fissures), présence éventuellede fluides interstitiels ;

! le niveau de la contrainte appliquée.

Page 188: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 67

Décrivons le comportement d’un granite dans lequel on distingue usuellement cinqétapes successives :! pour de faibles niveaux de contrainte cette roche initialement microfissurée

présente généralement une phase dite de serrage, l'application de la chargeprovoque une fermeture progressive des microfissures, et donc uneaugmentation de la raideur : la courbe !1 - #a présente une concavité commeindiqué sur la figure 3-15. La contrainte ! s correspond au début ducomportement linéaire consécutif à la phase de serrage. Cette phases'accompagne souvent d'émissions acoustiques liées à la fermeture progressivedu réseau microfissural ;

! pour des niveaux de contraintes supérieures à ! s, le comportement estgénéralement élastique, linéaire et réversible, jusqu'à un niveau de contrainte !fà partir duquel apparaît, sur la courbe !1 - #t un écart par rapport à la linéarité :#t augmente alors plus vite que dans la phase élastique ;

! cette déformation est liée à l'ouverture et à la propagation des fissurespréexistantes ou à l’amorçage de nouvelles fissures. Des événementsacoustiques se manifestent à nouveau. L'ouverture des fissures se traduit par uneévolution de la variation de volume . qui diminue moins vite que dans la phaseélastique. A mesure que la contrainte !1 augmente, le phénomène de dilatancetransversale prend de l'ampleur jusqu'à un niveau de contrainte !d (seuil dedilatance) à partir duquel la variation de volume . change de sens : à cemoment, l'augmentation de volume compense la diminution de volume due à lacontraction élastique. Cette phase s’accompagne d'une très nette recrudescencedes émissions acoustiques, traduisant une évolution instable du réseau fissuralpar coalescence des fissures ;

! à partir du niveau de contrainte défini par !d, toute augmentation de !1 induitun développement instable et non contrôlé du réseau fissural, qui induit à sontour un endommagement croissant de la roche. Les déformations axiales cessentd’être linéaires (ce seuil !l est appelé abusivement limite élastique), jusqu’à larésistance à la compression !c, pic de la courbe ;

! le comportement post-pic, essentiellement régi par les frottements mutuels desfragments de roche, n’est que rarement marqué par l’établissement d’unerésistance résiduelle !r sous sollicitation uniaxiale (granite altéré ou trèsmicrofissuré).

3.5.2 EXEMPLES DE COMPORTEMENT

Des figures présentent des courbes contrainte-déformations axiale, transversale etvolumique pour un grès très tendre (figure 3-16), un calcaire à organismes (figure 3-17) et une marne (figure 3-18). Le grès tendre présente des déformations axiales nonlinéaires en début de chargement, un comportement fortement non linéaire pour lesdéformations transversales. La courbe volumique est entièrement non linéaire, leseuil de dilatance est très bas. Les pentes des cycles déchargement-rechargementsont quasi-identiques. Les déformations permanentes sont importantes.

Le calcaire présente une petite phase de serrage, ensuite une partie linéaire et unephase non-linéaire avant le maximum (courbe !-#a). La courbe !-#t montre un seuilde fissuration très net. La courbe !-#a de la marne est rapidement non-linéaire, lesdéformations irréversibles sont croissantes. Les déformations transversales cessentd’être linéaires à peu près au même seuil que les déformations axiales. La dilatancese produit très tardivement.

Page 189: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

68 Manuel de Mécanique des Roches

#.10-3

0

2

4

6

8

10

12

-6 -4 0 5 10-2

!1 (MPa)

!t !a.

Figure 3-16 : Courbes !1 - #a , #t et . ; grès

#.10-3

!1 (MPa)

#t #a.

10

20

30

40

0-0,5 0,5 1,5

Figure 3-17 : Courbes !1 - #a , #t et . ; calcaire

0

5

10

15

20

25

-2 -1 0 2 4

#.10-3

#t #a.

!1 (MPa)

Figure 3-18 : Courbes !1 - #a , #t et . ; marne

Page 190: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 69

3.5.3 CAS DES ROCHES ORTHOTROPES

Les roches orthotropes sont caractérisées par 5 modules élastiques (Annexe) : 2modules de Young principaux E1, E2, 2 coefficients de Poisson principaux $12 (ou$21), $23 et un module de cisaillement G12. Les quatre premiers modules peuventêtre déterminés à partir d'essais de compression uniaxiale comme dans le cas desroches isotropes, en revenant à la signification physique de ces paramètres. Lemodule G12 est déterminé par des essais « clinotropes ».

Essais en axes principaux

Les essais de compression simple sont effectués suivant les axes de structure S1 etS2 par exemple. Les éprouvettes sont équipées de jauges comme sur la figure 3-19.

S1

S2

S3

S1

S2

S3

.

S1

S2

S3

X1

S1

plan d’anisotropie

X3

Figure 3-19 : Instrumentation pour lesmodules principaux

Figure 3-20 : Essai clinotrope surroche isotrope transverse

Pour l'essai de compression selon S1 la jauge axiale permet de calculer le module deYoung E1 et la jauge transversale, le coefficient de Poisson $12. Pour l'essai decompression selon S2, la jauge axiale permet de déterminer E2, la jauge transversalecollée dans le plan [S2, S3], le coefficient de Poisson $23, la jauge transversale colléeperpendiculairement à la schistosité, c’est-à-dire au plan [S2, S3], le coefficient dePoisson $21.

Essais clinotropes - Mesure de G12

Effectuons une rotation . du repère principal des contraintes autour de S2 etcaractérisée par "+2 % . " (S1,X1). Pour un essai de compression réalisé dans uneorientation . différente de 0° et 90°, une jauge axiale (figure 3-20) donne une valeurdu module E(.) qui doit être égale à (Annexe de ce chapitre) :

1 14

1 12

12

1

21

2

2 24

2E E G E E E( )

sin sin cos cos.

. $ $. .

." ' % %

(

)*

+

,- ' (3-9)

Les paramètres E1, E2, $12, $21 étant connus, le calcul de G12 s'en déduit. Il est doncpossible, de déterminer le module de cisaillement G12 par jauges d'extensométrie. Ilfaut néanmoins faire très attention à bien mesurer un paramètre élastique E(.), car laprésence de microfissures dans le plan d’anisotropie peut masquer le comportementélastique.

Page 191: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

70 Manuel de Mécanique des Roches

3.6 COMPRESSION TRIAXIALE DE RÉVOLUTION

Figure 3-21 : Principe de l'essaitriaxial

L'essai triaxial est un essai suréprouvette cylindrique gainée (figure3-21). Il consiste à étudier lecomportement de la roche sous unepression de confinement.

L'éprouvette est en outre sollicitée parune contrainte axiale !1. Supposons,tout d’abord, que l'essai est effectuésur échantillon « sec », c'est-à-diresans fluide interstitiel, ou encore quela pression du fluide interstitiel restenulle durant tout l’essai. On présenteraen §3.6.3 le principe des essais danslesquels cette pression n'est pas nulleet les différentes situations qui endécoulent.

3.6.1 LES TRAJETS DE CHARGEMENT

L'essai triaxial est donc caractérisé par deux paramètres de chargement: !1, et !2 =!3 = Pc. Il est donc possible de décrire l'ensemble des chemins triaxiaux par uneexpression des trajets de chargement dans le plan !1-Pc ou !1-!3 (figure 3-22).! trajet 1 : chargement hydrostatique (!1 = !2 = !3 = Pc) jusqu'à une valeur Pc =

P0. Ensuite chargement croissant en !1 avec P0. Il s'agit ici de l'essai triaxialmonotone classique ;

! trajet 2 : chargement tel que !1 = k !3, avec k constante. Cet essai est appeléessai proportionnel. Il peut être généralisé par un trajet de la forme :chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargement tel que !1= k !3 (trajet 2*) ;

! trajet 3 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementdécroissant en !1. Il s'agit ici de l'essai d'extension classique (extensionlongitudinale) ;

! trajet 4 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementdécroissant en !3 avec !1 = P0. Il s'agit ici de l'essai d'extension latérale. Ilpeut être généralisé par un trajet de la forme chargement hydrostatique jusqu'àune valeur Pc = P0 puis chargement croissant en !1 jusqu'à une valeur (!1)0 etenfin chargement décroissant en !3 avec !1 = (!1)0. (trajet 4*). Ce trajetreprésente schématiquement le chemin de contrainte autour d'un ouvragesouterrain lors du percement ;

! trajet 5 : chargement hydrostatique jusqu'à une valeur Pc = P0 puis chargementà contrainte moyenne constante (!1+ 2 P0 = K constante). Cette deuxièmephase de chargement est purement déviatorique et permet d'étudier la surface decharge indépendamment de la contrainte moyenne.

Gaine

Embasesupérieure

Embase inférieure

!1

!3 " Pc

Page 192: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 71

Pc

0

!1

P0

(!1)0

P0

!1

P0

P0

Pc

0 0

P0

P0

Pc

!1

!1

P0

P0

P0

P0

!1

Pc Pc

0 0

1 2*

2

4

3

4*

5

Figure 3-22 : Définition des principaux types de trajets de chargement en essaitriaxial

3.6.2 INFLUENCE DE LA PRESSION DE CONFINEMENT

REPRÉSENTATION DES RÉSULTATS

Influence de la pression de confinement sur le comportement

Plaçons nous dans le cas des essais triaxiaux classiques (trajet 1) et examinonsl'influence de la pression de confinement sur le comportement.

La figure 3-23 présente l'évolution des courbes contrainte-déformation axiale pourune marne. Comme l'indique cette figure, l'augmentation de la pression deconfinement a en général plusieurs effets :! elle augmente la limite élastique et la résistance maximale ;! elle fait passer le comportement du type fragile au type ductile (§3.7) ;! sur les courbes contrainte déformation volumique on remarquerait une

diminution de la dilatance.

Physiquement l'augmentation de pression de confinement diminue les possibilitésd’amorçage et de propagation des microfissures par augmentation du frottement surles lèvres des microfissures. Dans le cas des matériaux poreux, craie par exemple, ona montré (§ 3.4.4) que la pression de confinement pouvait conduire à une pressionlimite de comportement élastique. Il en découle donc une diminution de la limiteélastique avec la pression de confinement. Sur la figure 3-24, le comportementductile à partir du confinement de 6 MPa est observable. Les déformations ductilesaugmentent rapidement : sur la figure les courbes à 13 et 17 MPa de confinementont été tronquées.

Page 193: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

72 Manuel de Mécanique des Roches

40200

20

40

60

80

100 !3=50 MPa

!3=30 MPa

!3=10 MPa

!3=5 MPa#.10-3

!1-!3 (MPa)

20

15

10

5

00 2,50,5 1 1,5 2,0

6 MPa

# %

!1-!3 (MPa)

3 MPa17 MPa

13 MPa

1 MPa

Figure 3-23 : Influence de la pressionde confinement sur le comportementd'une marne en fonction de la pressionde confinement

Figure 3-24 : Influence de la pressionde confinement sur le comportementd'une craie en fonction de la pressionde confinement

Représentation dans le plan de Mohr

A partir des essais triaxiaux, il est possible d'étudier l'influence de la pression deconfinement sur la limite élastique ou la rupture (chapitre 9). La premièrereprésentation et la plus communément pratiquée est la représentation de Mohr. Ilsuffit de tracer les cercles, centrés sur l’axe des contraintes principales, et coupantcet axe en ! 1 et Pc, correspondant aux conditions limites recherchées (limiteélastique ou rupture) et de prendre l'enveloppe de ces cercles. La figure 3-25 donnel'exemple d’une marne. On remarque que plus la pression de confinement augmente,plus l'enveloppe « s'aplatit » pour tendre vers une asymptote / = constante,caractéristique d'un comportement ductile (§3.7).

/ (MPa)

! (MPa)20 40 60 80 100

20

10

30

Figure 3-25 : Représentation de Mohr des conditions de rupture pour une marne

Représentation en plan principal

C'est la représentation la plus directe à partir des résultats de l'essai triaxial. Deuxtypes de représentation sont possibles:! dans le plan des contraintes principales, c'est-à-dire dans le plan (!1, !3) ;! dans le plan (P,Q) avec P contrainte moyenne (P = (!1 + 2!3)/3) et Q contrainte

déviatorique (Q = (!1 - !3)). La notation habituelle est souvent en minuscules ;les majuscules sont employées ici, pour qu’il n’y ait pas de confusion avec lapression interstitielle notée p.

Page 194: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 73

Les figures 3-26 et 3-27 donnent ces représentations pour la même marne enconditions de rupture.

!1 (MPa)

5040302010020

40

60

80

100

120

!3 (MPa)

Q (MPa)

7050301000

20

40

60

80

P (MPa)

Figure 3-26 : Représentation dans leplan expérimental des conditions derupture pour une marne

Figure 3-27 : Représentation dans leplan (P,Q) des conditions de rupturepour une marne

Représentation en Invariants

Cette représentation peut être intéressante pour certains types de critères tels queCam Clay ou Drucker-Prager (chapitre 9). Elle représente par exemple la variationde 03J2 (J2 deuxième invariant du tenseur déviatorique des contraintes ; voirAnnexe générale) en fonction de I1, I1 premier invariant du tenseur des contraintes.Notons que dans le cas de l'essai triaxial, cette représentation est équivalente à lareprésentation (P,Q) puisque P=I1/3, et Q=03J2.

3.6.3 ESSAIS DRAINÉS ET ESSAIS NON DRAINÉS

Dans ce qui précède, nous avons supposé que la roche était sèche ou que la pressiondu fluide interstitiel restait nulle durant l'essai triaxial. Nous allons maintenantenvisager le cas où la roche est parfaitement saturée en fluide avant d'effectuerl’essai. Le dispositif expérimental (figure 3-28) comprend des embases drainantes entête et pied d'échantillon reliées à des capteurs de pression (A) et (B) et à des vannes(A) et (B). Notons p la pression du fluide interstitiel.

Essai non drainé

L'essai non drainé signifie que, durant l’essai, la masse de fluide dans l'échantillonreste constante. Donc pour réaliser cet essai, il faut :! fermer la vanne B ;! mettre le fluide interstitiel à une pression initiale p0. On vérifiera que le capteur

B indique cette pression p0 ;! fermer la vanne A.

On note au cours de l'essai triaxial l'évolution de la pression p avec le chargement.Les deux capteurs de pression doivent donner la même valeur. L’essai triaxialclassique (trajet 1) comprend une partie hydrostatique et une partie déviatorique. Lafigure 3-29 donne l'évolution de la pression p interstitielle en fonction de la pressionde confinement pour une craie (première partie de l'essai). On remarque une relationlinéaire entre p et Pc donnant BS, le coefficient de Skempton (chapitre 10) :

BS = &p/&Pc (3-10)

Page 195: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

74 Manuel de Mécanique des Roches

Gaine

Embasesupérieuredrainante

Embase inférieuredrainante

A

B

Mesurede

volume

B

A

p

!1

!3 = Pc

30

20

10

00 5 10 15 20

Pc (MPa)

p (MPa)

Figure 3-28 : Dispositif expérimentalpour essai drainé et non drainé

Figure 3-29 : Pression interstitielle enfonction de la pression de confinementpour une craie (essai non drainé )

La figure 3-30 donne l'évolution de la pression durant un chargement déviatoriquesur un grès. On remarque que la pression augmente lorsque la variation de volumede l'échantillon diminue, et que la pression chute dès qu'apparaît la dilatance.

300

200

100

0-5 0 5 10-10

!3 = 10 MPa

#.10-3

#3 #1.

!1 - !3

(MPa)

300

200

100

00 1 2 3-1

!3 = 10 MPa

p (MPa)

!1 - !3

(MPa)

Figure 3-30 : Évolution de la pression interstitielle en fonction du chargement pourun essai triaxial non drainé sur un grès

Essai drainé

Durant un essai, la pression interstitielle est gardée constante en laissant le fluideentrer ou sortir de l’éprouvette. Dans l'essai triaxial drainé, on note l'évolution de lavariation du volume des vides en mesurant le volume de fluide expulsé pendantl’essai. Ainsi l'essai triaxial est mené de la façon suivante pour une pression p égaleà 0 :! vérification de la saturation de l'échantillon et des différents circuits du

dispositif expérimental ;! fermeture de la vanne A, ouverture de la vanne B ;! réalisation de l'essai en mesurant le fluide expulsé ; on veille à ce que le capteur

A indique toujours une pression nulle.

Page 196: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 75

Cet essai peut être réalisé aussi avec une pression p = p0, en utilisant des contrôleursde pression qui gardent la pression constante et qui font simultanément la mesure devariation de volume.

Critère de rupture en contrainte effective

La roche, au cours des essais drainés et non drainés, est soumise à une pressioninterstitielle non nulle. Le concept de contrainte effective est alors utilisé dans toutesles lois de comportement et pour l’expression du critère de rupture. On pose : !’= !- bp, avec b, le coefficient de Biot (chapitre 10), compris entre 0 et 1. A la rupture, best pris généralement égal à 1. Dans le chapitre 10, on verra que ce sont lescontraintes effectives et non les contraintes totales qui gouvernent les déformationsdu milieu poreux. Le concept de contrainte effective est donc lié à la loi decomportement de la roche et il est important de dissocier les contraintes effectivesélastiques, des contraintes effectives gouvernant la rupture.

3.7 CLASSIFICATION DES COMPORTEMENTS

3.7.1 LES DIFFERENTS COMPORTEMENTS

Certaines roches comme les craies se rompent progressivement par écoulement, etprésentent donc de grandes déformations avant la rupture qui est dite ductile. Pourles grès peu poreux, les granites, la rupture se manifeste de manière brutale, sousforme de macrofissures se propageant sur des distances plus ou moins longues. Cetype de rupture est qualifié de fragile. Le mode de rupture dépend de l’état descontraintes, de la température et de l’histoire des contraintes. On peut avoir desrésultats différents pour un chargement croissant monotone uniaxial, un chargementsous confinement, un chargement cyclique.

Le comportement mécanique se classe en deux types suivant que les relationscontrainte-déformations sont réversibles ou non. Il est donc nécessaire de réaliser uncycle déchargement-rechargement pour faire ce premier classement. La figure 3-31illustre le comportement réversible, qui correspond à l’élasticité linéaire et non-linéaire. Si le comportement varie en fonction du temps on le qualifie deviscoélastique. Lorsque le déchargement est effectué à un niveau de contrainte plusélevé (figure 3-32), par exemple la fin de linéarité des déformations axiales !l, desdéformations irréversibles apparaissent. Celles-ci sont qualifiées de plastiques et laroche a un comportement élastoplastique.

!

#

a

b!

#

!p

Figure 3-31 : Comportement réversiblelinéaire (a) et non-linéaire (b)

Figure 3-32: Comportement nonréversible

Page 197: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

76 Manuel de Mécanique des Roches

Le terme « élastoplastique » est cependant un abus de langage (voir chapitre 8) car ilrecouvre :! de l’élastoplasticité au sens propre (glissement dans un cristal de sel, par

exemple) ;! un endommagement (créateur de discontinuités) dont on rend compte par des

lois issues de la théorie de l’élastoplasticité.

Figure 3-33 : Comportement élasto-plastique parfait (a), écrouissage positif(b), écrouissage négatif (c)

Le comportement est élastoplastiqueparfait si la limite élastique ne dépendpas de l’histoire des contraintes et desdéformations. En d’autres termes, lacourbe contrainte-déformation axialeprésente un plateau (figure 3-33, courbea). Si la pente de la courbe contrainte-déformation axiale est positive, onqualifie ce comportement de durcissant

ou d’écrouissage positif (courbe b). Si la pente de la courbe contrainte-déformationaxiale est négative, il s’agit d’un comportement radoucissant ou écrouissage négatif(courbe c). Quand le comportement dépend du temps, le comportement estélastoviscoplastique.

Dans le chapitre 8 on présentera les mécanismes physiques qui interviennent dans leprocessus de déformation ainsi que les principes des grandes catégories de lois decomportement. Il n’est question dans ce chapitre que de donner quelques élémentssur l’élasticité non-linéaire ou comportement hypoélastique et sur la plasticité.

3.7.2 COMPORTEMENT HYPOÉLASTIQUE

Il se réfère à une forme incrémentale de lois élastique non linéaire usuellementadoptée quand l'incrément de contrainte est une fonction à la fois de l'état decontraintes et de l'incrément de déformation. La différence fondamentale avec uneloi élastoplastique est le caractère réversible. La forme incrémentale d’une loiélastique non-linéaire est :

d! = f(!,d#), soit d! = Dt(!)d# (3-11)

Dt étant une matrice tangente. Une loi hypoélastique ne nécessite pas que lesdirections principales de contraintes et de déformation coïncident. Dans la classe deces modèles, on a, par exemple, la loi de Duncan dite hyperbolique. Le termehyperbolique est relié à l'équation adoptée pour l'interpolation des résultats d'essaistriaxiaux et non à la nature des équations gouvernant le problème en terme d'analysede contraintes. L’évolution du module de Young a la forme suivante :

E RC

KPP

fatm

atm

n" % '

% %

%

(

)*

+

,-

1

23

4

561 1

21 3

3

23( sin )( )

( cos sin )7 ! !

7 ! 7

! (3-12)

avec Rf, K, n : paramètre du matériau, Patm : pression atmosphérique, C : cohésionet 7 : angle de frottement.

!

#

a

b

c

Page 198: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 77

3.7.3 ÉLASTOPLASTICITÉ

Rappelons, tout d’abord, quelques définitions relatives à la plasticité. La surfaced’écoulement est la surface dans l’espace des contraintes définissant des états decontrainte pour lesquels se développent des déformations plastiques. La loi dedurcissement règle les changements possibles en forme, taille et position de lasurface d’écoulement. La règle d’écoulement gouverne l’incrément desdéformations plastiques. Dans le domaine non linéaire, l'incrément de déformationtotale consiste en la somme des incréments de déformation élastique et dedéformation plastique :

d# = d#el + d#pl (3-13)

et l'incrément de contrainte correspondant est directement évalué sur la base de larelation élastique :

d! = D d#el " D(d# - d#pl) (3-14)

La condition d'écoulement peut s'exprimer par :

F = F [!, h(#pl )] (3-15)

h est alors le vecteur de durcissement gouvernant le changement de surfaced’écoulement avec l'augmentation des déformations plastiques. Si F est négatif, l'étatde contraintes est représenté par un point dans l'espace des contraintes à l'intérieurde la surface d’écoulement. Dans ce cas, le matériau a un comportement purementélastique incrémental. Si F = 0 l'état de contraintes est sur le critère d’écoulement. SiF positif, ce sont des points à l'extérieur de la surface, donc l'état de contraintes n'estpas admissible. Des déformations plastiques se développent pendant un incrémentdepuis F = 0, seulement si le point de contraintes reste sur cette surface pendantl'incrément, c'est-à-dire si la condition de consistance suivante est respectée :

dF F d Fh

h dT T

plpl" 1

23

456 ' 1

23

456123

456 "

88!

!88

8

8## 0 (3-16)

L'incrément de déformation plastique gouvernée par la règle d'écoulement plastiqueest proportionnel au gradient du potentiel plastique Q = Q[!, h(#pl)] par l'incrémentd9 de multiplicateur plastique.

d d Qpl# 988!

" (3-17)

Figure 3-34: Règle d’écoulementnon associée

Cette équation exprime la con-dition que dans l'espace superposédes contraintes et des déforma-tions, le vecteur représentant l'in-crément de déformation plastiqueest directement le vecteur extérieurnormal à la surface représentant lepotentiel plastique au point qui

!

!,#

Q

F=0

d!

nQ

d#pl

Page 199: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

78 Manuel de Mécanique des Roches

correspond à l'état courant de contraintes. A noter que d9 est une inconnue qu’on nepeut déterminer qu’en résolvant un problème de structure. La règle d'écoulement estassociée si le potentiel plastique et la surface d'écoulement coïncident. Si ce n’estpas le cas la règle d’écoulement est non associée (figure 3-34 où nQ = 8Q/8!).

3.8 COMPORTEMENT DIFFÉRÉPar le terme comportement différé, nous entendons des lois de comportementfaisant intervenir, en plus de la déformation # et de la contrainte !, leur dérivée parrapport au temps. On parle également de comportement visqueux lorsqu'il y adépendance du comportement avec le temps, le terme visqueux est à associer à laviscosité qui est un paramètre pouvant décrire cette dépendance (§ 3.8.2).

3.8.1 MISE EN ÉVIDENCE DE L'EFFET DU TEMPS SUR LE COMPORTEMENT:

FLUAGE ET RELAXATION

La méthode la plus simple pour mettre en évidence l'importance du temps pour lecomportement des roches est d'effectuer un essai de fluage. L’essai de fluage le plussimple à réaliser est en compression monoaxiale, mais des essais triaxiaux peuventêtre également réalisés. Sur l'éprouvette de compression appliquons à l'instant t = t0,une contrainte ! = !0 (figure 3-35a). Si le matériau est purement élastique alors ilsubit à l'instant t = t0 une déformation # = #0 qui ne variera pas avec le temps. Maisl'expérience montre qu'il n'en est pas souvent ainsi : le matériau subit à l'instant t = t0une déformation instantanée # = #0, puis la déformation évolue ensuite de façon plusou moins croissante (contraction >0) avec le temps (figure 3-35b). Cette croissanceavec le temps dépend de la valeur de !0 et sera étudiée plus en détail dans leparagraphe 3-8-2.

#0

#

!

t

tt0

!0

a

b

!0

!

!:

#

#0

t

tt0

b

a

Figure 3-35 : Chemin et réponse d’unessai de fluage

Figure 3-36 : Chemin et réponse d'unessai de relaxation

Page 200: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 79

L'essai de relaxation est un autre essai qui permet de rendre compte des effets dutemps sur le comportement : c'est l’essai dual de l'essai de fluage. Il est décrit par lafigure 3-36. Dans cet essai on applique une déformation # = #0 au temps t = t0 ; cettedéformation est maintenue constante. La réponse est donc en contrainte ; si le tempsa un effet sur le comportement, la contrainte décroît (compression >0) avec le tempsdepuis ! = !0 au temps t = t0, pour tendre généralement vers une asymptote ! =!: < !0.

3.8.2 INFLUENCE DE L'INTENSITÉ DU DEVIATEUR

SUR LE COMPORTEMENT DIFFÉRÉ.

Prenons un essai de fluage en compression simple et faisons varier la contrainteappliquée à l'éprouvette (figure 3-37). Si la charge est faible par rapport à lacontrainte de rupture, la vitesse de fluage s'annule rapidement après une phasetransitoire (courbe a). La déformation reste toujours faible. Ce fluage estrelativement bien traduit par une expression sous forme logarithme du temps, parexemple :

# - #0= A ln ( ;t + 1) (3- 18)

Ce fluage est aussi appelé fluage < ou fluage logarithmique. A noter que cetteexpression n’est vraie que pour une fenêtre t = [0,T].

La courbe de fluage (b) correspond à des niveaux de contraintes plus élevés et peutêtre décomposée en deux stades :! stade I : ou fluage primaire ou fluage transitoire ou fluage >. C'est un stade de

transition ou la vitesse de fluage diminue rapidement avec le temps. Ce fluagepeut prendre la forme :

# - #0 = A tm (3-19)

avec m compris entre 0,3 et 0,6 selon les conditions expérimentales ;! stade II : ou fluage secondaire ou fluage stationnaire. Dans ce stade, la

vitesse de fluage est constante, et cette constante est analogue à la viscosité desfluides.

Après ce stade, les déformations peuvent s'amortir ou se poursuivre à une vitesseconstante (fluage permanent). La vitesse de fluage croît avec la contrainte appliquéeavec une loi de la forme :

d#/dt = K !n (3- 20)

avec n compris entre 1 et 5 (voir chapitre 8, sel gemme). La température joue un rôletrès important sur cette vitesse de fluage.

Cependant si la charge appliquée est encore augmentée, il apparaît alors untroisième stade III (courbe c) ou fluage accéléré. Ce fluage est essentiellement lié àun développement important de la micro fissuration. Cette accélération de la vitessede fluage d#/dt conduit à plus ou moins long terme à la rupture de l'éprouvette. Lesuivi de la vitesse de fluage et de sa variation dans le temps est la base de la méthodede suivi de la stabilité des ouvrages : l'ouvrage est stable si la vitesse de fluagediminue ou reste constante dans le temps, l'ouvrage devient instable à plus ou moinslong terme si la vitesse de fluage augmente avec le temps.

Page 201: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

80 Manuel de Mécanique des Roches

Enfin, si on effectue un essai de fluage sous des contraintes proches de la contraintede rupture, les stades I, et II peuvent disparaître pour ne laisser place qu'au stade III.

!

#

?

???

??

???

c

b

a

t

Fluage

Relaxation

Courbe limite

!

#

Figure3-37 : Influence du déviateur surla réponse en fluage

Figure 3-38 : Définition et obtentiond'une courbe « ultime »

3.8.3 NOTION DE COURBE LIMITE

La réponse de la roche dépend du temps avec une plus ou moins grande intensitéselon la nature minéralogique et les fluides interstitiels. Ainsi la résistance et lesmodules obtenus lors des essais en laboratoire vont dépendre de la vitesse desollicitation utilisée. Pour caractériser le comportement à long terme et obtenir ainsila courbe limite ou ultime, il serait nécessaire d'effectuer des essais à vitesse dechargement très faible. Cette courbe limite peut être déterminée de la façon suivanteà partir d'un essai standard :! à un état de chargement donné on stoppe l'essai et on effectue, soit un essai de

fluage, soit un essai de relaxation (figure 3-38);! à la stabilisation on obtient un point de la courbe ultime ; la procédure est

répétée à différents niveaux de chargement.

3.9 EFFET D’ÉCHELLE

3.9.1 POSITION DU PROBLÈME

Un des problèmes essentiels en mécanique des roches est l'extrapolation des mesuresde laboratoire aux propriétés à plus grande échelle. Afin d'étudier ce problème, denombreux auteurs ont réalisé des essais sur des échantillons de différentesdimensions qui ont montré que la résistance à la compression variait avec la taille del'éprouvette. La première explication consiste en une approche probabiliste : lorsquele volume de roche soumis à un essai augmente, la probabilité de contenir desdéfauts, susceptibles d’amorcer une fissure, ou même des fissures préexistantes,augmente. Cependant, la figure 3-39 résumant divers résultats publiés montre quetous les matériaux ne présentent pas un même comportement lorsque leur dimensionaugmente. Les travaux de différents auteurs permettent de classer cescomportements en trois catégories :! la résistance décroît avec les dimensions de l'éprouvette : effet de volume ;! la résistance augmente avec le volume de l'éprouvette : effet de surface ;

Page 202: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 81

! la résistance croît puis décroît : les deux effets se compensent. L'effet de surfacea tendance à dominer pour de petites dimensions d'échantillons.

Quelques exemples des différents comportements sont présentés ci-après.

0

50

100

150

200

250

0 2 4 6 8 10 12

!c (MPa)

Grès 2

Calcaire 1

Granite

Charbon

Calcaire 2

Grès 1

Marbre

Ø (cm)

Figure 3-39 : Résistance à la compression en fonction de la dimension del'échantillon pour diverses roches

3.9.2 EFFET DE VOLUME

La rupture est généralement amorcée par une augmentation de contrainte sur unehétérogénéité de la roche. Si on considère une répartition homogène de cesimperfections, en augmentant la taille de l'éprouvette on augmente le nombre desdéfauts susceptibles d'amorcer une fissure. Ainsi il parait logique que la résistance àla compression diminue quand la dimension de l'échantillon augmente.

Ce raisonnement peut également expliquer la dispersion importante lors des essais,le défaut générant la rupture pouvant être différent d'un échantillon à l'autre. Enconséquence, l'augmentation de la taille de l'éprouvette devrait diminuer ladispersion des résultats, l'amorçage de la première fissure ayant plus de chance de sedérouler dans les mêmes conditions.

Tout ceci est basé sur le concept de « maillon le plus fragile » : si on discrétisel'échantillon en une infinité d'échantillons élémentaires, la résistance globale estdéterminée par la résistance du maillon le plus faible. On peut alors établir unerelation entre la résistance de l'éprouvette et son volume, connaissant la probabilitéde rupture. La fonction de densité de probabilité la plus utilisée est celle utilisée parla théorie de Weibull. La probabilité de rupture d'un volume V d'un échantillonsoumis à une contrainte ! est :

S f dVV

" % %(

)

**

+

,

--@1 exp ( )! (3-21)

f(!) est une fonction du matériau f u

o

m( )! ! !

!"

%1

23

4

56 (3-22)

Page 203: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

82 Manuel de Mécanique des Roches

avec !u, la plus petite contrainte que tout élément de volume élémentaire peutsupporter, !o, la contrainte de référence, m, un paramètre d'échelle. Dans le cas oùla distribution des contrainte est uniforme :

! !!%1

23

4

56

u

o

m

représente donc le risque de rupture pour le volume élémentaire.

Prenons deux éprouvettes :

! !!

! !!

11

22

%1

23

4

56 "

%1

23

4

56

u

o

mu

o

mV V (3-23)

si !u = 0 on obtient !!

1

2

2

1

1"1

23

4

56

VV

m/(3-24)

Ainsi l'effet d'échelle ne dépendrait que de m. En fait !u ' 0 et les constantes dumatériau ne sont pas déterminées de façon simple. La théorie de Weibull estcritiquable sur plusieurs points :! en tant que modèle statistique, il demande de très nombreux essais afin de

déterminer les deux constantes propres au matériau et nécessaires aux calculs ;! elle fait appel à la théorie des valeurs extrêmes impliquant que la résistance soit

déterminée par la fissure la plus critique. La rupture est donc synonymed’amorçage de la fissure. Or, si cela peut être le cas dans un essai de tractiondirecte, ce n'est plus vrai lors d'un essai en compression simple ;

! il est de plus nécessaire que l’état de contrainte soit uniforme, ce qui n'est pastoujours le cas.

Houpert a étudié la dispersion des résistances à la compression pour le granite deSenones. Il apparaît clairement sur la figure 3-40 que la dispersion diminue lorsquele volume des éprouvettes augmente. Ce qui est en accord avec les théories de larupture comme nous l'avons vu plus haut.

3.9.3 EFFET DE SURFACE

Certains essais contredisent les résultats présentés. En effet, pour certaines roches larésistance à la compression peut augmenter lorsque les dimensions de l'échantillonaugmentent comme sur le granite de Senones ( figure 3-41).

0

2

4

6

8

0 400 800 1200

Coefficient de variation (%)

Volume (cm3) 150

160

170

180!c (MPa)

Ø éprouvette (cm)

Figure 3-40 : Dispersion de larésistance et volume essayé

Figure 3-41 : Effet d'échelle inverse surle granite de Senones

Page 204: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 83

Cet effet d'échelle inverse serait lié à des détériorations de la couche externe del'éprouvette modifiant les propriétés mécaniques de la roche sur une certaineépaisseur. Or, la surface externe par unité de volume décroît lorsque les dimensionsde l'éprouvette diminuent. Ainsi, l'effet de surface est prépondérant (lorsqu'il existe)pour les éprouvettes de petit diamètre.

3.9.4 EFFET D’ÉCHELLE MIXTE

Pour illustrer l’effet d’échelle mixte, composé d’un effet de surface pour leséprouvettes de petit diamètre et d’un effet de volume pour les diamètre plusimportants, les figures 3-42 et 3-43 présentent des résultats d’essai de compressionuniaxiale réalisés sur une ardoise suivant les deux directions principalesd’anisotropie.

2 4 6 8 10 12

!c (MPa)

100

200

Ø (cm)2 4 6 10 128

50

150

Ø (cm)

!c (MPa)

Figure 3-42 : Évolution de la résistanceà la compression orthogonalement à laschistosité

Figure 3-43 : Évolution de la résistanceà la compression parallèlement à laschistosité

Pour de petits diamètres (Ø < 40mm) on aurait un effet d'échelle inverseprobablement dû à un « effet de peau », la surface endommagée durant lapréparation des échantillons étant relativement importante. Lorsque le diamètreaugmente on retrouve un effet d'échelle normal faisant diminuer la résistance avec levolume.

Si nous excluons la première phase faisant intervenir un mécanisme différent, ladécroissance de résistance peut se traduire par l'équation suivante :

!c = 304 exp[- 0,02 Ø ] (3-25)

avec !c = résistance à la compression en MPa, Ø = diamètre d'éprouvette en cm.

Pour les essais réalisés sur des éprouvettes selon le plan d’anisotropie, la résistance àla compression présente une évolution un peu différente (figure 3-43). On constateune augmentation de la résistance jusqu'à un diamètre de 70mm puis une légèrediminution. Peut-on voir là l'influence très marquée d'un effet de surface ? Il s'agitbien d'un phénomène lié à la préparation des éprouvettes, mais le terme effet desurface ne paraît pas suffisant car cette direction de carottage a posé de très grosproblèmes, les éprouvettes cassant très souvent soit durant le carottage soit durant larectification. Les contraintes engendrées durant cette phase préparatoire ont doncsouvent suffit à amorcer des ruptures par « décollement » de plans de schistosité.

Page 205: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

84 Manuel de Mécanique des Roches

3.9.5 TRANSITION FRAGILE-DUCTILE ET EFFET D'ÉCHELLE

Pour une même roche, le comportement est modifié par l'augmentation de lacontrainte moyenne. Par exemple un calcaire dur (!c> 50 MPa) est élastique-fragileen compression simple, il devient élasto-plastique en essai triaxial sous pression deconfinement de 30 MPa, puis ductile sous pression de confinement proche de 500MPa. Une élévation de température produit des effets similaires.

Le changement d'échelle fait passer aussi le comportement de la fragilité à laductilité : un massif rocheux formé de roche fragile a un comportement élasto-fragile à l'échelle du décamètre, et relativement ductile à l'échelle kilométrique. Onsait que la dispersion des résultats d'essais est elle aussi sensible à l'échelle (Bernaix,1967), elle diminue pour des échantillons plus grands, et peut même disparaîtrelorsqu'on passe de la fragilité vers la ductilité.

L'effet d'échelle joue de la même manière autour d'une cavité creusée dans un terrainsous forte contrainte : un forage de petit diamètre est parfaitement stable ; quelquesdéformations non réversibles peuvent apparaître dans un petit tunnel, avec desdéformations différées modestes pendant un jour ou deux ; mais une caverne de 15m au même endroit donne lieu à des déplacements différés plus importants, que ceseffets différés apparaissent comme du fluage, de la convergence « inextinguible »,ou comme une croissance à long terme de la charge des soutènements.

SÉLECTION BIBLIOGRAPHIQUEAFNOR : Normes NFP 94-420, 94-422, 94-423, 94-425, 94-426.

Bieniawski Z.T. - The effect of specimen size on compressive strength of coal. Int. J. RockMech. Min. Sci., vol. 5, pp. 325-335, 1968.

Bernaix J. - Etude géotechnique de la roche de Malpasset, Dunod, 1967.

Einstein H., Baecher G. & Hirschfeld R. - The effect of size on strength of a brittle rock. 2èmeCongrès ISRM, Belgrade, vol. 2, thème 3, 1970.

Homand F. - Comportement mécanique des roches en fonction de la température. MémoireSci. de la Terre 46, 261 p., 1986.

Houpert R. & Tisot J.P. - Effet d'échelle et dispersion des contraintes de rupture encompression simple dans le cas d'un granite. Revue de l'Industrie Minérale,n° spécial, pp. 29-34, 1969.

Mandel J. – Propriétés mécaniques des matériaux. Eyrolles, 284 p., 1978.

Morlier P., Amokrane K. & Duchamps J.M. - L'effet d'échelle en mécanique des roches,recherche de dimensions caractéristiques. Revue Française de Géotechnique,49, pp. 5-13, 1989.

Niandou H., Shao J.F., Henry J.P. & Fourmaintraux D. – Laboratory investigation of themechanical behaviour of Tournemire shale. Int. J. Rock Mech. Min. Sci., 34(1), pp. 3-16, 1997.

Shao J.F. & Henry J.P. – Modélisation du comportement d’une craie blanche très poreuse etvalidation. Revue Française de Géotechnique, 43, pp. 35-46, 1988.

Page 206: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 85

ANNEXE : RELATIONS CONTRAINTE-DÉFORMATIONEN MILIEU ÉLASTIQUE

MILIEU ISOTROPE

Les deux paramètres E module de Young, (ou module d'élasticité longitudinale) et $,coefficient de Poisson, suffisent à caractériser le comportement élastique linéaired’un milieu homogène. Sous forme matricielle, la relation entre le tenseur descontraintes et celui des déformations dans le cas d'un essai de compression sur unmatériau dont le comportement est élastique et linéaire s'écrit :

#

#

#

$

$

!x

y

z

x

EEE

(

)

***

+

,

---

" %

%

(

)

***

+

,

---- .

1(3-26)

A trois dimensions, la relation entre le tenseur des contraintes et celui desdéformations s'écrit :

#

#

#

;

;

;

$ $

$

$

$

$

!

!

!

x

y

x

yz

xz

xy

x

y

x

E E E

E E

E

E

E

E

(

)

********

+

,

--------

"

% %

%

'

'

'

(

)

*************

+

,

-------------

1 0 0 01 0 0 0

1 0 0 02 1 0 0

2 1 02 1

( )

( )

( )

//

/

/

yz

xz

xy

(

)

********

+

,

--------

(3-27)

De cette relation, il ressort qu'il existe également un coefficient de proportionnalitéentre les contraintes de cisaillement / et les déformations angulaires ; appeléesdistorsions ou glissements (;ij=2#ij). Ce coefficient est désigné par G et appelécoefficient d'élasticité transversale ou module de cisaillement :

G E"

'2 1( )$(3-28)

A partir d'un essai de compression hydrostatique, il est possible de déterminer lecoefficient de proportionnalité entre la contrainte isotrope ! appliquée et ladéformation élastique volumique de l'échantillon. Ce coefficient désigné par K estappelé module de compressibilité K tel que :

K E K VV

"%

"3 1 2( )

;$

!& (3-29)

Les coefficients d'élasticité définis précédemment peuvent s'exprimer en fonctiondes coefficients de Lamé 9 et / :

E = / 3 9 + 2 /9 + / $ =

92 (9 + /) G = / K =

E3 (1 - 2$) (3-30)

et inversement :

Page 207: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

86 Manuel de Mécanique des Roches

9 = E $

(1 + $) (1 - 2 $) / = G = E

2 (1 + $) (3-31)

ÉLASTICITÉ EN MILIEU ANISOTROPE

D'une manière générale, dans un repère quelconque orthonormé R, les relationsentre les taux de déformations et les contraintes peuvent s'écrire vectoriellementsous la forme:

# = A.! ( 3- 32)

avec : # vecteur des taux de déformation, ! vecteur des contraintes et A matriced’élasticité à 36 coefficients

La relation (3-32) constitue la loi de Hooke généralisée. On démontre par desconsidérations énergétiques que cette matrice est symétrique. Le nombre decoefficients indépendants est donc réduit à 21.

#

#

#

;

;

;

$ $ A A A

$ A A A

A A A

/

x

y

x

yz

xz

xy

x

yx

x

zx

x

x yz

yz

x xz

xz

x xy

xy

y

zy

y

y yz

yz

y xz

xz

y xy

xy

z

z yz

yz

z xz

xz

z xy

xy

yz

yz

E E E G G G

E E G G G

E G G G

G

(

)

********

+

,

--------

"

% %

%

1

1

1

1

, , ,

, , ,

, , ,

,, ,

,

xz

xz

yz xy

xy

xz

xz xy

xy

xy

x

y

x

yz

xz

xy

G G

G G

G

/

/

!

!

!

/

/

/1

1

(

)

****************

+

,

----------------

(

)

********

+

,

--------

(3-33)

où! Ex, Ey, Ez sont les modules de Young dans les directions x, y et z ;! Gyx, Gxz, Gxy sont les modules de cisaillement pour les plans respectivement

parallèles aux plans yOx, xOz et xOy ;! $yz, $zx, $zy, $xy, $xz, $yz sont les coefficients de Poisson.! Les coefficients de Poisson $ij correspondent au rapport de la déformation dans

la direction j (effet) et de la déformation dans la direction i dues à la contrainteagissant dans la direction i (cause). Les coefficients de Poisson $ij et $ji sont telsque $ij/Ei = $ji/Ej

! /xz,yz : ........ : /xz,xy sont appelés coefficients de Chentsov et sont tels que /ij,klcaractérise le cisaillement dans le plan parallèle à kl induit par la contraintetangentielle dans le plan parallèle à ij. Autrement dit,

/ik,jkGjk =

/jk,ikGik (3-34)

! Ayz,x ........ Axy,z sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de premierordre ; Ax,yz,........ Az,xy sont appelés les coefficients d'influence mutuelle de

Page 208: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Comportement mécanique des roches 87

second ordre. Le coefficient A ij,k caractérise l'étirement dans la directionparallèle à k induit par la contrainte de cisaillement agissant dans un planparallèle à celui défini par les indices ij. Le coefficient Ak,ij caractérise uncisaillement dans le plan défini par les indices ij sous l'influence d'unecontrainte normale agissant dans la direction k. Autrement dit :

Aij,kEk =

Ak,ijGij (3-35)

Rappelons que dans le cas général de l'anisotropie, il n’y a jamais concordance desdirections principales de contrainte et de déformation, contrairement au cas del'isotropie.

LE MILIEU ORTHOTROPE

Les milieux naturels présentent souvent une structure orientée planaire (présence deplans et orientation préférentielle des grains dans ces plans par exemple). Repéronsla matrice rocheuse suivant le repère orthonormé de structure noté S de la figure3-9, avec :

• S1 direction orthogonale aux plans ;

• S2 direction d'allongement des grains par exemple ;

• S3 de telle façon que le repère S = S1,S2,S3 soit direct.

Une approche très physique consiste à écrire la matrice d'élasticité [A] enintroduisant des coefficients (complaisances) entre cause (contrainte normale outangentielle) et effet (allongement et variation angulaire), au lieu de déduire lesrelations de la matrice de l’équation générale (3-33). Prenons le repère R identiqueau repère S pour définir les tenseurs de contrainte et déformation et par conséquentla matrice [A]. Dans ce repère particulier, les contraintes normales n'induisent quedes allongements (un cube se transforme en un parallélépipède rectangle), et lescisaillements ne provoquent aucun allongement. Le tableau 3-1 synthétise alors larelation entre cause et effet.

Tableau 3 - 1 : MATRICE D’ÉLASTICITE DANS LE REPÈRE S

Cause

Contrainte normale Contrainte tangentielle

S1 S2 S3 S2,S3 S3,S1 S1,S2

!11 !22 !33 /23 /31 /12

S1 #11 1/E1 -$21/E2 -$31/E3 0 0 0

S2 #22 -$12/E1 1/E2 -$32/E3 0 0 0

Allo

nge-

men

t

S3 #33 -$13/E1 -$23/E2 1/E3 0 0 0

S3,S2 ;32 0 0 0 1/G23 0 0

S3,S1 ;31 0 0 0 0 1/G31 0

S1,S2 ;12 0 0 0 0 0 1/ G12

Effe

t

Varia

tion

d’an

gle

Page 209: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

88 Manuel de Mécanique des Roches

La notation $ij postule que i est l'indice lié à la cause et j l'indice lié à l'effet. Du faitde la symétrie de la matrice, on doit avoir :

$ijEi

= $jiEj

(3-36)

Il y a donc 9 coefficients indépendants pour caractériser un matériau orthotrope.

On ne peut avoir concordance des directions principales en contrainte et endéformation que si elles sont confondues avec le repère structural S.

LE MILIEU ISOTROPE TRANSVERSE

Dans le cas particulier où les directions S2 et S3 sont interchangeables, il y aisotropie dans le plan (S2, S3).Dans ce cas, nous avons :

E2 = E3, $12 = $13, $23 =$32 et G13 = G12

La matrice d'élasticité s'écrit alors dans le repère structural :

[A] =

)****(

,----+

1/E1 -$21/E2 -$21/E2 0 0 0

-$12/E1 1/E2 -$23/E2 0 0 0

-$12/E1 -$23/E2 1/E2 0 0 0

0 0 0 1/G23 0 0

0 0 0 0 1/G12 0

0 0 0 0 0 1/G12

(3-37)

De plus nous avons :

$12E1

= $21E2

et G23 = E2

2(1 + $23) (3-38)

Il y a donc 5 coefficients indépendants E1, E2, $12 (ou $21), $23 et G12 appelésmodules principaux pour caractériser un matériau isotrope transverse.

Page 210: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les minéraux des roches

Page 211: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

© École des mines de Paris, 200960, boulevard Saint-Michel - 75272 Paris Cedex 06 - Franceemail : [email protected]://www.ensmp.fr/Presses

© Photo de couverture :  Michel Demange

ISBN : 978-2-35671-016-1

Dépôt légal : 2009

Achevé d’imprimer en 2009 (Paris)

Tous droits de reproduction, de traduction, d’adaptation et d’exécution réservés pour tous les pays

Page 212: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Michel Demange

Les minéraux des roches

Caractères optiques – composition chimique –Gisements

Page 213: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

INTRODUCTION

POURQUOI LE MICROSCOPE ? PROPOS DE L’OUVRAGE

Le but de la pétrologie est de comprendre les conditions de formation desroches. Le premier stade de cette démarche est de décrire et classer les roches, ce qui estl’objet de la pétrographie. De nombreux caractères peuvent être retenus : densité,dureté, couleur, structure (à l’échelle de l’affleurement), texture (à l’échelle del’échantillon ou du microscope), composition minéralogique, composition chimique,vitesse de propagation des ondes…. Parmi tous les caractères, la compositionminéralogique est certainement le plus important : il conditionne, et permet même deprévoir plus ou moins précisément les autres caractères et surtout, il permet de remonteraux conditions même de formation des roches. En effet, la nature et la compositionchimique des minéraux associés dans une roche obéissent à des lois d’autant plus strictesque la température de formation a été plus élevée.

Deux méthodes de détermination des minéraux sont relativement simples, rapideset peu onéreuses : la diffraction des rayons X et le microscope polarisant.

La diffraction des rayons X permet une identification précise des minéraux, maisnécessite en général des séparations. Cette méthode demeure indispensable dans le cas deroches et de minéraux à grain très fin. Toutefois, son emploi peut être difficile lorsque laroche comprend de nombreux minéraux. Les minéraux en faible proportion risquent depasser inaperçus. Et surtout cette méthode ne permet pas d’apprécier la texture de la rocheet les rapports des minéraux entre eux.

L’emploi du microscope polarisant lève ces difficultés – du moins dans lecas des roches dont le grain est suffisamment gros (en principe supérieur à l’épaisseur dela lame mince soit 30 microns).

L’étude d’un nombre plus ou moins important de lames minces demeure unpréalable à des méthodes plus complexes et plus onéreuses, comme l’analyse chimiquedes minéraux individuels, soit par voie humide soit à la microsonde électronique.

Toutefois le microscope polarisant nécessite un apprentissage plus ou moins longet une certaine expérience. Il existe des tables, mais il est rare que l’on arrive à déterminerun minéral complètement inconnu à l’aide des seules tables.

Le but de cet ouvrage est d’illustrer la plupart des minéraux constituantscommuns des roches tels qu’ils se présentent au microscope polarisant et de faciliter cetapprentissage. Le choix des espèces minérales retenues a été fait en référence au livredésormais classique de Deer, Howie & Zussman, « An Introduction to the Rock FormingMinerals » (première édition 1966). Le présent guide comprend deux parties, un livre etun disque compact.

Ce disque compact illustre l’aspect au microscope des minéraux constituants desroches, au moyen de 383 fiches, présentant de nombreuses lames minces en lumière

Page 214: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

10 Introduction

naturelle et en lumière polarisée, Chaque minéral est présenté par des fiches où figurentaprès son nom et sa composition chimique, un ou deux schémas illustrant ses formescristallines et ses différents caractères optiques, ainsi que des photos de lamesminces illustrant ces caractères. Il y a en général deux photos prises dans lamême position, l’une en lumière naturelle, l’autre en lumière polarisée. Les couleurs, surun écran d’ordinateur, sans atteindre la luminosité du microscope, sont le plus souventsupérieures à des photographies imprimées. L’avantage d’un CD est de présenter sous unformat réduit suffisamment d’illustrations pour qu’un même minéral puisse être présentésous différents faciès et dans différents gisements.

Le livre, volontairement succinct, aborde les points pour lesquels l’illustrationdonnée par un disque compact, a moins d’intérêt. Quelques notions sur la définition d’uneespèce minérale, les facteurs d’apparition des minéraux et les méthodes d’observation aumicroscope sont rapidement rappelées. L’essentiel du livre consiste en une série demonographies sur les différents minéraux ou groupes de minéraux. Il ne s’agit pas deremplacer les ouvrages de minéralogie préexistants mais de présenter quelques pointimportants pour la caractérisation d’un minéral :

• quelques éléments sur la structure du minéral, dans la mesure où celle-ci enexplique la formule chimique ;

• la composition chimique et les variations que l’on peut attendre dans unmême minéral ou une même famille de minéraux tant sur les élémentsmajeurs que sur certains éléments mineurs ;

• les conditions de stabilité du minéral ; composition chimique et conditions destabilité débouchent sur les différents gisements de ce minéral : un minéraldonné ne se rencontre pas dans n’importe quelle roche, les différentesparagenèses (association de minéraux à l’équilibre) ne sont pas quelconques etles variations de composition chimique d’un minéral rendent compte dedifférentes évolutions géologiques. C’est en fait ce souci des gisements et desévolutions géologiques qui détermine le plan adopté dans ce guide, planquelque peu différent de la classification minéralogique classique. Les principesdu calcul des formules structurales sont donnés en annexe.

• Les caractères optiques des minéraux les plus importants seront rappelés dansle livre par des tableaux récapitulatifs volontairement succincts.

Page 215: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

1 - ROCHES ET MINERAUX

1-1. QU’EST CE QU’UN MINERAL ?Un minéral est un solide naturel homogène caractérisé par une structure

atomique ordonnée et une composition chimique définie.La définition de l’Internation Mineralogical Association “a mineral is an element

or chemical compound that is normally crystalline and that has been formed as a result ofgeological processes” (Nickel, 1995) exclut les “minéraux” synthétiques.

1-1-1. Une structure ordonnée

Les minéraux sont des solides constitués d’atomes ordonnés en un réseaupériodique et symétrique. Frankenheimer (1842) puis Bravais (1848) ont montré qu’ilexistait 14 types, (et 14 seulement), de telles structures, les réseaux de Bravais. Cesréseaux dérivent de sept systèmes réticulaires de base : triclinique, monoclinique,orthorhombique, quadratique, rhomboédrique, hexagonal, cubique. Ces systèmes sontcaractérisés par des éléments de symétrie : centres, plans, plans inverses (symétrie parrapport à un plan et rotation), axes (d’ordre 2, 3, 4 ou 6), axes inverses (rotation etsymétrie par rapport à un centre).(fig.1)

La maille élémentaire est le plus petit volume cristallin qui présente toutes lespropriétés géométriques (symétrie, dimensions), physiques et chimiques du cristal. Elleest définie par les longueurs des trois vecteurs a, b, c et les trois angles α, β, γ.

Figure 2. maille élémentaire

Ces trois vecteurs forment une base dans laquelle sont repérés tout plan ou toutvecteur. Dans cette vase, l’équation d’un plan est

u x/a + v y/b + w z/c = 1u, v et w sont des nombres entiers appelés indices de Miller. Une face cristalline seranotée (h k l). Par convention un indice négatif (–u) est noté (u) Le vecteur normal à ceplan a pour coordonnée u, v, w : une direction sera donc [u v w].

Page 216: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

12 Roches et minéraux

Figure 1: les systèmes cristallins

Page 217: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les minéraux des roches 13

Les systèmes hexagonaux et rhomboédriques utilisent un référentiel et desnotations légèrement différentes : dans le plan x y on utilise 3 axes à 120° l’un de l’autre(x y t), l’axe z est perpendiculaire au plan x y. La notation d’un plan dans ce système sera(j h k l), j, h, et k selon les axes x y t et l selon l’axe z, avec

j + h + k = 0

Figure 3. Référentiel dans les systèmes hexagonal et rhomboédrique

Lorsque le réseau et le cristal ont la même symétrie, qui est alors maximale, onparle d’holoédrie.

Lorsque le cristal a une symétrie moindre que le réseau, on parle de mériédrie(hémièdre si elle ne comporte que la moitié des faces du système holoèdre correspondant,tétartoèdre avec le quart des faces..). Les mérièdries les plus communes sont :

• l’antihémièdrie : absence de centre (et des plans associés) ; un exemple deforme antihémièdre est le tétraèdre (cubique ou quadratique) qui dérive del’octaèdre ; un autre exemple est la tourmaline dont les prismes ont deuxextrémités qui ne sont pas symétriques. Ces minéraux présentent despropriétés piézo-électriques ;

Figure 4. Antihémiédrie

Page 218: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

14 Roches et minéraux

• la parahémiédrie : le centre de symétrie est présent, mais les axes binaires sontabsents ; par exemple, le dodécaèdre pentagonal (forme commune de la pyrite,ou pyritoèdre) dérive d’un héxatétraèdre ;

Figure 5. Parahémiédrie

Figure 6. Hémihédrie holoaxe

Tout plan réticulaire (contenant un certain nombre de nœuds du réseau cristallin)peut former une face d’un cristal. Mais la croissance se fait plus ou moins rapidementselon les directions. Les faces à croissance rapide s’éliminent rapidement et les faces àcroissance lente deviennent dominantes. Ce sont ces faces qui déterminent les formescristallines du minéral. Les formes cristallines reflètent la structure du réseaucristallin et la classe de symétrie auquel il appartient. Lorsqu’un minéral présente sesformes cristallines propres, on dit qu’il est automorphe ; sinon on parle de minéralxénomorphe. Dans les roches, certains minéraux, comme la tourmaline, le disthène, legrenat…, sont très fréquemment automorphes ; d’autres, comme le quartz, plusrarement.

Un clivage est un plan de séparation, parfait, répétitif. Le ou les plans de clivagetraduisent à l'échelle macroscopique une ou des zones de faiblesse dans le réseaumicroscopique. Les clivages suivent les mêmes lois de symétrie que le cristal. Certainsminéraux n’ont pas de clivage (le quartz, par exemple) ; d’autres en ont un ou plusieurs.

Page 219: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les minéraux des roches 15

Une cassure est une surface plus ou moins irrégulière, a priori non répétée ourépétée un petit nombre de fois. L’aspect de certaines cassures peut être caractéristiqued’un minéral donné. Les cassures de la tourmaline transverses sur le prisme en sont unexemple.

Une macle est un édifice cristallin constitué par l’association de plusieurscristaux d’une même espèce minérale, orientés les uns par rapport aux autres suivant uneloi de symétrie déterminée. Il existe deux types de macles :

• Les macles à plan de macle : les deux individus sont symétriques par rapport àun plan, la surface d'accolement est alors un plan (exemple : macle de l’albitedans les plagioclases) ;

• Les macles à axe de macle : les deux individus sont symétriques par rapport àun axe, la surface d'accolement est alors quelconque (exemple : macle deCarlsbad dans les feldspaths).

Les macles peuvent être simples ou répétées. Parmi les macles répétées, ondistingue :

• Les macles polysynthétiques où les différents individus forment des lamellesparallèles (macles de la cordiérite, de l’albite et du péricline dans lesplagioclases, de la grünerite..)

• Les macles cycliques où les individus forment une association à peu prèscirculaire (macles de la leucite par exemple)

La maille élémentaire du système maclé possède une symétrie supérieure à celle dela maille élémentaire des réseaux individuels

1-1-2. Une certaine composition chimique

Une composition chimique donnée ne suffit pas à définir un minéral. En effet ilexiste des minéraux de même composition chimique mais de structure différente : lespolymorphes : diamant (cubique) et graphite (hexagonal), calcite (rhomboédrique) etaragonite (orthorhombique) en sont des exemples bien connus. D’autres exemples sontdonnés par les différents polymorphes de la silice ou encore des feldspaths.

La composition chimique varie dans certaines limites en fonction :• de la présence d’éléments traces inclus dans le réseau ;• des substitutions entre éléments

- ces substitutions peuvent se faire d’atome à atome, par exemple, lasubstitution Mg Fe2+  ;- ou encore par des lois de substitution impliquant plusieurs éléments. Unexemple est donné par la substitution très répandue dans les silicates

SiIV MgVI AlIV AlVI

(où AlIV est l’aluminium tétracoordonné, en site tétraédrique, en liaison avec 4 atomesd’oxygène  et AlVI est l’aluminium hexacoordonné, en site octaédrique, en liaison avec 6atomes d’oxygène).

Les micas ou les amphiboles sont des familles de minéraux où les lois desubstitution sont particulièrement variées.

Les substitutions dans les minéraux sont régies par des lois strictes (Règles deGoldschmidt) :

• l’équilibre électrique doit être respecté : ainsi dans la substitution ci-dessus lavalence du silicium est de 4, celle du magnésium 2 : 4 + 2 = 6 ; la valence del’aluminium est 3 : 3 + 3 = 6 ;

Page 220: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

16 Roches et minéraux

• d’autre part ne peuvent se substituer que des éléments ayant des rayonsioniques ne différant pas plus que de 15 % (la différence peut être plus grandemais la substitution n’est que partielle) : le fer se substitue couramment aumagnésium dans les silicates et les carbonates; mais le remplacement dumagnésium par le calcium est impossible (ou du moins très limité) dans lescarbonates vu la différence de rayons ioniques de ces éléments. Lorsque deuxéléments ont la même charge, celui qui a la rayon ionique le plus petit estincorporé préférentiellement : les termes magnésiens d’une série isomorphesont stables à des températures plus élevées que les termes ferrifères ;

• dans le réseau, un site peut rester, tout ou partiellement, vide : ainsi lasubstitution 2 AlVI _ 3 (Fe, Mg)VI , (où le signe _ représente un sitevacant), est une substitution (limitée) entre micas dioctaédriques et micastrioctaédriques.

Figure 7. Valence, rayon ionique (données de Shannon et Prewitt, 1969 et de Shannon,1976)

La composition des minéraux est d’autant plus contrainte que la température estforte. La connaissance des compositions précises des minéraux et de leurs variations esttrès importante pour reconstituer les conditions de formation des roches.

Les méthodes optiques permettent certaines déterminations précises. Le fondateurde ces méthodes a sans doute été A. Michel-Lévy avec ses nombreux abaques pour lesfeldspaths (1894-1904). Les ouvrages de Roubault et al. « Détermination des minéraux

Page 221: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les minéraux des roches 17

des roches au microscope polarisant »  (1963, Fabriès et al. 1984) et de Tröger« Optische Bestimmung des gesteinsbildenden Minerale » (1971), fournit un certainnombre d’abaques permettant de déterminer au microscope, ou du moins d’approcher, lescompositions d’un certain nombre de minéraux. Ces méthodes sont simples et bonmarché, mais elles ne fournissent que des approximations. Elles demeurent courammentemployées aujourd’hui pour la détermination rapide des plagioclases. L’invention de lamicrosonde électronique en 1951 permet des analyses quasi ponctuelles ; c’estaujourd’hui un instrument répandu dans tous les laboratoires.

Lorsque l’on étudie un phénomène géologique donné (une série magmatique, unmétamorphisme prograde ou une zonation métasomatique par exemple), on constate quela composition chimique d’un même minéral varie de façon plus ou moins régulière àtravers les différents stades de ce phénomène. On met ainsi en évidence différentes lois desubstitution qui jouent simultanément : par exemple une biotite s’enrichitsimultanément en fer, (selon la substitution Mg => Fe) et en aluminium (selon lasubstitution Si Mg => Al Al). Dans l’espace des substitutions possibles pour un mêmeminéral (qui sont a priori indépendantes), il existe une loi de variation de la compositionchimique relativement simple qui fait jouer simultanément les différentes substitutionspossibles: on parle alors de substitutions couplées. Les variations de compositionchimique d’un même minéral apparaissent ainsi d’excellents marqueurs de phénomènesgéologiques.

1-2. CLASSIFICATION DES MINERAUX

On connaît actuellement environ 4170 espèces minérales. Parmi ces minéraux,environ une cinquantaine sont des minéraux constitutifs des roches courants Lesminéraux d’importance économique courants, constituants des minerais, sont environ 70à 80.

Classiquement (Dana’s New Mineralogy, 9ème édition, 1997 ; Strunz,Mineralogical Tables, 9ème édition, 2006) les minéraux sont rangés en 9 classes sur labase de leur composition chimique. Selon un décompte assez ancien portant sur 2300minéraux, la répartition serait la suivante :

1- éléments natifs 50

2- sulfures et sulfosels 350

3- halogénures 40

4- oxydes et hydroxydes 220

5- carbonates [ (CO3) 2-] 100

nitrates[ (NO3) -]] 8

borates [ (BO3) 3-] 100

6- sulfates [(SO4) 2-] 250

chromates [(CrO4) 2-] molybdates [(MoO4) 2-] 20

tungstates [(WO4) 2-] - tellurates [(TeO4) 2-] 13

Page 222: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

18 Roches et minéraux

7- phosphates [(PO4) 3-]

arséniates [(AsO4) 3-]

vanadates [(VO4) 3-] 350

8- silicates [(SiO4) 4-] 700

9- minéraux organiques …quelques dizaines

La plupart des minéraux constitutifs des roches sont des silicates et le nombre deceux qui appartiennent aux autres classes est assez limité :

1- éléments natifs : graphite*

2- sulfures et sulfosels : pyrite*, pyrrhotite*

3- halogénures : halite, fluorite

4- oxydes : spinelles, dont magnétite* et chromite*, hématite*, ilménite*, rutile,périclase, corindon, pérovskite

et hydroxydes : goethite, limonites, gibbsite, diaspore, boehmite, brucite

5- carbonates : calcite, dolomite

6- sulfates : gypse, anhydrite, barytine

7- phosphates : apatite, monazite

(dans la liste ci-dessus, les minéraux opaques, qui ne se déterminent pas au microscope àtransmission, sont marqués d’un astérisque* ; les espèces non-traitées ici sont notées enitalique).

Les silicates sont le groupe de minéraux le plus abondant. Ils constituent plus de90% de la croûte terrestre. Le groupe des feldspaths en représente environ 60 % et celui dela silice (quartz essentiellement) 10 à 13%.

Le motif de base des silicates est un tétraèdre (SiO4)4-, dans lequel le centre dutétraèdre est occupé par un atome de silicium et les 4 sommets par des atomes d'oxygène.Les silicates sont classés en fonction de la disposition de ces tétraèdres ((SiO4)4- :

• tétraèdres isolés (nésosilicates) : olivine, monticellite, humites, zircon,sphène, andalousite, disthène, sillimanite, grenat, staurotide, chloritoïde,saphirine, topaze

• deux tétraèdres reliés par la pointe (sorosilicates) : épidotes (pistachite,clinozoïsite, zoïsite, allanite, piémontite, lawsonite, pumpellyite),vésuvianite, axinite, mélilite, låvenite

• tétraèdres en anneaux (cyclosilicates) : cordiérite, tourmaline, béryl, eudyalite• tétraèdres disposés en chaînes (inosilicates) : amphiboles, pyroxènes,

wollastonite, aenigmatite, astrophyllite• tétraèdres disposés en feuillets (phyllosilicates) : micas, chlorites, serpentine,

talc, stilpnomélane, argiles, prehnite, apophyllite• tétraèdres formant un édifice à trois dimensions (tectosilicates) : quartz,

feldspaths, feldspathoïdes, analcime, scapolites, zéolites

(néso- et sorosilicates sont parfois regroupés en une même classe : les orthosilicates)

Page 223: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Les minéraux des roches 19

Figure 8. Les silicates

Page 224: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

20 Roches et minéraux

1-3. LES FACTEURS D’APPARITION DES MINERAUX

L’apparition des minéraux dans une roche dépend de facteurs physiques et defacteurs chimiques.

1-3-1. Facteurs physiques

Les facteurs physiques sont des conditions imposées de l’extérieur lors de laformation de la roche : température, pression (pression lithostatique qui ne dépend que dela profondeur et pressions orientées) et pression de fluide. Ces derniers facteurs, pressionen roche et pression de fluide sont plus ou moins largement indépendants. Il estgénéralement admis que les pressions orientées ne jouent pas de rôle dans l’équilibre entreminéraux. Elles sont toutefois très importantes dans la dynamique de croissance desminéraux La notion de faciès minéralogique intègre ces différents facteursphysiques.

Les faciès minéralogiques sont définis par une ou des associations minéralogiquescritiques. Cette notion a été initialement introduite pour les roches métamorphiques(Eskola, 1920, 1927). Une dizaine de faciès sont actuellement reconnus :

Le faciès des zéolites (Coombs, 1960) comprend un premier sous-faciès quirecouvre le domaine de la diagenèse et le tout début du métamorphisme et qui est définipar les minéraux critiques heulandite (ou son polymorphe la clinoptinolite, ces deuxminéraux sont des zéolites de formule (Ca,Na)2Al2Si7O18.6H2O ) ou l'associationcritique analcime + quartz.

Un second sous-faciès est nettement plus métamorphique : les associationsprécédentes n'existent plus ; il est caractérisé par la présence d'albite NaAlSi3O8 etl'association laumontite + quartz (la laumontite est une zéolite de formuleCaAl2Si4O12.4H2O)

Le faciès à prehnite et à pumpellyite est défini par les associations prehnite +quartz et pumpellyite + quartz . Jadéite et glaucophane sont totalement absents. L'épidotepeut apparaître formant transition avec le faciès des schistes verts.

Le faciès des schistes bleus ou schistes à glaucophane (Eskola, 1929) se distinguepar la présence d'une amphibole sodique, la glaucophane. La présence de lawsonite et/oude l'association jadéïte+ quartz permettent de définir des sous-faciès. La pumpellyite peutexister dans la partie la moins métamorphique de ce faciès. Les micas blancs ne sont pasdes muscovites mais des phengites. La biotite et les feldspaths sont exclus.

Le faciès des schistes blancs (Chopin, 1984) se caractérise par l'association talc +disthène (équivalent à plus faible pression à la chlorite magnésienne). La coésite,polymorphe de haute pression de la silice, est connue dans certaines paragenèses, ce quisuppose des pressions supérieures à 25 kb.

Page 225: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Guide d’exploration et d’intégrationROCHES ET MINÉRAUX

Ateliers pour les élèves du deuxième et troisième cycles

La Maison Léon-Provancher, Québec 2002

Page 226: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Ce document a été réalisé grâce à la participation financière du ministère de la Culture et des Communications du Québec, dans le cadre du programme «Étalez votre science».

Ce programme est la propriété intellectuelle de La Maison Léon-Provancher de Québec et une autorisation de reproduction pour usage pédagogique vous est donnée. Malgré les efforts apportés, il peut comporter des erreurs ou des imprécisions. Il fera l’objet, comme toutes les autres productions de l’organisme, de révisions périodiques afin d’améliorer le contenu et la forme. Tous commentaires ou suggestions permettant son amélioration seront appréciés. Plusieurs autres thèmes ont été produits par La Maison Léon-Provancher, informez-vous!

Conception, recherche, rédaction et adaptation :

Geneviève BoucherJean BérubéJohanne PoulinClaire Truchon

© La Maison Léon-Provancher1435 ProvancherCap-Rouge (Québec) G1Y 1R91991, révision 2002Téléphone : (418) 650-7785 Télécopieur : (418) 650-1272Courriel : [email protected]

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 1

Page 227: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Introduction

Ce guide propose des activités d'exploration reliées au thème des roches et minéraux. Les jeunes pourront s'interroger sur le monde fascinant du sous-sol et seront amenés à entrer dans le processus d'apprentissage par la réalisation de projets ou de défis. Ces activités déclencheront un questionnement et donneront le goût d'en savoir plus sur ce sujet, permettant ainsi de se familiariser avec la démarche expérimentale.

Certaines explications naissent spontanément et elles leur sont utiles pour comprendre leur environnement. D’autres sont, cependant, plus éloignées de leur vécu. Les activités animées lors de la visite avec l’animateur sont alors importantes afin d’amener les jeunes à s’approprier de nouvelles connaissances et les encourager à poursuivre leurs recherches. Ces ateliers permettent la manipulation, l’expérimentation et la découverte par une approche coopérative.

Ce guide suggère également quelques activités d’intégration afin de consolider les connaissances acquises sur le sujet et de parfaire le développement de plusieurs compétences.

Cadre pédagogique du thème

Pendant l’animation de ce thème, l’élève pourra apprendre à ...• Classer des constituants de la Terre selon une ou plusieurs propriétés communes.• Identifier différents constituants d’une roche et les comparer avec d’autres.• Découvrir des ressemblances et des différences entre des roches.• Identifier des usages que l’homme fait des ressources naturelles du sol.• Reconnaître les transformations que l’homme fait subir à des substances naturelles.

Également, l’élève pourra explorer des savoirs essentiels tels que :• Les propriétés et caractéristiques de la matière terrestre

- traces de vivant et fossiles- classification de roches - classification de minéraux

• L’organisation de la matière- cristaux- structure de la Terre (continents, calottes glaciaires, montagnes, volcans, etc.)

• La transformation de la matière - phénomènes naturels (érosion)

• Conventions et modes de représentation (globe terrestre, cartes, modèles)• Technologies de la Terre• Technologies de l’environnement (recyclage, compostage, etc.)• Faire appel à divers modes de raisonnement • Recourir à des démarches empiriques (tâtonnement, analyse, exploration à l’aide de ses sens)• Les propriétés et caractéristiques de la matière terrestre

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 2

Page 228: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Tableau des compétences transversalesOrdres Compétences Composantes

Compétence 1 • S'approprier l'information.Exploiter l'information. • Reconnaître diverses sources d'information.

• Tirer profit de l'information.

• Analyser les éléments de la situation.Compétence 2 • Imaginer des pistes de solution.

Résoudre des problèmes. • Mettre à l'essai des pistes de solution.COMPÉTENCES • Adopter un fonctionnement souple.

D'ORDRE • Évaluer sa démarche. INTELLECTUEL

Compétence 3 • Construire son opinion.Exercer • Exprimer son jugement.

son jugement critique. • Relativiser son jugement.

Compétence 4 • S'imprégner des éléments d'une situation.Mettre en œuvre sa • Imaginer des façons de faire.pensée créatrice. • S'engager dans une réalisation.

• Adopter un fonctionnement souple.

Compétence 5 • Analyser la tâche à accomplir.Se donner des méthodes • S'engager dans la démarche.

de travail efficaces. • Accomplir la tâche.• Analyser sa démarche.

COMPÉTENCESD'ORDRE

MÉTHODOLOGIQUE Compétence 6 • S'approprier les technologies de l'informationExploiter les technologies et de la communication.

de l'information • Utiliser les technologies de l'informationet de la communication. et de la communication pour effectuer une tâche.

• Évaluer l'efficacité de l'utilisation de la technologie.

Compétence 7 • S'ouvrir aux stimulations environnantes.Structurer son identité. • Prendre conscience de sa place parmi les autres.

• Mettre à profit ses ressources personnelles.COMPÉTENCES

D'ORDRE PERSONNELET SOCIAL • Interagir avec ouverture d'esprit

Compétence 8 dans différents contextes.Coopérer. • Contribuer au travail collectif.

• Tirer profit du travail en coopération.

COMPÉTENCE Compétence 9 • Établir l'intention de la communication. DE L'ORDRE DE Communiquer de façon • Choisir le mode de communication.

LA COMMUNICATION appropriée. • Réaliser sa communication.

Les activités vécues lors de la visite et les activités suggérées dans ce guide visentle développement de chacune de ces compétences et de leurs composantes respectives.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 3

Page 229: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Activités d’exploration suggérées

La mise en situation est simple. Une invitation écrite par un prospecteur est remise aux élèves (page annexe 1). Ce dernier raconte qu'il a besoin d'aide pour approfondir son travail de prospection. Cette invitation tente de susciter l'intérêt des élèves pour les ressources qui sont sous nos pieds et encourage le groupe à réaliser de petites activités. Elle vise également à les amener à se rendre compte de l'importance de celles-ci et à chercher des réponses à leurs questions.

Les activités d’exploration suggérées doivent être réalisées en équipe afin de permettre des échanges.

Des roches pour tes sens(Durée suggérée : 1 période)

Déroulement : chaque équipe recherche ou apporte différentes roches et trouve deux caractéristiques opposées (exemple : rude-doux). Chacune de leur côté, les équipes classent leurs roches en deux catégories selon les caractéristiques choisies. Par la suite, les autres équipes tentent d'identifier quelles caractéristiques ont été la base de la classification.

Si tu as une loupe à ta disposition, tu peux observer les roches avec celle-ci. Tu peux observer peut-être de minuscules grains composant les roches. De quelles couleurs sont-ils? Sont-ils brillants, transparents, opaques?

Trucs pédagogiques

Découvrir des usages des roches (exemples : pierres tombales, pierres de construction, etc.).

Trouver le plus grand nombre de proverbes ou d'expressions avec des mots relatifs aux sols, roches et minéraux, par exemple : pierre qui roule n'amasse pas mousse, dur comme le roc, etc. (français).

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 4

Page 230: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

À la découverte des objets fabriqués(Durée suggérée : 1 à 2 périodes)

Déroulement : les jeunes deviennent enquêteurs et trouvent le plus grand nombre d’objets fabriqués à partir des ressources naturelles du sol. La recherche peut se faire à l’extérieur ou à l’intérieur. En équipe, ils retrouvent les différentes origines des objets (page annexe 2). Les laisser poser des questions et faire leurs hypothèses. Les équipes notent leurs observations : le nom de l’objet, le lieu où il se trouve et l’hypothèse quant aux matériaux utilisés pour le fabriquer. Refaire le déroulement de la fabrication de l'objet, tout en essayant de retracer les matières premières utilisées et les différentes transformations.

Trucs pédagogiques

Fabriquer votre propre objet à partir des produits du sol ou du sous-sol; sable, gravier, verre, argile, etc. (arts plastiques).

Choisir une matière première et trouver des objets fabriqués qui en contiennent.

Classer des objets d'après leurs utilisations : pour jouer, pour se nourrir, pour se déplacer, etc.

Discuter des conséquences sur l'environnement de la transformation des objets : pollution, dépense d'énergie, etc.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 5

Pour devenir un bon prospecteur, comme moi évidemment, il faut savoir être très observateur. Il faut aussi se rendre compte de l'importance du sol, du sous-sol et des produits qu’ils donnent.

Page 231: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

D’où ça vient?(Durée suggérée : 1 période)

Déroulement : photocopier les deux dessins de coupe du sol avec les différentes zones d’exploitation (pages annexes 3 et 4). Chaque équipe dispose d'un produit. Les préparer à l’avance.

Les équipes associent leur produit à la bonne zone présentée sur les dessins. Amener les élèves à se rendre compte que l'être humain dépend des ressources naturelles du sol. Discuter avec eux des moyens d'exploitation utilisés par l'humain : mine, carrière, puits de forage, etc. Trucs pédagogiques

Trouver différentes catégories d'utilisation des produits (exemple : vaseline - soins).

Visiter une carrière ou une sablière.

À l'aide des produits, découvrir les différentes activités de transformation des matières premières : scierie, fonderie, etc. (sciences humaines).

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 6

Zone d’exploitation

A sous-solC sous-solC sous-solA sous-solC sous-solC sous-solC sous-sol

D sol D solB sol

C sous-sol C sous-sol

D solC sous-solD sous-solA sous-solC sous-sol

D solC sous-solA sous-sol

Objet ou produit

VaselineBriquette de charbon

TalcHuile minéraleMine de crayon

1¢Clou

Objet en verreSable

CéréalesPapier d’aluminium

CraieObjet en céramique

Outil en acier inoxydableSel

Objet en plastique5¢

Pierre concasséeBijou en argent

Paraffine

Page 232: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Animation offerte

Accueil

Prospecteur Laroche• Éveil à la conservation des ressources par un personnage.• Notions de recyclage, récupération, réduction, etc.• Présentation des ateliers

Ateliers

L’histoire de la terre • La formation de la terre sous forme d'échange et découvertes. • Les différents types de roches et différences entre une roche et un minéral.• La formation et l’observation de fossiles.

Ça bouge sous nos pieds • La dérive des continents, les plissements montagneux.• Les volcans, les séismes et les glissements de terrain.

Minéralogistes amateurs• La caractérisation des minéraux (dureté, éclat, transparence, magnétisme, etc.).• Identification des minéraux sous forme de défi.

Dangers dans la mine• Jeu de type «serpents et échelles».• Échange et réflexions sur les utilisations possibles et la conservation du sol.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 7

Page 233: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Activités d’intégrationCes suggestions visent à favoriser la réalisation de projets, leur diffusion et l’évaluation.

• Visiter la collection d’un musée de géologie.

• Organiser une sortie pour ramasser les détritus se trouvant sur le terrain de l'école. Bricoler avec ceux-ci et exposer le tout à l'école afin de sensibiliser les élèves.

• Fabriquer un fossile avec de la boue et des restes de coquillages ou de crustacés (page annexe 5).

• Visiter les rivages d’une rivière ou du fleuve afin de trouver des fossiles et visiter des grottes de votre région.

• Aménager, à l'extérieur de l'école, une boîte à compost que les jeunes entretiendront.

• Trouver des moyens de réduire le nombre de déchets jetés dans la poubelle de la classe.

• Faire une expérience avec les classes du même degré. Peser les sacs de poubelle de chaque classe pendant une semaine et faire des comparaisons (mathématiques).

• Pendant toute une journée, noter tous nos achats. Classer ces items sous deux catégories : indispensables et superflus.

• Mettre sur pied un service de recyclage de métal, de plastique et de verre pour l'école.

• Utiliser les TIC pour planifier, chercher et traiter l’information.Voici quelques suggestions d’adresses :www.ulaval.ca/personnel/bourque/intro.pt/planete_terre.accueil.htmlwww.cgq-qgc.ca/tous/terre/terre.htmlwww.virtualmuseum.ca/Francais/Gallery/static/RocksGemsandMinerals_page1.html

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 8

Page 234: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

CONTENU NOTIONNEL

Les roches et les minérauxLes roches peuvent être divisées en trois grands groupes selon la manière dont elles ont été produites.

1) Les roches ignées Elles sont formées à la suite du refroidissement et de la solidification de la roche fondue ou magma qui provient des profondeurs de la terre. Elles ont habituellement une apparence cristalline. Exemple : granite.

2) Les roches sédimentaires Elles proviennent de l'érosion de roches anciennes. Elles se composent de particules minérales, de fragments de roches et de débris d'animaux et de végétaux qui se sont déposés au cours des années. Il est possible de voir assez facilement les couches de sédiments qui composent la roche. Exemple : grès.

3) Les roches métamorphiques Elles se forment quand des roches, d'origine sédimentaires ou ignées sont soumises à la chaleur et à une forte pression. Les roches métamorphiques d’origine ignée possèdent souvent une surface cristalline plus développée que les roches ignées, c'est-à-dire que les cristaux sont plus gros. Exemple : quartzite. Les couches des roches métamorphiques d’origine sédimentaire ont été cimentées par cuisson et pression, comme une céramique. Exemple : ardoise.

Les roches sont constituées de minéraux. Donc, pour bien connaître les roches qui sont la partie inorganique de la terre, il faut connaître les minéraux qui les composent.

Les propriétés des minérauxPour identifier les minéraux, leurs caractéristiques sont trouvées à l’aide de quelques tests.

Trait : couleur de la poudre d'un minéral.

Transparence : capacité d'un minéral de laisser passer la lumière (transparent, translucide, opaque).

Couleur : propriété qui attire le plus notre attention. Très variable car peu de minéraux possèdent une couleur constante. Il est important d'observer la couleur sur une cassure fraîche pour les minéraux métalliques car ils peuvent être altérés.

Éclat : aspect de la surface des minéraux ou des roches lorsqu'ils sont regardés à la lumière du jour (métallique, vitreux, gras, etc.).

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 9

Page 235: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Dureté : résistance à se laisser rayer par un objet et sa résistance à la destruction de sa structure. Elle est déterminée en comparant le minéral à d'autres. Dix minéraux de différentes duretés forment une échelle qui porte le nom d'échelle des «duretés relatives de Mohs».

Magnétisme : propriété d'être attiré par un aimant.

Effervescence : réaction d'un minéral en contact avec un acide. Il laisse alors échapper des bulles de gaz carbonique.

La formation des fossilesLes fossiles sont des restes d'organismes, ou de leurs activités, qui ont vécu dans les époques anciennes. La fossilisation est le passage d'un être vivant à l'état fossile, c'est-à-dire les transformations de la matière vivante en minéral.Généralement, ce sont les parties dures (coquilles, squelettes) qui laissent le plus souvent leurs traces dans la roche. La fossilisation dépend, avant tout, d'un recouvrement rapide de l'organisme par des sédiments et de l'absence d'oxygène entre ces sédiments et l'être vivant qui sera fossilisé. Cette absence d'oxygène freine ou arrête complètement les processus de décomposition.

Les phénomènes reliés aux solsTremblement de terreLes tremblements de terre ou séismes sont souvent provoqués par la rupture des roches en dessous et à la surface de la terre. Ces roches se brisent généralement parce que l'écorce terrestre s'ajuste ou bouge à tout moment. Les séismes sont aussi souvent reliés à l'activité volcanique.

Éruption volcaniqueUn volcan n'est pas une montagne. Lors de l'évolution géologique de la terre, il s'est formé un trou dans l'écorce terrestre d'où est sorti, violemment et venant des profondeurs de la terre, un feu liquide appelé lave. La lave coule, se refroidit et durcit autour de l'orifice, formant ainsi une fausse montagne. L'intérieur de notre planète est formé de roches en fusion appelé magma.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 10

Page 236: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

ÉrosionC'est l'usure mécanique, chimique ou la transformation de l'écorce terrestre par les eaux, les glaciers, les vents, la gravité, l'humain, etc. L'érosion est un phénomène naturel et constant. Il y a érosion normale tout au long des années, mais certaines actions des humains ou des animaux peuvent accélérer le processus d'érosion.

Glissement de terrainC'est la couche extérieure de l'écorce terrestre, c'est-à-dire le sol, qui se déplace plus ou moins rapidement suivant une pente. Ce phénomène souvent lié à la transformation du sol en liquide, s’appelle la liquéfaction. Les glissements se produisent surtout sur les versants naturels des bords de la mer, des grands cours d'eau et des ravins.

Utilisations des roches et des minérauxLes roches et les minéraux sont nécessaires à l'humain pour assurer un milieu de vie de qualité. Ils permettent :• de construire et d'agrandir les villes;• de construire des centres commerciaux, des développements résidentiels, des routes, des

voies ferrées, des aéroports et d'avoir des loisirs;• de faire de l'exploitation minière et d'avoir des matériaux de construction.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 11

Page 237: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Page annexe 1

Invitation du Prospecteur Laroche

Cher élève,

Je t'invite à vivre le thème «roches et minéraux» afin d'en connaître un peu plus sur les ressources naturelles de notre planète : la Terre. Pour devenir un bon prospecteur, il faut savoir être très observateur. Tout bon prospecteur se sert de ses sens lorsqu’il travaille. Tu dois être capable de différencier une roche d’une autre et pour cela il faudra mettre en éveil tes sens (vue, toucher et odorat). Afin de te préparer adéquatement, je te propose quelques activités d’exploration sur le sujet. Applique-toi bien et viens découvrir les secrets que cachent notre belle planète bleue.

Au plaisir de se rencontrer!

Le prospecteur Laroche

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 12

Page 238: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Page annexe 2

Quelques objets fabriqués et leurs matériaux

GypseGravier, eau, sable et cimentCéramique (terre cuite)Porcelaine (terre cuite et émail)FerFerCalcite (carbonate de calcium)Fer ou plastique (résine synthétique)Céramique ou porcelaineAcier inoxydable (nickel, chrome et fer)CuivreVerre (sable)

Mur de plâtreMur de bétonTuile de céramiqueCuvette de toilette, bain et lavaboCalorifèrePatte de pupitreCraiePoubelleAssietteUstensilePlomberieMiroir

MatériauxObjets observés à l’intérieur

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 13

Ciment (argile et calcaire)Briques (terre argileuse séchée)Asphalte (calcaire, silice et bitume)Asphalte (calcaire, silice et bitume)Verre (sable)PierreAluminium (bauxite)Acier (fer et carbone)FerFerCaoutchouc synthétiqueCaoutchouc synthétique, cuivre et mica blancVerre (sable)

TrottoirMur de briquesChausséeBardeau d’asphalteFenêtrePierre concasséeGouttièreVéhicule motoriséClôture en métalPoteau de lumièrePneuFil électriqueAmpoule

MatériauxObjets observés à l’extérieur

Page 239: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Page annexe 3

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 14

Zone A Zone B

Sol Sol

Sous-sol Sous-sol

Gaz

Pétrole

Eau

Page 240: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Page annexe 4Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 15

Zone C Zone DSol Sol

Sous-sol Sous-sol

Eau

Page 241: 130621544 Book Roches Mineraux[1]

Page annexe 5

Des fossiles vieux de... 4 heures

À partir d’éléments naturels variés, créer des fossiles en plâtre.

Matériel• petits pots vides de plastique (yogourt, compote, etc.)• coquillages, feuilles, cônes, etc.• pâte à modeler• plâtre de Paris• vernis transparent (facultatif)

1. Déposer de la pâte à modeler à l’intérieur des pots afin de couvrir le fond et la modeler pour qu’elle soit bien lisse.

2. Faire des empreintes sur la pâte à modeler avec des coquillages, des feuilles, etc.3. Préparer le plâtre de Paris en suivant les directives sur la boîte. Couler le plâtre sur la

pâte à modeler et attendre qu’il soit complètement sec.4. Démouler et appliquer du vernis transparent sur le plâtre.

N.B. Ne pas appliquer de gouache ou de peinture à l’eau car ils diluent le plâtre.

Ateliers pour les élèves du 2e et 3e cycles Roches et minéraux

La Maison Léon-Provancher 16