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LE

S N

OU

VE

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HIE

NS

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GA

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2

Ses en

jeux ? R

end

re sensib

le la nécessité,

voire l’urgen

ce de tran

sformation

s en p

ro-fon

deu

r et d’u

ne ap

prop

riation d

émocra-

tiqu

e des m

édias et, d

ans ce b

ut, faire o

u refaire d

e la qu

estion d

es méd

ias la qu

es-tio

n d

émo

cratiqu

e et do

nc p

olitiq

ue

qu

’elle n’aurait jam

ais dû

cesser d’être.

Form

uler d

es projets et leu

r accorder u

ne

place à la m

esure d

u d

éfi qu

e représen

te la con

jugaison

de la révolu

tion n

um

ériqu

e et d

e la con

tre-révolu

tion

libérale. E

t, par

con

séqu

ent, rom

pre avec la p

olitiq

ue d

es ru

stines et d

es placeb

os qu

e résum

ent d

es p

rop

ositio

ns m

inim

alistes et interm

it-ten

tes gagées sur les seules échéan

ces élec-torales.S

i un

autre m

on

de est p

ossib

le, d’au

tres m

édias le so

nt au

ssi. Po

ur q

u’u

n au

tre m

ond

e soit possib

le, d’au

tres méd

ias sont

nécessaires.

*HE

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AIN

E D

’AN

ES

, des

livres (comm

e ceux d

e Pierre B

ourd

ieu et

Serg

e Halim

i), des film

s, des jo

urn

aux

(comm

e PL

PL

, puis Le P

lan B

) et l’associa-

s’étend

à la contestation

en actes fom

entée

par des m

édias associatifs et altern

atifs et à la résistan

ce pratiq

uée p

ar les soutiers d

e l’in

formation

avec le soutien d

es synd

icats d

e journalistes. E

lle se diffuse sur d

es sites in

dépen

dan

ts et de n

ombreux blogs.

Ses cibles ? L

’ordre m

édiatiq

ue existan

t et ses gard

iens. L

a soumission

des cap

itaine-

ries ind

ustrielles et d

es chefferies éd

ito-

riales au cap

italisme d

ans sa versio

n

néolibérale, leur con

tribution à l’an

émie d

u pluralism

e politique et, plus généralem

ent,

les effets ravageurs d

e la logiqu

e du

profit

sur l’inform

ation, sur la culture et, d

ans d

es profession

s min

ées par une précarité gran

-d

issante, su

r les con

ditio

ns d

’activité des

journ

alistes et des créateu

rs. San

s oub

lier les m

enaces q

ui p

èsent su

r la neu

tralité d

’Intern

et et la liberté de ses usagers.

tion

Acrim

ed (so

n site et d

ésorm

ais, M

édiacrique(s), son m

agazine) con

tribuent

à une critique rad

icale et intran

sigeante d

es m

édias q

ui s’était asso

up

ie pen

dan

t les d

écenn

ies précéd

entes. C

ette critiqu

e

LA

CR

ITIQ

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S M

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IAS

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ctio

n d

u film

suit

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rès le

livre

de

Serg

e H

alim

i, mais a

vec so

n

ryth

me

pro

pre

. Co

mm

en

t ête

s-vous p

assé

du te

xte à

l’im

ag

e s

an

s v

ou

s n

oye

r dans la

masse

des a

rchive

s ?Y

AN

NIC

K K

ER

GO

AT

: Un

film

est très différen

t d’u

n livre.

D’ab

ord

, on

a fait le ch

oix d

’un

film d

e co

mb

at, qu

i ne p

ré-ten

d p

as cherch

er la n

ua

nc

e

en

to

ute

chose. O

n n

e men

t pas au

pu

blic, on n

e lui d

it pas

qu’en

1 heu

re 40 le film va brosser tou

s les aspects

de la q

uestion

des m

édias. O

n a fait u

n film

pou

r réveiller les con

sciences, p

our fou

rnir au

specta-

teur u

ne arm

e don

t il pou

rra se saisir pou

r aller lui-m

ême

au co

mb

at, dan

s tou

tes les luttes q

ui l’o

ccup

ent, car, à

no

tre sens, la q

uestio

n d

es méd

ias intéresse to

utes les

comp

osantes d

es luttes sociales. L

a fabrication d

e ce film

nou

s a pris beau

coup

de tem

ps, il a fallu

deu

x ans et d

emi

de travail en

tre l’écriture d

e la prem

ière version d

u scén

a-rio

et le résultat fin

al. Le m

on

tage à lui seu

l a nécessité

neu

f mois d

e travail.G

ILL

ES

BA

LB

AS

TR

E : L

e film est aussi le résultat d

’un travail

collectif, celu

i d’u

ne m

ou

vance n

ée du

con

flit social d

e 1995 et irrigu

ée par les travau

x de P

ierre Bou

rdieu

et de

Serge H

alimi. E

n quin

ze ans, ce groupe in

formel – que l’on

retro

uve d

ans P

LP

L, L

e Plan

 B, A

crimed

, Le M

onde

Diplom

atique, Fakir…

 – a réu

ni u

ne b

anq

ue d

e don

nées

extraordin

airemen

t vaste. San

s ce méticuleux travail d

’ar-ch

ivage, notre film

n’aurait pas été possible. Le m

ontage d

es « d

ébats » télévisés su

r LC

I entre L

uc F

erry et Jacqu

es Julliard

, par exemple, n

ous a été fourni par d

eux professeurs d

e français et d

’histo

ire-géo, qu

i on

t scrup

uleu

semen

t en

registré et dém

on

té chaq

ue séan

ce de b

avardages d

es d

eux « intellectuels ».

Votre

film va

sûre

ment irrite

r de n

om

bre

ux jo

urn

aliste

s. À

quels re

pro

ches vo

us a

ttendez-vo

us d

e le

ur p

art ?

YK

: La réaction

qui revient le plus souven

t, parmi les jour-

nalistes, c’est l’accusation

de sim

plism

e : « D’accord

, mais

c’est plus com

pliqué que ça…

 » Pour n

ous, la question est

simp

le : est-il norm

al qu’un

petit cercle d

’experts coop

tés en

tre eux et qui partagent les m

êmes poin

ts de vue accapa-

rent l’esp

ace méd

iatique ? Est-ce un

e bonn

e chose que les

journalistes cen

sés éclairer le jugemen

t des citoyen

s fassent

des m

énages p

our d

es entrep

rises privées ? E

st-ce qu’on

adm

et, dan

s un

e dém

ocratie telle q

u’on la so

uh

aite, qu

e l’épouse d

’un m

inistre en

exercice soit nom

mée par le pré-

siden

t de la R

épublique à la tête d

e l’audiovisuel extérieur

français ? C

e sont d

es questions sim

ples, auxquelles on d

oit répon

dre par oui ou par n

on.

L’atta

qu

e a

d h

om

inem

est-e

lle u

n m

al n

écessaire

? C

om

ment la

justifie

z-vous ?

YK

: Dan

s le film, on

ne tape pas sur les journ

alistes de base,

les sou

tiers de l’in

form

ation

, mêm

e s’ils p

orten

t leur p

art de resp

on

sabilités. O

n

s’intéresse à ceux qui occupen

t des position

s d

e pouvoir et qui ne se gên

ent pas, eux, pour

attaqu

er les catégories so

ciales exclues d

e l’espace m

édiatique.

GB

: L’éd

itorial du P

lan B

n°6 répon

d à votre

qu

estion

 : « Com

men

t lutter sans iden

tifier l’adv

ersaire ? Pourfen

dre “les marchés” san

s n

omm

er les architectes des marchés dém

atérialise la lutte sociale. C

’est oublier que les mécan

ismes an

alysés par les économ

istes son

t aussi actionn

és par des indiv

idus au profit de groupes sociaux particuliers ; qu’ils son

t appliqués par des courroies de

tran

smission

politiq

ues,

relayés par la presse qui men

t. U

ne critique qui n

e cible per-son

ne épargn

e tout le mon

de. Il faut n

omm

er l’enn

emi ! »

« Les jo

urn

aliste

s, les p

oli-

tiqu

es, le

s éco

no

miste

s fo

nt p

artie

de

la m

êm

e

fam

ille », a

ffirme M

ichel N

audy d

ans le

film. D

e vo

tre

côté

, vous fa

ites jo

uer à

ple

in vo

s pro

pre

s rése

aux. P

our

lutte

r contre

un b

loc, vo

us e

n c

onstitu

ez u

n a

utre

…G

B : B

ien sûr. L

a grand

e différen

ce, c’est que nous form

ons

une fam

ille intellectuelle alors qu’ils con

stituent, eux, un

e fam

ille de classe, d

’intérêts d

e classe, pou

r la protection

d

’un

grou

pe so

cial et au d

étrimen

t d’u

ne m

ajorité d

e la population

. Et les m

oyens qu’ils possèd

ent son

t sans com

-m

une m

esure avec les nôtres : c’est le pot d

e terre contre un

m

issile atomique…

L’IN

GR

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ITÉ

DE

L’EN

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IEN

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DIS

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SE

PR

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NT

« CO

NT

RE

-

PO

UVO

IR ». Pourtant, la grande m

ajorité des journaux, des radios et des chaînes de télévision appartiennent à des groupes industriels ou financiers intim

ement liés au pouvoir. Au sein d’un périm

ètre idéologique m

inuscule se multiplient les inform

ations prém

âchées, les intervenants permanents, les noto-

riétés indues, les affrontements factices et les renvois

d’ascenseur.En 1932, Paul Nizan publiait Les Chiens de garde pour dénoncer les philosophes et les écrivains de son époque qui, sous couvert de neutralité intellectuelle, s’im

posaient en gardiens de l’ordre établi. Aujourd’hui, les chiens de garde, ce sont ces journa-listes, éditorialistes et experts m

édiatiques devenus évangélistes du m

arché et gardiens de l’ordre social. Sur le m

ode sardonique, Les Nouveaux chiens de

garde dressent l’état des lieux d’une presse volontiers oublieuse des valeurs de pluralism

e, d’indépendance et d’objectivité qu’elle prétend incarner. Avec force et précision, le film

pointe la menace croissante d’une

information pervertie en m

archandise.

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Degueltz, O

livier Walczak, Julien

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: Joris Clerté

(Petite C

einture)

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nvo

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iche.

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EM

BR

E, la

fondation TF1 sollicite le lycée Jean-Zay à Orléans pour y organi-ser une « journée de proxim

ité ». Refus. Quelques jours plus tard, elle récidive avec le lycée Franklin, le priant d’accorder l’hospitalité à son directeur du savon à barbe, Jean-Pierre Pernaut. Afin de « créer du lien avec le public » et de prom

ouvoir le

s b

on

ne

s œ

uvre

s d

e Bouygues, soucieux de « m

ieux intégrer socialem

ent des jeunes issus de zones sensibles », les enseignants sont invités à rogner sur leurs heures de cours pour laisser le grand prêtre du « 13 heures » évangéliser les cer-veaux disponibles des lycéens, considérés com

me de futurs chô-

meurs et donc com

me des

recrues possibles pour la multina-

tionale du BTP.

Mais les enseignants

se cabrent. Ils font savoir à Pernaut que ses « accointances avec l’actuel gouver-nem

ent qui supprime

des postes dans l’Edu-cation nationale », ne le qualifient guère « pour parler de l’inté-gration des jeunes vivant dans les zones sensibles ». La fondation TF1 s’appuie pourtant sur un bilan indiscutable : « trois étudiants em

bau-chés » en seulem

ent quelques années. « Les enseignants qui ont em

pê-ché la rencontre avec une centaine de lycéens vivent dans un autre m

onde, déplore Pernaut. Quand ils disent “on ne veut pas ren-

contrer TF1”, c’est qu’ils n’ont pas com

pris que leur rôle est de form

er les jeunes à l’em-

ploi, ce que permet aussi TF1 »

(La République du Centre, 16.11.11).Les profs nourrissent-ils des préjugés contre l’interview

eur du président de la république, em

ployé de Bouygues depuis 37 ans ? On a posé la ques-tion à Anaïs Perdereau, ensei-

gn

an

te

en

s

cie

nc

es

économiques et sociales au

lycée Franklin, qui s’entête : « Pour nous, il incarne la pensée économ

ique dominante. Les

plans de rigueur, le rembourse-

ment de la dette, l’obsession de la

croissance… » Et l’em

ploi des jeunes, alors ? « On n’est pas là pour faire recruter nos élèves par TF1 ou une autre entreprise. La propagande de Pernaut, c’est soit de la m

alhonnêteté, soit une faute professionnelle. » Feu ! Feu sur le Parti de la presse et de l’argent !

PE

RN

AU

T

TO

MB

E S

UR

UN

OS

Acrobatie

La « crise » contraint parfois la presse à des contorsions douloureuses. À propos de l’économ

ie allemande et

des réformes ultra-libérales im

po-sées en 2004 par le gouvernem

ent du

social-démocrate

Gerhard Schröder, Le M

onde découvre aujourd’hui que « les inégali-tés se sont accrues » depuis sept ans et qu’« environ 7,4 m

illions de salariés occupent un “m

ini-job” très peu payé » (11.12.11).

À l’époque,

ces réform

es avaient soulevé l’en-thousiasm

e du Monde. Dans un

éditorial intitulé « L’Allemagne bouge », le quo-

tidien expliquait : « Ces mesures m

arquent un incontestable tournant dans l’histoire sociale de l’Allem

agne. Les avantages sociaux sont fortem

ent réduits.

[…].

Gerhard Schröder

veut que l’Allemagne “bouge” : pour le bien

de l’Europe on ne peut que saluer cette ambi-

tion » (25.12.04).

Boîte à idées

Christophe Barbier, directeur de la rédaction de L’Express et éditorialiste sur i-Télé, four-m

ille d’idées pour redresser la France : « Supprim

ons la cin-quièm

e sem

aine de

congés payés. […

] Indemnisons m

oins les prem

iers mois de chôm

age. » La

réduction du

chômage

impose en outre de « faciliter

les licenciements », car « si

licencier ne devient pas plus facile, embau-

cher finira par être impossible ». Les plans de

ri gueur édictés par Nicolas Sarkozy lui parais-sant trop laxiste envers les pauvres, Barbier ré-clam

e encore plus de flexibilité, « qui multiplie

les chances », et encore moins de protection

sociale, car « nous devons retrouver les vertus de la solidarité fam

iliale, et ne plus attendre de “l’État m

amm

a” les soins et consolations que nous devons prodiguer à nos proches » (L’Express, 4.11.11).

Am

nésie

Depuis son éviction du Monde et de LCI, Edw

y Plenel se réinvente en Em

iliano Zapata. Il a échoué dans sa tentative d’introduire

Le M

onde en

Bourse ? Il exhorte aujourd’hui les abonnés de M

ediapart à la «

révolte nécessaire

» contre « la dictature fi-nancière » (10.8.11). Il a fait du M

onde un groupe de presse dont Lagardère

et M

aurice Lévy

(Publicis) étaient

les actionnaires

? Il

dénonce maintenant « l’anorm

ale situation de dépendance, économ

ique et politique, de nos m

édias envers une oligarchie financière imbri-

quée à l’actuel pouvoir présidentiel » (Rue89, 14.12.07). « Alain M

inc est devenu un ami,

et je suis fier d’être son ami », ronronnait-il à

propos de son partenaire à la tête du Monde

(France 2, 6.3.03) ? Il brame à présent que

Minc a toujours été pour lui « un adversaire

potentiel qu’il fallait tenir en marge » (France

Culture, 13.12.07). Le plus insolite, dans ces divagations,

c’est l’indulgence

teintée de

charité qu’elles suscitent dans son nouveau public. Le 4 octobre dernier, après le NPA et le Front de gauche, c’était au tour de l’« Univer-sité critique et citoyenne » de Nîm

es d’inviter Plenel pour une conférence m

oustachue sur la « crise de la dém

ocratie ».

LE

1E

R JA

NVIE

R 2

002, le d

ébarquemen

t d

e l’euro provoque l’orgasm

e simultan

é d

es méd

ias et des m

ilieux d

’affaires. « A

lors, euro ? », rou

cou

le Libération

(1.1.02). « Q

u’est-ce qu’on attend pour être euro », ch

anton

ne L

e Nouvel O

bservateur (27.12.01). L

a niaiserie d

u calem

bour

suggère l’in

tensité d

u frisson

qu

i par-

court la chefferie éd

itoriale : la mon

naie

un

iqu

e symb

olise non

seulem

ent « un

destin partagé » et « une nouvelle solidarité en

marche », co

mm

e le pro

clame L

e Journ

al du diman

che (2.9.01), mais elle

pro

met au

ssi de « faciliter la v

ie des consom

mateurs » et d

e se graver dan

s leur m

émoire com

me « l’événem

ent politique le plus im

portant du siècle », selon les rêves

mouillés d

e l’éditorialiste d

e Libération

(1.1.02). Sur le p

lateau de F

rance 2, les

épan

chem

ents d

u patron

de la B

anque

centrale eu

rop

éenn

e, Jean-C

laud

e T

richet, fon

t mon

ter les larmes aux yeux

du présen

tateur : « Nous som

mes très ém

us et assez fiers d

’être arrivés à ce résultat »

(30.8.01). Un

e émotion

d’autan

t moin

s co

nten

ue q

ue T

richet p

alpera 3

0 0

00

euros de salaire m

ensuel.

Si les m

édias aimen

t l’euro, c’est que l’euro va rap

po

rter aux m

édias. L

a firme

Publicis, proch

e des socialistes alors au

pouvoir (la richissim

e Élizabeth

Badinter

en est la plus grosse action

naire), a h

érité en

Fran

ce du budget de propagande de la

mon

naie un

ique (525 million

s de francs,

soit 8

0 m

illion

s d’eu

ros). S

on slo

gan

– « L’euro, notre m

onnaie » – fait la joie de ses d

estinataires : les p

ériod

iqu

es de

Pin

ault, les rad

ios de L

agardère et les

télévisions d

e Viven

di, qui von

t hériter

de la pub. En

septembre 2001, L

e Journal du D

imanche (groupe L

agardère) dévoile un

e des grandes idées de P

ublicis : « Sept m

illions de petits Européens de 8 à 12 ans

[vont recevoir] un poster représentant les

pièces et les billets en euros. U

n con

cours – “D

evien

s un cham

pion de l’euro” – sera

organisé. […

] Les v

ingt-quatre lauréats

seront invités à Francfort pour assister à la

naissance solennelle de l’euro le 1er janvier au

matin. L

es enfants seront ainsi les premiers

à toucher les billets. »

La p

uéricu

lture p

ar l’euro n

e date p

as d

’hier. B

ien avan

t que les journalistes n

e glorifien

t le plan

« Vigieuro » d

estiné à

pro

téger, m

itraillette au p

oin

g, le

convoyage d

es nouveaux billets, la m

on-

naie un

ique faisait piailler d

e plaisir les

salles de réd

action. « L

a construction

euro-péen

ne in

carne u

ne politiqu

e de la raison

avan

t d’être u

n ém

oi du cœ

ur », exu

ltait L

aurent Joffrin

à l’ann

once d

e l’accouche-

men

t du « bébé » (L

ibération, 1.1.99). Q

ue la « raiso

n » m

on

étaire allait enrich

ir leurs

amis d

u CA

C 40 plutôt que les sm

icards et

les chôm

eurs ajou

tait à la délectation

des

plu

s persp

icaces. Dan

s Le P

oint, C

laud

e Im

bert p

ouvait se frotter les m

ains : « E

n

Fran

ce, pays où les moin

s assistés des chômeurs

sont m

ieux lotis que la majorité des trav

ail-leurs du m

onde, l’an

neuf n

ous accueille avec

l’euro, premier jalon

d’un

e espérance collective

sans précéden

t historique. C’est depuis lon

g-tem

ps la meilleure n

ouvelle ! » (3

1.1

2.9

8).

Su

r Eu

rop

e 1, A

lain D

uh

amel p

estait co

ntre les ad

versaires de l’eu

ro, po

urtan

t écartés d

e l’anten

ne, en

les qu

alifiant d

e « n

ostalgiques de la marin

e à voile, des gen

s qui rêven

t à un m

onde dan

s lequel on n

e peut se diriger qu’en

ballon » (5

.1.9

9). D

ans L

e M

onde, Jean

-Marie C

olomb

ani céléb

rait un

e « révolution » syn

onym

e de « v

ictoire sur les m

archés, de la détermin

ation de quelques-

uns sur les forces écon

omiques » (31.12.98).

L’eu

ro, un

e victoire sur les m

archés ? D

ix an

s plus tard

, alors que la mon

naie un

ique est d

ans les ch

ou

x et l’Eu

rop

e dan

s les m

ains d

e Gold

man

Sach

s, le diagn

ostic a u

n p

eu évo

lué. L

a chefferie éd

itoriale,

beaucoup moin

s.

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NS, la

monnaie

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féré

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atro

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resse

entra

it en c

ircula

tion.

L’occasio

n d

e se

rafra

îchir la

mém

oire

Brèv

es mou

stachues

Le Journal du dimanche, 9.9.01

Le Monde, 2.1.02

Page 4: - …€¦LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE /  2 Ses enjeux ? Rendre sensible la nécessité, voire l’urgence de transformations en pro-

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Décembre 2011 :

Le Nouvel Observateur rachète Rue89

Page 5: - …€¦LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE /  2 Ses enjeux ? Rendre sensible la nécessité, voire l’urgence de transformations en pro-

LE

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s années, le

s trois p

rincip

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iens « n

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t : Le F

igaro

racheté

par

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Monde re

capita

lisé d

’abord

par L

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ère

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avie

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l-Math

ieu P

igasse

(« BN

P »). U

ne situ

a-

tion in

édite

depuis 1

944. P

eu a

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ibéra

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résista

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quait : « Il e

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’accord

. C’e

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n n

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sse so

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la d

om

inatio

n d

e l’a

rgent. » C

’éta

it le 7

mars

1945. À

cette

date

, Laure

nt J

offrin

n’é

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as n

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Heure

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ment ! C

ar so

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tion. »

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rifées (« m

énages ») p

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s. Dans le

ur film

, les

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iord

ano. E

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ici q

uelq

ues a

utre

s…

LE « TRAIN

D’AVAN

CE » DE LAUR

ENT JOFFR

INP

our se faire d

es amis et p

romou

voir ses « réformes » au

près

des oreilles q

ui com

pten

t, la direction

de la S

NC

F a créé u

n

club de lobbyin

g baptisé « U

n train

d’avan

ce 1 ». Cette officin

e organ

ise régulièremen

t de som

ptueux d

îners au P

ershin

g Hall,

un p

alace situé dan

s le 8e arron

-d

issemen

t de P

aris, « au cœur du

triangle d

’or, haut lieu des affaires et de la fin

ance in

ternation

ale et à qu

elques pas des bou

tiques de

prestige », précise la b

rochu

re de

l’établissem

ent. À

l’invitatio

n

du

présid

ent d

e la SN

CF

, G

uillau

me P

épy, dép

utés, sén

a-teu

rs, écon

om

istes, dirig

eants

d’en

treprises et u

niversitaires

vienn

ent s’em

piffrer d

ans u

ne

« atmosphère de discrétion

, de luxe et d

’élégance ». E

ntre d

eux fou

r-ch

etées de tag

lierinn

i fraîches

au foie gras, ils y débatten

t aussi d

es gran

ds p

rob

lèmes d

e leur

temp

s – un exercice q

ui requiert

nécessairem

ent l’assistan

ce d’un

journ

aliste.L

e 27 avril 2010, la causerie gastronom

ique avait pour thèm

e : « M

édia, opinion

publique et entreprises : le gran

d malen

tendu ? »

Pour l’égayer, les organ

isateurs avaient fait ap

pel – c’était écrit

sur le carton d

’invitation

 – à « deux grands journ

alistes spécialistes de l’opin

ion » : L

auren

t Joffrin et P

hilip

pe T

esson.

Les in

vités on

t d’ab

ord

cru à u

ne p

laisanterie.

Qualifier d

e « grands journ

alistes » l’actuel direc-

teur d

u N

ouvel O

bservateur et le ch

ron

iqu

eur

mo

nd

ain d

u F

igaro Magazin

e, le qu

ipro

qu

o augurait m

al du « train

d’avan

ce » des m

anagers

de la S

NC

F. R

enseign

emen

ts pris, le « journaliste le plus bête de F

rance 2 » et le d

and

y octo

génaire avaien

t été recrutés par l’agen

ce Boury &

associés, à laquelle « U

n train

d’avan

ce » sous-traite l’organisation

d

e ses banquets. F

iliale d’A

ltedia, group

e de

« conseil en

man

agemen

t » déten

u lui-mêm

e par le géan

t de l’in

térim A

decco, cette société

se présente ain

si sur sa page Intern

et 3 : « La

plupart des lobbyistes français exer-cen

t leur activité à B

ruxelles. Tel

n’est pas le cas du cabinet Boury &

associés, qui s’est spécialisé dans le lobbying

auprès des institutions nationales : le gouvernement, l’A

s-sem

blée nation

ale et le Sén

at. Le lobbyin

g con

siste à faire valoir auprès des pouv

oirs publics des intérêts particuliers. »

L’APOSTOLAT DE M

ICHEL FIELD

Le présen

tateur d’« A

u Field

de la n

uit », l’émission

« culturelle » de T

F1, con

naît m

anifestem

ent des fin

s d

e mois d

ifficiles. En

octobre 2007, il anim

e le 62e

congrès de la F

édération n

ationale des tran

sports rou-tiers. E

n juin

2008, il se précipite à la Ch

ambre de com

-m

erce et d’in

dustrie de Lille pour égayer « L

es quartiers de l’im

mobilier, le 1

er salon du N

euf de la région lilloise ».

Trois sem

aines plus tard, on

le retrouve à un colloque du

grou

pe d

’assuran

ces Agrica su

r « Le dév

eloppemen

t durable en entreprise : un projet d

’avenir ? ». En

octobre 2008, c’est au

tou

r de l’O

rdre d

es experts-co

mp

tables d

e lui co

nfier le

chauffage de salle aux côtés d

’Isabelle Goun

in, de L

CI. R

ebelote

1 C

et article est tiré du d

ossier « Du m

énage par tem

ps de crise : in

tellec-tuels à ven

dre », L

e Plan

B n

° 23, mai-juin

2010.2

Lire l’article cu

lte du

Pla

n B

, ww

w.lep

lanb

.org

/arsenal/

laurent-joffrin

,-le-journaliste-le-plus-bete-d

e-france-2.h

tml.

3 w

ww

.boury-associes.fr

en juin

2009, cette fois au congrès d

u C

entre d

es jeunes d

irigeants d

’entrep

rise (C

JD), à C

alais, où

l’ancien

étud

iant

trotsk

iste pim

ente u

ne tab

le ron

de

con

sacrée à « Nos en

treprises face aux m

utations de dem

ain. » D

eux sem

aines

plu

s tard, F

ield p

art à M

on

tpellier faire la

claque avec Luc F

erry au

39

e congrès d

e la F

édération des prom

o-teu

rs et constru

cteurs d

e Fran

ce. Etcetera…

O

n s’in

quiète : le groupe B

ouygues verse-t-il seulem

ent un

salaire à son m

alheureux « jour-

naliste culturel » ?

JEAN-M

ARC SYLVESTR

E ET LA D

IGESTION D

ES COCHON

S

Le 23 sep

temb

re 2008, le journ

aliste écono

-m

iqu

e Jean-M

arc Sylvestre, ex-d

irecteur

adjo

int d

e l’info

rmatio

n d

e TF

1 et actu

el ch

roniqueur sur i-T

élé, anim

e un colloque sur

la nu

trition

anim

ale org

anisé p

ar LG

S

emen

ces, filiale du

grou

pe agro

-ind

ustriel

Lim

agrain. L

’ord

re du

jou

r a enflam

mé so

n

insp

iration : « D

igestibilité des fibres du maïs, la clé d

’améliora-

tion des ration

s pour l’aven

ir. »

« QUESTIONS D

’ARGEN

T » DANS LES H

OSPICEST

rois fois par sem

aine, su

r Fran

ce Info, le jou

rnaliste P

atrick L

elong rép

ond

aux « q

uestion

s d’argen

t » qu

i angoissen

t ses aud

iteurs (« placemen

ts, actions, obligation

s, marché im

mobilier…

les con

seils de l’expert »). Du

rant so

n tem

ps lib

re, il règle ses p

rop

res sou

cis pécu

niaires. L

e 12

juin

20

09

, par exem

ple,

Lelon

g anim

ait un « zoom

sur le plan A

lzheim

er 2008-2012 » au 9

e congrès n

ational d

es maison

s de retraite privées.

LA « POSITIVE ENTR

EPRISE » D

E JEANPER

RIN

« Com

men

t réconcilier les jeun

es avec le m

onde de l’en

treprise ? » C

’était le thèm

e du

colloqu

e don

né le 10 d

écemb

re 2007 au P

alais du L

uxembourg p

ar Man

pow

er et Positive E

ntrep

rise, un

e association qui en

tend

« favoriser le rapprochemen

t entre

les jeunes et les m

étiers de l’entreprise […

] par l’organisation

d

’actions d

’inform

ations ou de lobbyin

g ». Les tables ron

des

étaient an

imées p

ar Brigitte Jean

perrin

, jou

rnaliste à

Fran

ce Inter.

UN B

HL À LOUER

POUR 50 000 EUR

OSD

epuis 1997, la Speakers A

cadem

y, « leader du marché dan

s le dom

aine des conférenciers », exauce les entreprises qui rêven

t d

e s’offrir une tête con

nue le tem

ps d

’un p

ince-fesses. À

son

catalogue figurent sportifs, com

édien

s, journalistes et « in

tel-lectuels ». L

e tarif ? Proportion

nel à la n

otoriété du prestataire, évid

emm

ent. P

our louer un B

HL

, comp

ter jusqu’à 50 000

euros en h

aute saison, T

VA

et chem

ise blanch

e incluses. L

e com

ique Patrick S

ébastien, la socialiste S

égolène R

oyal et le journ

aliste Nicolas B

eytout (ex-directeur d

e la rédaction

du

Figaro et an

cien p

atron d

u p

ôle méd

ias de L

VM

H) se

situent d

ans la fourch

ette moyen

ne : d

e 7 500 à 12 500 euros. L

es petites bourses hésite-

ront en

tre Dom

inique M

oïsi et Th

ierry de

Mon

tbrial, tous deux « exp

erts » à l’Institut

français d

es relations in

ternation

ales (IFR

I) et convives perm

a-n

ents d

es plateaux de télévision

, dispon

ibles chacun

s pour 5 000 eu

ros seu

lemen

t. Au

rayon d

es prix cassés (m

oin

s de 5

 00

0 euros), le ch

ineur fera son

choix parm

i Pierre R

ousselin, d

irec-teur ad

joint d

e la rédaction

du F

igaro, Gérald

Arian

o, rédacteur

en ch

ef adjoin

t à TF

1 et présentateur sur L

CI, ou en

core Patrick

Jarreau, chef d

e la « new

sroom » d

u quotidien

Le M

onde.

Connivences et com

plaisances 5 D

ÉC

EM

BR

E 2011. Yves Calvi reçoit Laurent

Joffrin sur le plateau de « Mots croisés » (France 2).

Un mois plus tôt, com

mentant l’interview

télévisée de Nicolas Sarkozy par Jean-Pierre Pernaut et Yves Calvi, Laurent Joffrin écrivait : « Jean-Pierre Pernaut et Yves Calvi sont de bons professionnels, chacun dans leur genre, soucieux de vie quotidienne pour le prem

ier, attentif à la clarté et à la pédagogie pour le deuxièm

e. Ils ont posé pour l’essentiel les questions qu’il fallait poser, telles que l’actualité les suggérait » (Le Nouvel Observateur, 28.10.11).

24 NO

VE

MB

RE

. Le Monde indique que « le poli-

tologue Stéphane

Rozès conseille

discrètement

François Hollande ». En 2009, Rozès avait été recruté – en com

pagnie du journaliste Jean-Luc Mano et du

publicitaire Régis Lefebvre – par le gouvernement

monégasque pour com

bler le « déficit d’image » de

la principauté.

14 NO

VE

MB

RE

. Dans son blog « imm

édias » hébergé par le site de L’Express, Renaud Revel, em

ployé de L’Express, caresse le directeur de L’Express, Christophe Barbier : « Longtem

ps, il fut de bon ton de fustiger celles et ceux qui cacheton-naient ici et là : ces stakhanovistes du journalism

e que l’on retrouvait un peu partout, de Christine Ockrent à Serge July, en passant par Alain Duha-m

el ou Jean-Marie Colom

bani. […] La question

n’est pas de savoir si ces derniers sont d’infâmes

“cumulards”, m

ais si le paysage médiatique pos-

sède en son sein des professionnels capables, à l’instar d’un Christophe Barbier, à l’Express, d’un Laurent Joffrin, au Nouvel Observateur ou d’un Franz Olivier Giesbert au Point, d’éclairer intelli-gem

ment les téléspectateurs, sans pour autant

verser dans le café du comm

erce. »

29 OC

TOB

RE

. Alain Finkielkraut reçoit Pierre Rosanvallon (fondateur du club de réflexion so-cial-libéral La République des idées) et Paul Thi-baud (ancien directeur de la revue Esprit) dans son ém

ission « Répliques » sur France Culture, consacrée ce jour-là à « la passion de l’égalité ». Une passion partagée par les trois penseurs, si-gnataires en novem

bre 1995 de la pétition « Ré-form

e » initiée par la revue Esprit en soutien au plan Juppé de destruction de la Sécurité sociale.

20 OC

TOB

RE

. Dans Le Point, Jean-Paul Entho-ven, ancien journaliste au Nouvel Observateur, com

plimente M

ona Ozouf, collaboratrice du Nouvel Observateur, pour son recueil d’articles parus dans Le Nouvel Observateur : « Il faut en prendre acte : le m

onathéisme – qu’on nom

mera ainsi en hom

-m

age à la délicieuse Mona Ozouf – est un culte

exigeant, peu pratiqué, presque démodé […

]. Est “m

onathéiste”, en effet, celui ou celle dont le cœur

bat pour les livres, qui est heureux d’empocher la

liberté qu’ils promettent, qui les célèbre sans com

-plaisance ou les critique sans haine. »

6 OC

TOB

RE

. Dans Le Nouvel Observateur, Re-naud Dély salue le dernier livre d’Hervé Algalarrondo, journaliste au Nouvel Observateur : « Un pam

phlet vif et enlevé qui bouscule quelques idées reçues. »

24 SEP

TEM

BR

E. Dans Le Journal du Dim

anche, Philippe Sollers livre sa « sélection personnelle des livres de la rentrée. Le plus ém

ouvant et délectable : Ô Solitude, de Catherine M

illot […]. Le plus branché

magnétique : Vie électrique, de Jean-Philippe Rossi-

gnol. » Les deux livres sont parus chez Gallimard

dans la collection L’Infini, dirigée par Philippe Sollers.

19 AO

ÛT. Guyonne de M

ontjou, ancienne attachée de presse du sous-m

inistre UMP Alain Joyandet, re-

çoit le politologue libanais Ghassan Salamé dans

l’émission « Tém

oins de passage » sur France Inter. Guyonne de M

ontjou a travaillé au cabinet de Ghassan Salam

é lorsqu’il était ministre de la Culture du Liban.

Page 7: - …€¦LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE /  2 Ses enjeux ? Rendre sensible la nécessité, voire l’urgence de transformations en pro-

LE

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ITE

L D

E N

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YO

RK

Ratification

par les

18

3 m

embres de l’O

rganisation internationale du travail à Genève (Suisse) de la prem

ière Convention internationale sur le travail dom

estique. 16.6.11

Droit de retrait d’une durée

record (18 jours), à Dunkerque, d’environ 200 salariés de l’Asso-ciation d’action sociale et éduca-tive (350 salariés) suite au suicide d’un éducateur spécia-lisé. 5.12.11

Mort d’un ouvrier intérim

aire de 42 ans écrasé entre les parois m

étalliques et le moteur de la

tour de convoyage de charbon à la centrale therm

ique EDF de

Blénod-lès-Pont-à-Mousson

(Meurthe-et-M

oselle). 6.12.11

Total 3 informations

sociales :Une enquête du journaliste am

éricain Edw

ard Epstein relance la thèse du com

plot contre Dominique Strauss-

Kahn. 27.11.11 - 17.12.11

Le Monde :

2 articles, 1255 mots

RienRien

2 articles, 1255 mots

6 articles, 3 brèves, 5044 mots

Libération :Une brève, 61 m

otsRien

Rien1 brève, 61 m

ots5 articles, 5 brèves, 3624 m

ots

Aujourd’hui : Rien

Une brève, 133 mots

Rien1 brève, 133 m

ots3 articles, 2 brèves, 1451 m

ots

Le Figaro : Rien

RienRien

Rien1 article 1 brève, 758 m

ots

Total :2 articles, 1 brève, 1316 m

ots 1 brève, 133 m

otsRien

2 articles, 2 brèves, 1449 m

ots15 articles, 11 brèves, 10 877 m

ots

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- AC

TION

CR

ITIQU

E M

ÉD

IAS (A

CR

IME

D)

pionnière de la résistance à l’ordre m

édiatique, cette association née du m

ouvement social de novem

bre 1995 poursuit ses dém

ontages sur Internet (w

ww

.acrimed.org) et sur papier (la revue

trimestrielle M

édiacritique(s), disponible dans les bonnes librairies ou à com

mander

sur le site).

- PL

PL an

cêtre du P

lan B

, P

our lire Pas lu, « le journ

al qui mord

et fuit », d

emeure en

embuscad

e sur le site w

ww

.hom

me-m

odern

e.org/plpl.

- CP

-PR

OD

UC

TIO

NS n

é de la ren

contre

entre le réalisateur P

ierre Carles

(Pas v

u pas pris, Fin

de concession

) et la prod

uctrice An

nie G

onzales, ce collectif

de lutte cin

ématograph

ique contin

ue de

produire d

es films in

terdits par les

chaîn

es de télévision

. ww

w.

cp-production

s.fr.

- AL

AIN

AC

CA

RD

O

Journalistes précaires, journ

alistes au quotidienavec G

eorges Abou, G

illes Balbastre,

Ch

ristophe D

abitch &

An

nick P

uerto, A

gone, 2007.

- PIE

RR

E B

OU

RD

IEU

, Sur la télévision

, R

aison d

’Agir, 1996.

- SE

RG

E H

AL

IMI, L

es Nouveaux chien

s de garde, R

aisons d

’Agir, 2005.

- PIE

RR

E R

IMB

ER

T, Libération

, de Sartre à R

othschild, Raison

s d’A

gir, 2005.

Directeur de la publication : Brad Schnuppert. Rédaction : Julien Brygo, Olivier Cyran. Direction du bon goût : M

arc Pantanella. Carte du PPA : Yann Bureller. Dessin : Colloghan. Rem

erciements à Bertrand Loutte, Vanessa Schloum

a, Karim

a Younsi, la CRE, Gilles Balbastre. Impression :

Imprim

erie de l’Avesnois, 59440 Avesnes-sur-Helpe. OURS

BA

VA

RD

S, IN

TE

RC

HA

NG

EA

BL

ES

, OM

NIP

SE

NT

SC

omm

ent an

alyser l’automobile am

éricaine

sans évoquer General M

otors, Ford et C

hrysler ? C

omm

ent parler du journ

alisme fran

çais sans

citer le nom de certains des trente associés qui se

partagent les jeton

s de présence de son

conseil

d’adm

inistration, qui survivent à toutes les alter-nances, politiques et industrielles ? A

ssurément

leur personnalité ou leur talent sont ordinaires. T

rente autres feraien

t tout aussi bien l’affaire.

Loin

de se faire concurren

ce, ils ne cessen

t de troquer des com

plicités, ajoutant aux contraintes précédem

ment évoquées celles que leurs conni-

vences fon

t égoïstemen

t peser sur toute une

profession, ses princes et ses soutiers.U

n m

ilieu. Id

ées un

iformes et d

échiffreu

rs id

entiq

ues. Jou

rnalistes ou

« intellectu

els ». P

eu nom

breux. Inévitables, volubiles. E

ntre

eux, la co

nn

ivence est d

e règle. Ils se ren-

contren

t, ils se fréquenten

t, ils s’apprécient, ils

s’entreglosen

t. Ils sont d

’accord sur p

resque

tout. Lors d

’un « D

uel » télévisé l’opposant à

Jacques Attali, A

lain M

inc qualifia leur idéo-

logie de « cercle de la raison

 ». Alain

Tourain

e, co

sign

ataire du

rapp

ort co

mm

and

é par

Édouard B

alladur à Alain

Min

c en 1994, pré-

féra l’expression « cercle du réel et du possible ». Il

fallut p

resqu

e en ven

ir aux m

ains p

ou

r les sép

arer… S

orti de ce con

sensus, il n’y aurait

qu’aventure, d

émagogie, « populism

e ». Pour

eux, le soleil ne se couch

e jamais. D

ès l’aube à la rad

io, le soir à la télévision ; d

ans la p

resse écrite, l’éditorial à flux ten

du : quotidien n

atio-n

al, hebdom

adaire, quotidiens région

aux. […

] Parlan

t des journ

alistes de son

pays, un

syn

dicaliste am

éricain a observé : « Il y a v

ingt an

s, ils déjeunaien

t avec n

ous dans des cafés.

Aujourd

’hui, ils dînen

t avec des in

dustriels. » E

n n

e rencon

trant q

ue des « d

écideurs », en

se d

évoyant d

ans un

e société de cour et d

’ar-gen

t, en se tran

sforman

t en m

achin

e à propa-gan

de d

e la pensée d

e march

é, le journalism

e s’est en

fermé d

ans u

ne classe et d

ans u

ne

caste. Il a perdu d

es lecteurs et son créd

it. Il a p

récipité l’ap

pauvrissem

ent d

u débat p

ublic. C

ette situation est le propre d

’un systèm

e : les co

des d

e déo

nto

log

ie n’y chan

gero

nt p

as gran

d-ch

ose. Mais, face à ce que P

aul Nizan

ap

pelait « les con

cepts dociles que rangen

t les caissiers soign

eux de la pensée bourgeoise », la

lucidité est un

e forme d

e résistance.

SE

RG

E H

AL

IMI, L

ES

NO

UV

EA

UX

CH

IEN

S D

E G

AR

DE

(LIB

ER

-RA

ISO

NS

D’A

GIR

, 1997)

QU

AN

D L

E JO

UR

NA

L D

EV

IEN

T F

IRM

E

ET

LA

FIR

ME

DE

VIE

NT

MA

RQ

UE

Des ord

onn

ances d

e 1944 aux publication

s sau

vages de l’ap

rès-19

68

, la « presse d

e la liberté » con

temporain

e s’est fond

ée contre le

capitalisme de presse. E

lle s’y est dissoute dès lors que le projet d

’entreprise pren

ait le pas sur l’objectif réd

actionn

el et politique qui p

rési-d

ait à sa naissan

ce. Les tran

sformation

s de

Libération

illustrent la situation

générale d

e journ

aux contrain

ts de se nier en

tant qu’en

tre-prise afin

de poursuivre leurs buts, ou de renier

leurs buts pour in

tégrer l’univers d

es entre-

prises. […

] « Il ne faut pas que n

os moyen

s de vivre com

promettent nos raisons de vivre », aver-

tissait le fondateur du M

onde, H

ubert Beuve-

Méry. […

] « Refuser de devenir une industrie »,

selon

le sou

hait d

e Sartre p

ou

r Libération

, expose au m

anque d

e moyen

s et à une d

iffu-sio

n réd

uite ; ch

oisir l’o

ptio

n co

ntraire

enclen

che un

engren

age fatal. D’abord

invo-

quée comm

e un im

pératif de survie, la logique in

dustrielle tran

sforme le journ

al en firm

e, la

firme en

« marq

ue » q

ui affro

nte d

’autres

« marques » sur un

march

é où, pour permettre

au lecteur de circon

stance d

e distin

guer des

titres toujours plus interch

angeables, le jour-

nalism

e se fait mark

eting et le jo

urn

aliste gradé, patron

. « Au N

ouvel Observateur, je suis

le seul à avoir licencié des salariés, s’est rengorgé

Lauren

t Joffrin, directeur de la rédaction

de cet hebdom

adaire. À L

ibération, j’ai résisté à trois

grèves gén

érales. » […] N

aguère m

arginau

x com

parés au textile, à la chim

ie ou à l’automo-

bile, les groupes de comm

unication

compten

t à présen

t au nom

bre des principaux acteurs de

l’économ

ie mon

diale. L

a fusion d

e la presse

dan

s l’argent con

dition

ne ses con

tenus p

lus efficacem

ent que toutes les cen

sures directes,

fussent-elles exercées par le propriétaire. […

] L

es ann

ées de résignation

sont passées par là,

cherch

ant à effacer d

e nos m

émoires le lon

g com

bat pour un

e réapp

ropriation

dém

ocra-tique de l’in

formation

. P

IER

RE

RIM

BE

RT, L

IBÉ

RA

TIO

N, D

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TR

E À

RO

TH

SC

HIL

D (R

AIS

ON

S D

’AG

IR, 2005)

MO

RC

EA

UX

CH

OIS

ISSu

ffrage m

édiatique

Début novembre, l’annonce par le Prem

ier m

inistre grec d’un référendum sur le nou-

veau plan d’austérité imposé par Bruxelles

déclenche la fureur de la presse française. Le Parisien dénonce un « coup de poker qui risque d’avoir de lourdes répercussions sur la zone euro et sur la France », tandis que Libération s’alarm

e du « chaos » qui ruinerait la planète si les Grecs s’exprim

aient sur le sort qu’on leur inflige (2.11.11). « Im

agine-t-on un peuple ac-ceptant, unanim

e, une purge aussi violente ? », gronde l’éditorialiste du M

onde, qui en déduit que, chez les peuples m

écontents, l’exercice de la souveraineté populaire est « la pire des choses » (2.11.11). Les éditorialistes parisiens ne sont pas soum

is à la menace d’une « purge

violente » : leur souveraineté s’impose donc à

tous, y compris aux Grecs. Une sem

aine plus tard, le référendum

était enterré et le Premier

ministre grec rem

placé par un ancien dirigeant de Goldm

an Sachs.

Brèv

e mou

stachue

JE

M P

RO

DU

CTIO

NS

9, ru

e d

e la

Fonta

ine a

u R

oi,

75011 P

aris

Télé

phone : 0

1 4

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Mare

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Télé

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films.c

om

Page 8: - …€¦LES NOUVEAUX CHIENS DE GARDE /  2 Ses enjeux ? Rendre sensible la nécessité, voire l’urgence de transformations en pro-

LE

S N

OU

VE

AU

X C

HIE

NS

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GA

RD

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WW

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OU

VE

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HIE

NS

DE

GA

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OM

8Gardes, faites entrer l’accusé !

LE

PR

ÉS

IDE

NT

DU

TR

IBU

NA

L L

IT L’A

CT

E D

’AC

-

CU

SA

TIO

N : A

rnau

d L

agardère, vo

us êtes

incu

lpé p

ou

r trafic d’in

fluen

ce. Héritier

d’u

ne im

men

se fortu

ne, m

archan

d d

e can

ons, p

ropriétaire d

’un em

pire d

e presse,

vou

s vou

lez pro

pu

lser Nico

las Sark

ozy à

l’Élysée en

lui assu

rant le co

nco

urs d

es in

no

mb

rables jo

urn

alistes et intellectu

els que vous salariez.

L’AC

CU

SÉ se lève. S

ouriant, bron

zé, vêtu d’un

polo, il agrippe un

e boîte de C

oca light, d

ont

il avale une gorgée avan

t de roter – ce qui lui

arrache un

rire très sonore, « à l’am

éricaine ».

LE

PR

ÉS

IDE

NT

: Maître, veu

illez signaler à

votre clien

t qu

’un

tribu

nal n’est p

as un

saloon

du W

yomin

g.

L’AV

OC

AT

: Mon

sieur le Présid

ent, n

e voyez là n

ul man

que de respect. A

rnaud

Lagard

ère a exp

liqu

é qu

’il rêvait de co

nstitu

er « un

groupe qu

i a un

e influ

ence su

r le mode de

consom

mation

mon

dial, la mêm

e aura qu’un

Disn

ey, qu’un Coca-C

ola ». L’in

formalité et le

soda perm

ettent d

e faire des affaires d

ans la

mod

ernité – et avec n

os amis am

éricains.

LE

PR

OC

UR

EU

R : S

on in

formalité am

éricaine,

parlons-en

 ! À 33 an

s, l’accusé dirige G

rolier, u

n éd

iteur au

x États-U

nis. Il ferm

e un

site et l’entrep

rise passe d

e 37 à 40 heures san

s augmen

tation d

e salaire. Mais

il offre aux salariés « en échan

ge la possibilité d’aban

donn

er le costum

e-cravate ». P

arlant d

’un d

es emp

loyés, il se vantera

dan

s L’E

xpress (groupe Dassault) : « J’av

ais 33 ans, l’âge du

Christ. E

t je l’ai viré. »

L’AC

CU

: J’ado

re l’Am

ériqu

e et ses méth

od

es un

peu

bourrues. Bern

ard-H

enri [L

évy, nd

lr], qui pronon

ça l’éloge fu

nèb

re de p

apa en

2003, m’a ap

pris à ép

rouver p

our les

antiam

éricains le plus gran

d con

tempt…

LE

PR

ÉS

IDE

NT

: Plaît-il ?

L’AC

CU

: Ça sign

ifie « mépris » en

anglais. L

e français est

une lan

gue en retard

. Je veux rebaptiser mes m

aisons d

’édi-

tion H

achette, et les appeler B

uy ! Au len

dem

ain d

es atten-

tats du 11 sep

tembre 2001, in

spiré p

ar le « Nous som

mes

tous am

éricains » d

e Jean-M

arie [Colom

ban

i, nd

lr], j’ai ad

ressé ce « message aux salariés du G

roupe » : « Nous som

mes

une en

treprise libre, appartenan

t à un m

onde libre. Vous avez

un rôle à jouer pour que le m

onde libre le reste, pour n

ous, pour nos enfants. C

hacun doit bien peser ce qu’il peut apporter au sein

de sa famille ou dan

s son en

treprise pour gagner ce com

bat. »

LE

PR

OC

UR

EU

R : S

i l’accusé adore les p

roclamation

s guer-rières, c’est q

u’il vend

des arm

es mais q

ue les seules balles auxquelles il s’expose son

t des balles d

e tenn

is.

L’AC

CU

: Cesson

s de faire d

e l’idéologie ! C

omm

e je l’ai d

it à Libération (groupe R

othsch

ild), journ

al qui fut comm

e m

oi favorable aux guerres du G

olfe et du K

osovo, « si nous

avon

s un pays aussi fort, des m

édias qui peuven

t s’exprimer

aussi libremen

t, c’est aussi que nous avon

s une défen

se qui nous

est propre. Avoir un

groupe qui est dans la D

éfense n

ationale,

n’est pas une hon

te, c’est une im

men

se fierté. » Ni T

F1

ni

Charlie H

ebdo n’existeraient san

s les missiles L

agardère et

sans l’O

tan. P

hilippe V

al l’adm

et, d’ailleurs.

LE

PR

OC

UR

EU

R : V

otre cynism

e me révolte !

LA D

ÉFE

NSE

: Pas de flatterie, ça n

e prend pas. D

’autant que,

quand P

lenel rédigeait en

core les éditoriaux du Monde, celui

du 16 mars 2003 aurait pu être sign

é par mon

client : « Si la

France peut actuellem

ent jouer le rôle qui est le sien sur la scène internationale, c’est aussi parce que, grâce à Jean-L

uc Lagardère

et à Marcel D

assault, elle possède une véritable industrie de l’ar-

mem

ent. » À l’époque, H

achette

ne possédait pas 15 %

du capital d

u M

onde et c’est d

on

c libre-

men

t que ce quotidien et P

lenel

parlaient déjà le L

agardère.

L’AC

CU

: Mais san

s Co

ca lig

ht : E

dw

y préfère avo

ir la bou

che libre p

our y fou

rrer un

gros cigare, h

istoire de ressem

-bler à C

he G

uevara. Y com

pris

qu

and

il cou

rtise Éd

ou

ard d

e R

oth

schild

po

ur su

ccéder à

Serge Ju

ly. Éd

ouard

me l’a d

it. C

’est un

ami et il a d

’ailleurs

remp

lacé pap

a à la tête de la

société hippique F

rance G

alop. L

ui aussi se bat pour S

arkozy.

LE

PR

ÉS

IDE

NT l’in

terrom

pt :

Accusé, taisez-vous ! C

e procès n’est pas – ou pas en

core – celui d

e M. P

lenel. P

uisq

ue vo

us

venez d

e citer le min

istre de

l’Intérieur, parlez-n

ous plutôt de votre lob-

bying en

sa faveur.

LA

FE

NS

E : « L

obbying »…

Ce n’est parce

qu’Europ

e 1 est deven

ue « Rad

io Sarkozy »

que mon

client en

est responsable…

L’AC

CU

SA

TIO

N : À

ceci près que c’est lui qui

a nom

mé à sa tête Jean

-Pierre E

lkabbach,

do

nt le sark

ozysm

e est aussi n

oto

ire qu

e celu

i de M

ichel F

ield su

r LC

I. Et vo

tre clien

t – comm

e Field

– participait au mee-

ting d

e Sarkozy pour le « oui » en

mai 2005.

En

fin, G

enestar, le d

irecteur de P

aris Match,

un

e des p

ub

lication

s de L

agardère, vien

t d

’être congéd

ié pour avoir laissé publier des

photos privées qui on

t déplu à S

arkozy.

L’AC

CU

: En

fin, p

apa, d

éjà, ado

rait N

icolas ! En

mars 2

00

3, le m

inistre d

e la P

olice confie à P

aris Match : « P

our mes qua-

rante-huit an

s, Lagardère m

’a offert une cage

avec un

poulet viv

ant. » M

arrant, n

on ? J’ai

présen

té Nicolas à l’état-m

ajor d’H

achette

à La B

aule, en juin

2005, « non

pas comm

e un

ami, m

ais comm

e un frère ». G

enestar savait

ce qu’il lu

i restait à faire. D’au

tant q

ue je

l’avais remarqué quan

d il s’était d

éfini ain

si, en

1999 : « Je suis journaliste chez H

achette. Je m

’entends bien avec ses dirigeants. Match

n’est pas l’A

cadémie fran

çaise ! C’est le propriétaire

qui choisit. » J’avais aimé cet esp

rit d’in

dé-

pen

dan

ce. Pu

is Gen

estar a méco

nten

té S

arkozy. Il le paie aujourd’h

ui !

LE

PR

ÉS

IDE

NT

: Mais vou

s aviez confié au

Point (groupe P

inault) : « Je ne lui ai dem

andé qu’un

e chose [à Gen

estar] : “ Si tu fais quelque chose, prév

iens-m

oi avan

t, afin que, par cour-

toisie, je puisse moi-m

ême en

inform

er mon

am

i Nicolas S

arkozy.” Ce qu’il n’a pas fait.

C’est ça qui m

’a gêné. »

L’AC

CU

: Nico

las m’a d

’abo

rd d

eman

de fein

dre l’ap

aisemen

t. Il en a assez q

u’on

l’accu

se de ten

ir la p

resse grâ

ce à B

ou

ygu

es, parrain

de so

n fils, g

râce à A

rnau

lt, do

nt il a m

arié la fille, grâce à

Min

c, qu

i l’ado

re, grâce à Elkab

bach

, qu

i lu

i dem

and

e de ch

oisir les jo

urn

alistes d

’Eu

rop

e 1, g

râce à Co

lom

ban

i, grâce à

Jésus –

c’est-à-dire grâce à m

oi. [En

riant,

il remu

e si fort so

n C

oca lig

ht q

ue le

con

tenu

gicle dan

s le nez d

e son

avocat.]

Dep

uis, je rép

on

ds au

x av

ances d

e D

elano

ë, qu

i vient d

e me ven

dre d

es ter-rain

s à Paris, et E

lkabb

ach l’in

vite tous les

mo

is sur E

uro

pe 1

. D’ailleu

rs, à gauch

e, p

ersonn

e ne m

e critiqu

e. J’ai filé des eu

ros à L

’Hum

anité. Jo

spin

et Gaysso

t on

t été très b

ien q

uan

d l’É

tat m’a céd

é EA

DS

p

ou

r un

e bo

uch

ée de p

ain. J’ai en

suite

vend

u m

es action

s au p

lus h

aut, avan

t q

u’elles ne s’écrou

lent.

LE

PR

ÉS

IDE

NT

: À vous en

tend

re, on croirait

que les journalistes n

e sont que d

es pantin

s en

tre vos main

s.

L’AC

CU

: Ah

, pas d

u tou

t ! Un

iqu

emen

t ceu

x de m

on

grou

pe. L

es jou

rnalistes d

e P

inault obéissen

t à Pin

ault, ceux de T

F1 à

Bou

ygues, etc. L

e paysage d

es méd

ias est com

plexe, vous savez. Toutefois, j’ai appré-

cié que la présiden

te de la S

ociété des jour-

nalistes d

e Paris M

atch justifie la cen

sure

dan

s son

magazin

e d’u

n p

rop

os h

ostile à

Nicolas en

expliquan

t : « On

approuve l’in-

terview

telle qu’elle est sortie. On

ne con

sidère pas cela com

me un

e censure, m

ais comm

e un

comportem

ent respon

sable. On

est désireux de n

e pas jouer la provocation. »

LA

FE

NS

E : Il y a tout d

e mêm

e plein

de

jou

rnau

x, com

me L

e Nouv

el Observ

ateur, q

ui n

’app

artienn

ent p

as à mo

n clien

t. C

esson

s de m

acérer dan

s la théo

rie du

complot !

L’AC

CU

SA

TIO

N : M

ais quand

l’accusé remet

les bourses ann

uelles de la F

ond

ation Jean

-L

uc L

agardère, le ju

ry du

prix d

u jou

rna-

liste de la p

resse écrite est présid

é par…

L

aurent Joffrin

 ! Ce qui lui a perm

is d’attri-

bu

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n B n° 3, juillet-septemb

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