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Le présent rapport se veut un résumé des apprentissages effectués au courant de l’année 2010-2011 par la mission industrielle Poly-Monde. Initialement prévue pour le Japon, les évènements de mars 2011 ont su changer le cours ce projet étudiant. Ces tristes évènements ont malgré tout permis l’apprentissage dans le feu de l’action de la gestion de crise pour une équipe de 25 futurs ingénieurs, apprentissage des plus efficace, ayant repoussé nos limites de cohésion, d’entraîde de leadership et de collaboration à des niveaux encore insoupçonnés. Les membres de la mission tiennent à remercier chaleureusement Mme. Dubé, directrice du Bureau des Relations Internationales, M. Baptiste, directeur du département de mathématiques et de génie industriel, M. Warin, responsable des orientations thématiques et M. Aubertin, chef de mission Poly-Monde 2011 pour leur soutien sans faille face aux évènements, ainsi que pour leur implication des plus appréciées. La réussite de la mission 2011 n’aura pu avoir la même ampleur sans leur précieuse aide.

L’équipe Poly-Monde 2011

Aucune reproduction de ce document ne peut être effectuée, en tout ou en partie, sans mention de la source.Les photos ont été prises par Paul Blondé. La photo choisit en conclusion est une gracieusetée de Emmanuel Rey-Leduc.

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1. Introduction............................6

1.1. Présentation de la mission initiale........6

1.1.1. Objet d’étude...............................................6

1.1.2. Itinéraire prévu...........................................6

1.1.3. Conférenciers invités...................................7

1.1.4. Entreprises au programme au Japon......7

2. Études de l’industrie japonaise et des secteurs ciblés..8

2.1. Orchestration industrielle et économique du Japon.................................8

2.2. Secteur du transport et des infrastructures de mobilité urbaine............9

2.2.1. Un territoire à conquérir.........................9

2.2.2. Le système ferroviaire japonais..............................................................10

2.2.3. Le cas de Keio Corporation......................10

2.3. Secteur de la robotique .....................12

2.3.1. Une démographie alarmante....................12

2.3.2. De l’automatisation industrielle jusqu’à la robotisation........................................12

2.3.3. Vers la robotique médicale......................13

2.3.4. Conclusion................................................14

2.4. Secteur des jeux vidéos........................14

2.4.1. Une société aux forts contrastes...............14

2.4.2. Des hautes technologies............................14

2.4.3. ...aux jeux vidéos.......................................15

3. Évènements de mars 2011.....16

3.1. Éditorial, William Sanger, rédacteur en chef du Polyscope 2010-2011 ..............16

3.2. Séisme et du tsunamis au Japon, entrevue avec Serge Occhietti, géologue et professeur à l’UQAM .............17

3.3. Accident nucléaire à Fukushima, entrevue avec Guy Marleau, directeur de l’Institut de génie nucléaire de l’École Polytechnique de Montréal.......19

3.4. Économie et notion de risque systémiques, entrevue avec Thierry Warin et Nathalie de Marcellis-Warin, École Polytechnique de Montréal..............21

3.4.1. Aspect économique de la situation.............21

3.4.2. Discours de crise..........................................22

3.4.3. Risques systémiques....................................22

Table des matières

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3.4.4. Implication pour le Japon...........................22

3.4.5. Évolution des risques technologiques.......22

4. Gestion de la crise Poly- Mondienne ..............................22

4.1. L’élaboration de trois plans B.............22

5. Conclusions...........................24

5.1. Secteur des infrastructures de mobilité urbaine...................................24

5.2. Secteur de la robotique médicale et industrielle ............................24

5.3. Secteur des jeux vidéo....................25

5.4. Le mot de la fin................................26

6. Bibliographie.......................27

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1. IntroductionDepuis mars 2010, l’équipe Poly-Monde s’est prépa-rée en vue d’une mission industrielle en sol japonais. Initialement troisième édition en partance vers le pays du soleil levant (après 1990 et 1995), les évène-ments survenus une année plus tard à Fukushima ont forcé la redirection d’une mission arrivée à un stade de planification et d’organisation des plus aboutis.Ce rapport se veut une synthèse des apprentissages effectués par notre équipe, mais aussi un témoignage de la mission Poly-Monde 2011 Japon. Dans une première partie sera présentée la planification de la mission initiale vers le Japon, puis seront abordées les apprentissages réalisés à travers le cours IND5116 Mission industrielle, apprentissages acquis par le biais de conférences et d’exposés sur les entreprises japonaises. La dernière partie du rapport concernera la gestion de crise entourant les évènements de mars 2011, autant du côté japonais avec plusieurs entre-vues réalisées auprès d’experts, que de la part de la mission Poly-Monde, avec la mise en place de trois plans B à la mission 2011.

1.1 Présentation de la mission initiale

1.1.1 Objet d’étude

Étudier l’évolution du Japon dans le nouveau contexte d’innovation et de concurrence régionale et globale. Examiner spécifiquement le rôle de l’ingénierie organisationnelle, la notion de service et de dévelop-pement humain dans le Japon d’aujourd’hui. Porter un regard plus approfondi sur les domaines de la robotique avancée et ses futures applications industrielles et en santé, des médias, des jeux et du divertissement et enfin, des systèmes et infrastructures de mobilités urbaine.

1.1.2 Itinéraire prévu

TokyoTokyo est la capitale économique, commerciale et financière du pays. Les services, la finance et l’assu-rance sont les secteurs dominants. Pour son volume de transactions, la bourse de Tokyo fait partie des trois plus importantes de la planète avec celles de Londres et de New York. Il est aussi important de noter que le PIB de la région de Tokyo est classé au premier rang mondial pour les villes.

NagoyaSon industrie principale est celle des véhicules automobiles ; le siège social et plusieurs usines du groupe Toyota, première entreprise du Japon et premier constructeur automobile mondial en 2007, sont implantés à proximité de la ville. L’électronique, l’aéronautique et les industries lourdes (raffinage, sidérurgie) sont également très présentes dans la région.

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KyotoL’industrie principale de Kyoto est celle de l’électro-nique. La ville accueille en effet les sièges de Nin-tendo, Omron Corporation, Kyocera (Kyoto Ceramics), Murata Manufacturing, le géant du textile Wacoal Corporation ainsi que le constructeur de voitures Dai-hatsu. L’ancienne capitale est connue comme un des centres universitaires importants du pays, et accueille 37 établissements d’éducation supérieure.

YokohamaÉtant donné sa position portuaire, Yokohama est un important lieu de transit pour la marchandise et les produits finis. Ceci en fait un lieu de choix pour les grands joueurs des secteurs de l’automobile, comme Nissan et Mitsubishi, et de l’électronique, comme Toshiba et Hitachi, qui y sont installés.

OsakaTroisième plus grande ville par sa population et deu-xième centre économique du Japon, Osaka est dotée d’une région extrêmement productive. En plus, de nombreuses compagnies ferroviaires, de transport ou de construction, sont situées à Osaka, ce qui en fait une ville incontournable. Également, plusieurs industries de l’électronique et du domaine de la santé y sont présentes, en particulier en pharmaceutique.

1.1.3 Conférenciers invités

Survol politique, économique et industriel du Japon Thierry Warin, professeur, département de mathématiques et de génie industriel, École Polytechnique de Montréal.

Ingénierie organisationnelle et développement humain

Annick Corbeil, coordonnatrice des programmes de mobilité internationale, Service aux étudiants, École Polytechnique de Montréal.

Systèmes et infrastructures de mobilité urbaineBenoit Robert, professeur, département de mathé-matiques et de génie industriel, École Polytechnique de Montréal.

La culture populaire Pierre Proulx, directeur général, Alliance Numé-rique.

Futures applications robotiquesLionel Birglen, professeur, département de génie mécanique, École Polytechnique de Montréal.

Société japonaise, témoignages, étiquettes Bernard Bernier, professeur, département d’Anthro-pologie, Université de Montréal. Anne Thomas, présidente, TOMA Design. Annick Corbeil, coordon-natrice des programmes de mobilité internationale, Service aux étudiants, École Polytechnique de Montréal.

Relations économiques Québec-Japon et état de la situation économique du Japon

Hiroki Sugiyama, Vice-consul du Japon à Montréal.

1.1.4 Entreprises au programme au Japon

Robotique industrielle et médicaleDensoToyota MotorsKawasaki Heavy Industries - Robot divisionMazda MotorsHondaDoCoMoToyota Memorial HospitalSecond Red Cross Hospital

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ATR-RoboticsPanasonicIntelligent Robotic LabUniversity of Osaka (Prof. Ishiguro)University of Tokyo (Prof. Sakuma et Prof. Harata)Tokyo Fire Department

Jeux vidéos, médias et divertissementKyoto AnimationNintendoStudio GhibliDCAJSonySoftBankDisneyCirque du SoleilFujitsu Laboratories

Systèmes de transport et de mobilité urbaineCentral Japan RailwayKawasaki Heavy Industries - Rolling StocksHankyu Hanshin HoldingsHirodenHiroshima City PlanningMETI (Ministère de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie)Intelligent Transport System (ITS)TOEI (Métro de Tokyo)JFE Engineering

2. Études de l’industrie japonaise et des secteurs ciblésLe Japon est présenté de nos jours comme l’une des plus grandes puissances économiques de ce monde. Actuellement troisième puissance mondiale avec un PIB supérieur à 5500 milliards de dollars (The World

Bank, 2011), il fut tout récemment détrôné de la seconde position par la Chine en 2010. Néanmoins, cela n’a pas toujours été le cas pour le pays du soleil levant. En effet, le Japon a connu des temps difficiles après un état de quasi-destruction suite à la Seconde Guerre mondiale lors de l’occupation du territoire par les États-Unis et des bombes nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki. Depuis 1952, le Japon a connu une période de croissance économique sans pareil, correspondant au début du miracle japonais.

L’industrie japonaise a su se démarquer dans plusieurs domaines au cours de cette période. En effet, 68 com-pagnies japonaises font partie des 500 plus grandes entreprises mondiales à l’heure actuelle (Cable News Network, 2011). De plus, le Japon possède également plusieurs PME se spécialisant dans certaines niches (Sugiyama, Relations économiques Québec-Japon et état de la situation économique du Japon, 2011). Ils occupent donc sur le marché des positions de grands leaders de par leur expertise à la fine pointe de la technologie et par leur constante approche innova-trice. Plusieurs domaines favorisent l’émergence du Japon comme modèle de performance industriel, notamment ceux de la robotique (industrielle et en santé), mais aussi celui des transports et des jeux vidéo.

2.1. Orchestration industrielle et économique du Japon

Afin de structurer l’économie et les industries du pays, le gouvernement japonais possède une instance se spécialisant dans la création de politiques et programmes gouvernementaux. Cette dernière se nomme le Ministry of Economy, Trade and Insdutry (METI), autrefois connu sous le nom de Ministry of International Trade and Industry (MITI). Le mandat du METI se décline en quatre activités principales :

• Créer des politiques favorisant le développe-ment économique et industriel;

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• Financer la recherche et le développement (R&D);

• Créer des bases de données par le biais d’enquêtes annuelles et de la surveillance des activités économiques;

• Assurer une structure de concertation perma-nente avec les milieux d’affaires (Conseil des structures industrielles).

Cet encadrement de l’économie et des industries du Japon par les actions énumérées précédemment a permis à plusieurs entreprises de grandir au fil du temps et de se réorienter lorsque le besoin se pré-sentait.

Toutefois, afin de fournir cet encadrement, le METI a dû à travers les années s’adapter au contexte historique. Cette grande capacité d’adaptation ressort comme l’une des principales forces de ce ministère. Au cours des quatre grandes phases de l’histoire du MITI/METI, le ministère a adopté différentes poli-tiques dans le but d’atteindre un objectif spécifique pour répondre à son mandat.

Dès sa création en 1949, le MITI a dû opérer des chan-gements majeurs au niveau de son organisation et de ses processus pour rattraper le retard laissé par la Seconde Guerre mondiale. Ces modifications avaient pour but d’effectuer la relance économique du pays et de maintenir la stabilité économique. Cet équilibre se traduit par une balance des paiements stable. En 1955, cet objectif fut atteint, et le Japon intégra le GATT. La première décennie fut donc une période de rationalisation.

Les années 1960 sont caractérisées par la libérali-sation progressive des échanges. Il s’en suit alors la période de la Haute croissance. Cette forte croissance industrielle a toutefois eu des impacts néfastes, mêlant pollution et destruction de l’environnement aux bons résultats de production. En 1967, pour rétablir la situation, le MITI adopte sa première loi environnementale : « Basic Law for Environmental

Pollution Control ».

Au cours des années 1970, le Japon a été fortement touché par la politique américaine

quant à la structure industrielle a été nécessaire pour assurer la croissance. Le MITI a compris que la croissance économique rapide du pays et l’économie mondiale étaient liées, et les nouvelles politiques industrielles devaient refléter cette interdépendance.

Depuis les années 1980, le Japon est devenu un leader économique mondial. En adoptant la loi pour faciliter la recherche dans les secteurs technologiques clés, le Japon a permis à ses industries de se moderniser et de devenir plus compétitives. Depuis, le METI a adopté des politiques de renouvellement industrielles en plus de réorienter sa structure industrielle. (Ministry of Economy, Trade and Industry, 2011)

2.2 Secteur du transport et des infrastructures de mobilité urbaine

2.2.1 Un territoire à conquérir

La géographie particulière du Japon a joué un grand rôle dans le développement des infrastructures de mobilité urbaine. Le terrain montagneux de cet archipel rend les déplacements difficiles à l’intérieur du pays. C’est pour cette raison que plusieurs moyens de transport, tel le train, ont été mis en place afin de permettre à la population de se déplacer à travers le pays. De plus, le Japon a une très forte densité de population. En effet, le Japon, avec une population supérieure à 126 millions d’habitants, est le dixième pays le plus peuplé (Central Intelligence Agency, 2011), et ce malgré une superficie de 360 000 km2 (Central Intelligence Agency, 2011). Cela procure au Japon une densité de population de 350 personnes par kilomètre carré (The World Bank, 2011). De cette

« Nixon Shock » (1973) et la crise du pétrole (1974). Un virage majeur

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forte densité de population est né le besoin d’un système de transport efficace à travers l’ensemble du pays et spécialement au sein de ses grandes métro-poles pour les relier entre elles.

Au Japon, le train est le mode de transport le plus développé. Cela est dû au fait que le gouvernement de Meiji (1868-1912) a priorisé à l’époque le dévelop-pement des infrastructures de transport ferroviaire et maritime. Il importa la technologie ferroviaire européenne afin de réduire l’écart technologique entre le Japon et l’Occident pour ainsi moderniser le pays. Ce n’est qu’après la Seconde Guerre mon-diale que le réseau routier a été développé afin de faciliter la reconstruction du territoire. Toutefois, une seconde modernisation du réseau ferroviaire a été faite en parallèle afin de combiner les deux moyens de transport pour une reconstruction plus efficaces. Il est maintenant possible de constater que le Japon a effectivement dépassé dans plusieurs aspects plu-sieurs nations occidentales en terme de transport urbain.

2.2.2 Le système ferroviaire japonais

À l’heure actuelle, le Japon possède un des plus importants réseaux de chemin de fer avec 20 036 km de voie ferrée. En 2009, l’utilisation du transport ferroviaire se chiffrait à 253 555 millions de passagers fois le nombre de kilomètres parcourus (The World Bank, 2011). En parallèle avec le développement du transport en commun, un phénomène d’urbanisation autour des gares a été observé créant ainsi un lien entre le développement immobilier et les infrastruc-tures de mobilité urbaine. Historiquement, plusieurs entreprises ont forgé leur capital et leur force à partir de l’exploitation du réseau ferroviaire. C’est notam-ment le cas de la Holding Hankyu Hanshing, qui non seulement possède les réseaux ferroviaires d’Osaka, mais s’est diversifiée en acquérant ou en bâtissant de nombreux espaces commerciaux et immobiliers aux alentours de son réseau ferroviaire.

Cela montre à quel point le transport ferroviaire est ancré au sein de la communauté japonaise. Cette population japonaise, familiarisée au transport en commun, a accueilli avec facilité la venue de nouveaux types de transports au sein des villes, tel le métro. De plus, avec une densité de population comme celle présente dans les grandes métropoles du Japon, il est inconcevable d’imaginer un réseau de transport individualiste, par exemple l’automo-bile, pour la majorité de la population. Toutefois, il est important de constater que la grande qualité du transport en commun au Japon découle du concept de priorisation du transport en commun par rapport au transport automobile et de la qualité du service au sein des moyens de transport en commun. Paral-lèlement, l’implication des compagnies en lien avec le domaine du transport dans le développement urbain des communautés locales influence positivement le développement humain de la société japonaise.

2.2.3 Le cas de Keio Corporation

Keio Corporation a été une des premières compagnies de train à s’établir au Japon et a toujours sa place sur le marché. Depuis les débuts de l’entreprise en 1948, Keio Corporation était d’abord et avant tout axée sur la mobilité urbaine dans les banlieues de l’ouest de la ville de Tokyo. Par ses trains, ses autobus et ses innovations, Keio Corporation a participé au déve-loppement du pays assurant un moyen de transport à des millions de Japonais. Certaines des nouvelles activités de l’entreprise telles que l’immobilier, les loisirs, le commerce au détail servent aussi au déve-loppement de la métropole en mettant à disposition des lieux où vivre en communauté (divertissement, alimentation). Keio Corporation est une compagnie inspirante pour les Japonais puisqu’elle a concentré ses activités aux services de ceux-ci. L’un des objectifs de Keio est la mise en place de quartier où l’esprit de la communauté est au plus fort autant pour les jeunes familles que pour les personnes âgées actives, le tout dans un esprit de développement durable. En effet,

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Keio Corporation implantera des centres de soins pour enfants, des garderies interactives ainsi que des communautés de personnes actives. De plus, afin de combattre la compétition engendrée par un système de transport en commun géré par le secteur privé, Keio a développé plusieurs services permettant de rendre l’utilisation de ses transports plus agréable. Par exemple, Keio a été la première entreprise de transport en commun à réserver des sièges pour les personnes à mobilité réduite. Le fait de mettre des sièges prioritaires a permis de rendre l’expérience plus humaine dans les réseaux de transport et a servi d’inspiration pour toutes les autres compagnies de transport assurant ainsi une hausse des services per-sonnalisés. Également, à l’aide des multiples services qu’ils offrent, ils tentent de créer le meilleur réseau possible en combinant transport, immobilier et com-merce au détail afin que les usagers n’aient pas à avoir recours aux services offerts par leurs concurrents.

Cette convergence des services offerts aux clients est une des caractéristiques principales des compagnies de transport du Japon. En effet, ses compagnies qui initialement ne s’occupaient que de transport ferro-viaire voient maintenant leurs entreprises prendre énormément d’ampleur par la diversification de leur service en donnant accès à des moyens de transport en commun dans les villes et à des services de com-merces au détail et en faisant l’acquisition d’immobi-lier autour des gares.

Certaines entreprises vont même plus loin que cela. Par exemple, Hankyu Hanshin Holdings (HHH), jeune consortium résultant d’une fusion de deux compa-gnies ferroviaires centenaires, soit Hankyu Holdings et Hanshin Electric Railways, offre une vision élargie de la simple compagnie ferroviaire. Les différentes divisions de la compagnie oeuvrent dans six domaines distincts : le transport, l’immobilier, le divertissement et la publicité, les services de voyage et de transports internationaux, l’hôtellerie et finalement la vente au détail. Étant donné la forte concurrence dans

également les moments précédant et suivant le trans-port en commun. Cela crée une synergie au sein de leurs activités, en générant des clients les uns pour les autres, procurant ainsi un service plus complet.

Finalement, comme suggérées précédemment, plu-sieurs compagnies telles Keio Corporation et Hankyu Hanshin Holdings ont un impact positif sur la société japonaise et contribuent significativement au déve-loppement humain de cette dernière. De par cette gamme très complète de services reliés au transport en commun, les entreprises tendent à s’investir dans la communauté afin de combler ses besoins et ainsi obtenir une plus grande part de marché. De ce fait nait une implication de l’entreprise au niveau du développement humain de la société locale.

le domaine du transport en commun au Japon, les entreprises tendent à vou-loir surpasser leur rôle initial de transporteur, que ce soit par train, autobus, taxi ou vélo, pour offrir des services comblant les besoins de leurs clients durant leur trajet, mais

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2.3 Secteur de la robotique

2.3.1 Une démographie alarmante

La démographie de la population japonaise a joué un rôle important dans le développement de l’industrie de la robotique. En effet, le faible tôt de natalité jumelé au vieillissement de la population a contribué à créer une pyramide des âges inversée comme le montre la figure 1.

Avec le deuxième taux de natalité le plus faible au monde, soit 7,31 naissances/1000 personnes, 22,9% de sa population ayant plus de 65 ans et un taux de croissance négative de soit -0.278%, le Japon est assuré de rencontrer de nombreux problèmes dus à la grande diminution de la population active dans les

années à venir. Ces problèmes se répercuteront entre autres au niveau de la main d’œuvre et de la santé. Premièrement, puisque la population active dimi-nuera, il y aura nécessairement une plus petite main d’œuvre disponible et il faudra trouver une façon de combler ce manque, notamment par la robotisation industrielle. Deuxièmement, étant donné le vieillisse-ment de la majorité de la population, il faudra être en mesure de fournir les soins de santé adéquats à la population, aussi bien au niveau hospitalier qu’auprès du personnel soignant.

2.3.2 De l’automatisation industrielle jusqu’à la robotisation

Au cours d’une première phase de développement industriel, le Japon a développé son industrie robo-tique au cours de la Seconde Guerre mondiale dans

 

Figure 1: Pyramide des âges du Japon entre 1935 et 2010

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l’optique d’offrir des produits à faible différenciation, un peu à l’image de plusieurs pays émergents asia-tiques actuellement. Toutefois, avec les années et à l’aide des systèmes mis en place tel le METI, l’indus-trie japonaise s’est spécialisée dans l’automatisation de certains procédés industriels pour ainsi devenir rayonner au niveau mondial de par ses performances.

L’organisation du travail est un art que les Japonais ont su maîtriser au cours des décennies suivant la Seconde Guerre mondiale. En effet, les usines de production japonaise sont organisées et propres afin d’assurer la production à grande échelle de produits à forte valeur ajoutée. D’ailleurs, de cette nation sont nées plusieurs philosophies et techniques permet-tant la bonne gestion des opérations ainsi que de l’organisation des ressources et des biens. On a qu’à penser aux 5 zéros, au toyotisme, au Kaizen, au 5S, au Kanban, etc. Pour produire à plus grande échelle et gagner en efficacité, il a été convenu de remplacer certains ouvriers par des machines permettant de faire le même travail avec une qualité au moins aussi bonne à un débit supérieur pour certaines tâches répétitives et simples. De là est née l’automatisation. Dans le même ordre d’idée, des robots ont ensuite été créés afin d’exécuter d’autres tâches tout aussi répétitives, mais autrement plus complexes. Cela a permis non seulement d’augmenter la productivité, mais également de diminuer le risque d’accident de travail. De plus, un autre avantage de la robotisation est le déplacement de la main-d’œuvre. En effet, un robot qui peut remplacer un certain nombre d’ouvriers devra tout de même être entretenu et calibré par un ou deux employés hautement qualifiés. Les Japonais n’ont pas été les créateurs de ces technologies, mais ils se sont dotés de sérieuses expertises quant à leur utilisation et leur production. Aujourd’hui, les Japonais sont les premiers constructeurs au monde en matière de robotique et la situation socio-écono-mique actuelle du pays nous pousse à penser que ce n’est que le début d’une révolution.

Une des plus grandes compagnies mondiales de robotique siège au pied du mont Fuji au Japon. Cette entreprise, nommée FANUC, est un chef de file dans la construction de robots et de systèmes robotisés. À l’aide de son expertise, elle a mis en place dans son usine un système de production entièrement robotisé. En effet, ce sont des robots qui fabriquent les robots de l’usine FANUC. Cette compa-gnie a contribué à développer l’image industrielle du Japon basée sur la précision et la qualité des produits. Des fabricants dans tous les domaines et à travers le monde font appel à cette entreprise pour leur incon-testable expertise à la fine pointe de la technologie dans le secteur de robotique industrielle. Plusieurs industries ont vu une augmentation ahurissante de leur capacité de production grâce à l’utilisation des robots industriels produits par FANUC.

2.3.3 Vers la robotique médicale

À partir de cette expertise incontestée au sein de la robotique industrielle, le Japon a utilisé ses acquis d’efficacité et de productivité pour les appliquer dans un autre domaine primordial d’une société, celui de la santé de sa population.

Un des cas les plus probants est celui de la compa-gnie Toyota, chef de file de l’industrie automobile. Toyota a commencé à se diriger vers de nouveaux secteurs tels la fabrication de robot-humain avec le « Patner Robot » qui pourrait assister les humains dans une multitude de tâches. De plus, la construction du Toyota Memorial Hospital a permis de développer le concept d’hôpital robotisé. En effet, l’achemine-ment des médicaments vers les différentes chambres de patients est entièrement régulé par des robots sillonnant les différents étages de l’hôpital. De plus, des robots assistants permettent d’aider les chirur-

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giens dans diverses tâches, notamment le transfert de patients entre une chaise roulante et une table d’opération.

Cette division de la robotique santé est de plus en plus présente à travers le monde. Toutefois, comme cela a été soulevé précédemment, le Japon a une motivation personnelle plus importante dans ce sec-teur que la majorité des autres pays étant donné le vieillissement de sa population. Dans cette optique, trois axes ont été développés. Premièrement, l’utili-sation de la robotique en chirurgie par l’optimisation des instruments peut permettre d’effectuer une opé-ration plus rapidement avec un personnel restreint et de réduire le temps de convalescence du patient pour finalement réduire l’achalandage des hôpitaux. Également, afin d’aider les infirmières à transporter les patients et à effectuer d’autres tâches en milieu hospitalier demandant une grande force physique, certaines entreprises telles Honda ont commencé à développer des exosquelettes et des prothèses tel le « Walking Assist ». Finalement, l’automatisation et la robotisation d’hôpitaux sont de plus en plus répan-dues spécialement au Japon.

2.3.4 Conclusion

Pour conclure, la robotique a un grand avenir incontestable au Japon. Bien sûr, la démographique particulière de la population crée un besoin vital pour le développement et la maturité de ces technologies appliquées à l’être humain. Par contre, il ne faut pas oublier l’acceptation des robots dans la culture japo-naise. Bien que plusieurs nations occidentales vont rencontrer éventuellement des problèmes démogra-phiques semblables, peu envisagent une cohabitation humaine-robot dans la vie de tous les jours. Dans certaines cultures, les robots peuvent représenter au sein de la population une menace. Toutefois, cela est loin d’être le cas au Japon. Que ce soit des chiens robots qui tiennent compagnie aux personnes âgées ou assistants-robots, la majorité des Japonais

perçoivent d’un bon œil cette intégration de la technologie dans un environnement humain. Cette ouverture d’esprit aidera sans aucun doute au déve-loppement de cette industrie.

2.4 Secteur des jeux vidéos

2.4.1 Une société aux forts contrastes

La richesse de la culture japonaise, par ses légendes, ses traditions, sa longue histoire et son sens de l’hon-neur, a joué un grand rôle dans le développement du secteur des jeux vidéos et du divertissement. Initialement, le théâtre nô était la forme de divertis-sement la plus courante, mais avec les années les jeux vidéos ont pris une place très importante au sein de la société pour marquer la transition vers une ère plus moderne. Culturellement ancrée dans une société aux prises avec de fortes racines traditionnelles, la nouvelle génération de Japonais explose de créativité et d’effervescence. En effet, il n’est pas rare de voir certaines personnes déguisées en héros de jeux vidéo ou de manga, laissant ainsi libre cours à un imaginaire débridé par la pratique du cosplay.

Tout cela est possible grâce à la force culturelle au sein de la société. Cet intérêt pour les jeux vidéo et cette volonté de devenir un des personnages de ces jeux peuvent être perçus comme une façon d’échap-per aux us et coutumes de la société japonaise et ainsi faire ressortir les particularités et individualités inhérentes à chaque personne.

2.4.2 Des hautes technologies...

L’industrie japonaise s’est taillé une place de choix parmi les chefs de file mondiaux des hautes technolo-gies au cours de son histoire. Par exemple, durant les années 50, une entreprise, maintenant connue sous le nom de Sony, a fait ses débuts dans le secteur des télécommunications en fabricant des enregistreurs à

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bande magnétique. Le marché pour ce produit étant très limité au Japon, les dirigeants de l’entreprise, Ibuka et Morita, se sont mis à la recherche d’une nou-velle idée. C’est lors d’un voyage aux États-Unis, alors qu’il a appris que Western Electric donnait l’opportu-nité aux entreprises intéressées d’avoir accès à leur brevet de transistor, qu’il a commencé à envisager la possibilité de développer un produit en lien avec ce transistor. Ce n’est qu’après avoir signé le contrat avec Western Electric qu’ils ont décidé de we lancer dans le développement risqué d’une radio transistor qui pourrait être accessible à tous. (Sony Corporation, 2011). Leur spécialisation dans cette niche leur donnait accès à un marché potentiel énorme. Ce fut le début de la glorieuse histoire de Sony, déclinant à l’heure actuelle ses activités dans de nombreux domaines, notamment ceux des jeux vidéos, de la domotique et des ordinateurs. Non seulement l’entreprise a relevé le défi de concevoir une radio-transistor accessible à tous avec brio, mais ils ont aussi à continuellement développer des produits innovateurs et de qualité qui ont persisté à travers les années.

C’est cette capacité de l’industrie japonaise à se spé-cialiser dans des domaines précis et à innover, comme peu d’entreprises sont capables de le faire, qui fait la force des entreprises japonaises à l’international. Avec les années, ce sont ces aptitudes combinées à la créativité des Japonais qui a permis de développer le plus grand pôle de jeux vidéos.

2.4.3...aux jeux vidéos

L’entreprise japonaise la plus connue dans ce domaine est sans aucun doute Nintendo. Malgré certaines dif-ficultés rencontrées au cours des années, elle a tou-jours su se réinventer et trouver un nouveau produit qui lui permettrait de gagner des parts de marché. Cela a été possible grâce à leur approche particulière consistant à créer leur propre créneau plutôt que d’essayer de prendre une place dans un marché com-pétitif. Un excellent exemple de cela serait la console

de jeux Wii. Au lieu de concentrer leur effort à développer des tech-nologies de graphismes avancées, Nintendo s’est plutôt concentré sur le développement d’une nouvelle approche, soit l’interaction humain-machine, afin de procurer aux joueurs plus d’interaction physique avec la console et le jeu. En faisant cela, cette entreprise a réussi à aller chercher un public beaucoup plus large que celui des consoles de jeux régulières. Toutefois, afin d’arri-ver à cela, Nintendo, comme plusieurs compagnies japonaises, investit beaucoup d’argent dans la recherche et le développement pour maximiser la production, la créativité et l’innovation au sein de l’entreprise. Ce sont les innovations de ces compagnies japonaises qui souvent forcent leurs compétiteurs à aller plus loin et innover. Par exemple, après la sortie de la Wii de Nintendo, Microsoft a lancé le Kinect pour X-Box afin de concurrencer la première compagnie sur son nouveau marché. Toutefois, comme Nintendo à l’ha-bitude de le faire, elle saura sans doute trouver une nouvelle niche et concevoir un nouveau produit qui lui ouvrira les portes vers un nouveau marché encore inexistant. Il ne reste plus qu’à attendre de voir quel sera le nouveau produit perturbateur de marché que Nintendo sortira dans les prochaines années.

Comme plusieurs exemples l’ont démontré précé-demment, l’industrie japonaise des jeux vidéos a une incroyable capacité de renouvellement. Cela est possible grâce à la structure des entreprises qui encouragent la créativité et l’innovation, mais aussi grâce au peuple japonais. À travers l’histoire, le Japon a su rebâtir son pays après la guerre et cela est dû à son peuple et sa culture. Cela est possible dans les cas de l’industrie, des guerres, mais aussi, espérons-le, des catastrophes naturelles.

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3. Évènements de mars 2011Dans les jours suivant les évènements de mars 2011, la force des images transmises à la télévision ne pouvait présager que le pire pour le Japon. Peu d’évènements naturels connurent une telle ampleur et frappèrent l’imagination de manière si frappante. Avec l’intention d’éviter tout sensationnalisme, Le Polyscope, le journal étudiant de l’École Polytech-nique de Montréal, rencontra quatre experts pour s’entretenir des conséquences de tels désastres sur le pays. Moins d’une semaine après le séisme, ces entrevues furent publiées dans le but d’informer la population estudiantine montréalaise et tentent de couvrir les questions relatives au séisme, au tsu-nami, à la catastrophe nucléaire et aux conséquences économiques de tels désastres. Dans une première partie seront présentées intégralement ces entre-vues, pour ensuite aborder la gestion de crise par le groupe Poly-Monde 2011.

3.1 Éditorial, William Sanger, rédacteur en chef du Polyscope 2010-2011

Les images laissent sans voix. Ce qui n’avait pas été envisagé est arrivé. Populations délocalisées, tremblements de terre, menace nucléaire, tsunami ravageur... le Japon fut touché la semaine dernière par une série d’évènements des plus tragiques aux conséquences désastreuses.

Personne ne peut rester insensible devant de telles photographies rapportées par les journalistes de tous les médias. La vision d’une déferlante s’engouffrant à

travers champs et lotissements, fauchant tout sur son passage, ballotant d’innombrables voitures et mai-sons au gré de la vague relève de la science-fiction. Le vrombissement sourd fait place au silence glacial. Les premières impressions reportées par les journalistes dépêchés sur les lieux glacent le sang. Le temps s’est arrêté dans la région du Sendai. Les pertes humaines se comptent en milliers, dépassant l’entendement.

D’un autre côté, il est remarquable d’observer la réac-tion du peuple japonais. Fort d’une histoire ponctuée de désastres et de défis à relever, les habitants de l’archipel impressionnent par leur attitude, ne som-brant pas dans les émeutes. La société ne sombre pas dans les effets secondaires néfastes d’un tel désastre.Le gouvernement japonais se retrouve devant la tâche titanesque de relever un pays abattu par une force invisible. Aux prises avec une menace nucléaire provoquant les plus vives peurs, il se retrouve à gérer des milliers de dossiers dans l’immédiat. Nous sommes bien privilégiés de pouvoir observer depuis chez nous un tel désastre.

Le détail qui m’interpelle le plus reste la violence des évènements, et surtout l’image véhiculée depuis plusieurs jours à travers les médias. Profitant des images mises à disposition par le réseau d’informa-tions japonais NHK, les chaînes du monde entier se sont mises à relayer en boucle les séquences désas-treuses du tsunami. Par la suite, la crise du nucléaire a occupé la majorité du temps d’antenne consacré au Japon. Sans diminuer l’importance et la gravité du désastre de Fukushima, je remets en doute certaines informations parvenues à travers certains médias. Ce que je veux dire par là, c’est que les journalistes ne possèdent peut-être pas la formation nécessaire pour vulgariser et comprendre un sujet aussi délicat que la question du nucléaire, surtout en temps de gestion de crise.

C’est ainsi que j’amène le thème de cette édition du Polyscope. Le Japon est au centre de nos conversa-

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tions et nous portons depuis le début du mois de mars nos pensées vers le peuple japonais. Néanmoins, j’ai décidé d’aller chercher auprès de quatre experts leur avis sur les évènements. Le dossier de cette semaine se veut de grande envergure, tentant d’informer et de transmettre une information sans faire preuve de sensationnalisme. La première partie est axée sur les phénomènes naturels, avec en particulier l’explica-tion des mécanismes de formation des séismes et des tsunami par Serge Occhietti, géologue et professeur à l’UQAM.

Le nucléaire fait peur, ne peut être perceptible par la population et est par nature une zone d’ombre dans notre inconscient. Je me suis entretenu avec Guy Mar-leau, directeur de l’Institut de génie nucléaire à l’École Polytechnique pour tenter de comprendre ce qui se passe avec les différents réacteurs de Fukushima.

Finalement, pour clore ce dossier, j’ai eu l’occasion de discuter avec deux professeurs de l’École Poly-technique, Thierry Warin et Nathalie de Marcellis-Warin, respectivement économiste et spécialiste en risques et en développement durable, pour aborder la question de l’impact du tsunami sur l’inconscient social, sur la question du nucléaire et la réaction du gouvernement et les enjeux économiques.Je tiens à conclure mon éditorial en mentionnant que malgré le fait que le nucléaire soit en ligne de front, il ne faut pas oublier les milliers de disparus, les mil-lions d’habitants délocalisés, et garder en mémoire la terrible puissance du cataclysme. C’est peut-être ce qui est mis de côté en ce moment dans les médias, que j’aurais tendance à critiquer.

Pour tenter d’avoir une vision globale de la question, je vous encourage fortement à consulter et à recou-per de nombreuses sources, NHK étant évidemment un incontournable. Le monde n’a jamais été aussi proche et aussi éloigné du Japon à l’heure actuelle. On ne pourra que tirer de grandes leçons d’humilité de la réaction de ce peuple.

3.2 Séisme et du tsunamis au Ja-pon, entrevue avec Serge Occhietti, géologue et professeur à l’UQAM.

William Sanger : Quel est le mécanisme à l’origine du séisme au Japon ?Serge Occhietti : Pour commencer, le Japon fait partie d’une série de régions du Pacifique que l’on appelle la Ceinture de feu. Cela correspond au croisement de la plaque océanique Pacifique qui passe sous celle de l’Eurasie. On assiste alors à un phénomène de sub-duction causé par l’expansion des fonds marins. C’est un peu comme si un rouleau compresseur poussait continuellement sous la bordure de la plaque eurasia-tique. Java, l’Indonésie et le Japon, pour ne nommer qu’eux, correspondent à cette zone. C’est une zone avec d’énormes compressions et des mouvements profonds de matière engendrés par des mouvements de convection dans le manteau de la Terre. C’est ce qui provoque le phénomène de la tectonique des plaques.

Le Japon est donc une chaîne de montagnes en construction. Archipel étalé, seulement 10 à 15 % de sa surface territoriale est cultivable, le reste étant composé de reliefs importants où l’on assiste à des phénomènes de pluies torrentielles et volcaniques marqués par une forte érosion. Donc on observe que les villes se situent donc principalement sur les côtes japonaises. Le séisme qui a eu lieu est donc lié à une gigantesque zone de fractures de la croûte terrestre qui se manifeste périodiquement.

En profondeur, la matière est à l’état semi-rigide et les frictions s’accumulent. D’un coup survient une

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cassure qui résulte en un déplacement de matière suite aux très fortes compressions subies, avec une forte libération d’énergie. Cette énergie se traduit par une propagation d’ondes d’énergie à partir d’un foyer, aussi appelé épicentre.

WS : Peut-on anticiper de tels évènements ?SO : Il y a des signes avant-coureurs, mais ils ne sont ni caractéristiques ni omniprésents. En effet, il y a une possibilité de percevoir certains signes sans qu’il y ait de séismes par la suite, et vice-versa. On peut détecter certains bruits de fond, mais la principale anticipation reste la localisation de zones sensibles plus à risques.

WS : Que représente l’échelle de Richter ?OS : L’échelle de Richter est liée à la manifestation d’un séisme. Mais avant de parler d’échelle, il faut comprendre qu’il y a quatre types d’ondes que l’on distingue en deux catégories, les ondes de volume et les ondes de surface.

Les ondes de volume sont les plus rapides. Tout d’abord, il y a les ondes P (primaires) que l’on assi-mile au grondement du métro. Ce sont des ondes de compression, longitudinales, dont le mécanisme correspond à une succession et une alternance de dilatation et de compression. Il y a également les ondes S (secondaires), celles-ci très destructrices. Elles sont plus lentes, sauf que le déplacement de la matière s’effectue verticalement, en cisaillement.Ensuite, on distingue les ondes de surface, qui elles, dépendent de la morphologie à la surface de la Terre. Elles ressemblent un peu aux rides sur la surface d’un lac. Elles sont moins rapides, mais possèdent une amplitude plus élevée. Tel un serpent, les ondes L (Love) se déplacent horizontalement et latéralement. Elles affectent principalement les fondations des bâti-ments. Finalement, il y a les ondes R (Raleigh), plus lentes, destructrices par leur déplacement vertical. Dans la région du Sendai, la plupart des bâtiments sont restés intacts, car les normes de construction, adaptées pour ce type de secousses, ont été respec-tées.

L’échelle de Richter est une simplification journalis-tique représentant l’énergie libérée au cours d’un séisme. C’est une échelle logarithmique, dont l’aug-mentation d’une amplitude correspond à un facteur x30 d’énergie. L’énergie libérée est colossale : on estime que pour un séisme de 6 à 6,9 sur l’échelle de Richter, cela correspond à 100 bombes à hydrogène, tandis qu’un séisme dépassant 8 sur l’échelle de Rich-ter s’apparente à l’énergie de plus de 60 000 bombes à hydrogène.

Il est à noter que les séismes sont plutôt fréquents. On dénombre en moyenne plus de 120 séismes de magnitude 6, une vingtaine d’une magnitude 7 et un de magnitude 8 annuellement. En 1960 au Chili a eu lieu le plus fort séisme enregistré, avec 9,5 sur l’échelle de Richter. Le facteur géologique local est fondamental, car les dégâts sont proportionnels à la position par rapport à l’épicentre du foyer.

WS : Le Québec est-il à l’abri de tels séismes ?OS : Au Québec, il y a toujours eu des séismes, même récemment. En effet, le 23 juin dernier, il y a eu un séisme de 5,5 sur l’échelle de Richter à Gatineau, occasionnant certains dégâts. Normalement, c’est très peu probable qu’il y ait des séismes de magnitude extrême, mais il suffit que le séisme ait lieu proche d’une ville en pleine nuit pour avoir de grandes consé-quences. C’est pourquoi la menace des séismes est une incitation pour de meilleures normes pour les bâtiments publics, surtout en tenant compte de la géologie des sols.

En effet, malgré le Bouclier canadien nous protégeant, un grand séisme a eu lieu en 1663, rapporté par les frères Jésuites. Un glissement de terrain majeur catas-trophique s’en est suivi, causé par une zone argileuse liquéfiable. En 1925, dans La Malbaie, s’est manifesté un séisme d’amplitude 7. Charlevoix est une région reconnue comme étant une région à séismes.

WS : Comment est né le tsunami et que peut-on faire

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lorsqu’il se déclare ?SO : Un tsunami est une onde d’énergie se propa-geant dans un liquide. En dessous d’une magnitude de 6,3, la probabilité d’un tsunami est faible. Les ondes d’eau se déplacent à très grande vitesse, de l’ordre de 800 km/h. Deux facteurs sont à considérer dans un tsunami, soit la hauteur et l’énergie (la durée). Cette manifestation naturelle agit comme un rouleau compresseur auquel rien ne résiste. L’expression d’un tsunami va dépendre de la topographie des profon-deurs marines.

Pour les habitants, lorsque le tsunami rencontre une vallée, la colonne d’eau monte due à un facteur de resserrement, l’eau s’engouffrant dans l’espace dispo-nible. Les habitants n’ont pas le temps d’échapper à une telle force, leur seule solution étant de se réfu-gier dans les hauteurs de grands bâtiments solides. L’influence sur les centrales nucléaires à Fukushima est désastreuse, et il est à déplorer le manque de jugement lors de la construction de ces centrales. En effet, l’expertise des géologues n’a pas été prise en compte et les risques naturels ont été minimisés. Cela démontre une certaine part d’irresponsabilité de la part des entreprises privées n’ayant pas pris en compte l’historique des dangers naturels et en les minimisant.

WS : Quelles sont les conséquences écologiques de tels évènements ?SO : La région est ruinée, mais le Japon a une capacité de ressourcement incroyable. L’effort de reconstruc-tion sera impressionnant. Pour le pays, le coût global est terrible, c’est une claque économique majeure. Au Sendai, plus d’un million d’habitants sont sinistrés. C’est un coût énorme que seuls des pays tels que les États- Unis, l’Allemagne et le Japon sont capables d’absorber.

WS : Quelles leçons peut-on tirer de désastres de si grande ampleur ?SO : Les phénomènes naturels doivent être pris en

compte pour tous les amé-nagements majeurs, en prenant en considération l’aléa naturel et la vul-nérabilité. Les aléas sont inévitables, imprévisibles et dans le temps et dans leur localisation. Mais on peut optimiser l’occurrence d’aléas en mettant en lumière les zones sensibles et les failles présentes. La vulnérabilité est l’ensemble de facteurs qui peut faire en sorte que l’aléa ait peu ou trop d’impacts. On peut donc anticiper les zones d’aléas et prendre des déci-sions pour diminuer au maximum la vulnérabilité. Par exemple, pour le cas d’Haïti, l’aléa était peu important (un tel séisme n’aurait presque rien endommagé au Japon), mais la vulnérabilité était extrême.

On note aussi une très forte dignité de la part des Japonais : l’armée coopère et il n’y a pas de scènes de pillage. Presque aucun effet de société secondaire n’apparait. Finalement, les services fondamentaux ne doivent pas être privatisés. En effet, les infrastructures majeures doivent tenir compte des aléas potentiels à l’échelle nationale et historique, en étant soumises à des normes prenant en compte tous les risques potentiels sans les amoindrir.

3.3 Accident nucléaire à Fukushima, entrevue avec Guy Marleau, directeur de l’Institut de génie nucléaire de l’École Polytechnique de Montréal

William Sanger : Pourriez-vous expliquer ce qui s’est passé dans la centrale de Fukushima ?Guy Marleau : À l’heure actuelle, les réacteurs ont été mis en arrêt d’urgence. Les bornes d’arrêt ont fonc-tionné après les vibrations ressenties du séisme, des tiges s’interposant entre les barres de combustibles

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pour tenter de stopper la réaction. Néanmoins, lors que cette réaction est stoppée, le processus de désin-tégration nucléaire est toujours actif, provoquant une production de chaleur.

Il faut savoir que lors de l’arrêt d’une centrale, elle continue à produire environ 6% de sa puissance totale. Après une journée, c’est 0,5% de la puissance qui est développée dans le cœur en arrêt. À Fukushima, ce sont 65 MW thermique qui furent produits après 4 jours d’arrêt. Les mesures d’urgence ont fonctionné parfaitement, et ce jusqu’à la venue du tsunami. En effet, les systèmes d’urgence n’ont pas réussi à résister aux vagues de 4 mètres de haut. Plusieurs systèmes ont été mis en place, tous rendus inopérationnels par la venue du tsunami.

Les barres de combustibles continuent à produire de la chaleur, l’eau contenue dans le réacteur se met à chauffer, la pression augmente au sein de ce réacteur, et d’après les lois de la thermodynamique, le pro-cessus s’auto entretient si le cœur n’est pas refroidit. À très forte température, la vapeur d’eau devient instable et se dissocie en hydrogène et en oxygène. Vu que les systèmes de refroidissement sont inopé-rationnels, la pression contenue dans le réacteur est trop importante pour être maintenue à l’intérieur de manière sécuritaire. Les instances de l’usine ont donc décidé de relâcher une partie des gaz pour abaisser la pression interne.

Lors d’un tel relâchement, les gaz passent à travers de nombreux filtres retenant les particules radioactives, limitant ainsi le risque de fuite d’isotopes, en l’occur-rence du césium et de l’iode. Le gaz relâché s’accu-mule dans le bâtiment de la centrale. Sous la toiture de la centrale a eu lieu une certaine recombinaison de l’hydrogène et de l’oxygène, dégageant une très grande quantité de chaleur, suffisante pour souffler la toiture du bâtiment (d’où les explosions des bâtisses).

Plus les gaz sont relâchés du réacteur, plus le niveau de l’eau au sein de la cuve diminue, et plus les barres de

combustibles se retrouvent à l’air libre. Ces dernières sont composées de zirconium retenant le combustible radioactif. Si la température n’est pas contrôlée adé-quatement, l’enveloppe de zirconium vient à fondre et le cœur de la réaction entre en fusion.

Pour le protéger le cœur nucléaire se trouve à l’intérieur d’une cuve de 10 cm d’épaisseur en acier inoxydable, elle même dans une enceinte de 2 mètres d’épaisseur de béton.C’est la situation problématique du réacteur 4 : une partie des barres sont à l’air libre, et un risque de fusion du cœur existe. C’est aussi la priorité numéro une des instances du gouvernement que de réussir à contrôler et à stabiliser cette situation.

WS : À quoi correspondent les milli Sieverts ?GM : Le Sievert est l’unité de mesure de l’émission des radiations. En vulgarisant au maximum, 1mS = 1 gray, c’est-à-dire 1 Joule déposée par rayonnement. Les scientifiques considèrent qu’en dessous d’une exposition de 100mS/ année, il n’y a aucun impact sur la santé humaine. Une personne reçoit en moyenne entre 1 et 3mS par année de par la présence naturelle d’éléments radioactifs dans la nature.

Il faut aussi prendre en compte deux facteurs, soient l’efficacité des rayonnements et le type de tissu qui reçoit ces rayonnements. Une dose de 1 Sievert (très grande quantité) pourrait rendre quelqu’un malade, tandis que 10 Sieverts seraient fatals en 24 heures. Néanmoins, les tissus humains réagissent différem-ment à cette exposition radioactive, le cerveau étant un des tissus les plus résistants (de par la nature des fibres nerveuses).

WS : Pourquoi le niveau de dangerosité a-t ’il aug-menté au cours de la dernière semaine ?GM : Les avis ne concordent pas selon les sources. D’après l’échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques (INES), un évènement nucléaire de niveau 1 à 3 est considéré comme un incident. À partir de 4, il y a début de relâchement

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d’éléments radioactifs dans la nature. Le niveau d’alerte a été augmenté à cause des incidents surve-nus au cours des trois derniers jours, c’est-à-dire les barres de combustibles se retrouvant exposées.

WS : Quelles sont les possibilités qui s’offrent au gou-vernement japonais à l’heure actuelle ?GM : La priorité numéro un du gouvernement est de contenir les réactions nucléaires. La solution pour tenter de refroidir les réacteurs serait d’arroser directement les cuves à grande eau (on note d’ailleurs l’utilisation d’hélicoptères transportant de grandes quantités d’eau de mer pour tenter de noyer et refroidir cette enceinte). Le niveau d’alerte pour le gouvernement est à son niveau maximal et les efforts se dirigent vers le réacteur numéro 4 qui se révèle des plus problématiques.

WS : Quelles sont les conséquences de tels évène-ments ?GM : Un tel évènement influence fortement l’environ-nement. Des relâchements gazeux ont été observés, l’injection d’eau de mer est aussi mise à contribution. On assiste à la condamnation des réacteurs nucléaires de la zone de Fukushima.

La deuxième conséquence majeure concerne l’opinion publique. En effet, le débat sur le nucléaire demeure ouvert, et sera de plus en plus remis en question.

WS : Quelle est la situation du Québec pour la question du nucléaire ?GM : On ne peut comparer la situation entre la cen-trale de Fukushima et celle des centrales au Québec. Dans un premier temps, la situation géographique demeure très différente, vue le peu de chance que des vagues de plusieurs mètres de hauteur viennent ravager le territoire.

Finalement, le type même de réacteur nucléaire est différent. Tandis qu’au Japon les barres de combus-tibles se retrouvent dans la piscine pour maintenir la température, dans les centrales du Québec on re-

trouve des puits thermiques, eux même en immersion dans une grande quantité d’eau. Plus de 80 % de cette masse d’eau sert à abaisser la température du réacteur. Le facteur de risque d’un accident nucléaire de ce type en est d’autant plus réduit.

3.4 Économie et notion de risque systémiques, entrevue avec Thierry Warin et Nathalie de Marcellis-Warin, École Polytechnique de Montréal

Pour terminer ce dossier spécial sur le Japon, Le Polyscope a voulu se pencher sur deux derniers aspects de la question des désastres naturels : d’un côté les impacts économiques d’un évènement d’une telle ampleur et de l’autre la perception du Japon et la notion de risque technologique. La dernière entre-vue a été réalisée après un échange avec Mme de Marcellis-Warin, professeur à l’École Polytechnique et vice-présidente Risque et Développement durable au CIRANO, et avec M. Thierry Warin, économiste et responsable de l’orientation thématique « Projets internationaux » à l’École Polytechnique.

3.4.1 Aspect économique de la situation

Au cours des 15 dernières années, le Japon a tenté de revitaliser son économie. La crise non terminée de 2008 combinée à l’impact d’un tel désastre portera un coup dur à sa santé financière. Avec un endet-tement supérieur à deux fois son PIB, l’impact est majeur. Le premier résultat observable est l’instabilité des marchés financiers, avec une très forte variabilité des cours. La banque centrale japonaise a injecté de nombreux fonds aux diverses banques pour soutenir les différents secteurs industriels du pays.

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3.4.2 Discours de crise

L’aspect marquant de la situation actuelle est le dis-cours du premier ministre. En effet, la structure gou-vernementale vit un véritable état de crise, devant, en très peu de temps, gérer mille choses parallèlement. Le premier ministre joue gros. Impopulaire avant les évènements, il sera porté en héros ou devra rendre des comptes selon la tournure des évènements. De plus, le discours officiel utilisé reste au passé composé ou au présent. Il n’y a pas de vision future, le gouver-nement ne peut que réagir face aux évènements et ne peut les anticiper. C’est malheureusement le signe que la situation est grave.

3.4.3 Risques systémiques

L’ampleur des évènements sur la situation nucléaire met en lumière le fait que les risques ne doivent pas être traités séparément, mais plutôt de façon systé-mique : ce ne sont pas 4 centrales nucléaires à être traitées individuellement, lorsqu’une manifestation naturelle survient, c’est tout un réseau qui est mis à contribution et à rude épreuve, d’où l’état de crise actuelle.

3.4.4 Implication pour le Japon

La crise nucléaire ne peut être que néfaste pour le Japon, à court terme comme à long terme. On assiste déjà à certaines vérifications des produits provenant de l’archipel nippon. Peu importe ce qui se passera à Fukushima, l’impact sur l’inconscient collectif est réel, et perdurera. La question du nucléaire est aussi mise de l’avant, avec de nombreux pays européens remettant en question la sécurité des centrales et la pertinence d’une telle source d’énergie. Le nucléaire fait peur par nature, car il ne peut être ni palpable ni visible, et demande d’assez grandes connaissances pour comprendre en profondeur les enjeux de la technologie.

3.4.5 Évolution des risques technologiques

Le nucléaire représente par nature un risque techno-logique : le risque est minimal, mais les conséquences sont maximales. Lors de la conception de telles centrales, de nombreux facteurs sont pris en compte. L’influence des changements climatiques n’a pas été appréciée à sa juste valeur, et certains désastres tels que la catastrophe nucléaire survenue après le tsu-nami n’ont pas pu être envisagés. La nature change la donne.

4. Gestion de crise Poly-MondienneUne fois la mission au Japon officiellement annulée, l’équipe possédait 7 semaines pour mettre en place un plan de rechange dans le but de réaliser avec succès une nouvelle mission en sol étranger. Pour maximiser les apprentissages d’une seconde mis-sion industrielle, trois études de faisabilité ont été réalisées par les membres, répartis en trois différents groupes. Chacun de ces groupes devait analyser la pertinence et la faisabilité d’une nouvelle mission en France, en Corée du Sud et aux États-Unis.

4.1 L’élaboration de trois plans B

Une matrice de décision a été élaborée dans l’optique de départager objectivement les destinations selon les recherches effectuées par les trois nouvelles équipes. Les principaux résultats de recherche sont présentés dans les paragraphes suivants, exposant les points forts et les points faibles de chaque destination possible.

Pour la Corée du Sud, l’équipe s’est frappée à une lourde contrainte linguistique. Néanmoins, malgré le fait que la destination légitimait géographiquement

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cette mission #2 par rapport aux autres possibilités, le temps imparti pour la planification nous a amenés à éliminer cette possibilité. Cette destination de mission présentait le plus de similitudes avec la destination initiale au Japon quant aux thématiques et secteurs étudiés.

Pour ce qui est des États-Unis, plusieurs possibilités nous étaient offertes. Nous aurions pu orienter ce voyage d’études vers des visites de compagnies japonaises établies en Californie, la Californie étant la porte d’entrée du marché des États-Unis pour le Japon. D’un autre côté, les nombreuses entreprises présentes aux États-Unis auraient pu aussi rem-plir les prérequis vis-à-vis des secteurs industriels étudiés. Néanmoins, le manque de contact nous a obligés à nous tourner vers notre troisième choix de destination.

Finalement, le plan retenu fut celui de la France. En effet, ce fut la destination qui a pu répondre aux mieux les critères de la ma-trice de décision. Que ce soit au niveau linguistique, logistique ou au niveau de la pertinence, cette destination se démarqua des deux autres de par sa faisabilité en un très court laps de temps. De plus, de nombreux liens existent entre les différents professeurs de l’École Polytechnique de Montréal et les entreprises françaises, mais aussi avec les institutions européennes. Cette dernière variable fut le point déterminant pour opter vers une mission industrielle française, nous permettant de concrétiser le plus rapidement possibles les préparatifs d’une nouvelle mission.

Tableau 1: Matrice de décision

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France USA Corée Barème (/100)

31 29 34 40 Pertinence

23 23 24 30 Secteurs

4 4 4 5 Secteur Robotique santé

4 4 5 5 Secteur Robotique Industriel

7 10 5 10 Jeux video, media et divertissement

8 5 10 10 Mobilité urbaine

8 6 10 10 Problématique

3 2 4 4 Notion de service et dvlp humain

4 3 4 4 Ingénierie organisationnel

1 1 2 2 Contexte de compétition Asiatique

49 49 40 60 Faisabilité

29 29 20 40 Temps de préparation (sur 5 semaines)

10 15 15 15 Visa, Passport (pour tous les membres, même non Canadien !)

15 10 5 15 Facilitée de contact avec les entreprises

3 4 0 4 Délais de communication (décalage horaire, "formalitées...")

1 0 0 1 Langue (Q&A, Traduction...)

20 20 20 20 Budget

80 78 74 Total

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Les ressources mises à disposition de l’équipe Poly-Monde furent des plus déterminantes dans la réussite de cette seconde destination. En effet, le département de génie industriel et de mathéma-tiques mit à disposition un local de crise où les 25 étudiants purent travailler sans relâche durant les dernières semaines de la session dans le but de bâtir une nouvelle mission. Les équipes initiales furent réorganisées, la plupart des membres incorporant une équipe logistique hautement élargie à une ving-taine de membres. Les professeurs et la direction de l’École Polytechnique mirent aussi à disposition leurs contacts et travaillèrent de concert avec les membres de l’équipe Poly-Monde dans le but de programmer le plus rapidement possible les visites industrielles de mai 2012.

5. CONCLUSIONS

5.1. Secteur des infrastructures de mobilité urbaine

Le Japon est caractérisé par une géographie par-ticulière. Archipel montagneux, ses 125 millions d’habitants se concentrent sur un territoire limité, occasionnant un paysage urbain très fortement den-sifié. Dans le but d’assurer une fluidité de transport et d’inter connectivité entre les villes, le pays à miser historiquement sur son réseau de chemin de fer.

Après une période de maturité des systèmes de mobilité, les compagnies japonaises s’orientent actuellement vers une certaine convergence des services. Comment rallier l’ensemble de la population disponible ? Comment influencer sur le quotidien de chaque voyageur ? Comment faire en sorte qu’un déplacement monotone devienne une véritable expé-rience en soi ? Tels sont les défis auxquels s’attaquent les entreprises de transport japonaises.

En dépassant ainsi le rôle initial de simple transpor-teur, ces entreprises ferroviaires se diversifient et cisèlent activement l’espace de vie quotidienne. Avec les consortiums de transport japonais, il est courant de voir une même entreprise offrir des services immobiliers, des espaces commerciaux, des lieux de divertissement tout en restant fortement impliquée dans le développement social de sa communauté.

Cette synergie, couplée sinon causée par une très forte concurrence dans le secteur des transports en commun, permet de voir l’émergence de nouveaux services aux utilisateurs à la fine pointe de la tech-nologie. Ce rôle central dans la vie quotidienne des Japonais procure aux entreprises de ce secteur une position de choix en ce qui a trait au développement humain de la population nipponne.

5.2. Secteur de la robotique médicale et industrielle

La population japonaise est aux prises avec un problème démographique des plus préoccupants, pouvant influencer fortement ses différentes sphères industrielles. En effet, présentant un des taux de nata-lité les plus bas au monde, avec une croissance démo-graphique négative et une proportion de personnes âgées de plus en plus importante, la société japonaise a dû faire face à une réduction du volume de sa main d’oeuvre tout en prenant en compte l’essoufflement de ses citoyens.

Pour pallier à ce problème, c’est dans l’organisation du travail que les Japonais se sont investis. Grâce à une gestion du travail exemplaire, couplé à un savoir-faire unique dans les hautes technologies, les Japonais se sont spécialisés dans la production de produits à très haute valeur ajoutée. Les modèles d’organisation industrielle japonais reflètent à mer-veille cette constante recherche de la performance et de la productivité. Productivité pouvant être atteinte grâce à l’automatisation de ses chaînes de production

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jusqu’à la robotisation de ses chaînes de montage, notamment dans l’industrie automobile.

Capitalisant sur cette expertise incontestée en robo-tique, le Japon s’est attaqué au second volet de son problème démographique, celui concernant la santé de ses citoyens. Comment assurer un service médical efficace auprès d’une population vieillissante avec des ressources elles-mêmes vieillissantes ? Le parallèle avec la robotique industrielle est plus qu’adéquat.

L’utilisation de la robotique médicale se décline sous trois aspects principaux. Tout d’abord l’utilisation de la robotique en chirurgie, visant une plus grande pré-cision lors des opérations, et comblant ainsi certaines lacunes du médecin. Deuxièmement, la production d’exosquelettes facilitant les tâches quotidiennes des usagers, que ce soit de supporter un patient ou pour la réhabilitation motrice des malades. Finalement, une gestion automatique, voire robotisée des services hospitaliers, pouvant ainsi répondre aux besoins de plus en plus grands d’une population vieillissante.

Cette remarquable implication de la robotique dans le domaine médical n’est pas le fruit du hasard, mais est rendue possible par l’acception de la robotique au sein de la population japonaise.

5.3. Secteur des jeux vidéo

Sonic, Mario, Pikachu... des noms faisant référence à de nombreux souvenirs d’enfance. Des personnages tous issus de l’imagination de créateurs japonais. Cette société possède une dualité impressionnante en développant et en stimulant un imaginaire explosif, mais aussi en s’ancrant fermement dans un héritage culturel des plus marqués. Pays des samurais, des shoguns, des légendes et des traditions, ce pays a su s’établir comme un chef de file dans le secteur des jeux vidéos et compte bien maintenir son avantage face aux autres pays.

S’étant spécialisé dans les hautes technologies, les

performance. Étant parti d’une licence d’exploitation de brevet américain sur les transistors, la compagnie s’est établie comme une des plus innovantes, offrant au public des produits allant de la PlayStation au for-mat Betamax jusqu’aux télévisions 3D.

Cette capacité de se renouveler, d’innover constam-ment se traduit au sein des jeux vidéos. Culturellement riche, la société japonaise possède des compagnies rivalisant de créativité pour développer de nouveaux marchés. La compagnie Nintendo s’est démarquée à travers les vingt dernières années en présentant des personnages et des franchises de jeux de plus en plus populaires. Récemment, l’introduction de nouvelles technologies avec la Wii, axe les entreprises de jeux vidéos dans une optique de relation humain- machine, où les utilisateurs se retrouvent de plus en plus immergés dans l’univers virtuel développé.

entreprises japonaises ont su faire preuve d’une audace leur permettant à l’heure actuelle d’occuper une place de choix sur l’échiquier mondial. L’histoire de Sony est révélatrice d’une telle

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5.4 Le mot de la fin

Des trois secteurs industriels étudiés, une notion forte ressort de nos apprentissages. C’est cette capa-cité incessante au renouvellement, à la créativité, mais aussi à affronter les évènements qui caractérise la société japonaise. Ceci se répercute au niveau industriel, où les compagnies japonaises rivalisent d’ingéniosité pour se démarquer et pour faire face aux défis inhérents à leur domaine.

Maintenant troisième puissance mondiale, le Japon s’est réveillé dévasté de la Seconde Guerre mondiale. Les évènements de Fukushima en mars 2011 ébran-lèrent le pays comme seuls peu de pays peuvent s’y préparer. Mais le Japon tient toujours, se relève, et avec humilité fait face aux pires situations... C’est un peu l’héritage de la mission industrielle Poly-Monde 2011 : faire face à l’adversité malgré les évènements !

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