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Les classes préparatoires apprennent d’abord à gérer le temps Travailler vite, hiérarchiser les urgences, ne jamais se laisser submerger… Entretien avec la sociologue Muriel Darmon, sortie d’une plongée de deux années au cœur de ces formations, avec la conviction que les classes prépa savent fabriquer des « maîtres du temps ». LIRE PAGES 6-7 Les mesures anti-OPA du gouvernement vont affaiblir l’attractivité de la place de Paris LIRE PAGE 3 La loi Florange renchérit le coût de fermeture d’un site LIRE PAGE 3 Microsoft C ertains achètent la sym- pathie des actionnaires comme d’autres les voix de leurs électeurs. C’est peut-être une tentation quand le modèle économique ou le programme politique ne convainquent plus. Microsoft a choisi de ne pas lésiner sur les moyens. Le géant informatique a annoncé, mardi 17 septembre, qu’il allait lancer un nouveau programme de rachat d’actions de 40 milliards de dollars (30 milliards d’euros). Dans le même temps, le conseil d’administration a décidé d’aug- menter de 22 % le dividende tri- mestriel qui sera versé le 12 décembre. Les investisseurs, comme les électeurs, sont parfois ingrats. Ces deux bonnes nouvelles ont certes fait progresser le cours de Microsoft de 0,39 % à la clôture, mais le Nasdaq, le marché des valeurs technologiques sur lequel il est coté, gagnait lui deux fois plus (+ 0,75 %). Le groupe fondé par Bill Gates ne va donc pas être exempté d’une sérieuse explica- tion sur sa stratégie. Une grand- messe d’analystes financiers est prévue ce jeudi 19 septembre à Bellevue, à quelques kilomètres de Redmond (dans l’Etat de Washington) où se situe le siège du groupe. C’est peu dire que l’attente est forte. Les mignardi- ses offertes ici (à dessein ?) ne rassasieront personne. Les décisions s’accélèrent La feuille de route du numéro un mondial des logiciels doit être clarifiée à un moment où les décisions majeures sem- blent s’accélérer à son QG. Il a annoncé, le mois dernier, le rem- placement d’ici un an de son PDG, Steve Ballmer, puis, le 3 septembre, le rachat de l’activi- té de services et de terminaux mobiles de Nokia. Que l’empe- reur du logiciel pour PC s’inté- resse au mobile est nécessaire, mais pas suffisant. Mais il n’est pas facile de se remettre en cause lorsqu’on est riche et bien portant. La faibles- se de l’heureux éditeur de la sui- te logicielle Office et du système d’exploitation Windows vient de sa force. Malgré sa cécité dans le basculement du monde numérique vers le mobile et sa difficulté spectaculaire à rattra- per son retard, il pèse encore 273 milliards de dollars en Bour- se (204 milliards d’euros). C’est l’équivalent de Total, BNP Pari- bas et GDF Suez réunies. Le groupe est assis sur un tas d’or. Il possède une trésorerie de 77 milliards de dollars (58 mil- liards d’euros). Un pactole qui fait aussi saliver les investis- seurs activistes. L’un d’eux, ValueAct Capital, a misé 2,2 mil- liards de dollars sur Microsoft et fait pression sur le manage- ment. Un « accord de coopéra- tion » a même été signé ce mois- ci entre les deux parties, offrant au patron de ValueAct la pers- pective d’une entrée au conseil d’administration du géant de Redmond au printemps 2014. On comprend pourquoi Amy Hood, la directrice financière, a précisé que les deux annonces du 17 septembre « reflètent l’en- gagement permanent de rendre des liquidités à nos actionnai- res ». Ils ne vont pas être contre. Mais cela ne fait toujours pas une stratégie. p [email protected] PUBLICATIONS J CAC 40 4 141 PTS – 0,09 % EN GRÈCE, LA RÉCESSION EST AUSSI UN TERREAU POUR LA CRÉATION D’ENTREPRISES LIRE PAGE 2 HEULIEZ SE RAPPROCHE DE LA LIQUIDATION LIRE PAGE 4 Bataille littéraire pour « sauver » l’économie française Les politiques Karine Berger et Valérie Rabault, d’un côté, et les économistes Augustin Landier et David Thesmar, de l’autre, se prêtent à une lecture croisée de leurs livres respectifs. Chacun a sa recette pour favoriser l’entrepreneuriat, la concurrence et l’innovation. LIRE PAGE 8 UNIVERSITÉS - GRANDES ÉCOLES Le ras-le-bol fiscal des grandes banques françaises PERTES & PROFITS | par Jean-Baptiste Jacquin Le pis-aller des mignardises financières J TAUX FRANÇAIS À 10 ANS 2,46 % 18/09 - 9 H 30 L e ras-le-bol fiscal gagne… les banques ! A quelques jours de l’examen du pro- jet de loi de finances pour 2014, qui va accentuer la pression fiscale sur les ménages et les grandes entreprises, les diri- geants des banques françaises sont aux abois. Ils ont fait leurs calculs : la somme des prélèvements frappant le secteur financier pourrait atteindre 8 milliards d’euros au titre de 2013. Un chiffre record, qui s’entend hors impôt sur les sociétés. Certaines de ces taxes, comme celle sur les salaires qui repré- sente près de 1,8 milliard d’euros, sont anciennes. D’autres ont été instaurées après la crise (taxe dite « systémique », taxe finan- çant les autorités de régulation, etc.). Et si les taxes sur les conventions d’assurances ou sur les transactions financières ne concer- nent pas que les établissements de crédit, l’essentiel de ces prélèvements est à la char- ge du secteur bancaire. Certes, les banques ont la surface financiè- re pour absorber ce « choc » fiscal. Mais, à un moment où l’Etat leur demande de soutenir la reprise et d’irriguer le pays en crédits, la potion fiscale paraît amère aux dirigeants de BNP Paribas, de la Société générale ou du Cré- dit agricole. Même si le périmètre n’est pas le même, ces 8 milliards d’euros de taxes pesant sur le secteur financier peuvent être rapprochés de la somme des profits des cinq grandes banques françaises en 2012, soit… 8 milliards. « Attention à l’effet immédiat sur l’économie,1 milliard d’euros de prélèvements de plus par an, c’est 10 milliards d’euros de cré- dits en moins pour l’économie », indique au Monde Pierre de Lauzun, le directeur général délégué de la Fédération bancaire française. Ce ras-le-bol fiscal des banques s’accompa- gne d’une critique de la méthode employée par le gouvernement, caractérisée par une grande impréparation et des annonces dis- cordantes au sommet de l’Etat. « Nous ne sommes informés de rien. Il n’y a ni concerta- tion ni réflexion sur la fiscalité », dénonce le PDG d’une grande banque. Anne Michel a LIRE LA SUITE PAGE 4 J PÉTROLE 108,15 $ LE BARIL PARCE QU’UN DÉTAIL PEUT TOUT CHANGER... Suite en dernière page t Hors impôt sur les sociétés, les taxes sur le secteur financier pourraient atteindre 8 milliards d’euros au titre de 2013 j EURO-DOLLAR 1,3356 AU BANQUET NIGÉRIAN, LES FRANÇAIS SONT EN RETARD t Le Nigeria, avec sa croissance et ses besoins d’infrastructures, est considéré comme un eldorado t La part de marché des Français y est tombée de 5 %, en 2009, à 3,5 % t « Il faut corriger le tir », prévient la ministre du commerce extérieur, Nicole Bricq, en visite à Lagos LIRE PAGE 5 Construction d’un nouveau terminal à l’aéroport Murtala- Muhammed, à Lagos, en 2012. B. KURZEN/« THE NEW YORK TIMES »/REDUX/RÉA j DOW JONES 15 529 PTS + 0,23 % Jeudi 19 septembre 2013 Cahier du « Monde » N˚ 21358 daté Jeudi 19 septembre 2013 - Ne peut être vendu séparément

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Les classes préparatoiresapprennent d’abord à gérer le tempsTravaillervite, hiérarchiser lesurgences,ne jamais se laisser submerger…Entretienavecla sociologueMurielDarmon, sortie d’uneplongéededeuxannéesau cœurde ces formations, avecla convictionque les classesprépa savent fabriquerdes «maîtresdu temps».LIREPAGES6-7

Lesmesuresanti-OPAdugouvernementvontaffaiblirl’attractivitéde laplacedeParisLIRE PAGE 3

La loiFlorangerenchéritlecoûtdefermetured’unsiteLIRE PAGE 3

Microsoft

Certainsachètentlasym-pathie des actionnairescomme d’autres lesvoix de leurs électeurs.

C’est peut-être une tentationquand le modèle économiqueou le programme politique neconvainquentplus.

Microsoft a choisi de ne paslésiner sur lesmoyens. Le géantinformatique a annoncé,mardi17septembre, qu’il allait lancerun nouveau programme derachat d’actions de 40milliardsdedollars (30milliardsd’euros).Dans lemême temps, le conseild’administrationadécidéd’aug-menter de 22% le dividende tri-mestriel qui sera versé le12décembre.

Les investisseurs, comme lesélecteurs, sont parfois ingrats.Ces deux bonnes nouvelles ontcertes faitprogresser le coursdeMicrosoft de 0,39% à la clôture,mais le Nasdaq, le marché desvaleurs technologiques surlequel il est coté, gagnait luideux fois plus (+0,75%).

Le groupe fondé par BillGates ne va donc pas êtreexemptéd’unesérieuseexplica-

tion sur sa stratégie.Une grand-messed’analystesfinanciersestprévue ce jeudi 19septembre àBellevue, à quelqueskilomètresde Redmond (dans l’Etat deWashington)où se situe le siègedu groupe. C’est peu dire quel’attenteest forte. Lesmignardi-ses offertes ici (à dessein?) nerassasierontpersonne.

Les décisions s’accélèrentLafeuillederoutedunuméro

un mondial des logiciels doitêtre clarifiée à un moment oùles décisions majeures sem-blent s’accélérer à son QG. Il aannoncé,lemoisdernier, lerem-placement d’ici un an de sonPDG, Steve Ballmer, puis, le3septembre,lerachatdel’activi-té de services et de terminauxmobiles de Nokia. Que l’empe-reur du logiciel pour PC s’inté-resse au mobile est nécessaire,mais pas suffisant.

Mais il n’est pas facile de seremettre en cause lorsqu’on estriche et bien portant. La faibles-sede l’heureuxéditeurdelasui-telogicielleOfficeetdusystèmed’exploitation Windows vientde sa force. Malgré sa cécitédans le basculement dumonde

numérique vers le mobile et sadifficulté spectaculaire à rattra-per son retard, il pèse encore273milliardsdedollars enBour-se (204milliards d’euros). C’estl’équivalent de Total, BNP Pari-bas etGDF Suez réunies.

Le groupe est assis sur un tasd’or. Ilpossèdeunetrésoreriede77milliards de dollars (58mil-liards d’euros). Un pactole quifait aussi saliver les investis-seurs activistes. L’un d’eux,ValueActCapital, amisé 2,2mil-liardsdedollarssurMicrosoftetfait pression sur le manage-ment. Un «accord de coopéra-tion»amêmeété signécemois-ci entre les deuxparties, offrantau patron de ValueAct la pers-pective d’une entrée au conseild’administration du géant deRedmondauprintemps 2014.

OncomprendpourquoiAmyHood, la directrice financière, aprécisé que les deux annoncesdu 17septembre «reflètent l’en-gagementpermanent de rendredes liquidités à nos actionnai-res». Ils ne vont pas être contre.Mais cela ne fait toujours pasune stratégie.p

[email protected]

PUBLICATIONS

J CAC 40 4 141 PTS–0,09%

EN GRÈCE,LA RÉCESSIONEST AUSSI UNTERREAU POURLA CRÉATIOND’ENTREPRISESLIRE PAGE 2

HEULIEZSE RAPPROCHEDE LALIQUIDATIONLIRE PAGE 4

Bataille littéraire pour «sauver»l’économie françaiseLespolitiquesKarineBergeretValérieRabault,d’uncôté, et leséconomistesAugustinLandieretDavidThesmar,de l’autre, seprêtentàunelecturecroiséede leurs livres respectifs.Chacunasa recettepour favoriser l’entrepreneuriat,la concurrenceet l’innovation.LIREPAGE8

UNIVERSITÉS -GRANDES ÉCOLES

Leras-le-bol fiscaldesgrandesbanques françaises

PERTES &PROFITS | par Jean-Baptiste Jacquin

Lepis-allerdesmignardises financières

J TAUX FRANÇAIS À 10 ANS2,46%18/09 - 9H30

Leras-le-bolfiscalgagne…lesbanques!Aquelques joursde l’examendupro-jetde loidefinancespour2014,quivaaccentuer la pression fiscale sur les

ménages et les grandes entreprises, les diri-geants des banques françaises sont auxabois. Ils ont fait leurs calculs : la sommedesprélèvements frappant le secteur financierpourrait atteindre 8milliards d’euros autitre de 2013. Un chiffre record, qui s’entendhors impôt sur les sociétés. Certaines de cestaxes, commecelle sur les salairesqui repré-

sente près de 1,8milliard d’euros, sontanciennes.D’autresont été instaurées aprèsla crise (taxe dite «systémique», taxe finan-çant les autoritésde régulation,etc.). Et si lestaxes sur les conventions d’assurances ousur les transactions financières ne concer-nent pas que les établissements de crédit,l’essentiel de ces prélèvements est à la char-gedu secteurbancaire.

Certes, lesbanquesont la surface financiè-re pour absorber ce «choc» fiscal.Mais, à unmoment où l’Etat leur demande de soutenir

la reprise et d’irriguer le pays en crédits, lapotionfiscaleparaîtamèreauxdirigeantsdeBNPParibas,de laSociétégénéraleouduCré-dit agricole.Mêmesi lepérimètren’estpas lemême, ces 8milliards d’euros de taxespesant sur le secteur financier peuvent êtrerapprochésde la sommedesprofits des cinqgrandes banques françaises en 2012, soit…8milliards. «Attention à l’effet immédiat surl’économie,1milliardd’eurosdeprélèvementsdeplusparan,c’est10milliardsd’eurosdecré-dits en moins pour l’économie », indique au

MondePierrede Lauzun, le directeurgénéraldéléguéde laFédérationbancaire française.

Ceras-le-bolfiscaldesbanquess’accompa-gne d’une critique de laméthode employéepar le gouvernement, caractérisée par unegrande impréparation et des annonces dis-cordantes au sommet de l’Etat. «Nous nesommesinformésde rien. Il n’yani concerta-tion ni réflexion sur la fiscalité», dénonce lePDGd’unegrandebanque.

AnneMichelaLIRE LA SUITE PAGE4

J PÉTROLE 108,15 $ LE BARIL

PARCEQU’UNDÉTAILPEUTTOUTCHANGER...

Suiteendernièrepage

tHors impôt sur les sociétés, les taxes sur le secteur financier pourraient atteindre8milliardsd’euros au titrede 2013

j EURO-DOLLAR 1,3356

AU BANQUETNIGÉRIAN,LES FRANÇAISSONT ENRETARD

t LeNigeria, avec sacroissance et ses besoinsd’infrastructures, estconsidéré commeuneldorado

t Lapart demarchédesFrançais y est tombéede5%, en 2009, à 3,5%

t «Il faut corrigerle tir», prévientlaministre ducommerceextérieur,NicoleBricq, envisite à Lagos

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Construction d’un nouveauterminal à l’aéroportMurtala-Muhammed, à Lagos, en 2012.B. KURZEN/«THE NEW YORK TIMES»/REDUX/RÉA

j DOW JONES 15 529 PTS +0,23%

Jeudi 19 septembre 2013

Cahier du «Monde »N˚ 21358 daté Jeudi 19 septembre 2013 - Nepeut être vendu séparément

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EnGrèceaussi, ilyades«successstories»Pouréchapperauchômageetà l’expatriation,des jeunesGrecsontmontéleurstart-up

CES START-UPSONT

AUJOURD’HUICOURTISÉESPAR LES

AMÉRICAINS,LES RUSSESOU LES

ISRAÉLIENS

PRÈS DE SIXJEUNES SURDIX SONT

SANS EMPLOI.NOMBREUX

SONT CEUX QUIVEULENT

CRÉER LEURENTREPRISE

plein cadre

Reportage

AthènesCorrespondance

La Grèce est devenue, en trois ans,le pays européen le plus touchépar lechômage.Prèsdesix jeunessur dix sont aujourd’hui sansemploi, soit 58,8% des moins de

24 ans. Beaucoup prennent d’ailleurs laroute de l’exil alors que le pays a du malàsortir de la récession et que la «troïka»deses bailleursde fonds – Fondsmonétai-re international, Banque centrale euro-péenne et Commission de Bruxelles –,revenue à Athènes mardi 17 septembre,maintient la Grèce sous pression.

Beaucoup,mais pas tous. «Si nous par-tons, que restera-t-il à la Grèce lorsqu’ellesortira de cette crise?», s’interroge Geor-gesSpanoudakis.A29ans, il est à la têtedePinnatta, une start-up florissante crééeilya àpeine trois ans.«Jebossaisautrefoisdans une entreprise de la Silicon Valley etj’ai réalisé qu’il y avait un énormemarchépour les cartes de vœux électroniques ; ilétaitévaluéàl’époqueà8milliardsd’euroset les spécialistes estiment qu’il atteindra36milliards dans les trois prochainesannées.»

Georges décide alors de revenir dansson pays et développe, avec six collabora-teurs, une application pour téléphonesportablesquipermetd’envoyerdes cartesde vœux personnalisées accompagnéesdemessages instantanés.

«Après seulement quatre mois d’ex-istence, des investisseurs russes, chinois etaméricainsnousont financésàhauteurde350000dollars [262000euros]. Enaoût2012, un nouvel appel de fonds nousapermis de lever 300000dollars de plusauprès d’investisseursaméricains. Aujour-d’huinousallonsrecevoir1,5milliondedol-lars», se félicite Georges. De quoi monterdes locaux flambant neufs, dans uneancienne usine désaffectée d’un quartierbranché d’Athènes, avec aire de jeux etcoinde relaxation.

«Evidemment, jem’inspirede ce que j’aiconnu en Californie», explique le jeunehomme. Le siège de sa société y estd’ailleurs implanté. Les seize personnesde l’équipe technique sont enGrèce,maisle marketing et la finance sont gérésdepuis la petite ville de Sunnyvale.

«Aumomentdenotrepremière levéedefonds, nos investisseurs se sont montrésinquietsde l’instabilitééconomique,politi-que et fiscale de la Grèce… Inscrire notrestart-up aux Etats-Unis nous a semblé labonne solution mais il est beaucoup plusintéressant de recruter de bons ingénieursici. Ils sont moins chers et il y a moins decompétitionpour les séduire», avoue sanscomplexe le jeunehomme.

Rassurerles investisseurset lesencoura-ger à investir dans les start-up grecquesalorsmêmequelepaystraversesasixièmeannéederécessionestl’objectiftrèsclairdeCorallia, une initiative qui favorise lamiseenplacede«clusters» techniquesgrecs.

Le cluster, ou pôle de compétitivité, surle modèle de Sophia-Antipolis (Alpes-Maritimes) en France ou de la Silicon Val-ley aux Etats-Unis est un concept encorejeuneenGrèce.«C’estunoutilparfaitpourmettre des entreprises en relation, pourqu’elles échangent, collaborent et devien-nent complémentaires les unes des autresdans un secteur et donc plus compétitivesdans unmarché globalisé», décrit VassilisMakios, directeurdeCorallia.

Cet ancienprofesseurde la très réputéeuniversité technique de Patras se désolaitde la véritable hémorragie de talentsà laquelle il assistait. «J’ai vu partir auxquatre coins du monde plus de 600 étu-diants qui ont connu de gros succèsàl’étranger et je veux aujourd’hui créer lesconditions et l’environnement économi-que leur permettant de rester ici et de pro-duire de la richesse et de l’emploi pour lepays», affirmeM.Makios.

Les fonds européens financent à 50%les 10millions d’euros de budget annuelde Corallia. «Aujourd’hui, nous avons devrais succès notamment dans le cluster denano et microélectronique», se réjouit ledirecteur financier de l’entreprise, JorgeSanchez-Papaspiliou. «Par exemple Sam-sunga rachetéNanoradio, une start-updePatras. Le géant Citrix a rachetéBytemobi-le, ou encore, le groupe Siva a investi dansl’entrepriseAntcor.»

Antcor est une entreprise fondéeen 2004 qui crée des processeursWifipourtablettesetmobiles.Cesproduitssontdestinés àdes fabri-

cants de puces électroniques. En 2012, elleaenregistré un taux de croissance appro-chant les… 70%. Et cette année-là, elle estpasséede quinze à vingt employés.

«Nous ne subissons pas la crise qui tou-che le restedupaysparcequenotreclientè-len’estpas localemaisglobale, dit sonpré-sident et cofondateur, Costas Meimetis.Nous échappons aussi au problème demanque de liquidités lié à l’effondrementdusecteurbancaire,en2008,carnos inves-tisseurs sont euxaussi internationaux.»

Autre exemple de succès largementmédiatisé,l’applicationpoursmartphonesTaxibeat.Unservicequipermetauconsom-mateur de trouver rapidement un taxi, de

pouvoir le choisir en fonctionde ses préfé-rences (type de voiture, services àbord) etdenoterensuitel’expérience.Lancéen2011à Athènes, Taxi beat a depuis conquis laFrance,leMexique, leBrésiletdevraitbien-tôt s’implanter au Pérou et en Colombie.«Le service fonctionne particulièrementdanslespaysayantunproblèmedesécuritéou de qualité, car le client peut désormaischoisir son taxi en confiance», précise Spy-rosDovas,manager chezTaxibeat.

Cequadragénaireàl’alluredécontractéea été tenté par l’émigration en 2010 alorsque la Grèce plongeait dans la crise maisaujourd’hui, il ne regrette pas d’être resté.«C’est très gratifiant de participer à uneaventure qui fonctionne. Cela prouve lacapacité d’innovation des jeunes Grecs quisontbienformésetqui, lorsqu’ilsse lancent,se révèlent très compétitifs etmalins.»

Toutes ces start-up aujourd’hui courti-sées par les investisseurs américains, rus-sesouisraéliensontencommund’apparte-nir au secteur des technologies de l’infor-mationoude l’électroniqueengénéral.

«L’Europe a débloqué des fonds impor-tants pour soutenir ce secteur porteur enGrèce, car l’avantage des technologies del’information est que l’on peut lancer uneentreprise sans beaucoup d’argent», ditAristosDoxiadis.Cet économisteest aussipartenaire d’Open Fund, société subven-

tionnée à hauteur de 7millions d’eurosparleFondseuropéend’investissementetdont l’objectif est de financer de jeunessociétésde technologies de l’information.«Nous entrons en achetant des parts dansle capital – pour un montant oscillantentre 100000 et un demi-million d’euros.Nousavonsainsi intérêtàleurbondévelop-pement», précise M.Doxiadis. Ce derniersouligne la nécessité d’étendre ce type deprogrammeàd’autressecteursdel’écono-mie. «De nombreux entrepreneurs horstechnologiesde l’informationrestentcom-plètementdépourvusde financementet ilsdoivent semontrer très combatifs.»

Penny Vomva est de ceux-là. Cettejeunecréatricedemodede33 ansaouvertson atelier-magasin «Rien» en juin2010sansempruntetsansinvestisseur.Aujour-d’hui, toujours sans financement exté-rieur, elle s’est lancée dans la vente surInternet et a ouvert une deuxième bouti-que sur l’île deMykonos.

«Si au pire de la crise ça fonctionne,alors cela ira encoremieuxaprès», déclarel’enthousiaste jeune femme. Un succèsmoinstapageurquelesstart-upinformati-ques mais qui illustre bien la volonté demilliers de jeunes Grecs menacés par lechômagede se créer eux-mêmes leur pro-pre emploi. Et de s’inventerun avenir p

AdéaGuillot

Georges Spanoudakis, présidentet cofondateur de Pinnatta,

dans les locaux de la start-upàAthènes, le 17septembre.

Il a lancé une application qui permetd’envoyer des cartes de vœuxpersonnalisées accompagnées

demessages instantanés.MAX GYSELINCK POUR «LE MONDE»

Privatisationsetfiscalité, sujetsdefrictionavecla«troïka»

AthènesCorrespondance

C’est dansun contexte social tendu–des grèves vont agiter laGrècedurant toute la semaine– que sontarrivées àAthènes,mardi 17septem-bre, les équipes techniquesdesbailleursde fondsdupays (Fondsmonétaire international, Banquecentrale européenneet Commis-siondeBruxelles). Elles vontprépa-rer la venuedes chefs de file de cet-te «troïka», lundi 23septembre, aulendemaindes élections législativesallemandes.

Leprogrammede cette désor-mais cycliquemissiond’audit desréformesen cours enGrècedepuistrois ans s’annonce chargé. Athènesdoit d’abord convaincreque la réfor-mede la fonctionpublique, exigéedepuisdesmois par ses partenaires

et visant àmettre endisponibilité25000 fonctionnairesd’ici à décem-bre et à en licencier 15000d’ici à fin2015, est bien sur les rails.

C’est contre ce projet que les syn-dicats du secteurpublic semobili-sent cette semaine.Mais il s’agit, enfait, dudossier le plus facile à réglerentre le gouvernement et la troïka,car les objectifs chiffrés sont actésdepuisplusieursmois déjà.

Impôt sur la propriétéLesnégociations serontplus diffi-

ciles en cequi concerne la volontéde la troïkad’obtenir la liquidationde trois entreprisesnationales spé-cialiséesdans l’armement et ladéfense – ELVO, EAS et Larko.

Début septembre, l’échangedecourriels à ce sujet entre le représen-tant de la Commission européenne,MatthiasMors, et leministre grec

de l’économie, Yiannis Stournaras,a été publiépar la presse locale.

La propositiondeM.Stournarasde réformer ces entreprisesde l’inté-rieur, sur unepériodede cinq ans,yest polimentmais fermementrefusée,M.Mors incitant leminis-tre à revoir sa copie.

Autrepoint sensible, lamise enplace d’un impôtunique sur la pro-priétéqui toucherait les détenteursde tous typesde bien (terrainsconstructiblesounon,maisonsoccupéesounon), et remplaceraitles deux impôts jusqu’ici existants.

Le débat entre la troïka et leministre est assez techniquemaisd’importance.M.Stournaras pré-voit qu’environ80%de l’impôt col-lecté entrera dans les caisses del’Etat. Ce qui induit que, pour arri-ver à l’objectif de recettesde 2,9mil-liardsd’euros liés à cenouveaupré-

lèvement– fixé dans le cadredumémorandumsigné avec lesbailleursde fondsdupays –, il fau-drait en collecter 3,6milliards.

Les créanciers tablent, pour leurpart, sur un«tauxd’absorption» decet impôtde 70%, ce qui obligeraitl’Etat à collecter nonplus 3,6mil-liardsd’eurosmais 4,1milliards, ladifférence étant àtrouverdans lespochesdes contribuables grecs.

La troïkadevrait par ailleursenco-re examiner l’avancementdupro-grammedeprivatisationsou la libé-ralisationde la professiond’avocat,entre autres.

LesGrecs espèrentboucler les dis-cussions avant la réunionde l’Euro-groupedu 15octobre et obtenir ain-si rapidement le versementd’unenouvelle tranchedeprêt d’unmil-liardd’euros. p

A.G.

2 0123Jeudi 19 septembre 2013

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économie&entreprise

C ’était l’unedespromessesdecampagne de François Hol-lande:obligerlesentreprises

qui veulent fermer une usine àlacéder si un repreneur se présente.Le 24février 2012, le candidat duParti socialiste (PS) s’y étaitd’ailleurs engagé devant les sala-riés d’ArcelorMittal de Florange(Moselle), qui se battaient alorscontre la fermeture des deux der-niershauts-fourneauxdeLorraine.

Juché sur une camionnette,M.Hollandeavaitlancéauxcentai-nes de métallos venus l’écouter :«Si Mittal ne veut plus de vous (…),je suis prêt à cequenousdéposionsune proposition de loi qui dirait :quand une grande firme ne veutplus d’une unité de production,mais ne veut pas non plus la céder,nous en ferions obligation.»

Dix-huit mois plus tard, c’estpeu dire que l’accouchement a étédifficile. Alors qu’elle devait êtreinitialement adoptée à l’automne2012, ce n’est quemercredi 18sep-tembreque la «loi Florange», bap-tisée«loivisantàreconquérirl’éco-nomie réelle», devait être exami-née à l’Assembléenationale.

Sur le fond, le texte cosigné parune trentaine de députés socialis-tes, radicauxetécologistes,emme-nés par Bruno Le Roux, présidentdu groupe PS à l’Assemblée natio-nale, n’a plus grand-chose à voiravec les intentionsd’origine.

Tout d’abord, seuls les groupesde plus de 1000 salariés serontconcernés. Les petites et moyen-nes entreprises (PME) serontexclues du dispositif. Un critèrequi fait bondir les syndicats, quiestimentque85%desplansdesau-vegarde de l’emploi (PSE) déclen-chés ces dernières années en Fran-ce concernent des sociétés demoinsde 1000personnes.

Plus grave, pour les détracteursdu texte, il n’est plus questiond’obliger un chef d’entrepriseàcéder le site dont il veut se débar-rasser. Si les sociétés devront bien«rechercherun repreneur en cas deprojet de fermeture d’un établisse-ment», elles pourront refuser d’al-ler plus loin si celamet enpéril«lapoursuite de l’ensemble de l’activi-té».Untermesuffisammentvaguepourdonner lieuà interprétation.

« Faire autrement revenaitàexproprier les entreprises, ce quipouvaitêtreconsidérécommeanti-constitutionnel, justifie ClotildeValter, députée (PS) duCalvados etrapporteure de la proposition deloi. Nous avons préféré présenteruntextequisoitefficaceetquineris-quepasd’être retoqué.»

«Foutaises, s’emporte EdouardMartin,déléguéCFDTchezArcelor-Mittal et figure emblématique dela lutte des métallos lorrains.Quand l’Etat veut faire passer uneautorouteouune ligneTGV, ilne segêne pas pour exproprier. Pour-quoi ne pas faire pareil quand onestimequ’uneindustrieeststratégi-quepour le pays?»

Pour inciter les sociétés àcéderplutôt que fermer, les députés ontnéanmoins prévu un système depénalités. Si le comitéd’entrepriseou les déléguésdupersonnel pourlesétablissementsdemoinsdecin-quante salariés jugent que l’em-ployeur«arefusédedonnersuiteàuneoffrequ’ilsconsidèrentcommesérieuse», ils pourront saisir le tri-bunal de commerce.

En l’absence de «motif légiti-me», celui-cipourraalorscondam-ner l’entreprise à verser une« pénalité qui peut atteindrevingt fois la valeur mensuelle dusmic par emploi supprimé», soit28600euros, avec une limite quidevrait être fixée à 2% du chiffred’affaires de la société. Selon lesauteursdutexte,ceplafondcorres-pond à un doublement du coûtmoyen d’un PSE, ce qui devraitavoir un effet «dissuasif».

Plus contraignant encore, unamendement soutenu par cer-tains députés socialistes prévoitque l’entreprise sera obligée derembourser les aides publiquesdont elle aurait pu bénéficierdanslesdeuxansquiontprécédé la fer-meture.

«En renchérissant le coût de lafermeture, l’équation économiquedu dirigeant sera sensiblementmodifiée, ce qui peut l’ameneràrenoncer à son projet», estimeClotildeValter.

«Cela risque surtout de com-plexifier les processus de cession,met en garde David Jonin, avocatassocié chez Gide Loyrette Nouel.En mettant la décision dans lesmainsd’un juge, on s’exposeà tou-tes sortesde décisions: comment letribunal va-t-il juger que les effortsdu chef d’entreprise ont été suffi-sants? Et si c’est un concurrent quiveut reprendre le site? Ce texte estininterprétable.»

Les professionnels s’inquiètentégalement d’un article qui obligeledirecteurd’usineà informerson

comité d’entreprise des offres dereprise qu’il a reçues, au plus tardhuit jours après qu’elles aient étéformalisées. «Cela va augmenterlesrisquesdefuitesetdoncdécoura-ger les repreneurs de déposer undossier, estime M. Jonin. Dans cegenredeprocessus, laconfidentiali-té est en effet essentielle. Aucunelégislation dans le monde n’obliged’ailleursà ce typede publicité.»

«Cette loi a un très fort pouvoirde nuisance, renchérit ThibaultLanxade, PDG de la société demoyens de paiement Aqoba etmembre du conseil exécutif duMedef. Non seulement c’est uneatteinteà la libertéd’entreprendre,mais cela va une fois de plus com-plexifier le travaildes chefsd’entre-prise, quine ferment jamaisun siteparplaisir.»

Preuvedel’embarrasqueprovo-quecettepropositiondeloiauseinde l’exécutif, ArnaudMontebourgn’a pas souhaité la commenter. Le27septembre 2012, le ministre duredressement productif l’avaitpourtantbrandiedevantlesmétal-los de Florange, assurant qu’elleserait inscrite à l’ordre du jour del’Assemblée la semaine suivanteafin de sauver leurs hauts-four-neaux.Las!Ceux-ciontétédéfiniti-vementéteints le 27avril. p

Cédric Pietralunga

Seuls lesgroupesdeplusde1000salariésserontconcernés.Lespetitesetmoyennesentreprisesserontexcluesdudispositif

LoiFlorange:lessyndicatsdéçus, lepatronatinquietLetexte,encoursd’examenauParlement,prévoitdespénalitésquipourrontdoubler lecoûtmoyend’unplansocial

Lesentreprisesetlaplacefinancièredénoncentlesmesuresanti-OPAUNCAPITALISMEsans foi,maispas sans loi. La propositiondugouvernement, dite «loi Floran-ge», que les parlementaires fran-çais examinentmercredi18 et jeu-di 19septembrevise aussi à «pro-téger nos fleurons industriels»,selonClotildeValter, députéesocialisteduCalvados et rappor-teuredu texte à l’Assembléenatio-nale.Dans le collimateur, les«dégâts considérables»provo-quéspar les offres publiquesd’achat (OPA) hostiles qu’ontsubis les groupes industrielsPéchineyet Arcelor.

Problème, les fleurons enques-tionneveulentpasêtredéfendus.Pas commeça, en tout cas.

Le23juillet, après avoir décou-vert l’arsenaldemesures anti-OPAprésentéà la commissionécono-miquede l’Assemblée, l’Associa-tion françaisedes entreprisespri-vées (AFEP)– le lobbydesgrandspatrons–, leMedef et Paris Euro-place, quipromeut laplacedeParis, avaientadresséunemiseengardeaupremierministre, Jean-MarcAyrault. Pour eux, ce texten’étaitni plusnimoinsqu’«unrepoussoirde la placedeParis etdes entreprises françaises».

Difficile de réformer contrel’avis desprincipaux intéressés.«Cette propositionaurait dû fairel’objet d’une consultationplus lar-ge et plus approfondie»,déploreArnauddeBresson, directeurgénéral de Paris Europlace.

Cet été, la négociation a étérude. Au final, le texte examinépar les députés est jugé comme

étantun compromis acceptablepar les entreprises. Sauf sur unpoint. Il prévoit de donner sonmot àdire au comité d’entreprise(CE), en cas d’offrenon sollicitée.

Face à la levée de boucliers quecettedisposition a suscitée,MmeValter veut désormaisoffrirauCE la possibilité demandaternonplusunmédiateur – démar-che très lourde –,maisun expert.Et la procédured’information-consultationest encadréedansundélai d’unmois. Ces avancées, tou-tefois, sont jugées insuffisantespar l’ensemblede la place.

Eloigner les prédateurs«Il est possible d’envisagerde

renforcer les prérogativesduCE enmatièred’informationen coursd’offrepubliquepour faire en sor-te que le conseil d’administrationintègre les préoccupationsdes sala-riés»,plaide pour sa part Benja-minKanovitch, associé du cabinetd’avocatsBredinPrat.

Et d’ajouter: «Mais les proposi-tionsdiscutées à l’Assembléenatio-nale sont incompatibles avec lecalendriernormal d’uneoffrepublique. Cemécanisme, au lieud’améliorer le dialogue entre l’ac-quéreur et le CE, pourrait en prati-quebloquer l’ensemblede la procé-dured’offre.»

Dequoi éloigner, certes, les pré-dateurs.Mais ce faisant, de quoiaussi peser sur le cours deBoursedes sociétés car les investisseursvalorisentmieux les groupesopéables. Et, qui dit cours deBour-se plus bas dit entrepriseplus fra-

gile et financementplus cher.«Cette procédure, qui ferait de laFranceune exception, risquedepeser sur la compétitivitédes entre-prises de l’Hexagone et leur recher-che de financement», souligneM.deBresson.

Que les patronsne souhaitentpasdonner plusdepoids auxsala-riés, cela n’a riende surprenant.Leparadoxe, c’est qu’ils ne veu-lentpasnonplusque les élussocialistesmusclent… leur proprepouvoir.

La propositionde loi, en effet,entend revenir sur le «principedeneutralité» des conseils d’admi-nistration. En clair, elle veut don-ner auboardd’une entrepriseassiégée tous lesmoyensde sedéfendre, y compris en vendantouen achetantdes actifs. La loiactuelleprévoit que le conseild’administrationapour seulmoyendedéfense la recherched’un chevalier blanc.

«Il y a euunvrai débat en 2006à l’occasionde la transpositiondela directive européenne sur lesOPApour savoir si l’onautorisaitounon les conseils d’administra-tionàmettre enplace desmesuresde défense contre les offres hosti-les», rappelleM.Kanovitch.

«Laplace de Paris était globale-ment contre cettemesure denatu-re ànuire à l’attractivité des socié-tés françaises. Seule une véritableconcertationavec les entrepriseset l’Autorité desmarchés finan-ciers permettrait de parvenir à unnouveaupoint d’équilibre sur cesujet délicat», ajoute-t-il.

Autre sujet sensible, celui desdroits de vote double. Là aussi, larapporteurea amendé le textepour tenir compte, enpartie, desréticencesde la place. Les députésestimentque le doublementdecesdroits pour les actionnairesdelong termepermetde stabiliser lecapital des entreprises. Ils facili-tent dès lors leurmise enplace.

Mais les professionnels crai-gnent, au contraire, que les activis-tes enprofitent pour renforceràbon compte leur influence.Uncasusbelli si le seuil de déclenche-mentdesOPAavait été abaissé de30%à 25%, commec’était prévu.Mais un amendementdeMmeVal-ter revient sur cettemesure. p

IsabelleChaperon

Pour deux usines fermées,une seule est créée

François Hollande, alors candidat à la présidence de la République, sur le site industriel de Florange (Moselle), le 24février 2012. F.LENOIR/REUTERS

Malgré lamobilisation des pou-voirs publics etmalgré une timi-de amélioration de la conjonctu-re, la France continue à se désin-dustrialiser. C’est ce quemon-trent les derniers chiffrespubliés par Trendeo. Selon cettesociété, qui recense toutes lesannonces effectuées par lesentreprises, 191 fermeturesd’usine ont été rendues publi-ques depuis le début de l’année,soit autant quedurant lamêmepériode de 2012.Mais les créations d’usines,elles, ont baissé dans lemêmetempsde 25%. «Le solde netdes ouvertures et des fermetu-res de sites se dégrade doncencore, une tendance continuedepuis 2011», souligneDavidCousquer, le fondateur de Tren-deo. Au total, depuis le 1er janvier2009, quelque 1253 usines ontainsi fermédans l’Hexagone.En tenant compte des sites nou-veaux, la France totalise à pré-sent 613 usines demoins qu’il ya trois ans et demi. Aujourd’hui,«pour deux usines qui ferment,une seule est recréée», noteM.Cousquer.

30123Jeudi 19 septembre 2013

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aaaSuitede la premièrepage

Les relations entre l’Etat et lesbanques s’étaient pourtantréchauffées, le 19 juillet, lorsque,pour la première fois depuis sonélection, un an auparavant, Fran-çois Hollande avait reçu les diri-geants des principaux établisse-mentsà l’Elysée.

Le lobby bancaire avait obtenudes gages de la part du chef del’Etat, visiblement décidé à faireoublier son discours de campagneduBourgetdu22janvier2012,dési-gnant « la finance sans visage»comme «l’ennemi» public numé-ro un. Notamment l’accès, pourconforter les bilans bancaires, à30milliards d’euros de liquiditésprovenantdu LivretA, auparavantconservées à la Caisse des dépôts(CDC).

La normalisation des relationsauraétédecourtedurée.Sousréser-ve que les projets du gouverne-ment soient confirmés –le projetde loi de finances sera examiné enconseil desministres le 25septem-bre–, le budget2014 va alourdir lafacture fiscale supportée par lesbanques. Deux nouvelles taxes,encore à l’étude, devraient êtrerajoutées: l’une, commune à tou-tes les entreprises, sur leur excé-dentbrutd’exploitation(l’EBE,soitle résultat avant amortissementetremboursement de la dette) ;l’autrespécifiqueausecteur,etdes-tinée à financer un fonds de sou-tien aux collectivités locales affec-tées par des crédits dits toxiquescontractés auprès des banquesdans les années1990et 2000.

L’assiette du nouvel impôt EBE

–le plus coûteux– n’est pas arrê-tée,mais, selon le PDGd’une gran-debanque, il pourrait coûter «plu-sieurs centainesdemillionsd’eurosaux banques ». La taxe liée aufonds pour les collectivités localess’élèverapour sapart à 50millions

d’eurospar anpour le secteurpen-dantquinzeans.

Selon la Fédération bancairefrançaise (FBF), qui cite le Conseildes prélèvements obligatoires, lapartdusecteur financierdans l’en-semble des prélèvements (tous

impôts et contribuables confon-dus)est«enaugmentationréguliè-re», étant déjà passée de 4,9% en2010à5,3%en2013.

Encouragésànesurtoutpasfrei-nerladistributiondecréditsàl’éco-nomie,aprèscinqannéesdemaras-me, les banquiers admettent malde voir, dans lemême temps, leurfacture fiscale s’alourdir.

«Risque sur l’économie»Leur combat a beau être impo-

pulaire, les patrons de banquesmartèlent qu’il en va de l’intérêtpublic. «Ces impôts qui s’addition-nent et s’alourdissent d’année enannée ne sont pas seulement désa-gréables. Ils fontpeserunrisquesurl’économie, souligne Pierre deLauzun.Unmilliardd’eurosdepré-lèvements en plus par an, comptetenu du fait qu’il faut respecter lesratiosréglementaires,c’est100mil-liardsd’eurosdeprêtsdemoins surdixans»…Plusdedeuxfoislacapa-cité de prêt de la Banque publiqued’investissement (BPI) – la banquepublique créée par la nouvellemajorité, pour soutenir le créditauxPME–, observe-t-onà la FBF.

«Les banques vont payer unmontantd’impôts supérieur à leurpoids dans l’économie, argumenteM.de Lauzun. Nous souhaitonsengager un dialogue avec le gou-vernement sur la fiscalité, sur sonpoids autant que sur la superposi-tion des taxes décidées depuis plu-sieurs années. Il ne faudrait pasque l’économie souffre, pas plusqu’ilnefaudraitassisteràladéloca-lisation,àLondres,decertainesacti-vités financières.» p

AnneMichel

économie& entreprise

E st-ce la findu feuilletonHeu-liez? Après trois faillites ensix ans, cette PME de Cerizay

(Deux-Sèvres), emblématique desfragilités de l’industrie française,setrouveengranddangerdedispa-rition, malgré les efforts déployéspar l’Etat et par Ségolène Royal, laprésidentedelarégionPoitou-Cha-rentes, qui a fait de ce dossier l’unde ses grands combats.

«Oncourtdirectementàla liqui-dation», assure Jean-EmmanuelVallade,déléguéCFE-CGC.«Tout lemonde s’y prépare, car il n’y a guè-re d’autre solution crédible »,confirme un proche du dossier.Plusde 280 emplois sont en jeu.

Une dernière réunion devaitréunir les parties prenantes, mer-credi 18septembre, au ministèredu redressement productif. Maissans grand espoir de retourner lasituation d’ici à la remise desoffres attendue dans la soirée, etsurtout d’ici l’audience du tribu-nal de commerce de Niort, lundi23septembre.

Situation bloquéeDepuis que le dernier repre-

neur, le français Baelen GaillardIndustrie (BGI), a déposé le bilande la société, en avril, plusieurscandidatssesontpourtantintéres-sés à Heuliez. En particulier legroupe industriel espagnol Cos-mos, et deux particuliers, âgésl’un comme l’autre de 65 ans : leconsultantallemandMatthiasBit-tner, et Christian de Léotard, unvieux routier du monde automo-bile. «Mon projet consiste à réo-rienter complètement Heuliez,poury fabriquerdesvéhiculesà six

rouesdestinésauxartisans»,expli-queM.de Léotard.

Malgré ses faiblesses, Heuliezgardedes atouts. «Lepersonnel estcompétent, et le matériel permetde partir de la tôle et d’arriver auproduit fini, en assurant la décou-pe, lapeinture, etc.», souligne-t-onau siège de la Région.

Autre motif d’intérêt pour lescandidats repreneurs : un groscontrat est en discussion depuisdeux ans avec Volkswagen, pourfournir des pièces de rechange augéant allemand. BGI, l’actionnaireactuel, misait beaucoup sur cettecommande. Grâce à elle, la direc-tion imaginait déjà passer de500personnesà 700d’ici à 2017.

Mais cette commande de plu-sieursdizainesdemillionsd’eurospar an tarde à se concrétiser. Volk-swagen, s’il est effectivement inté-ressé, amisd’autres sous-traitantsen concurrence. Et aujourd’hui, lenumérouneuropéen«neveutpassigner un contrat avec une sociétéen dépôt de bilan», explique unbon connaisseurdu dossier.

LeproblèmeestqueCosmos,desoncôté,neveutpasnonpluss’en-gager à reprendre Heuliez sansgarantie sur la future commandede Volkswagen. Résultat : unesituationbloquée.

Lundi, le tribunal devrait doncse retrouver avec une offre espa-gnole crédiblemais qui reste souscondition, et deux autres dossiersjugés plus fragiles. «Les projets deBittner et Léotard ne sont pas sansintérêt, mais ils ne sont pas finan-cés», résume une des chevillesouvrières des négociations – ceque contesteM.de Léotard.

Dans ces conditions, « le tribu-naldecommercenepeutquesepro-noncer pour la liquidation totale»,redoute la CFE-CGC.

Pour éviter que des années devolontarismeéconomiquen’abou-tissent à une débâcle spectaculai-re,SégolèneRoyalenvisageunulti-me coup de pouce de la puissancepublique.

Vendredi 13 septembre, leconseil régional a voté le principede la création d’une société d’éco-nomie mixte, dotée de650000 euros. Elle pourraitreprendre les actifs d’Heuliez etune poignée de ses salariés aprèsla liquidation, afin de maintenirl’outil industriel en état dans l’hy-pothèseoùVolkswagenetCosmosfiniraientpar tenter l’aventure.

Maislessyndicatssontsansillu-sion : «En tout état de cause, il yaura de la casse sociale», affirmeM.Vallade.p

Denis Cosnard

Lesbanquierss’inquiètentd’unepressionfiscaleaccruedanslebudget2014Deuxnouvelles taxes,dont l’impôtsur l’excédentbrutd’exploitation, sontprévues l’anprochain

Trois faillites en six ans

Octobre2007Ouverture d’uneprocédure de sauvegarde.

Avril2009Premier redresse-ment judiciaire. La société estreprise en juillet par BernardKriefConsulting, qui n’apporte pas lesfonds promis.

Mai2010Deuxième redresse-ment judiciaire. En juin, l’entrepri-se est coupée en deux: Heuliezest repris par BGI,Mia Electricpar Edwin Kohl.

Avril2013 Troisièmedépôt debilan pourHeuliez.Mia Electricpasse en juin auxmains deMichelleBoos, une femmed’affai-re franco-coréenne.

18septembre 2013Date limitede remisedes offres pourHeuliez.

E ntre La Poste et les éditeursde presse, qui va payer ? Laquestion est posée depuis

quel’Etataannoncéladiminutiondes aides que perçoit l’entreprisepublique au titre du transport desjournaux, l’unede sesmissions.

Le PDG de La Poste, Jean-PaulBailly,aétéinformédecetteréduc-tion par le représentant de l’Etat àson conseil d’administration, le4juillet. Une surprise totale, puis-que l’encre du contrat signé avecl’Etat pour les années 2013-2017était à peine sèche et que cecontratneprévoyait riende tel.

Cette baisse des aides d’Etat,dans une activité qui perd de l’ar-gent mais fait l’objet d’une com-pensation substantielle de la part

de la puissance publique, va lais-ser à la charge de La Poste un défi-cit accru.

Ce déficit atteint un demi-mil-liardd’euroschaqueannée.Lenou-veau contrat d’entreprise pré-voyait que ce déficit soit partielle-ment compensé, à hauteur de200millionsd’eurosen2014.Maiscene seradoncpas le cas: il faudray soustraire 50millions, ce quiaboutit à une dotation de seule-ment 150millions en2014.

En outre, comme l’a annoncé laministredelaculture,AurélieFilip-petti, le 10juillet, La Poste va per-dre,en2014également,lafameusecompensationqu’avait accepté delui verser l’Etat pour faire face augeldestarifspostauxconsentiaux

éditeurs de presse dans le cadred’unmoratoire signé en 2008. Undeuxième coup rude, qui vaconduireLaPosteà augmenter sestarifs à destinationde la presse.

«Brutal et imprévisible»Leséditeursontfait leurscomp-

tes : leurs dépenses postales vontcroître d’environ 50millions d’eu-ros en2014 et 2015, soit une aug-mentation moyenne de 20%,selon eux. Une hausse « létale»selon Nathalie Collin, présidentedu syndicat des éditeurs de pressemagazine, à l’heure où les jour-naux tentent de combattre l’éro-sion de leurs revenus. «C’est tropbrutal et imprévisible, pour MarcFeuillée, président du syndicat de

la presse quotidienne nationale.Onva ruiner nos efforts.»

Les éditeurs réclament que lafin de cemoratoire soit majoritai-rement assumée par La Poste,selon eux « la plus chère d’Euro-pe». « J’ai demandé que l’effort[pour les éditeurs] puisse êtreamoindri en 2014», a réponduMmeFilippetti. Des négociationssont en cours sur ces contrepar-ties, qui pourraient aider la pressed’information générale. Mais unesource gouvernementale jugequel’équilibre actuel n’est «pas défa-vorable» aux éditeurs. Une ligneferme dont l’Etat ne semble pasvouloir trop s’écarter.palexisdelcambre, annemichel

etalexandre piquard

Siège de la Société générale à laDéfense. Les banques dénoncentunmanque de concertation de la part du gouvernement. B. DECOUT/REA

Automobile:HeuliezmenacédeliquidationfautederepreneursolideLarégionPoitou-Charentesestprêteàunderniergestepoursauver laPMEenfaillite

ConflitouvertentreLaPosteet leséditeursdepresseL’Etatnedédommageraplusautant legroupepublicpour ladistributiondes journaux

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économie& entreprise

DÉCOUVREZ CE QUEDÉCOUVREZ CE QUE JULIE, FRÉDÉRIC, TIGA, THOMASET LES AUTRES VOUS ONT PRÉPARÉ POUR LA RENTRÉEET LES AUTRES VOUS ONT PRÉPARÉ POUR LA RENTRÉE

Textile

10000C’est le nombredenouveauxemplois créés, aupremier semes-tre clos fin juillet, par Inditex, lamaisonmèrede Zara, qui comp-tedésormais 122579 employés dans lemonde. Le groupedeprêt-à-porter espagnol (6104magasinsdans 86pays) a annoncé,mercredi 18septembre, un chiffre d’affaires semestriel enhaussede6%, à 7,7milliardsd’euros et unbénéficenet de 944millionsd’euros (+1%).

LagosEnvoyé spécial

T outes proportions gardées,une délégation d’hommesd’affaires français qui débar-

que au Nigeria, c’est un peu com-meunconvivequitrouvetroptardla soirée dont tout le monde parleetsedemandecequiresteradubuf-fet lorsqu’il l’auraatteint.

Ils étaient une quinzaine àaccompagner, lundi 16 et mardi17septembre, la ministre du com-merceextérieur,NicoleBricq,dansson déplacement à Abuja et àLagos, au centre et au suddupays:des PME enmode découverte, desETI (établissements de taille inter-médiaire)àlarecherched’unparte-naireetdegrossesentreprises,déjàprésentes dans le pays, aspirant àunsoutienpolitiquepour finaliserdesaffaires en cours.

Le pays, avec ses 160millionsd’habitants, dont une classemoyenne émergente estimée à20millions d’âmes et ses 300mil-lionnaires, ses6%decroissanceenmoyennedepuisdixans,sespétro-dollarset ses immensesbesoinseninfrastructures,est considérécom-meuneldoradodanslequellaFran-ce aprisdu retard.

«Nousavonsétéunpeuabsents,reconnaît laministre.Nous avionsici 5% de parts demarché en 2009,nous sommes descendus à 3,5%,alors que les Allemands font deuxfois mieux. Il ne faut s’en prendre

qu’à nous-mêmes. Et corriger le tir,car la Franceveut être là (…) sur cet-te terre de défis et de potentiels (….),ceporte-avionsafricain.»

LeNigeriaestdéjàlepremierpar-tenairecommercialde laFranceenAfriquesubsaharienne,avec5,1mil-liards d’euros d’échanges en 2012.Etcen’estpasunhasard.Aelle seu-le, Lagos affiche un produit inté-rieurbrut(PIB)de40milliardsd’eu-ros, équivalent à celui, cumulé, detrois partenaires traditionnels dela France en Afrique: le Sénégal, leCamerounet laCôted’Ivoire.

Quant au Nigeria dans sonensemble,ilpourraitdevenirlapre-mière économie du continentdevant l’Afrique du Sud, à plus de380milliards de dollars (284,5mil-liardsd’euros), lorsquesonPIBseracalculé sur de nouvelles bases d’iciàunan.

Partenariat institutionnel«Tout le monde investit chez

nous!,affirmelaministredesfinan-ces, Ngozi Okonjo-Iweala. GeneralElectric pour 1milliard de dollars,Procter &Gamble pour 2,5mil-liards, les Indonésiens d’Indoramapour 1,2milliard. Que font les Fran-çais?»

Les Français? Ils commencentparcomblerleurretardinstitution-nel, en multipliant les visites.Après celle du président nigérianGoodluck JonathanàFrançoisHol-lande, en février, celle duministredes affaires étrangères, Laurent

Fabius, à Abuja le mois suivant, etla mission de MmeBricq, c’est leMedef qui est attendu en octobreauNigeria.

Les Français s’organisent, aussi,enmettantsurpiedunpartenariatinstitutionnelpourfixerdesobjec-tifs bilatéraux et faire le point cha-que année. Ils utilisent tous lesoutils de financement à disposi-tion (Agence française de dévelop-pement, UbiFrance ou Banquepubliqued’investissement). Ils ontaussi concluunedélégationdeser-vices publics avec la chambre decommerce franco-nigériane dontles locaux ont été inaugurés, le17septembre, dans le bâtiment duconsulatgénéraldeFranceà Lagos.

Lesgrandsgroupessontdéjàpré-sents. Alcatel emploie 600person-nes et tente de résister à la concur-rence du chinois Huawei. Total(3300employés, dont 700expa-triés) importe 12% de son pétroleduNigeriaetinvestitdansunenou-velleplate-forme,Ofon2, dontunepartie de la construction estconfiéeàunpartenaire local, Jagal.

Bolloré est un acteurmajeur duport de Lagos où 700000conte-neurs arrivent chaque année. Sch-neiderElectricasigné, le17septem-bre, un partenariat de distributionavecMikano, pour tenter de profi-ter de la privatisation partielle dusecteurnigériande l’électricité.

Peugeot revient dans le pays etespèrerecommenceràyassemblerdes voitures, dès 2015. Dans les

années 1970, le constructeur étaitleader incontesté dumarché, avec100000véhicules vendus par an,dont60000produits surplace.

D’autres entreprises, plus peti-tes, tentent d’ouvrir ou de consoli-der le marché. Le groupe Vergnetveutconfieràunpartenairelocal lafinition de sa ferme d’éoliennesdans l’EtatdeKatsina,dans lenord,après avoir dû arrêter les travauxendécembre2012àlasuitedelapri-seenotageparungroupeislamisted’un de ses expatriés, Francis Col-lomp, toujours aux mains de sesravisseurs. Cela n’empêche pas legroupe d’Orléans de songer à uneferme solaire dans l’Etat d’Osun,prèsdeLagos.

QuantàAeroSurveillance,start-up située à Toulon et aux Etats-Unis, elle espère décrocher uncontratdedétectiondeminesanti-personnelles avec ses dronesmodulaires, qui pourraient ensui-te être utilisés pour la surveillancedes pipelines nigérians. Lesquelsen ont grand besoin : entre150000et 400000barils y sontprélevés illégalement chaqueannée.

«Les entreprises françaises secomplaisentun peu dans leur zonede confort en Afrique francophone.Elles doivent se frotter au Nigeria,affirmeun fonctionnairede Bercy,toutenprévenant:Cen’estpasfaci-le,maisilyabeaucoup,beaucoupàgagner.» p

SergeMichel

AuNigeria, lesentreprisesfrançaisescherchentàrattraperletempsperduLepays, avec sacroissanceetsesbesoinsen infrastructures, est considérécommeuneldorado

AUTOMOBILE

PSAPeugeot-CitroënnégocieavecsonalliéchinoisDongfengPour assurer sondéveloppement, PSAPeugeot-Citroënnégocieun approfondissementde sonpartenariat avec le constructeurchinoisDongfeng, aujourd’hui limité à la Chine. Selon Les Echosdemercredi 18septembre, deuxbanquesont étémandatéespourdéfinir des scénarios d’allianceentre le français et lechinois.Dongfeng, qui souhaite se développer à l’international,est très intéressépar unaccord avec PSA. Le français, lui, chercheà financer sa propre expansiondans certainspays émergents.Reste qu’unéventuel accord avec le chinoisdoit être compatibleavec l’alliancedu français avec l’américainGeneralMotors, lan-cée en 2012 autourd’achats et de développementsde véhiculescommuns.«L’idéal serait de fairemonter les deuxau capital,avecunebaisse dupoids de la famille, qui ne semble plus contrecette idée. Cela permettrait de conserverune certaine indépendan-ce», confiait enaoûtune source. p Philippe Jacqué

Automobile Renault s’installe en IndonésieRenault et Indomobil, partenairedeNissanen Indonésie, ontsigné,mercredi 18 septembre, unaccorddeproductiondevéhicu-les Renault pour cemarchéd’unmillionde voitures annuel. Legroupe français y feraproduire leDuster et commercialiseraparailleurs son4×4Koleos et laMégane «R.S».

LuxeHausse de 7,6%dubénéfice net dePradaLe groupede luxe italienPrada a annoncé,mardi 17septembre,unbénéficenet enhausse de 7,6%, à 308,2millionsd’euros aucours dupremier semestre clos fin juillet, soit unpeumoins queles prévisionsdes analystes. Le chiffre d’affaires consolidé apro-gressé, lui, de 11,7%, à 1,728milliardd’euros (et de 14,8%à tauxdechange constants). Les ventes ont augmentéde 17,9% enAsie-Pacifique, de 13,4%dans les Amériques et de 5,6% enEurope.

Devises Le Venezuela envisage d’assouplirson contrôle des changesLeministredes finances,NelsonMerentes, a annoncé,mardi17septembre,que sonpayspourrait denouveau laisser fluctuerledollar. Le contrôle actuel des changesprovoqueeneffetunepénuriedebillets verts qui entrave l’activité économique.– (AFP.)

BudgetLe Trésor américainmet en gardele Congrès sur le plafondde la detteLe secrétaire au Trésor américain, Jack Lew, a prévenu,mardi17septembre, le Congrès, qu’attendre pour relever le plafondlégal de la dette serait catastrophique. Républicains et démocra-tes doivent trouver un accord avantmi-octobre, sans quoi lepays sera en défaut de paiement. – (Reuters.)

Le roi des Pays-Bas dit «au revoir»à l’Etat-providenceLe roi desPays-Bas,Willem-Alexander, a préparé,mardi 17sep-tembre, ses citoyens à la finde l’Etat-providencedemandant«àtous ceuxqui le peuvent (…)deprendre leurs responsabilités pourleur propre vie et pour leur entourage». Le roi s’exprimait avantla présentationd’unbudget d’austéritéprévoyant6milliardsd’eurosde coupes supplémentairespour 2014, qui s’ajoutentaux 30milliardsd’économiesdéjà prévues. – (AFP, AP.)

BanquesLaBelgique réfléchit à une cessionde ses actions BNPParibasL’Etat belge réfléchit à la cessionde tout oupartie de sa participa-tionde 10,28%dansBNPParibas, rapportemercredi 18septem-bre la presse locale. La Belgiqueveut se conformer àun engage-mentpris devant la Commissioneuropéennede ramener sonendettement sous les 100%duproduit intérieurbrut. – (AFP.)

Lagos, au sud duNigeria. Le pays enregistre 6%de croissance enmoyenne depuis dix ans. BENEDICTE KURZEN/«THE NEW YORK TIMES»/REDUX/RÉA

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universités&grandes écoles

Entretien

S avoir gérer l’urgence et maî-triser le temps est un desbénéfices du passage par les

classes préparatoires. Muriel Dar-mon, sociologue au CNRS, ancien-ne élève de l’Ecole normale supé-rieure de la rue d’Ulm, a décidé deplonger dans la vie de quatre clas-sespréparatoiresauxgrandeséco-les,deuxscientifiquesetdeuxéco-nomiques,d’ungrandlycéedepro-vince.

Pendant deux ans, elle a assistéà la sélection des «bons dossiers»et aux réunions de professeurs.Elle a suivi les conseils de classe etobservé le déroulementdes cours,des devoirs surveillés, des colles,jusqu’aux résultats des concours.Son enquête, Les Classes prépara-toires. La fabrique d’une jeunessedominante (éd. LaDécouverte,280pages, 24 euros), s’appuie surune centained’entretiens.Vousdécrivez lamise sous pres-sion et l’avalanche de travail,qui, dans un premier temps,sèment la panique puis obligentl’étudiant à s’organiser à laminu-te près. Au final, il sort des clas-ses préparatoiresmaître dutemps, dites-vous. Qu’entendez-vous par là?

Lerapportautempsetà l’urgen-ce est, en effet, un élément-clé desméthodes d’apprentissage. Lesprofesseurs instaurent un climat«d’avancerapide»,obligentlesélè-ves à se projeter, répètent que «lefutur est maintenant », « leconcoursestdéjàlà»,«lafindel’an-née commence dès le premierjour». Même les vacances, en finde première année, sont considé-rées comme le début de la deuxiè-meannée. Leprogrammeest ryth-mé par des colles, des devoirs sur-veillés, des conseils de classe oudes évaluations quimaintiennentla pression.Cette gestion du temps est-elleune des conditions primordialesde l’adaptation aux prépas et dela réussite?

Lamesuredu tempsdevientuninstrument d’évaluation: le rapi-de et le lent constituentun princi-pe majeur de sélection, dans lamesure où les prépas font de lavitessedecompréhensionetd’exé-cution une condition de la survie.Lesélèves réalisentd’ailleurs, avecémerveillement, leur capacité àapprendre de plus en plus vite.Ceux qui arrivent à maîtriser letemps, à faire autre chose que letravail scolaire, de la musique oudu sport, sont les dominants.Et vous estimez que le fils de

cadre est plus armé que le filsd’ouvrier…

Les étudiants ne sont, de cepointdevue,paségauxdepar leuroriginesociale. Commel’amontréle sociologue Pierre Bourdieu, lagestion du temps fait partie deschoses socialement déterminéesqui s’enseignent tacitement. Unfils de dirigeant d’entreprise qui atoujours vu son père jongler avecle temps, mener plusieurs activi-tésà lafois, le faitnaturellementetapprécie.

A l’opposé, lesétudiantsdeclas-sespopulairesont, commel’a rele-vé le sociologue Stéphane Beaud,une gestion plus élastique dutemps.Existe-t-il des différences entreles prépas scientifiques et éco-nomiques?

L’apprentissagedans les classesprépamenant aux écoles de com-merceesttrèsdifférent.Lescompé-tences extrascolaires y sont aussiimportantes que les scolaires : laculture générale et la connaissan-

ce de l’actualité des entreprises etdes milieux économiques sontévaluéesparles jurysd’admission.Lirelesjournaux,regarderlatélévi-sion ou écouter la radio peut alorsêtre considéré commefaisant par-tie du travail scolaire, et non com-meunepertede temps, ceque cer-tains étudiants, perçus comme«très scolaires», ontdumalà com-prendre. Un bon élève doit encoremoins être «scolaire» en prépaéco qu’en prépa scientifique, cequi renforce d’ailleurs le poids del’origine sociale.Vousdécrivez la transformationque les classes prépa opèrentsur les jeunes étudiants. Peut-on parler de formatage?

Je n’emploie pas cemot conno-té négativement, parce qu’il n’estpas scientifique. Toute «petitesociété», tout contexte, toute ren-contre modèlent les individus, etc’est l’undemes centres d’intérêt:comment se construisent et sontsocialisées les personnes. Je mesuisintéresséeauxclassesprépara-

toires, car s’il y a beaucoup de tra-vauxsur lesétablissementsscolai-res «difficiles» ou les élèves enéchec, peu sont consacrés à ceuxqui réussissent.

Le mot formatage évoque unehomogénéisation,alorsque la for-

cedesclassespréparatoiresest, jus-tement, de développer une atten-tion particulière à chacun, ce quirenforce d’ailleurs leur emprise.Les enseignants observentconstamment les élèves, leurs for-ces, leurs failles, leurs baisses demoral, leurfatigue, leursretardsetabsences… C’est un regard perma-nent, une surveillance «à la car-

te», dans une institution puissan-te, enveloppante, qui ne s’arrêtepas à l’espace scolairemais tend àorganiser toute la vie des étu-diants. En réaction, ils dévelop-pent une vie clandestine et arri-vent àvoler desmomentsà l’insti-tution : fous rires en classe, vieamoureuse, instants de détentelorsqu’ils sont censés travailler engroupe.Laprépaest toutdemêmeprésente et pèse sur eux, mêmedans cesmoments-là.Entrer en classe préparatoiren’impose-t-il pas de laisser decôté tous ses repères?

Lorsque les jeunes entrent enclasse préparatoire, on leur impo-se un dépouillement, toutefoislimité au domaine scolaire. Il leurest enjointdequitter leurshabitu-des de lycéens, de remettre leursconnaissances à niveau et surtoutd’admettre une régression dans leclassement: les anciennes notesn’ont plus cours, les premiers neseront plus premiers… Ce change-ment de repères est violent. C’est

un «hiatus social », au sens dusociologue Erving Goffman,même si, aujourd’hui, les ensei-gnants sensibles aux critiques nemettent plus de notes négativesouexagérémentbasses. Il leurarri-vemême, pour remonter lemorald’un élève, de lui accorder unenotevalorisante, ceque, d’ailleurs,les étudiants remarquent. Lesnotes sont un instrument de ges-tiondelapopulationpréparatoire.

Les enseignants de prépas sesentent, en effet, menacés, voireattaquésparlesmédias,enparticu-lierpar LeMonde. Alorsque j’assis-taisàuncoursde langue, laprofes-seure m’a signalée ainsi à ses élè-ves: «Oui, lamadameest là…Vousla connaissez, elle est là pour voircomment je vais vous briser, voussadiser, vous traumatiser, mes bel-les biches. Bon, donc elle regardecomment on travaille.» Bref, ce nesont pas les monstres froids deleur caricature.p

Proposrecueillis parIsabelleRey-Lefebvre

«Lesclassesprépafontdelavitesse

decompréhensionetd’exécutionuneconditiondelasurvie»

Classesprépa, lafabriquedesmaîtresdutempsLasociologueMurielDarmons’est intéresséeà l’effetsur lesétudiantsd’unpassageenclassepréparatoire

«Letempsperduneserécupèrejamais»Témoignage JenithAgodage, 19ans, endeuxièmeannéedeclasseprépaMP* (mathématiques-physique) au lycéeCharlemagne, àParis

YEnpremière année,toute la classe s’estrendu compte

qu’onallait devoir faire tout trèsvite. Les professeurs accordaientpeud’importance au travail quechacund’entre euxnousdonnait.C’était unpeu lapanique. J’ai finipar comprendrequ’il importaitsurtout d’êtrevolontaire. Les pro-fesseursont consciencequ’onnepeutpas tout fairemais refusentqu’onne fasse rien.

Il est impossible de dire :«J’avais un devoirmaison demaths, alors, je n’ai pas eu letemps de fairemes exercices dephysique…»Mais au final, ilsessaient d’instaurer une transi-tion. Ils ne veulent pas nous per-dre dès le début de l’année! Ilsnous disent qu’il est importantde garder une activité sportive et,plusieurs fois dans l’année, ilsnous ont rappelé qu’il étaitimportant de décompresser.

Moi, jeme suis réservédutempspour souffler. Par exemple,

dans le RER – j’ai deuxheures detrajetpar jour –, je pourrais enpro-fiter pour travailler, revoir descours…maisparfois je n’en ai pasenvie. Alors, je ne le fais pas. Jepenseque je suis plus efficace sij’ai vraiment envie de travailler.Demême, pendant les vacances,par exemple, si j’avais fait la listede tout le travail que j’aurais dûfaire, je n’aurais pas euuneminu-te de répit !

Depuisma rentrée endeuxiè-meannée, jem’aperçois que jesuis beaucoupplus rapide. J’aiacquisdes raisonnements,unemanièrede regarder un énoncé.Et tantmieux, car le rythmeestencoreplus intensequ’enpremiè-re année. Il y a une vraie rupture.Mais je connais lespièges dans les-quels je suis tombé enpremièreannée. Commepar exemple:remettre à plus tard…C’est désor-mais impossible.

En première année, on se dittoujours, “Je ferai ces exercicespendant le week-end ou pendant

les vacances”. En fait, le tempsque l’on perd, on ne le récupèrejamais. Et si l’on n’a pas fait le tra-vail, il vautmieux passer à autrechose. J’ai un copain qui vient defaire sa rentrée en premièreannéemaths-physique, il n’a paslu les bouquins de philosophiequ’il fallait lire pendant les vacan-ces. Je lui ai dit : «Laisse tomber,tu n’as plus le temps. Il ne te resteplus qu’à te procurer des résuméset des fiches.»

Autre piège: négliger sonhygiène de vie. Au début de l’an-née, jeme couchais vers 22h30,et puis, enmilieu d’année, jemesuis relâché, j’étaismoinsmoti-vé. J’ai essayé de combler cettebaisse demotivation en tra-vaillant plus tard pour comblermonmanque d’efficacité.Maisj’étais un zombie lematin. Je necomprenais plusmes cours. Cet-te année, j’ai décidé de préserverma forme.»p

Proposrecueillis parNathalieBrafman

«J’airapidementfaitdesimpasses»TémoignageClémentRoche-Pinteaux, 20ans, ex-élèvedekhâgne.Ilvientd’intégrer laFemis, aprèsune licencedephilosophie

YAprèsdeuxannéesde classes prépa,l’arrivée à l’univer-

sité est évidemmentbeaucoupplus simple. D’abord, j’avouequej’avais l’impressionden’avoirrien à faire, un sentimentde gran-de liberté. Ilme semblait que lachargede travail était dérisoirepar rapport à ce que l’onnousdemandeen classesprépa. Toutme semblait plus facile, car on aappris à gérer le temps.On saitaller à l’essentiel.

La grandedifférence entre lesclassesd’hypokhâgne et de khâ-gne réside dans le travail que l’onnousdemande. Enpremièreannée, on aunemultitudedepeti-tes tâches à accomplir. Et cela nes’arrête jamais. Il y a à la fois le tra-vail que les professeursnousdon-nent et la pressionque l’on semetpour finir. Finalement, j’ai rapide-ment fait des impasses.

Chaque semaine, notre profes-seur d’anglaisnousdonnait descentainesdemots à apprendre…

C’était énorme!Alors, je ne lesapprenais jamais. Evidemment,j’avais zéro à chaque contrôle,mais je l’assumais. Je préféraisconsacrer ce tempsàmesdisserta-tionsdephilosophie ouaux com-mentaires enanglais. En khâgneaussi, j’ai sélectionné.Mais j’avaisacquisune certaineméthodolo-gie.Mes journées étaient assezsemblables: j’allais en cours, et

ensuite je filais à la bibliothèque,où je passaismesweek-ends.Maisj’ai continué àmeménager dutempspour sortir, voir des amis,alors qu’autourdemoi certainsélèvesn’avaient plusde vie.

Envacances et le derniermoisjuste avant le concours, jem’étaisfait un tableaude révisions. Finale-ment, j’ai appris àm’organiser.»p

Proposrecueillis parN.Bn.

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universités&grandes écoles

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Reportage

P ourquoi les oignons font-ilspleurer? Pourquoi écouterdelamusiquesuscite-t-ildes

émotions? Nourdine Kechicheaimerait bien apporter des répon-ses à ces questions-là. Il a 20 ans,un bac technologique en poche etfait sa rentrée à l’InstitutVillebon-Georges-Charpak, à Palaiseau(Essonne). «J’aime les sciences, et,un jour, au lycée de Drancy, où jepréparais un bac technologique,monprofdemathsm’aparlédecet-te formation. Ce qui me plaît c’estqu’on voit immédiatement à quoisert ce que l’on apprend et pour-quoi on l’apprend. On n’en restepasà la théorie.»

Ce cursus original qui s’ouvredans l’enseignement supérieurest inspiré desméthodesdeGeor-gesCharpak.LePrixNobeldephy-sique a lancé en 1996 un renou-veaude l’enseignementdesscien-ces en primaire avec La Main à lapâte, une formule où l’élève sepose des questions etmonte avecson maître les expériences quipermettent d’y répondre. Avecl’Institut Villebon-Charpak, leprincipe est le même, mais dansl’enseignementsupérieur.Au ter-medes trois ans de formation, les17 filles et 21 garçonsde la premiè-re promotion obtiendront unelicencescientifiqueexpérimenta-le et pluridisciplinaire, délivréepar les universités partenairesParis-Descartes et Paris-Sud, etpourront continuer en école d’in-génieurs ou enmaster.

«Nouspoursuivonsdeuxobjec-tifs, expliquent Bénédicte Hum-bert, administratrice de l’Institut,et Isabelle Demeure, professeured’informatique à Télécom Paris-Techet directricede la formation.Il s’agit d’abord, de diversifier lesprofils d’étudiants scientifiques :plusdefilles,plusdeboursiers–cet-te première promotion en compte65%–,etdesbacheliers technologi-ques – 30%. Ces bacheliers sontd’abord recrutés pour leur appétitdes sciences et leur créativité.

Ensuite, nous voulons innover surle plan pédagogique et privilégierla méthode inductive, qui part del’expérience pour trouver la règle,plutôtque latraditionnellemétho-de déductive. » L’idée est bien dedonner ou de redonner le goûtdes sciences. «Nous constatonsque les jeunes se détournent deplusenplusdes formationsscienti-fiques, que le vivier des grandesécoles s’appauvrit, que la mixitésociale faiblit, que l’ascenseursocialestenpanne.C’estunetenta-tivepoury remédier», analyse Isa-belle Demeure.

«Relativiser les savoirs »Dès la rentrée, le programme

s’installe.Chaquesemainedémar-re par une conférencemagistrale,où les étudiantsont le droit d’êtreun peu plus passifs avant de selancer dans les projets, des ate-liers et des jeux. Dans quelquesjours, il s’agira de fabriquer unebio-pileàpartirdematièreorgani-que pour comprendre comments’y crée l’énergie. Ondine Lefeb-vre, bac scientifique en poche,hésitait entre science et art.Aujourd’hui, elle goûte la riches-se du groupe : «Nous avons tousdes visions et des centres d’intérêtdifférents, ce qui est enrichissant.Pour chaque question posée, nousabordons aussi le contexte écono-mique, politique, les questionssociales.Nousavons, par exemple,parlé de développement durableet constaté que, dans les pays pau-vres, ces techniques restent inac-cessibles.»

«Cette formation est très exi-geante et demande beaucoup detravail, mais, ici, le moteur n’estpas, commeenprépa, de réussirunconcours: c’est le plaisir d’appren-dre», explique JeanneParmentier,responsable de l’innovation péda-gogique de l’Institut Villebon-Charpak,normalienneetdocteureen physique, qui n’a pas oubliécombienelles’ennuyaitdurant lescours théoriques.

A l’Institut, les enseignementssont interdisciplinaires, avec une

place importante accordée auxsciencessociales.Unedespremiè-res questions abordées est«Qu’est-ce que la vie ? », avec,bien sûr, une contribution pré-pondérante d’un biologiste venudeParis-Descartes,maisaussi l’in-tervention de chimistes, juristes,sociologues…

«On apprend aussi à relativiserlessavoirs.Parexemple,sur laques-tion “Les hommes sont-ils plusrationnelsque les femmes?”,nousavons étudié les travaux de deuxchercheurs qui aboutissaient à desconclusions radicalement oppo-

sées », raconte Clément Hérat,bacheliervenud’un lycéeagricole,quesonhandicapdesurditéauraitempêché d’assister à des cours engrandgroupeou en amphi.

Sabine Rajkumar, passionnéede biologie et de sciences de la vieet de la Terre, venue du lycéeUtrillo de Stains (Seine-Saint-Denis), redoutait, elle, la pressionet le stressdes classesprépa, qu’el-le n’aurait pas supportés. «Je trou-ve, ici, l’atmosphère de travail cal-meet stimulantedont j’ai besoin»,se réjouit-elle.

Touslesélèveshabitentsurpla-

ce,dansunerésidenceoùilsparta-gent la cuisine. «C’est importantcar le programme est dense etlourd, avec des séances de tutoratjusqu’à 20heures, argumenteBénédicteHumbert.Etcelacontri-bue à créer un esprit collectif.» Leprogramme,minutieusementéla-boré par une dizaine d’ensei-gnants qui sont allés chercher etse former à toutes les méthodespédagogiques de pointe, jusquedans des écoles de design et avecdes cours en ligne, fourmille d’in-ventions, du recrutement à l’éva-luation.

La formation, présentée sur lesite Admission PostBac, a drainé1400 vœux, «mais comme nousdemandionsundossier demotiva-tion assez poussé, nous en avonsreçu 500. Nous avons extrait200candidats, convoqués à unejournéed’épreuvesorales,écritesetdemise en situation d’expériencesscientifiques en groupe pour jugerde leur curiosité, de leur créativitéetdeleurattentionàl’autre»,préci-se JeanneParmentier.

L’expérienceestégalementexi-geante pour la quinzaine d’ensei-

gnants venus, à parts égales etavec des pratiques très différen-tes, de Paris-Descartes, Paris-Sud-Orsay et des grandes écoles deParisTech. Mais tous y trouventleur compte. «Les cours en amphique je donne en première annéed’études de santé sont très frus-trants, car il y a très peu d’interac-tions avec les étudiants, un peuplus en travaux pratiques. Mais jeme sers, à la fac, de ce que j’ap-prends à l’institut Villebon-Char-pak,et j’envoisdéjà leseffetsbéné-fiques dans les copies des étu-diants en licence de bio», se félici-te Franck Brouillard, professeurde biologie à Paris-Descartes.

Partant du principe que resti-tuer ses connaissances est aussiimportant que de les acquérir, lesétudiants prendront part, en find’année,àdesactionsdevulgarisa-tiondes sciencesauprèsd’enfants,avec les ateliers La Main à la Pâte,Les Petits Débrouillards ou l’asso-ciation Paris-Montagne, qui rap-proche chercheurs et lycéens pas-sionnés de sciences, notammentdes zones sensibles.p

IsabelleRey-Lefebvre

Brive-la-Gaillarde (Corrèze),Albi (Tarn)Envoyé spécial

E tudier dans une grande ville,ça coûte cher… » MarieCueille et Pauline Rigon dis-

cutentcôteàcôtedanslabibliothè-que universitaire. C’est leur ren-trée dans l’enseignement supé-rieur, et toutes deux sont inscritesen DUTGestion des entreprises etdes administrations à Brive-la-Gaillarde (Corrèze).

«Brive, c’est ma ville natale,explique Pauline. J’habite à côté, àMalemort, chez mes parents. J’aienvie de rester le plus longtempspossible chez eux. Les grandes vil-les, on verra plus tard…» Marie,elle, travailledéjàdans la restaura-tion rapide pour payer ses études.En restant ici, elle joue la stabilité

financière. Pauline renchérit :«Pendant lesdeuxansd’IUT, j’évitedes dépenses de logement à mesparents. L’argent économisé per-mettra de financer un stage àl’étranger, plus tard.»

Permettre à des jeunes issus defamilles modestes de mettre unpied à l’université sans engagertropde frais est une des vertus descampus de villes moyennes. EtGenevièveFioraso,ministredel’en-seignement supérieur et de larecherche, entendbien soutenir ceservice de proximité. «Le dévelop-pement de l’enseignement supé-rieur en Midi-Pyrénées a eu, sur leplan de la démocratisation, deseffets palpables. Le nombre d’étu-diantsboursiers [56%àAlbi, contre27%demoyennenationale,NDLR]est plusdéveloppé sur les sites délo-calisés que dans les métropoles

régionales. Beaucoup de ces jeunesneparticiperaientpasàladémocra-tisationdel’universitésanscescam-pus», expliquait Martin Malvy, leprésident socialiste de la région, àGeneviève Fioraso venue rencon-trer, lundi 16septembre, les 3000étudiants en lettres, sciences ouinformatique du centre universi-taire Champollion d’Albi (Tarn) etceuxducampusdeBrive.

Pour soutenir une pédagogiefondée sur la proximité avec lesenseignants et la progressivité duparcours,elleamêmeprisl’engage-ment d’attribuer 43 postes à Albid’ici à 2015. «Nous avons un tauxde boursiers supérieur à lamoyen-ne, mais notre taux de réussite enlicence est lui aussi supérieur de 10pointsà lamoyennenationale», seféliciteleprésidentduconseild’ad-ministrationducampusChampol-lion,ChristianDesmoulins.

Hafiza Karaer, en licence dedroit,vanteune«transitionendou-ceur vers le supérieur» et des «pro-fs toujours là pour nous répondrequand nous avons des doutes».Pierre Catalo, étudiant en histoireetprésidentduconseildelavieétu-diante, s’emballe devant l’amphiplein à craquer pour écouter laministre. «Cette université, luidéclare-t-il,n’estpasuneusinepro-duisant des étudiants à la chaîne,

maisunematernitéà taille humai-ne.» Après avoir rappelé qu’il fautseméfier desmaternités des villesmoyennes, Mme Fioraso se féliciteelle aussi de ce côté«incubateur».

Les campus de proximité pré-sentent aussi des faiblesses. Dansuneétudesur leseffetsde laproxi-mité sur la poursuite d’étudessupérieures publiée en 2009, lasociologue Laurence Faure a exa-

minélecasdel’universitédePerpi-gnan. Si elle observe que ces sitespermettent une démocratisation,elle estime que celle-ci est «relati-ve», notamment parce que lesenfants de familles favorisées onttendance à éviter ces campus. Il yaurait la fac des riches et la fac despauvres.

Par ailleurs, dit-elle, les politi-quesde regroupementd’universi-tés « laissent présager une possiblefermeturedesantennesetuniversi-tés de proximité ou aumoins leur

restriction au premier cycle ».MmeFioraso se défend de vouloir«siphonner les territoires», et pro-meut la complémentarité dessites et les «niches d’excellence».Brive en est un exemple à sesyeux. L’université fait mentirl’idéequecespetitssitessecanton-nent à préparer à des licences.L’excellencey a aussi uneplace.

En visitant le campus, laminis-tre découvre la maquette d’unradar pour tunnelier, qui «va êtreexpérimenté en Chine». Puis, deschercheurs lui présentent un cap-teurderythmecardiaquequipour-rait prévenir des accidents de san-téenmaisonderetraite,parexem-ple. «Nous avons à Brive un trèsbon exemple de transfert scientifi-que. Et la proximité joue un grandrôle.»

Aquelques salles de là, elle visi-te le Centre de valorisation agro-ressources, qui travaille notam-ment avec Sothys, dont les pro-duits de soins de luxe ont acquisune renommée mondiale. Un sacde produits cosmétiques Sothyslui est offert. Elle plaisante : surl’étuifigurentlesnomsdeParis,deNewYorkoudeTokyo,mais«pour-quoi manque-t-il Brive?». «C’estvrai, nous aurions pu», répondDavid Marionnet, le représentantde l’entreprise corrézienne. Le siè-

gedeSothyssetrouveeneffetàBri-ve.

«Campus de ville moyenne neveut pas dire campus de qualitémoyenne, seréjouitGenevièveFio-raso. Parce que les gens se connais-sent et qu’ils sont tout de suite enconfiance,onpasseplusvitede l’in-vention de laboratoire à l’innova-tion en entreprise, ce qui crée del’emploi sur ces territoires.»

Lorsqu’elles conjuguent proxi-mité et excellence, les universitéslocales sont un vrai atout pouratteindre l’objectif d’amener lamoitié d’une génération à undiplôme d’enseignement supé-rieur.p

Benoît Floc’h

AAlbiouBrive, lesuniversitésdeproximitéonttrouvédesnichesd’excellenceLoindese limiteraux licences, lesuniversitésdesvillesmoyennesparient surdes formationsen lienavec le tissuéconomique local

Venue des Etats-Unis, LaMain àla pâte a été introduite en Fran-ce en 1996, à l’initiative du PrixNobelGeorgesCharpak, pouraider les enseignants du primai-re à enseigner les sciences en sti-mulant leur esprit scientifique.Depuis, près de 6000ensei-gnants de 31 pays s’y sont inté-ressés et 300000enfants enont bénéficié. En 2012 s’estmiseenplace une fondationde coopé-

ration scientifique créée parl’Académie des sciences, l’Ecolenormale supérieure (Paris) etl’Ecole normale supérieure deLyon. Son but est d’amplifier lesactions antérieures. QuatreMai-sons pour la science ont ouvertleurs portes dans les universitésenAuvergne, Lorraine,Midi-Pyrénées et Alsace pour créerun lien entre chercheurs etenseignants.

A l’Institut Villebon-Charpak, le programme s’articule autour de conférencesmagistrales, de projets, d’ateliers et de jeux. HIYA IMAGES/CORBIS

ASaclay, lesétudiantsfontdessciencesautrementInspiréedeLaMainà lapâte,une licencedesciencesd’unnouveaugenreouvreàSaclay

55%des 20-24 ans ont fait desétudes supérieures, contre 28%des45-49 ans.

Parmi les enfants de cadres ouprofessions intermédiaires, 76%des20-24ans étudient ou ont étu-dié dans le supérieur, contre 56%des45-49 ans.Parmi les enfants d’ouvriers ou

d’employés, c’est le cas de40%des20-24 ans, contre 17%des45-49ans.

20%des 2,3millions d’étu-diantspoursuivent leurs étudessur des pôles universitaireslocauxqui représentent 126 sites.Au total, la France compte 75uni-versités proprement dites.

La rénovation des sciences vient d’abord duprimaire

«Campusdevillemoyenneneveutpas

direcampusdequalitémoyenne»

Geneviève Fiorasoministre de l’enseignementsupérieur et de la recherche

Ladémocratisationdu supérieur se poursuit

70123Jeudi 19 septembre 2013

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E n2012, le soldeagroalimentairedenotrepaysétaitpositif de11,6milliardsd’euros, lamoitié

dece résultat étant réaliséavec lespaysextérieursà l’Unioneuropéen-ne. Il n’y aguèreque l’aéronautiquequi rapportedavantageà la France(20milliardsen2012).

L’agriculturen’est donc pas seule-ment un atout économique; elleest un atout géopolitiquemajeurdans unmonde dont la populationdevrait passer, en deux généra-tions, de 7 à 9milliards d’habitants.

Elle est redevenueun enjeu de premier plan: telle est lathèse principale de ce livre, dont l’originalité est de pro-poser une approche géostratégique des questions agrico-les et alimentaires. Un domaine où, plus que jamais, lepolitologue et l’économiste doivent croiser leurs démar-ches, ce que font judicieusement SébastienAbis, géopoli-ticien et spécialiste en agronomie, et Thierry Pouch, res-ponsable des études économiques aux chambres d’agri-culture.

«Changement de regard»Pendant longtemps, on a considéréque l’importance

des exportationsagricoles était caractéristiquedu sous-développement.Unpays avancé se devait d’exporterdesproduitsmanufacturés.Mais, à l’heure de l’agrobusiness,la donne change. La puissancenepeutplus êtrepenséecommehier. «Un changementde regard s’impose», affir-ment les auteurs. Ceux-ci n’hésitentpas à comparer l’agri-cultureà la sidérurgie. Cette dernière a été sacrifiée aumotif d’une rentabilité insuffisante.Mais, aujourd’hui, lademandemondialede fer, d’acier, de fonte, explose.

La France,montre le livre, ne possèdepas seulementune force céréalière, laitière ouviticole; elle a une forcescientifique, et des grandes entreprises compétitives.«Tous les pays duglobene peuvent se prévaloir d’une auto-suffisancealimentaire, écriventMM.Abis et Pouch, pourqui il faut cesser de faire paraître [la politiqueagricolecommune] comme la sommedes égoïsmesnationaux et laboîte à problèmesd’uneEurope enpanne.»

Lesauteurs se réjouissentdevoir l’agroalimentaire,petit à petit, se replacer aucentre desdiscourspolitiques.Mais il faut aller plus loin.Unepolitiquede long termeestnécessaire. Le vent est favorablepour l’agroalimentairefrançais. L’agriculture françaisea«rendez-vousavec l’histoi-re», écrivent les auteurs. Tâchonsdenepasmanquer l’occa-sion. p PhilippeArnaudAgriculture etmondialisation. Un atout géopolitique pour la FranceSébastien Abis et Thierry Pouch,Presses de Sciences Po, 185 pages, 15 euros.

LE LIVRE

L’agriculture,unatoutgéopolitiquepourlaFrance

LIRE AUSSIAquoi ressemblera 2014?L’éditionannuelle duCentred’étudesprospectives et d’in-formations internationales fait le bilande l’évolutiondela crise en 2013 et trace les perspectivespour l’année 2014selondeuxaxes: quels seront les effets dudésendette-mentdes Etats et desménages sur la croissance?Quellespolitiquesmonétaires les Banques centrales pourront-ellesmener après lesmesures hétérodoxesprises en2012et 2013?L’économie mondiale 2014Centre d’études prospectives et d’informations internationales,La Découverte, collection Repères, 124 pages, 10 euros.

publications

Coule-t-elle? Se redresse-t-elle?Se débande-t-elle? Contre-atta-que-t-elle?LaFranceestpropul-sée en couverture de l’actualitééditoriale des derniers jours

par les politiques (Arnaud Montebourg,Valérie Pécresse, Karine Berger et ValérieRabault), les économistes (ChristianSaint-Etienne, Augustin Landier, DavidThesmar), les journalistes (François deClosets). La patrie serait-elle en danger,pourque tantde fées sepenchent sur sonlit de douleur, chacun y allant de soncoup de baguettemagique?

Face à ce déferlement, le plus simplepour lecritiqueperplexeétaitde faire liredes économistes par des politiques, etinversement.C’estcequenousavonspro-posé à deux paires d’auteurs, Karine Ber-ger et Valérie Rabault, d’une part, Augus-tin Landier et David Thesmar, de l’autre.

Au premier abord, chacun des deux«camps» s’étonne, sans en contester lalégitimité, de l’intrusion de l’autre danssondomaine. Les économistes regrettentque,passéespar lesmeilleuresécolesd’in-génieurs et par l’entreprise, les deuxdéputées (PS), dont «on sent dans leurlivre qu’elles apprécient le monde desentrepreneurs», soient « tombées» enpolitique: d’oùun livreprésentant, seloneux,unbrillantdiagnosticdes insuffisan-ces françaises,mais «gâché»par despro-positions programmatiques « bienfloues».

Elles, justement,estimentquedeuxéco-nomistes,dont les travauxacadémiques–lepremierà l’Ecoled’économiedeToulou-se, le second à HEC – font autorité,devraient assumer des prises de positionpolitiques sans se réfugier derrière desconstatsprétendument scientifiques.

«Déliremanufacturier»Et pourtant, les points d’accord sont

nombreux. Chacun a reconnu chez lesautresunemêmecritiqueduconservatis-me et de la consanguinité des élites fran-çaisespubliques et privées, de leur capta-tion de la rente économique à travers lesgrandesentreprises,etdoncde lanécessi-té de favoriser l’entrepreneuriat, laconcurrence, les PME et la créativité desscientifiques et des ingénieurs pour bri-ser cesmonopoleset libérer l’innovation.

Il s’agit, pour les uns comme pour lesautres, de faire franchir à la France leseuilquipermettraàsesentreprisesd’en-trer enfin dans l’ère de l’économie sou-ple, innovante, technologiquementavan-cée et créatrice de valeur, celle que Chris-tian Saint-Etienne baptise « l’iconomie»(L’Iconomie pour sortir de la crise, OdileJacob, 164 pages, 18,90 euros).

Mais c’est bien sûr le comment qui lesdépartage.«Pourquoi s’attacher à la figu-re générique de l’usine, à la fabricationdes objets, partagée d’ailleurs à droitecomme à gauche, alors que l’économie

numérique et immatérielle succédera àl’économie industrielle, comme celle-ci asuccédé à l’économie agricole», s’interro-gentDavid Thesmaret Augustin Landier,qui parlent de «délire manufacturier»quandilsévoquentle«redressementpro-ductif» cher àM.Montebourg.

«Le numérique n’a pas le monopole del’innovation», rétorquent Karine Bergeret Valérie Rabault, qui ont «constaté surle terrain, et nondans la théorie économi-que, que les industries et les services tradi-tionnels innoventet exportentces innova-tions». Détournant l’unedes têtesde cha-pitre des deux économistes, elles procla-ment que « le poulet est bien une filièrestratégique,neserait-cequeparceque l’in-dépendancealimentaireestunatoutgéo-politiquemajeur».

Autre désaccord, le rôle de la finance.«Ce livre d’économistes est curieusementun déni de la réalité de la crise financière,disent les députées.Nousavons toutes lesdeux travaillé dans des multinationales.Contrairementà ce qu’ils écrivent, l’objec-tif de 15% de retour sur investissementexiste bel et bien et oriente les décisions. Aaucun moment ils ne posent la questionde la répartition de la valeur entre le tra-vail et le capital, qui est pourtantà labasede toute économie politique.»

De leur côté, les économistes regret-tentquelesdéputées«sesoientcruesobli-gées de reprendre les “éléments de langa-ge”convenussur lesprétenduesdérivesdela finance. Les entreprises qui se polari-sent sur leurs résultats financiers sont cel-

lesquin’ontpasdeprojets.Cequimanqueaujourd’hui à l’économie française, cesont les projets et pas les financements.Nulbesoind’uneBanquepubliqued’inves-tissement ou de subventions: si un projetpeut être rentable, lesmarchés le finance-ront. Lesbulles financièresnenaissentpasde la spéculationà court terme,mais de ladictature du long terme, lorsque le mar-ché auto-entretient la fiction d’une profi-tabilité à long terme d’un secteur».

Pour les deux économistes, l’ouvragedesdeuxdéputéesrelèvedu«créationnis-me en économie. Il n’y a pas d’un côté un“dessein intelligent” poursuivi par un Etatseul capablededirequi seradansdixans leGooglefrançaisetoùseranotreSiliconVal-ley, et de l’autre lemarchéqui choisirait demaximisersaplus-valueàcourt terme.Carlemarchénefaitpasdechoix, ilest laplate-forme où se croisent des choix innombra-bles dont certains seront payants, d’autresnon ». Ils critiquent également une«vision patrimoniale de l’économie», quiverrait dans «le rachat de pépites françai-ses par l’étranger un signe de déclin, alorsque l’essentiel est que le territoire nationaloffre un environnement qui permette derenouveler constamment la création denouvelles activités».

Pour lesdéputées, le livredeséconomis-tes «participe hélas à la mode du Frenchbashing, quand l’urgenceseraitplutôtd’ex-pliquercequ’ilfautfairepouraiderlesentre-prises.Carêtrenéokeynésien,cen’estpasnepasaimer les entreprises».p

AntoineReverchon

L’ÉCO SUR LA TOILEJanetYellen,unefemmeàlaFed?

B arack Obama s’apprête à désigner le nouveau président dela banque centrale américaine (Réserve fédérale, Fed). Leretrait surprise, lundi 16septembre, de la candidature de

l’un des deux favoris, Larry Summers, laisse un boulevard à JanetYellen, actuelle vice-présidente de la Fed. C’est la seule femme delacourseet, sielleétaitchoisieparM.Obama,elleseraitégalementla première à prendre la tête de l’institutiondeWashington.

Ce seul fait a cristallisé les débats sur le Net américain durantplusieurs semaines, quitte à réduire son curriculum vitae, pour-tantbien rempli, à sonseulgenre! EzraKlein, l’éditorialistevedet-te duWonkblog, hébergé par le site duWashington Post, a listé ledimanche15septembrecinqraisonsdelanommer,parmilesquel-les le faitqu’ellesoitunefemme. Il soulignequemêmesi« lechoix(…) ne devrait pas se fonder sur le sexe», «Yellen a dû accumulerplus d’expérience et bien plus de soutiens» que ses concurrentsmasculins, dont certains ont d’ailleurs versé dans le sexisme.M.Summers, son ex-rival, a en effet été critiqué sur des propostenusen2005,alorsqu’ilétaitprésidentdel’universitéHarvard: ils’était interrogé sur la capacité des femmes à exceller dans lesmatières scientifiques…

Depuis lami-septembre, lesassociationsféministesorganisentla riposte sur laToile.HeidiHartmann, la présidentede l’InstituteforWomen’sPolicyResearch, a adresséàBarackObamaune lettrepro-Yellensignéeparplusde350économistes.LaNationalOrgani-zationforWomena,quantàelle, lancéunepétition,accessible surson site, pour dénoncer une «campagne de diffamation sexiste»et demander auprésident denommer Janet Yellen. Réponsedansles prochains jours.p

AnnaVillechenon

¶À L I R ELa Francecontre-attaqueKarine Bergeret ValérieRabault(Odile Jacob,239p.,21,90euros).

10 idées quicoulent laFranceAugustinLandier etDavid Thesmar(Flammarion,158p., 13euros).

Spécialistesetpolitiquesbataillentpour«sauver»l’économiefrançaiseChacunsarecette: faiblessesetatoutsdel’Hexagonesontencouvertured’aumoinssix livresrécents

¶PierreJacquetest présidentde GlobalDevelopmentNetwork (GDN),à New Delhi

Pourquoidesenfantssipetits?LecturesétrangèresL’Indeestagitéeparundébatsur lamalnutrition

D e l’aveumême du premier minis-tre indien Manmohan Singh, « lamalnutrition est un déshonneur

national». D’après l’Organisation mon-diale de la santé, près de la moitié desenfants indiens présentent un retardanthropométrique, ce qui place le paysderrière la plupart des pays pauvresd’Afrique subsaharienne.

Dansunarticle controverséde l’hebdo-madaire Economic and Political Weekly,publié à Bombay (Mumbai) (no 18-48,4mai 2013), l’économiste Arvind Panaga-riya (université Columbia, Etats-Unis)conteste pourtant ces chiffres en obser-vant que les données relatives à la crois-sance et aux revenus,mais aussi à lamor-talité et aux autres indicateurs de santé,montrent une évidente supérioritéindienne. Il en conclutque lamesurede lamalnutrition est notoirement déficienteet que les retards anthropométriquesdesenfantsindiensrenvoientplutôtàdesspé-cificitésgénétiques.Circulez, iln’y a rienàvoir!

Mais dans un dossier publié quatremoisaprès, le24août(no34), lemêmeEco-nomic and Political Weekly démonte cet-

te thèse. L’explication génétique est peuplausible : la diversité est empirique-mentplus forte au seind’unepopulationdonnée qu’entre les populations, et l’In-de présente elle-même une hétérogénéi-té génétiquemarquée. En outre, le statutnutritionnel d’un individu ne dépendpas seulement du régime alimentaire etdu revenu, mais aussi des conditionsinfectieuses, des services de santé, de laqualité de l’eau potable et de l’assainisse-ment, de la santé maternelle prénatale,etc.

Place dans la fratrieL’Inde peut ainsi souffrir de malnutri-

tion,alorsmêmequesonrevenumoyenestsuffisamment élevé pour donner accès àune alimentation suffisante. Un facteurdéterminant est la pratique répandue de ladéfécationà l’air libre (53%delapopulationindienne, bien plus qu’en Afrique subsaha-rienne!), qui expose les enfants à desmala-dies intestinales susceptibles d’avoir uneffet notable sur leur taille. Quant à lamor-talité africaine, elle ne dépend pas seule-ment de la nutrition et résulte notammentde laprévalencedu sida et dupaludisme.

Les professeurs Seema Jayachandranet Rohini Pande proposent une explica-tion plus fine, en démontrant le lienentre laplacedans la fratrie et les caracté-ristiques anthropométriques. Les pre-miers-nés indiens sont plus grands queles premiers-nés africains au même âge.C’est avec les enfants suivants qu’appa-raissent et s’accentuent carences pondé-rales et retards de croissance des enfantsindiens. Les ménages indiens semblentinvestir demoins enmoins dans la santédes femmes au fur et à mesure des gros-sesses successives, ce qui affecte celle dufœtuspuisdunouveau-né. Cette explica-tion, clairement non génétique, suffit àrendre compte de l’écart entre l’Inde etl’Afrique.

Au moment où le gouvernementindien vient de faire adopter une loi surla sécurité alimentaire, d’autant pluscontroversée qu’ellemet en jeu d’impor-tantes subventions publiques, alors quele budget indien est très déficitaire, cedébat confirme que le problème va bienau-delà du volume des subventions dis-ponibles.p

Pierre Jacquet

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DE PLANTU

LMQ1

C ’est commeune cerise aigre sur legâteaud’anniversaire de la faillite de labanqued’affaires LehmanBrothers. Le

15septembrenemarquait pas seulement lescinq années écoulées depuis le début de lacatastrophe financière; c’était aussi le jour aucours duquel expirait l’ultimatumadressépar le conseil d’administrationde l’orchestreduMinnesota (MinnesotaOrchestra) à sesmusiciens.Depuis octobre2012, cordes, ventset percussions sont sous le coupd’un lock-out– une grève – décidé par leur direction aprèsqu’ils eurent refusé une importante coupedans leur salaire. Une propositionqui découledirectementde l’effondrementdesmarchésfinanciers en 2008.

Ce conflit a attiré l’attentionauxEtats-Unis.Sansdouteparce qu’il est survenudansunEtat qui n’est pas étranger – en raisonde sonpasséminier, de la présenced’une forte com-munautéd’origine scandinave – à la traditionsociale-démocrate, sansdoute aussi parce que,sous la directiondu chef finlandaisOsmoVänskä, l’orchestre a acquis, ces dernièresannées, une réputationnationale.

A tel pointque le gouverneurde l’Etat, ledémocrateMarkDayton, anomméunmédia-

teur, et pasn’importe lequel : l’anciensénateurGeorgeMitchell, négociateur internationalquia exercéaussi bienen IrlandeduNordqu’auMoyen-Orient.Pour l’instant, toutefois, sesefforts sont restésvains, et leMinnesotaOrchestraseproduit sans chef, dansdes sallesde fortunepour réunir les fondsquipermet-trontà sesmembresde survivreau lock-out.

Cette crise a été déclenchée à l’automne2012, lorsque, après avoir enregistré deuxannées consécutivesdedéficits, le conseil d’ad-ministrationaproposé auxmusiciensde fairepasser leur salairede basede 113000dollars(85000euros) par an à68000dollars. La rai-son avancée était alors l’effondrementde lavaleurde la dotationde l’orchestre, placée enBourse, en raisonde la crise financière.

Mais lesmusiciensont alors fait remarquerque les deuxannées précédentes avaient étééquilibrées, et que le déficit avait surgi aumomentmêmeoù leur contrat collectif devaitêtre renégocié.

Selonune enquêtepubliéepar le Star Tribu-nedeMinneapolis – principale ville de l’Etat,où l’orchestre est installé –, l’équilibremainte-nu en2008et 2009 l’a été grâce à des ventesdevaleurs à perte qui ont diminué celle de la

dotationen capital de l’orchestre. Il s’agissait,pour les administrateurs, de nepas compro-mettre la campagnede collectede fondsdesti-née à rénover – pour 50millionsde dollars – lasallede concerts de l’orchestre.

Le ParlementduMinnesota avait été sollici-té afin que l’Etat se porte garantd’un empruntde 14millions de dollars.«Laprésentationdebudgets en équilibre améliorerait l’imagedel’orchestreauprès des donateurs privés et desentreprises ainsi qu’avec le ParlementduMin-nesota», écrivait le Star Tribuneaumois dedécembre2012.

Ces procédésn’étaient sansdoutepas étran-gers auprésidentdu conseil d’administrationde l’orchestre, JonCampbell, qui se trouveparailleurs être l’undes vice-présidentsde la ban-queWells Fargo.

Spectaculaire gâchisDepuis, les contre-propositionsdesmusi-

ciensouduconseil d’administrationn’ontjamais réussi à fairebouger la partie adverse.Certainsdesmeilleurs instrumentistes sontpartis, cédant auxsirènesd’autres formations.

Le gâchis est d’autantplus spectaculaireque, depuis l’arrivéed’OsmoVänskä, leMinne-sotaOrchestra vivait une espèce de conte defées, se hissant au rangdes plus grands grâce,entre autres, à ses interprétationsde Sibelius(encore la Scandinavie).

Aprèsun concert donné le 1ermars 2010 auCarnegieHall deNewYork, AlexRoss, le criti-quede l’hebdomadaire leNewYorker, avaitécrit que leMinnesotaOrchestraqui interpré-tait le poème symphoniqueKullervo, de Sibe-lius,«sonnait comme le plus grandorchestre

dumonde».Mais lemarché sur lequel se ven-dent lesmusiciens classiquesn’est pas sirobustequ’ils puissent seprévaloir de ces acco-ladespour refuser unebaisse de salaire.

LeMinnesotaOrchestradoit retourneràNewYork, toujours auCarnegieHall, ennovembre, avantd’entreren studiopouryenregistrer. Sonchef aprévenuquesi les répéti-tionsne reprenaientpas le 30septembre, il ren-drait sabaguette.D’où l’ultimatumdesadmi-nistrateursqui veulent rassembler l’orchestrele 15septembre. EtGeorgeMitchell vientdeproposerunaccord, dont les termesn’ontpasencoreété renduspublics.

Onpeut voir dans ces tribulations les aléasde la gestionprivée de la culture. Ailleurs, auxEtats-Unis, les orchestresdeDetroit oude Phi-ladelphieont subi de plein fouet la crise finan-cière, l’un traversantun long conflit social,l’autre étant contraint à la faillite.

Mais il n’est pas besoind’aller si loinpourvoir desmusicienspleurer. C’est ce qu’ont faitceuxde l’Orchestrenational symphoniquegrec, qui dépendaitde la radiotélévisiond’Etat. Ils ont donnéunultime concert le20juin, après que le gouvernement eut décidéd’arrêterde financer le servicepublic.

Avanteux, des centainesdemusiciensdeformations symphoniquesoude chambredespaysde l’Est avaient affronté les conséquencesde l’effondrementdubloc socialiste.Unpeucomme lesmanchots sont lespremièresvicti-mesdu changementclimatique, ondirait quelesmusiciensd’orchestre sont toujoursenpre-mière lignequand la financeperd le tempo. p

[email protected]

A défautd’uneutilisationpluspertinente,DanielVic-tor, le spécialistedes

réseauxsociauxpour leNewYorkTimes,plaidepour l’abolitiondesmots-dièse,ouhashtag, cette«sui-te signifiantede caractères sansespacecommençantpar le signe#(dièse)». Les journalistesdutitreaméricain les ontbannisde leur«timeline».«Ils sont esthétique-mentpréjudiciables, jugeM.Victor(bit.ly/1dl1ESr).Untweet sansmot-dièse seraitplusagréableà l’œil,plus lisible, et susceptibled’êtredavantageretwitté.»

Intégrédepuis juinpar Face-bookpour regrouperdes conte-nus, lemot-dièsen’aurait, selonuneétuded’EdgeRankChecker(EdC), aucuneffet positif. Il ren-draitmême lespublicationsmoinsvirales (bit.ly/1gt1hVM).Toutefois, estimeEdC, a contrariodeM.Victor, sonutilisationestprofitableau tweet, décuplant seschancesd’être retwitté.

Lebloc intitulé «TendancesFrance», situé encolonnedegau-che surTwitter, présente lesmots-dièseslespluspopulaires sur leréseau.Ainsi, #soutienaulapin–prolongementtwittesquede lapageFacebook«Soutienau lapin»parodiantcellede «SoutienaubijoutierdeNice»– caracole entête. Il côtoie#Okcon, sans lienméridional: il désigne l’OpenKnowledgeConference2013, qui

réunit 750participantsde 45paysàGenève jusqu’au 18septembreautourdu thème«Lesdonnéesouvertes. Etendues,profondes etconnectées» (Okcon.org).

Dans ce Top 10, on trouveun#SachezLe – ce caméléonse prêteà tout et à rien – ou#virgintonic,lamatinale deVirgin radio, et des#lolly en cascade, le dernier titrede JustiiiiiinBieber. #Concordiacohabite avec «Costa-Concordia»qui, aussitôt l’opérationde redres-sement achevée, semble aisémentsepasserde l’appui d’undièse.

DépaysantDans ce classementdu réseau,

#Demaincestlarentreea cédé laplace à#Depuisquejesuisencours,surunpiedd’égalité toutefoispourmolester l’orthographe. Lemois de septembrea déjà reléguéles vacances auxoubliettes.

Mais quelles furent les tendan-ces de l’été?Numérounen juilletet en août, #vacances a étémen-tionné2,8millionsde fois, devant#soleil, #piscine,#plage et#voyage, selon l’infographie réali-séeparMinutebuzz.com(bit.ly/16AQebq).Mon lot deconsolation?Garderunpied dansles#vacances en suivant cellesdes autres sur le veilleur Tag-board.com/vacances.Dépaysantet… si agréable à l’œil,M.Victor! p

[email protected]

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ÉCONOMIE DE LA CULTURE | CHRONIQUEpar Thomas Sotinel

Lock-outpourorchestre

C’EST TOUT NET ! | CHRONIQUEpar Marlène Duretz

#vacancesnonstop

DE GRANDESFORMATIONS

SYMPHONIQUESPAIENT AU PRIX

FORT LESERREMENTSDE LA CRISEFINANCIÈRE

LES INDÉGIVRABLES | par Xavier Gorce

90123Jeudi 19 septembre 2013

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